N° 465 - Rapport de M. Christian Eckert sur le projet de loi de finances rectificative pour 2012 (n°403)



N° 465

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 28 novembre 2012.

RAPPORT

FAIT

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE
SUR LE PROJET DE
loi de finances rectificative pour 2012 (n° 403),

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Christian Eckert,

Rapporteur général,

Député.

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INTRODUCTION 7

AIDE-MÉMOIRE DU PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2012 9

I.– UNE EXÉCUTION 2012 MARQUÉE PAR LA BAISSE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT SUR LE PÉRIMÈTRE « ZÉRO VOLUME » 11

A.– LA BAISSE HISTORIQUE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT EN 2012 12

1.– Une économie de 2,4 milliards d’euros sur la charge de la dette en cours d’année en raison de taux d’intérêt particulièrement bas 13

2.– Une économie de 1,2 milliard d’euros des dépenses au sein du périmètre « zéro valeur » 16

3.– L’évolution des dépenses de l’État hors périmètre normé 17

B.– LES MODIFICATIONS DE CRÉDITS PROPOSÉES PAR LE PRÉSENT PROJET DE LOI 17

1.– Les ouvertures de crédits sur le budget général 18

a) L’inévitable progression des dépenses de la mission Ville et logement sous l’effet de la crise 21

b) La sous-évalualuation constante des dépenses de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances 24

c) Le doublement du coût de l’allocation temporaire d’attente en 2012 25

d) Les ouvertures de crédits au titre des aides exceptionnelles en faveur des collectivités victimes d’emprunts structurés 26

e) La nécessité de combler le besoin de financement du CAS Pensions par une ouverture de crédits au sein de la mission Régimes sociaux de retraite 26

f) La problématique de la réorganisation de la société Audiovisuel extérieur de la France (AEF) 27

g) L’ouverture de 910,4 millions d’euros d’autorisations d’engagement pour financer deux opérations immobilières 28

2.– Les annulations de crédits sur le budget général 29

3.– La régulation budgétaire en 2012 33

4.– Les mouvements de crédits sur les comptes spéciaux 35

C.– LA SITUATION FINALE DES CRÉDITS NETS EN 2012 35

II.– LES RECETTES DU BUDGET GÉNÉRAL ET LE SOLDE EN 2012 38

A.– L’ÉVOLUTION DES RECETTES DU BUDGET GÉNÉRAL 38

1.– Une surévaluation manifeste de la prévision initiale de recettes fiscales nettes 38

2.– Une quasi-stabilité des recettes du budget général par rapport à la prévision révisée de septembre dernier 40

B.– UN OBJECTIF DE DÉFICIT PUBLIC MAINTENU À 4,5 % DU PIB 43

1.– Le solde de l’État fortement impacté par plusieurs opérations exceptionnelles 43

2.– Le maintien de la prévision de solde des autres sous secteurs d’administration 45

EXAMEN DES ARTICLES 47

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

RESSOURCES AFFECTÉES

Dispositions relatives aux collectivités territoriales

Article premier : Compensation des transferts de compétences aux départements et aux régions par attribution d’une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) 47

Article 2 : Compensation à la collectivité de Mayotte des charges résultant de la mise en place du revenu de solidarité active (RSA) 55

Article 3 : Régularisation des montants dus au titre des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) 59

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES A L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

Article 4 : Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d’autorisation des emplois 62

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE PREMIER

AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2012. - CRÉDITS DES MISSIONS

Article 5 : Budget général : ouvertures et annulations de crédits 65

Article 6 : Comptes spéciaux : ouverture de crédits 66

Article 7 : Renforcement de la lutte contre les fraudes patrimoniales les plus graves 67

Article additionnel après l’article 7 : Extension de la compétence de la commission départementale de conciliation de Paris aux biens situés à l’étranger 77

Article additionnel après l’article 7 : Harmonisation du délai de reprise en cas de fraude révélée devant les Tribunaux 77

Article 8 : Adaptation des procédures de lutte contre les fraudes les plus graves 79

Après l’article 8 97

Article 9 : Lutte contre la fraude TVA sur la vente de véhicules d’occasion 104

Après l’article 9 107

Article 10 : Marquage obligatoire et traçabilité des produits du tabac. Consolidation du dispositif des « coups d’achat » sur Internet 110

Article 11 : Présentation obligatoire de la comptabilité sous forme dématérialisée dans le cadre d’une vérification de comptabilité 121

Article 12 : Modification des modalités d’imposition à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux de la cession à titre onéreux d’usufruit temporaire 127

Article 13 : Application aux plus-values d’apport de titres réalisées par les personnes physiques d’un report d’imposition optionnel en lieu et place du sursis d’imposition en cas d’apport à une société contrôlée par l’apporteur 135

Article 14 : Prévention des schémas d’optimisation fiscale dits de « donation-cession » de titres de sociétés 151

Article additionnel après l’article 14 : Suppression de la retenue à la source sur les intérêts de placements antérieurs à 1987 157

Article additionnel après l’article 14 : Allongement du délai global d’investissement des FCPI et des FIP au titre de l’avantage consenti à l’ISF 158

Article 15 : Harmonisation des délais de réclamation applicables en matière fiscale et de réparation des préjudices subis 159

Après l’article 15 168

Article 16 : Précisions des modalités d’imposition en cas de transfert de siège ou d’établissement stable hors de France 170

Après l’article 16 180

Article 17 : Ajustements consécutifs notamment à la suppression de la taxe professionnelle et à la mise en œuvre des schémas départementaux de coopération intercommunale 183

Article additionnel après l’article 17 : Ouverture d’une faculté de prise en charge par les collectivités territoriales de tout ou partie de la cotisation minimum de cotisation foncière des entreprises due au titre de 2012 210

Article additionnel après l’article 17 : Modification des modalités de révision des attributions de compensation versées par certains EPCI à fiscalité propre 211

Article 18 : Modification du droit de licence dû par les débitants de tabacs 213

Article 19 : Extension des dispenses de caution pour les petits opérateurs en matière d’alcool et de boissons alcooliques 217

Article 20 : Extension de la dispense de caution des taxes dues lors de l’importation et en matière de régimes économiques douaniers. 220

Article 21 : Modification des dispositions relatives à la taxe poids lourds alsacienne (TPLA) et à la taxe poids lourds nationale (TPLN) 225

Après l’article 21 238

Article additionnel après l’article 21 : Modification de certaines modalités de calcul de la contribution au service public de l’électricité 239

Article 22 : Transposition de la directive 2010/45/UE du 13 juillet 2010 modifiant la directive 2006/112/CE relative au système commun de la taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne les règles de facturation 241

Article 23 : Mise en conformité avec le droit communautaire de diverses dispositions en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA) 258

Après l’article 23 270

Article 24 : Départementalisation de Mayotte 271

Après l’article 24 272

II.– AUTRES MESURES

Article 25 : Modification de certaines redevances perçues par les agences et offices de l’eau 284

Article 26 : Taxe relative aux produits phytopharmaceutiques, à leurs adjuvants, aux matières fertilisantes et supports de culture affectée à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) 290

Après l’article 26 298

Article 27 : Réforme du financement de la revalorisation des rentes 299

Article 28 : Garantie par l’État des emprunts de l’Unédic émis en 2013 307

Article 29 : Révision du régime de la garantie de l’État accordée à Dexia en 2011 312

Article 30 : Amélioration du financement des exportations 321

Article 31 : Octroi de la garantie de l’État à la société Banque PSA Finance, filiale de la société Peugeot S.A. 339

TABLEAU COMPARATIF 349

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 549

ANNEXE 577

INTRODUCTION

Exercice traditionnel par excellence, le collectif budgétaire de fin d’année présente cette année certaines particularités : il doit tirer les conséquences en fin de gestion des surévaluations de recettes et des sous-évaluations de dépenses de l’État décidées au moment du débat sur le projet de loi de finances initiale pour 2012 par un autre Gouvernement, émanant d’une autre majorité. Il doit pour autant démontrer la capacité du nouveau Gouvernement à tenir les engagements de réduction du déficit public pris devant nos partenaires européens.

Le pari a été tenu et l’objectif atteint grâce au sens des responsabilités, à la volonté politique et à la réactivité du nouveau Gouvernement. Celui-ci a pris en effet, dès la loi de finances rectificative du 16 août 2012, les mesures nécessaires pour faire face aux dérapages de dépenses identifiés par la Cour des comptes à la suite de l’audit réalisé en juin à sa demande, et pour mobiliser de nouvelles recettes, dans un esprit de rééquilibrage de notre politique fiscale au profit des ménages modestes, ainsi que des petites et moyennes entreprises.

Ce résultat est d’autant plus remarquable que, pour la première fois dans l’histoire budgétaire française, les dépenses de l’État – hors dépenses exceptionnelles – baissent en valeur d’une année sur l’autre d’environ 200 millions d’euros, quand, sur la moyenne des cinq dernières années, elles avaient tendance à augmenter de 5 à 6 milliards d’euros par an. Ce faisant, aucune mesure fiscale de rapport n’est prévue par le présent collectif pour 2012.

S’il faut se féliciter de ce résultat historique, il convient néanmoins de rester vigilant pour au moins deux raisons : d’une part, la moitié de l’économie constatée par rapport à la tendance résulte d’un facteur conjoncturel, lié à la réduction de la charge de la dette de l’État par rapport à la prévision initiale en raison des taux d’intérêt faibles dont a bénéficié la dette française ; d’autre part, le Gouvernement doit aujourd’hui faire face à une nouvelle dépense exceptionnelle, liée à la nécessité de recapitaliser le groupe Dexia, à hauteur de 2,58 milliards d’euros sans connaître à ce stade son impact sur le déficit public de fin d’année, celui-ci dépendant d’une décision d’Eurostat attendue d’ici le 31 décembre 2012.

Si cette dépense exceptionnelle n’est pas prise en compte dans le déficit public, le Gouvernement sera parvenu à réduire le déficit public de 5,7 % en 2011 à 4,5 % du PIB en 2012, grâce à des mesures pérennes réduisant d’autant le déficit structurel de la France et s’inscrivant pleinement dans la programmation des finances publiques définie par le projet de loi de programmation 2012-2017 adopté en première lecture par l’Assemblée nationale en octobre dernier.

AIDE-MÉMOIRE DU PROJET DE LOI DE FINANCES
RECTIFICATIVE POUR 2012

(en milliards d’euros)

I.– LES DÉPENSES (1)

A.– Ouvertures de crédits proposées dans le collectif : + 6,8 d’AE et + 5,9 de CP

1. Budget général : 4,26 d’AE et 3,37 de CP

dont :

• Participation au capital de Dexia : 2,58

• Prévention de l’exclusion : 0,31 (aides au logement)

• Solidarité, insertion, et égalité des chances : 0,28 en AE et 0,31 en CP (AAH)

• Immigration, asile et intégration : 0,09 en AE et 0,08 en CP (ATA)

2. Comptes spéciaux : + 2,58 (participation au capital de Dexia)

B.– Annulations de crédits proposées dans le collectif : – 2,69 en AE et – 1,87 en CP

Budget général

dont :

• charge de la dette de l’État : – 1,01 en CP

• aide publique au développement : – 0,28 en AE et – 0,27 en CP

• Solidarité, insertion, égalité des chances : – 0,15 en AE et – 0,17 en CP

• Écologie : – 0,23 en AE et – 0,20 en CP

• Justice : – 0,47 en AE

C.– Soldes des mouvements proposés dans le collectif : + 4,15 en AE et + 4,08 en CP

1. Budget général : + 1,57 d’AE et + 1,50 de CP

2. Comptes spéciaux : + 2,58

II.– LES RECETTES

A.– Les modifications par rapport à l’évaluation révisée associée
à la loi de finances rectificative du 16 août 2012

• Recettes fiscales nettes : – 2,3

• Recettes non fiscales : – 1,4

• Comptes spéciaux : + 3  (2)

B.– Les évaluations de recettes après intervention du présent collectif

• Recettes fiscales nettes : 270,1

Moins-values par rapport à la loi de finances initiale : – 4,8

dont :

Ä IR net : – 1

Ä IS net : – 4,6

Ä TVA nette : – 1,1

• Ressources non fiscales : 14,1

Moins-values par rapport à la loi de finances initiale : – 1,7

• Prélèvements sur recettes : 74,7

dont :

Ä collectivités territoriales : + 0,05

Ä Union européenne : + 0,2

• Ressources nettes du budget général : 209,5

Moins-values par rapport à la loi de finances initiale : – 6,8

III.– LE DÉFICIT

• Estimé à 78,7 en LFI, le montant du déficit prévisionnel est relevé à 83,6 (hors recapitalisation de Dexia).

I.– UNE EXÉCUTION 2012 MARQUÉE PAR LA BAISSE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT SUR LE PÉRIMÈTRE « ZÉRO VOLUME »

L’analyse de l’évolution des dépenses de l’État en 2012 au sein des périmètres « zéro volume » et « zéro valeur » (3) montre que, non seulement les dépenses de l’État hors charges d’intérêt et des pensions ont été réduites de 1,2 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2012, mais surtout que, pour la première fois dans l’histoire budgétaire française, l’ensemble des dépenses de l’État sous le périmètre « zéro volume » devraient baisser en valeur de 0,2 milliard d’euros, par rapport à l’exécution 2011. Ce chiffre est à comparer avec la progression annuelle de 5 à 6 milliards d’euros de ces mêmes dépenses sur la période 2007-2011.

Le Rapporteur général souhaite donc, à titre liminaire, se féliciter de cette baisse historique des dépenses de l’État d’une année sur l’autre. Elle démontre la démarche volontariste du nouveau Gouvernement pour assumer les engagements pris par la France en faveur de la réduction du déficit, à travers une gestion rigoureuse mais juste des dépenses de l’État. Ce résultat est d’autant plus remarquable que, comme l’avait annoncé la Cour des comptes dans son audit des finances publiques en juin 2012 (4), le présent projet de loi de finances rectificative ainsi que le décret d’avance notifié à la commission des Finances le 20 novembre 2012, redéploient 2,2 milliards d’euros de crédits, essentiellement pour faire face aux dérapages des dépenses de personnel (0,6 milliard d’euros) et d’intervention résultant d’ « impasses » de construction en loi de finances initiale imputables au précédent Gouvernement.

Cette situation ne saurait pour autant éliminer le fait que certaines dépenses exceptionnelles – non comptabilisées ni dans les normes annuelles de dépenses de l’État ni dans le déficit public de l’État – sont apparues en 2012 pour des montants très importants : ainsi, la loi de finances rectificative du 14 mars 2012 a-t-elle ouvert 16,3 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 6,5 milliards d’euros en crédits de paiement (CP) pour assurer la participation de la France au Mécanisme européen de stabilité (MES). De même, le présent projet de loi de finances rectificative propose l’ouverture de 2,58 milliards d’euros en AE et CP sur le budget général afin d’alimenter le compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État, pour procéder à la recapitalisation de la banque Dexia, pour laquelle le soutien de l’État n’a cessé de croître depuis 2008 (5).

Enfin, les dépenses liées à la compensation de la réforme de la taxe professionnelle – non comptabilisées dans le prélèvement sur recettes en faveur des collectivités territoriales au sein de la norme « zéro valeur » mais pris en compte dans le déficit public – sont également revues à la hausse de 0,15 milliard d’euros dans le présent collectif budgétaire.

Il s’ensuit que les mouvements de crédits constatés sur l’ensemble de l’année sont d’un montant important par rapport à l’exercice précédent, le solde des ouvertures et annulations de crédits nets en cours d’année s’élevant à 21,6 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 7,8 milliards d’euros en CP (contre respectivement 0,7 et 1 milliard d’euros en 2011).

La loi de finances pour 2012 constitue la deuxième année de mise en œuvre de la double norme de dépenses de l’État en volume et en valeur.

Compte tenu du contexte dégradé constaté à la fin de l’année 2011, la loi de finances initiale a fixé un objectif plus strict que le simple respect des normes « zéro volume » et « zéro valeur » : les dépenses de l’État devaient baisser de 0,5 % sous le périmètre de la norme « zéro volume » et de 0,4 % sous le périmètre de la norme « zéro valeur », par rapport à la loi de finances initiale pour 2011. Ainsi, les dépenses de l’État devaient atteindre 361,3 milliards d’euros, et 274,9 milliards d’euros hors charge de la dette et des pensions (contre respectivement 357,9 et 276,1 milliards d’euros en LFI 2011). Cette contrainte budgétaire a encore été renforcée à l’occasion de la première loi de finances rectificative du 14 mars 2012 qui a procédé à une annulation de crédits de 1,2 milliard d’euros au sein du périmètre de la norme « zéro valeur ».

Comme le montre le tableau ci-après, ces objectifs seraient finalement dépassés : ainsi, l’ensemble des dépenses baisserait de 3,6 milliards d’euros par rapport à l’objectif initial, et, pour les seules dépenses sous le périmètre de la norme « zéro valeur », l’annulation de 1,2 milliard d’euros opéré en mars 2012 ne serait pas remise en cause malgré la nécessité de faire face au dérapage de 2,2 milliards d’euros de certaines dépenses incontournables en fin d’année.

In fine, les dépenses de l’État sous le périmètre « zéro volume » devraient s’établir fin 2012 à 357,7 milliards d’euros, soit une réduction de 0,2 milliard d’euros de l’ensemble des dépenses de l’État entre l’exécution 2011 et l’exécution 2012. À titre de comparaison, ces dépenses avaient progressé de 5,2 milliards d’euros entre 2010 et 2011 (6).

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT SOUS LES NORMES « ZÉRO VOLUME »
ET « ZÉRO VALEUR » EN 2012

(en milliards d’euros)

 

LFI 2012

Mouvements de crédits

Crédits ouverts 2012

Prévision d'exécution 2012****

 

LFR 1

LFR 2

PLFR 3

DA***

1. Budget général (BG)

 

 

 

 

 

 

 

Charge de la dette (a)

48,8

– 0,7

– 0,7

– 1,0

0,0

46,4

46,4

Pensions (b)

37,6

0,0

0,0

0,0

0,0

37,6

37,6

Personnels hors pensions (c)

80,4

0,0

0,0

0,0

0,6

81,0

81,0

Provisions (d)

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

Autres dépenses BG** (e)

123,8

– 1,2

0,0

– 0,1

– 0,6

121,9

121,9

Total BG

 

 

 

 

 

 

 

dont périmètre « 0 valeur » (c+d+e)

204,3

– 1,2

0,0

– 0,1

0,0

203,0

203,0

dont périmètre « 0 volume » (a+b+c+d+e)

290,7

– 1,9

– 0,7

– 1,1

0,0

287,0

287,0

2. PSR (prélèvement sur recettes)

 

 

 

 

 

 

 

Collectivités territoriales

55,6

 

 

0,0

 

55,6

55,6

dont PSR collectivités sous norme

51,7

 

 

– 0,1

 

51,6

51,6

Union européenne

18,9

 

 

0,2

 

19,1

19,1

Total PSR

74,5

 

 

0,2

 

74,6

74,6

dont PSR sous norme

70,6

 

 

0,1

 

70,7

70,7

3. Affectations de recettes ****

3,0

 

 

 

 

3,0

3,0

Total norme élargie

 

 

 

 

 

 

 

norme « 0 valeur »

274,9

– 1,2

0,0

0,0

0,0

273,7

273,7

norme « 0 volume »

361,3

– 1,9

– 0,7

– 1,0

0,0

357,7

357,7

* hors mission R&D, dotation au capital du Mécanisme européen de stabilité, recapitalisation de Dexia

** Le projet de décret d’avance prévoit une ouverture nette de près de 0,6 Md€ de crédits de titre 2

*** Prévision nette des fonds de concours, décrets de transfert et de virement

Par définition, l'exécution de la dotation "Provisions" n'est pas prévisible

**** Il s'agit des taxes affectées plafonnées au sens de l'article 46 de la LFI 2012. Pour mémoire, ces affectations de recettes ne sont pas incluses dans la norme « 0 valeur » de l'État en 2012.

 

Exécution 2011

LFI 2012

LFR I
mars

LFR II
août

PLFR III

Prévision d’exécution

Charge de la dette

46,3

48,8

48,1

47,4

46,4

46,4

Évolution

 

+ 2,5

– 0,7

– 0,7

– 1,0

– 2,4

Après les annulations de crédits d’un montant de 0,7 milliard d’euros dans chacune des deux premières lois de finances rectificatives pour 2012, le présent projet de loi propose d’annuler 1,014 milliard d’euros de crédits sur le programme Charge de la dette. Ainsi, par rapport à la loi de finances rectificative du 16 août 2012, la charge de la dette en 2012 s’établirait à 46,359 milliards d’euros compte tenu :

– d’une économie de 800 millions d’euros sur la charge d’intérêts des bons du trésor à taux fixe et intérêts précomptés – BTF (montant ramené à 237 millions d’euros) ;

– d’une économie de 200 millions d’euros sur la charge nette d’intérêts des bons du trésor à intérêt annuel – BTAN – et des obligations assimilables du Trésor – OAT (montant ramené à 41 371 millions d’euros) ;

– d’une économie de 14 millions d’euros sur la charge d’indexation du capital des titres indexés sur l’inflation (montant ramené à 3 638 millions d’euros).

Cette révision est inférieure de 0,3 milliard d’euros à celle qui avait été annoncée à l’occasion de la présentation en septembre dernier du projet de loi de finances pour 2013 (46,7 milliards d’euros).

Il s’ensuit que la charge de la dette en 2012 s’établirait à un montant quasiment équivalent à celui constaté fin 2011 alors même que l’encours de la dette de l’État a fortement progressé, passant de 1 335 milliards d’euros fin 2011 à 1 387 milliards d’euros fin 2012 (+ 3,9 %).

Sur le champ, largement prépondérant, de la dette négociable (OAT, BTAN et BTF), la quasi-stabilité de la charge de la dette de l’État attendue entre 2011 et 2012 résulterait de la compensation de l’effet « volume » défavorable lié à l’augmentation de l’encours de dette à moyen et long terme (+ 3,4 milliards d’euros), par :

– un effet « taux » très favorable (– 2,1 milliards d’euros) : les taux courts sont devenus légèrement négatifs au deuxième semestre 2012 et les taux de moyen et long termes sont très inférieurs aux taux initialement anticipés (2,7 % contre 3,7 % pour les OAT à 10 ans). Ceci s’explique principalement par l’abondance de liquidités résultant de la décision de la Banque centrale européenne du 5 juillet 2012 d’abaisser les taux de sa facilité de dépôt de 25 points de base à zéro (8);

– un effet « inflation » : la hausse des prix en 2012 a été certes plus importante que prévu, mais est demeurée moindre que celle enregistrée en 2011 (- 1 milliard d’euros) ;

– et un effet « calendaire » : le coût net des émissions à moyen et long termes de l’année, qui dépend essentiellement d’effets calendaires, s’inscrit en retrait en 2012 par rapport à 2011 (– 0,3 milliard d’euros).

Enfin, les autres ressources de trésorerie sont révisées à la hausse dans le présent projet de loi compte tenu d’une augmentation de 3,5 milliards d’euros des dépôts des correspondants du Trésor depuis la dernière loi de finances rectificative.

Le Rapporteur général ne peut que se féliciter de cette évolution à la baisse de la charge de la dette en 2012, qui contribue significativement à la réduction de l’ensemble des dépenses de l’État sous le périmètre « zéro volume », la totalité des économies ainsi réalisées ayant été affectées à la réduction du déficit public.

Toutefois, il convient de rester prudent au regard de la volatilité des marchés en rappelant qu’après Standard & Poor's en janvier 2012, l'agence américaine Moody’s, a retiré son triple A à la France, le 20 novembre dernier, compte tenu des incertitudes sur le regain de compétitivité de notre pays et des risques accrus sur la zone euro pour le pays.

En phase d’incertitudes, les investisseurs pourraient donc se reporter sur d’autres titres – en particulier sur les titres allemands, accroissant ainsi encore l’écart de taux entre nos deux pays  – ou réclamer un meilleur rendement du risque, accroissant dès lors la charge de la dette à venir.

Or, le Rapporteur général rappelle qu’une hausse des taux globale et pérenne de 1 %, répercutée sur l’ensemble de la courbe des taux, entraînerait une augmentation des intérêts de la dette d’environ 2 milliards d’euros dès la première année, de 4 milliards d’euros l’année suivante, de 6 milliards d’euros la troisième année, jusqu’à environ 14 milliards d’euros à un horizon de dix ans. Dans une telle situation, la charge de la dette deviendrait rapidement – probablement dès 2015 – le premier poste budgétaire de l’État.

Pour éviter cette situation, il est donc primordial que la France respecte son engagement de réduction du déficit public et mette en œuvre des réformes structurelles nécessaires au renforcement de sa compétitivité et au développement de l’emploi.

Le plafond de dépenses sous le périmètre de la norme « zéro valeur » en loi de finances initiale pour 2012 s’établit à 274,9 milliards d'euros. Les mouvements de crédits intervenus suite à la première loi de finances rectificative pour 2012 ont réduit ce plafond d’un montant de 1,2 milliard d’euros, celui-ci s’établissant alors à 273,7 milliards d’euros. Les redéploiements de crédits intervenus dans le cadre de la deuxième loi de finances rectificative pour renforcer les moyens en faveur de l’enseignement scolaire ont respecté ce nouveau plafond, le Gouvernement ayant par ailleurs décidé un « surgel » de crédits de 1,5 milliard d’euros pour faire face aux dérapages identifiés par la Cour des comptes.

Les ouvertures nettes de crédits prévues par le présent projet de loi de finances rectificative ainsi que par le décret d’avance notifié à la commission des Finances de l’Assemblée nationale le 20 novembre dernier, d’un montant total de 3,2 milliards d’euros en AE et de 2,1 milliards d’euros en CP sur le périmètre « zéro valeur » (hors charge de la dette, Remboursements et dégrèvements et recapitalisation de Dexia) sont entièrement gagées par des annulations de crédits équivalentes, dont 85 % portent des crédits mis en réserve (1,753 milliard d’euros en CP).

Pour le seul présent projet de loi de finances rectificative, les ouvertures nettes de crédits sur le périmètre « zéro valeur » s’élèvent à 1,7 milliard d’euros en AE et 789,8 millions d’euros en CP tandis que les annulations nettes s’élèvent, sur le même périmètre, à – 1,68 milliard d’euros en AE et – 860,2 millions d’euros en CP.

Le solde des ouvertures/annulations de crédits en CP (70,4 millions d’euros) permet de couvrir l’augmentation des prélèvements sur recettes (PSR) entrant dans le périmètre de la norme « zéro valeur » : majoration de 173 millions d’euros du PSR en faveur de l’Union européenne, résultant des besoins de paiement au titre des programmes pluriannuels de l’Union (cohésion, recherche…), partiellement compensée par la sous-exécution des PSR en faveur des collectivités territoriales entrant dans le champ de la norme (– 102 millions d’euros, dont - 126 millions d’euros au titre du fonds de compensation de la TVA et + 24 millions d’euros sur les autres dotations du périmètre).

Fin 2012, la réduction des dépenses de l’État sous le périmètre « zéro valeur » s’élèverait donc à – 1,2 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale, soit un effort six fois plus important que celui réalisé en 2011 (- 259 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2011).

Le présent projet de loi de finances rectificative procède par ailleurs à une majoration de 149,4 millions d’euros des prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales relatifs à la compensation de la réforme de la fiscalité directe locale(9), qui n’entrent pas dans le champ des normes « zéro volume » et « zéro valeur » et dont les effets sur le niveau des recettes 2012 et le déficit budgétaire sont analysés dans le III du présent rapport.

Il s’agit principalement d’une régularisation sur le calcul de la compensation relais qui a pour corollaire un dépassement sur la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP), ainsi que, dans une moindre mesure, d’une régularisation de la dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de taxe professionnelle 2011 et 2012.

L’article 5 et l’état B du présent projet de loi de finances rectificative tendent à ouvrir des crédits supplémentaires à hauteur de :

 10,3 milliards d’euros de crédits bruts en AE et 9,4 milliards d’euros en CP (10), soit des montants très supérieurs à ceux ouverts en collectif de fin d’année 2011 (respectivement 2,2 et 1,2 milliards d’euros) et 2010 (respectivement 3,1 et 4,5 milliards d’euros). Comme le montrent les tableaux ci-dessous, ces ouvertures de crédits, qui représentent 2,7 % des AE et 2,5 % des CP initiaux, sont néanmoins relativement concentrées puisqu’elles portent sur 14 missions sur 32 et 20 programmes sur 125 en AE et sur 13 missions sur 32 et 19 programmes sur 125 en CP.

– 4,3 milliards d’euros d’AE et 3,4 milliards d’euros de CP nets des remboursements et dégrèvements (soit 1,4 % des AE et 1,2 % des CP nets initiaux), à comparer avec l’ouverture de 1,8 milliard d’euros d’AE et 0,85 milliard d’euros de CP nets en loi de finances rectificative de fin d’année en 2011, et l’ouverture de 3,9 milliards d’euros en AE et 3,3 milliards d’euros en CP en loi de finances rectificative de fin d’année 2010.

Il convient néanmoins de constater que l’ouverture de 2,58 milliards d’euros d’AE et de CP sur la mission Engagements financiers de l’État au titre du nouveau programme budgétaire Recapitalisation de la banque Dexia constitue une dépense exceptionnelle, résultant de la décision conjointe de la France et de la Belgique du 8 novembre 2012. Ces ouvertures de crédits sont portées en recettes du compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État. Cette mesure est commentée sous l’article 29 du présent projet qui propose en outre d’étendre la garantie de l’État en faveur de Dexia.

Comme le montrent les tableaux ci-après, hors recapitalisation Dexia, le montant des ouvertures de crédits nettes proposé par le présent projet s’élève à 1,7 milliard d’euros en AE et à 789 millions d’euros en CP, soit un montant équivalent à l’ouverture de crédits en loi de finances rectificative de fin d’année 2011. Elles représentent 0,6 % des AE et 0,3 % des CP initiaux.

Sans examiner dans le détail chacune de ces ouvertures de crédits, le Rapporteur général souhaite rendre compte des plus significatives, par ordre d’importance décroissante, dans les développements qui suivent et les tableaux récapitulatifs ci-après.

OUVERTURES D’AUTORISATIONS D’ENGAGEMENT PAR MISSION ET PROGRAMME
DU BUDGET GÉNÉRAL

(en millions d’euros)

Missions et Programmes

LFI AE

Ouvertures

% AE initiales

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales

3 739 371 742

76 662

0,0 %

 

Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires

2 139 668 606

1 500

0,0 %

 

Forêt

349 687 967

2 000

0,0 %

 

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

758 290 338

73 162

0,0 %

Direction de l’action du Gouvernement

1 094 158 177

368 394 209

33,7 %

 

Coordination du travail gouvernemental

607 583 256

368 394 209

60,6 %

Écologie, développement et aménagement durables

9 649 346 775

542 000 000

5,6 %

 

Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables

3 530 574 681

542 000 000

15,4 %

Engagements financiers de l’État

49 921 176 591

2 585 000 000

5,2 %

 

Recapitalisation Dexia (nouveau)

 

2 585 000 000

 

Immigration, asile et intégration

631 891 444

89 066 557

14,1 %

 

Immigration et asile

553 453 404

89 066 557

16,1 %

Médias, livre et industries culturelles

1 248 263 591

8 550 000

0,7%

 

Action audiovisuelle extérieure

150 087 308

8 550 000

5,7 %

Outre-mer

2 118 665 911

5 000 000

0,2 %

 

Emploi outre-mer

1 312 871 975

5 000 000

0,4 %

Recherche et enseignement supérieur

25 757 630 834

18 000 000

0,1 %

 

Vie étudiante

2 171 203 845

18 000 000

0,8 %

Régimes sociaux et de retraite

6 618 706 092

19 453 133

0,3 %

 

Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers

1 682 050 000

19 453 133

1,2 %

Relations avec les collectivités territoriales

2 719 642 433

25 761 139

0,9 %

 

Concours financiers aux départements

492 859 347

667 550

0,1 %

 

Concours financiers aux régions

905 446 505

36 895

0,0 %

 

Concours spécifiques et administration

506 055 512

25 056 694

5,0 %

Remboursements et dégrèvements (crédits évaluatifs)

85 437 930 000

6 033 377 000

7,1 %

 

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État

75 153 430 000

4 926 877 000

6,6%

 

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux

10 284 500 000

1 106 500 000

10,8%

Solidarité, insertion et égalité des chances

12 726 673 939

287 386 256

2,3 %

 

Handicap et dépendance

10 531 453 198

287 386 256

2,7 %

Sport, jeunesse et vie associative

482 254 351

1 000

 
 

Jeunesse et vie associative

229 970 979

1 000

 

Ville et logement

7 720 038 082

316 142 324

4,1 %

 

Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables

1 206 253 547

56 700 000

4,7 %

 

Aide à l’accès au logement

5 490 207 727

259 442 324

4,7 %

Total budget

380 746 233 581

10 298 208 280

2,7%

Total budget hors Remboursement et dégrèvements

295 308 303 581

4 264 831 280

1,4 %

Total budget hors R et D et hors recapitalisation Dexia

295 308 303 581

1 679 831 280

0,6 %

OUVERTURES DE CRÉDITS DE PAIEMENT PAR MISSION ET PROGRAMME
DU BUDGET GÉNÉRAL

(en millions d’euros)

Missions et Programmes

LFI CP

Ouvertures

% CP initiaux

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales

3 771 305 865

76 662

0,0 %

 

Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires

358 447 263

1 500

0,0 %

 

Forêt

2 170 408 692

2 000

0,0 %

 

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

750 547 079

73 162

0,0 %

Engagements financiers de l’État

49 921 176 591

2 585 000 000

5,2 %

 

Recapitalisation Dexia (nouveau)

 

2 585 000 000

 

Enseignement scolaire

62 211 682 924

6 479

 

 

Enseignement technique agricole

3 952 435 153

6 479

 

Immigration, asile et intégration

631 791 444

83 128 587

13,2 %

 

Immigration et asile

560 153 404

83 128 587

14,8 %

Médias, livre et industries culturelles

1 268 379 591

8 550 000

0,7%

 

Action audiovisuelle extérieure

274 997 850

8 550 000

3,1 %

Outre-mer

1 966 444 165

5 000 000

0,3 %

 

Emploi outre-mer

628 352 190

5 000 000

0,8 %

Recherche et enseignement supérieur

25 408 785 172

18 000 000

0,1 %

 

Vie étudiante

12 511 247 419

18 000 000

0,1 %

Régimes sociaux et de retraite

6 618 706 092

19 453 133

0,3 %

 

Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers

4 080 200 000

19 453 133

0,5 %

Relations avec les collectivités territoriales

2 677 931 621

25 761 139

1,0 %

 

Concours financiers aux départements

492 859 347

667 550

0,1 %

 

Concours financiers aux régions

905 446 505

36 895

0,0 %

 

Concours spécifiques et administration

499 055 512

25 056 694

5,0 %

Remboursements et dégrèvements (crédits évaluatifs)

85 437 930 000

6 033 377 000

7,1 %

 

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État

75 153 430 000

4 926 877 000

6,6%

 

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux

10 284 500 000

1 106 500 000

10,8%

Solidarité, insertion et égalité des chances

12 693 447 484

313 679 733

2,5 %

 

Handicap et dépendance

20 264 381

313 679 733

1 547,9 %

Sport, jeunesse et vie associative

485 409 688

1 000

 
 

Jeunesse et vie associative

255 438 709

1 000

 

Ville et logement

7 596 293 692

316 142 324

4,2 %

 

Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables

5 490 207 727

56 700 000

1,0 %

 

Aide à l’accès au logement

359 849 586

259 442 324

72,1 %

Total budget

376 151 517 343

9 408 176 057

2,5%

Total budget hors Remboursement et dégrèvements (R&D)

290 713 587 343

3 374 799 057

1,2 %

Total budget hors R et D et hors recapitalisation Dexia

290 713 587 343

789 799 057

0,3 %

Comme l’avait anticipé la Cour des comptes, les ouvertures de crédits correspondent pour l’essentiel à une insuffisante budgétisation initiale de dépenses d’intervention, dont la dynamique était pourtant connue du précédent Gouvernement au regard de la récurrence des mouvements de crédits déjà opérés sur ces dépenses en loi de finances de fin d’année depuis 2008.

Pour autant, alors que la Cour avait évalué le risque de « dérapage » dans une fourchette comprise entre 1,18 et 2,02 milliards d’euros, la situation s’avère plus sévère encore puisque la somme des ouvertures de crédits dans le présent projet de loi et celles proposées dans le décret d’avance notifié à la commission des Finances de l’Assemblée nationale le 20 novembre dernier s’élève à 2,2 milliards d’euros.

Les dépassements supplémentaires par rapport aux estimations de la Cour portent principalement, en CP, sur les bourses universitaires (+ 30 millions d’euros), les aides au logement (+ 70 millions d’euros), le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne (+ 70 millions d’euros), la masse salariale de l’éducation nationale (+ 80 millions d’euros) et les dispositifs de la mission Travail et emploi (+ 100 millions d’euros), les ouvertures nécessaires sur la mission Défense s’avérant légèrement inférieures (- 100 millions d’euros).

À ces dépassements, il convient d’ajouter le financement de mesures nouvelles décidées par le Gouvernement comme le maintien d’un niveau important de contrats aidés compte tenu de la situation dégradée du marché du travail (dans le décret d’avance) ou le renforcement des moyens consacrés à l’hébergement d’urgence (dans le présent projet de loi).

 + 259 millions d’euros en faveur des aides personnelles au logement

En 2012, les allocations logement sont revalorisées en fonction de l’indice de référence des loyers qui lui-même correspond à la moyenne, sur les douze derniers mois, de l’indice des prix à la consommation hors tabac et hors loyers. Sont concernées par cette revalorisation :

– l’allocation de logement sociale (ALS) visée à l’article L. 831-4 du code de la sécurité sociale, à destination des personnes âgées, des infirmes, des jeunes salariés et de certaines catégories de demandeurs d’emplois. L’ALS est financée par le fonds national d’aide au logement (FNAL), alimenté à cette fin par une cotisation des employeurs et par une subvention de l’État sur le programme Aide à l’accès au logement ;

– l’aide personnalisée au logement (APL) visée à l’article L. 351-3 du code de la construction et de l’habitation. Le champ d’application de l’APL comprend, d’une part, l’aide à l’accession à la propriété de logements financés avec des prêts aidés ou réglementés par l’État, d’autre part, l’aide en faveur des locataires. Anciennement assuré par le fonds national de l’habitat (FNH), le financement de l’APL est depuis le 1er janvier 2006 assuré par le FNAL, alimenté à cette fin par une contribution du fonds national des prestations familiales (FNPF) et par une contribution de l’État inscrite sur le programme Aide à l’accès au logement ;

– l’allocation de logement familial (ALF) visée à l’article L. 542-5 du code de la sécurité sociale est intégralement financée par le FNPF, lui-même alimenté par les cotisations allocations familiales des employeurs et par 1,1 point de CSG (hors budget de l’État).

Les trois aides (ALS, APL et ALS) sont versées sous condition de ressources aux personnes qui s’acquittent d’un minimum de loyer ou de mensualité, sous réserve que le logement constitue bien leur résidence principale, c’est-à-dire qu’il soit occupé pendant au moins huit mois dans l’année par elles-mêmes, leur conjoint ou des personnes à charge. Comme le montre le tableau ci-après, depuis 2006 et plus encore depuis le début de la crise économique et financière, le nombre d’allocataires ne cesse de progresser.

NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES DES AIDES AU LOGEMENT AU 31 DÉCEMBRE

(en milliers d’euros)

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

APL

2 797

2 751

2 708

2 637

2 586

2 567

2 482

2 496

2 620

2 619

2 622

2 681

ALF

1 248

1 247

1 240

1 225

1 235

1 255

1 244

1 263

1 350

1 356

1 335

1 332

ALS

2 234

2 200

2 221

2 221

2 234

2 252

2 199

2 216

2 344

2 364

2 353

2 388

Total

6 278

6 198

6 168

6 083

6 055

6 074

5 925

5 975

6 315

6 338

6 310

6 401

Pour 2012, la contribution de l’État au FNAL prévue en loi de finances initiale s’élève à 5,558 milliards d’euros. Les crédits ouverts dans le présent collectif s’établissent à 259,4 millions d’euros en AE et CP (contre 272 millions d’euros en LFR de fin d’année 2011).

Cette majoration de 4,7 % des crédits s’explique par deux phénomènes :

– une hausse continue du nombre d’allocataires (+ 1,9 % entre juin 2011 et juin 2012) combinée à une hausse du coût unitaire de l’aide liée à l’augmentation du nombre de chômeurs, supérieure aux prévisions initiales. Or, l’augmentation du chômage se traduit par une majoration des aides en raison de la diminution des ressources des bénéficiaires qu’elle entraîne pour le calcul des aides au logement ;

– une révision par l’ACOSS à la baisse des prévisions de recettes des cotisations employeurs (– 29 millions d’euros par rapport aux prévisions initiales).

 + 41,7 millions d’euros pour couvrir les dépenses d’hébergement d’urgence

Le présent projet propose tout d’abord d’ouvrir 41,7 millions d’euros en AE et CP sur le programme Prévention et lutte contre l’exclusion, au titre des dispositifs d’hébergement d’urgence et de veille sociale (contre 75 millions d’euros fin 2011), dont 37,5 millions d’euros en faveur du seul dispositif d’hébergement d’urgence, ce qui représente une majoration de 15 % des crédits initiaux (244 millions d’euros).

Le dérapage de ces dépenses s’explique, comme chaque année, par une sous-évaluation du nombre des demandes d’hébergement alors que les capacités d’accueil des centres d’hébergement ne sont pas suffisantes, ce qui nécessite l’ouverture de nouvelles places et le financement de nuitées hôtelières supplémentaires par rapport aux prévisions de la budgétisation. En outre, la prolongation de plusieurs milliers de places hivernales jusqu’en juillet 2012 a contribué à la progression de la dépense.

Le nouveau Gouvernement a donc souhaité améliorer la budgétisation initiale de ces dépenses en proposant, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013, 275 millions d’euros pour l’hébergement d’urgence, soit des crédits en progression de 31 millions d’euros par rapport aux crédits votés pour 2012. Le Rapporteur général relève néanmoins que cette démarche responsable pourrait s’avérer insuffisante pour couvrir les besoins d’ores et déjà constatés et le financement de 5 000 places d’hébergement d’urgence supplémentaires.

 + 7,5 millions d’euros au titre de l’allocation de reconnaissance en faveur des Français rapatriés

Malgré l’arrêt du Conseil d’État du 6 avril 2007 supprimant la subordination de cette aide au fait d’être de nationalité française (11), le précédent Gouvernement n’a jamais pris la responsabilité de réévaluer à la hausse le montant des dépenses à verser au titre de l’allocation de reconnaissance en faveur des Français rapatriés. Par conséquent, il est devenu traditionnel d’ouvrir entre 4 et 7,5 millions d’euros de crédits supplémentaires en loi de finances rectificative en fin d’année pour couvrir les dépenses effectivement constatées en fonction du rythme d’entrée des dossiers nouveaux.

Souhaitant rompre avec cette pratique, le Gouvernement a proposé dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013 de majorer les crédits initiaux destinés à l’action 15 Rapatriés du programme 177 de 4,3 millions d’euros.

 Une progression de 60 % des crédits finançant l’aide au logement temporaire destinée à l’accueil des gens du voyage (+ 7,5 millions d’euros)

Le programme 177 supporte également le cofinancement, à parité avec la CNAF, du fonctionnement des aires d’accueil des gens du voyage via l’aide au logement temporaire, dite « ALT2 ». D’un montant de 12,4 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2012, ces crédits sont versés aux organismes gestionnaires de ces aires d’accueil (communes, établissements publics de coopération intercommunale ou personnes morales gérant une ou plusieurs aires permanentes d’accueil), le montant forfaitaire étant fixé à un total de 132,45 euros par mois et par emplacement.

Sans qu’aucune explication ne soit mentionnée dans le présent projet de loi de finances, il est proposé d’ouvrir 7,5 millions d’euros supplémentaires à ce titre. Selon les informations recueillies par votre Rapporteur général, la prévision initiale reposait sur une perspective d’économie sur le dispositif ALT2, résultant d’une tarification sur la base des places effectivement occupées et non pas disponibles. La mise en œuvre effective de cette réforme s’est néanmoins heurtée à un manque de préparation et de concertation sur le terrain, si bien qu’elle n’a pas été mise en œuvre, ce qui expliquerait le dérapage constaté.

Le montant des ouvertures de crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, s’élève à 287,4 millions d’euros en AE et 313 millions d’euros en CP.

● Elle concerne principalement le financement de l’augmentation des dépenses de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) qui atteint cette année 291,7 millions d’euros (contre 212 millions d’euros en 2011). Cette croissance s’explique essentiellement par une sous-estimation initiale de la progression des bénéficiaires qui impose une révision à la hausse du nombre total de bénéficiaires (+ 55 400 par rapport à la prévision), et plus particulièrement des titulaires de cette prestation présentant un taux d’incapacité compris entre 50 et 80 % et une difficulté substantielle et durable d’accès à l’emploi.

À la fin de l’année 2012, le nombre total de bénéficiaires devrait atteindre 1 000 200 et la proportion de personnes âgées de 50 ans ou plus, qui représentaient 28,5 % des allocataires en 2000, avoisinerait les 40 % fin 2012. Le coût total de l’AAH pour l’État s’élèverait à 7,8 milliards d’euros en 2012.

Le Rapporteur général rappelle que les travaux conduits par la Cour des comptes à la demande de l’Assemblée nationale (12) montrent que cette dépense est fortement influencée par les plus ou moins grandes facilités à accéder à d’autres revenus de remplacement : le RSA, les préretraites et l’assurance chômage, l’invalidité, l’allocation de cessation d’activité des travailleurs de l’amiante, l’allocation de solidarité spécifique, pour ne citer que les principaux dispositifs de solidarité. Par conséquent, avec l’accentuation de la crise économique, il était prévisible de voir cette dépense encore progresser en 2012, à défaut d’une réforme d’envergure.

● En parallèle, le présent projet propose d’ouvrir sur cette mission 25 millions d’euros en CP au titre du remboursement de dépenses en faveur des services d’aides à domicile et 3 millions d’euros en CP également afin de couvrir les restes à payer d’opérations d’investissements.

L’allocation temporaire d’attente (ATA) est versée aux demandeurs d’asile pendant toute la durée d’instruction de leur demande dès lors qu’ils n’ont pas accès aux centres d’accueil de demandeurs d’asile (CADA), qu’ils viennent de pays d’origine sûrs, qu’ils soient déboutés en procédure de recours devant la Cour nationale du droit d’asile, ou qu’aucune place en CADA ne soit disponible alors qu’ils ont accepté l’offre de prise en charge qui leur a été présentée lors de leur admission au séjour.

La loi de finances initiale pour 2012 a ouvert 89,65 millions d’euros en AE et CP pour financer l’ATA au sein de la mission Immigration, asile et intégration contre 54 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2011 (+ 35,65 millions d’euros). Ce « rebasage » était toutefois nettement insuffisant au regard de l’exécution 2011 dans la mesure où il avait été nécessaire d’ouvrir 147 millions d’euros supplémentaires en cours d’année.

Sans surprise, le présent projet propose de doubler les crédits en faveur de cette allocation, en ouvrant 89 millions d’euros en AE et 83 millions d’euros en CP pour faire face à :

– la poursuite de la hausse du flux des demandeurs d’asile (+ 3,9 % sur les dix premiers mois de l’année) ;

– l’allongement des délais d’instruction des demandes d’asile par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et par la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) – d’environ 15 mois – malgré le renforcement de leurs moyens en 2011 et 2012 (+ 80 emplois).

Compte tenu de la dynamique des dépenses liées à la prise en charge des demandeurs d'asile, le projet de loi de finances pour 2013 entend mettre fin aux sous-budgétisations chroniques constatées sous la précédente législature, en relevant les crédits initiaux destinés à l'allocation temporaire d'attente des demandeurs d'asile, pour les porter à 140 millions d’euros. Il prévoit notamment la création de 1 000 places supplémentaires en centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA) et la création de 10 nouveaux emplois d'officiers de protection chargés de l'instruction des demandes à l'OFPRA afin de poursuivre les efforts de réduction des délais de traitement des demandes d'asile.

Le Rapporteur général ne peut que saluer cet effort important à la hausse des crédits initiaux mais craint néanmoins l’apparition d’un besoin supplémentaire en 2013 compte tenu du niveau des dépenses passées (170 millions d’euros en 2012 et 210 millions d’euros en 2011).

Le présent projet de loi de finances rectificative propose d’ouvrir 19,4 millions d’euros sur la mission Régimes sociaux de retraite afin d’abonder le CAS Pensions à partir de l’action n° 9 Contributions exceptionnelles au compte d’affectation spéciale "Pensions" du programme Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers.

Comme l’a souligné la Cour des comptes, ce CAS est confronté à une érosion de l’assiette des ressources, imputable en particulier aux effets de la politique de rémunération qui, sous la précédente législature, privilégiait les mesures indemnitaires non soumises à retenue pour pension, au détriment de mesures plus générales affectant le traitement indiciaire.

Les ministères constatant des besoins de crédits de masse salariale hors contributions aux pensions et, dans le même temps, des disponibilités supérieures sur les crédits destinés aux pensions ont mobilisé ces disponibilités en cours d’année par fongibilité au sein des crédits de titre 2 comme le montre le tableau ci-après.

Ministère

Fongibilité asymétrique au 15/11/2012 (en euros)

Économie et finances

4 163 728

Éducation nationale

10 192 211

Agriculture, agroalimentaire et forêt

25 627 371

Intérieur

18 000 000

Écologie, développement durable et énergie

7 000 000

Enseignement supérieur et recherche

260 000 000

Il est désormais impératif, pour assurer le versement intégral des montants prévus en loi de finances initiale au CAS Pensions et garantir la neutralité de ces mouvements de crédits sur le champ de la norme « zéro valeur » (qui s’oppose en pratique à la fongibilité des crédits au sein du titre 2), d’ouvrir des crédits sur le titre 2 de la mission Régimes sociaux et de retraites afin d’abonder le CAS Pensions. L’abondement proposé, d’un montant de 19,4 millions d’euros, est néanmoins bien inférieur au besoin constaté en loi de finances rectificative de fin d’année 2011 (+ 70 millions d’euros).

En avril 2008, le précédent Gouvernement avait décidé la création d’une société holding, Audiovisuel Extérieur de la France (AEF). La société AEF détient aujourd’hui 100 % du capital de Radio France international (RFI) et de France 24 ainsi que 49 % du capital de TV5 Monde, celle-ci étant une entreprise multipartite, partenaire et non filiale de la holding AEF. Par ailleurs les crédits alloués à TV5 Monde, Radio France Internationale (RFI) et France 24 font désormais l’objet d’une enveloppe globale, la répartition des dotations incombant à la holding.

Or, le nouveau Gouvernement a confié à M. Jean-Paul Cluzel le 5 juin dernier, une « mission d’évaluation sur l’Audiovisuel extérieur de la France » pour évaluer la pertinence des décisions prises par le précédent Gouvernement et proposer le cas échéant les différentes options alternatives au plan juridique, financier et technique. Les décisions visées par les ministres concernent essentiellement la fusion juridique, effective depuis le 13 février 2012, entre les sociétés France 24, RFI et Monte Carlo Doualiya2 (MCD) avec « Audiovisuel extérieur de la France » (AEF), et celle, non encore mise en place, des rédactions des trois anciennes entités.

Ces décisions ont suscité l’émotion d’une partie significative des personnels de RFI et de Monte Carlo Doualiya comme de France 24. Cette situation a rendu de facto impossible le déménagement des personnels de RFI et de MCD dans un nouvel immeuble conçu pour les accueillir avec leurs collègues des autres entités d’AEF à Issy-les-Moulineaux.

Le Gouvernement a donc demandé au président d’AEF un moratoire d’un mois sur la fusion des rédactions afin d’attendre les conclusions du rapport demandé. Celui-ci a été remis au Gouvernement le 6 juillet 2012 (13). Celui-ci préconise plutôt une « AEF réformée, fondée sur la séparation des relations de France 24 et de RFI, la reconstitution de deux directions d'antenne distinctes et la réaffirmation de l'identité et de la spécificité de France 24 et RFI ». En conséquence, le conseil d'administration de l'AEF a sollicité la remise d'un nouveau projet d'organisation, prévoyant des rédactions distinctes pour RFI et France 24. Le futur projet devra être préalablement soumis aux instances représentatives du personnel.

En ce qui concerne TV 5 Monde, le rapport estime que l'arrivée d'AEF à son capital s'est révélée négative à plusieurs égards. Le Gouvernement a donc exprimé le souhait que TV 5 Monde se rapproche à nouveau de France Télévisions, dans des conditions qui ne pourront être précisées qu'à l'issue d'une concertation entre les partenaires francophones de la chaîne.

Le présent projet de loi de finances rectificative en tire les conséquences en proposant une ouverture de crédits de 8,55 millions d’euros destinée à financer :

– le second plan de départs lié à la réorganisation du groupe consécutive à la fusion de RFI et France 24 au sein du groupe AEF qui ne peut être remis en question (6,3 millions d’euros) ;

– le déménagement de RFI et Monté Carlo Doualiya (MCD) à proximité de France 24 qui demeure utile (0,74 million d’euros) ;

– l’ajustement de la dotation à la société « Audiovisuel extérieur de la France » pour tenir compte du moratoire décidé par le Gouvernement et préparer le nouveau projet d’organisation de la société (0,15 million d’euros).

Le présent projet de loi de finances rectificative envisage le financement de deux importantes opérations immobilières, donnant lieu à des ouvertures de crédits en autorisations d’engagement seulement, à savoir :

– 370 millions d’euros destinés à permettre la signature d’un protocole locatif avec la Société de valorisation foncière et immobilière (SOVAFIM) qui se chargera de la restructuration de l’ensemble immobilier « Ségur-Fontenoy », sis avenue de Ségur à Paris (75007). Ce site serait ainsi destiné à accueillir, à partir de 2016, la majeure partie des services du Premier Ministre (SPM) ainsi que plusieurs autorités administratives indépendantes œuvrant dans le secteur de la protection des droits et libertés.

Selon l’avis favorable du Conseil de l’immobilier de l’État du 28 février 2012, cette opération immobilière permettrait de regrouper 22 structures actuellement réparties sur 22 sites différents, dont les services administratifs des SPM, deux cabinets ministériels, le Contrôleur Budgétaire et Comptable Ministériel (CBCM) des SPM et plusieurs AAI actuellement hébergées dans le parc privé à des conditions d’occupation (en moyenne 17,2 m² SUN (14)/agent) et des coûts de location (jusqu’à 707 euros/m²) supérieurs aux normes de la politique immobilière de l’État (12 m² SUN/agent et 400 euros/m²/an) ;

– 542 millions d’euros destinés à permettre la prise à bail d’un nouvel immeuble sur le site de La Défense, sous forme de location avec option d’achat, dans le cadre de la mise en œuvre du projet immobilier de regroupement des services de l’administration centrale des ministères de l’égalité des territoires et du logement, du développement durable et de l’énergie. Conformément aux modalités de consommation des AE dans le cas d’un bail locatif de durée déterminée, il s’agit de la somme des loyers et des charges annexes au bail en euros courants sur la durée ferme du bail (soit treize ans et demi). Le flux de CP correspondant en euros courants sera étalé sur 13,5 ans.

Le coût de l’opération immobilière de regroupement des services centraux des ministères de l’égalité des territoires et de l’écologie est à mettre en regard du coût généré par le maintien des occupations actuelles. Cette comparaison fait apparaître que la réalisation de ce projet de regroupement permettrait de dégager des économies d’au moins 10 millions d’euros par an dès 2015 par rapport au coût locatif de l’année 2012 et d’environ 20 millions d’euros à horizon 2017 par rapport à l’évolution tendancielle des coûts en cas de poursuite dans les implantations actuelles.

Outre l’annulation de 1,014 milliard d’euros en AE et CP sur le programme Charge de la dette et trésorerie de l’État commentée précédemment, le présent projet annule 1,67 milliard d’euros en AE et 860,2 millions d’euros en CP.

Conformément au principe d’auto-assurance, le Gouvernement s’est efforcé de compenser les ouvertures de crédits par des annulations de crédits au sein de la même mission, et de viser en priorité les crédits mis en réserve. Ainsi, le montant global des annulations de crédits au titre du projet de loi de finances rectificative sur la réserve de précaution est estimé à 583 millions d’euros en AE et à 605 millions d’euros en CP, soit 35 % des AE annulées et 75,5 % des CP annulés.

Le Rapporteur général relève notamment :

– une annulation de 237 millions d’euros en AE et 207 millions d’euros en CP sur la mission Écologie, développement et aménagement durables, qui permet de compenser partiellement l’ouverture de 542 millions d’euros en AE en faveur du regroupement immobilier des services du ministère. Les annulations de crédits de paiement portent sur des crédits non consommés ou sur des crédits devenus sans emploi (dont 60 millions d’euros sur la subvention à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France en raison de recettes d’amendes de radars automatiques supérieures à la prévision initiale) ;

– une annulation de 177 millions d’euros en CP sur le programme Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances pour financer l’ouverture de 314 millions d’euros en faveur de l’AAH sur le programme Handicap et dépendance. Cette annulation porte sur les crédits du Fonds national des solidarités actives, dont les besoins s’avèrent, comme les années précédentes, inférieurs à la prévision ;

– une annulation de 41 millions d’euros sur les réserves de précaution des programmes Développement et amélioration de l’offre de logement et Politique de la ville pour financer partiellement les ouvertures de crédits de 316 millions d’euros sur la mission Ville et logement ;

– une annulation de 39 millions d’euros d’AE et de 23 millions d’euros de CP devenus sans emploi sur les programmes de la mission Direction de l’action du Gouvernement, qui permet de compenser partiellement l’ouverture de 370 millions d’euros d’AE en vue du regroupement immobilier des services du Premier ministre, et de financer les ouvertures de crédits sur des programmes d’autres missions du budget général ;

– une annulation de 37 millions d’euros en AE et CP sur le programme Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres, qui permet non seulement de financer l’ouverture de 19 millions d’euros de crédits sur le titre 2 du programme Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers, et de contribuer au financement d’autres ouvertures de crédits sur d’autres missions ;

– une annulation de 11 millions d’euros en AE et CP sur le programme Contribution à l’audiovisuel et à la diversité radiophonique de la mission Médias, livres et industries culturelles, qui permet de compenser totalement l’ouverture de 8,5 millions d’euros en AE et CP au titre de l’AEF et de contribuer partiellement au financement des ouvertures de crédits sur d’autres missions. Cette annulation repose sur des crédits devenus sans emploi (6 millions d’euros) et sur une sous-consommation des crédits du GIP France Télé numérique, d’environ 5 millions d’euros (moindre sollicitation du fonds d’aide, économies sur les dépenses de fonctionnement et moindre coût des campagnes de communication relatives à l’extinction du signal) ;

– une annulation de 5 millions d’euros sur les programmes de la mission Outre-mer sur la « ligne budgétaire unique » compte tenu de la prévision d’exécution et de l’état d’avancement des opérations financées qui permet de gager, à due concurrence, l’ouverture de crédits sur le programme Emploi outre-mer au titre du dérapage de la compensation des exonérations de charges sociales ;

– une annulation de 4 millions d’euros sur le programme Intégration et accès à la nationalité française pour compenser, pour une part limitée, l’ouverture de 83 millions d’euros sur la mission Immigration, asile et intégration.

Le solde des autres annulations de crédits – soit 355 millions d’euros en CP – est porté par des missions pour lesquelles aucune ouverture de crédits n’est proposée dans le présent collectif, dont les principales sont :

– la mission Aide publique au développement, qui subit une annulation de 287 millions d’euros en AE et 273 millions d’euros en CP en raison d’appels de fonds moins importants que prévus adressés au ministère des affaires étrangères par les principales organisations internationales (notamment l’Union européenne au titre du Fonds européen de développement) ;

– la mission Santé, et en particulier le programme Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins qui connaît une annulation de 29 millions d’euros en AE et CP devenus sans emplois (24 millions d’euros) et d’une révision à la baisse de la subvention pour charge de service public de certains opérateurs disposant d’un fonds de roulement significatif (4,5 millions d’euros) ;

– la mission Sécurité civile compte tenu d’une annulation de 16 millions d’euros en AE et CP de crédits mis en réserve du programme Coordination des moyens de secours ;

– enfin, la mission Justice contribue à gager les ouvertures d’AE pour le financement des projets immobiliers de l’État compte tenu d’une annulation de 476 millions d’euros d’AE du fait de l’abandon de contrats de partenariats public-privé pour la construction de nouvelles prisons.

La régulation budgétaire, fondée sur la mise en réserve de crédits en début de gestion, en application du 4° bis de l’article 51 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, a connu en 2012 une évolution particulière par rapport aux années précédentes.

Il faut rappeler que le précédent Gouvernement avait augmenté le taux de mise en réserve pour 2012 en procédant, en début d’année, à la mise en réserve, sur chaque programme, de 0,5 % des crédits de paiement et autorisations d’engagement ouverts sur le titre des dépenses de personnel et de 6 % sur les autres titres, au lieu de 5 % en 2011. Cette mesure avait eu pour effet de majorer la réserve de précaution de 1 milliard d’euros par rapport à 2011.

Néanmoins, cette marge de manœuvre, destinée à faire face à des aléas nouveaux en gestion, a été immédiatement consommée par le précédent Gouvernement à l’occasion de la loi de finances rectificative du 14 mars 2012, qui a procédé à une annulation « sèche » de 1,2 milliard d’euros sur la réserve ainsi qu’à un redéploiement de 0,4 milliard d’euros en faveur de la politique de l’emploi.

Compte tenu de l’audit réalisé par la Cour des comptes faisant état d’un risque en exécution sur la dépense de l’État hors charge de la dette et de pensions estimé entre 1,2 milliard d’euros et 2,0 milliards d’euros, dû en partie à des hypothèses optimistes de construction du budget initial, le Gouvernement a décidé, d’une part, de maintenir la réserve initiale jusqu’à la fin de gestion et, d’autre part, d’aller plus loin en l’augmentant de 1,5 milliard d’euros à l’occasion de la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 du 16 août 2012. La répartition par mission et par programme du « surgel » de crédits réalisé par le Gouvernement a été modulée afin de tenir compte des capacités contributives de chacun des programmes. L’on peut rappeler à cet égard que certains programmes sont exonérés, en totalité ou partiellement, pour l’un des motifs suivants : levée de la mise en réserve pouvant être considérée comme inéluctable au sens de la définition de l’exposé général des motifs du projet de loi de finances pour 2012(15) ; risque en exécution 2012 déjà identifié ; programme faisant l’objet d’ouvertures nettes de crédits dans le présent projet de loi de finances rectificative.

En 2012, le montant des mises en réserve de crédits initiaux s’est donc élevé à 8,17 milliards d’euros en AE et à 7,91 milliards d’euros en CP.

En outre, dans le cadre de la reconduction du « Fonds État exemplaire » et du « Fond Handicap » en 2012, chaque ministère a alimenté le montant de la réserve initiale pour atteindre, au total, 125 millions d’euros (ces crédits devaient être dégelés en fonction des performances respectives des ministères en matière environnementale et du taux d’emploi des personnes handicapées).

Le montant des mises en réserve de crédits initiaux apparaît cependant théorique, dans la mesure où il a été diminué dès le début de l’exercice de 995 millions d’euros en AE et 1,2 milliard d’euros en CP pour tenir compte de deux décisions :

– le financement des différentes ouvertures de crédits par amendement au projet de loi de finances pour 2012 en seconde délibération (26 millions d’euros en AE et 253 millions d’euros en CP) ;

– le dégel de 969 millions d’euros de crédits au bénéfice de certaines subventions pour charges de service public qui, bien qu’imputées sur le titre 3, financent in fine des charges de personnels employés par des opérateurs de l’État (16).

Par conséquent, le montant réel de la mise en réserve initiale en 2012 s’élevait à 7,3 milliards d’euros en AE et 6,8 milliards d’euros en CP (contre 6,3 milliards d’euros en AE et 5,8 milliards d’euros en CP en 2011).

Depuis le 16 août 2012, le Gouvernement a limité les dégels aux seules dépenses inéluctables pour un montant de 161 millions d’euros en AE et 280 millions d’euros en CP. Il en résulte que, comme le montre le tableau récapitulatif ci-après, au 15 novembre 2012, la réserve de précaution s’élevait à 6,4 milliards d’euros en AE et à 6,04 milliards d’euros en CP.

Après les annulations prévues par le décret d’avance et le projet de loi de finances rectificative de fin d’année, la réserve disponible pour dégel et consommation des crédits s’élèverait donc à 4,86 milliards d’euros en AE et 4,3 milliards d’euros en CP.

ÉVOLUTION DE LA MISE EN RÉSERVE EN 2012 (AU 15 NOVEMBRE 2012)

(en millions d’euros)

 

Titre 2

Hors titre 2

T2+HT2

AE

CP

AE

CP

Mise en réserve théorique

590

7 583

7 326

8 173

7 916

Surgel FEE (fonds d’État exemplaire) et handicap

0

125

125

125

125

Autres ajustements

0

– 26

– 253

– 26

– 253

Dégels au titre de la masse salariale opérateurs

0

– 969

– 969

– 969

– 969

Mise en réserve initiale

590

6 713

6 229

7 303

6 819

Mouvements intervenus sur la mise en réserve

– 93

254

373

161

280

Annulations LFR I

0

– 1 064

– 1 055

– 1 064

– 1 055

Annulations LFR II

0

– 3

– 3

– 3

– 3

Mise en réserve au 15/11/2012

497

5 900

5 544

6 397

6 041

Annulations prévues en DA

– 10

– 939

– 1 120

– 949

– 1 130

Mise en réserve prévue après DA

487

4 961

4 424

5 448

4 911

Annulations prévues en LFR III

0

– 583

– 605

– 583

– 605

Mise en réserve prévue après LFR III

487

4 378

3 819

4 865

4 306

Source : Direction du budget.

En prenant en compte les ouvertures et annulations de crédits proposées dans le prochain décret d’avance, les deux lois de finances rectificatives ainsi que les modifications proposées par le présent projet de loi, il apparaît que, par rapport à la loi de finances initiale, les crédits nets du budget général seraient majorés de 15,4 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 5,6 milliards d’euros en crédits de paiement en 2012 contre moins d’un milliard d’euros en AE et CP en 2011.

Cela représente plus de quatre fois le montant des ouvertures nettes de crédits en cours de gestion 2011. Toutefois, l’essentiel de ces variations de crédits résulte du financement de dépenses exceptionnelles liées à la dotation de la France en faveur du mécanisme européen de stabilité, d’une part, et à la recapitalisation de Dexia, d’autre part : en dehors de ces dépenses exceptionnelles, les crédits de paiement nets du budget général ont été réduits de 3,5 milliards d’euros en AE et CP en 2012.

Les missions dont les crédits de paiement seraient les plus fortement majorés, en valeur absolue, par rapport à la loi de finances initiale, seraient les missions Économie (+ 16,78 %), Engagements financiers de l’État (+ 13,17 %), Immigration, asile et intégration (+ 12,4 %), et Ville et logement (+ 3,35 %).

À l’inverse, les plus fortes diminutions en valeur absolue concerneraient les missions Politiques des territoires (– 14,8 %), Aide publique au développement (– 8,9 %), Sport, jeunesse et vie associative (– 6,72 %), Écologie, développement et environnement durable (– 4,9 %), Direction de l’action du Gouvernement
(– 4,43 %), Santé (– 3,9 %), Sécurité civile (– 3,8 %).

On peut également relever que quelques – rares – programmes n’ont connu, à ce stade, aucune modification de leurs crédits en 2011. Il s’agit de programmes sur lesquels aucune marge de manœuvre n’a, semble-t-il, pu être dégagée (Presse, crédits de la mission Pouvoirs publics à l’exclusion de la dotation Présidence de la République, Régime de retraite et de sécurité sociale des marins, Formations supérieures et recherche universitaire, Majoration des rentes, Appel en garanties).

À titre de synthèse, les deux tableaux ci-après récapitulent l’ensemble des mouvements effectués en cours de gestion au titre des lois de finances rectificatives déjà intervenues en 2012, ainsi que les mouvements proposés dans le présent projet de loi et dans le projet de décret d’avance notifié à la commission des Finances le 20 novembre 2012.

OUVERTURES ET ANNULATIONS D’AUTORISATIONS D’ENGAGEMENT EN 2012

(hors fonds de concours, en millions d’euros)

Loi de finances initiale

Mouvements en LFR I et II

PLFR novembre

Décret d'avance

Montant final des crédits

Ouvertures

Annulations associées

Variation nette des crédits

Ouvertures

Annulations associées

Variation nette des crédits

Ouvertures

Annulations associées

Variation nette des crédits

Budget général

AE brutes du budget général

380 746

17 220

3 219

+14 000

10 298

2 694

+7 604

+1 501

+1 501

+0

402 351

Remboursements et dégrèvements

85 438

483

342

+141

6 033

0

+6 033

+0

+0

+0

91 612

AE nettes du budget général

295 308

16 737

2 877

+13 860

4 265

2 694

+1 571

+1 501

+1 501

+0

310 739

Budgets annexes

2 234

4

4

+0

 

 

+0

+0

+0

+0

2 234

Comptes spéciaux

167 108

12 431

8 859

3 572

2 585

0

2 585

60

60

0

173 265

Crédits des CAS (1)

63 953

8 588

4 866

+3 722

0

0

+0

+60

+60

+0

67 675

Crédits des CCF (2)

103 155

3 843

3 993

-150

2 585

0

+2 585

+0

+0

+0

105 590

OUVERTURES ET ANNULATIONS DE CRÉDITS DE PAIEMENT EN 2012

(hors fonds de concours, en millions d’euros)

Loi de finances initiale

Mouvements en LFR I et II

PLFR novembre

Décret d'avance

Montant final des crédits

Ouvertures

Annulations associées

Variation nette des crédits

Ouvertures

Annulations associées

Variation nette des crédits

Ouvertures

Annulations associées

Variation nette des crédits

Budget général

CP bruts du budget général

376 152

7 433

3 219

+4 214

9 408

1 874

+7 534

+1 310

+1 310

+0

387 899

Remboursements et dégrèvements

85 438

483

342

+141

6 033

0

+6 033

+0

+0

+0

91 612

CP nets du budget général

290 714

6 951

2 877

+4 073

3 375

1 874

+1 501

+1 310

+1 310

+0

296 288

Budgets annexes

2 227

6

6

+0

0

0

+0

+0

+0

+0

2 227

Comptes spéciaux

170 998

12 432

12 737

-305

2 585

0

2 585

60

60

0

173 278

Crédits des CAS (1)

64 053

8 589

4 866

+3 722

2 585

0

+2 585

+60

+60

+0

70 360

Crédits des CCF (2)

106 945

3 843

7 870

-4 027

0

0

+0

+0

+0

+0

102 918

(a) Lois de finances rectificatives du 14 mars 2012 et du 16 août 2012 et décret d’avance notifié le 20 novembre 2012.

(1) CAS : comptes d’affectation spéciale

(2) CCF : comptes de concours financiers

 

LFI

LFR
mars

LFR
juillet

Révisé de septembre*

PLFR novembre **

Montant PLFR novembre

Écart PLFR novembre –LFI

Recettes fiscales nettes

274,9

– 1,6

– 0,9

– 2,1

– 0,2

270,1

– 4,8

dont IS net

44,9

– 1,8

– 2,4

– 0,4 ***

0

40,3

– 4,6

dont TVA nette

137,8

– 0,8

– 1,4

+ 1 ***

0

136,7

– 1,1

Source : lois de finances initiale et rectificatives pour 2012 ; présent projet de loi.

* Prévision révisée pour 2012, présentée lors du dépôt du projet de loi de finances pour 2013.

** Variation par rapport à la prévision révisée associée au PLF pour 2013.

*** Réévaluations dues à des modifications de traitements comptables entraînés par le passage à Chorus.

Cette moins-value de 4,8 milliards d’euros est principalement due à une surestimation, en loi de finances initiale, des prévisions de produit d’impôt sur les sociétés (IS) et de taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Prévu initialement à 44,9 milliards d’euros, le rendement de l’impôt sur les sociétés net atteindrait 40,3 milliards d’euros selon la prévision du présent projet de loi, soit une moins-value de 4,6 milliards d’euros.

Cette réévaluation s’est d’abord faite dans la première loi de finances rectificative, avec un réhaussement de 1,8 milliard d’euros tirant les conséquences d’un cinquième acompte d’IS, versé au mois de décembre 2011, moins important qu’escompté. La deuxième loi de finances rectificative s’est fondée sur le produit de la régularisation de l’impôt, en avril, pour revoir à la baisse sa prévision de produit, de 2,4 milliards d’euros.

Après prise en compte des modifications de traitements comptables entraînés par Chorus, la prévision d’impôt sur les sociétés net s’établit en fin d’année à 40,3 milliards d’euros.

Cette estimation repose sur un montant prévisionnel de cinquième acompte de 1,1 milliard d’euros. Ce montant est inférieur à celui de 1,4 milliard d’euros constaté fin 2011, alors que les établissements financiers alors avaient passé d’importantes provisions sur leurs titres d’État grec du fait du plan de restructuration décidé à l’automne 2011 et qu’ils avaient ainsi minoré leurs versements de plusieurs centaines de millions d’euros. Le Gouvernement prévoyant un cinquième acompte inférieur à celui de l’an dernier, son estimation paraît donc potentiellement prudente.

Il convient de remarquer que, si le produit de l’IS s’élevait effectivement à 40,3 milliards d’euros en 2012, il serait inférieur au montant de 40,7 milliards d’euros constaté en 2001 alors que, entre 2001 et 2012, la progression du PIB serait de l’ordre de 36 %. En conséquence, la part de l’IS dans le PIB serait de 2 % en 2012 quand elle atteignait 2,7 % en 2001.

Fixé initialement à 137,8 milliards d’euros, le produit prévisionnel de la taxe sur la valeur ajoutée nette s’établit désormais à 136,7 milliards d’euros - 135,7 milliards d’euros hors modifications comptables, soit une moins-value de 2,2 milliards d’euros.

Comme l’IS, la TVA a d’abord été revue à la baisse en LFR de mars, pour 0,8 milliard d’euros, pour tenir compte d’une exécution 2011 moins élevée que prévu. Les résultats des premiers mois d’exécution de l’année 2012 ont conduit à ce que son estimation soit revue à la baisse de 1,4 milliard d’euros en LFR de juillet.

Depuis la LFR de juillet, la prévision de TVA a été revue uniquement pour prendre en compte le manque à gagner lié à la baisse temporaire de la TICPE sur les carburants – soit 0,06 milliard d’euros – ainsi que l’impact de la modification des traitements comptables entraînée par le passage à Chorus – 1 milliard d’euros.

La prévision du présent projet de loi se fonde donc sur les mêmes hypothèses de croissance de l’assiette que celles déterminées en LFR de juillet. Pour mémoire, deux hypothèses sont indiquées par l’annexe relative à l’évaluation des voies et moyens du projet de loi de finances pour 2013 :

– une hausse de l’assiette taxable de 2,2 %, inférieure à 2011, en raison notamment du fléchissement de l’investissement et d’une consommation des ménages plus dynamique que le PIB mais ralentie par la faible évolution des salaires réels en raison de la dégradation du marché du travail ;

– une élasticité de la TVA nette budgétaire aux emplois taxables de 0,7, donc inférieure à l’unité, qui serait en ligne avec les recouvrements observés.

Ces moins-values par rapport à la prévision initiale ont été en grande partie compensées par les mesures nouvelles prévues par la LFR de juillet dernier, dont le rendement serait proche de 5,5 milliards d’euros en 2012. Rappelons que ces mesures avaient non seulement pour objet d’entamer le rééquilibrage du système fiscal mais également de dégager les ressources requises pour assurer la compensation de ces moins-values en recettes et garantir le respect de l’objectif de déficit public pour 2012.

 

LFR 2

Révisé

PLFR 3

Recettes fiscales nettes

272,5

270,3

270,1

Impôt sur le revenu net

60,0

59,0

59,0

Impôt sur les sociétés net

40,7

40,7

40,7

TICPE

14,1

13,6

13,4

Taxe sur la valeur ajoutée nette

135,7

135,6

135,6

Autres recettes fiscales nettes

22,0

21,4

21,4

Source : exposé des motifs du présent projet de loi.

La prévision révisée des principales recettes fiscales est analysée dans le tome II du rapport du Rapporteur général relatif au projet de loi de finances pour 2013.

Le Rapporteur général souhaite toutefois apporter un éclairage sur la modification de la prévision de rendement de l’impôt de solidarité sur la fortune et du coût du bouclier fiscal.

La révision à la baisse de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ne doit pas faire l’objet d’une erreur d’interprétation.

La prévision d’ISF est revue à la baisse de 462 millions d’euros par rapport à la dernière loi de finances rectificative. Selon les informations recueillies par le Rapporteur général, cette estimation est fondée sur l’extrapolation à l’ensemble des contribuables des recouvrements réalisés, au 15 juin, auprès des contribuables dont le patrimoine est inférieur à 3 millions d’euros.

Cette réévaluation à la baisse de l’ISF ne traduit donc pas un rendement moindre qu’escompté de la contribution exceptionnelle prévue par la dernière loi de finances rectificative. Le produit de cette contribution, versée au 15 novembre, serait encore inconnu.

Le Rapporteur général insiste sur le fait que les mesures adoptées depuis le début de la XIVe législature ont eu pour effet de renforcer le produit de l’ISF. La deuxième loi de finances rectificative pour 2012 a ainsi prévu la suppression du bouclier fiscal et l’instauration de la contribution exceptionnelle. Le projet de loi de finances pour 2013 réforme, pour sa part, son barème en accentuant sa progressivité.

L’analyse du rendement de l’ISF sous la XIIIe législature requiert la déduction du montant du bouclier fiscal, qui est un dispositif indissociable de cet impôt et destiné à en réduire le poids pour les plus fortunés. Le produit ainsi minoré de l’ISF ressort à un niveau nettement inférieur à celui anticipé sur les deux premières années de la XIVe législature. Les « pics » de produit d’ISF sous la XIIIème législature sont, en outre, à relativiser car ils ont été dus :

– en 2008, à la montée en charge encore incomplète du bouclier fiscal dont le coût était encore limité à 0,4 milliard d’euros ;

– en 2010 et 2011, aux recettes, en grande partie temporaires, tirées de la cellule de régularisation.

Le tableau suivant illustre ce constat.

PRODUIT DE L’IMPÔT DE SOLIDARITÉ SUR LA FORTUNE

(en milliards d’euros)

Rendement sous la XIII° législature *

Rendement sous la XIV° législature

2008

2009

2010

2011

2012 **

2012

2013

3,7

2,9

3,8

3,5

2,9

5,2

4,1

Source : pour les années 2008 à 2011 : situations mensuelles des dépenses et des recettes au 31 décembre de l’année concernée : pour les années 2012 et 2013 : loi de finances initiale pour 2012, présent projet de loi, projet de loi de finances pour 2013.

* Produit d’ISF déduction faite du bouclier fiscal.

** Prévision de la première loi de finances rectificative pour 2012.

Par ailleurs, la prévision de bouclier fiscal est revue à la hausse, de 162 millions d’euros à 450 millions d’euros. Cette réévaluation peut conduire à tirer deux conclusions.

D’une part, la prévision initiale de 162 millions d’euros conditionnait l’équilibre financier de la réforme de l’ISF du printemps 2011. Dès lors que cette estimation est revue à la hausse, on peut affirmer que, toutes choses égales par ailleurs, la réforme de l’imposition du patrimoine adoptée par la précédente majorité a été partiellement financée par l’endettement alors que le précédent Gouvernement affirmait qu’elle était entièrement gagée.

D’autre part, cette sous-estimation en prévision initiale paraît particulièrement surprenante pour une dépense dont la prévisibilité était notoire. Il ressort des éléments transmis au Rapporteur général que le niveau très bas de cette prévision initiale supposait :

– soit que la part du « millésime 2012 » (17) du bouclier fiscal, auto-imputée sur l’ISF versé en 2011, ait été sensiblement surévaluée (18). Une telle erreur de prévision aurait dû être constatée dès le début de l’année 2012 et corrigée par la loi de finances rectificative de mars 2012 ;

– soit que la prévision pour 2012 n’intégrait pas les montants versés au titre des millésimes antérieurs à 2012, dont le montant, sur les années précédentes, était généralement de l’ordre de 0,2 à 0,3 milliard d’euros. Dans une telle hypothèse, l’erreur de prévision serait grossière.

Au final, la révision du coût du bouclier fiscal prévue par le présent projet de loi semble prouver que le précédent Gouvernement a délibérément faussé la prévision initiale de cette dépense afin de ne pas faire apparaître le déséquilibre financier de la réforme de l’ISF du printemps 2011.

À noter enfin la prévision, dans le présent projet de loi, d’un produit de 250 millions d’euros de taxe sur les achats de viande, qui correspondrait à des restes à recouvrer.

● La prévision des recettes non fiscales n’est pas modifiée par rapport à la prévision révisée associée au projet de loi de finances pour 2013 et s’établit à 14,1 milliards d’euros.

Cette estimation ressort en baisse de 1,4 milliard d’euros par rapport à la prévision de la dernière loi de finances rectificative. Cette moins-value s’explique par le versement en titres, et non en numéraire comme prévu initialement, des dividendes de GDF-Suez et du Fonds stratégique d’investissement. Si un tel mode de versement vient minorer les recettes en comptabilité budgétaire, il est, en revanche, sans impact sur le déficit public. L’opération est assimilée à une opération patrimoniale, qui enrichit l’actif de l’État et doit être comptabilisée en recettes selon les conventions de la comptabilité nationale.

Trois lignes de recettes non fiscales appellent une attention particulière dans le présent projet de loi.

En premier lieu, les intérêts des prêts à des banques et des États étrangers (ligne 2401) sont revus en baisse de 331 millions d’euros par rapport à la prévision de la dernière loi de finances rectificative. Cette moins-value serait due à des opérations de refinancement de la dette de la Côte d’Ivoire et du Soudan, dont le contenu ou la date de réalisation ont été modifiés par rapport à ce qui était prévu initialement.

En deuxième lieu, le solde de trésorerie du compte de l’État auprès de Natixis est mobilisé à hauteur de 100 millions d’euros, soit un niveau inférieur de 220 millions d’euros mobilisés par la loi de finances rectificative de fin d’année 2011. Ce prélèvement serait calculé sur l’année en cours, ce qui expliquerait le fait qu’il ne soit anticipé qu’en fin d’année, au moment où il est plus aisé d’anticiper le bénéfice de l’année.

Enfin, reprenant la prévision révisée de septembre dernier, les produits tirés de la garantie de l’État sont revus à la hausse, à 322 millions d’euros, pour prendre en compte les revenus tirés de la garantie accordée à Dexia. Cette prévision n’intègre pas la diminution de 90 points de base à 5 points de base de la rémunération de la garantie, annoncée le 8 novembre dernier. Cette baisse de la rémunération n’entrerait en vigueur qu’en fin d’année et n’aurait qu’un impact marginal sur les recettes perçues par l’État en 2012.

Par rapport à la prévision révisée de septembre dernier, la prévision de solde de l’État du présent projet de loi ressort en dégradation de 2,6 milliards d’euros en raison de la recapitalisation de Dexia et s’établit à 86,1 milliards d’euros.

Déduction faite de cet élément exceptionnel, la prévision est stable en raison d’une économie prévisionnelle supplémentaire de 0,4 milliard d’euros sur la charge de la dette, qui compenserait une moins-value de 0,2 milliard d’euros sur la TICPE et un surcoût de même ordre sur le prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales.

Le tome II du rapport du Rapporteur général sur le projet de loi de finances pour 2013 présente les différents facteurs expliquant la variation de la prévision de solde.

● Le Rapporteur général observe que la prévision de 86,1 milliards d’euros intègre des éléments exceptionnels d’un montant substantiel et que ces éléments doivent en être déduits pour apprécier le niveau du déficit de l’État.

Comme l’illustre le tableau suivant, la prévision de solde pour 2012 a varié sensiblement en cours d’année en raison de ces opérations exceptionnelles.

LA PRÉVISION DE SOLDE DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

 

LFI

LFR 1

LFR 2

Révisé

PLFR 3 *

Solde de l’État

– 78,7

– 84,8

– 81,1

– 83,4

– 86,1

dont prêts à la Grèce

3,9

4,4

0

0

0

dont dotation au MES

0

6,5

6,5

6,5

6,5

dont recapitalisation de Dexia

0

0

0

0

2,6

Solde de l’État hors éléments exceptionnels

– 74,8

– 73,9

– 74,6

– 76,9

– 77

Source : lois de finances pour 2013 et présent projet de loi.

* Variation par rapport au révisé.

Déduction faite de ces éléments exceptionnels, la prévision de solde de l’État en comptabilité budgétaire a été progressivement revue en baisse au cours de l’année pour atteindre un écart de 2,2 milliards d’euros avec la prévision initiale.

La surestimation des recettes fiscales nettes et, plus particulièrement, de l’IS et de la TVA, qui a été présentée plus haut, constitue le principal facteur expliquant cette dégradation du solde en exécution. Elle a été compensée par deux éléments principaux, d’une part, l’anticipation d’une économie de 2,5 milliards d’euros sur la charge de la dette, d’autre part, les mesures nouvelles prévues par la LFR de juillet, dont le rendement dépasserait 5 milliards d’euros.

● Prévu à 86,1 milliards d’euros en comptabilité budgétaire, la prévision de solde de l’État en comptabilité nationale est incertaine du fait d’une interrogation sur le traitement de la recapitalisation de Dexia par Eurostat – cette dépense devant être réalisée avant le 31 décembre de 2012 et devant donc être rattachée à l’année 2012.

Si Dexia devait être considérée comme une structure de défaisance, le versement que l’État réalise à son profit ne serait pas considéré comme relevant d’une opération patrimoniale et d’une logique d’investissement avisé. Le Gouvernement fait valoir que Dexia demeure soumise aux règles prudentielles, qui garantissent sa bonne gestion, et ne peut donc pas être assimilée à une telle structure.

Dans l’hypothèse où Eurostat suivrait le Gouvernement, le solde de l’État en comptabilité nationale s’établirait à 75 milliards d’euros. Le tableau suivant précise les modalités de calcul du solde de l’État en comptabilité nationale.

LE SOLDE DE L’ÉTAT EN COMPTABILITÉ NATIONALE *

(en milliards d’euros)

Solde en comptabilité budgétaire

– 86,1

Dotation au MES

6,5

Recapitalisation de Dexia *

2,6

Primes et décotes à l'émission

2,2

Dividendes en titres

1,4

Dépenses matériels militaires

1

Culot d'émission

– 0,5

Intérêts courus non échus

– 0,5

Prêts et remises de dettes aux États étrangers

– 0,6

Intérêts reversés par la Banque de France à la Grèce

– 0,6

Autres

– 0,4

Solde de l’État en comptabilité nationale

– 75

Source : d’après ministère de l’Économie et des finances.

* Hypothèse d’un traitement de la recapitalisation de Dexia en opération patrimoniale.

 

PLF 2012

PLFR 3

État

– 74,4

– 75

ODAC

– 3,7

– 4,8

APUL

– 3,9

– 2,1

ASSO

– 8,7

– 10,4

TOUTES APU

– 90,7

– 92,3

Source : d’après ministère de l’Économie et des finances.

Le déficit prévisionnel des organismes divers d’administration centrale (ODAC), à 4,8 milliards d’euros, est plus important que l’estimation initiale de 3,7 milliards d’euros. Cette révision à la hausse serait la conséquence de l’exécution 2011. Le rebasage concernerait le solde des Universités, dont le déficit en 2011 se serait avéré plus important que prévu, à hauteur de 0,8 milliard d’euros. La révision du solde pour 2012 s’expliquerait également par le fait que l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) aurait dégagé un excédent non anticipé en 2011 et consommé en 2012, ce qui viendrait dégrader le solde de 0,3 milliard d’euros.

La prévision de solde des administrations publiques locales (APUL) a été revue, en début d’année, en baisse de près de 2 milliards d’euros en raison d’une exécution 2011 meilleure que prévu. Il importe de rappeler la difficulté à réaliser une prévision fiable du solde des APUL, y compris en fin d’année, du fait du manque d’informations fiables. La Cour des comptes (19) a ainsi estimé que, s’agissant des collectivités territoriales, « les restitutions infra-annuelles qui pourraient être effectuées présenteraient un degré de fiabilité très relatif ».

Pour mémoire, le programme de stabilité présenté an avril dernier par le précédent Gouvernement prévoyait l’équilibre des APUL en 2012. Une telle prévision était probablement trop optimiste comme le prouve la révision à la hausse, de + 1,5 % à 5,3 %, de la croissance prévisionnelle des dépenses d’investissement local.

Enfin, la prévision de déficit des administrations de sécurité sociale (ASSO) est supérieure à celle faite en PLF pour 2012 en raison de la dégradation de la conjoncture qui limite la croissance de la masse salariale – croissance de 2,5 % contre 3,7 % initialement prévue – et se traduit en sens contraire par des dépenses d’indemnisation chômage plus importantes que prévu. Cet effet a été pris en compte dès la LFR de mars.

Ces évolutions seraient en partie compensées par deux éléments pris en compte dans la prévision révisée de septembre dernier, à savoir un ONDAM inférieur de 0,9 milliard d’euros à la prévision initiale et une charge de la dette qui bénéficierait de taux d’intérêt plus faibles qu’anticipé.

*

* *

EXAMEN DES ARTICLES

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

RESSOURCES AFFECTÉES

Dispositions relatives aux collectivités territoriales

Article premier

Compensation des transferts de compétences aux départements et aux régions par attribution d’une part du produit de la taxe intérieure
de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

Texte du projet de loi :

I.– 1° Il est prélevé en 2012 au département du Bas-Rhin, en application des articles L. 3113-1 à L. 3113-4 du code général de la propriété des personnes publiques et de l’article 32 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, un montant de 22 978 euros correspondant à l’ajustement, au titre des années 2008 à 2012, de la compensation au titre de la prise en charge des dépenses d’investissement et des frais de fonctionnement liées au transfert du Canal de la Bruche ainsi que des dépenses de fonctionnement des services en charge du domaine hydraulique transférés en 2011 ;

2° Il est prélevé en 2012 aux départements de la Savoie, de la Guadeloupe et de La Réunion, en application des articles 1er, 3 et 6 de la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l’équipement et à l’évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers, un montant de 21 369 euros correspondant à l’ajustement, au titre de l’année 2011, de la compensation des charges de fonctionnement des services des parcs transférés au 1er janvier 2011 ;

3° Il est versé en 2012 au département de la Haute-Savoie, en application des articles 1er, 3 et 6 de la loi du 26 octobre 2009 précitée, un montant de 8 191 euros correspondant à l’ajustement, au titre de l’année 2011, de la compensation des charges de fonctionnement des services des parcs transférés au 1er janvier 2011 ;

4° Il est prélevé en 2012 aux départements de la Côte-d’Or, des Côtes-d’Armor, de la Creuse, de la Dordogne et de l’Eure, en application des articles 18 et 65 de la loi du 13 août 2004 précitée, un montant de 6 831 euros au titre de l’ajustement, au titre des années 2008 à 2011, de la compensation des dépenses d’action sociale afférentes aux personnels titulaires des services transférés au 1er janvier 2007 qui participaient à l’exercice des compétences transférées dans les domaines des routes départementales, des routes nationales d’intérêt local et de la gestion des fonds de solidarité pour le logement ;

5° Il est versé en 2012 aux départements des Hautes-Alpes, de l’Aveyron, de la Corse-du-Sud, de la Haute-Corse, du Doubs, de la Drôme, du Finistère, de la Gironde et de Loir-et-Cher, en application des articles 18 et 65 de la loi du 13 août 2004 précitée, un montant de 8 708 euros au titre de l’ajustement, au titre des années 2008 à 2011, de la compensation des dépenses d’action sociale afférentes aux personnels titulaires des services transférés au 1er janvier 2007 qui participaient à l’exercice des compétences transférées dans les domaines des routes départementales, des routes nationales d’intérêt local et de la gestion des fonds de solidarité pour le logement.

II.– Les diminutions opérées en application des 1°, 2° et 4° du I sont imputées sur le produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques attribué aux départements concernés en application de l’article 52 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005. Elles sont réparties conformément à la colonne A du tableau figurant au III.

Les montants correspondant aux versements mentionnés aux 3° et 5° du I sont prélevés sur la part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques revenant à l’État. Ils sont répartis conformément à la colonne B du tableau figurant au III.

III.– Les ajustements mentionnés au I sont répartis conformément au tableau suivant :

 

DIMINUTION
du produit versé
(en euros)
[col. A]

MONTANT
à verser
(en euros)
[col. B]

TOTAL

(en euros)
[col. A et col. B]

Ain

0

Aisne

0

Allier

0

Alpes-de-Haute-Provence

0

Hautes-Alpes

270

270

Alpes-Maritimes

0

Ardèche

0

Ardennes

0

Ariège

0

Aube

0

Aude

0

Aveyron

680

680

Bouches-du-Rhône

0

Calvados

0

Cantal

0

Charente

0

Charente-Maritime

0

Cher

0

Corrèze

0

Corse-du-Sud

2 618

2 618

Haute-Corse

1 712

1 712

Côte-d’Or

– 1 894

– 1 894

Côtes-d’Armor

– 2 524

– 2 524

Creuse

– 724

– 724

Dordogne

– 1 096

– 1 096

Doubs

1 216

1 216

Drôme

1 096

1 096

Eure

– 593

– 593

Eure-et-Loir

0

Finistère

404

404

Gard

0

Haute-Garonne

0

Gers

0

Gironde

580

580

Hérault

0

Ille-et-Vilaine

0

Indre

0

Indre-et-Loire

0

Isère

0

Jura

0

Landes

0

Loir-et-Cher

132

132

Loire

0

Haute-Loire

0

Loire-Atlantique

0

Loiret

0

Lot

0

Lot-et-Garonne

0

Lozère

0

Maine-et-Loire

0

Manche

0

Marne

0

Haute-Marne

0

Mayenne

0

Meurthe-et-Moselle

0

Meuse

0

Morbihan

0

Moselle

0

Nièvre

0

Nord

0

Oise

0

Orne

0

Pas-de-Calais

0

Puy-de-Dôme

0

Pyrénées-Atlantiques

0

Hautes-Pyrénées

0

Pyrénées-Orientales

0

Bas-Rhin

–22 978

– 22 978

Haut-Rhin

0

Rhône

0

Haute-Saône

0

Saône-et-Loire

0

Sarthe

0

Savoie

– 8 191

– 8 191

Haute-Savoie

8 191

8 191

Paris

0

Seine-Maritime

0

Seine-et-Marne

0

Yvelines

0

Deux-Sèvres

0

Somme

0

Tarn

0

Tarn-et-Garonne

0

Var

0

Vaucluse

0

Vendée

0

Vienne

0

Haute-Vienne

0

Vosges

0

Yonne

0

Territoire-de-Belfort

0

Essonne

0

Hauts-de-Seine

0

Seine-Saint-Denis

0

Val-de-Marne

0

Val-d’Oise

0

Guadeloupe

– 4 408

– 4 408

Martinique

0

Guyane

0

La Réunion

– 8 770

– 8 770

Total

– 51 178

16 899

– 34 279

IV.– Il est versé en 2012 aux régions Alsace, Aquitaine, Auvergne, Bretagne, Île-de-France, Nord-Pas-de-Calais, Haute-Normandie, Picardie, Provence-Alpes Côte-d’Azur et Rhône-Alpes, en application de l’article 95 de la loi du 13 août 2004 précitée, un montant de 1 220 000 euros au titre de la compensation, au titre des années 2007 à 2012, des charges afférentes aux agents associatifs participant à l’exercice de la compétence transférée relative à l’inventaire général du patrimoine culturel.

V.– Le montant correspondant au versement prévu au IV est prélevé sur la part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques revenant à l’État. Il est réparti conformément au tableau suivant :

RÉGION

MONTANT TOTAL
à verser
(en euros)

Alsace.

261 429

Aquitaine.

43 571

Auvergne.

87 143

Bourgogne

0

Bretagne

217 857

Centre

0

Champagne-Ardenne

0

Corse

0

Franche-Comté

0

Île-de-France

130 714

Languedoc-Roussillon

0

Limousin

0

Lorraine

0

Midi-Pyrénées

0

Nord-Pas-de-Calais

174 286

Basse-Normandie

0

Haute-Normandie

43 571

Pays-de-Loire

0

Picardie

174 286

Poitou-Charentes

0

Provence-Alpes-Côte-d’Azur

43 571

Rhône-Alpes

43 571

TOTAL

1 220 000

Observations et décision de la Commission :

Comme l’article 22 du projet de loi de finances pour 2013, le présent article procède à plusieurs ajustements liés à la compensation de transferts de charges aux départements et aux régions opérée par l’attribution d’une partie du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TICPE).

La compensation financière des transferts de compétences est calculée sur la base des dépenses consacrées par l’État à ces compétences au cours de la période précédant le transfert.

L’application du principe de concomitance nécessite que chaque compensation soit fixée en deux temps par les lois de finances, afin de protéger au mieux les collectivités territoriales.

Ainsi, l’année précédant le transfert, la loi de finances initiale doit provisionner une somme correspondant à l’évaluation des charges transférées, sur la base du dernier état connu des dépenses que consacrait l’État aux compétences transférées.

L’année du transfert, voire, le cas échéant, l’année suivant celle du transfert, une loi de finances rectificative doit corriger la compensation allouée aux collectivités locales afin de tenir compte de leur droit à compensation arrêté sur la base des montants définitifs des dépenses consacrées par l’État aux compétences transférées. Cet ajustement doit également être répercuté sur le droit à compensation par la loi de finances initiale de l’année suivante, afin d’éviter la répétition annuelle de l’écart et de sa correction.

Les parts de TICPE (exprimées en valeur absolue) attribuées aux départements sont modifiées, par les alinéas 1 à 9 (I à III) de cet article, afin de tenir compte :

– d’une diminution des dépenses du conseil général du Bas-Rhin liées au transfert du canal de la Bruche, soit un gain pour l’État de 22 978 euros ; (1)

– d’une diminution des dépenses assumées par trois départements et des coûts assumés par un département au titre du transfert des services des parcs, représentant un gain global en recettes pour l’État de 13 178 euros  mais in fine un coût pour le budget général du fait de la majoration consécutive de la dotation globale de décentralisation financée par crédits budgétaires ; (2)

– d’une diminution des dépenses assumées par cinq départements et des coûts assumés par neuf autres au titre du transfert des routes départementales, des routes nationales d’intérêt local et de la gestion des fonds de solidarité pour le logement, représentant un coût global pour l’État de 1 877 euros. (3)

La cession du canal de la Bruche s’inscrit dans le cadre du transfert des voies d’eau réalisé au profit de plusieurs collectivités d’Alsace à compter du 1er janvier 2008. Les ajustements opérés dans le présent projet de loi de finances rectificative visent à reprendre le trop perçu par le département du Bas-Rhin qui a reçu depuis 2008 une compensation supérieure aux charges transférées.

Il apparaît en effet que la compensation des dépenses d’investissement et de fonctionnement versée par l’État de 2010 à 2012 intégrait, au-delà des dépenses relatives aux ouvrages hydrauliques, dues dès le transfert de la compétence, les dépenses de fonctionnement des services.

Sur cette période, le conseil général du Bas-Rhin a perçu 219 000 euros (73 000 euros depuis 2010) de subvention du ministère de l’environnement plus 190 078 euros (95 039 euros de TICPE depuis la LFI 2011), soit 409 078 euros, alors qu’il aurait dû se voir verser 386 100 euros (droit à compensation de 77 220 euros dû depuis 2008), d’où un ajustement non pérenne de + 22 978 euros.

L’article 13 de la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l’évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers a prévu que les agents non titulaires de l’État qui exercent leurs fonctions dans le service ou la partie de service transféré deviennent agents non titulaires de la fonction publique territoriale à la date de transfert du parc. La prise en charge de ces agents par les collectivités bénéficiaires du transfert fait l’objet, depuis le 1er janvier 2011, d’une compensation financière par l’État.

Il s’agit de corriger des inversions de bénéficiaires :

– le département de la Savoie se voit retirer 8 191 euros, dont il a bénéficié à tort au détriment de la Haute-Savoie ;

– des sommes de 4 408 euros et 8 770 euros sont reprises respectivement aux départements de Guadeloupe et de la Réunion, avant d’être allouées aux régions de Guadeloupe et de la Réunion sous forme de dotation globale de décentralisation (DGD) puisque les régions d’outre-mer ne perçoivent pas de TICPE.

La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales dite Acte II de la décentralisation a opéré des transferts de compétences dans des domaines aussi variés que l’entretien des routes départementales et des routes nationales d’intérêt local (article 18) ou la gestion des fonds de solidarité pour le logement (article 65). Outre ces transferts de compétences, elle a organisé des garanties pour les agents concernés (maintien des avantages statutaires, délai d’option de deux ans) comme pour les collectivités bénéficiaires (clause de sauvegarde garantissant la compensation des emplois dits « disparus »).

Dans le silence de la loi de 2004, c’est la Commission consultative d’évaluation des charges (CCEC) qui a déterminé les modalités de compensation des dépenses liées à ces transferts de compétences. Le principe de la compensation des dépenses d’action sociale (20) en complément des dépenses de rémunération pour chaque agent ayant opté a ainsi été affirmé.

Les corrections opérées sont de faible montant :

– un montant global de 6 831 euros est repris aux départements de la Côte-d’Or (1 894 euros), des Côtes-d’Armor (2 524 euros), de la Creuse (724 euros), de la Dordogne (1 096 euros) et de l’Eure (593 euros) ;

– en sens inverse, une somme de 8 708 euros est versée aux départements des Hautes-Alpes (270 euros), de l’Aveyron (680 euros), de la Corse-du-Sud (2 618 euros), de la Haute-Corse (1 712 euros), du Doubs (1 216 euros), de la Drôme (1 096 euros), du Finistère (404 euros), de la Gironde (580 euros) et du Loir-et-Cher (132 euros).

Les alinéas 7 à 12 (IV et V) du présent article modifient les fractions de TICPE affectées aux régions, afin de tenir compte de la nouvelle mesure de compensation au titre de la prise en charge des agents d’associations qui participaient à l’inventaire général du patrimoine culturel préalablement au transfert de cette compétence aux régions (+ 1 220 000 euros).

Dans le cadre du transfert des services de l’inventaire général du patrimoine culturel, les représentants des régions au sein de la Commission consultative d'évaluation des charges (CCEC) ont sollicité la compensation de la prise en charge des agents d’associations qui participaient, préalablement au transfert de 2005, à cet inventaire. Selon les informations recueillies par le Rapporteur général, leur contrat serait susceptible d’être requalifié par le juge en contrat de droit public ; ces emplois n’avaient pas été intégrés dans le périmètre des services ayant fait l’objet du transfert et de la compensation.

Lors de la séance de la CCEC du 6 décembre 2011, le ministère de la Culture et de la communication s’est engagé à compenser le coût de ces agents avant de conduire au premier semestre 2012 une concertation avec l’Association des régions de France sur les modalités de leur « valorisation ».

Lors de la séance de la CCEC du 27 juin 2012, la section des régions a accepté la proposition présentée par le ministère, consistant à compenser les vingt-huit postes d’agents associatifs recensés dans dix régions à compter de 2013, à hauteur de 35 000 euros par agent (soit au total 980 000 euros) et à hauteur de 30 000 euros par agent pour le rattrapage correspondant à la période 2007-2012 (soit 5 040 000 euros, échelonnés sur 5 ans).

La première tranche de ce rattrapage est inscrite pour 2012 au présent article, en première partie du présent projet de loi de finances rectificative, tandis que l'article 22 du projet de loi de finances pour 2013 a prévu une compensation de 980 000 euros pour l’année 2013.

*

* *

La Commission adopte l’article premier sans modification.

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* *

Article 2

Compensation à la collectivité de Mayotte des charges résultant
de la mise en place du revenu de solidarité active (RSA)

Texte du projet de loi :

Pour 2012, les valeurs de fraction de tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques prévues au II de l’article 39 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 sont fixées comme suit :

1° Pour les valeurs inférieures mentionnées au troisième alinéa : 0,003 euro par hectolitre s’agissant des supercarburants sans plomb et 0,002 euro par hectolitre s’agissant du gazole présentant un point éclair inférieur à 120°C ;

2° Pour les valeurs supérieures mentionnées au quatrième alinéa : 0,008 euro par hectolitre s’agissant des supercarburants sans plomb et 0,006 euro par hectolitre s’agissant du gazole présentant un point éclair inférieur à 120°C.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article revient sur les modalités de compensation à la collectivité de Mayotte des charges liées à la mise en œuvre du revenu de solidarité active (RSA) depuis le 1er janvier 2012.

Cette compensation prend la forme de l’affectation d’une part du produit de la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques).

I.– LA MISE EN œUVRE DU RSA À MAYOTTE
DEPUIS LE 1ER JANVIER 2012

Depuis le 31 mars 2011, Mayotte est devenu le 101ème département français et le 5ème département d’outre-mer. Les modalités du processus de départementalisation de Mayotte ont été précisées par la loi n° 2010-1487 du 7 décembre 2010.

● Conformément à cette loi, complétée par l’ordonnance n° 2011-1641 du 24 novembre 2011 et le décret n° 2011-2097 du 30 décembre 2011 portant extension et adaptation du revenu de solidarité active (RSA) au département de Mayotte, le RSA a été mis en place à Mayotte depuis le 1er janvier 2012.

Le barème retenu pour le « RSA socle » et le « RSA chapeau » (21) correspond à peu près au quart des montants en vigueur en métropole et dans les autres départements d’outre-mer. Ce barème sera ensuite régulièrement revalorisé, sur une période de 20 à 25 ans, en vue d’une convergence vers le montant de droit commun.

À l'instar des autres départements, seule la partie RSA « socle » fait l’objet d'une compensation par l'État et ce, uniquement pour son montant forfaitaire puisque le montant forfaitaire majoré (soit le RSA socle majoré) correspondant à l'ancienne API, ainsi que le RSA « jeunes » ne sont pas applicables en 2012.

LA MÉTHODE D’ÉVALUATION DU NOMBRE DE FOYERS BÉNÉFICIAIRES

En 2012, le montant de la compensation provisionnelle a été fondé sur la base d’une fourchette d’estimation du nombre de bénéficiaires du RSA socle à Mayotte. Deux hypothèses de calcul ont été retenues :

– une hypothèse haute fondée sur les données de l’INSEE pour 2007 ;

– une hypothèse basse prenant en compte le nombre de bénéficiaires des prestations familiales à Mayotte, c'est-à-dire les foyers avec au moins un enfant.

Dans le cadre de l’hypothèse haute, un effet volume a été appliqué afin de prendre en compte la croissance démographique intervenue entre 2007 et 2012, tout en excluant la population étrangère en situation irrégulière et en appliquant un critère de ressources donnant droit au dispositif. Selon cette première méthode, 18 400 foyers auraient pu bénéficier du RSA à Mayotte à compter de 2012.

L’hypothèse basse reposait quant à elle sur les données de la CNAF selon laquelle 17 273 foyers mahorais percevaient une prestation familiale en décembre 2010. L’application d’un critère de ressources et, en sens contraire, l’ajout d’un certain nombre de contribuables sans enfants potentiellement éligibles ont conduit à considérer que 13 600 foyers pouvaient bénéficier du RSA en 2012.

En appliquant le barème du RSA et en prenant en compte le forfait logement et la déduction des allocations familiales pour un certain nombre de foyers, le coût net en année pleine se situait, compte tenu des hypothèses formulées, entre 21 millions d’euros et 27 millions d’euros.

Toutefois, en raison de la montée en charge du dispositif dont on pouvait estimer qu’elle serait progressive – avec une prévision de versement du RSA à un tiers des bénéficiaires en début d’année, relevée à 100 % en fin d’année –, le montant de compensation en 2012 avait été finalement fixé entre 11,6 millions d’euros pour l’hypothèse basse et 15,7 millions d’euros pour l’hypothèse haute.

● L’ordonnance du 24 novembre 2011 avait prévu que la compensation à Mayotte des dépenses du RSA soit calculée pour l'année 2012 sur la base d’un montant provisionnel, lui-même fondé sur une estimation du nombre de foyers susceptibles de bénéficier du montant forfaitaire mentionné au 2° de l’article L. 2626-2 du code de l’action sociale et des familles (le RSA « socle »). Le montant de cette compensation est majoré de 6,34 % pour le financement des actions destinées à permettre l’insertion des bénéficiaires du RSA ainsi que des dépenses de structure correspondantes.

Sur la base d'une évaluation du nombre de ménages bénéficiaires, la dépense de RSA à Mayotte avait été évaluée pour 2012 entre 11,6 millions d’euros et 15,7 millions d’euros (cf. encadré supra).

II.– LES MODALITÉS DE COMPENSATION DU RSA À MAYOTTE EN 2012

Afin de compenser les charges résultant de cette création de compétences pour Mayotte, la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 a prévu un dispositif de transfert d’une fraction du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) – devenue taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) – comparable au dispositif de compensation des charges liées au RMI et au RSA mis en place pour les autres départements et placé, comme lui, sous le contrôle de la commission consultative d'évaluation des charges (CCEC) mentionné à l'article L. 1711-3 du code général des collectivités territoriales.

● L’article 39 de la loi de finances initiale pour 2012 a défini une « fourchette » de fractions de tarif de la TICPE et confié aux ministres de l’Intérieur et du Budget le soin de fixer par arrêté interministériel la fraction effectivement transférée, évaluée au plus juste par rapport aux charges supportées par le Département de Mayotte.

La fraction de tarif plancher a été fixée à 0,030 euro par hectolitre de super carburants sans plomb et 0,021 euro par hectolitre de gazole présentant un point éclair inférieur à 120°C. La fraction de tarif plafond a été arrêtée à 0,041 euro par hectolitre pour les super carburants sans plomb et à 0,029 euro pour le gazole présentant un point éclair inférieur à 120°C.

Par un arrêté du 26 janvier 2012, cette fraction a été limitée pour 2012 aux valeurs plancher de la fourchette (soit 0,030 euro par hectolitre s'agissant des supercarburants sans plomb et 0,021 euro par hectolitre s'agissant du gazole présentant un point éclair inférieur à 120°), correspondant à une compensation provisionnelle de 11,6 millions d'euros.

● Toutefois, l'évolution des dépenses constatées sur les dix premiers mois de l'année a démontré que la montée en charge du RSA à Mayotte est beaucoup plus lente que cela avait été envisagé : les dépenses cumulées atteignaient à peine 1,82 million d'euros au début du mois de novembre 2012. Selon les informations recueillies par le Rapporteur général, beaucoup de foyers qui pourraient bénéficier du RSA ignorent, voire renoncent à engager les démarches nécessaires à son versement.

Sur le plan financier, les dépenses totales pour 2012 s'établiront à un niveau très inférieur à celui de la compensation qu'autorise la fourchette basse de fractions de TICPE fixées en loi de finances initiale. Cette surestimation des dépenses à compenser emporte deux mesures correctrices :

– afin d'éviter que cette situation se répète en 2013, l'article 24 du projet de loi de finances pour 2013 a élargi la fourchette de compensation, pour l’année 2013 ;

– pour l'année 2012, le présent article, placé en première partie du projet de loi de finances rectificative, abaisse à 0,003/0,002 euro et 0,008/0,006 euro par hectolitre les deux fourchettes des fractions de TICPE, afin de permettre au pouvoir réglementaire de déterminer par voie d'arrêté modificatif le montant exact de la compensation qui sera due au département de Mayotte.

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La Commission adopte l’article 2 sans modification.

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Article 3

Régularisation des montants dus au titre des fonds départementaux
de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP)

Texte du projet de loi :

Pour 2012, le montant prévu au I de l’article 1648 A du code général des impôts est fixé à 423 291 955 euros.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article majore de 4,829 millions d’euros les transferts financiers de l’État aux fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP), par rapport au montant voté pour 2012.

Cette mesure est pérennisée en 2013 par l’article 24 du projet de loi de finances pour 2013.

I.– L’EXISTENCE DES FONDS DÉPARTEMENTAUX DE PÉRÉQUATION N’A PAS ÉTÉ REMISE EN CAUSE PAR LA SUPPRESSION DE LA TAXE PROFESSIONNELLE

Les fonds départementaux de la taxe professionnelle (FDPTP) ont été créés par la loi n° 75-678 du 29 juillet 1975, en même temps que la taxe professionnelle. En effet, l'inégale répartition des bases de taxe professionnelle sur le territoire était considérée comme l’une des premières causes d’inégalité de richesse entre collectivités.

● Avant la réforme de la taxe professionnelle en 2010, les FDPTP, régis par les articles 1648 A et 1648 AA (désormais abrogé) du code général des impôts, étaient alimentés par deux types de ressources (22) : l'écrêtement des bases excédentaires et un prélèvement sur les ressources des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Les reversements des ressources des FDPTP étaient opérés en faveur de trois types de collectivités :

– tout d'abord, les collectivités écrêtées, qui bénéficiaient d'un « retour prioritaire » sur les ressources du fonds ;

– les communes « concernées », c'est-à-dire celles situées à proximité de l'établissement exceptionnel écrêté ou accueillant ses salariés et subissant donc un préjudice du fait de cet établissement ;

– enfin, les communes ou EPCI dits « défavorisés » par la faiblesse de leur potentiel fiscal ou l'importance de leurs charges. Une grande liberté était laissée à chaque conseil général pour la répartition de cette part.

● La loi de finances pour 2010 (n° 2009-1673 du 30 décembre 2009) a rendu obsolète le mécanisme d'alimentation des FDPTP qui s’appuyait sur les bases de taxe professionnelle, sans pour autant supprimer les fonds eux-mêmes. À titre conservatoire, l’article 78 de la loi avait prévu de faire bénéficier les FDPTP de la garantie de ressources sur les montants de taxe professionnelle qui étaient écrêtés à leur profit, mais qui n’étaient pas reversées aux collectivités d’implantation (bénéficiaires d’un « retour prioritaire ») ou aux communes dites « concernées » (23).

Seuls les montants correspondant aux « structures défavorisées », par la faiblesse de leur potentiel fiscal ou l’importance de leurs charges (communes et EPCI), étaient maintenus. Cette garantie au profit des FDPTP s’est traduite par un prélèvement spécifique sur les recettes de l’État (la dotation de garantie des reversements des FDPTP), évalué par l’article 25 du projet de loi de finances pour 2013 à 430 millions d'euros (qui minore d’autant la DCRTP).

Dans ce schéma, qui a perduré jusqu’à aujourd’hui, la répartition entre départements a continué à être opérée sur la base des versements effectués en 2009 et les conseils généraux ont conservé une large marge d'appréciation pour distribuer ces sommes.

● Dans un premier temps, l’article 46 de la loi de finances pour 2011 (n° 2010-1657 du 29 décembre 2010), corrigé par l’article 84 de la loi de finances rectificative pour 2010 (n° 2010-1658 du 29 décembre 2010), a prolongé pour un an le statu quo.

Procédant à une réécriture complète des articles 1648 A et 1648 AC du code général des impôts, il a également gelé le montant global attribué aux FDPTP et gelé son niveau pour 2011 sur la base des versements effectués en 2009, tout en sécurisant le financement des deux FCNA (fonds de compensation des nuisances aéroportuaires, adossés aux FDPTP). Les FDPTP et les FCNA ont donc perçu, en 2011, des dotations figées au niveau des montants antérieurement perçus par eux.

L’article 42 de la loi de finances pour 2012 (n° 2011-1977 du 28 décembre 2011) a marqué une deuxième étape en opérant trois modifications :

– la pérennisation des dotations versées par l’État aux FDPTP et au FCNA, « à compter de 2012 », qui s’accompagne de la fixation dans la loi de leurs montants globaux ;

– la limitation du bénéfice de la dotation aux FDPTP existants en 2011 ;

– la minoration, à raison de 31,3 millions d’euros par rapport à 2011 du montant de la dotation versée aux FDPTP, au titre de la contribution de 200 millions d’euros des collectivités territoriales en faveur du redressement des finances publiques.

II.– LA DOTATION DE GARANTIE VERSÉE AUX FDPTP NE FAIT L’OBJET, EN 2012 COMME EN 2013, QUE DE RÉGULARISATIONS MINIMES

Il n’est pas proposé par le présent article de revenir sur le gel à son niveau 2011 du montant attribué aux FDPTP, mais de corriger les conséquences des erreurs constatées dans la prise en compte des versements de 2009 qui servent aujourd’hui de base au calcul. Un amendement au projet de loi de finances pour 2012, adopté à l’initiative du Gouvernement, opérait déjà une régularisation semblable (38 millions d’euros de minoration, mais 6,7 millions d’euros d’ajustement positif).

L’alinéa unique du présent article porte à 423 291 955 euros le montant de la dotation de l’État versée au FDPTP, contre 418 462 372 euros en loi de finances initiale (+ 1,15 %).

Comme déjà évoqué, une disposition symétrique a été insérée dans le projet de loi de finances pour 2013, et déjà débattue à l’Assemblée nationale, afin de permettre d’opérer la même régularisation sur le prochain exercice (2013).

La limitation du bénéfice de la dotation aux seuls fonds de péréquation existants en 2011 n’est en revanche pas remise en cause.

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* *

La Commission adopte l’article 3 sans modification.

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TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES A L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES
ET DES CHARGES

Article 4

Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d’autorisation
des emplois

Texte du projet de loi :

I.– Pour 2012, l’ajustement des ressources tel qu’il résulte des évaluations révisées figurant à l’état A annexé à la présente loi et la variation des charges du budget de l’État sont fixés aux montants suivants :

   

(en millions d’euros)

 

RESSOURCES

CHARGES

SOLDES

Budget général

     

Recettes fiscales brutes / dépenses brutes

3 711

7 534

 

À déduire : Remboursements et dégrèvements

6 033

6 033

 

Recettes fiscales nettes / dépenses nettes

– 2 322

1 501

 

Recettes non fiscales

– 1 371

   

Recettes totales nettes / dépenses nettes

– 3 693

   

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des
collectivités territoriales et de l’Union européenne

220

   

Montants nets pour le budget général

-3 913

1 501

– 5 414

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants

     

Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

– 3 913

1 501

 
       

Budgets annexes

     

Contrôle et exploitation aériens

     

Publications officielles et information administrative

     

Totaux pour les budgets annexes

     

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants :

     

Contrôle et exploitation aériens

     

Publications officielles et information administrative

     

Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours

     
       

Comptes spéciaux

     

Comptes d’affectation spéciale

2 585

2 585

0

Comptes de concours financiers

400

 

400

Comptes de commerce (solde)

     

Comptes d’opérations monétaires (solde)

     

Solde pour les comptes spéciaux

   

400

       
       

Solde général

   

– 5 014

II.– Pour 2012 :

1° Les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier sont évaluées comme suit :

(en milliards d’euros)

Besoin de financement

 
   

Amortissement de la dette à long terme

55,5

Amortissement de la dette à moyen terme

42,4

Amortissement de dettes reprises par l’État

1,3

Déficit budgétaire

86,1

Total

185,3

   

Ressources de financement

 
   

Émissions à moyen et long terme (obligations assimilables du Trésor et
bons du Trésor à taux fixe et intérêt annuel), nettes des rachats effectués par l’État et par la Caisse de la dette publique

178,0

Annulation de titres de l’État par la Caisse de la dette publique

-

Variation des bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés

– 10

Variation des dépôts des correspondants

3,2

Variation du compte de Trésor

2,4

Autres ressources de trésorerie

11,7

Total

185,3

2° Le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an demeure inchangé.

III.–  Le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État fixé pour 2012 par la loi
n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 demeure inchangé.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article retrace l’incidence sur l’équilibre budgétaire du présent projet de loi de finances rectificative. Sur le fond, les déterminants de cet équilibre, qui trouvent leur traduction dans le tableau d’équilibre du I du présent article, sont analysés dans l’exposé général du présent rapport.

La dégradation du solde budgétaire de 5,014 milliard d’euros par rapport à la dernière loi de finances rectificative pour 2012 du 16 août 2012 majore d’autant le besoin de financement de l’État pour le porter à 86,1 milliards d’euros.

Cette amélioration du solde budgétaire entraîne en conséquence, au 1° du II du présent article, une nouvelle actualisation du tableau de financement pour 2012 (24) mais le plafond de variation de la dette négociable de l’État resterait inchangé, à 80,1 milliards d’euros, au 2° du II du présent article.

Enfin, le plafond des autorisations d’emplois rémunérés par l’État mentionné au III du présent article reste également inchangé à 1 936 014 ETPT.

L’ensemble de ces éléments est commenté dans l’exposé général du présent rapport.

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M. Charles de Courson. Aux termes de l’amendement déposé par le Gouvernement après l’article 24, il semble que les entreprises pourront faire figurer dans leur bilan au 31 décembre 2013 la créance représentative du crédit d’impôt. Cette mesure aurait donc un impact sur le budget de 2013…

M. le rapporteur général. Je rappelle que nous examinons ce matin l’article d’équilibre pour 2012 ! Cela étant, le CICE n’aura pas d’impact sur le budget de 2013. Comme le Gouvernement nous l’expliquera cet après-midi, les entreprises concernées auront la possibilité de se faire préfinancer ce crédit d’impôt en souscrivant un emprunt de trésorerie, soit auprès des banques avec caution d’OSÉO, soit directement auprès de ce dernier organisme, pour un montant déterminé à l’aide d’un simulateur de calcul qui sera mis à leur disposition.

Dès lors que l’assiette du crédit d’impôt est constituée par une partie des salaires versés en 2013, le montant exact de ce crédit ne pourra pas être connu avant la fin de 2013 et, comme tout impôt, sera imputé sur les comptes de l’entreprise pour 2013. Il n’y aura donc pas de conséquences pour 2012, ni pour 2013 s’agissant du budget de l’État.

La Commission adopte l’article 4 sans modification.

Elle adopte ensuite la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2012 sans modification.

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SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE PREMIER

AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2012. - CRÉDITS DES MISSIONS

Article 5

Budget général : ouvertures et annulations de crédits

Texte du projet de loi :

I.– Il est ouvert aux ministres, pour 2012, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant respectivement à 10 298 208 280 euros et à 9 408 176 057 euros, conformément à la répartition par mission et programmes donnée à l’état B annexé à la présente loi.

II.– Il est annulé pour 2012, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement à 2 693 831 280 euros et à 1 874 252 492 euros, conformément à la répartition par mission et programmes donnée à l’état B annexé à la présente loi.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article tend à ouvrir et à annuler des crédits sur le budget général, selon la répartition donnée à l’état B annexé au présent projet de loi de finances rectificative. Ces ouvertures et annulations sont commentées dans l’exposé général du présent rapport.

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La Commission adopte l’article 5 sans modification.

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Article 6

Comptes spéciaux : ouverture de crédits

Texte du projet de loi :

Il est ouvert aux ministres, pour 2012, au titre des comptes d’affectation spéciale, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant à 2 585 000 000 euros, conformément à la répartition par programme donnée à l’état C annexé à la présente loi.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article tend à ouvrir et à annuler des crédits sur les comptes spéciaux, selon la répartition donnée à l’état C annexé au présent projet de loi de finances rectificative. Ces ouvertures et annulations sont commentées dans l’exposé général du présent rapport.

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La Commission adopte l’article 6 sans modification.

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TITRE II

DISPOSITIONS PERMANENTES

Article 7

Renforcement de la lutte contre les fraudes patrimoniales les plus graves

Texte du projet de loi :

I.– Après l'article 754 B du code général des impôts, il est inséré un article 755 ainsi rédigé :

« Art. 755.– Les avoirs inscrits sur un compte ou un contrat d’assurance-vie étranger et dont l’origine et les modalités d’acquisition n’ont pas été justifiées dans le cadre de la procédure prévue à l’article L. 23 C du livre des procédures fiscales sont réputés constituer, jusqu’à preuve contraire, un patrimoine acquis à titre gratuit assujetti, à la date d’expiration des délais prévus à l’article L. 23 C précité, aux droits de mutation à titre gratuit au taux le plus élevé mentionné au tableau III de l'article 777.

« Ces droits sont calculés sur la valeur la plus élevée connue de l'administration des avoirs du compte ou du contrat d’assurance-vie au cours des dix années précédant l'envoi de la demande d'informations ou de justifications prévue à l’article L. 23 C précité, diminuée de la valeur des avoirs dont l’origine et les modalités d’acquisition ont été justifiées. »

II.– Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

A.– Après l’article L. 10, il est inséré un article L. 10-0 A ainsi rédigé :

« Art. L. 10-0 A.– L’administration peut demander communication auprès de tiers des relevés de compte du contribuable, afin d’examiner l’ensemble des relevés de compte du contribuable sur les années au titre desquelles les obligations déclaratives prévues au deuxième alinéa de l’article 1649 A ou à l’article 1649 AA du code général des impôts n’ont pas été respectées, sans que cet examen constitue le début d’une procédure de vérification de comptabilité ou d’une procédure d’examen de situation fiscale personnelle.

« Ces relevés de compte ne peuvent être opposés au contribuable pour l’établissement de l’impôt sur le revenu que dans le cadre d’une des deux procédures de contrôle précitées. »

B.– La première phrase du troisième alinéa de l’article L. 16 est complétée par les mots suivants : « , notamment lorsque le total des montants crédités sur ses relevés de compte représente au moins le double de ses revenus déclarés ou excède ces derniers à hauteur d’au moins 200 000 € ».

C.– En première partie, titre II, chapitre premier, section II, le II est complété par un D intitulé : "Contrôle des comptes financiers et des contrats d'assurance-vie souscrits auprès d'organismes établis hors de France " qui comprend un article L. 23 C ainsi rédigé :

« Art. L. 23 C.– Lorsque l’obligation prévue au deuxième alinéa de l’article 1649 A ou à l'article 1649 AA du code général des impôts n’a pas été respectée au moins une fois au titre des dix années précédentes, l’administration peut demander, indépendamment d’une procédure d’examen de situation fiscale personnelle, à la personne physique soumise à cette obligation de fournir dans un délai de soixante jours toutes informations ou justifications sur l’origine et les modalités d'acquisition des avoirs mentionnés sur le compte ou le contrat d’assurance-vie.

« Lorsque la personne a répondu de façon insuffisante aux demandes d’informations ou de justifications, l’administration lui adresse une mise en demeure d’avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu’elle souhaite. »

D.– En première partie, titre II, chapitre premier, section V, le I est complété par un C intitulé : « En cas de défaut de justifications de l’origine et des modalités d’acquisition des avoirs à l’étranger » qui comprend un article L. 71 ainsi rédigé :

« Art. L. 71.– En l’absence de réponse ou à défaut de réponse suffisante aux demandes d’informations ou de justifications prévues à l’article L. 23 C dans les délais prévus audit article, la personne est taxée d’office dans les conditions prévues à l’article 755 du code général des impôts.

« La décision de mettre en œuvre cette taxation d’office est prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret en Conseil d’État, qui vise à cet effet la notification prévue à l’article L. 76. »

III.– Les I et II s’appliquent aux demandes adressées par l’administration à compter du 1er janvier 2013.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article vise à renforcer les dispositifs juridiques permettant à l’administration fiscale de lutter contre certaines fraudes concernant le patrimoine des ménages. Il comprend deux séries de dispositions : d’une part, il renforce les moyens de contrôle et de sanction des avoirs non déclarés détenus à l’étranger ; d’autre part, il permet de mieux appréhender, de manière générale, les revenus non déclarés.

Ces dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2013.

La levée du contrôle des changes le 1er janvier 1990 s'est traduite, pour les personnes physiques résidant en France, par la possibilité de transférer librement des capitaux à l'étranger et d'y détenir des avoirs. Afin que cette levée ne constitue pas une source d'évasion fiscale, la loi de finances pour 1990 a institué une obligation de déclaration de la détention de comptes à l'étranger. L’article 1649 A du code général des impôts prévoit cette obligation déclarative des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger par les personnes physiques et certaines personnes morales, domiciliées ou établies en France (25).

Un fichier dénommé EVAFISC a été créé par un arrêté du 25 novembre 2009 pour répertorier les comptes bancaires détenus hors de France par des personnes physiques ou morales domiciliées en France. Géré par la direction nationale des enquêtes fiscales (DNEF), ce fichier permet de recenser et de centraliser les informations laissant présumer la détention de comptes bancaires hors de France, afin de mener des actions de prévention, de recherche, de constatation ou de poursuite d’infractions pénales. Pour cela, outre l’identité des personnes, EVAFISC recense les comptes bancaires concernés avec le montant des soldes et des virements. Ces données peuvent être recueillies par interrogation des établissements bancaires, notamment à partir d’une analyse des transactions réalisées en France au moyen de cartes bancaires étrangères, ou être reprises depuis d’autres fichiers fiscaux. EVAFISC comporte aujourd’hui plus de 95 000 informations sur des comptes bancaires permettant de présumer la détention d’avoirs non déclarés à l’étranger.

Par ailleurs, l'article 1649 AA du code général des impôts prévoit que les personnes physiques domiciliées fiscalement en France qui souscrivent des contrats d'assurance-vie auprès d'organismes établis hors de France sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus, les références et dates d'effet et de durée de ces contrats, ainsi que les avenants et opérations de remboursement effectuées.

Si ces deux types d’obligations déclaratives ne sont pas respectés, il existe plusieurs sanctions applicables :

– d’une part, une amende spécifique mise à la charge du déclarant défaillant, dont le montant par compte non déclaré est de 1 500 euros (ou 10 000 euros dans le cas où le compte est détenu dans un État ou territoire qui n'a pas conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales permettant l'accès aux renseignements bancaires). La première loi de finances rectificative pour 2012 a renforcé cette amende en prévoyant qu’elle s'élève à 5 % du solde créditeur de chaque compte non déclaré lorsque le total des soldes créditeurs des comptes non déclarés est égal ou supérieur à 50 000 euros ;

– d’autre part, les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables soumis à l'impôt sur le revenu. En application de l'article 1758 du code général des impôts, ces rappels d'impôt sont soumis à une majoration de 40 % (jugée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2011-220 QPC du 10 février 2012), à l'intérêt de retard et aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine.

Depuis la dernière loi de finances rectificative pour 2011, l'article L. 169 du livre des procédures fiscales fixe à dix ans, au lieu de trois dans le droit commun, le délai de reprise à l’impôt sur le revenu en cas de non-respect des obligations déclaratives au titre de l'ensemble des avoirs détenus à l'étranger. Toutefois, cette extension du délai de reprise ne s'applique pas en cas de non-respect de l'obligation déclarative relative à l'ouverture, l'utilisation ou la clôture de comptes à l'étranger, lorsque le contribuable apporte la preuve que le total des soldes créditeurs de ses comptes à l'étranger est inférieur à 50 000 euros au 31 décembre de l'année au titre de laquelle la déclaration devait être faite.

Afin d’assurer une plus grande effectivité de ces procédures de contrôle et de sanction des avoirs détenus à l’étranger, tant sur des comptes bancaires que sur des contrats d’assurance-vie, le présent article prévoit deux séries de dispositions, l’une au titre du contrôle fiscal, l’autre au titre de l’imposition d’office.

Au titre du contrôle fiscal, il est ouvert la possibilité pour l’administration de demander communication à des tiers (les établissements bancaires français, ainsi que les administrations fiscales étrangères dans le cadre de l’assistance administrative internationale) l’ensemble des relevés de compte du contribuable qui n’aurait pas déclaré ses comptes ou contrats d’assurance-vie étrangers, sur le fondement d’un nouveau droit à communication prévu par l’article L. 10 A du livre des procédures fiscales, créé par le A du II du présent article.

En application de l’article L. 10 du livre des procédures fiscales, l’administration peut toujours demander au contribuable les renseignements, justifications ou éclaircissements qui lui paraissent utiles pour asseoir et contrôler l'impôt, mais le contribuable n’est pas tenu de répondre à une telle demande et un tel refus n’emporte aucune conséquence ou sanction.

Dans le cadre d’un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle (ESFP) prévu par l’article L. 12, l’administration peut engager toutes les démarches qui tendent à recueillir, pour les besoins de la vérification de la cohérence entre les revenus déclarés et la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et le train de vie du contribuable, des informations ou des documents, soit auprès du contribuable lui-même, soit auprès de tiers. L’article L. 47 du même livre des procédures fiscales (LPF) prévoit explicitement que l’avis envoyé au contribuable avant l’engagement d’un ESFP peut comporter une demande de relevés de comptes. Mais, dès lors que l’ESFP ne revêt aucun caractère contraignant pour le contribuable, celui-ci n'est pas légalement tenu de fournir les documents ou renseignements demandés lors de cette vérification. L’article L. 12 prévoit toutefois que, si le contribuable n’a pas lui-même fourni dans un délai de deux mois ses relevés de compte à l’administration, cette dernière dispose des délais supplémentaires nécessaires pour les obtenir en usant de son droit de communication auprès des tiers.

L’administration dispose en effet d’un tel droit de communication auprès des banques, soit en vertu de l'article L. 85 du LPF qui fait obligation aux entreprises industrielles ou commerciales de communiquer à la demande de l'administration fiscale les livres dont la tenue est prescrite par le code de commerce ainsi que tous documents annexes, notamment les comptes privés des particuliers, soit en vertu de l'article L. 83 du LPF qui prévoit que les entreprises soumises au contrôle de l'autorité administrative ne peuvent opposer le secret professionnel aux agents des impôts qui leur demandent communication des documents de service qu'elles détiennent. Par ailleurs, l’article L. 96 A du LPF prévoit que les établissements bancaires doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, la date et le montant des transferts de fonds vers l'étranger réalisés par les personnes physiques, les associations et les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, ainsi que l'identité de l'auteur et du bénéficiaire de ces transferts et les références des comptes concernés. On rappellera enfin qu’en application de l’article L. 102 B du livre des procédures fiscales, les documents sur lesquels peut s’exercer le droit de communication doivent être conservés pendant six ans.

Lorsque l'administration a réuni des éléments permettant de présumer que le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger, elle peut aussi mettre en œuvre l'assistance administrative prévue par les conventions fiscales internationales. Le délai d'exercice de l'ESFP est alors aussi prorogé pour permettre à l'administration de recevoir les renseignements demandés aux autorités fiscales étrangères – ce qui prend du temps...

L’intérêt de la nouvelle procédure prévue par le présent article est de rationaliser et d’optimiser le contrôle fiscal : l’administration pourra désormais demander communication des relevés de compte à des tiers dès qu’elle peut prouver que le contribuable n’a pas respecté ses obligations déclaratives de comptes ou de contrats d’assurance-vie à l’étranger. Elle ne sera alors tenue à aucun délai pour procéder à l’analyse des comptes communiqués. Sa demande pourra porter sur toutes les années au cours desquelles les obligations déclaratives n’ont pas été respectées, ainsi que sur l’ensemble des comptes concernés. L’administration ne poursuivra la procédure, en engageant un contrôle fiscal externe, que si la situation fiscale du contribuable ainsi analysée au préalable l’exige. Ce souci de rationalisation des moyens de l’administration et de meilleure programmation des contrôles s’explique par le fait que 18 % des ESFP engagés n’aboutissent pas à des propositions de rectification.

Il est expressément mentionné que l’exercice de ce droit de communication ne constitue pas l’engagement d’un ESFP (ou d’une vérification de comptabilité pour un professionnel), afin de se prémunir contre toute interprétation jurisprudentielle qui requalifierait la demande de communication de l’ensemble des relevés bancaires du contribuable en une procédure de contrôle externe, exigeant le respect d’un certain formalisme et enserrée dans des délais fixés par le livre des procédures fiscales. Cette précision est apportée en raison de la lecture a contrario, faite par l’administration, d’une décision du Conseil d’État statuant au contentieux du 15 février 2002 (n° 217394, Schmitt). Dans cette décision, le Conseil d’État a jugé que des démarches entreprises par l'administration fiscale pour obtenir d'un pays étranger, en application des clauses d’assistance administrative d’une convention fiscale bilatérale, la communication de la copie des relevés de l'un des comptes bancaires du contribuable ne sont pas de nature à constituer un contrôle de la cohérence du revenu global déclaré avec l'ensemble des revenus dont l'intéressé a disposé, tels qu'ils peuvent être évalués à partir du patrimoine, de la situation de trésorerie ou du train de vie, seul de nature à caractériser un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle.

Il y a toutefois peu de risque que la demande de communication des relevés de tous les comptes, et non d’un seul comme dans le cas précité, suffise pour autant à caractériser un ESFP puisqu’en tout état de cause, l’administration ne pourra utiliser les relevés que dans le cadre d’un ESFP, après avoir procédé à une analyse d’ensemble. Le Conseil d’État a d’ailleurs déjà jugé que l’exercice du droit de communication constitue une procédure distincte de l'ESFP (23 mars 1992, n° 76586, Weber) et que l’administration peut dès lors valablement exercer ce droit sans avoir au préalable adressé au contribuable un avis de vérification (1er décembre 2004, n° 258774, ministre c/Jallet).

Les droits du contribuable sont en effet préservés puisqu’une procédure de rectification ne pourra être engagée à son encontre qu’après engagement d’un ESFP (ou d’une vérification de comptabilité) si l’administration entend se prévaloir des relevés de compte qu’elle a obtenus et exploités. Dans le cadre de ces procédures contradictoires, le contribuable pourra alors discuter avec l’administration de la pertinence de son analyse et apporter tout élément de nature à justifier l’origine des fonds figurant sur des comptes non déclarés.

En complément de ce nouveau droit de communication, dont l’exercice peut aboutir à l’engagement d’un ESFP et à une rectification contradictoire à son issue, le présent article instaure également une procédure d’imposition d’office lorsque les obligations déclaratives relatives aux comptes et contrats d’assurance-vie à l’étranger n’ont pas été respectées. Il s’agit toutefois d’une procédure particulière qui permet de garantir les droits du contribuable concerné : quand bien même la procédure n’est pas définie a priori comme contradictoire (puisqu’il est expressément mentionné qu’elle ne constitue pas un ESFP), le contribuable dispose de délais suffisants pour apporter à l’administration les justifications appropriées permettant de faire échec, le cas échéant, à l’imposition d’office.

Le nouvel article L. 23 C du livre des procédures fiscales, introduit par le C du II du présent article, prévoit qu’en cas de non-respect des obligations déclaratives au titre d’une année sur les dix précédentes, l’administration peut demander au contribuable concerné de fournir, dans un délai de soixante jours, les justifications de l’origine des fonds figurant sur les comptes bancaires ou contrats d’assurance-vie non déclarés. Si le contribuable répond et que l’administration estime certains éléments de cette réponse insuffisants, cette dernière peut adresser au contribuable une mise en demeure de préciser ces éléments dans un délai supplémentaire de trente jours.

Après cet échange entre l’administration et le contribuable, la nouvelle procédure d’imposition d’office proprement dite peut être engagée sur le fondement du nouvel article L. 71 du livre des procédures fiscales, introduit par le D du II du présent article. Les conditions de l’engagement de cette procédure sont l’absence de réponse du contribuable dans les délais impartis (de soixante ou quatre-vingt-dix jours), ou une réponse insuffisante dans ces mêmes délais. La décision d’engagement de la procédure doit être prise par un agent de catégorie A, détenant un grade dont le niveau minimum sera fixé par décret en Conseil d’État (qui sera donc un supérieur hiérarchique de l’inspecteur-vérificateur), comme pour la procédure de taxation forfaitaire en fonction des éléments de train de vie prévue par l’article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts. Les bases d’imposition et leurs modalités de détermination doivent être notifiées au contribuable dans un délai de trente jours avant la mise en recouvrement de l’imposition, selon la procédure de droit commun prévue en matière de taxation d’office par l’article L. 76 du livre des procédures fiscales. Cette notification interrompt le délai de prescription.

La base de l’imposition d’office est déterminée par le nouvel article 755 du code général des impôts, créé par le I du présent article au sein du paragraphe relatif aux présomptions de propriété concernant le champ d’application des droits de mutation à titre gratuit.

L’ensemble des avoirs détenus sur les comptes bancaires et contrats d’assurance-vie détenus à l’étranger et non déclarés sont réputés constituer un patrimoine acquis à titre gratuit, qui sera taxé au taux le plus élevé existant pour les droits de mutation, soit 60 % (le taux applicable entre parents au-delà du 4e degré et entre personnes non-parentes). L’application de ce taux correspond à une présomption d’origine inconnue des fonds en cause, donc hors lignée familiale. Le contribuable concerné conserve toutefois la possibilité d’apporter la preuve contraire devant le juge de l’impôt, en établissant l’origine de ces fonds. Tant que la donation ou le don manuel n’ont pas été révélés à l'administration par le bénéficiaire de la mutation, le droit de reprise de l’administration n’est pas prescrit. Il n’y a donc aucune difficulté à rendre exigible en l’espèce les droits de mutation à la date d’expiration des délais de réponse laissés au contribuable, qui peut révéler l’origine de ses avoirs lors de la phase préalable contradictoire.

L’assiette taxable est constituée par la valeur la plus élevée des avoirs du compte ou du contrat au cours des dix années précédant l’envoi de la demande de justification. L’administration pourra connaître ce montant grâce à l’exercice préalable de son nouveau droit de communication en la matière, ou par toute autre procédure de contrôle (y compris suite à une enquête judiciaire pour fraude fiscale). La valeur des avoirs dont l’origine aura été justifiée vient en déduction de l’assiette taxable.

En plus des flux de revenus vers ou depuis l’étranger, qui peuvent déjà être imposés à l’impôt sur le revenu, l’administration disposera donc désormais de la possibilité de taxer le stock qui demeure sur des comptes ou contrats non déclarés à l’étranger et dont les flux qui en sont à l’origine n’auront pas pu être appréhendés au préalable, du fait d’une dissimulation par le contribuable concerné. Une fois qu’il aura été ainsi identifié, le stock pourra aussi être taxé chaque année au titre de l’ISF.

L'article L. 16 du livre des procédures fiscales prévoit qu'en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements et, dans certains cas précisément mentionnés dans la loi, des justifications sous la forme de production de documents. Il en est notamment ainsi lorsque l'administration a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir un revenu plus important que le revenu déclaré. En cas d'absence ou d'insuffisance de réponse à la demande de justifications formulée sur ce fondement par l’administration, le contribuable s’expose soit à la taxation d'office au titre de revenus d'origine injustifiée (article L. 69), soit à l'évaluation d'office des bases de l'impôt pour défaut de déclaration s’il admet s'être livré à une activité occulte (article L. 73). Dans la suite éventuelle de la procédure au niveau contentieux, la charge de la preuve est inversée en faveur de l’administration.

L'abondant contentieux généré par les contrôles opérés sur le fondement de l'article L. 16 a permis au juge de l'impôt de retenir trois catégories d’indices permettant à l'administration de présumer l'existence de revenus dissimulés : le constat de dépenses sans rapport avec les revenus déclarés ; l'existence d'un solde inexpliqué de la balance personnelle de trésorerie ; la constatation d'un écart au moins égal au double entre les revenus déclarés et les sommes portées au crédit des comptes bancaires du contribuable. En ce qui concerne ce troisième indice, la « règle du double » a été posée, comme garantie offerte au contribuable, par une décision du Conseil d’État statuant au contentieux du 22 janvier 1982 (n° 23454). Le caractère strict de l’application de cette règle a été rappelé par une décision du Conseil d’État statuant au contentieux du 5 mars 1999 (n° 164412, Bancarel), qui a jugé insuffisant pour permettre à l'administration de mettre en œuvre la procédure de demande de justifications un écart de 1,96 entre les crédits bancaires recensés et les revenus déclarés. Le Conseil d'État semble avoir retenu une telle interprétation stricte pour assurer une application uniforme de la règle prétorienne qu'il a lui-même établie.

Dans le chapitre consacré à la lutte contre la fraude de son rapport public 2012, la Cour des comptes a toutefois constaté que l’application de cette règle du double « bénéficie indubitablement aux plus hauts revenus, bien davantage en tout cas que ne le ferait l’appréhension de l’écart entre les crédits et les revenus déclarés s’il était exprimé en valeur absolue ». C’est pourquoi le B du II du présent article propose de modifier l’article L. 16 du livre des procédures fiscales afin de mentionner explicitement dans la loi la règle du double et de la compléter par la possibilité nouvelle offerte à l’administration fiscale de formuler une demande de justifications lorsqu’elle constate un écart entre les crédits bancaires et les revenus déclarés d’un montant supérieur ou égal à 200 000 euros en valeur absolue.

Avec l’application actuelle de la règle du double, si l’administration constate un écart de 500 000 euros entre des revenus déclarés de 1 million d'euros et les crédits bancaires du contribuable concerné, elle ne peut pas de ce seul fait lui demander de fournir des justifications. Désormais, avec le nouveau seuil de 200 000 euros, une telle demande de justifications pourra être adressée au contribuable.

On rappellera que, dans une décision du 22 juin 2011 (n° 347813, Kargaci), le Conseil d’État statuant au contentieux a refusé de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur l’application de la règle du double en estimant que « la circonstance que ce seuil soit apprécié en valeur relative, loin de créer une différence de traitement entre contribuables, permet au contraire d'assurer le respect du principe d'égalité ». L’extension du pouvoir de contrôle de l’administration réalisée par le présent article ne devrait pas fragiliser l’actuelle règle du double, puisque celle-ci est maintenue et complétée par une autre disposition qui, par la référence à un montant assez élevé en valeur absolue, permet de limiter l’effet de seuil résultant de la prise en compte de la seule valeur relative des revenus, laquelle avantage aujourd’hui les contribuables dont les revenus sont les plus élevés.

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La Commission est saisie de l’amendement CF 52 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Dans le droit en vigueur, il est possible de taxer d'office les flux de revenus à destination ou en provenance de l'étranger sur des comptes non déclarés dès que l'administration en a connaissance, sans qu'elle soit tenue d'engager une procédure de contrôle contradictoire. Cet amendement vise à maintenir cette possibilité de taxation d'office, même lorsque l'administration aura eu connaissance de ces flux de revenus non déclarés en exerçant le nouveau droit de communication auprès des banques que lui ouvre le présent article.

La Commission adopte cet amendement (Amendement n° 11).

La Commission est ensuite saisie de l’amendement CF 51 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. L’un des objets de l’article 7 est de durcir la « règle du double » qui permet au fisc de demander des justifications à un contribuable dès lors que ses revenus constatés représentent au moins le double de ses revenus déclarés : il dispose que l’administration fiscale pourra intervenir dès lors que la différence atteindra 200 000 euros. L’amendement tend à ramener ce montant à 150 000 euros. Cette disposition, certes plus sévère, reste néanmoins raisonnable.

M. Charles de Courson. La règle dite du double restant en vigueur, est-il bien justifié de conserver ce deuxième seuil, qu’il soit fixé à 200 000 ou 150 000 euros ? Ne vaudrait-il pas mieux se contenter d’un seuil unique, ramené par exemple à une fois et demie le revenu déclaré ?

M. le rapporteur général. Nous n’avons pas voulu toucher à cette règle du double, qui est conforme à une jurisprudence constante du Conseil d’État et qui a l’avantage de s’appliquer lorsque le revenu déclaré est inférieur au seuil fixé en valeur absolue. Ainsi, pour un revenu déclaré de 100 000 euros, elle continuera à s’appliquer à partir de 100 000 euros d’avoirs non déclarés.

M. le président Gilles Carrez. Le « ou » de l’article est alternatif, et non cumulatif.

M. Olivier Carré. Il est amusant de constater que l’exposé sommaire de l’amendement se réfère encore à un montant en francs.

M. le rapporteur général. Il est déjà difficile de discuter les amendements : épargnons-nous un débat sur les exposés sommaires.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 12).

Puis la Commission examine l’amendement CF 50 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. L’amendement tend à harmoniser à dix ans tous les délais de reprise en cas de non-déclaration de comptes à l’étranger.

M. le président Gilles Carrez. Je crois me souvenir que c’est à l’initiative de Mme Valérie Pécresse alors qu’elle était ministre du Budget que le délai de reprise à l’impôt sur le revenu a été porté à dix ans dans le cas de ces opérations suspectes. Il me semble aussi que nous nous étions alors demandés s’il ne fallait pas adopter le même délai pour l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et les droits d’enregistrement. Il y aurait donc continuité dans la lutte contre la fraude.

Mme Valérie Pécresse. Vous avez bonne mémoire ! Mais M. le rapporteur général assume-t-il cette continuité ?

M. Charles de Courson. Tous les délais seront-ils désormais harmonisés en cas de non-déclaration ?

M. le rapporteur général. Oui. Tous les délais de reprise seront harmonisés à dix ans, pour tous les impôts en cas de comptes à l’étranger non déclarés.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 13).

Elle adopte ensuite l’article 7 ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 7

Extension de la compétence de la commission départementale de conciliation de Paris aux biens situés à l’étranger

La Commission est saisie de l’amendement CF 45 du rapporteur général, portant article additionnel après l’article 7.

M. le rapporteur général. Les éventuels litiges portant sur l’estimation d’un bien entrant dans le calcul de l’ISF ou soumis à droits d’enregistrement sont traités par une commission départementale de conciliation. Aujourd'hui, aucune commission n'est territorialement compétente pour les biens situés à l'étranger. Il est proposé que cette compétence soit attribuée à la commission de Paris, ce qui permettra un contrôle effectif des déclarations tout en garantissant aux contribuables concernés le bénéfice d’une procédure de conciliation.

M. Charles de Courson. Ces commissions de conciliation fonctionnent-elles bien ?

M. le rapporteur général. Je l’ignore. Je vous propose de poser la question aux services concernés.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 14).

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Article additionnel après l’article 7

Harmonisation du délai de reprise en cas de fraude révélée devant les Tribunaux

La Commission est ensuite saisie de l’amendement CF 47 du rapporteur général, portant article additionnel après l’article 7.

M. le rapporteur général. Dans le même souci d’harmonisation qu’avec l’amendement adopté à l’article 7, cet amendement tend à porter pour tous les impôts de trois ans à dix ans le délai de reprise en cas de fraude révélée devant les tribunaux.

M. Charles de Courson. Il est fréquent que les faits de fraude fiscale révélés dans le cadre d’un contentieux ne soient pas transmis au fisc ou qu’ils ne le soient qu’après qu’ils ont été prescrits. Vous êtes-vous rapproché de la commission des Lois ou du ministère de la Justice pour régler ce problème ?

M. le rapporteur général. C’est précisément pour tenir compte de ces problèmes de transmission qu’il est proposé d’allonger les délais.

M. Charles de Courson. Ne faudrait-il pas compléter l’amendement en faisant obligation aux juges de transmettre ces faits ?

M. le rapporteur général. Cette obligation existe, même s’il peut arriver qu’elle ne soit pas respectée.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 15).

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Article 8

Adaptation des procédures de lutte contre les fraudes les plus graves

Texte du projet de loi :

Modernisation de la procédure de droit de visite et de saisie par la création de dispositions spécifiques aux perquisitions informatiques.

I.– L’article L. 16 B du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° Au I :

a) Les mots : « de la taxe sur la valeur ajoutée » sont remplacés par les mots : « des taxes sur le chiffre d’affaires » ;

b) Après les mots : « susceptibles d’être détenus » sont insérés les mots : « , ou d’être accessibles ou disponibles, » ;

2° Après le IV, il est inséré un IV bis ainsi rédigé :

« IV bis.– Lorsque l’occupant des lieux ou son représentant fait obstacle à l’accès aux pièces ou documents présents sur un support informatique, à leur lecture ou à leur saisie, mention en est portée au procès-verbal.

« Les agents de l’administration des impôts peuvent alors procéder à la copie de ce support et saisir ce dernier qui est placé sous scellés. Ils disposent de quinze jours à compter de la date de réalisation de la visite pour procéder à l’accès aux pièces ou documents présents sur le support informatique placé sous scellés, à leur lecture et à leur saisie, ainsi qu’à la restitution de ce dernier et de sa copie. Ce délai est prorogeable sur autorisation délivrée par le juge des libertés et de la détention.

« À la seule fin de permettre la lecture des pièces ou documents présents sur le support informatique placé sous scellés, les agents de l’administration des impôts procèdent aux opérations nécessaires à leur accès ou à leur mise au clair. Ces opérations sont réalisées sur la copie du support.

« L’occupant des lieux ou son représentant est avisé qu’il peut assister à l’ouverture des scellés, à la lecture et à la saisie des pièces et documents présents sur ce support informatique, qui ont lieu en présence de l’officier de police judiciaire.

« Un procès-verbal décrivant les opérations réalisées pour procéder à l’accès à ces pièces et documents, à leur mise au clair et à leur lecture est dressé par les agents de l’administration des impôts. Un inventaire des pièces et documents saisis lui est annexé s’il y a lieu.

« Le procès-verbal et l’inventaire sont signés par les agents de l’administration des impôts et par l’officier de police judiciaire ainsi que par l’occupant des lieux ou son représentant ; en son absence ou en cas de refus de signer, mention en est faite au procès-verbal.

« Il est procédé concomitamment à la restitution du support informatique et de sa copie. En l’absence de l’occupant des lieux ou de son représentant, l’administration accomplit alors sans délai toutes diligences pour les restituer. » ;

3° Le VI est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après les mots : « les informations recueillies » sont insérés les mots : « , y compris celles qui procèdent des traitements mentionnés au troisième alinéa, » ;

b) Après le dernier alinéa, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« En présence d’une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés saisie dans les conditions prévues au présent article, l’administration communique au contribuable, au plus tard lors de l’envoi de la proposition de rectification prévue au premier alinéa de l’article L. 57 ou de la notification prévue à l’article L. 76, sous forme dématérialisée ou non au choix de ce dernier, la nature et le résultat des traitements informatiques réalisés sur cette saisie qui concourent à des rehaussements, sans que ces traitements ne constituent le début d’une procédure de vérification de comptabilité. Le contribuable est informé des noms et adresses administratives des agents par qui, et sous le contrôle desquels, les opérations sont réalisées. »

II.– L’article L. 74 du même livre est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ces dispositions s’appliquent également au contrôle du contribuable mentionné au I de l’article L. 16 B lorsque l’administration a constaté dans les conditions prévues au IV bis du même article, dans les locaux occupés par ce contribuable, ou par son représentant en droit ou en fait s’il s’agit d’une personne morale, la situation d’obstacle à l’accès aux pièces ou documents sur support informatique, à leur lecture ou à leur saisie ».

III.– Après l’article 1735 ter du code général des impôts, il est inséré un article 1735 quater ainsi rédigé :

« Art. 1735 quater.– L’obstacle à l’accès aux pièces ou documents sur support informatique, à leur lecture ou à leur saisie, mentionné au IV bis de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales est passible d’une amende égale à :

« – 10 000 euros ou 5 % des droits rappelés, si ce dernier montant est plus élevé, lorsque cet obstacle est constaté dans les locaux occupés par le contribuable mentionné au I de ce même article ;

« – 1 500 euros dans les autres cas, portée à 10 000 euros lorsque cet obstacle est constaté dans les locaux occupés par le représentant en droit ou en fait du contribuable mentionné au I de cet article. »

Élargissement de la procédure de flagrance fiscale.

IV.– L’article L. 16-0 BA du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° Au I :

a) Au premier alinéa, les mots : « de la période en cours pour laquelle » sont remplacés par les mots : « des périodes pour lesquelles » ;

b) Au a du 3°, les mots : « d'opérations commerciales sans facture et non comptabilisées » sont remplacés par les mots : « d'achats, de ventes ou de prestations non comptabilisés » ;

c) Après le 4°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 5° pour les contribuables qui poursuivent une activité professionnelle, l’absence réitérée du respect de l'obligation déclarative prévue au 2 de l'article 287 du code général des impôts, » ;

d) À l'avant-dernier alinéa, après les mots : « ainsi que par le contribuable », sont insérés les mots : « , hormis les cas dans lesquels l'infraction mentionnée à l'article 1746 du code général des impôts a été constatée » ;

2° Après le I bis, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« I ter.– Lorsqu'une infraction mentionnée au 4° du I a été constatée par des agents de contrôle autres que ceux de l’administration des impôts et que ces derniers en ont été informés dans les conditions prévues aux articles L. 82 C ou L. 101, ils peuvent, dans le cadre de l'une des procédures énumérées au premier alinéa d’I, en cas de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement d’une créance fiscale de la nature de celle mentionnée à ce même alinéa, dresser à l’encontre du contribuable un procès-verbal de flagrance fiscale.

« Le procès-verbal de flagrance fiscale est signé par les agents de l'administration des impôts ainsi que par le contribuable, hormis les cas dans lesquels l'infraction visée à l'article 1746 du code général des impôts a été constatée. En cas de refus de signer, mention en est faite au procès-verbal.

« L'original du procès-verbal est conservé par l'administration des impôts et copie est notifiée au contribuable. » ;

3° Au II, le mot : « saisies » est remplacé par le mot : « mesures ».

4° Au dernier alinéa du V, le mot : « saisies » est remplacé par le mot : « mesures ».

V.– Le I de l’article L. 252 B du même livre est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « des saisies conservatoires » sont remplacés par les mots : « une ou plusieurs mesures conservatoires mentionnées aux articles L. 521-1 à L. 533-1 du code des procédures civiles d’exécution » ;

2° Au deuxième alinéa du 1°, les mots : « hors taxes réalisé au titre de l’année ou de l’exercice en cours » sont remplacés par les mots : « ou des recettes brutes hors taxes réalisés au titre de chaque année ou exercice » ;

3° Au 2°, les mots : « de l’année ou de l’exercice en cours » sont remplacés par les mots : « de chaque année ou exercice » ;

4° Au 3°, les mots : « de la période en cours » sont remplacés par les mots : « de chaque période » ;

5° Après le 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 4° Pour l’amende mentionnée à l’article 1740 B du code général des impôts, le montant de cette amende. » ;

6° Au premier alinéa du II, les mots : « de saisies conservatoires » sont remplacés par les mots : « des mesures conservatoires » et les mots : « ces saisies » sont remplacés par les mots : « ces mesures » ;

7° Au quatrième alinéa du II, les mots : « des saisies » sont remplacés par les mots : « des mesures conservatoires » et les mots : « la mainlevée immédiate de ces saisies » sont remplacés par les mots : « leur mainlevée immédiate » ;

8° Au III, le mot : « saisies » est remplacé par le mot : « mesures » .

VI.– L'article 1740 B du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, les mots : « et I bis » sont remplacés par les mots : « à I ter » ;

2° Le deuxième alinéa du I est complété par la phrase suivante :

« Il est également porté à 10 000 euros si, à cette même date, le revenu imposable établi dans les conditions prévues à l’article 1649 quater-0 B bis excède le seuil de la quatrième tranche du barème de l’impôt sur le revenu fixé au I de l’article 197. » ;

3° Le troisième alinéa d’I est complété par la phrase suivante :

« Il est également porté à 20 000 euros si, à cette même date, le revenu imposable établi dans les conditions prévues à l’article 1649 quater-0 B bis excède le seuil de la cinquième tranche du barème de l’impôt sur le revenu fixé au I de l’article 197. » ;

4° Au II, les mots : « et I bis » sont remplacés par les mots : « à I ter ».

Élargissement du champ de la procédure judiciaire d’enquête fiscale.

VII.– 1° Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

a) À l’article L. 188 B, la référence : « 3° » est remplacée par la référence : « 5° » ;

b) Après le sixième alinéa de l'article L. 228, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« 4° Soit d’une domiciliation fiscale fictive ou artificielle à l’étranger ;

« 5° Soit de toute autre manœuvre destinée à égarer l’administration. » ;

2° Au second alinéa du I de l’article 28-2 du code de procédure pénale, la référence : « 3° » est remplacée par la référence : « 5°».

Observations et décision de la Commission :

Afin de renforcer la lutte contre les fraudes fiscales les plus graves, le présent article prévoit trois séries de mesures visant à :

– adapter la procédure de visite et de saisie fiscales aux nouvelles technologies, notamment utilisées par les entreprises (I) ;

– moderniser la procédure de flagrance fiscale utilisée dans les cas de fraude particulièrement graves, que cette forme soit liée à l’activité professionnelle normale du contribuable ou à des activités illicites, et élargir son champ d’application (II) ;

– étendre la procédure judiciaire d’enquête fiscale à certaines fraudes fiscales complexes visant à l’évasion fiscale (III).

I.– LA PROCÉDURE DE VISITE ET DE SAISIE

La procédure de visite et de saisie, mise en œuvre à l’initiative de l’autorité judiciaire, donne la possibilité, sous certaines conditions, à l’administration fiscale de réaliser des contrôles et de saisir les documents qui lui seront utiles pour apprécier le caractère frauduleux du comportement de certains contribuables en matière d’impôts professionnels.

En vertu de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales (LPF), la procédure de visite et de saisie est mise en œuvre « lorsque l’autorité judiciaire, saisie par l’administration fiscale, estime qu’il existe des présomptions qu’un contribuable se soustrait à l’établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou de la taxe sur la valeur ajoutée ».

Cette présomption, fondée sur des éléments qui doivent être réunis par l’administration, doit porter sur des infractions limitativement énumérées par l’article L. 16 B précité, soit :

– la réalisation d’achat ou de ventes sans facture ;

– l’utilisation ou la délivrance de factures ou de documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ;

– l’omission volontaire de passer ou de faire passer des écritures ;

– le fait de passer ou faire passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts (CGI).

Dans le cas d’une telle présomption, l’autorité judiciaire peut autoriser les agents de l’administration des impôts ayant au moins le grade d’inspecteur (26) et habilités à cet effet par le directeur général des finances publiques à « rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s’y rapportant sont susceptibles d’être détenus »(27).

Si de tels documents sont trouvés lors de la visite, ils peuvent être saisis, quel qu’en soit le support.

La visite ne peut intervenir qu’entre six heures et vingt et une heures et doit être effectuée en présence de l’occupant des lieux ou de son représentant, ou à défaut de deux témoins qui ne sont pas soumis à l’autorité de l’officier de police judiciaire ou de l’administration fiscale présents.

Au cours de la visite, les agents des impôts :

– notifient l’ordonnance verbalement et sur place à l’occupant des lieux ou à son représentant, qui en reçoit une copie intégrale ;

– recueillent des informations concernant les agissements du contribuable, avec son consentement ;

– consignent l’ensemble des opérations réalisées, les constatations effectuées, les renseignements et justifications obtenus de la part du contribuable et les autres informations demandées le cas échéant dans un procès-verbal dressé sur le champ ;

– dressent, le cas échéant, un inventaire des pièces saisies, annexé au procès-verbal ;

– placent sous scellés les pièces et documents saisis, en cas de difficultés à en dresser l’inventaire.

Le procès-verbal et l’inventaire, signés par les agents de l’administration des impôts, l’officier de police judiciaire et l’occupant des lieux ou son représentant s’il y consent, sont adressés au juge qui a autorisé la visite, tandis qu’une copie est remise à l’occupant des lieux ou à son représentant. Une copie est également envoyée, s’il n’est pas l’occupant des lieux, au contribuable dont le comportement a suscité la présomption de fraude à l’origine de la visite.

Par ailleurs, les documents saisis doivent être restitués au contribuable dans un délai de six mois, sauf en cas d’engagement de poursuites pénales (28).

Le procès-verbal et l’inventaire mentionnent le délai et la voie de recours dont peut bénéficier l’occupant des lieux ou, le cas échéant, l’auteur de la fraude présumée (29).

En cohérence avec les objectifs poursuivis par cette procédure en matière de lutte contre la fraude fiscale, le présent article prévoit son élargissement à l’ensemble des taxes sur le chiffre d’affaires (à l’instar de la taxe sur les huiles ou de la taxe sur le chiffre d’affaires des exploitants agricoles) alors qu’auparavant seuls l’impôt sur le revenu ou sur les bénéfices et la TVA étaient concernés.

Par ailleurs, le champ des documents susceptibles d’être saisis est étendu : s’ajoutent aux documents détenus sur le lieu de la visite, les documents accessibles ou disponibles depuis ce lieu. Il s’agit de répondre aux problèmes auxquels est confrontée l’administration lorsque le lieu où se déroule la visite n’est pas celui où sont stockées les informations recherchées (par exemple, en cas de serveurs de stockage de données à distance, en fort développement).

Si la saisie de supports informatiques est possible en l’état du droit, les obstacles que peuvent opposer les propriétaires de ces supports à l’accès aux données qu’ils contiennent peuvent être préjudiciables à l’intervention de l’administration, qui ne dispose pas toujours des moyens matériels pour les lever.

Le présent article prévoit plusieurs dispositions permettant de renforcer les pouvoirs de l’administration lorsque de tels comportements sont constatés :

– une mention de l’obstacle fait à l’administration est portée au procès-verbal ;

– les agents des services fiscaux procèdent à la copie du support et le placent sous scellés ;

– ils disposent alors de quinze jours pour parvenir à accéder à ces informations (par exemple, en « cassant » les codes d’accès), ce délai étant prorogeable sur autorisation du juge des libertés et de la détention.

L’occupant des lieux ou son représentant est alors avisé qu’il peut assister à l’ouverture des scellés et à la lecture des pièces saisies qui ont lieu en présence de l’officier de police judiciaire.

Un procès-verbal décrit les opérations réalisées pour procéder à l’accès aux pièces et documents et un inventaire des pièces saisies lui est annexé le cas échéant. Il porte la signature des agents de l’administration fiscale, de l’officier de police judiciaire et de l’occupant des lieux ou de son représentant s’il y consent. Dans le cas contraire, une mention le signalant est portée au procès-verbal.

Les supports et documents saisis sont restitués de façon concomitante.

La procédure de la flagrance fiscale, introduite par l’article 15 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 et codifiée à l’article L. 16-0 BA du LPF, déroge au droit commun du contrôle fiscal en ce qu’elle permet d’exercer un contrôle en matière d’impôt sur le revenu, d’impôt sur les sociétés et de taxe sur le chiffre d’affaires alors qu’aucune obligation déclarative n’est échue, et d’effectuer des saisies conservatoires. Le contribuable peut toutefois en contester la régularité devant le juge des référés.

La procédure de flagrance fiscale est subordonnée à la réunion de quatre conditions cumulatives :

– le contribuable contrôlé doit se livrer à une activité professionnelle ;

– l’administration doit constater au moins un fait caractérisant la fraude ;

– cette constatation doit être établie au titre de la période en cours pour laquelle aucune obligation déclarative n’est échue (30) ;

– les circonstances doivent être susceptibles de menacer le recouvrement d’une créance fiscale (31).

Le recours à la procédure de flagrance fiscale ne peut intervenir que dans le cadre des procédures de recherche et de contrôle sur place expressément mentionnées à l’article L. 16-0 BA suivantes :

– les procédures de visite et de saisie mentionnées à l’article L. 16 B ;

– les procédures de contrôle des opérations réalisées ou facturées par les redevables de la TVA placés sous le régime simplifié d’imposition prévues à l’article L. 16 D ;

– le droit d’enquête prévu par l’article L. 80 F ;

– les procédures de contrôle inopiné prévues à l’article L. 47.

Les principales procédures de mise en œuvre de la flagrance fiscale

● Le droit de visite et de saisie permet à l’administration de rechercher la preuve de l’agissement frauduleux lorsqu’il existe des présomptions à l’égard d’un contribuable qui ne remplirait pas ses obligations déclaratives. Ces visites doivent être autorisées par le juge des libertés et de la détention, et les saisies s’effectuent sous son autorité et son contrôle.

● Le droit d’enquête est exercé par les agents des impôts ayant au moins le grade de contrôleur afin d’identifier les manquements aux règles de facturation en matière de TVA.

● Le contrôle inopiné est limité à des opérations de constatations matérielles (inventaires de stocks, inventaire de valeur en caisse, existence et état des documents comptables).

La mise en œuvre de la flagrance fiscale n’est possible que si des agents de l’administration des impôts ayant au moins le grade de contrôleur constatent, pour un contribuable exerçant une activité professionnelle et au titre de la période en cours pour laquelle les obligations déclaratives en matière d’impôt sur le revenu, d’impôt sur les sociétés et de TVA ne sont pas échues, l’un des faits suivants :

– l’exercice d’une activité que le contribuable n’a pas fait connaître à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce (c’est-à-dire en cas d’activité occulte), sauf s’il a satisfait, au titre d’une période antérieure, à l’une de ses obligations fiscales déclaratives ;

– la délivrance de factures ne correspondant pas à la livraison d’une marchandise ou à l’exécution d’une prestation de services, ou de factures afférentes à des livraisons de biens au titre desquelles la taxe sur la valeur ajoutée ne peut faire l’objet d’aucune déduction (montage de type « carrousel » de TVA) ou la comptabilisation de telles factures reçues ;

– lorsqu’ils sont de nature à priver la comptabilité de valeur probante, soit la réitération d’opérations commerciales sans facture et non comptabilisées, soit l’utilisation d’un logiciel de comptabilité ou de caisse aux fins d’omettre des opérations ou d’enregistrer des opérations fictives ;

– le recours au travail dissimulé.

En application de l’article 19 de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009, la procédure de flagrance fiscale s’applique également dans le cas de contrôle portant sur des activités illicites.

Les agents de l’administration fiscale peuvent recourir à cette procédure à la suite d’informations délivrées par le ministère public à l’occasion de toute instance devant les juridictions civiles ou criminelles (article L. 82 C du LPF) ou par l’autorité judiciaire dans le cas où elle disposerait d’une indication de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale (article L. 101 du même code), ainsi que dans le cadre de l’échange d’informations entre les services fiscaux et les forces de l’ordre (article L. 135 L du même code).

Par ailleurs, la flagrance fiscale ne s’appliquera aux cas de fraudes liées à des activités lucratives non déclarées qu’après l’ouverture :

– d’une enquête menée à la suite de la constatation d’un crime ou d’un flagrant délit (article 53 du code de procédure pénale) ;

– d’une enquête préliminaire menée par des officiers de police judiciaire (article 75 du même code) ;

– d’une instruction préparatoire obligatoire ou facultative (article 79 du même code).

L’établissement du procès-verbal et sa notification permettent au comptable public de procéder à des saisies conservatoires sans autorisation préalable du juge (32) à hauteur d’un montant représentatif des impôts afférents à la période en cours (impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés ou TVA) (33). Pour établir ce montant, l’administration fiscale peut utiliser les informations recueillies dans le cadre des visites et des saisies à domicile, du droit d’enquête et du droit de communication. Cette mesure permet d’assurer l’efficacité du recouvrement et de prévenir toute intention du contribuable d’organiser son insolvabilité. Les saisies conservatoires perdurent jusqu’à l’échéance déclarative. Par la suite, soit le contribuable procède au paiement des impositions dues au titre de l’exercice, ce qui entraîne la mainlevée de ces saisies, soit le contribuable n’acquitte pas l’impôt dû et les saisies sont converties en saisies-attributions dans les conditions de droit commun.

Ces saisies ne peuvent porter que sur des droits corporels, incorporels ou des créances, à l’exclusion des immeubles, des fonds de commerce et des parts d’associés.

On notera qu’en cas d’application de la procédure de flagrance fiscale lors d’un contrôle portant sur des activités illicites, le calcul du montant des saisies conservatoires est égal au montant des revenus déterminés au regard de la valeur vénale des biens objet du trafic ou ayant servi à sa réalisation.

L’article 1740 B du code général des impôts institue un régime spécifique d'amendes en cas de flagrance fiscale :

– le montant de l'amende s'élève à 5 000 euros ;

– ce montant est porté à 10 000 euros si le chiffre d'affaires hors taxes ou le montant des recettes brutes dépasse les limites prévues pour l'application des régimes de micro-imposition au titre des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices non commerciaux ou du forfait agricole ;

– ce montant est porté à 20 000 euros si, à la date du constat de flagrance fiscale, le chiffre d'affaires hors taxes ou le montant des recettes brutes excède les limites du régime simplifié d'imposition en matière de TVA ou de bénéfice agricole.

Les amendes dues au titre de la flagrance fiscale ne sont pas exclusives de l'application d'autres sanctions et amendes.

Comme précisé précédemment, la flagrance fiscale concerne uniquement la période en cours, c’est-à-dire pour laquelle aucune obligation déclarative n’est encore échue.

Or, la fraude peut s’étendre ou concerner un exercice clos pour lequel l’obligation déclarative n’est pas échue. Dans cette hypothèse, l’administration ne peut pas recourir à la procédure de flagrance fiscale, même si l’obligation déclarative n’est pas échue.

Par ailleurs, le fait de limiter la procédure de flagrance fiscale à l’exercice en cours a pour conséquence de faire porter les contrôles sur des périodes relativement courtes, ce qui peut rendre plus difficile la collecte de documents prouvant la fraude.

En conséquence, le présent article propose d’étendre la flagrance fiscale à l’ensemble de la période pour laquelle l’obligation déclarative n’est pas échue, que l’exercice auquel se rapporte cette déclaration soit clos ou non.

L’amende prévue en cas de recours à la procédure de flagrance fiscale est majorée si cette procédure intervient dans le cadre d’activités illicites de façon à atteindre :

– 10 000 euros si le revenu imposable évalué par l’administration excède le seuil de la quatrième tranche du barème progressif de l’impôt sur le revenu mentionné à l’article 197 du code général des impôts, soit 26 420 euros ;

– 20 000 euros si ce revenu excède le seuil de la cinquième tranche du même barème progressif, soit 70 830 euros.

III.– LA PROCÉDURE JUDICIAIRE D’ENQUÊTE FISCALE

L'article 23 de la loi n° 2009-1674 de finances rectificative pour 2009 du 30 décembre 2009, adopté à l’initiative de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, a institué une procédure judiciaire d'enquête fiscale visant à renforcer les moyens de l’administration en matière de répression pénale de la fraude fiscale (34).

Cette procédure repose sur l’octroi à des agents des services fiscaux de pouvoir de police judiciaire afin de conduire des enquêtes dans le cas des fraudes fiscales les plus graves.

La présomption est caractérisée lorsque des indices suffisants corroborent l’existence de la fraude, sans qu’il soit néanmoins possible, au regard des preuves accumulées, de mettre directement en œuvre des poursuites. Les montages pour échapper à l’impôt pouvant se révéler extrêmement complexes, un travail préalable conséquent et étayé doit avoir été réalisé pour retenir l’existence d’une telle présomption.

b) Les cas de fraude visés par la procédure d’enquête judiciaire

L’article L. 228 précité mentionne expressément les trois cas de fraude au titre desquels peut être appliquée la procédure d’enquête judiciaire. Il s’agit toujours de fraudes complexes réalisées au moyen de :

– l'utilisation, aux fins de se soustraire à l'impôt, de comptes ou de contrats souscrits auprès d'organismes établis dans un État ou territoire qui n'a pas conclu avec la France, depuis au moins trois ans au moment des faits, de convention d'assistance administrative permettant l’échange de tout renseignement nécessaire à l’application de la législation fiscale française ;

– l'interposition, dans un État ou territoire mentionné précédemment, de personnes physiques ou morales ou de tout organisme, fiducie ou institution comparable ;

– l’usage de faux.

Dans les conditions de droit commun, l’administration peut saisir le parquet d’une plainte tendant à l’application de sanctions pénales en matière fiscale, après avis conforme de la Commission des infractions fiscales.

Avant de rendre cet avis, la Commission examine l’affaire qui lui est transmise par l’administration fiscale et invite le contribuable à lui communiquer toute information utile dans un délai de trente jours.

Dans le cas de la présomption d’une fraude complexe et du risque d’un dépérissement des preuves, une exception est prévue par l’article L. 228 de sorte que le contribuable ne soit pas informé de la saisine, ni de l’avis rendu par la Commission. En effet, en matière de contentieux fiscal, la réactivité de l’administration, puis des services judiciaires, est décisive pour aboutir à des sanctions effectives.

À l’issue de l’examen de l’affaire, la Commission des infractions fiscales rend un avis sur l’existence d’une présomption, qui cependant ne lie pas le ministre.

Les compétences des nouveaux officiers fiscaux judiciaires sont très encadrées. Les agents des services fiscaux de catégorie A et B, désignés dans un cadre strict (arrêté des ministres de la justice et du budget, pris après avis conforme de la Commission des infractions fiscales), sont habilités personnellement par le procureur général près la cour d’appel du siège de leur fonction. Ils sont placés exclusivement sous la direction du procureur de la République, sous la surveillance du procureur général et sous le contrôle de la chambre d’instruction. Ils sont compétents, sur l’ensemble du territoire, pour rechercher ou constater un cas de fraude fiscale complexe reposant sur l’usage de faux (fausse identité, faux documents…) ou sur le recours à des comptes détenus directement ou indirectement dans des États non coopératifs en matière de renseignements fiscaux. Ils sont également compétents pour rechercher et constater les infractions connexes aux délits de fraude fiscale (35). Dans le cadre de ces enquêtes, ils ne peuvent toutefois réaliser que des actes limitativement énumérés.

Dans la conduite de leur enquête, ces officiers bénéficient également de conditions dérogatoires au droit commun, de nature à garantir un contexte favorable à l’établissement de preuves (notamment, la prorogation du délai de reprise, la dérogation à l’interdiction de renouveler un contrôle fiscal et l’absence de limitation de la durée de contrôle sur place).

Par ailleurs, ils ne peuvent exercer d’autres attributions ou accomplir d’autres actes que ceux prévus dans le cadre de l’enquête dont ils sont saisis par l’autorité judiciaire, ni effectuer une enquête judiciaire sur des faits dont ils auraient eu à connaître dans le cadre d’une précédente procédure de contrôle fiscal.

Cette nouvelle procédure est entrée en vigueur au 1er janvier 2010, mais sa mise en œuvre effective est intervenue à la suite de la publication du décret n° 2010-1318 du 4 novembre 2010 portant création d’une brigade nationale de répression de la délinquance fiscale, qui décline l’ensemble de ses missions, soit :

– animer et coordonner à l'échelon national et au plan opérationnel, les investigations de police judiciaire et les recherches entrant dans son domaine de compétence ;

– effectuer ou poursuivre à l'étranger les recherches liées aux infractions dont elle a à connaître ;

– centraliser les informations relatives à cette forme de délinquance ;

– fournir une assistance documentaire et analytique, à leur demande, aux services de la police nationale et de la gendarmerie nationale.

Le décret précise que la brigade est composée à la fois d’officiers de police judiciaire et d’officiers fiscaux de police judiciaire.

Le présent article vise à étendre le périmètre de la procédure judiciaire d’enquête fiscale à deux nouveaux cas de fraudes fiscales complexes résultant :

– d’une domiciliation fiscale fictive ou artificielle à l’étranger,

– de toute autre manœuvre destinée à égarer l’administration.

En effet, ces cas de fraudes, très difficilement appréhendables par les procédures de recherche et de contrôle de droit commun du fait du caractère éphémère et de la complexité des montages mis en œuvre, pourront utilement faire l’objet des procédures d’enquête judiciaire menées par la brigade de répression de la délinquance fiscale qui dispose des moyens adéquats pour collecter les preuves nécessaires à l’application des sanctions pénales.

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* *

La Commission examine l’amendement CF 42 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Le Gouvernement propose que l’amende encourue par les contribuables ayant fait l’objet d’une procédure de flagrance fiscale au titre d’activités illicites soit majorée si leurs revenus, estimés par l’administration fiscale dans le cadre de cette procédure, sont supérieurs aux seuils de la quatrième et de la cinquième tranche de barème. Logiquement, la création d’une nouvelle tranche du barème dans le projet de loi de finances pour 2013 devrait conduire à celle d’une nouvelle tranche d’amende.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 17).

Elle adopte ensuite l’article 8 ainsi modifié.

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* *

Après l’article 8

La Commission est saisie de l’amendement CF 21 du président Gilles Carrez, portant article additionnel après l’article 8.

M. le président Gilles Carrez. Les contentieux fiscaux donnent lieu à deux procédures : l’une administrative, destinée à apprécier s’il y a eu fraude, et l’autre pénale. Lorsque les conclusions de la juridiction administrative et de la juridiction judiciaire diffèrent, le Tribunal des conflits est saisi. Or cette saisine n’a pas toujours lieu et il se produit des situations absurdes, comme celle d’un contribuable qui vient d’être condamné par la chambre criminelle de la Cour de cassation à deux ans d’emprisonnement ferme pour fraude fiscale, alors que le juge administratif avait décidé qu’il n’y avait pas eu de fraude fiscale.

L’amendement tend à ce que les sanctions pénales ne soient pas applicables lorsque le juge administratif a établi par une décision définitive que l’impôt n’est pas dû. Il s’agit là du respect des droits élémentaires des citoyens.

M. le rapporteur général. Je ne suis pas favorable à votre amendement. Une intention frauduleuse peut être établie en droit pénal, alors que des questions de procédure peuvent amener le juge administratif à décharger le contribuable de certaines impositions. Les procédures pénale et fiscale ont des objets distincts : la première doit statuer sur la responsabilité pénale du contribuable, tandis que la seconde doit permettre de statuer sur le montant de la dette fiscale. Les plaintes tendant à l’application des sanctions pénales en matière d’impôts directs, de TVA, de droits d’enregistrement, de taxe sur la publicité et de droit de timbre sont déposées par l’administration sur avis conforme de la Commission des infractions fiscales.

M. Charles de Courson. Notre président pose un vrai problème, mais je ne suis pas sûr que la solution qu’il propose soit adaptée. Le cas qu’il évoque est certes choquant mais comment se fait-il que le Tribunal des conflits n’ait pas été saisi ?

M. le président Gilles Carrez. Il semble que, dans certains cas, ce soit impossible.

M. Charles de Courson. Ce tribunal ayant pour mission de trancher en cas de différence d’interprétation entre les deux ordres de juridiction, il faudrait plutôt un amendement visant à lever les obstacles à sa saisine.

M. le rapporteur général. Ce tribunal est saisi sur les conflits de compétence, et donc sur des questions de procédure. Les cas individuels de décisions divergentes entre ordres judiciaires ne lui sont pas soumis.

M. Olivier Carré. Il est parfaitement justifié de durcir les dispositifs de lutte contre la fraude, mais il nous faut veiller aussi à préserver les droits fondamentaux des contribuables.

M. le président Gilles Carrez. Depuis plusieurs années, d’un commun accord, nous durcissons la lutte contre la fraude fiscale. Mais des cas comme celui que j’évoquais risquent de saper la confiance des contribuables envers l’État. Comment, en effet, expliquer à nos concitoyens que l’on peut être condamné à une peine de prison alors que l’on n’a pas fraudé le fisc, puisque la juridiction administrative en a définitivement jugé ainsi ? Ayons le courage de le reconnaître : les textes législatifs ne sont pas toujours clairs et l’interprétation qu’en livrent les textes réglementaires donne à réfléchir. Mon rapport d’information annuel en tant que Rapporteur général sur l’application de la loi fiscale l’a montré au cours des dernières années : nombreux sont les textes d’application non publiés ou manifestement contraires à l’intention du législateur.

Mme Sandrine Mazetier. Votre majorité n’a pas eu les mêmes scrupules à inverser l’ordre d’intervention du juge judiciaire et du juge administratif dans le contentieux des étrangers, ce qui a permis de prononcer de nombreuses mesures d’éloignement du territoire sans que le juge des libertés et de la détention ait pu statuer sur la légalité de la privation de liberté. C’était même l’objectif quasi explicite de la réforme.

M. le président Gilles Carrez. On ne justifie pas une injustice par une autre, voyons !

Mme Sandrine Mazetier. Ensuite, je suis surprise que l’on envisage de remettre en cause l’indépendance des deux ordres de juridiction et d’instaurer une prééminence du juge administratif sur le juge judiciaire, et ce par un simple amendement en commission des finances, fût-il déposé par son président.

Je m’étonne enfin que l’on puisse condamner quelqu’un qui n’a rien fait à une peine privative de liberté. Le juge qui a prononcé la peine ne s’est sans doute pas totalement désintéressé de ce que cette personne avait pu faire en matière fiscale.

M. le président Gilles Carrez. Il ne s’y connaissait peut-être pas en fiscalité !

M. Henri Emmanuelli. Depuis plusieurs années, loin de régresser, la fraude fiscale est en forte hausse. Son montant dépasse peut-être même aujourd’hui celui des déficits budgétaires courants que nous avons pu connaître. Les cabinets d’avocats spécialisés en optimisation fiscale se sont développés au niveau national et international. Face à eux, l’administration est de moins en moins bien armée. Olivier Carré a laissé entendre que nous persécuterions le contribuable. Ce n’est pas vrai. N’oublions pas que la fraude fiscale est un délit pénal dans bien d’autres pays ; voyez la législation et les méthodes américaines en la matière. Je ne voterai donc pas cet amendement.

M. Patrick Ollier. Je suis tout à fait d’accord avec M. Emmanuelli pour combattre la fraude fiscale, mais il s’agit ici de dénouer une situation qui confine à l’absurde. Il n’est pas question d’établir la priorité d’un ordre de juridiction sur un autre, mais de faire en sorte que la fraude soit réellement constatée avant qu’une condamnation puisse être prononcée. Cet amendement de bon sens, qui n’a rien de politique, devrait donc être adopté.

M. Henri Emmanuelli. Le cas cité est rarissime !

M. Patrick Ollier. Raison de plus pour voter un amendement qui ne produira peut-être ses effets qu’une fois par an.

M. Éric Woerth. Cet amendement est en effet marqué au coin du bon sens. Au cours des cinq dernières années, nous avons tous pris des mesures visant à lutter plus efficacement contre la fraude fiscale et sociale, dotant l’administration fiscale de pouvoirs et d’outils nouveaux pour faire face aux infractions nationales et internationales. Pourtant, nos concitoyens ont le sentiment que nous ne faisons rien contre la fraude fiscale. Ce problème nous concerne tous, quelle que soit notre appartenance politique. Nous devons montrer que, conformément aux principes de l’État de droit, l’administration dispose des moyens juridiques, financiers et humains d’agir. Or la condamnation au pénal d’un contribuable de bonne foi qui n’est, selon la justice administrative, redevable d’aucun impôt nourrit une incompréhension qui nuit à la lutte contre la véritable fraude.

M. Dominique Lefebvre. Le groupe SRC ne votera pas l’amendement, pour au moins deux raisons. Premièrement, une telle disposition ne doit pas paraître priver la lutte contre la fraude fiscale de l’une de ses armes. Deuxièmement, sans connaître en détail le partage des compétences entre les juges administratif et judiciaire en matière de contentieux fiscal, sans rien savoir du cas d’espèce, j’observe que c’est la chambre criminelle de la Cour de cassation, plus haute instance judiciaire, qui s’est prononcée ici. Quoi qu’il en soit, si l’on doit toucher à la répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction, ce ne saurait être sur un coin de table en commission des finances. Mieux vaudrait, monsieur le président, retirer votre amendement afin d’approfondir ces questions en lien avec la commission des Lois.

M. Christophe Caresche. Sans me prononcer quant au fond, je m’interroge sur la qualité juridique de l’amendement. Comment pourrait-on ne pas appliquer des sanctions qui ont été décidées par une juridiction judiciaire ? En outre, ne risque-t-on pas de remettre en question l’indépendance du juge ?

Mme Arlette Grosskost. Le juge dit le droit, même s’il dispose d’une marge d’interprétation. Nous sommes le législateur, et non une chambre d’enregistrement de la jurisprudence. Ce n’est pas à nous d’interpréter les dires du magistrat.

M. Henri Emmanuelli. Ce n’est pas ce qu’a dit M. Caresche.

M. Charles de Courson. À mon sens, nous ne pouvons pas voter l’amendement en l’état. En effet, il est privé d’effet dans tous les cas où le juge pénal se prononce avant la décision définitive du juge administratif, car l’on ne peut pas revenir sur une décision de justice. Le véritable problème, comme l’indique d’ailleurs l’exposé des motifs, est le champ de compétence du Tribunal des conflits. C’est en étendant ce champ que l’on trouvera une issue à ce type d’affaire, dans le respect de l’indépendance de la magistrature.

M. le président Gilles Carrez. Je suis sensible aux arguments de MM. Lefebvre et de Courson. Les relations complexes entre l’ordre judiciaire et l’ordre administratif sont en effet à l’arrière-plan de cet amendement. Cela étant, le problème reste entier.

M. Henri Emmanuelli. La Cour de cassation s’est prononcée !

M. le président Gilles Carrez. Oui, mais après que le juge administratif a rendu sa décision définitive.

Je suis disposé à retirer mon amendement pour le redéposer au titre de l’article 88, afin de connaître la position du Gouvernement à ce sujet et ses éventuelles propositions. Mais la médiatisation de ce cas pourrait discréditer notre lutte contre la fraude fiscale aux yeux de nos concitoyens.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CF 23 de M. Éric Woerth.

M. Éric Woerth. Aux termes de cet amendement, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur l’exil fiscal qui sera joint au projet de loi de finances chaque année. Sur ce sujet qui nous intéresse tous depuis longtemps, on lit tout et n’importe quoi et les chiffres les plus divers circulent. Le Gouvernement peut seul nous éclairer, malgré la difficulté de l’exercice.

M. le président Gilles Carrez. Je suis cosignataire de cet amendement. La question suscite des rumeurs incessantes, de plus en plus folles, dans la presse et dans différents milieux, dont celui des notaires et des avocats fiscalistes. Au nom de l’intérêt général, il faut y mettre fin en clarifiant la situation. J’ai donc envoyé au ministre un questionnaire qui s’appuie notamment sur le suivi des déclarations d’ISF et surtout, de celles des plus-values latentes au titre de l’exit tax que nous avons instaurée en 2011. Le quitus fiscal ayant été supprimé il y a plusieurs années, nous devons nous doter d’un appareil statistique. Voilà pourquoi je suis également favorable à un rapport.

M. le rapporteur général. Je vous félicite, monsieur le président, d’avoir écrit au ministre pour lui demander des informations – j’aurais pu en faire autant compte tenu des pouvoirs des rapporteurs généraux des commissions des Finances – et j’espère que vous nous communiquerez ses réponses.

M. le président Gilles Carrez. Bien sûr !

M. le rapporteur général. Quant aux rumeurs, certains de ceux qui les alimentent ne seraient-ils pas parmi nous ?

En somme, monsieur le président, vous demandez un « jaune » supplémentaire alors que la LOLF vous fournit déjà en tant que président de la Commission les moyens d’obtenir les informations que vous demandez. Vous précisez en outre vouloir disposer d’« éléments d’appréciation de l’attractivité fiscale de la France ». Mais notre rôle est de faire les lois qui déterminent notre fiscalité, laissant chacun libre d’apprécier ensuite, en ses grade et qualité, l’attractivité fiscale de notre pays.

Avis défavorable.

M. Pascal Terrasse. Nous voulons tous la même chose : la vérité sur les exilés fiscaux – sans oublier ceux qui rejoignent notre territoire national pour des raisons fiscales, par exemple depuis Jersey à la suite des dispositions prises par différents États, comme me le disait tout récemment le directeur de l’autorité financière de l’île. Éric Woerth a raison de vouloir la vérité sur l’exil fiscal et notre président d’interroger le Gouvernement à ce sujet, mais, comme l’a dit le rapporteur général, ce n’est pas en ajoutant un article au projet de loi de finances rectificative qu’ils parviendront à leurs fins. Lorsqu’il aura obtenu tous les renseignements nécessaires, notre président devrait plutôt organiser un débat annuel sur le sujet au sein de notre Commission ; ce serait préférable à un amendement « bavard », si vous me permettez l’expression.

M. le président Gilles Carrez. Monsieur Terrasse, je vous signale que le rapport demandé porte non seulement sur les départs, mais également sur les retours.

Il ne faudrait pas donner l’impression que le Gouvernement, voire la majorité, ne voit pas où est le problème, car sur ce sujet qui intéresse beaucoup tous nos concitoyens, le déni serait la pire attitude à adopter. En s’efforçant d’y voir clair, notre Commission est tout à fait dans son rôle. Voilà pourquoi j’ai envoyé le questionnaire sous mon autorité de président, comptant bien proposer à la Commission de poursuivre ce travail. Voilà également pourquoi nous demandons au Gouvernement un rapport annuel.

M. Jean-François Lamour. Je suis tout à fait d’accord avec le président. En évoquant le déficit d’informations sur les entrées et les départs de contribuables ainsi que l’existence de rumeurs, le rapporteur général et M. Terrasse reconnaissent du reste implicitement l’utilité d’un tel rapport. C’est en obtenant chaque année du Gouvernement des chiffres dont nous pourrons débattre que nous établirons la vérité. La demande est d’autant plus équilibrée qu’elle s’étend à ceux qui, en venant sur notre territoire, en confirment l’attractivité fiscale. En outre, repris chaque année, l’exercice permettra de dégager une tendance.

M. Éric Woerth. La position du rapporteur général est un peu surprenante. Sur ce sujet sans cesse débattu, il s’agit de clarifier la situation, non d’obtenir un énième « jaune ». Du reste, lorsque vous étiez dans l’opposition, vous ne manquiez pas de demander des rapports, que la majorité acceptait quasi systématiquement. Pourquoi, en effet, ne pas chercher à travailler dans de meilleures conditions ? Pourquoi ne pas tordre le cou aux rumeurs ? Mais pour y parvenir, il nous faut des données. À chacun d’en tirer ensuite les conséquences politiques qu’il voudra ! La fiscalité, l’attractivité fiscale du territoire, le patriotisme fiscal, enjeux essentiels pour l’avenir qui sont débattus publiquement, doivent l’être à la lumière d’éléments fournis par le Gouvernement, dont la teneur et le mode de calcul soient indiscutables. Il ne suffit pas que le président de la commission des Finances demande ponctuellement tel ou tel document ; les données devraient être sur la place publique.

M. Charles de Courson. Je suis favorable à cet amendement. Il nous a fallu plusieurs mois, voire plusieurs années pour obtenir, à propos de l’ISF du moins, une estimation du nombre de départs et de retours. Reste le problème de ceux qui sont partis pour ne pas être assujettis à cet impôt.

M. le président Gilles Carrez. L’exit tax permet d’en savoir plus.

M. Charles de Courson. Si nos collègues sont indisposés par le dernier membre de phrase – « avoir des éléments d’appréciation de l’attractivité fiscale de la France » –, je propose de le supprimer par un sous-amendement.

Lorsque l’on nous demande combien de Français sont partis pour échapper à l’ISF, nous ne sommes pas en mesure de répondre. Et combien reviennent ? Les chiffres qui nous ont été fournis font état d’environ 800 départs et de 300 à 400 retours, mais quelles en sont les causes ? Nous avons besoin de ces données.

M. le président Gilles Carrez. L’ISF fait l’objet d’une déclaration annuelle. Aujourd’hui, nous ne connaissons pas encore les mouvements correspondant à l’année 2010, alors qu’il serait normal de disposer aujourd’hui, fin novembre 2012, des données pour 2011. Je suis donc favorable au sous-amendement de M. de Courson.

Soyons raisonnables : pourquoi pas un « jaune » sur les départs et retours pour raisons fiscales ? Notre majorité avait bien accepté en son temps un « jaune » sur la lutte contre le changement climatique !

M. le rapporteur général. Je suis défavorable à votre amendement, monsieur le président, même sous-amendé par M. de Courson. Savez-vous, mes chers collègues, qu’il existe depuis 2009 un « jaune » sur la fraude fiscale ? Qui en a fait état au cours des derniers débats ? Personne ! Depuis que je siège ici, je n’en ai jamais entendu parler. Faut-il vraiment en demander un de plus ? Vous faites valoir que celui qui existe n’est pas exploitable. Ce qui implique le cas échéant que l’on demande un nouveau rapport, puis un rapport considéré comme exploitable, puis des modifications, etc.

Le Gouvernement vous a récemment fourni les données précises relatives aux niches fiscales que vous lui aviez demandées.

M. le président Gilles Carrez. Ce qui vous a aidé, monsieur le rapporteur général, à soumettre les SOFICA au plafond !

M. le rapporteur général. Je ne vous reproche pas d’avoir formulé cette demande, monsieur le président. Je vous ai d’ailleurs remercié d’avoir adressé au Gouvernement un questionnaire sur l’exil fiscal – pour ne pas dire la fraude. Simplement, vous pouvez avoir tous les chiffres que vous souhaitez, même s’il peut être nécessaire de s’y reprendre à deux fois, ce qui n’a rien de nouveau. Continuons ainsi. Pourquoi un rapport de plus ?

M. Éric Woerth. Monsieur le rapporteur général, vous n’êtes pas comptable du surcroît de travail que notre amendement va demander au Gouvernement : vous êtes le Parlement, non le porte-parole du Gouvernement en son sein ! Il est bien naturel que la commission des Finances puisse obtenir des données, qu’il nous appartient d’exploiter ensuite ou non. Sur un sujet aussi important, l’on ne peut se contenter de dire qu’un rapport de plus ne servira à rien – à moins d’avoir intérêt à faire obstacle à la transparence, ce qui serait très regrettable.

M. Alain Fauré. Monsieur le président, je regrette que votre amendement ait été présenté à la presse comme un carton rouge adressé au Gouvernement. Si vous n’en aviez pas fait état à l’extérieur de cette manière provocatrice, nous aurions pu envisager de le voter.

La Commission rejette l’amendement.

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Article 9

Lutte contre la fraude TVA sur la vente de véhicules d’occasion

Texte du projet de loi :

I.– Après le 4 bis de l’article 283 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 4 ter. L’assujetti en faveur duquel a été effectuée une livraison de véhicules terrestres à moteur et qui savait ou ne pouvait ignorer que tout ou partie de cette livraison ou de toute livraison antérieure des mêmes véhicules ne pouvait pas bénéficier du régime prévu à l’article 297 A est solidairement tenu d’acquitter la taxe frauduleusement éludée avec tout assujetti partie à cette livraison ou à toute livraison antérieure des mêmes véhicules. »

II.– Le I est applicable aux livraisons effectuées à compter du 1er janvier 2013.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article vise à améliorer les moyens de lutter contre la fraude importante qui se développe depuis plusieurs années sur le marché intra-communautaire des véhicules d’occasion. Cette fraude s’appuie sur une utilisation abusive du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge. L’objectif recherché par les opérateurs est d’imposer à la TVA, en France, la revente d’un véhicule non pas sur le prix de vente total, mais sur la marge bénéficiaire.

I.– LE DROIT EXISTANT

Les opérations portant sur les véhicules d'occasion sont en principe soumises au régime général des objets d'occasion.

Aux termes de l'article 98 A de l'annexe III du code général des impôts (CGI), sont considérés comme biens d'occasion les biens meubles corporels ayant déjà fait l'objet d'une utilisation mais susceptibles de réemploi, en l'état ou après réparation, quels que soient, pour les véhicules, leur kilométrage ou la date de leur première mise en circulation. Toutefois, l'article 298 sexies du CGI donne une définition spéciale des moyens de transport neufs en matière d'échanges intracommunautaires. Corrélativement, dans le cas de livraisons ou d'acquisitions intracommunautaires, sont considérés comme des véhicules automobiles d'occasion les véhicules qui sont livrés plus de six mois après leur première mise en service et qui ont parcouru plus de 6 000 kilomètres.

Pour les livraisons intracommunautaires de véhicules d’occasion, la TVA est en principe exigible sur la marge, conformément à l’article 297 A du CGI, sauf si le bien livré a déjà ouvert droit à déduction.

Un négociant français achète des véhicules d’occasion auprès d’un fournisseur établi dans un État membre qui délivre une facture indiquant l’application du régime de la marge. Or ce fournisseur, qui n’a pas d’autre rôle que celui de société écran, a lui-même acquis le véhicule auprès d’un négociant établi dans un autre pays de l’Union selon le régime général de TVA, c’est-à-dire en payant et en récupérant la TVA sur la totalité du prix. Dans ce cas, le fournisseur ne peut pas normalement appliquer le régime de TVA sur la marge et il doit facturer la TVA sur la totalité du prix.

Le véhicule, souvent issu d’un parc de loueur automobile, est lui directement livré de ce pays en France sans transiter par le pays de la société écran. Comme pour les schémas « carrousélistes », la fraude tend à se sophistiquer par l’interposition supplémentaire d’une ou deux structures écrans en France destinées à protéger le négociant final, généralement un concessionnaire, principal bénéficiaire de la fraude.

S’il est difficile de chiffrer les pertes de recettes pour les finances publiques, la TVA éludée s’élève probablement à quelques centaines de millions d’euros.

II.– LE DROIT PROPOSÉ

Le Conseil d’État (36) autorise la remise en cause du régime d’imposition sur la marge si ce régime n’était pas applicable et si l’administration fiscale peut démontrer que l’acquéreur savait, ou ne pouvait ignorer, que son fournisseur n’était lui-même pas autorisé à appliquer ce régime d’imposition.

Le présent article prévoit de rendre solidaire du paiement de la taxe frauduleusement éludée l’assujetti en faveur duquel a été effectuée une livraison de véhicules terrestres à moteur et qui savait, ou ne pouvait ignorer, que tout ou partie de cette livraison ou de toute livraison antérieure des mêmes véhicules ne pouvait pas bénéficier du régime de la marge. Il complète en ce sens l’article 283 du CGI, qui fixe les exceptions au principe selon lequel la TVA doit être acquittée par les personnes qui réalisent les opérations imposables.

Cette mesure devrait améliorer le recouvrement de la TVA, puisque le premier acquéreur français du véhicule, auprès duquel l’administration remet en général en cause le bénéfice du régime de la TVA sur la marge, est souvent sans consistance économique et insolvable.

Elle s’appliquerait aux livraisons effectuées à compter du 1er janvier 2013.

Source : ministère du Budget.

Une disposition similaire est déjà prévue par le 4 bis de l’article 283 du CGI, qui prévoit une solidarité entre les différents acteurs de la chaîne de déduction en cas de fraude de type carrousel. Toutefois, elle ne s’applique pas pour les fraudes sur les véhicules d’occasion car elle suppose le non reversement d’une TVA facturée par un fournisseur. Or, dans le schéma de fraude au régime de TVA sur la marge, le premier acquéreur n’est pas défaillant puisqu’il a en règle générale acquitté la TVA, mais sur la marge.

Le présent article reprend l’obligation, issue de la jurisprudence, pour l’administration de démontrer que l’assujetti solidairement tenu au paiement de la taxe éludée savait ou ne pouvait ignorer que son fournisseur n’était pas autorisé à appliquer le régime de la TVA sur la marge.

Cette condition limite la portée de la réforme, mais est nécessaire au regard du droit communautaire, qui voit dans toute règle de solidarité une atteinte à la neutralité économique de la TVA. Conformément au principe de personnalité des peines, la solidarité porte sur le paiement de la taxe mais pas sur les pénalités.

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La Commission adopte l’article 9 sans modification.

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Après l’article 9

La Commission est saisie de l’amendement CF 37 de M. Marc Le Fur, portant article additionnel après l’article 9.

Mme Marie-Christine Dalloz. Il s’agit d’harmoniser les taux de TVA applicables à un produit que nombre de nos concitoyens jugent de première nécessité : le café, le « petit café ». Alors que 14 millions de boissons chaudes sont préparées et consommées chaque jour, il y a lieu de s’étonner de la disparité entre le taux de 5,5 % applicable à l’achat du café ou de la poudre à café et la taxation à 7 % du café préparé dans un estaminet.

M. le rapporteur général. Je suis évidemment défavorable à cet amendement, dont l’exposé sommaire est édifiant.

L’un des amendements du Gouvernement que nous examinerons cet après-midi porte sur la modification des taux de TVA et engage quelque six milliards d’euros. Nous devrons le sous-amender, notamment pour tenir compte du fait qu’une part de la TVA est affectée aux recettes de la sécurité sociale, des effets de la mesure sur les collectivités territoriales, et pour moduler les taux sur certains produits ou services. Or je doute qu’il soit possible de le faire avant l’examen du texte en séance publique, prévu lundi. Puisque les modifications des taux de TVA ne s’appliqueront qu’à compter du 1er janvier 2014, nous pourrons attendre un prochain collectif et, au plus tard, le projet de loi de finances initiale pour 2014 pour en reparler s’agissant du café, du logement social, de la restauration, de l’assainissement, des transports publics, etc. Je ne souhaite pas que nous légiférions en quelques jours sur ces importantes questions qui appellent une analyse précise et chiffrée. Nous sommes assez souvent contraints de travailler en très peu de temps sur des sujets majeurs pour nous abstenir de le faire lorsque cela est possible.

M. le président Gilles Carrez. Je soutiens pleinement cette position. J’étais rapporteur général lorsque la TVA sur certains produits a été portée de 5,5 à 7 %, dans le cadre du collectif budgétaire de décembre 2011, et je peux témoigner de l’extrême complexité des problèmes de coordination avec la loi de financement de la sécurité sociale, ainsi que d’harmonisation de la fiscalité sur un même type de produits. Nous devrons y travailler au cours de l’année 2013, par exemple, en effet, à l’occasion d’un prochain collectif.

Mme Karine Berger. Je partage l’analyse du rapporteur général : il est impossible dans le délai proposé à la commission des Finances et à l’Assemblée nationale d’entrer dans le détail des mesures – pourtant de portée considérable – inscrites dans ce collectif.

Toutefois, dans certains secteurs touchés par la hausse de TVA envisagée, l’horizon temporel des contrats conclus par les entreprises peut être éloigné. C’est le cas, en particulier, des décisions de construction de logements sociaux, qui doivent intégrer les prévisions de rentabilité à long terme.

Le raisonnement du rapporteur général et du président vaut pour la très grande majorité des secteurs. Il faudra néanmoins tenir compte, dès 2013, des mises en chantier déjà décidées, qui connaissent d’ailleurs des difficultés.

M. le président Gilles Carrez. C’est ce que rappelait très justement notre collègue Jean-Louis Dumont lors de l’examen du collectif de décembre 2011.

M. le rapporteur général. S’agissant des mises en chantier déjà décidées, le Gouvernement a prévu des mesures transitoires, qui répondent à la préoccupation légitime de Mme Berger.

M. Dominique Lefebvre. Nous devons rejeter cet amendement pour les raisons indiquées par le rapporteur général. Le Gouvernement engage une réforme en profondeur de la TVA. En fixant les trois taux à 5 %, 10 % et 20 %, il simplifie et modernise son architecture. Les mesures ponctuelles telles que celle prévue par cet amendement – sur le cas typique d’un produit qui n’est pas taxé de la même manière selon qu’il est acheté en magasin ou consommé dans d’autres conditions – n’iraient pas dans le sens de la cohérence.

En outre, la hausse de la TVA vise à financer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Compte tenu de la situation des finances publiques, nous ne pouvons et ne pourrons réformer la TVA qu’à rendement constant. Après l’adoption des amendements du Gouvernement, nous prendrons le temps nécessaire pour procéder à des réajustements entre les différents taux de TVA en respectant cette condition.

Mme Marie-Christine Dalloz. J’entends bien l’argumentation du rapporteur général. Je me propose de faire de l’amendement CF 37 un sous-amendement à l’amendement correspondant du Gouvernement après l’article 24.

M. le président Gilles Carrez. Il devrait en effet être possible de le présenter sous cette forme.

L’amendement CF 37 est retiré.

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* *

Article 10

Marquage obligatoire et traçabilité des produits du tabac. Consolidation
du dispositif des « coups d’achat » sur Internet

Texte du projet de loi :

I.– Le code général des impôts est modifié comme suit :

A.– Après l'article 564 undecies, il est inséré un article 564 duodecies ainsi rédigé :

« Art. 564 duodecies.– 1. Les paquets, cartouches et tous conditionnements de cigarettes sont, lors de leur importation, introduction, exportation, expédition ou commercialisation, revêtus d'une marque d'identification unique, sécurisée et indélébile, qui permet de garantir leur authentification et leur traçabilité ainsi que d'accéder à des informations relatives aux mouvements de ces cigarettes.

« Les informations mentionnées au premier alinéa sont contenues dans des traitements automatisés de données à caractère personnel mis en œuvre par et aux frais des personnes se livrant aux activités mentionnées au premier alinéa. Ces traitements, lorsqu'ils sont établis en France, sont soumis aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Les personnes responsables de ces traitements ont l'obligation d’informer les personnes concernées par lesdits traitements.

« 2. Toute personne responsable du traitement mentionné au 1 est tenue de s'assurer de la fiabilité des informations afin d'établir le lien entre le produit revêtu de la marque et lesdites informations.

« 3. Les informations mentionnées au second alinéa du 1 sont conservées pendant un délai de trois ans à compter de leur intégration dans le traitement.

« 4. Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, fixe les conditions d'apposition de la marque d'identification unique et détermine les catégories de données faisant l'objet du traitement informatique ».

B.– À l'article 1825, le mot : « prévues » est remplacé par le mot : « mentionnées » et les mots : « de huit jours » sont remplacés par les mots : « ne pouvant excéder trois mois ».

II.– Au titre II de la première partie du livre des procédures fiscales, après le chapitre I quater, il est inséré un chapitre I quinquies ainsi rédigé :

« Chapitre I quinquies. – Consultation des traitements automatisés de données concernant le marquage des produits du tabac

« Art. L 80 N.- 1. Pour rechercher et constater les infractions prévues par le code général des impôts en matière de tabac, les agents de l'administration des douanes de catégorie A et B ont accès aux informations contenues dans les traitements prévus par l'article 564 duodecies du code général des impôts, au moyen de la marque d'identification unique, sécurisée et indélébile mentionnée à cet article.

« Les frais occasionnés par l'accès à ces traitements sont à la charge des personnes responsables de ces traitements se livrant aux activités mentionnées au premier alinéa de l'article 564 duodecies du code général des impôts.

« En cas de constatation d'une infraction, le résultat de la consultation mentionnée au deuxième alinéa est indiqué sur tout document, quel qu'en soit le support, annexé au procès-verbal constatant l'infraction.

« 2. Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, fixe les modalités d'accès aux données mentionnées au 1, par les agents de l'administration des douanes mentionnés au 1. »

III.– Le code des douanes est ainsi modifié :

A.– À l'article 67 bis-1 :

1° Au premier alinéa, après les mots : « aux seules fins de constater l'infraction », sont insérés les mots :

« d'importation, d'exportation ou » ;

2° Après le troisième alinéa, sont insérés six alinéas ainsi rédigés :

« 3° Lorsque l'infraction est commise par un moyen de communication électronique, faire usage d'une identité d'emprunt en vue de l'acquisition des produits stupéfiants.

« Dans ce cadre, les agents des douanes habilités peuvent également :

« a) Participer sous un pseudonyme à des échanges électroniques,

« b) Être en contact par ce moyen avec les personnes susceptibles d'être les auteurs de l'infraction,

« c) Extraire, acquérir ou conserver par ce moyen des données sur les personnes susceptibles d'être les auteurs de l'infraction ainsi que les comptes bancaires utilisés.

« L'exonération de responsabilité prévue au premier alinéa est également applicable, pour les actes commis à seule fin de procéder à l'opération d'acquisition, aux personnes requises par les agents des douanes pour permettre la réalisation de cette opération. » ;

3° Après le quatrième alinéa, est inséré l'alinéa suivant :

« La révélation de l'identité d'emprunt des agents des douanes ayant effectué l'acquisition est passible des peines prévues au V de l'article 67 bis du présent code. » ;

4° Au dernier alinéa après les mots : « aux fins de constatation de l'infraction », sont insérés les mots : « d'importation, d'exportation ou » et après les mots : « de détention de », sont insérés les mots : « tabac manufacturé et de ».

B.– Après le chapitre IV du titre II, il est inséré un chapitre IV bis ainsi rédigé :

« Chapitre IV bis.– Consultation des traitements automatisés de données aux fins de contrôles douaniers.

« Art. 67 quinquies.– Pour rechercher et constater les infractions prévues par le présent code en matière de tabac, les agents de l'administration des douanes ont accès aux informations contenues dans les traitements prévus par l'article 564 duodecies du code général des impôts, dans les conditions prévues par l'article L. 80 N du livre des procédures fiscales.

« En cas de constatation d'une infraction, le résultat de la consultation des informations mentionnées au premier alinéa est indiqué sur tout document, quel qu'en soit le support, annexé au procès-verbal constatant l'infraction ».

Observations et décision de la Commission :

Le présent article a pour objet de renforcer les moyens de lutte contre le commerce illégal de produits du tabac.

Pour ce faire, trois types de mesures sont proposés :

– l’instauration d’un système de marquage des paquets de cigarettes, permettant d’en assurer la traçabilité ;

– le renforcement des moyens juridiques des agents des douanes réalisant des « coups d’achat » sur Internet, notamment en leur permettant d’utiliser une identité d’emprunt ;

– l’allongement de huit jours à trois mois de la durée de fermeture des établissements dans lesquels a été constatée une infraction à la législation sur le tabac.

L’impact sur les ressources publiques, qui devrait être positif, n’est toutefois pas chiffrable.

I.– LA CRÉATION D’UN SYSTÈME DE MARQUAGE DES CIGARETTES

L’article 15 de la convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la lutte anti-tabac (entrée en vigueur le 27 février 2005) stipule que « chaque Partie adopte et applique des mesures législatives, exécutives, administratives ou autres mesures efficaces pour faire en sorte que tous les paquets et cartouches de produits du tabac et toutes les formes de conditionnement extérieur de ces produits comportent une marque pour aider les Parties à déterminer l’origine des produits du tabac et, conformément à la législation nationale et aux accords bilatéraux ou multilatéraux pertinents, pour aider les Parties à déterminer le point où intervient le détournement et à surveiller, suivre et contrôler le mouvement des produits du tabac et leur statut en droit ».

Chaque État partie envisage à cette fin « la mise en place d’un régime pratique permettant de suivre et de retrouver la trace des produits de manière à rendre le système de distribution plus sûr et de contribuer aux enquêtes sur le commerce illicite ».

Un protocole additionnel à cette convention a été adopté le 12 novembre dernier à Séoul ; selon les termes du communiqué de presse de l’OMS (37), ce protocole « engage les pays à instaurer un système mondial de suivi et de traçabilité, mesure cruciale pour réduire le commerce illicite des produits du tabac ».

Anticipant un processus de ratification dont elle ne précise pas le calendrier, l’évaluation préalable annexée au présent article indique que celui-ci a notamment « pour objet la mise en œuvre de la convention-cadre précitée et le [sic] protocole qui sera ratifié par la France ». Le protocole sera ouvert à la signature à compter de janvier prochain.

Cette mise en œuvre appelle la création d’un nouvel article dans le code général des impôts (CGI), ainsi que d’un nouveau chapitre dans le livre des procédures fiscales (LPF) comme dans le code des douanes.

Le A du I du présent article introduit dans le CGI un nouvel article 564 duodecies, qui prévoit un système de repérage et de traçabilité des cigarettes. Selon l’exposé des motifs, un tel système devrait « permettre aux autorités de surveiller les mouvements des produits du tabac fabriqués légalement [et] de repérer les produits contrefaits ».

● Le 1 de ce nouvel article définit le champ, les modalités et les objectifs du marquage (alinéas 3 et 4). Doivent être marqués « les paquets, cartouches et tous conditionnements de cigarettes », c’est-à-dire l’emballage des cigarettes ou des paquets, et non les cigarettes elles-mêmes. Les conditionnements évoqués par le texte sont en fait les cartons contenant les paquets et les cartouches, eux-mêmes marqués. Par commodité, le terme « paquets » sera employé ci-après pour désigner toutes les formes de conditionnement.

● Le marquage a lieu lors de l’importation, de l’introduction, de l’exportation, de l’expédition ou de la commercialisation des paquets. Il faut rappeler ici que les termes « introduction » et « expédition » désignent respectivement l’importation et l’exportation d’un produit au sein de l’Union européenne. Cela signifie donc que tout paquet de cigarettes entrant en France, en sortant ou y étant commercialisé doit être marqué ; l’ensemble des paquets circulant sur le territoire est concerné.

● La marque d’identification des paquets doit être « unique, sécurisée et indélébile ». Aucun des termes employés ne pose de difficultés de définition, mais il aurait été utile que l’évaluation préalable fournisse des exemples concrets de marques d’identification répondant à ces critères. Il a été indiqué au Rapporteur général que la marque prendra la forme d’un code apposé sur les paquets.

● La marque doit permettre :

– de garantir l’authentification et la traçabilité des paquets ;

– d’accéder à des informations relatives aux mouvements des cigarettes.

Le premier objectif assigné à la marque ne soulève pas d’interrogation particulière. Il n’aurait pas été inutile que l’évaluation préalable prenne la peine de préciser le second. Selon les informations transmises au Rapporteur général, le code apposé sur les paquets permettra de retracer la « vie » des cigarettes depuis leur fabrication ou leur entrée sur le territoire français, jusqu’à leur première sortie du territoire. La liste des informations est en réalité déjà fixée, par l’article 8 du protocole précité (cf. encadré ci-dessous).

Informations relatives aux mouvements des cigarettes auxquelles la marque d’identification doit permettre d’accéder (4.1 de l’article 8 du protocole)

a) La date et le lieu de fabrication

b) L’unité de fabrication

c) La machine utilisée pour fabriquer les produits du tabac

d) L’équipe de production ou l’heure de fabrication

e) Le nom du premier acheteur qui n’est pas affilié au fabricant, le numéro de facture, le numéro de commande et l’état de paiement

f) Le marché sur lequel le produit est destiné à être vendu au détail

g) La description du produit

h) L’entreposage et l’expédition du produit, le cas échéant

i) L’identité de tout acheteur ultérieur connu

j) L’itinéraire prévu, la date d’expédition, la destination, le point de départ et le destinataire

 Il est précisé que les informations relatives aux mouvements des paquets de cigarettes « sont contenues (38) dans des traitements automatisés de données à caractère personnel » (alinéa 4).

L’article 2 de la loi dite « Informatique et libertés » (39) définit le traitement de données à caractère personnel comme « toute opération ou tout ensemble d’opération portant sur de telles données, quel que soit le procédé utilisé, et notamment la collecte, l’enregistrement, l’organisation, la conservation, l’adaptation ou la modification, l’extraction, la consultation, l’utilisation, la communication par transmission, diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l’interconnexion, ainsi que le verrouillage, l’effacement ou la destruction ».

Le même article définit la donnée à caractère personnel comme « toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être identifiée, directement ou indirectement, par référence à un numéro d’identification ou à un ou plusieurs éléments qui lui sont propres ».

Considérer les informations relatives aux mouvements de paquets de cigarettes comme des données à caractère personnel présuppose que ces mouvements font intervenir des personnes physiques identifiables. Il en résulte que la marque d’identification devra permettre d’identifier les individus opérant les mouvements des paquets de cigarettes. En cas d’expédition d’une palette de cartouches d’une société A située en France vers une société B située en Allemagne, la marque doit permettre de savoir qui, au sein de la société A a expédié la palette.

● Il est précisé que les traitements automatisés sont mis en œuvre par et aux frais des personnes se livrant aux activités d’importation, introduction, exportation, expédition et commercialisation des paquets de cigarettes. Le texte ne précise pas qui doit apposer la marque d’identification, l’obligation de marquage pesant en réalité sur le produit : un produit marqué peut circuler sur le territoire, quelle que soit la personne qui a procédé au marquage ; un produit non marqué ne le peut pas.

● Le texte indique que lorsque les traitements automatisés sont établis en France, ils sont soumis aux dispositions de la loi Informatique et libertés. Les garanties offertes par cette loi aux personnes physiques ne s’appliqueraient donc pas – ce qui est conforme au principe général de territorialité de la loi – aux traitements établis hors de France.

● Le texte indique en revanche que les personnes responsables des traitements ont l’obligation d’informer les personnes concernées par les traitements.

Dans le silence du texte, il est permis de penser que le responsable est défini comme à l’article 3 de la loi Informatique et libertés : « Le responsable d'un traitement de données à caractère personnel est, sauf désignation expresse par les dispositions législatives ou réglementaires relatives à ce traitement, la personne, l'autorité publique, le service ou l'organisme qui détermine ses finalités et ses moyens ».

● Ce responsable doit en tout état de cause « s’assurer de la fiabilité des informations afin d’établir le lien entre le produit revêtu de la marque et lesdites informations » (2 du nouvel article – alinéa 5). L’exposé des motifs indique sobrement à ce sujet qu’« un traitement informatisé des données sera tenu par les professionnels du secteur. […] Le responsable du traitement doit pouvoir assurer la fiabilité des informations qu’il contient, grâce à un système de contrôle interne ».

Si l’on essaie d’illustrer cette disposition qui demeure imprécise, elle semble signifier que le dirigeant de la société A précédemment évoquée doit être en mesure de garantir, donc de vérifier, que l’indication d’un mouvement de la palette de cigarettes expédiée en Allemagne – recueillie au moyen du traitement automatisé mis en place par lui – correspond bien à la réalité.

● Le délai de conservation des informations sur les mouvements des paquets ne peut excéder trois ans ; il est décompté au moment de leur intégration dans le traitement automatisé (3 du nouvel article – alinéa 6).

● Le 4 du nouvel article (alinéa 7) prévoit qu’un décret en Conseil d’État (pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (40)) « fixe les conditions d’apposition de la marque d’identification unique et détermine les catégories de données faisant l’objet du traitement informatique ».

La notion de « traitement informatique » n’étant pas préalablement employée dans le texte, il faut sans nul doute entendre par là les traitements automatisés de données. Les « catégories de données » seront celles mentionnées à l’article 8 du protocole.

L’évaluation préalable indique qu’« un cahier des charges concernant ce marquage a été élaboré avec les acteurs du secteur du tabac », et que le décret en Conseil d’État « devra prévoir un délai de deux ans pour l’application de l’authentification des cigarettes et un délai de cinq ans pour l’application pour la traçabilité des cigarettes ».

Le II du présent article introduit un chapitre I quinquies dans le LPF, composé d’un article unique L. 80 N.

● Ce nouvel article prévoit en son 1 que les agents des douanes de catégorie A et B ont accès aux informations contenues dans les traitements automatisés de données prévues par le nouvel article 564 duodecies du CGI (alinéa 11). Le texte précise que l’accès aux informations se fait « au moyen de la marque d’identification unique, sécurisée et indélébile ».

L’accès aux informations par les agents des douanes doit avoir pour objet de rechercher et constater les infractions prévues par le code général des impôts « en matière de tabac ».

● Il est précisé que les frais occasionnés par l’accès aux traitements de données automatisés sont à la charge des personnes responsables (alinéa 12). Selon les informations recueillies par le Rapporteur général, les frais en question sont ceux afférents à la constitution d’une interface d’accès pour l’administration.

● Lorsque la consultation des informations contenues dans le traitement de données permet de constater une infraction, il est prévu d’annexer le résultat de la consultation au procès-verbal. C’est ce qui doit être compris de la formulation de l’alinéa 13.

● Le 2 du nouvel article L. 80 N (alinéa 14) prévoit utilement qu’un décret en Conseil d’État (pris après avis de la CNIL) fixe les modalités d’accès « aux données mentionnées au 1 » ; le terme « données » n’étant pas employé au 1, il faut comprendre qu’il s’agit des informations contenues dans les traitements automatisés.

Le B du III du présent article introduit dans le code des douanes un nouveau chapitre IV bis, composé d’un article unique 67 quinquies.

Il s’agit quasiment d’un article de coordination, qui permet à l’ensemble des agents des douanes (et, vraisemblablement du fait d’une erreur de rédaction, pas seulement aux agents de catégorie A et B) d’accéder aux informations contenues dans les traitements automatisés prévus à l’article 564 duodecies du CGI, afin de rechercher et constater les infractions prévues par le code des douanes « en matière de tabac ».

L’accès se fait dans les conditions prévues à l’article L. 80 N du LPF (alinéa 31). La précision relative à la consignation des résultats de la consultation sur le procès-verbal est donc formulée dans les mêmes termes (alinéa 32).

II.– LE RENFORCEMENT DES MOYENS JURIDIQUES À DISPOSITION DES DOUANES EN CAS DE « COUP D’ACHAT »

L’article 67 bis-1 du code des douanes permet à des agents habilités par le ministre chargé des douanes d’être déchargés de toute responsabilité pénale lorsqu’ils se livrent à certaines activités illicites aux fins « de constater l’infraction de détention de produits stupéfiants, d’en identifier les auteurs et d’effectuer les saisies ». Soumis à autorisation du procureur de la République, les actes en question consistent :

– à acquérir des produits stupéfiants (1° de l’article 67 bis-1) ;

– à mettre des moyens à disposition de personnes se livrant à l’infraction, afin de leur permettre d’acquérir des produits stupéfiants (2°).

Cette technique dite de « coup d’achat » est également permise afin de constater l’infraction de détention de marchandises contrefaites.

Le A du III du présent article étend le champ de ce dispositif, dans une perspective de « consolidation des pouvoirs mis en œuvre par le service spécialisé "Cyberdouane" » (exposé des motifs). Les modifications proposées entreront en vigueur à la promulgation de la présente loi de finances.

● Le 1° du A (alinéas 17 et 18) étend le mécanisme du coup d’achat aux actes réalisés afin de constater les infractions d’importation et d’exportation des produits stupéfiants, au-delà de la seule infraction de détention.

● Le 4° (alinéa 28) procède à la même extension s’agissant des marchandises contrefaites.

Il élargit en outre le dispositif, au-delà des marchandises contrefaites, au tabac manufacturé. L’intention du texte est de permettre de réaliser des coups d’achat de tabac non contrefait mais importé, exporté ou détenu illégalement. L’évaluation préalable justifie ainsi la mesure par « l’augmentation de la vente de cigarettes authentiques en ligne ». Mais du fait de la rédaction proposée, le dernier alinéa de l’article 67 bis-1 consacrerait une « infraction d’importation, d’exportation ou de détention de tabac manufacturé », ce qui pourrait être lu comme l’instauration d’une prohibition générale du tabac dans notre pays.

● Le 2° ajoute un troisième cas d’exonération de responsabilité pénale (en plus de l’acquisition de produits stupéfiants et de la mise à disposition de moyens en vue de cette acquisition) : utiliser une identité d’emprunt en vue d’acquérir des produits stupéfiants « lorsque l’infraction est commise par un moyen de communication électronique » (3° nouveau de l’article 67 bis-1 – alinéa 20).

Il va sans dire qu’un moyen de communication, aussi sophistiqué soit-il, ne saurait par sa propre volonté se rendre coupable d’une quelconque infraction. Il faut donc en déduire que l’intention du Gouvernement consiste à viser les cas où l’infraction est commise en ayant recours à un moyen de communication électronique. Dans ce cas, les agents des douanes pourront utiliser une identité d’emprunt pour acquérir des produits stupéfiants.

● Le texte autorise également les agents des douanes à utiliser un pseudonyme électronique pour participer à des échanges électroniques (alinéa 22), à être en contact avec les potentiels auteurs d’infraction (alinéa 23), à collecter des données sur ces auteurs et sur les comptes bancaires utilisés (alinéa 24).

Il faut comprendre de la rédaction retenue que ces possibilités sont ouvertes uniquement lorsque l’infraction est commise en ayant recours à un moyen de communication électronique. L’alinéa 21, qui commande les trois alinéas suivants, prévoit le recours aux possibilités qu’ils ouvrent « dans ce cadre », le cadre en question étant celui du nouveau 3°. Il est donc explicitement prévu que, pour préparer un achat de produits illicites via Internet, les agents des douanes puissent utiliser un pseudonyme ; c’est déjà le cas en pratique, fort heureusement pour la sécurité des agents concernés. L’apport juridique de ces alinéas est donc limité.

● Le 2° du A du III du présent article étend l’exonération de responsabilité pénale aux personnes requises par les agents des douanes pour procéder à l’acquisition (alinéa 25). L’évaluation préalable indique que les personnes requises pourraient être « par exemple, des banques ou des services postaux qui par leur concours permettent aux agents habilités de procéder aux opérations de coups d’achat ». L’exonération de responsabilité des personnes requises est déjà prévue dans le cadre du régime de l’infiltration douanière, prévu à l’article 67 bis du code des douanes.

● Le 3° punit « la révélation de l’identité d’emprunt des agents des douanes ayant effectué l’acquisition » (alinéa 27). La seule référence à une identité d’emprunt étant celle introduite par le 2°, il faut en déduire que seule la révélation de l’identité d’un agent réalisant un coup d’achat en ligne serait répréhensible.

Les peines sont définies par référence au V de l’article 67 bis, qui prévoit au minimum cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende en cas de révélation de l’identité d’un agent des douanes infiltré.

III.– L’ALLONGEMENT DE LA DURÉE DE FERMETURE DES ÉTABLISSEMENTS DANS LESQUELS EST CONSTATÉE UNE FRAUDE À LA LÉGISLATION SUR LES TABACS

En application de l’article 1825 du CGI, les préfets peuvent prendre, sur proposition du directeur régional des douanes (41), un arrêté de fermeture, pour huit jours, d’un établissement dans lequel a été constatée la fabrication ou la modification illégale d’alcool, la détention ou la vente frauduleuse de métaux précieux, ainsi que la fabrication, la détention, la vente ou le transport frauduleux de tabac (42).

L’évaluation préalable indique que la mise en œuvre de cette disposition « a mis en lumière le caractère insuffisamment dissuasif de la durée de fermeture ».

Le B du II (alinéa 8) prévoit donc, outre une opportune modification rédactionnelle, de porter la durée de fermeture de huit jours à un maximum de trois mois. L’intention est clairement d’allonger la durée de fermeture. Il faut cependant relever qu’il sera désormais possible, le cas échéant, à l’administration de décider d’une durée de fermeture plus brève que le « forfait » actuel de huit jours.

Dans le silence du texte, la modification proposée entre en vigueur à la promulgation de la loi.

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La Commission adopte l’article 10 sans modification.

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Article 11

Présentation obligatoire de la comptabilité sous forme dématérialisée
dans le cadre d’une vérification de comptabilité

Texte du projet de loi :

I.– Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

A.– Au I de l'article L. 47 A :

1° À la première phrase :

a. Les mots : « peut satisfaire » sont remplacés par le mot : « satisfait » ;

b. Après les mots : « en remettant » sont insérés les mots : « au début des opérations de contrôle » ;

2° Après la première phrase, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le premier alinéa s’applique également aux fichiers des écritures comptables de tout contribuable soumis par le code général des impôts à l’obligation de tenir et de présenter des documents comptables autres que ceux mentionnés au premier alinéa de l’article 54 du même code, et dont la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés. » ;

3° Les deuxième et troisième phrases constituent un troisième alinéa ;

4° À la troisième phrase, après le mot : « contribuable », sont insérés les mots : « , à la demande de ce dernier ».

B.– Au début du III de l’article L. 52, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : 

« 1. En cas de mise en œuvre du I de l’article L. 47 A, le délai de trois mois prévu au présent I est suspendu jusqu'à la remise de la copie des fichiers des écritures comptables à l’administration. »

C.– Au second alinéa de l’article L. 74, les mots : « au II », sont remplacés par les mots : « aux I et II ».

II.– Après l'article 1729 C du code général des impôts, il est inséré une division ainsi rédigée :

« bis. Infraction à l'obligation de présenter la comptabilité sous forme dématérialisée

« Art. 1729 D.– Le défaut de présentation de la comptabilité selon les modalités prévues au I de l’article L. 47 A du livre des procédures fiscales est passible d’une amende de 1 500 euros par exercice ou par année soumis à contrôle ou, si le montant correspondant est supérieur à cette dernière somme, et compte tenu de la gravité des manquements, d’un montant pouvant atteindre, selon le cas, 5 pour mille du chiffre d’affaires déclaré en l’absence de rehaussement ou du chiffre d’affaires rehaussé, par exercice soumis à contrôle, ou 5 pour mille du montant des recettes brutes déclarées en l’absence de rehaussement ou de leur montant rehaussé, par année soumise à contrôle. »

III.– Le présent article s’applique aux contrôles pour lesquels l'avis de vérification est adressé après le 1er janvier 2014.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article propose de rendre obligatoire, à compter de 2014, en cas de contrôle fiscal d’une entreprise, la présentation par celle-ci de ses documents comptables sous forme dématérialisée lorsqu’elle tient sa comptabilité sous cette forme. Cette présentation est aujourd’hui possible, mais les entreprises sont en droit de la refuser. L’objectif est de rendre plus fluides les opérations de contrôle. L’impact sur les recettes du budget de l’État, par principe favorable, n’est toutefois pas chiffrable.

I.– LE DROIT EXISTANT

 L’article L. 13 du livre des procédures fiscales (LPF) dispose que « les agents de l’administration des impôts vérifient sur place […] la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ».

Le I de l’article L. 47 A du LPF, créé par la loi de finances rectificative pour 2007 (43), donne la possibilité aux entreprises (44) qui tiennent leur comptabilité au moyen de systèmes informatisés de satisfaire à leur obligation de représentation des documents comptables sous forme dématérialisée, c’est-à-dire en mettant à la disposition de l’administration fiscale des fichiers informatiques et non plus de très épaisses liasses papier. Il a été indiqué au Rapporteur général que 40 % des quelque 48 000 vérifications de comptabilité annuelles sont réalisées ainsi.

L’obligation de représentation des documents comptables est prévue par l’article 54 du code général des impôts (CGI) : les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés (IS) ou au régime réel des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) (45) sont tenues « de représenter à toute réquisition de l’administration tous documents comptables […] de nature à justifier l’exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration » fiscale.

Les documents pouvant être transmis par voie dématérialisée sont les copies des fichiers des écritures comptables définies aux articles 420-1 et suivants du plan comptable général (articles décrivant les modalités de tenue de la comptabilité en partie double).

La transmission sous forme dématérialisée doit répondre à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget. L’article A. 47 A-1 du LPF, issu de cet arrêté, définit de manière précise les normes à respecter (46).

Après s’être assurée de la concordance entre les données comptables et les déclarations fiscales – le cas échéant en procédant à des tris, classements et calculs –, l’administration restitue les copies des fichiers à l’entreprise, sans pouvoir en conserver de double.

Le II de l’article L. 47 A du LPF prévoit que lorsque les agents de l’administration fiscale envisagent des traitements informatiques des copies des fichiers transmis, ils en informent l’entreprise qui peut choisir :

– soit de laisser les agents de l’administration effectuer les vérifications sur son propre matériel informatique ;

– soit d’effectuer elle-même les traitements nécessaires à la vérification ;

– soit de mettre les copies à disposition des agents de l’administration, afin qu’ils procèdent aux vérifications sur un matériel autre que le sien.

 Une entreprise qui tient sa comptabilité sur support informatique n’est pas tenue d’en mettre une copie sous cette forme à disposition des agents de l’administration, puisqu’il s’agit pour elle d’une simple faculté. Le refus parfois opposé par les entreprises (quelques centaines par an) constitue selon le Gouvernement un obstacle au bon déroulement du contrôle fiscal. L’évaluation préalable annexée au présent article indique en effet que « le volume des documents présentés sous format papier peut empêcher de fait la réalisation du contrôle de manière efficace dans les délais légaux par l’administration ».

Disposer des données informatisées permettrait, selon la même source, de réduire « le temps consacré à la lecture, au tri, au classement des écritures comptables […] au profit d’investigations plus approfondies, et au profit d’une meilleure qualité du débat oral et contradictoire ».

II.– LE DROIT PROPOSÉ

Le présent article transforme en obligation la présentation des données comptables sous forme dématérialisée, pour les contribuables dont la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés (alinéa 4).

Il est précisé que la copie des fichiers devrait être remise au début des opérations de contrôle (alinéa 5). En application du I de l’article L. 52 du LPF, la durée d’une vérification de comptabilité ne peut en principe excéder trois mois ; il convient donc d’éviter que le délai de cette transmission réduise le temps utile de contrôle si l’entreprise contrôlée ne fournit pas au début des opérations de contrôle, comme elle devra le faire, les copies des fichiers. Aussi, il est prévu de suspendre le délai de trois mois en cas de mise en œuvre du I de l’article L. 47 A (alinéa 11).

Dans un souci de simplification des relations entre l’administration fiscale et le contribuable, il est également prévu que la restitution des copies des fichiers, aujourd’hui automatique, soit demain opérée par l’administration à la demande du contribuable (alinéa 9). Le droit existant interdit à l’administration de conserver un double de ces copies, et il n’est pas proposé de modification sur ce point : cela signifie qu’à l’avenir, l’administration devra spontanément – et en principe immédiatement – procéder à la destruction des copies de fichiers dont la restitution ne serait pas réclamée par les contribuables.

Partant du constat que « la majorité des entreprises imposées dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles pouvant faire l’objet d’une vérification de comptabilité tiennent aujourd’hui leur comptabilité à l’aide d’un logiciel comptable » (47), le Gouvernement propose d’étendre cette nouvelle obligation au-delà des seules entreprises relevant de l’IS ou du régime réel des BIC. Seraient désormais concernés tous les contribuables soumis à l’obligation de présenter des documents comptables et dont la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés (alinéa 7(48).

Le présent article prévoit que l’opposition à la mise en œuvre du contrôle par un refus de présentation dématérialisée entraînera, en application de l’article L. 74 du LPF, la réévaluation d’office des bases d’imposition (alinéa 12).

Il est en outre créé une infraction à l’obligation de présenter la comptabilité sous forme dématérialisée, au sein d’une division nouvelle du CGI, composée d’un unique article 1729 D (alinéas 14 et 15).

Le défaut de présentation de la comptabilité selon les modalités prévues au I de l’article L. 47 A du LPF serait ainsi sanctionné :

– en l’absence de rehaussement, d’une amende pouvant atteindre
5 pour mille du chiffre d’affaires (
49) déclaré, par exercice (50) soumis à contrôle ;

– en cas de rehaussement, d’une amende pouvant atteindre 5 pour mille du chiffre d’affaires rehaussé, par exercice soumis à contrôle ;

– en tout état de cause, d’une amende minimale de 1 500 euros par exercice soumis à contrôle, payable par les entreprises dont le chiffre d’affaires est nul ou dont la fraction de 5 pour mille du chiffre d’affaire est inférieure à 1 500 euros.

L’administration fiscale déterminera, sous l’un ou l’autre des plafonds
de 5 pour mille, le taux de l’amende en fonction de la gravité des manquements à l’obligation de présentation dématérialisée. Cette marge d’appréciation de la sanction, apparemment dictée par un souci de proportionnalité, pourrait toutefois poser des difficultés d’application. Le soin de définir l’échelle de la gravité des manquements est en l’espèce laissé à la discrétion de l’administration, alors que le texte prévoit que c’est le défaut de présentation qui entraîne l’amende. En l’absence de toute précision, il ne paraît pas évident de caractériser la plus ou moins grande gravité du défaut de présentation dématérialisée des comptes.

L’entrée en vigueur du dispositif proposé par le présent article est prévue, par son III (alinéa 16), avec une année de décalage, c’est-à-dire pour les contrôles dont les avis de vérification seront adressés aux contribuables après le 1er janvier 2014.

Ce délai d’un an entre le vote de la loi et l’entrée en vigueur du dispositif devrait permettre à l’administration fiscale de préciser par arrêté (51) les normes des fichiers de données fiscales. Il a été indiqué au Rapporteur général que ces normes seront définies de sorte à correspondre aux supports informatiques les plus couramment utilisés par les entreprises.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CF 49 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. L’article 11 vise à obliger les entreprises qui tiennent leur comptabilité au moyen d’un système informatisé à présenter leurs comptes sous forme dématérialisée dans le cadre d’un contrôle fiscal. Il prévoit, en cas de défaut de présentation selon ces modalités, une amende, qui peut être modulée.

Or on voit mal selon quels critères l’administration fiscale pourrait apprécier la gravité d’un défaut de présentation. De deux choses l’une : soit l’entreprise présente ses comptes, soit elle ne le fait pas. Je propose donc de supprimer la possibilité de moduler l’amende. Cela ne va pas à l’encontre – nous nous en sommes assurés – du principe de proportionnalité des peines.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 16).

Puis elle adopte l’article 11 ainsi modifié.

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Article 12

Modification des modalités d’imposition à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux de la cession à titre onéreux d’usufruit temporaire

Texte du projet de loi :

I.– L’article 13 du code général des impôts est complété par un 5 ainsi rédigé :

« 5. 1° Pour l’application du 3 et par dérogation aux dispositions du présent code relatives à l’imposition des plus-values, le produit résultant de la cession à titre onéreux d’un usufruit temporaire ou, si elle est supérieure, la valeur vénale de cet usufruit temporaire est imposable au nom du cédant, personne physique ou société ou groupement qui relève des articles 8 à 8 ter, dans la catégorie de revenu à laquelle se rattache, au jour de la cession, le bénéfice ou revenu procuré ou susceptible d’être procuré par le bien ou le droit sur lequel porte l’usufruit temporaire cédé.

« Lorsque l’usufruit temporaire cédé porte sur des biens ou droits procurant ou susceptibles de procurer des revenus relevant de différentes catégories, le produit résultant de la cession de cet usufruit temporaire ou, le cas échéant, sa valeur vénale, est imposable dans chacune de ces catégories à proportion du rapport entre, d’une part, la valeur vénale des biens ou droits dont les revenus se rattachent à la même catégorie et, d’autre part, la valeur vénale totale des biens ou droits sur lesquels porte l’usufruit temporaire cédé.

« 2° Pour l’application du 1° et à défaut de pouvoir déterminer, au jour de la cession, une catégorie de revenu, le produit résultant de la cession de l’usufruit temporaire ou, le cas échéant, sa valeur vénale, est imposé :

« a) Dans la catégorie des revenus fonciers, sans qu’il puisse être fait application des dispositions du II de l’article 15, lorsque l’usufruit temporaire cédé est relatif à un bien immobilier ou à des parts de sociétés, groupements ou organismes, quelle qu’en soit la forme, non soumis à l’impôt sur les sociétés et à prépondérance immobilière au sens des articles 150 UB ou 244 bis A ;

« b) Dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, lorsque l'usufruit temporaire cédé est relatif à des valeurs mobilières, droits sociaux, titres ou droits s'y rapportant, ou à des titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, mentionnés à l’article 150-0 A ;

« c) Dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, dans les autres cas. »

II.– Le I est applicable aux cessions à titre onéreux d'un usufruit temporaire intervenues à compter du 14 novembre 2012.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article vise à empêcher un schéma d’optimisation fiscale dit de cession d’usufruit temporaire, au titre de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux. À cette fin, il substitue à l’actuel régime d’imposition de la plus-value constatée en cas de cession à titre onéreux d’un usufruit temporaire, un régime d’imposition des revenus correspondants.

Afin d’éviter tout effet d’aubaine, ces dispositions entrent en vigueur le jour de la délibération du conseil des ministres sur le présent projet, soit le 14 novembre 2012, pour le calcul de l’impôt sur le revenu dû au titre de 2012 et devant être payé en 2013.

Le démembrement de propriété peut classiquement faciliter la gestion patrimoniale et permettre de bénéficier d’avantages fiscaux, par la séparation entre la nue-propriété et l’usufruit. L’usufruit est défini par l’article 578 du code civil comme « le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance ». Il s’agit d’un droit réel qui peut porter sur tout bien. Lorsqu’il n’est pas établi automatiquement par la loi dans certaines situations (notamment pour les successions), l’usufruit peut être établi par une convention à l’initiative du propriétaire du bien. L’usufruitier dispose de deux attributs du bien : d’une part, l’usus, c'est-à-dire un pouvoir de jouissance et un droit d’usage du bien, à charge d'en assurer sa conservation ; d’autre part, le fructus, à savoir le bénéfice des produits perçus du fait de la jouissance du bien. Le nu-propriétaire conserve l’abusus, soit le droit de disposer du bien, mais il ne peut pas vendre seul la pleine propriété du bien grevé d’usufruit. Il est aussi tenu de maintenir le bien en l’état, donc de supporter le cas échéant les charges extraordinaires, telles que les grosses réparations portant sur un bien immobilier.

L’usufruit est par essence un droit temporaire : selon les articles 617 et suivants du code civil, il cesse notamment, soit au décès de l’usufruitier personne physique, soit au plus tard après trente ans si l’usufruitier est une personne morale, soit à l'expiration du temps pour lequel il a été accordé. Une fois l'usufruit éteint, le nu-propriétaire redevient plein propriétaire. Lorsqu’il est fait référence à un usufruit temporaire, cela correspond à un usufruit déterminé pour une durée à terme fixe lors de sa constitution même.

L’usufruit peut notamment porter sur un bien immobilier, auquel cas il donne droit à percevoir des loyers, ou sur des valeurs mobilières, produisant dividendes ou intérêts perçus par l’usufruitier, ou sur un fonds de commerce, permettant à l’usufruitier de percevoir des revenus professionnels. En cédant l’usufruit du bien, le propriétaire transforme un flux de revenus futurs et aléatoires en un capital immédiat et liquide (qu’il pourra par ailleurs faire fructifier) : c’est pourquoi le prix de cession de l’usufruit est déterminé en fonction d’une valeur économique calculée sur la base de l’actualisation des revenus à percevoir sur la durée de l’usufruit. Une fois cette valeur économique calculée au titre de la pleine propriété du bien, le II de l’article 669 du code général des impôts prévoit que « l'usufruit constitué pour une durée fixe est estimé à 23 % de la valeur de la propriété entière pour chaque période de dix ans de la durée de l'usufruit, sans fraction et sans égard à l'âge de l'usufruitier ».

Au titre de l’impôt sur le revenu, la cession de l’usufruit est considérée comme une plus-value. Cette plus-value est taxée en fonction de la nature du bien démembré : plus-value mobilière, immobilière ou professionnelle. Il faut toutefois signaler que, par un arrêt du 12 juin 2012 (n° 11LY01293, ministre c/ Glas) qui fait l'objet d'un pourvoi en instance devant le Conseil d'État, la cour administrative d’appel de Lyon a jugé que la cession de l'usufruit temporaire d’un fonds libéral par une entreprise détentrice de sa pleine propriété devait être regardée non comme génératrice d'une plus-value d'actif, mais comme entraînant la perception d'un produit d'exploitation.

Le montage d’optimisation fiscale fréquemment mis en œuvre résulte de la différence entre l’imposition d’une plus-value et celle d’un revenu : taxer en une fois la plus-value de cession de l’usufruit est plus avantageux, du point de vue du contribuable, que taxer les flux de revenus qui auraient été procurés par le bien pendant une durée équivalente à celle de l’usufruit. En effet, d’une part, la valeur de l’usufruit est plus faible que celle du bien en pleine propriété, ce qui réduit le montant de la plus-value taxable (du fait que le prix d’acquisition du bien n’est retenu qu’à hauteur de la valeur de l’usufruit déterminée selon le barème, fonction de l’âge de l’usufruitier, prévu par le I de l’article 669 du code général des impôts) ; d’autre part, il existe des taux forfaitaires et des abattements pour durée de détention, pouvant par exemple aboutir à une exonération totale de la plus-value immobilière après trente ans de détention. Même avec le nouveau régime d’imposition des plus-values mobilières prévu par l’article 6 du projet de loi de finances pour 2013, la cession d’un usufruit temporaire peut demeurer avantageuse, du fait du maintien d’un taux forfaitaire dans certains cas ou de l’application d’abattements pour durée de détention aux plus-values mobilières. En transformant des revenus futurs fiscalisés en une plus-value le plus souvent totalement exonérée, la cession d’usufruit temporaire permet au contribuable avisé de réaliser une opération particulièrement rentable, fiscalement parlant.

Il est proposé de requalifier le produit de la cession d’un usufruit temporaire dans la catégorie de revenu sous-jacent, tant pour l’impôt sur le revenu que pour les prélèvements sociaux. Il s’agit en quelque sorte de généraliser et de légaliser le critère retenu par la cour administrative d’appel de Lyon dans son arrêt précité : le produit de la cession sera désormais imposé au titre de la catégorie de revenu à laquelle se rattachent les fruits susceptibles d’être procurés par le bien sûr lequel porte l’usufruit temporaire.

Le présent article propose, dans cette perspective, d’insérer une nouvelle règle d’assiette à l’article 13 du code général des impôts, qui définit de manière générale le revenu imposable au titre de l’impôt sur le revenu.

Cette nouvelle règle d’assiette comporterait trois éléments :

1. La définition de l’imposition des cessions d’usufruit temporaire par dérogation aux règles concernant les plus-values, en retenant soit le prix de cession, soit la valeur vénale de l’usufruit si elle est supérieure. L’administration disposera ainsi d’un fondement légal pour rectifier la base d’imposition en cas de sous-évaluation manifeste du prix de cession. Sont concernés tous les contribuables à l’impôt sur le revenu, directement ou par transparence fiscale au travers de sociétés de personnes. Dès lors que les règles d’imposition aux prélèvements sociaux pour les revenus du capital sont « décalquées » automatiquement de celles applicables pour le calcul de l’impôt sur le revenu, le changement du régime d’imposition s’appliquera de plano pour les prélèvements sociaux ;

2. Une règle de prorata, lorsque l’usufruit est susceptible de procurer des revenus se rattachant à plusieurs catégories de revenus. L’imposition se fera dans chaque catégorie de revenus à due proportion du rapport entre la valeur de l’usufruit par catégorie et sa valeur totale ;

3. Une présomption de répartition de la valeur de l’usufruit temporaire entre catégorie de revenus, si l’acte de cession ne permet pas de réaliser une répartition réelle :

– lorsque l’usufruit temporaire cédé est relatif à un bien immobilier ou à des parts de société à prépondérance immobilière (par exemple une société civile immobilière – SCI), le produit résultant de la cession de l’usufruit est réputé constituer un revenu foncier, sans chercher notamment à savoir si, le cas échéant, il pourrait s’agir d’une location en meublé non professionnelle relevant des BIC. Les charges relatives à ce bien sont déductibles (notamment, le cas échéant, les intérêts d’un emprunt en cours s’il existe d’autres revenus fonciers). Afin d’éviter tout risque de détournement, il est prévu que le produit soit taxé quand bien même, malgré la cession de l’usufruit, le propriétaire se réserverait la jouissance du bien ;

– lorsque l’usufruit temporaire cédé est relatif à des valeurs mobilières, le produit résultant de la cession de l’usufruit est réputé constituer un revenu de capitaux mobiliers ;

– par défaut, dans tous les autres cas, le produit résultant de la cession de l’usufruit est réputé constituer un bénéfice non commercial (BNC).

Il convient de souligner que ce nouveau régime d’imposition ne concerne que les cessions d’usufruit temporaire.

En sont donc exclues les cessions d’usufruit viager, dont la durée n’est pas prédéterminée. L’article 617 du code civil distingue ces deux types d’usufruit.

Les donations d’usufruit temporaire, très utilisées dans le cadre familial pour aider notamment les enfants à financer leurs études (avec des avantages fiscaux du fait que les descendants supportent a priori une fiscalité moins lourde que leurs ascendants plus aisés à ce stade de leur vie respective) ne sont pas non plus impactées.

L’usufruit locatif social (ULS), tel qu’organisé par les articles L. 253-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, n’est pas plus concerné lorsqu’il s’agit d’une acquisition séparée ab initio de la nue-propriété par un investisseur privé et de l’usufruit de logements par des bailleurs, notamment sociaux.

Enfin, les nouvelles règles d’assiette concernant la cession d’usufruit temporaire ne sont pas exclusives de la possibilité demeurant pour l’administration de remettre en cause, sur le fondement de la procédure de répression des abus de droit, des montages à but exclusivement fiscal utilisant cet outil de gestion patrimoniale. On peut penser au cas de la cession d’un tel usufruit à une société contrôlée par le cédant, qui emprunterait pour financer l’acquisition de l’usufruit et annulerait l’impôt sur les sociétés portant sur les revenus retirés de l’usufruit du fait de l’amortissement de l’usufruit dans son bilan et de la déduction des charges financières de l’emprunt ainsi contracté (52).

On rappellera pour conclure que la cession temporaire d’usufruit permet également d’optimiser la situation fiscale du cédant au regard de l’ISF, d’une part, parce que les biens grevés d’un usufruit sont compris dans le patrimoine de l’usufruitier (s’il est redevable de cet impôt) à hauteur de sa valeur en pleine propriété, et, d’autre part, parce que le cédant ne perçoit plus de revenus afférents au bien dont il demeure nu-propriétaire pendant la durée de l’usufruit, ce qui facilite de son point de vue l’application du mécanisme de plafonnement de l’ISF en fonction de ses revenus, ainsi opportunément minorés.

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La Commission examine l’amendement CF 14 de M. Philippe Vigier.

M. Charles de Courson. L’article 12 vise à remettre en cause le régime des cessions d’usufruit temporaire à titre onéreux, qui a pu être utilisé à des fins d’optimisation fiscale.

Nous sommes favorables à la suppression de la cession d’usufruit par un chef d’entreprise à une société qu’il a créée à cet effet, le bien immobilier étant loué à la société opérationnelle ou à un tiers. Cette pratique s’apparente en effet à une cession à soi-même pour échapper à l’impôt.

Toutefois, à un moment où il est question d’alléger les charges des entreprises pour renforcer leur compétitivité, il ne faudrait pas supprimer un dispositif sain qui répond à leurs intérêts, au motif que quelques montages de cette nature existent. Une cession d’usufruit sur un bien détenu depuis plus de trente ans sans plus-value demeure une hypothèse d’école.

L’amendement CF 14 permettrait de ne pas soumettre au même traitement les cessions d’usufruit temporaire justifiées et celles qui relèvent de l’optimisation fiscale.

M. le rapporteur général. Avis défavorable.

L’article 12 ne vise pas seulement à lutter contre les abus, mais il instaure également une nouvelle règle d’assiette pour le calcul de l’impôt sur le revenu.

Les cessions d’usufruit temporaire bénéficient d’un avantage fiscal excessif à nos yeux : le dispositif permet au cédant de percevoir un capital immédiatement disponible tout en réduisant le montant de son impôt sur le revenu et de son impôt de solidarité sur la fortune. Dans un souci de rééquilibrage, il nous paraît juste de soumettre le produit des cessions au barème progressif de l’impôt sur le revenu. Cela ne remettra d’ailleurs pas en cause l’intérêt de ces opérations : leur régime fiscal demeurera favorable, même s’il le sera moins qu’auparavant.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine à l’amendement CF 24 de M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. L’intention du Gouvernement est bonne et nous partageons son objectif de lutte contre la fraude. Cependant, le dispositif qu’il propose à cette fin n’est pas équilibré. Les conséquences pour les contribuables ont été mal analysées et risquent de se révéler excessives. Je propose, avec cet amendement, une réponse mieux adaptée.

M. le président Gilles Carrez. Comme l’a indiqué le rapporteur général, il s’agit moins avec cet article d’un dispositif de lutte contre la fraude que d’un changement – radical – de règle fiscale. J’appelle l’attention des membres de la Commission sur ses conséquences – majeures – pour certaines entreprises. Il convient de l’examiner de manière approfondie. Je souhaite éviter une situation analogue à celle que nous avons connue, lors de l’examen de l’article 6 du projet de loi de finances pour 2013, sur le régime fiscal des plus-values de cession de valeurs mobilières.

M. le rapporteur général. Sont visées, non pas les entreprises, mais les particuliers. Le régime fiscal actuel, très favorable, permet aux contribuables de réaliser d’importantes économies d’impôt à travers certains montages. M. Mariton n’a pas vraiment présenté d’argument pour défendre son amendement.

M. Olivier Carré. Premièrement, certains dispositifs constituent la contrepartie d’une fiscalité déjà lourde dans son ensemble – sans parler des mesures récentes. M. Carrez l’a souvent souligné par le passé.

Deuxièmement, le régime fiscal des cessions d’usufruit temporaire est utilisé en matière de logement social…

M. le rapporteur général. Il est aussi utilisé pour échapper à l’impôt de solidarité sur la fortune.

M. Olivier Carré. Ce n’est pas une raison pour cesser de réaliser des logements sociaux dans ces conditions, même s’il n’y en a actuellement que quelques milliers.

M. le président Gilles Carrez. Nous parlons de 6 000 logements sociaux en démembrement de propriété.

M. le rapporteur général. Le dispositif n’est pas remis en question pour les logements sociaux. L’usufruit locatif social n’est pas dans le champ d’application de l’article.

M. Olivier Carré. La remarque de Mme Berger était tout à fait juste. Les mesures fiscales affectent le rendement net – par nature déjà faible en raison de la modicité des loyers – des projets d’investissement en matière de logement social. Le dispositif actuel a sa raison d’être : il permet d’orienter l’épargne vers ces projets. Si vous souhaitez le supprimer, il faut le dire clairement. Cela déstabilisera une partie – certes modeste – du secteur de la construction de logements sociaux, que nous souhaitons pourtant tous favoriser.

M. Hervé Mariton. Pour être général, mon propos n’en était pas moins exact : sous couvert de lutte contre la fraude et les abus, le Gouvernement modifie en réalité les modalités de calcul de l’impôt, alors même qu’il se prévalait de ne pas avoir introduit de mesures fiscales nouvelles dans ce collectif. Le dispositif actuel a sa raison d’être, il n’est pas injuste en tant que tel. Vous allez supprimer, sans aucun accompagnement, des mécanismes qui ont leur utilité. En outre, c’est une mesure destinée à rapporter de l’argent au budget de l’État.

M. le président Gilles Carrez. Le sujet est important. Nous ne contestons pas la nécessité de limiter ce type de montage, mais cette mesure beaucoup trop générale va les interdire.

M. le rapporteur général. Nous ne les interdisons pas !

M. le président Gilles Carrez. En outre, cette mesure représente un alourdissement important de la fiscalité, alors même que le ministre, lorsqu’il nous a présenté ce collectif, nous avait indiqué qu’il ne comportait aucune augmentation d’impôt nouvelle. C’est même la première phrase qu’il avait prononcée.

M. le rapporteur général. Tout d’abord, l’article 12 concerne non pas les donations – dont on sait pourtant l’usage qui peut en être fait pour échapper à l’impôt de solidarité sur la fortune –, mais uniquement les cessions.

De plus, le logement social n’est pas touché, dans la mesure, je le répète, où la nouvelle règle ne concerne pas les investissements initiaux dans la construction.

Enfin, les mesures de lutte contre les abus ont en effet vocation à rapporter de l’argent au budget de l’État ou de lui en faire moins perdre. Nous en convenons volontiers. Le Gouvernement a d’ailleurs prévu un milliard d’euros de recettes fiscales nettes supplémentaires en 2013 au titre de la lutte contre la fraude.

M. Hervé Mariton. Nous proposons non pas de supprimer la mesure, mais de mieux la cibler. Nous ne nions ni l’existence d’abus, ni la nécessité de légiférer. Nous proposons de recentrer le dispositif sur un abus de droit identifiable qu’il convient d’empêcher : le cas où le contribuable cède l’usufruit de son bien immobilier à une société qu’il contrôle. Si la mesure est profitable au budget de l’État, tant mieux. Mais nous ne voulons pas aller au-delà de la lutte contre l’abus de droit, qui demeure sanctionnable en tant que tel.

M. Charles de Courson. Quel est le rendement de cette mesure ? En a-t-on mesuré l’impact économique ?

M. le rapporteur général. J’ai interrogé le Gouvernement sur le premier point, mais n’ai pas obtenu de réponse : par nature, les pratiques abusives ou frauduleuses ne sont généralement pas quantifiables. Les recettes supplémentaires au titre de la lutte contre la fraude ont été évaluées à un milliard d’euros – chiffre que j’estime, à titre personnel, peut-être ambitieux. L’ensemble des mesures de ce collectif y contribueront, mais je ne suis pas en mesure de vous dire dans quelle proportion respective.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 12 sans modification.

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Article 13

Application aux plus-values d’apport de titres réalisées par les personnes physiques d’un report d’imposition optionnel en lieu et place du sursis d’imposition en cas d’apport à une société contrôlée par l’apporteur

Texte du projet de loi :

I.– Le code général des impôts est ainsi modifié :

A.– Au premier alinéa de l’article 150-0 B, les mots : « Les dispositions de l’article 150-0 A » sont remplacés par les mots : « Sous réserve des dispositions de l’article 150-0 B ter, les dispositions de l’article 150-0 A ».

B.– Après l’article 150-0 B bis, il est inséré un article 150-0 B ter ainsi rédigé :

« Art. 150-0 B ter.– I.– L’imposition de la plus-value réalisée directement ou par personne interposée dans le cadre d’un apport de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres ou de droits s’y rapportant tels que définis à l’article 150-0 A à une société soumise à l’impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent peut, si les conditions prévues au II sont remplies, être reportée lorsque le contribuable en fait expressément la demande et mentionne le montant de la plus-value dans la déclaration prévue à l’article 170. À défaut d’option pour le report, la plus-value est imposée dans les conditions de l’article 150-0 A.

« Les apports avec soulte demeurent soumis aux dispositions de l’article 150-0 A lorsque le montant de la soulte reçue excède 10 % de la valeur nominale des titres reçus.

« Il est mis fin au report d’imposition à l’occasion :

« 1° De la transmission, du rachat, du remboursement ou de l’annulation des titres reçus en rémunération de l’apport ;

« 2° De la transmission, du rachat, du remboursement ou de l’annulation des titres apportés. Toutefois, il n’est pas mis fin au report d’imposition lorsque la société bénéficiaire de l’apport des titres réinvestit le produit de leur cession, dans un délai de cinq ans à compter de la date de l’apport et à hauteur de 50 % du montant de ce produit, dans le financement d’une activité commerciale, artisanale, libérale, agricole ou financière à l’exception de la gestion d’un patrimoine mobilier ou immobilier, ou dans la souscription en numéraire au capital initial ou à l’augmentation de capital d’une société répondant aux conditions du b du 3° du II de l’article 150-0 D bis ;

« 3° De la transmission, du rachat, du remboursement ou de l’annulation des parts ou droits dans les sociétés ou groupements interposés ;

« 4° Ou, si cet événement est antérieur, lorsque le contribuable transfère son domicile fiscal hors de France dans les conditions prévues à l’article 167 bis.

« La fin du report d’imposition entraîne l’imposition de la plus-value dans les conditions prévues à l’article 150-0-A, sans préjudice de l’intérêt de retard prévu à l’article 1727, décompté de la date de l’apport des titres.

« II.– Le report d’imposition est en outre subordonné aux conditions suivantes :

« 1° L’apport de titres est réalisé en France ou dans un État membre de l’Union européenne ou dans un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ;

« 2° La société bénéficiaire de l’apport est contrôlée par le contribuable. Cette condition est appréciée à la date de l’apport, en tenant compte des droits détenus par le contribuable à l’issue de celui-ci. Pour l’application de cette condition, un contribuable est considéré comme contrôlant une société :

« a. Lorsque la majorité des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société est détenue directement ou indirectement par le contribuable ou par l’intermédiaire de son conjoint ou de leurs ascendants ou descendants ou de leurs frères et sœurs ;

« b. Ou lorsqu’il dispose seul de la majorité des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de cette société en vertu d’un accord conclu avec d’autres associés ou actionnaires ;

« c. Ou lorsqu’il y exerce en fait le pouvoir de décision.

« Le contribuable est présumé exercer ce contrôle lorsqu’il dispose directement ou indirectement d’une fraction des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux égale ou supérieure à 33,33 % et qu’aucun autre associé ou actionnaire ne détient directement ou indirectement une fraction supérieure à la sienne.

« Le contribuable et une ou plusieurs personnes agissant de concert sont considérés comme contrôlant conjointement une société lorsqu’ils déterminent en fait les décisions prises en assemblée générale.

« 3° Les titres apportés ne font pas l’objet d’un engagement de conservation prévu aux articles 787 B ou 787 C dans les conditions prévues par ces articles.

« III.– Lorsque les titres reçus en rémunération de l’apport ou les titres des groupements ou sociétés interposés font eux-mêmes l’objet d’un apport, l’imposition de la plus-value réalisée à cette occasion peut être reportée, dans les mêmes conditions, si le contribuable en fait expressément la demande et mentionne le montant de la plus-value dans la déclaration prévue à l’article 170.

« Il est mis fin au report initial en cas de transmission, de rachat, de remboursement ou d’annulation des nouveaux titres reçus en échange ou en cas de survenance d’un des événements mentionnés aux 1° à 4° du I, lorsque les titres reçus en rémunération de l’apport ou les titres des groupements ou sociétés interposés font eux-mêmes l’objet d’un échange bénéficiant du sursis d’imposition prévu à l’article 150-0 B ou d’un apport soumis au report d’imposition prévu au I.

« IV.– En cas de survenance d’un des événements prévus aux 1° à 4° du I et au 2e alinéa du III, il est mis fin au report d’imposition de la plus-value dans la proportion des titres cédés, transmis, rachetés, remboursés ou annulés.

« V.– Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article, notamment les obligations déclaratives des contribuables. »

C.– L’article 167 bis est ainsi modifié :

1° Au II, après la référence : « 150-0 B bis » est ajoutée la référence : « , 150-0 B ter » ;

2° Au a du 1 du VII, les mots : « l’article 150-0 D bis s’applique » sont remplacés par les mots : « les reports d’imposition prévus aux articles 150-0 B ter et 150-0 D bis s’appliquent » ;

3° Après le e du 1 du VII, il est ajouté un f ainsi rédigé :

« f. La transmission, le rachat, le remboursement ou l’annulation des titres ou droits reçus en rémunération de l’apport ou des titres ou droits apportés ou des parts ou droits dans les sociétés ou groupements interposés conformément à l’article 150-0 B ter, pour l’impôt afférent aux plus-values de cession reporté en application dudit article. » ;

D.– Au troisième alinéa du 1 de l’article 170, avant les mots : « du I de l’article 150-0 D bis » sont insérés les mots : « de l’article 150-0 B ter et ».

II.– Le I est applicable aux apports réalisés à compter du 14 novembre 2012.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article vise à remettre en cause un schéma d’optimisation fiscale dit d’apport-cession, au titre de la taxation des plus-values de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux des particuliers à l’impôt sur le revenu. À cette fin, il substitue à l’actuel régime de sursis d’imposition applicable en cas d’apport un régime de report d’imposition sous condition de remploi.

Afin d’éviter tout effet d’aubaine, il est proposé que ces dispositions entrent en vigueur le jour de la délibération du conseil des ministres sur le présent projet, soit le 14 novembre 2012.

Le législateur a pris en compte la situation particulière des contribuables qui réalisent des plus-values à l'occasion d'un échange de titres ou d'un apport. En effet, ces opérations ne dégagent pas de liquidités au moment de leur réalisation mais facilitent les restructurations d’entreprises nécessaires à la vie économique. Par dérogation à la règle selon laquelle le fait générateur de l'imposition d'une plus-value est constitué au cours de l'année de la réalisation de celle-ci, la loi prévoit dans ce cas que la plus-value n’est imposée que l'année au cours de laquelle les titres reçus en échange seront eux-mêmes cédés.

Les plus-values réalisées depuis le 1er janvier 2000 à l'occasion de certaines opérations d'échanges de titres bénéficient d'un sursis d'imposition. Ce régime de sursis a été institué par la loi de finances pour 2000 à la place du régime de report d’imposition qui s’appliquait depuis 1991 pour les échanges de titres réalisés à l'occasion d'une offre publique, d'une fusion, d'une scission ou d'un apport en société (et qui continue d’ailleurs à s’appliquer pour les plus-values qui étaient en situation de report d'imposition au 1er janvier 2000).

En cas de sursis d'imposition, l'opération d’échange est considérée comme présentant un caractère intercalaire et n'est donc pas prise en compte pour l'établissement de l'impôt sur le revenu au titre de l'année de l'échange des titres. Le sursis d'imposition s'applique de plein droit, sans que le contribuable ait à en faire la demande ni qu’il ait à déclarer la plus-value d'échange non constatée. Toutefois, il n’y a pas d'exonération définitive de cette plus-value puisqu’ultérieurement, lors de la cession des titres reçus en échange ou lorsque ces titres sont rachetés, remboursés ou annulés, le gain net est calculé à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres remis à l'échange.

L’article 150-0 B du code général des impôts qui prévoit ce sursis d’imposition concerne les opérations d'échange de valeurs mobilières ou de droits sociaux résultant d'une offre publique (d'échange, d'achat, de rachat ou de retrait), d'une fusion, d'une scission, de l'absorption d'un fonds commun de placement (FCP) par une société d'investissement à capital variable (SICAV), d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés, d’une conversion, d’une division ou d’un regroupement. Le montant de la soulte éventuellement reçue par le contribuable lors de l’échange ne doit toutefois pas excéder 10 % de la valeur nominale des titres reçus pour que le sursis d’imposition soit applicable.

Ce régime peut donc s'appliquer en cas d'apport de valeurs mobilières ou de droits sociaux à une société de capitaux ou assimilée soumise à l'impôt sur les sociétés (de plein droit ou sur option, sans en être exonérée totalement ou partiellement de façon permanente). Les titres remis en contrepartie de l'apport doivent, d'une part, être des valeurs mobilières ou des droits sociaux représentatifs d'une quotité du capital de la société bénéficiaire de l'apport ou constituer des valeurs mobilières donnant droit à l'attribution de titres représentant une quotité du capital de cette société (obligations convertibles, échangeables ou remboursables en actions) et, d'autre part, être émis à l'occasion de l'opération d'apport.

Un montage fréquemment utilisé à des fins d’optimisation fiscale consiste à céder des titres initialement détenus par une personne physique juste après leur apport à une société contrôlée par ce contribuable. L’administration fiscale a systématiquement pourchassé ce type de montage, d’abord sous le régime de report applicable jusqu’en 2000 puis sous le régime de sursis. Elle considère en effet que le placement en report ou en sursis d'imposition d'une plus-value réalisée par un contribuable lors de l'apport de titres à une société qu'il contrôle, suivi de leur cession par cette société, est un montage constitutif d'un abus de droit. Le contribuable aurait en effet normalement pu céder directement les titres à un acquéreur puis réinvestir lui-même le produit de cette cession sans procéder à l'opération d'apport, qui a pour seul but d’échapper au paiement immédiat de l’impôt sur la plus-value.

SCHÉMA DE L’APPORT-CESSION

Le Conseil d’État statuant au contentieux a développé une jurisprudence précisant les cas dans lesquels l’administration peut être fondée à invoquer l’abus de droit dans le cadre d’opérations d’apport-cession, et donc à remettre en cause le régime de faveur décrit ci-dessus. Au titre de l’ancien régime de report applicable jusqu’en 2000, il a jugé légal le bénéfice de ce régime dès lors que le réinvestissement économique du produit de la cession est avéré (8 octobre 2010, n° 301934, Bazire ; 11 février 2011, n° 314950, Picoux) et qu’il a été effectué dans le délai nécessaire qu'impliquaient l'importance et la nature de l'investissement réalisé (8 octobre 2010, n° 313139, ministre c/ Bauchart). En revanche, il en a remis en cause le bénéfice lorsque les sommes réinvesties ne représentaient pas une part significative du produit de la cession des titres (4 % du produit de la cession réinvestis et 60 % affectés à des avances en compte courant qui ont un caractère patrimonial, dans une décision du 3 février 2011, n° 329839, ministre c/ Conseil ; 15 % du produit de la cession réinvestis et 41 % affectés à des avances en compte courant, dans une décision du 24 août 2011, n° 316928, Ciavatta). Il y a aussi abus de droit lorsque le produit de la cession, affecté à des investissements immobiliers réalisés par une SCI à caractère patrimonial bénéficiaire de l'apport, peut être appréhendé par le contribuable porteur de parts de la SCI bénéficiaire de l’apport et qu’il contrôle (24 août 2011, n° 314579, Moreau et Girault), ou lorsque le contribuable, apporteur des titres, récupère des liquidités à l'occasion de la réduction ultérieure du capital de la société bénéficiaire de l'apport, par voie de remboursement partiel aux associés du montant de leurs parts (8 octobre 2010, n° 321361, Four).

Statuant pour la première fois sur le régime de sursis applicable depuis 2000 dans une décision du 27 juillet 2012 (n° 327295, Berjot), le Conseil d’État a jugé qu’en dépit du caractère automatique du sursis, un montage d’apport-cession peut aussi être considéré comme constitutif d'un abus de droit. Il a alors appliqué les mêmes critères que ceux qu’il a dégagés pour les apports ouvrant droit à un report d'imposition : l’administration est fondée à se prévaloir de la procédure de répression des abus de droit dès lors que l'opération d'apport, dont l'intérêt fiscal consiste à différer l'imposition de la plus-value, permet à l'apporteur de disposer des liquidités obtenues lors de la cession tout en restant détenteur des titres et que le produit de la cession n'est pas effectivement réinvesti dans une activité économique.

Compte tenu du durcissement de l’imposition des plus-values prévu par l’article 6 du projet de loi de finances pour 2013, les tentatives d’y échapper risquent de se multiplier, notamment au travers d’opérations d’apport-cession. Eu égard à la difficulté pratique de mise en œuvre pour l’administration, du caractère traumatisant pour les contribuables, de la longueur de la procédure et de l’incertitude contentieuse qui caractérisent la répression des abus de droit, le Gouvernement propose de définir un nouveau régime légal de report d’imposition spécifique aux montages d’apport-cession, et à cette occasion de transposer dans la loi les critères retenus par la jurisprudence pour caractériser les opérations qui auront le droit de bénéficier de ce régime.

Pour autant, la définition législative des apports-cessions pouvant bénéficier d’un régime de faveur n’a pas seulement un caractère répressif, mais elle vise aussi à sécuriser les investisseurs eux-mêmes : les critères retenus seront désormais objectifs et clairement affichés dans la loi, sans devoir attendre la prise de position du juge sur chaque espèce, bien après la réalisation des réinvestissements.

En cas de report d'imposition, la plus-value est normalement constatée au titre de l'année de l'échange des titres mais son imposition est différée au moment où s'opérera la cession des titres reçus lors de l'échange. La cession ultérieure des titres reçus en échange entraîne l'expiration du report, de sorte que la plus-value en report est immédiatement mise en recouvrement et une nouvelle imposition est établie sur la différence entre le prix de cession et le prix ou la valeur du titre lors de l'échange.

Le champ d’application de ce nouveau régime ne concerne que l’apport de titres à une société soumise à l’impôt sur les sociétés et contrôlée par le contribuable. Il est donc plus restreint, tant que l’actuel régime de sursis que l’ancien régime de report. L’articulation du nouveau report avec l’actuel sursis est réalisée par le A du I du présent article, qui modifie l’article 150-0 B du code général des impôts relatif au sursis en indiquant que le sursis ne s’applique que « sous réserve » de l’application du report. Comme le rappelle le guide de légistique mis en ligne sur le site officiel www.legifrance.gouv.fr, la locution « sous réserve » indique l'ordre de prééminence entre deux dispositions en conflit : la disposition ne joue que lorsque le texte réservé ne trouve pas à s'appliquer. Cela signifie que, si le contribuable réalise un apport à une société soumise à l’impôt sur les sociétés qu’il contrôle, il ne peut plus bénéficier du régime du sursis et relève exclusivement du régime du report. Il peut alors demander le bénéfice du report, mais s’il ne le fait pas, il est immédiatement imposé sur la plus-value d’échange. En revanche, s’il effectue un apport à une société qu’il ne contrôle pas, il demeure dans le champ d’application de l’actuel régime de sursis.

Le nouveau régime de report ne concerne pas les titres qui font l’objet d’un engagement de conservation (pacte Dutreil) pour pérenniser l’actionnariat familial dans le cadre des transmissions patrimoniales. Les opérations d’apport-cession réalisées avec ces titres peuvent donc continuer à bénéficier du régime de sursis de droit. L’exonération de 75 % des droits de mutation à titre gratuit prévue par les articles 787 B et 787 C du code général des impôts pour ces titres peut être remise en cause dans certains cas de cession et d’apport qui ne respectent pas les engagements collectif et individuel de conservation, mais il n’existe dans le droit en vigueur aucun régime de faveur spécifique concernant l’imposition des plus-values au titre des pactes Dutreil.

Le report d’imposition concerne non seulement l’impôt sur le revenu, mais aussi les prélèvements sociaux. En effet, du fait de l’apport de titres, le contribuable ne perçoit aucune liquidité en contrepartie qui lui permettrait de s’acquitter de l’impôt dû. Le système est différent pour le report d’imposition prévu par l’article 150-0 D bis qui n’emporte pas report des prélèvements sociaux, en application expresse du e ter de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale. Pour ce report en effet, il y a cession avant remploi et donc des liquidités disponibles pour s’acquitter des prélèvements sociaux dès l’année de la cession.

L'application du nouveau report d'imposition est subordonnée au respect de quatre conditions.

1. Le contribuable doit demander expressément le bénéfice du report (à la différence du régime de sursis, qui est de droit). Cette demande doit être réitérée lorsque les titres remis en échange après un premier apport font eux-mêmes l’objet d’un nouvel apport.

La demande de report devra être formulée au moment de la souscription de la déclaration des revenus de l'année de l'échange. Le D du I du présent article modifie pour coordination en ce sens l’article 170 du code général des impôts.

À cet égard, dans une décision du 13 juillet 2011 (n° 338463, Labbé), le Conseil d’État statuant au contentieux a refusé de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur l'obligation pour le contribuable de formuler une demande et de la réitérer à l'occasion d'un nouvel échange afin de bénéficier du régime de report applicable jusqu’en 2000, en estimant « que cette obligation a pour objet de permettre un contrôle de la plus-value placée par le contribuable en report d'imposition » et « que les conséquences attachées à l'omission d'une telle formalité, qui se traduisent par la taxation immédiate de la plus-value précédemment réalisée, ne revêtent pas le caractère d'une sanction mais se bornent à faire application du régime de droit commun ». Il n’y a donc pas de méconnaissance du droit de propriété garanti par l'article XVII de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen.

2. Le montant de la soulte éventuelle ne doit pas excéder 10 % de la valeur nominale des titres reçus en échange de l’apport, comme dans le régime de sursis.

3. L’apport doit bénéficier à une société soumise à l’impôt sur les sociétés établie en France ou, s’il est réalisé dans un État de l'Union européenne ou dans un État ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, à une société soumise à un impôt équivalent à l'impôt sur les sociétés. Le même régime d’extraterritorialité s’applique pour le régime de sursis.

4. La société bénéficiaire de l’apport doit être contrôlée par le contribuable qui apporte les titres. Ce critère légal de contrôle répond au critère jurisprudentiel d’appréhension potentielle par le contribuable des liquidités disponibles dans la société après l’opération d’apport-cession. Il est proposé pour l’essentiel de transposer les critères de contrôle d’une société par une autre tels que retenus par le code de commerce. Cette condition doit être appréciée à la date de l’apport, en tenant compte des nouveaux droits détenus dans la société en cause suite à cet apport. Trois critères alternatifs sont prévus :

– la détention de la majorité des droits de vote, directement ou avec le cercle familial du contribuable,

– l’exercice de la majorité des droits de vote en vertu d’un pacte d’actionnaires,

– l’exercice d’un pouvoir de décision de fait, avec deux cas de présomption : d’une part, lorsque le contribuable dispose directement ou indirectement d’au moins 33,33 % des droits de vote (c'est-à-dire qu’il dispose d’une minorité de blocage – on observera toutefois que le code de commerce retient 40 %) sans qu’aucun autre actionnaire ne détienne une participation supérieure ; d’autre part, lorsque le contribuable détermine les décisions prises en assemblée générale en agissant de concert avec une autre personne.

Définition du contrôle au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce

« I.– Une société est considérée, pour l'application des sections II et IV du présent chapitre, comme en contrôlant une autre :

« 1° Lorsqu'elle détient directement ou indirectement une fraction du capital lui conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de cette société ;

« 2° Lorsqu'elle dispose seule de la majorité des droits de vote dans cette société en vertu d'un accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires et qui n'est pas contraire à l'intérêt de la société ;

« 3° Lorsqu'elle détermine en fait, par les droits de vote dont elle dispose, les décisions dans les assemblées générales de cette société ;

« 4° Lorsqu'elle est associée ou actionnaire de cette société et dispose du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance de cette société.

« II.– Elle est présumée exercer ce contrôle lorsqu'elle dispose directement ou indirectement, d'une fraction des droits de vote supérieure à 40 % et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détient directement ou indirectement une fraction supérieure à la sienne.

« III.– Pour l'application des mêmes sections du présent chapitre, deux ou plusieurs personnes agissant de concert sont considérées comme en contrôlant conjointement une autre lorsqu'elles déterminent en fait les décisions prises en assemblée générale. »

Les plus-values d'échange en report deviennent imposables au titre de l'année de réalisation de l'événement entraînant l'expiration du report. Le taux d'imposition applicable est celui en vigueur au cours de l'année d'expiration du report. Comme pour tout régime de report, l’intérêt de retard s’applique (au taux de 4,8 % par an, tel que prévu par l’article 1727 du code général des impôts) à partir de la date de l’apport des titres. L’application de l’intérêt de retard a pour effet de compenser le préjudice résultant, pour le budget de l’État, de l’écoulement du temps depuis le calcul initial de la plus-value, dont le montant nominal subit chaque année l’inflation. Le contribuable aura aussi pu placer le montant d’impôt qu’il n’aura pas encore payé au titre de la plus-value d’échange du fait du report.

Cinq événements sont susceptibles de mettre fin au report. Ils sont prévus au I du nouvel article 150-0 B ter pour les quatre premiers, et au dernier alinéa du III du même article pour le cinquième.

1. La transmission, le rachat, le remboursement ou l’annulation des titres reçus en échange entraînent l'expiration du report d'imposition de la plus-value d'échange et, par conséquent, l'imposition immédiate de cette plus-value.

La notion de transmission retenue pour mettre fin au report est très large : elle comprend non seulement les transmissions à titre onéreux (vente, apport, échange), comme dans le régime de sursis, mais elle concerne aussi les transmissions à titre gratuit (succession et donation) des titres reçus en échange. Il s’agit d’une dérogation à la règle générale d’exonération définitive (« purge ») de la plus-value dont l'imposition a été reportée en cas de mutation à titre gratuit (une autre dérogation, spécifique pour certaines donations, est aussi prévue par l’article 14 du présent projet). Une telle dérogation s’est toutefois déjà appliquée pour les plus-values d'échange de titres réalisés avant le 1er janvier 1988 en report sur le fondement de l'ancien article 160 du code général des impôts. Elle est aussi prévue pour la remise en cause du report d’imposition prévu par l’article 150-0 D bis, lorsque la durée de détention des titres après remploi (soit cinq ans) n’est de ce fait pas respectée.

Lorsque les titres reçus en échange sont des actions ou des droits sociaux d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés et que cette société procède à un remboursement d'apports ou de primes d'émission, ce remboursement entraîne l'expiration du report d'imposition. De même, l'annulation des titres reçus en échange, à la suite notamment d'une réduction du capital ou de la dissolution de la société émettrice de ces titres, entraîne l'expiration du report d'imposition l'année au titre de laquelle l'annulation intervient.

Si la transmission, le rachat, le remboursement ou l’annulation ne portent que sur une partie des titres reçus en échange, seule la fraction correspondante de la plus-value initialement reportée est imposée. Le surplus continue à bénéficier du report, en application du IV du nouvel article 150-0 B ter.

2. La transmission, le rachat, le remboursement ou l’annulation des titres apportés sont aussi susceptibles d’entraîner l'expiration du report d'imposition de la plus-value d'échange.

Le bénéfice du report d'imposition peut toutefois être maintenu à la condition que le produit de la cession soit réinvesti par la société bénéficiaire de l’apport qui, comme on l’a vu précédemment, est contrôlée par le contribuable. Ce critère légal de remploi traduit le critère jurisprudentiel de réinvestissement effectif d’une part substantielle du produit de la cession dans une activité économique. L’État se doit en effet de réserver le bénéfice du régime de faveur aux seules opérations d’apport-cession qui sont favorables à l’investissement et au développement de l’économie.

Le produit de la cession des titres ou droits doit être investi, dans un délai de cinq ans après l’apport (53) et à hauteur de 50 % du montant de la plus-value :

– soit dans le financement d’une activité commerciale, artisanale, libérale, agricole ou financière (pourquoi pas industrielle aussi ?), c'est-à-dire une activité opérationnelle qui ne soit pas de gestion patrimoniale,

– soit dans la souscription au capital initial ou dans l'augmentation de capital d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés qui exerce elle-même une activité opérationnelle ou qui est une holding dont l’objet social exclusif est de détenir des participations dans des sociétés opérationnelles. Cette condition portant sur la nature de l’activité de la société de remploi doit s'apprécier de manière continue pendant les huit années précédant la cession des titres, ce qui est incompatible avec une souscription au capital initial d’une société nouvellement créée. La société bénéficiaire du remploi doit aussi avoir son siège social dans un État membre de l'Union européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales (soit l’Islande, la Norvège et le Liechtenstein). Il n’est pas prévu de pouvoir remployer le produit de la cession pour acquérir des titres de sociétés déjà existantes, hors augmentation de capital.

On observera qu’il existe d’autres régimes légaux de report d’imposition sous condition de remploi. Il faut ici faire référence au dispositif général de report d’imposition des plus-values mobilières prévu par l’article 150-0 D bis du code général des impôts et modifié par l’article 6 du projet de loi de finances pour 2013 : il concerne les cessions de titres réalisées depuis le 1er janvier 2011 dont le produit de la cession est réinvesti dans la souscription au capital d'une société. Au-delà du report, la plus-value peut même être intégralement exonérée si certaines conditions sont remplies. Le taux de remploi retenu dans le nouveau dispositif prévu par le présent article est le même que celui retenu par le projet de loi de finances pour 2013 adopté par l’Assemblée nationale en première lecture le 20 novembre dernier pour le régime général. Il est toutefois plus exigeant que celui retenu par le comité de l’abus de droit dans son avis n° 2011-17 du 2 février 2012, qui a estimé qu’un réinvestissement est substantiel lorsqu’il représente 39 % du produit de la cession.

Régime du report d'imposition sous condition de remploi de l’article 150-0 D bis

Droit en vigueur :

Conditions à respecter pour bénéficier du report de la plus-value (PV) :

– avoir détenu les titres pendant 8 ans en continu,

– avoir détenu (avec le cercle familial) 10 % du capital,

– titres d’une société opérationnelle soumise à l’IS.

Conditions à respecter pour bénéficier de l’exonération de la PV reportée :

– remploi dans les 3 ans de 80 % du montant de la PV,

– remploi dans une société opérationnelle soumise à l’IS,

– détention d’au moins 5 % du capital lors du remploi,

– conservation des titres pendant au moins 5 ans.

Nouvelles conditions à compter du 1er janvier 2013 (article 6 du PLF (54) ) :

Part à remployer : diminuée de 80 % à 50 %.

Délai de remploi : diminué de 3 ans à 2 ans.

Exonération de la PV non plus totale mais limitée à la part remployée.

Par ailleurs, il subsiste aussi un régime de report d’imposition pour les cessions de titres réalisées avant le 1er janvier 2006 dont le produit est réinvesti dans les fonds propres d'une société non cotée. Le réinvestissement pouvait porter sur une partie seulement du prix de cession ; dans ce cas, le montant de la plus-value susceptible de bénéficier du report d'imposition était déterminé selon le rapport existant entre le montant réinvesti et le prix de cession.

3. La transmission, le rachat, le remboursement ou l’annulation, soit des droits du contribuable dans les sociétés ou groupements interposés qui ont réalisé l'opération d'apport, soit des titres reçus en échange par la société ou le groupement interposés, mettent fin au report d'imposition, comme s’il n’y avait pas de chaîne de participations.

Il s’agit ainsi de tenir compte de l’éventuelle interposition de sociétés civiles de portefeuille.

4. Le transfert du domicile fiscal hors de France met aussi fin au report. Le C du I du présent article modifie par coordination l’article 167 bis du code général des impôts afin de tenir compte, pour le calcul de l’exit tax, de la plus-value précédemment reportée qui devient imposable à ce titre.

5. La transmission, le rachat, le remboursement ou l’annulation des nouveaux titres reçus en échange entraînent l'expiration du report initial. Les titres reçus en échange après un premier apport peuvent en effet eux-mêmes faire l’objet d’un échange, bénéficiant d’un sursis d’imposition, ou d’un nouvel apport, lui aussi soumis à report.

On peut se demander si le nouveau régime de report est compatible avec le droit de l’Union européenne.

En effet, dans un arrêt du 12 avril 2012, la Cour administrative d’appel de Paris a jugé le régime de report d'imposition applicable avant 2000 incompatible avec les objectifs de la directive 90/434/CEE du 23 juillet 1990. La cour a en effet estimé qu’en vertu de l'article 8 de cette directive, l'attribution, à l'occasion d'un échange d'actions, de titres d'une société à un associé de la société apporteuse en échange de titres représentatifs du capital social de cette dernière société ne doit, par elle-même, entraîner aucune imposition sur le revenu et que seul peut être imposé le profit résultant de la cession ultérieure des titres reçus. Selon la cour, le régime du report d'imposition est contraire à cette directive dans la mesure où il a pour effet de liquider la plus-value réalisée à la date de l'échange et, le cas échéant, à défaut pour le contribuable d'en demander le bénéfice qui n’est qu’optionnel, de l'imposer au titre de l'année de réalisation de l'échange.

Un pourvoi en cassation a été introduit contre cet arrêt par le ministre de l’Économie et des finances. On ne dispose donc pas encore à ce stade d’une position du juge administratif suprême sur la compatibilité d’un régime de report avec le droit de l’Union européenne. On peut toutefois observer que l’analyse de la cour repose sur la prémisse que le report ne remet pas en cause le principe même de l’imposition. Or, les dispositions du code général des impôts qui permettent au contribuable réalisant une plus-value à l'occasion d'un échange de droits sociaux résultant d'une opération d'apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés d'obtenir le report de l'imposition de cette plus-value n'ont pas pour effet de différer le paiement d'une imposition qui aurait été établie au titre de l'année de réalisation de la plus-value, mais seulement de permettre, par dérogation à la règle suivant laquelle le fait générateur de l'imposition d'une plus-value est constitué au cours de l'année de sa réalisation, de la rattacher à l'année au cours de laquelle intervient l'événement qui met fin au report d'imposition. Sans fait générateur, il n’y a pas d’imposition.

De ce point de vue, l’institution d’un nouveau régime de report d’imposition en cas d’apport ne paraît pas manifestement contraire à l’article 8 de la directive. Conformément au 1 de cet article, la plus-value d’échange n’est pas taxée en elle-même. En revanche, en application du 2 de cet article, elle peut être taxée ultérieurement, lors de la cession des titres reçus. Le sixième considérant de la directive mentionne d’ailleurs expressément la possibilité d’instituer un régime de report d’imposition. On peut seulement se demander si le caractère optionnel du report ne pourrait pas être regardé comme constituant une restriction à la neutralisation de la fiscalité au titre d’une opération intercalaire. En vertu de l’adage nemo auditur, le contribuable ne saurait pourtant se prévaloir du non-exercice d’une option pour invoquer une incompatibilité avec le droit de l’Union alors que l’État lui permet de bénéficier d’un report d’imposition.

Article 8 de la directive 90/434/CEE du Conseil, du 23 juillet 1990, concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'États membres différents

« 1. L'attribution, à l'occasion d'une fusion, d'une scission ou d'un échange d'actions, de titres représentatifs du capital social de la société bénéficiaire ou acquérante à un associé de la société apporteuse ou acquise, en échange de titres représentatifs du capital social de cette dernière société, ne doit, par elle-même, entraîner aucune imposition sur le revenu, les bénéfices ou les plus-values de cet associé.

« 2. Les États membres subordonnent l'application du paragraphe 1 à la condition que l'associé n'attribue pas aux titres reçus en échange une valeur fiscale plus élevée que celle que les titres échangés avaient immédiatement avant la fusion, la scission ou l'échange d'actions.

« L'application du paragraphe 1 n'empêche pas les États membres d'imposer le profit résultant de la cession ultérieure des titres reçus de la même manière que le profit qui résulte de la cession des titres existant avant l'acquisition.

« Par « valeur fiscale », on entend la valeur qui servirait de base pour le calcul éventuel d'un profit ou d'une perte entrant en compte pour l'assiette d'un impôt frappant le revenu, les bénéfices ou les plus-values de l'associé de la société.

« 3. Dans le cas où un associé est autorisé, conformément à la législation de l'État membre de sa résidence, à opter pour un traitement fiscal différent de celui défini au paragraphe 2, le paragraphe 1 ne s'applique pas aux titres représentatifs pour lesquels cet associé aura exercé son droit d'option.

« 4. Les paragraphes 1, 2 et 3 ne font pas obstacle à la prise en compte, pour la taxation de l'associé, de la soulte en espèces qui lui est éventuellement attribuée à l'occasion de la fusion, de la scission ou de l'échange d'actions. »

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La Commission est saisie de l’amendement CF 55 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. En cas d’apport-cession, l’article 13 prévoit qu’on puisse bénéficier d’un report d’imposition à condition de réinvestir le produit de la cession dans une société dans un certain délai. Aux termes du texte gouvernemental, il faut réinvestir dans un délai de cinq ans après l’apport, mais le bénéfice du report est perdu si la cession a lieu plus de cinq ans après l’apport, même en cas de réinvestissement : cela paraît incohérent. Je propose donc de décomposer en deux périodes le délai de cinq ans : l’obligation de réinvestissement ne concernerait que les cessions intervenant dans un délai de trois ans après l’apport, en suite de quoi l’on disposerait de deux ans pour investir. Cela permet de mieux viser les montages abusifs sans pénaliser les restructurations d’entreprise, auxquelles l’apport-cession peut être utile.

M. le président Gilles Carrez. Cet amendement semble aller dans le bon sens.

M. Charles de Courson. Si la cession intervient après trois ans, il n’y aura plus d’obligation de réinvestissement, dites-vous – mais pas non plus d’exonération ?

M. le rapporteur général. Dans ce cas, le bénéfice du report demeure. Si la cession intervient avant trois ans, il ne prend fin que si le produit de la cession n’est pas réinvesti au cours des deux ans qui suivent.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 233).

Puis elle en vient à l’amendement CF 57 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Il s’agit de préciser que le réinvestissement doit aussi pouvoir se faire dans une activité industrielle.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 232).

Elle examine ensuite l’amendement CF 58 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Il s’agit également d’un amendement de précision qui assouplit le dispositif de réinvestissement. Une disposition similaire a été adoptée à l’article 6 du projet de loi de finances sur 2013. Il s’agit de pouvoir réinvestir, le cas échéant, dans plusieurs sociétés.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 230).

Puis elle examine l’amendement CF 56 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Dans le texte qui nous est soumis, le mécanisme d’encadrement des apports-cessions ne concerne pas les pactes Dutreil. Or ceux-ci n’emportent aujourd’hui d’avantages fiscaux que pour l’ISF et les droits de mutation, à l’exclusion des plus-values. Il n’y a donc pas lieu de favoriser ces pactes par rapport au droit commun en matière de plus-values, mais bien de maintenir le seul régime de faveur existant, conformément aux engagements qui ont été souscrits.

M. Charles de Courson. Je suis perplexe. Si l’on instaure un régime fiscal, il doit être cohérent. Si je comprends bien, les pactes Dutreil continueraient de bénéficier de l’abattement de 75 %, mais non des avantages sur les plus-values ?

M. le président Gilles Carrez. Non : à l’heure actuelle, les pactes Dutreil ont des conséquences sur les droits de succession et de donation et l’ISF, mais pas sur les plus-values.

M. Charles de Courson. Le texte gouvernemental me paraissait plus logique. Si l’on durcit le régime fiscal applicable aux plus-values – fût-ce pour atténuer ensuite la mesure, comme cela a été fait –, il faut maintenir les dispositions applicables aux pactes Dutreil.

M. le rapporteur général. L’imposition des plus-values des valeurs mobilières a été modifiée par le projet de loi de finances pour 2013. Il n’y a aucune raison de réserver un traitement différent aux plus-values réalisées dans le cadre des pactes Dutreil.

M. Charles de Courson. Il faut soutenir la position du Gouvernement si l’on veut préserver le capitalisme familial et éviter que les entreprises familiales ne soient toutes vendues à de grands groupes, ce qui nuirait au dynamisme du pays. Pour cette raison, je suis défavorable à l’amendement.

M. le président Gilles Carrez. Aujourd’hui, un actionnaire lié par un pacte Dutreil qui en sort pour vendre afin de réaliser une plus-value ne bénéficie d’aucune exonération d’impôt sur celle-ci puisque l’abattement de 75 % est limité aux droits de succession et de donation ainsi qu’à l’ISF. Mais qu’en est-il lorsqu’un associé A cède des titres à son associé B au sein du pacte ? Si je ne me trompe, la plus-value ainsi réalisée sera elle aussi assujettie à l’impôt.

M. Charles de Courson. Puisque l’on a durci le régime applicable aux plus-values, je maintiens qu’il faut en exonérer les pactes Dutreil pour les maintenir aussi longtemps que possible et les encourager.

M. le président Gilles Carrez. Je suis plutôt d’accord avec le rapporteur général. Les pactes incitent à l’actionnariat stable, que l’on favorise encore davantage en décourageant les cessions.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 231).

Elle examine ensuite l’amendement CF 53 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Cet amendement précise la manière dont il faut apprécier l’exigence d’exercice d’une activité opérationnelle pour les sociétés nouvelles.

M. Charles de Courson. Comment faisait-on avant ?

M. le rapporteur général. Moins bien !

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 229).

Puis elle adopte l’article 13 ainsi modifié.

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Article 14

Prévention des schémas d’optimisation fiscale
dits de « donation-cession » de titres de sociétés

Texte du projet de loi :

I.– L’article 150-0 D du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le 1 bis est ainsi rédigé :

« 1 bis. – En cas de cession, d’apport, de remboursement ou d’annulation de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres ou de droits s’y rapportant tels que définis à l’article 150-0 A, dans un délai de deux ans suivant leur acquisition par voie de donation ou de don manuel :

« a) Le prix d’acquisition des valeurs, titres ou droits concernés à retenir par le cédant pour la détermination du gain net de cession de ces valeurs, titres ou droits est leur prix ou leur valeur d’acquisition par le donateur augmenté des frais afférents à l’acquisition à titre gratuit, ou, si elle est inférieure, la valeur retenue pour la détermination des droits de mutation au moment de la transmission ;

« b) La durée de détention à retenir par le cédant est décomptée à partir de la date de souscription ou d’acquisition de ces valeurs, titres ou droits par le donateur ;

« Ces dispositions ne s’appliquent pas aux valeurs, titres ou droits qui ont fait l’objet d’une donation dans les conditions prévues aux articles 787 B ou 787 C.

« Pour l’application de ces dispositions, lorsque les valeurs, titres ou droits concernés ont fait l’objet de donations ou dons manuels successifs dans un délai de deux ans précédant leur cession, le prix d’acquisition des valeurs, titres ou droits à retenir est le prix ou la valeur d’acquisition par le premier donateur, ou si elle est inférieure, la valeur retenue pour la détermination des droits de mutation au moment de la première donation ou du premier don manuel intervenu dans le délai de deux ans précité. La durée de détention à retenir par le cédant est décomptée à partir de la date de souscription ou d’acquisition de ces valeurs, titres ou droits par le premier donateur.

« Lorsque, dans le délai de deux ans, les valeurs, titres ou droits reçus par donation ou par don manuel font l’objet d’un apport pour lequel le contribuable a opté pour le régime du report prévu à l’article 150-0 B ter, le montant de la plus-value en report est calculé selon les règles fixées aux trois premiers alinéas du présent 1 bis. Si les valeurs, titres ou droits apportés sont conservés par la société bénéficiaire de l’apport jusqu’à l’expiration du délai de deux ans, le montant de la plus-value en report est recalculé à partir de la valeur d’acquisition retenue pour la détermination des droits de mutation au titre de la donation considérée.

« Les dispositions du présent 1 bis ne s’appliquent pas en cas d’invalidité correspondant au classement dans la deuxième ou troisième des catégories prévues à l’article L. 341-4 du code de la sécurité sociale, de licenciement ou de décès du donataire ou de l’un des époux soumis à une imposition commune » ;

2° Le 9 est complété d’un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque les valeurs, titres ou droits remis à l’échange ont été acquis par voie de donation ou de don manuel, et que la vente ultérieure intervient moins de deux ans après ladite donation, le prix d’acquisition à retenir des valeurs, titres ou droits concernés est le prix ou la valeur d’acquisition par le donateur augmenté des frais afférents à l’acquisition à titre gratuit, ou si elle est inférieure, la valeur retenue pour la détermination des droits de mutation. La durée de détention à retenir par le cédant est décomptée à partir de la date de souscription ou d’acquisition de ces valeurs, titres ou droits par le donateur. Les dispositions du présent alinéa ne s’appliquent pas en cas d’invalidité correspondant au classement dans la deuxième ou troisième des catégories prévues à l’article L. 341 4 du code de la sécurité sociale, de licenciement ou de décès du donataire ou de l’un des époux soumis à une imposition commune.» ;

II.– Le premier alinéa du 2 du I de l’article 167 bis du même code est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette valeur est déterminée, lors d’un transfert de domicile fiscal hors de France intervenant dans un délai de deux ans suivant l’acquisition par voie de donation ou de don manuel des droits sociaux, valeurs, titres ou droits mentionnés au premier alinéa du 1 du présent I, dans les conditions prévues au 1 bis de l’article 150-0 D. » 

III.– Les I et II sont applicables aux donations et dons manuels réalisés à compter du 14 novembre 2012.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article vise à remettre en cause un schéma d’optimisation fiscale dit de donation-cession, au titre de la taxation des plus-values de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux des particuliers à l’impôt sur le revenu. À cette fin, il substitue à l’actuel régime de non-imposition de la plus-value latente en cas de transmission à titre gratuit des titres à l’origine de cette plus-value, un régime dérogatoire d’imposition de cette plus-value dans le chef du bénéficiaire lorsque les titres ont été acquis par donation puis cédés dans un délai inférieur à deux ans.

Afin d’éviter tout effet d’aubaine, ces dispositions entrent en vigueur le jour de la délibération du conseil des ministres sur le présent projet, soit le 14 novembre 2012.

En application du 1 de l’article 150-0 A du code général des impôts, seules sont en principe susceptibles de générer des plus-values imposables les cessions à titre onéreux. Celles-ci s'entendent des opérations emportant transfert à titre onéreux de la propriété des titres (vente, échange, apport...). Elles peuvent être réalisées de gré à gré entre deux personnes physiques (cessions directes) ou sur un marché réglementé.

A contrario, les mutations à titre gratuit n'entraînent en principe aucune taxation au titre des plus-values. Ces transmissions ne sont en effet pas susceptibles de dégager un gain pour le contribuable qui se dessaisit des titres qu’il possède. Dès lors, la transmission à titre gratuit des titres a pour conséquence l'exonération (on pourrait dire par purge) de la plus-value latente. Il n’y a aucune taxation à l’impôt sur le revenu de la plus-value constatée sur les titres depuis leur acquisition par le contribuable. La transmission des titres emporte transmission concomitante de leur valeur réelle à la date de la mutation. Les droits de mutation à titre gratuit (DMTG) taxent cette transmission de valeur. Le bénéficiaire de la transmission, qui doit acquitter ces droits, voit ensuite les titres entrer dans son patrimoine avec une valeur actualisée.

Un montage d’optimisation fiscale fréquemment utilisé consiste à faire précéder la cession des titres d'une donation. Ce type de montage permet ainsi de neutraliser la taxation des plus-values : la plus-value due avant la transmission est purgée par la donation (55), et la cession qui intervient juste après la donation ne génère aucune plus-value puisque le prix de cession est alors égal à la valeur des titres transmis.

SCHÉMA DE LA DONATION-CESSION

L’administration poursuit assez systématiquement ces opérations de donation-cession sur le terrain de l’abus de droit. On ne peut toutefois citer à ce stade que deux décisions du Conseil d’État statuant au contentieux sur ce type de montages. Elles témoignent de la difficulté pour l’administration d’obtenir gain de cause sur ce fondement : il lui faut en effet pouvoir démontrer la fictivité de la donation pour caractériser un abus de droit. Or cela lui est très malaisé compte tenu de la grande liberté qu’offre le droit civil en matière d’organisation des transmissions.

Dans une décision du 27 juillet 2012 (n° 327295, Berjot), le Conseil d'État a sanctionné le caractère fictif d’une donation avec réserve d'usufruit suivie d’une cession des titres. Il a en effet considéré que le produit de la cession était en fait appréhendé par les donateurs, les donataires n'ayant pas reçu la quote-part du produit correspondant à leurs droits attachés à la nue-propriété des titres. En revanche, dans une décision du 30 décembre 2011 (n° 330940, Motte-Sauvage), le Conseil d’État a estimé qu’une donation-partage de titres placés en report d'imposition, suivie de la cession immédiate de ces titres par les donataires à une société civile familiale contrôlée par les donateurs, ne présentait pas un caractère fictif constitutif d'un abus de droit, alors même que l'acte de donation était assorti de clauses restrictives des droits des donataires, dès lors que l'intention libérale des donateurs n'était pas remise en cause par ces clauses et qu'il y a bien eu dépouillement immédiat et irrévocable des titres en faveur des donataires. Les donateurs ne se sont pas réapproprié les sommes issues de la vente des titres, ces sommes ayant été versées dans leur intégralité sur des comptes bancaires ouverts au nom de chacun des enfants. La rapidité avec laquelle est intervenue la donation est en tout état de cause sans incidence.

L’administration a aussi pu tenter de remettre en cause la valeur des titres retenue pour la donation, la pratique d’optimisation consistant à porter cette valeur à un montant équivalent au prix de la cession qui va intervenir juste après la donation. Mais elle se heurte alors au 1 de l’article 150-0 D du code général des impôts qui précise qu’en cas de transmission à titre gratuit, le prix d’acquisition à retenir pour le calcul de la plus-value en cas de cession postérieure à la donation est la valeur retenue pour la détermination des droits de mutation. Dans une décision du 12 octobre 2011 (n° 324717, Rastier), le Conseil d’État a ainsi jugé que l’administration ne peut écarter la valeur retenue pour le calcul des droits de mutation – que cette valeur procède d'une déclaration du contribuable au titre des droits d'enregistrement ou, le cas échéant, d'une rectification de cette déclaration par l'administration elle-même selon les procédures prévues en matière de droits de mutation – qu'en établissant que cette valeur est dépourvue de toute signification.

Face à ces difficultés, le Gouvernement propose d’instaurer un nouveau régime légal d’imposition des plus-values, spécifique au cas des donations-cessions. S’agissant d’un régime objectif d’imposition, il ne sera plus nécessaire de tenter d’établir l'intention des contribuables d'échapper à l'imposition. L’instauration d’un tel système anti-optimisation fiscale est d’autant plus nécessaire que le durcissement de l’imposition des plus-values prévu par l’article 6 du projet de loi de finances pour 2013 risque de démultiplier les tentatives d’y échapper, notamment au travers d’opérations de donation-cession.

Le nouveau régime d’imposition est inséré au sein de l’article 150-0 D du code général des impôts qui détermine le mode de calcul des plus-values imposables à l’impôt sur le revenu. Le 1° du I du présent article rétablit un 1 bis au sein de l’article 150-0 D afin de prévoir le mode de taxation des donations-cessions.

Le principe de taxation retenu consiste à faire peser sur le donataire une taxation de la plus-value – qui a en principe été purgée par la donation – lorsqu’il cède les titres reçus dans un délai inférieur à deux ans après leur transmission. Ce choix a été fait car, si la donation n’est pas fictive, la décision de cession relève du seul donataire, qui doit donc en assumer les conséquences fiscales. Par ailleurs, si l’imposition reposait sur le donateur, la plus-value serait imposable alors même que sa transmission à titre gratuit ne procure aucune liquidité au contribuable pour s’acquitter de l’impôt correspondant, le produit de la cession revenant au donataire. En revanche, ce système aboutit à faire peser sur le donataire une imposition correspondant à une valorisation des titres intervenue alors qu’ils figuraient dans le patrimoine du donateur.

Il faut souligner que ce régime spécifique d’imposition ne concerne que les donations et dons manuels. En cas de succession (par principe imprévisible dans sa date et donc insusceptible de permettre la mise en place d’un schéma d’optimisation fiscale a priori), le principe de la purge de la plus-value par la transmission opérée à titre gratuit demeure.

Le mécanisme spécifique d’imposition n’est déclenché qu’en cas de cession des titres reçus dans un délai de deux ans suivant leur acquisition. Après l’expiration de ce délai, le régime de droit commun de purge de la plus-value retrouve à s’appliquer. Il ne risque plus en effet d’y avoir d’optimisation puisque les titres acquis à titre gratuit auront pu prendre de la valeur avant leur cession et une plus-value normalement taxable aura donc pu réapparaître.

Afin de rattraper la valeur des titres avant la donation, il est prévu de retenir comme prix d’acquisition, non pas la valeur retenue pour la détermination des droits de mutation, mais le prix pour lequel le bien a été acquis (à titre gratuit ou onéreux) par le donateur. Afin d’éviter une double imposition pour le donataire, il est cependant prévu d’ajouter à ce prix le montant des droits de mutation payés lors de la transmission correspondant à ces titres. Pour qu’il n’y ait pas non plus d’effet d’aubaine à rebours, il sera cependant de nouveau fait référence à la valeur retenue pour la détermination des droits de mutation si la somme du prix d’acquisition initial et des droits de mutation payés est supérieure à la valeur retenue pour la détermination des droits de mutation. Ce cas peut se produire notamment en cas de moins-value constatée avant la donation : si un titre acquis 100 est donné à 50 puis vendu à 60 dans le droit en vigueur, une plus-value de 10 est taxée ; il ne faudrait pas qu’avec le nouveau système de taxation, la plus-value post-cession soit absorbée par la moins-value latente ante-cession.

Pour l’application des abattements pour durée de détention (notamment ceux qui ont été introduits par l’article 6 du projet de loi de finances pour 2013 tel qu’adopté en première lecture à l’Assemblée nationale : 20 % entre deux et quatre ans, 30 % entre quatre et six ans, 40 % au-delà de six ans), le point de départ retenu est, dans tous les cas (quelle que soit la valeur retenue pour les titres), celui de l’acquisition par le donateur.

Ces modalités de calcul du prix d’acquisition et de la durée de détention sont adaptées pour tenir compte de quatre situations particulières :

a) en cas de donations successives dans le délai de deux ans, il sera toujours fait référence aux valeur et durée retenues pour le premier donateur en application de ce nouveau régime d’imposition ;

b) en cas d’apport des titres reçus et de bénéfice du nouveau régime de report d’imposition créé par l’article 13 du présent projet (pour contrer les montages d’apport-cession), il sera aussi fait référence aux valeur et durée retenues en application du nouveau régime d’imposition des donations-cessions pour le calcul de la plus-value en report pendant une période de deux ans ;

c) en cas d’échange des titres reçus et de bénéfice du régime de sursis d’imposition prévu par l’article 150-0 B, il sera également fait référence aux valeur et durée retenues en application du nouveau régime d’imposition des donations-cessions pour le calcul de la plus-value en sursis pendant une période de deux ans. Cette disposition est insérée au 9 de l’article 150-0 D du code général des impôts par le 2° du I du présent article ;

d) en cas de transfert du domicile fiscal hors de France dans un délai de deux ans après une donation de titres, il sera tenu compte pour le calcul de l’exit tax de la valeur et de la durée retenues en application du nouveau régime d’imposition des donations-cessions. Le II du présent article modifie en ce sens l’article 167 bis du code général des impôts relatif à l’exit tax.

Ce régime spécifique d’imposition ne s’appliquera pas dans deux cas :

– pour les titres qui font l’objet d’un engagement de conservation (pacte Dutreil) afin de pérenniser l’actionnariat familial dans le cadre des transmissions patrimoniales. Les opérations de donation-cession réalisées avec ces titres peuvent donc continuer à bénéficier du régime de purge de la plus-value. En effet, l’exonération de 75 % des droits de mutation à titre gratuit prévue par les articles 787 B et 787 C du code général des impôts pour ces titres peut déjà être remise en cause dans certains cas de cession et d’apport ne respectant pas les engagements collectif et individuel de conservation ;

– en cas d’accident de la vie concernant le donataire ou son conjoint (56), si le bénéficiaire de la donation est obligé involontairement de céder les titres reçus dans un délai inférieur à deux ans. Il en sera ainsi suite à un décès, suite à une invalidité grave ne permettant pas d'exercer une activité rémunérée (invalidité dite de deuxième catégorie – invalide absolument incapable d'exercer une profession quelconque – ou de troisième catégorie – invalide qui, étant absolument incapable d'exercer une profession, est en outre dans l'obligation d'avoir recours à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie), ou suite à un licenciement.

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La Commission est saisie de l’amendement CF 61 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Cet article vise les montages d’optimisation qui consistent à revendre immédiatement après avoir reçu une donation. Dans une première version du texte, le Gouvernement avait prévu un délai de trois ans, ramené à deux ans après le passage en Conseil d’État. Je propose de le ramener à un an et demi, ce qui me paraît plus raisonnable, mais pas à un an comme dans un amendement déposé par M. Hervé Mariton.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 228).

Elle examine ensuite l’amendement CF 59 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Le texte mentionne les personnes mariées mais non les pacsés. L’amendement remédie à cet oubli.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 227).

Puis elle adopte l’article 14 ainsi modifié.

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Article additionnel après l’article 14

Suppression de la retenue à la source sur les intérêts de placements antérieurs à 1987

La Commission est saisie de l’amendement CF 48 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Un amendement similaire avait été adopté par la Commission lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013, puis retiré en séance à la demande du Gouvernement afin de préciser plusieurs aspects techniques, ce qui a été fait.

L’article 5 du projet de loi de finances unifie les prélèvements applicables aux produits de placement à revenu fixe, mais il maintient l’application de la retenue à la source aux placements d’avant 1987, ce qui peut poser des problèmes de gestion. L’amendement propose d’intégrer la retenue à la source sur les intérêts de placements d’avant 1987 au prélèvement applicable sur les intérêts de placements d’après 1987. Il s’agit d’une mesure de simplification et de clarification.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 226).

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Article additionnel après l’article 14

Allongement du délai global d’investissement des FCPI et des FIP au titre de l’avantage consenti à l’ISF

Puis la Commission examine l’amendement CF 46 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Il s’agit d’un amendement de coordination avec le projet de loi de finances pour 2013. Comme celui-ci l’a fait pour la réduction d’impôt en faveur de l’investissement dans les PME – c’est le dispositif « Madelin » –, et comme le demandaient les acteurs du secteur, il porte le délai global d’investissement des FCPI et des FIP de 16 à 24 mois au titre de l’exonération d’ISF en cas d’investissement dans les PME.

La Commission adopte l’amendement (Amendement n° 225).

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Puis elle en vient à l’amendement CF 19 de M. de Courson.

M. Charles de Courson. Il s’agit d’harmoniser le plafond d’exonération d’ISF au titre de l’investissement dans les PME – 45 000 euros – et celui qui s’applique à l’impôt sur le revenu – 18 000 euros –, soit par le haut, soit en optant pour un moyen terme de 20 000 à 22 000 euros afin d’annuler le coût de la mesure. En effet, la disparité est curieuse dès lors que l’on peut choisir de faire porter l’exonération, soit sur l’ISF, soit sur l’impôt sur le revenu. L’on pourrait également procéder à une harmonisation des taux de l’exonération, qui sont de 18 % dans le dispositif Madelin applicable à l’impôt sur le revenu, mais de 50 % dans le cas de l’ISF – soit 30 % en réalité, car cela porte sur les 60 % éligibles du montant investi.

M. le rapporteur général. Avis défavorable à cet amendement qui ne concerne en fait que l’ISF et que l’on retrouve régulièrement, ce qui montre que certaines personnes savent se faire entendre. Les FCPI ne fonctionnent pas très bien. Nous devrons y réfléchir. Je ne suis pas certain qu’il faille leur accorder une aide fiscale supplémentaire, d’autant que l’opportunité fiscale l’emporte souvent – quoique pas toujours – sur l’intérêt économique.

La Commission rejette l’amendement.

*

* *

Article 15

Harmonisation des délais de réclamation applicables en matière fiscale
et de réparation des préjudices subis

Texte du projet de loi :

I.– Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° L'article L. 190 est ainsi modifié :

a) Le troisième alinéa est ainsi modifié :

– Après les mots : « droits à déduction » sont insérés les mots : « ou à la restitution d'impositions indues » ;

– Il est complété par les mots : « , révélée par une décision juridictionnelle ou par un avis rendu au contentieux. » ;

b) Le quatrième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :

« Ces actions sont introduites selon les règles de délais applicables aux réclamations mentionnées au premier alinéa. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent alinéa. » ;

c) Au cinquième alinéa, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « troisième » et les mots : « des Communautés européennes » sont remplacés par les mots : « de l'Union européenne » ;

2° Après l'article L. 190, il est inséré un article L. 190 A ainsi rédigé :

« Art. L. 190 A. – L'action en réparation du préjudice subi fondée sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure, ou la demande de dommages et intérêts résultant de la faute commise dans l’assiette, le contrôle et le recouvrement de l'impôt ne peut porter que sur une période postérieure au 1er janvier de la deuxième année précédant celle au cours de laquelle l’existence de la créance a été révélée au demandeur. »

II.– Le code des douanes est ainsi modifié :

1° le premier alinéa du 1 de l’article 352 est remplacé par les dispositions suivantes :

« Les demandes en restitution de droits et taxes perçus par l’administration des douanes, les demandes en paiement de loyers et les demandes en restitutions de marchandises, à l’exclusion des demandes formulées en application des articles 236 à 239 du code des douanes communautaires, sont présentées à l’administration dans les délais et conditions fixées par décret en Conseil d’État. » ;

2° À l'article 352 ter, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « deuxième » et le second alinéa est supprimé ;

3° Après l'article 352 ter, il est inséré un article 352 quater ainsi rédigé :

« Art. 352 quater. – L'action en réparation du préjudice subi fondée sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure ou la demande de dommages et intérêts résultant de la faute commise dans l'assiette, le contrôle et le recouvrement de l'impôt ne peut porter que sur une période postérieure au 1er janvier de la deuxième année précédant celle au cours de laquelle l'existence de la créance a été révélée au demandeur. »

III.– 1° Le 1° du I et le 2° du II s'appliquent aux réclamations et demandes fondées sur une décision juridictionnelle ou un avis rendu au contentieux prononcés à compter du 1er janvier 2013 ;

2° Le 2° du I et le 3° du II s’appliquent aux actions en réparation relatives à des créances dont l’existence a été révélée au demandeur à compter du 1er janvier 2013.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article vise à harmoniser les délais de réclamation en matière fiscale et de réparation des préjudices subis par les contribuables en cas de contentieux fiscal, que ce contentieux résulte de la non-conformité de la règle de droit appliquée à une règle de droit supérieure ou de l’action des services fiscaux et douaniers.

I.– LES RÈGLES EN VIGUEUR EN MATIÈRE DE DÉLAIS DE RÉCLAMATION ET DE RÉPARATION DES PRÉJUDICES SUBIS

En application de l’article L. 190 du livre des procédures fiscales (LPF), les réclamations présentées par les contribuables à l’administration fiscale relatives aux « impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l’administration » sont du ressort de la juridiction contentieuse lorsque ces réclamations « tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire ».

Il en est de même dans deux cas particuliers :

– si l’objet de la réclamation est d’obtenir la réparation d'erreurs commises par l'administration dans la détermination d'un résultat déficitaire ou d’un crédit de taxe sur la valeur ajoutée, même lorsque ces erreurs n'entraînent pas la mise en recouvrement d'une imposition supplémentaire ;

– si la réclamation se fonde sur la non-conformité de la règle de droit appliquée à une règle de droit supérieure.

Les réclamations présentées visent donc à obtenir soit la décharge ou la réduction d’une fraction ou de la totalité de l’imposition mise en recouvrement par voie de rôle ou d'avis de mise en recouvrement, soit la restitution de sommes acquittées, soit l'exercice d'un droit à déduction qui n’aurait pas été respecté.

Les contribuables peuvent ainsi adresser une réclamation au service administratif en charge des impôts, des contributions, droits ou taxes auxquels ils sont assujettis. L’administration dispose alors d’un délai de six mois pour leur répondre, à l’échéance duquel les contribuables peuvent décider de saisir la juridiction contentieuse compétente (57).

Les contribuables doivent présenter leur réclamation dans les délais prévus par la loi, sous peine que la réclamation soit considérée comme irrecevable. La date prise en compte pour apprécier le respect de cette condition est celle de l’envoi de la réclamation par le contribuable, le cachet de la poste faisant foi.

La réclamation ne peut ainsi être prise en compte si elle a été envoyée après l’expiration du délai légal (58).

Elle ne peut l’être également si son envoi précède la date à compter de laquelle s’apprécie le délai légal (59).

Par ailleurs, les délais de présentation des réclamations diffèrent selon les impôts concernés. Ils sont fixés par voie réglementaire (articles R 196-1 à R 196-6 du livre des procédures fiscales), sauf dans le cas des taxes et autres impositions recouvrées par l’administration des douanes pour lesquelles l’article 352 du code des douanes prévoit explicitement le délai à respecter.

 Les délais applicables aux réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et leurs taxes annexes

Les réclamations doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas :

– de la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement ;

– du versement de l'impôt contesté ;

– de la réalisation de l'événement (60) qui motive la réclamation.

Le schéma ci-dessous permet d’illustrer ce délai de droit commun :

 

Mise en recouvrement de
l’imposition le 1.07.2011

Art. R 196-1 a
Délai pour agir

         
     


Paiement de l’impôt
le 1.02.2012

             
                                 
 

2011

2012

2013

2014

2015

   
   

1/01

31/12

1/01

31/12

1/01

31/12

1/01

31/12

1/01

31/12

       

Source : Instruction fiscale 10 août 2006, 13 O-1-06

Toutefois, des dérogations spécifiques prévoient que ce délai peut être ramené, si cela est plus favorable au contribuable, au 31 décembre de l'année suivant celle :

– de la réception par le contribuable d'un nouvel avis d'imposition tenant compte des erreurs de celui adressé précédemment ;

– au cours de laquelle les retenues à la source et les prélèvements ont été opérés ;

– au cours de laquelle le contribuable a eu une connaissance certaine que les cotisations d'impôts établies l’étaient à tort ou faisaient double emploi.

 Les délais applicables aux réclamations relatives aux impôts directs locaux et à leurs taxes annexes

En matière d’impôts locaux, les délais de présentation des réclamations à l’administration courent jusqu’au 31 décembre de l’année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu soit la mise en recouvrement, soit la réalisation d’un événement motivant la réclamation, ou suivant celle au cours de laquelle le contribuable a eu une connaissance certaine qu’une erreur existait dans l’établissement du montant de son imposition.

 

Mise en recouvrement de
l’imposition le 1.07.2011

Art. R 196-2 a
Délai pour agir

         
   


Paiement de l’impôt
le 1.02.2012

             
                                 
 

2011

2012

2013

2014

     
   

1/01

31/12

1/01

31/12

1/01

31/12

1/01

31/12

           

 Le délai applicable en cas de reprise ou de rectification de l’imposition du contribuable

Un délai spécial est prévu dans le cas où le contribuable fait l’objet d’une procédure de reprise ou de rectification, de façon que ce dernier dispose d’un délai égal à celui de l’administration fiscale pour présenter ses propres réclamations. Ce délai spécial correspond ainsi au délai général de reprise de trois ans, qui peut être porté à dix ans dans certains cas de fraude grave (61).

Il expire donc selon le cas au 31 décembre de la troisième ou de la dixième année suivant celle au cours de laquelle l’administration a adressé la proposition de rectification au contribuable.

Dans le cas de procédures particulières, l’article L. 190 précité précise que la réclamation peut être présentée à l’administration à compter de :

– la réception de la réponse faite aux observations du contribuable par l’administration, prévue dans le cadre de la procédure contradictoire mentionnée à l’article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

– un délai de 30 jours après réception de la notification prévue en cas d’imposition d’office mentionnée à l'article L. 76 du même livre ;

– la notification de l'avis rendu par la commission départementale ou nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires en cas de saisine de cette dernière.

 Le délai applicable en cas de non-conformité de la règle de droit appliquée à une règle supérieure révélée par une décision juridictionnelle ou un avis rendu au contentieux

La non-conformité de la règle de droit appliquée au regard d’une règle supérieure peut être constatée de plusieurs manières et donner droit, à ce titre, à des délais de réclamation différents.

Dans le cas où la non-conformité est constatée en l’absence de décision juridictionnelle ou d’avis rendu au contentieux, les délais de réclamation de droit commun, qui varient selon les impositions concernées, s’appliquent. La modification de la règle de droit en vue de rétablir sa conformité avec des règles de droit supérieures n’est donc pas susceptible d’ouvrir droit à un nouveau délai de réclamation. Par ailleurs, la période prise en compte pour le calcul du montant de la restitution est fixée à deux années seulement avant celle au cours de laquelle la règle de droit a été modifiée.

Au contraire, dans le cas où la non-conformité est révélée par une décision juridictionnelle ou un avis rendu au contentieux, un nouveau délai de réclamation est ouvert. L’article L. 190 précité prévoit ainsi que le contribuable peut adresser des réclamations à l’administration fiscale, dans un délai de deux années suivant celle au cours de laquelle la décision est intervenue, au titre des impositions indûment versées pendant une période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle au cours de laquelle la décision ou l'avis révélant la non-conformité est intervenu. Les impositions acquittées au cours des années précédentes ne peuvent en revanche faire l’objet d’une action en restitution.

Le schéma ci-dessous illustre cette disposition :

 

Mise en recouvrement de
l’imposition le 1.07.2008

       

Décision juridictionnelle
du 1.07.2012

     
     

Paiement de l’impôt
le 1.02.2009

           

Art. R 196-1 a
Délai pour agir

                     


         
 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

   

1/01

31/12

1/01

31/12

1/01

31/12

1/01

31/12

1/01

31/12

1/01

31/12

1/01

31/12

     



Art. L 190 (al. 4)
Période répétible

         

Source : Instruction fiscale 10 août 2006, 13 O-1-06

Pour l’application de cette disposition, le même article précise que ces décisions et avis recouvrent :

– les décisions du Conseil d'État ;

– les arrêts de la Cour de cassation ;

– les arrêts du Tribunal des conflits ;

– les arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes, devenue la Cour de justice de l’Union européenne depuis le 1er décembre 2009, se prononçant sur un recours en annulation, sur une action en manquement ou sur une question préjudicielle.

 Le délai applicable aux demandes de restitutions adressées à l’administration des douanes

En application de l’article 352 du code des douanes, les contribuables qui souhaitent présenter à l’administration des douanes une demande en restitution « de droits et de marchandises et paiement de loyers » disposent d’un délai de trois années après le paiement des montants concernés, au-delà duquel les créances que l’administration détient à leur encontre sont prescrites à son profit.

Par ailleurs, si la demande de restitution trouve son fondement dans le défaut de validité du texte fondant la perception de la taxe recouvrée par les services des douanes et que ce défaut est révélé par une décision juridictionnelle, cette demande ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle au cours de laquelle la décision est intervenue. L’action en restitution ne peut donc viser les années antérieures à cette période.

2.– Les délais encadrant les recours en indemnités

Si le contribuable estime devoir être dédommagé du préjudice subi du fait de l'action des services fiscaux, il peut engager une procédure appuyée sur le droit commun de la responsabilité de la puissance publique.

Sa demande de dommages et intérêts doit alors être présentée avant que ne soient prescrites les créances que détient l’administration à son encontre. Cette prescription intervient, conformément aux dispositions des articles 1, 2 et 3 de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’État, les départements, les communes et les établissements publics, au titre des « créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du 1er janvier de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ».

Par conséquent, la demande du contribuable doit intervenir avant l’expiration de ce délai (62).

Par ailleurs, si le préjudice subi est lié à la non-conformité de la règle appliquée à la règle de droit supérieure révélée par une décision juridictionnelle, l’action en réparation de ce préjudice ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle où la décision est intervenue, en application des dispositions prévues à l’article L. 190 du livre des procédures fiscales.

Ainsi, dans le cas d'une décision juridictionnelle rendue au cours de l'année 2012, l’action en réparation doit être introduite avant le 31 décembre 2016 et ne peut porter que sur des faits intervenus après le 1er janvier 2009.

Ces dispositions s’appliquent également aux taxes recouvrées par l’administration des douanes, en l’absence de disposition spécifique au régime indemnitaire dans le code des douanes.

II.– LES MESURES D’HARMONISATION DES RÈGLES EN VIGUEUR PROPOSÉES PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article prévoit que l’ensemble des règles relatives à ces délais soit à l’avenir prévu par voie réglementaire (la détermination des délais mentionnés à l’article 352 du code des douanes est donc renvoyée à un décret en Conseil d’État).

Le délai de réclamation de droit commun de deux années suivant celle de la mise en recouvrement de l’impôt devrait donc s’appliquer à l’ensemble des réclamations présentées par les contribuables en matière fiscale (hormis les réclamations portant sur les impôts locaux et les délais spécifiques prévus en cas de redressement du contribuable par exemple).

Le délai de trois années prévu par l’article 352 du code des douanes ne devrait donc plus s’appliquer.

Par ailleurs, les délais des demandes en restitution des impositions indûment versées du fait de la non-conformité de la règle de droit appliquée à une règle de droit supérieure seraient, en application du présent article, identiques à ceux applicables aux demandes de décharge ou de réduction d’impôt, ou d’exercice de droits à déduction.

Si la rédaction proposée renvoie la détermination de ces délais à des décrets en Conseil d’État, ceux-ci devraient reprendre les délais de droit commun existant en matière de réclamation et de demande de restitution, soit dans les deux cas, un délai de deux années à compter de la date de mise en recouvrement.

Enfin, il est proposé de supprimer la réouverture des délais dont bénéficiaient les contribuables à la suite d’une décision de justice relevant la non-conformité de la règle appliquée à une règle de droit supérieure. Par conséquent, le délai applicable sera celui de droit commun, plus contraignant, de deux années suivant celle de la mise en recouvrement de l’impôt.

Après l’article 15

La Commission est saisie de l’amendement CF 5 de M. Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. À l’heure actuelle, un dispositif spécifique permet à l’INSEE, notamment, d’accéder sous certaines conditions à des informations nominatives susceptibles de nourrir ses études, alors que les autres chercheurs ne bénéficient d’aucune dérogation au secret fiscal. Aux fins de transparence, nous proposons de leur étendre cet accès tout en assurant la protection des données fiscales par un filtrage confié au comité du secret statistique, chargé de vérifier que la demande est justifiée par une recherche scientifique.

M. le président Gilles Carrez. Qui sont ces « chercheurs extérieurs » ?

M. Dominique Lefebvre. Les universitaires, par exemple.

Mme Marie-Christine Dalloz. Et les chercheurs du CNRS ?

M. le rapporteur général. Avis favorable à cet amendement, qui assortit la transparence, salutaire, de toutes les garanties nécessaires.

Mme Karine Berger. Je suis très gênée : pour la première fois depuis mon élection, je me sens en porte-à-faux par rapport à mes collègues de la commission et au rapporteur général. Le principe du secret statistique suppose que l’on ne puisse déduire des chiffres l’identité des personnes, car quelle que soit la bonne foi des demandeurs, l’on ne peut exclure que les informations délivrées soient utilisées à d’autres fins que la recherche. À titre personnel, mes chers collègues, je vous déconseille vivement d’adopter cet amendement. L’INSEE, que je connais bien, ne dispose pas d’un accès automatique à ces informations et je n’ai jamais pu y consulter les données individuelles d’un particulier ou d’une entreprise, ce qui est tout à fait normal car cela suppose que des conditions extrêmement strictes soient réunies.

M. Charles de Courson. Cet amendement offrirait aux chercheurs – certes encadrés – un accès aux dossiers individuels qui est refusé aux membres de la Commission des finances, à l’exception de son rapporteur général et de son président, tenus au secret fiscal. Ensuite, comme Mme Berger, je redoute l’utilisation qui pourrait être faite des fichiers, même sans identification nominative. Qu’adviendra-t-il d’eux au terme des recherches ? Seront-ils détruits ?

M. Pierre-Alain Muet. Il ne peut s’agir que de dossiers individuels anonymisés. Peut-être conviendrait-il de retirer l’amendement pour le redéposer dans une rédaction plus précise, car il est essentiel que les travaux scientifiques puissent s’appuyer sur des données individuelles.

M. Olivier Carré. L’anonymat est possible lorsque plusieurs centaines d’individus sont concernés, mais les études les plus intéressantes portent souvent sur des échantillons plus réduits. Comment les cent plus gros patrimoines se sont-ils construits au cours des cinquante dernières années ? Voilà un beau problème d’économie ; mais les données qui permettent de le traiter pourraient être exploitées de manière contraire aux règles de déontologie.

M. le président Gilles Carrez. Monsieur Lefebvre, acceptez-vous de retirer votre amendement pour le redéposer au titre de l’article 88 ?

M. Dominique Lefebvre. Oui. J’insisterai sur l’importance de la recherche scientifique en la matière – dont l’INSEE ne devrait pas avoir le monopole. La protection des données nominatives est assurée dans la rédaction actuelle de l’amendement par une procédure très stricte.

L’amendement est retiré.

*

* *

Article 16

Précisions des modalités d’imposition en cas de transfert de siège
ou d’établissement stable hors de France

Texte du projet de loi :

I.– Le code général des impôts est ainsi modifié :

A.– Le 2 de l’article 221 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « à l'étranger » sont remplacés par les mots : « dans un État étranger autre qu’un État membre de l’Union européenne ou qu’un État partie à l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement ayant une portée similaire à celle prévue par la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures, » ;

2° Le troisième alinéa est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque le transfert de siège ou d'un établissement s’effectue dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un État partie à l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement ayant une portée similaire à celle prévue par la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 précitée et qu’il s'accompagne du transfert d'éléments d'actifs, l'impôt sur les sociétés calculé à raison des plus-values latentes constatées sur les éléments de l’actif immobilisé transférés et des plus-values en report ou en sursis d’imposition est acquitté dans les deux mois suivant le transfert des actifs :

« a) Soit pour la totalité de son montant ;

« b) Soit, sur demande expresse de la société, pour le cinquième de son montant. Le solde est acquitté par fractions égales au plus tard à la date anniversaire du premier paiement au cours des quatre années suivantes. Le solde des fractions dues en application de la phrase précédente peut être versé à tout moment, en une seule fois, avant l’expiration de ce délai.

« L'impôt devient immédiatement exigible lorsqu'intervient, dans le délai de cinq ans, la cession des actifs ou leur transfert dans un autre État que ceux mentionnés au troisième alinéa du présent 2 ou la dissolution de la société ou le non-respect de l'une des échéances de paiement.

« La société adresse chaque année au service des impôts des non résidents un état conforme au modèle fourni par l'administration faisant apparaître les renseignements nécessaires au suivi des plus-values latentes sur les éléments de l'actif immobilisé transférés, mentionnées au quatrième alinéa. »

B.– Après le g du I de l’article 1763, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« h) L’état mentionné au septième alinéa du 2 de l’article 221. »

II.– Le I s’applique aux transferts réalisés au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2012.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article a pour objet de tirer les conséquences de la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne. Dans deux arrêts assez récents, celle-ci a estimé que les mécanismes d’exit tax ayant pour effet d’imposer de manière immédiate les plus-values latentes sur les actifs d’une société transférés d’un État de l’Union européenne vers un autre portent une atteinte disproportionnée au principe de liberté d’établissement, consacré par l’article 49 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Ces deux arrêts ne concernaient pas la législation française, mais les législations néerlandaise et portugaise. Le code général des impôts prévoit cependant, selon des modalités au demeurant peu claires, un dispositif identique. Afin d’éviter une condamnation ultérieure de la France au titre de ce dispositif, le Gouvernement entend par le présent article offrir aux entreprises concernées la possibilité de fractionner le paiement de leur impôt, l’option en faveur d’un paiement différé étant considérée par la Cour comme une condition de conformité de l’exit tax au droit de l’Union européenne.

I.– LE DROIT EXISTANT

Afin de mettre la législation française en conformité avec le droit de l’Union européenne (63), l’article 34 de la loi de finances pour 2005 (64) a prévu une exception au principe de taxation immédiate des bénéfices en cas de transfert à l’étranger.

Le dernier alinéa du 2 de l’article 221 dispose en effet que « le transfert de siège dans un autre État membre de la Communauté européenne, qu’il s’accompagne ou non de la perte de la personnalité juridique en France, n’emporte pas les conséquences de la cessation d’entreprise ».

L’évaluation préalable annexée au présent article indique que « cette exception au principe de la cessation d’entreprise ne s’applique que dans la mesure où le transfert de siège d’une société française dans un autre État membre ne s’accompagne pas du transfert total des actifs ».

Le transfert total des actifs entraîne donc, en l’état du droit en vigueur, l’imposition immédiate :

– des bénéfices d’exploitation dégagés depuis la date d’ouverture de l’exercice en cours ;

– des bénéfices en sursis d’imposition (notamment les provisions constituées en franchise d’impôt et les plus-values issues de fusions antérieures) ;

– des plus-values latentes afférentes aux éléments d’actif immobilisé (65).

Même en cas de transfert partiel, la taxation immédiate des actifs transférés est possible (à l’exclusion, donc, des actifs maintenus au bilan d’un établissement stable français (66)) : l’évaluation préalable indique que dans ce cas, « seules les plus-values latentes afférentes aux éléments d’actif immobilisé transférés sont immédiatement taxables ». Les bénéfices d’exploitation et les bénéfices en sursis d’imposition restent en effet taxables en France du fait du maintien d’un établissement stable.

Ces « exceptions à l’exception » ne sont toutefois pas expressément prévues par l’article 221 du CGI. Dans leurs commentaires précités de l’article 17 du projet de loi de finances pour 2005, les Rapporteurs généraux d’alors indiquaient que seraient seules soumises à taxation immédiate, en cas de transfert de siège au sein de l’Union, « les plus-values afférentes aux actifs réellement transférés dans le pays d’accueil ou cédés lors du transfert de siège ».

Selon certains commentateurs, la possibilité d’imposer les plus-values latentes résulte de « la simple application du droit commun […]. Une simple sortie de bilan constitue en effet une "cession" rendant exigible l’impôt de plus-values […]. Il en va ainsi d’un transfert d’actif d’un bilan français vers un bilan étranger. À strictement parler, c’est donc la sortie des actifs hors de France qui constitue l’événement imposable, et non le transfert du siège à l’étranger qui, en tant que tel, n’emporte pas cessation d’entreprise » (67). Le même auteur indique que la position selon laquelle les plus-values latentes sont imposables lors du transfert d’actifs « est défendue par l’administration fiscale et figure dans un projet d’instruction, qui n’a jamais été publié » (68). Cette affirmation n’a pas été démentie auprès du Rapporteur général.

Il lui a en revanche été confirmé que la taxation immédiate des bénéfices d’exploitation et des bénéfices en report en cas de transfert total des actifs résulte de l’application des dispositions de droit commun (2 de l’article 221), qui assimilent un tel transfert à la disparition du sujet fiscal, rendant nécessaire l’établissement de l’impôt sine die.

B.– UN MÉCANISME REMIS EN CAUSE PAR LA COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE

● La taxation immédiate des plus-values latentes en cas de transfert d’actifs au sein de l’Union européenne a récemment été remise en cause par la jurisprudence. La Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a en effet jugé que le régime de taxation néerlandais – similaire au nôtre – portait une atteinte disproportionnée au principe de liberté d’établissement posé par l’article 49 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (29 novembre 2011, National Grind Indus BV, affaire C-371/10).

Cette décision s’inscrit dans la ligne jurisprudentielle tracée par l’arrêt Lasteyrie du Saillant du 11 mars 2004 (affaire C-9/02), dans lequel la même Cour a déclaré contraire à la liberté d’établissement l’exit tax qui frappait, en application de l’article 167 bis du CGI, les plus-values latentes sur les droits sociaux des personnes physiques transférant leur domicile fiscal hors de France.

● La législation néerlandaise considérée prévoit l’imposition immédiate des plus-values latentes afférentes aux actifs transférés à l’occasion d’un transfert du siège d’une société de droit néerlandais vers un autre État membre de l’Union européenne (UE). Les plus-values latentes n’étant pas imposées à l’occasion du transfert du siège d’une même société à l’intérieur du territoire néerlandais, mais uniquement lors de leur éventuelle réalisation (donc lorsqu’elles ne sont plus latentes), la législation nationale crée un désavantage de trésorerie au détriment de la société dont le siège est transféré dans un autre État. La Cour a jugé qu’en ce sens, elle est constitutive d’une restriction à la liberté d’établissement.

● Par application d’une jurisprudence constante, une restriction à la liberté d’établissement peut cependant être admise si elle se justifie par des raisons impérieuses d’intérêt général et qu’elle n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs fixés, en vertu du principe de proportionnalité
(CJUE, 13 décembre 2005, Marks & Spencer, affaire C-446/03).

Le même arrêt reconnaît la préservation du pouvoir d’imposition entre les États membres comme un objectif légitime, pouvant justifier une restriction à la liberté d’établissement. La Cour a en conséquence jugé que le transfert du siège d’une entreprise dans un autre État membre ne contraint pas l’État d’origine à renoncer à imposer une plus-value née avant le transfert (12 décembre 2006, Test Claimants in Class IV of the ACT Group Litigation, affaire C-374/04).

La Cour a ainsi jugé que le pouvoir d’imposition de la plus-value latente par l’État d’origine au moment du transfert ne porte pas, en tant que tel, une atteinte disproportionnée au principe de liberté d’établissement tel que posé par l’article 49 du traité.

● Comme le relève l’avocat général dans ses conclusions, « il est considérablement plus difficile d’évaluer si le recouvrement immédiat de la dette fiscale est, lui aussi, compatible avec le principe de proportionnalité » (69).

La Cour a posé comme postulat de bon sens que « le recouvrement de la dette fiscale au moment de la réalisation effective, dans l’État membre d’accueil, de l’actif pour lequel une plus-value a été constatée par les autorités de l’État membre d’origine à l’occasion du transfert […] tend à éviter les problèmes de trésorerie que le recouvrement immédiat de l’imposition due sur les plus-values latentes pourrait générer » (70). Mais la Cour a reconnu, comme l’avocat général, que le suivi des actifs transférés – indispensable si la taxation des plus-values latentes doit intervenir au moment de la cession de l’actif – pourrait générer pour l’entreprise une charge administrative constituant « une entrave à la liberté d’établissement qui ne serait pas nécessairement moins attentatoire à cette liberté que le recouvrement immédiat de la dette fiscale » (71).

En conséquence, seul un dispositif optionnel a été jugé par la Cour conforme au principe de proportionnalité, dans les termes suivants : « une réglementation nationale offrant le choix à la société qui transfère […] entre, d’une part, le paiement immédiat du montant de l’imposition, qui crée un désavantage en matière de trésorerie pour cette société mais la dispense de charges administratives ultérieures, et, d’autre part, le paiement différé du montant de ladite imposition, […] qui est nécessairement accompagné d’une charge administrative pour la société concernée, liée au suivi des actifs transférés, constituerait une mesure qui, tout en étant propre à garantir la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres, serait moins attentatoire à la liberté d’établissement que la mesure en cause au principal » (à savoir l’imposition nécessairement immédiate des plus-values latentes) 72).

● La Cour a eu l’occasion de confirmer la jurisprudence ainsi bâtie dans un arrêt Commission contre Portugal du 6 septembre 2012 (affaire C-38/10). Elle en a étendu la portée à l’imposition des plus-values latentes afférentes au transfert des actifs d’un établissement stable d’un État membre vers un autre État membre (sans que ce transfert s’accompagne nécessairement du transfert du siège).

Dans ses conclusions, l’avocat général a proposé de reconnaître une autre alternative à la taxation immédiate en cas de transfert d’actifs, en plus du paiement différé de l’impôt : « offrir également aux sociétés le choix d’échelonner le paiement de la dette fiscale, […] par exemple lors d’échéances annuelles ou en fonction de la réalisation des plus-values, [peut] constituer une mesure adéquate et proportionnée à l’objectif de préservation de la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres » (73).

● L’exit tax française, qui impose automatiquement les plus-values latentes au moment de leur transfert, serait donc vraisemblablement jugée contraire au droit de l’Union en cas de contentieux.

L’évaluation préalable annexée au présent article indique que « la Commission a d’ailleurs d’ores et déjà adressé une lettre à la France le 17 avril 2012 l’interrogeant sur son régime de taxation immédiate prévu au 2 de l’article 221 du code général des impôts ».

II.– LE DROIT PROPOSÉ

Il est proposé de distinguer clairement, au sein du 2 de l’article 221 du CGI, le régime applicable aux transferts de siège ou d’établissement hors de l’Union européenne du régime applicable au transfert d’éléments d’actifs en son sein.

Il y a lieu de préciser à cet égard que le régime applicable aux transferts au sein de l’UE sera également applicable aux transferts dans un État partie à l’Espace économique européen (EEE) ayant conclu avec la France :

– une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ;

– et une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement, ayant une portée similaire à celle prévue par la directive régissant cette matière pour les États membres de l’UE (74).

Il faut rappeler que l’article 31 de l’Accord sur l’Espace économique européen proscrit, au sein de cet espace, les restrictions à la liberté d’établissement. La Cour de l’Association européenne de libre-échange a récemment rendu un arrêt dont les conclusions sont proches de celles des arrêts précités de la CJUE (3 octobre 2012, Arcade Drilling AS v Staten v/Skatt Vest, affaire E-15/11).

La modification apportée au premier alinéa du 2 de l’article 221 (alinéa 3) a pour effet de réserver le mécanisme de taxation immédiate, en cas de transfert du siège ou d’un établissement de la société hors de France, aux transferts réalisés dans un État hors UE ou hors EEE (à condition que la France ait signé avec ce dernier les deux conventions précédemment évoquées).

Pour les transferts dans les États membres de l’UE ou de l’EEE (avec lesquels la France a signé les conventions précitées), un nouveau dispositif est prévu, qui se substitue à l’actuel dernier alinéa du 2 de l’article 221.

● Le premier mérite de ce dispositif est de prévoir explicitement, à une place pertinente dans le code général des impôts, que ces transferts ne sont pas intégralement et systématiquement exonérés d’IS. Comme cela a été rappelé, le mécanisme actuel de taxation n’apparaît pas clairement à la lecture du 2 de l’article 221, dont le dernier alinéa dispose que « le transfert de siège dans autre État membre de la Communauté européenne (75), qu’il s’accompagne ou non de la perte de la personnalité juridique en France, n’emporte pas les conséquences de la cessation d’activité ».

● Le fait générateur de la taxation est précisé : conformément aux interprétations qui pouvaient être faites du droit existant (cf. supra), il est confirmé que l’imposition n’est déclenchée que lorsque le transfert de siège ou d’un établissement « s’accompagne du transfert d’éléments d’actifs » (alinéa 5).

Il est explicitement prévu que le transfert du siège ou d’un établissement accompagné du transfert d’éléments d’actifs entraînera le paiement de l’IS au titre :

– des plus-values latentes constatées sur les éléments de l’actif immobilisé transféré ;

– des plus-values en report ou en sursis d’imposition.

On rappellera pour mémoire que dans le régime du sursis, la plus-value n’est ni constatée ni imposée au moment de la cession, la charge fiscale latente étant transférée au cessionnaire, qui devra payer l’impôt lorsque le sursis prendra fin, c’est-à-dire en cas de revente de l’actif concerné. Le sursis s’applique notamment en cas de fusion, pour les plus-values sur les immobilisations non amortissables. Dans le régime du report, la plus-value est constatée au moment de la cession, mais non imposée. Lorsque le report prend fin (le plus souvent à la revente de l’actif), la plus-value est imposée dans le chef du cédant.

Les bénéfices d’exploitation restent soumis au droit commun décrit supra (imposition immédiate en cas de transfert total des actifs).

● L’impôt est dû dans les deux mois suivant le transfert des actifs.

● Mais, et c’est là le principal apport du présent article, le montant d’impôt dû à l’expiration de ce délai de deux mois est variable. La société peut – elle le doit aujourd’hui –régler en une seule fois sa cotisation d’impôt (alinéa 6). Elle peut également, « sur demande expresse », ne régler qu’un cinquième de cette cotisation (alinéa 7). Le solde doit en principe être acquitté « par fractions égales au plus tard à la date anniversaire du premier paiement au cours des quatre années suivantes ».

Exemple : soit une entreprise redevable de l’IS en France qui transfère son siège et ses actifs en Allemagne au 1er janvier de l’année N. L’administration fiscale constate une plus-value latente sur les actifs, ayant pour effet de mettre à la charge de l’entreprise une exit tax d’un montant de 100. Au 1er mars de la même année, cette entreprise peut s’acquitter de la totalité de ce montant, ou bien demander à n’en payer qu’un cinquième. Si l’entreprise choisit cette seconde option, elle devra s’acquitter d’un montant de 20 au 1er mars de l’année N, puis d’un montant égal au plus tard le 1er mars de chacune des années N+1 à N+4.

Après le premier versement, l’entreprise peut toutefois choisir de verser le solde à tout moment, en une seule fois.

L’exposé des motifs indique qu’« un paiement fractionné de l’imposition sur plusieurs années, à l’instar de ce que prévoient les législations suédoise et allemande, permet de concilier la liberté d’établissement et l’objectif de juste répartition de la matière imposable entre États membres ». La Commission a retiré une procédure en manquement engagée contre la Suède après que celle-ci a introduit une option en faveur du paiement fractionné. Par ailleurs, une réponse explicite de la Cour sera apportée au sujet de la conformité de la législation allemande au traité, une question préjudicielle lui ayant été posée par un tribunal.

La législation française serait ainsi mise en conformité avec la jurisprudence de la CJUE. À l’appui de cette thèse, l’évaluation préalable indique que « dans le cas où l’option pour le paiement échelonné est exercée, les sociétés pourront ainsi bénéficier d’une trésorerie supplémentaire ».

Cette affirmation n’est pas contestable. Il faut cependant relever que l’arrêt National Grind Indus BV semble considérer que la perte de trésorerie subie par une entreprise immédiatement taxée au titre d’une plus-value latente en cas de transfert de siège résulte surtout du fait que la taxation intervient avant la réalisation de la plus-value.

Dans le dispositif proposé par le présent article, l’entreprise choisissant de ne pas procéder au paiement immédiat de son impôt doit néanmoins s’en acquitter, au moins pour partie, avant la revente éventuelle de l’actif. Le Gouvernement considère que l’option en faveur d’un paiement fractionné répond à l’exigence de la Cour, dont l’arrêt évoque expressément un paiement « différé » (76). Les conclusions de l’avocat général sur l’arrêt Commission contre Portugal, qui n’ont pas été démenties par la Cour, confortent, à cet égard, l’option retenue par le Gouvernement.

● L’article prévoit en son alinéa 8 l’interruption du paiement fractionné, au profit d’un paiement immédiat du solde, lorsque, dans le délai de cinq ans, intervient l’un des événements suivants :

– la cession des actifs ;

– leur transfert dans un autre État, hors UE ou EEE (77) ;

– la dissolution de la société ;

– le non-respect de l’une des échéances de paiement.

● L’option en faveur du paiement fractionné nécessite le suivi des actifs transférés, par exemple pour procéder au recouvrement du solde en cas de cession desdits actifs pendant la période de cinq ans. C’est pourquoi l’alinéa 9 prévoit que la société adresse chaque année au service des impôts des non résidents un état de suivi des plus-values latentes sur les éléments de l’actif immobilisé transférés.

● L’alinéa 11 prévoit l’adjonction de cet état de suivi à la liste des documents dont, en application de l’article 1763 du CGI, le défaut de production ou le caractère inexact ou incomplet entraîne l’application d’une amende égale à 5 % des sommes omises (5 % de la plus-value en l’espèce).

B.– L’ENTRÉE EN VIGUEUR ET L’EFFET BUDGÉTAIRE

● Le II du présent article (alinéa 12) prévoit une entrée en vigueur permettant son application aux transferts réalisés au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2012.

● L’impact des dispositions de cet article sur le budget de l’État n’est pas chiffré par l’évaluation préalable. Deux effets peuvent toutefois être distingués :

– l’État pourrait enregistrer une perte de trésorerie, puisque les montants d’impôts encaissés aujourd’hui en une seule fois seraient susceptibles de l’être demain sur une période de cinq ans ;

– la sécurisation juridique du dispositif permettra le maintien d’un dispositif de taxation, en évitant sa censure par la CJUE.

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La Commission adopte l’article 16 sans modification.

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Après l’article 16

La Commission est saisie de l’amendement CF 22 de Mme Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cet amendement invite à réfléchir à la différence entre la taxation du capital productif et celle du capital non productif de nos entreprises. La dépense fiscale liée au mécénat d’entreprise ne cesse de croître : de 570 millions en 2011, elle passe à 800 millions selon l’évaluation du Gouvernement pour 2013. Au nom de l’objectif de maîtrise de nos finances publiques, nous proposons par conséquent de ramener la réduction d’impôt de 60 à 50 % du montant du don en fixant le plafond de dépenses retenues à 1 ‰ du chiffre d’affaires total, hors taxes de l’entreprise mécène, contre 5 ‰ aujourd’hui.

M. le président Gilles Carrez. J’ai cosigné cet amendement, car depuis la loi sur le mécénat de 2003, la dépense s’est envolée. L’entreprise bénéficie non seulement d’une réduction de 60 % de l’IS, mais aussi, bien souvent, d’autres avantages, dont des entrées gratuites au musée, qui peuvent porter le taux de subvention à 80 % ! Le principe est louable, mais le taux excessif. Le crédit d’impôt compétitivité est plus défendable. En adoptant l’amendement, nous ferions la preuve de notre détermination à préserver la recette de l’IS.

M. le rapporteur général. Avis défavorable. Après avoir chanté les louanges de la stabilité fiscale, Mme Dalloz propose de modifier une disposition que l’Inspection générale des finances a jugée efficace, ce qui est rare. Cette évaluation, ainsi que d’autres arbitrages, nous ont dissuadés d’y toucher il y a quelques mois : nous avons préféré durcir d’autres dispositifs.

M. Marc Goua. Je partage l’avis du rapporteur général. Dans la France profonde, le mécénat d’entreprise est essentiel à la vie culturelle. Si les montants sont globalement très élevés, il n’en va pas de même des dons de chaque entreprise. Le double cliquet actuel – pourcentage du montant global et pourcentage du chiffre d’affaires – me paraît suffisant.

M. Pierre-Alain Muet. Je souscris pleinement aux propos de M. Goua : tout comme les dons, dont nous débattrons bientôt, qui soutiennent les associations de bénévoles œuvrant dans le domaine social, cette dépense fiscale est indispensable aux activités culturelles. Il serait beaucoup plus coûteux de la remplacer par une subvention de l’État. Ce raisonnement a conduit l’Inspection générale des finances à l’évaluer positivement. Ce n’est pas le moment de la modifier.

M. le président Gilles Carrez. Il convient pourtant de maîtriser cette dépense fiscale, créée en 2003. Songez que le budget consolidé du ministère de la Culture – crédits budgétaires, dépenses fiscales et subventions aux opérateurs – est passé de 6 milliards d’euros en 2004 à plus de 8 milliards en 2012, soit une augmentation de près de 50 % ! Or nous devons impérativement redresser nos finances publiques. Je ne défends pas ici un point de vue partisan, mais l’intérêt général.

M. le rapporteur général. Lors de la séance des questions au Gouvernement, un député d’opposition nous a accusés de massacrer la culture…

M. le président Gilles Carrez. J’ai applaudi la réponse du ministre.

M. le rapporteur général. Vous devez, chers collègues de l’opposition, cesser de tenir des discours contradictoires : vous ne pouvez pas à la fois insister sur la stabilité fiscale, nous accuser de massacrer la culture et nous reprocher de maintenir le régime fiscal favorable au mécénat. Il a été envisagé, au plus haut niveau de l’État, de le remettre en cause. Cependant, des arbitrages ont été rendus : il a été décidé de faire porter l’effort sur d’autres dispositifs afin de préserver cette dépense fiscale, certes plutôt coûteuse, mais jugée efficace. Nous assumons ce choix.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CF 4 de M. Thomas Thévenoud.

M. Thomas Thévenoud. Cet amendement, que j’ai déposé avec Carole Delga, vise à proroger de deux ans le crédit d’impôt en faveur des métiers d’arts - CIMA –, qui arrive à expiration le 31 décembre 2012. Cette disposition avait été approuvée par notre Commission lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013. Toutefois, la mise en œuvre de ce crédit d’impôt donne lieu à des contentieux en augmentation sensible et, lors de la séance publique, le ministre délégué chargé du budget avait, tout en se déclarant favorable à la prorogation du dispositif, jugé nécessaire de réfléchir à son champ d’application, notamment à la notion de « conception » en matière d’artisanat d’art. Or ce travail n’a pas été mené à bien. Je souhaite donc que la Commission adopte cet amendement, afin que le Gouvernement s’engage dans cette réflexion et propose une rédaction plus précise des dispositions en cause. Ce crédit d’impôt est très utile aux artisans d’art, tant dans les villes qu’en milieu rural. Il convient de défendre leur savoir-faire et la qualité française.

M. le rapporteur général. Cet amendement avait été adopté par notre Commission et le Gouvernement avait promis de l’examiner avec bienveillance. Cependant, en séance publique, il a émis un avis défavorable, en précisant qu’il proposerait une disposition dans le cadre du collectif que nous examinons, ce qu’il n’a pas fait. Je suis très embarrassé : selon mes informations, cet amendement pourrait connaître le même sort que le précédent. Je suis donc réservé sur l’idée de le reprendre au nom de la Commission.

M. Thomas Thévenoud. Le ministre délégué avait clairement affiché sa volonté de prolonger le dispositif et un engagement a été pris au plus haut niveau de l’État. De contacts avec le ministère de l’économie et des finances, je comprends que le temps aurait manqué pour réfléchir au champ d’application et trouver la rédaction idoine. Je souhaite que la Commission adopte cet amendement, afin que le Gouvernement réitère son engagement et mobilise les services compétents.

M. le rapporteur général. Je vous suggère de retirer cet amendement et de le redéposer pour la réunion qui se tiendra au titre de l’article 88 du Règlement, de sorte que le débat puisse avoir lieu en séance publique, mais je ne souhaite pas que la Commission l’adopte à nouveau en prenant le risque d’affaiblir sa position.

L’amendement CF 4 est retiré.

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Article 17

Ajustements consécutifs notamment à la suppression de la taxe professionnelle et à la mise en œuvre des schémas départementaux
de coopération intercommunale

Texte du projet de loi :

I.– Cotisation foncière des entreprises : cotisation minimum

A.– Le troisième alinéa du I de l’article 1639 A bis du code général des impôts est supprimé.

B.– Le I de l’article 1647 D du même code est ainsi modifié :

1° Au quatrième alinéa du 1, les mots : « celui mentionné au premier alinéa du 2 » sont remplacés par les mots : « ceux mentionnés aux a et b du 2 » ;

2° Le 2 est remplacé par les dispositions suivantes :

« 2. À défaut de délibération pour l'une des deux premières catégories de redevable définie au 1, le montant de la base minimum qui est applicable est égal :

« a. Pour les communes existantes au 31 décembre 2012 et les établissements publics de coopération intercommunale soumis à l’article 1609 nonies C ou au I de l’article 1609 quinquies C à la même date : au montant de la base minimum applicable sur leur territoire au titre de l’année 2012 ;

« b. Pour les communes nouvelles créées à compter du 1er janvier 2013, pour celles rattachées à un établissement public de coopération intercommunale soumis à l’article 1609 nonies C ou au I de l’article 1609 quinquies C à compter de la même date ainsi que pour les établissements publics soumis à l’un de ces régimes pour la première fois à compter de cette date à la suite d’une création, d’une fusion ou d’un changement de régime fiscal :

« – l’année au cours de laquelle cette opération produit ses effets au plan fiscal : au montant applicable l’année précédente sur le territoire de chacune des communes ou établissements publics de coopération intercommunale concernés ;

« – les années suivantes : à la moyenne des bases minimum applicables sur leur territoire la première année pondérée par le nombre de redevables soumis à la cotisation minimum au titre de la même année.

« c. Lorsque le montant de la base minimum de cotisation foncière des entreprises déterminée dans les conditions définies au présent 2 est supérieur aux plafonds définis au 1, pour les deux premières catégories de redevables ou pour l'une d'entre elles seulement, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale peuvent, par une délibération prise dans les conditions prévues au I de l'article 1639 A bis, réduire le montant de la base minimum. » ;

3° Après le 2, il est inséré un 2 bis ainsi rédigé :

« 2 bis. Lorsque, à la suite d’une création, d’un changement de régime fiscal ou d’une fusion, un établissement public de coopération intercommunale fait application du régime prévu à l’article 1609 nonies C ou du I de l’article 1609 quinquies C, le montant de la base minimum applicable l’année où, pour la première fois, cette opération produit ses effets au plan fiscal, est égal à celui applicable l’année précédente sur le territoire de chacune des communes ou établissements publics de coopération intercommunale concernés.

« L’année suivant celle où cette opération produit pour la première fois ses effets au plan fiscal, les établissements publics de coopération intercommunale qui, par une délibération prise dans les conditions prévues au I de l’article 1639 A bis et au 1 du I du présent article, fixent, pour chacune des deux premières catégories de contribuables définies au 1 ou pour l’une d’entre elles seulement, le montant de la base minimum, peuvent, par une délibération prise dans les mêmes conditions, décider d’appliquer, pour la catégorie de contribuables concernée, des bases minimum différentes selon le territoire des communes ou des établissements publics de coopération intercommunaux préexistants pendant une période maximale de 5 ans.

« Les écarts entre, d’une part, les bases minimum appliquées sur le territoire de l’établissement public de coopération intercommunale l’année au cours de laquelle l’opération a pour la première fois produit ses effets au plan fiscal et, d’autre part, celle qu’il a fixée sont réduits par fractions égales sur la durée qu’il a retenue.

« La procédure de convergence définie aux deux alinéas précédents n’est pas applicable lorsque le rapport entre la base minimum la plus faible applicable sur le territoire de l’établissement public de coopération intercommunale et celle qu’il a fixée est supérieur à 80 %. Ce rapport s’apprécie séparément pour chacune des deux premières catégories de contribuables définies au 1.

« Le dispositif de convergence prévu au présent 2 bis s’applique également en cas de création d’une commune nouvelle et en cas de rattachement d’une commune à un établissement public de coopération intercommunale faisant application du régime prévu à l’article 1609 nonies C ou du I de l’article 1609 quinquies C. »

C.– Les dispositions des A et B s’appliquent à compter du 1er janvier 2013.

II.– Mesures relatives aux taux d’imposition

Report de la date limite de vote des taux des impôts directs locaux

A.– Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Aux premier et troisième alinéas du II de l’article 1522 bis, la date : « 31 mars » est remplacée par la date : « 15 avril » ;

2° Au second alinéa de l’article 1638-00 bis, la date : « 31 mars » est remplacée par la date : « 15 avril » ;

3° Le I de l’article 1639 A est ainsi modifié :

a. Au premier alinéa, la date : « 31 mars » est remplacée par la date : « 15 avril » ;

b. Au deuxième alinéa, la date : « 15 mars » est remplacée par la date : « 31 mars » et les mots : « ou généraux concernés par ce renouvellement, du 31 mars au 15 avril et, pour les conseils régionaux, du 31 mars au 30 avril. » sont remplacés par les mots : « , généraux ou régionaux concernés par ce renouvellement, du 15 avril au 30 avril. » ;

c. Au troisième alinéa, la date : « 15 mars » est remplacée par la date : « 31 mars ».

B.– Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Au troisième alinéa de l’article L. 1612-1, la date : « 31 mars » est remplacée par la date : « 15 avril » ;

2° L’article L. 1612-2 est ainsi modifié :

a. Au premier alinéa, les dates : « 31 mars » et « 15 avril » sont respectivement remplacées par les dates : « 15 avril » et « 30 avril » ;

b. Au troisième alinéa, la date : « 15 mars » est remplacée par la date : « 31 mars ».

C.– Les A et B s’appliquent à compter du 1er janvier 2013.

Modalités de détermination du taux maximum de cotisation foncière des entreprises pouvant être voté par un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité professionnelle unique en 2012 et 2013

D.– Le A du VI de l’article 1640 C du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les taux de référence définis au V ainsi que les dispositions du deuxième alinéa du présent A sont également retenus pour l’application en 2012 du premier alinéa du 3° du II de l’article 1636 B decies et pour l’application en 2013 du second alinéa du même 3°. »

III.– Mesure relative à la valeur locative des ports de plaisance

A.– L’article 1501 du code général des impôts est complété par un III ainsi rédigé :

« III.– La valeur locative des postes d’amarrage dans les ports de plaisance à la date de la révision est fixée selon le tarif suivant :

« 110 euros pour les ports maritimes de la Méditerranée ;

« 80 euros pour les autres ports maritimes ;

« 55 euros pour les ports non maritimes.

« Pour chaque port, ce tarif peut être, après avis des commissions communales et intercommunales des impôts directs prévues aux articles 1650 et 1650 A, minoré ou majoré de 20 % ou 40 % en fonction des services et des équipements offerts.

« Les modalités d’application de cette modulation sont fixées par décret en Conseil d’État. »

B.– Le A s’applique à compter des impositions dues au titre de 2014.

IV.– Report de la date limite d’option pour le régime de la fiscalité professionnelle unique

A.– 1° Après la première phrase du second alinéa du IV de l’article 1379-0 bis du code général des impôts, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Par exception, pour les établissements publics nouvellement créés, cette décision peut être prise jusqu’au 15 janvier de l’année au cours de laquelle leur création prend fiscalement effet. » ;

2° L’article 1638-0 bis du même code est ainsi modifié :

a. Au premier alinéa du I et du II, les mots : « le 31 décembre de l’année de la fusion » sont remplacés par les mots : « le 15 janvier de l’année au cours de laquelle la fusion prend fiscalement effet » ;

b. Le premier alinéa du I et le premier alinéa du II sont complétés par une phrase ainsi rédigée :

« Cette délibération ne peut être rapportée pendant la période d’unification des taux prévue au III de l’article 1609 nonies C. »

B.– Le A s’applique à compter du 1er janvier 2013.

V.– Mesure relative aux garanties de ressources versées aux collectivités territoriales dans le cadre de la réforme de la fiscalité directe locale

A.– L’article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 est ainsi modifié :

1° Le D du IV du 1.1 est complété par un alinéa c ainsi rédigé :

« c. Lorsqu'à la suite de la dissolution d’un établissement public de coopération intercommunale auquel elle adhérait, une commune est devenue membre d’un nouvel établissement public de coopération intercommunale dans le cadre d’une procédure de fusion, de modification de périmètre ou d’adhésion individuelle, la part de dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle calculée selon les conditions prévues aux a et b du présent D est versée au profit de cet établissement public de coopération intercommunale. » ;

2° Le E du IV du 1.1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'à la suite du retrait d’un établissement public de coopération intercommunale auquel elle adhérait, une commune est devenue membre d'un nouvel établissement public de coopération intercommunale dans le cadre d’une procédure de fusion, de modification de périmètre ou d’adhésion individuelle, la part de dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle calculée selon les conditions prévues aux a et b du D du présent IV est versée au profit de cet établissement public de coopération intercommunale. » ;

3° Le D du IV du 2.1. est ainsi modifié :

a. Au premier alinéa, avant les mots : « En cas de dissolution d’un établissement public de coopération intercommunale, », est ajouté la référence : « a. » ;

b. Après le dernier alinéa, il est ajouté deux alinéas ainsi rédigés :

« b. Lorsqu'à la suite de la dissolution d’un établissement public de coopération intercommunale auquel elle adhérait, une commune est devenue membre d'un nouvel établissement public de coopération intercommunale dans le cadre d’une procédure de fusion, de modification de périmètre ou d’adhésion individuelle, la fraction de reversement sur les ressources calculée selon les conditions prévues aux 1° et 2° du a du présent D est versée au profit de cet établissement public. 

« Lorsqu'à la suite de la dissolution d’un établissement public de coopération intercommunale auquel elle adhérait, une commune est devenue membre d'un nouvel établissement public de coopération intercommunale dans le cadre d’une procédure de fusion, de modification de périmètre ou d’adhésion individuelle, le prélèvement sur les ressources calculé selon les conditions prévues aux 1° et 2° du a du présent D est mis à la charge de cet établissement public.» ;

4° Le E du IV du 2.1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsqu'à la suite du retrait d’un établissement public de coopération intercommunale auquel elle adhérait, une commune est devenue membre d'un nouvel établissement public de coopération intercommunale dans le cadre d’une procédure de fusion, de modification de périmètre ou d’adhésion individuelle, la fraction de reversement sur les ressources calculée selon les conditions prévues aux 1° et 2° du a du D du présent IV est versée au profit de cet établissement public.

« Lorsqu'à la suite du retrait d’un établissement public de coopération intercommunale auquel elle adhérait, une commune est devenue membre d'un nouvel établissement public de coopération intercommunale dans le cadre d’une procédure de fusion, de modification de périmètre ou d’adhésion individuelle, le prélèvement sur les ressources calculé selon les conditions prévues aux 1° et 2° du a du D du présent IV est mis à la charge de cet établissement public. »

B.– L’article 1609 nonies C du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au 3 du I bis, après les mots : « prévu au 2.1 de l’article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 » sont ajoutés les mots : « , à l’exclusion de la fraction calculée selon les conditions prévues aux 1° et 2° du a du D du IV du même 2.1. » ;

2° Après le 3 du I bis, il est ajouté un 4 ainsi rédigé :

« 4. Le cas échéant, sur délibérations concordantes des communes membres et de l'établissement public de coopération intercommunale, de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle calculée conformément aux II et III du 1.1 de l’article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, à l’exclusion de la part calculée dans les conditions prévues aux a et b du D du IV du même 1.1. » ;

3° Après le I bis, il est ajouté un I ter ainsi rédigé :

« I ter.– Le cas échéant, sur délibérations concordantes des communes membres et de l'établissement public de coopération intercommunale, le prélèvement sur les ressources calculé selon les conditions prévues aux II et III du 2.1 de l’article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 peut être mis à la charge de cet établissement public, à l’exclusion de la part calculée selon les conditions prévues aux 1° et 2° du a du D du IV du même 2.1. »

C.– Les A et B s’appliquent, à compter du 1er janvier 2013, aux communes devenues membres d’un établissement public de coopération intercommunale à la suite d’une fusion d’établissement public de coopération intercommunale ou d’un rattachement devenus effectifs à compter du 1er janvier 2012.

VI.– Mesures techniques diverses

Mesure de coordination liée à la réforme des établissements publics fonciers de l’État

A.– Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 1607 bis est ainsi modifié :

a. Au premier alinéa, les mots : « aux articles L.324-1 et suivants » sont remplacés par les mots « à l’article L.324-1 » ;

b. A la deuxième phrase du deuxième alinéa, les mots : « au troisième ou quatrième alinéa de » sont remplacés par le mot : « à » ;

2° L’article 1607 ter est ainsi modifié :

a. Au premier alinéa, les mots : « au b de » sont remplacés par le mot  : « à » ;

b. Il est complété d’un alinéa ainsi rédigé :

« La taxe est répartie et recouvrée dans la zone de compétence de l’établissement selon les règles définies aux troisième à sixième alinéas de l’article 1607 bis. » ;

3° Au premier alinéa de l’article 1609 F, les mots : « des articles L. 321-1 et suivants » sont remplacés par les mots : « de l’article L. 321-1 » ;

4° Le I de l’article 1636 B octies est ainsi modifié :

a. Les mots : « à l’article L. 324-1 du code de l’urbanisme et au b de l’article L. 321-1 du même code » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 321-1 et L. 324-1 du code de l’urbanisme » ;

b. Les mots : « de l’établissement public foncier de Normandie, de l’établissement public foncier de Lorraine, de l'établissement public d'aménagement de la Guyane, des agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en Guadeloupe et en Martinique et de l’établissement public foncier de Provence-Alpes-Côte d’Azur » sont remplacés par les mots : «  de l'établissement public d'aménagement de la Guyane et des agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en Guadeloupe et en Martinique » ;

5° Au premier alinéa de l’article 1636 C, les mots : « aux articles L. 324-1 et suivants du code de l’urbanisme et au b de l’article L. 321-1 du même code, de l’établissement public foncier de Normandie, de l’établissement public foncier de Lorraine et de l’établissement public foncier de Provence-Alpes-Côte d’Azur » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 321-1 et L. 324-1 du code de l’urbanisme ».

Corrections d’erreurs rédactionnelles

B.– Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 1379-0 bis est ainsi modifié :

a. Au VIII, les mots : « taxe sur les fournitures d’électricité » sont remplacés par les mots : « taxe communale sur la consommation finale d’électricité » ;

b. Au IX, les mots : « Les communautés urbaines » sont remplacés par les mots : « Les métropoles, les communautés urbaines » ;

2° Au quatrième alinéa du IV de l’article 1519 I, l’année : « 2011 » est remplacée par l’année : « 2010 » ;

3° Au dernier alinéa du I de l’article 1522 bis, la référence : « 1638 B undecies» est remplacée par la référence : « 1636 B undecies » ;

4° Au troisième alinéa du I de l’article 1639 A ter, les mots : « du 1 du II » sont remplacés par les mots : « du I et du 1 du II ».

VII.– Mesures relatives à la taxe sur les surfaces commerciales

Aménagement des règles d’assiette et de liquidation de la TASCOM

A.– L’article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Ne sont pas considérés comme magasins de commerce de détail les établissements de commerce de gros dont la clientèle est composée de professionnels pour les besoins de leur activité ou de collectivités. Lorsque ces établissements réalisent à titre accessoire des ventes à des consommateurs pour un usage domestique, ces ventes constituent des ventes au détail qui doivent être soumises à la taxe dans les conditions de droit commun.» ;

2° Après le 4ème alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La surface de vente à retenir pour le calcul de la taxe est celle existante au 31 décembre de l’année précédant l’année d’imposition pour les établissements existant à cette date. » ;

3° À la première phrase du dix-septième alinéa, après les mots : « les professions dont l’exercice » sont ajoutés les mots : « à titre principal ».

Harmonisation de la modulation de la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) en cas de modification de la carte intercommunale

B.– Après le sixième alinéa du 1.2.4.1 de l’article 77 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, sont insérés dix alinéas ainsi rédigés :

« En cas de fusion d’établissements publics de coopération intercommunale réalisée dans les conditions prévues par l’article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, les dispositions relatives à la taxe sur les surfaces commerciales et à la perception de son produit, qui étaient en vigueur sur le territoire de chaque commune ou de chaque établissement public de coopération intercommunale préexistant, sont maintenues pour la première année d’existence du nouvel établissement public de coopération intercommunale.

« L'établissement public de coopération intercommunale issu de la fusion doit se prononcer avant le 1er octobre de sa première année d’existence sur les dispositions applicables à compter de l’année suivante sur l’ensemble de son territoire.

« L'établissement public de coopération intercommunale issu de la fusion ne faisant pas application de l'article 1609 nonies C du code général des impôts peut se substituer à ses communes membres pour l'application des dispositions relatives à la taxe sur les surfaces commerciales et la perception de son produit, sur délibérations concordantes de l'établissement public et des communes concernées prises avant le 1er octobre de la première année de la fusion.

« À défaut de délibérations prises dans le délai défini aux deux précédents alinéas, le produit de la taxe sur les surfaces commerciales demeure acquis aux communes sur le territoire desquelles est situé l'établissement imposable, lorsque les établissements publics de coopération intercommunale préexistants à la fusion ne bénéficiaient pas des dispositions du quatrième alinéa du présent 1.2.4.1. Lorsque les établissements publics de coopération intercommunale préexistant à la fusion étaient substitués aux communes pour la perception de la taxe et que, la première année de la fusion, s’appliquaient par défaut sur le territoire de chacun de ces établissements publics de coopération intercommunale préexistants des coefficients décidés antérieurement à la fusion en application des dispositions du septième alinéa du présent 1.2.4.1, le coefficient applicable l’année suivante sur l’ensemble du territoire de l’établissement public issu de la fusion est égal au plus faible des coefficients des établissements publics de coopération intercommunale préexistants.

« En cas de rattachement volontaire d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale ou à la suite d'une transformation dans les conditions prévues aux articles L. 5211-41-1 et L. 5211-41-2 du code général des collectivités territoriales, les dispositions relatives à la taxe sur les surfaces commerciales et à la perception de son produit, qui étaient en vigueur sur le territoire de chaque commune ou de chaque établissement public de coopération intercommunale préexistant, sont maintenues pour la première année du changement de périmètre.

« Dans ce cas, l'établissement public de coopération intercommunale doit délibérer avant le 1er octobre de la première année du changement de périmètre sur les dispositions applicables à compter de l’année suivante sur l’ensemble du territoire.

« Lorsqu’il a subi une modification de son périmètre dans les conditions mentionnées aux deux alinéas précédents, l’établissement public de coopération intercommunale ne faisant pas application de l'article 1609 nonies C du code général des impôts peut se substituer à ses communes membres pour l'application des dispositions relatives à la taxe sur les surfaces commerciales et la perception de son produit, sur délibérations concordantes de l'établissement public et des communes concernées prises avant le 1er octobre de la première année du changement de périmètre.

« À défaut de délibérations prises dans le délai défini aux deux alinéas précédents, le produit de la taxe sur les surfaces commerciales demeure acquis aux communes sur le territoire desquelles est situé l'établissement imposable, lorsqu’elles étaient membres, avant le changement de périmètre, d’un établissement public de coopération intercommunale ne bénéficiant pas des dispositions du quatrième alinéa du présent 1.2.4.1. Lorsque des communes étaient membres, avant le changement de périmètre, d’un établissement public de coopération intercommunale compétent pour la perception de la taxe et que, la première année de la modification du périmètre intercommunal, s’appliquait par défaut sur le territoire de chacune de ces communes des coefficients décidés antérieurement au changement de périmètre intercommunal en application des dispositions du onzième alinéa du présent 1.2.4.1, le coefficient applicable l’année suivante sur l’ensemble du territoire de l’établissement public ayant accueilli ces communes est égal au plus faible des coefficients applicables avant la modification du périmètre.

« En cas de création d’une commune nouvelle réalisée dans les conditions prévues par les articles L. 2113-2 et suivants du code général des collectivités territoriales, les dispositions relatives à la taxe sur les surfaces commerciales et à la perception de son produit, qui étaient en vigueur sur le territoire de chaque commune préexistante, sont maintenues pour la première année d’existence de la commune nouvelle.

« En vue de l’application aux montants de la taxe, calculés conformément à l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 précitée, du coefficient multiplicateur dans les conditions prévues aux cinquième et sixième alinéas du présent 1.2.4.1, les deuxième et troisième années d'existence de la commune nouvelle, les écarts de coefficients des communes préexistantes sont réduits de moitié la première année et supprimés la seconde, jusqu’à application d’un coefficient unique, lorsque le rapport entre le coefficient le moins élevé et le coefficient le plus élevé est inférieur à 90 %. Lorsque le rapport est supérieur ou égal à 90 %, l’organe délibérant de la commune nouvelle peut appliquer un coefficient unique dès la deuxième année existence de la commune nouvelle. Le coefficient unique doit être fixé, par délibération adoptée à la majorité simple dans les conditions prévues au I de l’article 1639 A bis du code général des impôts, dès la première année d’existence de la commune nouvelle. »

C.– 1° Les dispositions du A s’appliquent à compter des impositions dues au titre de l'année 2013 ;

2° Les dispositions du B s'appliquent à compter du 1er janvier 2013.

VIII.– Mise à jour des dispositions relatives au transfert aux départements du solde de la taxe sur les conventions d'assurance

A.– Le tableau du III de l’article L. 3332-2-1 du code général des collectivités territoriales est remplacé par le tableau suivant :

Département

POURCENTAGE

AIN

0,8752

AISNE

0,7007

ALLIER

0,9608

ALPES DE HTE-PROVENCE

0,3243

HAUTES-ALPES

0,2399

ALPES MARITIMES

1,3572

ARDÈCHE

0,8651

ARDENNES

0,6232

ARIÈGE

0,4224

AUBE

0,4559

AUDE

0,9190

AVEYRON

0,6030

BOUCHES-DU-RHÔNE

3,4201

CALVADOS

CANTAL

0,3443

CHARENTE

0,8859

CHARENTE-MARITIME

0,7138

CHER

0,4934

CORRÈZE

0,5341

CÔTE-D’OR

0,3445

CÔTES-D’ARMOR

1,3468

CREUSE

0,2724

DORDOGNE

0,7025

DOUBS

1,2350

DROME

1,2769

EURE

0,5411

EURE-ET-LOIR

0,5818

FINISTÈRE

1,5412

CORSE DU SUD

0,6021

HAUTE-CORSE

0,4464

GARD

1,6035

HAUTE-GARONNE

2,1950

GERS

0,5195

GIRONDE

1,9662

HÉRAULT

1,8837

ILLE-ET-VILAINE

1,8976

INDRE

0,3177

INDRE-ET-LOIRE

0,4331

ISÈRE

3,1910

JURA

0,6026

LANDES

0,8946

LOIR-ET-CHER

0,4500

LOIRE

1,7232

HAUTE-LOIRE

0,5454

LOIRE-ATLANTIQUE

1,6897

LOIRET

LOT

0,3451

LOT-ET-GARONNE

0,6332

LOZÈRE

0,0832

MAINE-ET-LOIRE

0,4726

MANCHE

1,0275

MARNE

HAUTE-MARNE

0,3307

MAYENNE

0,5574

MEURTHE-ET-MOSELLE

1,6947

MEUSE

0,4232

MORBIHAN

1,0252

MOSELLE

1,3705

NIÈVRE

0,6953

NORD

5,0669

OISE

1,4902

ORNE

0,3756

PAS-DE-CALAIS

3,7614

PUY-DE-DÔME

0,9247

PYRÉNÉES-ATLANTIQUES

1,1146

HAUTES-PYRÉNÉES

0,6927

PYRÉNÉES-ORIENTALES

1,1454

BAS-RHIN

1,9801

HAUT-RHIN

1,9846

RHÔNE

HAUTE-SAÔNE

0,4070

SAÔNE-ET-LOIRE

1,0027

SARTHE

1,0215

SAVOIE

0,9315

HAUTE-SAVOIE

1,2086

PARIS

SEINE-MARITIME

2,1056

SEINE-ET-MARNE

1,6614

YVELINES

DEUX-SÈVRES

0,5709

SOMME