N° 4520 - Proposition de loi constitutionnelle de M. Éric Ciotti relative à la sécurité intérieure



N° 4520

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 février 2017.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

relative à la sécurité intérieure,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Éric CIOTTI, Yves FOULON, Jacques LAMBLIN, Josette PONS, Alain MOYNE-BRESSAND, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Bérengère POLETTI, Frédéric REISS, Claude GREFF, Lionnel LUCA, Olivier MARLEIX, Axel PONIATOWSKI, Marie-Louise FORT, Bernard BROCHAND, Jean-Claude GUIBAL, Arlette GROSSKOST, Alain GEST, Jacques Alain BÉNISTI, Patrice MARTIN-LALANDE, Bernard PERRUT, Nicolas DHUICQ, Philippe GOUJON, Jean-Pierre DOOR, Jean-Marie TÉTART, Éric STRAUMANN, Philippe VITEL, Jacques MYARD, Laurent WAUQUIEZ, Denis JACQUAT, Marc-Philippe DAUBRESSE, Marie-Christine DALLOZ, Damien ABAD, Marine BRENIER et Bernard ACCOYER,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’ambition de cette proposition de loi constitutionnelle est de procéder aux modifications constitutionnelles nécessaires pour adapter notre cadre législatif aux impératifs de sécurité contemporains.

Le Conseil constitutionnel estime que la sauvegarde de l’ordre public constitue un objectif de valeur constitutionnelle qui autorise que des limitations puissent être apportées à l’exercice de libertés fondamentales. Néanmoins, force est de constater que dans un contexte de menace terroriste maximale et durable doublé d’une hausse continue de la délinquance, l’équilibre actuel n’est plus pleinement adapté et les instruments juridiques à la disposition des différents intervenants sont insuffisants.

Le premier objectif est de faire évoluer le cadre légal des contrôles d’identité, qui est aujourd’hui trop contraint.

Saisi en 1993 d’une loi qui visait à étendre les conditions de mise en œuvre des contrôles et vérifications d’identité, le Conseil constitutionnel a estimé que si « la prévention d’atteintes à l’ordre public, notamment d’atteintes à la sécurité des personnes ou des biens, est nécessaire à la sauvegarde de principes et de droits ayant valeur constitutionnelle ; (…) la pratique de contrôles d’identité généralisés et discrétionnaires serait incompatible avec le respect de la liberté individuelle » et « que s’il est loisible au législateur de prévoir que le contrôle d’identité d’une personne peut ne pas être lié à son comportement, il demeure que l’autorité concernée doit justifier, dans tous les cas, des circonstances particulières établissant le risque d’atteinte à l’ordre public qui a motivé le contrôle (…) » (décision n° 93-323 DC – 5 août 1993 – loi relative aux contrôles et vérifications d’identité, considérant 9).

De plus, les policiers municipaux ne peuvent aujourd’hui procéder à des contrôles d’identité (décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 – loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure). L’accroissement des pouvoirs des polices municipales, qui participent pleinement à la mise en œuvre de la politique de sécurité, est pourtant devenu indispensable.

Afin de permettre à la loi d’autoriser des contrôles d’identité moins contraints, il est donc nécessaire de procéder à une réforme constitutionnelle (article 1).

Le deuxième objet est de modifier le régime des fouilles de véhicules et de bagages, devenu trop restrictif face à une criminalité de plus en plus violente et organisée.

Le Conseil constitutionnel proscrit la visite des véhicules « sans restrictions, (…) alors même qu’aucune infraction n’aura[it] été commise et sans que la loi subordonne ces contrôles à l’existence d’une menace d’atteinte à l’ordre public » (décision n° 76-75 DC du 12 janvier 1977, loi autorisant la visite des véhicules en vue de la recherche et de la préservation des infractions pénales, considérant 4).

Aussi, l’article 2 modifie l’article 34 de la Constitution afin de permettre à la loi d’adapter notre arsenal législatif en matière de fouille de bagages ou de véhicules.

De plus, la décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 – loi
d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure – a limité les cas dans lesquels les polices municipales peuvent seconder les officiers de police judiciaire dans l’exercice de leurs fonctions, cette évolution est pourtant devenue incontournable. L’article 3 propose par conséquent de remédier à cette situation.

Par ailleurs, afin de mieux prévenir et lutter contre le terrorisme :

– l’article 4 complète la Constitution afin de donner au ministre de l’intérieur le pouvoir d’assigner, dans un centre de rétention fermé, tout individu à l’égard duquel il existe des raisons sérieuses de penser qu’il constitue, par son comportement, une grave menace pour la sécurité nationale ;

– l’article 5, tirant les conséquences de la décision n° 2016-611 QPC du 10 février 2017 qui a censuré le délit de consultation habituelle de sites internet djihadistes, autorise le législateur à adopter les dispositions législatives nécessaires à la prévention de la radicalisation par la voie des services de communication au public en ligne.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article 1er

Après l’alinéa 10 de l’article 34 de la Constitution, insérer l’alinéa suivant :

« La loi détermine les conditions dans lesquelles il peut être procédé à des contrôles d’identité. »

Article 2

Après l’alinéa 10 de l’article 34 de la Constitution, insérer l’alinéa suivant :

« La loi détermine les conditions dans lesquelles il peut être procédé à la visite de véhicules ou à la fouille de bagages se trouvant sur la voie publique. »

Article 3

Après l’alinéa 10 de l’article 34 de la Constitution, insérer l’alinéa suivant :

« La loi détermine les conditions dans lesquelles les agents de police municipale secondent les officiers de police judiciaire dans l’exercice de leurs fonctions. »

Article 4

Après le dixième alinéa de l’article 34 de la Constitution ajouter un alinéa ainsi rédigé :

« La loi fixe les conditions dans lesquelles l’autorité administrative peut priver de liberté tout individu à l’égard duquel il existe des raisons sérieuses de penser qu’il constitue, par son comportement, une grave menace pour la sécurité nationale, ainsi que les garanties juridictionnelles qui s’y rattachent. »

Article 5

Après l’alinéa 10 de l’article 34 de la Constitution, insérer l’alinéa suivant :

« La loi fixe les règles concernant la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables, afin de prévenir la radicalisation d’individus susceptibles, du fait de la consultation de certains services de communication au public en ligne, d’entreprendre ou de participer à une action terroriste. »


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