N° 3930
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 juillet 2016.
PROPOSITION DE LOI
visant à supprimer l’aide médicale d’État et
à créer une aide médicale d’urgence,
(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Yannick MOREAU,
député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La loi du 27 juillet 1999 portant création de la couverture maladie universelle a créé dans le même temps l’aide médicale d’État (AME) qui assure une protection médicale aux étrangers qui ne peuvent être affiliés à un régime de sécurité sociale en raison de leur situation irrégulière au regard de la réglementation relative au séjour en France. Depuis sa création, l’aide médicale d’État n’a cessé de voir le nombre de ses bénéficiaires augmenter (209 000 bénéficiaires en 2011 pour 294 000 bénéficiaires en 2014, soit une augmentation de 40,67 % en trois ans seulement).
Les crédits alloués à l’aide médicale d’État représentent chaque année une charge de plus en plus lourde (774 millions d’euros en 2016 contre 588 millions d’euros en 2011).
Les dérapages budgétaires de l’aide médicale d’État pointés par la Cour des comptes renforcent le sentiment d’inquiétude que laisse présager une hausse continuelle des aides accordées. L’incapacité du dispositif à déterminer et à fixer des objectifs financiers crédibles et réalistes, l’« insoutenabilité budgétaire », le manque de sincérité dans les crédits, appellent à une remise en question de l’aide médicale d’État.
À une époque de crises migratoires importantes, on ne peut nier l’attractivité que représente un système généreux et gratuit d’aide médicale, véritable encouragement à une immigration clandestine et sanitaire. L’aide médicale d’État est ainsi de plus en plus sollicitée, ce qui explique en partie les dépassements du budget. Une mesure sociale ne peut pas être la porte ouverte à des flux migratoires non désirés et non contrôlés, participant dans un même temps à creuser le gouffre financier des dépenses publiques.
Il apparaît par ailleurs clairement qu’existe une différence de traitement inégalitaire entre les personnes en situation irrégulière qui bénéficient d’un remboursement à hauteur de 100 % de leurs frais médicaux et les personnes soumises au régime général de la couverture maladie universelle qui ne seraient pas inscrites dans une mutuelle, qui, elles, ne peuvent bénéficier d’une prise en charge totale de leurs frais médicaux. Les Français ne peuvent accepter que les étrangers en situation irrégulière, ce qui représente déjà en soi une situation illégale et délictuelle, soient mieux traités que les assurés au revenu modeste relevant du régime général.
Face aux risques financiers et relatifs à l’incitation à l’immigration, et par respect du principe d’égalité, l’article 1er de cette proposition de loi demande l’abrogation de l’aide médicale d’État pour les personnes en situation irrégulière.
La France ne peut cependant pas abandonner toute forme d’aide aux personnes en situation irrégulière, au titre de ses valeurs et de la morale. Il est ainsi proposé de créer une aide médicale d’urgence, limitée, à l’instar de celle mise en place en Allemagne.
PROPOSITION DE LOI
Le titre V du livre II du code de l’action sociale et des familles est abrogé.
Le titre V du livre II du code de l’action sociale et des familles est ainsi rédigé :
1° Le chapitre Ier est ainsi rédigé :
« Chapitre Ier
« Aide médicale d’urgence
« Art. L. 251-1. – Tout étranger résidant en France sans remplir la condition de régularité mentionnée à l’article L. 380-1 du code de la sécurité sociale et dont les ressources ne dépassent pas le plafond mentionné à l’article L. 861-1 du même code a droit, pour lui-même et les personnes à sa charge au sens de l’article L. 161-14 du présent code et des 1° à 3° de l’article L. 313-3 du code de la sécurité sociale, à l’aide médicale d’urgence.
« En outre, toute personne qui, ne résidant pas en France, est présente sur le territoire français, et dont l’état de santé le justifie, peut, par décision individuelle prise par le ministre chargé de l’action sociale, bénéficier de l’aide médicale d’urgence dans les conditions prévues par l’article L. 252-1.
« De même, toute personne gardée à vue sur le territoire français, qu’elle réside ou non en France, peut, si son état de santé le justifie, bénéficier de l’aide médicale d’urgence, dans des conditions définies par décret. »
« Art. L. 251-2. – La prise en charge, assortie de la dispense d’avance des frais, concerne :
« 1° Le traitement des maladies graves et des douleurs aiguës ;
« 2° Les soins liés à la grossesse et ses suites ;
« 3° Les vaccinations réglementaires ;
« 4° Les examens de médecine préventive.
« La prise en charge est subordonnée, lors de la délivrance de médicaments appartenant à un groupe générique tel que défini à l’article L. 5121-1 du code de la santé publique, à l’acceptation par les personnes mentionnées à l’article L. 251-1 du présent code d’un médicament générique, sauf :
« 1° Dans les groupes génériques soumis au tarif forfaitaire de responsabilité défini à l’article L. 162 – 16 du code de la sécurité sociale ;
« 2° Lorsqu’il existe des médicaments génériques commercialisés dans le groupe dont le prix est supérieur ou égal à celui du princeps ;
« 3° Dans le cas prévu au troisième alinéa de l’article L. 5125-23 du code de la santé publique.
« Art. L. 251-3. – Sauf disposition contraire, les modalités d’application du présent chapitre sont déterminées par décret en Conseil d’État. » ;
2° Le chapitre II est abrogé ;
3° Le chapitre III est ainsi rédigé :
« Chapitre III
« Dispositions financières
« Art. L. 253-1. – Les prestations prises en charge par l’aide médicale d’urgence peuvent être recouvrées auprès des personnes tenues à l’obligation alimentaire à l’égard des bénéficiaires de cette aide. Les demandeurs de l’aide médicale de l’urgence sont informés du recouvrement possible auprès des personnes tenues à l’obligation alimentaire à leur égard des prestations prises en charge par l’aide médicale.
« Art. L. 253-2. – Les dépenses d’aide médicale sont prises en charge par l’État.
« Lorsque les prestations d’aide médicale ont pour objet la réparation d’un dommage ou d’une lésion imputable à un tiers, l’État peut poursuivre le tiers responsable pour obtenir le remboursement des prestations mises à sa charge.
« Lorsqu’une provision a été versée à un établissement de santé pour couvrir des frais de soins et de séjour ou qu’un engagement de versement a été souscrit, la partie des frais correspondant à la provision ou à l’engagement reste à la charge des bénéficiaires.
« Art. L. 253-3. – Les demandes en paiement des prestations fournies au titre de l’aide médicale par les médecins, chirurgiens, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, établissements de santé et autres collaborateurs de l’aide sociale doivent, sous peine de forclusion, être présentées dans un délai de deux ans à compter de l’acte générateur de la créance.
« Art. L. 253-4. – Sauf disposition contraire, les conditions d’application du présent chapitre sont déterminées par décret en Conseil d’État. »
La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
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