N° 3987
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 juillet 2016.
PROPOSITION DE LOI
relative au renforcement
et à l’indemnisation du congé de proche aidant,
(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par Mesdames et Messieurs
Jean-Jacques GUILLET, Marc LE FUR, Julien AUBERT, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Lionel TARDY, Jacques KOSSOWSKI, Guy TEISSIER, Laurence ARRIBAGÉ, Philippe BRIAND, Jean-Luc REITZER, Vincent LEDOUX, Lionnel LUCA, Bernard PERRUT, Thierry SOLÈRE, Jacques MYARD, Michel VOISIN, Jean-Pierre BARBIER, Guy GEOFFROY, Jean-Pierre DECOOL, Sylvain BERRIOS et Alain MARLEIX,
députés.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La France est engagée, comme tous les pays européens, dans un processus de transition démographique marqué par une croissance importante et continue des classes d’âge les plus élevées, ainsi que par une augmentation de la longévité des Français. Les personnes âgées de soixante ans et plus, au nombre de 15 millions aujourd’hui, seront 20 millions en 2030 et près de 24 millions en 2060. Les Français âgés de soixante-quinze ans et plus (5,7 millions en 2012) seront 12 millions en 2060. Et le nombre des plus de quatre-vingt-cinq ans va quasiment quadrupler, passant de 1,4 million aujourd’hui à 5,4 millions en 2060.
L’entourage proche est de plus en plus sollicité devant la perte d’autonomie et l’article 53 de la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement a remplacé le congé de soutien familial par le congé de proche aidant. Celui-ci est accessible au salarié apportant son aide à une personne âgée ou à une personne handicapée avec laquelle il réside ou entretient des liens étroits et stables et à qui il vient en aide de manière régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne. Il peut être fractionné et, avec l’accord de l’employeur, être transformé en période d’activité à temps partiel.
Le congé de proche aidant s’adresse au salarié ayant au moins deux ans d’ancienneté dans l’entreprise et résidant en France de façon stable, l’article L. 3142-24 du code du travail disposant, en outre, que s’il « est d’une durée de trois mois renouvelable. Il ne peut excéder la durée d’un an pour l’ensemble de la carrière. » Son accès est donc difficile à un salarié en contrat non pérenne, et le plafonnement de la durée maximale en limite la portée. Il est souhaitable de revenir sur ces deux dispositions afin d’en renforcer l’application. Il est donc proposé de modifier le code du travail (article 1er de la proposition de loi) pour supprimer la condition d’ancienneté dans l’entreprise pour bénéficier de la disposition (1°) et supprimer son plafonnement à un an pour l’ensemble de la carrière du salarié (2°).
Comme le congé pour soutien familial auquel il succède, mais aussi comme les congés pour enfant malade ou pour présence parentale, il n’est pas rémunéré.
Certaines conventions collectives prévoient néanmoins des dispositions plus favorables en cas d’absence pour enfant malade ; par ailleurs, l’allocation journalière de présence parentale attribuée par les caisses d’allocations familiales vise à répondre à la perte de revenus entrainée par le congé de présence parentale. Il est proposé de mettre en place une allocation journalière de proche aidant construite sur les mêmes bases législatives que l’allocation journalière de présence parentale, mais adaptée à la situation d’un proche aidant, en insérant un chapitre spécifique dans le code de la sécurité sociale (article 2).
Telles sont les dispositions de la présente proposition de loi qu’il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.
PROPOSITION DE LOI
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa de l’article L. 3142-22, les mots : « Le salarié ayant au moins deux ans d’ancienneté dans l’entreprise » sont remplacés par les mots : « Tout salarié » ;
2° Le deuxième alinéa de l’article L. 3142-24 est supprimé.
Le titre IV du livre cinquième du code de la sécurité sociale est complété par un chapitre V ainsi rédigé :
« Chapitre V
« Allocation journalière de proche aidant
« Art. L. 545-1 – La personne qui aide un proche présentant un handicap ou une perte d’autonomie d’une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue et des soins contraignants bénéficie, pour chaque jour de congé prévu à l’article L. 3142-22 du code du travail, d’une allocation journalière de proche aidant.
« Ces dispositions sont également applicables aux agents publics bénéficiant du congé de proche aidant prévu par les règles qui les régissent.
« Un décret précise les modalités d’application du présent article.
« Art. L. 545-2 – La particulière gravité du handicap ou de la perte d’autonomie visés au premier alinéa de l’article L. 545-1 ainsi que le caractère indispensable d’une présence soutenue et de soins contraignants sont attestés par un certificat médical détaillé, établi par le médecin qui suit le proche au titre du handicap ou de la perte d’autonomie susmentionnés. Le droit à la prestation est soumis à un avis favorable du service du contrôle médical prévu aux articles L. 315-1 et L. 615-13 ou du régime spécial de sécurité sociale.
« Le droit est ouvert pour une période égale à la durée prévisible du traitement du proche visé au premier alinéa. Cette durée fait l’objet d’un nouvel examen selon une périodicité fixée par décret.
« Art. L. 545-3 – L’allocation est versée dans la limite d’une durée maximum fixée par décret pour un même proche et par handicap ou perte d’autonomie. Le nombre maximum d’allocations journalières versées au cours de cette période est égal à trois cent dix.
« Au delà de la durée maximum prévue au premier alinéa, le droit à l’allocation journalière de proche aidant peut être ouvert de nouveau, en cas de rechute ou de récidive de la pathologie du proche au titre de laquelle un premier droit à l’allocation journalière de proche aidant avait été ouvert, dès lors que les conditions visées aux articles L. 545-1 et L. 545-2 sont réunies.
« Art. L. 545-4 – Le nombre versé au cours d’un mois civil et le montant de l’allocation journalière sont fixés par décret.
« Art. L. 545-5 – Les personnes mentionnées aux articles L. 7221-1, L. 7311-3 et L. 7313-1 du code du travail, aux 1°, 4° et 5° de l’article L. 615-1, à l’article L. 722-1 du présent code, à l’article L. 722-9 du code rural et de la pêche maritime et aux articles L. 5421-1 à L. 5422-8 du code du travail peuvent bénéficier de l’allocation journalière de proche aidant.
« Les travailleurs à la recherche d’un emploi mentionnés au premier alinéa ou en formation professionnelle rémunérée bénéficient d’une allocation journalière de proche aidant versée mensuellement sur la base d’un nombre de jours fixé par décret.
« Le versement des indemnités dues aux demandeurs d’emploi est suspendu au début du versement de l’allocation journalière de proche aidant et est, à la date de cessation de paiement de celle-ci, repris et poursuivi jusqu’à son terme.
« Les modalités d’attribution et de versement de l’allocation journalière de proche aidant aux personnes visées aux premier et deuxième alinéas sont fixées par décret.
« Art. L. 545-6 – L’allocation journalière de proche aidant n’est pas cumulable, pour un même bénéficiaire, avec :
« 1° L’indemnisation des congés de maladie ou d’accident du travail ;
« 2° Les indemnités servies aux demandeurs d’emploi ;
« 3° Un avantage personnel de vieillesse ou d’invalidité.
« Toutefois, l’allocation journalière de proche aidant, lorsqu’elle n’est pas servie pour la totalité des jours prévus à l’article L. 545-4, est cumulable en cours de droit avec l’indemnisation mentionnée au 1° perçue au titre de l’activité exercée à temps partiel.
Les charges qui pourraient résulter de l’application de la présente loi pour les organismes de sécurité sociale sont compensées, à due concurrence, par la création d’une contribution additionnelle à la contribution visée à l’article L. 136–7–1 du code de la sécurité sociale.
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