N° 3684 - Rapport d'information de Mme Valérie Rabault déposé en application de l'article 145 du règlement, par la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire sur le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 et le programme national de réforme




N° 3684

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 avril 2016.


RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE

sur le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019
et le
programme national de réforme

ET PRÉSENTÉ

PAR Mme Valérie RABAULT

Rapporteure générale,

Députée.

——

SOMMAIRE

___

Pages

EXPOSÉ GÉNÉRAL 9

I. LA MISE EN œUVRE DU PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE PAR LES PAYS DE LA ZONE EURO 9

A. LE NON-RESPECT DU PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE PAR L’ALLEMAGNE ET LA FRANCE A SUSCITÉ SA MODIFICATION 11

B. LE NOMBRE DE PAYS EN SITUATION DE PROCÉDURE DE DÉFICIT EXCESSIF S’EST ACCRU EN RAISON DE LA CRISE ÉCONOMIQUE ET DES DETTES SOUVERAINES 11

II. LES OBJECTIFS DU PROGRAMME DE STABILITÉ 13

III. LES MOYENS MIS EN œUVRE POUR ATTEINDRE LES OBJECTIFS 15

IV. LE PROGRAMME NATIONAL DE RÉFORME 2016 17

A. LA STRATÉGIE DE SOUTENABILITÉ ET DE QUALITÉ DES FINANCES PUBLIQUES 18

B. LE RENFORCEMENT DE LA COMPÉTITIVITÉ ET DE LA PRODUCTIVITÉ DE L’ÉCONOMIE 19

C. L’AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT DU MARCHÉ DU TRAVAIL 19

D. LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ, LES INÉGALITÉS ET L’EXCLUSION 19

V. LE SUIVI DES OBJECTIFS DE LA « STRATÉGIE EUROPE 2020 » 20

FICHE 1 : LES CYCLES ANNUELS BUDGÉTAIRES 2015 ET 2016 23

I. DÉROULEMENT GÉNÉRAL D’UN CYCLE ANNUEL BUDGÉTAIRE 23

A. LE SEMESTRE EUROPÉEN 23

1. Contenu du semestre européen 23

2. Calendrier du semestre européen 24

B. LE SEMESTRE NATIONAL 25

II. RETOUR SUR LE CYCLE ANNUEL BUDGÉTAIRE 2015 27

A. LE SEMESTRE EUROPÉEN 2015 A PERMIS À LA FRANCE DE FAIRE PRÉVALOIR SON POINT DE VUE 27

B. LE SEMESTRE NATIONAL 2015 A FAIT L’OBJET D’UNE ÉVALUATION POSITIVE PAR LES INSTANCES EUROPÉENNES 31

III. PREMIERS ÉLÉMENTS DU SEMESTRE EUROPÉEN 2016 31

A. LE PAQUET DE NOVEMBRE 31

1. L’examen annuel de la croissance 2016 31

2. Le rapport sur le mécanisme d’alerte 32

B. LE RAPPORT 2016 POUR LA FRANCE 32

1. L’analyse de la situation économique de la France 32

2. Les deux déséquilibres macroéconomiques de la France 33

3. Les progrès dans la mise en œuvre des recommandations du Conseil 33

C. LES CONCLUSIONS DU CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE 34

D. L’ADOPTION DU PROGRAMME DE STABILITÉ ET DU PROGRAMME NATIONAL DE RÉFORME 34

FICHE 2 : LA SURVEILLANCE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES NATIONALES PAR L’UNION EUROPÉENNE 35

I. LA SURVEILLANCE DES FINANCES PUBLIQUES 36

A. NORMES DE FINANCES PUBLIQUES À RESPECTER 36

B. CADRE JURIDIQUE DE LA SURVEILLANCE DES FINANCES PUBLIQUES 38

1. Le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance 39

2. Le volet correctif du pacte de stabilité et de croissance 40

II. LA SURVEILLANCE MACROÉCONOMIQUE 41

A. OBJET DE LA SURVEILLANCE MACROÉCONOMIQUE 42

B. CADRE JURIDIQUE DE LA SURVEILLANCE MACROÉCONOMIQUE 43

C. APPRÉCIATION PAR LA COMMISSION DE L’ÉQUILIBRE MACROÉCONOMIQUE DES ÉTATS MEMBRES EN 2016 43

1. Les déséquilibres macroéconomiques excessifs de la France 45

2. Les déséquilibres macroéconomiques de l’Allemagne 45

FICHE 3 : LE CADRAGE MACROÉCONOMIQUE DU PROGRAMME DE STABILITÉ 47

I. L’AVIS DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES 47

A. UN AVIS OBLIGATOIRE DEPUIS 2013 47

B. UN AVIS QUI CONFORTE LES PRÉVISIONS MACROÉCONOMIQUES DU GOUVERNEMENT 48

II. LE RETOUR DE LA CROISSANCE 48

A. UNE CROISSANCE MEILLEURE QUE PRÉVU EN 2015 48

B. DES PRÉVISIONS DE CROISSANCE INCHANGÉES POUR LES ANNÉES 2016 ET SUIVANTES 49

III. LA BAISSE DES PRÉVISIONS D’INFLATION 51

IV. LA PERSISTANCE DE TAUX D’INTÉRÊT FAIBLES 53

FICHE 4 : LES OBJECTIFS DE FINANCES PUBLIQUES DU PROGRAMME DE STABILITÉ POUR LES ANNÉES 2016 À 2019 55

I. UN MAINTIEN DE LA TRAJECTOIRE DE RÉDUCTION DU DÉFICIT NOMINAL 55

A. LE DÉFICIT PUBLIC DIMINUE PLUS RAPIDEMENT QUE PRÉVU 56

B. LA TRAJECTOIRE DE RÉDUCTION DU DÉFICIT EST CONFIRMÉE POUR LES ANNÉES 2016 ET SUIVANTES 57

II. UNE TRAJECTOIRE D’AJUSTEMENT STRUCTUREL COMPATIBLE AVEC LE SOUTIEN DE LA CROISSANCE 58

A. UNE LÉGÈRE RÉVISION DE LA TRAJECTOIRE D’AJUSTEMENT STRUCTUREL ET DE DÉFICIT STRUCTUREL 58

B. UNE TRAJECTOIRE D’AJUSTEMENT STRUCTUREL MOINS PÉNALISANTE QUE CELLE RECOMMANDÉE PAR LE CONSEIL 59

C. UNE TRAJECTOIRE DE DÉFICIT STRUCTUREL QUI REPOSE SUR DES HYPOTHÈSES JUGÉES PEU VRAISEMBLABLES PAR LE HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES 60

1. Rappel des modalités de calcul du déficit structurel 60

2. Les différences d’appréciation du niveau de déficit structurel 61

III. UNE DETTE PUBLIQUE MOINS ÉLEVÉE QUE PRÉVU 62

A. LA DETTE PUBLIQUE AUGMENTE PLUS LENTEMENT QU’ANTICIPÉ 63

B. LA TRAJECTOIRE DE L’ENDETTEMENT PUBLIC EST PLUS FAVORABLE QUE LES PRÉCÉDENTES PRÉVISIONS PLURIANNUELLES ET LES RECOMMANDATIONS EUROPÉENNES 64

FICHE 5 : LES RECETTES ET LE SUIVI DU PACTE DE RESPONSABILITÉ ET DE SOLIDARITÉ 67

I. LES RECETTES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES 67

A. LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES SONT EN BAISSE POUR LA PREMIÈRE FOIS DEPUIS 2009 67

B. LA STABILITÉ DES RECETTES HORS PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES 68

II. LA MONTÉE EN CHARGE DU PACTE DE RESPONSABILITÉ ET DE SOLIDARITÉ 69

A. LE VOLET « RESPONSABILITÉ » 69

1. Le calendrier de mise en œuvre du pacte est respecté 69

2. 5 milliards d’euros n’ont pas encore fait l’objet d’un vote 72

3. Le CICE est entré dans sa phase de maturité 72

a. Une baisse du coût du travail pour les entreprises 73

b. Le coût pour l’État 74

B. LE VOLET « SOLIDARITÉ » 75

1. Les deux premières étapes : 3 milliards d’euros de réduction pour 9 millions de ménages 75

2. Une nouvelle étape en 2016 qui porte à 5 milliards d’euros le montant des réductions d’impôt au bénéfice de 12 millions de ménages 76

FICHE 6 : L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES 77

I. LE RALENTISSEMENT DE LA CROISSANCE DES DÉPENSES PUBLIQUES 78

A. L’INFLÉCHISSEMENT NET DE LA DYNAMIQUE DES DÉPENSES PUBLIQUES PAR RAPPORT AUX DEUX PRÉCÉDENTES LÉGISLATURES 78

1. L’évolution des dépenses publiques, hors crédits d’impôts 78

2. L’évolution des dépenses publiques, y compris crédits d’impôts 79

B. LES DIFFÉRENTES COMPOSANTES DE LA DÉPENSE PUBLIQUE 81

1. La décomposition de l’évolution de la dépense publique 81

2. La charge de la dette 82

II. LA MISE EN œUVRE DU PROGRAMME D’ÉCONOMIES DE 50 MILLIARDS D’EUROS SUR LA PÉRIODE 2015-2017 83

A. LES MESURES D’ÉCONOMIES MISES EN œUVRE EN 2015 85

1. Les mesures d’économies complémentaires prévues pour 2015 85

2. La décomposition du programme d’économies pour 2015 86

B. LES MESURES D’ÉCONOMIES MISES EN œUVRE EN 2016 ET 2017 87

1. Les mesures d’économies complémentaires annoncées pour 2016 87

2. La décomposition du programme d’économies pour 2016 88

3. L’adoption de nouvelles économies supplémentaires en raison de l’abaissement de la prévision d’inflation 89

4. L’annonce de nouvelles dépenses pour 2016, en principe intégralement gagées 90

5. Le plan d’économies prévu pour 2017 et les mesures complémentaires 91

FICHE 7 : LA STRATÉGIE EUROPE 2020 93

I. LA STRATÉGIE DE LISBONNE (2000-2010) 93

II. LA STRATÉGIE EUROPE 2020 (2010-2020) 94

A. LES CINQ OBJECTIFS RETENUS PAR LA STRATÉGIE EUROPE 2020 95

1. Les cinq objectifs principaux de la stratégie Europe 2020 95

2. La mise en place de sept initiatives phares 96

B. LES LIGNES DIRECTRICES INTÉGRÉES « EUROPE 2020 » 96

C. LE SUIVI DE LA STRATÉGIE EUROPE 2020 98

1. Les modalités de gouvernance et de suivi de la stratégie Europe 2020 98

2. L’état des lieux de la stratégie Europe 2020 réalisé en 2014 99

3. Le respect inégal par la France de ses cinq objectifs nationaux issus de la stratégie Europe 2020 99

FICHE 8 : LE PROGRAMME NATIONAL DE RÉFORME 2016 103

I. LES DÉFIS ÉCONOMIQUES MAJEURS AUXQUELS LA FRANCE EST CONFRONTÉE 104

A. L’ENGAGEMENT DU GOUVERNEMENT EN FAVEUR DE LA SOUTENABILITÉ ET DE LA QUALITÉ DES FINANCES PUBLIQUES 104

1. Assurer de la soutenabilité des finances publiques 104

2. Améliorer la qualité de la dépense publique 105

3. Réduire le niveau des prélèvements obligatoires 106

B. LE RENFORCEMENT DE LA COMPÉTITIVITÉ ET DE LA PRODUCTIVITÉ DE L’ÉCONOMIE 107

1. Accroître la compétitivité coût des entreprises 107

2. Faciliter l’activité économique 108

3. Améliorer la compétitivité hors coût et la croissance potentielle 109

C. L’AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT DU MARCHÉ DU TRAVAIL 109

1. Promouvoir le dialogue social 109

2. Renforcer les dispositifs d’accompagnement 110

D. LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ, L’EXCLUSION ET LES INÉGALITÉS 111

II. L’UTILISATION DES FONDS STRUCTURELS ET D’INVESTISSEMENT 112

AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES 113

AUDITION DE MM. EMMANUEL MACRON, MINISTRE DE L’ÉCONOMIE, DE L’INDUSTRIE ET DU NUMÉRIQUE, ET CHRISTIAN ECKERT, SECRÉTAIRE D’ÉTAT CHARGÉ DU BUDGET 125

EXAMEN EN COMMISSION 147

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 et le programme national de réforme (PNR) ont été présentés en conseil des ministres le 13 avril 2016. Ce même jour, ils ont été présentés devant la commission des finances par le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique et le secrétaire d’État chargé du budget.

Ces documents s’inscrivent dans le cycle annuel budgétaire mis en place dans le cadre de la surveillance des politiques économiques nationales par l’Union européenne (1).

La présentation du programme de stabilité intervient alors que la France fait l’objet d’une procédure pour déficit excessif depuis le 27 avril 2009. Il convient à cet égard de rappeler que de nombreux pays de la zone euro ont eu à connaître d’une telle procédure au cours des dernières années (I).

Globalement, les objectifs de finances publiques de la France sont inchangés par rapport à ceux du précédent programme de stabilité (II).

Le rétablissement des finances publiques s’appuie essentiellement sur la maîtrise des dépenses (III).

Les réformes présentées dans le programme national de réforme doivent contribuer à créer 2,5 points de produit intérieur brut (PIB) supplémentaires et 665 000 emplois à l’horizon 2020, après prise en compte de l’effet récessif lié à leur financement (IV).

Le suivi des cinq objectifs de la « stratégie Europe 2020 » permet de mesurer les progrès réalisés (V).

I. LA MISE EN ŒUVRE DU PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE PAR LES PAYS DE LA ZONE EURO

Le respect du pacte de stabilité et de croissance, adopté en 1997 (2), par les États de la zone euro apparaît inégal depuis son entrée en vigueur le 1er janvier 1999 (3).

LE RESPECT DU PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE

PAR LES PAYS DE LA ZONE EURO

État

99

00

01

02

03

04

05

06

07

08

09

10

11

12

13

14

Allemagne

 

 

 

 

+ 2

 

+ 2

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Autriche

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

+ 1

 

 

Belgique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

+ 1

 

 

Chypre

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

+ 4

 

 

Espagne

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

+ 1

+ 1

+ 1

+ 2

 

 

Estonie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Finlande

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

France

 

 

 

 

 

+ 2

 

 

 

 

+ 1

 

 

+ 2

 

+ 2

Grèce

 

 

 

 

 

+ 1

 

 

 

 

+ 2

+ 2

+ 2

 

 

 

Irlande

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

+ 1

+ 1

 

 

 

Italie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lettonie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lituanie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Luxembourg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Malte

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

+ 1

 

 

 

 

Pays-Bas

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

+ 1

 

 

Portugal

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

+ 1

+ 1

 

 

Slovaquie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Slovénie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

+ 2

 

 

                                 

 

État ne faisant pas encore partie de la zone euro

           

 

État ne faisant pas l’objet d’une procédure de déficit excessif

       

 

État faisant l’objet d’une procédure de déficit excessif

         

 

État faisant l’objet d’une procédure de déficit excessif et d’actions suivies d’effet

 

État faisant l’objet d’une procédure de déficit excessif et de sanctions

   

État bénéficiant d’un délai de correction de son déficit

         

Source : Semestre européen, présentation présidence néerlandaise.

Seul le Luxembourg a respecté chaque année les dispositions de ce pacte depuis l’origine. Le schéma ci-dessus (4) illustre les décisions annuelles adoptées par le Conseil à l’égard des différents États membres de la zone euro (5).

Le Portugal est le premier pays à être soumis à une procédure de déficit excessif au titre de l’année 2001, en raison d’un déficit nominal de 4,1 %. Les deux plus grands pays de la zone euro, l’Allemagne et la France, font l’objet de cette procédure de déficit excessif l’année suivante, au titre de l’année 2002.

A. LE NON-RESPECT DU PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE PAR L’ALLEMAGNE ET LA FRANCE A SUSCITÉ SA MODIFICATION

Dès 2003, un débat concernant l’assouplissement du pacte de stabilité et de croissance s’établit à l’initiative du président Jacques Chirac (6), soutenu par le chancelier allemand Gerhard Schröder. En novembre 2003, le Conseil européen rejette les recommandations de la Commission européenne relatives à la procédure de déficit excessif engagée contre la France et contre l’Allemagne. Il décide de suspendre la procédure engagée contre les deux pays, ces derniers s’engageant à ramener leurs déficits en dessous du seuil des 3 % au plus tard en 2005. En janvier 2004, la Commission européenne saisit la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) sur la validité de la procédure retenue par le Conseil en novembre 2003. La CJCE annule les conclusions du Conseil le 13 juillet 2004 (7). En novembre 2004, le Conseil prend l’initiative d’un débat de réexamen des dispositions du pacte de stabilité et de croissance.

Au titre de l’année 2004, la Grèce devient le premier État, en situation de procédure de déficit excessif, à être mis en demeure de prendre, dans un délai déterminé, des mesures visant à la réduction de son déficit (8).

En juin 2005 (9), le pacte de stabilité et de croissance est modifié afin « d’assurer un équilibre adéquat entre d’une part le discernement économique le plus élevé et la liberté de décision (...) et, d’autre part, la nécessité de faire en sorte que le cadre réglementaire soit simple, transparent et applicable », selon les termes des conclusions du Conseil européen (10). Les principales modifications concernent la définition d’un objectif de moyen terme, la fixation d’une trajectoire d’ajustement vers cet objectif et la prise en compte des réformes structurelles.

B. LE NOMBRE DE PAYS EN SITUATION DE PROCÉDURE DE DÉFICIT EXCESSIF S’EST ACCRU EN RAISON DE LA CRISE ÉCONOMIQUE ET DES DETTES SOUVERAINES

Au titre de l’année 2006, seuls l’Italie et le Portugal étaient en procédure de déficit excessif. La Grèce demeurait le seul État à être soumis à la procédure de déficit excessif pour l’année 2007. Il s’agit de la dernière année où le pacte de stabilité et de croissance a été le mieux respecté par les États membres de la zone euro.

En effet, la crise économique de 2008 puis celle des dettes souveraines au sein de la zone euro auront pour conséquence un allongement de la liste des pays en situation de procédure de déficit excessif. Quatre États étaient dans cette situation au titre de l’année 2008, dont la France et l’Espagne. Au titre de l’année 2009, le Conseil a décidé de constater que quatorze pays de la zone euro sur seize sont en situation de déficit excessif.

Au cours de cette période, compte tenu de la situation économique européenne particulièrement dégradée, de nombreux États ont bénéficié de délais pour se conformer aux exigences du pacte de stabilité et de croissance.

Au titre de l’année 2014, sept pays de la zone euro dont la France sont encore soumis à la procédure de déficit excessif. Dans une recommandation adoptée le 10 mars 2015 (11), le Conseil a accordé à la France un délai de deux ans afin de ramener son déficit public sous la limite des 3 % du PIB, c’est-à-dire à compter de 2017.

PAYS DE LA ZONE EURO SOUMIS À LA PROCÉDURE DE DÉFICIT EXCESSIF

État

Date du rapport
de la Commission européenne

Décision du Conseil constatant l’existence d’une situation
de déficit excessif

Délai de correction
du déficit

Chypre

12 mai 2010

13 juillet 2010

2016

Portugal

7 octobre 2009

2 décembre 2009

2015

Slovénie

7 octobre 2009

2 décembre 2009

2015

France

18 février 2009

27 avril 2009

2017

Irlande

18 février 2009

27 avril 2009

2015

Grèce

18 février 2009

27 avril 2009

2016

Espagne

18 février 2009

27 avril 2009

2016

Source : commission des finances.

Les programmes de stabilité, préparés actuellement par les États de la zone euro, seront examinés par la Commission européenne. Celle-ci recommandera en mai au Conseil la clôture de la procédure de déficit excessif pour les pays qui respectent les dispositions du pacte de stabilité et de croissance au titre de l’année 2015. Le Conseil adoptera ses recommandations par pays en juin ou juillet, lesquelles constituent l’aboutissement du semestre européen 2016.

II. LES OBJECTIFS DU PROGRAMME DE STABILITÉ

Les objectifs de finances publiques du programme de stabilité ont été définis sur la base d’un scénario macroéconomique qui a été jugé plausible par le Haut Conseil des finances publiques (12).

Le Gouvernement a décidé de maintenir la trajectoire de réduction du déficit nominal qu’il avait définie lors de la présentation du programme de stabilité d’avril 2015. Le déficit nominal serait ainsi ramené à 3,3 % du PIB en 2016, puis sous les 3 % dès 2017 à 2,7 % (13).

Cette trajectoire demeure légèrement plus ambitieuse que celle recommandée par le Conseil de l’Union européenne le 10 mars 2015 : 3,4 % en 2016 et 2,8 % en 2018.

De même, l’objectif de déficit nominal pour 2016 demeure amélioré de 0,3 point de PIB par rapport à la trajectoire définie dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (14).

DÉFICIT NOMINAL POUR LES ANNÉES 2015 À 2019

(en % du PIB)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

Recommandations du Conseil du 10 mars 2015

4,0

3,4

2,8

– 

– 

Loi de programmation des finances publiques

4,1

3,6

2,7

1,7

0,7

Programme de stabilité 2015

3,8

3,3

2,7

1,9

– 

Programme de stabilité 2016

3,5

3,3

2,7

1,9

1,2

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Le Gouvernement a légèrement revu la trajectoire d’ajustement structurel en abaissant de 0,1 point l’ajustement prévu pour 2016. Pour 2017 et 2018, l’ajustement structurel est maintenu à 0,5 point de PIB. Pour 2019, le Gouvernement prévoit un ajustement structurel limité à 0,3 point du PIB.

La trajectoire de déficit structurel est également légèrement revue. La prévision de déficit structurel est relevée de 0,2 point de PIB pour les années 2016 à 2018.

AJUSTEMENT STRUCTUREL ET DÉFICIT STRUCTUREL POUR LES ANNÉES 2016 À 2019 PROPOSÉS PAR LE GOUVERNEMENT

(en % du PIB)

Trajectoire

Source

2016

2017

2018

2019

Ajustement structurel

Programme de stabilité 2015

0,5

0,5

0,5

– 

Programme de stabilité 2016

0,4

0,5

0,5

0,3

Déficit structurel

Programme de stabilité 2015

1,1

0,6

0,1

– 

Programme de stabilité 2016

1,3

0,8

0,3

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

La trajectoire d’ajustement structurel retenue par le Gouvernement est moins contrainte que celle recommandée par le Conseil de l’Union européenne le 10 mars 2015.

COMPARAISON DE L’AJUSTEMENT STRUCTUREL ET DU DÉFICIT STRUCTUREL POUR LES ANNÉES 2016 À 2019 PRÉSENTÉS PAR LE GOUVERNEMENT ET LE CONSEIL EUROPÉEN

(en % du PIB)

Année

2016

2017

2018

2019

Programme de stabilité 2016

0,4

0,5

0,5

0,3

Recommandations du Conseil

0,8

0,9

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Enfin, la trajectoire de ralentissement de l’endettement public et de sa décrue est plus ambitieuse jusqu’en 2018 dans le présent programme de stabilité, par rapport à la recommandation du Conseil du 10 mars 2015 et aux précédentes prévisions.

DETTE PUBLIQUE POUR LES ANNÉES 2015 À 2019

(en % du PIB)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

Recommandations du Conseil européen du 10 mars 2015

97,2

98,8

99,3

Loi de programmation des finances publiques

97,1

97,7

97

95,1

92,4 

Programme de stabilité 2015

96,3

97

96,9

95,5

Programme de stabilité 2016

95,7

96,2

96,5

95,4

93,3

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Le Gouvernement prévoit d’atteindre ces objectifs tout en baissant les prélèvements obligatoires (15).

PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES POUR LES ANNÉES 2015 À 2019

(en % du PIB)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

Programme de stabilité 2016

44,5

44,2

44,0

43,8

43,5

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Les objectifs en valeur et en pourcentage de PIB sont récapitulés dans le tableau qui suit sur la base des informations recueillies auprès du Gouvernement et de l’INSEE.

TRAJECTOIRE DES FINANCES PUBLIQUES POUR LES ANNÉES 2015 À 2018

En milliards d’euros

(en % du PIB)

2015

2016

2017

2018

Produit intérieur brut

2 190,1

2 243,0

2 296,4

2 368,0

Recettes publiques (16)

1 166,0

(53,2 %)

1 183,9

(52,8 %)

1 209,3

(52,7 %)

1 243,3

(52,5 %)

Dont prélèvements obligatoires*

975,3

(44,5 %)

991,4

(44,2 %)

1 009,6

(44 %)

1 036,3

(43,8 %)

Dont crédits d’impôts enregistrés en recettes

26,0

(1,2 %)

25,3

(1,1 %)

28,4

(1,2 %)

30,0

(1,3 %)

Dont recettes hors prélèvements obligatoires

166,9

(7,6 %)

169,4

(7,6 %)

173,5

(7,6 %)

179,3

(7,6 %)

Dépenses publiques

1 243,4

(56,8 %)

1 256,9

(56 %)

1 270,9

(55,3 %)

1 288,2

(54,4 %)

Dont crédits d’impôts enregistrés en dépenses

31,8

(1,5 %)

31,5

(1,4 %)

31,8

(1,4 %)

31,2

(1,3 %)

Dont dépenses hors crédits d’impôts

1 211,6

(55,3 %)

1 225,4

(54,6 %)

1 239,1

(54 %)

1 257,0

(53,1 %)

Solde public

77,4

(3,5 %

73,1

(3,3 %)

61,7

(2,7 %)

44,8

(1,9 %)

Dette publique

2 096,9

(95,7 %)

2 156,7

(96,2 %)

2 216,9

(96,5 %)

2 259,6

(95,4 %)

*les prélèvements obligatoires comprennent 2,2 milliards au profit de l’Union européenne, lesquels ne sont pas comptabilisés dans les recettes totales.

Source : données gouvernementales.

III. LES MOYENS MIS EN ŒUVRE POUR ATTEINDRE LES OBJECTIFS

L’atteinte des objectifs de solde repose exclusivement sur un effort sur les dépenses (17).

Pour 2016, 15 milliards d’euros d’économies sont proposées dans le programme de stabilité du Gouvernement :

– 6,4 milliards d’euros pour l’État et ses opérateurs dont 1,8 milliard d’euros provenant d’économies de constatation sur la charge de la dette ;

– 3,3 milliards d’euros pour les collectivités locales ;

– 5,3 milliards d’euros pour les administrations de sécurité sociale (dont 945 millions d’euros sur la baisse du prix des médicaments et le recours aux génériques, 700 millions d’euros sur des améliorations de la politique d’achat à l’hôpital, 500 millions d’euros sur un meilleur recours à l’ambulatoire et 1,9 milliard d’euros non précisés sur les administrations de sécurité sociale hors objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM).

Pour 2017, 18,7 milliards d’euros d’économies sont proposées dans le programme de stabilité du Gouvernement :

– 6,2 milliards d’euros pour l’État et ses opérateurs ;

– 3,7 milliards d’euros pour les collectivités locales ;

– 8,8 milliards d’euros pour les administrations de sécurité sociale, dont 3,4 milliards au titre de l’ONDAM.

Le Gouvernement prévoit 2 milliards d’euros d’économies complémentaires en 2016 par rapport à la loi de finances initiale et 5 milliards d’euros en 2017 afin de compenser les effets de la faible inflation. Les dépenses nouvelles annoncées depuis janvier 2016 nécessitent en outre la réalisation de 4 milliards d’euros d’économies supplémentaires.

ÉCONOMIES À RÉALISER EN 2016 ET 2017

Année

2016

2017

Objectif à atteindre (en % du PIB) (programme de stabilité)

3,3 %

2,7 %

Économies prévues en loi de finances initiale (en euros) (A)

15,8 Mds

15,4 Mds

Part des économies « détruites » du fait de la faible inflation (en euros) (B)

– 4,6 Mds

– 1,7 Mds

Économies complémentaires prévues par le programme de stabilité (en euros) (C)

+ 2 Mds

+ 5 Mds

Constatation d’une moindre charge sur les intérêts de la dette (en euros) (D)

+ 1,8 Mds

– 

Économies prévues par le programme de stabilité (en euros) (A– B + C + D)

15 Mds

18,7 Mds

Dépenses nouvelles annoncées depuis janvier 2016 (en euros) (E)

4 Mds

– 

Économies supplémentaires à réaliser (en euros) (E)

4 Mds

Source : calcul commission des finances.

Ces moyens sont calibrés pour atteindre les objectifs de déficit nominal et d’ajustement structurel du programme de stabilité.

Le niveau de croissance potentielle intervient pour 0,2 point de PIB dans la réalisation de l’objectif d’effort structurel en 2016. Si le programme de stabilité était basé sur le niveau de croissance potentielle retenu par la Commission européenne, l’effort structurel aurait été – toutes choses égales par ailleurs – inférieur de 0,2 point de PIB à celui retenu pour 2016.

Atteindre les objectifs d’effort structurel fixés par la Commission européenne nécessiterait 26 milliards d’euros d’économies supplémentaires sur deux ans (2016 et 2017).

COMPARAISON DE L’EFFORT STRUCTUREL RETENU PAR LE GOUVERNEMENT
ET RECOMMANDÉ PAR LA COMMISSION EUROPÉENNE

Année

2016

2017

Effort structurel à atteindre (en %) du PIB (Programme de stabilité 2016)

0,4 %

0,5 %

Traduction de cet objectif en réduction de dépenses (par rapport à la « tendance »), (en milliards d’euros)

13,2

18,7

Effort structurel à atteindre (en % du PIB) (recommandation du Conseil de l’Union européenne)

0,8 %

0,9 %

Traduction de cet objectif en réduction de dépenses (par rapport à la « tendance »), (en milliards d’euros) (en retenant les hypothèses de croissance potentielle de la Commission)

26,7

33,1

Réduction supplémentaire de dépenses à réaliser pour atteindre l’objectif du Conseil de l’Union européenne (en milliards d’euros)

13,5

12,6

Source : calcul commission des finances.

Atteindre l’objectif d’effort structurel de la Commission européenne détruirait 150 000 emplois à horizon 2017 et coûterait 1 point de taux de croissance du PIB.

IMPACT SUR LA CROISSANCE ET L’EMPLOI DE L’EFFORT STRUCTUREL RECOMMANDÉ PAR LA COMMISSION EUROPÉENNE

Année

2016

2017

2018

Effet sur l’emploi de la réalisation de l’objectif d’effort structurel de la Commission européenne (en milliers d’emplois)

– 20

– 83

– 152

Effet total sur le niveau du PIB (en point de PIB)

– 0,4

– 0,9

– 1,1

Source : modèle MÉSANGE du ministère des finances.

La Rapporteure générale approuve dès lors le choix du Gouvernement de privilégier un équilibre raisonnable entre assainissement des finances publiques et soutien à la croissance économique.

IV. LE PROGRAMME NATIONAL DE RÉFORME 2016

Le programme national de réforme 2016 vise à répondre aux recommandations formulées par le Conseil européen à la France en juillet 2015 (18), en matière de politiques macroéconomiques et structurelles (19).

Ce document propose un chiffrage de l’impact macroéconomique des réformes menées. La Rapporteure générale a obtenu cette année, de la part du Gouvernement, la transmission d’informations en tenant compte du financement des mesures. Ainsi, le tableau suivant présente ces données d’impact macroéconomique, soit en version brute – sans prise en compte des modalités de financement, soit en version nette – c’est-à-dire en intégrant le coût de financement.

IMPACT MACROÉCONOMIQUE DES RÉFORMES À L’HORIZON 2020

Réformes économiques

Croissance

Emplois

Impact brut (en points de PIB)

Impact net (en points de PIB)

Impact brut (en nombre d’emplois)

Impact net (en nombre d’emplois)

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et pacte de responsabilité

1,7

0,1

520 000

280 000

Réforme des collectivités territoriales

0,3

0,3

0

0

Transition énergétique

0,8

0,8

120 000

120 000

Soutien à l’investissement et l’innovation

0,6

0,5

80 000

60 000

Simplification de la réglementation et amélioration du fonctionnement du marché des biens et services

0,4

0,4

25 000

25 000

Amélioration du fonctionnement du marché du travail

0,3

0,3

120 000

120 000

Soutien au pouvoir d’achat des ménages à revenus modestes

0,3

0

40 000

10 000

Réforme de l’éducation

0,1

0

20 000

0

Accompagnement et soutien des populations les plus éloignées de l’emploi

0,2

0,1

110 000

50 000

TOTAL

4,7

2,5

1 035 000

665 000

Source : Gouvernement.

En tenant compte des modalités de financement, l’impact macroéconomique des mesures présentées dans le programme national de réforme 2016 serait de 2,5 points de PIB supplémentaires et 665 000 emplois créés à l’horizon 2020.

A. LA STRATÉGIE DE SOUTENABILITÉ ET DE QUALITÉ DES FINANCES PUBLIQUES

Le Gouvernement présente dans le programme national de réforme sa stratégie de retour à l’équilibre des comptes publics, avec un déficit public ramené en dessous de 3 % du PIB et une stabilisation du ratio dette/PIB en 2017. L’effort de redressement des finances publiques porte désormais exclusivement sur les dépenses. Le ratio de dépense publique, hors crédits d’impôts, serait en baisse de 2014 à 2016, passant de 56,4 % à 55,1 % par rapport au PIB.

Le Gouvernement souhaite également améliorer la qualité de la dépense publique, à travers son programme de modernisation de l’action publique et de revues des dépenses. L’amélioration de la qualité de l’offre de soins et l’acte III de la décentralisation devraient en outre rendre la dépense publique plus efficiente dans ces domaines.

Parallèlement, le niveau de prélèvements obligatoires devrait se réduire à 44,2 % en 2016 en raison du pacte de responsabilité et de solidarité et du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). La fiscalité des ménages et des entreprises diminuerait substantiellement, tandis que la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales continueraient de s’intensifier.

B. LE RENFORCEMENT DE LA COMPÉTITIVITÉ ET DE LA PRODUCTIVITÉ DE L’ÉCONOMIE

La France a engagé un travail important de simplification des normes pesant sur les entreprises. Ainsi, le conseil de simplification, mis en place en janvier 2014, a permis l’annonce de 415 mesures de simplification, pour des gains bruts estimés à 1,1 milliard d’euros entre août 2014 et septembre 2015.

La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (20) a facilité l’activité économique le dimanche et en soirée, dans les professions réglementées du droit et sur le marché des lignes d’autocar interurbaines.

Le Gouvernement encourage également l’investissement en matière de d’innovation, avec la stabilité du crédit d’impôt recherche, le plan « France Très Haut Débit » et le plan numérique pour l’éducation. L’investissement des entreprises est favorisé par le prolongement du dispositif de suramortissement de l’investissement productif et la dynamisation de l’épargne salariale.

C. L’AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT DU MARCHÉ DU TRAVAIL

L’amélioration du fonctionnement du marché du travail résulte d’un approfondissement du dialogue social et d’un renforcement des dispositifs d’accompagnement, notamment en faveur des publics les plus éloignés de l’emploi tels que les jeunes. La pérennisation et la généralisation de la « garantie jeunes » à compter de 2017 et le développement de la filière professionnelle et des périodes d’apprentissage représentent des solutions pertinentes pour accroître l’adéquation des compétences et des besoins sur le marché du travail.

D. LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ, LES INÉGALITÉS ET L’EXCLUSION

Le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, adopté en 2013, prévoit une revalorisation des minimas sociaux et des allocations à destination des familles à revenus modestes.

Le Gouvernement concentre par ailleurs ses efforts en faveur de la facilitation de l’accès au logement et le développement de l’offre de logements sociaux ou locatifs intermédiaires sur l’ensemble du territoire.

Enfin, la jeunesse est l’une des priorités de ce mandat, cela s’illustre par des réformes en matière d’éducation, d’enseignement supérieur et d’augmentation substantielle des moyens dédiés depuis 2012.

V. LE SUIVI DES OBJECTIFS DE LA « STRATÉGIE EUROPE 2020 »

TABLEAU DE SUIVI DES OBJECTIFS 2020

Objectifs

Dernière observation disponible (France)

Dernière observation disponible (UE 28)

Objectif national de la France

Objectif européen

Taux d’emploi de la population âgée de 20 à 64 ans

69,4 % en 2014

69,2 % en 2014

75 %

75 %

Part du PIB consacrée à la R&D

2,24 % en 2013

1,91 % en 2013

3 %

3 %

Réduction des émissions de gaz à effet de serre (1)

12 % en 2014 (/2005 hors SCEQE (2))

23 % (/1990, avec SCEQE)

14 % (/2005, hors SCEQE en 2020)

20 % (/1990, avec SCEQE en 2020)

Part des énergies renouvelables dans la consommation finale

14,6 % en 2014

16,0 % en 2014

23 %

20 %

Efficacité énergétique

En 2014 :
144,3 Mtep en énergie finale
250,9 Mtep en énergie primaire

En 2013 :
1 103,8 Mtep en énergie finale
1 566,5 Mtep en énergie primaire

131,4 Mtep (énergie finale) et 219,9 Mtep (énergie primaire), hors aérien international et usages non énergétiques

1 086 Mtep en énergie finale (1 483 Mtep en énergie primaire)

Taux de décrochage scolaire

9 % en 2014

11,2 % en 2014

9,5 %

Moins de 10 %

Proportion des personnes âgées de 30 à 34 ans diplômées de l’enseignement supérieur

43,7 % en 2014

46,8 % pour les personnes âgées de 17 à 33 ans (3)

37,9 % en 2014

50 % des personnes âgées de 17 à 33 ans

40 % au moins

Réduction du nombre de personnes risquant de tomber dans la pauvreté ou l’exclusion

18,5 % (4) de la population en 2014
(11,2 millions de personnes, stable par rapport à 2007)

24,4 % de la population en 2014 (122,9 millions de personnes, en hausse de 6,3 millions par rapport à 2007) (4)

Réduction de 1,9 million de personnes (comparé au chiffre estimé pour 2007)

Réduction de 20 millions de personnes (comparé au chiffre estimé pour 2007)

(1) L’objectif européen couvre l’ensemble des sources d’émissions. L’objectif de réduction des missions des secteurs soumis à la directive SCEQE n’ont pas été décliné en objectifs nationaux.

(2) Système communautaire d’échange de quotas d’émission.

(3) Commission européenne, Rapport 2016 pour la France, page 103.

(4) Source : Eurostat 2014.

Source : programme national de réforme 2016.

La France, à l’instar des autres pays de l’Union européenne, obtient des résultats satisfaisants en termes de formation, d’effort en matière de recherche et développement (R&D) et d’objectifs de transition énergétique (21).

Le taux de décrochage scolaire, établi à 9 % en 2014, est conforme à l’objectif de 9,5 % fixé à la France pour 2020. Le taux de diplômés de l’enseignement supérieur en France s’élève à 46,8 % en 2014 pour les 17-33 ans, proche de l’objectif fixé à 50 %.

L’intensité de R&D s’élève à 2,24 % du PIB en 2014, contre 2,06 % en 2008, avec une dynamique positive dans le secteur privé.

La part des énergies renouvelables dans la consommation finale s’établit à 14,6 % en 2014, la France pourrait être en capacité d’atteindre l’objectif de 23 % qui lui est assigné. La réduction des émissions de gaz à effet de serre s’est élevée à 12 % dans les secteurs non couverts par le système d’échange de quotas d’émission (SEQE). L’objectif fixé à la France d’une réduction des émissions de 14 % par rapport à 2005 devrait donc être atteint avec une marge inférieure à cinq points de pourcentage selon la Commission européenne.

Les résultats d’efficacité énergétique de la France se sont élevés à 250,9 mégatonnes d’équivalent pétrole (Mtep) en 2014 pour la consommation d’énergie primaire et 144,3 Mtep pour la consommation d’énergie finale. La France devrait atteindre son objectif de réduction de la consommation d’énergie finale, elle progresse au niveau de l’objectif de consommation d’énergie primaire.

À l’inverse, les objectifs en termes de taux d’emploi et de réduction de la pauvreté ou des inégalités seront difficilement atteints par la France, notamment en raison de l’impact de la crise économique subie en 2008.

Le taux d’emploi des travailleurs âgés de vingt à soixante-quatre ans s’établit à 69,4 % en France en 2014. La Commission relève que l’objectif de 75 % ne pourra être atteint que si de nouveaux signes de reprise économique se traduisent par des emplois.

Le pourcentage de la population totale menacée de pauvreté est passé de 18,1 % en 2013 à 18,5 % en 2014. Le nombre de personnes menacées de pauvreté a augmenté de 389 000 unités en France depuis 2008, contrairement à l’objectif de réduction de pauvreté visé à l’horizon 2020.

FICHE 1 :
LES CYCLES ANNUELS BUDGÉTAIRES 2015 ET 2016

La France informe les instances européennes de la politique qu’elle entend mener sur le plan économique et budgétaire par le biais de deux documents : le programme de stabilité et le programme national de réforme (PNR).

La transmission de ces deux documents constitue ainsi un temps fort du cycle annuel budgétaire, et plus particulièrement du semestre européen qui précède le semestre national.

I. DÉROULEMENT GÉNÉRAL D’UN CYCLE ANNUEL BUDGÉTAIRE

Le cycle annuel budgétaire se décompose en un semestre européen et un semestre national.

A. LE SEMESTRE EUROPÉEN

1. Contenu du semestre européen

Le semestre européen, instauré en 2011, est une période d’environ six mois qui permet un dialogue économique entre les instances européennes et les États membres. Son objet est de coordonner et de surveiller les politiques économiques et budgétaires des États membres ainsi que leurs réformes structurelles (22).

À ce titre, le semestre européen regroupe trois types de procédure de coordination.

LES TROIS AXES DE LA COORDINATION DES POLITIQUES DES ÉTATS MEMBRES
DURANT LE SEMESTRE EUROPÉEN

Objet de la coordination

Cadre juridique de la coordination

Réformes structurelles

Stratégie Europe 2020

Politiques budgétaires – finances publiques

Pacte de stabilité et de croissance (PSC)

Politiques économiques

Prévention des déséquilibres macroéconomiques (PDM)

Source : commission des finances.

Le semestre européen comprend ainsi (23) :

– la formulation et la surveillance de la mise en œuvre des grandes orientations des politiques économiques dans l’examen annuel de la croissance auquel procède la Commission européenne ;

– la formulation, et l’examen de la mise en œuvre, des lignes directrices pour l’emploi ;

– la présentation et l’évaluation des programmes de stabilité ou de convergence des États membres ;

– la présentation et l’évaluation des programmes nationaux de réforme des États membres ;

– la surveillance pour prévenir et corriger les déséquilibres macroéconomiques.

2. Calendrier du semestre européen

a. Novembre de l’année N-1

Le semestre européen est lancé par la Commission européenne avec la publication d’une série de documents (le « paquet » de novembre) qui sert de base à la discussion.

Le document le plus important est l’« examen annuel de la croissance » qui expose les grandes orientations des politiques économiques. Il est soumis à l’examen des autres institutions et alimente les discussions préalables au Conseil européen de printemps.

La Commission publie également un rapport sur le mécanisme d’alerte (RMA) dans le cadre de la procédure de surveillance des déséquilibres macroéconomiques (PDM). Ce rapport identifie les pays comme pouvant être touchés par un tel déséquilibre et devant faire l’objet d’un bilan approfondi.

Enfin, la Commission publie un projet de rapport sur l’emploi dans le cadre de la définition des lignes stratégiques pour l’emploi.

b. Février de l’année N

La Commission publie, ensuite, en février, une série de rapports par pays analysant les politiques économiques des États membres. Ces rapports comprennent des bilans approfondis des pays considérés comme étant en situation de déséquilibre macroéconomique.

c. Conseils européens de printemps

Sur ces différentes bases, le Conseil européen définit les lignes directrices de l’Union européenne dont les États membres doivent tenir compte. Il peut également transmettre des orientations à certains membres.

d. Avril de l’année N

Les États membres de la zone euro transmettent ensuite, avant la fin avril, aux autorités européennes leur programme de stabilité (ou programme de convergence pour les autres États membres), ainsi que leur programme national de réforme (PNR).

LE RÔLE DES ÉTATS MEMBRES DURANT LE SEMESTRE EUROPÉEN

Document transmis par les États membres

Objet de la coordination

Programme de stabilité ou de convergence

Politiques budgétaires

Programme national de réforme

Politiques économiques et réformes structurelles

Sour : commission des finances.

e. Mai de l’année N

La Commission publie ses recommandations stratégiques par pays en se fondant sur son évaluation des situations économiques et des programmes nationaux.

f. Juin et juillet de l’année N

Enfin, le Conseil adopte ses recommandations par pays en juin ou juillet, lesquels constituent l’aboutissement du semestre européen.

Ce calendrier doit permettre d’organiser un dialogue. L’institution d’un semestre européen a indéniablement amélioré la coopération entre les États membres et les institutions européennes, tout en renforçant le caractère multilatéral du processus.

B. LE SEMESTRE NATIONAL

À l’issue du semestre européen, les États membres doivent élaborer leur budget, selon leurs règles propres, en tenant compte des orientations de l’UE.

Le semestre national est, du point de vue des procédures européennes, régit par le « two-pack » (24), c’est-à-dire un ensemble de deux règlements du 21 mai 2013 qui ont été adoptés en vue de renforcer la surveillance budgétaire de la zone euro :

– le règlement (UE) du Parlement européen et du Conseil n° 472/2013 du 21 mai 2013 qui a organisé une surveillance renforcée des États membres qui sollicitent une aide multilatérale.

– et le règlement (UE) du Parlement européen et du Conseil n° 473/2013 du 21 mai 2013 qui a prévu l’obligation pour les États membres de se doter d’un organisme indépendant pour évaluer les hypothèses macroéconomiques des stratégies budgétaires.

Ce règlement a également transformé le semestre européen en un cycle budgétaire annuel ce qui permet un approfondissement de l’échange d’informations et de la coordination entre les États membres et les institutions européennes.

Les États membres doivent ainsi envoyer leur « plan budgétaire » pour l’année suivante avant le 15 octobre. Les États membres faisant l’objet d’une procédure pour déficit excessif doivent également présenter un « programme de partenariat économique », conformément au traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), signé le 2 mars 2012 et ratifié par la France le 8 janvier 2013. Ce programme décrit les mesures et les réformes structurelles engagées pour assurer une correction durable des déficits excessifs (25).

DOCUMENTS À TRANSMETTRE À LA COMMISSION EUROPÉENNE
AVANT LE 15 OCTOBRE DE L’ANNÉE N-1

Documents

Cadre juridique

Plan budgétaire

Suivi de la mise en œuvre du programme de stabilité

Programme de partenariat économique

Procédure pour déficits excessifs

Source : commission des finances.

La Commission donne son avis avant le 30 novembre et demande, le cas échéant, des modifications. Pour ce qui est des États membres faisant l’objet d’une procédure de déficit excessif, l’avis de la Commission évalue si la correction du déficit est conforme aux recommandations du Conseil de l’Union européenne.

Cette évaluation se fait également sur la base d’un rapport sur l’action engagée en réponse à la recommandation issue de la procédure de déficit excessif, transmis par le pays concerné.

L’Eurogroupe, qui réunit les ministres des finances des États membres de la zone euro, examine, ensuite, les avis sur les projets de plans budgétaires ainsi que la situation et les perspectives budgétaires pour la zone euro dans son ensemble, sur la base d’une évaluation réalisée par la Commission, afin de disposer d’une vision agrégée du contexte budgétaire de la zone.

L’État membre transmet, enfin, sa loi de finances à la Commission avant la fin de l’année.

II. RETOUR SUR LE CYCLE ANNUEL BUDGÉTAIRE 2015

Au terme d’un semestre européen constructif, la France est parvenue à faire prévaloir son point de vue sur la trajectoire d’ajustement structurel, ce qui lui a permis d’obtenir une suspension de la procédure de déficit excessif.

A. LE SEMESTRE EUROPÉEN 2015 A PERMIS À LA FRANCE DE FAIRE PRÉVALOIR SON POINT DE VUE

Le 28 novembre 2014, la Commission européenne a adopté l’examen annuel de la croissance, qui a marqué le lancement du semestre européen 2015 de coordination des politiques économiques (26).

Dans son rapport publié le 26 février 2015 (27), la Commission a considéré que la France était dans une situation de déséquilibres macroéconomiques excessifs nécessitant l’adoption de mesures préventives et une surveillance particulière. Parallèlement, le 27 février 2015, la Commission a recommandé l’adoption d’une nouvelle recommandation du Conseil de l’Union européenne à la France, invitant celle-ci à corriger son déficit excessif au plus tard pour 2017 (28).

C’est ainsi que, dans sa recommandation du 10 mars 2015, le Conseil de l’Union européenne a donné à la France jusqu’en 2017 – au lieu de 2015 précédemment – pour ramener son déficit public sous les 3 % de PIB en lui recommandant de suivre la trajectoire de déficit suivante : 4 % en 2015, 3,4 % en 2016 et 2,8 % en 2017. Le Conseil a également recommandé une réduction soutenue du déficit structurel de 0,5 point de PIB en 2015, puis 0,8 point en 2016 et 0,9 point en 2017.

Le 15 avril 2015, la France a présenté son programme national de réforme et son programme de stabilité qui trace les grandes lignes des finances publiques pour les années 2015-2018. Le programme de stabilité reposait sur une hypothèse de croissance du PIB de 1 % pour l’année 2015, puis de 1,5 % pour les années 2016 et 2017, et 1,75 % pour 2018. La France prévoit, en outre, d’atteindre en 2018 son objectif à moyen terme (OMT) d’équilibre structurel avec un déficit structurel limité à 0,1 point de PIB − la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 prévoit un OMT de – 0,4 % du PIB.

Dans le programme de stabilité présenté le 15 avril 2015, le Gouvernement a fait le choix de ne pas suivre entièrement la recommandation du Conseil.

Certes, le déficit nominal prévu est inférieur à la recommandation du Conseil de l’Union européenne. Les cibles de déficit public sont ainsi de 3,8 % du PIB pour l’année 2015, puis 3,3 % pour l’année 2016 et 2,7 % pour l’année 2017.

COMPARAISON DE LA TRAJECTOIRE DE SOLDE PUBLIC

(en % du PIB)

Année

2015

2016

2017

Recommandation du Conseil de l’Union européenne du 10 mars 2015

− 4,0

− 3,6

− 2,8

Programme de stabilité du 15 avril 2015

− 3,8

− 3,3

− 2,7

Source : commission des finances.

Mais, l’ajustement structurel prévu est moins important que celui recommandé par le Conseil de l’Union européenne puisqu’il est limité à 0,5 point de PIB par an de 2015 à 2017.

COMPARAISON DE LA TRAJECTOIRE D’AJUSTEMENT STRUCTUREL

(en % du PIB)

Année

2015

2016

2017

Recommandation du Conseil de l’Union européenne du 10 mars 2015

0,5

0,8

0,9

Programme de stabilité du 30 avril 2015

0,5

0,5

0,5

Source : commission des finances.

Ainsi qu’elle a eu l’occasion de le développer dans son rapport d’information sur le programme de stabilité pour 2015-2018 (29), la Rapporteure générale estime que la recommandation du Conseil du 10 mars 2015 reposait sur un ajustement structurel trop important qui pouvait se traduire par un recul de la croissance économique. Cette recommandation impliquait, en effet, de réaliser 20 milliards d’euros d’économies supplémentaires sur le triennal ce qui aurait eu un impact négatif sur la croissance en France et en Europe.

Les mesures de stimulation de la croissance peuvent être au moins aussi efficaces que les mesures d’économies budgétaires pour réduire le déficit.

La Rapporteure générale a dès lors pleinement approuvé le choix du Gouvernement de retenir une trajectoire d’ajustement structurel différente de celle recommandée par le Conseil et de préserver ainsi la croissance. Ce choix permet, in fine, de dépasser les objectifs de solde nominal fixés par la recommandation du Conseil. Au surplus, la trajectoire retenue par le Gouvernement est conforme aux règles du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance (PSC).

Certes, dans sa recommandation du 13 mai 2015 (30), la Commission européenne a constaté que, si le gouvernement français prévoit de respecter les objectifs de déficits nominaux fixés par le Conseil de l’Union européenne, l’effort budgétaire prévu pour 2016 et 2017 est inférieur au niveau recommandé en termes d’ajustements structurels.

Mais, le point de vue de la France a finalement prévalu.

La Commission européenne a, en effet, constaté que le Rapport sur l’action engagée, remis par la France le 10 juin 2015 dans le cadre de la procédure pour déficit excessif, confirmait l’intention du Gouvernement de ramener le déficit public sous les 3 % de PIB dans le délai fixé par le Conseil. La Commission s’attend, ainsi, à ce que la France respecte ses objectifs de déficit nominal en 2015 et en 2016. La procédure de déficit excessif engagée contre la France a été suspendue (31).

Sur la base de cet avis de la Commission, la recommandation du Conseil du 14 juillet 2015 a conclu que l’action de la France était « globalement conforme » aux dispositions du pacte de stabilité et de croissance (32).

Le dialogue qui a eu lieu tout au long du semestre européen a donc permis à la France de faire prévaloir sa stratégie budgétaire qui consiste à privilégier le retour de la croissance pour faire baisser le solde nominal.

Les recommandations du Conseil du 14 juillet 2015 concernant le programme national de réforme de la France pour 2015 et portant avis
sur le programme de stabilité de la France pour 2015

1. engager une action suivie d’effets au titre de la procédure concernant les déficits excessifs et assurer une correction durable du déficit excessif en 2017 au plus tard par un renforcement de sa stratégie budgétaire, en prenant les mesures nécessaires pour toutes les années et en consacrant toutes les recettes imprévues à la réduction du déficit et de la dette ; préciser les réductions de dépenses prévues pour ces années et fournir une évaluation indépendante de l’impact des principales mesures ;

2. accentuer les efforts visant à rendre efficace la revue des dépenses, poursuivre les évaluations des politiques publiques et recenser les possibilités d’économies dans tous les sous-secteurs des administrations publiques, et notamment aux niveaux de la sécurité sociale et des collectivités locales ; prendre des mesures pour limiter l’augmentation des dépenses de fonctionnement des collectivités locales ; prendre des mesures supplémentaires pour ramener le système de retraite à l’équilibre, notamment en s’assurant, d’ici à mars 2016, que la situation financière des régimes de retraite complémentaire soit soutenable à long terme ;

3. maintenir les réductions du coût du travail découlant du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et du pacte de responsabilité et de solidarité, notamment en les mettant en œuvre comme prévu en 2016 ; évaluer l’efficacité de ces dispositifs en tenant compte des rigidités du marché du travail et du marché des produits ; réformer, en concertation avec les partenaires sociaux et conformément aux pratiques nationales, le processus de formation des salaires pour que ceux-ci évoluent au même rythme que la productivité ; veiller à ce que les évolutions du salaire minimum soient compatibles avec les objectifs de promotion de l’emploi et de la compétitivité ;

4. d’ici à la fin de 2015, éliminer les obstacles réglementaires à la croissance des entreprises, notamment en révisant les critères de taille fixés dans la réglementation pour éviter les effets de seuil ; éliminer les restrictions d’accès aux professions réglementées autres que juridiques et à l’exercice de celles-ci, notamment en ce qui concerne les professions de santé à partir de 2015 ;

5. simplifier et améliorer l’efficacité du système fiscal, notamment en supprimant les dépenses fiscales inefficaces ; afin de promouvoir l’investissement, prendre des mesures visant à réduire les impôts sur la production et le taux nominal de l’impôt sur les sociétés, tout en élargissant la base d’imposition sur la consommation ; prendre des mesures à partir de 2015 en vue de supprimer les impôts inefficaces dont le produit est nul ou faible ;

6. réformer le droit du travail afin d’inciter davantage les employeurs à embaucher en contrats à durée indéterminée ; faciliter, aux niveaux des entreprises et des branches, les dérogations aux dispositions juridiques générales, notamment en ce qui concerne l’organisation du temps de travail ; réformer la loi portant création des accords de maintien de l’emploi d’ici à la fin de 2015 en vue d’accroître leur utilisation par les entreprises ; entreprendre, en concertation avec les partenaires sociaux et conformément aux pratiques nationales, une réforme du système d’assurance chômage afin d’en rétablir la soutenabilité budgétaire et d’encourager davantage le retour au travail.

B. LE SEMESTRE NATIONAL 2015 A FAIT L’OBJET D’UNE ÉVALUATION POSITIVE PAR LES INSTANCES EUROPÉENNES

La France a communiqué à la Commission européenne le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2016. Ce document fait office de « plan budgétaire » au titre du suivi du programme de stabilité, et de « programme de partenariat économique » au titre de la procédure pour déficit excessif.

Ce plan budgétaire a été jugé « globalement conforme » aux dispositions du pacte de stabilité et de croissance par la Commission européenne (33).

Par ailleurs, la France adresse régulièrement à la Commission européenne des rapports sur les actions suivies d’effet qu’elle a entreprises en vue de remédier au déficit excessif. Le dernier date du 10 décembre 2015 (34).

III. PREMIERS ÉLÉMENTS DU SEMESTRE EUROPÉEN 2016

A. LE PAQUET DE NOVEMBRE

Le 26 novembre 2015, la Commission européenne a lancé le sixième exercice du semestre européen en présentant son « examen annuel de croissance pour 2016 » dans lequel elle dresse un bilan de la situation économique et sociale au sein de l’Union et formule ses propositions pour les grandes orientations de politique économique pour l’année à venir. Le même jour, la Commission a publié le rapport sur le mécanisme d’alerte (RMA).

1. L’examen annuel de la croissance 2016

Dans son « examen annuel de la croissance 2016 » (35), la Commission a recommandé la fixation de trois priorités pour la politique économique et sociale de l’Union européenne en 2016 :

– une relance de l’investissement à travers notamment le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) qui doit permettre de mobiliser au moins 315 milliards d’euros d’investissements supplémentaires sur trois ans ;

– une poursuite des réformes structurelles pour moderniser les économies des États membres, dont la réforme du marché du travail qui doit « garantir à la fois la flexibilité et la sécurité » ;

– et la mise en œuvre de politiques budgétaires responsables, c’est-à-dire la poursuite de l’assainissement budgétaire.

Le Conseil européen des 17 et 18 mars 2016 a approuvé les priorités stratégiques recensées dans l’examen annuel de la croissance. Il a également invité les États membres à intégrer ces priorités dans leurs prochains programmes nationaux de réforme et programmes de stabilité ou de convergence.

2. Le rapport sur le mécanisme d’alerte

La Commission a adopté, dans le cadre de la prévention des déséquilibres macroéconomiques (PDM), le rapport sur le mécanisme d’alerte (RMA).

Comme l’an dernier, ce rapport mentionne la France parmi les États membres qui doivent fait l’objet d’un bilan approfondi en raison du déficit de sa balance commerciale, de la dégradation de sa compétitivité ainsi que de l’importance de son endettement privé et public.

B. LE RAPPORT 2016 POUR LA FRANCE

La Commission européenne a publié les rapports par pays le 26 février 2016.

Le Rapport 2016 pour la France (36) contient une analyse de la situation économique de la France, un bilan approfondi pour évaluer les déséquilibres macroéconomiques et une évaluation de la mise en œuvre des recommandations du Conseil du 14 juillet 2015.

1. L’analyse de la situation économique de la France

La Commission européenne souligne que la croissance économique en France reste modérée et continue d’être surtout tirée par la consommation. Elle pointe également le fait que si l’investissement repart, celui-ci demeure faible en matière de biens d’équipement.

Elle estime ainsi la croissance potentielle de la France à seulement 1,1 % pour 2016. La croissance potentielle ne serait plus tirée que par la croissance démographique, la productivité du travail et du capital étant en baisse.

2. Les deux déséquilibres macroéconomiques de la France

Le rapport 2016 pour la France contient également un bilan approfondi dès lors que le RMA de novembre 2015 avait identifié une situation de déséquilibre macroéconomique.

Dans ce bilan approfondi, la Commission européenne a estimé que la France connaissait deux types de déséquilibres macroéconomiques : un déséquilibre d’endettement et un déséquilibre de compétitivité.

Dans sa communication du 8 mars 2016, la Commission européenne a officiellement informé les diverses instances européennes (Conseil, Parlement, Eurogroupe) que la France connaissait une situation de déséquilibre excessif (37).

3. Les progrès dans la mise en œuvre des recommandations du Conseil

Enfin, le rapport 2016 pour la France procède à une évaluation de la mise en œuvre des recommandations du Conseil du 14 juillet 2015. La Commission a ainsi relevé de nombreux progrès de la France, dont des progrès substantiels en matière de réduction du coût du travail et de réforme des retraites.

Recommandations du Conseil du 14 juillet 2015

Appréciation

de la Commission

Correction du déficit budgétaire excessif

Assurer une correction durable du déficit excessif en 2017

Progrès limités

Préciser les réductions de dépenses prévues

Progrès limités

Maîtrise des dépenses publiques

Accentuer les efforts visant à rendre efficace la revue des dépenses

Certains progrès

Recenser les possibilités d’économies (sécurité sociale et collectivités locales)

Certains progrès

Ramener le système de retraites à l’équilibre

Progrès substantiels

Amélioration de la compétitivité-coût

Maintenir les réductions du coût du travail

Progrès substantiels

Réformer le processus de formation des salaires

Certains progrès

Revoir l’évolution du salaire minimum

Progrès limités

Levée obstacles réglementaires à la croissance

Revoir les effets de seuil

Progrès limités

Revoir les restrictions d’accès aux professions réglementées

Certains progrès

Réforme de la fiscalité

Simplifier et améliorer l’efficacité du système fiscal

Progrès limités

Réduire la fiscalité des entreprises et la réorienter sur la consommation

Certains progrès

Supprimer les impôts inefficaces de faible rendement

Aucun progrès

Réforme du droit du travail

Assouplissement des règles

Progrès limités

Faciliter les dérogations au niveau des entreprises et des branches

Progrès limités

Réformer les accords de maintien dans l’emploi en vue d’accroître leur utilisation

Certains progrès

Réformer l’assurance chômage

Progrès limités

C. LES CONCLUSIONS DU CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE

Contrairement à l’an dernier, le Conseil de l’Union européenne n’a pas formulé d’orientations spécifiques concernant la France pour la préparation de son programme de stabilité et son programme national de réforme.

Le Conseil de l’Union européenne du 7 mars 2016 a invité les États membres d’une manière générale « à traduire dans leurs programmes nationaux de réforme les priorités de la stratégie Europe 2020, de l’examen annuel de la croissance 2016, du rapport conjoint sur l’emploi et (…) à mettre en œuvre des politiques appliquant les recommandations par pays de 2015 ».

D. L’ADOPTION DU PROGRAMME DE STABILITÉ ET DU PROGRAMME NATIONAL DE RÉFORME

C’est dans ce contexte qu’ont été adoptés en Conseil des ministres du 13 avril 2016 le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 ainsi que le programme national de réforme. Ces documents doivent désormais être examinés par la Commission européenne.

FICHE 2 :
LA SURVEILLANCE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES NATIONALES PAR L’UNION EUROPÉENNE

La présentation du programme de stabilité et du programme national de réforme (PNR) s’inscrit dans le cadre de différentes coordinations des politiques budgétaires et économiques au sein de l’Union européenne. Ces documents, élaborés par le Gouvernement, ont pour objet d’informer les instances européennes des politiques économiques et budgétaires envisagées au plan national.

Le principe d’une surveillance multilatérale des politiques économiques des États membres est posé par l’article 121 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). À l’origine, la surveillance – régie par différents textes formant le pacte de stabilité et de croissance (PSC) – portait uniquement sur les finances publiques. Depuis 2012, elle porte également sur la prévention des déséquilibres macroéconomiques (PDM). Il existe ainsi deux cadres de surveillance multilatérale des politiques économiques, l’un portant sur les finances publiques, l’autre sur la macroéconomie.

LES DEUX CADRES DE SURVEILLANCE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES NATIONALES

Cadre de surveillance

Surveillance

des finances publiques

Surveillance

macroéconomique

Instrument juridique

Pacte de stabilité et de croissance (PSC)

Prévention et correction

des déséquilibres macroéconomiques (PDM)

Volet correctif

Procédure

pour déficit excessif

Procédure

pour déséquilibre excessif

Source : commission des finances.

Chacun de ces deux cadres de surveillance comprend un volet préventif et un volet correctif. Les volets préventifs concernent tous les États membres tandis que les volets correctifs ne concernent que ceux à l’encontre desquels une procédure pour déficit excessif ou pour déséquilibre excessif a été ouverte. Ces différents volets, à l’exception du volet préventif de la prévention des déséquilibres macroéconomiques, sont assortis de sanctions en cas de manquements répétés dans la mise en œuvre des recommandations des instances européennes.

Actuellement, et depuis février 2009, la France relève du volet correctif du PSC. En revanche, bien qu’en situation de déséquilibre macroéconomique excessif depuis février 2015, la France ne relève pas du volet correctif de la prévention des déséquilibres macroéconomiques dans la mesure où la Commission n’a pas initié à son encontre l’ouverture d’une procédure.

Outre ces deux cadres de surveillance, les politiques économiques des États membres font également l’objet d’une coordination, moins contraignante, au titre de la « stratégie Europe 2020 » (38).

I. LA SURVEILLANCE DES FINANCES PUBLIQUES

La présentation du programme de stabilité a lieu dans le cadre de la surveillance des finances publiques nationales par l’Union européenne. Il s’agit du document par lequel le Gouvernement communique à la Commission ses objectifs en matière de finances publiques.

A. NORMES DE FINANCES PUBLIQUES À RESPECTER

Contrairement à la surveillance macroéconomique, l’objectif de la surveillance des finances publiques est davantage centré sur la discipline que sur la coordination.

Le PSC est régi par deux règlements qui ont fait l’objet de plusieurs modifications :

– le règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dit « volet préventif » ;

– et le règlement (CE) n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs, dit « volet correctif ».

Le pacte de stabilité et de croissance a pour objet de prévenir et de corriger les déficits excessifs définis par le TFUE, d’une part, et de faire respecter les règles budgétaires (« règle d’or ») du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), d’autre part. Plusieurs types de normes résultent de ces deux traités et des règlements pris pour leur application. Ces normes font l’objet de modalités de surveillance et de sanction différentes. Elles sont résumées dans le tableau qui suit.

NORMES DE FINANCES PUBLIQUES APPLICABLES AUX ÉTATS MEMBRES
DONT LA DETTE PUBLIQUE EXCÈDE 60 % DU PIB

Normes

Modalités de surveillance et de sanction

Traité source

Limite du déficit structurel

à 0,5 % du PIB

Volet préventif
du PSC

Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG)

Trajectoire d’ajustement structurel supérieure

à 0,5 point de PIB par an

Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG)

+

Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE)

Limitation de l’augmentation annuelle des dépenses au taux de croissance potentielle sauf compensation par des mesures discrétionnaires en matière de recettes

Compensation des réductions de recettes par des réductions de dépenses (règle applicable aux États n’ayant pas encore atteint leur objectif budgétaire de moyen terme)

Réduction de la dette publique excédant 60 % du PIB d’au moins un vingtième par an en moyenne sur trois ans

Volet correctif

du PSC

« Procédure pour déficit excessif »

Limite du déficit nominal

à 3 % du PIB

Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

(TFUE)

Source : commission des finances.

En premier lieu, le TFUE prohibe les déficits excessifs évalués suivant deux critères : le déficit public et la dette publique. Le déficit public est excessif lorsqu’il dépasse 3 % du PIB. La dette publique est excessive lorsqu’elle dépasse 60 % du PIB sauf si elle diminue suffisamment (39), c’est-à-dire si la part de la dette qui excède 60 % du PIB diminue d’au moins un vingtième par an en moyenne sur les trois dernières années (40).

En second lieu, l’article 3 du TSCG pose le principe de l’équilibre ou de l’excédent des budgets des administrations publiques. Il limite le déficit structurel autorisé à – 0,5 point de PIB pour les États membres dont la dette dépasse 60 % du PIB, et à – 1 point de PIB pour les autres États membres.

Par ailleurs, et pour respecter les règles précitées, les États membres doivent déterminer un objectif de moyen terme (OMT), défini en termes de solde structurel, compris entre – 0,5 point de PIB et l’excédent (41). Ils doivent également définir une trajectoire d’ajustement en vue d’atteindre l’OMT, étant précisé que le solde structurel doit converger vers l’OMT retenu d’au moins 0,5 point de PIB par an (et de plus de 0,5 point par an lorsque l’État membre possède une dette publique supérieure à 60 % du PIB).

La Commission européenne et le Conseil peuvent cependant estimer que l’effort d’ajustement peut être plus limité en période de conjoncture économique défavorable (42). L’évolution des dépenses publiques est également encadrée en fonction de la croissance potentielle estimée par la Commission. Enfin, les États n’ayant pas encore atteint leur OMT doivent compenser les réductions de recettes discrétionnaires par des réductions de dépenses équivalentes (43).

B. CADRE JURIDIQUE DE LA SURVEILLANCE DES FINANCES PUBLIQUES

Le pacte de stabilité et de croissance constitue l’armature juridique de la surveillance des finances publiques. Il comporte un volet préventif et un volet correctif, tous deux assortis d’un régime de sanctions.

LA SURVEILLANCE DES FINANCES PUBLIQUES

Volet Préventif

Orientations du Conseil

Le Conseil adopte ses orientations généralement en février sur la base de l’examen annuel de la croissance élaboré par la Commission

Programme de stabilité ou programme de convergence

Ces programmes sont transmis par les États membres à la Commission avant le 30 avril

Évaluation et suivi

− Les programmes sont évalués dans les trois mois de leur transmission

− Un avertissement et des recommandations peuvent être adoptés en cas d’écart important avec la trajectoire d’ajustement

Volet correctif

Ouverture de la procédure pour déficit excessif

Sur décision du Conseil, agissant sur recommandation de la Commission, le Conseil adopte des recommandations en vue de la correction du déficit excessif

Actions suivies d’effet

− L’État membre remet un rapport sur les actions suivies d’effet qu’il a entreprises en vue de remédier au déficit excessif

− La Commission évalue les actions suivies d’effet

Mise en demeure

En l’absence d’actions suivies d’effet, le Conseil peut, sur recommandation de la Commission, adresser une mise en demeure

Sanctions

Sanction du volet préventif

Dépôt portant intérêts de 0,2 % du PIB

Sanctions du volet correctif

Dépôt ne portant pas intérêts de 0,2 % du PIB, voire amendes de 0,2 % du PIB à 0,5 % du PIB si l’État membre enfreint à plusieurs reprises les règles du volet correctif

Source : commission des finances.

1. Le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance

Le volet préventif s’articule autour du programme de stabilité (États de la zone euro) ou de convergence (États hors zone euro) que les États membres doivent transmettre à la Commission avant le 30 avril. Ces programmes font l’objet d’une évaluation et d’un suivi par les instances européennes.

a. L’obligation d’élaborer un programme de stabilité ou de convergence

Les États membres déterminent, dans leur programme de stabilité ou de convergence, un OMT et une trajectoire d’ajustement, ainsi que les moyens mis en œuvre pour atteindre ces différents objectifs.

Le programme de stabilité présenté par la France en avril 2015 prévoyait un ajustement structurel de 0,5 point par an entre 2015 et 2018 pour atteindre en 2018 un OMT de
– 0,1 point en 2018. L’article 2 de la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 fixe un OMT de
– 0,4 point de PIB pour 2019.

Ces programmes doivent reposer sur un scénario macroéconomique plausible.

CONTENU OBLIGATOIRE D’UN PROGRAMME DE STABILITÉ OU DE CONVERGENCE

Objectif de moyen terme (OMT)

Solde structurel compris entre – 0,5 point de PIB et l’excédent

Trajectoire d’ajustement

− Au moins 0,5 point de PIB

− Supérieure à 0,5 point de PIB lorsque la dette publique est supérieure à 60 % du PIB

Moyens mis en œuvre

− Cadrage économique comprenant les principales hypothèses concernant l’évolution prévisible de l’économie et les variables économiques importantes

− Description des mesures budgétaires et des autres mesures de politique économique qui sont mises en œuvre et/ou envisagées pour réaliser les objectifs du programme

− Analyse de l’incidence que tout changement des principales hypothèses économiques aurait sur la situation budgétaire et la dette

Source : commission des finances.

En France, contrairement à d’autres État de l’Union européenne, le programme de stabilité ne fait pas l’objet d’un vote obligatoire par le Parlement.

b. L’évaluation et le suivi des programmes de stabilité ou de convergence

La conformité de la trajectoire de chaque État membre au regard des recommandations européennes est évaluée dans les trois mois par la Commission. L’État membre peut être invité à modifier son programme si le Conseil, agissant sur recommandation de la Commission, adopte une recommandation en ce sens (44).

Les programmes de stabilité ou de convergence font également l’objet d’un suivi. À ce titre, les États membres communiquent avant le 15 octobre leur projet de plan budgétaire pour l’année qui suit. Ces plans budgétaires doivent tenir compte des recommandations par pays adoptées par le Conseil au mois de juillet.

La France a communiqué à la Commission européenne comme plan budgétaire le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2016. Ce plan budgétaire a été jugé « globalement conforme » aux dispositions du pacte de stabilité et de croissance par la Commission européenne.

Commission européenne, 17 novembre 2015 : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-15-6067_fr.htm.

Par ailleurs, les plans budgétaires font eux-mêmes l’objet d’un suivi durant la phase d’exécution.

La Commission adresse aux États membres un avertissement en cas d’écart important par rapport à la trajectoire d’ajustement. Le Conseil peut alors adopter des recommandations lesquelles peuvent donner lieu, en l’absence d’actions suivies d’effet de la part de l’État membre, à des sanctions (45) consistant en un dépôt portant intérêts de 0,2 % du PIB.

À ce jour, la France n’a jamais fait l’objet d’un avertissement par la Commission européenne au titre d’un écart important entre la trajectoire d’ajustement transmise et la trajectoire exécutée. La France n’est donc pas exposée, à ce stade, à des sanctions au titre du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance.

2. Le volet correctif du pacte de stabilité et de croissance

L’ouverture d’une procédure pour déficit excessif est décidée par le Conseil sur recommandation de la Commission. L’État membre doit prendre des actions suivies d’effet et en rendre compte régulièrement à la Commission. En l’absence d’actions suivies d’effet, l’État membre peut être mis en demeure par le Conseil de corriger son déficit excessif et d’améliorer chaque année son solde structurel d’au moins 0,5 % du PIB (46). À l’issue de la procédure et en l’absence d’actions suivies d’effet, l’État membre s’expose à des sanctions pouvant aller de 0,2 % à 0,5 % du PIB (47).

La procédure de déficit excessif ouverte à l’encontre de la France

La France fait l’objet d’une procédure de déficit excessif depuis le 27 avril 2009. Le Conseil de l’Union européenne avait alors accordé un délai à la France jusqu’en 2012 pour corriger son déficit. Le 2 décembre 2009, le Conseil a accordé un nouveau délai à la France jusqu’en 2013. Le 21 juin 2013, ce délai a été reporté à 2015. Enfin, le 10 mars 2015, ce délai a été porté à 2017.

Le 10 juin 2015, la France a présenté un rapport sur l’action engagée qui fournit des informations complémentaires sur les mesures prévues pour la période 2015-2017. Après analyse de ce rapport, la Commission a publié, le 1er juillet 2015, une communication dans laquelle elle estime que la procédure concernant les déficits excessifs doit être suspendue. Autrement dit, la Commission européenne n’est pas passée à l’étape suivante de la procédure qui aurait consisté à mettre la France en demeure de prendre des actions suivies d’effet. Pour autant, la procédure de déficit excessif est toujours ouverte à l’encontre de la France. La clôture éventuelle de la procédure sera constatée par le Conseil lorsque le déficit excessif aura été corrigé.

Huit autres États, dont sept appartenant à la zone euro, font actuellement l’objet d’une procédure pour déficit excessif : la Croatie, Chypre, l’Espagne, la Grèce, l’Irlande, le Portugal, le Royaume-Uni et la Slovénie.

II. LA SURVEILLANCE MACROÉCONOMIQUE

Tout comme le pacte de stabilité et de croissance, la prévention des déséquilibres macroéconomiques comporte un volet préventif et un volet correctif. Seul le volet correctif peut déboucher sur des sanctions.

Le programme national de réforme et le programme de stabilité font partie des documents que les instances européennes examinent pour déterminer les éventuelles mesures préventives à mettre œuvre ou pour décider de l’ouverture d’une procédure concernant les déséquilibres excessifs.

LA SURVEILLANCE DES DÉSÉQUILIBRES MACROÉCONOMIQUES

Prévention

Mécanisme d’alerte

Tableaux de bord

Le rapport sur le mécanisme d’alerte (RMA) est un rapport annuel de la Commission qui désigne les États membres dont elle considère qu’ils peuvent être touchés par un déséquilibre. Le rapport est généralement publié en novembre en même temps que l’examen annuel de la croissance

Bilan approfondi

La Commission procède à un bilan approfondi (en février) pour chaque État membre exposé à un déséquilibre macroéconomique

Mesures préventives

Sur recommandation de la Commission (en mai), le Conseil adresse ses recommandations (en juillet) à l’État membre en situation de déséquilibre macroéconomique

Correction

Ouverture de la procédure concernant les déséquilibres excessifs

Sur recommandation de la Commission, le Conseil adresse ses recommandations à l’État membre en situation de déséquilibre excessif

Plan de mesures correctives

L’État membre doit alors adresser un plan de mesures correctives dans le délai imparti par le Conseil

Suivi des mesures correctives

L’État membre soumet des rapports d’avancement qui sont évalués par la Commission

Clôture de la procédure concernant les déséquilibres excessifs

Le Conseil, sur recommandation de la Commission, abroge les recommandations émises dès qu’il estime que l’État membre concerné ne présente plus de déséquilibres excessifs

Sanction

Dépôt portant intérêt

Un dépôt de 0,1 % du PIB portant intérêt est imposé par décision du Conseil, statuant sur recommandation de la Commission, si le Conseil conclut que l’État membre concerné n’a pas pris les mesures correctives recommandées.

Amende annuelle

Une amende annuelle de 0,1 % du PIB est imposée par décision du Conseil, statuant sur recommandation de la Commission lorsque deux recommandations successives sont prises constatant l’insuffisance du plan de mesures correctives ou lorsque deux recommandations successives sont prises constatant que les mesures correctrices n’ont pas été prises.

Source : commission des finances.

A. OBJET DE LA SURVEILLANCE MACROÉCONOMIQUE

La surveillance macroéconomique a pour but de sortir du « tout finances publiques » à laquelle se réduisait auparavant le dialogue économique entre les instances européennes et les États membres.

Son but est de déceler et de corriger à un stade précoce les déséquilibres macroéconomiques en prêtant une attention particulière à ceux qui pourraient avoir des retombées sur d’autres États membres.

Le déséquilibre est défini assez largement comme « toute tendance donnant essor à des développements macroéconomiques ayant un effet préjudiciable ou susceptibles d’avoir un effet préjudiciable sur le bon fonctionnement de l’économie d’un État membre, de l’Union économique et monétaire ou de l’Union dans son ensemble ».

Le déséquilibre est considéré comme excessif lorsqu’il est « grave », notamment lorsqu’il compromet ou est susceptible « de compromettre, le bon fonctionnement de l’Union économique et monétaire » (48).

En d’autres termes, la surveillance macroéconomique doit inciter à une meilleure coordination des politiques économiques des États membres au bénéfice de l’ensemble de l’Union européenne, et en particulier de la zone euro.

Sa finalité est moins « disciplinaire » que la surveillance des finances publiques issue du pacte de stabilité et de croissance : le volet préventif ne peut faire l’objet de sanctions et les sanctions du volet correctif sont moins fortes.

B. CADRE JURIDIQUE DE LA SURVEILLANCE MACROÉCONOMIQUE

La surveillance multilatérale de l’Union européenne au titre des déséquilibres macroéconomiques est régie par deux règlements :

– le règlement (UE) n° 1176/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011 sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques ;

– et le règlement (UE) n° 1174/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011 établissant des mesures d’exécution en vue de remédier aux déséquilibres macroéconomiques excessifs dans la zone euro.

Le volet préventif de la prévention des déséquilibres macroéconomiques (PDM) peut aboutir à l’adoption de mesures sous forme de recommandations du Conseil lorsqu’un État membre est jugé en situation de déséquilibre macroéconomique au terme d’un bilan approfondi de la Commission européenne.

Le volet correctif n’a encore jamais été activé. Il débute par l’ouverture d’une procédure concernant les déséquilibres excessifs et par l’adoption d’un plan de mesures correctives qui fait l’objet d’un suivi. Les sanctions théoriques sont limitées à 0,1 % du PIB.

C. APPRÉCIATION PAR LA COMMISSION DE L’ÉQUILIBRE MACROÉCONOMIQUE DES ÉTATS MEMBRES EN 2016

Le 8 mars 2016 (49), sur la base des bilans approfondis par pays publiés le 26 février 2016, la Commission a estimé que :

– sept États membres étaient touchés par un déséquilibre qui ne pouvait être qualifié d’excessif (Allemagne, Espagne, Finlande, Irlande, Pays-Bas, Slovénie, Suède) ;

– cinq États membres connaissaient un déséquilibre excessif (Bulgarie, Croatie, France, Italie, Portugal).

La Commission formulera ses recommandations par pays en mai pour l’ensemble des pays en situation de déséquilibre, après avoir examiné les programmes nationaux de réforme qui seront transmis en avril.

Pour ceux d’entre eux qui connaissent un déséquilibre excessif, la Commission peut également recommander au Conseil l’ouverture d’une procédure concernant les déséquilibres excessifs. À ce jour, aucun État membre ne fait l’objet d’une telle procédure.

Le Conseil devrait adopter ses recommandations par pays en juillet.

Surveillance macroéconomique de la France : l’ouverture possible d’une procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques

À ce jour, la France relève uniquement du volet préventif de la surveillance macroéconomique, comme l’ensemble des autres États membres en situation de déséquilibre.

Depuis 2012, soit depuis la création de ce mécanisme de surveillance, la Commission a systématiquement désigné, dans ses rapports sur le mécanisme d’alerte, la France comme étant touchée par des déséquilibres macroéconomiques. En février 2015, pour la première fois, la Commission a considéré que la France était en situation de déséquilibre « excessif ». La Commission a renouvelé ce constat le 8 mars 2016.

Dans ces conditions, la Commission peut recommander au Conseil l’ouverture d’une procédure concernant les déséquilibres excessifs à l’encontre de la France. Si le Conseil suivait cette recommandation, la France serait contrainte de présenter un plan de mesures correctives.

Cette procédure s’ajouterait à la procédure pour déficit excessif dont fait également objet la France depuis avril 2009.

Le constat juridique de la Commission est appuyé sur des considérations économiques exposées dans les différents rapports par pays contenant un bilan approfondi publiés le 26 février 2016. Ces rapports constituent un instrument particulièrement important de la communication de la Commission. Ils ont été nettement mis en avant cette année, avec notamment l’organisation de plusieurs réunions de présentation du rapport pays auprès de représentants syndicaux et associatifs (50).

Les analyses de la Commission européenne par pays dans le cadre des bilans approfondis présentent essentiellement pour intérêt d’examiner l’impact et les effets de la situation macroéconomique d’un pays sur l’ensemble de l’Union européenne.

Pour les deux principaux pays de la zone euro, la France et l’Allemagne, la Commission relève plusieurs déséquilibres macroéconomiques. Certains de ces déséquilibres, en particulier ceux relatifs au niveau des salaires et de la demande intérieure, sont antithétiques et reflètent des réalités opposées.

1. Les déséquilibres macroéconomiques excessifs de la France

Dans son Rapport 2016 pour la France, la Commission européenne a estimé que la France connaissait deux types de déséquilibres macroéconomiques : un déséquilibre d’endettement et un déséquilibre de compétitivité (51).

LES DÉSÉQUILIBRES MACROÉCONOMIQUES DE LA FRANCE

Déséquilibre d’endettement

Déséquilibre de compétitivité

− Dette publique élevée et croissante

− Importance du déficit primaire

− Niveau élevé de dépenses publiques

− Risques à moyen et long terme sur la soutenabilité de la dette

− Mauvaises performances à l’exportation

− Décrochage de compétitivité depuis les années 2000

− Dynamique des salaires supérieure à l’évolution de la productivité due à des rigidités dans le mécanisme de formation des salaires

− Faiblesse de l’investissement productif

Source : commission des finances à partir des données du Rapport pays 2016 pour la France de la Commission européenne.

Le déséquilibre d’endettement est révélé par une dette publique élevée et croissante, réduisant les marges de manœuvre budgétaire en cas de choc conjoncturel.

Le déséquilibre de compétitivité se traduit quant à lui par des pertes de parts de marché à l’exportation. Dans son rapport, la Commission européenne explique cette perte de compétitivité par le fait que les salaires ont progressé plus vite que la productivité du travail ces dernières années.

Elle estime également que la croissance potentielle de la France a reculé depuis la crise financière de 2008, pour se situer en moyenne à 1 % (1,1 % en 2016). Cette croissance potentielle serait en grande partie imputable à une démographie dynamique, et pour une moindre part à la productivité des facteurs de production, laquelle serait freinée par les rigidités du marché du travail.

2. Les déséquilibres macroéconomiques de l’Allemagne

Les déséquilibres macroéconomiques peuvent aussi concerner des pays en excédent budgétaire et/ou commercial, à l’instar de l’Allemagne.

Dans le rapport concernant l’Allemagne (52), la Commission a estimé que la persistance de l’excédent de la balance courante à un niveau élevé (plus de 8 % du PIB) constituait un déséquilibre macroéconomique. Ce déséquilibre est un facteur de risque pour l’économie allemande dans la mesure où cette dernière est de plus en plus dépendante à la demande extérieure.

Pour la Commission, l’excédent commercial allemand s’explique essentiellement par des raisons structurelles notamment la forte compétitivité du secteur manufacturier. Mais il est également dû à la faiblesse de la demande intérieure comme en témoigne le fait que les importations allemandes en provenance de la zone euro stagnent. À terme, la persistance et la croissance des excédents allemands peuvent donc affecter l’ensemble de la zone euro en comprimant la demande adressée à ses partenaires.

L’excédent de la balance courante reflète aussi un défaut de mobilisation de l’épargne disponible. Or, la faiblesse de l’investissement intérieur limite la croissance potentielle à long terme de l’Allemagne, même si celle-ci se situe encore à un niveau élevé par rapport aux autres États membres (1,8 % en 2016).

Pour la Commission, le renforcement de la demande intérieure en Allemagne profiterait à la fois à cette dernière et à la zone euro. Elle considère qu’une période prolongée de croissance dynamique des salaires serait favorable à la consommation privée, sans mettre en danger la compétitivité de l’Allemagne.

Cette analyse est dans la ligne de celle que la Commission avait retenue pour élaborer ses recommandations concernant la politique économique de la zone euro.

Les recommandations concernant la politique économique de la zone euro

La Commission européenne a également procédé à une analyse de la zone euro dans son ensemble dans le cadre du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance (PSC), d’une part, et de la prévention des déséquilibres macroéconomiques (PDM), d’autre part.

L’intérêt de cette analyse est d’appréhender la zone euro comme une entité économique globale afin de mieux coordonner les politiques budgétaires et économiques des États membres.

Le 26 novembre 2015, la Commission a ainsi recommandé :

– la mise en œuvre de mesures de stimulations de la consommation et de l’investissement dans les États membres qui affichent des excédents commerciaux importants ;

– un assouplissement des règles de fonctionnement du marché du travail et un allégement de la fiscalité sur le travail ;

– un renforcement de la coordination des politiques budgétaires qui doit permettre de débattre plus en amont de la position budgétaire de la zone euro ;

– une amélioration des procédures d’insolvabilité des entreprises et des ménages de façon à faciliter une résolution ordonnée des dettes privées non viables.

Ces recommandations ont été adoptées par le Conseil européen des 18 et 19 février 2016.

FICHE 3 :
LE CADRAGE MACROÉCONOMIQUE DU PROGRAMME
DE STABILITÉ

Les objectifs de finances publiques du programme de stabilité doivent reposer sur un scénario macroéconomique plausible. C’est la raison pour laquelle le programme de stabilité doit contenir un cadrage économique comprenant « les principales hypothèses concernant l’évolution prévisible de l’économie et les variables économiques importantes », conformément à l’article 3 du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques.

Ce cadrage macroéconomique, qui fait l’objet d’un avis par le Haut Conseil des finances publiques, présente trois caractéristiques principales : un retour de la croissance économique, un ralentissement de l’inflation et la persistance de taux d’intérêt faibles.

I. L’AVIS DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES

Le Haut Conseil des finances publiques est une autorité administrative indépendante créée par l’article 11 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques. Il a pour mission principale d’apprécier le réalisme des prévisions macroéconomiques du Gouvernement.

A. UN AVIS OBLIGATOIRE DEPUIS 2013

L’avis du Haut Conseil des finances publiques sur les prévisions macroéconomiques ayant présidé à l’élaboration du programme de stabilité est obligatoire depuis 2013. Il est prévu tant par le droit interne que le droit européen.

En droit interne, l’article 17 de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques prévoit que le Haut Conseil des finances publiques rend public son avis au moins deux semaines avant la date limite de transmission du programme de stabilité au Conseil de l’Union européenne et à la Commission européenne. Cet avis est joint au programme de stabilité.

En droit européen, l’article 5 du règlement (UE) n° 473/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 a prévu l’obligation pour les États membres de se doter d’un organisme indépendant pour évaluer les hypothèses macroéconomiques des stratégies budgétaires.

B. UN AVIS QUI CONFORTE LES PRÉVISIONS MACROÉCONOMIQUES DU GOUVERNEMENT

Dans son avis n° HCFP-2016-1 du 12 avril 2016 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, le Haut Conseil des finances publiques estime que :

– pour 2016, la prévision de croissance du Gouvernement, « tout en se situant en haut de la fourchette des prévisions économiques, est encore atteignable » (c’est nous qui soulignons) ;

– pour 2017-2019, le scénario macroéconomique du Gouvernement est « plausible, même si l’hypothèse d’accélération de l’activité en fin de période est fragile » (c’est nous qui soulignons).

Globalement, cet avis conforte donc les prévisions macroéconomiques du Gouvernent même s’il est marqué par une prudence habituelle et inhérente à la mission du Haut Conseil.

II. LE RETOUR DE LA CROISSANCE

A. UNE CROISSANCE MEILLEURE QUE PRÉVU EN 2015

La croissance du PIB a marqué un coup d’arrêt brutal en 2008. Après une phase de rattrapage en 2010 et 2011, elle a fortement ralenti à partir de 2012.

En 2015, la croissance du PIB s’est élevée à 1,2 % au lieu de 1 % prévu en loi de finances. La croissance est désormais à son niveau le plus élevé depuis 2012.

CROISSANCE EN FRANCE DEPUIS 2002

(% d’évolution annuelle en volume du PIB)

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

1,1

0,8

2,8

1,6

2,4

2,4

0,2

– 2,9

2,0

2,1

0,2

0,7

0,2

1,2

Source : INSEE.

Pour rappel, dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2015 (53), le Haut Conseil des finances publiques avait jugé « optimiste » la prévision de croissance du Gouvernement de 1 % pour 2015. Selon le Haut Conseil, cette prévision supposait « un redémarrage rapide et durable de l’activité que n’annoncent pas les derniers indicateurs conjoncturels ».

Le 30 septembre 2015, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2016, le Haut Conseil a revu son appréciation initiale en estimant que cette prévision « devrait se réaliser » (54).

En dernier lieu, le 6 novembre 2015, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2015, le Haut Conseil a considéré que cette prévision était « prudente » (55).

Autrement dit, après avoir émis un avis plutôt pessimiste, le Haut Conseil des finances publiques a progressivement revu son jugement jusqu’à considérer que le Gouvernement n’avait pas été assez optimiste dans ses prévisions de croissance pour 2015.

B. DES PRÉVISIONS DE CROISSANCE INCHANGÉES POUR LES ANNÉES 2016 ET SUIVANTES

Les prévisions du Gouvernement sont inchangées par rapport à la loi de finances pour 2016 et au programme de stabilité d’avril 2015.

La croissance devrait encore accélérer en 2016 et 2017. Le Gouvernement retient en effet une hypothèse de croissance de 1,5 % pour 2016 en 2017, soit un niveau égal à son hypothèse de croissance potentielle.

Pour 2016, la prévision du Gouvernement est légèrement supérieure à celles du Fonds monétaire international (FMI), de la Commission européenne, de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et de la Banque de France, lesquelles se situent entre 1,1 % et 1,4 %.

Pour 2017 en revanche, la prévision du Gouvernement est en ligne, voire légèrement inférieure à celles de la Commission européenne, de l’OCDE et de la Banque de France. Seul le FMI retient une hypothèse de croissance moins élevée.

PRÉVISIONS DE CROISSANCE EN VOLUME DU PIB POUR LA FRANCE

Institutions

2016

2017

Gouvernement

(programme de stabilité 2016)

1,5 %

1,5 %

Fonds monétaire international (FMI)

(Prévisions Perspectives de l’économie mondiale, avril 2016)

1,1 %

1,3 %

Commission européenne

(Prévisions d’hiver, 4 février 2016)

1,3 %

1,7 %

Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)

(Perspectives économiques intermédiaires globales, 18 février 2016)

1,2 %

1,5 %

Banque de France

(Projections macroéconomiques pour la France établies par la Banque de France dans le cadre de l’Eurosystème, décembre 2015)

1,4 %

1,6 %

Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)

(Perspectives économiques du 12 avril 2016)

1,6 %

1,6 %

Consensus Forecasts de mars 2016

1,3 %

1,5 %

Source : commission des finances.

Le Gouvernement anticipe une accélération de la croissance en 2018 et 2019 (respectivement 1,75 % et 1,9 %). La croissance effective dépasserait ainsi la croissance potentielle, ce qui permettrait de réduire l’écart de production accumulé au cours des années précédentes entre le PIB potentiel et le PIB effectif.

Pour le Haut Conseil des finances publiques, ce regain de croissance s’explique par « trois évolutions concomitantes : la baisse du prix du pétrole, la dépréciation de l’euro, et la réduction des ajustements budgétaires » en Europe qui entraînent une reprise modérée dans la zone euro depuis un an. Dans le programme de stabilité, le Gouvernement souligne l’existence d’un quatrième facteur : « la politique économique menée, notamment de soutien à la compétitivité des entreprises et au pouvoir d’achat ». La baisse du coût du travail devrait ainsi favoriser les exportations.

PRINCIPAUX ÉLÉMENTS DU SCÉNARIO MACROÉCONOMIQUE 2015-2019

(taux de croissance annuel en % du PIB)

Agrégat

2015

2016

2017

2018

2019

Produit intérieur brut

1,2

1,5

1,5

1,75

1,9

Consommation des ménages

1,4

1,6

1,6

1,8

2,0

Consommation des administrations publiques

1,5

1,0

0,6

0,0

0,0

Formation brute de capital fixe

0,0

1,7

3,0

3,9

4,5

Exportations

6,1

3,9

4,8

5,5

5,5

Importations

6,7

4,8

5,1

5,6

5,8

Masse salariale

1,6

2,3

2,5

3,1

3,8

Source : programme de stabilité, tableau 1.

Dans le détail du scénario macroéconomique présenté, le Haut Conseil a jugé « un peu élevée » la prévision d’augmentation de la masse salariale pour 2016. Il observe que cette prévision est plus élevée que celle de l’Unédic et de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) (respectivement 2,0 % et 1,9 %).

Le Haut Conseil s’est également interrogé sur l’importance de la contribution des stocks à la croissance, tout en relevant que cette hypothèse était cohérente avec la note de conjoncture de l’INSEE de mars 2016.

III. LA BAISSE DES PRÉVISIONS D’INFLATION

Entre 2002 et 2012, à l’exception de l’année 2009, l’inflation se situait dans une fourchette de 1,5 % à 2,8 %. Elle ralentit fortement depuis 2012 jusqu’à devenir nulle en 2015.

INFLATION EN FRANCE DEPUIS 2002

(% d’évolution annuelle de l’indice des prix à la consommation)

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

1,9

2,1

2,1

1,8

1,6

1,5

2,8

0,1

1,5

2,1

2,0

0,9

0,5

0,0

Source : INSEE.

Pour 2015, le Gouvernement avait prévu une inflation de 0,9 % en loi de finances initiale. Cette prévision avait été jugée « plausible » par le Haut Conseil des finances publiques (56). Le Gouvernement a révisé à la baisse cette prévision à 0,1 % pour l’élaboration du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Tout comme en 2015, l’inflation a été surestimée pour 2016. Le programme de stabilité présenté en avril 2015 ainsi que la loi de finances pour 2016 ont été construits sur une hypothèse d’inflation de 1 % en 2016. Le Gouvernement a revu à la baisse cette prévision d’inflation à 0,1 %.

Il a également revu à la baisse ces prévisions pour les années 2017 à 2019.

PRÉVISIONS D’INFLATION

Année

2016

2017

2018

2019

Programme de stabilité de 2015

1 %

1,4 %

1,75 % 

Programme de stabilité de 2016

0,1 %

1 % 

1,4 %

1,75 %

Les prévisions d’inflation du Gouvernement sont en ligne avec celles publiées par la Commission européenne dans ses prévisions économiques d’hiver 2016. La Commission prévoit, en effet, un ralentissement de l’inflation dans la zone euro, à 0,5 % pour 2016 au lieu de 1 % dans sa précédente prévision. De même, pour la France, elle ne prévoit désormais qu’une hausse des prix de 0,6 % au lieu de 0,9 % dans sa précédente prévision.

PRÉVISIONS D’INFLATION DE LA COMMISSION EUROPÉENNE

Année

2015

2016

2017

France

0,1 %

0,6 %

1,3 %

Zone euro

0,0 %

0,5 %

1,5 %

Source : Commission européenne, prévisions économiques hiver 2016.

Selon le Haut Conseil des finances publiques, la révision à la baisse opérée par le Gouvernement est « justifiée ». Le Haut Conseil avait d’ailleurs jugé, dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2016, que « la hausse des prix pourrait être inférieure à l’hypothèse de 1,0 % retenue par le Gouvernement ».

Le ralentissement de l’inflation serait dû essentiellement à la baisse des prix du pétrole, celui-ci ayant encore diminué à la fin 2015 pour se situer à environ 40 dollars le baril au lieu de 65 dollars à l’été dernier.

La politique monétaire expansionniste de la banque centrale européenne devrait toutefois susciter une reprise de l’inflation à compter de 2017.

L’assouplissement quantitatif (« quantitative easing »)
de la Banque centrale européenne

Le conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) a annoncé le 22 janvier 2015 un programme étendu d’achats d’actifs. Ce programme, qui vise à faire face aux risques d’une période trop prolongée de faible inflation, a été amplifié le 10 mars 2016.

Les achats d’actifs cumulés s’élèveront à 80 milliards d’euros par mois au lieu de 60 milliards précédemment. La BCE achète contre de la monnaie de banque centrale, sur le marché secondaire, des obligations émises par les administrations centrales, les agences et les institutions européennes de la zone euro. Depuis le 10 mars 2016, ces programmes de rachats sont élargis à d’autres types d’actifs, dont des obligations d’entreprises de bonne qualité. Ces achats devraient être effectués au moins jusqu’en septembre 2016. Le montant global des rachats pourrait donc être d’environ 1 420 milliards d’euros.

La baisse de l’inflation provoque plusieurs effets sur les finances publiques, lesquels se compensent en partie. Elle entraîne une baisse de certaines recettes fiscales, en particulier de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Mais, dans le même temps, elle entraîne une baisse des dépenses publiques : les dépenses de fonctionnement des ministères peuvent être contenues, la progression des prestations indexées est limitée et la charge d’intérêts des obligations indexées sur l’inflation diminue.

IV. LA PERSISTANCE DE TAUX D’INTÉRÊT FAIBLES

Les taux d’intérêts faibles ont un impact immédiat sur les finances publiques en ce qu’ils permettent de réduire la charge d’intérêts de l’État.

La charge de la dette recule fortement depuis 2012. Elle a ainsi reculé de 4,2 milliards d’euros en trois ans, passant de 46,3 milliards d’euros en 2012 à 42,1 milliards d’euros en 2015. Autrement dit, la charge d’intérêts ne représente plus que 1,9 % du PIB au lieu de 2,2 % en 2012.

CHARGES DE LA DETTE DE L’ÉTAT

Année

2012

2013

2014

2015

Montant en milliards d’euros

46,3

44,9

43,2

42,1

Montant en % du PIB

2,2

2,1

2

1,9

Source : commission des finances.

Les taux d’intérêts devraient poursuivre leur baisse en 2016. Le Gouvernement a ainsi revu à la baisse sa prévision de taux d’intérêt : alors que la loi de finances pour 2016 a été construite sur une hypothèse de taux pour les emprunts à dix ans de 1,9 %, le programme de stabilité retient désormais une hypothèse de 0,9 %.

FICHE 4 :
LES OBJECTIFS DE FINANCES PUBLIQUES DU PROGRAMME
DE STABILITÉ POUR LES ANNÉES 2016 À 2019

Le programme de stabilité est le document par lequel le Gouvernement informe, dans le cadre de la mise en œuvre du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance (PSC), les instances européennes de ses objectifs de finances publiques.

Les objectifs du programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 sont globalement identiques à ceux définis dans le précédent programme de stabilité pour les années 2015 à 2018 (57).

TRAJECTOIRE DES FINANCES PUBLIQUES POUR LES ANNÉES 2015 À 2018

En milliards d’euros

(en % du PIB)

2015

2016

2017

2018

Produit intérieur brut

2 190,1

2 243,0

2 296,4

2 368,0

Recettes publiques (58)

1 166,0

(53,2 %)

1 183,9

(52,8 %)

1 209,3

(52,7 %)

1 243,3

(52,5 %)

Dont prélèvements obligatoires*

975,3

(44,5 %)

991,4

(44,2 %)

1 009,6

(44 %)

1 036,3

(43,8 %)

Dont crédits d’impôts enregistrés en recettes

26,0

(1,2 %)

25,3

(1,1 %)

28,4

(1,2 %)

30,0

(1,3 %)

Dont recettes hors prélèvements obligatoires

166,9

(7,6 %)

169,4

(7,6 %)

173,5

(7,6 %)

179,3

(7,6 %)

Dépenses publiques

1 243,4

(56,8 %)

1 256,9

(56 %)

1 270,9

(55,3 %)

1 288,2

(54,4 %)

Dont crédits d’impôts enregistrés en dépenses

31,8

(1,5 %)

31,5

(1,4 %)

31,8

(1,4 %)

31,2

(1,3 %)

Dont dépenses hors crédits d’impôts

1 211,6

(55,3 %)

1 225,4

(54,6 %)

1 239,1

(54 %)

1 257,0

(53,1 %)

Solde public

77,4

(3,5 %

73,1

(3,3 %)

61,7

(2,7 %)

44,8

(1,9 %)

Dette publique

2 096,9

(95,7 %)

2 156,7

(96,2 %)

2 216,9

(96,5 %)

2 259,6

(95,4 %)

* les prélèvements obligatoires comprennent 2,2 milliards de prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne, lesquels ne sont pas comptabilisés dans les recettes totales.

Source : données gouvernementales.

I. UN MAINTIEN DE LA TRAJECTOIRE DE RÉDUCTION DU DÉFICIT NOMINAL

La diminution plus rapide que prévu du déficit en 2015 conforte la trajectoire de réduction définie dans le précédent programme de stabilité.

A. LE DÉFICIT PUBLIC DIMINUE PLUS RAPIDEMENT QUE PRÉVU

Le déficit public poursuit sa décrue. Le point le plus bas de solde effectif a été atteint en 2009, année qui a suivi la crise financière de 2008, avec un déficit record de 7,2 % du PIB. En 2011, le déficit public atteignait 5,1 % du PIB. En 2015, il a été ramené à 3,5 % du PIB alors qu’il avait été prévu à 4,1 % en loi de finances initiale et à 3,8 % en loi de finances rectificative.

DÉFICIT PUBLIC

Année

En milliards d’euros

En % du PIB

2007

49,5

2,5

2008

63,5

3,2

2009

138,9

7,2

2010

135,8

6,8

2011

105,0

5,1

2012

100,4

4,8

2013

85,4

4,1

2014

84,8

4,0

2015

77,4

3,5

Source : INSEE.

Ainsi, le déficit public a reculé de 1,6 point de PIB depuis le début de la législature. Dans ces conditions, il est probable que le déficit public retrouve en 2016 son niveau d’avant-crise (3,2 % du PIB en 2008), avant de repasser sous la barre des 3 % en 2017.

TRAJECTOIRE DU SOLDE PUBLIC

(en % du PIB)

Fondement

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Loi du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019

– 4,4

– 4,1

– 3,6

– 2,7

– 1,7

– 0,7

Recommandations du Conseil de l’Union européenne du 10 mars 2015

– 4,3

– 4,0

– 3,4

– 2,8

Programme de stabilité d’avril 2015

– 4,0

– 3,8

– 3,3

– 2,7

Déficit public constaté

– 4,0

– 3,5

Source : commission des finances.

Le déficit public se réduit beaucoup plus rapidement que dans la trajectoire prévue par la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019. Le déficit public de 2015 est même inférieur à celui qui avait été escompté pour 2016.

Le déficit public est aussi inférieur pour 2015 de 0,5 point de PIB à celui recommandé par le Conseil de l’Union européenne le 10 mars 2015 dans le cadre de la correction du déficit excessif.

Enfin, le déficit public pour 2015 est en deçà de 0,3 point de PIB par rapport à ce qui avait été prévu dans le programme de stabilité présenté au mois d’avril 2015.

La programmation pluriannuelle des finances publiques

Deux types de documents juridiques fixent un cadre pluriannuel pour les finances publiques et déterminent une trajectoire de réduction des déficits public et structurel.

En droit interne, les lois de programmation des finances publiques sont prévues par l’article 34 de la Constitution et « s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ». À ce titre, elles déterminent les trajectoires des soldes structurels et effectifs annuels. Leur contenu est précisé par la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

En droit européen, les programmes de stabilité ont été institués par le pacte de stabilité et de croissance du 7 juillet 1997 comme outil de la surveillance multilatérale des politiques économiques. Ils sont transmis chaque année au mois d’avril à la Commission européenne.

B. LA TRAJECTOIRE DE RÉDUCTION DU DÉFICIT EST CONFIRMÉE POUR LES ANNÉES 2016 ET SUIVANTES

Le Gouvernement a décidé de maintenir la trajectoire de réduction du déficit nominal qu’il avait définie lors de la présentation du programme de stabilité d’avril 2015.

Le déficit nominal serait ainsi ramené à 3,3 % du PIB en 2016, puis sous les 3 % dès 2017 à 2,7 %.

Cette trajectoire demeure légèrement plus ambitieuse que celle recommandée par le Conseil de l’Union européenne le 10 mars 2015 : 3,4 % en 2016 et 2,8 % en 2018.

De même, l’objectif de déficit nominal pour 2016 demeure amélioré de 0,3 point de PIB par rapport à la trajectoire définie dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

DÉFICIT NOMINAL POUR LES ANNÉES 2015 À 2019

(en % du PIB)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

Recommandations du Conseil du 10 mars 2015

4,0

3,4

2,8

– 

– 

Loi de programmation des finances publiques

4,1

3,6

2,7

1,7

0,7

Programme de stabilité 2015

3,8

3,3

2,7

1,9

– 

Programme de stabilité 2016

3,5

3,3

2,7

1,9

1,2

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Pour atteindre ces objectifs, le déficit public doit baisser de 4,3 milliards en 2016, puis de 11,4 milliards d’euros en 2017, de 16,9 milliards d’euros en 2018, et enfin de 15,4 milliards d’euros en 2019.

PRÉVISIONS DE SOLDE PUBLIC EN VALEUR

(en milliards d’euros)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

Déficit nominal

77,4

73,1

61,7

44,8

29,4

Évolution du déficit par rapport à l’année précédente

– 4,3

– 11,4

– 16,9

– 15,4

Source : calculs de la commission des finances sur la base des données du programme de stabilité.

II. UNE TRAJECTOIRE D’AJUSTEMENT STRUCTUREL COMPATIBLE AVEC LE SOUTIEN DE LA CROISSANCE

Le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance ainsi que le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) imposent des normes de finances publiques en termes d’ajustement structurel annuel et d’objectif de solde structurel.

RAPPEL DES NORMES APPLICABLES À LA COMPOSANTE STRUCTURELLE DU DÉFICIT

Trajectoire d’ajustement structurel

Solde structurel

Le solde structurel doit converger vers l’objectif de moyen terme (OMT) d’au moins 0,5 point de PIB par an et de plus de 0,5 point par an si la dette publique est supérieure à 60 % du PIB. La Commission européenne et le Conseil peuvent cependant estimer que l’effort d’ajustement peut être plus limité en période de conjoncture économique défavorable (« clause de flexibilité »).

Le déficit structurel autorisé est limité à 0,5 point de PIB pour les États membres dont la dette dépasse 60 % du PIB.

Par ailleurs, les États membres doivent déterminer un objectif de moyen terme (OMT), défini en termes de solde structurel, compris entre – 0,5 point de PIB et l’excédent.

Source : commission des finances.

A. UNE LÉGÈRE RÉVISION DE LA TRAJECTOIRE D’AJUSTEMENT STRUCTUREL ET DE DÉFICIT STRUCTUREL

Par rapport au précédent programme de stabilité, le Gouvernement a légèrement revu la trajectoire d’ajustement structurel en abaissant de 0,1 point l’ajustement prévu pour 2016. Pour 2017 et 2018, l’ajustement structurel est maintenu à 0,5 point de PIB, soit le niveau minimal requis par les règles du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance. Pour 2019, le Gouvernement prévoit un ajustement structurel limité à 0,3 point du PIB, ce qui est conforme aux règles du volet préventif du pacte puisque l’OMT devrait être atteint en 2018.

La trajectoire de déficit structurel est également légèrement revue. La prévision de déficit structurel est relevée de 0,2 point de PIB pour les années 2016 à 2018.

AJUSTEMENT STRUCTUREL ET DÉFICIT STRUCTUREL POUR LES ANNÉES 2016 À 2019

(en % du PIB)

Trajectoire

Source

2016

2017

2018

2019

Ajustement structurel

Programme de stabilité 2015

0,5

0,5

0,5

– 

Programme de stabilité 2016

0,4

0,5

0,5

0,3

Déficit structurel

Programme de stabilité 2015

1,1

0,6

0,1

– 

Programme de stabilité 2016

1,3

0,8

0,3

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Toutefois, cette révision ne traduit pas un changement de politique budgétaire du Gouvernement. Elle s’explique par deux raisons techniques liées aux modalités de calcul du déficit structurel : la prise en compte du retour de la croissance et le maintien de la trajectoire de déficit nominal.

Le retour de la croissance entraîne, en effet, une réduction de l’écart de production plus rapide qu’anticipé par le précédent programme de stabilité : la croissance effective du PIB en 2015 a été de 1,2 % au lieu de 1 % prévu ce qui a pour effet de réduire de 0,2 point l’écart de production.

ÉCART DE PRODUCTION POUR LES ANNÉES 2016 À 2019

(en % du PIB)

Année

2016

2017

2018

2019

Programme de stabilité 2015

3,5

3,5

3,2

– 

Programme de stabilité 2016

3,3

3,3

2,9

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Par voie de conséquence, à trajectoire de déficit nominal inchangée, la quote-part structurelle du déficit augmente mécaniquement par rapport à la quote-part conjoncturelle.

L’augmentation de la prévision du déficit structurel ne doit donc pas s’interpréter comme une détérioration des finances publiques de la France. Elle s’explique au contraire par deux facteurs positifs : la diminution de l’écart de production et le caractère prudent des prévisions du Gouvernement dans la détermination du rythme de réduction du déficit nominal.

B. UNE TRAJECTOIRE D’AJUSTEMENT STRUCTUREL MOINS PÉNALISANTE QUE CELLE RECOMMANDÉE PAR LE CONSEIL

La trajectoire d’ajustement structurel retenue par le Gouvernement est moins contrainte que celle recommandée par le Conseil de l’Union européenne le 10 mars 2015.

AJUSTEMENT STRUCTUREL ET DÉFICIT STRUCTUREL POUR LES ANNÉES 2016 À 2019

(en % du PIB)

Année

2016

2017

2018

2019

Programme de stabilité 2016

0,4

0,5

0,5

0,3

Recommandations du Conseil

0,8

0,9

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Ainsi qu’elle a eu l’occasion de le développer dans son rapport d’information sur le programme de stabilité pour les années 2015 à 2018 (59), la Rapporteure générale estime que la recommandation du Conseil du 10 mars 2015 reposait sur un ajustement structurel trop important qui pouvait se traduire par un recul de la croissance économique.

Les mesures de stimulation de la croissance peuvent être au moins aussi efficaces que les mesures d’économies budgétaires pour réduire le déficit.

La Rapporteure générale a dès lors pleinement approuvé le choix du Gouvernement de retenir une trajectoire d’ajustement structurel différente de celle recommandée par le Conseil et de préserver ainsi la croissance.

C. UNE TRAJECTOIRE DE DÉFICIT STRUCTUREL QUI REPOSE SUR DES HYPOTHÈSES JUGÉES PEU VRAISEMBLABLES PAR LE HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES

Dans son avis n° HCFP-2016-1 du 12 avril 2016 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, le Haut Conseil des finances publiques juge « peu vraisemblables » les hypothèses sur lesquelles repose le calcul du déficit structurel et de l’ajustement structurel.

1. Rappel des modalités de calcul du déficit structurel

Le solde structurel est le solde public corrigé des effets du cycle économique.

La quote-part du déficit structurel au sein du déficit nominal est déterminée en fonction de l’écart de production (« output gap » en anglais), c’est-à-dire de l’écart estimé entre le PIB effectif et le PIB potentiel. Autrement dit, la détermination du déficit structurel repose essentiellement sur l’estimation du PIB potentiel.

Mécaniquement, pour un niveau de PIB effectif donné, une estimation plus élevée du PIB potentiel aura pour effet de creuser l’écart de production et donc d’améliorer le solde structurel. Plus le PIB potentiel est élevé, plus la quote-part de déficit structurel est faible.

La méthode de calcul du déficit structurel est assez complexe car elle fait intervenir une estimation des recettes et des dépenses structurelles.

Une méthode simplifiée de calcul du solde structurel − appelée « règle du pouce » − consiste à considérer qu’en pratique, le solde conjoncturel est proche de la moitié de l’écart de production. Ceci s’explique par le fait que les postes sensibles à la conjoncture représentent, dans notre pays, près de la moitié du PIB et que l’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance du PIB est, en moyenne, de l’ordre de 1.

Sur la base des chiffres communiqués par le Gouvernement, on peut estimer que la « règle du pouce » fonctionne sur la base d’un coefficient de 0,57 pour 2016 et 0,56 pour les années suivantes.

2. Les différences d’appréciation du niveau de déficit structurel

Le tableau qui suit permet de reconstituer le calcul du déficit structurel sur la base des hypothèses gouvernementales d’écart de production.

CALCUL DU DÉFICIT STRUCTUREL POUR LES ANNÉES 2016 À 2019
SELON LA « RÈGLE DU POUCE »

(en % du PIB)

Année

2016

2017

2018

2019

a) Écart de production

3,3

3,3

2,9

2,4

b) Déficit nominal

3,3

2,7

1,9

1,2

c) Déficit conjoncturel (a x 0,57 pour 2016 et 0,56 pour les autres années)

1,8

1,8

1,6

1,3

d) Mesures exceptionnelles

0,2

0,1

0,0

0,0

e) Déficit structurel (a – c – d)

1,3

0,8

0,3

0,0

Source : programme de stabilité et calcul commission des finances.

Les estimations du déficit structurel de la Commission européenne sont différentes. Elle retient en effet un écart de production moins important que celui retenu par le Gouvernement dans la mesure où son hypothèse de croissance potentielle est plus faible.

ÉCART DE PRODUCTION

(en % du PIB potentiel)

Hypothèses

2016

2017

2018

2019

Gouvernement

3,3

3,3

2,9

2,4

Commission européenne

1,5

1,0

– 

– 

Source : Gouvernement, programme de stabilité ; Commission européenne, Rapport 2016 pour la France.

En retenant l’hypothèse d’écart de production de la Commission européenne, le déficit structurel ressortirait à 2,3 % en 2016 et 2 % en 2017 au lieu de 1,3 % et 0,8 % selon le Gouvernement.

Le Haut Conseil estime que « l’hypothèse retenue par le Gouvernement d’un écart de production très important et supérieur à la plupart des estimations existantes tend à majorer la composante structurelle du déficit, et donc à sous-estimer le déficit structurel ».

La divergence d’appréciation qui oppose le Gouvernement et la Commission européenne sur le niveau de l’écart de production s’explique par une différence d’évaluation de la croissance potentielle.

Croissance potentielle

Le Gouvernement retient une hypothèse de croissance potentielle de 1,5 % pour 2016 et 2017. La Commission européenne estime la croissance potentielle de la France à un niveau légèrement inférieur pour ces deux années (1,1 % et 1,2 %).

Le Gouvernement avait estimé initialement la croissance potentielle à 1,3 % pour 2016 et 2017 dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, reprenant ainsi les estimations publiées par la Commission européenne dans ses prévisions économiques de printemps 2014, en date du 5 mai 2014.

Le Gouvernement a rehaussé sa prévision de croissance potentielle de 0,2 point lors de la présentation du programme de stabilité d’avril 2015 afin de tenir compte des effets du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), du pacte de responsabilité et de solidarité (PRS) et de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. À l’inverse, la Commission européenne a abaissé ses prévisions de croissance potentielle pour la France dans ses prévisions économiques d’hiver 2015. Ces mouvements inverses sur les prévisions expliquent l’écart entre l’hypothèse du Gouvernement et celle de la Commission.

À noter que le niveau de croissance potentielle retenu par le Gouvernement est en ligne avec le vote de la commission des finances de l’Assemblée nationale, lors de sa séance du 18 juin 2014, d’un amendement relatif à l’article liminaire du projet de loi de finances rectificative pour 2014. Cet amendement avait d’ailleurs été adopté par l’Assemblée nationale en première lecture lors de sa séance du 23 juin 2014 (la version initiale de l’article liminaire a cependant été rétablie en nouvelle lecture sur amendement du Gouvernement lors de la séance du 15 juillet 2014).

Le niveau de croissance potentielle retenu par le Gouvernement est en revanche jugé « surévalué » par le Haut Conseil des finances publiques.

(en % du PIB)

Fondement

2014

2015

2016

2017

Recommandations du Conseil de l’Union européenne du 10 mars 2015

95,3

97,2

98,8

99,3

Programme de stabilité d’avril 2016

95,3

95,7

96,2

96,5

Endettement public constaté

95,3

95,7

Source : commission des finances.

 

Année

En milliards d’euros

En % du PIB

2007

1 253,0

64,4

2008

1 358,2

68,1

2009

1 531,6

79

2010

1 632,5

81,7

2011

1 754,4

85,2

2012

1 869,2

89,6

2013

1 953,4

92,4

2014

2 040,3

95,3

2015

2 096,9

95,7

Source : INSEE.

Le ratio d’endettement public n’a progressé que de 6,1 points de PIB depuis 2012, à comparer avec le rythme d’augmentation de la dette publique au cours des trois années précédentes (+ 10,6 points de PIB entre 2009 et 2012).

TRAJECTOIRE DE L’ENDETTEMENT PUBLIC

(en % du PIB)

Fondement

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Loi du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019

95,2

97,1

97,7

97

95,1

92,4 

Recommandations du Conseil de l’Union européenne du 10 mars 2015

95,3

97,2

98,8

99,3

Programme de stabilité d’avril 2015

95

96,3

97

96,9

95,5

Endettement public constaté

95,3

95,7

Source : commission des finances.

En 2015, l’endettement public progresse moins vite que les prévisions issues de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 et de la recommandation du Conseil de mars 2015.

Cette évolution positive résulte principalement de deux éléments :

− un effet numérateur : avec un endettement contenu, notamment en raison d’une maîtrise efficace de la dépense publique et une charge de la dette plus faible qu’anticipé ;

− un effet dénominateur : avec un taux de croissance en 2015 plus élevé que prévu.

Cette décélération du rythme d’endettement public devrait confirmer la prévision d’une stabilisation du niveau de la dette publique en 2017, avant une décrue en 2018.

(en % du PIB)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

Recommandations du Conseil européen du 10 mars 2015

97,2

98,8

99,3

Loi de programmation des finances publiques

97,1

97,7

97

95,1

92,4 

Programme de stabilité 2015

96,3

97

96,9

95,5

Programme de stabilité 2016

95,7

96,2

96,5

95,4

93,3

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Dès lors, la trajectoire de ralentissement de l’endettement public et de sa décrue est plus ambitieuse jusqu’en 2018 dans le présent programme de stabilité, par rapport aux précédentes prévisions et à la recommandation du Conseil de mars 2015.

ÉVOLUTION DE LA DETTE PUBLIQUE

Source : commission des finances, INSEE et programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Le rythme d’augmentation de la dette publique s’infléchirait progressivement en valeur à partir de 2017.

PRÉVISIONS DE DETTE PUBLIQUE EN VALEUR

(en milliards d’euros)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

Dette publique en valeur

2 096,9

2 156,7

2 216,9

2 259,6

2 288,9

Évolution de la dette publique par rapport à l’année précédente

59,8

60,2

42,7

29,3

Source : calculs de la commission des finances sur la base des données du programme de stabilité.

FICHE 5 :
LES RECETTES ET LE SUIVI DU PACTE DE RESPONSABILITÉ
ET DE SOLIDARITÉ

Depuis 2014, le Gouvernement s’est engagé dans une politique de baisse des prélèvements obligatoires, notamment avec la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité.

I. LES RECETTES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

LES RECETTES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

prévision

En % du PIB

49,8

49,6

49,7

50,8

52,0

53,0

53,4

53,2

52,8

En milliards d’euros

994,1

961,7

992,2

1 046,6

1 085,6

1 119,9

1 141,8

1 166

1 183,9

Source : INSEE ; données gouvernementales.

Les recettes des administrations publiques ont nettement progressé sur la période 2010-2014 sous l’effet de la hausse des prélèvements obligatoires. Leur poids dans le PIB a, en revanche, diminué en 2015, passant de 53,2 % au lieu de 53,4 % en 2014. Cette diminution s’explique principalement par la baisse des prélèvements obligatoires, lesquels constituent l’essentiel des recettes publiques.

A. LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES SONT EN BAISSE POUR
LA PREMIÈRE FOIS DEPUIS 2009

PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN FRANCE

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

prévision

En % du PIB

41,9

41,0

41,3

42,6

43,8

44,7

44,8

44,5

44,2

En milliards d’euros

836,5

795,8

825,1

876,7

914,7

946,7

957,7

975,3

991,4

Source : INSEE pour les années 2008 à 2014 ; données gouvernementales pour les années 2015 et 2016.

Entre 2009 et 2014, les prélèvements obligatoires ont augmenté de 3,8 points de PIB. Le taux de prélèvements obligatoires est ainsi passé de 41 % du produit intérieur brut à 44,8 %. Durant cette période, le redressement des comptes publics a donc été réalisé essentiellement sur les recettes.

RÉPARTITION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN 2014

Sous-secteur

des administrations publiques

Montant

(en milliards d’euros)

Catégorie

de prélèvements obligatoires

Montant

(en milliards d’euros)

État

291,6

Impôts

595,3

Organismes divers d’administration centrale (ODAC)

15,2

Administrations publiques locales (APUL)

127,6

Cotisations sociales

362,4

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

521,3

Institutions et organes de l’Union européenne

2,1

Total

957,7

Total

957,7

Source : INSEE.

En 2015, les prélèvements obligatoires se sont élevés à 975,3 milliards d’euros au lieu de 957,7 milliards en 2014. La hausse en valeur des prélèvements obligatoires ne résulte pas d’une augmentation discrétionnaire des impôts et des cotisations mais de leur évolution spontanée liée à l’activité économique, et notamment à l’augmentation de la population active. Cette hausse se limite, en tout état de cause, à 1,8 %, soit à un niveau inférieur à la croissance du PIB en valeur (2,3 %). Dès lors, le taux de prélèvement obligatoire par rapport au PIB diminue en 2015, et ce pour la première fois depuis 2009. Le taux de prélèvements obligatoires s’établit ainsi à 44,5 % au lieu de 44,8 % en 2014.

Le Gouvernement prévoit une poursuite de la baisse du taux de prélèvements obligatoires, lequel devrait s’établir à 44,2 % en 2016 et 44 % en 2017 en raison de la montée en charge du pacte de responsabilité et de solidarité.

Cette baisse des prélèvements obligatoires est concomitante à une baisse du déficit public. Désormais, le redressement des comptes publics ne repose donc plus sur une hausse des recettes mais sur un effort en matière de dépenses.

B. LA STABILITÉ DES RECETTES HORS PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

Sur la période 2008-2014, les recettes hors prélèvements obligatoires se sont situées dans une fourchette comprise entre 7,9 % et 8,8 % du PIB.

Dans le présent programme de stabilité, le Gouvernement prévoit que le poids des recettes hors prélèvements obligatoires dans le PIB devrait être stable à 7,6 % du PIB sur la période 2015-2019.

II. LA MONTÉE EN CHARGE DU PACTE DE RESPONSABILITÉ ET DE SOLIDARITÉ

Annoncé le 14 janvier 2014 par le Président de la République, le pacte de responsabilité et de solidarité comporte, ainsi que son intitulé l’indique, deux volets :

– un volet « responsabilité » à destination des entreprises portant sur un allégement de prélèvements de 40 milliards d’euros à l’horizon 2017, en ce compris le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) ;

– et un volet « solidarité » à destination des ménages.

A. LE VOLET « RESPONSABILITÉ »

1. Le calendrier de mise en œuvre du pacte est respecté

Le volet « responsabilité » du pacte, avec le CICE, porte sur une enveloppe de 40 milliards d’euros se répartissant en trois grandes catégories :

– 10 milliards d’euros d’allégements de cotisations sociales patronales ;

– 10 milliards d’euros de baisse de fiscalité sur l’impôt sur les sociétés (IS) et ses contributions additionnelles ;

– 20 milliards d’euros de crédit d’impôt sur la masse salariale au titre du CICE.

Le tableau qui suit récapitule l’ensemble des mesures envisagées dans le cadre de cette enveloppe, avec leur année d’entrée en vigueur.

MESURES ET CALENDRIER INITIAL DU PACTE DE RESPONSABILITÉ PAR CATÉGORIES

Catégorie de mesures

Mesures et évaluation initiale du montant
de l’allégement

Calendrier

10 milliards d’euros

Allégements de cotisations sociales patronales

4,5 milliards d’euros

Allégement de cotisations entre 1 et 1,6 SMIC

2015

4,5 milliards d’euros

Allégement de cotisations entre 1,6 et 3,5 SMIC

2016

1 milliard d’euros

Allégement des cotisations familiales des indépendants

2015

10 milliards d’euros

Allégements de fiscalité sur l’IS et ses contributions additionnelles

2,5 milliards d’euros

Suppression de la contribution exceptionnelle sur l’IS

2016

5,6 milliards d’euros

Suppression progressive de la contribution sociale
de solidarité des sociétés (C3S)

2015-2017

2 milliards d’euros

Baisse progressive du taux de l’IS à 28 %

2017-2020

20 milliards d’euros

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

20 milliards d’euros

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

2013

(montée en charge progressive jusqu’en 2017)

Source : commission des finances.

a. 24 milliards d’euros d’allégements d’impôts et de cotisations dès 2015

En 2015, les premières mesures du pacte de responsabilité et de solidarité ont été mises en œuvre en complément du CICE, conformément au calendrier prévu.

Les entreprises ont ainsi bénéficié d’environ 24 milliards d’euros d’allégements fiscaux et sociaux dont 17,2 milliards au titre du CICE, 4,6 milliards au titre d’allégements de cotisations patronales entre 1 et 1,6 SMIC (au lieu de 4,5 milliards évalués initialement), un milliard au titre d’allégements de cotisations en faveur des travailleurs indépendants et un milliard au titre de la de réduction de contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S).

b. 8 milliards d’euros d’allégements d’impôts et de cotisations supplémentaires en 2016

Outre la montée en charge du CICE, plusieurs mesures du pacte de responsabilité ont été mises en œuvre en 2016 :

− l’extension de la baisse des cotisations d’allocations familiales (1,8 point) pour tous les salaires inférieurs à 3,5 fois le SMIC à compter du 1er avril 2016, qui représentera un coût en année pleine de 4,5 milliards d’euros, et de 3,1 milliards d’euros en 2016 ;

− un nouvel abattement sur l’assiette de C3S en direction des petites et moyennes entreprises (PME), à hauteur d’un milliard d’euros supplémentaire ;

− l’expiration de la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés, au taux de 10,7 % qui devait représenter initialement un gain pour les entreprises de 2,5 milliards d’euros, désormais chiffré à près de 3 milliards d’euros par le Gouvernement dans le programme de stabilité.

Ainsi, en 2016, les entreprises bénéficieront de plus de 8 milliards d’euros d’allégements supplémentaires au titre du pacte, soit un montant total de plus de 32 milliards d’euros.

À ces 8 milliards d’euros, il convient d’ajouter un milliard d’euros supplémentaires au titre de la mesure de suramortissement exceptionnel de 40 % (500 millions d’euros en année pleine) et au titre des diverses mesures de soutien aux très petites entreprises (TPE) et PME dont la limitation des effets de seuil prévue par l’article 15 de la loi de finances pour 2016 (60).

Le suramortissement de 40 %

Le suramortissement est un avantage fiscal exceptionnel qui prend la forme d’un amortissement supplémentaire de 40 %, c’est-à-dire d’une déduction du résultat fiscal supérieure à celle de l’amortissement de droit commun.

Autrement dit, pour un investissement de 100 euros, l’entreprise pourra déduire 140 euros de son résultat fiscal. La déduction est répartie linéairement sur la durée normale d’utilisation des biens.

Le suramortissement est réservé aux investissements éligibles à l’actuel dispositif d’amortissement dégressif. Les biens éligibles au suramortissement sont donc essentiellement des biens d’équipement ce qui a pour but d’encourager les investissements physiques du secteur industriel.

La mesure était initialement réservée aux investissements réalisés entre le 15 avril 2015 et le 14 avril 2016. Le Gouvernement l’a reconduite jusqu’au 14 avril 2017 par voie d’instruction administrative (mise à jour de la base Bofip du 12 avril 2016). Le Gouvernement a annoncé que cette prolongation serait légalisée par voie d’amendement dans le cadre de l’examen du projet de loi pour une République numérique. À noter qu’à cette occasion, la mesure devrait être étendue aux appareils informatiques.

Bien que son champ d’application soit limité à deux années, le suramortissement produira ses effets sur l’ensemble de la durée normale d’utilisation du bien puisque la déduction doit être répartie linéairement sur la durée d’amortissement.

Contrairement au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) qui constitue une réforme structurelle de baisse du coût du travail, le suramortissement est une mesure de relance conjoncturelle qui a pour but d’accompagner la reprise de la croissance et de rattraper le retard de la France en matière d’investissement privé.

Le coût de la mesure était estimé initialement, avant prolongation de la mesure, à environ 2,5 milliards d’euros sur cinq ans, soit 500 millions d’euros en année pleine.

Pour une entreprise imposée au taux normal de l’impôt sur les sociétés (33 1/3 %), la mesure assurera une réduction fiscale de plus de 13 % de la valeur de l’investissement – soit un tiers de 40 %.

c. 40 milliards d’allégements de cotisations et d’impôts en 2017

Le Gouvernement a confirmé dans le programme de stabilité que deux dernières mesures devraient être mises en œuvre en 2017 : la suppression complète de la C3S et une réduction du taux de l’IS de 33,33 % à 28 %.

Toutefois, le montant cible de la baisse de l’IS est désormais fixé à 1,5 milliard d’euros au lieu de 2 milliards d’euros prévus initialement.

Pour autant, le montant total des allégements de prélèvements au titre du pacte de responsabilité est toujours fixé à 40 milliards d’euros en 2017 conformément aux engagements pris.

Le tableau qui suit récapitule le suivi de la mise en œuvre du pacte de responsabilité et actualise l’évaluation des différentes mesures.

SUIVI DE LA MISE EN ŒUVRE DU PACTE DE RESPONSABILITÉ

(en milliards d’euros)

Mesures/année

2015

2016

2017

Allégements de cotisations patronales entre 1 et 1,6 SMIC

4,6

4,7

4,9

Allégements de cotisations patronales entre 1,6 et 3,5 SMIC

3,1

4,2

Allégements de cotisations en faveur des indépendants

1

1

1

Abattement de contribution sociale sur l’IS

1

2

5,5

Suppression de la contribution exceptionnelle sur l’IS

2,9*

3,3*

CICE

17,2

18,7

19,2

Réduction du taux de l’IS

2,5

Total

23,8

32,4

39,7

* selon les dernières données gouvernementales.

Source : calcul commission des finances.

2. 5 milliards d’euros n’ont pas encore fait l’objet d’un vote

La mise en œuvre des dernières mesures est toutefois soumise à l’approbation du Parlement. Sur l’enveloppe globale du pacte de responsabilité, il reste à ce jour environ 5 milliards d’euros de mesures à voter : 3,5 milliards au titre de la dernière étape en vue de la suppression complète de la C3S et 1,5 milliards d’euros au titre de la réduction du taux de l’IS.

Le Gouvernement a indiqué dans le programme de stabilité que ces deux mesures seront incluses dans le projet de loi de finances pour 2017. Elles feront dès lors l’objet d’un débat.

Environ 2 milliards d’euros d’allégements supplémentaires interviendront sans qu’un nouveau vote soit nécessaire au titre, d’une part, de la montée en charge du CICE (0,5 milliard) et, d’autre part, de l’exonération en année pleine de cotisations patronales d’allocations familiales (1,8 point) pour les salaires compris entre 1,6 et 3,5 SMIC (1,1 milliard d’euros).

3. Le CICE est entré dans sa phase de maturité

La création du CICE a été annoncée dès les premiers mois du quinquennat, le 6 novembre 2012, peu après la remise du rapport sur la compétitivité française de M. Louis Gallois. Institué par l’article 66 de la dernière loi de finances rectificative pour 2012 (61), le CICE est entré en vigueur le 1er janvier 2013.

Il s’agit d’un crédit d’impôt qui porte sur la masse salariale des salariés dont les rémunérations brutes n’excèdent pas 2,5 fois le montant annuel du SMIC. Il bénéficie à toutes les entreprises relevant de l’IS ou à l’impôt sur le revenu (IR) d’après leur bénéfice réel. Son taux, qui était de 4 % pour les salaires versés en 2013, a été relevé à 6 % pour les salaires versés à compter de 2014 (9 % dans les départements d’outre-mer à compter des salaires versés en 2015).

a. Une baisse du coût du travail pour les entreprises

Le CICE a représenté pour les entreprises une baisse du coût du travail de 11,3 milliards d’euros en 2013, et de 16,1 milliards d’euros en 2014 selon les dernières données publiées par le ministère de l’économie et des finances. Au titre des salaires versés en 2015 et 2016, les prévisions de créances globales de CICE dont bénéficieront les entreprises ont été arrêtées à 18,6 milliards et 19,4 milliards d’euros. Le CICE devrait ensuite atteindre les 20 milliards d’euros au titre des salaires versés en 2017.

EXÉCUTION ET PRÉVISIONS DE CRÉANCES EN FAVEUR DES ENTREPRISES
SELON LES MILLÉSIMES DE CICE

(en milliards d’euros)

Millésime

Montant de créances

CICE millésime 2013

(exécution)

11,3

CICE millésime 2014

(exécution)

16,1

CICE millésime 2015

(prévision)

18,6

CICE millésime 2016

(prévision)

19,4

CICE millésime 2017

(prévision)

20,0

Source : ministère des finances et des comptes publics.

Les entreprises n’ont toutefois pas immédiatement bénéficié de ces montants. Trois séries de raisons peuvent l’expliquer.

Tout d’abord, la nature fiscale du dispositif induit un décalage d’une année par rapport à l’année du versement du salaire. En d’autres termes, la créance de CICE relative aux salaires versés en 2013 n’a bénéficié aux entreprises qu’en 2014.

Ensuite, si elles peuvent imputer leur créance de CICE sur leur impôt, les entreprises ne peuvent pas – sauf exception – en obtenir une restitution immédiate lorsque le montant de leur impôt est inférieur au montant de leur créance de CICE. Dans ce cas, la créance de CICE est reportée l’année suivante. Ce n’est qu’à l’issue d’un délai de trois ans que le montant de créance de CICE non imputé est restitué par l’État à l’entreprise. Par exception, les PME, les jeunes entreprises innovantes, les entreprises nouvelles et les entreprises en difficultés peuvent demander une restitution immédiate.

Enfin, certaines entreprises ont mis un peu de temps pour s’approprier le dispositif et pour déclarer leur créance de CICE à l’administration fiscale. Cette phase d’apprentissage est terminée : selon France Stratégie, dans son rapport de septembre 2015, « tout indique que (les entreprises) ont maintenant une bonne connaissance des implications comptables du dispositif, de son fonctionnement et des obligations déclaratives qu’il comporte ».

L’arrivée à maturité du dispositif se constate dans les derniers chiffres disponibles. À fin 2015, les entreprises ont d’ores et déjà perçu 18,7 milliards d’euros depuis la création du CICE (imputé ou restitué), sur un montant total de 27,4 milliards d’euros de créances déclarées au titre des salaires versés en 2013 et 2014.

CONSOMMATION DES CRÉANCES DE CICE AU 31 DÉCEMBRE 2015

(en milliards d’euros)

Année

Restitutions ou imputations sur l’impôt

Créances reportées

Total

CICE « salaires 2013 »

8,0

3,3

11,3

CICE « salaires 2014 »

10,7

5,4

16,1

Total

18,7

8.7

27,4

Source : actualisation calculée par la commission des finances sur la base des derniers chiffres publiés par le ministère de l’économie et des finances dans le dossier de presse du 22 janvier 2016.

b. Le coût pour l’État

Le coût du CICE pour l’État diffère selon que l’on examine la comptabilité budgétaire ou la comptabilité nationale.

i. Le coût en comptabilité budgétaire

Le coût budgétaire du CICE correspond au montant décaissé chaque année par l’État, sous forme de restitutions ou sous forme d’imputations. Au 31 décembre 2015, le coût global budgétaire du CICE depuis sa création s’élève à 18,7 milliards d’euros, dont 6,6 milliards en 2014 et 12 milliards en 2015.

COÛT BUDGÉTAIRE DU CICE

(en milliards d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Montant

6,6

12,0

12,7

16,0

18,6

19,6

Source : actualisation calculée par la commission des finances sur la base des dernières données gouvernementales communiquées.

ii. Le coût en comptabilité nationale

Le coût en comptabilité nationale, qui sert de base à la comptabilité « maastrichtienne » pour le calcul du solde public, correspond à l’ensemble des créances déclarées par les entreprises, y compris les créances faisant l’objet d’un report.

La chronique du coût en comptabilité en nationale devrait normalement suivre, avec une année de décalage, la chronique des millésimes de CICE. Toutefois, la chronique du coût en comptabilité nationale diffère légèrement par rapport à la chronique des millésimes car le crédit d’impôt ne constitue un coût en comptabilité nationale qu’à partir du moment où il est déclaré par l’entreprise créancière. Or, selon les règles du droit commun fiscal, les entreprises disposent de trois années pour procéder à cette déclaration. Ainsi, une entreprise peut déclarer jusqu’en 2016 une créance de CICE relative à l’année 2013.

COÛT EN COMPTABILITÉ NATIONALE DU CICE

(en milliards d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Montant

10,6

17,2

18,7

19,2

19,9

20,7

Source : actualisation calculée par la commission des finances sur la base des dernières données gouvernementales communiquées.

Désormais, la montée en charge du CICE ne devrait peser que faiblement sur le déficit public (1,5 milliard d’euros en 2016 par rapport à 2015, 0,5 milliard d’euros en 2017 par rapport à 2016, et 0,7 milliard d’euros en 2018 par rapport à 2017).

B. LE VOLET « SOLIDARITÉ »

La loi de finances pour 2016 a marqué une troisième étape dans la mise en œuvre du volet « solidarité » du pacte permettant de porter à 5 milliards d’euros le montant global des réductions d’impôt dont bénéficieront 12 millions de ménages (soit les deux tiers des ménages imposables).

1. Les deux premières étapes : 3 milliards d’euros de réduction pour 9 millions de ménages

Après une phase d’augmentation de la fiscalité pesant sur les ménages rendue nécessaire en raison de l’état des finances publiques dont a hérité cette majorité en 2012, le Gouvernement s’est engagé depuis 2014 dans un processus de baisse de l’impôt sur le revenu en faveur des ménages aux revenus modestes et moyens.

Deux mesures ont été adoptées avant la loi de finances pour 2016.

En premier lieu, l’article 1er de la première loi de finances rectificative pour 2014 (62) a institué une réduction d’impôt exceptionnelle d’un montant maximal de 350 euros pour un contribuable célibataire et de 700 euros pour un couple. Cette mesure a permis de rendre non imposables à l’impôt sur le revenu 2 millions de contribuables. Son coût budgétaire a été évalué à 1,25 milliard d’euros.

La réduction d’impôt, applicable pour les seules impositions des revenus de 2013, a été soumise à des conditions de revenus afin qu’elle bénéficie exclusivement aux classes moyennes imposées dans les premières tranches de l’IR.

En second lieu, l’article 2 de la loi de finances pour 2015 (63) a supprimé la première tranche d’impôt sur le revenu à 5,5 %. Cette mesure, dont le coût budgétaire a été évalué à environ 3 milliards d’euros, a bénéficié à plus de 9 millions de ménages.

2. Une nouvelle étape en 2016 qui porte à 5 milliards d’euros le montant des réductions d’impôt au bénéfice de 12 millions de ménages

La loi de finances pour 2016 a poursuivi et amplifié l’allégement de l’imposition des ménages aux revenus modestes et moyens qui a été engagé par le Gouvernement l’année précédente.

Ainsi, l’article 2 de la loi de finances pour 2016 a institué une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu de 2 milliards d’euros, bénéficiant à 8 millions de foyers pour un gain moyen de 252 euros (de 200 à 300 euros par célibataire, et de 300 à 500 euros par couple). Parmi eux, 3 millions n’avaient pas bénéficié des précédentes mesures de baisse.

Au total, 12 millions de foyers fiscaux auront bénéficié de ces baisses d’impôt depuis 2014 pour un montant global de 5 milliards d’euros par an qui viennent soutenir le pouvoir d’achat des ménages aux revenus modestes et moyens.

FICHE 6 :
L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES

La trajectoire des finances publiques est marquée par un infléchissement notable de la progression de la dépense publique depuis 2012. Cette tendance est notamment le résultat de la mise en œuvre du programme d’économies de 50 milliards d’euros pour les années 2015 à 2017, annoncé par le Gouvernement lors du programme de stabilité pour les années 2014 à 2017 et détaillé dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (LPFP 2014-2019) (64).

TAUX DE CROISSANCE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE, HORS CRÉDITS D’IMPÔTS

Source : INSEE et calculs de la commission des finances sur la base du programme de stabilité.

Hors crédits d’impôts, la dynamique de la dépense publique en valeur se réduit fortement sur la période récente, elle s’élève à 0,9 % en 2015, contre 3,1 % en 2012 et 5,1 % en 2002. Cette rupture avec la tendance passée illustre l’efficacité des mesures de maîtrise de la dépense publique mises en œuvre au cours de la présente législature.

I. LE RALENTISSEMENT DE LA CROISSANCE DES DÉPENSES PUBLIQUES

A. L’INFLÉCHISSEMENT NET DE LA DYNAMIQUE DES DÉPENSES PUBLIQUES PAR RAPPORT AUX DEUX PRÉCÉDENTES LÉGISLATURES

La dynamique des dépenses publiques connaît un fort ralentissement depuis 2012, tant au niveau consolidé que hors charge d’intérêt et hors crédits d’impôts.

CROISSANCE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE

(en évolution %)

Dépense publique

2012

2013

2014

2015

Croissance de la dépense publique

3,0

1,6

1,8

1,4

Croissance de la dépense publique hors charge d’intérêt

2,9

2,1

1,9

1,6

Croissance de la dépense publique hors crédits d’impôts

3,1

1,7

1,0

0,9

Source : INSEE, comptes nationaux des administrations publiques – année 2015.

1. L’évolution des dépenses publiques, hors crédits d’impôts

Le taux de croissance annuel de la dépense publique en valeur, hors crédits d’impôts, a été en moyenne de 1,2 % entre 2013 et 2015 contre 3,6 % sur la période 2002-2012.

TAUX DE CROISSANCE ANNUELS DE LA DÉPENSE PUBLIQUE, HORS CRÉDITS D’IMPÔTS

Source : INSEE et calculs de la commission des finances sur la base du programme de stabilité.

Ce ralentissement sensible de l’augmentation annuelle des dépenses publiques, hors crédits d’impôts, correspond à un passage de + 34 milliards d’euros par an entre 2002 et 2012 à + 14 milliards d’euros de 2013 à 2015.

ÉVOLUTION ANNUELLE DES DÉPENSES PUBLIQUES, HORS CRÉDITS D’IMPÔTS

(en milliards d’euros)

Année

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Dépenses, hors crédits d’impôts

831,2

861,3

895,2

932,7

966,1

1 006,0

1 042,5

1 083,5

Augmentation annuelle

+ 30,1

+ 34,0

+ 37,5

+ 33,4

+ 39,9

+ 36,5

+ 41,1

Année

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016 p

2017 p

2018 p

2019 p

Dépenses, hors crédits d’impôts

1 110,4

1 134,5

1 169,4

1 189,4

1 200,9

1 211,6

1 225,4

1 239,1

1257

1278,1

Augmentation annuelle

+ 26,9

+ 24,1

+ 34,9

+ 19,9

+ 11,5

+ 10,7

+ 13,8

+ 13,7

+ 17,9

+ 21,1

Source : INSEE et calculs de la commission des finances sur la base du programme de stabilité.

Le programme de stabilité 2016 prévoit une tendance similaire de 2016 à 2019 avec une augmentation annuelle moyenne des dépenses publiques, hors crédits d’impôts, de 16,6 milliards d’euros.

Les données des différents tableaux de cette fiche tiennent compte des séries actualisées de l’INSEE, qui sont utilisées par le Gouvernement dans l’envoi des documents à la Commission européenne. Cependant, ces séries actualisées ne seront publiées par l’INSEE que le 15 mai prochain au moment de la publication des comptes annuels. Ce décalage temporel entre l’utilisation de données et le moment où elles sont rendues publiques pose un problème méthodologique de suivi et de contrôle de l’action du Gouvernement. Il conviendrait d’harmoniser la date de publication des comptes annuels avec le calendrier européen, afin de permettre au Parlement de disposer aisément des dernières données actualisées au moment de l’examen du programme de stabilité.

2. L’évolution des dépenses publiques, y compris crédits d’impôts

L’évolution des dépenses publiques, y compris crédits d’impôts, permet de tenir compte de la dynamique des crédits d’impôts restituables ou reportables, qui sont désormais intégrés aux dépenses publiques au sens des nouvelles normes comptables européennes SEC 2010 (65).

Or, les crédits d’impôts enregistrés en dépenses augmentent fortement depuis 2013, où ils s’établissaient à 15,9 milliards d’euros, pour atteindre 30,8 milliards d’euros en 2015. Cela résulte principalement de la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, évalué en comptabilité nationale à 17,2 milliards d’euros en 2015.

ÉVOLUTION ANNUELLE DES DÉPENSES PUBLIQUES, Y COMPRIS CRÉDITS D’IMPÔTS

(en milliards d’euros)

Année

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Dépenses, y compris crédits d’impôts

833,8

864,3

898,6

937,0

972,8

1 016,2

1 057,6

1 100,6

Augmentation annuelle

+ 30,5

+ 34,2

+ 38,4

+ 35,8

+ 43,3

+ 41,4

+ 43,0

Année

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016 p

2017 p

2018 p

2019 p

Dépenses, y compris crédits d’impôts

1 128,0

1 151,5

1 186,0

1 205,3

1 226,6

1 243,4

1 256,9

1 270,9

1 288,2

1 312,5

Augmentation annuelle

+ 27,4

+ 23,5

+ 34,5

+ 19,3

+ 21,3

+ 16,8

+ 13,5

+ 14

+ 17,3

+ 24,3

Source : INSEE et calculs de la commission des finances sur la base du programme de stabilité.

Cependant, les dépenses publiques, y compris crédits d’impôts, ont un rythme de progression sensiblement plus élevé entre 2002 et 2012, représentant en moyenne 35,2 milliards d’euros, contre 18,1 milliards d’euros d’augmentation par an pour la période 2013-2019.

Le ralentissement de la progression des dépenses publiques, hors crédits d’impôts et y compris crédits d’impôts, permet une diminution des deux ratios de dépenses publiques à compter de 2015, établis respectivement à 55,3 et 56,8 points de PIB.

RATIO DE DÉPENSES PUBLIQUES / PIB

Source : INSEE et calculs de la commission des finances sur la base du programme de stabilité.

B. LES DIFFÉRENTES COMPOSANTES DE LA DÉPENSE PUBLIQUE

1. La décomposition de l’évolution de la dépense publique

Le taux de progression contenu de la dépense publique résulte de mesures de maîtrise de la dépense applicables à l’ensemble des secteurs de l’administration publique.

ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE, PAR SOUS-SECTEUR

(moyenne annuelle, en valeur hors crédits d’impôts et en %*)

Secteur

2014

2015

2016

2017

Administrations publiques

1,0

0,9

1,1

1,1

État

− 0,4

− 1,6

0,7**

− 0,6

Organismes divers d’administration centrale (ODAC)

4,1

1,7

1,7**

1,2

Administrations publiques locales (APUL)

0,2

− 1,3

1,2

1,6

Administrations de Sécurité sociale (ASSO)

2,3

1,5**

1,3**

1,2

* Les dépenses présentées ci-dessus sont exprimées à champ courant, sauf mention contraire (**), et y compris transferts entre sous-secteurs des administrations publiques.

** À périmètre constant :

− en 2015, la budgétisation des aides pour le logement (APL) diminue la dépense ASSO sans impact sur la dépense publique totale. Y compris budgétisation des APL, l’évolution de la dépense des ASSO serait de 0,7 % ;

− en 2016, la budgétisation de la contribution au service public de l’électricité sur le budget général et le compte d’affectation spéciale (CAS) Transition énergétique diminue la dépense des ODAC et augmente celle de l’État de 7 milliards d’euros ; la budgétisation des allocations logement familiales (ALF) diminue la dépense ASSO et augmente la dépense État ; y compris ces mesures, i.e. à champ courant, la progression de la dépense de l’État serait de + 3,5 % en 2016, celle des ODAC de – 6,7 % et celle des ASSO de 0,5 %.

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

Les dépenses de l’État, hors charge de la dette et pensions, ont diminué à périmètre comparable de 1,4 milliard d’euros en 2015 par rapport à 2014 et les dépenses dites « zéro volume » (y compris charge de la dette et pensions) ont baissé de 1,8 milliard d’euros. L’atteinte de ces objectifs a notamment été permise par une annulation de 700 millions d’euros de crédits dans le décret du 9 juin 2015 (66).

Les dépenses des ODAC sont maîtrisées notamment en vertu de l’application de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, qui prévoit des objectifs minimaux de réduction annuelle des plafonds pour les taxes affectées plafonnées et un plafonnement systématique à compter de 2016 de toutes les taxes affectées, ou, à défaut, une « rebudgétisation » des taxes non-plafonnées en 2017.

Le taux d’évolution des dépenses d’administrations de sécurité sociale diminue progressivement de 2014 à 2017. Cela résulte notamment de la fixation d’un ONDAM à un niveau plancher historique, 1,75 % de 2016 à 2019. La modulation des allocations familiales en fonction des ressources du ménage a permis une économie de 700 millions d’euros en 2015, avec une montée en charge en année pleine à un milliard d’euros en 2016 (67).

Les dépenses des administrations publiques locales sont contraintes principalement en raison de la baisse significative des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales de 1,5 milliard d’euros en 2014, puis 3,5 milliards d’euros par an en moyenne de 2015 à 2017.

2. La charge de la dette

La charge de la dette de l’État, autrement dit les intérêts payés par celui-ci à ses créanciers, représente le deuxième poste budgétaire en 2016 (68). Cette dépense substantielle pour l’État présente la particularité d’être fortement rigide à court terme. Elle est par construction non discrétionnaire ou non pilotable, car fortement soumise à des aléas conjoncturels.

La charge de la dette dépend en effet de trois facteurs : l’encours de la dette, l’évolution des taux d’intérêt (69) et le niveau d’inflation (70). L’évolution favorable des deux derniers facteurs fait plus que compenser la hausse du stock de dette, ainsi la charge d’intérêts a tendance à diminuer depuis 2012.

ÉVOLUTION DE LA CHARGE DE LA DETTE DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

Charge de la dette

2012

2013

2014

2015

2016

Prévision

48,8

46,9

46,7

44,3

44,5

Exécution

46,3

44,9

43,2

42,1

Écart

2,5

2

3,5

2,2

Source : commission des finances.

La charge de la dette a diminué de 4,2 milliards d’euros entre 2012 et 2015, soit une baisse moyenne de 1,4 milliard d’euros par an.

Eu égard à la complexité des prévisions, le Gouvernement a systématiquement surévalué la charge de dette prévisionnelle. L’écart moyen entre la charge de dette prévue et la charge de dette effective s’élève à 2,55 milliards d’euros sur la période 2012-2015.

Cette surestimation récurrente de la charge de la dette facilite in fine l’atteinte des objectifs en termes de solde public, dans la mesure où la dépense exécutée est plus faible que la prévision. En revanche, elle n’a aucun impact sur le programme d’économies de 50 milliards d’euros, celui-ci ayant été construit sur les dépenses publiques pilotables et par conséquent hors charge de la dette.

II. LA MISE EN œUVRE DU PROGRAMME D’ÉCONOMIES DE 50 MILLIARDS D’EUROS SUR LA PÉRIODE 2015-2017

L’ajustement budgétaire et la trajectoire des finances publiques pour les années 2015-2017 reposent sur le volet dépenses et sur la mise en place du programme d’économies de 50 milliards d’euros durant ce triennal. Le Gouvernement a présenté ces mesures d’économies comme un « objectif intangible » (71) pour réduire le déficit public et garantir une baisse de prélèvements sur les ménages et les entreprises.

Le programme d’économies de 50 milliards d’euros réparti sur trois ans (2015-2017) a été élaboré par rapport à la croissance tendancielle de la dépense publique. Il se compose de moindres dépenses par rapport à la tendance et de réductions de dépenses sèches, c’est-à-dire hors de toute considération de tendance (par exemple la modulation des allocations familiales en fonction des ressources du ménage (72)).

Le Gouvernement a présenté pour la première fois lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2016 un tableau décomposant le plan d’économies de 50 milliards d’euros et les efforts à réaliser entre les différents secteurs d’administration au titre de chacune des années 2015 à 2017.

OBJECTIFS D’ÉCONOMIES À RÉALISER SUR LA CROISSANCE TENDANCIELLE
DE LA DÉPENSE POUR LA PÉRIODE 2015-2017

(en milliards d’euros)

Administration publique

2015

2016

2017

total

État et agences

8,7

5,1

5,1

19

Collectivités locales

3,5

3,5

3,7

10,7

Protection sociale

6,4

7,4

6,5

20,3

dont dépenses d’assurance maladie

3,2

3,4

3,4

10

dont autres dépenses de protection sociale

3,2

4

3,1

10,3

Total

18,6

16

15,4

50

Source : Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2016.

Le séquençage du plan d’économies a été modifié entre le programme de stabilité présenté en avril 2015 et le projet de loi de finances pour 2016 déposé en octobre 2015 à l’Assemblée nationale. Cet ajustement résulte principalement du régime de faible inflation constaté depuis l’été 2014. Ainsi, le Gouvernement indiquait lors de la présentation de la loi de finances pour 2016 que « près de 6 milliards d’euros d’économies ont été comptablement "perdues" du fait de la faible inflation. Pour moitié, cela provient des prestations et pour moitié d’autres dépenses évoluant spontanément suivant l’inflation, comme les salaires publics » (73).

ÉCHELONNEMENTS SUCCESSIFS DU PLAN D’ÉCONOMIES DE 50 MILLIARDS

(en milliards d’euros)

Administration publique

2015

2016

2017

total

Programme de stabilité 2015-2018

21

14,5

14,5

50

Projet de loi de finances pour 2016

18,6

16

15,4

50

Programme de stabilité 2016-2019

18,1

13,2

18,7

50

Source : commission des finances.

Le programme de stabilité 2016 prévoit un nouveau décalage dans la réalisation du plan d’économies de 50 milliards d’euros. Les efforts d’économies sont progressivement reportés sur l’année 2017, en raison de l’abaissement de la prévision d’inflation pour 2016 et d’objectifs de solde public en 2016 et 2017 inchangés par rapport à la trajectoire de programmation pluriannuelle adoptée en 2014.

ÉVOLUTION DU SÉQUENÇAGE DU PLAN D’ÉCONOMIES
DE 50 MILLIARDS D’EUROS

(en milliards d’euros)

Source : commission des finances.

A. LES MESURES D’ÉCONOMIES MISES EN œUVRE EN 2015

1. Les mesures d’économies complémentaires prévues pour 2015

Lors du programme de stabilité présenté en avril 2015, le Gouvernement a abaissé sa prévision d’inflation de 0,9 % (74) pour l’année en cours à 0 % (75). Cette révision a rendu nécessaire l’annonce de mesures d’économies supplémentaires destinées à respecter les objectifs de solde public fixés dans la loi de programmation de 2014.

Ces économies supplémentaires se sont élevées à 3,4 milliards d’euros. Par ailleurs, le Gouvernement a constaté un surplus de recettes à hauteur de 600 millions d’euros.

NOUVELLES MESURES D’ÉCONOMIES ANNONCÉES POUR 2015

(en milliards d’euros)

Secteur

Montant

Source d’économie

État

0,7

Décret n° 2015-639 du 9 juin 2015 portant annulation de crédits

ODAC

0,15

0,35

Budget rectificatif de l’AFITF du 6 mars 2015

Ralentissement des dépenses du programme d’investissement d’avenir

Administrations de sécurité sociale

1,0

Avis du Comité d’alerte de l’ONDAM du 26 mai 2015

Rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale du 8 juin 2015

Économies supplémentaires

2,2

 

Charge de la dette

1,2

Diminution de la charge d’intérêts évaluée par l’Agence France Trésor (AFT)

Économies de constatation

1,2

 

Recettes

0,4

Rendement supplémentaire issu de la déconcentration du STDR

Dividendes

0,2

Dividendes supplémentaires reçus par l’État issus de la Banque de France

Recettes totales

0,6

 

Total

4

 

AFITF : Agence de financement des infrastructures de transport de France.

STDR : service de traitement des déclarations rectificatives.

Source : Gouvernement, Rapport de la France sur la mise en œuvre des actions suivies d’effet consécutives à la recommandation du Conseil de l’Union européenne du 10 mars 2015, 10 juin 2015.

Ces économies supplémentaires, hors effet charge de la dette, évaluées à 2,2 milliards d’euros sont intégrées au volet 2015, du plan d’économies de 50 milliards d’euros.

2. La décomposition du programme d’économies pour 2015

ÉVOLUTION DES ÉCONOMIES RÉALISÉES EN 2015

(en milliards d’euros)

Programme d’économies

2015

Effort d’économies (PLF 2015)

21

Réduction du rendement des économies du fait de la faible inflation

− 4,6

Effort d’économies après l’inflation

16,4

Mesures d’économies supplémentaires (programme de stabilité 2015)

+ 2,2

Effort d’économies après le programme de stabilité 2015 (LFI 2016)

18,6

Effort d’économies réalisé (programme de stabilité 2016)

18,1

Source : commission des finances.

L’effort d’économies réalisé en 2015 a été abaissé d’environ 500 millions d’euros entre la loi de finances initiale pour 2016 et le chiffrage du programme de stabilité 2016, en raison d’un nouvel affaiblissement du taux d’inflation qui réduit le rendement de certaines mesures d’économies. La répartition des économies pour 2015 a finalement été la suivante.

APPLICATION DU PLAN D’ÉCONOMIES DE 50 MILLIARDS D’EUROS POUR L’ANNÉE 2015

(en milliards d’euros)

Secteur

Montant

Source d’économie

État

2,3

Baisse des dépenses nettes de l’État entre l’exécution 2014 et la loi de finances pour 2015 (hors PIA, à périmètre constant)

ODAC

0,15

0,35

Budget rectificatif de l’AFITF du 6 mars 2015

Ralentissement des dépenses du programme d’investissement d’avenir

État et opérateurs

5,6

Économies à préciser

État et opérateurs

8,4

 

Collectivités locales

3,5

Baisse des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales

ONDAM

3,2

Évolution de l’ONDAM contenue à 2,1 % par rapport à l’objectif 2014

Autres

3

Économies à préciser

Administrations de sécurité sociale

6,2

 

Total

18,1

 

Source : Gouvernement.

Le suivi du plan d’économies de 50 milliards d’euros est rendu difficile en raison du processus de budgétisation. Ce plan est élaboré à partir d’une croissance tendancielle de la dépense publique, qui fait référence à une situation dite « contrefactuelle », dans laquelle la dépense évoluerait en l’absence de mesures nouvelles (76).

Le tendanciel de la dépense

Le plan d’économies de 50 milliards d’euros se fonde sur le rythme d’évolution spontanée de la dépense, autrement dénommé tendanciel de la dépense.

Ce tendanciel de la dépense est calculé par la direction du budget, qui examine chaque « brique budgétaire » − un niveau de dépense plus fin que l’action – pour en déterminer l’évolution prévisionnelle. Ainsi, le tendanciel des dépenses de l’État est, par exemple, exposé très précisément lors de chaque projet de loi de finances.

Ce tendanciel de dépenses est un instrument utilisé par les gestionnaires publics dans la construction de leur budget, permettant d’estimer le montant prévisionnel de la dépense en année N + 1, en l’absence de mesures nouvelles. Cette référence à la dépense tendancielle est déterminante pour identifier les mesures d’économies. Ainsi, il est possible de réaliser des économies avec une dépense qui augmente, par exemple les allocations pour le logement. À l’inverse, il est envisageable de ne faire aucune économie dans un contexte de dépenses qui diminuent, c’est le cas topique des dépenses d’anciens combattants.

Cette gestion budgétaire légitime un suivi de la dépense par sous-secteur d’administration, en cohérence avec les modalités pratiques de budgétisation.

B. LES MESURES D’ÉCONOMIES MISES EN œUVRE EN 2016 ET 2017

1. Les mesures d’économies complémentaires annoncées pour 2016

Le programme de stabilité de 2015 a également revu à la baisse la prévision d’inflation pour 2016 à 1 % contre 1,4 % en loi de programmation des finances publiques (77). Cette réduction du niveau d’inflation a mécaniquement diminué le rendement de plusieurs mesures d’économies à hauteur de 1,6 milliard d’euros en 2016.

Le Gouvernement a prévu lors du programme de stabilité de 2015 la mise en œuvre de 5 milliards d’euros d’économies supplémentaires en 2016 afin de respecter la trajectoire de redressement des comptes publics sur le triennal. Ces mesures ont été détaillées dans la loi de finances pour 2016, pour un montant total de 5,35 milliards d’euros (78). Elles intègrent 2,95 milliards d’euros d’économies nouvelles au sein du plan de 50 milliards d’euros d’économies.

NOUVELLES MESURES D’ÉCONOMIES POUR 2016

(en milliards d’euros)

Secteur

Montant

Source d’économie

État

0,1

Mesures complémentaires

0,4

Réduction des décaissements des investissements d’avenir

Opérateurs de l’État

0,3

Élargissement du périmètre des taxes affectées plafonnées et diminution du plafond de ces taxes

Dépenses sociales

0,5

Progression de l’ONDAM limitée à 1,75 %

Administrations de sécurité sociale

0,25

Montée en charge de la réforme du cumul emploi retraite

0,1

Montée en charge plus progressive de la loi d’adaptation de la société au vieillissement

0,2

Économies sur l’action sociale et sur les dépenses de gestion des organismes de protection sociale

0,1

Meilleur contrôle des ressources des bénéficiaires de la CMU-C et de l’ACS

0,5

Économies sur le régime d’assurance chômage

0,5

Effets de la refonte des modalités de revalorisation des prestations

Nouvelles économies

2,95

 

État

1,2

Abaissement de la norme de dépense hors dette et pensions et hors transferts aux collectivités territoriales, en raison de la faible inflation

Collectivités territoriales

1,2

Abaissement de l’objectif d’évolution de la dépense locale, en raison de la faible inflation

Économies de constatation

2,4

 

Total des économies

5,35

 

ACS : aide au paiement d’une complémentaire santé.

Source : Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2016, page 67.

En outre, le rendement prévisionnel du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR) a été revu à la hausse de 600 millions d’euros, soit un milliard d’euros par rapport au niveau de la programmation.

2. La décomposition du programme d’économies pour 2016

Le projet de loi de finances pour 2016 a détaillé le plan d’économies de 50 milliards d’euros pour l’année en cours. Le quantum d’économies initialement prévu s’élevait à 16 milliards d’euros, il a été abaissé à 15,8 milliards d’euros en loi de finances initiale en raison d’une diminution des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales revue à la baisse (79).

PROGRAMME D’ÉCONOMIES PRÉVU POUR 2016

(en milliards d’euros)

Secteur

Montant

Source d’économie

État (1)

0,8

Ralentissement de l’évolution de la masse salariale

2,7

Réduction des dépenses d’intervention

0,6

Réduction des dépenses de fonctionnement des ministères

ODAC

1

Diminution des subventions pour charges de service public et des taxes affectées plafonnées

État et opérateurs

5,1

 

Collectivités locales

3,3

Baisse des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales

Administrations de sécurité sociale

3,4

Taux d’évolution de l’ONDAM (3) abaissé à 1,75 %

4

Autres

Administrations de sécurité sociale

7,4

 

Total

15,8

 

(1) Rapport économique, social et financer annexé au projet de loi de finances pour 2016, page 78.

Source : Rapport économique, social et financer annexé au projet de loi de finances pour 2016 et loi de finances initiale pour 2016.

3. L’adoption de nouvelles économies supplémentaires en raison de l’abaissement de la prévision d’inflation

Le programme de stabilité 2016 abaisse la prévision d’inflation de 1 % à 0,1 % pour l’année 2016. Cette inflation plus basse détruit de nouveau un quantum d’économies, évalué à 4,6 milliards d’euros.

ÉVOLUTION DES ÉCONOMIES PRÉVUES EN 2016

(en milliards d’euros)

Programme d’économies

2016

Effort d’économies (programme de stabilité 2015)

14,5

Réduction du rendement des économies du fait de la faible inflation

− 1,6

Effort d’économies après l’abaissement de l’inflation

12,9

Mesures d’économies supplémentaires (LFI 2016)

+ 2,95

Effort d’économies après la loi de finances pour 2016

15,85

Réduction d’économies du fait de la faible inflation (programme de stabilité 2016)

− 4,6

Économies complémentaires prévues par le programme de stabilité 2016

2

Effort d’économies après le programme de stabilité 2016

13,25

Source : commission des finances.

Le présent programme de stabilité prévoit 2 milliards d’euros d’économies complémentaires, afin de compenser les effets d’une inflation plus faible :

− un milliard d’euros sur les dépenses de l’État et de ses opérateurs ;

− un milliard d’euros sur les dépenses de santé et de protection sociale.

Le programme d’économies s’élève in fine pour 2016 à 13,2 milliards d’euros, réparties de la façon suivante.

ANNUITÉ 2016 DU PROGRAMME D’ÉCONOMIES DE 50 MILLIARDS D’EUROS

(en milliards d’euros)

Secteur

Montant

État et opérateurs

4,6

Collectivités locales

3,3

Administrations de sécurité sociale

5,3

dont ONDAM

3,4

dont autres

1,9

Total

13,2

Source : Gouvernement.

Par ailleurs, le Gouvernement constate une économie sur la charge de la d’intérêts à hauteur de 1,8 milliard d’euros, du fait de la faiblesse de l’inflation et des taux d’intérêt, qui permettra d’atteindre les objectifs de solde nominal.

4. L’annonce de nouvelles dépenses pour 2016, en principe intégralement gagées

Le Gouvernement a annoncé un certain nombre de dépenses nouvelles depuis le vote de la loi de finances initiale pour 2016. Ces mesures n’ont par conséquent pas été prévues au moment du vote du budget 2016, elles doivent dès lors bénéficier de nouvelles modalités de financement. Le Gouvernement a posé le principe d’un gage intégral et systématique pour l’ensemble de ces nouvelles mesures, c’est-à-dire qu’elles ne doivent pas entraîner de dégradation du solde public.

NOUVELLES DÉPENSES ANNONCÉES PAR LE GOUVERNEMENT EN 2016

Mesures annoncées

Date de l’annonce

Coût estimé pour 2016 (en milliards d’euros)

Financement envisagé des mesures*

Prime à l’embauche*

18 janvier 2016

1

− Redéploiements sous la norme de dépense : 0,9 milliard d’euros

− Diminution des décaissements PIA : 0,4 milliard d’euros

− Économies sur les administrations de sécurité sociale : 0,3 milliard d’euros

Formation de 500 000 chômeurs supplémentaires*

18 janvier 2016

0,6

Plan de soutien exceptionnel à l’élevage**

11 février 2016

0,4

Redéploiement sous la norme de dépense

Baisse de cotisations sociales pour les agriculteurs**

11 février 2016

0,5

Redéploiement sous la norme de dépense

Fonds de financement de la transition énergétique**

8 mars 2016

0,3

− Gel du report de crédits de 2015 à 2016 : 1,8 milliard d’euros

Hausse de 1,2 % du point d’indice des fonctionnaires**

17 mars 2016

0,6

Prolongement d’un an de la mesure de suramortissement

31 mars 2016

0,4

Mesures en faveur des jeunes**

11 avril 2016

0,2

Total

 

4,0

4,2

* Programme de stabilité 2016, page 31.

** Réponse du Gouvernement au questionnaire de la Rapporteure générale.

Source : commission des finances et programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

5. Le plan d’économies prévu pour 2017 et les mesures complémentaires

Le quantum d’économies prévu en 2017 s’élève à 18,7 milliards d’euros, réparties selon le même principe que les deux premières annuités du plan – en fonction du poids de chaque secteur d’administration dans la dépense publique. Par ailleurs, l’épisode de faible inflation et l’objectif de solde nominal rendent indispensable l’adoption de mesures d’économies complémentaires à hauteur de 5 milliards d’euros.

MESURES D’ÉCONOMIES COMPLÉMENTAIRES PRÉVUES POUR 2017

(en milliards d’euros)

Secteur d’administration

Montant

Mesure d’économie complémentaire

État et opérateurs

2

Administrations de sécurité sociale

2

Collectivités locales

1

Source : programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

L’ensemble des mesures d’économies sera précisé dans les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2017.

ANNUITÉ 2017 DU PROGRAMME D’ÉCONOMIES DE 50 MILLIARDS D’EUROS

(en milliards d’euros)

Secteur

Montant

État et opérateurs

6,2

Collectivités locales

3,7

Administrations de sécurité sociale

8,8

dont ONDAM

3,4

dont autres

5,4

Total

18,7

Source : Gouvernement.

FICHE 7 :
LA STRATÉGIE EUROPE 2020

Le principe d’une coordination des politiques économiques des États membres est posé à l’article 121 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Ce rôle de coordination des politiques économiques dévolu au Conseil de l’Union européenne s’est traduit en 2000 par l’adoption d’une stratégie globale de croissance et d’emploi pour dix ans, dite « stratégie de Lisbonne » (80). En 2010, le Conseil a adopté une nouvelle stratégie de croissance pour la période 2010-2020, la stratégie Europe 2020 (81). Le programme national de réforme constitue un instrument de suivi de cette stratégie et des résultats de la France en la matière.

I. LA STRATÉGIE DE LISBONNE (2000-2010)

Adoptée pour la période 2000-2010, la stratégie de Lisbonne visait à faire de l’Union européenne « l’économie de la connaissance la plus compétitive, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale ». Cette stratégie avait pour objet d’instaurer une orientation générale aux politiques économiques et de l’emploi de l’Union européenne.

Cette stratégie a été déclinée par le Conseil à travers l’adoption en 2005 et en 2008 des grandes orientations des politiques économiques (82) et des lignes directrices pour l’emploi (83). Ces deux instruments de coordination économique, prévus par le traité (84), forment un cadre aux priorités microéconomiques et macroéconomiques exprimées par les États membres dans le cadre de leurs programmes nationaux de réforme.

Parallèlement, la Commission européenne a établi une liste d’indicateurs permettant d’assurer le suivi quantitatif des objectifs fixés par la stratégie de Lisbonne.

QUATORZE PRINCIPAUX OBJECTIFS DE LA STRATÉGIE DE LISBONNE (1)

PIB par habitant

en standard de pouvoir d’achat

Par rapport à la moyenne de l’UE

Productivité de la main-d’œuvre

par personne occupée

Par rapport à la moyenne de l’UE

Taux d’emploi total*

70 %

Taux d’emploi des 55-64 ans

50 %

Niveau d’instruction des jeunes de 20 à 24 ans

(ayant atteint au moins un niveau d’éducation secondaire supérieur)

Par rapport à la moyenne de l’UE

Dépenses de recherche et développement

(en % du PIB)

3 %

Investissements des entreprises (en % du PIB)

Par rapport à la moyenne de l’UE

Niveau des prix comparés

Par rapport à la moyenne de l’UE

Part de la population à risque de pauvreté

(seuil de pauvreté fixé à 60 % du revenu disponible équivalent médian national)

Par rapport à la moyenne de l’UE

Chômage de longue durée

Par rapport à la moyenne de l’UE

Dispersion des taux d’emploi régionaux

Par rapport à la moyenne de l’UE

Réduction d’émissions de gaz à effet de serre

par rapport à 1990

8 %

Intensité énergétique de l’économie

Par rapport à la moyenne de l’UE

Volume du transport de fret par rapport au PIB

Par rapport à la moyenne de l’UE

* Indicateurs désagrégés par sexe.

(1)  Ces quatorze principaux critères sont issus de la liste restreinte proposée par la Commission européenne (COM [2003] 585) et adoptée par le Conseil européen le 8 décembre 2003.

La stratégie de Lisbonne a produit des résultats insuffisants en raison d’une multiplicité d’indicateurs, de leur caractère non-contraignant et d’un contexte de crise économique en 2008-2009.

II. LA STRATÉGIE EUROPE 2020 (2010-2020)

Néanmoins, la crise économique a confirmé la nécessité d’une coordination des politiques économiques au niveau de l’Union européenne, à condition d’être renforcée et rendue plus efficace.

Ainsi, le Conseil européen a décidé le 17 juin 2010 de relancer une stratégie pour la croissance et l’emploi, dite « Europe 2020 » (85), sur la période 2010-2020, articulée autour de trois priorités complémentaires :

− une croissance « intelligente » : fondée sur une économie de la connaissance et de l’innovation ;

− une croissance durable : avec une utilisation plus efficace des ressources, une économie plus verte et plus compétitive ;

− une croissance inclusive : avec un fort taux d’emploi favorisant la cohésion sociale et territoriale.

Cette stratégie vise à renforcer la coordination des politiques économiques nationales afin d’accroître le potentiel de croissance de l’Union européenne sur le long terme. Elle constitue le troisième axe de coordination des politiques économiques dans le cadre du semestre européen, s’agissant des réformes structurelles. Le semestre européen s’articule autour de trois axes de coordination des politiques des États membres :

− réformes structurelles (stratégie Europe 2020) ;

− politiques budgétaires (pacte de stabilité et de croissance) ;

− politiques économiques (prévention des déséquilibres macroéconomiques).

A. LES CINQ OBJECTIFS RETENUS PAR LA STRATÉGIE EUROPE 2020

1. Les cinq objectifs principaux de la stratégie Europe 2020

Le Conseil européen a défini cinq grands objectifs chiffrés à atteindre d’ici 2020 :

LES CINQ OBJECTIFS DE LA STRATÉGIE EUROPE 2020

Taux d’emploi

75 % de la population âgée de 20 à 64 ans devrait avoir un emploi 

Recherche et développement

3 % du PIB de l’Union européenne devrait être investi dans la R&D 

Changement climatique et énergie

− réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 20 % par rapport aux niveaux de 1990 ;

− augmentation de la part des sources d’énergie renouvelables dans la consommation finale d’énergie à 20 % ;

− augmentation de 20 % de l’efficacité énergétique (y compris le fait de porter à 30 % la réduction des émissions si les conditions adéquates sont remplies) ;

Éducation

Le taux d’abandon scolaire devrait être ramené à moins de 10 % et au moins 40 % des jeunes générations devraient obtenir un diplôme de l’enseignement supérieur 

Lutte contre la pauvreté

réduction de 20 millions de personnes menacées par la pauvreté

Source : Commission européenne.

Ces cinq grands objectifs définissent la situation dans laquelle l’Union européenne devra se trouver d’ici 2020. Ces cinq grands objectifs ont représenté le point de départ d’un dialogue entre la Commission européenne et chaque État membre afin d’en déterminer la déclinaison nationale, en tenant compte des spécificités et des circonstances de chaque pays. À l’issue de cette discussion, chaque État membre a défini des objectifs nationaux exprimés lors de leur programme national de réforme en avril 2011.

2. La mise en place de sept initiatives phares

La Commission européenne a présenté sept initiatives phares permettant de coordonner les efforts des États membres au regard des trois priorités fixées à l’horizon 2020.

SEPT INITIATIVES PHARES

Croissance intelligente

Stratégie numérique pour l’Europe

Une Union pour l’innovation

Jeunesse en mouvement

Croissance durable

Une Europe efficace dans l’utilisation des ressources

Une politique industrielle à l’ère de la mondialisation

Croissance inclusive

Stratégie pour les nouvelles compétences et les nouveaux emplois

Plateforme européenne contre la pauvreté

Source : Commission européenne.

Ces initiatives phares sont des programmes de travail inscrits à l’agenda de la Commission. Elles servent de catalyseur d’actions au niveau de l’Union européenne et des États membres.

B. LES LIGNES DIRECTRICES INTÉGRÉES « EUROPE 2020 »

La stratégie Europe 2020 est mise en œuvre à travers des lignes directrices dites intégrées, qui sont composées :

− de lignes directrices pour l’emploi (86) ;

− et de grandes orientations des politiques économiques (87).

Ces lignes directrices intégrées forment le cadre juridique de la coordination des politiques économiques des États membres, qui tiennent compte de ces dernières dans l’élaboration de leurs programmes nationaux de réforme.

Les grandes orientations des politiques économiques

Chaque année, le Conseil adopte des grandes orientations des politiques économiques afin de guider et de coordonner l’action des États membres et de l’Union européenne en matière macroéconomique. En juillet 2015, le Conseil a adopté les quatre grandes orientations de politiques économiques suivantes :

− favoriser les investissements ;

− renforcer la croissance par la mise en œuvre de réformes structurelles dans les États membres ;

− éliminer les principales entraves à la croissance durable et à l’emploi au niveau de l’Union ;

− rendre les finances publiques plus viables et plus propices à la croissance.

Les lignes directrices pour les politiques de l’emploi

Chaque année, le Conseil adopte des lignes directrices pour les politiques de l’emploi (1) afin d’aiguiller les politiques des États membres et de l’Union européenne relatives au marché du travail. Le Conseil a adopté en octobre 2015 les quatre lignes directrices pour les politiques de l’emploi suivantes :

− stimuler la demande d’emplois ;

− améliorer l’offre d’emplois, les qualifications et les compétences ;

− améliorer le fonctionnement des marchés du travail ;

− favoriser l’inclusion sociale, combattre la pauvreté et promouvoir l’égalité des chances.

(1) Article 148 § 2 TFUE.

Les lignes directrices constituent la base de toute recommandation adressée individuellement par le Conseil aux États membres (88) ou, dans le cas des grandes orientations des politiques économiques, de tout avertissement formulé par la Commission au sujet des politiques menées, lorsque les suites données aux recommandations sont insuffisantes (89). En revanche, il n’existe aucune sanction applicable en cas de non-respect des objectifs de la stratégie Europe 2020.

Le Conseil a adressé le 14 juillet 2015 une recommandation (1) à la France concernant son programme national de réforme et portant avis sur son programme de stabilité. Six recommandations ont été formulées, deux concernent la trajectoire de finances publiques, quatre relèvent de mesures de politiques économiques. Ces quatre recommandations de politique économique concernent le coût du travail, les obstacles réglementaires à la croissance des entreprises, l’efficacité du système fiscal et la réforme du marché du travail.

(1) Recommandation du Conseil du 14 juillet 2015 concernant le programme national de réforme de la France pour 2015 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2015.

C. LE SUIVI DE LA STRATÉGIE EUROPE 2020

1. Les modalités de gouvernance et de suivi de la stratégie Europe 2020

Les modalités de gouvernance de la stratégie Europe 2020 ont été renforcées par rapport à la stratégie de Lisbonne. Elles s’inscrivent désormais dans le cadre du semestre européen.

La Commission européenne est en charge du suivi des progrès des États membres dans le cadre du semestre européen. Elle présente chaque année un examen de la croissance, évalue l’agenda de réformes des États membres et propose des recommandations spécifiques à chaque pays. Réciproquement, les États membres exposent chaque année les mesures mises en œuvre en lien avec la stratégie Europe 2020 dans le cadre de leur programme national de réforme.

Le suivi de la stratégie Europe 2020 est intégré au calendrier du semestre européen, favorisant la coordination des politiques économiques des États membres. Les différents documents suivants, présentés lors du semestre européen, tiennent compte de la stratégie Europe 2020 afin d’analyser les progrès réalisés et à attendre au sein des États membres.

LA STRATÉGIE EUROPE 2020 AU SEIN DU SEMESTRE EUROPÉEN

Novembre

Examen annuel de croissance

Commission européenne

Février

Rapport par pays

Commission européenne

Mars

Orientations politiques sur le fondement de l’examen annuel de croissance

Conseil européen

Avril

Programmes nationaux de réforme

États membres

Mai

Élaboration de recommandations par pays

Commission européenne

Juillet

Adoption des recommandations par pays

Conseil

Source : commission des finances.

2. L’état des lieux de la stratégie Europe 2020 réalisé en 2014

La Commission européenne a dressé en mars 2014 un état des lieux (90) mitigé des progrès réalisés sur la voie des objectifs de la stratégie Europe 2020. La crise a eu un impact négatif sur l’emploi et les niveaux de pauvreté, les indicateurs correspondants sont en recul par rapport aux objectifs visés. À l’inverse, l’Union européenne bénéficie d’évolutions structurelles positives, en termes de niveaux d’éducation et d’intensité énergétique de la croissance économique.

ÉTAT DES LIEUX DE LA STRATÉGIE EUROPE 2020

Indicateur

2008

2014

2020 (p)*

Taux d’emploi de la population âgée de 20 à 64 ans à au moins 75 %

70,3 %

69,2 %

72 %

Augmentation du niveau cumulé des investissements publics et privés en recherche et développement à 3 % du PIB

1,85 %

2,03 %

2,2 %

Réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 20 % par rapport aux niveaux de 1990

10 %

20 %

24 %

Augmentation de la part des sources d’énergie renouvelables dans la consommation finale d’énergie à 20 %

11 %

16 %

21 %

Augmentation de 20 % de l’efficacité énergétique

Abaissement du taux d’abandon scolaire à moins de 10 %

14,7 %

11,2 %

10,30 %

Augmentation à au moins 40 % de la proportion de personnes âgées de 30 à 34 ans ayant achevé un cycle de l’enseignement supérieur

31,1 %

37,9 %

40 %

Sortir au moins 20 millions de personnes du risque de pauvreté et d’exclusion sociale

114

124

100

(p)* : prévisions, sur la base des tendances récentes.

Source : Commission européenne, Eurostat.

3. Le respect inégal par la France de ses cinq objectifs nationaux issus de la stratégie Europe 2020

Dans le cadre du rapport pays adressé à la France le 26 février 2016 (91), la Commission européenne dresse le constat des performances françaises par rapport aux objectifs nationaux de la stratégie Europe 2020. En réponse, la France présente dans le programme national de réforme 2016 les progrès réalisés dans la mise en œuvre des objectifs 2020.

a. Un taux d’emploi (20-64 ans) établi à 75 % en 2020

Le taux d’emploi des travailleurs âgés de 20 à 64 ans s’établit à 69,4 % en France en 2014, selon le programme national de réforme. La Commission européenne relève que la tendance est relativement stable et que le marché du travail présente un certain nombre de difficultés en France.

à Selon la Commission, « l’objectif de 75 % ne pourra être atteint que si de nouveaux signes de reprise économique se traduisent par des emplois ».

b. Un effort en matière de recherche et développement fixé à 3 % du PIB en 2020

L’intensité de R&D s’établit à 2,24 % du PIB en 2014, contre 2,06 % en 2008, selon le programme national de réforme. Le taux de croissance annuel moyen sur la période 2008-2014 s’élève à 1,56 %. La progression de l’effort en recherche et développement (R&D) apparaît plus dynamique dans le secteur privé, avec un taux de croissance annuel moyen de 2,08 %.

à « Bien que certains progrès aient été observés ces dernières années, la France n’est pas en bonne voie pour atteindre ces objectifs », selon la Commission.

c. Les objectifs en matière de changement climatique et d’énergie

• La réduction des émissions de gaz à effet de serre s’établit à 12 % en 2014 par rapport aux émissions de 2005, selon le programme national de réforme.

à L’objectif de réduction des émissions de 14 % par rapport aux émissions de 2005 devrait être atteint avec une marge inférieure à cinq points de pourcentage, selon la Commission. Les projections nationales anticipent un niveau de réduction de 18 % en 2020.

• La France dispose en 2014 d’une part d’énergies renouvelables de 14,6 % selon le programme national de réforme et d’une part de 7,8 % d’énergies renouvelables utilisées dans le secteur des transports.

à La France pourrait atteindre son objectif de 23 % d’énergies renouvelables « à condition d’utiliser son potentiel en énergies renouvelables ».

à « La France est bien partie pour atteindre son objectif de 10 % d’énergies renouvelables dans tous les modes de transport d’ici à 2020. »

• La consommation d’énergie primaire de la France a été réduite à 250,9 mégatonnes d’équivalent pétrole (Mtep) en 2014 et sa consommation d’énergie finale s’est établie à 144,3 Mtep, selon le programme national de réforme.

à La France doit atteindre un objectif de réduction de la consommation primaire fixé à 219,9 Mtep, hors transport aérien international et usages non énergétiques, en vertu de la directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique (1).

à Sa consommation primaire reste supérieure à l’objectif pour 2020 fixé à 131,4 Mtep.

(1) Directive 2012/27/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 relative à l’efficacité énergétique, modifiant les directives 2009/125/CE et 2010/30/UE et abrogeant les directives 2004/8/CE et 2006/32/CE.

d. L’amélioration des niveaux d’éducation

• Le taux de décrochage scolaire s’établit à 9 % en 2014, soit un niveau conforme à l’objectif de 9,5 % fixé pour la France en 2020. La France se situe dans une position plus favorable que la moyenne européenne de 11,2 %.

à La Commission européenne relève la disparité des situations, regrettant que « trop de jeunes, en particulier parmi ceux d’origine immigrée, quittent encore l’école avec, au mieux, un diplôme du secondaire inférieur, malgré la forte détérioration des perspectives d’emploi pour ce groupe de population ».

• Le taux de diplômés de l’enseignement supérieur en France s’élève à 46,8 % en 2014 pour les jeunes âgés de dix-sept à trente-trois ans et 43,7 % pour ceux âgés entre trente et trente-quatre ans.

à L’objectif fixé pour la France est un taux de diplômés de l’enseignement supérieur fixé à 50 % de la population âgée de dix-sept à trente-trois ans (tranche d’âge différente de celle visée par l’objectif européen, à savoir trente-trente-quartre ans), qui devrait pouvoir être atteint. La Commission relève que « le taux de diplômés nés à l’étranger est plus faible que celui de la population née en France (38,5 % contre 44,4 %) ».

e. La lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale

Le pourcentage de la population totale française menacée de pauvreté est passé de 18,1 % en 2013 à 18,5 % en 2014, soit 11,2 millions de personnes. La France a pour objectif de réduire le nombre de personnes exposées au risque de pauvreté ou d’exclusion sociale à hauteur de 1,9 million de personnes comparativement au chiffre relevé en 2007. Or, le nombre de personnes menacées de pauvreté a augmenté de 389 000 unités en France depuis 2008.

à L’objectif fixé à la France semble difficilement atteignable.

FICHE 8 :
LE PROGRAMME NATIONAL DE RÉFORME 2016

Le programme national de réforme (PNR) 2016 vise notamment à répondre aux recommandations formulées par le Conseil de l’union européenne à la France en juillet 2015 (92). Ce document s’inscrit dans le cadre du dialogue entre la France et les institutions européennes relatif aux politiques macroéconomiques et structurelles.

L’évaluation ex ante de l’impact macroéconomique des réformes

L’évaluation de l’impact macroéconomique des réformes présente un intérêt particulier dans le cadre des échanges avec les institutions européennes. Ainsi, le pacte de stabilité et de croissance permet aux pays qui relèvent du volet préventif de la procédure de déficit excessif de réduire leur ajustement structurel en tenant compte des effets positifs de réformes structurelles sur leur trajectoire de finances publiques (1).

Dans le cadre de la surveillance des déséquilibres macroéconomiques, la Commission européenne analyse la dynamique et l’ampleur des réformes structurelles envisagées par chaque pays. Ainsi, la Commission a renoncé en 2015 à appliquer à la France le volet correctif de cette procédure, compte tenu de la présentation détaillée de l’impact économique de mesures structurelles dans le programme national de réforme.

Dès lors, ce document présente de manière systématique l’impact macroéconomique attendu des réformes économiques, selon les calculs de la direction générale du Trésor, réalisés à l’aide du modèle Mésange (2). Traditionnellement, l’impact macroéconomique des réformes est présenté en chiffres « bruts », c’est-à-dire indépendamment de leur financement. Or, la Rapporteure générale a regretté l’an dernier lors de la présentation du programme national de réforme de ne pas pouvoir disposer de chiffres incluant le financement des réformes (3). Le Gouvernement a répondu favorablement à la demande de la Rapporteure générale et propose cette année un chiffrage « brut » et un chiffrage « net » de l’impact macroéconomique des réformes.

(1) Article 5 § 1 du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dans sa version modifiée par le paragraphe 8 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1175/2011 du 16 novembre 2011.

(2) Modèle économétrique de simulation et d’analyse générale de l’économie.

(3) Valérie Rabault, Rapport d’information sur le programme de stabilité pour les années 2015 à 2018 et le programme national de réforme, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 2740, 22 avril 2015, page 63 : http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i2740.asp.

L’impact macroéconomique des mesures présentées dans le programme national de réforme 2016 serait de 2,5 points de produit intérieur brut (PIB) supplémentaires et 665 000 emplois créés à l’horizon 2020.

I. LES DÉFIS ÉCONOMIQUES MAJEURS AUXQUELS LA FRANCE EST CONFRONTÉE

A. L’ENGAGEMENT DU GOUVERNEMENT EN FAVEUR DE LA SOUTENABILITÉ ET DE LA QUALITÉ DES FINANCES PUBLIQUES

1. Assurer de la soutenabilité des finances publiques

Le Gouvernement présente dans le programme national de réforme sa stratégie de retour à l’équilibre des comptes publics, avec un déficit public ramené en dessous de 3 % du PIB et une stabilisation du ratio dette/PIB en 2017. Il s’agit de répondre à trois recommandations formulées par le Conseil en juillet 2015 (93).

Première recommandation du Conseil (extrait) : « engager une action suivie d’effets au titre de la procédure concernant les déficits excessifs et assurer une correction durable du déficit excessif en 2017 au plus tard par un renforcement de sa stratégie budgétaire, en prenant les mesures nécessaires pour toutes les années et en consacrant toutes les recettes imprévues à la réduction du déficit et de la dette ».

Deuxième recommandation du Conseil (extrait) : « recenser les possibilités d’économies dans tous les sous-secteurs des administrations publiques, et notamment aux niveaux de la sécurité sociale et des collectivités locales ; prendre des mesures pour limiter l’augmentation des dépenses de fonctionnement des collectivités locales ; prendre des mesures supplémentaires pour ramener le système de retraite à l’équilibre, notamment en s’assurant, d’ici à mars 2016, que la situation financière des régimes de retraite complémentaire soit soutenable à long terme ».

Sixième recommandation du Conseil (extrait) : « entreprendre, en concertation avec les partenaires sociaux et conformément aux pratiques nationales, une réforme du système d’assurance chômage afin d’en rétablir la soutenabilité budgétaire ».

La démarche de redressement des finances publiques porte désormais exclusivement sur les dépenses, illustrée par le plan d’économies en dépenses de 50 milliards d’euros sur la période 2015-2017. Cet effort de maîtrise des dépenses est décliné au niveau de l’État, de ses opérateurs, des collectivités territoriales et des dépenses de protection sociale.

Le ratio de dépense publique, hors crédits d’impôts, serait en baisse de 2014 à 2016, passant de 56,4 % à 55,1 % par rapport au produit intérieur brut (PIB).

Le Gouvernement présente l’accord national interprofessionnel relatif aux retraites complémentaires Agirc-Arrco-AGFF du 30 octobre 2015, destiné à pérenniser financièrement le régime de retraite complémentaire des salariés du secteur privé. Cet accord intervient sur le niveau des pensions, le niveau des cotisations et les comportements de départ à la retraite. Il devrait permettre, selon les estimations du Gouvernement, de réaliser 2 milliards d’euros d’économies d’ici 2017 et 6 milliards d’euros en 2020.

Depuis février 2016, les partenaires sociaux négocient également une nouvelle convention d’assurance chômage, qui entrera en vigueur le 1er juillet prochain et devra remédier au déficit structurel du régime, qui atteindrait 1,6 milliard d’euros en 2018.

2. Améliorer la qualité de la dépense publique

Première recommandation du Conseil (extrait) : « préciser les réductions de dépenses prévues pour ces années ».

Deuxième recommandation du Conseil (extrait) : « accentuer les efforts visant à rendre efficace la revue des dépenses, poursuivre les évaluations des politiques publiques et recenser les possibilités d’économies dans tous les sous-secteurs des administrations publiques, et notamment aux niveaux de la sécurité sociale et des collectivités locales ; prendre des mesures pour limiter l’augmentation des dépenses de fonctionnement des collectivités locales ».

Le Gouvernement a mis en place dès 2012 un programme de modernisation de l’action publique (MAP), mené à travers 59 évaluations de politiques publiques favorisant 5,4 milliards d’euros d’économies. Cette démarche est complémentaire des revues de dépenses mises en place en 2015, qui ont permis de documenter près de 500 millions d’euros d’économies. L’État entreprend par ailleurs une rationalisation de son action, en matière de politique immobilière, de services informatiques, de sa fonction achat ou de ses services régionaux.

L’amélioration de la qualité de l’offre de soins est également soulignée par le Gouvernement du fait de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé (94). Ce texte vise à améliorer la gouvernance du système de santé, le parcours de soins et à moderniser l’exercice des professions de santé. Ainsi, les groupements hospitaliers territoriaux (GHT) permettront de renforcer la coordination entre professionnels de santé et de mutualiser un certain nombre de fonctions support. Ils seront constitués autour d’établissements pivots, entre 150 et 200, avant le 1er juillet 2016.

Enfin, l’acte III de la décentralisation (95) doit permettre une certaine rationalisation de la dépense locale, à travers une spécialisation des collectivités territoriales, une mutualisation accrue et des économies d’échelle.

3. Réduire le niveau des prélèvements obligatoires

Troisième recommandation du Conseil (extrait) : « maintenir les réductions du coût du travail découlant du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et du pacte de responsabilité et de solidarité, notamment en les mettant en œuvre comme prévu en 2016 ; évaluer l’efficacité de ces dispositifs en tenant compte des rigidités du marché du travail et du marché des produits ».

Cinquième recommandation du Conseil : « simplifier et améliorer l’efficacité du système fiscal, notamment en supprimant les dépenses fiscales inefficaces ; afin de promouvoir l’investissement, prendre des mesures visant à réduire les impôts sur la production et le taux nominal de l’impôt sur les sociétés, tout en élargissant la base d’imposition sur la consommation ; prendre des mesures à partir de 2015 en vue de supprimer les impôts inefficaces dont le produit est nul ou faible ».

Le Gouvernement a amélioré l’efficacité du système fiscal français à travers le pacte de responsabilité et de solidarité, en supprimant la contribution exceptionnelle d’impôt sur les sociétés, un certain nombre de taxes à faible rendement et progressivement la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), soit une baisse de la fiscalité de 4,5 milliards d’euros par an.

Parallèlement, la fiscalité des ménages a été allégée depuis 2015, avec la réforme et l’indexation du barème et la revalorisation exceptionnelle de la décote. Ces mesures représentent une réduction de la fiscalité des ménages de 5 milliards d’euros, bénéficiant à 12 millions de ménages (soit les deux tiers des ménages imposables).

Le Gouvernement s’est également engagé en faveur d’une montée en charge de la fiscalité écologique. Le rendement budgétaire net attendu de la contribution climat énergie devrait s’élever à 1,9 milliard d’euros en 2017. La fiscalité du gazole et de l’essence doivent converger d’ici cinq années et les biocarburants bénéficient désormais d’une fiscalité incitative.

Enfin, le Gouvernement a renforcé les dispositifs de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Ces efforts ont permis de notifier 21,2 milliards d’euros et de recouvrer 12,2 milliards d’euros en 2015. Le service de traitement des déclarations rectificatives (STDR), créé en juin 2013, a enregistré près de 45 000 demandes de régularisation fiscale, pour un rendement de 2,65 milliards d’euros en 2015.

B. LE RENFORCEMENT DE LA COMPÉTITIVITÉ ET DE LA PRODUCTIVITÉ DE L’ÉCONOMIE

1. Accroître la compétitivité coût des entreprises

Troisième recommandation du Conseil : « maintenir les réductions du coût du travail découlant du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et du pacte de responsabilité et de solidarité, notamment en les mettant en œuvre comme prévu en 2016 ; évaluer l’efficacité de ces dispositifs en tenant compte des rigidités du marché du travail et du marché des produits ; réformer, en concertation avec les partenaires sociaux et conformément aux pratiques nationales, le processus de formation des salaires pour que ceux-ci évoluent au même rythme que la productivité ; veiller à ce que les évolutions du salaire minimum soient compatibles avec les objectifs de promotion de l’emploi et de la compétitivité ».

La compétitivité coût des entreprises repose sur le coût des facteurs de production, à savoir le travail, le capital et les intrants. Le Gouvernement a mis en place le 1er janvier 2013 le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), représentant une réduction massive du coût du travail. Il constituera un allégement de 20 milliards d’euros du coût du travail en 2017. Le CICE a accentué une tendance à la baisse du coût du travail en France depuis 2012 par rapport aux autres pays de la zone euro.

ÉVOLUTION DES COÛTS SALARIAUX UNITAIRES

(sur la période 4e trimestre 2012 – 3e trimestre 2015)

France

Zone euro

Ensemble de l’économie

+ 0,7 %

+ 2,4 %

Secteur manufacturier

− 3,2 %

+ 1,4 %

Source : Gouvernement.

Depuis 2012, la revalorisation du SMIC est en ligne avec l’évolution de la productivité des salariés, compte tenu de l’absence de revalorisation discrétionnaire, dite de « coup de pouce ». Cette dynamique doit favoriser la compétitivité coût des salariés rémunérés au niveau du SMIC, soit 11,1 % de l’ensemble des salariés en 2015.

Le CICE et le volet « entreprises » du pacte de responsabilité et de solidarité – représentant 34 milliards d’euros en 2016 et plus de 40 milliards d’euros en 2017 – devraient accroître le PIB de 0,1 point à l’horizon 2020 et créer 280 000 emplois, après prise en compte du financement.

2. Faciliter l’activité économique

Quatrième recommandation du Conseil : « d’ici à la fin de 2015, éliminer les obstacles réglementaires à la croissance des entreprises, notamment en révisant les critères de taille fixés dans la réglementation pour éviter les effets de seuil ; éliminer les restrictions d’accès aux professions réglementées autres que juridiques et à l’exercice de celles-ci, notamment en ce qui concerne les professions de santé à partir de 2015 ».

Cinquième recommandation du Conseil : « simplifier et améliorer l’efficacité du système fiscal ».

Le Gouvernement a mis en place en janvier 2014 un conseil de la simplification destiné à réduire les normes pesant sur les entreprises. Ce processus a permis l’annonce de 415 mesures de simplification, pour des gains bruts estimés à 1,1 milliard d’euros entre août 2014 et septembre 2015.

La loi consommation (96) a entrepris un transfert de pouvoir d’achat direct aux consommateurs, notamment grâce à la réduction des contraintes réglementaires dans le secteur de l’assurance et de l’optique.

La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (97) a réformé les professions réglementées du droit, libéralisé le marché des lignes d’autocar interurbaines et assoupli les conditions d’ouverture des commerces le dimanche et en soirée. Un suivi de l’application de cette loi est réalisé par notre collègue Richard Ferrand, qui a publié un premier rapport d’information en mars 2016 (98). Il constate un taux satisfaisant de publication des mesures réglementaires d’application, établi à 56 % sept mois après la promulgation de ladite loi.

Par ailleurs, le Gouvernement a présenté le 30 mars 2016 en conseil des ministres un projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. Ce texte doit faire progresser la France en matière de lutte contre la corruption, qui constitue un frein à l’activité économique.

L’ensemble de ces mesures devrait accroître le PIB de 0,4 point et créer 25 000 emplois à l’horizon 2020, après prise en compte du financement.

3. Améliorer la compétitivité hors coût et la croissance potentielle

Le Gouvernement souhaite encourager les efforts en matière d’innovation et de recherche et développement. Il s’est engagé en faveur de la stabilité et de la pérennité du principal dispositif incitatif, le crédit d’impôt recherche, représentant plus de 5,3 milliards d’euros.

Les activités numériques doivent être également promues, c’est le sens du projet de loi pour une République numérique, actuellement en discussion au Parlement. Le plan « France Très Haut Débit », lancé en 2013, prévoit par ailleurs une couverture de l’ensemble du territoire à l’horizon 2022, pour un investissement de l’État de plus de 2 milliards d’euros. Un plan numérique à destination de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur est également déployé sur trois ans à partir de 2015, représentant un milliard d’euros.

L’incitation à l’investissement des entreprises est réalisée par le biais du dispositif de suramortissement de l’investissement productif. Cette mesure, entrée en vigueur à compter du 15 avril 2015, a été prorogée jusqu’au 14 avril 2017. Selon l’INSEE, elle permet de rehausser l’investissement en produits manufacturés de l’ordre de 0,2 à 0,4 point par trimestre. Les programmes d’investissements d’avenir (PIA) successifs privilégient les projets innovants, pour un montant global à terme de 57 milliards d’euros. Enfin, la France apparaît comme le premier bénéficiaire du plan Juncker en 2015, en termes de projets sélectionnés.

Le financement des PME a été facilité par la création du plan d’épargne action PME (PEA-PME), la réforme de l’épargne salariale, notamment à travers la promotion du dispositif « PERCO + » et l’adoption d’un cadre juridique favorable au développement du crowdfunding. Bpifrance œuvre par ailleurs en faveur du financement des entreprises en ayant engagé 17,5 milliards d’euros en 2014.

Ces mesures favorables à l’investissement devraient créer 60 000 emplois et susciter 0,5 point de PIB supplémentaire à l’horizon 2020, après prise en compte du financement.

C. L’AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT DU MARCHÉ DU TRAVAIL

1. Promouvoir le dialogue social

Sixième recommandation du Conseil (extrait) : « faciliter, aux niveaux des entreprises et des branches, les dérogations aux dispositions juridiques générales, notamment en ce qui concerne l’organisation du temps de travail ; réformer la loi portant création des accords de maintien de l’emploi d’ici à la fin de 2015 en vue d’accroître leur utilisation par les entreprises ».

Les conditions de recours aux accords de maintien de l’emploi, créés en 2013 (99), ont été assouplies en 2015 (100). La loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi (101) a entrepris de rationaliser les obligations d’information et de consultation du comité d’entreprise ainsi que les obligations de négociation. La conférence sociale du 19 octobre 2015 a fixé pour objectif une réduction du nombre de branches professionnelles à 200 d’ici trois ans, contre 700 aujourd’hui.

Le projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs prévoit d’étendre les domaines couverts par la négociation collective.

Les mesures adoptées en matière de marché du travail et de dialogue social devraient générer 120 000 emplois et 0,3 point de PIB supplémentaires en 2020, après prise en compte du financement.

2. Renforcer les dispositifs d’accompagnement

Sixième recommandation du Conseil (extraits) : « réformer le droit du travail afin d’inciter davantage les employeurs à embaucher en contrats à durée indéterminée » ; « entreprendre, en concertation avec les partenaires sociaux et conformément aux pratiques nationales, une réforme du système d’assurance chômage afin d’en rétablir la soutenabilité budgétaire et d’encourager davantage le retour au travail ».

La formation professionnelle est fortement encouragée par le Gouvernement, dont le financement et la gouvernance ont été rénovés par la loi en mars 2014 (102). Le Président de la République a annoncé en janvier 2016 le doublement sur l’année du nombre de formation des demandeurs d’emplois, pour le porter à un million.

Par ailleurs, 396 000 demandeurs d’emploi bénéficiaient d’un accompagnement intensif fin octobre 2015, tandis que le volume des contrats aidés représentait 437 000 personnes à la même période.

Un dispositif expérimental – la « garantie jeunes » – a été créé en 2013 à destination des jeunes de seize à vingt-cinq ans, en situation de précarité qui ne sont ni en emploi, ni en formation, ni en étude (NEET pour (Not in Employment, Education or Training). Il s’agit d’un accompagnement proposé par les missions locales bénéficiant de mises en situation professionnelle, assorti d’une aide financière. Ce dispositif sera pérennisé et généralisé à l’ensemble du territoire à compter de 2017. En outre, la prime d’activité, remplaçant à compter du 1er janvier 2016 le revenu de solidarité active-activité (RSA-activité) et la prime pour l’emploi, est désormais ouvert aux jeunes actifs dès dix-huit ans. Ces différents dispositifs d’accompagnement doivent permettre d’améliorer l’adéquation des compétences et des besoins sur le marché du travail. Cela résultera également d’un développement de la filière professionnelle et des périodes d’apprentissage.

Ces mesures d’accompagnement des populations les plus éloignées de l’emploi augmenteraient le PIB de 0,1 point et le nombre d’emplois de 50 000, après prise en compte du financement.

D. LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ, L’EXCLUSION ET LES INÉGALITÉS

Le Gouvernement a adopté en 2013 un plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale. Cette démarche prévoit notamment une revalorisation des minimas sociaux et des allocations à destination des familles à revenus modestes. Ainsi, le RSA bénéficiera d’une revalorisation de 10 % sur cinq ans, l’allocation de soutien familial et le complément ont également été revalorisés. Les plafonds de revenus donnant droit à l’aide à la complémentaire santé (ACS) et à la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) ont été relevés de 7 % en 2013.

La facilitation de l’accès au logement est également l’un des axes prioritaires du Gouvernement, qui souhaite mobiliser le foncier public et développer l’offre de logements sociaux ou locatifs intermédiaires sur l’ensemble du territoire.

Le Gouvernement a fait de la jeunesse l’une de ses priorités pour ce mandat, comme l’illustre l’adoption de deux lois en 2013 relatives à la refondation de l’école de la République (103) et à l’enseignement supérieur et à la recherche (104). La mise en œuvre de ces textes législatifs a été renforcée par un effort budgétaire significatif de 5,3 milliards d’euros par rapport à 2012 et la création de 60 000 postes. Enfin, le service civique devra devenir « universel » selon l’engagement du Président de la République. Ce dispositif, qui concernera plus de 110 000 volontaires en 2016, verra son budget passer de 300 millions d’euros actuellement à plus d’un milliard d’euros en 2018.

Le soutien au pouvoir d’achat des ménages aux revenus modestes, à travers le pacte de responsabilité et de solidarité, la baisse de l’impôt sur le revenu et le plan pauvreté, devrait permettre la création de 10 000 emplois, après prise en compte du financement.

II. L’UTILISATION DES FONDS STRUCTURELS ET D’INVESTISSEMENT

Le Gouvernement détaille dans le programme national de réforme 2016 l’enveloppe de financements européens reçus par la France en faveur de l’investissement, de la croissance et de l’emploi.

ENVELOPPE ALLOUÉE À LA FRANCE POUR LA PÉRIODE 2014-2020

(en milliards d’euros)

Fonds

Montant

Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER)

11,4

Fonds européen de développement régional (FEDER)

9,5

Fonds social européen (FSE)

6

Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP)

0,588

Initiative pour l’emploi des jeunes (IEJ)

0,31

Total

27,7

Source : programme national de réforme 2016.

Cette enveloppe budgétaire est désormais principalement gérée par les conseils régionaux, à hauteur de 20,5 milliards d’euros. L’État assure uniquement un rôle de définition de la politique générale et garantit la cohérence et la bonne mise en œuvre de ces fonds sur le territoire national.

AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL
DES FINANCES PUBLIQUES

Lors de sa séance du 13 avril 2016 à 10 heures, la commission a entendu M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques, sur l’avis du Haut Conseil relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

M. le président Gilles Carrez. Conformément à la loi organique de 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, le Haut Conseil des finances publiques est tenu d’émettre un avis sur le programme de stabilité, lequel doit être transmis à aux instances européennes avant la fin avril. Le Conseil des ministres l’examinera ce matin même, en même temps que le programme national de réforme, suite à quoi nous recevrons le ministre de l’économie, M. Emmanuel Macron, et le secrétaire d’État chargé du budget, M. Christian Eckert, qui nous présenteront ces deux documents. Avant cela, nous allons entendre M. Didier Migaud sur l’avis du Haut Conseil, un document tout à fait intéressant qui a été adopté dans la nuit. Je rappelle que le Haut Conseil est saisi par le Gouvernement des prévisions macroéconomiques, et non de l’état des finances publiques. Cependant, en l’absence de loi de finances rectificative ce printemps, toute question relative aux finances publiques sera légitime, compte tenu du lien – que rappelle d’emblée le Haut Conseil dans chacun de ses avis – qu’elles entretiennent avec les prévisions macroéconomiques. Précisons tout de même que nous aurons de nouveau l’occasion d’auditionner M. Migaud sur les finances publiques, en sa qualité de Premier président de la Cour des comptes, à l’occasion du projet de loi de règlement d’abord, puis du débat d’orientation des finances publiques.

M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques. Je vous remercie d’avoir bien voulu m’inviter à vous présenter les principales conclusions de l’avis relatif aux prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016-2019 qu’a rendu le Haut Conseil des finances publiques. Je suis pour ce faire accompagné de François Monier, rapporteur général du Haut Conseil, Vianney Bourquard, rapporteur général adjoint, et Paul Bérard, rapporteur.

C’est la quatrième fois que le Haut Conseil est appelé à se prononcer sur le projet de programme de stabilité, que la France adresse au Conseil de l’Union européenne et à la Commission européenne. En application de l’article 17 de la loi organique du 17 décembre 2012, l’avis du Haut Conseil porte sur les prévisions macroéconomiques sous-jacentes à la trajectoire des finances publiques jusqu’en 2019, mais il va de soi que le Haut Conseil ne saurait ignorer les conséquences macroéconomiques de l’évolution des finances publiques.

Permettez-moi de commencer par dire un mot du contexte macroéconomique actuel, étant entendu que le Haut Conseil ne produit pas ses propres prévisions mais qu’il s’appuie sur celles de plusieurs institutions internationales – la Commission européenne, le Fonds monétaire international (FMI) et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) – ainsi que de nombreuses institutions nationales comme l’INSEE, la Banque de France, l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) ou encore le Centre d’observation économique et de recherche pour l’expansion de l’économie et le développement des entreprises (COE-Rexecode).

Nous constatons une reprise européenne modérée dans un contexte de croissance mondiale ralentie. Le regain modéré de croissance qui s’observe depuis un an dans la zone euro et en France s’explique par trois facteurs concomitants : la baisse du prix du pétrole, la dépréciation de l’euro et la réduction des ajustements budgétaires. Gardons à l’esprit deux autres éléments de contexte favorables à la croissance : la politique monétaire de plus en plus expansive, d’où le niveau exceptionnellement bas des taux d’intérêt, et l’apaisement relatif des tensions sur les marchés, alors qu’elles pénalisaient les pays périphériques de la zone euro. De façon générale, ces évolutions se sont traduites par un regain de la demande intérieure européenne, c’est-à-dire de la consommation, mais aussi de l’investissement. Pour le Haut Conseil, il s’agit là du fait majeur de la conjoncture européenne récente. La demande intérieure a recommencé à croître en 2014 et progresse désormais à un rythme annuel moyen de près de 2 %.

Au cours des derniers mois, plusieurs autres facteurs favorables à la croissance européenne se sont renforcés. Tout d’abord, le prix du pétrole a de nouveau baissé de 15 dollars depuis l’été 2015, pour s’établir désormais à 40 dollars environ. Cette nouvelle baisse se répercute sur les prix à la consommation et contribue à l’amélioration du pouvoir d’achat des ménages et du taux de marge des entreprises. Ensuite, les politiques budgétaires en Europe n’exercent plus d’effets restrictifs à court terme et, en 2016, leur orientation globale devrait être neutre ou faiblement expansive. Plusieurs pays, en effet, relâchent leurs efforts après avoir retrouvé l’équilibre ou ramené leur déficit sous le seuil de 3 %. Enfin, la Banque centrale européenne a annoncé le 10 mars dernier un nouvel assouplissement de sa politique monétaire, qui a renforcé les pressions à la baisse sur les taux d’intérêt et leur convergence au sein de la zone euro.

En somme, la croissance de la zone euro pourrait se poursuivre, voire dépasser son rythme potentiel. Il existe en effet une capacité de rattrapage, comme le suggèrent les écarts de production négatifs constatés dans la plupart des pays de la zone euro.

Toutefois, des menaces sur la croissance mondiale perdurent et des risques spécifiques à l’Europe sont apparus. La croissance du commerce mondial en volume est tombée à des rythmes historiquement faibles : estimée à environ 2,5 % en 2015 contre 6,5 % par an en moyenne pendant les années 2000-2007, elle ne devrait se redresser que modérément en 2016. La croissance chinoise a nettement fléchi, et ce ralentissement s’accompagne d’une aggravation des risques financiers. La situation est très dégradée dans de nombreux pays émergents producteurs de pétrole et d’autres matières premières, particulièrement en Russie et au Brésil, où la récession devrait se prolonger en 2016. L’économie américaine, quant à elle, continue de croître à un rythme proche de 2,5 % par an et entre dans sa septième année de croissance consécutive, le chômage ayant retrouvé son niveau d’avant la crise. Étant donné la faiblesse des gains de productivité constatée depuis la crise, il existe cependant de fortes incertitudes concernant la capacité des États-Unis à maintenir leur rythme de croissance à moyen terme.

Enfin, d’autres risques importants pèsent plus spécifiquement sur l’Europe : la restauration des contrôles aux frontières, qui pénaliserait les échanges intra-européens, une éventuelle sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, mais aussi le relatif attentisme sans doute lié à certaines échéances électorales, en particulier le référendum britannique. Malgré les mesures de renforcement de la régulation financière prises ces dernières années, des facteurs de fragilité bancaire demeurent dans certains pays et pourraient être renforcés par la réapparition d’écarts de taux sur la dette des États. Ces risques, difficiles à quantifier, appellent à apprécier les perspectives de croissance avec prudence.

J’en viens plus en détail à la prévision pour 2016, puis pour les années 2017-2019. En ce qui concerne 2016, le Haut Conseil considère que la prévision de croissance du Gouvernement, bien qu’elle se situe en haut de la fourchette des prévisions économiques, reste atteignable. Dans son analyse des prévisions économiques, le Haut Conseil a l’habitude de distinguer trois éléments, qui sont les plus importants pour les finances publiques : la croissance de l’activité, l’emploi et la masse salariale, et, enfin, les prix à la consommation.

Le Gouvernement prévoit une croissance de 1,5 % en 2016, soit un taux inchangé par rapport à la prévision associée au projet de loi de finances pour 2016. Le Haut Conseil note que le Gouvernement a fortement revu à la baisse son hypothèse d’évolution en volume du commerce mondial pour 2016 par rapport au projet de loi de finances, l’estimant à 3,2 % au lieu de 5,2 %. Cette nouvelle hypothèse est légèrement inférieure à celles que retiennent les organisations internationales ; nous nous félicitons de cette évolution. Le Haut Conseil avait en effet souligné le caractère optimiste de cette prévision de croissance dans son avis rendu à l’occasion du projet de loi de finances pour 2016, et estime que la stabilisation des parts de marché à l’exportation constitue une hypothèse crédible, compte tenu des gains de compétitivité enregistrés récemment.

La demande intérieure devrait quant à elle bénéficier de certaines conditions favorables grâce à l’augmentation du pouvoir d’achat des ménages, en particulier, dans un contexte de taux d’épargne très élevé, et au redressement du taux de marge des entreprises, qui pourrait favoriser la reprise de l’investissement. En septembre dernier, le Haut Conseil avait considéré dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2016 que la prévision de croissance pour 2016 ne pouvait plus être qualifiée de « prudente » – comme elle l’avait été en avril 2015 – mais que, compte tenu de la demande interne et européenne, elle demeurait « atteignable ». Le Gouvernement a maintenu sa prévision de croissance alors que les organisations internationales ont généralement révisé les leurs à la baisse depuis l’automne. De ce fait, cette prévision se situe désormais dans le haut de fourchette par rapport aux consensus des économistes – prévision de 1,3 % selon le Consensus Forecast de mars – et aux organisations internationales – prévisions de 1,2 % pour l’OCDE, 1,3 % pour la Commission européenne et 1,1 % pour le FMI, qui a publié ses estimations hier. En revanche, les prévisions des organismes nationaux consultés sont plus contrastées : 1,6 % pour l’OFCE et 1,2 % pour COE-Rexecode.

Toutefois, le Haut Conseil considère que la prévision du Gouvernement est compatible avec les derniers comptes trimestriels et avec les prévisions à court terme présentées par l’INSEE dans sa note de conjoncture publiée à la fin mars. Les enquêtes de conjoncture restent bien orientées, même si elles sont en léger recul ces derniers mois ; c’est pourquoi nous estimons que l’objectif d’une croissance de 1,5 % demeure atteignable.

S’agissant de l’emploi, l’amélioration décrite par le Gouvernement est cohérente avec celle de l’activité, mais l’accroissement du nombre d’emplois prévu pour 2016 – une hausse de 130 000 emplois en moyenne annuelle dans le secteur marchand non agricole – semble élevé. Pour ce qui concerne la masse salariale privée, le Haut Conseil avait considéré comme élevée la prévision d’une augmentation de 2,8 % associée au projet de loi de finances pour 2016. Cette prévision est revue sensiblement à la baisse dans le programme de stabilité, en étant ramenée à 2,3 %, même si, compte tenu du dynamisme prévu de l’emploi, elle demeure supérieure aux prévisions de l’UNEDIC – 2,0 % en moyenne annuelle pour 2016 – et de l’ACOSS – 1,9 % en glissement annuel à l’issue du premier semestre 2016. En somme, le Haut Conseil estime que la prévision que fait le Gouvernement d’une augmentation de la masse salariale de 2,3 % en 2016 demeure un peu élevée.

Enfin, s’agissant des prix à la consommation, le Haut Conseil considère que la révision à la baisse opérée par le Gouvernement est justifiée et que la hausse des prix à la consommation en moyenne annuelle devrait être à peu près nulle en 2016. Dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2016, le Haut Conseil avait d’ailleurs estimé que l’inflation pouvait être inférieure à la prévision de 1,0 % alors retenue par le Gouvernement. Il ne peut donc que se réjouir de la présente révision à la baisse de cette prévision, le Gouvernement la ramenant à 0,1 % dans le programme de stabilité. Cette révision est pour l’essentiel la conséquence de la nouvelle baisse des cours du pétrole observée depuis l’été 2015. Nous estimons que la révision à la baisse de la prévision d’inflation du Gouvernement est justifiée, et que la hausse des prix à la consommation en moyenne annuelle devrait être à peu près nulle en 2016.

J’en viens aux prévisions pour les années 2017 à 2019 : le Haut Conseil estime que le scénario de croissance du Gouvernement pour cette période est plausible, même si l’hypothèse d’accélération de l’activité en fin de période est fragile. Il souligne l’importance des risques entourant ce scénario, qu’ils concernent la croissance mondiale ou qu’ils portent plus spécifiquement sur la zone euro.

Ces prévisions de moyen terme reposent notamment sur des hypothèses de croissance potentielle et d’écart de production. Les estimations de croissance potentielle retenues par le Gouvernement pour les années 2015 à 2018 sont identiques à celle du programme de stabilité d’avril 2015. Or, le Haut Conseil observe que la croissance potentielle présentée par le Gouvernement – soit 1,5 % pour les deux années 2016 et 2017 – est désormais nettement supérieure aux estimations des organisations internationales, qui se situent entre 1,1 % et 1,2 %, plusieurs ayant récemment été révisées à la baisse. De ce fait, le Haut Conseil considère que la croissance potentielle présentée par le Gouvernement est vraisemblablement surévaluée, en particulier pour 2016 et 2017.

L’écart de production découle de la croissance potentielle, puisqu’il correspond à la différence entre le niveau effectif et le niveau potentiel de la richesse nationale. Dans son avis rendu en avril 2015 à l’occasion du précédent programme de stabilité, le Haut Conseil s’est étonné du maintien d’un écart de production aussi creusé sur une aussi longue période. Il continue de considérer que ce maintien est peu vraisemblable. Il estime aussi, comme il l’avait déjà souligné à l’époque, qu’une « sous-utilisation aussi importante et aussi durable des facteurs de production ne s’accorde pas avec l’accélération de l’investissement et de l’inflation retenue dans le scénario du Gouvernement ».

Ces hypothèses d’écart de production ne sont pas neutres pour l’appréciation de la situation des finances publiques. En effet, le déficit structurel corrige le déficit effectif des effets de la conjoncture, lesquels sont évalués à partir de l’écart de production. Le Haut Conseil estime que l’hypothèse retenue par le Gouvernement d’un écart de production très important et supérieur à la plupart des estimations existantes tend à surestimer la composante conjoncturelle du déficit, et donc à sous-estimer le déficit structurel. Il souligne que cette sous-estimation amplifie en apparence l’effort structurel déjà réalisé et minimise l’effort à engager pour atteindre l’équilibre des finances publiques à moyen terme.

M. le président Gilles Carrez. Nombreux sont les membres de notre Commission qui apprécient l’étude de l’écart en solde effectif et solde structurel. Le Gouvernement lui-même, après avoir beaucoup insisté en début de législature sur le solde structurel, a désormais tendance à souligner davantage les excellents résultats liés au solde nominal. Certes, ces notions sont difficiles à manier, quoique le solde nominal ait un avantage, puisqu’il dépend de ce que l’État emprunte – or, chacun sait que nos problèmes futurs seront liés à la dette.

Le Haut Conseil s’inquiète à juste titre du fait que la réalité du déficit structurel est masquée non seulement par une appréciation trop optimiste de la croissance potentielle, d’où une surestimation du solde conjoncturel qui permet de diminuer d’autant le solde structurel, mais aussi parce que l’exécution du budget pour 2015, apparemment bonne puisque les objectifs ont été atteints et dépassés – le déficit s’établissant à 3,5 % contre une prévision de 3,8 % –, est aussi liée à des facteurs exceptionnels de grande importance. Le premier, qui n’est plus guère exceptionnel puisqu’il se reproduit tous les ans, tient aux taux d’intérêt : nous remplaçons chaque année 120 milliards de capital onéreux par un montant équivalent de dette nouvelle, ce qui fait plus qu’effacer le surcoût lié à l’augmentation de la dette – de l’ordre de 80 milliards d’euros supplémentaires par an.

M. Olivier Carré. Cette augmentation, elle, est bien structurelle !

M. le président Gilles Carrez. Or, si ce phénomène est récurrent, il ne saurait durer indéfiniment.

De plus, le solde excédentaire en 2015 des comptes spéciaux est tout à fait exceptionnel, comme l’est l’économie de plus de 1 milliard d’euros réalisée sur le prélèvement au profit de l’Union européenne.

Autrement dit, la satisfaction liée au solde effectif cache de réels motifs d’inquiétude concernant la pérennité de ces résultats.

M. Dominique Lefebvre. Le Haut Conseil, que je remercie pour la clarté de ses analyses, a été créé à la fin 2012 afin de remplir deux missions distinctes et importantes : la première consiste à analyser les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles sont fondées nos textes financiers – loi de finances, loi de finances rectificative ou loi de financement de la sécurité sociale – mais aussi, en l’occurrence, le programme de stabilité. La seconde consiste à vérifier la conformité des résultats budgétaires aux lois de la République, en particulier les lois de programmation des finances publiques.

Le programme de stabilité n’étant ni une loi financière ni un programme national de réforme, le moment ne semble pas venu de se prononcer sur le respect dans nos textes financiers de la trajectoire décidée dans la loi de programmation des finances publiques. Ayant relu les avis émis par le Haut Conseil en avril et septembre 2015 et sauf erreur de ma part, je constate d’ailleurs que cette trajectoire est tenue, qu’il s’agisse du déficit nominal ou du déficit structurel. Compte tenu des efforts structurels consentis en début de période, le niveau actuel de déficit structurel est inférieur à la trajectoire de la loi de programmation.

L’exécution du budget pour 2016 se présente peu ou prou de la même manière que celle de l’année précédente : les résultats sont liés à des facteurs structurels et d’autres conjoncturels, et les économies réalisées sur les dépenses permettent de financer des mesures nouvelles. De ce point de vue, le Gouvernement vient de décider l’augmentation de la réserve de précaution, ce qui me paraît opportun à cette période de l’année.

Quoi qu’il en soit, il me semble que c’est la première fois qu’une loi de programmation des finances publiques – comme c’est aussi le cas de la loi de programmation militaire – est respectée. Dans les années 2000, la Cour des comptes avait constaté que les résultats étaient parfois très éloignés des prévisions, l’une des causes principales de cet écart résidant dans la non-réalisation des hypothèses macroéconomiques. La droite comme la gauche avant elle ont eu tendance à équilibrer les lois de finances en s’appuyant sur des hypothèses macroéconomiques surestimées qui ne se vérifient pas concrètement. Ceux qui soutiennent le Gouvernement estimeront qu’il fait preuve de sérieux budgétaire ; ceux qui le contestent conviendront que le Haut Conseil nous permet de disposer d’hypothèses macroéconomiques convenables.

Le Haut Conseil a certes raison d’être prudent, mais il n’est pas plus inquiet que l’an passé, lorsqu’il s’interrogeait sur l’éventualité d’une reprise de l’investissement – laquelle s’est produite depuis. La situation internationale demeure toutefois tendue, ce qui devrait tempérer ceux qui se sont gaussés d’un prétendu effet de cagnotte. Il faut conserver des hypothèses prudentes, car elles ont un double effet essentiel sur le pilotage des finances publiques : elles contiennent des prévisions de recettes réalistes – or, les équilibres annuels dépendent avant tout de l’écart entre recettes effectives et recettes prévues, comme l’a montré la dégradation du déficit par rapport à la prévision pour 2013-2014 – et elles incitent à compenser les mesures liées à des priorités politiques et aux exigences du moment par des économies nouvelles.

Au fond, le seul véritable débat que pose cet avis du Haut Conseil, dont la pertinence sera ou non vérifiée par les faits, est celui de la croissance potentielle et de l’écart de production avec, en filigrane, la question suivante : ne faut-il pas consentir un effort structurel supplémentaire de maîtrise de la dépense publique ? À cet égard, je rappelle notre position : nous souhaitons accompagner la reprise de la croissance, qui reste timide – comme l’indique le Haut Conseil. Certes, la situation internationale produit des incidences sur cette évolution, mais la croissance française s’appuie sur la consommation des ménages. De même, la reprise de l’investissement est faible.

Il n’existe pas de bonnes et de mauvaises dépenses lorsque l’on entend maîtriser la dépense publique. Nos collègues de droite expliquent à l’envi que la baisse de la dotation aux collectivités locales, qui contribue pourtant à l’équilibre de l’exercice budgétaire, pénalise l’investissement ; au contraire, nous adoptons une trajectoire réaliste qui doit être durable. Je remercie de ce point de vue le Haut Conseil pour son avis, qui nous oblige à rester prudents et vigilants.

M. Hervé Mariton. Comment le Haut Conseil apprécie-t-il les hypothèses qui lui sont fournies sur l’évolution de l’investissement ? En effet, vous avez vous-même souligné combien les observations que vous faites sur la croissance potentielle peuvent conduire à remettre en cause ces hypothèses d’investissement. Or il me semble peu cohérent pour la gouvernance de nos finances publiques de s’appuyer sur des données qui, selon qu’elles proviennent de l’État, de l’UNEDIC ou de l’ACCOSS, sont significativement dispersées. Ne serait-il pas de la responsabilité du Haut Conseil d’appeler à davantage de convergence ?

Enfin, comment le Gouvernement justifie-t-il le chiffre de la croissance potentielle qu’il vous a soumis et dont vous soulignez qu’il est probablement surestimé ? Avez-vous les moyens, en amont du rapport, de l’interroger sur la manière dont il construit ces données, et comment analysez-vous sa méthode ?

M. Éric Alauzet. Pour la deuxième année consécutive, les prévisions de croissance à court terme sont stables. La surprise en revanche et, avec elle, son lot d’incertitudes, est venue du taux d’inflation, initialement évalué à 1 %, puis ramené à 0,1 %, ce qui va fragiliser l’équilibre budgétaire, puisque la réduction des dépenses publiques se calcule en tendance et que les économies budgétaires vont devoir être plus importantes que prévu.

En revanche, si la croissance à court terme est correctement évaluée, ce n’est pas le cas pour le moyen et long terme, puisque vous soulignez les risques de surestimation. Cette surestimation ne conduit-elle pas à une vision biaisée de l’articulation entre solde structurel et solde conjoncturel ; en d’autres termes, une partie du solde conjoncturel ne glisse-t-elle pas vers le solde structurel ?

Vous distinguez entre croissance réelle et croissance potentielle, mais, si l’on songe qu’une large part de cette croissance, déjà faible, est détournée de l’activité économique et des ménages par l’évasion fiscale et qu’une autre partie est captée par des opérations de réparation sociale, sanitaire ou environnementale, ne vaudrait-il pas mieux parler de croissance vécue ?

M. Christophe Caresche. La croissance serait, selon l’avis du Haut Conseil, davantage liée à la reconstitution des stocks qu’à une progression de la demande. Pourriez-vous nous en dire plus sur ce point ? En effet, cette analyse rend plutôt crédibles les prévisions du Gouvernement en matière de croissance potentielle, dans la mesure où celle-ci dépendrait moins de la demande que de l’investissement, ce qui correspond aux orientations politiques de l’exécutif, qui a mis en place des instruments visant à restaurer les marges des entreprises.

Quant à la stratégie qu’il convient d’adopter pour accompagner la sortie de crise, ne pensez-vous pas, dans la mesure où la légère reprise de la croissance que connaît la zone euro s’explique par la réduction des ajustements budgétaires, qu’il conviendrait de considérer l’objectif de réduction des déficits budgétaires avec la plus grande prudence ?

M. Patrick Hetzel. Dans la construction de son budget pour 2016, le Gouvernement tablait sur un fort rebond de l’investissement des entreprises, censé augmenter de 4,9 %, après avoir augmenté de 2,5 % en 2015. Or les documents que vous nous avez remis font état d’une progression de 3,2 % : que pouvez-vous dire de cet écart assez conséquent ?

De même, le Gouvernement prévoyait que le taux de marge des entreprises s’élèverait à 31 %, tandis que vos estimations le situent autour de 24 %. Il y a là encore un différentiel important qui confirme que le Gouvernement a eu tendance à surestimer certaines performances.

M. Régis Juanico. Vous estimez plausible que la croissance atteigne 1,5 % en 2016, mais le Haut Conseil a-t-il mené des études pour connaître le niveau de croissance à partir duquel notre pays créera des emplois nets supplémentaires ?

Quels seraient par ailleurs, selon vous, les effets macroéconomiques à long terme d’un taux d’inflation quasi nul ? Je pense, entre autres, au fait que la revalorisation des bases locatives s’effectue chaque année sur une hypothèse d’inflation à 1 %.

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous avez évoqué le contexte mondial, la menace du Brexit et les risques liés à l’évolution des taux de change. Qu’en est-il de la Grèce, et quelles pourraient-être les conséquences d’une nouvelle révision du plan de sauvetage et des taux d’intérêt ?

Parmi les éléments dont nous n’avons pas la maîtrise mais qui déterminent l’évolution de notre déficit, vous avez mentionné les cours du pétrole, sachant que la baisse du prix du baril, favorable à la fois aux entreprises et aux ménages, a un impact positif sur notre économie mais qu’il a en revanche un impact négatif sur les pays exportateurs de pétrole et de matières premières, comme la Russie ou le Brésil. Dans ces conditions, peut-on poursuivre une politique de baisse des cours, sachant que cela aura in fine des répercussions sur l’économie européenne ?

Pour en revenir à la France, le Gouvernement a dû, en toute logique, revoir à la baisse ses prévisions d’inflation, mais il est à craindre que cela freine la réduction du déficit nominal, puisque l’État présente désormais l’évolution de sa masse budgétaire selon des normes tendancielles. Or un taux d’inflation quasi nul marque les limites de cet exercice auquel se livre l’État.

Enfin, vous validez le fait qu’en 2016 la consommation publique puisse contribuer à hauteur de 1 point à la croissance. Ce chiffre intègre-t-il la mesure de la baisse colossale de l’effort d’investissement des collectivités territoriales ?

M. Alain Chrétien. Le Gouvernement s’est félicité d’avoir ramené en 2015 les déficits publics à 3,5 % du PIB au lieu des 3,8 % initialement prévus, et ce, notamment, grâce à des taux d’intérêt plus faibles que prévu. L’État cependant emprunte toujours autant sur les marchés financiers, soit près de 190 milliards d’euros pour cette année, ce qui m’amène à m’interroger sur les incidences d’une éventuelle hausse des taux d’intérêt. On sait en effet que, contrairement à la dette japonaise, la dette française est aujourd’hui essentiellement propriété de fonds étrangers. Or, ce qui permet d’apprécier si l’État engage réellement des réformes de structure, ce n’est pas le coût de la dette mais son renouvellement et l’analyse du stock. Le Haut Conseil et la Cour des comptes ont-ils procédé à des examens en la matière ?

M. Guillaume Bachelay. Vous jugez sérieuses les prévisions de croissance du Gouvernement. Par ailleurs, alors que nous nous livrions l’an dernier au même exercice qu’aujourd’hui, Charles de Courson s’était inquiété de la faiblesse du redressement du taux de marge des entreprises, estimant que cela pesait lourd sur la croissance ; vous soulignez au contraire le rétablissement de ce taux de marge, passé de 31 % en 2011 à 39 % selon l’OFCE, grâce à la baisse des prélèvements et à celle des taux d’intérêt. C’est le plus haut niveau jamais atteint depuis 1980, singulièrement dans le secteur industriel. L’enjeu est de taille pour nos investissements, mais quelles pourront en être les conséquences en termes de création nette d’emplois, sachant qu’en 2015, l’économie française a créé 100 000 emplois dans le secteur privé ?

Enfin, M. Pébereau et d’autres économistes que nous avons auditionnés il y a quelques semaines ont insisté sur le fait que le niveau de la base monétaire mondiale est passé de 15 % en 2007 à 28 %. Vous évoquez la volatilité des marchés financiers, mais comment évaluez-vous le risque d’apparition de bulles obligataires dans un tel contexte ?

Mme Véronique Louwagie. Je reviens sur les divergences d’évaluation du niveau de croissance que nous sommes susceptibles d’atteindre cette année, le Gouvernement maintenant sa prévision initiale à 1,5 %, le FMI la baissant à 1,1 % et l’OFCE tablant sur 1,6 %, grâce notamment à l’effet pétrole, le prix du baril s’établissant début mars à 38 dollars, ce qui permet un surcroît de 0,1 % de croissance en moyenne annuelle.

Une étude du Trésor publiée lundi insiste sur les effets positifs à court terme de cette baisse du pétrole mais souligne en revanche qu’à moyen terme cette diminution pourrait induire des effets de « second tour », comme une moindre progression des salaires et une moindre progression des prestations indexées sur l’inflation, ce qui pourrait avoir des effets sur la consommation des ménages. Les travaux du Haut Conseil tiennent-ils compte de ces effets ?

D’autre part, le déficit commercial de la France s’est fortement creusé en février, pour atteindre 5,2 milliards d’euros – soit le solde mensuel le plus négatif depuis août 2014, époque à laquelle le baril de pétrole valait environ 100 dollars. Or, selon le programme de stabilité, les échanges extérieurs ne pèseraient négativement que pour 0,3 % dans l’évolution de la croissance du PIB, soit un taux identique à celui de 2015. Au regard de nos performances commerciales, je m’interroge donc évidemment sur ce chiffre.

M. Olivier Carré. Les prévisions de croissance fournies par les différentes institutions correspondent-elles au taux de croissance potentielle de la France ou au niveau de croissance anticipé d’après la conjoncture ?

En ce qui concerne la dette de l’État, son volume, même s’il a légèrement diminué en fin d’année dernière, reste très élevé puisqu’il se monte à 1 681 milliards d’euros ; c’est, en quelque sorte, une donnée structurelle. Son impact sur les finances publiques est lié quant à lui à l’évolution conjoncturelle des taux d’intérêt. Pour réellement mesurer les effets de conjoncture dont bénéficie l’État, il faudrait calculer le poids des intérêts de la dette au taux moyen de 3 ou 3,5 %, ce qui correspond aux taux à long terme. Cela donnerait un coût d’environ 60 milliards d’euros, chiffre à mettre en regard des 40 milliards inscrits en loi de finances, qui montre bien que nous bénéficions, avec la baisse des taux, d’un avantage conjoncturel favorable. Au-delà de cet avantage, il me paraît pourtant essentiel d’en revenir aux données structurelles, car il y a tout lieu d’anticiper une hausse des taux longs.

M. Laurent Wauquiez. Vous avez vous-même relevé que nous avions bénéficié d’un climat extrêmement favorable, compte tenu de la baisse des cours du pétrole et des taux d’intérêt. Comment expliquez-vous dans ce cas que la France en ait si peu profité et que cela transparaisse si peu dans les perspectives de croissance pour 2016 ?

Vous ne vous êtes pas attardé sur les comparaisons avec les autres pays de la zone euro. Or, sauf erreur de ma part, comparées à celles de l’Allemagne, des Pays-Bas, du Royaume-Uni ou de l’Espagne, les performances de la France sont accablantes. Comment l’expliquez-vous ?

M. Nicolas Sansu. Je voudrais rappeler à nos collègues qui s’interrogent sur le poids de la dette que nous menons actuellement avec Jean-Claude Buisine et Jean-Pierre Gorges une mission d’évaluation et de contrôle sur la transparence et la gestion de la dette publique, qui nous permettra de clarifier certains points. Il est vrai notamment que la dette se finance aujourd’hui sur les marchés financiers et que sa réinternalisation est une vraie question, mais je rappelle que la Banque centrale européenne rachète 70 % des titres de dettes sur le second marché, ce qui est un facteur de stabilité, même si nous ignorons combien de temps encore elle va poursuivre sa politique de quantitative easing et continuer de déverser des flots de milliards d’euros pour racheter de la dette publique ou privée.

Une remontée de 1 % des taux d’intérêt ne signifie pas que tout le stock de dette monterait d’un coup et que cela représenterait d’emblée un coût supplémentaire de 20 milliards d’euros. En réalité, l’augmentation serait de 2 milliards la première année, de 3,5 milliards la deuxième année, et ainsi de suite.

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Nombre de vos questions ne concernent pas le président du Haut Conseil des finances publiques que je suis ici, mais davantage le Premier président de la Cour des comptes, et j’aurai l’occasion de revenir sur un certain nombre de sujets lorsque je viendrai vous présenter le rapport sur l’exécution du budget de l’État et le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques.

Les questions en particulier que vous avez posées sur la dette ou sur les performances de la France au regard de celles des autres membres de la zone euro ne nous concernent pas aujourd’hui.

M. Laurent Wauquiez. C’est une réponse facile : vous les évoquez dans les documents que vous nous avez remis !

M. Didier Migaud. Non, ce n’est pas de la facilité, monsieur Wauquiez, mais il y a un temps pour tout, et nous disposons en France de deux institutions faisant office de comités budgétaires indépendants conformément aux exigences européennes : la Cour des comptes et le Haut Conseil des finances publiques, ce dernier ayant une mission relativement restreinte et très encadrée consistant à exprimer un avis sur les hypothèses macroéconomiques de l’État. Il n’est ainsi pas dans notre champ de compétences d’évaluer le bon niveau de croissance pour la création d’emplois.

Nous n’employons plus le terme « prudent », monsieur Lefebvre. Nous l’utilisions mais nous avons expliqué dans un avis récent que nous ne qualifiions plus de prudente la prévision du Gouvernement sur la croissance pour 2016. Nous constatons d’ailleurs que cette prévision se situe dans le haut de la fourchette ; elle est supérieure aux estimations présentées par les organisations internationales, de 1,5 %, même si l’OFCE prévoit quant à elle une croissance de 1,6 %. Nous considérons, compte tenu notamment des comptes trimestriels et des enquêtes de conjoncture, que l’hypothèse reste atteignable, mais nous ne la qualifions pas de « prudente ».

M. le président Gilles Carrez. Tout est dans la nuance !

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. La loi de programmation, ensuite, est d’autant plus facile à respecter qu’elle a été fortement revue à la baisse. Nous pourrons donc vraisemblablement constater qu’elle est respectée. La Commission européenne a accepté ces révisions dans le cadre d’un accord politique avec le Gouvernement.

Sur l’évolution de l’investissement, nous avions dit que l’hypothèse retenue l’an dernier par le Gouvernement était optimiste. La réalité nous donne raison, même si nous observons une reprise modérée de l’investissement depuis un an. Cette reprise est la conséquence d’une reconstitution des marges des entreprises et d’une demande plus forte. Elle est de 2 % en 2015 et devrait être, d’après les enquêtes, de 3,2 % en 2016. Nous avons donc une appréciation plus positive qu’il y a un an, l’année 2015 ayant été meilleure que prévu, même si elle n’a pas atteint le résultat anticipé par le Gouvernement.

Les estimations de l’UNEDIC et de l’ACOSS sur l’évolution de la masse salariale sont, avec 0,1 point d’écart, proches l’une de l’autre ; c’est plutôt le Gouvernement qui s’éloigne, puisqu’il est à 2,3 %. Nous avions considéré, au moment de la loi de finances pour 2016, que son hypothèse était très élevée. Il la corrige, nous donnant ainsi raison, mais la correction nous semble encore insuffisante.

La surestimation de la part conjoncturelle, monsieur Alauzet, peut en effet biaiser l’appréciation de la situation des finances publiques. Une partie du conjoncturel peut davantage relever du structurel : le dernier paragraphe de l’avis l’indique clairement.

Nous avons un débat avec le Gouvernement sur la croissance potentielle, et ce n’est pas un débat facile car il existe des désaccords réels entre économistes. Le Gouvernement, pour mettre un terme aux débats, a retenu l’hypothèse de croissance potentielle qu’avait à un moment fixé la Commission européenne. Le problème, c’est que la Commission, entre-temps, a révisé son estimation à la baisse et que non seulement le Gouvernement n’a pas suivi mais il a aussi augmenté son hypothèse de 0,2 %, correspondant à l’estimation qu’il fait des conséquences sur la croissance des réformes notamment contenues dans la « loi Macron ». Cette nouvelle hypothèse n’est pas documentée par le Gouvernement.

M. le président Gilles Carrez. Nous verrons tout à l’heure.

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Le Gouvernement pourra peut-être la documenter davantage que cela n’a été le cas jusqu’à présent.

Cela explique que l’estimation du Gouvernement apparaît aujourd’hui très haute. Cette hypothèse permet d’ailleurs de présenter une évolution du solde structurel plus favorable qu’elle ne l’est sans doute en réalité.

Le temps de l’ajustement ne relève pas du Haut Conseil des finances publiques, mais des responsables politiques.

Le déficit commercial est moins important qu’il n’a pu l’être, mais sa permanence traduit la difficulté de l’appareil productif français à répondre à l’augmentation de la demande. C’est tout le sujet des réformes structurelles et de la compétitivité hors coût, où notre pays a encore des marges de progrès.

Le débat sur le solde structurel et la croissance potentielle peut apparaître très théorique. Ces notions sont intervenues lorsque des situations de crise ont nécessité de ne plus raisonner seulement en fonction de la conjoncture mais aussi en termes structurels. Au moment où la croissance revient, il convient de ne pas abandonner ce raisonnement, car il est important d’améliorer le solde structurel afin de se redonner des marges de manœuvre au cas où une crise surviendrait de nouveau.

M. le président Gilles Carrez. Comme l’a dit Dominique Lefebvre, il n’y a pas de cagnotte.

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Il est difficile de considérer qu’il y a une cagnotte, vu le niveau de déficit de nos comptes publics. Je n’ai d’ailleurs jamais compris comment on avait pu parler de cagnotte à l’époque sans que cela ne suscite aucun commentaire. Nous sommes en déficit permanent depuis quarante ans. De temps en temps, des recettes rentrent mieux que prévu, mais cela ne constitue pas une cagnotte, compte tenu de la nécessité de rembourser la dette.

M. François Monier, rapporteur général du Haut Conseil des finances publiques. Dans l’avis, nous avons produit un petit encadré afin de clarifier la question des stocks, alors que nous n’en parlons pas habituellement, dans la mesure où c’est quelque chose d’extrêmement incertain.

Sur les deux derniers trimestres de 2015, les comptes trimestriels font apparaître des stocks importants. Une analyse montre que ce sont plutôt des stocks de croissance, c’est-à-dire constitués en vue d’exportations ultérieures, par exemple dans l’aéronautique : la France étant au bout de la chaîne de fabrication des Airbus, elle importe avant d’exporter. Ces stocks ne sont pas accumulés involontairement, ils vont contribuer à la croissance future.

Il est prévisible que les comptes trimestriels des deux derniers trimestres soient révisés dans un futur proche et que cette partie « stocks » soit réduite au profit d’autres éléments de demande. Au moment de dresser les comptes trimestriels, on connaît la production et certains éléments de demande. Quand on ne parvient pas à expliquer intégralement l’augmentation de la production, cela s’impute en stocks, mais il arrive souvent que des éléments nouveaux permettent une meilleure imputation par la suite. Il est donc possible que ces stocks se dégonflent en partie.

Le PIB est plus assuré que les stocks, c’est-à-dire que nous n’en avons pas déduit une remise en cause de la production en 2015 ni en 2016. Les données et prévisions sur la croissance nous paraissent mieux assurées.

S’agissant des prévisions d’emploi, deux effets jouent sur les années 2015 et 2016. Tout d’abord, nous sommes dans une période de redémarrage et, traditionnellement, quand la croissance repart après une période de stagnation, l’emploi ne reprend pas aussi vite que la production, parce que des effectifs ont été conservés en surnombre durant la période de stagnation. En revanche, les réformes, notamment le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi ainsi que les baisses de charges, jouent positivement. Ces deux effets se compensent en partie. Au total, nous avons constaté en 2015 un début de redémarrage de l’emploi de 1,2 %. Dans les prévisions du Gouvernement, la reprise, compte tenu de ces deux effets, est de 1 %. Avec 1,5 % de croissance du PIB, notre économie crée de l’emploi. Néanmoins, comme notre président l’a dit, nous considérons que les estimations par le Gouvernement des effets bénéfiques des réformes sont sans doute un peu hautes.

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AUDITION DE MM. EMMANUEL MACRON, MINISTRE DE L’ÉCONOMIE, DE L’INDUSTRIE ET DU NUMÉRIQUE, ET CHRISTIAN ECKERT, SECRÉTAIRE D’ÉTAT CHARGÉ DU BUDGET

Lors de sa séance du 13 avril 2016 à 12 heures, la commission a entendu M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, et M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget, sur le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 et le programme national de réforme.

M. le président Gilles Carrez. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous venez nous présenter le programme de stabilité, ainsi que le programme national de réforme (PNR), adoptés tous deux en Conseil des ministres ce matin.

Mme la Rapporteure générale, Valérie Rabault, en déplacement à l’étranger, nous prie de l’excuser de ne pouvoir être parmi nous. Elle établira néanmoins un rapport, qui sera disponible la semaine prochaine, et qui servira de base à un débat en séance publique le 26 avril prochain. Je remercie les groupes Socialiste, républicain et citoyen et Radical, républicain, démocrate et progressiste d’avoir pris cette initiative – le Gouvernement ne l’a pas fait, et je le regrette. Il aurait été possible cette année, comme en 2011, en 2013 et en 2014, d’organiser un débat au titre de l’article 50-1 de la Constitution. Cela aurait donné un peu de solennité à l’exercice, et cela aurait été d’autant plus utile que le Gouvernement nous a confirmé qu’il n’y aurait pas de collectif budgétaire de milieu d’année. Ces sujets méritent de vrais débats.

Avant de vous donner la parole, monsieur le secrétaire d’État, je salue la présence parmi nous de Mme Danielle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget. Monsieur le président de la commission, madame la présidente de la commission des affaires européennes, mesdames et messieurs les députés, les questions de calendrier sont toujours complexes. L’Assemblée nationale ne siège pas cette semaine, nous en sommes bien conscients. Mais nous étions tenus par les délais de transmission des documents, en amont au Haut Conseil des finances publiques, en aval à la Commission européenne. L’usage selon lequel le programme de stabilité est présenté à votre commission aussitôt après le Conseil des ministres qui l’adopte est ainsi respecté, et nous vous remercions de votre présence aujourd’hui.

Nous vous prions d’excuser Michel Sapin, qui vient de s’envoler vers Washington pour assister au G20 des ministres des finances.

Ce programme de stabilité, qui est bien sûr entièrement cohérent avec le programme national de réforme que vous présentera Emmanuel Macron, retrace les grandes orientations économiques et budgétaires de la France et participe à la coordination de ces politiques économiques au sein de l’Union européenne. Avant de l’adresser à la Commission européenne et à nos partenaires d’ici à la fin du mois, nous aurons l’occasion d’en débattre en séance publique mardi 26 avril, comme vous l’avez rappelé, monsieur le président.

Vous constaterez que ce document recèle peu de nouveautés : nos grandes orientations économiques et budgétaires n’ont pas changé car seule la constance, dans les objectifs et dans la méthode, permet d’obtenir des résultats tangibles et durables.

La constance dans la politique fiscale, c’est la poursuite des baisses d’impôts. Après avoir totalisé 24 milliards d’euros en 2015, le pacte de responsabilité représentera, avec le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), 34 milliards de baisses de cotisations et de fiscalité pour les entreprises en 2016. Ces allégements massifs soutiennent la production et l’emploi ; ils sont décisifs pour la prospérité du pays.

La constance dans la politique budgétaire, c’est la poursuite de la réduction du déficit grâce au plan d’économies de 50 milliards sur trois ans annoncé en 2014. Tous les organismes publics sont associés à cet effort, et toute dépense nouvelle est financée par des économies à due concurrence. C’est la condition pour mettre en œuvre les baisses de prélèvements tout en nous donnant les moyens d’agir pour financer nos priorités, comme pour réagir lorsque de nouveaux besoins se font sentir dans le courant d’un exercice budgétaire.

Comme nous l’avions anticipé, l’environnement macroéconomique s’améliore progressivement. Cette tendance devrait se poursuivre.

La croissance s’est installée sur des bases solides en 2015 : elle a atteint 1,2 %, dépassant l’objectif initial de 1 % que certains jugeaient pourtant optimiste. Cette dynamique, portée par la consommation et l’investissement, pourrait s’accélérer en 2016.

Les ménages voient leur pouvoir d’achat progresser fortement, grâce à la politique de modération fiscale ainsi qu’à la baisse du prix du pétrole : il a augmenté de 1,8 % l’an dernier. C’est sa plus forte progression depuis 2007, et il devrait rester dynamique en 2016 et 2017. En conséquence, la consommation progresse : après une hausse de 1,4 % l’an dernier, elle devrait croître de 1,6 % par an en 2016 et 2017.

Les entreprises voient leurs marges se redresser : c’est une étape nécessaire pour investir et produire en France. Ainsi, leur taux de marge a déjà repris les deux tiers du chemin perdu avec la crise, pour atteindre 31,4 % à la fin de l’année 2015. Avec le déploiement complet du pacte de responsabilité, le taux de marge reviendra à son niveau moyen d’avant crise. Tout cela crée les conditions d’une accélération de l’investissement des entreprises : après avoir progressé de 2 % l’an dernier, il devrait augmenter de plus de 3 % en 2016.

Dans ce contexte, l’économie française a renoué avec les créations d’emploi dans le secteur privé en 2015, avec 100 000 emplois créés. Ce rythme devrait s’accélérer dès cette année, grâce au renforcement de la reprise et au déploiement du plan d’urgence pour l’emploi.

En 2015, la croissance s’est donc affermie, marquant la première année de reprise économique effective.

Pour 2016, les derniers développements conjoncturels sont cohérents avec notre prévision de 1,5 % de croissance. Le Haut Conseil des finances publiques a rendu ce matin son avis sur les prévisions macroéconomiques associées au programme de stabilité et il considère cette prévision comme « atteignable ». Maintenir cette ancre permet d’assurer une stabilité essentielle à la conduite sereine de la politique budgétaire.

La seule modification majeure que contient ce document concerne l’inflation : alors que notre prévision était de 1 % pour 2016 à l’automne, elle devrait être à nouveau quasiment nulle cette année – 0,1 % selon nos prévisions – avant de revenir progressivement vers sa cible de 2 %. C’est la nouvelle baisse du prix du pétrole depuis janvier qui entraîne un redressement de l’inflation plus lent que prévu.

Si la situation s’améliore sur le front de l’économie, elle s’améliore aussi sur le front des finances publiques.

Permettez-moi de revenir tout d’abord sur l’année 2015. Le passé éclaire l’avenir, j’en suis persuadé, et les similitudes entre 2015 et 2016 ne manquent pas. Ce que nous avons réussi l’an dernier, nous pouvons le réussir cette année – la méthode a fait ses preuves.

Les résultats de 2015 sont meilleurs que prévu : le déficit s’établit à 3,5 % du PIB ; c’est mieux que ce que nous avions anticipé.

Les dépenses ont diminué de 1,4 milliard d’euros d’exécution à exécution – je pense que vous êtes sensible à ce point, monsieur le président : ce ne sont pas là des tendances. C’est le résultat d’une gestion réactive du budget : tout au long de l’année, nous avons su dégager de nouveaux moyens pour agir. Cette année, nous ferons de même : toute dépense nouvelle sera financée, à commencer par le plan emploi, le plan d’urgence en faveur des agriculteurs et les mesures en faveur de la jeunesse. Concrètement, ces dépenses seront financées par deux moyens principalement : la réserve de précaution a été augmentée de 1,8 milliard d’euros par le gel des crédits reportés de 2015 à 2016, et elle atteint aujourd’hui un peu plus de 11 milliards d’euros ; prochainement, un décret d’avance va gager les dépenses sur l’emploi par des économies supplémentaires.

Les comptes de la sécurité sociale se sont également améliorés en 2015. En quatre années, le déficit du régime général a été divisé par trois, enregistrant son niveau le plus bas depuis 2002. Là encore, ces bons résultats viennent de la maîtrise de la dépense : la progression des dépenses d’assurance maladie a été contenue à 2 %, niveau historiquement bas. Cette année encore, nous allons poursuivre cet effort ; l’objectif voté – 1,75 % – est ambitieux. L’avis du Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie publié aujourd’hui confirme que nous pouvons l’atteindre.

Les élus locaux se sont également emparés du sujet du rétablissement des comptes publics. Permettez-moi de vous rappeler les faits : la dépense locale a ralenti, dépenses de fonctionnement comme dépenses de personnel, et les recettes ont progressé plus vite que les dépenses. La politique budgétaire du Gouvernement se révèle efficace : pour la première fois depuis 2003, le solde des administrations locales est excédentaire ! Cette année encore, grâce au mouvement désormais enclenché, la maîtrise de la dépense sera poursuivie et cette situation financière globalement bonne permettra aux collectivités de relancer leurs investissements : en 2015, les collectivités ont augmenté leurs dépôts sur le compte du Trésor ; elles ont donc mis de l’argent de côté et disposent des marges nécessaires pour relancer l’investissement.

En 2016 comme en 2015, nous prenons aussi des mesures complémentaires pour absorber l’impact négatif de la faible inflation sur les finances publiques : 3,8 milliards d’économies complémentaires vont être réalisées en 2016, au-delà du financement des dépenses nouvelles. En voici le détail précis : après financement des mesures nouvelles, les dépenses de l’État et des opérateurs seront diminuées d’un milliard d’euros ; un autre milliard d’économies sera également réalisé sur les dépenses sociales, avec notamment la pérennisation des économies constatées en 2015 ; enfin, 1,8 milliard d’euros seront économisés grâce à de moindres dépenses sur la charge d’intérêts. Cette dernière économie est permise par la seule révision à la baisse des taux d’intérêt – le taux à dix ans à la fin 2016 est désormais prévu à 1,25 %, contre 2,4 % en loi de finances initiale.

Pour 2017, les orientations fixées par ce programme de stabilité sont constantes et inchangées : poursuivre la réduction du déficit pour qu’il repasse en deçà de 3 %, continuer à baisser les impôts et financer tout cela par des économies. C’est ce que nous faisons depuis deux ans et c’est ce que nous continuerons à faire jusqu’à la fin du quinquennat.

J’en viens maintenant à la description un peu plus agrégée de notre trajectoire : le taux de progression de la dépense publique en 2014 et en 2015 a été limité à environ 1 %. Cette progression sera maintenue à un niveau similaire en 2016 et en 2017. Sur ces quatre années, nous avons engagé une vraie rupture avec le passé car la dépense avait progressé en moyenne de 3,2 % entre 2007 et 2012.

S’agissant des recettes, le taux de prélèvements obligatoires a baissé en 2015 pour la première fois depuis 2009. La baisse va se poursuivre ; nous atteindrons 44 % en 2017, avec le déploiement des baisses d’impôts du pacte de responsabilité et de solidarité.

Le résultat d’un déficit qui se réduit et d’une croissance qui repart, c’est une dette qui se stabilise. Celle-ci n’aura progressé que de 0,4 point en 2015 pour atteindre 95,7 % du PIB. C’est bien peu quand l’on regarde le rythme de progression de la dette depuis 2007.

Après avoir augmenté fortement depuis 2008, la dette est aujourd’hui quasi stabilisée. Maîtriser ainsi nos grands équilibres, c’est également la condition pour préserver la qualité de la signature de la France et se financer à bas coût. La semaine dernière, nous avons emprunté à dix ans à un taux de 0,43 % – c’est un record. Cette semaine même, nous avons réalisé une émission à maturité de cinquante ans à 1,9 %, événement rare, puisque la dernière opération de ce type avait eu lieu en 2010, à un taux de 4,2 %.

Ces bonnes conditions de financement nous permettront de dépenser à nouveau moins au titre des charges d’intérêts en 2016 qu’en 2015 – 43,1 milliards d’euros contre 44,1 milliards pour l’ensemble des administrations. Et comme il est d’usage, nos prévisions de taux d’intérêt restent prudentes : 1,25 % fin 2016, et 2 % fin 2017.

Depuis 2012, le Gouvernement et la majorité assument la responsabilité d’apurer des années de laisser-aller budgétaire : si nous n’avions rien fait, le déficit public se serait établi à près de 7 %. Au lieu de cela, il a été divisé par deux depuis le pic de la crise et il sera ramené sous les 3 % à horizon 2017.

Pour la première fois depuis l’année 2000, nous avons l’an dernier baissé à la fois le déficit et le taux de prélèvements obligatoires.

Voilà les éléments du débat passionné que nous ne manquerons pas d’avoir.

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Je viens pour ma part, comme chaque année, vous présenter le programme national de réforme, dans la continuité de ce que Christian Eckert vient de vous indiquer. J’évoquerai aussi ses premiers résultats – notre débat de l’an dernier avait, je m’en souviens, porté notamment sur leur évaluation.

Ce programme national de réforme comprend quatre axes principaux.

Il s’agit tout d’abord d’assurer la soutenabilité et la qualité des finances publiques. Cet aspect vient d’être détaillé, et je n’y reviens pas. Certaines de nos réformes – celles qui concernent, par exemple, les retraites et les retraites complémentaires – ont permis d’améliorer la soutenabilité de long terme de nos finances publiques. On connaît les éléments conjoncturels qui nous sont favorables, le niveau des taux d’intérêt par exemple ; il faut poursuivre nos réformes structurelles.

Le deuxième axe, c’est la poursuite du redressement de la compétitivité et de la productivité, mais aussi de l’amélioration de l’environnement des entreprises.

Cette amélioration passe par celle de la compétitivité-coût ; si les marges des entreprises étaient si basses, c’est aussi parce que pendant une décennie nous avons progressivement dérivé – non pas tant sous l’effet de décisions gouvernementales, mais en raison d’une dynamique salariale très décorrélée entre les principales économies de la zone euro. Nous avions donc perdu en compétitivité ; c’est pourquoi nous avons pris des mesures destinées à corriger cet état de fait, à commencer par le pacte de responsabilité et le CICE. Elles fonctionnent, puisque les marges s’améliorent, comme l’a dit Christian Eckert. Dans le PNR, nous faisons notamment état de notre volonté de pérenniser le CICE, par sa transformation en baisse durable de cotisations sociales, de la mise en œuvre du dernier volet du pacte – un peu de 6 milliards d’euros d’allégements de charges complémentaires résulteront de son entrée en vigueur au 1er avril, avec un ciblage important pour la compétitivité de l’industrie, puisque les charges seront allégées jusqu’à 3,5 SMIC – et de la poursuite de la suppression progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S). Cette stratégie en matière de compétitivité-coût comprend une composante conjoncturelle, avec en particulier le dispositif « embauche PME », qui vient accélérer et accompagner la reprise ; il devrait permettre de créer 60 000 emplois supplémentaires d’ici à la fin 2016.

La compétitivité revêt également une dimension hors coût : ce qui importe, c’est de réussir une différenciation de l’offre, une montée en gamme tant de la production que de la formation, afin de désensibiliser notre économie à la concurrence des pays à bas coût et de conquérir de nouveaux marchés.

Le Gouvernement apporte donc son aide à la recherche et développement et à l’innovation. Les derniers chiffres de l’attractivité confirment que cette stratégie est bonne. Nous avons notamment pérennisé le crédit d’impôt recherche et prorogé pour un an le dispositif de suramortissement mis en place en 2015 – qui permet d’amortir 140 pour une décision d’investissement productif de 100. À cela s’ajoutent les mesures prises en matière de simplification de la vie des entreprises.

Ces mesures seront complétées par des dispositions structurantes pour l’entrepreneuriat. Certaines seront comprises dans le projet de loi présenté par Michel Sapin. Il s’agit de faciliter la création d’entreprises, notamment en poursuivant le mouvement de simplification des exigences de qualification pour chaque métier, tout en continuant naturellement de protéger la santé et la sécurité de tous. Il s’agit également de faciliter la croissance des entreprises, en simplifiant le passage du régime fiscal et social de la micro-entreprise au régime de droit commun, et en allégeant autant que faire se peut les obligations et les procédures. Enfin, l’amélioration de l’environnement économique passe par les simplifications en matière de numérique et par l’ouverture des données. La loi pour la croissance et l’activité a pris des mesures pour plusieurs secteurs ; ce mouvement sera poursuivi par voie réglementaire comme par voie législative, avec le projet de loi pour une République numérique. Il s’agit par exemple de donner une valeur juridique probante aux documents numériques. Nous amenderons également le projet de loi pour y inclure de nouvelles mesures visant à ouvrir les données dans les secteurs de l’énergie et du foncier notamment.

Le troisième axe concerne le fonctionnement du marché du travail.

Depuis 2012, nous avons adopté des réformes visant à permettre à nos entreprises de s’adapter à une conjoncture incertaine : nous avons ainsi, en 2013, réformé les plans de sauvegarde de l’emploi (PSE), à la suite de la signature de l’accord national interprofessionnel (ANI) ; nous avons également mis en place, en 2013, les accords de maintien dans l’emploi, qui ont été réformés et simplifiés en 2015.

Nous prenons également des mesures destinées à offrir plus de protections et à améliorer la qualité des accompagnements offerts aux salariés comme aux demandeurs d’emploi, dans un environnement où la fréquence des transitions professionnelles s’accélère : je pense à la portabilité des droits, à la réforme de la formation professionnelle, à l’instauration du compte personnel d’activité.

Nous avons enfin renforcé le cadre du dialogue social, que la loi relative au dialogue social a également permis de simplifier. D’autres mesures sont en discussion dans le cadre de la loi « travail », visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs.

Nous voulons continuer de donner plus de visibilité aux employeurs afin de faciliter la création d’emploi et de sécuriser les transitions pour les salariés.

Enfin, le quatrième axe concerne la promotion de l’inclusion sociale et de l’égalité des chances. C’est en parvenant à renforcer la sécurité individuelle que nous pourrons donner plus de flexibilité à notre économie. Cet équilibre est nécessaire pour affronter un monde où les ruptures de parcours sont plus nombreuses et les risques plus grands.

Il est essentiel de rendre plus facile pour les entreprises de s’organiser de façon flexible, par le dialogue social, et de renforcer l’entrepreneuriat ; mais ces mesures doivent être complétées par d’autres, visant à lutter contre la précarité et la pauvreté. On constate d’ailleurs, à cet égard, que la situation se dégrade fortement chez nos voisins.

Le Gouvernement a donc décidé une revalorisation des minima sociaux et pris des mesures en faveur de l’inclusion bancaire et de l’accès au logement. Il apporte un soutien particulier aux jeunes à travers le dispositif « garantie jeunes ».

Les mesures destinées à ouvrir le marché des biens et des services aux nouveaux entrants font également partie de cette stratégie d’inclusion sociale – je veux souligner ici la cohérence de notre politique. Ces mesures, qui rendent notre économie plus efficace, la rendent aussi plus juste, en permettant aux plus fragiles d’accéder qui au crédit, qui à la mobilité, qui à certaines professions.

Voilà, rapidement brossés, les quatre axes du PNR.

J’ai aussi parlé de résultats et d’évaluation.

Les marges des entreprises se redressent, même si nous n’avons pas encore retrouvé les niveaux d’avant la crise : cela doit nous conduire à rester à la fois prudents et volontaristes. Dans beaucoup d’entreprises, et notamment de PME, les marges demeurent très fragiles.

En matière de coût unitaire du travail, nous avons enrayé la dégradation du différentiel. Je rappelle qu’au début de la décennie 2000, le coût unitaire du travail pour des emplois industriels peu qualifiés était moins élevé en France qu’en Allemagne. Au début de cette décennie, il est devenu plus important. Depuis la fin de l’année 2014, nous avons réussi à inverser cette tendance sous l’effet conjugué des mesures de compétitivité que j’évoquais et de l’inflation salariale allemande liée aux négociations sociales, d’une part, et aux mesures décidées par le gouvernement de grande coalition d’autre part.

À plus longue échéance, selon les évaluations de nos services, qui sont toujours réalisées avec une grande prudence et qui sont cohérentes avec d’autres études, notamment de l’OCDE, les mesures présentées dans le PNR auront un impact brut de l’ordre de 4,8 points de PIB à l’horizon 2020 et de plus d’un million d’emplois créés. L’impact net est estimé à 2,5 points de PIB et de 670 000 emplois à horizon 2020, ce qui reste robuste et non négligeable. La décomposition de cet impact par catégorie de mesures figure page 19 du document. L’un des plus gros écarts entre le brut et le net concerne le CICE et le pacte de responsabilité et de solidarité pour une raison simple : il faut tenir compte de l’effet récessif des économies qui financent ce dispositif. On passe d’un impact sur le PIB de 1,7 point à l’horizon 2020 à un impact de 0,1 point, ce qui est tout à fait normal. On observe par contraste le caractère particulièrement robuste de toutes les mesures de soutien à l’investissement et à l’innovation dont l’impact est de 0,6 point en brut et de 0,5 point en net.

Voilà les quelques éclairages que je souhaitais vous apporter en complément des documents qui vous ont été transmis.

M. le président Gilles Carrez. Mes questions s’adressent pour une part à M. le secrétaire d’État et pour l’autre à M. le ministre.

Concernant les aspects financiers, le Haut Conseil des finances publiques a confirmé que vos prévisions macroéconomiques paraissaient atteignables.

Toutefois, un sujet, sur lequel vous avez vous-même insisté, monsieur le secrétaire d’État, nous préoccupe particulièrement pour l’exercice 2016 : le financement des nouvelles dépenses. Le coût de ces nouvelles dépenses, qu’il s’agisse du plan emploi, des mesures en faveur de l’agriculture, ou de la défense et de la sécurité, de l’extension de la garantie jeunes, des dernières annonces pour la jeunesse ou de la hausse du point d’indice de la fonction publique, est estimé entre 5 et 7 milliards d’euros en année pleine, dont plus de la moitié en 2016. À ces dépenses nouvelles s’ajoutent les 3,8 milliards d’euros d’économies supplémentaires imposées par le réajustement à la baisse de l’inflation – les prévisions passant de 1 % à 0,1 %. Les économies à trouver pour la seule année 2016 se situeraient donc dans un ordre de grandeur de 7 à 8 milliards d’euros.

Or, pour seule réponse, vous avancez la réserve de précaution, agrémentée d’une nouveauté, puisqu’elle est, pour la première fois, étendue aux reports de crédits. La réserve va atteindre cette année presque 12 milliards d’euros en autorisations d’engagement. Cela signifie qu’à peine le budget voté, un mois entier de ce budget est gelé – je parle des crédits « pilotables », qui représentent une bonne centaine de milliards.

L’expérience des années précédentes montre qu’entre 4 et 4,5 milliards d’euros de crédits sur les crédits mis en réserve sont annulés chaque année. Pour 2016, le montant devrait s’élever à 8 milliards d’euros sur une réserve au maximum de 12 milliards d’euros dont une bonne partie n’est pas réellement opérationnelle. Comment allez-vous vous y prendre pour réaliser ces économies ?

De plus en plus, le recours à la technique du rabot, puisqu’il s’agit bien de cela, pose un problème de méthode. Pour effectuer les annulations de crédits nécessaires, on cherche les économies là où l’on peut, c’est-à-dire sur les crédits « pilotables », essentiellement des crédits d’investissement, des crédits d’avenir. Avec cette technique et faute de réformes structurelles, la gestion de nos finances publiques pose d’énormes difficultés. L’administration, y compris pour exercer des missions régaliennes, se trouve parfois dans le plus grand dénuement.

La question de la méthode vaut pour aujourd’hui et pour l’avenir, car, désormais privés de marge de manœuvre fiscale, nous devons nous intéresser aux dépenses.

J’en viens aux questions adressées à M. Macron. Ce matin, le Haut Conseil a fait état d’une divergence avec le Gouvernement sur la croissance potentielle. Il estime, à l’instar de la Commission européenne, que les prévisions de croissance potentielle sont excessives, trop optimistes, et que les différentes réformes que vous venez d’évoquer ne permettent pas de redresser de manière aussi importante que vous le souhaitez la croissance potentielle.

Je reconnais un point positif : les engagements pris dans le pacte de responsabilité sont tenus puisque les documents semblent indiquer que la dernière tranche prévue pour 2017, à savoir la suppression totale de la C3S et le début de l’abaissement progressif du taux de l’impôt sur les sociétés, sera exécutée. Nous souhaiterions avoir confirmation de ce point.

Je note une proposition très intéressante : sur le modèle du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, est envisagée la mise en place d’une baisse des charges à la source, par transformation du CICE en baisse directe de cotisations sociales. Cela nous évitera de perdre du temps sur des amendements de conditionnalité du CICE, qui créent beaucoup d’incertitude et d’instabilité dans cette commission. Pouvez-vous nous confirmer que cette réforme souhaitable interviendra à un horizon proche, peut-être dans la loi de finances pour 2017 ?

Je souhaite enfin vous interroger sur quelques réformes qui sont à mes yeux structurelles et qui ne figurent pas dans le PNR alors même qu’elles vont augmenter de façon structurelle la dépense publique.

Première réforme, essentielle bien que conduite à bas bruit, qui aura des conséquences sur la société : l’ouverture de l’assistance aux jeunes qui arrivent sur le marché du travail. Le Gouvernement entre 1997 et 2002 s’est constamment opposé à l’idée d’ouvrir le revenu minimum d’insertion (RMI) aux moins de vingt-cinq ans. Or, aujourd’hui, avec le revenu de solidarité active (RSA), l’extension de la garantie jeunes et les mesures pour les étudiants, de facto est offert à la sortie des études le choix de l’assistance. Que pensez-vous de ce type de réponse structurelle ?

Deuxième réforme qui n’est pas mentionnée : la généralisation du tiers payant pour les consultations médicales. Il suffit d’observer les effets à la fin des années 1980 de la généralisation du tiers payant pour les médicaments : une hausse considérable de la consommation, en dépit du garde-fou que représentent la consultation et la délivrance sur ordonnance des produits. Cette réforme structurelle va modifier les comportements de nos concitoyens qui ne seront plus à même de mesurer le coût réel de la santé puisqu’ils n’en auront plus connaissance.

Troisième réforme structurelle en France, qui va à l’inverse de la politique menée dans les pays étrangers : la conjugaison d’une augmentation des effectifs dans la fonction publique et d’une hausse du point d’indice.

Mme Danielle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes. Je remercie M. le président de la commission des finances de m’avoir conviée à cette audition. Il est extrêmement important que nos deux commissions s’associent à chaque étape du semestre européen.

Je voudrais vous poser quelques questions sur les perspectives économiques de moyen terme et sur les engagements qu’entend prendre le Gouvernement, notamment s’agissant des réformes structurelles qui constituent, je le rappelle, l’une des trois priorités de politique économique de la Commission européenne pour l’année 2016.

Je souhaite vous interroger sur trois sujets en m’appuyant sur le rapport pays pour la France, publié par la Commission européenne le 26 février dernier.

S’agissant, en premier lieu, de la transition écologique et énergétique, la Commission européenne a souligné les relatifs bons résultats de la France en matière de réduction des gaz à effet de serre et d’amélioration de l’efficacité énergétique, en particulier avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. S’il faut se féliciter des premières réalisations, il est évidemment nécessaire de maintenir les efforts. Quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière ? Dans le domaine des transports, le report modal et l’amélioration de l’efficacité énergétique semblent poser des difficultés. Quelles réponses entendez-vous y apporter ?

En deuxième lieu, je rappelle que la dimension sociale est désormais intégrée au semestre européen et donc davantage prise en compte dans les échanges entre les États membres et la Commission européenne, en particulier la lutte contre la pauvreté, la réduction des inégalités et la lutte contre les exclusions. La Commission dresse, dans le rapport pays, des constats extrêmement préoccupants sur lesquels j’aimerais, messieurs les ministres, vous entendre. Le décrochage scolaire et la dualisation accrue du marché du travail dans notre pays sont-ils des défis suffisamment pris en compte par le Gouvernement dans le PNR ?

En dernier lieu, s’agissant de la relance de l’investissement, je vous indique que notre commission poursuit ses travaux sur le plan Juncker et qu’un rapport, assorti d’une proposition de résolution, sera présenté par nos rapporteurs, Razzy Hammadi et Arnaud Richard, début mai en commission.

La relance de l’investissement, qui constitue une autre des priorités de la Commission européenne pour 2016, enregistre, en France, des premiers résultats notables. Il convient ainsi de saluer le dynamisme des porteurs de projets français, particulièrement impliqués dans la mise en œuvre du plan d’investissement pour l’Europe, ainsi que la très large représentation des projets à caractère environnemental dans le total des projets acceptés ou financés. Près de 50 % des projets ayant bénéficié du soutien de la Banque européenne d’investissement en France, fin 2015, concernaient le climat, qu’il s’agisse du soutien à la rénovation thermique ou de la production d’énergies renouvelables. Comment s’articuleront, dans les années à venir, les programmes d’investissements d’avenir (PIA) et le plan Juncker ?

Enfin, au vu du scandale actuel des Panama papers, la France est-elle prête désormais à soutenir la proposition de directive sur le reporting extra-financier pays par pays ?

M. Dominique Lefebvre. Ce rendez-vous, devenu rituel, est utile car il intervient six mois après la présentation des hypothèses macroéconomiques qui sous-tendent la loi de finances initiale et six mois avant le prochain projet de loi de finances. C’est l’occasion de faire le point sur tous les sujets, y compris ceux qui tiennent à l’exécution 2016.

Il est aussi un moment utile parce nous examinons à la fois un programme de stabilité et ce qui lui permet de se réaliser, le programme national de réforme.

C’est enfin l’occasion pour le Parlement d’exprimer une position alors que les ministres vont engager les discussions avec la Commission européenne. Je veux les assurer du soutien du groupe Socialiste, républicain et citoyen.

Je n’ai pas eu le temps d’examiner dans le détail les documents qui nous ont été transmis ce matin. Je note qu’une annexe reprend point par point les recommandations formulées par la Commission européenne. J’aimerais avoir votre sentiment sur le climat des discussions qui s’engagent. Quels sont les points susceptibles de faire l’objet d’une divergence avec la Commission ? J’imagine que la Commission dira que tout cela va dans le bon sens mais que les perspectives 2017 sont insuffisamment documentées pour qu’elle puisse se prononcer sur le respect de l’objectif de 2,7 % de déficit en 2017.

Je ne remercierai jamais assez le président Carrez dont chaque intervention rappelle qu’il existe des politiques de droite et des politiques de gauche et que droite et gauche, ce n’est pas pareil.

L’enjeu des programmes qui nous sont présentés est double : tenir nos engagements européens et assurer concomitamment le retour à la croissance ; le redressement de nos finances publiques et la cohésion sociale. De ce point de vue, nous abordons la discussion avec la Commission en ayant tenu nos engagements. Les résultats sont là en 2015.

Je tiens à souligner la constance qui caractérise les réformes que nous mettons en œuvre et qui ne sont pas toujours bien identifiées ou bien comprises. Cette constance dans la politique conduite est à l’origine des succès que nous enregistrons.

Je retiens de la lecture du PNR les débats qui nous attendent pour le projet de loi de finances pour 2017, en particulier la mise en œuvre du pacte de responsabilité. Nous aurons à discuter de sa dernière étape, de la manière de la rendre la plus efficace possible, dans le respect du volume des engagements pris à l’égard des entreprises. La suppression intégrale de la C3S envisagée par le Gouvernement doit être précédée d’un débat sur les mesures les plus pertinentes – nous l’avons déjà eu l’année dernière lorsque nous avons décidé de mettre en place le dispositif de suramortissement, dont l’efficacité est avérée, et, par conséquent, de retarder d’un trimestre la baisse des cotisations sociales. Si le volume des baisses de charges doit être respecté, les modalités de mise en œuvre de cette dernière tranche du pacte de responsabilité méritent d’être débattues.

Comme le président, j’ai noté, pour la première fois, me semble-t-il, la mention dans le PNR de la perspective du basculement du CICE en allégement de cotisations sociales – ce débat a eu lieu dans l’hémicycle, Yves Blein avait interrogé M. Eckert sur ce sujet. Je partage l’objectif mais je souligne qu’au regard du redressement des finances publiques, nous parlons d’un coût de 20 milliards d’euros, soit pour le budget de l’État, soit pour les entreprises, soit pour les deux. Les conditions du basculement, progressif ou pas, restent à préciser. Alors que le PNR évoque le projet de loi de finances pour 2017 pour la suppression de la C3S et la baisse de l’impôt sur les sociétés, il ne fixe aucune échéance sur ce point. Pouvez-vous nous en dire plus ?

J’ai bien entendu ce que vous nous avez indiqué sur l’exécution 2016. Je pensais poser la question et devancer ainsi celle de l’opposition mais le président m’a précédé. Il paraît logique de tenir compte des effets d’une inflation moindre à hauteur de 3,8 milliards en réduisant les dépenses. Avec une inflation moins forte, les coûts pour les administrations sont censés être moins élevés. Il me paraît donc normal de revoir les crédits fixés sur la base d’une inflation à 1 %.

Je ne suis pas complètement certain que les mesures nouvelles doivent s’additionner comme l’a fait le président Carrez. Il est vrai que la réserve de précaution s’élève aujourd’hui à 12 milliards d’euros. J’ai retrouvé les chiffres pour la loi de finances pour 2015 : nous avions finalement annulé 5,5 milliards d’euros et ouvert 6,5 milliards d’euros de crédits. La réserve de précaution est donc largement surdimensionnée à ce stade.

Par rapport aux objectifs de déficit nominal auxquels vous êtes très attachés, monsieur le président, en 2013 et 2014, la divergence entre les recettes prévues et les recettes réalisées a expliqué l’essentiel, non pas de la dégradation du déficit, mais de l’écart par rapport à nos objectifs. En l’espèce, si les recettes 2016 sont au rendez-vous, nous devrions pouvoir tenir la norme de dépense en 2016, si le Gouvernement nous confirme que telle est son intention.

M. Hervé Mariton. Le Haut Conseil des finances publiques a sévèrement critiqué ce matin votre évaluation de la croissance potentielle, laquelle vous permet de faire ressortir un effort structurel qui serait surévalué au regard de la réalité. Il serait intéressant que le Gouvernement nous explique comment il justifie cette croissance potentielle qui, de nouveau cette année, paraît surévaluée pour les besoins de la cause, mais avec un risque qui a été souligné par la Cour des comptes : si vous êtes cohérents avec vous-mêmes, si la croissance potentielle est au niveau que vous annoncez, cela signifie probablement que l’augmentation de l’investissement des entreprises que vous escomptez n’a pas lieu. En tout cas, vous ne pouvez pas avoir raison sur tous les tableaux. Il faut que vous nous répondiez, monsieur le secrétaire d’État.

Deuxième point, sur lequel je n’ai peut-être pas été assez attentif : le Gouvernement, depuis un certain temps, parle de 50 milliards d’euros d’économies. Chaque fois que des dépenses supplémentaires sont prévues, vous annoncez des économies supplémentaires. Mais le chiffre de référence, le totem, reste désespérément identique : 50 milliards. C’est donc qu’il y a un truc. J’aimerais que vous nous l’expliquiez.

S’agissant des dépenses, beaucoup a été dit par le président de la commission. Pourquoi choisissez-vous le moment où l’inflation est nulle et où le pouvoir d’achat augmente – vous vous en flattez, dont acte – pour augmenter le point d’indice ? Quelle curieuse idée !

Je note l’engagement sur une « barémisation » du CICE. Au demeurant dans le document, vous articulez CICE, pacte de responsabilité et baisse de charges jusqu’à 3,5 SMIC. Nous devons tous être attentifs au risque de tiers-mondisation de l’économie française, avec un effort de baisse de charges qui serait concentré sur les salaires au niveau du SMIC. La question de l’employabilité de la main-d’œuvre peu qualifiée et de l’entrée difficile sur le marché de l’emploi doit probablement trouver d’autres réponses plus pertinentes que la seule baisse des charges.

Le Gouvernement peut-il confirmer sa volonté de mettre en place une « barémisation » des cotisations sociales à spectre large, c’est-à-dire applicable au moins jusqu’à 3,5 SMIC ? Les décisions prises jusqu’à présent ont heureusement évolué pour éviter l’erreur qui a longtemps été commise – par les gouvernements de gauche comme de droite – de concentrer l’effort public au niveau du SMIC.

Les tableaux que comportent ces documents les rendent intéressants. Ils relèvent de ce que j’appellerai un volontarisme hors sol. S’agissant de la transition énergétique, c’est épatant : vous décrivez la politique gouvernementale en matière d’énergies renouvelables mais vous êtes moins bavards sur les perspectives en matière de réduction de la part du nucléaire. L’impact des efforts en faveur des énergies renouvelables est positif, mais je ne suis pas sûr que celui de la restriction du nucléaire, qui figure aussi dans la loi relative à la transition énergétique – comme la programmation pluriannuelle de l’énergie dont nous n’avons toujours pas connaissance – aille dans le même sens. Il serait bon de nous renseigner aussi sur les effets négatifs, sauf s’ils sont agrégés mais cela n’est écrit nulle part.

Enfin, l’annexe sur les investissements publics est intéressante. J’ai envie de vous demander de la compléter. Le Gouvernement avait plutôt bien démarré le mandat en matière d’infrastructures de transport – mon propos sera différent de celui de la présidente de la commission des affaires européennes – considérant qu’un certain nombre de projets n’étaient manifestement pas soutenables pour les finances publiques. Au fil du mandat, on a vu cette bonne disposition s’effriter, voire s’effondrer. Quelle est la vision du ministre de l’économie sur les critères d’investissement, en particulier dans le domaine ferroviaire ?

M. Éric Alauzet. La première de mes trois questions rejoint celle qu’a posée Gilles Carrez concernant les 6, 7 ou 8 milliards d’économies supplémentaires qu’il faudrait réaliser. J’ajoute que le dernier milliard est toujours plus difficile à trouver que le premier. En outre, l’exercice, parce qu’il ne s’inscrit pas dans le contexte de la préparation budgétaire, semble plus périlleux et plus aléatoire.

Mes questions suivantes portent sur les deux indicateurs que le ministre de l’économie a retenus, à savoir l’emploi et la croissance, pour évaluer la pertinence des politiques conduites.

Le pacte de responsabilité et les autres dispositifs sont censés créer de l’emploi. Il faut reconnaître de l’inertie au dispositif. Or, pour les économies de dépenses qui le financent, il n’y a pas d’inertie, les suppressions d’emplois sont quasiment instantanées. Parallèlement aux prévisions de création d’emplois, pouvez-vous nous indiquer les chiffes de pertes d’emplois publics et parapublics mais aussi les pertes dans le BTP liées à la baisse de l’investissement des collectivités locales ? Je suis sceptique sur la troisième phase de suppression de la C3S qui concerne les grandes entreprises. Est-ce véritablement de ces entreprises que l’on peut espérer la création d’emplois ? La balance avec les pertes d’emplois est-elle favorable ou pas ?

Ma troisième et dernière question porte sur la croissance dont nous venons de débattre avec M. Didier Migaud. À court terme, les prévisions du Gouvernement sont bonnes, et nous devons nous en réjouir : nous sommes dans les clous depuis l’an dernier. En revanche, à l’horizon de deux, trois ou quatre ans, l’incertitude est telle qu’elle nous fait redouter que les prévisions de croissance ne soient exagérément optimistes. Le président du Haut Conseil des finances publiques a distingué croissance potentielle et croissance réelle ; il a reconnu qu’il fallait revoir la liaison entre le déficit structurel et la croissance potentielle ; il a indiqué qu’une partie du déficit conjoncturel devait être traitée comme du déficit structurel, c’est-à-dire de manière beaucoup plus lourde, ce qui hypothèque les projets de croissance potentielle. Il faut regarder ce point avec attention.

En outre, je m’étonne de la position du FMI, qui s’alarme des prévisions économiques et reproche au Gouvernement de ne pas prendre les mesures structurelles nécessaires, mais qui n’anticipe pas deux risques importants : la faiblesse du taux de croissance, qui se situe à 1,5 % en moyenne ; le grignotage de cette croissance par des pertes qui sont notamment liées à l’évasion fiscale et à des fraudes de toute nature. Quelle est la croissance effective, celle dont la population ressent les effets ? À ces quelques milliards qui s’évaporent dans la nature et viennent amputer d’autant la croissance, il faut ajouter l’impact de la hausse des dépenses de réparation – sociales, environnementales et médicales – qui sont certes nécessaires mais pas dynamiques. Cette croissance, à la fois grignotée et moins dynamique qu’elle ne pourrait l’être, me donne quelques inquiétudes.

Mme Christine Pires Beaune. Merci à vous, messieurs les ministres, pour vos présentations synthétiques et claires. Cela étant, je regrette que nous disposions de trop peu de temps pour pouvoir consulter les documents. Monsieur le président, nous aurions peut-être pu décaler la réunion de notre commission.

Ma question porte sur la fraude fiscale. Au niveau national, une circulaire publiée en juin 2013 invitait les titulaires de comptes à l’étranger à déclarer ceux-ci au fameux service de traitement des déclarations rectificatives (STDR), dans une logique qui refuse l’impunité, comme vous l’aviez rappelé dans une autre enceinte. Il s’agit d’une vraie rupture avec les méthodes utilisées précédemment, à l’époque où les contribuables pouvaient se présenter de manière anonyme à une cellule opaque, afin de discuter de conditions fiscales qui les décideraient à éventuellement régulariser leur situation. Sous la précédente législature, la seule proposition de loi qui a été adoptée en la matière a consisté en une amnistie fiscale qui récompensait les évadés fiscaux d’avoir fraudé dès lors qu’ils revenaient dans la légalité.

Le STDR a rendu son rapport 2015 il y a quelques jours. Depuis sa création en 2013, il a reçu plus de 44 000 demandes de contribuables et il a traité plus de 11 000 dossiers, permettant l’encaissement de 4,4 milliards d’euros. Pour l’année 2015, les encaissements s’élèvent 2,6 milliards d’euros pour 7 800 dossiers traités, dont 515 avaient un lien avec des sociétés écran implantées au Panama et ont entraîné 760 millions d’euros de rappels pour un montant d’avoirs de 2,4 milliards d’euros, désormais sortis de l’ombre. Au passage, je voudrais remercier le consortium international des journalistes d’investigation qui est à l’origine des récentes révélations sur le Panama. Qu’envisagez-vous de faire au cours des deux années à venir à ce sujet ? Quelles conséquences financières cette affaire peut-elle avoir sur l’exercice 2016 ?

J’ai aussi une remarque à propos des collectivités locales. Monsieur le ministre, pour l’année 2015, vous avez annoncé une augmentation de 1,5 % des recettes de fonctionnement et une hausse de 1,46 % des dépenses de fonctionnement. On peut imaginer que le taux d’épargne brute des collectivités sera aussi en augmentation, ce qui n’est pas forcément une bonne nouvelle dans la mesure où ce mouvement peut résulter d’une hausse déraisonnable des impôts locaux et d’une baisse sévère de l’investissement public. J’espère que l’explication tient davantage aux efforts de rationalisation de la dépense publique mais il est encore trop tôt pour le dire. Vous avez aussi évoqué l’augmentation du dépôt de comptes des collectivités au Trésor, ce dont je ne doute pas. Cette situation macroéconomique que vous décrivez ne doit cependant pas masquer l’hétérogénéité des situations. Dans le Puy-de-Dôme, 16 % des communes avaient une épargne nette négative au 31 décembre 2014. J’attends les chiffres de 2015. Il est fort probable que ce taux soit en augmentation et que nous retrouvions les mêmes communes en difficulté.

Ma remarque n’a d’autre but que celui de soutenir une réforme – que j’attends de longue date – de la dotation globale de fonctionnement (DGF), la principale dotation de fonctionnement aux collectivités. Pour réussir cette réforme, il faudra peut-être mettre un peu d’huile dans les rouages. Si d’aventure nous devions revoir cette dernière marche, je voudrais être sûre que les collectivités recevraient une bouffée d’oxygène en contrepartie de la réforme.

Mme Marie-Christine Dalloz. Monsieur le président, vous avez fait allusion à l’article 50-1 de la Constitution. J’aimerais rappeler aussi l’article 14 de la loi de programmation des finances publiques du 28 décembre 2010, qui impose au Gouvernement, dans le cadre du programme de stabilité, d’organiser un débat en séance publique au Parlement, mais aussi un vote. En 2012, la procédure n’a pas été mise en œuvre en raison de l’élection présidentielle et, l’an dernier, vous vous êtes totalement exonérés de cette démarche. Que constate-t-on cette année ? Nous avons ici une réunion à la dernière minute, et un débat – sans vote – aura lieu le 26 avril dans l’hémicycle. Il faudrait revenir aux bonnes pratiques imposées par la loi. Il me semble qu’il en va aussi de votre crédibilité.

Cette introduction étant faite, revenons au fond. Le Haut Conseil des finances publiques estime que la perspective d’un taux de croissance de 1,5 % est encore atteignable. Les mots ont un sens et, en l’occurrence, le terme « encore » indique bien que l’objectif risque de ne pas être atteint. M. le secrétaire d’État nous a rappelé que les dépenses constatées ont diminué de 1,4 milliard d’euros entre 2014 et 2015. Puisque nous vous reprochions de donner des tendances, vous nous avez affirmé qu’il s’agissait là d’un montant réel, constaté. Cependant, en tenant compte de diverses baisses – des taux d’intérêt, des cours du pétrole, de notre contribution à l’Europe –, on en déduit qu’il y a une hausse des dépenses réelles. Ce bon résultat n’est dû qu’à des éléments extérieurs à votre politique.

Pour 2016, je m’inquiète de voir que deux coûts – la revalorisation du point d’indice pour l’ensemble de la fonction publique et les mesures liées à la sécurité de nos concitoyens – ne seront pas intégrés dans une loi de finances rectificative présentée cet été. C’est une mauvaise façon de travailler. Vous auriez dû nous présenter un collectif budgétaire dans le courant de l’été, afin que nous soyons au plus près des réalités budgétaires de 2016, plutôt que d’attendre une éventuelle embellie avant la fin de l’année. Les embellies ne viennent pas tous les ans, monsieur le ministre.

Mme Monique Rabin. Saluons le travail qui nous est présenté. Le Haut Conseil des finances publiques, qui est toujours un peu réservé et qui emploie un vocabulaire particulièrement neutre, juge que le Gouvernement est un peu optimiste. Pour ma part, je retiens la seconde partie de son appréciation, celle où il estime votre scénario plausible. Même si chacun tend à utiliser les parties de l’analyse qui l’intéressent, je crois que nous sommes sur la bonne pente depuis deux ans.

S’agissant de la dépense publique, mes propos vont contredire ceux de Marie-Christine Dalloz. Peut-être aurait-il fallu isoler l’impact de la baisse des taux d’intérêt et du coût de l’énergie, mais cela n’empêche pas de constater les efforts considérables qui ont été consentis au cours de cette législature, comparés aux évolutions précédentes et notamment celles de l’année 2011. Cette maîtrise des dépenses est indispensable pour ramener le déficit à 3,5 % du PIB et pour diminuer les impôts. Cette maîtrise a un réel sens puisqu’elle nous a permis de rendre du pouvoir d’achat à 12 millions de foyers fiscaux depuis trois ans, et de financer nos priorités. À cet égard, j’aimerais revenir sur le gel et le surgel dont il a été question : il serait bon d’en exonérer toutes les administrations chargées de la sécurité qui souffrent énormément, je pense à la police et à la gendarmerie...

M. le président Gilles Carrez. Et à la justice de M. Urvoas !

Mme Monique Rabin. Je pense aussi à la justice, en effet, car la situation des prisons mérite beaucoup d’attentions. S’il faut diminuer la dépense publique, il ne faut pas le faire à n’importe quel prix. J’ai lu avec beaucoup d’intérêt le programme pour 2017 de nos collègues Les Républicains qui prévoient d’économiser 100 milliards d’euros et d’exonérer le SMIC de toute cotisation. Un tel programme me fait peur. Il faut veiller à garder un cap politique en matière de dépenses publiques : les charges sont des cotisations, des revenus qui seront transférés aux retraités. À travers une diminution trop importante des dépenses, il ne faudrait pas donner l’impression d’oublier la protection matérielle et physique de nos concitoyens. Il faut aussi faire attention à nos administrations. J’ai la chance de représenter le Parlement au Conseil d’orientation du service des achats de l’État. Les hauts fonctionnaires, qui font énormément d’efforts pour moderniser notre pays, souffrent eux aussi. Soyons prudents face aux discours sur la diminution du nombre des fonctionnaires et le non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux.

M. Christophe Caresche. Ma première question porte sur la contribution tout à fait exceptionnelle des stocks à la croissance, sur laquelle le Haut Conseil des finances publiques s’est d’ailleurs étendu. Vous prévoyez des taux de 0,4 % en 2015 et 2016, puis un taux zéro au cours des années suivantes. Pourriez-vous nous donner votre analyse de ce phénomène exceptionnel ?

Avec ma seconde question, j’aimerais insister sur le désaccord manifeste qui subsiste avec la Commission européenne. Celle-ci propose un ajustement structurel de 0,8 point en 2016 et de 0,9 point en 2017, alors que vous prévoyez 0,5 point pour chacune de ces deux années. Ce désaccord tient-il à l’évaluation de la croissance potentielle ou à d’autres facteurs ?

M. Patrick Hetzel. L’examen des documents m’inspire une remarque liminaire : la dette publique nette continue d’augmenter. Il faut rappeler régulièrement ce point fondamental. Ensuite, j’aimerais rapprocher trois chiffres de ceux qui avaient été présentés par le Gouvernement le 16 septembre dernier, et notamment par vous, monsieur Eckert : la consommation des ménages, les investissements des entreprises, les créations nettes d’emplois dans le secteur privé.

Alors que vous prévoyiez une hausse de 1,7 % de la consommation des ménages en septembre dernier, vous tablez désormais sur une hausse de 1,6 %. L’écart est assez paradoxal – l’augmentation du pouvoir d’achat des ménages devrait avoir un effet positif sur leur consommation – et il va avoir des répercussions négatives sur les recettes de TVA attendues. Vous passez ce point sous silence.

Quant à la hausse des investissements des entreprises que vous estimiez à 4,9 % en septembre dernier, elle ne serait plus que de 3,2 % si j’en juge d’après vos documents et ceux de M. Migaud. L’écart est très significatif : les investissements des entreprises ne seront pas à la hauteur de ce que vous aviez imaginé. C’est d’autant plus inquiétant, qu’il y a six mois, vous mettiez en avant le CICE et le pacte de responsabilité. Vous indiquez d’ailleurs que les marges des entreprises sont en train de se reconstituer. Alors que vous vous réjouissez de certains éléments positifs, comment se fait-il que les investissements des entreprises ne suivent pas ?

En matière de créations nettes d’emplois dans le secteur privé, il y a aussi un écart entre vos annonces de septembre dernier et vos constats actuels. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi les 150 000 créations attendues ne seront pas au rendez-vous ?

Mme Véronique Louwagie. Pour ma part, j’aimerais vous interroger sur l’investissement local et sur le diagnostic du FMI.

En 2015, l’investissement local a décru de 4,6 milliards d’euros, essentiellement en raison de la baisse des dotations de l’État. Celles-ci s’inscrivent en baisse de 28 milliards d’euros sur la période 2014-2017, et de 10,5 milliards d’euros sur la période 2015-2017. Les collectivités vont aussi ressentir l’effet du dégel du point d’indice de la fonction publique. Elles sont également confrontées à tous les enjeux liés à la nouvelle politique territoriale, notamment à la fusion des communautés de communes, car ces restructurations mobilisent de l’énergie. Dans un premier temps, tout ceci est bénéfique pour les comptes de l’État, comme le souligne l’INSEE : c’est surtout grâce aux administrations publiques locales que le déficit public a été contenu à 3,5 % du PIB, un taux meilleur que prévu. Cependant, il y a là motif à inquiétude. Avez-vous pris en compte les incertitudes qui pèsent sur le budget de l’État, au regard de la baisse de l’investissement local qui risque de se poursuivre ?

Après avoir établi un diagnostic beaucoup plus pessimiste que les précédents, le FMI estime pour sa part que les États doivent élaborer un plan de secours. Il redoute que les décisions prises ne soient pas à la hauteur des besoins en matière de croissance économique. Le Gouvernement a-t-il envisagé un plan de secours, conformément aux préconisations dévoilées le 12 avril dernier par le FMI ?

M. Marc Goua. Si vous le permettez, j’aimerais tout d’abord signaler à ma collègue Véronique Louwagie qu’une enveloppe d’un milliard d’euros a été prévue en 2016 pour les collectivités qui seraient capables de présenter très rapidement des dossiers pour des investissements à engager avant la fin de l’année. Je crois savoir que, pour l’instant, l’utilisation de ces fonds n’est pas à la hauteur des espérances. Étant maire, j’estime aussi que l’on ne peut pas demander aux entreprises de réduire leurs frais de fonctionnement pour privilégier l’investissement, et ne pas nous appliquer la règle à nous-mêmes dans les collectivités.

Cela étant, je constate avec plaisir que de nouvelles mesures sont prévues pour améliorer la compétitivité des entreprises. Toutes celles que je visite – ce qui fait un certain nombre – demandent de la continuité et de la sécurité : il est évident qu’elles n’investissent pas pour six mois. Je me réjouis donc de la baisse de l’impôt sur les sociétés, mais ne serait-il pas possible d’accélérer le mouvement en établissant une distinction entre les bénéfices réinvestis et les bénéfices redistribués ? Une telle mesure aurait des effets vertueux sur les comportements de nos compatriotes et sur l’économie.

M. le ministre. Je vais d’abord répondre aux questions sur la croissance et notamment à celle que vous avez soulevée, monsieur le président, à propos de la croissance potentielle. Que ce soit par le Haut Conseil des finances publiques, la Commission européenne ou nous-mêmes, ce sujet doit être abordé avec beaucoup de modestie parce que le débat académique n’est absolument pas stabilisé. Si consensus il y a, il se fait plutôt autour de l’idée que personne ne sait vraiment intégrer certains facteurs – en particulier l’impact du numérique et de l’économie collaborative – dans la croissance potentielle de nos économies. Nous sommes face à une sorte de nouveau paradoxe de Solow. Nous devons donc rester très prudents et préciser que nos calculs ont un caractère très conventionnel. L’économie collaborative fait sortir beaucoup de notre richesse du PIB, mais elle crée aussi de l’emploi, des transferts de valeur. La modestie s’applique à nos propres prévisions.

Le Haut Conseil des finances publiques s’est appuyé sur un débat récurrent entre la Commission européenne et nos services. Ce débat, qui relève de la casuistique, a connu une parenthèse éphémère l’année dernière quand nous nous étions alignés sur les positions de la Commission qui avait elle-même fait un pas vers nous. Rappelons que, l’an dernier, la Commission avait évalué la croissance potentielle à 1,3 % pour 2016. Le point de divergence est toujours le même : elle ne prend pas en compte les mesures nouvelles que nous avions intégrées en estimant leur effet à 0,2 %. Revenant sur l’accord méthodologique que nous avions obtenu, la Commission a refait un calcul décalé de 0,2 %. C’est ce qui explique l’écart de 0,4 % qui existe en 2016 entre ses chiffres et les nôtres : 0,2 % de révision méthodologique et 0,2 % de mesures non prises en compte par la Commission. Nous allons vivre avec cet écart dans l’évaluation de la croissance potentielle : 1,1 % contre 1,5 % pour 2016 ; 1,2 % contre 1,5 % pour 2017.

Monsieur Caresche, vous nous avez interrogés sur la contribution des stocks à la croissance, dont l’INSEE a publié le chiffre pour 2015. L’essentiel de la contribution des stocks à la croissance en 2016 vient d’un effet d’acquis, c’est-à-dire de l’élan pris à la fin de l’année 2015. Comme l’ont souligné M. Alauzet et Mme Louwagie, le FMI a une approche particulièrement pessimiste, sachant qu’il est toujours plus pessimiste que d’autres institutions chargées de la prévision qui, elles, sont traditionnellement optimistes. Quoi qu’il en soit, tout cela montre que nous devons être extrêmement prudents.

Monsieur le président, vous m’avez aussi posé une question sur les mesures prises en faveur des jeunes. Pour clarifier les choses, j’indique qu’il n’y a pas de RSA pour les moins de vingt-cinq ans dans les mesures annoncées. Nous prévoyons une garantie jeunes qui n’est pas une mesure d’assistance car elle suppose un engagement actif dans un parcours – formation ou stage – et qui est ciblée. Pour 2017, le coût de cette mesure est évalué à 200 millions d’euros. Quant aux mesures jeunes, qui prolongent les bourses pendant quatre mois afin de favoriser le retour à l’emploi, elles sont conditionnées et limitées. Leur coût est estimé à 100 millions d’euros en 2017. Les deux mesures représentent donc un montant annuel de 300 millions d’euros. Elles sont conditionnées à des obligations de formation et, en particulier la première, visent le public des jeunes qui ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation, une catégorie que la Commission européenne désigne sous le terme de NEET (Not in Employment, Education or Training). S’il s’agissait d’un RSA jeunes, les masses financières n’auraient rien à voir avec les 300 millions d’euros prévus pour 2017.

La question qui nous est posée – et qui dépasse très largement notre débat du jour – est celle-ci : compte tenu des changements économiques et sociaux en cours, comment pouvons-nous repenser nos politiques d’entrée et d’évolution dans l’emploi ? La réforme de la formation professionnelle n’est qu’une partie de la réponse. Dans une économie de rupture, l’entrée dans l’emploi et le changement de parcours d’une entreprise à l’autre ou d’un secteur à l’autre sont de plus en plus difficiles pour les jeunes, en particulier pour ceux qui sont peu qualifiés. Il faut privilégier cette approche plutôt que de se focaliser sur le ciblage d’un public ou le coût d’une mesure. Quoi qu’il en soit, j’y insiste, les mesures annoncées ne relèvent pas d’une politique de l’assistance ; elles constituent un filet de sécurité dans un ensemble qui est actuellement imparfait, compte tenu des difficultés de l’entrée sur le marché du travail et des politiques de formation ou d’accompagnement.

Votre approche de la généralisation du tiers payant est un peu biaisée. On peut penser que la mesure aura un impact sur la trésorerie. Pour autant, posera-t-elle un problème structurel en contribuant à décaler nos dépenses de santé en général ? Je ne le crois pas, et d’autant moins quand je compare avec des pays comme les États-Unis qui ont des mécanismes plus forts en matière d’incitation ou de contrôle des individus. Aux États-Unis, le ratio des dépenses de santé rapportées au PIB est l’un des plus élevé au monde, et le système de santé est le plus inefficient. La généralisation du tiers payant permet l’accès aux soins, ce qui est bénéfique pour la croissance potentielle à long terme, mais elle a un effet sur la trésorerie à court terme. D’un point de vue structurel, cette mesure est loin d’être négative : son caractère inclusif est bon pour notre croissance potentielle.

La revalorisation du point d’indice dans la fonction publique n’est pas une mesure structurelle. Quand on compare la trajectoire – hors mesures catégorielles – des fonctionnaires avec celle des autres actifs, on constate qu’un effort leur a été demandé au cours des dernières années par deux majorités successives. Il n’était pas illégitime de revoir le niveau du point. Si réforme structurelle de la fonction publique il doit y avoir, elle doit porter sur les missions, les périmètres, etc. En revanche, la revalorisation du point d’indice est une mesure conjoncturelle qui ne me paraît pas illégitime.

Madame Auroi, vous avez soulevé le sujet de l’investissement pour lequel deux actions sont en cours : le plan Juncker, qui représente 315 milliards d’euros pour l’ensemble des pays de l’Union européenne ; la nouvelle génération de programmes d’investissements d’avenir (PIA). Rappelons que le PIA a des composantes d’avances remboursables, de subventions ou de dotations, avec une partie maastrichtienne et l’autre non, alors que l’essentiel du plan Juncker est constitué de financements du type prêts à long terme. La part en fonds propres du plan s’élève à 21 milliards d’euros, et c’est l’effet de levier public et privé qui permet d’atteindre 315 milliards d’euros. La France est le premier pays bénéficiaire du plan avec 28 projets approuvés pour un montant de 11,3 milliards d’euros d’investissements, principalement dans les domaines du très haut débit et des énergies renouvelables.

M. le secrétaire d’État. Je vais être très impoli et interrompre le ministre pour appuyer son propos. Lundi dernier, j’étais avec le Premier ministre à la Banque européenne d’investissement (BEI), où nous avons signé pour 2,1 milliards d’euros d’engagement dans sept ou neuf projets : usine de traitement du lait, soutien aux PME, en partenariat notamment avec La Banque postale et la Banque publique d’investissement (BPI), etc.

M. le ministre. La troisième tranche du PIA, à partir de 2017, représentera 10 milliards d’euros, un montant fondé sur les évaluations réalisées par M. Maystadt, ancien responsable de la Banque européenne d’investissement, et par France Stratégie. Elle complétera et poursuivra le dispositif actuel du « PIA 2 », qui vient à expiration cette année, en rouvrant des crédits. Les deux actions sont complémentaires du point de vue du pilotage, et nous avons notre propre évaluation du PIA.

J’ai été interrogé par M. Mariton sur les investissements ferroviaires et, plus largement, publics. Le Gouvernement a engagé un effort sans précédent s’agissant de la sélectivité des investissements publics, au moyen d’une méthode générale et d’une nouvelle procédure d’évaluation horizontale. Grâce à l’évaluation que nous avons instaurée au-delà de 100 millions d’euros, avec l’appui du Commissariat général à l’investissement (CGI), les investissements ne sont pas automatiques et leur sélection est beaucoup moins discrétionnaire qu’auparavant. Le document de présentation qui vous a été remis synthétise à la page 157 les avis du CGI.

Dans le domaine ferroviaire, la priorité a été accordée à la rénovation du réseau plutôt qu’aux nouveaux investissements. Ce choix me paraît relever d’une bonne stratégie, car nous sommes confrontés à la vétusté du réseau après avoir privilégié pendant plusieurs décennies les nouveaux projets, sans nous donner la possibilité d’entretenir le réseau existant. Nous avons fait preuve de cohérence, dans le cadre de la réforme ferroviaire puis de la loi pour la croissance, en instaurant cette règle d’or qui garantit à l’établissement public la préservation de ses capacités à investir – dans le renouvellement exclusivement.

Au niveau industriel, cette politique d’investissement implique une contrainte, voire une gageure. En effet, nous avons développé des acteurs industriels français qui sont par construction captifs de la commande publique, et d’une commande publique en quelque sorte infinie. Le dimensionnement de l’appareil productif a été déterminé par ces politiques très volontaristes. Nous menons donc actuellement une politique d’accompagnement – je vous renvoie aux annonces récentes de commandes de trains par Alain Vidalies, qui marquent le maintien de notre volontarisme s’agissant du renouvellement, que les régions devront compléter –, mais afin de désensibiliser nos acteurs industriels vis-à-vis de l’investissement public. Ainsi cette politique s’articule-t-elle à celle qui vise la compétitivité.

Un exemple : Alstom Transport a besoin de se moderniser, de se différencier, d’accéder à de nouveaux marchés ; nous y œuvrons très régulièrement – le week-end dernier encore, en Algérie, où l’extension de la joint venture Cital a permis à l’entreprise, en particulier à son site de Reichshoffen, très menacé, d’obtenir un nouveau marché, donc de dégager des volumes en étant beaucoup moins sensible qu’auparavant à la commande publique.

Sans cette politique, nous en resterons à une économie relativement fermée et essentiellement tributaire de la commande publique. Tel est le défi que nous devons relever, dans plusieurs secteurs, dont le ferroviaire et le BTP : réussir cette transition qui ne se produira pas du jour au lendemain.

Le chiffrage en matière de nucléaire est très difficile, particulièrement en ce qui concerne l’emploi où il suppose de tenir compte du développement futur des activités de démantèlement et, surtout, de toute la nouvelle production, laquelle dépend de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ainsi que des travaux que nous sommes en train de finaliser avec EDF. C’est un sujet important dont je sais qu’il vous tient à cœur, monsieur Mariton. Je suis à votre disposition si vous souhaitez que nous consacrions une audition à ces questions. Notre visibilité n’est pas totale, mais il est certain que l’évolution ne sera pas sans conséquences, et celles-ci doivent être bien évaluées. Il y a ici une approche très conservatrice de la part du nucléaire : vous avez raison ; mais je ne veux pas non plus adopter une approche catastrophiste. Il faut donc progresser sur cette question, en l’abordant du point de vue industriel.

S’agissant des énergies renouvelables, ce sont essentiellement des investissements privés qui justifient la dynamique de création d’emplois, dans la rénovation thermique comme dans la production de nouveaux ensembles ou dans le développement d’activités nouvelles.

Enfin, les chiffres d’emploi cités dans le document correspondent à des montants bruts. J’ai donné tout à l’heure quelques chiffres nets. Je vous propose, par souci de transparence, de transmettre à votre commission, pour chaque bloc de mesures, le chiffrage détaillé, en brut et en net, de leur effet sur le PIB et du nombre d’emplois qu’elles permettent de créer. Vous pourrez ainsi vérifier que l’écart entre le brut et le net est faible pour toutes les mesures d’investissement et d’innovation, contrairement à celui qui caractérise les effets du CICE et du pacte de responsabilité : 1,7 point de PIB et 520 000 emplois créés en brut, contre 0,1 point et 280 000 emplois en net. Je ne cite que cet exemple, qui va dans votre sens, monsieur Alauzet. Le différentiel s’explique bien par la capture de l’effet des mesures au niveau des collectivités locales, du fait des destructions d’emplois.

M. le secrétaire d’État. Je commencerai par un point de méthode. Il est d’usage que nous venions vous présenter le programme de stabilité, de même que le budget, à l’issue du Conseil des ministres, par respect pour votre commission qui a ainsi la primeur de ces documents. Mais si les commissaires souhaitent avoir davantage de temps pour les consulter, c’est tout à fait possible : nous sommes à votre disposition.

Madame la présidente de la commission des affaires européennes, nous avons toujours été favorables au reporting public pays par pays – chaque mot compte. Je me souviens parfaitement de l’épisode du mois de décembre ; je ne sais si vous étiez là.

Mme Danielle Auroi. Oui, je l’étais.

M. le secrétaire d’État. Dans ce cas, vous vous en souvenez aussi bien que moi. J’ai toujours dit que la France demandait à l’Europe d’instaurer ce reporting public pays par pays. J’ai toujours dit que, dès que l’Europe l’aurait instauré, nous nous engagions à le transcrire dans notre législation. Pierre Moscovici s’est exprimé ces jours-ci et s’exprimera de nouveau très prochainement sur cette question ; Michel Sapin emporte à Washington des propositions précises, y compris à ce sujet. Je précise que, dans la décision qu’il a rendue après nos travaux de décembre, le Conseil constitutionnel a clairement dit qu’il acceptait le reporting pays par pays dans la mesure où celui-ci n’était pas public, mais réservé aux administrations fiscales, et ce afin de ne pas entraver la liberté d’entreprendre. Il apparaît donc de plus en plus nécessaire qu’un autre principe constitutionnel, celui qui oblige à transposer les règles européennes, nous permette de procéder au reporting de manière solide, constitutionnellement fondée. J’ai été violemment pris à partie à ce sujet en décembre, et je le regrette. Mes propos ont toujours été clairs et nets. Afin de dissiper toute inquiétude s’il en était encore besoin, j’ajoute que le reporting public figure dans les propositions 12 et 13 de la liste de propositions que Michel Sapin et moi-même avons publiée à la suite de l’affaire des Panama papers.

En ce qui concerne le STDR et Panama, Mme Pires Beaune a eu raison de citer les chiffres de 2015. Ils méritent explication. J’ai entendu, en effet, que trois affaires concernant le Panama auraient été traitées au STDR. Mais, si le STDR est saisi d’une affaire dans laquelle un compte est localisé au Luxembourg, concernant une société basée aux Îles Vierges et créée par une autre société elle-même créée au Panama et ayant des bénéficiaires français, dans quelle catégorie faut-il la classer : France, Îles Vierges, Panama ou Luxembourg ? Nous avons adopté, notamment pour présenter le rapport auquel il a été fait allusion – et dont la publication, curieusement, était prévue avant l’affaire Panama –, le principe d’une classification selon la localisation du compte bancaire. Nous avons néanmoins cherché à savoir, à la suite de cette affaire, combien de dossiers traités en 2014 et 2015 concernaient Panama à un stade ou à un autre ; nous en avons trouvé 750 environ, qui représentent quelque 4 milliards d’euros d’avoirs et 1,2 milliard d’impôts et de pénalités perçus.

Les effectifs sont aujourd’hui de 159 agents, en place au service central du STDR et dans les annexes régionales que nous avons créées. Avant l’affaire Panama, nous avions déjà décidé de porter leur nombre à 200 environ. En effet, nous avons 45 000 dossiers, et nous en traitons 6 000 ou 7 000 par an : il nous faut donc plus de personnel pour écluser le stock.

Y a-t-il plus ou moins de dossiers qu’auparavant ? Nous en avons reçu 341 en mars ; il n’est pas sûr que ce soit lié à l’affaire Panama, compte tenu du calendrier des événements. Cela représente 4 000 à 5 000 dossiers par an. Voilà les informations que je puis vous donner à ce stade.

Michel Sapin et moi-même avons rencontré Wolfgang Schäuble à Metz jeudi dernier pour nous mettre d’accord, ainsi qu’avec d’autres pays, sur les propositions qui seront défendues en commun aujourd’hui à Washington, et dans les deux semaines à venir en vue du prochain sommet européen.

Monsieur le président, le lanceur d’alerte que vous êtes sera bientôt protégé par la « loi Sapin » ! En la matière, vous êtes un récidiviste : l’année dernière à la même époque, vous donniez l’alerte dans les mêmes termes – il n’y avait pas assez d’inflation, il allait nous manquer 10 milliards d’euros de recettes, nous avions engagé des dépenses non prévues et le déficit de la France allait exploser. Voilà qui appelle les réponses suivantes.

Vous avez évoqué la faible inflation. Celle-ci a trois effets sur nos comptes publics. Elle a, premièrement, un effet, qui peut paraître négatif, sur les dépenses puisque l’on peut penser qu’elle provoque mécaniquement une diminution des recettes, de TVA par exemple, si la croissance ne compense pas ce déficit d’inflation. Or, nous avons prévu une croissance de 1,5 % – tout a été dit sur l’humilité des prévisionnistes ; je n’en rajouterai pas. Au demeurant, l’an dernier, nous étions dans la même situation : l’écart entre nos prévisions et l’inflation réelle était le même que cette année. Or, il a manqué tout au plus 1 milliard d’euros sur les 170 milliards de recettes de TVA. Ces dernières ont donc été au rendez-vous. Certes, je ne peux pas vous garantir que ce sera encore le cas cette année.

Elle a, deuxièmement, un effet sur les dépenses : une faible inflation permet de mieux tenir les budgets, puisque l’on achète à un prix moins élevé. Je prends un exemple caricatural. Si l’on a alloué à un ministère les crédits nécessaires pour acheter cent véhicules en tenant compte d’une inflation de 1 %, on peut penser que, si celle-ci est finalement de 0,1 %, ces véhicules lui coûteront moins cher et qu’il pourra donc économiser de l’argent. Je pourrais également mentionner le coût plus faible de l’énergie, dont tous les ministères – de même que les collectivités territoriales, nous y reviendrons – bénéficient, car tous doivent chauffer des bâtiments. Une faible inflation favorise donc la tenue des crédits budgétaires et permet même, parfois, d’en annuler un certain nombre. Tel est l’exercice auquel nous sommes en train de nous livrer avec tous les ministères. Faut-il traiter la justice et la défense à part, et considérer que tout est prioritaire, donc sanctuarisé ? Vous comprendrez que le secrétaire d’État au budget ne peut pas tenir ce type de discours. Je reviendrai, du reste, sur la situation du ministère de la justice.

Enfin une faible inflation a un troisième effet : elle diminue le coût de la charge de la dette, car les taux d’intérêt à dix ans et un certain nombre de produits financiers sont indexés sur l’inflation, de sorte qu’une moindre inflation, y compris au niveau européen, produit au moins autant d’économies que des taux d’intérêt faibles.

L’an dernier, les effets de ces trois facteurs se sont assez largement compensés et se sont même montrés, en définitive, plutôt favorables. Mais je ne dis pas que ce n’est pas un souci : nous avons corrigé nos prévisions sur ce point et nous y sommes attentifs.

Je voudrais dire un mot des collectivités territoriales. Mme Pires Beaune a rappelé l’hétérogénéité des situations, mais nous parlons, ici, de moyennes. En moyenne, donc, les recettes réelles de fonctionnement de l’ensemble des collectivités territoriales – communes, intercommunalités, départements et régions – ont augmenté d’1,5 %, en incluant la baisse des dotations, laquelle ne s’élève pas à 28 milliards, madame Louwagie – comme le prétend également M. Laignel, qui prend en compte quatre années de baisse de dotations –, mais à trois fois 3,667 milliards, soit 10,5 milliards. Les dépenses réelles de fonctionnement des collectivités ont, quant à elles, augmenté de 1,46 %.

Leur capacité d’autofinancement a donc, généralement, progressé. Du reste, les comptes au Trésor ont, je le redis, bénéficié d’environ 4 milliards de dépôts supplémentaires, ce qui signifie qu’il existe un certain nombre de disponibilités qui n’ont pas été mises en œuvre, et ce, pour diverses raisons que je n’aurai pas le temps d’exposer. Les dépenses de fonctionnement, qui s’accroissaient d’environ 3 % par an, augmentent donc cette année de 1,46 % et les recettes, comme nous l’avons toujours dit, n’ont pas baissé : elles ont même continué à augmenter, malgré la baisse des dotations.

Se pose donc la question de savoir à quoi est due cette augmentation des recettes. Pour le savoir, nous avons examiné attentivement les produits fiscaux : celui de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises reversée aux collectivités a progressé de 4,5 % et celui des droits de mutation à titre onéreux de 16 %, en raison d’une certaine reprise du marché immobilier. Par ailleurs, une augmentation des taux des impôts locaux a été décidée dans moins d’un tiers des communes et des intercommunalités. Nous avons donc également examiné les raisons de l’accroissement des recettes de taxe d’habitation, de taxe foncière sur les propriétés bâties et de cotisation foncière des entreprises, augmentation qui est de l’ordre de 2,6 milliards d’euros, soit 4 % à 5 %. Vous savez tous que l’augmentation des recettes d’impôts locaux peut avoir trois causes : l’augmentation de l’assiette générale – que vous avez votée et établie à 0,9 %, sans grande pression du Gouvernement –, l’augmentation physique des bases d’imposition et celle des taux. Les travaux de nos services nous ont permis de repérer que cette hausse de 4 à 5 % est due, pour un quart, soit 726 millions exactement, à l’augmentation des taux et pour 521 millions d’euros à la revalorisation forfaitaire, le reliquat étant lié à l’augmentation physique des bases. Je livre ces faits à votre réflexion.

Si vous souhaitez – j’ai également fait cette proposition au Sénat, qui semble faire la sourde oreille – que nous consacrions une séance de travail à la fiscalité locale, je suis prêt à répondre à vos sollicitations. Ensuite, toutes les questions politiques et stratégiques peuvent se poser.

Madame Dalloz, je vous signale que la baisse des dépenses de 1,4 milliard d’euros est calculée hors intérêts de la dette, pensions et comptes d’affectation spéciale (CAS). À ce propos, je précise que nous avons transféré 2 milliards de dépenses militaires d’un CAS vers le budget général, ce qui vient nous « pénaliser », si j’ose dire. En revanche, vous avez raison à propos de la baisse du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne, qui s’établit à 600 millions d’euros.

Un mot, enfin, sur le gel et le surgel des crédits budgétaires ainsi que sur la situation du ministère de la justice. Tout d’abord, geler des crédits ne signifie pas qu’on ne les dépensera pas. Il arrive en effet régulièrement que nous en dégelions, et pas seulement à la fin de l’année, mais dès juin – ce qui est plutôt rare – et septembre, ce qui est un peu plus fréquent. À ce propos, j’ai eu une explication de texte avec M. Urvoas, qui souhaite s’en remettre à un arbitrage qui dépasse ma modeste compétence. Vous en lirez certainement, un jour, le résultat dans les documents budgétaires, ou dans les journaux puisqu’il a choisi de parler davantage à ces derniers qu’à son collègue.

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EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa séance du mercredi 20 avril 2016 à 10 heures 15, la Commission a examiné le présent rapport d’information sur le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 et le programme national de réforme.

M. le président Gilles Carrez. Mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner le rapport d’information de notre Rapporteure générale sur le programme national de stabilité 2016-2019 et le programme national de réforme.

Ces deux documents nous ont été présentés la semaine dernière par le secrétaire d’État chargé du budget et le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. La commission a aussi entendu le président du Haut Conseil des finances publiques, qui, comme vous le savez, doit donner son avis sur les prévisions macroéconomiques du programme de stabilité. Conjointement avec la commission des affaires européennes, nous entendrons prochainement, sans doute le 18 mai, le commissaire européen aux affaires économiques et monétaires, M. Pierre Moscovici, ce qui nous permettra de prendre connaissance des recommandations de la Commission européenne sur le programme de stabilité, qui, chaque année, est transmis avant le 30 avril.

Je rappelle que le Gouvernement n’a pas souhaité organiser un débat en séance publique sur le fondement de l’article 50-1 de la Constitution, ce qui avait été le cas en 2013 et 2014, mais pas en 2015. C’est donc sur la base du rapport de notre Rapporteure générale que nous aurons ce débat mardi prochain, non pas à l’initiative du Gouvernement, mais à celle de nos collègues des groupes Socialiste, républicain et citoyen (SRC) et Radical, républicain, démocrate et progressiste (RRDP).

Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Je me propose de présenter les grands axes du rapport, qui sera disponible à la fin de la semaine en prévision de son examen en séance publique mardi prochain.

Le premier axe reprend la présentation faite lors du Semestre européen, le 17 février dernier à Bruxelles, par le vice-président de la Cour des comptes des Pays-Bas, État qui préside actuellement l’Union européenne. Il s’agit d’une approche historique du respect des critères du pacte de stabilité et de croissance ainsi que d’un bilan de la situation au sein de la zone euro, telle qu’elle se présente aujourd’hui.

Ce document donne la liste des pays au sein de la zone euro faisant l’objet d’une procédure de la part de la Commission européenne pour déficit excessif ; ils sont au nombre de sept sur dix-neuf. Pour certains d’entre eux, un délai de deux ans est ouvert pour remplir les objectifs du pacte de stabilité, sans pour autant casser la croissance ou la dynamique de création de richesses. Cette matrice montre comment, au fil du temps, la crise a affecté un certain nombre de pays, puisqu’en 2009 quatorze pays sur seize faisaient l’objet d’une procédure pour déficit excessif.

Le deuxième axe du rapport porte sur les hypothèses du programme de stabilité. Les hypothèses retenues par le Gouvernement pour établir celui-ci y sont comparées avec celles de la plupart des organismes qui font des prévisions macroéconomiques ; elles portent sur la croissance, les exportations, la consommation, l’investissement ou l’inflation. La semaine dernière, le président du Haut Conseil des finances publiques a rappelé devant notre commission que la seule divergence susceptible de demeurer portait sur l’hypothèse de croissance potentielle pour la France.

Au demeurant, les hypothèses retenues pour l’élaboration du programme de stabilité sont proches de celles de la plupart des autres organismes ou institutions : Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), Fonds monétaire international (FMI), Banque de France, Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) et Commission européenne.

L’hypothèse de croissance potentielle – qui donne toujours lieu à de vastes discussions – est une grandeur qui ne s’observe pas, contrairement à la croissance qui se mesure a posteriori. Elle n’en est pas moins restée la même que l’an dernier, et, à l’époque, nous avions eu un débat portant sur le fait de savoir pourquoi l’hypothèse de croissance retenue par la France était supérieure à celle de la Commission européenne. Je partage le point de vue du Gouvernement qui souhaite maintenir ses prévisions.

Le 1er mars dernier, j’ai d’ailleurs écrit au commissaire européen compétent ; dans ce courrier, je manifestais mon étonnement devant les analyses macroéconomiques de la Commission, puisque, dans le document qu’elle a remis le 17 février dernier, elle précisait que la zone euro connaissait un output gap tendant vers zéro, et que l’inflation repartirait. En d’autres termes, cela signifie que la Commission européenne considère que la crise économique serait terminée au sein de la zone euro à l’horizon de la fin de l’année 2016 ou du début de l’année 2017. Nous ne partageons pas cette hypothèse qui semble peu réaliste pour bâtir un programme de stabilité : elle n’a donc pas été validée par le Gouvernement.

Ainsi, notre hypothèse de croissance potentielle est supérieure de 0,3 à 0,4 point à celle prévue par la Commission européenne pour 2016 ou 2017.

Le troisième axe du programme de stabilité concerne les objectifs, qui reposent sur deux indicateurs.

Le premier, cher au président de notre commission, porte sur le déficit nominal
– c’est-à-dire l’argent sonnant et trébuchant qu’il faut emprunter pour le financer : l’objectif du Gouvernement est d’atteindre – 3,3 % du produit intérieur brut (PIB) en 2016 et – 2,7 % en 2017, alors que celui de la Commission européenne ne diffère que d’un dixième de point.

Le second, qui ne porte pas sur le déficit structurel, mais sur l’ajustement structurel
– c’est-à-dire la marche à gravir pour atteindre l’objectif de déficit structurel – est estimé à 0,4 point de PIB par le Gouvernement, alors que l’Union européenne demande le double. Encore une fois, cette marche se mesure à l’aune de la croissance potentielle ; or nous ne partons pas des mêmes hypothèses.

Mon rapport établit encore la comparaison entre les prévisions de l’évolution du déficit nominal et du déficit structurel réalisées par le Gouvernement et celles du Conseil de l’Union européenne, et porte en outre sur l’appréciation comparée de l’effort structurel, c’est-à-dire de la façon dont on peut atteindre ces objectifs.

Les moyens mis en œuvre pour cela constituent le quatrième axe du programme de stabilité. À court terme, ils reposent quasi exclusivement sur la réduction des dépenses publiques, à raison de 13,2 milliards d’euros d’économies, plus 1,8 milliard d’euros provenant d’économies de constatation sur la charge de la dette. Pour l’année 2016, 15 milliards d’euros de baisse des dépenses sont donc prévus, et 18,7 milliards le sont pour l’année 2017, ce qui permettra d’atteindre les objectifs du programme de stabilité.

Si nous avions retenu l’hypothèse de croissance potentielle de la Commission européenne, l’effort structurel nécessaire aurait été inférieur de 0,2 point de PIB à ce que propose le Gouvernement. En d’autres termes, le choix même de ce taux de croissance potentielle compte pour 0,2 point dans la réalisation de l’effort structurel ; encore une fois, aucun ajustement n’a été nécessaire par rapport à l’année 2015.

J’ai récapitulé les mesures envisagées en matière de dépenses publiques : les économies prévues par la loi de finances initiale pour 2016 s’élevaient à 15,8 milliards d’euros ; une partie de ce montant, estimée à 4,6 milliards d’euros, a été « détruite » par la faible inflation, ce qui ramène le total à 11,2 milliards d’euros.

Dans le cadre du programme de stabilité, le Gouvernement propose d’ajouter 2 milliards d’euros d’économies, le montant passant ainsi à 13,2 milliards d’euros. Par ailleurs, une moindre charge relative aux intérêts de la dette – pour 1,8 milliard d’euros – est constatée ; le montant total des économies s’élève ainsi à 15 milliards d’euros. C’est ce dernier chiffre qui est retenu par le programme de stabilité ; il est légèrement inférieur aux 15,8 milliards d’euros prévus par la loi de finances initiale, du fait de la bonne exécution, en fin d’exercice 2015, de la réduction du déficit nominal : 3,5 % du PIB au lieu des 3,8 % prévus. La marche à gravir était donc moins élevée que ce que la loi de finances initiale avait estimé.

Le Gouvernement a par ailleurs annoncé un montant de dépenses supplémentaires de 4 milliards d’euros, qu’il s’est engagé à financer par de nouvelles réductions de dépenses.

Pour l’année 2017, 18,7 milliards d’euros d’économies sont annoncés, dont 5 milliards d’euros d’économies supplémentaires prévues par le programme de stabilité. Le prochain projet de loi de finances détaillera l’ensemble de ces économies.

Que signifie « atteindre les objectifs de la Commission européenne sur l’effort structurel » ? Pour répondre à cette question, j’ai été conduite à établir mon propre calcul, car il n’existe nulle part ailleurs. Il en résulte que cela revient à considérer qu’il aurait fallu réaliser, en 2016 et 2017, 26 milliards d’euros d’économies supplémentaires, soit un effort nettement supérieur à nos prévisions.

Le modèle économétrique de simulation et d’analyse générale de l’économie, dit MÉSANGE, a, cette fois, fonctionné, et les projections établies ont montré que répondre à la demande d’effort structurel de la Commission européenne conduirait à détruire 1,1 point de PIB et 152 000 emplois à l’horizon 2018. Ces chiffres sont présentés en cumulé, c’est-à-dire que 20 000 emplois seraient détruits la première année, 83 000 à la fin de la deuxième, et 152 000 à l’horizon 2018. Il ne me semble pas que de telles perspectives soient compatibles avec le projet « stratégie Europe 2020 » que l’Union européenne est réputée défendre, et qui ne saurait concerner les seules finances publiques.

Le programme national de réforme (PNR), présenté par chaque État, est destiné à répondre aux objectifs de la « stratégie Europe 2020 », et connaît des variations en fonction des pays considérés. Il a été constaté que la principale difficulté rencontrée par nombre de membres de l’Union européenne est le manque de demande interne, ce qui freine la relance de la machine économique.

L’année dernière, le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique a présenté le PNR en chiffres bruts, ce qui retrace les attentes en termes de création de croissance et d’emplois. À l’époque, j’avais demandé une présentation en chiffres nets, permettant de mettre en évidence la destruction d’emplois et de croissance résultant des réductions de dépenses. Cette année, nous disposons d’une estimation en chiffres nets incluant l’effet attendu moins le « coût de son financement », c’est-à-dire sa traduction en destruction d’emploi ou de PIB.

Selon le modèle MÉSANGE, il serait créé, en cumulant toutes les mesures proposées, 665 000 emplois, principalement du fait du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et du pacte de responsabilité. Les 40 milliards d’euros que coûtent ces deux dispositifs étant destructeurs d’emplois, le résultat net obtenu in fine serait un gain de 2,5 points de PIB et 665 000 emplois créés à l’horizon 2020, ce qui est à l’évidence moins que ce qu’indiquaient les prévisions fondées sur des chiffres bruts.

J’ai enfin recensé les objectifs d’Europe 2020, programme réputé servir de boussole aux pays membres de l’Union européenne ainsi qu’à la Commission européenne pour amener l’Europe et la zone euro vers une croissance plus élevée : ils sont au nombre de cinq.

Le premier est relatif à l’emploi. Le deuxième porte sur la recherche et développement, l’ambitieux objectif de 3 % du PIB n’étant toujours pas atteint aujourd’hui, ni par la France, ni par l’Union européenne. Le troisième vise le changement climatique et les énergies durables, ce qui implique que nous soyons capables de faire plus avec moins, en recourant à des ressources renouvelables. Le quatrième porte sur l’éducation, avec le double objectif d’abaisser à moins de 10 % le taux de sorties précoces du système scolaire et d’aboutir à un taux de diplômés de l’enseignement supérieur au moins égal à 40 % dans la population âgée de trente à quarante ans. Le cinquième concerne la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, ce qui passe par la réduction de 20 millions du nombre de personnes touchées en Europe par ce fléau.

L’action de coordination attendue de la part de la Commission européenne dans l’examen des PNR, au regard des cinq objectifs fixés par Europe 2020, n’est guère efficiente aujourd’hui. Les résultats attendus pour doper la croissance et relancer la demande interne ne sont pas pleinement atteints, et c’est pourquoi j’ai insisté pour les présenter : les objectifs d’Europe 2020 doivent être liés aux plans nationaux de réforme.

M. Dominique Lefebvre. Je tiens à remercier notre Rapporteure générale pour ce rapport qui va à l’essentiel ; le débat que nous menons en commission comme dans l’hémicycle a pour objet de faire connaître la position du Parlement sur la trajectoire de redressement des finances publiques choisie par le Gouvernement.

Ce document met en évidence les résultats obtenus ainsi que les éventuels écarts susceptibles d’émailler les discussions que nous pourrions avoir avec la Commission européenne, et qui portent essentiellement sur le niveau d’effort structurel demandé. Cette question qui renvoie au fameux débat, si technique que nous préférons nous-mêmes ne pas nous y égarer, sur le taux de croissance potentielle. La réalité est que, si nous suivions mécaniquement les recommandations du Conseil de l’Union européenne, les effets de l’effort d’ajustement seraient à nos yeux négatifs au regard de la croissance et de l’emploi.

Ce débat a cours depuis le début du quinquennat, au sein de la majorité comme avec l’opposition. Le programme national de réforme présenté nous convient, car il permet de tenir les objectifs définis quant au solde nominal, ce qui me semble impératif. Les efforts complémentaires à fournir ne sont pas d’une ampleur très différente de ceux réalisés en 2015, et la ligne directrice demeure la limitation du déficit public à moins de 3 % du PIB en 2017.

M. Éric Woerth. Je m’interroge sur la manière dont sont calculés les 4 milliards d’euros de dépenses nouvelles. L’opposition considère, quant à elle, que ce montant sera plus élevé ; peut-être le résultat final sera-t-il intermédiaire entre ces deux estimations ?

M. le président Gilles Carrez. D’après mes propres calculs, il s’agirait plutôt de 5 à 6 milliards d’euros, ce qui ne représente pas un écart considérable…

M. Éric Woerth. Quel crédit peut-on accorder, d’autre part, aux prévisions en matière de créations d’emplois, qu’elles soient nettes ou brutes ? Je me doute bien que ces chiffres proviennent de modèles...

Mme Karine Berger. Cela fait réfléchir, n’est-ce pas ?

M. Éric Woerth. Pas vraiment : cela me conduit plutôt à douter encore plus des chiffres et des modèles. C’est pourquoi, je le dis sans cynisme, je souhaite sincèrement savoir, madame la Rapporteure générale, quel est le crédit que vous apportez aux prévisions que vous nous avez présentées.

J’observe, par ailleurs que l’impact attendu de la réforme sur l’éducation est de zéro…

M. Philippe Vigier. Alors que les dépenses nouvelles se multiplient, le Gouvernement pourrait-il préciser comment seront ventilées les 4 milliards d’euros d’économies complémentaires annoncées ? Les scénarios de réforme des minima sociaux contenus dans le rapport que M. Christophe Sirugue vient de remettre au Premier ministre coûtent, à eux seuls, entre 2 à 6 milliards d’euros !

Pour 2017, le programme de stabilité comporte 3,7 milliards d’euros d’économies pour les collectivités locales, ainsi que l’a confirmé le ministre de l’économie, mais il me semble avoir entendu des voix dissonantes au sein du Gouvernement, et le chiffre d’un milliard d’euros de redéploiements circule. Si mes informations sont exactes, c’est ce qu’a dit le Premier ministre lui-même aux présidents de conseils généraux venus lui parler du financement du revenu social d’activité (RSA). Qu’en est-il réellement ?

L’enthousiasme de Dominique Lefebvre est toujours très grand, mais je me permets de lui faire observer que, malgré un contexte extrêmement favorable – le prix des matières premières est bien plus faible qu’autrefois, l’inflation n’est que de 0,1 %, le niveau des intérêts d’emprunt est au plus bas –, le programme de stabilité qui misait initialement sur 14 milliards d’euros d’économies en prévoit maintenant pour près de 19 milliards d’euros !

Mme Karine Berger. Monsieur Woerth, vous devriez faire confiance au modèle économétrique MÉSANGE. Je le connais de l’intérieur, et je puis vous assurer qu’il est très solide et qu’il repose sur des calculs simples. Il est « proportionnel », c’est-à-dire que, si l’on double ou que l’on triple les baisses de dépenses demandées par la Commission européenne, comme le propose la droite, ce doublement ou ce triplement se constatera aussi pour les suppressions d’emplois.

À la page 105 du document rédigé par le Gouvernement sur le programme de stabilité, un tableau indique que le CICE pèserait sur les recettes à hauteur de 5,3 % en 2015, de 0,6 % en 2016, et de 3,1 % en 2017. Cela m’étonne car, sauf erreur de ma part, le CICE est déjà engagé en comptabilité nationale.

M. le président Gilles Carrez. Ce sont des données en décaissement.

Mme Karine Berger. Si c’est le cas, un programme de stabilité rédigé sans tenir compte des règles comptables de Maastricht, cela « fait désordre » ! Les 3,1 % annoncés pour 2017 me paraissent par ailleurs élevés, outre le fait qu’ils ne correspondent pas au calcul en comptabilité nationale.

Je vous remercie, madame la Rapporteure générale, d’avoir calculé l’impact qu’aurait l’application de la recommandation du Conseil de l’Union européenne sur la croissance et l’emploi, notamment si nous allions jusqu’à doubler la réduction du déficit structurel initialement prévue. Dans le dernier traité budgétaire européen, dans le two-pack et le six-pack, est inscrite une limite minimale correspondant à 0,5 point de PIB. Je suis ravie que le Conseil nous fasse une recommandation d’ajustement structurel de 0,8 ou 0,9 point, mais ce n’est pas dans le traité que nous avons signé. Je voudrais comprendre d’où viennent ces chiffres, et en quoi ils pourraient nous être imposés dès lors que nous respectons les traités à la lettre. Je crois plus important de respecter les traités internationaux que les recommandations de responsables politiques qui n’ont pas de responsabilités en France.

Je conclus par une remarque amusée, ou plutôt agacée : mes chers collègues – et je m’adresse plus particulièrement aux membres de la majorité –, vous apprendrez à la page 53 du document du Gouvernement sur le programme national de réforme que nous allons tous voter le projet de loi sur le droit du travail d’ici l’été 2016, puisque l’accroissement des marges de manœuvre des entreprises pour déterminer les règles de rémunération des heures supplémentaires est d’ores et déjà considéré comme adopté…

M. Patrick Hetzel. C’est sans doute parce que la majorité présidentielle est particulièrement bien tenue ! (Sourires.)

Madame la Rapporteure générale, nous constatons que le Gouvernement propose dans le programme de stabilité que l’effort des administrations de sécurité sociale soit, en 2017, supérieur à celui de l’État lui-même : 8,8 milliards d’euros d’économies pour les premières, 6,2 milliards d’euros pour le second. Je m’interroge sur ces chiffres, et mes questions sont d’autant plus justifiées que, selon le document que vous nous avez distribué, sur les 5,3 milliards d’euros d’économies des administrations de sécurité sociale annoncées en 2016, 1,9 milliard d’euros ne sont pas documentés – et je ne parle même pas de l’année 2017 ! Ce manque de précision est assez inquiétant.

Par ailleurs, vous nous avez présenté des données cumulées sur l’impact du programme national de réforme à l’horizon 2020. Êtes-vous en mesure de ventiler ces chiffres sur les cinq années concernées ? Au-delà de la situation en 2020, nous sommes intéressés par la tendance et par la répartition des effets dans le temps.

M. Marc Goua. L’impact net du programme national de réforme en nombre d’emplois est estimé à 665 000 en 2020. Compte tenu de l’évolution démographique, comment cela se traduira-t-il sur le taux de chômage en 2020 ?

D’autre part, la transition énergétique est censée permettre la création de 120 000 emplois ; je crains que cette prévision ne soit un peu optimiste. A-t-on bien décompté les destructions d’emplois qu’elle causera dans d’autres secteurs ?

M. le président Gilles Carrez. Étant donné qu’il n’y aura pas de collectif budgétaire de milieu d’année, la loi de finances pour 2017 sera la dernière loi de finances de la législature. Or, cette année 2017 verra la mise en œuvre de la dernière tranche du pacte de responsabilité, avec la suppression totale de ce qui reste de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) et la première étape de la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés (IS). La pression fiscale continuera donc à diminuer, pour atteindre les 40 milliards d’euros prévus au total. La réduction du déficit ne peut donc venir que d’une baisse des dépenses, mais les économies supplémentaires envisagées ne sont pas suffisamment documentées. Certaines sont liées au fait que l’inflation a quasiment disparu. Sachant que nous avons la quasi-certitude que l’inflation sera faible, il faut documenter les 3,8 milliards d’euros affectés à la compensation de la réduction de l’inflation par rapport au tendanciel.

De nombreuses dépenses supplémentaires, en outre, ont été engagées depuis le début de l’année. Il faut les analyser de façon très rigoureuse, ainsi que les mesures de compensation prévues. Elles consisteront en annulations de crédits mis en réserve, sachant que, cette année, les crédits de reports de 2015 sur 2016 ont été presque totalement intégrés à la réserve – à l’exception, je crois, de ceux de la police nationale et de la gendarmerie nationale. Selon un courrier issu du Gouvernement, la réserve représente, au total, 11,8 milliards d’euros en autorisations d’engagement, ce qui permettrait de trouver les montants nécessaires – 4 milliards d’euros auxquels s’ajoutent les 3,8 milliards d’euros liés à la baisse de l’inflation. Sans même parler du caractère qualitatif des annulations de crédits, qui frappent malheureusement en priorité les crédits « pilotables » plutôt que ceux qui devraient être touchés – il suffit de penser à la découverte par M. Jean-Jacques Urvoas des crédits de son ministère (Sourires) –, il faut savoir que l’on parvient, bon an mal an, à annuler 4 à 5 milliards d’euros au plus. Nous entrons donc dans une sorte d’impasse quant à la gestion des dépenses. Mme la Rapporteure générale peut-elle nous éclairer sur l’articulation des économies et du financement des dépenses nouvelles ?

Enfin, nous avons sans aucun doute besoin d’un modèle macroéconomique, mais nous sommes quelque peu sceptiques s’agissant des données produites. Existe-t-il, au-delà de MÉSANGE, des analyses microéconomiques qui permettraient de constater, pour chaque secteur de dépenses, les mécanismes par lesquels la réduction des dépenses publiques engendre des pertes d’emplois ? En l’état, croire aux chiffres qui nous sont présentés relève d’un acte de foi !

Mme la Rapporteure générale. Monsieur Woerth, le Gouvernement a bien annoncé, depuis le début de l’année, des dépenses supplémentaires par rapport à la loi de finances, pour un montant total de 4 milliards d’euros. La prime à l’embauche a été annoncée le 18 janvier, pour un coût estimé d’un milliard d’euros. À la même date, la formation de 500 000 chômeurs supplémentaires a été annoncée pour 600 millions d’euros. Le 11 février, a été présenté le plan de soutien à l’élevage en même temps qu’était annoncée la baisse de cotisations sociales des agriculteurs, pour un coût respectif de 400 millions et 500 millions d’euros. Le fonds de financement de la transition énergétique coûtera 300 millions d’euros. La hausse de 1,2 % du point d’indice des fonctionnaires, annoncée le 17 mars, sera mise en œuvre le 1er juillet prochain : elle représentera, pour l’année 2016, une dépense supplémentaire de 600 millions d’euros. Le coût du prolongement d’un an de la mesure de suramortissement annoncée le 31 mars s’élève à 400 millions d’euros. Enfin, les mesures en faveur des jeunes annoncées le 11 avril dernier coûteront 200 millions d’euros.

Il est vrai que nous aurons besoin de précisions concernant le financement envisagé des mesures que je viens de citer. Je puis cependant déjà vous communiquer, sans prétendre que nous devons nous en contenter, les informations dont je dispose. Plusieurs mesures seraient financées par le redéploiement sous la norme de dépense – ce serait le cas de la prime à l’embauche pour 900 millions d’euros, du plan de soutien à l’élevage et de la baisse des cotisations sociales pour les agriculteurs. La diminution des décaissements du programme d’investissements d’avenir (PIA) équivaudrait à 400 millions. Les économies sur les administrations de sécurité sociale – sans que j’aie d’autres informations, monsieur Hetzel – se monteraient à 300 millions. Le gel des reports de crédits de 2015 sur 2016 s’élèverait à 1,8 milliard d’euros.

Mme la Rapporteure générale. Monsieur Woerth, MÉSANGE a été mis au point par le ministère des finances au début des années 2000. Sa robustesse a été testée et, que je sache, lorsque vous étiez ministre du budget, toutes les évaluations produites par Bercy s’appuyaient sur ce modèle économétrique. MÉSANGE serait-il devenu moins fiable depuis que vous êtes passé dans l’opposition ? Ce modèle reste celui qui permet au ministère des finances de mettre en place l’ensemble de ses projections. Des tests, surnommés post mortem, sont pratiqués a posteriori sur les chiffres produits pour les confronter à ce qu’il s’est réellement passé. J’imagine que si le modèle perdure, c’est qu’il a dû donner satisfaction, y compris lorsque vous l’utilisiez…

M. Éric Woerth. Très peu !

Mme la Rapporteure générale. Sans doute est-ce pour cela que nous ne disposions que de peu d’études d’impact !

M. Patrick Hetzel. Une mésange ne fait pas le budget ! (Sourires.)

Mme la Rapporteure générale. Madame Berger, les données que vous évoquez à propos de CICE correspondent bien à des décaissements.

Mme Karine Berger. Elles ne correspondent pas aux normes de la comptabilité au sens du traité de Maastricht.

Mme la Rapporteure générale. Vous m’avez également interrogée sur l’ajustement structurel recommandé par le Conseil de l’Union européenne. Un tableau relatif aux normes de finances publiques applicables aux États membres dont la dette publique excède 60 % du PIB figurera dans mon rapport d’information. Tant que l’objectif à moyen terme n’est pas atteint, nous sommes censés réaliser au moins 0,5 point de PIB d’ajustement structurel : il s’agit d’un plancher. L’ajustement de 0,8 ou 0,9 point que vous évoquez relève du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance.

Pour ce qui concerne le projet de loi relatif au droit du travail, disons que le programme national de réforme a un caractère fortement prospectif…

Monsieur Hetzel, j’ai demandé au Gouvernement quelles économies il attendait de la baisse des tarifs appliqués à l’hôpital public et dans l’ensemble des cliniques privées. Je vous transmettrai ces informations dès qu’elles me parviendront. Je n’en sais pas davantage sur les économies d’1,9 milliard d’euros annoncées pour 2016 sur les administrations de sécurité sociale.

Monsieur Goua, l’étude de l’impact du programme national de réforme sur les créations et destructions d’emplois ne permet pas d’extrapoler un taux de chômage pour 2020. L’exercice demanderait d’intégrer toutes les autres données économiques !

Enfin, monsieur le président, le gel de report de crédits s’élèvera bien à 1,8 milliard d’euros. Nous présenterons ultérieurement, pour l’ensemble des décrets d’avance, un tableau indiquant, comme l’année dernière, ce qui a été voté et ce qu’il s’est passé dans la réalité.

M. le président Gilles Carrez. Madame la Rapporteure générale, nous vous remercions pour ce document de qualité, qui sera extrêmement utile pour notre réflexion.

La commission autorise la publication du rapport d’information de la Rapporteure générale sur le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 et le programme national de réforme.

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1 () Voir fiche n° 1 sur les cycles annuels budgétaires 2015 et 2016 et fiche n° 2 sur la surveillance des politiques économiques nationales par l’Union européenne.

2 () Conseil européen d’Amsterdam, 16 et 17 juin 1997, D/97/2. Règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques. Règlement (CE) n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs.

3 () Applicable à l’ensemble des pays de l’Union européenne, le pacte de stabilité et de croissance présente une importance particulière pour les pays de la zone euro, appelés à coordonner leurs politiques économiques et budgétaires dans un souci primordial de convergence. En conséquence, ce paragraphe se concentre sur la situation des pays de la zone euro.

4 () Ce schéma est issu de la présentation réalisée par M Kees Vendrik, vice-président de la Cour des comptes des Pays-Bas lors de la Conférence interparlementaire sur la stabilité, la coordination économique et la gouvernance dans l’Union européenne, au Parlement européen, le 17 février 2016.

5 () La décision du Conseil est formellement prise avec un an de retard par rapport à l’année étudiée. Ainsi, le Conseil décide d’ouvrir une procédure de déficit excessif contre le Portugal le 5 novembre 2002, en raison du déficit nominal du pays de 4,1 % pour l’année 2001. Dès lors, le Portugal est considéré comme étant en procédure de déficit excessif au titre de l’année 2001. Cette décision est ainsi reportée dans le schéma ci-dessus.

6 () Entretien télévisé de M. Jacques Chirac, le 14 juillet 2003.

http://discours.vie-publique.fr/notices/037000259.html.

7 () Cour de justice des Communautés européennes (CJCE), 13 juillet 2004, C-27/04.

8 () Article 104 § 9 du traité sur l’Union européenne, 92/C 191/01.

9 () Règlement (CE) n° 1056/2005 du Conseil du 27 juin 2005 modifiant le règlement (CE) n° 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs.

10 () Conclusions du Conseil européen des 22 et 23 mars 2005, 7619/1/05.

11 () Recommandation du Conseil visant à ce qu’il soit mis fin à la situation de déficit public excessif en France, 10 mars 2015, 6704/15.

12 () Voir fiche n° 3 sur le cadrage macroéconomique du programme de stabilité.

13 () Voir fiche n° 4 sur les objectifs de finances publiques du programme de stabilité pour les années 2016 à 2019.

14 () Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

15 () Voir fiche n° 5 sur les recettes et le suivi du pacte de responsabilité et de solidarité.

16 () Voir fiche n° 5 sur les recettes.

17 () Voir fiche n° 6 sur l’évolution des dépenses publiques.

18 () Recommandation du Conseil du 14 juillet 2015 concernant le programme national de réforme de la France pour 2015 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2015, 2015/C 272/14.

19 () Voir fiche n° 8 sur le programme national de réforme 2016.

20 () Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

21 () Voir fiche n° 7 sur la « stratégie Europe 2020 »

22 () Voir les fiches sur « la surveillance des politiques économiques nationales par l’Union européenne » et sur « la stratégie Europe 2020 ».

23 () Article 2 bis du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dans sa version modifiée par le paragraphe 3 de l’article 1er du règlement n° 1175/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011.

24 () Le « paquet de deux » en français.

25 () Jusqu’à présent, la France a choisi de communiquer à la Commission européenne le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances, lequel fait office tout à la fois de plan budgétaire et de programme de partenariat économique.

26 () Commission européenne, communication du 28 novembre 2014 : http://ec.europa.eu/europe2020/pdf/2015/ags2015_fr.pdf.

27 () Commission européenne, Rapport 2015 pour la France concernant un bilan approfondi sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques, 26 février 2015 : http://ec.europa.eu/europe2020/pdf/csr2015/cr2015_france_fr.pdf.

28 () Commission européenne, recommandation de recommandation du Conseil visant à ce qu’il soit mis fin à la situation de déficit public excessif en France, 27 février 2015 : http://ec.europa.eu/transparency/regdoc/rep/1/2015/FR/1-2015-115-FR-F1-1.PDF.

29 () Valérie Rabault, Rapport d’information sur le programme de stabilité pour les années 2015 à 2018 et le programme national de réforme, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 2740, 22 avril 2015 : http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i2740.asp.

30 () Commission européenne, recommandation de Recommandation au Conseil concernant le programme national de réforme de la France pour 2015 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2015, 13 mai 2015 : http://ec.europa.eu/europe2020/pdf/csr2015/csr2015_france_fr.pdf.

31 () Commission européenne, communication sur l’évaluation de l’action engagée par la France en réponse à la recommandation du Conseil du 10 mars 2015 visant à ce qu’il soit mis fin à la situation de déficit public excessif, 1er juillet 2015 : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A52015DC0326.

32 () Recommandation du Conseil de l’Union européenne du 14 juillet 2015 concernant le programme national de réforme de la France pour 2015 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2015 : http://ec.europa.eu/europe2020/pdf/csr2015/csr2015_council_france_fr.pdf.

33 () Commission européenne, 17 novembre 2015 : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-15-6067_fr.htm.

34 () Rapport sur la mise en œuvre des actions suivies d’effet : http://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/Rapport_mise_en_oeuvre_actions_suivies_effet.pdf.

35 () Commission européenne, Examen annuel de la croissance 2016, 26 novembre 2015 : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-15-6069_fr.htm.

36 () Commission européenne, Rapport 2016 pour la France, 26 février 2016 : http://ec.europa.eu/europe2020/pdf/csr2016/cr2016_france_fr.pdf.

37 () Commission européenne, 8 mars 2016 : http://ec.europa.eu/europe2020/pdf/csr2016/cr2016_comm_en.pdf.

38 () Voir fiche sur la « stratégie Europe 2020 ».

39 () Ces règles sont aujourd’hui codifiées à l’article 126 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) et précisées par le protocole n° 12 sur la procédure concernant les déficits excessifs.

40 () Article 2 § 1 bis du règlement (CE) n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs, dans sa version modifiée par le b) du paragraphe 2 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1177/2011 du Conseil du 8 novembre 2011.

41 () Le seuil de – 0,5 point de PIB défini par l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) prime sur le seuil de – 1 point de PIB défini par l’article 2 bis du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dans sa version modifiée par le paragraphe 8 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1175/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011.

42 () Article 5 § 1 du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dans sa version modifiée par le paragraphe 8 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1175/2011 précité.

43 () Idem.

44 () Article 5 § 2 du règlement précité.

45 () Article 6 du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dans sa version modifiée par le paragraphe 9 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1175/2011 précité.

46 () Article 5 § 1 du règlement (CE) n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs, dans sa version modifiée par le paragraphe 6 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1177/2011 précité.

47 () Article 12 du règlement précité, dans sa version modifiée par le paragraphe 11 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1177/2011 précité.

48 () Article 2 du règlement (UE) n° 1176/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011 sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques.

49 () Commission européenne, 8 mars 2016 : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-16-591_fr.htm.

50 () Par exemple, la réunion du 10 mars 2016 de la Représentation en France de la Commission européenne : http://web.dbee.com/repfrce/20160310/.

51 () Commission européenne, Rapport 2016 pour la France, 26 février 2016 : http://ec.europa.eu/europe2020/pdf/csr2016/cr2016_france_en.pdf.

52 () Commission européenne, Rapport 2016 pour l’Allemagne, 26 février 2016 : http://ec.europa.eu/europe2020/pdf/csr2016/cr2016_germany_en.pdf.

53 () Avis n° 2014-05 du 26 septembre 2014relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2015.

54 () Avis n° 2015-03 du 25 septembre 2015 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2016.

55 () Avis n° 2015-04 du 6 novembre 2015 relatif au projet de loi de finances rectificative pour 2015.

56 () Avis n° 2014-05 du 26 septembre 2014 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2015.

57 () Valérie Rabault, Rapport d’information sur le programme de stabilité pour les années 2015 à 2018 et le programme national de réforme, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 2740, 22 avril 2015 : http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i2740.asp.

58 () Voir fiche n° 5 sur les recettes.

59 () Valérie Rabault, Rapport d’information sur le programme de stabilité pour les années 2015 à 2018 et le programme national de réforme, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 2740, 22 avril 2015 : http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i2740.asp.

60 () Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

61 () Loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012.

62 () Loi n° 2014-891 du 8 août 2014 de finances rectificative pour 2014.

63 () Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

64 () Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

65 () Règlement (UE) n° 549/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux.

66 () Décret n° 2015-639 du 9 juin 2015 portant annulation de crédits.

67 () La mesure est entrée en vigueur le 1er juillet 2015, en vertu de l’article 85 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

68 () Au titre de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, après la mission Enseignement scolaire.

69 () Taux moyen pondéré des bons du Trésor à intérêts annuels (BTAN) et des obligations assimilables du Trésor (OAT) établi à 0,40 % fin mars 2016. Bulletin mensuel de l’Agence France Trésor, n° 310, mars 2016.

70 () INSEE, Informations rapides, n° 63, 15 mars 2016 : l’indice des prix à la consommation se replie de 0,2 % sur un an.

71 () Projet de loi de finances pour 2015, exposé général des motifs, page 8.

72 () Cité précédemment.

73 () Rapport économique, social et financier, annexé au projet de loi de finances pour 2016, page 144.

74 () Rapport économique, social et financier, annexé au projet de loi de finances pour 2015, page 27.

75 () Programme de stabilité de la France pour les années 2015 à 2018, page 7.

76 () Rapport économique, social et financier, annexé au projet de loi de finances pour 2016, pages 140 et suivantes.

77 () Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, annexe I, B.

78 () Rapport économique, social et financier, annexé au projet de loi de finances pour 2016, page 67.

79 () La diminution nette des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales s’élève pour 2016 à 3,3 milliards d’euros, contre 3,5 milliards d’euros prévus lors du projet de loi de finances pour 2016.

80 () Conseil européen, conclusions de la présidence, 23 et 24 mars 2000.

81 () Conseil européen, conclusions du 17 juin 2010, EUCO 13/10.

82 () Commission des communautés européennes, Lignes directrices intégrées pour la croissance et l’emploi (2005-2008), 12 avril 2005, COM(2005) 141 final.

83 () Communication de la Commission au Conseil européen, Rapport stratégique concernant la stratégie renouvelée de Lisbonne pour la croissance et l’emploi : lancement du nouveau cycle (2008-2010), 11 décembre 2007, COM(2007) 803.

84 () Articles 121 et 148 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).

85 () Conseil européen, conclusions du 17 juin 2010, EUCO 13/10.

86 () Décision 2015/1848/UE du Conseil du 5 octobre 2015 relative aux lignes directrices pour les politiques de l’emploi des États membres pour 2015.

87 () Recommandation (UE) 2015/1184 du Conseil du 14 juillet 2015 relative aux grandes orientations des politiques économiques des États membres et de l’Union européenne.

88 () Article 148 § 4 TFUE.

89 () Article 121 § 4 TFUE.

90 () Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et sociale européen et au Comité des régions, État des lieux de la stratégie Europe 2020 pour une croissance intelligente, durable et inclusive, 5 mars 2014, COM(2014) 130 final.

91 () Commission européenne, Rapport 2016 pour la France contenant un bilan approfondi sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques, 26 février 2016, SWD (2016) 79.

92 () Recommandation du Conseil du 14 juillet 2015 concernant le programme national de réforme de la France pour 2015 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2015, 2015/C 272/14.

93 () Recommandation précédemment citée, 2015/C 272/14.

94 () Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

95 () Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles ; loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral ; loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

96 () Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.

97 () Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

98 () M. Richard Ferrand, Rapport fait au nom de la mission d’information commune sur l’application de la loi n° 2015-990 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 3596, 22 mars 2016.

99 () Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi.

100 () Loi n° 2015-990 précitée.

101 () Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi.

102 () Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale.

103 () Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République.

104 () Loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche.


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