N° 3558 - Rapport de MM. Gérard Cherpion et Jean-Patrick Gille déposé en application de l'article 145-7 alinéa 1 du règlement, par la commission des affaires sociales sur la mise en application de la loi n°2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale



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N° 3558

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 mars 2016.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145-7 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

sur la mise en application de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale,

ET PRÉSENTÉ PAR

MM. Gérard CHERPION et Jean-Patrick GILLE,

Députés.

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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 7

I. LES TEXTES RÉGLEMENTAIRES : ÉTAT DES LIEUX 9

A. LES TEXTES RÉGLEMENTAIRES PERMETTANT L’APPLICATION DE LA LOI ONT ÉTÉ PRIS DANS DE COURTS DÉLAIS 9

B. AUCUN DES RAPPORTS DEMANDÉS AU GOUVERNEMENT N’A ÉTÉ REMIS AU PARLEMENT 11

C. UNE PREMIÈRE ÉVALUATION DES DISPOSITIONS RELATIVES À LA FORMATION PROFESSIONNELLE 12

II. REPENSER LA FORMATION COMME UN INVESTISSEMENT : DE L’OBLIGATION FISCALE À L’OBLIGATION SOCIALE 14

A. DE « L’OBLIGATION DE PAYER » À « L’OBLIGATION DE FORMER » 14

1. La simplification des obligations de financement 14

2. Financer la montée en charge du CPF 16

3. L’allégement des charges administratives et l’aménagement des effets de seuil 18

4. La contribution unique : pari réussi ? 19

B. ORIENTER LES FONDS VERS LA QUALIFICATION ET LA SÉCURISATION DES PARCOURS 19

1. Un fléchage et une mutualisation des financements rénovés 20

2. Les OPCA « nouvelle génération » 20

3. La consécration législative des OPACIF 23

4. La montée en puissance du FPSPP 24

III. LA MISE EN PLACE D’OUTILS PERSONNELS ET QUALIFIANTS AU SERVICE DE LA SÉCURISATION DES PARCOURS PROFESSIONNELS 25

A. LE COMPTE PERSONNEL DE FORMATION, PILIER DE LA QUALIFICATION ET DE LA SÉCURISATION DES PARCOURS 25

1. La création d’un compte unique comme levier de la sécurisation des parcours professionnels 25

a. L’entrée en vigueur du compte personnel de formation 25

b. Une transférabilité garantie des droits 26

c. Une mobilisation simplifiée des heures 27

d. Un accès renforcé à l’information 28

2. La diversité des abondements 29

a. L’alimentation du compte en heures de formation 29

b. La prise en compte des publics spécifiques 30

c. Les abondements supplémentaires 31

3. Une appropriation progressive 32

B. LE CONSEIL EN ÉVOLUTION PROFESSIONNELLE, LA VALIDATION DES ACQUIS DE L’EXPÉRIENCE ET L’ENTRETIEN PROFESSIONNEL : DES OUTILS AU CœUR D’UNE DÉMARCHE DE PARCOURS 35

1. Le conseil en évolution professionnelle au service de l’employabilité 35

a. Un outil de maîtrise du parcours professionnel 35

b. Faciliter le recours au CEP 37

2. Le soutien à la validation des acquis de l’expérience 38

3. Le renforcement de l’entretien professionnel 39

C. DES INCERTITUDES À CORRIGER 40

1. La pertinence des listes en question 40

a. Les modalités d’élaboration des listes 40

b. Un bien-fondé contesté 43

c. Simplifier le système d’éligibilité à une formation 45

2. Le contrôle de la qualité des formations 46

a. Le contrôle des actions de formation prévu par la loi 46

b. Renforcer la cohérence du contrôle de la qualité 47

3. Les publics restés en dehors du dispositif 49

D. LA PERSPECTIVE D’INTÉGRATION DANS LE COMPTE PERSONNEL D’ACTIVITÉ : « LA GREFFE D’UN EMBRYON SUR UN EMBRYON » () ? 50

1. Favoriser les mobilités professionnelles tout en sécurisant les parcours de vie 50

2. Les scénarios envisagés 51

IV. LA CRÉATION DES NOUVELLES INSTANCES : BIEN DÉFINIR LE RÔLE DE CHACUN 53

A. LA LOI DU 5 MARS 2014 : UN OBJECTIF DE RATIONALISATION DES INSTANCES 53

1. Le CNEFOP et les CREFOP, de nouvelles instances chargées de coordonner les politiques publiques en matière de formation, d’orientation et d’emploi 53

2. La gouvernance des partenaires sociaux représentatifs : COPANEF et COPAREF 54

B. LE COPANEF EST DEVENU UN ORGANE « POLITIQUE » DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE 55

1. Le rôle du FPSPP, du COPANEF et de l’État 55

2. Une fusion COPANEF – FPSPP est-elle compatible avec l’universalisation du droit à la formation ? 57

V. L’APPRENTISSAGE, UN OUTIL ESSENTIEL AU SERVICE DE L’EMPLOI : DES PRINCIPES À LA RÉALITÉ 58

A. DES OBJECTIFS QUANTITATIFS AMBITIEUX 58

B. LA MODIFICATION DU FINANCEMENT ET DU PILOTAGE DE L’APPRENTISSAGE ISSU DE LA LOI DU 5 MARS 2014 59

1. Une modification du financement de l’apprentissage heurtée par la volonté de réaliser des économies budgétaires 59

2. Une réforme profonde de la collecte de la taxe d’apprentissage 63

3. Un renforcement des compétences des régions en matière d’apprentissage 63

4. Une volonté de sécuriser le parcours des apprentis 64

C. DES RÉSULTATS DÉCEVANTS DUS EN PARTIE AUX MESURES FINANCIÈRES ET RÉGLEMENTAIRES PRISES EN DÉBUT DE LÉGISLATURE 64

1. Des chiffres d’entrée dans l’apprentissage encore loin des objectifs annoncés 64

2. Un secteur très sensible aux mesures prises en début de législature 65

D. DES MESURES CORRECTIVES QUI COMMENCENT À PORTER LEURS FRUITS 66

E. PROPOSITIONS DES RAPPORTEURS : VALORISER L’APPRENTISSAGE ET LES APPRENTIS 67

1. Conserver deux voies d’alternance 67

2. Neutraliser le facteur de l’âge des apprentis 68

3. Valoriser les maîtres d’apprentissage 69

CONCLUSION 71

TRAVAUX DE LA COMMISSION 73

ANNEXES 93

ANNEXE N° 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 93

ANNEXE N° 2 : SUIVI RÉGLEMENTAIRE DE LA LOI DU 5 MARS 2014 97

ANNEXE N° 3 : SUIVI DE LA TRANSMISSION DES RAPPORTS AU PARLEMENT 108

ANNEXE N° 4 : SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS 109

INTRODUCTION

En transposant l’accord national interprofessionnel du 14 décembre 2013, la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a opéré une véritable réforme systémique qui concerne l’ensemble des acteurs : organismes de formation, organisations syndicales de salariés, organisations professionnelles d’employeurs, salariés, demandeurs d’emploi, État, collectivités territoriales, organismes paritaires collecteurs agréés et entreprises. Elle a surtout changé la philosophie de la formation professionnelle dans notre pays en substituant à l’obligation légale pour l’employeur de « payer », en vigueur depuis 1971, une obligation de former, faisant ainsi de la formation professionnelle un moteur du dialogue social.

Le financement de la formation professionnelle est désormais appréhendé comme un investissement, et non plus comme une dépense de fonctionnement, ni comme un moyen permettant de satisfaire une obligation légale. Elle se place au service tant du salarié et du demandeur d’emploi, dans une démarche de sécurisation des parcours professionnels et de qualification, que de l’entreprise, à l’appui de sa compétitivité et de sa vitalité.

Au cœur de la réforme du 5 mars 2014, cette refonte du financement de la formation professionnelle s’accompagne de la création ou de la rénovation des outils de qualification et d’accompagnement. Le compte personnel de formation (CPF), appelé à devenir demain le pivot du futur compte personnel d’activité, constitue le dispositif-clef de qualification et doit désormais répondre au défi de son universalisation. La loi du 5 mars 2014 permet également de faciliter l’accès à la validation des acquis de l’expérience, de définir les missions du conseil en évolution professionnelle et d’enrichir les entretiens professionnels.

Le pilotage de ces outils s’appuie sur une gouvernance rénovée de la formation professionnelle, désormais quadripartite. Si l’articulation des différentes instances doit encore être clarifiée, le nouveau cadre institutionnel tire toutes les conséquences de la montée en puissance des régions en matière de formation professionnelle et de la redéfinition du rôle des partenaires sociaux dans les instances nationales et locales.

Le présent rapport est un rapport sur la mise en application de la loi précitée. Si l’article 145-7 du Règlement de l’Assemblée nationale prévoit un délai de six mois après la promulgation de la loi pour en faire un bilan, les rapporteurs ont estimé nécessaire d’aller au-delà du simple suivi réglementaire et d’ainsi attendre une première année de pleine application de la réforme pour en dresser les conclusions les plus saillantes. Ce rapport n’a pas vocation à faire une évaluation de la loi, qui a été confiée par la loi au Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP), mais d’en vérifier la mise en application conformément aux intentions du législateur et, le cas échéant, de proposer des pistes d’amélioration.

Au terme d’une trentaine d’auditions, les rapporteurs ont souhaité attirer plus particulièrement l’attention sur quatre enjeux centraux, au cœur de la réforme passée mais aussi des débats parlementaires à venir :

– la refonte du financement de la formation professionnelle, prenant la forme d’une contribution unique substituant à une obligation fiscale – « payer » – une obligation sociale – « former ». Bien que la première collecte de la contribution unique au titre de l’année 2015 ne soit pas achevée, un premier bilan du dispositif peut néanmoins être effectué à ce stade ;

– les dispositifs au service d’une démarche de parcours, permettant la personnalisation des droits et l’acquisition d’au moins un niveau de qualification, à la veille de l’entrée en vigueur du compte personnel d’activité ;

– la mise en œuvre des nouvelles instances quadripartites, s’agissant notamment de la création des comités régionaux de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CREFOP), du renforcement de la compétence régionale et de l’articulation entre le Comité interprofessionnel pour l’emploi et la formation (COPANEF) et le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) ;

– l’enjeu central de la relance de l’apprentissage, dans le contexte de la réforme de la taxe d’apprentissage et de sa collecte et de l’idée, parfois évoquée, d’un contrat unique d’alternance.

Les rapporteurs ont souhaité se placer du point de vue du bénéficiaire de la formation professionnelle et ont ainsi fait de l’appropriation de la loi du 5 mars 2014 par chaque acteur le fil rouge de leur travail. L’inscription des actions de formation dans une démarche de parcours tire les conséquences de la multiplicité des transitions professionnelles au cours d’une même carrière et de la redéfinition du salariat. Il conviendra d’approfondir davantage ces enjeux au cours des prochains débats parlementaires, relatifs notamment au CPA, en insistant sur la modularisation des formations et des certifications. C’est à cette condition que l’accès de tout actif – en particulier des demandeurs d’emploi et des travailleurs en difficulté – pourra être effectif. C’est cet enjeu que la démocratie sociale doit aujourd’hui relever afin de répondre aux attentes des actifs et des entreprises et de participer pleinement au redressement de la compétitivité française.

I. LES TEXTES RÉGLEMENTAIRES : ÉTAT DES LIEUX

A. LES TEXTES RÉGLEMENTAIRES PERMETTANT L’APPLICATION DE LA LOI ONT ÉTÉ PRIS DANS DE COURTS DÉLAIS

L’état des lieux de la publication des textes d’application nécessite de prendre en compte non seulement les textes réglementaires prévus par la loi
– décrets en Conseil d’État, décrets et arrêtés – mais également ceux qui relèvent de l’information du Parlement, c’est-à-dire les rapports à remettre à celui-ci par le Gouvernement.

S’agissant des textes réglementaires, à ce stade, 23 décrets en Conseil d’État et 18 décrets simples ont été pris ainsi que 6 arrêtés. Par conséquent, 3 décrets en Conseil d’État, 3 décrets simples et 4 arrêtés sont encore à publier. L’annexe 2 précise l’état des lieux de la parution des mesures d’application.

Deux décrets sont aujourd’hui particulièrement attendus :

– s’agissant de la formation professionnelle, l’article 1er de la loi du 5 mars 2014 renvoie à un décret la définition des conditions dans lesquelles le compte personnel de formation des travailleurs handicapés accueillis dans un établissement et service d’aide par le travail (ESAT) fait l’objet d’abondements en heures complémentaires. Il a été indiqué aux rapporteurs que le décret prévu fait aujourd’hui l’objet d’arbitrages interministériels et devrait être publié en 2016 ;

– s’agissant de la démocratie sociale, l’article 29 de la loi précitée prévoit que lorsqu'une organisation professionnelle d'employeurs adhère à plusieurs organisations professionnelles d'employeurs ayant statutairement vocation à être présentes au niveau national et interprofessionnel, elle répartit entre ces organisations ses entreprises adhérentes pour permettre la mesure de l'audience. Le législateur a renvoyé au décret la définition du seuil minimal de répartition des entreprises entre organisations, tout en prévoyant une fourchette comprise entre 10 % et 20 %. Ce décret fait aujourd’hui l’objet d’une concertation.

Parmi les décrets publiés, certains méritent une attention particulière au regard de leur impact concret sur les différents acteurs de la formation professionnelle et l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2014.

Concernant le cœur de la réforme, qui a transformé l’obligation légale de payer pour la formation en une obligation de former, le décret n° 2015-600 du 2 juin 2015 portant suppression des dispositions réglementaires relatives à la déclaration fiscale des employeurs en matière de formation professionnelle est venu supprimer les obligations de déclaration à l’autorité administrative. Cette déclaration permettait jusqu’alors de déduire les dépenses consacrées à la formation professionnelle continue des salariés de la contribution légale.

Un deuxième décret essentiel à la mise en place de la réforme a été pris dès octobre 2014 – décret n° 2014-1120 du 2 octobre 2014 relatif aux modalités d’alimentation et de mobilisation du compte personnel de formation – en vue de préciser les modalités de mobilisation du CPF par leur titulaire. Il définit notamment les conditions et les modalités de prise en charge des frais de formation au titre du CPF et de rémunération des salariés en formation pendant le temps de travail.

S’agissant également des dispositions relatives à la démocratie sociale, deux décrets particulièrement attendus sont venus préciser les modalités d’entrée en vigueur des dispositions prévues par la loi du 5 mars 2014.

D’une part, le décret n° 2015-654 du 10 juin 2015 relatif à la mise en œuvre de la représentativité syndicale identifie les conditions dans lesquelles une organisation professionnelle d’employeurs voit son audience mesurée au niveau de la branche professionnelle et aux niveaux national, interprofessionnel et multiprofessionnel. Les modalités de dépôt de la candidature et le contenu de la déclaration de candidature sont également précisés.

D’autre part, le décret n° 2015-87 du 28 janvier 2015 relatif au financement mutualisé des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs détermine les règles de répartition des crédits du fonds paritaire contribuant au financement des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs pour l'exercice de missions d'intérêt général. La composition du fonds paritaire, la compétence de son conseil d’administration et les critères de répartition des crédits sont ainsi déclinés.

La suite du rapport revient sur les principales mesures réglementaires permettant la mise en œuvre de la loi du 5 mars 2014, s’agissant notamment du cahier des charges du conseil en évolution professionnelle, des critères de qualité de la formation délivrée ou de l’utilisation du compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) au titre du compte personnel de formation.

Les rapporteurs soulignent que la plupart des textes réglementaires ont été pris dans des délais réduits, pour la plupart en 2014, et ont ainsi permis la pleine entrée en vigueur des dispositions au 1er janvier 2015, avec, au premier titre, l’ouverture des comptes personnels de formation.

B. AUCUN DES RAPPORTS DEMANDÉS AU GOUVERNEMENT N’A ÉTÉ REMIS AU PARLEMENT

Il est de pratique courante au cours de l’examen d’une loi d’introduire par voie d’amendement parlementaire des demandes de rapport au Gouvernement. Ces amendements répondent à quatre types de préoccupations :

– le parlementaire à l’origine de l’amendement souhaite mettre la lumière sur un sujet précis. Il souhaite faire travailler les services de l’État sur ledit sujet afin d’évaluer la faisabilité d’une réforme ;

– le parlementaire aurait souhaité proposer une disposition normative mais est contraint de demander un rapport, du fait de l’interdiction de créer une charge supplémentaire inscrite à l’article 40 de la Constitution ;

– le parlementaire a déposé un amendement créant une véritable norme mais l’a retiré afin d’engager un travail de fond avec le Gouvernement, dans le cadre d’un rapport à remettre au Parlement ;

– l’amendement répond à une demande d’information et de suivi de l’application d’une ou de plusieurs dispositions législatives votées dans la loi en question.

Huit rapports étaient prévus dans la loi du 5 mars 2014, comme l’illustre l’annexe 2 du rapport. Un rapport concernait plus spécifiquement le cœur de la réforme ; il devait tirer les conséquences, en matière de formation, du passage de l’obligation de dépenser à l’obligation de former, avec un examen particulier de la situation des entreprises de 10 à 299 salariés. Prévu par l’article 27 de la loi, ce rapport devait être remis avant le 31 décembre 2015. Il était d’autant plus attendu qu’il devait permettre au législateur de disposer d’une analyse chiffrée des conséquences de la rénovation du financement de la formation professionnelle sur l’investissement des entreprises dans la formation.

Aucun rapport n’a été publié à ce jour. Le rapport dû tous les deux ans par le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) au Parlement devrait être remis dans les temps, à l’automne 2016. Le rapport que doit remettre le fonds paritaire de financement des organisations syndicales et patronales devrait également l’être prochainement.

Six rapports dus par le Gouvernement au Parlement demeurent donc en attente. Le ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a préféré disposer du recul d’une première année pleine d’entrée en vigueur de la réforme afin de dresser un constat aussi objectif que possible.

C. UNE PREMIÈRE ÉVALUATION DES DISPOSITIONS RELATIVES À LA FORMATION PROFESSIONNELLE

La loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale comporte deux titres.

Le titre Ier intitulé « Formation professionnelle et emploi » comprend lui-même trois chapitres :

– le chapitre Ier : Formation professionnelle continue ;

– le chapitre II : Apprentissage et autres mesures en faveur de l’emploi ;

– le chapitre III : Gouvernance et décentralisation.

Les rapporteurs ont souhaité mettre l’accent sur quatre points – le financement de la formation professionnelle, les outils de qualification et de sécurisation des parcours, la gouvernance rénovée de la formation professionnelle et l’apprentissage – qui font ainsi l’objet d’une première analyse deux ans après la promulgation de la loi.

Cette analyse thématique, élaborée au terme d’une trentaine d’auditions menées par les rapporteurs, mesure le chemin parcouru depuis la promulgation de la loi et la capacité à assurer l’entrée en vigueur des dispositifs – en particulier le CPF – dans les délais impartis. L’analyse souligne également les difficultés rencontrées et les pistes d’amélioration pouvant être suivies afin de garantir l’appropriation du dispositif par chaque acteur. En se plaçant du point de vue de l’utilisateur, différentes dispositions sont apparues peu adaptées à l’enjeu de l’acquisition par chacun d’un niveau de qualification, notamment concernant la mobilisation du CPF et les formations éligibles.

Les rapporteurs ont choisi de consacrer leur analyse thématique à ces dispositions du titre Ier.

En conséquence, le titre II intitulé « Démocratie sociale » fait l’objet du seul suivi réglementaire. Modifiées en partie dans le cadre de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, ses dispositions seront au cœur des prochains débats parlementaires. Les rapporteurs rappellent néanmoins l’évolution centrale portée par l’article 29 de la loi du 5 mars 2014 s’agissant de la représentativité patronale.

La mesure de l’audience des organisations professionnelles d’employeurs

La loi du 5 mars 2014 a rénové les critères de mesure de l’audience des organisations professionnelles d’employeurs.

Sont ainsi considérées comme représentatives les organisations professionnelles d’employeurs qui assurent le respect de six critères définis à l’article L. 2151-1 du code du travail : le respect des valeurs républicaines, l’indépendance, la transparence financière, l’ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation, l’influence et l’audience, « qui se mesure en fonction du nombre d’entreprises adhérentes ».

S’agissant plus spécifiquement du dernier critère, le seuil d’audience est mesuré en fonction du nombre d’entreprises adhérentes à jour de leurs cotisations. Toute entreprise adhérente compte ainsi invariablement pour une voix.

Dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soulevée par le Medef et plusieurs unions et fédérations patronales, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes ces dispositions du code du travail à la Constitution. La décision n° 2015-519 QPC du 3 février 2016 précise ainsi qu’« en prévoyant que l’audience de ces organisations se mesure en fonction du nombre des entreprises adhérentes, le législateur a entendu assurer un égal accès à la représentativité des organisations professionnelles d’employeurs quel que soit le nombre de salariés employés par les entreprises adhérentes ou leur chiffre d’affaires » et « a traité de la même manière l’ensemble des entreprises ». Aucune atteinte n’est donc portée à la liberté syndicale ou au principe d’égalité devant la loi.

Ces dispositions sont aujourd’hui la source d’un débat renouvelé entre les organisations professionnelles d’employeurs, notamment au lendemain d’un accord signé par le Medef et la CGPME prévoyant de pondérer la mesure de l’audience selon le nombre de salariés (80 %) et le nombre d’entreprises (20 %). Cet accord ne fait toutefois pas l’objet d’un consensus de l’ensemble des organisations patronales concernées.

Les dispositions du titre II ont rénové les fondements de la démocratie sociale, qu’il s’agisse de la réforme de la représentativité patronale précitée, de l’instauration d’un fonds paritaire pour financer les organisations syndicales et patronales ou de l’obligation d’établir des comptes dans les comités d’entreprise. Ces dispositions relatives au dialogue social, appelées à être enrichies ou modifiées dans le cadre du prochain projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs, ne font donc pas l’objet d’une analyse thématique, cette dernière étant consacrée aux enjeux de la formation professionnelle et de l’emploi.

II. REPENSER LA FORMATION COMME UN INVESTISSEMENT : DE L’OBLIGATION FISCALE À L’OBLIGATION SOCIALE

La redéfinition des outils de la formation professionnelle et la mise en œuvre du compte personnel de formation s’appuient sur un financement rénové prenant la forme d’une contribution unique. Le passage d’une obligation fiscale à une obligation sociale vise à responsabiliser les entreprises et à garantir la qualification des salariés et des demandeurs d’emploi, en cohérence avec l’objectif d’acquisition d’un niveau de qualification durant sa vie professionnelle.

Cette redéfinition s’accompagne d’une mutualisation renforcée des financements, orientée vers les petites entreprises et la sécurisation des parcours professionnels. Après une première année d’application, et à la veille de la première collecte au titre de la contribution unique, le nouveau financement de la formation professionnelle peut aujourd’hui faire l’objet d’un premier bilan d’étape.

A. DE « L’OBLIGATION DE PAYER » À « L’OBLIGATION DE FORMER »

L’article 10 de la loi du 5 mars 2014 rénove en profondeur le mécanisme de financement de la formation professionnelle afin de rassembler en une contribution unique des dispositifs auparavant épars et de mettre fin au mécanisme d’imputabilité fiscale des dépenses internes effectuées par l’entreprise. La refonte du financement de la formation professionnelle continue s’accompagne d’un allégement des charges administratives et des effets de seuil.

1. La simplification des obligations de financement

La création d’une contribution unique a été rendue indispensable par les limites et la complexité des obligations de financement existant jusqu’alors. Différentes contributions étaient établies selon le dispositif à financer et l’effectif de l’entreprise :

– les entreprises de moins de 10 salariés devaient consacrer au moins 0,55 % de leur masse salariale à la formation professionnelle, dont 0,15 % versé à un organisme collecteur paritaire agréé (OPCA) afin de financer les contrats et les périodes de professionnalisation ;

– les entreprises comprenant entre 10 et 49 salariés étaient tenues de consacrer au moins 1,05 % de leur masse salariale au financement de la formation professionnelle continue, incluant un versement de 0,15 % consacré à un OPCA au titre du financement des contrats et des périodes de professionnalisation ainsi que du droit individuel à la formation (DIF). Le solde de 0,9 % devait être utilisé soit pour effectuer un nouveau versement à un OPCA, soit pour financer directement les actions de formation dans l’entreprise ;

– les entreprises de plus de 20 salariés étaient soumises à une contribution d’au moins 1,6 % de leur masse salariale, comprenant un versement de 0,2 % consacré à un OPCA collecteur au titre du congé individuel de formation (OPACIF) et un versement de 0,5 % effectué à un OPCA de branche ou interprofessionnel au titre du financement des contrats et des périodes de professionnalisation. Le solde de 0,9 % était acquitté soit sous forme de versement à un OPCA, soit de dépense directe dans l’entreprise afin de financer des actions de formation supplémentaires entrant dans le cadre du plan de formation de l’entreprise, du DIF, du congé individuel de formation (CIF) ou de la validation des acquis de l’expérience (VAE).

Ces taux minimums de contribution pouvaient être relevés par un accord collectif ou complétés par les dépenses supplémentaires consacrées volontairement par l’entreprise au financement de la formation professionnelle continue.

Ce système de financement de la formation professionnelle était critiqué au regard de sa complexité et de son incapacité à orienter le financement privé vers les formations les plus qualifiantes et à redistribuer une partie des financements vers les très petites entreprises. L’obligation fiscale, fixée à 0,9 %, était, dans la pratique, largement dépassée par les dépenses consacrées par les entreprises au plan de formation. La multiplicité des contributions, l’utilisation de l’obligation fiscale comme un moyen permettant de se soustraire à l’obligation de former et l’insuffisante mutualisation des fonds de la formation professionnelle continue effectuée par les OPCA, avec une adéquation pour chaque classe d’entreprises entre les sommes versées aux OPCA et les sommes reçues, ne permettaient pas au système de financement d’atteindre ses objectifs.

Face à ces limites, le nouveau dispositif de financement de la formation professionnelle continue prévu à l’article L. 6331-1 du code du travail distingue clairement deux modalités de financement de la formation par l’employeur et met ainsi un terme à l’alternative « payer ou former » :

– d’une part, le financement direct par l’employeur d’actions de formation, dans le cadre de l’obligation de maintien de la capacité des salariés à occuper un emploi ;

– d’autre part, le versement d’une contribution unique, dont le taux diffère selon la taille de l’entreprise.

Maintenu à 0,55 % pour les entreprises de moins de 10 salariés, le taux de la contribution unique est fixé à 1 % pour les entreprises de plus de 10 salariés. Un accord d’entreprise conclu pour une durée de trois ans peut toutefois prévoir que l’employeur consacre au moins 0,2 % de sa masse salariale au financement du CPF, pouvant alors abaisser le taux de sa contribution unique à 0,8 %. L’entreprise doit dans ce cas transmettre à l’OPCA une déclaration faisant état des dépenses qu’elle consacre au financement du CPF. Dans le cas où ces dépenses seraient inférieures au taux d’au moins 0,2 % prévu par l’accord d’entreprise, au terme des trois années suivant la conclusion de cet accord, les fonds que l’employeur n’a pas consacrés au financement du CPF sont reversés à l’OPCA. Le décret n° 2014-968 du 22 août 2014 relatif aux contributions des entreprises au titre de la formation professionnelle continue précise que ce versement compensateur doit être effectué avant le 1er mars de l’année qui suit la dernière année d’application de l’accord. À défaut, cette somme est versée au Trésor public.

En abaissant le niveau des obligations légales, la contribution unique ne diminue pas l’effort de financement mais concentre le financement légal sur les dépenses dont la mutualisation ou le fléchage sont les plus nécessaires, en premier lieu le CPF. La suppression de l’obligation fiscale au titre du plan ne signifie en revanche ni la fin du plan de formation ni celle de l’obligation de former.

Le décret n° 2015-600 du 2 juin 2015 portant suppression des dispositions réglementaires relatives à la déclaration fiscale des employeurs en matière de formation professionnelle a en conséquence supprimé les obligations de déclaration à l’autorité administrative permettant jusqu’alors de déduire les dépenses consacrées à la formation professionnelle continue des salariés de la contribution légale.

Il est aujourd’hui possible d’aller plus loin en ouvrant une réflexion sur la possibilité pour une entreprise de bénéficier d’une déduction fiscale au titre de ses investissements supplémentaires en formation, à partir d’une logique incitative.

Proposition n° 1 :

Engager une réflexion sur un mécanisme de déduction fiscale ouvert aux entreprises voire aux particuliers en contrepartie de leurs efforts supplémentaires d’investissement en formation.

2. Financer la montée en charge du CPF

a. Les modalités de financement du CPF prévues par la loi

La rénovation des dispositifs de financement des heures de formation constitue l’une des garanties d’effectivité du CPF et le corollaire de sa mobilisation par son titulaire. La loi du 5 mars 2014 distingue deux financements distincts : des financements dédiés, d’une part ; un financement direct par l’employeur, d’autre part.

S’agissant des financements dédiés, tout d’abord, la refonte des règles et des obligations de financement aux articles 10 et 11 du projet de loi se traduit par le fléchage de 0,2 % de la masse salariale des entreprises d’au moins dix salariés vers le CPF. Ce mécanisme correspond à un versement de 900 millions d’euros exclusivement dédié au financement du CPF. Cette somme s’ajoute au financement des heures de formation mobilisées au titre du compte par les demandeurs d’emploi ou dans le cadre d’un congé individuel de formation. Ce second financement, à hauteur de 300 millions d’euros, est effectué par le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP).

Ces financements permettent de rendre effective la prise en charge des coûts pédagogiques des formations sollicitées prévue aux articles L. 6323-20 et L. 6323-23 du code du travail, respectivement pour les salariés et les demandeurs d’emploi. Dans le cas d’un salarié, et en l’absence d’accord d’entreprise, les frais pédagogiques et les frais annexes afférents à la formation du salarié qui mobilise son CPF – pendant ou hors temps de travail – sont pris en charge par l’organisme collecteur paritaire agréé pour collecter la contribution de l’employeur. Le décret n° 2014-1120 du 2 octobre 2014 relatif aux modalités d’alimentation et de mobilisation du compte personnel de formation en a précisé les modalités d’application. D’une part, les frais annexes sont définis comme les frais de transport, de repas et d’hébergement occasionnés par la formation et peuvent s’étendre aux frais de garde d’enfant ou de parent. D’autre part, la prise en charge de ces frais est effectuée au regard du coût réel de la formation, un plafond de prise en charge pouvant toutefois être déterminé par le conseil d’administration de l’organisme. Enfin, la prise en charge par l’OPCA de la rémunération des salariés en formation pendant le temps de travail dans la limite de 50 % du montant total pris en charge par cet organisme pour le financement de la formation des heures inscrites sur le compte est subordonnée à l’existence d’un accord exprès du conseil d’administration de cet organisme. Dans le cas d’un demandeur d’emploi, ces frais sont pris en charges par le FPSPP dans la limite du nombre d’heures inscrites sur le CPF.

S’agissant du financement par l’employeur, ensuite, et par dérogation aux dispositions précédentes, un accord d’entreprise négocié peut prévoir la prise en charge de ces frais de formation et des frais annexes directement par l’employeur. L’employeur doit alors consacrer au moins 0,2 % du montant des rémunérations versées pendant l’année de référence au financement du CPF de ses salariés et à son abondement.

b. Garantir la pérennité du financement une fois le CPF monté en charge

L’enjeu du financement du CPF est central pour garantir l’accès à des formations longues, seules à même de répondre à l’objectif de qualification prévu par la loi. La soutenabilité financière du dispositif pose toutefois question et dépendra en premier lieu des comportements des salariés – mobilisant ou non leur CPF – et des employeurs – prenant en charge directement le financement ou non.

Dans le cadre de sa montée en charge progressive, le poids financier du CPF demeure incertain et dépend de plusieurs paramètres :

– la mobilisation du CPF dès la première année, et la répartition entre salariés et demandeurs d’emploi ;

– le coût horaire d’une formation et sa durée, en lien avec l’exigence de qualification ou de certification ;

– le suivi d’une formation pendant ou en dehors du temps de travail, avec l’enjeu de la rémunération du salarié.

À partir d’hypothèses retenant notamment une utilisation du CPF par 5 % des titulaires, soit la moyenne d’utilisation du droit individuel à la formation, et une durée moyenne de 150 heures par formation, une étude évalue à 6 milliards d’euros le coût annuel du CPF (1). La somme de 1,2 milliard d’euros dédiée au CPF met donc en lumière le rôle déterminant des financements directs par l’employeur et des abondements supplémentaires. L’enjeu est donc aujourd’hui d’accompagner la montée en puissance du CPF et la mise à disposition de financements adéquats.

Les rapporteurs soulignent l’ampleur du travail mené par les différents acteurs pour assurer un financement effectif du CPF dès son entrée en vigueur. Malgré les incertitudes initiales, les circuits de financement ont été mis en place dans des délais très courts et ont permis aux actifs – et notamment aux demandeurs d’emploi – de mobiliser leur compte dès le printemps 2015. À ce jour, les principales craintes relatives à la pertinence du financement du CPF peuvent donc être levées, permettant de souligner la bonne implication de tous
– entreprises, administration et OPCA – dans le déploiement du CPF.

3. L’allégement des charges administratives et l’aménagement des effets de seuil

La simplification des modalités de financement se traduit également par un allégement des charges de gestion administratives. Les entreprises doivent désormais uniquement transmettre à l’autorité administrative des informations relatives aux modalités d’accès à la formation professionnelle des salariés, dont le contenu a été précisé par le décret n° 2015-600 du 2 juin 2015 précité.

Par ailleurs, un mécanisme de simplification a également été prévu afin d’aménager les effets de seuil et d’accompagner l’évolution des effectifs d’une entreprise.

Le dispositif de financement de la formation professionnelle continue mis en place par la loi du 5 mars 2014 distinguant deux régimes de contribution unique selon la taille de l’entreprise, il est apparu indispensable de prévoir un régime transitoire afin de ne pas créer de complexité supplémentaire pour toute entreprise souhaitant recruter de nouveaux salariés.

Le décret n° 2014-968 du 22 août 2014 précité et le décret n° 2016-189 du 24 février 2016 (2) précisent en conséquence les modalités de lissage de la contribution due à l’OPCA lorsque les employeurs dépassent ou atteignent l’effectif de dix salariés afin d’atténuer les effets de seuil. L’article L. 6331-15 du code du travail prévoit déjà que, dans cette situation, les employeurs restent soumis, pour l’année en cours et pour les deux suivantes, à l’obligation de financement de 0,55 % de la masse salariale prévue pour les entreprises de moins de 10 salariés. En complément, il est désormais prévu que le taux de la contribution légale de 1 % de la masse salariale prévu pour les entreprises de plus de 10 salariés est réduit de 30 % la quatrième année puis de 10 % la cinquième année.

4. La contribution unique : pari réussi ?

Le passage d’une « obligation de payer » à une « obligation de former » était rendu indispensable par le caractère dépassé du dispositif antérieur, parfois assimilé à un moyen permettant à l’employeur de se soustraire à son obligation sociale. Il témoigne d’un changement de conception de la formation professionnelle, relevant bien davantage d’une dépense d’investissement que d’une dépense de fonctionnement ou d’une contrainte comptable et administrative.

En fixant une contribution unique à un niveau inférieur – pour les entreprises de plus de 10 salariés – au cumul antérieur des différentes contributions, le législateur a fait le choix d’une responsabilisation des entreprises dans la mise en place de formations internes répondant à leurs propres besoins et à ceux de leurs salariés et d’une orientation des fonds résultant de la contribution unique vers les dispositifs qualifiants et le financement des formations dans les très petites entreprises.

Entré en vigueur il y a un an, le nouveau dispositif de contribution unique n’a pas encore produit tous ses effets. La contribution unique doit ainsi être versée en intégralité avant le 1er mars 2016 au titre de la masse salariale 2015. Au terme des auditions, il apparaît qu’une période de deux années sera nécessaire pour évaluer les effets de la contribution unique et la réaction des entreprises au titre du plan de formation. Néanmoins, d’ores et déjà, cette contribution apparaît être à la compétitivité des entreprises ce que le CPF est à la liberté de formation des actifs : un dispositif bien plus adapté au marché du travail et aux besoins de formation que le système précédent.

B. ORIENTER LES FONDS VERS LA QUALIFICATION ET LA SÉCURISATION DES PARCOURS

Les financements recueillis au titre de la contribution unique voient leur ciblage et leur fléchage renforcés afin d’en garantir l’efficacité et de répondre aux besoins des entreprises, des salariés et des demandeurs d’emploi. Il en résulte une redéfinition du rôle des organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA), une clarification des missions des organismes collecteurs paritaires agréés au titre du congé individuel de formation (OPACIF) et un renforcement du rôle du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP).

1. Un fléchage et une mutualisation des financements rénovés

Le financement des formations les plus qualifiantes et l’accompagnement des petites entreprises reposent sur la modulation des taux et la fongibilité des financements selon l’effectif de l’entreprise.

Si la loi définit le taux de la contribution unique et la part des contributions dues au titre du CIF et du FPSPP, le décret fixe ensuite la décomposition des ressources issues de la contribution unique entre le plan de formation et les actions de professionnalisation.

Aux termes des dispositions contenues dans la loi du 5 mars 2014 et précisées par le décret n° 2014-1240 du 24 octobre relatif aux organismes paritaires agréés mentionnés aux articles L. 6332-1, L. 6333-1 et L. 6333-2 du code du travail, la contribution unique se répartit de la façon suivante selon la taille de l’entreprise :

RÉPARTITION DE LA CONTRIBUTION UNIQUE SELON L’EFFECTIF DE L’ENTREPRISE

 

1 à 9 salariés

10 à 49 salariés

50 à 299 salariés

Plus de 300 salariés

Plan de formation

0,40 %

0,20 %

0,10 %

0 %

Actions de professionnalisation

0,15 %

0,30 %

0,30 %

0,40 %

L’article 11 de la loi du 5 mars 2014 a également élargi le champ de la mutualisation, en prévoyant que les versements reçus par l’OPCA sont mutualisés dès leur réception dans les différentes sections, à l’exception de la section dédiée au CPF. Concernant plus spécifiquement les versements dédiés au financement du plan de formation, l’OPCA peut affecter des versements des employeurs d’au moins 50 salariés au financement des plans de formation présentés par les employeurs de moins de 50 salariés adhérant à l’organisme.

2. Les OPCA « nouvelle génération »

L’article 11 de la loi du 5 mars 2014 précise les missions des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) dans le nouveau contexte de mise en œuvre de la contribution unique et du compte personnel de formation. Plutôt qu’une redéfinition des conditions d’agrément, la réforme préserve le paysage institutionnel mais en adapte le fonctionnement afin d’orienter les financements vers les formations les plus qualifiantes. L’exigence d’un seuil de collecte au moins égal à 100 millions d’euros est ainsi maintenue. Le décret n° 2014-1240 du 24 octobre 2014 précité prévoit toutefois que l’agrément est retiré lorsque cette condition n’est pas remplie durant trois années consécutives, au lieu de deux auparavant.

L’adaptation des OPCA concerne à la fois leurs compétences, leurs obligations de financement, leurs missions et leurs règles de gestion.

S’agissant de leurs compétences, tout d’abord, les OPCA sont désormais habilités à collecter les versements des entreprises donnant lieu à exonération de la taxe d’apprentissage, en cohérence avec l’ambition de rapprochement avec les organismes paritaires collecteurs de la taxe d’apprentissage (OCTA), ainsi que les fonds dus au titre du congé individuel de formation (CIF).

S’agissant de leurs obligations de financement, ensuite, les OPCA financent les formations effectuées au titre du compte personnel de formation pour les salariés.

S’agissant de leurs missions, aussi, l’activité de conseil des OPCA est consacrée, prenant notamment la forme d’un service de proximité au bénéfice des très petites entreprises, petites et moyennes entreprises et des entreprises du milieu agricole et rural et devant permettre d’améliorer l’information et l’accès des salariés de ces entreprises à la formation professionnelle. Cette mission de conseil, rompant avec la fonction originelle de seule collecte des financements, facilite l’information sur le compte personnel de formation et sur la mise en place des entretiens professionnels. En outre, la mission de contrôle de la qualité des formations dispensées est également attribuée aux OPCA pour les formations qu’ils financent.

S’agissant de leurs règles de gestion, enfin, cinq sections sont instituées dans la comptabilité de chaque OPCA, consacrées au financement du FPSPP, du CIF, du CPF, des actions de professionnalisation et du plan de formation. Cette dernière section est elle-même divisée en quatre sous-sections qui regroupent les sommes respectivement versées par les employeurs de moins de 10 salariés, ceux de 10 à moins de 50 salariés, ceux de 50 à moins de 300 salariés et ceux d’au moins 300 salariés. Cette dernière subdivision se justifie par les différences de part consacrée par chaque entreprise au plan de formation selon son effectif. En outre, le renforcement du rôle des conventions d’objectifs et de moyens (COM) et l’interdiction d’assurer un financement direct ou indirect des organisations syndicales et professionnelles coïncident avec l’exigence d’une gestion efficiente et transparente des financements récoltés au titre de la formation professionnelle. Ainsi, le décret du 24 octobre 2014 précité encadre les frais de gestion et d’information des OPCA dans un plafond déterminé dans la COM et compris entre un minimum et un maximum déterminés en pourcentage de la collecte de l’OPCA par arrêté du ministre chargé de la formation professionnelle.

Plus spécifiquement, au terme des auditions menées, les rapporteurs soulignent les conséquences de l’entrée en vigueur des dispositions relatives à la gestion de la trésorerie. Il est aujourd’hui prévu que les disponibilités dont un OPCA peut disposer en fin d’année au titre du CPF – hors dotations aux amortissements et provisions – ne peuvent excéder le quart des charges comptabilisées au cours du dernier exercice clos et, pour les autres sommes, le tiers de ces charges. Lorsqu’elles excèdent ce plafond, les disponibilités sont alors versées au FPSPP. Or, les flux de trésorerie entre les OPCA et les organismes de formation s’effectuent en grande partie en début d’année civile. Si les formations sont bien effectuées durant une année N, les demandes de remboursement des entreprises s’effectuent souvent en début d’année N+1. La base de calcul correspond ainsi aux charges comptabilisées, et non aux dépenses engagées. En conséquence, les OPCA disposent fréquemment d’excédents de trésorerie au 31 décembre de l’année N ne reflétant pourtant pas la réalité de leur activité durant cette année. Cette situation illustre le décalage entre deux temporalités : le cycle des dépenses comptables des OPCA, retracées sur une année civile ; le cycle des dépenses de formation, effectuées sur une année universitaire. Le rythme d’engagement des OPCA ne correspond ainsi pas à celui d’une année civile. Il conviendra donc de mesurer le risque d’un sur-versement au FPSPP une fois la première année d’application de la contribution unique achevée et, le cas échéant, d’élever le seuil prévu par la loi.

Les rapporteurs attirent également l’attention sur la restructuration en cours du paysage des OPCA. La redéfinition de leur financement et de leurs missions s’accompagne nécessairement d’une évolution de leur nombre et de leur organisation. Les OPCA ont ainsi défini différemment l’appropriation de leurs missions et la conception de leur rôle lors des auditions, laissant apparaître l’image d’OPCA à géométrie variable. Aujourd’hui au nombre de 20, les OPCA ajustent leurs financements et ont, pour trois d’entre eux, engagé des plans de sauvegarde de l’emploi. Le suivi de leur rôle et de l’évolution de leur paysage sera donc l’un des enjeux clefs de prochains mois.

Ayant les compétences d’un OCTA et d’un OPACIF, les OPCA ont vocation à devenir l’outil de toute une branche ou d’un secteur d’activité.

Les rapporteurs attirent toutefois l’attention sur la tension dans l’action des OPCA entre deux types d’activités :

– d’une part, une activité de service public, dans le cadre de leur rôle de collecteur unique des contributions dues au titre de la formation professionnelle ;

– d’autre part, une activité complémentaire, de nature commerciale, de prestataire de services pour les entreprises et les branches ainsi que pour les actifs.

Les OPCA doivent donc concilier leur fonction historique d’opérateur de service public avec leur fonction commerciale, notamment au service des organisations professionnelles d’employeurs fondatrices. Afin d’éviter toute confusion, il apparaît nécessaire de clarifier juridiquement les missions et les fonctions des OPCA.

Proposition n° 2 :

Clarifier la distinction entre les activités d’un OPCA relevant du service public et celles répondant à une logique de prestation commerciale.

3. La consécration législative des OPACIF

La loi du 5 mars 2014 a introduit dans le code du travail un chapitre consacré aux organismes paritaires agréés au titre du congé individuel de formation (OPACIF), permettant d’en définir les missions, les moyens et le statut et tirant ainsi les conséquences de la création d’une contribution unique.

Leurs compétences, tout d’abord, sont recentrées sur l’attribution des formations dans le cadre d’un CIF et l’accompagnement des salariés et des demandeurs d’emploi ayant été titulaires d’un contrat déterminé. À l’inverse, la collecte de la contribution due au titre du CIF est désormais effectuée par les seuls OPCA, dans le cadre de la nouvelle contribution unique. Les OPACIF perçoivent le pourcentage de la contribution unique qui leur est destiné par le biais d’un versement des OPCA, correspondant à 0,2 % de la masse salariale des entreprises d’au moins 50 salariés et à 0,15 % de la masse salariale des entreprises comprenant entre 10 et 49 salariés. Ils continuent également de bénéficier du 1 % CIF-CDD prélevé par les OPCA, dans des conditions définies par le décret du 24 octobre 2014 précité.

Leurs modalités d’agrément, ensuite, sont précisées par la loi afin de garantir le respect de critères homogènes avec ceux prévus pour les OPCA, qu’il s’agisse de la capacité financière, de la performance de gestion, de la cohérence du champ d’intervention géographique et professionnel ou interprofessionnel ou de l’aptitude à assurer des services de proximité au bénéfice des très petites, petites et moyennes entreprises. Une fois agréés, les OPACIF voient leurs frais de gestion définis par les conventions d’objectifs et de moyens et doivent, en outre, respecter les mêmes règles de gestion que les OPCA en matière d’incompatibilité de fonction des administrateurs avec l’exercice d’une fonction dans un établissement de formation ou de crédit.

Leurs missions, enfin, sont rappelées dans la loi et complétées par la mise en œuvre du conseil en évolution professionnelle et par l’accompagnement des salariés et des demandeurs d’emploi dans leur projet professionnel lorsque celui-ci nécessite la réalisation d’une action de formation, d’un bilan de compétence ou d’une validation des acquis de l’expérience. Ils s’assurent également de la qualité des formations financées, au même titre que les OPCA. Dans le cadre de leurs missions, les OPACIF engagent des dépenses relatives à l’information des salariés sur le CIF, au conseil en évolution professionnelle ou aux rémunérations des salariés durant leur CIF.

4. La montée en puissance du FPSPP

Créé par la loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) contribue au financement d’actions de formation à destination des salariés et des demandeurs d’emploi les plus fragilisés, et constitue en ce sens un outil central de qualification et de requalification de ces actifs. L’article 11 de la loi du 5 mars 2014 a modifié ses règles de financement afin d’en garantir la pérennité et d’accompagner la mise en œuvre du compte personnel de formation (CPF).

Le rapport revient sur la montée en puissance du FPSPP dans la partie dédiée à la gouvernance de la formation professionnelle, s’agissant à la fois de ses missions et de ses financements. Les rapporteurs soulignent néanmoins dès à présent la mutation du FPSPP en une forme de « méta-OPCA », ayant un rôle renforcé dans la mutualisation des financements. Il constitue aujourd’hui un lieu central de régulation de la formation professionnelle, en particulier à destination des demandeurs d’emploi et de l’alternance des jeunes. En publiant des appels à projets auxquels les OPCA doivent répondre sous forme de demande d’aide financière, le FPSPP assure une meilleure redistribution des financements. Son budget – 1,3 milliard d’euros en 2015 – lui permet de financer à grande échelle ses priorités, avec en premier lieu l’accès à la qualification des jeunes et la reconversion des salariés licenciés. Il constitue également une instance déterminante dans la promotion du compte personnel de formation, en particulier à destination des demandeurs d’emploi dans le cadre du financement d’abondements. Les rapporteurs souhaitent donc que l’activité croissante du FPSPP, associée à des financements devenus pérennes, se poursuive.

Les fonds dédiés à l’insertion par l’activité économique : un impact négatif à corriger

La réforme de l’insertion par l’activité économique (IAE) a modifié le régime juridique de cette dernière en supprimant en particulier le recours aux contrats aidés dans les ateliers et chantiers d’insertion (ACI). Ainsi, depuis le 1er juillet 2014, seuls des contrats à durée déterminée d’insertion (CDDI) peuvent être conclus pour un ACI.

La loi du 5 mars 2014 a eu pour effet collatéral de réduire les fonds consacrés à l’IAE, s’ajoutant ainsi à une moindre mutualisation. Or, le législateur a précisé que les personnes en IAE ont un double statut : salariés à part entière, avec les droits afférents, ils peuvent également bénéficier de dispositifs prévus pour les demandeurs d’emploi. Ces salariés ne bénéficient toutefois pas de cette possibilité dans la pratique. Une enveloppe financière du FPSPP pourrait donc être mobilisée pour abonder les OPCA concernés par l’IAE afin de répondre à cette situation.

III. LA MISE EN PLACE D’OUTILS PERSONNELS ET QUALIFIANTS AU SERVICE DE LA SÉCURISATION DES PARCOURS PROFESSIONNELS

La loi du 5 mars 2014 a fixé comme objectif premier l’effectivité de l’accès à la formation, au service de la qualification individuelle, de la sécurisation des parcours et de la compétitivité des entreprises. Loin d’être un droit virtuel, cet accès à la formation repose sur des garanties d’utilisation telles que l’entière transférabilité des droits, leur gestion en dehors de l’entreprise, la rénovation de l’accompagnement à la validation des acquis de l’expérience (VAE) ou l’obligation d’entretien professionnel.

Parmi ces garanties, les rapporteurs ont souhaité évaluer la mise en œuvre des dispositifs clefs de la politique d’accès à la formation, avec en premier lieu le compte personnel de formation (CPF). Quelques mois après l’entrée en vigueur de ces dispositifs, et au terme des auditions menées, un premier bilan peut être dressé afin de faire apparaître les avancées permises par ces outils en termes de sécurisation et de qualification professionnelles. N’ayant pas encore vu leur potentiel pleinement exploité, ces outils doivent néanmoins aujourd’hui faire l’objet d’une appropriation renforcée par la population active et pourraient ainsi voir certains de leurs paramètres ajustés.

A. LE COMPTE PERSONNEL DE FORMATION, PILIER DE LA QUALIFICATION ET DE LA SÉCURISATION DES PARCOURS

1. La création d’un compte unique comme levier de la sécurisation des parcours professionnels

a. L’entrée en vigueur du compte personnel de formation

Consacré comme un droit depuis l’accord national interprofessionnel (ANI) du 5 décembre 2003, l’accès à la formation est longtemps demeuré virtuel, en décalage avec les attentes des salariés et des employeurs en matière de qualification. Le droit individuel à la formation (DIF) n’a pas atteint les objectifs qui lui étaient dévolus, qu’il s’agisse de l’égal accès à la formation, de la sécurisation des parcours professionnels ou de l’acquisition de niveaux supplémentaires de qualification. Son échec se mesurait à l’aune de sa très faible utilisation, avec un taux d’accès limité à 6,5 % en 2010 (3).

La faible mobilisation du DIF s’expliquait en premier lieu par l’obligation d’accord de l’employeur : subordonnés à celui-ci en raison de son pouvoir de direction et de la nature même de la relation de travail, peu de salariés se sont approprié ce droit. La distinction claire entre les actions de formation initiées par l’employeur et celles mises en œuvre à l’initiative du salarié en ressortait affaiblie.

Le DIF n’étant pas suffisamment mobilisé, au terme d’une longue réflexion menée à la fois par les partenaires sociaux, les pouvoirs publics et la société civile, la loi du 14 juin 2013 de sécurisation de l’emploi a posé les grands principes du compte personnel de formation. Précisés dans son article 5, ces principes ont ensuite été enrichis et ajustés par l’article 1er de la loi du 5 mars 2014, reprenant les dispositions adoptées par les partenaires sociaux lors de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 14 décembre 2013. Avec une entrée en vigueur prévue au 1er janvier 2015, les modalités pratiques d’utilisation du CPF sont codifiées au chapitre III du titre premier du livre premier de la sixième partie du code du travail et précisent à la fois les conditions d’ouverture et de fermeture du compte et celles d’utilisation des heures de formation.

S’agissant de la possession d’un compte, tout d’abord, le CPF est ouvert pour toute personne âgée d’au moins seize ans lors de son entrée sur le marché du travail, qu’elle occupe un emploi, en recherche un ou soit accompagnée dans un projet d’orientation ou d’insertion professionnelles ou accueillie dans un établissement et service d’aide par le travail. Une exception est toutefois prévue pour tout jeune âgé d’au moins quinze ans, dès lors qu’il signe un contrat d’apprentissage, à condition d’avoir accompli la scolarité du premier cycle de l’enseignement secondaire. Le compte est fermé lorsque son titulaire est admis à faire valoir ses droits à la retraite. Si l’objectif de formation tout au long de la vie est maintenu, la mobilisation d’heures de formation via le CPF est toutefois recentrée sur la qualification et l’employabilité des actifs, qu’ils soient en emploi ou demandeurs d’emploi.

S’agissant des modalités d’utilisation des heures de formation, également, le titulaire du compte mobilise les heures à son initiative afin de financer les formations au moment voulu, en particulier lors des transitions professionnelles. Ces formations doivent garantir de manière effective l’évolution professionnelle et la progression d’au moins un niveau de qualification au cours de la vie professionnelle.

En vigueur depuis un an, le compte personnel de formation constitue aujourd’hui le principal instrument de sécurisation des parcours professionnels. Ni virtuel, ni limité dans le temps, ce compte offre trois garanties d’appropriation par les actifs de leurs droits : la transférabilité des droits, une mobilisation simplifiée des heures de formation disponibles et une information accrue sur les droits acquis.

b. Une transférabilité garantie des droits

La première garantie d’appropriation du compte personnel de formation par les actifs réside dans la transférabilité des droits. Dès lors que l’espérance de vie du compte est attachée au titulaire tout au long de son parcours d’actif, la déconnexion entre le CPF et l’étape professionnelle du titulaire est indispensable. L’article 1er de la loi du 4 mars 2014 garantit ainsi le maintien des heures de formation inscrites sur le compte en cas de changement de situation professionnelle ou de perte d’emploi de son titulaire.

Consacré dès la loi du 14 juin 2013 de sécurisation de l’emploi, le principe de pleine transférabilité des heures acquises rompt ainsi avec l’espérance de vie limitée des droits accumulés au titre du DIF. Les mécanismes de portabilité du DIF étaient en effet conditionnés à une utilisation des droits durant la période de chômage consécutive ou aux deux années suivant la prise de fonctions dans une nouvelle entreprise. À ces restrictions s’ajoutaient la nécessité pour l’employeur d’avoir inscrit sur le certificat de travail du salarié le montant des droits acquis au titre du DIF dans cette entreprise. Certaines ruptures du contrat de travail, telles que la démission ou le licenciement pour faute lourde, étaient en outre également exclues du dispositif de portabilité.

De manière immédiate, la transférabilité s’applique aussi aux droits accumulés au titre du DIF jusqu’au 31 décembre 2014. Ces heures de formation sont ainsi inscrites sur le CPF et pourront être mobilisées par leur titulaire jusqu’au 1er janvier 2021. Ces heures ne sont prises en compte ni pour le calcul du plafond, ni pour le mode de calcul des heures créditées sur le compte. Le décret n° 2014-1120 du 2 octobre 2014 relatif aux modalités d’alimentation et de mobilisation du compte personnel de formation précise les modalités de transfert des heures accumulées au titre du DIF vers le CPF : chaque employeur doit informer par écrit ses salariés du nombre total d’heures acquises et non utilisées au titre du DIF avant le 31 janvier 2015. Ces heures sont mobilisées en premier lieu et, le cas échéant, complétées, par les heures inscrites sur le CPF de l’intéressé dans la limite du plafond total de 150 heures.

c. Une mobilisation simplifiée des heures

L’effectivité de l’accès à la formation constitue l’une des principales finalités du compte personnel de formation, par opposition à l’insuffisante mobilisation du DIF et au caractère trop souvent virtuel de l’accès à la formation pour une majorité de salariés. Cette effectivité repose en premier lieu sur une mobilisation simplifiée des heures de formation.

Tout salarié peut mobiliser les heures créditées sur son compte sans accord de son employeur dès lors que la formation est suivie en dehors du temps de travail. Lorsque cette formation est suivie en tout ou partie pendant le temps de travail, l’accord préalable de l’employeur doit être demandé par le salarié concernant le contenu et le calendrier de la réponse. La réponse de l’employeur est notifiée au salarié dans des délais prévus par le décret n° 2014-1120 du 2 octobre 2014 précité, l’absence de réponse valant acceptation :

– tout salarié souhaitant bénéficier d’une formation suivie en tout ou partie pendant le temps de travail demande l’accord de l’employeur au minimum soixante jours avant le début de celle-ci ;

– lorsque la formation a une durée supérieure à six mois, la demande d’accord préalable de l’employeur doit lui être adressée au minimum cent vingt jours auparavant ;

– l’employeur dispose d’un délai de trente jours calendaires à compter de la réception de la demande pour notifier sa réponse au salarié.

Des exceptions à l’obligation d’accord préalable de l’employeur sur le contenu de la formation sont toutefois prévues, notamment lorsqu’il s’agit d’heures de formation financées au titre des heures créditées sur le CPF pour manquement à l’obligation d’organiser un entretien professionnel ou dans des cas prévus par accord de branche, d’entreprise ou de groupe. La mobilisation du CPF au titre de l’accompagnement à la validation des acquis de l’expérience ou de l’acquisition du socle de connaissances et de compétences constitue par ailleurs un droit opposable.

Dans le cas d’un demandeur d’emploi, son projet de formation est réputé validé au titre du projet personnalisé d’accès à l’emploi dès lors qu’il bénéficie d’un nombre d’heures inscrites sur son CPF suffisant pour suivre une formation. Dans le cas contraire, Pôle emploi ou toute autre institution chargée du conseil en évolution professionnelle étudie le projet de formation et peut mobiliser les financements complémentaires en conséquence.

d. Un accès renforcé à l’information

L’effectivité de l’accès à la formation repose également sur la refonte des outils d’information relatifs aux CPF. Tout titulaire d’un CPF peut consulter son nombre d’heures créditées en accédant à un service en ligne gratuit. Le système d’information du compte personnel de formation (SI-CPF), créé par l’article L. 6323-8 du code du travail, permet ainsi la gestion des droits à la formation ainsi que l’accès aux informations sur les formations éligibles et aux abondements complémentaires pouvant être sollicités. Pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), le décret n° 2014-1717 du 30 décembre 2014 (4) précise les caractéristiques de ce système d’information, notamment au regard de l’objectif de protection de la confidentialité des données personnelles. Mis en œuvre et géré par la Caisse des dépôts et consignations, ce nouveau système cumule, pour chaque titulaire d’un CPF, des données relatives à la personne – numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques (NIR), date et lieu de naissance, adresse… –, aux heures comptabilisées – périodes d’activité et d’inactivité, SIRET de l’employeur, temps de travail… – et au dossier de formation – formations éligibles, historique des opérations effectuées sur le compte… Afin de garantir la protection des données à caractère personnel, outre les agents de la Caisse des dépôts et consignations, seuls les agents des collectivités et organismes chargés du financement des formations, ceux des conseils en évolution professionnelle et ceux des employeurs assurant la gestion du financement des heures de formation acquises au titre du DIF sont habilités à accéder à ces données dans les limites strictement nécessaires à l’exercice de leurs missions. Les droits d’accès et de rectification s’exercent auprès de la Caisse des dépôts et consignations.

L’accès à l’information est également facilité par la création d’un passeport d’orientation, de formation et de compétences, accessible par son titulaire et recensant les formations et les qualifications suivies dans le cadre de la formation initiale ou continue et les acquis de l’expérience professionnelle. Le décret du 30 décembre 2014 précité en a précisé les modalités d’application et le contenu, restreignant son accès aux mêmes personnes que le SI-CPF dans son ensemble.

Les rapporteurs soulignent la diligence et l’efficacité du travail mené par la Caisse des dépôts et consignations, ayant permis une ouverture du portail d’information du CPF dès novembre 2014. Ces délais ont à la fois permis aux salariés et aux demandeurs d’emploi d’ouvrir un compte dès janvier 2015, et aux opérateurs – tels que les OPCA ou Pôle Emploi – de monter des dossiers de formation et de gérer des abondements en heures. Le portail CPF a ainsi été consulté par près de 9 millions de visiteurs uniques en 2015. Des équipes de gestion et de téléconseillers ont en outre été déployées, dans le cadre notamment de la mise en place d’une « hotline » pour le grand public. L’avis des utilisateurs est toutefois plus nuancé quant à la convivialité et à la fonctionnalité du site Internet, heureusement en cours de rénovation.

2. La diversité des abondements

a. L’alimentation du compte en heures de formation

Le compte personnel de formation est alimenté en heures de formation, reprenant ainsi le principe posé par la loi du 14 juin 2013 de sécurisation de l’emploi. L’absence de comptabilisation en fonction du coût de l’heure de formation assure le maintien des droits acquis par chaque actif à plusieurs titres. D’une part, alors que le DIF reposait sur un forfait réglementaire de l’heure de formation, l’absence de monétisation des heures permet de maintenir des droits en dehors de l’évolution du niveau des prix – et notamment du prix des formations. D’autre part, la comptabilisation en heures permet également de procéder à un choix de formation en fonction de son adéquation avec les besoins du salarié et de l’intérêt en termes de qualification – et non fonction de la seule attractivité financière d’une formation. Enfin, cette comptabilisation témoigne d’un changement dans l’appréhension des dépenses de formation, effectuées selon l’intérêt de la formation en soi plutôt que selon son coût, et relevant à ce titre davantage des dépenses d’investissement que de fonctionnement.

Les règles d’alimentation du CPF sont définies aux articles L. 6323-10 à L. 6323-15 du code du travail. Jusqu’à l’acquisition d’un crédit de 120 heures, le compte est alimenté à hauteur de 24 heures par année de travail. Au-delà, et jusqu’à un plafond de 150 heures, le compte est alimenté de 12 heures par année de travail. S’il se rapproche du DIF par son mécanisme d’alimentation, le CPF a toutefois un plafond supplémentaire de 30 heures permettant de financer des formations plus longues. Cette modalité d’alimentation du CPF s’effectuant sur une hypothèse de temps complet, les salariés à temps partiel – sur une partie ou l’ensemble de l’année – voient leur compte alimenté à due proportion du temps de travail effectué. Toutefois, des dispositions plus favorables peuvent être prévues par un accord d’entreprise, de groupe ou de branche prévoyant un financement spécifique à cet effet. L’application de ce dispositif est précisée par le décret n° 2014-1120 du 2 octobre 2014 précité. Pour chaque salarié concerné, l’entreprise abonde le CPF du nombre d’heures supplémentaires prévu par l’accord d’entreprise, de groupe ou de branche multiplié par un montant forfaitaire déterminé par cet accord. Ce montant forfaitaire ne peut être inférieur à 13 euros.

Lorsque le titulaire du CPF recherche un emploi, son compte n’est plus alimenté avant utilisation des heures y figurant.

b. La prise en compte des publics spécifiques

Outre les modalités génériques d’alimentation du CPF en heures de formation, des abondements spécifiques sont prévus par la loi du 5 mars 2014 afin de garantir l’adaptation du volume d’heures de formation aux titulaires du compte.

S’agissant des travailleurs handicapés, tout d’abord, accueillis dans un établissement et service d’aide par le travail (ESAT), des abondements complémentaires sont prévus au III de l’article L. 6323-4 du code du travail. Les modalités d’application et de détermination de ces abondements complémentaires sont toutefois renvoyées à un décret n’ayant pas été publié à ce jour. Au terme de l’article 26 de l’accord national interprofessionnel du 14 décembre 2013, cet abondement effectué par l’employeur au bénéfice des travailleurs handicapés doit pouvoir être déductible de la contribution annuelle due à l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH) par les entreprises de plus de 20 salariés n’atteignant pas le taux de 6 % de travailleurs handicapés ou n’ayant pas signé un accord d’entreprise portant sur l’emploi et le handicap. Cette déductibilité doit aujourd’hui être précisée par voie réglementaire, les partenaires sociaux ayant proposé un plafond de 20 %.

S’agissant des congés prévus à l’article L. 6232-12 du code du travail, ensuite, l’absence du salarié ne saurait avoir pour effet d’interrompre l’alimentation du compte personnel de formation jusqu’au plafond de 150 heures. Ainsi, les périodes d’absence des salariés pour un congé de maternité, de paternité et d’accueil de l’enfant, d’adoption, de présence parentale ou de soutien familial, pour un congé parental d’éducation ou pour une maladie professionnelle ou un accident du travail sont intégralement prises en compte pour le calcul des heures créditées sur le CPF.

c. Les abondements supplémentaires

Plutôt qu’un simple « plafond » au-delà duquel le compte personnel de formation ne serait plus abondé, le seuil de 150 heures correspond davantage à un « socle » au-delà duquel plusieurs abondements peuvent être effectués. Ces abondements supplémentaires n’entrent en compte ni dans le mode de calcul des heures créditées sur le compte du salarié chaque année ni dans celui du plafond.

Le CPF peut tout d’abord être abondé en application d’un accord d’entreprise ou de groupe, un accord de branche ou un accord conclu par les organisations syndicales de salariés et d’employeurs signataires de l’accord constitutif d’un organisme collecteur paritaire agréé interprofessionnel. Cet accord porte notamment sur la définition des formations éligibles et des salariés prioritaires tels que les salariés les moins qualifiés ou les salariés à temps partiel. Il est donc possible de prévoir des abondements plus favorables pour les salariés ayant les plus bas niveaux de qualification.

Le CPF est également abondé dans le cas du non-respect par une entreprise d’au moins cinquante salariés de l’obligation prévue à l’article 5 de la loi du 5 mars 2014 et codifiées à l’article L. 6315-1 du code du travail : il s’agit ici de l’« abondement correctif ». Cette obligation consiste en un entretien professionnel effectué tous les deux ans et prenant la forme, tous les six ans, d’un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié. Cet état des lieux doit notamment permettre de vérifier si le salarié a suivi au moins une action de formation, a acquis des éléments de certification par la formation ou par une validation des acquis de son expérience, et a bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle. Si le salarié n’a pu bénéficier d’au moins deux de ces trois mesures et de l’état des lieux prévu tous les six ans, son compte est abondé de cent heures supplémentaires. S’il s’agit d’un salarié à temps partiel, le volume abondé est porté à cent trente heures. En complément, l’entreprise verse à l’organisme collecteur paritaire agréé une somme forfaitaire correspondant à ces heures. L’application de ces dispositions est précisée par le décret n° 2014-1120 du 2 octobre 2014 précité : l’entreprise doit verser à l’organisme paritaire collecteur agréé le nombre d’heures abondées multiplié par un montant forfaitaire de 30 euros. En cas de versement insuffisant, les agents du contrôle mettent en demeure l’entreprise de se conformer à ses obligations. À défaut, le double des sommes dues doit être versé au Trésor public.

Le CPF peut aussi être abondé au titre de l’utilisation du compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P), en application de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites. Ainsi, un point inscrit sur le compte personnel de prévention de la pénibilité ouvre droit à 25 heures de prise en charge de tout ou partie des frais d’une action de formation professionnelle continue en vue d’accéder à un emploi non exposé ou moins exposé. L’utilisation des points inscrits sur ce compte au titre de la formation constitue d’ailleurs une obligation s’agissant des vingt premiers points inscrits pour les assurés nés à partir du 1er janvier 1963 – cette obligation ne s’appliquant pas pour les assurés nés avant le 1er janvier 1960, et ne s’appliquant que pour les dix premiers points concernant les assurés nés entre le 1er janvier 1960 et le 31 décembre 1962. Mis en œuvre par la Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS), l’ensemble de ces dispositions est décliné dans le décret n° 2014-1156 du 9 octobre 2014 relatif à l’acquisition et à l’utilisation des points acquis au titre du compte personnel de prévention de la pénibilité.

Ces modalités de financement des formations des salariés au titre du C3P ont, en outre, été simplifiées dans le cadre de la publication de deux arrêtés à la fin de l’année 2015, visant notamment à faciliter le remboursement des frais de formation engagés par l’entreprise ou l’organisme de formation. D’une part, un arrêté du 30 décembre 2015 (5) définit les informations devant être transmises par l’organisme prenant en charge les frais de formation professionnelle. Ces informations regroupent notamment les modalités d’identification du titulaire du C3P, l’identification du suivi effectif et des dates de la formation par l’assuré et le nombre d’heures et le coût de la formation. D’autre part, un arrêté du 29 décembre 2015 (6) précise que le montant de l’heure de formation financée est fixé au regard du coût réel de la formation, dans la limite d’un plafond qui s’élève à 12 euros.

Enfin, lorsque la durée de la formation recherchée est supérieure au nombre d’heures inscrites sur le CPF, des « abondements complémentaires » peuvent être effectués afin d’assurer le financement de la formation concernée. Ces abondements sont liés à un projet de formation et ne figurent sur le compte que lors de leur utilisation, sans y être inscrites. Leur mobilisation entraîne alors le débit de tous les droits inscrits sur le compte, avec l’accord exprès du titulaire. Les heures complémentaires peuvent être financées par l’employeur, le titulaire du compte, un organisme paritaire collecteur agréé (OPCA), un organisme paritaire agréé au titre du congé individuel de formation (OPACIF), la CNAVTS, l’État, les régions, Pôle Emploi ou l’association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées (AGEFIPH). Ces dépenses permettent d’assurer une meilleure adaptation du volume d’heures disponibles au projet du salarié ou du demandeur d’emploi.

3. Une appropriation progressive

Au terme des auditions menées et des données statistiques collectées par la Direction générale de l’emploi et de la formation professionnelle (DGEFP), un premier bilan de l’application du compte personnel de formation peut être dressé. Néanmoins, après une seule année d’application, les rapporteurs soulignent le manque de recul et l’insuffisance de données et insistent en ce sens sur la nécessité de procéder à une évaluation in itinere.

L’enjeu central est de mesurer la capacité du CPF à répondre à sa mission première : être l’outil d’acquisition d’un premier niveau de qualification ou de progression d’un niveau de qualification supplémentaire pour tout actif.

Le rapport que doit remettre le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP) chaque année constituera une source centrale pour évaluer, et le cas échéant ajuster, le dispositif mis en œuvre.

Dans l’attente de la publication de ce rapport, les données chiffrées recueillies auprès de la DGEFP permettent de faire un premier bilan de l’application du CPF sur une année. Ainsi, 2 600 000 CPF ont été ouverts par des salariés et plus de 286 000 formations ont été validées. Parmi ces formations, plus des trois quarts – 79 % – ont été suivies par des demandeurs d’emploi. En termes d’heures de formation suivies, cette différence est encore plus prononcée, avec plus de 90 % des heures de formation financées à destination des demandeurs d’emploi. Ces premières données sont d’autant plus encourageantes qu’elles ne reflètent pas une année pleine de mise en œuvre du CPF. En effet, l’utilisation du CPF n’a réellement débuté qu’à l’été 2015, comme l’illustre le graphique ci-dessous. L’intervalle pertinent d’évaluation du dispositif correspond donc davantage au second semestre 2015.

Source : Caisse des dépôts et consignations.

Les rapporteurs manient ces données statistiques avec précaution et attirent l’attention sur plusieurs précautions méthodologiques. D’une part, le CPF n’a réellement été mis en œuvre qu’à partir du printemps 2015 ; le recul d’une année pleine fait donc défaut. Un nouveau bilan devra être effectué à l’été 2016 afin de dresser les conclusions d’une première année d’utilisation effective du dispositif. D’autre part, le poids majoritaire des demandeurs d’emploi dans l’utilisation du dispositif, conforme aux objectifs fixés par le législateur, s’explique en partie par l’ouverture de CPF par les demandeurs d’emploi en vue d’abondements initiaux financés par le FPSPP de 100 heures à partir du printemps 2015. Ainsi, un budget de 170 millions d’euros a été mobilisé en 2015 afin d’alimenter de 100 heures le CPF de 160 000 demandeurs d’emploi. Ce dispositif est reconduit en 2016 à hauteur de 285 millions d’euros. L’ampleur du nombre de dossiers validés pour les demandeurs d’emploi soulève la question de leur consentement explicite lors de l’ouverture et de l’utilisation du CPF (7), cette notion étant pourtant centrale dans l’esprit du législateur. Il convient donc de rester particulièrement vigilant sur ces données et de garantir à l’avenir le plein assentiment de chacun, conformément aux objectifs d’autonomie et de responsabilisation des personnes formées et à rebours d’une démarche de prescription des actions de formation.

S’agissant de la durée des formations, également, les salariés ont suivi des formations d’une durée moyenne de 148 heures en 2015. Cela témoigne du suivi de formations plus longues facilitant la qualification des actifs, par rapport à une durée moyenne plus courte auparavant avec le DIF. Cette durée s’élève en 2015 à 575 heures pour les demandeurs d’emploi. Néanmoins, la durée moyenne des formations en 2015 ne reflète pas réellement le poids pris par le CPF. En effet, vide lors de son ouverture en 2015, le CPF n’a pu être mobilisé en dehors des heures transférées au titre du DIF. Il conviendra ainsi de mesurer la part des heures CPF dans la durée totale des formations une fois la vague d’abondements effectuée début 2016 au titre de l’année 2015 achevée.

Les auditions ont permis de souligner l’application rapide des nouvelles dispositions dans les grandes entreprises. Davantage de difficultés sont toutefois apparues dans les entreprises de moins de 50 salariés, raisonnant parfois encore à partir de catégories anciennes, d’autant plus qu’il s’agit d’un véritable changement de culture dans l’appropriation de la formation professionnelle par l’entreprise. Ni DIF amélioré, ni CIF diminué, le CPF constitue un outil totalement neuf qui répond à sa propre logique et produit une nouvelle culture.

L’appropriation du CPF par les actifs est donc progressive et devrait se renforcer en 2016. Pour la faciliter, les rapporteurs insistent sur l’utilité d’une campagne de communication adaptée aux objectifs du compte. Déployée en octobre 2015 uniquement sur les supports radiophoniques et Internet, le dispositif du Gouvernement n’a pas eu les effets escomptés et pourrait donc être renouvelé en 2016, une fois les premiers abondements sur les comptes effectués.

Proposition n° 3 :

Mettre à profit la première vague d’alimentation des CPF au titre de 2015 pour engager une véritable campagne de communication audiovisuelle, rappelant à tout salarié d’ouvrir son compte.

B. LE CONSEIL EN ÉVOLUTION PROFESSIONNELLE, LA VALIDATION DES ACQUIS DE L’EXPÉRIENCE ET L’ENTRETIEN PROFESSIONNEL : DES OUTILS AU CœUR D’UNE DÉMARCHE DE PARCOURS

1. Le conseil en évolution professionnelle au service de l’employabilité

Aux côtés du compte personnel de formation, la loi du 5 mars 2014 prévoit un second outil au service de la qualification et de l’employabilité : le conseil en évolution professionnelle (CEP). Placé au cœur de la gouvernance quadripartite créée par la loi, ce conseil vise à faciliter la sécurisation des trajectoires professionnelles. Ses premiers mois de mise en œuvre interrogent toutefois quant à la clarté de son pilotage et à l’adéquation de ses moyens à ses missions. Bien conçu dans les textes, le CEP reste donc fragile dans sa mise en œuvre.

a. Un outil de maîtrise du parcours professionnel

Au cœur des logiques de parcours et de mobilité, le conseil en évolution professionnelle a été créé par la loi du 14 juin 2013 de sécurisation de l’emploi. Ses missions et ses modalités de fonctionnement ont ensuite été définies à l’article 22 de la loi du 5 mars 2014, puis déclinées par voie réglementaire.

L’article L. 6111-6 du code du travail prévoit ainsi que toute personne peut bénéficier, tout au long de sa vie professionnelle, d’un conseil en évolution professionnelle dont l’objectif est de favoriser l’évolution et la sécurisation de son parcours professionnel. Mis en œuvre dans le cadre du service public régional de l’orientation, ce conseil est gratuit et remplit deux missions. D’une part, il accompagne les projets d’évolution professionnelle, en lien avec les besoins économiques existants et prévisibles dans les territoires. Il correspond donc à un processus d’appui à l’élaboration et à la concrétisation des projets personnels d’évolution professionnelle des actifs. D’autre part, il facilite l’accès à l’information et identifie à ce titre les qualifications et les formations répondant aux besoins du bénéficiaire du conseil ainsi que les financements disponibles. En ce sens, il simplifie et amplifie l’utilisation du compte personnel de formation : les deux dispositifs sont donc liés, orientés vers les mêmes objectifs de sécurisation et de qualification.

L’offre de service du CEP, renvoyée par la loi au pouvoir réglementaire, a été définie par l’annexe de l’arrêté du 16 juillet 2014 du ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social.

L’arrêté du 16 juillet 2014 fixant le cahier des charges relatif au conseil en évolution professionnelle prévu à l’article L. 6111-6 du code du travail

Le cahier des charges du CEP, dont le contenu a été élaboré de manière concertée par le groupe quadripartite rassemblant l’État, les régions et les organisations professionnelles et syndicales, a été publié à l’été 2014. Il rappelle les objectifs du CEP et ses opérateurs et prévoit que le contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles (CPRDFOP) fixe des objectifs en matière de conseil et d’accompagnement en orientation et définit un schéma prévisionnel de développement du service public de l’orientation. Deux ans après la publication de l’arrêté, les CREFOP devront effectuer une première évaluation de la montée en charge du dispositif et du service rendu aux personnes, selon une méthodologie commune arrêtée au sein du CNEFOP.

Le cahier des charges recense ensuite les quatre catégories de règles devant être respectées par ses opérateurs et correspondant successivement :

– aux finalités et aux publics bénéficiaires du CEP, avec notamment l’accessibilité du dispositif à tout actif quel que soit son statut et l’articulation du CEP avec les entretiens professionnels ;

– à l’offre de services du CEP, avec la définition de trois niveaux de conseil : un accueil individualisé, un conseil personnalisé et un accompagnement à la mise en œuvre du projet professionnel ;

– aux principes et aux modalités de mise en œuvre du CEP, dans le respect des principes du service public, des règles de confidentialité et d’impartialité et de la logique d’initiative personnelle ;

– au suivi de la mise en œuvre du CEP, assuré conjointement par l’État au plan national – en lien avec l’Association des régions de France (ARF) – et par les régions au niveau local à partir d’indicateurs devant satisfaire à des exigences de qualité.

Ce conseil est délivré au niveau local, en dehors de l’entreprise, par cinq institutions identifiées par la loi : les organismes de placement spécialisés dans l’insertion professionnelle des personnes handicapées (réseau Cap emploi), Pôle emploi, les missions locales pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes, les organismes paritaires collecteurs agréés au titre du congé individuel de formation (OPACIF), l’Association pour l’emploi des cadres (APEC) et les opérateurs régionaux désignés par la région après concertation au sein du bureau du comité régional de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles (CREFOP). Son financement est assuré par chacun de ces opérateurs lorsqu’il le met en œuvre, en s’appuyant le cas échéant sur les fonds des régions. Effectué en dehors de l’entreprise, le CEP doit garantir l’accès à un conseil de qualité à tout salarié, en particulier ceux des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises qui ne disposent pas d’un tel accès à l’information dans leur entreprise.

Le dispositif de CEP est complété par la création d’un système d’information national portant sur l’offre de formation professionnelle couvrant l’ensemble du territoire national. Le décret n° 2015-742 du 24 juin 2015 relatif au système d’information sur l’offre de formation professionnelle en a précisé les modalités de mise en œuvre, et notamment l’information des opérateurs du service public de l’emploi et du CEP par les opérateurs de formation quant aux sessions d’information des demandeurs d’emploi préalables à leur entrée ainsi que les modalités de leur inscription en formation. L’information sur l’offre de formation est diffusée dans un langage de référence commun appelé « Langage harmonisé d’échange d’informations sur l’offre de formation » (LHÉO). Ce langage, défini dans l’arrêté du 16 juillet 2014 précité, est actualisé de façon régulière et est mis à la disposition du public sur Internet. Il est entré en vigueur en novembre 2014.

b. Faciliter le recours au CEP

Progressivement mis en place, le CEP doit désormais entrer dans une phase d’appropriation par la population active. Son ouverture à l’ensemble des actifs, quel que soit leur statut, concrétise l’objectif d’accès universel à la formation et lui donne toute sa place dans le cadre de la création prochaine du compte personnel d’activité (CPA).

Les opérateurs en charge du CEP se sont toutefois approprié inégalement le CEP. Si certains opérateurs comme l’APEC et les FONGECIF s’y sont rapidement consacré, aidés par leurs publics restreints, d’autres ont pris davantage de retard, selon le constat effectué lors des auditions par les rapporteurs. Pôle emploi doit accélérer la montée en compétences de ses conseillers et l’ouverture de l’accès à un conseil de proximité, au-delà de l’adaptation de ses services aux missions d’accompagnement et de conseil, et non plus à une simple mise en relation entre l’offre et la demande de travail. Cela est d’autant plus urgent que les demandeurs d’emploi constituent un public prioritaire pour le CEP et la redéfinition d’un parcours professionnel. Les missions locales, quant à elles, doivent davantage formaliser leur activité de conseil en évolution professionnelle et sont appelées à devenir un acteur central du dispositif. De nouveaux opérateurs pourraient par la suite mettre en œuvre le CEP dans le cadre de la création du CPA afin de l’adapter à cette nouvelle logique d’accompagnement global.

Trois caractéristiques spécifiques du CEP posent aujourd’hui question et appellent des améliorations.

D’une part, l’exigence de qualité homogène du service rendu lors d’un CEP doit s’appuyer sur l’émergence d’une culture commune, partagée entre les cinq opérateurs. La montée en charge du CEP, dans le cadre notamment de la mise en œuvre du plan « 500 000 formations », devra donc passer par une professionnalisation renforcée des personnels le mettant en œuvre.

D’autre part, l’articulation entre le CEP et le service public régional de l’orientation (SPRO) ne va pas de soi, en particulier concernant le premier niveau du CEP. L’arrêté du 16 juillet 2014 précité prévoit ainsi que l’accueil individualisé du bénéficiaire du CEP au premier niveau s’effectue dans des conditions communes à l’ensemble des membres du SPRO et que « les modalités de l’aiguillage sont formalisées en amont dans le cadre du SPRO ». À l’inverse, l’ensemble des niveaux du CEP sont mis en œuvre dans le cadre du SPRO. Conduit à dépasser le seul cadre de l’orientation dans le cadre du CPA, le CEP doit donc voir son positionnement institutionnel précisé afin d’éviter toute contradiction ou redondance. Le contenu du premier niveau du CEP mériterait en ce sens d’être précisé.

Enfin, afin de faciliter le recours au CEP, les modalités de conseil à distance pourraient être précisées. Si une part minimale du conseil et de l’accompagnement doit être effectuée en présentiel, il importe toutefois de faciliter l’accès dématérialisé au CEP, en cohérence avec la montée en puissance des tutorats et des formations en ligne. Le niveau III du CEP, correspondant à l’accompagnement à la mise en œuvre du projet professionnel, pourrait ainsi être en partie effectué à distance et ne pas se limiter à un échange physique.

Proposition n° 4 :

Accompagner la mise en œuvre du CEP en favorisant l’émergence d’une culture commune aux professionnels le dispensant, en clarifiant son articulation avec le SPRO et en aménageant un conseil à distance. Une partie des crédits du « plan 500 000 formations » pourrait par ailleurs être consacrée au déploiement du CEP, dès lors que ce dernier en conditionne la réussite.

2. Le soutien à la validation des acquis de l’expérience

L’inscription de la formation professionnelle dans une démarche de parcours s’appuie également sur la simplification de la validation des acquis de l’expérience (VAE), réformée par l’article 6 de la loi du 5 mars 2014 introduit à l’initiative du rapporteur du projet de loi à l’Assemblée nationale.

La VAE permet à toute personne d’obtenir un titre à finalité professionnelle ou un diplôme de l’enseignement supérieur en raison de son activité professionnelle exercée durant au moins trois ans, que cette activité soit salariée, non salariée, bénévole ou de volontariat. L’exercice de responsabilités syndicales ou d’une fonction de conseiller municipal, départemental ou régional peut également être retenu dans le cadre d’une VAE.

La loi du 5 mars 2014 a assoupli ce dispositif en reconnaissant les activités d’une durée de trois n’ayant pas été exercées de façon continue et en facilitant l’accès des moins qualifiés à la VAE. Pour ces derniers, n’ayant pas atteint le niveau V de qualification pour la préparation d’un diplôme ou d’un titre, les périodes de formation initiale ou continue en milieu professionnel sont prises en compte dans le calcul de la durée minimale d’activité requise.

L’encouragement à la reconnaissance de son activité repose également sur l’instauration d’un accompagnement à la VAE, ouvert à toute personne dont la candidature a été déclarée recevable. Cet accompagnement vise à faciliter la préparation du dossier et de l’entretien avec le jury.

Le décret n° 2014-1354 du 12 novembre 2014 portant diverses mesures relatives à la validation des acquis de l’expérience a précisé le périmètre et le contenu des actions de préparation à la VAE. Pouvant débuter dès que le dossier de demande de VAE a été déclaré recevable, l’accompagnement comprend un module de base composé d’une aide méthodologique à la description des activités et de l’expérience du candidat, à la formalisation du dossier et à la préparation de l’entretien. L’accompagnement peut s’étendre à l’assistance à l’orientation et à la recherche de financement pour la prise en charge d’une formation complémentaire dès lors qu’un représentant d’un des organismes membres du service public de l’orientation le propose. Les modalités du suivi statistique de cet accompagnement effectuées par le comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CREFOP) et le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP) dans leurs missions respectives sont, enfin, précisées.

Les rapporteurs soulignent l’apport central de la loi du 5 mars 2014 en matière d’accompagnement à la VAE. Reconnues unanimement lors des auditions menées, ces avancées renforcent l’approche par parcours et valorisent l’acquisition de compétences en particulier dans le cadre du bénévolat ou de l’engagement syndical ou politique. La mobilisation du CPF au titre de l’accompagnement à la VAE devrait favoriser le recours à celle-ci. Il est aujourd’hui nécessaire d’aller plus loin en encourageant la modularisation des formations et des certifications.

3. Le renforcement de l’entretien professionnel

L’article 5 de la loi du 5 mars 2014 a rénové les outils d’échange au sein de l’entreprise afin de mieux apprécier l’évolution des compétences des salariés et de favoriser leur progression.

L’entretien professionnel, plus précisément, est placé au cœur de cette démarche de dialogue et est porté à l’information du salarié dès son embauche. Créé par l’accord national interprofessionnel du 5 décembre 2003, cet entretien a pour objectif de permettre au salarié d’être acteur dans son parcours professionnel.

Consacré aux perspectives d’évolution professionnelle du salarié, l’entretien professionnel a lieu tous les deux ans et ne porte pas sur l’évaluation du travail effectué, se distinguant ainsi clairement de l’entretien d’évaluation. Tous les six ans, cet entretien prend la forme d’un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié, permettant notamment de vérifier si le salarié a suivi au moins une action de formation, a acquis des éléments de certification par la formation ou par la validation des acquis de l’expérience ou a bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle.

Lorsque le salarié d’une entreprise d’au moins cinquante salariés n’a bénéficié ni des entretiens professionnels ni d’au moins deux des trois mesures précitées, le CPF du salarié est crédité de cent heures supplémentaires destinées à couvrir les besoins de formation. Cette démarche s’inscrit en cohérence avec le changement de conception de la formation professionnelle, ne devant pas être perçue comme une obligation fiscale pour l’employeur mais comme une obligation de former et une opportunité pour la compétitivité de son entreprise.

La notion d’action de formation mise en œuvre par l’entreprise a plus spécifiquement été précisée par la loi. Ainsi, il est désormais prévu que la formation peut être séquentielle et peut s’effectuer en tout ou partie à distance, le cas échéant en dehors de la présence des personnes chargées de l’encadrement. Dans ce cas, le programme établi par l’entreprise précise notamment la nature des travaux demandés au stagiaire, les modalités de suivi et d’évaluation spécifiques aux séquences de formation et les moyens d’organisation, d’accompagnement ou d’assistance.

Le décret n° 2014-935 du 20 août 2014 relatif aux formations ouvertes ou à distance a précisé ces dispositions. Les moyens d’organisation, d’accompagnement ou d’assistance comprennent les compétences et qualifications des personnes chargées d’assister le bénéficiaire de la formation, les modalités techniques selon lesquelles le stagiaire est accompagné ou assisté et les délais dans lesquels les personnes en charge de son suivi sont tenues de l’assister. S’agissant de la mesure de l’assiduité, également, les justificatifs permettant d’attester de la réalisation des travaux exigés, les informations et données relatives au suivi de l’action, à l’accompagnement et à l’assistance du bénéficiaire par le dispensateur de la formation et les évaluations spécifiques qui jalonnent ou terminent la formation sont pris en compte.

C. DES INCERTITUDES À CORRIGER

1. La pertinence des listes en question

a. Les modalités d’élaboration des listes

La loi du 5 mars 2014 retient le principe de sélection des formations parmi des listes destinées à garantir l’amélioration des qualifications et à répondre aux besoins du marché du travail. Visant à assurer la qualité et la pertinence des formations, le choix d’une formation dans une liste élaborée en dehors de l’entreprise conditionne l’utilisation des heures inscrites sur le CPF.

L’article L. 6323-6 du code du travail identifie trois grandes catégories de formations éligibles au CPF.

Il s’agit tout d’abord des formations permettant d’acquérir le socle de connaissances et de compétences défini par le décret n° 2015-172 du 13 février 2015. Ce décret identifie sept modules constituant le socle de connaissances et de compétences professionnelles, parmi lesquels figurent la communication en français et la capacité d’apprendre tout au long de la vie. Ce socle de connaissances fait l’objet d’une certification sur proposition du Comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation (COPANEF). Les modalités de délivrance de cette certification ont été définies en janvier 2016, avec la création du certificat « CLÉA ». De portée nationale, cette certification est accessible par tous les dispositifs de formation professionnelle et est reconnue dans tous les secteurs.

Il s’agit ensuite des formations conduisant à une qualification ou à une certification et inscrites sur une liste par les partenaires sociaux aux échelles nationale et régionale. Ces formations sont de quatre ordres :

– celles sanctionnées par une certification enregistrée dans le répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) ou permettant d’obtenir une partie identifiée de certification professionnelle identifiée au sein de ce répertoire ;

– celles sanctionnées par un certificat de qualification professionnelle (CQP) ;

– celles correspondant à des compétences transversales et sanctionnées par une certification recensée dans un inventaire spécifique établi par la Commission nationale de la certification professionnelle (CNCP). L’arrêté du 31 décembre 2014 fixant les modalités de recensement à l’inventaire des certifications et des habilitations mentionnées à l’article L. 335-6 du code de l’éducation prévoit que ces certifications sont mises à la disposition de la Caisse des dépôts et consignations dans le cadre de sa mission de gestion du SI-CPF ;

– celles concourant à l’accès à la qualification des demandeurs d’emploi et financées par les régions, Pôle emploi et, pour les personnes handicapées bénéficiaires de l’obligation d’emploi, par l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH).

Une fois ces quatre types de formations définis, les formations effectivement éligibles doivent être placées sur des listes dans des conditions définies aux articles L. 6323-16 et L. 6323-21 du code du travail, s’agissant respectivement les salariés et les demandeurs d’emploi.

Concernant les salariés, d’une part, les formations doivent figurer sur la liste nationale interprofessionnelle établie par le COPANEF après consultation du conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP), sur la liste de la branche professionnelle concernée dans le cadre des listes nationales établies par les commissions paritaires nationales pour l’emploi (CPNE) ou sur la liste régionale pour les salariés établie par le comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation (COPAREF) du lieu de travail après consultation des commissions paritaires régionales de branche lorsqu’elles existent et concertation au sein du bureau du comité régional de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles (CREFOP).

Concernant les demandeurs d’emploi, d’autre part, les formations doivent figurer sur la liste nationale interprofessionnelle établie par le COPANEF ou sur la liste régionale pour les demandeurs d’emploi établie par le COPAREF du lieu de domicile, après diagnostic et concertation au sein du bureau du CREFOP et consultation des commissions paritaires régionales de branche lorsqu’elles existent. Cette seconde liste est alors élaborée à partir du programme régional de formation professionnelle pour les personnes à la recherche d’un emploi financé par la région, Pôle Emploi et l’AGEFIPH.

Des dispositions spécifiques sont également prévues dans le cadre des personnes en contrat de sécurisation professionnelle (CSP). Les formations doivent alors figurer sur la liste nationale interprofessionnelle établie par le COPANEF, sur la liste régionale pour les demandeurs d’emploi établie par le COPAREF du lieu de domicile ou sur la liste de la branche professionnelle de l’entreprise où le salarié exerçait son activité avant d’entrer en CSP, établie par la CPNE.

Il s’agit enfin des formations relatives à l’accompagnement à la validation des acquis de l’expérience (VAE). Le congé pour VAE est ouvert à toute personne justifiant de 24 mois d’activité salariée ou d’apprentissage, consécutifs ou non, au cours des cinq dernières années, la condition d’avoir exercé quatre mois sous CDD au cours des 12 derniers mois étant supprimée. Ce dispositif, précisé par le décret n° 2014-1354 du 12 novembre 2014 portant diverses mesures relatives à la validation des acquis de l’expérience, s’applique à tous les types de contrats – et inclut donc les contrats aidés dans la prise en compte de cette durée minimale d’activité salariée.

LES TROIS CATÉGORIES DE FORMATIONS ÉLIGIBLES AU CPF

Outil de sécurisation des parcours et d’évolution professionnelle, le bilan de compétences pourrait également être accessible via la mobilisation du CPF. Les rapporteurs proposent ainsi de créer une quatrième catégorie de formations éligibles au CPF, correspondant aux actions de formation permettant de bénéficier de prestations de bilan de compétences.

Proposition n° 5 :

Permettre la mobilisation du CPF au titre des prestations de bilan de compétences.

b. Un bien-fondé contesté

Plusieurs garanties ont été précisées dans la loi du 4 mars 2014 afin d’assurer l’adéquation des listes de formations éligibles aux besoins des salariés, des demandeurs d’emploi et des entreprises. Parmi ces garanties figurent notamment l’actualisation régulière des listes, la transmission des listes au CNEFOP et à la Caisse des dépôts et consignations ou la mention dans les listes des formations facilitant l’évolution professionnelle des salariés exposés à des facteurs de risques professionnels.

Les modalités de contrôle et de constitution des listes de formation ont été renvoyées à un décret en Conseil d’État et définies avec la publication du décret n° 2014-1119 du 2 octobre 2014 relatif aux listes de formations éligibles au titre du compte personnel de formation. Il est ainsi précisé que la responsabilité du contrôle de légalité et de conformité de ces listes incombe à l’État, et que des demandes d’expertise pourront être sollicitées auprès du président de la CNCP. Ces listes sont publiées via un service dématérialisé confié à la Caisse des dépôts et consignations ainsi que sur le site Internet du CNCP.

Toutefois, de nombreuses incertitudes pèsent aujourd’hui sur la pertinence des listes de formations disponibles et sur leur adéquation avec les objectifs fixés par le législateur en 2014. Si les listes ont effectivement été élaborées en peu de temps – entre septembre 2014 et janvier 2015 – et ont permis de recenser plus de 12 000 formations dès leur publication, leur contenu et leur articulation posent aujourd’hui problème.

De nombreuses formations ne sont aujourd’hui pas éligibles. Des formations pourtant reconnues comme qualifiantes ou certifiantes, et enregistrées en conséquence au RNCP ou à l’inventaire, ne sont donc pas accessibles dès lors qu’elles ne sont pas inscrites sur les listes. Ainsi, lors de son audition par les rapporteurs, le Conservatoire national des arts et métiers a indiqué que moins d’un tiers de ses formations – 130 sur un total de 450 – étaient éligibles au titre du compte personnel de formation. De même, les formations de « formateur professionnel d’adulte » (FPA) et de « conseiller en insertion professionnelle » (CIP) ne sont inscrites sur aucune liste, à rebours de l’objectif de renforcement de la qualité des actions de formation. Le système actuel porte donc un paradoxe central difficilement compréhensible : des conseillers ne peuvent pas mobiliser leur CPF pour se former et ainsi fournir une prestation adaptée.

Cette rigidité du dispositif, associée à une complexité et à une incertitude quant au caractère éligible d’une formation, affaiblit l’esprit de responsabilisation et de liberté au fondement du CPF. La durée d’examen des modules de formation par le RNCP freine d’autant plus l’adaptation du système aux nouveaux besoins.

Parmi les formations éligibles – plus de 2 600 figurent aujourd’hui sur la liste nationale interprofessionnelle – seules 4 sont réellement sollicitées (les langues, la bureautique, le permis de conduire et le certificat d’aptitude à la conduite en sécurité – CACES). À titre d’exemple, comme le souligne la liste des trois formations les plus suivies ci-dessous, la moitié des mobilisations du CPF par les salariés l’a été dans le cadre de formations linguistiques.

Rang

Certifications choisies par les salariés

Certifications choisies par les demandeurs d’emploi

1

Tests TOEIC (Test of English for International Communication) – 14 924

Socle de compétences – 26 461

2

BULATS (Business Language Testing Service) – 12 524

Stage de préparation à l’installation (SPI) – 15 404

3

Accompagnement – 3 090

Diplôme d’État d’aide-soignant – 8 444

Source : Caisse des dépôts et consignations.

En outre, les différences d’éligibilité à une formation selon les régions ou les branches rendent le système de liste difficilement lisible. Deux titulaires d’un CPF n’ont ainsi pas accès aux mêmes formations s’ils relèvent de deux régions ou branches distinctes.

Enfin, la construction des listes et leur difficile articulation heurtent la mobilisation du CPF par chaque actif. La grande diversité de listes nuit à la lisibilité de l’offre de formation et rend indispensable une fusion de certains dispositifs. La distinction entre les formations enregistrées au RNCP et celles inscrites à l’inventaire par le CNCP alimente une confusion chez les titulaires du CPF.

 

Nombre de listes
créées dans l’outil

Nombre de formations, certifications et actions de formation

Listes des COPAREF

46

7 602

Listes des CPNE de branches

144

7 947

Liste nationale interprofessionnelle COPANEF

1

2 678

Liste générique (socle & accompagnement VAE)

1

2

Total

192

12 276 (sans doublon)

Source : Caisse des dépôts et consignations.

Au total, le contenu actuel des listes a conduit à rigidifier considérablement le système. En freinant l’accès aux formations et en contredisant les objectifs de responsabilisation et d’autonomie du titulaire du compte, il freine la pleine entrée en vigueur du CPF. La refonte du système d’éligibilité apparaît en conséquence comme un préalable au développement des capacités d’action des personnes, pourtant au cœur du dispositif de CPF.

c. Simplifier le système d’éligibilité à une formation

L’appropriation du compte personnel de formation (CPF) dépend aujourd’hui de la capacité de son titulaire à identifier les formations éligibles et à définir un parcours de qualification individualisé. Pour ce faire, et face au consensus exprimé lors des auditions quant à la complexité du dispositif, les rapporteurs estiment indispensable d’engager sans tarder une simplification de l’éligibilité des formations.

L’existence d’un système de listes répond au besoin de régulation de l’accès à la formation, afin d’assurer l’adéquation aux besoins des entreprises et aux compétences les plus recherchées, dans une dimension prospective.

La complexité du système actuel invite toutefois à se placer du point de vue de l’utilisateur et de sa capacité à choisir une formation répondant à ses attentes, y compris lorsqu’elle relève d’une branche ou d’une région distincte.

Les listes pourraient tout d’abord apparaître en un document unique sur le compte des utilisateurs, que la formation ait été inscrite par le COPANEF, la branche ou la région concernée. L’impossibilité d’utiliser des heures disponibles sur un CPF pour suivre une formation d’une région à une autre ou d’une branche à une autre n’est pas justifiée et contredit l’esprit d’appropriation du parcours de formation au fondement de la loi du 5 mars 2014. La mobilité de l’utilisateur ne doit pas être freinée. Une fois les listes fusionnées, l’accessibilité aux formations devrait également être facilité par des outils numériques enrichis permettant d’identifier facilement le lieu, le contenu et la durée de la formation.

La régulation de l’accès aux formations demeure nécessaire. La fusion des listes en un document unique implique de trouver un nouveau mode de régulation, qui pourrait le cas échéant consister en des abondements complémentaires. Il reviendra aux instances de régulation – en particulier le COPANEF – la tâche de retirer les formations ne répondant plus aux besoins économiques et devenues en décalage avec les priorités de la formation professionnelle.

L’éligibilité de tout actif à une formation relevant de l’inventaire du RNCP pose, enfin, question. En effet, si cette éligibilité est justifiée pour les demandeurs d’emploi, elle est en revanche contestable s’agissant des salariés, pour lesquels l’accès aux habilitations obligatoires relève de la responsabilité de l’employeur et doit s’inscrire dans la relation de travail. L’accès à ces formations via le CPF pourrait donc être restreint aux seuls demandeurs d’emploi.

Proposition n° 6 :

Faciliter l’appropriation du CPF par leurs titulaires en fusionnant les listes et en dotant le CNEFOP d’une compétence de régulation du système de liste

2. Le contrôle de la qualité des formations

a. Le contrôle des actions de formation prévu par la loi

Peu formalisé dans les textes législatifs précédents, le contrôle de la qualité des actions de formation est précisé à l’article 8 de la loi du 5 mars 2014 afin de garantir la qualité des actions mises en œuvre par les prestataires de formation professionnelle. Il est ainsi prévu que les organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA), les organismes paritaires agréés au titre du congé individuel de formation (OPACIF), l’État, les régions, Pôle Emploi et l’AGEFIPH s’assurent de la capacité du prestataire à dispenser une formation de qualité sur la base de critères définis par décret en Conseil d’État.

Le décret n° 2015-790 du 30 juin 2015 relatif à la qualité des actions de la formation professionnelle continue identifie ainsi six critères devant être respectés en contrepartie des financements versés au prestataire :

– l’identification précise des objectifs de la formation et son adaptation au public formé ;

– l’adaptation des dispositifs d’accueil, de suivi pédagogique et d’évaluation aux publics de stagiaires ;

– l’adéquation des moyens pédagogiques, techniques et d’encadrement à l’offre de formation ;

– la qualification professionnelle et la formation continue des personnels chargés des formations ;

– les conditions d’information du public sur l’offre de formation, ses délais d’accès et les résultats obtenus ;

– la prise en compte des appréciations rendues par les stagiaires.

Les obligations applicables aux organismes de formation vis-à-vis des stagiaires, telles que la rédaction d’un règlement intérieur et la poursuite d’un programme de formation personnalisé, s’imposent en sus au titre de ces critères de qualité.

Les prestataires respectant ces critères sont alors inscrits par les organismes financeurs sur un catalogue de référence mis à la disposition du public. Le contrôle du respect de ces critères de qualité peut s’effectuer par le biais de deux procédures distinctes. D’une part, l’organisme financeur peut procéder à ce contrôle dans le cadre de ses procédures internes d’évaluation. D’autre part, il peut également vérifier que le prestataire bénéficie d’une certification ou d’un label inscrits sur une liste établie par le CNEFOP et mise à la disposition du public. Cette liste n’a toutefois pas été publiée à ce jour.

Les organismes financeurs veillent en particulier à l’adéquation financière des prestations achetées aux besoins de formation, à l’ingénierie pédagogique du prestataire, à l’innovation des moyens fournis et aux tarifs pratiqués. Ils publient alors les informations relatives aux outils, méthodologies et indicateurs permettant de faciliter l’appréciation de la qualité des formations dispensées.

En l’absence de justification de la qualité de la prestation fournie par l’organisme de formation ou l’employeur, l’OPCA concerné peut se soustraire à la prise en charge des frais de formation dus et signale le manquement aux services de l’État chargés du contrôle de la formation professionnelle.

b. Renforcer la cohérence du contrôle de la qualité

La question du contrôle de la qualité des formations est apparue tardivement dans les débats parlementaires, lors de l’examen du projet de loi. Si le dispositif mis en place a le mérite d’inscrire « en dur » dans la loi l’exigence de qualité des formations, il demeure toutefois inabouti et a fait l’objet de nombreux commentaires lors des auditions menées par les rapporteurs.

Face à ce constat, il apparaît indispensable de poursuivre la réflexion et de définir des garanties plus précises de contrôle de la qualité. La transparence des informations sur la qualité des prestations et sur les débouchés est indispensable pour assurer le fonctionnement concurrentiel du marché de la formation et garantir sa soutenabilité tant qualitative que financière. Parmi les modèles étrangers, l’exemple de l’Allemagne peut être cité, ayant mis en place un véritable marché de la certification. N’appelant pas une reproduction identique en France, au regard de la différence de système de formation professionnelle entre les deux pays, il fournit néanmoins l’illustration d’une démarche aboutie de contrôle de la qualité.

Le système allemand de contrôle de la qualité des offres de formation

Adoptées entre 2003 et 2005, les « réformes Hartz » ont refondu le système allemand de contrôle des prestations de formation en mettant en place un véritable marché de la certification. Répondant à la forte hétérogénéité de l’offre de formation, notamment héritée de la réunification, ces réformes ont abouti à la création d’un système à deux étages destiné à réguler l’offre et à garantir la qualité :

– des agences de certification contrôlent la qualité des modules de formation mis en place par les prestataires. Leur contrôle porte notamment sur la qualité des formateurs et de leurs fonctions support et sur celle des formations dispensées – modalités d’examen, ateliers de mise en situation professionnelle, nombre de formateurs par module… ;

– ces agences sont elles-mêmes accréditées par l’organisme d’accréditation national dès lors qu’elles satisfont à des exigences méthodologiques, financières et organisationnelles.

Cette concurrence entre prestataires de formation a permis de restructurer le marché de la formation en procédant à une sélection par la qualité. Le nombre de prestataires certifiés a ainsi été divisé par deux, passant de 10 000 en 2000 à 4 000 aujourd’hui.

S’agissant de la France, des procédures de contrôle de la qualité sont aujourd’hui déjà reconnues dans le domaine de la formation professionnelle mais sont mises en œuvre à l’initiative des organismes de formation. La démarche repose donc sur le volontariat.

Il existe à ce jour trois procédures principales de contrôle de la qualité des formations dispensées par les organismes :

– le certificat de qualification professionnelle délivré par l’Office professionnel de qualification des organismes de formation (OPQF) accrédité par le Comité français d’accréditation (COFRAC), renouvelé tous les quatre ans et faisant l’objet chaque année d’une déclaration d’activité justifiant le respect des critères de qualification ;

– la certification ISO 3001, délivrée par un auditeur missionné par l’organisme pour effectuer l’audit qualité en fonction du référentiel de certification et selon un plan d’audit et valable trois ans, avec un audit de suivi annuel ;

– la certification NF Service Formation, délivrée par Afnor Certification une fois la conformité aux normes spécifiques à la formation vérifiée et renouvelée tous les trois aux avec un audit de contrôle annuel.

Accordées à environ 1 200 organismes de formation, ces certifications ont un coût variable selon la démarche suivie et le chiffre d’affaires de l’organisme de formation, compris entre 800 euros et 4 500 euros.

En conséquence, les rapporteurs soulignent la nécessité de poursuivre la réflexion relative au contrôle des formations suivies. Ce contrôle ne doit toutefois pas se limiter à la qualité de la seule action de formation, mais à celle de l’ensemble du parcours de formation, de l’orientation initiale au terme de la formation. Il s’agit notamment d’analyser les effets induits de la formation au regard de la chaîne de formation, et de définir ainsi à chaque étape des exigences spécifiques en matière de qualité.

Plus largement, la notion même d’action de formation pourrait être repensée afin de tirer toutes les conséquences de la loi du 5 mars 2014. De fait, la formation va aujourd’hui au-delà du seul module de formation. Conçue sur le modèle des programmes de la formation initiale, l’action de formation ne rend pas compte de la grande variété des modalités de qualification et de professionnalisation des actifs. La formation professionnelle doit donc aujourd’hui relever d’une approche par parcours et, dès lors, être conçue comme un processus sur la durée. La formation ne peut plus être réduite à un contenu ou un programme et doit intégrer l’ensemble des données d’un parcours individuel de formation, rassemblant les objectifs, les modalités pédagogiques d’organisation de la formation et l’évaluation du résultat et des effets induits dans la vie professionnelle. Cette redéfinition juridique de la formation pourra constituer le point d’entrée d’une mesure plus efficace de la qualité des formations dispensées.

Proposition n° 7 :

Travailler à une redéfinition de l’acte de formation en le construisant comme un parcours allant du positionnement à la validation, permettant ainsi de faire évoluer les financements et l’évaluation de la qualité.

3. Les publics restés en dehors du dispositif

La création du compte personnel de formation a renforcé la dimension universelle de l’accès à la formation, en garantissant la conservation des droits tout au long du parcours professionnel, quelles que soient les étapes de salariat ou de chômage et les transitions professionnelles. La formation pourra ainsi pleinement répondre à son ambition de sécurisation des parcours professionnels, en particulier durant les périodes de recherche d’emploi.

Le caractère universel du droit à la formation se heurte toutefois, aujourd’hui encore, à une difficulté de taille : l’exclusion des personnes non salariées et des agents publics du dispositif.

Le code du travail prévoit, à son article L. 6111-1, que la formation professionnelle vise à permettre à chaque personne « indépendamment de son statut » d’acquérir et d’actualiser des connaissances et des compétences favorisant son évolution professionnelle, ainsi que de progresser d’au moins un niveau de qualification au cours de sa vie professionnelle. Pourtant, du fait du champ de négociation des partenaires sociaux, seuls les salariés et les demandeurs d’emploi sont aujourd’hui couverts par le dispositif du compte personnel de formation.

Cette dichotomie entre salariés et demandeurs d’emploi d’une part, et non-salariés et agents publics d’autre part, reflétant le champ d’application du code du travail, est d’autant plus dommageable qu’elle méconnaît les transitions de plus en plus fréquentes entre statuts au cours d’une carrière professionnelle. Les mobilités professionnelles se font ainsi de plus en plus d’un secteur à un autre et rendent indispensable la préservation des droits acquis à la formation.

L’extension du CPF à tous les actifs est, en outre, techniquement possible aujourd’hui. Le système d’information du CPF, géré par la Caisse des dépôts et consignations, comprend d’ores et déjà virtuellement 40 millions de comptes. Si la plupart ne sont pas activés, ils sont donc toutefois intégrés dans le système d’information et soutiendront l’extension ultérieure du dispositif.

En ce sens, dans la perspective de création d’un compte personnel d’activité, les rapporteurs soulignent la nécessité de se saisir dès maintenant de la question de l’extension à tous les actifs du dispositif mis en place. Cet enjeu d’universalisation du CPF soulève de nombreux débats, notamment au regard de la place des partenaires sociaux dans sa gestion. S’il n’appartient pas aux rapporteurs de trancher cette question à ce stade, il semble toutefois indispensable de réfléchir dès aujourd’hui aux conditions de gouvernance, de gestion et de financement d’un tel compte universel.

D. LA PERSPECTIVE D’INTÉGRATION DANS LE COMPTE PERSONNEL D’ACTIVITÉ : « LA GREFFE D’UN EMBRYON SUR UN EMBRYON » (8) ?

La création du compte personnel d’activité (CPA), inscrite à l’article 38 de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, tire les conséquences de la transformation de notre modèle social et de la relation de travail. Avec une entrée en vigueur prévue au 1er janvier 2017, le CPA rassemblerait pour chaque personne « indépendamment de son statut, les droits sociaux personnels utiles pour sécuriser son parcours professionnel ». Si le périmètre précis et les modalités de fonctionnement du CPA font aujourd’hui l’objet d’une négociation entre les organisations professionnelles d’employeurs et syndicales de salariés à l’échelle nationale interprofessionnelle, il semble néanmoins acté que le compte personnel de formation y sera intégré et verra en conséquence ses paramètres ajustés.

1. Favoriser les mobilités professionnelles tout en sécurisant les parcours de vie

La création du CPA traduit l’ambition d’une protection des actifs rattachée à la personne et non plus au statut ou au métier. De fait, la modification des formes d’emploi et de la relation de travail, la discontinuité des trajectoires individuelles et l’émergence de nouveaux statuts nourrissent un écart croissant entre notre modèle social et les parcours professionnels.

Des réformes ont été entreprises isolément afin de tirer les conséquences de ce nouveau contexte et de la difficulté de notre modèle social à enrayer l’essor de nouvelles inégalités entre actifs. Ces réformes ont conduit à l’universalisation progressive des droits sociaux et se sont traduites par la refonte de certains droits tels que le CPF, la généralisation de la complémentaire santé ou le caractère rechargeable des droits à l’assurance chômage. Destinées à corriger et à compenser les inégalités dans l’accès aux droits sociaux, ces mesures ont donné naissance à un paysage fragmenté où coexistent des dispositifs rattachés au statut et des dispositifs rattachés à la personne. Bâti sur un marché du travail où l’emploi salarié à temps plein était la norme, notre modèle social doit aujourd’hui intégrer les mutations profondes issues des nouvelles formes d’emploi et de la révolution numérique.

La sécurisation des parcours professionnels constitue le principal fondement de la création d’un compte personnel. En ce sens, la formation professionnelle se place au centre du dispositif et devrait faire du CPF le levier de l’utilisation des différents comptes, grâce à une unité de mesure commune permettant d’assurer la fongibilité des droits acquis à l’appui du financement d’heures de formation. Ce mécanisme, aujourd’hui possible dans le cadre du compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P), sera ainsi étendu à l’ensemble des droits personnels accumulés au cours du parcours professionnel. Ancré sur les droits à la formation, le CPA serait donc complété par tout dispositif ayant un lien avec la mobilité professionnelle afin d’éviter les ruptures dans l’accès aux droits.

Les rapporteurs insistent sur cet enjeu de sécurisation, qui constitue un processus et non pas un état et doit dès lors être préparé sur la durée et de manière progressive. La rapidité des mutations technologiques et la transformation de la relation de travail brouillent les frontières entre les salariés et les non-salariés, ainsi qu’entre les insiders et les outsiders sur le marché du travail. Le CPA doit donc permettre à chacun de rester maître de son parcours professionnel et de préparer son évolution sur le long terme, et non pas seulement une fois le changement subi.

2. Les scénarios envisagés

Le périmètre et les modalités d’utilisation du CPA sont aujourd’hui l’objet de débats et conditionneront le succès et l’appropriation du dispositif. Répondant à une demande du Premier ministre, France Stratégie a mis en place une commission dédiée, dont les travaux ont été publiés à l’automne 2015 (9).

Après avoir identifié des principes clefs que le CPA devra respecter –l’universalité, l’ouverture dès l’âge de 16 ans jusqu’au décès du titulaire, l’utilisation du point comme unité de compte, la possibilité de dotations correctrices –, France Stratégie identifie trois scénarios répondant à trois visions du CPA :

– un compte orienté vers la capacité d’évolution professionnelle, visant spécifiquement la sécurisation des parcours professionnels. Il serait bâti autour des droits à la formation (CPF et CIF) et complété par des droits eux-mêmes fongibles – partiellement ou en totalité – en actions de formation (C3P, compte épargne-temps et épargne salariale) ainsi que par des dotations initiales et correctrices ;

– un compte ciblé sur la liberté de l’usage des temps au long de la vie, destiné à mieux articuler les différents temps de vie et à assurer une plus grande liberté dans et par le travail, notamment par la reconnaissance d’activités non marchandes. Outre les droits du compte précédent, il rassemblerait les droits à congés et des points acquis dans certaines activités d’utilité collective comme le service civique. Cette approche est porteuse d’une nouvelle vision du travail et valorise les notions de capacité et de liberté ;

– un compte ciblé sur l’accès aux droits et la sécurité des transitions, visant à assurer la continuité des droits au-delà de l’emploi. Outre les éléments des précédentes options, le CPA serait le point d’accès aux droits de notre modèle social – assurance chômage, assurance vieillesse, droits familiaux, accidents du travail… S’agissant de ces droits sociaux, toute fongibilité serait en revanche exclue. Le CPA constituerait ainsi un « compte-ressources » dépassant le seul cadre du marché du travail.

Une négociation à l’échelle nationale interprofessionnelle a ensuite été engagée par les partenaires sociaux afin de définir les contours du CPA, n’ayant pas la valeur d’un accord national interprofessionnel mais ayant vocation à être transposé dans le futur projet de loi relatif au travail. Comprenant le CPF et le C3P, le CPA tel qu’issu du projet de position commune présenté le 8 février 2016 se rapproche ainsi de la première option présentée par France Stratégie. Il en diffère toutefois par l’exclusion du dispositif du compte épargne-temps ou des droits à l’assurance chômage, ainsi que par une fermeture du compte lors de la liquidation de la retraite et non pas au moment du décès.

Les rapporteurs soutiennent la démarche entreprise tant par France Stratégie que par les partenaires sociaux. Ils insistent sur la nécessité de faire des outils de formation le pivot du futur compte personnel d’activité en instaurant des mécanismes de fongibilité à l’intérieur du compte. Cette fongibilité pourrait toutefois être différenciée afin de valoriser certaines actions et d’inciter à la qualification. À titre d’exemple, l’utilisation d’un point issu du C3P au titre de la formation pourrait générer un point supplémentaire sur le CPF. À l’inverse, les points accumulés au titre du CPF ne pourraient être utilisés pour modifier les conditions de liquidation de sa retraite dans le cadre du C3P.

Proposition n° 8 :

Prévoir une fongibilité différenciée des droits accumulés sur le CPA afin de soutenir les actions de formation et d’orienter le choix de la personne vers la qualification, grâce à une valorisation supplémentaire des points lorsqu’ils sont utilisés au titre de la formation.

Les rapporteurs s’interrogent néanmoins sur la capacité des différents acteurs à assurer une pleine entrée en vigueur du dispositif au 1er janvier 2017 alors même que le CPF poursuit sa montée en charge progressive. Le déploiement des fonctionnalités du CPF est aujourd’hui en cours et nécessite une adaptation en continu des outils, en particuliers des systèmes d’information. À titre d’exemple, l’interfaçage des différents OPCA avec la Caisse des dépôts et consignations n’est pas uniforme et peut heurter la transmission des demandes de formation. L’intégration d’un dispositif récent – le CPF – dans un outil novateur – le CPA – sera par définition complexe et risque de freiner l’appropriation du CPF par leurs titulaires. Par ailleurs, les différents comptes inclus dans le CPA ne seront pas nécessairement gérés par le même acteur. Ainsi, alors que le SI-CPF relève aujourd’hui d’une gestion par la Caisse des dépôts et consignations, le C3P relève de la Caisse nationale de l’assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS). Aussi, il importe de préserver les paramètres clefs du CPF tant que le dispositif n’est pas arrivé à maturité et d’éviter toute forme de fragilisation d’un outil encore neuf.

IV. LA CRÉATION DES NOUVELLES INSTANCES : BIEN DÉFINIR LE RÔLE DE CHACUN

La loi du 5 mars 2014 a entendu dans un premier temps attribuer à la région un véritable « bloc de compétences » en matière de formation professionnelle. Les rapporteurs ne reviendront pas sur ce point. L’évaluation des politiques régionales en matière de formation excède le champ du présent rapport. En revanche, ils présentent une première analyse du fonctionnement des nouvelles instances créées.

A. LA LOI DU 5 MARS 2014 : UN OBJECTIF DE RATIONALISATION DES INSTANCES

1. Le CNEFOP et les CREFOP, de nouvelles instances chargées de coordonner les politiques publiques en matière de formation, d’orientation et d’emploi

Les politiques en matière de formation, d’orientation et d’emploi sont liées mais relèvent d’autorités et d’organismes distincts. La loi du 5 mars 2014 renforce la coordination de ces politiques publiques en confiant à une même institution le soin d’organiser la concertation nationale et régionale quadripartite entre l’État, les régions, les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d’employeurs.

Le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP) a vu ses missions s’enrichir par rapport au Conseil national de la formation tout au long de la vie (CNFPTLV) en matière d’orientation professionnelle, de système d’information, de suivi de l’engagement des principaux financeurs de la formation et de l’apprentissage.

Le CNEFOP est composé, autour d’un noyau quadripartite d’acteurs qui forme son bureau (État, régions et partenaires sociaux représentatifs au niveau national et interprofessionnel), des principaux décideurs et opérateurs de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles.

Le CNEFOP s’est vu confier la responsabilité de définir des priorités triennales et d’élaborer la stratégie partagée pour les mettre en œuvre. Il élabore un programme triennal d’évaluation et assure le suivi du déploiement des principaux outils, notamment ceux issus de la réforme de mars 2014 : liste nationale des formations éligibles au compte personnel de formation, conseil en évolution professionnelle, service public régional de l’orientation (SPRO).

Au niveau régional, le comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CREFOP), issu de la fusion du comité régional de l’emploi et de la formation professionnelle et du conseil régional de l’emploi, a principalement pour mission, en cohérence avec les orientations du CNEFOP, d’accorder les partenaires sociaux, l’État et la région sur la désignation des opérateurs régionaux chargés du conseil en évolution professionnelle, sur la répartition des fonds de la taxe d’apprentissage non affectés par les entreprises et sur les listes des formations éligibles au compte personnel de formation.

2. La gouvernance des partenaires sociaux représentatifs : COPANEF et COPAREF

La loi du 5 mars 2014 a confié aux partenaires sociaux représentatifs la responsabilité de constituer les listes de formation éligibles au compte personnel de formation pour les salariés et les demandeurs d’emploi.

Le Comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation (COPANEF) est constitué des organisations syndicales de salariés et des organisations d’employeurs au niveau national et interprofessionnel. Il a pour mission de définir les orientations politiques paritaires en matière de formation et d’emploi et d’assurer le suivi et la coordination avec les autres acteurs.

Le Comité paritaire interprofessionnel régional pour l’emploi et la formation (COPAREF) a notamment pour mission d’animer en région le déploiement territorial des politiques paritaires définies par les accords nationaux interprofessionnels en matière de formation professionnelle et d’emploi. Le COPAREF est consulté sur la carte régionale des formations professionnelles initiales et sur l’établissement des listes mais, surtout, il élabore le contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelle et en assure le suivi.

L’Association de formation professionnelle des adultes (AFPA) et la question des transferts immobiliers

L’article 21 de la loi du 5 mars 2014 a prévu la possibilité pour les régions de se voir transférer à titre gratuit les biens immobiliers de l’AFPA, sous réserve de la conclusion d’un projet de site élaboré entre la collectivité et l’AFPA dont la teneur a fait l’objet d’un arrêté publié fin 2014 afin de permettre d’engager une intégration plus grande des centres AFPA dans une logique régionale.

À ce jour, seule la région Basse Normandie a pris une délibération mandatant son président pour mener toutes les opérations conduisant à un tel transfert pour le centre AFPA de Cherbourg afin d’en faire une cité des métiers.

Cette disposition sera annulée lors de la publication de l’ordonnance pour laquelle le Gouvernement a reçu habilitation dans le cadre de la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi. En effet, cette loi prévoit la dévolution en pleine propriété de l’immobilier appartenant à l’État et occupé par l’AFPA à l’EPIC dont la création est prévue par cette même loi et qui fera l’objet de ladite ordonnance. Ces dispositions rendent donc caduque la possibilité d’un transfert aux régions dès la publication de l’ordonnance dans le courant de l’année 2016.

B. LE COPANEF EST DEVENU UN ORGANE « POLITIQUE » DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE

1. Le rôle du FPSPP, du COPANEF et de l’État

Créé par l’Accord National Interprofessionnel du 7 janvier 2009 sur le développement de la formation tout au long de la vie professionnelle, la professionnalisation et la sécurisation des parcours professionnels et par la loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, le Fonds Paritaire de Sécurisation des Parcours Professionnels (FPSPP) est une association constituée entre les organisations syndicales d’employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel.

Il a principalement pour missions :

– de contribuer au financement au financement d’actions de formation professionnelle concourant à la qualification et à la requalification des salariés et demandeurs d’emploi sur la base d’appels à projets, au bénéfice de publics dont les caractéristiques sont déterminées par une convention-cadre conclue entre le Fonds et l’État ;

– d’assurer la péréquation des fonds par des versements complémentaires aux organismes collecteurs paritaires agréés au titre de la professionnalisation pour le financement d’actions de professionnalisation ;

– d’assurer l’animation du réseau des Organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) et Organismes paritaires agréés au titre du congé individuel de formation (OPACIF) du champ interprofessionnel.

Le FPSPP assure ses missions au moyen des ressources d’origine légale, conventionnelle ou contractuelle qu’il reçoit.

L’article 11 de la loi du 5 mars 2014 a modifié ses règles de financement et de fonctionnement afin d’en garantir la pérennité et d’accompagner la mise en œuvre du compte personnel de formation (CPF).

S’agissant de son financement, tout d’abord, le FPSPP perçoit désormais :

– la part de la contribution obligatoire définie par la loi et versée par chaque organisme paritaire collecteur agréé (OPCA). Cette part s’établit à 0,15 % pour les entreprises de 10 à 49 salariés et à 0,2 % pour les entreprises d’au moins 50 salariés ;

– les excédents dégagés par les OPCA sur la collecte de la contribution dès lors qu’ils dépassent, au 31 décembre, un quart de leurs charges comptabilisées au titre du CPF et un tiers de ces excédents pour les autres dépenses.

Ce financement assis sur les versements des entreprises vise à garantir la pérennité des ressources du FPSPP, mettant ainsi fin au financement relevant du prélèvement effectué par les OPCA et les OPACIF sur la participation des entreprises à un taux compris entre 5 % et 13 % et défini chaque année par arrêté ministériel sur proposition des organisations syndicales et patronales. Cette ressource pérenne offre au FPSPP une prévisibilité renforcée dans l’exercice de ses missions et lui permet ainsi d’entreprendre un programme d’actions sur la durée.

S’agissant de ses missions, en deuxième lieu, la loi maintient la contribution au financement d’actions de formation à destination de publics déterminés par la convention-cadre et de péréquation des fonds au titre des contrats de professionnalisation. Dans le cadre de la création du CPF, la mission de développement de systèmes d’information concourant au développement de la formation professionnelle est désormais définie.

S’agissant des financements effectués par le FPSPP, en troisième lieu, les ressources du fonds s’orientent désormais vers les heures acquises et mobilisées au titre du CPF, soit en cas de mobilisation conjointe d’un congé individuel de formation (CIF), soit pour financer la formation des demandeurs d’emploi. Afin de prolonger l’effort de mutualisation des financements, il est également prévu que le FPSPP contribue au développement de la formation des salariés des entreprises de moins de 10 salariés organisée dans le cadre du plan de formation par des versements complémentaires aux OPCA, calculés en fonction de la part de ces entreprises parmi les adhérents de l’OPCA. De même, des versements complémentaires peuvent être effectués aux OPCA afin de financer des actions de formation dans les entreprises de 10 à 49 salariés à partir des ressources collectées par le FPSPP au titre des excédents de trésorerie des OPCA et, à l’initiative du rapporteur du projet de loi à l’Assemblée nationale, des excédents du CPF.

Enfin, le FPSPP assure deux financements complémentaires, dans le cadre de sa mission de péréquation et du financement des fonds de gestion des CIF (FONGECIF). Le volume de ces financements est précisé par le décret n° 2014-967 du 22 août 2014 relatif au Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.

Dans le cadre de la péréquation, d’une part, le FPSPP effectue des versements complémentaires aux OPCA pour le financement de formations organisées au titre des contrats de professionnalisation. Pour bénéficier de ces versements complémentaires, les OPCA doivent affecter au moins 50 % de leurs fonds destinés à financer des actions de professionnalisation aux contrats de professionnalisation et au financement des dépenses de fonctionnement de centres de formation des apprentis et affecter aux contrats de professionnalisation une part de leurs fonds supérieure à un taux fixé à 25 % par le décret du 22 août 2014.

Dans le cadre du financement des FONGECIF, d’autre part, les sommes collectées sont réparties en fonction de la masse salariale des établissements par région. Une transition est toutefois prévue pour les trois premières années d’application du dispositif. Ainsi, la répartition des contributions versées au titre du CIF en 2015, 2016 et 2017 sera effectuée en fonction du montant perçu par les FONGECIF au cours des trois années précédant l’année au cours de laquelle cette répartition est effectuée.

Plus précisément, la mise en œuvre de la réforme par le FPSPP se décline via la convention-cadre 2015–2017 conclue avec l’État et complétée par une annexe financière validée le 15 janvier 2016. Cette dernière prévoit un budget global de 1 625 millions d’euros en 2016. Ces fonds s’orienteront en priorité vers :

– le financement du CPF, pour 320 millions d’euros se répartissant en 305 millions d’euros au profit des demandeurs d’emploi et 15 millions d’euros dans le cadre d’un CIF ;

– le financement des formations en alternance, pour près de 350 millions d’euros ;

– des versements complémentaires aux OPCA afin d’augmenter la proportion de personnes formées dans les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME), pour plus de 600 millions d’euros.

Au vu de l’abondement financier provenant quasi exclusivement des entreprises, le FPSPP a tendance à jouer un rôle de gestion au service des orientations arrêtées par le COPANEF. Cette évolution pourrait avoir pour conséquence de réduire le rôle de l’État dans la définition des objectifs et des moyens de la formation professionnelle.

2. Une fusion COPANEF – FPSPP est-elle compatible avec l’universalisation du droit à la formation ?

L’hypothèse d’une fusion entre le COPANEF et le FPSPP est aujourd’hui avancée par une partie des partenaires sociaux. Si ses contours ne sont aujourd’hui pas définis, ce projet implique de s’interroger sur les spécificités de chacune de ses deux instances, soulevant en premier lieu la question de la place de l’État.

Ces deux organes ont aujourd’hui une proximité fonctionnelle : les instances y siégeant sont communes – à l’exception de l’absence de l’État au COPANEF – et leurs locaux sont communs. Un argument de rationalisation simplification des circuits de décision et de financement est donc fréquemment avancé.

Le véritable enjeu concerne aujourd’hui la place respective de l’État et des partenaires sociaux dans ces deux instances dans la perspective d’une universalisation du droit à la formation. Si la formation professionnelle doit être accessible à tout actif, quel que soit son statut, la seule présence des partenaires sociaux dans une instance fusionnant le COPANEF et le FPSPP apparaît problématique. Le rôle de l’État, face à un COPANEF qui renforcerait son pouvoir politique avec un outil financier de plus de 1 milliard d’euros, resterait donc à définir.

L’universalisation de l’accès à la formation est pourtant au cœur du dispositif de CPF. Ainsi, la Caisse des dépôts et consignations (CDC), à laquelle il a été attribué la maîtrise d’ouvrage déléguée du projet CPF, a mis en place les outils qui permettent l’alimentation, la consultation et la mobilisation des comptes CPF pour les salariés, les demandeurs d’emploi mais aussi l’ensemble des personnes en âge de travailler dans le pays, soit près de 40 millions de comptes. Ces chiffres vont bien au-delà des salariés du secteur privé.

Les rapporteurs souhaitent attirer l’attention sur la contradiction pouvant sous-tendre une instance unique, compétente pour tous les actifs mais composée des seuls représentants des salariés et des employeurs. Tout l’enjeu est donc de clarifier la vocation du CPF, et demain du CPA, et de déterminer s’il est un outil géré par les seuls partenaires sociaux ou conjointement par les partenaires sociaux et la puissance publique. Dans cette dernière hypothèse, le FPSPP n’aurait-il pas vocation à être rapproché du CNEFOP ?

En définitive, la question essentielle est celle de la légitimité des partenaires sociaux à gérer seuls des droits universels.

V. L’APPRENTISSAGE, UN OUTIL ESSENTIEL AU SERVICE DE L’EMPLOI : DES PRINCIPES À LA RÉALITÉ

A. DES OBJECTIFS QUANTITATIFS AMBITIEUX

Au 31 décembre 2012, soit un an avant la présentation et le vote de la loi relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, plus de 440 000 personnes étaient en apprentissage en France. Il est aujourd’hui admis – sans pour autant que le déficit d’image qui s’y attache ne soit complètement levé – que l’apprentissage est une voie d’excellence menant à l’emploi. En effet, mêlant formation théorique et apprentissage en entreprise, cette voie de formation obtient de très bons résultats en termes d’insertion professionnelle. Ainsi, parmi les 100 000 apprentis formés chaque année par le réseau des chambres de commerce et d’industrie, près de 80 % trouvent un emploi dans les trois mois suivant la fin de leur formation, et 82 % occupent un poste quatre ans plus tard.

C’est pourquoi, le Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi a fixé l’objectif de faire progresser le nombre d’apprentis à 470 000 en 2015 puis 500 000 en 2017. Ces objectifs ont été réaffirmés à maintes reprises par le Président de la République et par le Gouvernement. Toutefois, il semble qu’au vu de l’évolution du nombre d’apprentis en 2014 et 2015 (10), ces chiffres seront difficiles à atteindre.

Préalablement à la présentation de la loi au Parlement, le Gouvernement a lancé une large concertation réunissant les partenaires sociaux, les régions, les chambres consulaires, les branches professionnelles et les réseaux de l’enseignement supérieur.

Deux grands objectifs étaient au cœur de cette concertation :

– un objectif quantitatif ;

– un objectif lié à l’employabilité des apprentis consistant à sécuriser davantage le parcours de formation des apprentis afin de favoriser leur intégration durable dans l’emploi.

Le présent rapport a notamment pour objet de vérifier si ces objectifs ont été ou sont en passe d’être atteints.

B. LA MODIFICATION DU FINANCEMENT ET DU PILOTAGE DE L’APPRENTISSAGE ISSU DE LA LOI DU 5 MARS 2014

1. Une modification du financement de l’apprentissage heurtée par la volonté de réaliser des économies budgétaires

Dans le but de recentrer l’intervention des régions sur les très petites entreprises et dans un contexte général de réduction des dépenses publiques, la loi de finances pour 2014 a supprimé le crédit d’impôt et l’indemnité compensatrice forfaitaire versée par les régions aux employeurs pour la remplacer par une nouvelle prime à l’apprentissage, dont le bénéfice est restreint aux entreprises de moins de 11 salariés. Le montant minimal de cette prime demeure fixé à 1 000 euros par année de formation, les régions pouvant décider d’accorder un montant supérieur aux employeurs. La loi de finances précitée a également recentré le crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage, dont bénéficient les entreprises, sur les seuls apprentis ayant un faible niveau de formation initiale.

Par ailleurs, la loi de finances rectificative pour 2013 a fusionné, depuis le 1er janvier 2014, la taxe d’apprentissage et la contribution au développement de l’apprentissage. Le taux de la taxe est porté à 0,68 % et à 0,44 % en Alsace-Moselle.

La même loi de finances a, par ailleurs, déterminé la répartition des fonds collectés par la nouvelle taxe d’apprentissage :

– 55 % du produit de la nouvelle taxe d’apprentissage sont affectés aux régions afin de réaffirmer leur rôle de pilote dans la répartition des fonds de la taxe d’apprentissage ;

– une seconde fraction, dénommée « quota », ainsi que la contribution supplémentaire de l’apprentissage sont, quant à elles, affectées aux centres de formation d’apprentis et aux sections d’apprentissage afin d’augmenter leurs financements. Cette seconde partie de la réforme a cependant été censurée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 29 décembre 2013 (11).

À la suite du vote de ces dispositions, la loi du 5 mars 2014 s’est inscrite dans cette politique en renforçant le rôle de chef de file de la région, en sécurisant le parcours de l’apprenti et en simplifiant le circuit de collecte de la taxe d’apprentissage.

Le nouveau schéma de financement, qui s’applique depuis l’exercice 2015, est retracé par le graphique suivant. Les chiffres sont ceux de l’exercice 2016.

SCHÉMA DE RÉPARTITION EN 2016 DE LA TAXE D’APPRENTISSAGE
























2. Une réforme profonde de la collecte de la taxe d’apprentissage

La loi du 5 mars 2014 a également réformé la collecte de la taxe d’apprentissage. Créés par la loi du 16 juillet 1971 (12), les organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage – les OCTA – sont chargés de sa collecte.

Ces organismes :

– collectent les déclarations de versements des entreprises avant le 1er mars ;

– reversent les fonds au Trésor public au plus tard le 30 avril ;

– répartissent les sommes collectées au titre des dépenses libératoires entre les organismes de formation, au plus tard le 30 juin.

La réforme a consisté à doter, au niveau national, les seuls OPCA agréés d’une habilitation à collecter la taxe d’apprentissage, et au niveau régional, en confiant la collecte à un collecteur interconsulaire régional unique. Cette simplification de la collecte aboutit à réduire drastiquement le nombre de collecteurs de 86 organismes à 22. Par ailleurs, pour plus de transparence, les entreprises versent désormais la taxe d’apprentissage et la contribution supplémentaire de l’apprentissage à un seul organisme collecteur, que ce soit au niveau national ou régional.

3. Un renforcement des compétences des régions en matière d’apprentissage

La loi du 5 mars 2014 a renforcé le rôle des régions en mettant fin à l’obligation faite aux régions de conclure des contrats d’objectifs et de moyens avec l’État. L’article L. 6211-3 du code du travail dispose désormais que la région pourra élaborer des contrats d’objectifs et de moyens avec l’État mais aussi avec les organismes consulaires et les organisations représentatives d’employeurs et de salariés. Ces contrats ne reposent plus sur un cofinancement État-région.

Par ailleurs, la loi poursuit la décentralisation des centres de formation des apprentis en transférant les derniers CFA à recrutement national. La loi dispose que seules les régions peuvent désormais définir les conventions type auxquelles doivent se conformer les conventions de création de CFA. La décentralisation ne concerne pas les Compagnons du devoir dont l’OCTA demeure national et autonome jusqu’en 2018 eu égard à une formation spécifique à l’échelle nationale.

4. Une volonté de sécuriser le parcours des apprentis

La loi du 5 mars 2014 a affirmé clairement la gratuité de la formation pour l’apprenti, y compris en ce qui concerne les frais « hors formation », et introduit la possibilité de conclure un contrat d’apprentissage dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée, sans remettre en cause la protection particulière dont bénéficie l’apprenti pendant sa période formation théorique et pratique. Aux termes de l’article L. 6211-2 du code du travail, l’apprentissage concourt aux « objectifs éducatifs de la Nation » et entre de ce fait dans le champ du principe de gratuité de la formation énoncé par le préambule de la Constitution de 1946.

C. DES RÉSULTATS DÉCEVANTS DUS EN PARTIE AUX MESURES FINANCIÈRES ET RÉGLEMENTAIRES PRISES EN DÉBUT DE LÉGISLATURE

1. Des chiffres d’entrée dans l’apprentissage encore loin des objectifs annoncés

Les chiffres d’entrée en apprentissage demeurent insuffisants par rapport aux objectifs fixés. Ainsi, le nombre d’entrée a diminué de 8 % en 2013 par rapport à 2012, passant de 297 000 à 273 000. Cette baisse s’est prolongée en 2014, avec un total de 265 000 nouveaux contrats d’apprentissage comptabilisés dans le secteur privé, équivalent à une nouvelle baisse annuelle de 3 %. Ce même mouvement d’une diminution certes réduite mais encore réelle du nombre d’entrées en apprentissage s’est poursuivi en 2014.

Ces évolutions sont retracées par le graphique suivant.

NOMBRE DE NOUVEAUX CONTRATS D’APPRENTISSAGE ENREGISTRÉS PAR ANNÉE SELON LE NIVEAU DE FORMATION PRÉPARÉ

Source : Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES).

L’année 2015 connaîtrait, selon les chiffres provisoires, une augmentation de l’ordre de 2,1 % du nombre d’entrées dans l’apprentissage, avec un nombre d’entrée de l’ordre de 280 000 nouveaux apprentis.

Le nombre d’apprentis serait à la fin de 2015 de 402 900, soit un différentiel encore important avec l’objectif des 500 000.

2. Un secteur très sensible aux mesures prises en début de législature

Autant que la conjoncture économique difficile, la remise en cause du soutien financier aux employeurs pour le recrutement d’apprentis dû à des considérations ayant plus à voir avec le souci de réduire les dépenses publiques que d’encourager l’apprentissage – suppression du crédit d’impôt apprentissage et suppression de l’indemnité compensatrice forfaitaire (ICF) tardivement remplacée par une nouvelle prime en tout état de cause inférieure à son niveau antérieur –, conjuguées à des freins structurels au développement de l’apprentissage, ont joué un rôle important dans le recul des entrées en apprentissage constaté en 2013 et 2014.

S’ajoutant aux freins préexistant et aux difficultés financières, de nouvelles dispositions ont créé des difficultés supplémentaires dans le recrutement et la formation des apprentis.

Le décret n° 2013-914 du 13 octobre 2013 a été très préjudiciable à l’entrée des mineurs dans l’apprentissage. En effet, le droit du travail tant interne qu’européen – à travers notamment la directive 94/33/CE du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail – encadre strictement le travail des mineurs en définissant les dérogations possibles à l’interdiction du travail des mineurs, en particulier dans le cas des travaux présentant des risques pour leur santé ou leur sécurité.

Les rapporteurs souscrivent, bien évidemment, à la nécessaire protection des mineurs. Cependant le décret mentionné relatif à la procédure de dérogation prévue à l’article L. 4153-9 du code du travail a prévu de passer d’une procédure de dérogation annuelle et individuelle demandée à l’inspection du travail par l’employeur à une dérogation triennale et collective, attachée à un lieu de travail. Il s’agissait en théorie d’un assouplissement mais la nouvelle procédure, du fait de la demande d’une fiche unique d’évaluation des risques pour l’ensemble des tâches, est apparue rapidement insoluble pour les PME et notamment celles qui embauchaient des apprentis. Par ailleurs, les inspecteurs du travail ont vu leur responsabilité engagée sur un champ beaucoup plus large que précédemment.

Les entrées en apprentissage ont connu une diminution sensible dans des secteurs où l’accidentalité est importante – agriculture et forêt notamment – car les maîtres d’apprentissage se sont montrés réticents à prendre des apprentis pour lesquels l’apprentissage du travail est devenu trop complexe eu égard à la réglementation. Ces apprentis étaient par ailleurs issus des milieux sociaux les plus défavorisés.

D. Des mesures correctives qui commencent À porter leurs fruits

À la suite de la baisse du nombre des entrées dans l’apprentissage, diverses mesures ont été mises en œuvre afin de corriger les effets pervers des mesures précédentes et d’encourager l’apprentissage :

– de nouvelles dispositions financières sont entrées en vigueur, telles que la fraction régionale, l’augmentation du quota ou l’aide au recrutement ;

– le décret n° 2013-914 précité a été corrigé : le décret n° 2015-443 du 17 avril 2015 relatif à la procédure de dérogation prévue à l’article L. 4153-9 du code du travail pour les jeunes âgés de moins de dix-huit ans prévoit désormais que les employeurs pourront affecter des jeunes de moins de 18 ans à des travaux « à caractère dangereux » non plus après autorisation par l’inspection du travail, mais sur simple déclaration préalable, dans le but de protéger les apprentis « sans créer de contrainte nouvelle de gestion ». La responsabilité est de nouveau celle des employeurs qui connaissent le mieux les contraintes et les dangers des tâches qu’ils demandent d’accomplir à leurs apprentis ;

– des outils de communication ont été mobilisés afin de relayer auprès du grand public les informations relatives à l’apprentissage, à l’appui des différents réseaux institutionnels, y compris au sein de l’Éducation nationale. Celle de 2015 a fait l’objet de spot télévisé avec le slogan : « l’apprentissage, c’est votre avenir ». L’information des élèves dans le secondaire a plus particulièrement été renforcée pour favoriser leur orientation scolaire vers l’apprentissage, à partir notamment de la rentrée 2015. L’outil d’affectation AFFELNET permet désormais de formuler un vœu d’orientation vers l’apprentissage au même titre que vers un lycée général ou professionnel ;

– 20 000 places d’apprentis supplémentaires dans les établissements publics locaux d’enseignement devraient être créées grâce au travail de mobilisation et de formation des enseignants ;

– s’agissant plus spécifiquement de la fonction publique, l’effectif en apprentissage augmente avec une première tranche de recrutement de 4 000 apprentis en 2015 puis une seconde de 6 000 apprentis à la rentrée 2016.

L’apprentissage dans la fonction publique, s’il est en augmentation, reste toutefois largement en deçà des objectifs souhaités. En effet, il souffre de deux freins structurels : la question de la réussite au concours qui conditionne l’accès à l’emploi et celle du financement de l’apprentissage dans le secteur public.

E. PROPOSITIONS DES RAPPORTEURS : VALORISER L’APPRENTISSAGE ET LES APPRENTIS

1. Conserver deux voies d’alternance

Aujourd’hui le système d’apprentissage est dual. Il fait cohabiter la voie académique et celle du contrat de professionnalisation alors que des pays en pointe dans le domaine de la formation, comme l’Allemagne, ne connaissent qu’une seule voie.

La révolution systémique de la voie unique ne manquerait pas d’avantages : facilitation de la gestion par les entreprises, suivi et contrôle assurés par une seule administration, procédures d’agrément unifiées. Pour l’entreprise et l’apprenti, l’unicité du contrat serait en outre un facteur de simplification et donc d’attractivité qui permettrait à n’en pas douter d’augmenter le nombre d’entrées dans l’apprentissage.

En revanche, il n’est pas certain que la voie unique – outre qu’elle nécessiterait une véritable révolution des mentalités – permette une plus grande employabilité des apprentis à l’issue de leur formation. En effet, l’apprentissage prodigue un savoir-faire mais également un savoir et un savoir-être qui sont autant de prérequis pour être un travailleur efficace, capable de s’adapter à un environnement économique changeant. La tentation d’exclure l’Éducation nationale de la définition des programmes de l’action de formation ne semble pas opportun aux rapporteurs.

En définitive, il est impératif de mettre fin à la trop forte étanchéité qui continue d’exister aujourd’hui en France entre le monde de l’éducation et le monde de l’entreprise pour mieux adapter l’offre de formation aux besoins des entreprises, mais souhaitable de garder un apprentissage relevant de la formation et le contrat de professionnalisation ouvert à tous les publics.

Les CREFOP sont l’instance adéquate pour permettre une meilleure articulation des régions, des rectorats et des partenaires sociaux dans l’élaboration de la carte des formations professionnelles initiales. Par ailleurs, il arrive encore trop souvent que les contenus de la formation conduisant au même diplôme diffèrent sensiblement si cette formation est assurée par l’Éducation nationale ou par les chambres des métiers.

Proposition n° 9 :

Accroître le rôle des CREFOP dans le domaine de l’alternance afin de rapprocher les différentes voies et de renforcer l’employabilité quelle que soit la voie suivie.

2. Neutraliser le facteur de l’âge des apprentis

Des progrès importants ont été réalisés dans les dernières années pour améliorer le statut de l’apprenti avec notamment la création de la carte « Étudiant des métiers » par la loi n° 2011-893 du 28 juillet 2011 pour le développement de l’alternance et la sécurisation des parcours professionnels. Par ailleurs, la loi du 5 mars 2014 a instauré un CDI en apprentissage sans remettre en cause la protection particulière dont bénéficie l’apprenti pendant sa période de formation théorique et pratique. Enfin, les périodes d’apprentissage sont désormais intégralement prises en compte dans le calcul du nombre d’annuité.

Des avancées méritent néanmoins encore d’être réalisées pour conforter ce statut. En effet, le système de rémunération des apprentis – déterminé en pourcentage du SMIC en fonction de l’âge de l’apprenti et de sa progression dans le cycle de formation – peut avoir un effet négatif sur l’emploi des apprentis majeurs. En effet, le salaire d’un apprenti, dont le plancher est de 364 euros par mois pour un mineur en première année de formation, peut aller jusqu’à 1 136 euros par mois pour un apprenti de 21 ou plus en 3ème année de formation, ce qui est plus onéreux pour l’entreprise qu’un salarié qui travaille à temps complet dans l’emploi dans l’entreprise.

De plus, le système de rémunération ne tient pas compte du niveau du diplôme préparé et peut conduire des employeurs à préférer recruter des apprentis sur des contrats plus courts, le coût de l’apprenti s’élevant au fur et à mesure de la durée de sa formation.

Par ailleurs, depuis le 1er juillet 2015, les très petites entreprises de moins de 11 salariés sont exonérées de charges lorsqu’elles embauchent un apprenti mineur. Le Président de la République a estimé que cette mesure représentait un gain de 4 400 euros par an pour les entreprises. Les rapporteurs estiment bien évidemment que cette exonération de charges a un effet bénéfique pour les entrées dans l’apprentissage mais elle crée un effet de seuil important pour l’entrée en apprentissage des jeunes majeurs alors qu’il existe une réelle demande de la part de jeunes adultes qui souhaitent se réorienter après une ou deux années de cycle universitaire.

Proposition n° 10 :

Une refonte de la grille de rémunération serait opportune, pour tenir davantage compte du cursus et effacer le facteur de l’âge dans la rémunération.

Par ailleurs, il serait opportun de lisser également l’exonération de charges dont bénéficient les entreprises de moins de 11 salariés lorsqu’elles embauchent un apprenti mineur en prévoyant par exemple des exonérations partielles pour un apprenti âgé de 18 à 21 ans.

3. Valoriser les maîtres d’apprentissage

La valorisation de l’apprentissage suppose également de valoriser ceux qui assument le rôle de tuteurs des apprentis dans l’entreprise. Or, il n’existe pas aujourd’hui de véritable statut du maître d’apprentissage.

CONCLUSION

Deux ans après sa promulgation, la réforme du 5 mars 2014 est aujourd’hui effective et a redéfini les contours de la formation professionnelle et de la démocratie sociale. Malgré l’absence de publication des rapports dus par le Gouvernement au Parlement, les textes d’application de la réforme ont été publiés dans des délais resserrés et ont permis une mise en œuvre satisfaisante de la réforme.

Mené en six semaines en raison de l’agenda parlementaire, le travail de contrôle de la mise en application de la loi n’a pas permis d’auditionner davantage ou d’effectuer des visites de terrain, ce que les rapporteurs regrettent. Néanmoins, il apparaissait indispensable d’achever cette analyse le plus tôt possible, afin le cas échéant de pouvoir relayer dans un prochain projet de loi les préconisations formulées dans le rapport.

Au terme de leurs travaux, les rapporteurs effectuent un bilan satisfaisant de la mise en application de la loi du 5 mars 2014. En dépit de l’ampleur des dispositions modifiées, les nouveaux outils ont été déployés et les instances créées ont pris leurs marques dans le paysage institutionnel. Après un début difficile, présagé par l’ensemble des acteurs en raison de la refonte du dispositif de financement, les circuits financiers sont désormais opérants.

S’il est à ce stade trop tôt pour mesurer l’efficience des dispositifs créés ou rénovés, les auditions et les rencontres effectués par les rapporteurs ont toutefois mis en lumière l’appropriation croissante des enjeux de la formation par les individus, notamment concernant le compte personnel de formation (CPF), malgré la quasi absence de communication.

Il importe désormais de rester particulièrement vigilant quant à la réussite du CPF, qui ne pourra reposer que sur un conseil en évolution professionnelle effectif, avant d’envisager la création d’un compte personnel d’activité aux contours encore flous. Les rapporteurs rappellent que ces dispositifs complexes techniquement servent avant tout des projets sociétaux qui nécessitent un portage politique et un consensus autour de leurs objectifs.

L’investissement des partenaires sociaux dans les nouvelles instances et le renforcement de la compétence des régions sont en voie de faire réussir le pari de la gouvernance quadripartite dont l’équilibre reste fragile. Des expérimentations pourraient au mieux être envisagées dans le cadre de la mise en œuvre du programme de formation de 500 000 demandeurs d’emploi annoncé par le Président de la République. Il s’agit d’un programme classique qu’il conviendrait précisément d’articuler avec les nombreuses innovations de la loi du 5 mars 2014 et qui pourrait permettre d’affecter des crédits au développement du conseil en évolution professionnelle qui en est une des conditions de réussite.

Les voies d’alternance, quant à elles, font l’objet d’un consensus quant à leur utilité et leur potentiel en termes d’emploi et d’expérience. Les rapporteurs insistent donc sur la nécessité de stabiliser leur cadre juridique et financier.

Au terme de leurs travaux, et dans une dimension plus prospective, les rapporteurs invitent le législateur à identifier les principes fondamentaux qui régissent la formation professionnelle et l’apprentissage. À l’instar du rapport remis par la « Commission Badinter » (13) en janvier 2016 sur le code du travail, ces principes pourraient servir de prolégomènes à l’élaboration d’un code autonome de la formation professionnelle. Un tel code allégerait en outre d’autant le code du travail, et ferait donc œuvre de simplification.

Proposition n° 11 :

Formuler les principes fondamentaux qui régissent la formation professionnelle et l’apprentissage, comme prolégomènes à l’élaboration d’un code autonome de la formation professionnelle.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission des affaires sociales examine, en application de l’article 145-7 alinéa 1 du Règlement, le rapport d’information de MM. Gérard Cherpion et Jean-Patrick Gille sur l’application de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, lors de sa séance du mercredi 9 mars 2016.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Mes chers collègues, ce matin, l’ordre du jour de notre commission appelle l’examen du rapport sur la mise en application de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale.

Le contrôle de l’application des lois est une compétence importante des commissions parlementaires et d’ailleurs, compte tenu de l’inflation législative, nous ne pouvons que regretter le manque de moyens à notre disposition pour exercer le contrôle des lois que nous votons.

Toutefois depuis le début de cette législature, nous avons débattu de plusieurs rapports de ce type ; l’un concernant la mise en œuvre de la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé que j’avais eu le plaisir de vous présenter avec mon collègue Arnaud Robinet, rapporteur sous la précédente législature, un autre rapport sur la loi du 26 octobre 2012 relative aux emplois d’avenir, dont M. Jean-Marc Germain avait la charge, ou plus récemment, le rapport sur la loi du 30 mai 2013 portant réforme de la biologie médicale, sur le rapport de nos collègues Jean-Louis Touraine et Arnaud Robinet.

C’est avec plaisir et intérêt que nous entendrons aujourd’hui le rapport de nos collègues Jean-Patrick Gille et Gérard Cherpion, qui me semble aller bien au-delà du seul contrôle de la sortie des textes d’application de la loi, et peut fournir de véritables pistes de réflexion pour les textes législatifs à venir, et notamment pour l’avant-projet de loi dont il est question depuis des semaines – je crois que nous n’aurons jamais autant discuté d’un avant-projet de loi.

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur. Mes chers collègues, M. Cherpion et moi-même vous présentons en effet ce matin le rapport sur la mise en application de la loi du 5 mars 2014, dont nous venons de fêter le deuxième anniversaire.

Je voudrais préciser que nous n’avons eu que quelques semaines pour rédiger le rapport puisque nous souhaitions le rendre avant l’examen du projet de loi relatif aux nouvelles protections pour les entreprises et pour les salariés, qui devait initialement être présenté aujourd’hui en conseil des ministres. Nous sommes également désolés de ne pas avoir pu conduire certaines auditions dans le laps de temps qui nous était imparti, en particulier l’audition de la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP). Nous n’avons pas pu non plus effectuer de visite de terrain.

Je rappelle toutefois que le rapport que nous vous présentons est un rapport sur l’application de la loi, et non une évaluation de celle-ci ou des dispositifs qu’elle contient. L’évaluation a en effet été confiée par la loi elle-même au Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP), qui doit rendre prochainement un rapport sur la formation et sur le conseil en évolution professionnelle.

Nous avons choisi d’aller au-delà du délai de six mois après la promulgation de la loi prévu par le règlement de notre assemblée pour au moins deux raisons. D’une part, l’ampleur des modifications apportées par la loi appelait un grand travail d’application réglementaire, dont un bilan effectué à l’été 2014 n’aurait pu être que parcellaire. Plus fondamentalement, de nombreuses dispositions de la loi n’entraient en vigueur qu’au 1er janvier 2015, au premier chef le compte personnel de formation (CPF).

Nous avons aujourd’hui le recul d’une année d’application des différents dispositifs et pouvons donc en dresser un premier bilan.

Le rapport d’application effectue en premier lieu le recensement des mesures réglementaires prévues par la loi, avec l’appui des données mises à disposition par la Direction générale du travail (DGT) et la DGEFP. Avec plus de 80 % des dispositions publiées, dont 23 décrets en Conseil d’État, la réforme est aujourd’hui effective. En revanche, s’agissant plus spécifiquement des rapports du Gouvernement prévus par la loi, nous ne pouvons que regretter leur absence de publication dans les temps.

Ce rapport d’application va toutefois plus loin que le seul suivi réglementaire et tire les conséquences de la réforme « systémique » de la formation professionnelle issue de la loi du 5 mars 2014.

M. Cherpion et moi-même avons ainsi souhaité nous placer du point de vue du bénéficiaire de la formation, qu’il soit salarié ou demandeur d’emploi, dans une grande ou une petite entreprise, sans ou avec peu de qualification.

Ayant comme fil rouge l’enjeu de la qualification, nous avons orienté nos auditions et le présent rapport autour de quatre axes : d’abord, la refonte du financement, pilier de la réforme du 5 mars 2014 avec le passage d’une « obligation de payer » à une « obligation de former » ; la rénovation des outils de formation, ensuite, qu’il s’agisse du CPF, de l’entretien professionnel, de la validation des acquis de l’expérience (VAE) ou du conseil en évolution professionnelle, en inscrivant la formation dans une logique de parcours ; troisième thème retenu, la nouvelle gouvernance quadripartite, marquée par le rôle central des régions et la création de nouvelles instances paritaires ; enfin, l’enjeu spécifique de l’apprentissage.

Bien d’autres sujets auraient pu être abordés mais nous avons préféré nous concentrer sur la réforme de la formation professionnelle.

Plutôt que de retracer le contenu du rapport, il nous semble préférable de souligner les outils efficaces issus de la loi du 5 mars 2014 et d’identifier les dispositions problématiques pouvant être corrigées lors de nos prochains débats parlementaires.

S’agissant du financement de la formation professionnelle, le passage d’une obligation fiscale à une obligation sociale constitue un changement déterminant dans l’appréhension de la formation, considérée désormais comme un investissement au service tant du salarié et du demandeur d’emploi que de l’entreprise. D’ailleurs, nous nous interrogeons sur la possibilité de créer une déduction fiscale pour cet investissement. Alors que s’achève en ce moment la première collecte de la contribution unique, les auditions ont permis de souligner la rapidité avec laquelle les nouveaux circuits de financement ont été mis en place.

Plutôt qu’une diminution de l’effort de financement consacré à la formation, la réforme permet de distinguer clairement deux types de dépenses répondant chacune à leur propre finalité : d’une part, le financement direct d’actions de formation par l’employeur, traduisant son obligation de maintenir la capacité des salariés à occuper un emploi ; d’autre part, la contribution unique, support de la mutualisation et du fléchage des fonds, en particulier à destination des demandeurs d’emploi, du compte personnel et du congé individuel de formation (CIF).

Ce financement implique une redéfinition des missions des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) et un poids déterminant du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), devenu lui-même une forme de « méta-OPCA ».

Il conviendra de rester vigilant sur certains paramètres tels que les excédents de trésorerie des OPCA, une fois le bilan de la première collecte de la contribution unique effectuée.

Cette réforme du financement s’appuie ensuite sur des outils rénovés de la formation professionnelle, tous orientés vers deux objectifs : l’acquisition d’au moins un niveau de qualification et la sécurisation des parcours professionnels.

Il semble également important de rappeler « l’assouplissement » de la VAE, adopté à l’initiative de notre assemblée lors des débats parlementaires. Cette valorisation de l’expérience est en outre facilitée par la création d’un accompagnement à la VAE, lui-même éligible au CPF. Nous devons aujourd’hui aller plus loin, en insistant sur la nécessité de modulariser les formations et les certifications, en encourageant l’adaptation de l’organisation des formations, ainsi qu’en repensant la conception même de l’acte de formation, du positionnement jusqu’à la validation. Nous pouvons également réfléchir à y introduire d’autres types de formations telles que des formations à distance, ou des formations au numérique.

Il est également incontournable de dresser un premier bilan du CPF, alors que chaque titulaire vient de voir son compte alimenté en janvier. Avec 2,6 millions de comptes ouverts et 286 000 dossiers de formation validés, le dispositif poursuit sa montée en charge et entre dans sa phase d’appropriation.

Il importe toutefois que le dispositif ne soit pas dévoyé, notamment au regard des notions de consentement et de liberté dans l’utilisation du CPF, au cœur de l’esprit de la loi du 5 mars 2014. De fait, la surreprésentation des demandeurs d’emploi dans les statistiques de mobilisation du CPF, qui représentent 96 % des heures consommées, interroge sur l’effectivité de leur assentiment.

Nous reconnaissons l’efficacité du travail mené par les différentes institutions en charge de la mise en place de ce compte, avec, en premier lieu, le rôle déterminant de la Caisse des dépôts et consignations dans la mise en place du système d’information et de gestion des comptes : les 40 millions de comptes sont prêts et n’attendent que d’être ouverts. La faiblesse de la communication, et notamment de la communication gouvernementale autour du CPF, peut, en revanche, susciter une interrogation.

Nous devons à présent nous arrêter spécifiquement sur le sujet des listes de formations éligibles au CPF. La logique de listes répond au besoin de régulation de l’offre de formation et des financements, indispensable pour vérifier l’adéquation des formations suivies avec les besoins présents et futurs de notre économie.

Le système actuel est toutefois unanimement reconnu comme trop complexe et rigide. Ainsi, deux titulaires d’un CPF n’ont pas accès aux mêmes formations selon qu’ils relèvent de régions ou de branches distinctes. Il est donc urgent de simplifier ce mécanisme en se plaçant du point de vue de l’utilisateur, c’est-à-dire en fusionnant l’ensemble des listes dans un document unique et en renforçant leur régulation à l’échelle nationale.

Nous préconisons par ailleurs d’étendre la mobilisation du CPF à la prestation de bilan de compétences.

Dans une dimension plus prospective, l’universalisation du CPF constitue le principal défi à relever. Cela passe par l’extension du compte aux fonctionnaires et aux travailleurs indépendants, mais aussi par le développement du conseil en orientation professionnelle, ce qui suppose d’y consacrer des moyens spécifiques – mais le plan « 500 000 formations pour les chômeurs » pourrait répondre à cet objectif. Le développement du conseil en orientation professionnelle nécessiterait le développement d’une culture commune entre les différents acteurs chargés de le mettre en place.

Notons que l’universalité du droit de formation pose aussi la question de la légitimité des partenaires sociaux à gérer seuls ce dispositif.

Pour aborder les questions relatives à la nouvelle gouvernance, je cède la parole à Gérard Cherpion en soulignant le plaisir que j’ai eu à travailler avec lui et les convergences de vue qui nous ont permis d’énoncer une dizaine de préconisations communes.

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Le plaisir de travailler avec Jean-Patrick Gille était partagé, comme pour l’ensemble des rapports que nous avons déjà rédigé en commun.

Je prends le relais afin de vous exposer notre analyse et nos propositions sur les deux derniers points que nous avons souhaité traiter, à savoir la création des nouvelles instances chargées de coordonner les politiques publiques en matière de formation, d’orientation et d’emploi et la question de l’apprentissage.

Concernant le premier point, le rapport revient sur l’architecture de pilotage du système issu de la loi du 5 mars 2014. Elle repose sur les couples CNEFOP – CREFOP (comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles) d’un côté et sur les instances paritaires COPANEF (Comité interprofessionnel pour l’emploi et la formation professionnelle) – COPAREF (comité paritaire interprofessionnel régional pour l’emploi et la formation professionnelle) de l’autre.

Le CNEFOP, qui remplace l’ancien Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV), est composé de représentants de l’État, des régions et des partenaires sociaux. Son rôle est essentiel – nous l’avons vu sur la question des listes de formations éligibles au CPF, sur lesquelles Jean-Patrick Gille et moi avons quelques points de divergence – et il est appelé à prendre encore plus de place, car c’est la seule instance qui regroupe tous les acteurs du système.

Le COPANEF, instance paritaire, tend quant à lui à devenir un organe politique essentiel de la formation professionnelle. Ceci est d’autant plus vrai que le couple qu’il forme avec le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), dont les abondements financiers proviennent quasi exclusivement des entreprises – même s’il existe une participation de l’État – tend à fonctionner comme un tandem agissant de manière complémentaire : l’un arrête les grandes orientations, le COPANEF, et l’autre, le FPSPP, tient le rôle d’organe de gestion. Cette autonomisation des partenaires sociaux pose la question du rôle de l’État. La question que nous posons, sans y apporter à ce stade de réponse, est la suivante : quelle est la légitimité pour les partenaires sociaux de gérer un droit qui se veut universel, le droit à la formation ? Quelle pourrait être donc la place de l’État dans cette nouvelle architecture ? Je suppose que nous aurons à nouveau ce débat dans les semaines qui viennent, au travers de l’examen du projet de loi présenté par Mme Myriam El Khomri.

Le dernier point abordé dans le rapport est évidemment celui de l’apprentissage. Les règles régissant le secteur ont subi un certain nombre de modifications, d’ordre financier – en particulier la suppression du crédit d’impôt et de l’indemnité compensatrice forfaitaire – mais aussi législatives et réglementaires. Or, ce secteur est très sensible à la réglementation.

Ces mesures expliquent partiellement les reculs des entrées en apprentissage de l’ordre de 8 % en 2013 et de 3 % en 2014, même si l’année 2015 enregistre une légère augmentation du nombre d’entrées de l’ordre de 2,1 %.

Ce nouveau démarrage trouve notamment ses causes dans le fait que le Gouvernement est partiellement revenu sur les mesures qui décourageaient de prendre un jeune en apprentissage, mais aussi dans une conjoncture économique plus favorable. Nous ne pouvons qu’applaudir à ces nouveaux chiffres. Toutefois, l’objectif de 500 000 apprentis, une nouvelle fois affirmé par le Président de la République, semble encore hors de portée d’autant que la croissance économique n’est toujours pas suffisante pour porter cette augmentation substantielle.

Le rapport formule différentes propositions pour tendre vers cet objectif. La première consiste à bien maintenir les deux voies d’alternance que constituent la formation initiale et le contrat de professionnalisation. Elles ne s’adressent pas aux mêmes publics et leur fusion serait porteuse, à notre sens, de plus de dangers que de bienfaits. En revanche, il serait opportun de rapprocher l’Éducation nationale et les formations proposées par les professionnels. Les CREFOP nous sont apparus comme l’instance adaptée pour mettre en place ces synergies. Par ailleurs, la grille des rémunérations est encore trop dépendante de l’âge de l’apprenti et décourage les employeurs à embaucher les plus âgés des candidats qui leur sont proposés. Enfin, il serait opportun de stabiliser l’environnement règlementaire pour un certain nombre d’années afin de donner un peu de visibilité aux acteurs, aux chefs d’entreprise en particulier.

Un mot enfin, à l’invitation de M. Gille, sur la onzième et dernière proposition du rapport : il s’agit de « formuler les principes fondamentaux qui régissent la formation professionnelle et l’apprentissage, comme prolégomènes à l’élaboration d’un code autonome de la formation professionnelle ». Cela évoquera pour certains un autre texte.

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur. Cela aurait le mérite alléger ipso facto le code du travail, puisqu’il serait vidé de ses dispositions relatives à la formation professionnelle !

M. Michel Liebgott. Je salue le travail conjoint des deux rapporteurs.

En guise d’introduction, je voudrais souligner qu’avec la loi du 5 mars 2014, nous sommes passés d’une obligation de payer à une obligation de faire. Il ne s’agit pas seulement de rhétorique, c’est un message fort en faveur de la recherche de compétitivité dans les entreprises. La formation professionnelle doit effectivement concourir à cet accroissement de compétitivité.

Les premiers chiffres en notre possession plaident en faveur de la mise en œuvre de cette loi : au 1er mars 2016, plus de 2,7 millions de comptes ont été activés, 300 000 formations ont été validées. La durée moyenne de ces formations était de 220 heures, alors qu’en novembre 2015 elles n’étaient que de 160 heures : j’y vois là un signe positif.

La loi introduit également la notion de qualité : elle impose aux principaux financeurs des actions de formation de s’assurer de la capacité des prestataires à dispenser une formation de qualité, en définissant sept critères de celle-ci, entrés en vigueur le 1er janvier 2016.

La loi suscite pourtant des interrogations. Je reviendrai en premier lieu sur la certification. La plupart des demandes des salariés sont concentrées sur quatre types de certification : les langues vivantes, la bureautique, le permis de conduire et l’aptitude à la conduite en sécurité. Cela paraît peu, même si c’est important et fondamental pour trouver un emploi. Je note toutefois que la loi du 5 mars 2014 permet à un salarié de suivre une formation dispensée dans une autre région que sa région d’origine.

Ensuite, cela a été dit, ni les travailleurs indépendants, ni les fonctionnaires, ni les créateurs d’entreprise n’ont accès au compte personnel de formation. Il serait bon que le compte personnel d’activité (CPA) transforme le CPF en droit universel afin que ce droit ne se limite pas à certaines catégories.

Concernant l’objectif fixé par le Gouvernement de 500 000 apprentis en 2017, pensez-vous que cet outil législatif contribuera à la réalisation de cet objectif ? Si tel n’est pas le cas, pensez-vous que le nombre de 500 000 apprentis est trop optimiste ? Si la loi est un obstacle pour atteindre cet objectif, comment peut-il être levé ?

S’agissant des autres éléments positifs contenus dans la loi du 5 mars 2014, il faudra les vérifier bien au-delà du présent rapport puisque la loi vient d’entrer en vigueur : son évaluation demande donc un peu de recul.

Un dernier point sur la portabilité du CPF, qui permet de suivre le salarié tout au long de sa carrière professionnelle : le fait qu’on laisse au salarié l’initiative de la formation, sans avoir besoin de l’autorisation de l’employeur pour l’engager, encourage les reconversions professionnelles, ce qui me paraît très positif dans le monde changeant dans lequel nous vivons.

M. Bernard Perrut. Je tiens à saluer la qualité du travail mené par les rapporteurs, sur un sujet, la formation professionnelle, qui dépasse les clivages politiques. La loi du 5 mars 2014 a été votée il y a deux ans : ce délai permet de mieux appréhender son impact. D’après les informations données aux rapporteurs, 47 textes réglementaires ont été pris depuis l’entrée en vigueur de la loi, mais dix sont toujours en souffrance, dont un texte sur les travailleurs handicapés. Qui plus est, aucun des huit rapports au Parlement demandés dans le cadre de ce texte n’a pour l’heure été rendu. Quand le seront-ils ?

La loi du 5 mars 2014 a substitué à l’obligation pesant sur les employeurs de payer pour financer la formation professionnelle une obligation de former, faisant ainsi de la formation professionnelle un moteur puissant du dialogue social. La principale nouveauté de cette loi réside dans la création du compte personnel de formation, dont le financement a été rénové avec la mise en place d’une contribution unique. Pourtant, la mise en œuvre de ce compte se révèle complexe et se pose la question de la pertinence des formations éligibles sur les listes. Il est indispensable de simplifier l’éligibilité des formations sur les listes et de mieux contrôler la qualité des formations dispensées. À ce jour, 2,6 millions de comptes personnels de formation ont été ouverts : c’est insuffisant. En outre, 79 % des formations ont bénéficié à des demandeurs d’emploi. Cependant, s’il est indispensable de former les personnes privées d’emploi, il est aussi important de ne pas oublier les salariés.

Comme l’indiquent les rapporteurs, il est essentiel de mieux communiquer sur ce compte personnel de formation. Aujourd’hui, trop de formations sont encore absentes des listes et les différents publics n’ont pas accès aux mêmes listes de formations. Il conviendrait ainsi d’ouvrir le compte personnel de formation à tous les publics, y compris aux professions indépendantes et aux professions libérales, – ce qui, semble-t-il pourrait être envisagé à l’horizon du 1er janvier 2018 – mais aussi aux agents publics.

Le futur projet de loi relatif au code du travail devrait vraisemblablement permettre de faire aboutir le processus d’intégration du compte personnel de formation dans le compte personnel d’activité. On sait que ce dernier n’est à ce jour qu’une coquille vide, qui ne suscite d’ailleurs pas l’enthousiasme chez les partenaires sociaux, les négociations engagées à ce sujet se déroulant pour le moment a minima. La mise en place d’un secrétariat d’État chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage ne permettra pas de parvenir à l’objectif fixé de 500 000 apprentis d’ici la fin du quinquennat, en raison sans doute des réformes dommageables qui ont été engagées en matière d’apprentissage au début de ce même quinquennat.

Je ne peux que souscrire au refus des rapporteurs d’une « voie unique » et à une démarche alliant simplification, clarification et efficacité.

Je souscris également à la proposition des rapporteurs de mettre en place un code autonome de la formation professionnelle. Dans un contexte de chômage record et de surcoût du travail, il est indispensable de libérer les capacités des entreprises et d’approfondir l’investissement dans la formation.

M. Christophe Cavard. Le projet de loi relatif à la formation professionnelle visait à faire de celle-ci une véritable plus-value. C’était tout l’enjeu de la création du compte personnel de formation, dont la fusion est désormais envisagée avec le compte pénibilité au sein du compte personnel d’activité. L’objectif final est d’instaurer un compte recensant l’ensemble des droits acquis par le salarié.

Si la loi porte ses fruits, il reste néanmoins des difficultés à surmonter, notamment s’agissant des jeunes les moins qualifiés, pour lesquels le retard est toujours important. L’objectif de proposer une formation à 500 000 demandeurs d’emploi est également une initiative louable.

Le mécanisme de financement de la formation professionnelle a été grandement amélioré, mais il subsiste des interrogations, notamment sur le rôle des collectivités territoriales en la matière et les procédures de reconnaissance des organismes de formation.

Nous avions prévu dans le cadre du texte la mise en place d’instances de gouvernance de la formation professionnelle au niveau territorial. Je pense notamment à la place donnée à l’économie sociale et solidaire, pour laquelle nous n’avons pas réellement eu de retour sur le degré d’implication et les résultats obtenus.

Il convient toutefois de saluer cette loi qui a constitué une véritable avancée.

Mme Dominique Orliac. Deux ans après la loi du 5 mars 2014, qui a mis en place le compte personnel de formation, nous sommes à l’heure du bilan d’une réforme de la formation professionnelle qui avait pour objectifs de développer les compétences des salariés et d’améliorer la compétitivité des entreprises. Je serais curieuse de savoir si les rapporteurs disposent d’éléments sur la manière dont les choses se passent dans des pays voisins. Je pense en particulier à la Suisse, où le nombre de jeunes en apprentissage est particulièrement élevé et où ce type de formation est très valorisé. Je rappelle que le taux de chômage des jeunes en Suisse est très bas : il était en 2015, pour les moins de 24 ans, de 6,4 %, contre 24,5 % en France, et – rappelons-le – 7 % en Allemagne. Il est essentiel que nous apprenions dans notre pays à changer de point de vue sur l’apprentissage, surtout à l’heure où les changements dans la vie professionnelle sont monnaie courante.

M. Arnaud Richard. Je remercie les rapporteurs pour leur travail et rappelle à mon tour l’importance de ce texte. Le groupe UDI s’était abstenu lors du vote de la loi, qui contenait des dispositions auxquelles nous ne pouvions souscrire. Malgré tout, elle comportait de nettes avancées, en particulier la mise en place du compte personnel de formation. Ce texte avait par ailleurs l’avantage d’être la traduction d’un accord national interprofessionnel conclu en décembre 2013, ce qui avait garanti un débat serein avec les partenaires sociaux. C’est loin d’être le cas aujourd’hui.

Je souhaiterais adresser trois questions aux rapporteurs : en premier lieu, la loi de 2014 offre-t-elle un cadre juridique suffisant pour permettre la mise en œuvre pleine et entière de la réforme de la formation professionnelle ou faudrait-il profiter du projet de loi à venir sur la réforme du code du travail pour aller encore plus loin, étant observé que la formation professionnelle est en première ligne dans la lutte contre le chômage ?

Deuxièmement, la hausse du nombre d’entrées en apprentissage en 2015 ne gomme pas les fortes baisses successives intervenues les deux années précédentes. L’objectif de 500 000 apprentis d’ici 2017 a-t-il encore une chance d’être atteint ?

Enfin, avez-vous des préconisations à formuler au sujet de la taxe d’apprentissage, dont le produit a été entièrement redistribué à la faveur de la loi du 5 mars 2014 ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je relève une phrase de votre rapport qui me semble importante : « (…) La modification des formes d’emploi et de la relation de travail, la discontinuité des trajectoires individuelles et l’émergence de nouveaux statuts nourrissent un écart croissant entre notre modèle social et les parcours professionnels ». Notre modèle social doit aujourd’hui intégrer ces mutations profondes. Il s’agit d’un défi de taille pour notre système de formation professionnelle, qui reste un système complexe et rigide, qui fonctionne de manière quadripartite. Des réformes parfois délétères mises en œuvre en début de législature – je pense à la suppression du crédit d’impôt apprentissage et de l’indemnité compensatrice forfaitaire (ICF) – rendent ce travail de réflexion d’autant plus utile.

Mme Isabelle Le Callennec. Malgré l’adoption d’une loi voilà deux ans, toutes les questions sont loin d’être réglées en matière de formation professionnelle. On doit en rappeler les enjeux, notamment financier, puisqu’on parle de 32 milliards d’euros. L’avant-projet de loi « Travail » prévoit d’ailleurs l’intégration du compte personnel de formation (CPF) dans le compte personnel d’activité. On peut toutefois relever les résultats obtenus dans la formation des demandeurs d’emploi.

Au-delà de ces considérations d’ordre général, j’ai trois questions plus précises.

Le travail de nos rapporteurs fait apparaître l’extrême complexité du système, que nous avions déjà relevée lors du débat sur la loi, du fonctionnement du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles, et de l’ensemble des institutions compétentes. Au-delà de la proposition – un peu timide – des rapporteurs, comment rapprocher davantage, y compris sur le terrain, les différents intervenants ? Il faut veiller à ne pas compliquer davantage en voulant faire simple, en particulier à l’échelle des régions.

La question des listes doit être retravaillée. Il conviendrait en particulier que les entreprises soient davantage associées à leur définition afin que les formations proposées aux demandeurs d’emploi soient pertinentes. Quelles sont les mesures envisagées en ce sens ?

Le président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises estimait que le nombre de chômeurs diminuerait, que les dépenses augmenteraient, et s’inquiétait de la fin des fonds mutualisés. Des entreprises ont également pu faire ce constat. Qu’en est-il ?

Mme Martine Carillon-Couvreur. S’agissant de l’un des axes majeurs de la loi, à savoir le fait de passer de l’obligation de payer à l’obligation de former, je souhaite saluer la proposition de mobiliser le CPF au titre des bilans de compétences et l’accent mis sur la valorisation des formations qualifiantes.

Je m’interroge sur les voies et moyens d’une extension du champ des formations offertes, certaines semblant encore inaccessibles.

Je voudrais également dire un mot des publics spécifiques, notamment ceux relevant des établissements et services d’aide par le travail. Le décret relatif à ces publics, prévu par la loi, n’est toujours pas publié ; il serait utile que notre commission veille à sa publication au cours de l’année.

M. Patrick Hetzel. Je rejoins totalement les rapporteurs lorsqu’ils indiquent que la tentation d’exclure l’Éducation nationale des programmes de formation est une mauvaise idée et qu’il faut trouver un bon équilibre. Vous faites ressortir par ailleurs les différences de qualification et de reconnaissance de diplômes, pourtant identiques, selon qu’ils sont délivrés par l’Éducation nationale ou par les chambres des métiers. C’est effectivement problématique.

La proposition n° 9, tendant à accroître le rôle des comités régionaux de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CREFOP) dans le domaine de l’alternance afin de rapprocher les différentes voies et de renforcer l’employabilité quelle que soit la voie suivie me semble très sage. Mais comment procéder, concrètement, pour renforcer le rôle des CREFOP ?

Mme Monique Iborra. Il pourrait être utile que les rapporteurs sur l’application d’une loi ne soient pas nécessairement les mêmes que ceux qui ont rapporté le texte d’origine, afin d’avoir un regard extérieur.

Il est difficile de juger de l’efficacité opérationnelle d’une loi deux ans seulement après son entrée en vigueur. Pour autant, le rapport aurait pu essayer d’analyser ce qui se pratique concrètement au niveau régional, niveau pertinent en matière d’opérationnalité dont le rôle doit être renforcé. La question du financement ne m’inquiète pas : le problème de la formation professionnelle n’est pas son financement, mais son pilotage trop centralisé.

Ce rapport formule, en matière d’apprentissage, des propositions diamétralement opposées à celles récemment présentées dans une proposition de loi de Christian Estrosi ; cela montre que nous pouvons nous influencer mutuellement de manière utile.

Je voudrais dire que la formation ne peut, de mon point de vue, se substituer à la réforme du code du travail.

Enfin, Jean-Patrick Gille a parlé de culture commune. Mais avec qui ? Avec quelle coordination ? Il est dommage que ces questions ne soient pas évoquées dans le rapport.

M. Jean-Louis Costes. L’apprentissage est la voie royale pour permettre aux jeunes d’accéder à l’emploi. Cependant, malgré des efforts, la France n’a pas retrouvé le goût de l’apprentissage et est en retard, du fait notamment de contraintes administratives et techniques imbéciles. Ainsi, un agriculteur de ma circonscription ne recrutera plus d’apprentis à l’avenir, car il leur est désormais interdit de nourrir les vaches…

M. Denys Robiliard. Comme les intervenants précédents, je tiens à saluer la qualité du travail des rapporteurs, même s’il est encore trop tôt pour faire une véritable évaluation des effets de la loi. Je dois dire que je ne partage pas l’analyse précédemment développée sur le mode de désignation des rapporteurs et l’intérêt que présenterait un regard extérieur.

Sur le fond, trois questions se posent.

Les craintes d’une réduction de la mutualisation se sont-elles avérées fondées ?

Le conseil en évolution professionnelle est un dispositif porté par cinq institutions. Quelles sont vos propositions pour permettre une montée en puissance plus rapide ?

La loi poursuivait notamment comme objectif de donner une formation « socle » aux personnes non formées, et plus seulement de former davantage celles qui le sont déjà. De quelles informations disposez-vous sur la satisfaction de cet objectif ?

M. Dominique Dord. Je souhaite interroger les rapporteurs sur la complexité de la gouvernance en matière de formation. La remise en cause du paritarisme dans la gestion de la formation fait partie du débat public, les régions souhaitant notamment jouer un rôle plus important. Comme cela a été précédemment relevé, il est difficile d’être à la fois cotisant et gérant. Avez-vous de nouvelles propositions à ce sujet ?

M. Michel Issindou. La loi du 5 mars 2014 est cohérente. La création du compte personnel de formation ainsi que la nécessité de former, et non plus seulement de payer, constituent de belles avancées. Toutefois, malgré la réforme de 2008 et celle de 2014, les mêmes questions reviennent toujours en matière de formation professionnelle. Nous avons toujours des difficultés à former les salariés à l’évolution rapide des métiers. Ce sont trop souvent les mêmes personnes qui bénéficient de formations. On constate également parfois un manque d’appétence de certains salariés pour ces formations. Se pose ensuite l’éternel problème de la formation des chômeurs et de l’inadaptation de la formation à l’offre de travail. La compétitivité des entreprises est la clé de notre réussite collective, mais il reste à rendre les différents dispositifs opérationnels. Je m’interroge enfin quand je lis la phrase suivante, figurant dans votre rapport : « le pilotage de ces outils s’appuie sur une gouvernance rénovée de la formation professionnelle désormais quadripartite ». Une gouvernance quadripartite me semble plutôt inquiétante.

M. Arnaud Robinet. Je souhaite aborder la question de l’apprentissage. Je suis d’accord avec la fixation d’objectifs quantitatifs ambitieux, avec une réflexion sur une modification du financement ou encore avec l’idée de confier davantage de responsabilités aux régions. Mais ne gagnerait-on pas à être plus pragmatique ? Ne faudrait-il pas plutôt proposer de revoir l’âge d’entrée dans l’apprentissage, en l’abaissant de 16 à 14 ans, ou modifier la réglementation ? En effet, les chefs d’entreprise, notamment dans le secteur du bâtiment, ne sont pas incités à accueillir des apprentis pour leur apprendre la réalité d’un métier sur le terrain.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Nous aurons l’occasion de revenir sur ces questions lors de l’examen du projet de loi réformant le droit du travail, qui comporte un volet consacré à l’apprentissage.

Mme Chaynesse Khirouni. Je souscris totalement à votre première proposition consistant à prévoir un mécanisme de déduction fiscale, voire de baisse d’impôt pour les entreprises en contrepartie de leurs efforts d’investissement dans la formation. J’irais même plus loin en étendant ce dispositif aux entreprises qui recrutent, à la place du maquis actuel d’aides et d’exonérations diverses souvent peu lisibles pour les petites et moyennes entreprises.

J’ai deux interrogations. La première concerne la formation des salariés des associations. La loi a fixé un seuil de 1 % de la masse salariale à consacrer à la formation, les accords de branche pouvant fixer un taux supérieur. Or, nous savons tous qu’il est difficile de conclure de tels accords dans certains secteurs. Sur le terrain, il m’a été indiqué que les fonds consacrés à la formation étaient en baisse par rapport à ce qui se pratiquait antérieurement compte tenu de ce seuil. Dressez-vous le même constat ?

Ma deuxième interrogation concerne les organismes qui forment les créateurs d’entreprises. La loi du 5 mars 2014 a créé les comités paritaires interprofessionnels régionaux pour l’emploi et la formation professionnelle (COPAREF), qui constituent désormais l’une des nouvelles instances de gouvernance de la formation professionnelle au niveau régional. Les missions confiées à cette instance sont particulièrement importantes, puisqu’elle assure la coordination des politiques de formation professionnelle et qu’elle élabore la liste des formations éligibles au compte personnel de formation, en lien avec les pouvoirs publics. Or, j’ai été alertée par un organisme de formation régional expérimenté, qui œuvre depuis plus de 33 ans en faveur de la création d’entreprises et a été un acteur privilégié du dispositif « contrat de transition professionnelle » (CTP), aujourd’hui généralisé sur l’ensemble du territoire sous l’appellation CSP. Ce dispositif permet à des demandeurs d’emploi victimes d’un licenciement économique de bénéficier d’un accompagnement renforcé. Or, cet organisme ne peut plus intervenir car la formation qu’il dispense a fait l’objet d’un refus d’accompagnement de la part du COPAREF de Lorraine au motif qu’elle n’est pas référencée au niveau national et qu’elle n’est pas certifiante. Comment peut-on exiger d’un entrepreneur un diplôme de créateur d’entreprises pour démarrer son entreprise ? Cela me paraît ubuesque et va à l’encontre de l’objectif du doublement du nombre de demandeurs d’emploi accompagnés dans leur démarche de création d’entreprise. Partagez-vous ce constat ? Avez-vous des propositions à ce sujet ?

M. Dominique Tian. Je m’interroge sur les chiffres de l’apprentissage en 2015. Pouvez-vous préciser le nombre d’entrées et de sorties de l’apprentissage, ainsi que le nombre total d’apprentis ?

Mme Françoise Dumas. La loi du 5 mars 2014 a opéré une véritable réforme de fond. L’obligation de formation devient centrale, devant celle de payer. Concernant les plus jeunes, vous dénoncez la trop grande étanchéité entre le monde de l’éducation et celui de l’entreprise. Vous nous confirmez qu’il faut donner au comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CREFOP) un rôle central dans l’articulation entre les différents partenaires, et plus particulièrement les régions. Vous portez également, à juste titre, la préoccupation de l’employabilité des apprentis à l’issue de leur formation.

Nous devons par ailleurs poursuivre le travail accompli en matière d’accompagnement des jeunes en amont, notamment autour du savoir-être, afin de leur apporter la confiance dont ils ont besoin et de leur permettre de dépasser les stéréotypes qui perdurent. Quelles sont les modalités d’amélioration de ce double accompagnement, à la fois celui effectué par les maîtres d’apprentissage et celui ayant lieu au moment de l’entrée en apprentissage ?

M. Bernard Accoyer. Je souhaite interroger les rapporteurs sur les causes de la baisse du nombre d’entrées en apprentissage depuis 2012, au point que nous serons en 2015 à un niveau inférieur à celui de 2003. Y a-t-il un rapprochement à faire avec les contraintes introduites en matière de recrutement d’apprentis, comme ce fut le cas pour les stagiaires ? Ces derniers, lorsqu’ils ont la nationalité française, sont désormais écartés des postes à pourvoir dans les organisations non gouvernementales (ONG) siégeant à Genève.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Avant de donner la parole aux rapporteurs pour répondre à vos questions, je tiens à saluer la qualité du travail qu’ils ont réalisé sur un sujet d’une extrême technicité. La clarté de leur présentation illustre l’intérêt de l’exposé du projet de rapport devant la commission par rapport à la lecture brute du document qui vous est selon l’usage fourni en début de réunion.

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur. Je rappellerai tout d’abord que, lors de l’examen du projet relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, nous avions eu des débats sur le calendrier de mise en œuvre de cette réforme. Le choix a alors été fait de mettre en place l’intégralité du dispositif dans la première année suivant la promulgation de la loi. De fait, tout a été mis en place dans ce délai, y compris le mécanisme de gestion du compte personnel de formation par la Caisse des dépôts et consignations.

À l’époque, certains parlaient d’une « énième réformette ». Aujourd’hui, presque personne ne dit qu’il ne s’est rien passé en matière de formation professionnelle. Un consensus émerge dans certains cénacles, chez les acteurs de la formation professionnelle, pour considérer que la réforme a représenté une avancée. Toutefois, ce consensus n’est pas toujours partagé dans le débat public.

Mme Monique Iborra. C’est bien le problème !

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur. Le grand public a l’impression que les dispositifs de formation professionnelle sont une pure gabegie. Ce n’est pas notre sujet aujourd’hui, mais je tenais à pointer ce décalage.

L’avant-projet de loi visant à instituer de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs, porté par Mme Myriam El Khomri, répond à un certain nombre de besoins d’évolutions du cadre juridique de la formation professionnelle. Ce texte comporte des dispositions relatives à la formation professionnelle : à travers la création du compte personnel d’activité (CPA), il étend le dispositif du compte personnel de formation (CPF) à la fois aux indépendants et aux fonctionnaires. L’avant-projet de loi comporte aussi des mesures sur l’extension du travail des apprentis mineurs.

Pour répondre aux interrogations relatives au financement de la formation professionnelle, la question de savoir si la mutualisation est en baisse se pose. A priori, ce semble être le cas. La mutualisation obligatoire baisse puisque l’on a réduit les crédits qui lui sont dédiés. Toutefois, nous ne disposons pas d’étude exhaustive sur la mutualisation volontaire. Il semblerait néanmoins que les branches – notamment celles du monde associatif – aient reconduit leurs accords.

Toutefois, l’enjeu est moins de savoir si la mutualisation est en baisse que de savoir si le financement global de la formation décline. Sur ce point, nous ne disposons pas d’informations et il sera difficile d’en avoir puisqu’il n’existe plus de système statistique dans la mesure où la loi a octroyé une plus grande marge de liberté aux entreprises. Il faudra donc du temps pour déterminer si ce financement diminue. Il est probable que ce soit le cas sur la première année, d’où l’intérêt qu’il y aurait à encourager l’investissement dans la formation professionnelle, notamment grâce à des incitations fiscales. Si l’on veut que les particuliers investissent dans leur formation en complément de l’abondement de leur compte, ne faudrait-il pas imaginer un dispositif de déduction fiscale ?

Sur la question du paritarisme, l’instance paritaire qu’est le Comité interprofessionnel pour l’emploi et la formation (COPANEF) est montée en puissance. Or, la gouvernance de la formation professionnelle, qui associe l’État et les régions aux partenaires sociaux, est plutôt quadripartite. On commence à observer une certaine tension entre les partenaires sociaux qui, à travers le COPANEF, veulent garder la mainmise sur la formation professionnelle, et l’accroissement du rôle de l’État et des régions. Si le compte personnel de formation (CPF) devient universel et concerne donc 40 millions d’actifs, est-il normal que les partenaires sociaux, dont la gestion concerne 16 millions d’actifs, gèrent l’ensemble ? Cette question rejoint celle de la gouvernance de la protection sociale. Ce sera aux parlementaires de trancher cette question.

En matière de conseil en évolution professionnelle, on constate aujourd’hui que cinq opérateurs travaillent chacun de leur côté. Il faut qu’une culture commune émerge dans un souci d’efficacité. Aujourd’hui, chaque opérateur met en place ses propres formations. Les « gros » opérateurs comme Pôle Emploi semblent considérer qu’ils fournissaient déjà un conseil en évolution professionnelle, mais j’estime qu’il faut mieux formaliser ce travail. Je rappelle en outre que le dispositif a été mis en place sans crédits complémentaires. Sans doute faut-il y consacrer une partie du milliard d’euros qu’il est envisagé d’investir dans le cadre du plan de 500 000 formations prioritaires pour les demandeurs d’emploi annoncé, car la réussite de ce plan dépendra en partie de l’amélioration de la qualité de l’accompagnement.

Pour ce qui concerne le CPF, sa mise en œuvre passe par l’élaboration de listes qualifiantes et certifiantes. Un travail complexe et considérable a été conduit sur ces listes mais, au final, seules quelques formations sont éligibles au CPF : les formations numériques et linguistiques constituent l’essentiel des 12 000 formations repérées.

Un travail remarquable a été mené par les partenaires sociaux sur le socle de compétences, à travers le dispositif du nouveau certificat professionnel CléA. Je signale par ailleurs que la validation des acquis de l’expérience (VAE) a été rendue éligible au CPF. Je note en outre que l’avant-projet de loi porté par Mme Myriam El Khomri prévoit de rendre éligibles au CPF les actions de formation permettant de bénéficier de prestations de bilan de compétences, pour l’heure censées relever du conseil en évolution professionnelle, ainsi que les actions de formation dispensées aux créateurs ou repreneurs d’entreprises.

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Je tiens tout d’abord à souligner la convergence de l’approche des deux rapporteurs.

La question de l’abondement en heures complémentaires du CPF des travailleurs handicapés accueillis dans un établissement et service d’aide par le travail a été soulevée à juste titre. Il est insupportable que les décrets sur ce sujet n’aient pas encore été publiés. Un certain nombre d’autres décrets sont encore attendus. Je note par ailleurs qu’aucun rapport au Parlement demandé dans la loi du 5 mars 2014 n’a été déposé.

Sur le renforcement du rôle des comités régionaux de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CREFOP), on constate encore une certaine difficulté à s’approprier pleinement ces instances complexes. Cela évoluera avec le temps. Les premières réunions de CREFOP ont été plutôt fructueuses. La gouvernance complexe de la formation professionnelle a, dans une certaine mesure, été simplifiée puisque tous les acteurs des politiques d’orientation, de formation professionnelle et d’emploi sont désormais réunis au sein d’une même instance de coordination.

La somme de 32 milliards d’euros que l’on présente souvent comme celle investie dans la formation professionnelle est une addition « de choux et de carottes ». Elle inclut par exemple la formation dispensée dans les lycées professionnels, les salaires d’un certain nombre d’enseignants, etc. Le montant des sommes investies par les entreprises dans la pure formation professionnelle représente environ 6 milliards d’euros. C’est sur cette somme qu’il faut travailler. Il reste des choses à faire mais la formation professionnelle n’est pas un immense gâchis.

Pour ce qui concerne les listes qualifiantes et certifiantes, il s’agit d’un débat complexe. Je ne suis pas certain qu’il eût fallu recourir à ce type de listes mais la démarche est engagée. Ces listes comportent beaucoup de formations mais il y a en même temps « des trous dans la raquette ». Par exemple, elles ne comprennent pas la formation des pisteurs-secouristes dans les massifs montagneux, qui relèvent du ministère de l’Intérieur.

Il faudrait rapprocher les listes régionales de listes qui devraient être établies au niveau national. À défaut, on risque d’introduire des discriminations entre les différentes régions.

Au sujet de la baisse de l’apprentissage, elle s’explique non seulement par le contexte économique, mais aussi par un problème de lisibilité : l’apprentissage fait l’objet de modifications législatives ou fiscales presque tous les six mois. Les employeurs ne savent plus quelles règles appliquer lorsqu’ils embauchent un apprenti. On constate cependant une légère reprise dans l’évolution du nombre d’apprentis qui reste insuffisante par rapport aux objectifs fixés.

Quant à l’âge des apprentis, il peut certes y avoir une forme de pré-apprentissage dans les lycées, mais il ne faut pas perdre de vue que les petites et moyennes entreprises embauchent aujourd’hui plutôt à « bac + 2 ». Par ailleurs, la rémunération des apprentis majeurs est un frein à l’apprentissage. Afin de réduire le coût du recours à l’apprentissage, on pourrait concevoir des avantages fiscaux pour les tuteurs d’apprentissage qui ne font aujourd’hui l’objet d’aucune reconnaissance.

S’agissant, enfin, de la répartition entre les flux et les stocks, l’apprentissage se déroule sur plusieurs années et implique donc de cumuler, pour le calcul du stock, les entrants et ceux qui poursuivent leur formation. Nous atteignons alors le chiffre de 400 000. Le flux par année, nécessairement inférieur, est de l’ordre de 280 000.

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur. En effet, un contrat d’apprentissage est signé pour deux ou trois ans. Le rapport contient un graphique précisant ces chiffres. Il y manque l’année 2015 au cours de laquelle les chiffres augmentent. Le chiffre à considérer par rapport aux objectifs de 500 000 apprentis est donc de 400 000. Après plusieurs années de baisse, il est par définition difficile de faire augmenter rapidement le stock.

S’agissant de la question relative à la première qualification à donner aux jeunes « décrocheurs » dans le compte personnel de formation, le principe de la « formation initiale différée » existe déjà dans la loi. L’avant-projet de loi réformant le code du travail propose qu’il revienne aux régions d’abonder les comptes de ces jeunes.

Je souhaite évoquer l’enjeu de l’insertion pour l’activité économique (IAE). Compte tenu de la baisse des fonds de mutualisation, les associations ont du mal à se procurer des financements pour les salariés. Un déclic administratif reste à trouver, bien que tous les acteurs s’accordent sur leur pertinence. Par ailleurs, concernant la création d’entreprises, nous faisons face à un refus de certains syndicats.

S’agissant de la place des partenaires sociaux, on constate que, dans de nombreux pays, ce sont eux qui pilotent l’ensemble de l’apprentissage. Ce n’est pas la culture française et il faut trouver un autre système, plus équilibré, pour à la fois accompagner la montée en puissance des partenaires sociaux et conserver l’Éducation nationale comme acteur de l’apprentissage.

C’est le pari qui est en passe d’être gagné au sein du CREFOP, qui rassemble tous ces acteurs. Le fait que les régions aient connu d’importantes réorganisations ces derniers mois a ralenti ce mouvement. Cette nouvelle gouvernance est assurée, dans chaque région, par un bureau restreint qui doit prendre des décisions sur la carte des formations, sur la répartition des fonds de l’apprentissage et sur une stratégie régionale qui associe tout le monde. On peut débattre de la possibilité de fonctionner d’une manière aussi collégiale. L’essentiel est d’avoir mis fin au cloisonnement. Certains pensent qu’il faut aller plus loin et désigner un chef. La question est loin d’être tranchée, même si je signale que le plan « 500 000 chômeurs » prévoira peut-être des expérimentations.

M. Gérard Cherpion, rapporteur. S’agissant de la vérification au niveau régional de l’efficacité des dispositions de la loi, je rappelle qu’il appartient au CNEFOP de publier un rapport, en cours d’élaboration, qui évalue l’efficacité des mesures, notamment à ce niveau régional.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Ce rapport, très intéressant et très facile à lire sur un sujet pourtant complexe, arrive à point nommé avant l’examen de la loi réformant le code du travail. Nul doute qu’il inspirera des amendements en vue d’améliorer le texte.

*

* *

La commission autorise, à l’unanimité, le dépôt du rapport sur la mise en application de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, en vue de sa publication.

ANNEXES

ANNEXE N° 1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Ø Chambre de commerce et d’industrie de France – M. André Marcon, président, M. Patrice Guezou, directeur de la formation et des compétences, et M. Jérôme Pardigon, directeur des relations institutionnelles

Ø Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) – M. Olivier Faron, administrateur général, Mme Martine Poulin, directrice du centre CNAM de Paris, et M. Armel Guillet, directeur de CNAM entreprises

Ø JML CONSEIL – M. Jean-Marie Luttringer

Ø M. Marc Ferracci, professeur à l’Université Panthéon-Assas– CRED, membre du Crest – Laboratoire de microéconométrie

Ø Willems Consultant – M. Jean-Pierre Willems

Ø Groupe Alpha – M. Pierre Ferracci, président, et Mme Carine Seiler, directrice de la formation

Ø Table ronde réunissant des organisations multiprofessionnelles :

– Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (UDES) – M. Hugues Vidor, président, M. Sébastien Darrigrand, délégué général, et M. Jean-Pierre Azaïs, vice-président en charge de la formation professionnelle et des régions

– Union nationale des professions libérales (UNAPL) – Dr Michel Chassang, président, Mme Marie-Françoise Gondard-Argenti, secrétaire générale, et M. Gérard Goupil, président de la commission des affaires sociales

– Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) – M. Jérôme Volle, président de la commission Emploi, M. Morgan Oyaux, sous-directeur Emploi, relations sociales, et M. Jérôme Lachaux, chargé de la formation professionnelle continue

Ø Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) – M. Jean-Michel Pottier, vice-président en charge des affaires sociales et de la formation, M. Francis Petel, vice-président de la commission formation, et M. Georges Tissié, directeur des affaires sociales

Ø Confédération générale du travail (CGT) – M. Jean Philippe Marechal, M. Djamel Teskouk et Mme Catherine Perret

Ø Table ronde réunissant des OPCA :

– Opcalia – M. Patrice Lombard, président, Mme Marie Russo, vice-présidente, et Mme Claire Khecha, directrice générale adjointe, directrice générale par intérim

– Opca Agefos PME – M. Joël Ruiz, directeur général

– Uniformation – Mme Nadine Goret, présidente, M. François Édouard, vice-président, et M. Thierry Dez, directeur général

Ø Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA) * – M. Alain Griset, président, M. François Moutot, directeur général, et Mme Véronique Matteoli, chargée des relations institutionnelles

Ø Fédération de la formation professionnelle (FFP) – M. Jean Wemaëre, président, Mme Emmanuelle Peres, déléguée générale, M. Olivier Poncelet, responsable Affaires publiques et M. Adrien Huygues Despointes, consultant junior chez Forward Partners

Ø Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP) – M. Jean-Marie Marx, président, et Mme Catherine Beauvois, secrétaire générale

Ø Les Compagnons du devoir – M. Jean-Claude Bellanger, secrétaire général

Ø Ministère de l’éducation nationale – Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) M. Jean-Marc Huart, chef de l'instruction publique et de l'action pédagogique, service A, et Mme Brigitte Doriath, sous-directrice des lycées et de la formation professionnelle tout au long de la vie. service A2

Ø Confédération française démocratique du travail (CFDT) * – M. Yvan Ricordeau, secrétaire national, M. Philippe Couteux, M. Gilles Bensaid

Ø Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) – M. Jean-Marie Truffat, trésorier national et secrétaire national chargé de la formation professionnelle, et M. Jean-Louis Blanc, conseiller national secteur formation

Ø Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) – M. Maxime Dumont, secrétaire confédéral en charge de la formation professionnelle, et M. Jean-François Marcellin, conseiller technique et membre de la commission confédérale Formation professionnelle

Ø Confédération française de l'encadrement – Confédération générale des cadres (CFE-CGC) – M. Christophe Mickiewicz, directeur financier, M. Franck Mikula, secrétaire national en charge de l’emploi et de la formation, Mme Anne Lecrenais, conseillère technique, et M. Jean Siro, chargé de mission

Ø Pôle emploi – M. Jean Bassères, directeur général

Ø Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) – M. Christophe Donon, directeur général adjoint

Ø Mouvement des entreprises de France (MEDEF) * – M. Antoine Foucher, directeur général adjoint en charge des affaires sociales, M. Alain Druelles, directeur de l’éducation et de la formation, et M. Matthieu Pineda, chargé de mission à la direction des affaires publiques

Ø Caisse des dépôts et consignations – Mme Anne-Sophie Grave, directrice des retraites et de la solidarité, et M. Charles-Henry Ronzeaud, directeur du projet Compte personnel de formation

Ø Comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation (COPANEF) – M. Christian Janin, président, M. Alain Druelles, représentant la vice-présidente du MEDEF

Ø Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social – Direction générale du travail (DGT)M. Jean-Henri Pyronnet et M. Aymeric Morin

Ø M. Bernard Masingue, partenaire d’Entreprise&Personnel

Ø Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) – M. Philippe Dole, directeur général, et M. Dominique Schott, vice-président

Ø Cabinet de la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social – Mme Nadine Richard, conseillère Formation professionnelle et apprentissage, et Mme Claire Rabès, conseillère parlementaire

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

ANNEXE N° 2 :
SUIVI RÉGLEMENTAIRE DE LA LOI DU 5 MARS 2014

Article

Objet

Décrets en Conseil d’État

Décrets

Arrêtés

Textes en attente

Commentaires du ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Titre Ier - Formation professionnelle et emploi

Chapitre Ier - Formation professionnelle continue

1er

Mise en œuvre du compte personnel de formation

   

Décret en CE n° 2014-1156 relatif à l’acquisition et à l’utilisation des points acquis au titre du compte personnel de prévention de la pénibilité

Décret en CE n° 2014-1119 relatif aux listes des formations éligibles au titre du CPF

Décret en CE n° 2014-1717 portant création du Système d’information du CPF

Décret en CE n° 2014-1120 relatif aux modalités d’alimentation et de mobilisation du CPF

Décret en CE n° 2014-1311 relatif au Comité paritaire interprofessionnel régional pour l’emploi et la formation

Décret n° 2015-172 relatif au socle de connaissances et de compétences professionnelles

 

Article L. 6323-4 Code Travail :

« Un décret précise les conditions dans lesquelles le compte personnel de formation des travailleurs handicapés accueillis dans un établissement et service d’aide par le travail mentionné au a du 5° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles fait l’objet d’abondements en heures complémentaires »

Le projet de décret fait l’objet actuellement de discussions interministérielles

2

Égalité d’accès à la formation femmes-hommes

3

Application du CPF aux intermittents

4

CPF des artistes auteurs

5

Obligation de l’employeur, entretien professionnel, développement des compétences et des qualifications

     

Décret n° 2014-1045 relatif à l’information et à la consultation du comité d’entreprise en matière de formation professionnelle

Décret n° 2014-935 relatif aux formations ouvertes ou à distance

     

6

Développement de la validation des acquis de l’expérience

   

Décret en CE n° 2014-1354 portant diverses mesures relatives à la validation des acquis de l’expérience

       

7

Contrat de professionnalisation, périodes de professionnalisation, préparation opérationnelle à l’emploi

     

Décret n° 2015-172 relatif au socle de connaissances et de compétences professionnelles

Décret n° 2014-969 relatif à la durée minimale des périodes de professionnalisation et à l’obligation de tutorat d’un salariat en contrat de professionnalisation

     

8

Qualité des actions de formation professionnelle continue

   

Décret en CE n° 2015-790 relatif à la qualité des actions de formation professionnelle continue

       

9

Rapport sur la couverture sociale des stagiaires de la formation professionnelle

10

Simplification des obligations de financement par les employeurs de la formation professionnelle continue

 

 

Décret en CE n° 2014-968 relatif aux contributions des entreprises au titre de la formation professionnelle continue

Décret en CE n° 2014-1240 relatif aux organismes paritaires agréés

Décret en CE n° 2015-600 portant suppression des dispositions réglementaires relatives à la déclaration fiscale des employeurs en matière de formation professionnelle

Décret n° 2014-1120 relatif aux modalités d’alimentation et de mobilisation du compte personnel de formation

 

Article L. 6331-32 Code Travail :

« L’employeur transmet à l’autorité administrative des informations relatives aux modalités d’accès à la formation professionnelle de ses salariés dont le contenu est défini par décret en Conseil d’État »

S’agissant des informations relatives aux modalités d’accès à la formation professionnelle, le Ministère va recueillir les informations en utilisant les enquêtes annuelles de la DARES sur l’activité et les conditions d’emploi de la main d’œuvre (ACEMO) : modification de l’enquête sur le dialogue social et modification de l’enquête sur les petites entreprises

11

Amélioration de la mutualisation et du ciblage des financements de la formation professionnelle continue

   

Décret en CE n° 2014-1240 relatif aux organismes paritaires agréés

Décret en CE n° 2014-967 relatif au Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels

Décret n° 2014-1378 relatif à la collecte des contributions de la formation professionnelle continue dans les DOM, à Saint Barthélemy et à Saint Martin

Arrêté du 23.11.2015 autorisant la FAFSEA à collecter les fonds de formation professionnelle continue dans les DOM

Arrêté du 2 février 2015 relatif aux seuils de collecte des contributions de la formation professionnelle continue dans les départements d’outre-mer, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin

   

12

Rapport sur la formation professionnelle en outre-mer

       

Chapitre II - Apprentissage et autres mesures en faveur de l’emploi

13

Renforcement des compétences des régions en matière d’apprentissage

14

Principe de gratuité et élargissement du contrat d’apprentissage aux CDI

   

Décret en CE n° 2014-1031 modifiant diverses dispositions relatives à l’apprentissage

       

15

Renforcer les missions des CFA

16

Affichage des symboles républicains dans les CFA

17

Coût des formations et circuit de la collecte de la taxe d’apprentissage

   

Décret en CE n° 2014-986 relatif aux conditions d’habilitation à collecter les versements des entreprises donnant lieu à exonération de la taxe d’apprentissage et à les reverser

Décret n° 2014-985 relatif aux modalités d’affectation des fonds de la taxe d’apprentissage

 

Article L. 6233-1 Code Travail :

« Dans le cadre de la convention mentionnée à l’article L. 6232-1, ces coûts sont déterminés, par la région et par la collectivité territoriale de Corse, par spécialité et par niveau de diplôme préparé, selon une méthode de calcul proposée par le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles et fixée par arrêté du ministre chargé de la formation professionnelle »

 

18

Fixation du plafond d’une partie du quota et du barème de la taxe d’apprentissage

19

Réforme du « barème » de la taxe d’apprentissage - Article devenu sans objet

     

Décret n° 2014-985 relatif aux modalités d’affectation des fonds de la taxe d’apprentissage

Arrêté du 11.12.2014 fixant la liste complémentaire des territoires concernés par l’expérimentation de la garantie jeunes

Article L. 6241-10 Code Travail :

« Chaque année, après concertation au sein du bureau mentionné à l’article L. 6123-3, un arrêté du représentant de l’État dans la région fixe la liste des formations dispensées par les établissements mentionnés à l’article L. 6241-9 et des organismes et services mentionnés aux 1° à 5° du présent article, implantés dans la région, susceptibles de bénéficier des dépenses libératoires mentionnées au premier alinéa de l’article L. 6241-8 »

Les arrêtés en région sont pris dans les délais impartis. Les ministères chargés de l’éducation nationale et de la formation professionnelle ont également pris, en application du 6° de l’article L. 6241-10, en 2014 et en 2015 les arrêtés nécessaires

(ETSD1426922A du 11 décembre 2014,

ETSD1429520A du 10 février 2015, ETSD1526732A du 24 novembre 2015, ETSD1529569A du 14 décembre 2015)

20

Mesures visant à favoriser l’insertion dans l’emploi

   

Décret en CE n° 2015-1435 relatif à la durée minimale de travail en atelier et chantier d’insertion et portant diverses mesures relatives à l’insertion par l’activité économique

Décret n° 2014-1360 relatif aux périodes de mise en situation en milieu professionnel

Décret n° 2014-998 relatif aux groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification

Décret n° 2014-1757 relatif à la protection contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des bénéficiaires d’actions d’aide à la création d’entreprise, d’orientation, d’évaluation ou d’accompagnement dans la recherche d’emploi

 

V :

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions de mise en œuvre de la pénalité prévue à l’article L. 5121-8 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la présente loi, ainsi que sa date d’entrée en vigueur, qui intervient au plus tard le 31 mars 2015 »

 

Chapitre III - Gouvernance et décentralisation

21

Compétences des régions

   

Décret en CE n° 2014-1354 portant diverses mesures relatives à la validation des acquis de l’expérience

Décret en CE n° 2014-1390 relatif à la procédure d’habilitation des organismes chargés d’actions d’insertion et de formation professionnelle

Décret n° 2015-172 relatif au socle de connaissances et de compétences professionnelles

Décret n° 2016-153 du 12 février 2016 relatif à l’organisation du service public régional de la formation professionnelle

Arrêté du 22.09.2014 relatif au projet de site préalable au transfert de propriété de l’État à titre gratuit aux régions d’un ou de plusieurs immeubles utilisés par l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes

Article L. 6121-5 Code Travail :

« La région et les autres structures contribuant au financement de formations au bénéfice de demandeurs d’emploi s’assurent que les organismes de formation qu’ils retiennent informent, préalablement aux sessions de formation qu’ils organisent, les opérateurs du service public de l’emploi et du conseil en évolution professionnelle mentionnés au titre Ier du livre III de la cinquième partie et à l’article L. 6111-6 des sessions d’information et des modalités d’inscription en formation. Ces organismes informent, dans des conditions définies par décret, l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 de l’entrée effective en stage de formation d’une personne inscrite sur la liste des demandeurs d’emploi »

 
         

Division VII :

« Les immeubles transférés demeurent affectés aux missions de service public assurées par l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes. La liste des immeubles éligibles à ces transferts est fixée par arrêté conjoint du ministre chargé de la formation professionnelle et du ministre chargé du domaine »

Un projet est en cours sur le site de Cherbourg, la procédure est réinterrogée dans son objet pour les autres du fait des dispositions de la loi dialogue social et emploi qui habilite le gouvernement à prendre une ordonnance pour créer un EPIC reprenant les activités actuellement dévolues à l’AFPA

22

Service public de l’orientation

   

Décret en CE n° 2015-742 relatif au système d’information sur l’offre de formation professionnelle

 

Arrêté du 16.07.2014 fixant le cahier des charges relatif au conseil en évolution professionnelle

   

23

Contrat de plan régional

         

Article L. 214-13 Code Éducation :

« Un décret en Conseil d’État, pris après avis du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles mentionné à l’article L. 6123-1 dudit code, fixe les modalités du suivi et de l’évaluation des contrats de plan régionaux »

 

24

Gouvernance nationale et régionale de la formation professionnelle

   

Décret en CE n° 2014-965 relatif aux missions, à la composition et au fonctionnement du CNEFOP

Décret en CE n° 2014-1055 relatif aux missions, à la composition et au fonctionnement du CREFOP

Décret en CE n° 2014-966 relatif au Comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation

Décret en CE n° 2014-1311 relatif au Comité paritaire interprofessionnel régional pour l’emploi et la formation

       

25

Instances de gouvernance régionales et paritaires ultramarines

26

Rapport sur le développement professionnel continu

27

Compensation financière des transferts de compétences

   

Décret en CE n° 2015-672 relatif aux modalités de la compensation des charges prévue à l’article 27

Décret n° 2015-1694 du 17 décembre 2015 relatif à la convention type de mise à disposition de services de l’État chargés des compétences transférées aux conseils régionaux dans le cadre de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale

     

28

Institut national de formation

     

Décret n° 2015-711 relatif à l’Institut national de formation

     

Titre II - Démocratie sociale

Chapitre Ier - Représentativité patronale

29

Réforme de la représentativité patronale

   

Décret en CE n° 2015-654 relatif à la mise en œuvre de la réforme de la représentativité patronale

Décret en CE n° 2015-262 relatif à la création de la sous-commission de la restructuration des branches professionnelles de la Commission nationale de la négociation collective

Décret n° 2015-1525 relatif à la certification et à la publication des comptes des syndicats professionnels de salariés ou d’employeurs et de leurs unions et des associations de salariés ou d’employeurs mentionnés à l’article L, 2135-1 du code du travail

 

Article L. 2152-4 Code Travail :

« Lorsqu’une organisation professionnelle d’employeurs adhère à plusieurs organisations professionnelles d’employeurs ayant statutairement vocation à être présentes au niveau national et interprofessionnel, elle répartit entre ces organisations, pour permettre la mesure de l’audience prévue au présent article, ses entreprises adhérentes. Elle ne peut affecter à chacune de ces organisations une part d’entreprises inférieure à un pourcentage fixé par décret, compris entre 10 et 20 % »

Article L. 2152-5 Code Travail :

« Pour l’établissement de leur représentativité en application du présent chapitre, les organisations professionnelles d’employeurs se déclarent candidates, dans des conditions déterminées par voie réglementaire. »

Concertation nécessaire

Arrêté pris en application du décret n° 2015-654 du 10 juin 2015 relatif à la mise en œuvre de la représentativité patronale.

Publication prévue en mars 2016

Chapitre II - Représentativité syndicale

30

Adaptation des règles liées à la représentativité syndicale

Chapitre III - Financement des organisations syndicales et patronales

31

Instauration d’un fonds paritaire pour financer les organisations syndicales et patronales

     

Décret n° 2015-87 relatif au financement mutualisé des organisations syndicales des salariés et des organisations professionnelles d’employeurs

Décret n° 2014-1718 relatif à la contribution du fonds paritaire

Arrêté du 29 décembre 2014 fixant la liste des organismes dont les stages ou sessions sont consacrés à la formation économique, sociale ou syndicale

Article L. 2135-10 Code Travail :

« La liste des organismes pouvant verser une participation au fonds est fixée par l’accord mentionné au 1° ou, à défaut d’accord ou de son agrément, par décret »

Concertation nécessaire

Chapitre IV - Transparence des comptes des comités d’entreprise

32

Obligation d’établir des comptes dans les comités d’entreprise

   

Décret en CE n° 2015-357 relatif aux comptes des comités d’entreprise et des comités interentreprises

Décret n° 2015-358 relatif à la transparence des comptes des comités d’entreprise

     

33

Expérimentation de la négociation unique « Qualité de vie au travail »

Titre III - Inspection et contrôle

         

34

Renforcement du dispositif de contrôle

         

Article L. 335-6 Code de l’Éducation :
« Ces engagements sont précisés sur un cahier des charges défini par arrêté du ministre chargé de la formation professionnelle, sur proposition de la Commission nationale de la certification professionnelle »

Un projet d’arrêté a été formalisé sur proposition de la CNCP, conformément aux dispositions de l’article. Cependant, une évaluation de politique publique est en cours sur la politique de certification professionnelle, la publication de l’arrêté interviendra après la remise des préconisations des inspections

35

Application à Mayotte

         

ANNEXE N° 3 :
SUIVI DE LA TRANSMISSION DES RAPPORTS AU PARLEMENT

RAPPORTS AU PARLEMENT PRÉVUS PAR LA LOI DU 5 MARS 2014

Article

Rapport

État

1er

Art. L. 6323-9. – Tous les ans, à compter du 1er juin 2015, le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles remet au Parlement un rapport évaluant la mise en œuvre et l’utilisation du compte personnel de formation.

Attente

"

VI.– Le Gouvernement remet au Parlement un rapport, avant la fin de l’année 2015, sur les conditions de la mise en œuvre du droit à la formation initiale différée.

Attente

9

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport étudiant l’opportunité de mettre en place une mesure permettant de garantir une couverture sociale, dans le cadre du stage de formation professionnelle, aux stagiaires dont les cotisations de sécurité sociale ne sont pas prises en charge.

Attente

11

Tous les deux ans, le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels remet un rapport d’activité au Parlement sur sa contribution au financement de la formation professionnelle des demandeurs d’emploi, en décrivant notamment les actions financées.

Attente. Ce rapport devrait être remis à l’automne 2016.

12

Le Gouvernement présente au Parlement, dans les dix-huit mois suivant la promulgation de la présente loi, un rapport sur la formation professionnelle en outre-mer, notamment par la mobilité dans le cadre de la continuité territoriale.

Attente

26

Dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport examinant les conditions de mise en œuvre du développement professionnel continu des professionnels de santé et formule des recommandations concernant sa gouvernance et sa réalisation.

Attente

27

V.– Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 31 décembre 2015, un rapport sur les conséquences, en matière d’effort de formation, du passage de l’obligation de dépenser à l’obligation de former, avec un examen particulier de la situation des entreprises de dix à deux cent quatre-vingt-dix-neuf salariés.

Attente

31

Avant le 1er octobre de chaque année, le fonds remet au Gouvernement et au Parlement un rapport sur l’utilisation de ses crédits. Ce rapport est publié selon des modalités fixées par voie réglementaire.

Attente

ANNEXE N° 4 :
SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS

Proposition n°1 : Engager une réflexion sur un mécanisme de déduction fiscale ouvert aux entreprises voire aux particuliers en contrepartie de leurs efforts supplémentaires d’investissement en formation

Proposition n° 2 : Clarifier la distinction entre les activités d’un OPCA relevant du service public et celles répondant à une logique de prestation commerciale

Proposition n° 3 : Mettre à profit la première vague d’alimentation des CPF au titre de 2015 pour engager une véritable campagne de communication audiovisuelle, rappelant à tout salarié l’intérêt d’ouvrir son compte

Proposition n°4 : Accompagner la mise en œuvre du CEP en favorisant l’émergence d’une culture commune aux professionnels le dispensant, en clarifiant son articulation avec le SPRO et en aménageant un conseil à distance. Une partie des crédits du « plan 500 000 formations » pourrait par ailleurs être consacrée au déploiement du CEP, dès lors que ce dernier en conditionne la réussite

Proposition n°5 : Permettre la mobilisation du CPF au titre des prestations de bilan de compétences

Proposition n°6 : Faciliter l’appropriation du CPF par leurs titulaires en fusionnant les listes et en dotant le CNEFOP d’une compétence de régulation du système de liste

Proposition n° 7 : Travailler à une redéfinition de l’acte de formation en le construisant comme un parcours allant du positionnement à la validation, permettant ainsi de faire évoluer les financements et l’évaluation de la qualité

Proposition n°8 : Prévoir une fongibilité différenciée des droits accumulés sur le CPA afin de soutenir les actions de formation et d’orienter le choix de la personne vers la qualification, grâce à une valorisation supplémentaire des points lorsqu’ils sont utilisés au titre de la formation

Proposition n°9 : Accroître le rôle des CREFOP dans le domaine de l’alternance afin de rapprocher les différentes voies et de renforcer l’employabilité quelle que soit la voie suivie

Proposition n°10 : Envisager une refonte de la grille de rémunération pour tenir davantage compte du cursus et effacer le facteur de l’âge dans la rémunération

Proposition n°11 : Formuler les principes fondamentaux qui régissent la formation professionnelle et l’apprentissage, comme prolégomènes à l’élaboration d’un code autonome de la formation professionnelle

1 () Marc Ferracci, Bertrand Martinot, Institut Montaigne, « Réformer la formation professionnelle : entre avancées, occasions manquées et pari financier », septembre 2014.

2 () Décret n° 2016-189 du 24 février 2016 relatif à la prise en charge par les organismes collecteurs paritaires agréés de la rémunération des stagiaires dans le cadre du plan de formation des employeurs occupant moins de dix salariés.

3 () Descamps, Renaud. Le DIF : la maturité modeste. Centre d’études et de recherches sur les qualifications (CEREQ), Bref n° 299-2, mai 2012.

4 () Décret n° 2014-1717 du 30 décembre 2014 portant création d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Système d’information du compte personnel de formation » relatif à la gestion des droits inscrits ou mentionnés au compte personnel de formation.

5 () Arrêté du 30 décembre 2015 relatif au contenu de l’attestation prévue à l’article R. 4162-15 du code du travail.

6 () Arrêté du 29 décembre 2015 relatif au plafond du montant de l’heure de formation financée au titre du 1° de l’article R. 4126-4 du code du travail.

7 () On peut imaginer qu’il y ait eu un décompte quasi automatique en CPF de toutes les entrées en formation qualifiante des demandeurs d’emploi ayant bénéficié de 100 heures du FPSPP

8 () Jean-Marie Luttringer.

9 () France Stratégie, Commission Compte personnel d’activité présidée par Selma Mahfouz, « Le compte personnel d’activité, de l’utopie au concret », octobre 2015.

10 () 402 900 apprentis à la fin de l’année 2015.

11 () Décision n° 2013-684 DC du 29 décembre 2013. « Considérant que la taxe d’apprentissage relève de la catégorie des impositions de toutes natures au sens de l’article 34 de la Constitution ; que le législateur ne pouvait, sans méconnaître l’étendue de sa compétence, renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de fixer les critères d’affectation d’une partie des recettes provenant de cette imposition ».

12 () Loi n° 71-578 du 16 juillet 1971 relative à la participation des employeurs au financement des premières formations technologiques et professionnelles.

13 () Comité chargé de définir les principes essentiels du droit du travail, Rapport au Premier ministre, janvier 2016.


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