N° 4256 - Rapport d'information de M. René Rouquet déposé en application de l'article 29 du règlement au nom des délégués de l'Assemblée nationale à l'Assemblée parlementaire du conseil de l'Europe sur l'activité de cette Assemblée au cours de la quatrième partie de sa session ordinaire de 2016.



RAPPORT D’INFORMATION

FAIT

en application de l’article 29 du Règlement

au nom des délégués de l’Assemblée nationale à l’Assemblée

parlementaire du Conseil de l’Europe (1) sur l’activité de cette Assemblée

au cours de la quatrième partie de sa session ordinaire de 2016

par M. René ROUQUET

ET PRÉSENTÉ À LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

(1) La composition de cette délégation figure au verso de la présente page.

PREMIER CHAPITRE : ACTIVITÉS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE DEPUIS LA PRÉCÉDENTE PARTIE DE SESSION 5

I. Activités du Président 5

A. Réunion du Bureau - Paris ( 5 septembre 2016) 5

B. Conférence européenne des Présidents de Parlement du Conseil de l’Europe - Strasbourg (15 et 16 septembre 2016) 6

II. Activités de la délégation 6

A. Séminaire sur la lutte contre le racisme, la haine et l’intolérance – Paris
(8 septembre 2016) 6

B. Colloque sur l’avenir du Conseil de l’Europe – Paris (12 septembre 2016) 7

SECOND CHAPITRE : 4EME PARTIE DE LA SESSION ORDINAIRE
DE 2016 9

I. Actualités de la délégation française 11

A. La délégation et son bureau 11

B. Nominations et élections des parlementaires français 14

C. Rencontres de la délégation 15

II. Informations générales sur le déroulement de la partie de session 16

A. Ordre du jour et interventions des parlementaires français 16

B. Textes adoptés 18

C. Élections de deux juges à la Cour européenne des droits de l’Homme 19

D. Le rapport d’activité du bureau et de la commission permanente 20

III. Échanges avec différentes personnalités 21

A. Les questions au Secrétaire général du Conseil de l’Europe 21

B. Discours de M. François Hollande, Président de la République française 22

C. Communication du Comité des Ministres à l’Assemblée, présentée par M. Jürgen Ligi, ministre des affaires étrangères de l’Estonie et président du Comité des Ministres 28

D. Discours du ministre fédéral des affaires étrangères de l’Allemagne 30

IV. La situation des droits de l’Homme et de la démocratie dans le monde 31

A. Observation des élections législatives au Bélarus 31

B. Observation des élections législatives anticipées en Jordanie 31

C. Débat libre 33

D. Remise du prix des droits de l’Homme Václav Havel 34

V. La situation en Turquie 34

A. Discours de M. Mevlüt Çavuşoğlu, ministre des affaires étrangères de la Turquie. 34

B. Débat d’actualité : La situation en Turquie dans le contexte de la
tentative de coup d’État 37

VI. Situation en Ukraine 38

A. Débat conjoint : Conséquences politiques du conflit en Ukraine / Recours juridiques contre les violations des droits de l’Homme commises dans les territoires ukrainiens se trouvant hors du contrôle des autorités ukrainiennes 38

VII. La protection des personnes vulnérables 40

A. Droits de l’enfant liés à la maternité de substitution 40

B. Les mutilations génitales féminines en Europe 42

C. Harmoniser la protection des mineurs non accompagnés en Europe 43

D. Le sport pour tous : un pont vers l’égalité, l’intégration et l’inclusion sociale 45

VIII. L’APCE face aux défis économiques 47

A. Les activités de l’Organisation de coopération et de développement
économiques (OCDE) en 2015-2016 47

B. Enseignements à tirer de l’affaire des « Panama Papers » pour assurer
la justice sociale et fiscale 48

C. L’incidence de la dynamique démographique européenne sur les
politiques migratoires 49

IX. Coopération avec la Cour pénale internationale : pour un engagement étendu et concret 51

PREMIER CHAPITRE :

ACTIVITÉS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE
DEPUIS LA PRÉCÉDENTE PARTIE DE SESSION

Afin de mieux rendre compte des activités de la délégation française entre les parties de session de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), le présent rapport expose, essentiellement sous forme de comptes rendus, les entretiens, déplacements et événements ayant concerné les membres de la délégation.

Depuis la 3e partie de la session de 2016, qui s’était tenue du 26 au 30 juin 2016, le président de la délégation a participé au Bureau de l’APCE, le 5 septembre, et a accompagné le président Claude Bartolone à la Conférence européenne des Présidents de Parlement, à Strasbourg, les 15 et 16 septembre. La délégation a reçu au Sénat les membres de l’Alliance parlementaire contre la haine pour un séminaire sur la lutte contre le racisme, la haine et l’intolérance, le 8 septembre, et a organisé un colloque à l’Assemblée nationale sur l’avenir du Conseil de l’Europe, le 12 septembre.

I. ACTIVITÉS DU PRÉSIDENT

A. RÉUNION DU BUREAU - PARIS ( 5 SEPTEMBRE 2016)

M. René Rouquet, (Val-de-Marne – Socialiste, écologiste et républicain), président de la délégation française, a participé au Bureau de l’APCE à Paris le 5 septembre. Lors de cette réunion, le Bureau a notamment évoqué la mise en œuvre du paragraphe 13 de la Résolution 2094 (2016) sur la situation au Kosovo et le rôle du Conseil de l’Europe. Il a examiné un mémorandum, a approuvé le projet de décision contenue dans le document, sous réserve de ratification par l’Assemblée, et a décidé de revenir sur la question d’intensifier le dialogue avec l’Assemblée du Kosovo à l’une de ses prochaines réunions, sur la base d’un mémorandum préparé par le Secrétaire général de l’Assemblée.

B. CONFÉRENCE EUROPÉENNE DES PRÉSIDENTS DE PARLEMENT DU CONSEIL DE L’EUROPE - STRASBOURG (15 ET 16 SEPTEMBRE 2016)

M. René Rouquet, (Val-de-Marne – Socialiste, écologiste et républicain), président de la délégation française, a accompagné le président Claude Bartolone1, à la Conférence européenne des Présidents de Parlement. Le Sénat était représenté par M. Jean-Claude Gaudin2, vice-président.

Les travaux de la conférence européenne ont porté sur trois thèmes : « Migrations et crise des réfugiés en Europe - rôle et responsabilités des parlements », « Les parlements nationaux et le Conseil de l’Europe : promouvoir ensemble la démocratie, les droits de l’Homme et l’État de droit » et « Mobilisation des parlements contre la haine, pour des sociétés inclusives et non racistes ».

II. ACTIVITÉS DE LA DÉLÉGATION

A. SÉMINAIRE SUR LA LUTTE CONTRE LE RACISME, LA HAINE ET L’INTOLÉRANCE – PARIS (8 SEPTEMBRE 2016)

Un séminaire sur la lutte contre le racisme, la haine et l’intolérance en France a eu lieu, le 8 septembre 2016, à Paris, au Sénat, dans le cadre des activités de l’Alliance parlementaire contre la haine. L’Alliance parlementaire contre la haine est une alliance de parlementaires qui s’engagent à prendre des positions publiques contre le racisme, la haine et l’intolérance, quels qu’en soient les motifs et la manière dont ils se manifestent. L’Alliance est ouverte aux membres de l’APCE ainsi qu’aux membres des délégations ayant le statut d’observateur et de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée. Leur engagement est formalisé par la signature de la Charte des engagements3 des membres de l’Alliance.

Mme Nicole Duranton (Eure – Les Républicains) et M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain) ont présidé cette réunion qui avait pour objet d’évoquer les moyens de lutter efficacement contre ces phénomènes, en partant de l’analyse de la situation en France et des perspectives européennes.

B. COLLOQUE SUR L’AVENIR DU CONSEIL DE L’EUROPE – PARIS (12 SEPTEMBRE 2016)

Le 12 septembre 2016, la délégation française a organisé à l’Assemblée nationale un colloque sur l’avenir du Conseil de l’Europe réunissant les principaux responsables du Conseil de l’Europe, des représentants des autorités françaises, des personnalités engagées dans la défense des droits de l’Homme et de l’État de droit, ainsi que des parlementaires et des ambassadeurs de divers États membres auprès de l’Organisation.

On peut en retenir un certain nombre d’idées fortes de nature à constituer la trame d’une feuille de route pour l’avenir.

En premier lieu, la Convention européenne des droits de l’Homme est le pilier de l’Organisation ; la non-exécution volontaire des arrêts de la Cour européenne des droits de l’Homme est donc inacceptable car elle sape les fondements mêmes du système, en particulier quand elle est le fait d’un État fondateur. Pour autant, il est vital que les États membres ne présentent que des candidats de grande valeur, sauf à miner la crédibilité de la Cour.

La croissance nominale zéro n’est pas tenable sur le long terme, sauf à mener l’Organisation sur la voie du déclin. Il faut permettre au Conseil de l’Europe de continuer à attirer du personnel de qualité.

Et si l’on doit recentrer l’organisation, que cela se fasse en fonction de la réussite de l’organe concerné et non sur une base abstraite et a priori qui ne réunira jamais un consensus. Il faut également, sur le modèle de la Commission de Venise, faire preuve de réactivité et de souplesse.

La tenue d’un sommet des chefs d’État et de gouvernement est une nécessité pour refonder le Conseil de l’Europe. Enfin, même si l’on se doit d’être critique lorsque nos valeurs sont bafouées, il faut maintenir le dialogue avec tous les États, sans exclusive.

En vue de faire en sorte que ce colloque constitue la première étape d’une démarche visant à renforcer l’Organisation, il est apparu indispensable d’en publier les travaux4.

SECOND CHAPITRE :

4ÈME PARTIE DE LA SESSION ORDINAIRE DE 2016

La quatrième partie de session de l’APCE, qui s’est tenue à Strasbourg du 10 au 14 octobre 2016, a été marquée par la venue du Président de la République française. Son intervention a permis de rappeler solennellement l’attachement de la France à une organisation internationale de défense de l’État de droit, de la démocratie et des droits de l’Homme basée sur son territoire, dans ce lieu très symbolique pour la paix en Europe qu’est Strasbourg. Le Président a notamment indiqué que notre pays était favorable à un quatrième sommet du Conseil de l’Europe, en 2019, ce qui permettrait de donner à l’Organisation une feuille de route pour les années à venir.

Le ministre allemand des affaires étrangères, M. Frank-Walter Steinmeier, a donné l’accord de l’Allemagne à cette initiative, dont on peut espérer beaucoup à un moment où le Conseil de l’Europe, et plus généralement notre continent, est confronté à des défis considérables, l’APCE ayant débattu de certains d’entre eux.

Elle a ainsi pu évoquer la situation en Turquie après la tentative de coup d’État au travers d’un débat d’actualité et de l’intervention de son ministre des affaires étrangères, M. Mevlüt Ҫavuşoğlu.

Elle s’est également penchée sur la situation en Ukraine par l’intermédiaire de l’examen de deux rapports.

Elle a eu plusieurs débats sur des questions de société, en particulier sur les droits de l’enfant liés à la maternité de substitution, mais également sur les mutilations génitales féminines en Europe ou l’harmonisation de la protection des mineurs non accompagnés.

Elle a également débattu de plusieurs questions économiques, notamment de la fraude fiscale, de la Cour pénale internationale, et a entendu diverses autres personnalités. Elle a enfin évoqué les conclusions de missions d’observation des élections en Biélorussie et en Jordanie, et a décerné le prix Václav Havel 2016 à Mme Nadia Murad, militante yézidie des droits de l’Homme.

En marge des débats de l’APCE, on relèvera une initiative très positive de la délégation suisse tendant à organiser des rencontres régulières des parlementaires dont le français est une des langues utilisées dans leur pays.

Au final, ce fut une partie de session très riche, où la France a été mise à l’honneur, non seulement par la venue du Président de la République, mais aussi par la forte implication de sa délégation parlementaire.

I. ACTUALITÉS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE

A. LA DÉLÉGATION ET SON BUREAU

La délégation française à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe comprend vingt-quatre députés (douze titulaires et douze suppléants) et douze sénateurs (six titulaires et six suppléants), soit dix-huit sièges.

Composition de la délégation en octobre 2016

Membres titulaires

 

Chambre Parlement national

Groupe
Parlement national

Groupe

APCE

       

Mme Brigitte Allain

Députée

NI

SOC

M. Gérard Bapt

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

Mme Maryvonne Blondin

Sénatrice

Socialiste et républicain

SOC

Mme Nicole Duranton

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

Mme Josette Durrieu

Sénatrice

Socialiste et républicain

SOC

M. Bernard Fournier

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

Mme Sylvie Goy-Chavent

Sénateur

UDI-UC

PPE/DC

M. François Grosdidier

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

M. Denis Jacquat

Député

Les Républicains

PPE/DC

Mme Marietta Karamanli

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Pierre-Yves Le Borgn’

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Jean-Yves Le Déaut

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. François Loncle

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Thierry Mariani

Député

Les Républicains

PPE/DC

M. Jean-Claude Mignon

Député

Les Républicains

PPE/DC

M. François Rochebloine

Député

Union des démocrates et indépendants

PPE/DC

M. René Rouquet

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

Mme Marie-Jo Zimmermann

Députée

Les Républicains

PPE/DC

Membres suppléants

 

Chambre Parlement
national

Groupe
Parlement national

Groupe

APCE

M. Damien Abad

Député

Les Républicains

PPE/DC

Mme Danielle Auroi

Députée

NI

SOC

M. Philippe Bies

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Jacques Bigot

Sénateur

Socialiste et républicain

SOC

Mme Pascale Crozon

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

Mme Marie-Christine Dalloz

Députée

Les Républicains

PPE/DC

M. Jean-Claude Frécon

Sénateur

Socialiste et républicain

SOC

Mme Geneviève Gosselin-Fleury

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Guy-Dominique Kennel

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

Mme Anne-Yvonne Le Dain

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Jacques Legendre

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

Mme Martine Martinel

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Yves Pozzo Di Borgo

Sénateur

UDI-UC

PPE/DC

Mme Catherine Quéré

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. André Reichardt

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

M. Frédéric Reiss

Député

Les Républicains

PPE/DC

M. Rudy Salles

Député

Union des démocrates et indépendants

PPE/DC

M. André Schneider

Député

Les Républicains

PPE/DC

Le Bureau de la délégation est composé de la façon suivante :

Président

M. René Rouquet

Député

Socialiste, écologiste et républicain

Président délégué

M. Jean-Claude Mignon

Député

Les Républicains

Première vice-présidente

Mme Josette Durrieu

Sénatrice

Socialiste et républicain

Vice-présidents

Mme Brigitte Allain

Députée

NI

 

M. Jean-Claude Frécon

Sénateur

Socialiste et républicain

 

Mme Marietta Karamanli

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

 

M. Jacques Legendre

Sénateur

Les Républicains

 

M. François Loncle

Député

Socialiste, écologiste et républicain

 

M. François Rochebloine

Député

Union des démocrates et indépendants

 

M. André Schneider

Député

Les Républicains

 

Mme Marie-Jo Zimmermann

Députée

Les Républicains

B. NOMINATIONS ET ÉLECTIONS DES PARLEMENTAIRES FRANÇAIS

M. René Rouquet (Val-de-Marne – Socialiste, écologiste et républicain), président de la délégation française, a présidé la séance des mardi 11 octobre après-midi, jeudi 13 octobre après-midi et vendredi 14 octobre. Il a été désigné par le Bureau, au titre de la commission des questions politiques et de la démocratie, membre de la commission ad hoc pour participer au Forum mondial de la démocratie, à Strasbourg, du 7 au 9 novembre 2016.

M. Damien Abad (Ain – Les Républicains) a été désigné par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléant de la commission ad hoc pour l’observation de l’élection présidentielle en Moldavie (30 octobre 2016) et de la commission ad hoc pour l’observation de l’élection présidentielle en Bulgarie (6 novembre 2016).

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – Socialiste et républicain) a été désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre titulaire de la commission ad hoc pour l’observation de l’élection présidentielle en Moldavie (30 octobre 2016).

Mme Marie-Christine Dalloz (Jura – Les Républicains) a été désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre titulaire de la commission ad hoc pour l’observation de l’élection présidentielle en Moldavie (30 octobre 2016).

Mme Geneviève Gosselin-Fleury (Manche – Socialiste, écologiste et républicain) a été désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre titulaire de la commission ad hoc pour l’observation de l’élection présidentielle en Bulgarie (6 novembre 2016).

Mme Sylvie Goy-Chavent (Ain – UDI-UC) a été désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléante de la commission ad hoc pour l’observation de l’élection présidentielle en Bulgarie (6 novembre 2016).

M. Denis Jacquat (Moselle – Les Républicains) a été désigné par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléant de la commission ad hoc pour l’observation de l’élection présidentielle en Moldavie (30 octobre 2016).

M. Jean-Claude Mignon (Seine-et-Marne – Les Républicains) a été désigné par le Bureau, sur proposition de son groupe, rapporteur sur « La situation à Alep » au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie, en vue d’un débat selon la procédure d’urgence à la commission permanente à Nicosie, le 25 novembre 2016.

Mme Catherine Quéré (Charente-Maritime – Socialiste, écologiste et républicain) a été désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre suppléante de la commission ad hoc pour l’observation de l’élection présidentielle en Moldavie (30 octobre 2016) et de la commission ad hoc pour l’observation des élections législatives anticipées dans l’ex-République yougoslave de Macédoine (11 décembre 2016).

C. RENCONTRES DE LA DÉLÉGATION

Le Représentant permanent de la France auprès du Conseil de l’Europe, M. Jean-Baptiste Mattéi, a reçu la délégation française, le dimanche 9 octobre, pour un dîner de travail.

Les membres Les Républicains de la délégation ont rencontré des membres CDU de la délégation allemande, le 10 octobre, pour un déjeuner de travail.

Mme Pascale Crozon (Rhône – Socialiste, écologiste et républicain), MM. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain) et Frédéric Reiss (Bas-Rhin – Les Républicains) ont rencontré, le mardi 11 octobre, une délégation de magistrats de l’École nationale de magistrature (ENM).

Enfin à l’initiative de la délégation suisse, un dîner de travail entre les délégations dont le français est une des langues officielles a eu lieu le mercredi 11 octobre.

Mme Pascale Crozon (Rhône – Socialiste, écologiste et républicain), MM. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain) et Jean-Yves Le Déaut (Meurthe-et-Moselle – Socialiste, écologiste et républicain) ont rencontré, le jeudi 13 octobre, des étudiants en Sciences politiques de Strasbourg ainsi que des diplomates francophones.

II. INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LE DÉROULEMENT DE LA PARTIE DE SESSION

A. ORDRE DU JOUR ET INTERVENTIONS DES PARLEMENTAIRES FRANÇAIS

Lundi 10 octobre

– Rapport d’activité du Bureau et de la commission permanente et observation d’élections : Mme Josette Durrieu, M. Bernard Fournier, Mme Geneviève Gosselin-Fleury et M. René Rouquet (rapporteur de la commission ad hoc du Bureau sur l’observation des élections législatives anticipées en Jordanie) ;

– Cérémonie de remise du Prix des droits de l’Homme Václav Havel ;

– Questions à M. Thorbjørn Jagland, Secrétaire général du Conseil de l’Europe : Mme Josette Durrieu, M. Jean-Yves Le Borgn’ et Mme Marie-Jo Zimmermann.

Mardi 11 octobre

– Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2015-2016 : M. Bernard Fournier ;

– Discours de M. François Hollande, Président de la République française  ;

– Communication du Comité des Ministres à l’Assemblée parlementaire, présentée par M. Jürgen Ligi, ministre des affaires étrangères de l’Estonie, Président du Comité des ministres : Mme Maryvonne Blondin et M. Bernard Fournier ;

– Les droits de l’enfant liés à la maternité de substitution : Mme Anne-Yvonne Le Dain, MM. Jean-Yves Le Déaut, Yves Pozzo di Borgo et Frédéric Reiss ;

– Les enseignements à tirer de l’affaire des « Panama Papers » pour assurer la justice sociale et fiscale : Mmes Geneviève Gosselin-Fleury et Marie-Jo Zimmermann.

Mercredi 12 octobre

– Le sport pour tous : un pont vers l’égalité, l’intégration et l’inclusion sociale : Mme Maryvonne Blondin, M. Pierre-Yves Le Borgn’, Mme Catherine Quéré et M. René Rouquet ;

– Discours de M. Mevlüt Ҫavuşoğlu, ministre des affaires étrangères de la Turquie : Mme Josette Durrieu et M. René Rouquet ;

– Débat conjoint : Les conséquences politiques du conflit en Ukraine – Les recours juridiques contre les violations des droits de l’Homme commises dans les territoires ukrainiens se trouvant hors du contrôle des autorités ukrainiennes : Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Fournier et Pierre-Yves Le Borgn’ ;

– La coopération avec la Cour pénale internationale : pour un engagement étendu et concret : Mme Marietta Karamanli et M. Pierre-Yves Le Borgn’.

Jeudi 13 octobre

– Débat d’actualité : la situation en Turquie dans le contexte de la tentative de coup d’État : MM. Jean-Claude Mignon et René Rouquet ;

– Discours de M. Frank-Walter Steinmeier, ministre fédéral des affaires étrangères de l’Allemagne : Mme Maryvonne Blondin ;

– Les mutilations génitales féminines en Europe : Mmes Maryvonne Blondin et Pascale Crozon ;

– Harmoniser la protection des mineurs non accompagnés en Europe : Mme Pascale Crozon et M. Pierre-Yves Le Borgn’.

Vendredi 14 octobre

– L’incidence de la dynamique démographique européenne sur les politiques migratoires : MM. Frédéric Reiss et André Schneider ;

– Débat libre.

B. TEXTES ADOPTÉS

Le Règlement de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe distingue trois types de textes : les avis, les recommandations et les résolutions :

– aux termes de l’article 24.1.a, une recommandation consiste en une proposition de l’Assemblée adressée au Comité des ministres, dont la mise en œuvre échappe à la compétence de l’Assemblée, mais relève des gouvernements ;

– définie à l’article 24.1.b, une résolution exprime une décision de l’Assemblée sur une question de fond, dont la mise en œuvre relève de sa compétence, ou un point de vue qui n’engage que sa responsabilité ;

– les avis répondent aux demandes qui sont soumises à l’Assemblée par le Comité des ministres concernant l’adhésion de nouveaux États membres au Conseil de l’Europe, mais aussi les projets de conventions, le budget ou la mise en œuvre de la Charte sociale.

Texte et rapporteur(e)

Document(s)

Commission des questions politiques et de la démocratie

Conséquences politiques de l’agression russe en Ukraine

Rapporteure : Mme Kristýna Zelienková, (République tchèque - ADLE)

Résolution n° 2132

Commission des questions sociales, de la santé
et du développement durable

Enseignements à tirer de l’affaire des « Panama Papers » pour assurer la justice sociale et fiscale

Rapporteur : M. Stefan Schennach, (Autriche – SOC)

Commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées

Harmoniser la protection des mineurs non accompagnés en Europe

Rapporteur : M. Manlio Di Stefano (Italie – NI))

Résolution n° 2136

L’incidence de la dynamique démographique européenne sur les politiques migratoires

Rapporteure : Mme Kristin Ørmen Johnsen (Norvège – PPE/DC)

Commission des questions juridiques et des droits de l’Homme

Recours juridiques contre les violations des droits de l’Homme commises dans les territoires ukrainiens se trouvant hors du contrôle des autorités ukrainiennes

Rapporteure : Mme Marieluise BECK (Allemagne – ADLE)

Résolution n° 2133

Coopération avec la Cour pénale internationale : pour un engagement étendu et concret

Rapporteur : M. Alain Destexhe (Belgique – ADLE)

Résolution n° 2134

Commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias

Le sport pour tous : un pont vers l’égalité, l’intégration et l’inclusion sociale

Rapporteure : Mme Carmen Quintanilla (Espagne -– PPE/DC)

Résolution n° 2131

Commission sur l’égalité et la non-discrimination

Les mutilations génitales féminines en Europe

Rapporteure : Mme Béatrice Fresko-Rolfo (Monaco – PPE/DC)

Résolution n° 2135

C. ÉLECTIONS DE DEUX JUGES À LA COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME

Lors de cette partie de session, l’Assemblée a élu M. Lətif Hüseynov juge à la Cour européenne des droits de l’Homme au titre de l’Azerbaïdjan et M. Jovan Ilievski au titre de l’ex-République yougoslave de Macédoine.

D. LE RAPPORT D’ACTIVITÉ DU BUREAU ET DE LA COMMISSION PERMANENTE

L’ouverture de chaque partie de session est traditionnellement consacrée à l’examen du rapport d’activité du Bureau et de la commission permanente.

Mme Ingjerd Schou (Norvège – PPE/DC) a rappelé l’importance du rôle de l’Assemblée comme enceinte de dialogue.

Elle a évoqué la situation en Russie, en regrettant que l’APCE n’ait pu observer les élections à la Douma. Concernant la tentative de coup d’État en Turquie, si elle a condamné cette attaque contre la démocratie, elle a néanmoins considéré que la réaction du gouvernement turc avait été très dure et a insisté sur le fait que la réponse à ce coup d’État qui a échoué devait être adéquate, proportionnée, fondée sur des faits et conforme aux normes du Conseil de l’Europe, des droits de l’Homme, de la démocratie et de l’État de droit.

Rappelant que plusieurs attentats avaient eu lieu dans des États membres du Conseil de l’Europe et que la lutte contre la haine et l’extrémisme devait être une priorité, elle a souligné l’importance de l’initiative « ni Haine, ni Peur ». La Conférence européenne des Présidents de Parlement du Conseil de l’Europe, réunie à Strasbourg en septembre, a d’ailleurs abordé ce sujet.

Évoquant le référendum sur des amendements constitutionnels en Azerbaïdjan, elle a souligné que l’avis préliminaire de la Commission de Venise avait montré de sérieuses préoccupations, aussi bien sur la procédure que sur le fond de cette réforme.

I. ÉCHANGES AVEC DIFFÉRENTES PERSONNALITÉS

A. LES QUESTIONS AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE

L’ordre du jour de cette partie de session avait ménagé du temps pour permettre au Secrétaire général du Conseil de l’Europe, M. Thorbjørn Jagland, de répondre aux questions des parlementaires.

Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – Socialiste et républicain), porte-parole du Groupe socialiste, a souligné qu’avec le martyre de la ville d’Alep, c’est la conscience internationale qui est interpelée. Elle s’est interrogée sur la manière de sortir de l’impasse diplomatique avec les Russes et a demandé au Secrétaire général quelle initiative pouvait-il prendre pour que le sort d’Alep soit enfin évoqué au Conseil de l’Europe et dans l’Assemblée. Elle a notamment évoqué la possibilité qu’une délégation parlementaire puisse se rendre sur place.

M. Jagland a rappelé que la situation en Syrie n’entrait pas dans le mandat du Conseil de l’Europe. Il a considéré qu’il s’agissait d’un échec considérable pour le Conseil de sécurité des Nations unies, puisqu’il est bien inscrit dans la Charte des Nations unies que les membres du Conseil de sécurité ont la responsabilité de la paix et de la sécurité pour tous les autres États membres de l’Organisation. Les bombardements aériens, qui, du reste, avant de toucher la Syrie, avaient débuté en Libye, sont parfaitement scandaleux. Cela ne peut en aucun cas déboucher sur une solution au conflit. M. Jagland n’entrevoit aucune solution militaire à ce conflit. Il faut donc que des solutions politiques, négociées entre toutes les parties concernées, soient trouvées. Avant tout, bien entendu, il faut un cessez-le-feu en Syrie – ce serait un début –, mais il convient aussi d’élaborer une solution plus large.

M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain) a interrogé le Secrétaire général sur les propositions de certains États membres visant à réduire, voire interdire le regroupement familial, propositions en rupture, entre autres, avec l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme et l’article 22 de la Convention européenne des droits de l’enfant.

Le Secrétaire général a rappelé que le droit à avoir une vie de famille était inscrit dans la Convention. Aujourd’hui, la présence de milliers de mineurs non accompagnés en Europe est un enjeu. Premièrement, il a remercié la Grèce qui fait ce qu’elle peut pour offrir un hébergement à ces jeunes. Il a rappelé que nombre d’entre eux ont des parents ailleurs en Europe, mais il est de plus en plus difficile de regrouper les familles en raison du durcissement des lois dans un certain nombre d’États membres. À Calais, la même problématique se pose avec les jeunes dont la plupart devraient bénéficier d’une possibilité de regroupement avec des parents se trouvant au Royaume-Uni. Cet article 8, qui prévoit un droit au regroupement familial certes pas illimité, a vocation à être appliqué en ce moment afin de ne pas réduire le degré de protection prévu.

Mme Marie-Jo Zimmermann (Moselle – Les Républicains) a interrogé le Secrétaire général sur la classification de l’ONG « Mémorial » comme agent de l’étranger et sur l’action du Conseil de l’Europe pour lutter contre l’oubli et l’ignorance de notre histoire.

M. Jagland a rappelé que qualifier des ONG recevant des financements de l’étranger d’agents de l’étranger, comme c’est le cas actuellement dans la loi russe, est un moyen de discréditer les ONG, qui ne peuvent que pâtir d’une telle appellation. Il a assuré à Mme Zimmermann qu’il parlerait du nécessaire amendement de cette loi aux autorités russes.

B. DISCOURS DE M. FRANÇOIS HOLLANDE, PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Un des points forts de cette session a été la venue du Président de la République, M. François Hollande5, devant l’Assemblée parlementaire. Il était accompagné de M. Harlem Désir, secrétaire d’État aux affaires européennes, et de Mme Catherine Lalumière, Secrétaire générale du Conseil de l’Europe, de 1988 à 1994, au moment de la fin de l’Union soviétique et de la réunification de l’Europe. Cette première participation d’un Président français à une session de l’APCE, depuis la visite historique de M. François Mitterrand, était particulièrement symbolique, alors que la France est le pays du siège et qu’elle assurera la présidence du Conseil de l’Europe au cours du second semestre 2019, lors du 70ème anniversaire de l’Organisation.

Monsieur le Président, Monsieur le Secrétaire général, Mesdames, Messieurs les Parlementaires, Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs.

Je tenais par ma présence aujourd’hui parmi vous à renouveler l’attachement de la France à votre institution, le Conseil de l’Europe, ici, à Strasbourg, une capitale européenne.

Mais j’ai conscience que le contexte particulier que nous connaissons et qui est grave, donne à cette visite également un sens, parce que les valeurs que porte le Conseil de l’Europe doivent encore nous inspirer. François MITTERRAND, qui était au congrès de La Haye en 1948, rappelait toujours que l’enjeu européen était de sauver les libertés acquises et de les étendre au bénéfice de tous.

Et c’est ce que votre Conseil a pu faire tout au long de ces dernières années. Il rassemble aujourd’hui 47 pays, représentant 820 millions d’habitants, et tous ces Etats membres se sont engagés à placer la personne humaine au cœur de leur système juridique. Le Conseil de l’Europe est dépositaire de 211 conventions, 135 ont été ratifiées par la France. Au sommet de l’édifice, il y a la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, et la France fait en sorte d’en respecter tous les points et tous les principes.

Je veux aussi saluer la progression constante de vos engagements pour protéger davantage les libertés, non seulement en élargissant les frontières, ce que vous avez fait avec votre assemblée, mais aussi en élargissant les domaines de la protection des libertés. C’est ainsi que vous avez travaillé sur les questions éthiques avec l’interdiction du clonage humain, que vous avez lutté contre toutes les formes de traite des êtres humains, que vous combattez les violences faites aux femmes, que vous veillez à la protection des données personnelles, au nom du respect de la vie privée.

Mais, au-delà de la proclamation de ces principes, il y a aussi le mécanisme contraignant qui doit en assurer l’effectivité. C’est la mission de la Cour européenne des Droits de l’Homme - je viens de rencontrer son président. La France, là encore, et je veux le réaffirmer ici, prend toutes ses responsabilités pour soutenir en toutes circonstances la Cour. Elle a appuyé toutes les réformes qui ont permis d’améliorer son fonctionnement, je pense notamment aux derniers protocoles 14 et 15 que la France a ratifiés. Je m’engage ici à préparer l’adoption définitive du 16ème protocole.

Soutenir la Cour, c’est assurer la pleine exécution de ses arrêts. C’est la raison pour laquelle le gouvernement français a fait adopter une loi visant à simplifier la procédure de révision des condamnations pénales ayant donné lieu à une mise en cause de la France par la Cour européenne des Droits de l’Homme. Ce sera également vrai, en matière civile, pour les décisions sur l’état des personnes, qui pourront être réexaminées chaque fois qu’il y aura une décision de la Cour prononcée par rapport à la France. C’est le cas notamment pour le changement de sexe ou la transcription d’un acte d’état-civil.

J’ai également tenu compte, chaque fois que la Cour est intervenue par un arrêt, de traduire les décisions dans la loi française. En 2013, nous avons ainsi introduit une infraction spécifique contre la traite des êtres humains. En 2014, le régime de la garde-à-vue a été profondément modifié pour une meilleure protection des droits de la défense, dès le stade de l’enquête. Plus récemment a été ouvert le droit à la représentation professionnelle dans les armées, et là encore, ce principe a été non seulement reconnu, mais aussi mis en œuvre.

J’ai également conscience des devoirs de la France face à l’état de ses prisons, nous sommes conscients de l’ampleur de la surpopulation carcérale et du défi représenté par l’encellulement individuel. C’est l’objet d’un plan qui a été annoncé par le gouvernement français et qui consacrera plus d’un milliard d’euros à la construction de nouveaux établissements pénitentiaires.

Mais notre politique pénale veille aussi à mettre en œuvre des peines alternatives à l’incarcération, voilà pourquoi je suis attaché au Conseil de l’Europe, parce que vous faites progresser l’état du droit, parce que vous permettez de garder, de manière vigilante, les engagements que nous avons pu prendre. Je rends ici hommage à l’action du commissaire aux Droits de l’Homme, à la Commission de Venise, qui a joué un rôle très important depuis 1990 dans la transition constitutionnelle de l’Europe centrale et orientale, notamment dans les Balkans, et aujourd’hui en Ukraine.

Je veux saluer aussi l’action de la Banque de développement du Conseil de l’Europe, trop peu connue, qui finance des projets hautement sociaux dans 41 Etats membres, et qui a récemment voulu dédier un fonds pour le soutien aux réfugiés et aux migrants. La France s’honore d’être un des trois actionnaires principaux de l’institution.

Mesdames et Messieurs, en près de 70 ans, le Conseil de l’Europe a aidé à bâtir sur le continent un espace de paix, de coopération, de libertés, sans égal dans le monde. Mais, soyons lucides, ce mouvement peut s’interrompre, il n’est pas irréversible, il y a des menaces, vous les avez évoquées, le terrorisme, mais aussi la montée des populismes et des extrémismes, face notamment à la crise des réfugiés.

Il y a des remises en cause, il y a des replis nationalistes, il y a une montée du souverainisme, qui laisse penser que chaque pays pourrait trouver en lui-même la solution. Même les valeurs que vous représentez ici commencent à être mises en cause, suspectes de ne pas pouvoir protéger suffisamment nos concitoyens. Comme si la liberté pouvait être une limite ou si nous pouvions imaginer un Etat d’exception qui se substituerait à l’Etat de droit.

Le terrorisme met la démocratie à l’épreuve, notre mode de vie, nos libertés, nos principes fondamentaux sont la cible des fanatiques. La France a été frappée plusieurs fois et de manière terrible, dans des jours symboliques, y compris le 14 juillet, et aussi dans des lieux qui pouvaient faire ressurgir une forme de guerre entre les religions. Un prêtre égorgé dans une église. Et que dire de ces lieux de vie, de joie, de bonheur, qui ont été également attaqués parce que justement, c’était des jeunes qui voulaient partager un moment d’émotion.

La France n’a pas été le seul pays qui a été attaqué. Il y en a beaucoup d’autres, en dehors du continent européen, mais il y a aussi des pays européens qui sont visés, attaqués, frappés, et aucun ne peut être prémuni contre ce fléau. Le Conseil de l’Europe a pris ses responsabilités dans l’élaboration de protocoles, notamment sur la prévention du terrorisme, et pour appréhender le phénomène des combattants étrangers.

La France a été amenée après les terribles attentats du 13 novembre à évoquer l’article 15 de la Convention qui permet aux Etats de faire face à des impératifs de sécurité sous le contrôle du juge. C’est l’état d’urgence. C’est la voie que j’ai choisie au lendemain des attentats du 13 novembre.

Mais j’ai veillé avec le gouvernement de Manuel VALLS à prendre des mesures proportionnées pour doter les autorités administratives des moyens indispensables pour agir par des perquisitions ou par des assignations à résidence de personnes dangereuses. Et le Parlement a été amené à se prononcer. Plusieurs lois ont été votées en France depuis 2014 pour renforcer nos moyens contre le terrorisme. Toutes ces lois ont été validées par le Conseil constitutionnel et ont pu être ici regardée par vous.

Nous avons également voulu donner un cadre légal - c’était la première fois pour les activités de renseignement - un cadre cohérent, complet, pour que nous puissions agir et en même temps qu’il y ait les contrôles nécessaires.

Nous faisons en sorte également - et nous ne pouvons pas le faire seuls - d’agir contre la propagande sur Internet qui encourage la radicalisation. C’est un enjeu que vous devez aborder ici pour ce qui relève de la protection de la vie privée qui doit être défendue, et pour ce qui en revanche, est aussi utilisé par les fanatiques pour faire une propagande qui puisse amener un certain nombre de nos jeunes dans nos pays respectifs à partir faire le djihad.

La France a pris la responsabilité de fermer ce qui étaient regardé comme des salles de prières et qui n’était en fait que des appels à la haine. La France a également expulsé des prêcheurs qui utilisaient la liberté d’expression pour propager l’intolérance la plus agressive. Mais nous veillons à ce qu’il n’y ait aucune stigmatisation et notamment vis-à-vis des musulmans. Nous veillons à ce qu’il n’y ait aucune confusion entre ce que nous devons faire pour nous protéger et ce que doit être la liberté religieuse dans notre pays, qui ne doit jamais être altérée.

J’ai eu plusieurs fois l’occasion de défendre la conception française de la laïcité, je veux le refaire ici. C’est un principe de neutralité, c’est aussi une règle qui interdit le financement des cultes par l’Etat, de tous les cultes. La laïcité garantit à chacune et à chacun le droit de croire ou de ne pas croire, la possibilité de pratiquer sa foi dans les limites qu’inspire le respect de l’ordre public.

Ces règles ne sont pas le fruit de lois de circonstance, mais reposent sur des principes qui ont été posés il y a plus de 100 ans et qui aujourd’hui nous permettent de faire respecter la liberté de conscience avec fermeté, et aussi de faire en sorte que puissent être poursuivies les provocations qui peuvent mettre en cause la vie en commun. Et je n’entends pas remettre le sujet en discussion parce que l’équilibre a été trouvé et qu’il suffit d’appliquer les règles qui existent dans notre pays.

La sûreté, la sécurité, c’est une exigence, et nos concitoyens demandent à être protégés. Mais la sécurité, la sûreté est compatible avec l’Etat de droit. Il n’est pas question d’ouvrir en France, par exemple, des centres de rétention pour les personnes suivies par les services de renseignement. Parce que ce serait porter atteinte aux principes de notre droit pénal qui fait que seul un juge peut décider d’une peine privative de liberté.

De même, la France - et je n’ai pas besoin de vous rassurer là-dessus - ne créera pas de cour d’exception pour des actes terroristes parce que ce serait aussi inutile que dangereux. Nous avons des juridictions et des magistrats spécialisés à tous les stades de la procédure qui font un excellent travail. Notre droit, là encore, nous permet d’agir efficacement.

Voilà ce que je voulais vous dire au nom d’un pays qui lutte contre le terrorisme et qui le fait en gardant ses principes fondamentaux. Bien sûr, nous faisons évoluer la législation mais elle reste conforme à notre ordre constitutionnel. Face à cette menace, ce que cherchent les terroristes c’est à nous diviser, à nous séparer, à nous conduire à prendre des mesures d’exception qui seraient utilisées pour dénoncer nos principes de liberté. C’est la liberté qui est visée par les terroristes. C’est la liberté que nous devons défendre.

Mesdames, Messieurs les parlementaires, l’Europe est confrontée aussi depuis plusieurs mois à l’afflux de migrants et de réfugiés. La crise syrienne a mis sur le chemin de l’exil des millions de réfugiés. Beaucoup ont rejoint les camps en Jordanie, au Liban, en Turquie et je veux saluer ces pays qui font l’effort principal. D’autres personnes – réfugiés, migrants – ont choisi notre continent mais l’ont choisi parce qu’ils n’avaient en définitive pas d’autre destination, parce qu’ils fuyaient, parce qu’ils cherchaient l’exil.

L’Europe a tardé à trouver une réponse commune. Cette réponse passe par le contrôle effectif des frontières extérieures de l’Europe. C’est la condition pour pouvoir justement accueillir dignement les réfugiés, reconduire les migrants qui ne relèvent pas de ce droit et être capable de poser des règles et de les faire respecter, y compris celles de répartir l’effort pour l’accueil des réfugiés.

Sans ces règles, sans cette protection des frontières, sans des garde-côtes européens, sans la capacité de savoir ce qui relève du droit et ce qui n’en relève pas – je parle du droit d’asile – alors l’Europe se déchirera. L’Europe peut se disloquer sur cette question de l’accueil des réfugiés. La France a pris des engagements et elle les honorera. Trente mille réfugiés venant de Grèce, d’Italie et de Turquie d’ici 2017 seront accueillis par la France. De la même manière, nous poursuivrons le programme de réinstallation mis en œuvre avec le Haut comité des réfugiés au Liban et en Jordanie.

Nous faisons aussi face, en France, à la présence de réfugiés et de migrants sur notre territoire. Je sais que vous êtes attentifs à ce qui, hélas, se produit à Calais où un camp, depuis trop longtemps, avec au moins sept mille personnes, accueille dans des conditions qui ne sont pas dignes des personnes qui ont fui leur pays. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé, avec le gouvernement, de démanteler le camp de Calais de façon à pouvoir accueillir autrement et dignement celles et ceux qui y sont aujourd’hui installés.

Toute personne pourra ainsi être hébergée, pouvoir faire ses démarches et, à ce moment-là, être dans le processus du droit d’asile. En revanche, et je l’ai dit à chaque reprise, les personnes qui ne relèvent pas du droit d’asile seront raccompagnées. Mais pour l’essentiel, celles et ceux qui sont à Calais relèvent du droit d’asile. Nous faisons aussi en sorte de régler la question des mineurs isolés et nous devons le faire là encore avec dignité et responsabilité.

Cette question est posée avec le Royaume-Uni et nous engageons des discussions pour que ces mineurs isolés qui ont des proches au Royaume-Uni puissent les rejoindre. C’est aussi une condition pour démanteler le camp de Calais. Ce sera une opération humanitaire puisque chacun se verra proposer une place dans un centre. Nous avons crée et ouvert des centres d’accueil et d’orientation pour pouvoir justement régler la question de Calais et d’autres campements, notamment à Paris. Toute personne aura une solution parce que c’est la responsabilité de la France, mais c’est aussi la responsabilité de tous ceux qui doivent comprendre qu’il n’est pas possible de démanteler un camp comme celui de Calais sans qu’il y ait des solutions qui soient proposées sur l’ensemble du territoire.

Mesdames et messieurs les parlementaires, les valeurs du Conseil de l’Europe inspirent l’action diplomatique de la France aux frontières-mêmes de l’Union et de notre continent. En Ukraine, l’annexion illicite de la Crimée par la Russie et la déstabilisation de l’Est de l’Ukraine ont provoqué d’abord de nombreuses victimes et là aussi des milliers de déplacés. Je me suis personnellement engagé, avec la chancelière MERKEL, dans le cadre de ce qu’on appelle le format Normandie, pour la recherche d’une solution diplomatique. C’est ce que l’on a appelé les accords de Minsk.

Je le dis tout net : les progrès sont trop lents et nous devons avancer sur les conditions politiques et sécuritaires qui permettront de tenir le plus rapidement possible, comme les accords de Minsk le prévoient, des élections à l’Est de l’Ukraine selon la loi ukrainienne et dans le respect des critères internationaux. Je suis prêt à tout moment, avec la chancelière MERKEL, à réunir le format Normandie avec le président POUTINE et le président POROCHENKO pour veiller à la pleine application des accords de Minsk. L’Ukraine elle-même doit prendre sa part des réformes attendues et je sais que le Conseil de l’Europe peut jouer un rôle utile pour l’accompagner.

Avec la Russie, la France a un désaccord majeur sur la Syrie. Le veto russe à la résolution française de sécurité a empêché la cessation des bombardements et la proclamation de la trêve. Les principales victimes sont les populations civiles, celles qui vivent sous les bombardements – meurent sous les bombardements. C’est la raison pour laquelle je considère que le dialogue est nécessaire avec la Russie mais il doit être ferme et franc. Sinon il n’a pas sa place, sinon, c’est un simulacre.

Je suis donc prêt à tout moment à rencontrer le président POUTINE.

Mais si nous avons la possibilité de faire avancer la cause de la paix, de faire cesser les bombardements et de proclamer la trêve, je veux aussi qu’il y ait, avec la Turquie, une discussion qui puisse s’engager ; là-encore parce que la Turquie fait l’effort principal pour l’accueil des réfugiés et parce que la Turquie est partie prenante d’une solution pour la Syrie.

La Turquie a connu, dans la nuit du 14 au 15 juillet, un coup d’Etat. La Turquie y a fait face et la Turquie doit aussi respecter, malgré cette situation très difficile et la proclamation de l’état d’urgence, les principes qui nous unissent.

Voilà la position de la France : toujours le dialogue, mais toujours pour la recherche de la paix. La position de la France, c’est le Conseil de sécurité dans le sens de la résolution que nous avions présenté. Je rappelle que la résolution russe n’avait recueilli que trois voix et que le veto russe a empêché qu’il puisse y avoir la cessation des bombardements. Dialogue toujours, responsabilité toujours et recherche de la paix.

Je voulais parler de la Syrie ici parce que c’est pour la communauté internationale un défi. Ou elle trouvera là son honneur pour régler cette situation ou alors ce sera sa honte de voir autant de Syriens obligés de quitter leur foyer, autant de familles massacrées et le terrorisme qui s’est installé sur ce terreau et qui nous frappe de Syrie par sa propagande, mais aussi par les terroristes qu’elle y envoie en Europe.

Alep, oui Alep, c’est la conscience de humanité qui est interpellée, Alep est en passe de rejoindre la terrible liste des villes martyres.

Mesdames et Messieurs, je voulais lancer cet appel ici, parce que c’est ici que les valeurs, les principes, l’espérance de la paix ont été forgés. C’est ici qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale il a été possible de lancer ces appels pour la paix. C’est ici qu’a été voulue l’unification, qu’ont été accueillis des pays qui jusque là étaient dans le totalitarisme et sous la dictature.

Et cette œuvre là du Conseil de l’Europe n’est pas achevée, au contraire dans ces circonstances, dans ce contexte, celui que j’ai évoqué. Plus que jamais vous avons besoin du Conseil de l’Europe. En 2019, le Conseil de l’Europe célébrera son 70ème anniversaire, la France présidera son comité des ministres et elle se tient prête à organiser un sommet, le quatrième, pour lui donner un nouveau cap.

Voilà le message que je voulais délivrer devant vous au nom des valeurs qui nous unissent parce que la France est aux côtés du Conseil de l’Europe et je suis sûr que le Conseil de l’Europe est aux côtés de la France pour toutes les démarches qui sont utiles à la paix, à la liberté et à la démocratie.

Merci.

Le Président de la République a répondu à dix questions de parlementaires.

C. COMMUNICATION DU COMITÉ DES MINISTRES À L’ASSEMBLÉE, PRÉSENTÉE PAR M. JÜRGEN LIGI, MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE L’ESTONIE ET PRÉSIDENT DU COMITÉ DES MINISTRES

M. Jürgen Ligi, ministre des affaires étrangères de l’Estonie, a évoqué les événements récents intervenus pendant la présidence estonienne du Comité des Ministres, notamment la tentative de coup d’État en Turquie. Il a rappelé le soutien du Conseil de l’Europe aux autorités turques. Évoquant la lutte contre le terrorisme, il a encouragé les États membres à « redoubler d’efforts et à signer et ratifier le Protocole additionnel à la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention du terrorisme ».

M. Ligi a également présenté les actions mises en œuvre par son pays notamment dans le domaine des droits de l’enfant dans le contexte de la crise migratoire. Il a souligné que « les droits de l’Homme et l’État de droit sur Internet font aussi partie des priorités de l’Estonie ». La lutte contre la cybercriminalité et l’adaptation juridique aux nouveaux défis soulevés par Internet sont au cœur des domaines d’action de la présidence estonienne.

Il a rappelé l’importance des programmes d’assistance électorale pour aider les États membres dans l’organisation d’élections conformes aux principes démocratiques en ajoutant que « l’Assemblée parlementaire jouait un rôle primordial pour assurer la promotion et la mise en œuvre des normes européennes dans le domaine électoral ».

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – Socialiste et républicain), porte-parole du Groupe socialiste, a interrogé le président du Comité des Ministres sur les atteintes aux droits fondamentaux en Pologne, notamment sur la remise en cause de certains droits des femmes, comme le droit à l’avortement.

M. Ligi a considéré qu’une position commune se dégageait sur l’égalité des genres, essentielle en matière de droits de l’Homme et pour une authentique démocratie. Ce principe essentiel est aussi une priorité de la présidence estonienne. Quant à la question de l’avortement, il n’y a pas de position commune au sein des États membres. Le Comité des Ministres est donc d’avis que, compte tenu des différences prévalant dans les situations et les approches des différents États membres sur cette question, c’est au niveau national qu’il convient de donner des réponses.

M. Bernard Fournier (Loire - Les Républicains) a rappelé que la Russie avait adopté une loi qui place sa cour constitutionnelle au-dessus de la juridiction de la Cour de Strasbourg, en contradiction flagrante avec la Convention européenne des droits de l’Homme. Il a interrogé le président du Comité des Ministres sur sa mission d’exécution des arrêts de la Cour de Strasbourg relatifs à la Russie dans le contexte nouveau créé par cette loi.

M. Ligi a répondu qu’aucun pays ne pouvait invoquer sa Constitution pour ne pas donner effet à des arrêts et à des décisions découlant d’un traité international. La décision relative à l’article 46 de la Convention européenne des droits de l’Homme est contraignante. Par ailleurs, la Commission de Venise a récemment adopté un avis relatif aux amendements adoptés à la loi fédérale de la Cour constitutionnelle russe et a proposé d’autres amendements qui pourraient être ajoutés à ce texte de loi et qui permettraient de le mettre en conformité avec les normes internationales.

D. DISCOURS DU MINISTRE FÉDÉRAL DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE L’ALLEMAGNE

Le ministre allemand des affaires étrangères, M. Frank-Walter Steinmeier, a rappelé que les droits de l’Homme étaient la pierre angulaire sur laquelle doit reposer le bon fonctionnement de l’ordre international.

Évoquant les guerres et les conflits aux portes de l’Europe, l’annexion illégale de la Crimée par la Russie, les forces qui minent la cohésion de l’Union européenne – comme le tout récent référendum sur le Brexit – ainsi que les tensions sociales croissantes au sein de nombreux États européens, il a réaffirmé avec force l’importance du Conseil de l’Europe. L’Assemblée parlementaire a toujours été une enceinte de dialogue et de débat, surtout dans les périodes où les tensions et les conflits se multiplient. Mais ce débat n’est possible que lorsque les pays concernés sont respectueux des éléments constitutifs du Conseil de l’Europe, c’est-à-dire de son Statut, de ses buts et de ses valeurs.

Il a espéré que les initiatives prises pour trouver une solution pacifique au conflit à l’est de l’Ukraine créent à moyen terme les conditions qui permettent à la délégation russe de prendre à nouveau part aux sessions et aux travaux de l’Assemblée parlementaire. Cependant il a précisé que des députés représentant la Crimée et siégeant à la Douma ne sauraient faire partie de la délégation russe.

Le ministre allemand des affaires étrangères a rendu hommage au rôle constructif que le Conseil de l’Europe a joué et devrait continuer à jouer dans la situation difficile que connaît la Turquie.

Il a dit soutenir la proposition et le souhait d’organiser un quatrième sommet du Conseil de l’Europe et s’est réjoui de ce que le Président Hollande, non seulement soutienne une telle proposition, mais ait lui-même proposé la tenue de ce quatrième sommet en 2019. 

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – Socialiste et républicain) a interrogé le ministre allemand sur son appréciation de la situation en Turquie après la tentative de coup d’État.

M. Steinmeier a répondu que, suite à une tentative de coup d’État au cours de laquelle des personnes ont perdu la vie et d’autres ont été agressées, il n’était pas possible de faire comme si rien ne s’était passé. Il fallait bien évidemment réagir, sur le plan politique comme sur le plan judiciaire. Cependant, les normes du droit doivent être respectées.

I. LA SITUATION DES DROITS DE L’HOMME ET DE LA DÉMOCRATIE DANS LE MONDE

A. OBSERVATION DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES AU BÉLARUS

Mme  Gisela Wurm (Autriche – SOC), rapporteure de la commission ad hoc du Bureau sur l’observation des élections législatives au Bélarus, a souligné que l’invitation des autorités bélarusses à observer ces élections législatives était un signe d’ouverture et une preuve de leur volonté politique de renforcer la coopération avec notre Assemblée.

La délégation a conclu que si le jour de l’élection, le climat était calme et les opérations bien organisées, la transparence de la procédure de décompte soulevait des inquiétudes. Les élections ne se limitent pas au jour du scrutin : si des efforts conséquents ont été réalisés pour répondre à des problèmes de longue date, certains détails doivent être réglés. La société civile et ses représentants ont critiqué la formation de la commission électorale, mal équilibrée avec des représentants de l’opposition très peu nombreux.

Ainsi un plus grand nombre de personnes se sont inscrites comme candidates sur les listes électorales par rapport aux élections précédentes, environ 600, il faut noter que peu de femmes participent aux élections.

La rapporteure a donc proposé qu’en lien avec la Commission de Venise, l’APCE s’engage davantage au Bélarus.

B. OBSERVATION DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES ANTICIPÉES EN JORDANIE

M. René Rouquet (Val-de-Marne – Socialiste, républicain et socialiste), rapporteur de la commission ad hoc du Bureau sur l’observation des élections législatives anticipées en Jordanie, a rappelé que le but de la mission était de vérifier que les élections anticipées de la Chambre des représentants se déroulaient conformément aux recommandations adressées aux pays qui ont le statut de partenaire pour la démocratie, la Jordanie l’ayant obtenu en janvier 2016. Ce scrutin, organisé en toute intégrité et en toute transparence n’a pas engendré d’évolution majeure dans l’équilibre du pouvoir politique en Jordanie, puisque le dix-huitième parlement sera, comme le précédent, principalement constitué de petits partis royalistes tribaux, dont la base électorale est souvent cantonnée à une province ou à une région. Cependant, la diversité est due principalement aux modalités de répartition des sièges.

Un des enseignements principaux de cette élection réside dans la participation des Frères musulmans, qui avaient refusé de prendre part aux deux dernières consultations électorales pour des motifs de politique intérieure. Ils ont obtenu une majorité relative à la Chambre des représentants, en s’alliant au Front islamique d’action.

Le rapporteur a salué la coopération des membres de la délégation jordanienne à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, qui ont aidé la délégation à identifier quels étaient les défis démocratiques auxquels leur pays est confronté, et qui ont également joué un rôle prépondérant pour le bon déroulement de ce processus électoral.

M. Bernard Fournier (Loire – Les Républicains) a souligné que cette mission d’observation électorale était particulièrement importante.

Il s’est félicité de la bonne organisation du scrutin qui se déroulait selon des règles du jeu complètement renouvelées en mars dernier, visant à doter le pays d’un régime davantage parlementaire notamment avec l’introduction d’un scrutin proportionnel de, une augmentation très sensible du nombre d’électeurs, l’absence d’incident majeur pendant la campagne, le professionnalisme de la commission électorale indépendante, les efforts d’information des médias et le rôle des réseaux sociaux, le libre choix des électeurs le jour du scrutin et l’absence d’irrégularités constatées ou encore l’élection, pour la première fois, de vingt femmes parmi les députés.

Il a souligné que le Roi joue un rôle central dans la vie institutionnelle et politique en Jordanie et que la Chambre des députés nouvellement élue devra gagner en légitimité et redresser l’image parlementaire, passablement écornée dans l’opinion publique au cours des précédentes législatures.

Rappelant le contexte régional difficile et le rôle joué par la Jordanie dans l’accueil des réfugiés syriens, il a formé le vœu que le nouveau parlement soit suffisamment fort pour contribuer à faire face aux défis à venir.

Mme Geneviève Gosselin-Fleury (Manche – Socialiste, écologiste et républicain) qui était membre de la commission ad hoc a tenu à faire part de ses impressions.

Comme le rapporteur elle a souligné l’organisation du scrutin faite avec rigueur et professionnalisme, avec un souci de transparence vis-à-vis des observateurs présents.

Cependant, elle a insisté sur la nécessité de faire appliquer strictement le principe du silence de la campagne dans les deux jours qui précèdent le scrutin. En effet, elle a pu constater la présence de propagande, tractage ou autre, jusqu’aux portes d’entrée des bureaux de vote. Ainsi, même si le calme prédominait, on peut légitimement s’interroger sur l’influence de ces dernières minutes de campagne électorale sur les électeurs indécis ou influençables. Il est bon qu’au temps du débat d’idées, de la lutte politique légitime, succède un temps de réflexion où chaque citoyen puisse faire son choix sans pression. Ce serait une grande avancée pour les prochaines échéances électorales en Jordanie.

Enfin, elle s’est réjouie de la progression de la représentation politique des femmes dans le nouveau parlement: 250 candidates, un record historique pour la Jordanie, se sont présentées, ont fait librement campagne, et 20 ont été élues, au-delà des 15 sièges réservés aux femmes. Dans cette région où certains pays bafouent chaque jour les droits des femmes, la Jordanie adresse, encore une fois, un message plein d’espoir, que nous devons saluer et soutenir, l’égalité homme/femme étant l’un des piliers du partenariat pour la démocratie.

Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – Socialiste et républicain) en charge du rapport sur la Jordanie, a souligné que la grande réforme électorale a été une volonté du Roi, les choses sont allées vite, peut-être un peu trop. Il s’agissait d’insuffler un élan démocratique au pays, mais le renouveau profond n’a pas eu lieu. Les partis qui avaient besoin de se restructurer sont restés éparpillés. Les programmes qui devaient être élaborés n’ont pas été suffisamment pensés. Au total, il y aura, au sein du nouveau parlement, de nombreuses listes minoritaires, contraintes de s’unir dans des blocs de circonstance. Le Parlement jordanien sera du même coup peu politisé.

Quant au renouvellement des parlementaires, il est marginal. Ces élections ont permis un retour en demi-teinte des Frères musulmans dans le jeu démocratique. Seul parti réellement structuré, ils ont obtenu 12 élus et leur position politique reste relativement faible.

Les gagnants de ces élections sont des hommes d’affaires et des caciques ou chefs de tribus, globalement des conservateurs. Cependant, il faut noter la volonté réformatrice de l’une des listes, qui réunit des jeunes, des classes moyennes et des chrétiens autour d’un programme laïque. Elle s’est interrogée sur l’avenir pour les réformes avec un bloc conservateur fort au Parlement. Telle est la question qui se pose désormais, sachant que le rôle du Roi est essentiel.

C. DÉBAT LIBRE

La réforme du Règlement entrée en vigueur en janvier 2012 prévoit l’organisation d’un débat libre, les parlementaires pouvant intervenir sur un sujet qui n’est pas inscrit à l’ordre du jour.

Lors de cette séance les parlementaires de l’APCE sont intervenus notamment sur le projet de loi anti-avortement en Pologne, les élections en Géorgie et en Moldavie, le conflit gelé du Haut-Karabagh et le drame d’Alep. Plusieurs interventions ont porté sur le Brexit et l’avenir de l’Europe et du Conseil de l’Europe comme organisation paneuropéenne.

D. REMISE DU PRIX DES DROITS DE L’HOMME VÁCLAV HAVEL

Le « Prix des Droits de l’Homme Václav Havel », créé en 2013 à l’initiative de M. Jean-Claude Mignon, alors président de l’APCE, récompense des actions exceptionnelles de la société civile pour la défense des droits de l’Homme. Chaque année, lors de la session d’automne, l’Assemblée parlementaire, en partenariat avec la Bibliothèque Václav Havel et la Fondation Charte 77, remet ce prix en mémoire de Václav Havel, dramaturge, opposant au totalitarisme, artisan de la Révolution de velours de 1989, symbole de la défense des droits de l’Homme et des valeurs défendues par le Conseil de l’Europe.

L’an dernier, le prix avait été remis à Mme Ludmilla Alexeeva, âgée de 88 ans, dissidente soviétique et militante russe des droits de l’Homme.

Cette année, le quatrième prix Václav Havel a été remis à Mme Nadia Murad, une jeune femme yézidie courageuse, qui est parvenue à échapper à l’État islamique dans le nord de l’Irak. Elle est devenue une activiste des droits de l’Homme. Elle appelle l’attention de la communauté internationale sur les exactions commises par l’État islamique, les difficultés auxquelles est confrontée la communauté yézidie et le sort auquel elle est condamnée, en particulier l’esclavage sexuel et la traite des femmes et des enfants capturés par l’État islamique. En septembre 2016, elle a été nommée première ambassadrice de bonne volonté des Nations unies pour la dignité des survivants de la traite des êtres humains.

I. LA SITUATION EN TURQUIE

A. DISCOURS DE M. MEVLÜT ÇAVUşOğLU, MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE LA TURQUIE.

M. Mevlüt Çavuşoğlu, ministre des affaires étrangères de la Turquie, s’est réjoui que son pays soit devenu grand contributeur au budget du Conseil et que le turc soit désormais l’une des langues de travail. Il a rappelé que, quand il était entré au Conseil de l’Europe en tant que député en 2003, la Turquie était alors soumise à une procédure de suivi. Grâce à l’aide du Conseil de l’Europe, le pays a pu en sortir rapidement en accomplissant les progrès nécessaires.

Pendant longtemps, certains ont douté de la capacité de la Turquie à se réformer. Pourtant, la Turquie a introduit de nombreux mécanismes de protection des droits : aujourd’hui, chacun peut, en Turquie, faire valoir ses droits, devant la justice ou le médiateur ; la Turquie a également ratifié la Charte sociale européenne révisée et est État partie à toute une série de conventions et protocoles du Conseil de l’Europe. En mettant en œuvre les recommandations de l’Assemblée parlementaire, la Turquie a pu ouvrir un certain nombre de chapitres de négociation avec l’Union européenne.

Il a souligné l’importance de mettre l’accent sur le dialogue interculturel et interreligieux alors que certaines couches de la population se sentent mises à l’écart, ce qui favorise le radicalisme, l’extrémisme et la montée du terrorisme.

Rappelant que la Turquie est confrontée de longue date au terrorisme, il a accusé le mouvement Gülen d’être à l’origine de la tentative de coup d’État de juillet. Au moment du putsch, l’ensemble des partis politiques a fait bloc, majorité et opposition se sont élevées pour condamner les putschistes et pour rappeler leur attachement à la démocratie.

Depuis ce coup d’État, un état d’urgence a été instauré pour essayer de se débarrasser de cette organisation qui est l’instigatrice de cette tentative, et qui s’est infiltrée dans tous les rouages de l’État. Il a insisté sur la coopération continue avec les divers organes du Conseil de l’Europe.

La Turquie est toujours menacée par le PKK, par différents mouvements extrémistes musulmans, dont l’État islamique. Tous ces terroristes, tous ces mouvements veulent remettre en cause notre civilisation, notre démocratie, nos valeurs.

Évoquant la crise des migrants, il a rappelé que la Turquie était le pays qui avait accueilli le plus grand nombre de réfugiés. Il faut tout faire pour améliorer le sort de ces personnes et se mobiliser, mais le ministre a insisté sur l’importance de partager le fardeau.

De la Crimée au Haut-Karabakh, à l’Abkhazie et à l’Ossétie du sud ainsi qu’à la Transnistrie, sans compter les risques subsistant dans les Balkans, des menaces pèsent sur la stabilité et la démocratie en Europe. Cependant, le ministre a espéré, d’ici à la fin de l’année, parvenir à un accord au sujet de Chypre et à un statut de l’île qui soit partagé par tous.

Le ministre s’est montré favorable à l’organisation d’un sommet sur l’avenir du Conseil de l’Europe et a souligné l’importance du partenariat pour la démocratie.

Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – Socialiste et républicain), porte-parole du Groupe socialiste, a demandé au ministre s’il avait des preuves des accusations portées contre M. Gülen. Elle a également interpelé le ministre sur la levée de l’immunité parlementaire ayant frappé environ un tiers des membres de l’Assemblée turque, et sur le référendum pour l’instauration d’un régime présidentiel.

Le ministre a répondu que le mouvement Gülen a déjà été à l’origine de différentes attaques en Turquie. En 2012, il a également été à l’origine de la fuite de certains entretiens qu’il avait enregistrés à Oslo, pour les utiliser contre le Gouvernement turc. Tous les officiers de police qui ont été arrêtés ont confirmé que Fethullah Gülen était derrière ce coup d’État. Celui-ci vit aux États-Unis et doit être extradé vers la Turquie. Tout le monde, aux États-Unis, est convaincu que Fethullah Gülen est à l’origine de cette tentative de coup d’État. S’agissant de la levée de l’immunité parlementaire, certaines choses ont été mal perçues et mal comprises. Les parlementaires bénéficient de l’immunité lorsqu’ils s’expriment devant le Parlement, quelle que soit leur appartenance politique. La levée de cette immunité concerne les parlementaires soupçonnés d’infraction dans certaines affaires. La Commission de Venise a été consultée sur cette question et la Turquie tiendra compte de son avis. Concernant le référendum sur le régime présidentiel, quel que soit le régime ou le système en place, ce qui est important, c’est le bon fonctionnement de la démocratie, l’État de droit et la séparation des pouvoirs entre le judiciaire, le législatif et l’exécutif. Les parlementaires doivent jouer un rôle-clé dans la démocratie, l’exécutif doit être contrôlé. Or, à l’heure actuelle, la séparation de l’exécutif et du législatif n’est pas nette. Le président de la Commission de Venise a insisté sur l’importance de mettre en place un système fonctionnel. Chaque pays a le choix du régime qui lui convient à condition de respecter les règles de la démocratie.

M. René Rouquet (Val-de-Marne – Socialiste, écologiste et républicain), président de la délégation française, a interrogé le ministre sur la situation à Chypre. Il a constaté que, pour la première fois depuis longtemps, un espoir existait de voir Chypre réunifiée. L’un des obstacles au règlement de ce conflit semble être la difficulté de pouvoir garantir la sécurité des deux communautés de manière acceptable par les deux parties.

Le ministre a répondu que la Turquie est très optimiste sur cette question, même s’il reste à régler des points difficiles, concernant la sécurité, les garanties sur la propriété et le territoire. Il faut compter désormais avec de nouveaux éléments, comme les réserves potentielles de gaz naturel et de pétrole, le voisinage immédiat de la Syrie, la crise des migrants, les flux migratoires en Méditerranée, et l’existence d’organisations terroristes, qui pèsent sur ce qui se passe sur l’île.

Il faut prendre en compte les attentes en matière de sécurité des deux parties, pas seulement celles de la communauté turque. À Chypre, les besoins et les requêtes de chacune des communautés doivent être respectés. Cependant, il a considéré que c’était la dernière chance de régler le problème.

B. DÉBAT D’ACTUALITÉ : LA SITUATION EN TURQUIE DANS LE CONTEXTE DE LA TENTATIVE DE COUP D’ÉTAT

L’Assemblée parlementaire, sur la proposition des groupes politiques, a décidé de tenir un débat d’actualité sur la situation en Turquie après la tentative de coup d’État. Les débats d’actualité ne donnent lieu à aucun vote. Le débat a été ouvert par M. Ian Liddell-Grainger (Royaume-Uni - CE).

Celui-ci a rappelé la place unique de la Turquie au Conseil de l’Europe en raison de sa géopolitique et de son histoire. Il a insisté sur la nécessité de soutenir la Turquie après la tentative de coup d’État et d’essayer de comprendre ce qui se passait en Turquie. Enfin, il a appelé l’Assemblée à ne pas porter des jugements hâtifs sur les projets de réforme constitutionnelle du Président Erdoğan.

M. Jean-Claude Mignon (Seine-et-Marne – Les Républicains) a rappelé que l’état d’urgence n’explique pas tout. En particulier, la volonté de M. Erdoğan et de la Turquie de rétablir la peine de mort serait un retour en arrière dramatique. Bien sûr, la pression de la rue existe, mais la responsabilité des politiques, surtout lorsqu’ils sont représentants au Conseil de l’Europe, c’est de ne pas tomber dans ce travers. Rien ne pourrait expliquer qu’un pays, quel qu’il soit, rétablisse la peine de mort.

M. René Rouquet (Val-de-Marne – Socialiste, écologiste et républicain) a souligné que la Turquie avait été victime d’une inacceptable tentative de coup d’État que tout démocrate ne pouvait que fermement condamner sans réserve. Il est légitime que les auteurs de cette tentative criminelle soient poursuivis avec toute la rigueur de la loi et que l’état d’urgence puisse être proclamé. Cependant, il s’est inquiété de l’ampleur de la répression, et en particulier des révocations dans l’appareil d’État. La suspicion naît de ce que ces purges s’inscrivent dans le contexte d’une dérive autoritaire du Président Erdoğan, antérieure à la tentative du coup d’État. Néanmoins, une démarche pour contester les droits de la délégation turque serait précipitée et inopportune. Les autorités turques ont pris des engagements pour collaborer avec les organes pertinents du Conseil de l’Europe. Il convient de laisser une chance à ces engagements de se concrétiser.

I. LA SITUATION EN UKRAINE

A. DÉBAT CONJOINT : CONSÉQUENCES POLITIQUES DU CONFLIT EN UKRAINE / RECOURS JURIDIQUES CONTRE LES VIOLATIONS DES DROITS DE L’HOMME COMMISES DANS LES TERRITOIRES UKRAINIENS SE TROUVANT HORS DU CONTRÔLE DES AUTORITÉS UKRAINIENNES

Mme Kristýna Zelienková (République tchèque - ADLE), rapporteure au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie sur les conséquences politiques du conflit en Ukraine, a considéré qu’il n’y avait pas eu de progrès dans la mise en œuvre des aspects politiques de l’ensemble des mesures en vue de l’application des accords de Minsk. Elle a réitéré son soutien à une solution pacifique du conflit et au processus de Minsk et a appelé la Fédération de Russie à retirer ses troupes du territoire ukrainien et à cesser de fournir du matériel militaire aux séparatistes. Le rapport souligne cependant que l’Ukraine doit prendre les mesures nécessaires afin de se doter d’institutions stables, efficaces et responsables.

Dans sa résolution, l’APCE a appelé la Russie à « annuler l’annexion de la Crimée et à permettre à l’Ukraine de regagner le contrôle sur la péninsule ». Elle a également condamné les récentes élections organisées par la Douma dans la Crimée occupée, qu’elle a qualifiées de « violations flagrantes du droit international », qui compromettent en réalité la légitimité du Parlement russe. L’Assemblée a appelé l’Ukraine à accélérer la mise en œuvre des réformes promises, notamment pour mettre fin à « un système corrompu et oligarchique ».

Mme Marieluise Beck (Allemagne - ADLE), rapporteure de la commission des questions juridiques et des droits de l’Homme sur les recours juridiques contre les violations des droits de l’Homme commises dans les territoires ukrainiens se trouvant hors du contrôle des autorités ukrainiennes, s’est inquiétée de la situation des droits de l’Homme en Crimée et dans les « républiques populaires » autoproclamées de Donetsk et Lougansk et par le manque de voies de recours pour les victimes. En vertu du droit international, la Fédération de Russie, qui exerce un contrôle de fait sur ces territoires, est responsable de la protection de la population locale.

Dans sa résolution, l’APCE a invité instamment la Russie à rétablir, notamment, les droits historiques des Tatars de Crimée et à « permettre la restauration de l’État de droit dans tout l’est de l’Ukraine ». L’Assemblée a également appelé les autorités ukrainiennes à faciliter la vie quotidienne des habitants des territoires qui se trouvent hors de leur contrôle et des personnes déplacées, en allégeant les formalités administratives et en accordant les moyens nécessaires aux tribunaux. L’APCE s’est également félicitée des activités de l’équipe commune d’enquête sur le vol MH17 abattu au-dessus du Donbass et a pris note de ses conclusions préliminaires.

M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain) a remercié Mme Zelienkova d’avoir rappelé à chacun, à commencer par la Russie, l’exigence de respecter l’intégrité territoriale de l’Ukraine, dans ses frontières internationalement reconnues. Cela comprend, entre autres, la Crimée, qui est et reste en droit une partie du territoire ukrainien. Cela vaut aussi pour le Donbass, où il est primordial que la Russie cesse de soutenir militairement les forces séparatistes. Il a souligné que les accords de Minsk, s’ils sont appliqués dans leur intégralité par les deux parties, permettront la fin du conflit. La réforme des institutions, la décentralisation et la lutte contre la corruption pour l’Ukraine sont fondamentales comme le retrait de la Russie de Crimée. Ni la faiblesse ni l’intimidation ne construisent jamais la paix. Le processus de réconciliation requiert que soient appréhendés des deux côtés les auteurs des pires crimes, depuis le meurtre jusqu’aux disparitions forcées en passant par la torture. Il faut vouloir être juste et intransigeant pour construire l’avenir. Il a rappelé la responsabilité de l’Assemblée et le rôle de la diplomatie parlementaire. Il a appelé les députés russes à revenir à Strasbourg, sans poser de conditions, parce que seul le dialogue peut et doit contribuer à la résolution pacifique de ce conflit.

Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – Socialiste et républicain) a rappelé que l’annexion de la Crimée était une violation de la paix en Europe. Par les accords de Minsk, les Européens se sont montrés unis, que ce soit dans le cadre du triangle de Weimar ou du format « Normandie ». Pour la première fois, l’Europe a fait front et M. Poutine a été obligé d’accepter la discussion, lui qui n’avait pour partenaire que les États-Unis.

Vladimir Poutine est fort de notre faiblesse. Mais si les conditions sont difficiles pour les Ukrainiens, l’Europe est lasse. Après les avoir soutenus, elle ne sent pas la volonté de mettre en œuvre les réformes. Dans ces conditions, la seule voie que peut suivre l’Europe est de refuser le statu quo.

M. Bernard Fournier (Loire - Les Républicains), soutenant les propos tenus par les autres intervenants, a souligné que les Tatars de Crimée, opposés à l’annexion, subissent une répression sévère. Leur assemblée et ses instances locales ont été dissoutes. À l’Est, la situation n’est guère meilleure : des enlèvements, des actes de torture et des exécutions extrajudiciaires ont été signalés par le Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe et par l’OSCE. Il a appelé l’APCE à ne pas céder sur le terrain des valeurs. Pour autant, le dialogue avec la Fédération de Russie reste nécessaire. La question du retour de la délégation russe devra donc être posée, mais celui-ci ne pourra se faire que si la Russie démontre sa volonté de trouver une solution pacifique à ce conflit. Enfin, il est urgent de venir en aide aux personnes déplacées. On estime leur nombre à 500 000. Dans les régions que l’Ukraine ne contrôle plus, ces personnes sont expropriées et n’ont aucun recours. Enfin, l’adoption des normes européennes en Ukraine ne peut rester un exercice incantatoire, mais doit reposer sur une volonté politique réelle démontrée par des actes.

I. LA PROTECTION DES PERSONNES VULNÉRABLES

A. DROITS DE L’ENFANT LIÉS À LA MATERNITÉ DE SUBSTITUTION

Mme Petra De Sutter (Belgique – SOC), rapporteure au nom de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, a examiné la question de la gestation pour autrui (GPA) du point de vue des droits des enfants.

Ce rapport sur le thème de la GPA a été source de multiples débats et prises de position de la commission, souvent sous la pression de lobbies pro et anti GPA. Une question relative au conflit d’intérêt éventuel de la rapporteure avait été soulevée (celle-ci étant gynécologue et travaillant dans une clinique en Belgique pratiquant des GPA). La suspicion du conflit d’intérêt avait été rejetée par la commission. Ensuite, la première version du rapport, portant sur la GPA et ses aspects éthiques, qui différenciait la GPA à but lucratif et la GPA altruiste (sans contrepartie monétaire) avait été rejetée par la commission. Le rapport présenté par Mme De Sutter en séance était donc une version corrigée, plus centrée sur les droits des enfants issus de la GPA. Le projet de résolution joint au rapport a été également rejeté par la commission qui a voté en faveur de la recommandation après de vifs débats.

L’Assemblée devait donc se prononcer sur le projet de recommandation, nécessitant une majorité des deux tiers pour être adoptée.

Dans sa recommandation, la rapporteure demandait au Comité des Ministres d’examiner l’opportunité et la faisabilité d’élaborer des lignes directrices européennes en vue de sauvegarder les droits de l’enfant liés aux conventions de maternité de substitution et de collaborer avec la Conférence de La Haye de droit international privé (HCCH) sur les questions relevant du droit international privé qui entourent le statut des enfants, y compris les problèmes de filiation juridique résultant des conventions de maternité de substitution internationales.

Plusieurs amendements en faveur d’une interdiction universelle ont été rejetés par l’Assemblée.

Après un débat tendu entre les parlementaires soutenant la recommandation au nom des droits des enfants, et notamment du droit à une filiation, et ceux opposés à cette recommandation considérant que la GPA était une atteinte aux droits de l’Homme et celui des femmes en particulier, l’Assemblée a rejeté la recommandation.

M. Frédéric Reiss (Bas-Rhin – Les Républicains) a considéré que la recommandation ouvrait une brèche dangereuse dans notre droit et dans notre échelle de valeurs. En effet, la notion d’intérêt supérieur de l’enfant ne saurait servir de prétexte à une légalisation voilée de pratiques condamnables. Il a rappelé qu’en France, ces enfants, lorsqu’ils arrivaient sur le territoire, n’étaient pas en danger et avaient même la possibilité d’obtenir la nationalité française après cinq ans. Il a tenu à rappeler que le débat sur la filiation n’était que la conséquence d’une marchandisation du corps de la femme, une réification de l’enfant qui devient, de fait, un bien de consommation comme les autres. La GPA est une atteinte à la dignité humaine et plus particulièrement à celle des femmes. Il s’est interrogé sur le fait d’accepter à l’état civil les conséquences d’un acte prohibé par le droit civil et réprimé par le droit pénal et a souligné que si les enfants n’étaient pas coupables, les parents l’étaient. Fixer des lignes directrices sur le statut de l’enfant né de la GPA sans remettre en cause cette pratique contraire aux valeurs défendues dans la Convention d’Oviedo ne serait pas acceptable.

Mme Anne-Yvonne Le Dain (Hérault – Socialiste, écologiste et républicain) a interpelé l’Assemblée sur le droit à l’enfant et a rappelé que seul le droit des enfants existe et qu’il n’est pas en péril. La question de la filiation reste l’unique problème : qui est l’enfant de qui, la mère porteuse, celle qui donne ses ovules, celle qui a commandé ? Elle a insisté sur les dangers courus par ces mères porteuses pendant et après l’accouchement. Elle a précisé que dans les pays pratiquant la GPA altruiste ou éthique, de moins en moins de femmes souhaitent le faire et a évoqué les pressions psychologiques qui pouvaient apparaître au sein d’une même famille pour celle qui refuse. La question fondamentale n’est pas celle de la situation de l’enfant. L’identité est une question complexe. Ce n’est pas qu’une histoire de gènes. Certes, il faut accompagner les enfants, mais sans passer par le fait d’utiliser le corps de deux femmes pour les mettre au monde.

M. Jean-Yves Le Déaut (Meurthe-et-Moselle – Socialiste, écologiste et républicain) a considéré que la GPA était une forme d’esclavage moderne. Il a rappelé que sur 20 000 cas de gestation pour autrui dans le monde, 5 000 avaient lieu en Inde, pays de ces « fermes à femmes » inacceptables. En tant que président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques en France, M. Le Déaut s’est interrogé sur la décision de ce qui est éthique ou pas en matière de GPA. Qui décidera ? Il a insisté sur la nécessité de commencer par interdire la gestation pour autrui marchande. Il a constaté que les enfants issus de GPA avaient de fait de nombreux droits et que, pour la filiation, l’adoption pourrait être l’un des moyens de régler cette question.

M. Yves Pozzo di Borgo (Paris – UDI-UC) a estimé qu’il ne fallait pas sous-estimer la détresse des couples, hétérosexuels comme homosexuels, qui ne peuvent satisfaire leur sincère désir d’enfant. Pour autant, il a rejeté l’existence d’un droit à l’enfant et a rappelé que la GPA soulevait d’innombrables questions éthiques, en premier lieu parce qu’elle constitue une exploitation des femmes, et plus particulièrement des plus démunies. En 2013, la Cour de cassation française avait considéré que la naissance par GPA était l’aboutissement d’une fraude à la loi. Mais, en juin 2014, puis en juillet dernier, la Cour de Strasbourg a condamné la France pour non-transcription à l’état civil d’actes de naissance d’enfants nés à l’étranger par GPA en se fondant à la fois sur le respect de la vie privée garanti par la Convention européenne des droits de l’Homme et sur la Convention internationale des droits de l’enfant. Il s’agit en quelque sorte de distinguer le sort des enfants de celui de leurs parents ayant eu recours à un contrat illicite. C’était une bonne décision, car les enfants doivent être protégés, mais elle a entraîné en France une offensive politique très forte de la part de nombreux partis de l’opposition et de la majorité contre la Cour européenne des droits de l’Homme.

B. LES MUTILATIONS GÉNITALES FÉMININES EN EUROPE

« En 2016, 200 millions de femmes et de filles avaient, dans le monde, subi des mutilations génitales. Ces pratiques ont lieu principalement dans certains pays d’Afrique ou d’Asie, mais également en Europe. Malgré la prise de conscience croissante au niveau international de sa gravité, celles-ci perdurent et demeurent ancrées dans les cultures et traditions des communautés qui les pratiquent ».

Mme Béatrice Fresko-Rolfo (Monaco – PPE/DC), rapporteure au nom de la commission sur l’égalité et la non-discrimination, a rappelé que les mutilations génitales féminines constituent une violation grave des droits de la femme et de l’enfant. Elle a insisté sur la prévention qui doit être au cœur du dispositif et impliquer tous les acteurs concernés, qu’il s’agisse des communautés concernées ou des professionnels de la santé, des services sociaux et bien entendu de la justice.

Dans la résolution adoptée à une très large majorité, l’Assemblée a demandé que les campagnes de sensibilisation, d’information et d’éducation incluent aussi bien les femmes que les hommes des communautés concernées et veillent à dissocier ces pratiques de la religion, des stéréotypes de genre et « des croyances culturelles qui perpétuent la discrimination à l’égard des femmes ». L’Assemblée a également demandé que les mutilations génitales féminines soient reconnues en tant que violence faite aux femmes et aux enfants, et que la compétence extraterritoriale des juridictions nationales soit prévue afin que des poursuites pénales puissent être engagées lorsque les mutilations ont été commises à l’étranger.

Mme Pascale Crozon (Rhône – Socialiste, écologiste et républicain) a souligné que l’excision ne répondait à aucune préconisation religieuse, mais à des coutumes pré-religieuses. Face à cette situation, le rôle de l’éducation est primordial pour permettre qu’à l’avenir, ces jeunes filles devenues mères, refusent les mutilations de leurs propres enfants. Mme Crozon a salué le travail des associations, notamment en Afrique, sur la déconstruction de ces représentations ancestrales et sur la formation des médecins de proximité. Évoquant la sensibilité du droit d’asile aux violences de genre, elle a rappelé que les mutilations génitales féminines sont, au sens de la convention de Genève, une persécution. De fait, cette préoccupation a créé une suspicion à l’égard des parents, suspicion qui a été levée en France en 2015, aucun cas ne venant confirmer une utilisation détournée de la menace d’excision pour faciliter l’accès à un titre de séjour.

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – Socialiste et républicain) a rappelé la difficulté de combattre les mutilations génitales féminines qui touchent aux mentalités et illustrent la prégnance de stéréotypes ancestraux. Elles sont aussi associées à la notion de pureté, de chasteté et d’honneur, comme une convention sociale qui préserve de l’exclusion de la communauté. Du fait de leur brutalité, leurs conséquences physiques sont dramatiques et peuvent conduire à la mort, sans oublier les traumatismes psychologiques encore trop sous-estimés. Mme Blondin a rendu hommage à l’action de l’OMS et de l’Unicef sur le terrain, à la fois pour prendre en charge les victimes et pour faire évoluer les mentalités grâce à l’éducation. La France a renforcé son plan d’action. Tout d’abord, en matière de répression, la loi de 2013 a renforcé la protection des mineurs et les sanctions encourues par les personnes incitant aux actes de mutilation. Point important, la levée du secret professionnel est prévue expressément dans les cas de mutilations sexuelles. Mais la répression ne suffit pas. Seules des actions d’information et de sensibilisation, menées en partenariat avec les communautés, notamment les hommes, permettront de faire évoluer les mentalités.

C. HARMONISER LA PROTECTION DES MINEURS NON ACCOMPAGNÉS EN EUROPE

En 2015, près de 90 000 mineurs non accompagnés ont demandé l’asile dans l’Union européenne. La crise migratoire en Europe a exacerbé les défis liés à l’accueil et à l’assistance de ces enfants en déplacement, et a engendré de nouveaux problèmes de protection, notamment en vue du grand nombre d’enfants non accompagnés portés disparus.

M. Manlio Di Stefano (Italie – NI), rapporteur au nom de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, a souligné les lacunes dans les politiques nationales concernant le traitement des enfants non accompagnés, notamment sur les questions de tutelle ou des procédures d’évaluation de l’âge des enfants. Il a constaté que les nombreuses normes internationales existant dans le domaine sont transposées de manière très inégale dans les législations nationales, et qu’il est donc urgent d’harmoniser les procédures qui s’appliquent aux enfants migrants non accompagnés.

Dans sa résolution, l’Assemblée a demandé aux États membres d’améliorer l’harmonisation de leur législation et en premier lieu de traiter les mineurs non accompagnés comme des enfants et non des migrants. Elle a souligné que les enfants migrants non accompagnés devraient être dûment enregistrés en arrivant en Europe, bénéficier d’un logement adapté à leurs besoins et pouvoir accéder à des soins de santé et à l’éducation, la rétention devant être évitée à tout prix. Enfin, l’APCE a également demandé aux gouvernements de mettre en place des procédures accélérées de demande d’asile prévoyant la désignation en temps utile de tuteurs et de représentants légaux suffisamment formés et de favoriser la coopération avec les pays d’origine.

Mme Pascale Crozon (Rhône – Socialiste, écologiste et républicain) a rappelé que, selon Europol, plus de 10 000 enfants sont portés disparus en Europe. Les ratés de ce système d’asile solidaire contribuent évidemment à une errance des migrants sur le territoire européen, qui s’est développée, faute d’avoir été encadrée, fatale pour des enfants qui ont parfois perdu leur famille dans les conflits, qui l’ont perdue sur la route de l’exil en traversant la mer, ou qui la perdent en Europe à tel ou tel point de passage. Ces enfants deviennent alors des proies pour les trafiquants d’êtres humains. Mme Crozon a souligné que la responsabilité des Européens n’est donc pas d’en gérer le flux, mais de les protéger. Les protéger, c’est les mettre à l’abri dès qu’ils sont identifiés dans le pays où ils se trouvent. C’est lutter contre ces réseaux de traite. Un enfant de plus à protéger toutes les 50 naissances. Voilà le prix des recommandations du rapporteur. Elle a considéré que l’idée que nous nous faisons de l’Europe vaut bien ce prix-là.

M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain) a également insisté sur le fait qu’un mineur non accompagné, c’est un enfant. Il a souligné que les États qui évoquent, pour fuir leurs responsabilités, le manque de moyens et la gravité de la crise, manquent en réalité de volonté politique, symbolisée par l’absence de transposition cohérente dans les législations nationales des dispositions européennes et internationales en faveur des droits de l’enfant et a fortiori de l’enfant migrant. Ainsi se multiplient les discours visant à proposer de mettre fin au regroupement familial, en rupture du droit de tout enfant migrant séparé de vivre avec ses parents, comme le proclame l’article 22 de la Convention internationale sur les droits de l’enfant. Il a insisté sur la nécessité d’une coopération étroite des polices nationales pour retrouver les enfants disparus et pour lutter efficacement contre la traite des êtres humains. En parallèle, il faut aussi mener le combat du droit : sur la tutelle, avec l’harmonisation des conditions de désignation et de mission des tuteurs et sur le regroupement familial. Il a considéré que la rétention des enfants est une honte absolue car « un enfant est un enfant. Sa dignité et son intégrité doivent être respectées. L’intérêt supérieur de l’enfant doit nous guider, notre conscience d’Européens aussi ».

D. LE SPORT POUR TOUS : UN PONT VERS L’ÉGALITÉ, L’INTÉGRATION ET L’INCLUSION SOCIALE

Le président du Comité international olympique, M. Thomas Bach, s’est adressé aux parlementaires dans le cadre du débat. Il a rappelé que les gouvernements et le Mouvement olympique avait une responsabilité commune dans la lutte contre le dopage. Il a souligné que « nous ne pouvons progresser qu’en ralliant nos efforts, en travaillant ensemble. Votre résolution d’aujourd’hui est une grande opportunité pour nous serrer les mains et pour nous rallier autour d’un vœu commun. Le CIO est bâti sur la conviction qu’à travers le sport, nous pouvons faire du monde un meilleur endroit où vivre. Mais nous ne pouvons le faire que si nous travaillons ensemble ».

Mme Carmen Quintanilla (Espagne PPE/DC), rapporteure au nom de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias, a rappelé que, si le sport est une pratique universelle, les préjugés racistes et sexistes compromettent toujours l’égalité d’accès au sport. Elle a encouragé une approche plus intégrée et plus dynamique de la promotion de l’accès au sport, notamment par une coopération accrue entre les parties prenantes et par la mise en place de mécanismes de contrôle effectifs de toute forme de discrimination dans le sport.

Reprenant les propositions de la rapporteure dans sa résolution, l’APCE a invité les États membres à réduire les écarts de rémunération fondés sur le genre, de même que les disparités en matière de prix, à reconnaître les résultats des sportives et à accroître considérablement la visibilité médiatique des femmes dans le sport, en particulier en incitant la radiodiffusion de service public à consacrer plus de temps d’antenne au sport féminin et en œuvrant à une vision non sexiste du sport. L’APCE a également insisté sur la nécessité d’une meilleure redistribution des recettes générées par le sport professionnel de haut niveau, afin d’allouer un pourcentage de ces fonds à des projets destinés à améliorer l’accès au sport pour tous.

M. René Rouquet (Val-de-Marne – Socialiste, écologiste et républicain) a rappelé que le Conseil de l’Europe était depuis longtemps un acteur majeur dans le domaine du sport. S’il a adhéré aux préconisations de la rapporteure concernant la valorisation du sport féminin et une meilleure redistribution des revenus générés par le sport professionnel de haut niveau, il s’est montré plus réservé sur l’aménagement, dans les quartiers défavorisés, d’installations sportives « adaptées aux filles ». Il a exprimé sa crainte que l’on compromette ainsi l’effet inclusif de la pratique sportive et a jugé préférable de renforcer la sécurité plutôt que d’aller vers une évolution préoccupante. Enfin, il a insisté sur la nécessité de mieux intégrer les personnes handicapées dans les activités sportives et de soutenir une plus large radiodiffusion des manifestations sportives les concernant.

M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain) a considéré que le sport, étant un atout considérable en faveur de la culture du vivre-ensemble, il doit être précisément ouvert à tous. Prenant l’exemple des réfugiés à Cologne, il a constaté que la pratique encouragée du sport par les autorités municipales et les associations aidaient les réfugiés à prendre peu à peu leur place dans la société qui les accueille. Rappelant le rôle du sport dans le vivre-ensemble, il a donné l’exemple de l’association « Pl4y International » qui a développé au Kosovo un programme de sport inclusif destiné aux enfants de toutes les communautés, donnant à croire en la capacité de la jeunesse, par le sport, de dépasser les haines et les atavismes séculaires. M. Le Borgn’ avait présenté deux amendements en commission, l’un visant à faire davantage référence dans la résolution à la dimension d’espace de rencontres entre personnes différentes et l’autre étant en faveur de la création d’un label « Sport pour tous » visant à valoriser et à mieux faire connaître toutes ces initiatives formidables qui existent à l’échelon local et qui contribuent au vivre-ensemble si cher au cœur des Européens. Ces deux amendements ont été adoptés par la commission et intégrés au projet de résolution.

Mme Catherine Quéré (Charente-Maritime – Socialiste, écologiste et républicain) a rappelé que les inégalités existant dans la société entre hommes et femmes se retrouvaient dans le sport. Seuls 12,5 % des présidents de fédérations sportives sont des présidentes. De même, les hommes accèdent beaucoup plus souvent au statut de joueurs professionnels que les femmes. Les inégalités de salaire sont particulièrement importantes, notamment dans le football professionnel. Mme Quéré a souligné que le Conseil supérieur de l’audiovisuel français collabore avec l’association « Femix’Sports » afin d’assurer une meilleure représentativité du sport féminin dans les médias. Ainsi, la part du sport féminin à la télévision est passée de 7 % en 2012 à 15 % en 2015. Elle a également insisté sur le rôle du mouvement olympique comme rempart contre les intégrismes. Enfin, elle a constaté que la pratique féminine du sport était le miroir des inégalités sociales. Les trois quarts des femmes ne pratiquant aucune activité physique sont employées ou ouvrières. Et cette sous-représentation des milieux populaires est vraie aussi chez les adolescentes. C’est pourquoi le sport et l’éducation physique doivent constituer des occasions de mise en évidence des inégalités et d’apprentissage de l’égalité.

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – Socialiste et républicain) a rappelé que les régimes totalitaires ont instrumentalisé le sport à des fins de propagande. Pourtant, le sport permet à chacun, au-delà de l’effort et du dépassement de soi, de faire l’expérience concrète des valeurs de solidarité et de tolérance. Il a aussi des vertus éducatives. Bref, le sport est un outil majeur d’intégration. Évoquant le plan national « Citoyens du sport », elle a souligné que le sport doit jouer un rôle concret dans l’éducation à la citoyenneté, mais aussi dans l’emploi, la formation, l’insertion et dans une restructuration territoriale autour d’équipements favorisant la mixité sociale. Elle a insisté sur la nécessité de lutter contre les inégalités hommes-femmes dans le sport, notamment par la médiatisation du sport féminin. Elle s’est félicitée de la mise en place d’un guide juridique et d’un guide pédagogique relatif aux phénomènes sexistes dans les fonctions d’encadrement. La France a également signé la déclaration de Brighton-Helsinki sur la place des femmes dans le monde du sport qui comporte des engagements à mettre en œuvre par les fédérations sportives.

I. L’APCE FACE AUX DÉFIS ÉCONOMIQUES

A. LES ACTIVITÉS DE L’ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES (OCDE) EN 2015-2016

Chaque année, un débat sur les activités de l’OCDE est organisé pendant la quatrième partie de session, soit sur la base d’un rapport fait par la commission des questions politiques et de la démocratie, soit sur la base d’un rapport établi par l’OCDE. Cette année, c’est Mme Mari Kiviniemi, secrétaire générale adjointe de l’OCDE, qui a présenté le rapport de l’OCDE. Ancienne parlementaire, elle a souligné l’importance de la collaboration de l’OCDE avec les parlements. Insistant sur le déclin de la croissance et la montée des inégalités, elle a demandé que les efforts pour augmenter la productivité ne soient pas faits aux dépends de la sauvegarde de la planète et de sociétés équitables. Elle a félicité l’APCE pour son débat sur les « Panama Papers » et a mis en avant la lutte contre la corruption et la nécessité de systèmes fiscaux efficaces. Enfin elle a mis l’accent sur le rôle des nouvelles technologies dans le développement économique et sur l’apport positif à l’économie des migrants dès lors que des politiques d’intégration efficaces sont mises en place.

M. Bernard Fournier (Loire – Les Républicains) a constaté que le lien entre la situation économique et sociale et l’état de la démocratie n’était plus à démontrer. La confiance dans les politiques économiques conduites et les institutions qui les définissent et les mettent en œuvre est déterminante pour la stabilité de nos sociétés démocratiques. En effet, des interrogations naissent sur les causes économiques de l’appauvrissement relatif que connaissent les classes moyennes des pays du Nord et qui devient un défi politique, comme le montre la montée des populismes de tous bords et des extrémismes. La mondialisation s’est traduite par un accroissement considérable de la richesse mondiale, en particulier en Asie. Mais la mondialisation compte aussi des perdants. Au niveau mondial, la hausse des revenus a été très forte pour la classe moyenne asiatique, et pour les plus riches dans l’ensemble des pays. À l’inverse, les classes moyennes européennes et américaines ont vu leurs revenus stagner, en raison de l’explosion du chômage, de la généralisation de la précarité et de la faiblesse des salaires. M. Fournier a constaté que huit ans après le début de la crise, ses principaux ingrédients sont toujours là : croissance faible, hausse du chômage, atonie de l’investissement. Aujourd’hui, les dépenses publiques doivent porter sur des investissements et des projets induisant un effet de levier des fonds publics sur les fonds privés tels que le développement des compétences humaines et du numérique.

B. ENSEIGNEMENTS À TIRER DE L’AFFAIRE DES « PANAMA PAPERS » POUR ASSURER LA JUSTICE SOCIALE ET FISCALE

En avril 2016, une fuite d’informations sans précédent, qualifiée de « Panama Papers », venue de la base de données du quatrième plus grand cabinet juridique offshore du monde, Mossack Fonseca, a révélé la façon dont des personnes riches dissimulent leurs actifs financiers pour éviter tout contrôle fiscal. Ces révélations qui ont touché des célébrités, mais également des personnalités politiques de plus de 50 pays et des grandes entreprises, démontrent que la lutte contre les paradis fiscaux et l’instauration d’une transparence fiscale n’ont eu, à ce jour, qu’un effet limité.

M. Stefan Schennach (Autriche – SOC), rapporteur au nom de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, a insisté sur la nécessité de trouver de bons moyens d’assurer une conformité technique aux normes internationales déjà existantes en matière de politiques de lutte contre l’évasion fiscale et le blanchiment d’argent.

Dans sa résolution, l’APCE a rappelé que ce type d’affaires était une menace pour la démocratie car elle sapait la confiance des citoyens dans leurs systèmes fiscaux mais aussi dans l’État de droit. Elle a appelé les États à prendre des mesures fortes contre l’évasion fiscale, notamment en assurant l’application effective et la conformité technique aux normes existantes en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, en créant au niveau national une cellule de renseignement financier efficace et indépendante, libre de toute ingérence politique dans la prise de décisions opérationnelles,; ou en maintenant une surveillance renforcée des transactions opérées par les personnes politiquement exposées pendant au moins cinq ans après que ces dernières ont cessé d’exercer les fonctions justifiant ce statut.

Mme Marie-Jo Zimmermann (Moselle – Les Républicains) s’est interrogée sur le point 7 du projet de résolution portant sur les « juridictions adeptes du secret » et a mis en garde l’Assemblée contre la tentation de l’extraterritorialité, prônée par les États-Unis. Elle a souligné l’importance des dysfonctionnements des systèmes fiscaux, comme cause des problèmes d’évasion fiscale. Les déséquilibres structurels entre des pays comme la France, où les impôts sont très importants, et d’autres comme l’Irlande, qui pratiquent un dumping fiscal, constituent une véritable incitation à la fraude et à l’évasion fiscale. Les solutions ne sont pas simples, mais cela mériterait une réflexion globale de notre assemblée, en liaison avec l’Union européenne.

Mme Geneviève Gosselin-Fleury (Manche – Socialiste, écologiste et républicain) a rappelé que sans transparence, il n’y a pas de démocratie moderne. La crise de confiance des citoyens dans leurs institutions et, plus largement, dans l’ordre social établi – économique ou politique – en est la conséquence la plus dramatique car elle ouvre la porte aux populismes et aux extrémismes. En France, depuis 2013, des mesures relatives au reporting, au contrôle des marchés financiers ont été adoptées, et une agence anti-corruption qui lutte contre ce fléau sur notre territoire et au-delà a été créée. Le 28 septembre dernier, un amendement permettant une compétence universelle de la France pour poursuivre les fraudeurs, y compris à l’étranger, a été adopté. Cette mesure sera particulièrement efficace pour atteindre les entités du numérique, souvent dépourvues de filiales françaises. Elle a rappelé qu’une justice fiscale ne peut être réellement efficace que si chaque citoyen prend conscience que l’impôt, loin d’être une punition, est au cœur du pacte démocratique. Cette justice fiscale est complexe car rien ne peut réussir sans une vraie collaboration internationale, par exemple sur les échanges de données bancaires. La convention de l’OCDE est, en la matière, un modèle.

C. L’INCIDENCE DE LA DYNAMIQUE DÉMOGRAPHIQUE EUROPÉENNE SUR LES POLITIQUES MIGRATOIRES

L’Europe est particulièrement concernée par l’« hiver démographique » : en raison de la baisse de la fécondité, le taux de natalité global moyen s’y est établi à 1,5 enfant par femme, ce qui représente le niveau le plus bas jamais atteint. Dans le même temps, les pays du Conseil de l’Europe se caractérisent par la population la plus âgée au monde, en raison de la forte proportion de personnes de 65 ans et plus

Tirant les conséquences de cette situation, Mme Kristin Johnsen (Norvège PPE/DC), rapporteure au nom de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, a insisté sur la nécessité d’attirer de jeunes migrants qualifiés pour faire face à la baisse de la population active.

Dans sa résolution, l’APCE a encouragé la mise en place de stratégies ayant pour but l’augmentation du taux de natalité globale moyen, l’élaboration de politiques de santé et la promotion d’une meilleure conciliation entre vie familiale et vie professionnelle. D’autre part, elle a invité les États membres à « élaborer, le cas échéant, des politiques migratoires tournées vers l’avenir et à assurer un transport sécurisé des personnes, qui permettent d’attirer des migrants qualifiés », en encourageant notamment l’entrée rapide des migrants en situation régulière sur le marché du travail, tout en répondant aux besoins d’intégration.

M. André Schneider (Bas-Rhin – Les Républicains), porte-parole du Groupe PPE/DC, a rappelé que d’ici 30 ans, l’Afrique devra nourrir, former, loger, employer 1 milliard d’habitants supplémentaires et que cette population extrêmement jeune se tournera vers l’Europe. À ces migrations s’ajouteront celles induites par le changement climatique, tandis que nous continuerons d’être confrontés à l’afflux des réfugiés fuyant les guerres. Certains considèrent les migrations comme un danger. M. Schneider a considéré que si de vraies stratégies et une politique migratoire concertée sont établies, les migrations seront une chance pour l’Europe. Certains dénonceront une fuite des cerveaux des pays d’origine, mais s’agissant de l’accueil de migrants qualifiés, l’Europe est en concurrence avec des pays comme le Canada. Il a insisté sur l’apport considérable de capitaux que ces migrants envoient dans leur pays d’origine, bien supérieur à l’aide publique. La question de la reconnaissance des diplômes ou de la formation, en particulier dans certains pays, est également essentielle. Permettre aux migrants de travailler légalement, c’est aussi lutter contre toutes les formes de traite et de travail illégal. Enfin, il a soutenu la rapporteure pour sa proposition de créer « un transport sécurisé des personnes » qui pourrait mettre fin aux traversées mortelles de la Méditerranée.

M. Frédéric Reiss (Bas-Rhin – Les Républicains) a rappelé que, depuis la Seconde Guerre mondiale, jamais l’Europe n’a été confrontée à un afflux de migrants de cette ampleur. L’Europe ne peut rester sur une position attentiste et doit aujourd’hui prendre des initiatives pour une gestion concertée de cette situation. Comme la rapporteure, il a constaté le besoin de migrants qualifiés pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre dans certains secteurs économiques. Cependant, il a insisté sur la nécessité de réfléchir aux conditions sociales offertes à ces migrants. Cette problématique des conditions sociales recoupe celle de l’intégration. Il ne s’agit pas seulement d’attirer des migrants, il faut réfléchir à leur accueil et à leur intégration sociale pour éviter d’accroître la masse de ces travailleurs pauvres qui, malgré un salaire, n’arrivent pas à se loger ou à assurer une vie décente à leurs familles. Il conviendra de réfléchir au risque de dumping social. Au sein même de l’Union européenne, dans certains secteurs, notamment médical, il y a déjà un débat sur la valeur de certaines formations, de certains diplômes. Dans ces conditions, des diplômes non européens ne seront acceptés que si une réflexion est menée sur la valorisation de l’expérience et des compétences. L’intégration passera également par la connaissance de la langue du pays d’accueil. Il faut donc préparer en amont l’accueil de ces migrants et ne pas se contenter de leur proposer des cours une fois installés dans le pays. La connaissance linguistique doit devenir un préalable. Enfin, il a été interpelé par l’addendum au rapport sur la Moldavie et qui amènera les pays du Conseil de l’Europe à réfléchir ensemble à la concurrence de fait qui va exister entre les migrants venus d’Europe orientale et ceux qui viendront du continent africain. Ces pays d’Europe orientale touchés par l’hiver démographique voient leurs jeunes partir à l’Ouest, dans l’espoir d’une vie meilleure. Il faut être attentif au message envoyé à ces jeunes actifs européens dans nos choix de politique migratoire.

I. COOPÉRATION AVEC LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE : POUR UN ENGAGEMENT ÉTENDU ET CONCRET

M. Alain Destexhe (Belgique – ADLE), rapporteur au nom de la commission de questions juridiques et des droits de l’Homme, a rappelé que seulement 124 États avaient ratifié le Statut de Rome, six États membres du Conseil de l’Europe ne l’ayant pas encore fait. Plusieurs États membres n’ont pas ratifié les « amendements de Kampala », portant sur l’élargissement de la définition des crimes de guerre et sur le crime d’agression. D’autres n’ont transposé dans leur législation nationale ni les obligations concernant la coopération avec la Cour pénale internationale (CPI) ni les crimes définis dans le Statut de Rome. Il s’est inquiété du fait que la CPI est accusée de « deux poids, deux mesures », qu’elle ne dispose pas de ressources appropriées pour mener à bien ses actions et que certains États africains remettent en cause son existence.

Dans sa résolution adoptée à l’unanimité, l’APCE a invité les États membres et aussi observateurs, invités ou partenaires de la démocratie à réaffirmer leur engagement en faveur de la CPI, en signant et ratifiant sans plus tarder le Statut de Rome, les « amendements de Kampala » et l’accord sur les privilèges et immunités de la CPI. Elle les invite également à adopter une législation effective qui transpose le Statut de Rome, notamment en intégrant les crimes et les principes généraux du droit qui sont définis dans leur législation pénale nationale et en établissant des procédures qui permettent une coopération pleine et effective avec la Cour.

Enfin, l’APCE appelle également la Procureure de la CPI à reconsidérer sa décision d’avril 2015 de ne pas procéder à l’examen préliminaire des crimes commis par les combattants étrangers d’ISIS/Daesh, à la lumière des preuves nouvelles et accablantes dont elle dispose, et de rapidement reconnaître sa compétence à l’égard des auteurs de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis en Syrie et en Irak, dans toute la mesure du possible.

M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain), porte-parole du Groupe socialiste, a rappelé qu’il faudrait que la Cour soit incontestable et incontestée. La vérité, malheureusement, est que ce n’est pas le cas, l’intégrité et l’indépendance de la Cour ayant pu parfois être mises en cause. Il a considéré qu’il était de la responsabilité du Conseil de l’Europe de lutter contre toutes les attaques portées à l’autorité de la Cour en sa qualité d’institution judiciaire internationale permanente. Il n’est pas acceptable que six États membres de l’Organisation n’aient toujours pas ratifié le Statut de Rome, alors qu’il s’agit de la poursuite des crimes les plus graves touchant l’ensemble de la communauté internationale : génocides, crimes contre l’humanité et crimes de guerre. Il a demandé que les États ratifient les textes concernés et adoptent à l’échelle nationale les législations permettant la pleine mise en œuvre du Statut, a fortiori en incorporant les crimes et les principes généraux qui figurent dans le droit pénal de chacun de nos États. Il a insisté sur la nécessité de conclure des accords de coopération avec la Cour pour faciliter les enquêtes et les poursuites, assurer l’exécution des peines prononcées et protéger les témoins et de mobiliser les énergies par la formation des juges, des procureurs, des avocats et des forces de l’ordre sur la mise en œuvre du Statut de Rome.

MmeMarietta Karamanli (Sarthe – Socialiste, écologiste et républicain) a rappelé l’espoir que suscitait la CPI lors de sa création. Si elle est permanente, plusieurs limites institutionnelles ont néanmoins été posées pour en assurer l’acceptabilité et l’opérationnalité. Limites matérielles, puisque sont énumérés les crimes contre l’humanité, les génocides, les crimes de guerre et les crimes d’agression. Limites territoriales, au sens où le crime doit avoir été commis sur le territoire d’un État ayant signé la Convention. Limite organisationnelle, dans la mesure où la compétence de la Cour est complémentaire. Enfin, la limite d’une ratification par seulement 124 États, six États membres du Conseil de l’Europe ne l’ayant pas encore fait. De fait, la justice pénale internationale est et reste à deux vitesses. Cette justice a suscité des déceptions explicables à bien des égards. Les effets des décisions de cette juridiction sont parfois perçus comme ayant des dimensions politiques. Mais la tâche est difficile et les enquêtes menées nécessitent une coopération que certains États refusent ou accordent avec parcimonie. Si elle est critiquée et critiquable, cette juridiction, par le mouvement historique qu’elle dessine, est primordiale pour construire un ordre juridique international. Il faut en poursuivre la construction et inviter les États membres qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Statut de Rome et les textes afférents, à adopter une législation transposant leurs dispositions et à coopérer de façon loyale, transparente et équitable avec la Cour. Mme Karamanli a conclu sur les avancées possibles en matière de poursuite des crimes contre l’environnement.

1 http://www.claudebartolone.fr/2016/09/15/conference-europeenne-des-presidents-de-parlement-a-strasbourg/

2 http://www.jeanclaudegaudin.net/v4_jcg/index.php?option=com_content&view=article&id=2677:jean-claude-gaudin-a-la-conference-europeenne-des-presidents-de-parlement&catid=5&Itemid=35

3  http://website-pace.net/documents/19879/1110723/20150129-CharteEngagementsNHPA-BIL.pdf/95347ed9-8d91-4271-bbeb-3226ac95fd25

4  http://www2.assemblee-nationale.fr/documents/notice/14/rap-info/i4050/%28index%29/depots

5  Vidéo : http://www.elysee.fr/photos/conseil-de-l-europe-2/?input-search=&input-date1=&input-date2=&input-theme=&search_index=10#content


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