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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 septembre 2013.
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI visant à accorder un prêt à taux zéro pour l’aménagement du domicile des personnes handicapées moteur,
Député.
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Voir le numéro :
Assemblée nationale : 494.
SOMMAIRE
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Pages
I. QUEL DROIT AU LOGEMENT POUR LES PERSONNES HANDICAPÉES ? 7
A. PORTÉE ET LIMITES DU PRINCIPE D’ACCESSIBILITÉ DU CADRE BÂTI 7
1. L’accessibilité, une réponse à l’inadaptation de l’environnement 7
a. De la reconnaissance du droit des personnes handicapées à participer à la vie de la cité… 7
b. … à l’accessibilité pour tous 8
2. Un chantier inachevé 9
B. FAVORISER L’AUTONOMIE ET LE MAINTIEN À DOMICILE DES PERSONNES HANDICAPÉES : UNE PRIORITÉ À RÉAFFIRMER 14
1. Dans un contexte de vieillissement de la population… 14
2. … l’adaptation du logement au handicap devient un enjeu majeur 15
a. Le maintien à domicile, une solution individuellement et collectivement bénéfique 15
b. Le logement, premier défi à relever d’une nouvelle politique publique du maintien à domicile 16
II. METTRE EN PLACE DES MESURES SIMPLES ET OPÉRATIONNELLES POUR RÉPONDRE AUX ATTENTES DE NOS CONCITOYENS 19
A. LES LIMITES DES DISPOSITIFS EN VIGUEUR 19
1. Les aides aux propriétaires et aux locataires 19
a. Les aides de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat 19
b. Les aides aux locataires du secteur social 22
c. Les aides aux salariés 22
2. Le volet aménagement du logement de la prestation de compensation du handicap 22
3. Le crédit d’impôt équipement 25
B. UNE RÉPONSE CIBLÉE : LE PRÊT À TAUX ZÉRO 27
1. La proposition de loi 27
a. Création d’un prêt à taux zéro pour le financement des travaux d’aménagement des logements des personnes handicapées 27
b. Extension du bénéfice du prêt à taux zéro pour l’accession à la propriété 27
2. L’examen en commission 27
TRAVAUX DE LA COMMISSION 29
Article 1er(art. 244 quater W [nouveau] du code général des impôts) : Création d’un prêt à taux zéro pour le financement de travaux d’aménagement des logements des personnes handicapées 39
Article 2 (art. 244 quater J du code général des impôts) : Assouplissement des conditions d’accès des personnes handicapées au prêt à taux zéro pour l’accession à la première propriété 42
Après l’article 2 43
Article 3 : Gage financier 45
Titre 45
TABLEAU COMPARATIF 47
Mesdames, Messieurs,
Près de 10 millions de personnes en France seraient aujourd’hui en situation de handicap (1). Que ce handicap soit léger ou lourd, il empêche concrètement plusieurs millions de nos concitoyens de participer pleinement à la vie de la cité. Trop d’obstacles contribuent aujourd’hui encore à les priver d’accès à l’éducation, aux loisirs, au monde du travail et, parfois, tout simplement, à leur lieu de vie. Choisir de vivre chez soi, dans un environnement familial, y compris lorsque leur handicap le permettrait, n’est pas toujours à la portée des personnes handicapées, notamment pour des raisons financières. Certes, des dispositifs existent pour les accompagner dans leur vie quotidienne mais, pour faire valoir leurs droits, celles-ci sont trop souvent confrontées à des complexités administratives qui les acculent à des choix par défaut.
Cette situation est d’autant plus injuste qu’il suffirait parfois de menus aménagements pour adapter le logement des personnes handicapées et leur permettre de continuer à vivre à leur domicile. Des solutions d’hébergement alternatives, parfois très coûteuses, sont mises en place faute de dispositif adéquat, alors que, dans nombre de cas, le cadre de vie de ces personnes pourrait être aisément rendu compatible avec leur handicap.
Donner aux personnes handicapées la possibilité d’aménager leur logement en fonction de leur handicap, c’est à la fois respecter leur choix de vie, favoriser leur maintien dans leur environnement social et diminuer les coûts de prise en charge pour la société.
Alors que l’intégration des personnes handicapées constitue depuis la loi du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées une « obligation nationale » et que, plus récemment, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a posé la règle de l’accessibilité totale de la société à tous les handicaps, force est de constater que ces grands principes n’ont pour l’heure pas conduit à une amélioration notable de la vie quotidienne d’un nombre important de nos concitoyens.
Le vieillissement de la population, en général, mais également le vieillissement des personnes handicapées lié à l’allongement de leur espérance de vie, devraient cependant convaincre les pouvoirs publics de la nécessité d’agir et de transformer les engagements pris tant au niveau national qu’européen (2) ou international (3) en mesures effectives en faveur des personnes en situation de handicap. La Commission européenne estime déjà qu’à l’heure actuelle, plus d’un tiers des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans souffrent de handicaps partiels et plus de 20 % sont atteintes de handicaps lourds (4). Apporter des réponses à la perte d’autonomie, que celle-ci résulte du handicap, du vieillissement ou de ces deux facteurs combinés, doit être une priorité.
Le Président de la République s’était engagé à prendre en compte le handicap dans chaque loi en y insérant un « volet handicap ». Cette promesse, qui n’a trouvé d’autre traduction juridique qu’une transcription dans une circulaire du Premier ministre, n’a pour l’heure pas débouché sur des avancées concrètes pour les personnes handicapées. Aucun texte relatif au handicap n’a été présenté au Parlement depuis mai 2012. Alors que nous fêterons dans moins de dix-huit mois les dix ans de la loi du 11 février 2005, il est plus que temps de redonner un nouveau souffle à la politique du handicap et faire en sorte que ses ambitions se traduisent en actes.
C’est la raison pour laquelle la présente proposition de loi met en avant des mesures précises et réalistes afin de favoriser l’accès des personnes handicapées à un logement adapté, que ce soit par le biais d’un nouveau prêt à taux zéro en faveur des travaux d’aménagement de la résidence principale ou d’une adaptation du prêt à taux zéro en faveur de l’accession à la propriété. Ces mesures pourraient en outre être utilement complétées, dans le secteur du logement social, par l’instauration d’une priorité des personnes handicapées pour l’accès aux logements situés en rez-de-chaussée. La présente proposition de loi poursuit ainsi un objectif ciblé mais essentiel, elle n’invente rien mais repose sur des mécanismes qui ont fait leur preuve dans d’autres domaines (rénovation énergétique des logements, primo-accession à la propriété, etc…) : elle n’apporte en conséquence aucune complexité dans les dispositifs existant mais avance, au contraire, des solutions simples en réponse à un problème vécu par plusieurs millions de personnes en France. Telles sont les raisons pour lesquelles je vous demande, Mesdames, Messieurs, d’adopter ce texte.
I. QUEL DROIT AU LOGEMENT POUR LES PERSONNES HANDICAPÉES ?
« Constitue un handicap, (…) toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant » (art. L. 114 du code de l’action sociale et des familles).
Cette définition du handicap, introduite par la loi du 11 février 2005 et centrée, non pas sur des critères médicaux ou administratifs, mais sur les effets réels produits sur une personne par l’altération de ses capacités, va de pair, d’une part, avec la consécration d’un droit à compensation permettant de garantir l’égalité des chances entre citoyens valides et handicapés, afin que ces derniers puissent eux aussi être en mesure de bâtir leur propre projet de vie et, d’autre part, avec la réaffirmation du principe selon lequel ce n’est pas à la personne handicapée de s’adapter à l’organisation de la cité, mais que c’est à la cité de s’organiser pour être accessible à tous, dans tous les domaines (éducation, emploi, transports, cadre bâti, culture et loisirs).
La définition de cet objectif est en adéquation avec les engagements pris par la France aux niveaux international et européen. La conception du handicap qui transparaît dans la loi du 11 février 2005 correspond en effet à la définition que donnent les Nations-Unies du handicap. Aux termes de l’article 1er de la convention relative aux droits des personnes handicapées (5), sont en effet considérées comme telles « des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres ». Quant à l’Union européenne, la Charte des droits fondamentaux adoptée le 7 décembre 2000 interdit toute discrimination fondée sur le handicap (article 21) et reconnaît le droit des personnes handicapées à l’autonomie, à l’intégration sociale et professionnelle et à la participation à la vie de la communauté (article 26). Le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) exige en conséquence de l’Union qu’elle combatte toute discrimination fondée sur un handicap dans la définition comme dans la mise en œuvre de ses politiques et de ses actions (article 10) et lui confère le pouvoir de légiférer en vue de lutter contre toute discrimination (article 19). La politique européenne en faveur des personnes handicapées repose ainsi sur un double pilier : d’une part, la reconnaissance et la protection des droits des personnes handicapées et, d’autre part, le refus de toute discrimination.
L’adoption d’une conception « environnementale » du handicap, c’est-à-dire qui se place du point de vue de l’interaction entre un individu et son environnement, conception qui date d’une quinzaine d’années à peine, a eu des conséquences très importantes sur l’élaboration des politiques publiques en faveur du handicap, en particulier dans le domaine de l’accessibilité. Ainsi que le souligne Muriel Larrouy, sociologue, auteur de « L’invention de l’accessibilité », nous concevons désormais qu’une personne est handicapée non pas parce qu’elle est paralytique, non pas parce qu’elle ne peut pas marcher, mais parce qu’il y a des escaliers. « C’est l’environnement qui va provoquer son handicap. Lorsqu’on construit sans escalier, on ne provoque pas de situation de handicap. C’est déjà une autre conception : faire directement sans obstacle, des aménagements intégrés et disponibles pour tous » (6).
Comme l’illustre parfaitement cet exemple, l’enjeu de l’accessibilité dépasse le simple cadre du handicap mais concerne potentiellement toute la population (personnes âgées, femmes enceintes, familles avec enfants en bas âge, personnes accidentées etc…) : nous sommes tous susceptibles à un moment ou à un autre de nous trouver en situation de handicap face à un escalier !
Désormais, le handicap n’est plus lié à la personne ou à une déficience physique, mais à un environnement qui n’est pas accessible. Dans ce contexte, ainsi que l’explique Jésus Sanchez, chercheur en sciences sociales (7), une rampe d’accès est beaucoup plus qu’une rampe : c’est une pratique sociale à part entière qui nécessite de penser à qui elle va servir. Est-ce qu’on va construire directement accessible ? Est-ce qu’on va faire une rampe sur le côté ? Est-ce qu’on va la mettre devant ? La rampe témoigne d’une interrogation collective et globale sur l’accessibilité, qui n’est plus un problème individuel, mais qui constitue désormais une catégorie générale de revendication et d’intervention publique.
Si la loi du 11 février 2005 s’est voulue porteuse à la fois de cette revendication et de propositions destinées à y répondre, sa mise en œuvre n’en reste pas moins décevante.
En ratifiant, en 2010, la Convention internationale des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, la France s’est engagée à prendre les mesures appropriées pour assurer à ces dernières, sur la base du principe d’égalité, l’accès à l’environnement physique, aux transports, à l’information et à la communication et aux autres équipements et services ouverts ou fournis au public, tant dans les zones urbaines que rurales. Ces mesures, parmi lesquelles figurent l’identification et l’élimination des obstacles et barrières à l’accessibilité, s’appliquent, entre autres aux bâtiments, à la voirie, aux transports et autres équipements intérieurs ou extérieurs, y compris les écoles, les logements, les installations médicales et les lieux de travail. Elles reposent sur un principe de « conception universelle », c’est-à-dire de conception de produits, d’équipements, de programmes et de services qui puissent être utilisés par tous, dans toute la mesure possible, sans nécessiter ni adaptation ni conception spéciale.
Les dispositions prévues par la loi du 11 février 2005 dans son volet accessibilité doivent en principe nous permettre de répondre à ces exigences en éliminant tous les obstacles à l’accomplissement des activités quotidiennes des personnes handicapées de sorte que celles-ci puissent vivre et se déplacer comme tout un chacun. L’objectif de la loi du 11 février 2005 est ainsi d’organiser une continuité en intégrant le cadre bâti, la voirie, les aménagements des espaces publics, les systèmes de transport et leur intermodalité.
S’agissant du seul cadre bâti, la loi a introduit à l’article L. 111-7 du code de la construction et de l’habitation la définition suivante de la fongibilité : « Les dispositions architecturales, les aménagements et équipements intérieurs et extérieurs des locaux d’habitation, qu’ils soient la propriété de personnes privées ou publiques, des établissements recevant du public, des installations ouvertes au public et des lieux de travail doivent être tels que ces locaux et installations soient accessibles à tous, et notamment aux personnes handicapées, quel que soit le type de handicap, notamment physique, sensoriel, cognitif, mental ou psychique (...) ». S’agissant de l’habitat collectif, cet article a été complété sur le plan réglementaire par l’article R. 111-18-1 du même code aux termes duquel « est considéré comme accessible aux personnes handicapées tout bâtiment d’habitation collectif ou tout aménagement lié à un bâtiment permettant à un habitant ou à un visiteur handicapé, avec la plus grande autonomie possible, de circuler, d’accéder aux locaux et équipements, d’utiliser les équipements, de se repérer et de communiquer. Les conditions d’accès des personnes handicapées doivent être les mêmes que celles des autres publics ou, à défaut, présenter une qualité d'usage équivalente ». Les obligations auxquelles doivent satisfaire les constructions et les aménagements propres à assurer l’accessibilité de ces bâtiments et de leurs abords sont fixées par arrêté.
L’obligation de mise en accessibilité concerne tant l’intérieur que l’extérieur des bâtiments, qu’il s’agisse de locaux d’habitation neufs (collectifs ou individuels, occupés ou non par une personne handicapée), de locaux d’habitation anciens faisant l’objet de travaux ou d’établissements recevant du public, neufs ou existants. La loi prévoit ainsi que :
– toute construction neuve, de quelque nature qu’elle soit, doit être accessible. Soulignons que cette disposition s’applique à la construction de maisons individuelles, que celles-ci soient destinées à être louées, mises à disposition ou vendues, pour lesquelles une demande de permis de construire a été déposée après le 1er janvier 2007. Cette obligation ne s’impose pas en revanche aux propriétaires ayant entrepris la construction ou la réhabilitation d’une maison individuelle pour leur propre usage ;
– les bâtiments d’habitation existants faisant l’objet de travaux de rénovation (dès lors que ces travaux visent à accroître leur surface ou représentent au moins 80 % de la valeur du bâtiment) doivent respecter les règles d’accessibilité. Des dérogations motivées peuvent cependant être autorisées ;
– enfin, sauf dérogations exceptionnelles, les établissements existants recevant du public (administrations, commerces, etc…) doivent être rendus accessibles au plus tard le 1er janvier 2015.
La loi a donc tout à la fois fixé des objectifs élevés, notamment en termes de délai de mise en conformité des établissements recevant du public (ERP), et prévu des possibilités de dérogations relativement importantes. C’est la raison pour laquelle, si son ambition est partagée par tous, ses modalités restent critiquées, d’aucuns considérant qu’elles ne vont pas assez loin, alors que d’autres prétendent au contraire qu’elles sont trop contraignantes.
En dépit des principes inscrits dans le code de la construction et de l’habitation, de nombreuses limites, inhérentes aux conditions de mise en accessibilité prévues par la loi ou résultant de son application, doivent nous conduire à nous interroger sur l’efficacité des mesures prises depuis 2005 pour garantir aux personnes handicapées l’accès à un logement adapté.
Tout d’abord, d’après les chiffres fournis par l’association nationale pour l’intégration des handicapés moteurs (ANIPHM), 85 % des 220 000 maisons individuelles construites annuellement le sont pour le propre usage de leur propriétaire. Ainsi, in fine, seuls les 15 % de maisons destinées à la vente clefs en main ou à la location supporteraient aujourd’hui l’obligation de répondre aux règles d’accessibilité ou d’adaptabilité prévues par les textes.
S’agissant des bâtiments d’habitation collectifs, une distinction a été introduite sur le plan réglementaire entre deux types de logements, imposant des exigences plus fortes pour ceux situés en rez-de-chaussée ainsi que ceux desservis, ou susceptibles de l’être, par un ascenseur (article R. 111-18-2 du code de la construction et de l’habitation). Les logements ne répondant pas à ces critères sont considérés comme des logements dans lesquels les personnes en situation de handicap moteur n’ont pas vocation à habiter mais auxquels l’accessibilité s’applique néanmoins, dans un sens restreint à la « visitabilité » de ces logements. Une personne à mobilité réduite doit donc pouvoir s’y déplacer, accéder à chacune des pièces (couloirs et portes), mais sans employer les équipements sanitaires ou la cuisine. On notera d’emblée qu’il s’agit là d’une conception particulièrement restrictive de l’accessibilité qui ne permet même pas à la personne handicapée de se rendre aux toilettes et qui est d’ailleurs aujourd’hui remise en cause (8). Pour les autres logements, la notion d’accessibilité consiste en revanche à permettre aux personnes handicapées d’y vivre (aménagement des pièces, présence d’équipements spécifiques). Si cette exigence est censée être satisfaite, pour tous les bâtiments neufs dès le stade de la construction, un tempérament a néanmoins été introduit en référence à la possibilité d’« aménagements » ultérieurs susceptibles, par des « travaux simples », d’en permettre l’utilisation par une personne handicapée. Bien qu’il n’y soit pas fait référence dans la loi, l’accessibilité du logement se double ainsi d’une notion d’ « adaptabilité » (9) permettant in fine d’y déroger.
Signalons enfin que certaines normes fixées en application des textes réglementaires sont parfois loin d’être en adéquation avec les objectifs recherchés et demeurent donc impuissantes à améliorer la situation actuelle. L’ANIPHM cite à cet égard l’exemple du seuil à partir duquel un ascenseur est obligatoire : celui-ci est fixé au niveau R + 4, alors même que les immeubles construits aujourd’hui, notamment dans le logement social, ne dépassent que rarement R + 3. Un rapport du Conseil économique et social intitulé « Situations de handicap et cadre de vie » recommandait d’ailleurs dès septembre 2000 d’abaisser le seuil déclencheur à R + 3.
Alors que l’échéance de 2015 se rapproche pour les établissements recevant du public (ERP), de nombreux rapports ont été publiés sur la mise en œuvre de la loi du 11 février 2005, concluant pour la plupart à l’insoutenabilité du délai accordé pour la mise en accessibilité et préconisant des « aménagements » des obligations prévues par les textes (10). Ainsi le rapport conjoint du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et du Contrôle général économique et financier (CGEFi) sur les modalités d’application des règles d’accessibilité du cadre bâti pour les personnes handicapées (octobre 2011) souligne-t-il d’emblée que « la mission n’a pu que se rendre compte, comme tout le monde, que cette obligation [de mise en accessibilité] ne pourrait en aucun cas être tenue ». Si le dernier rapport de l’Observatoire interministériel de l’accessibilité et de la conception universelle (OBIAçU), remis au Premier ministre en octobre 2012, indique pour sa part que nombre d’acteurs se mobilisent aujourd’hui pour programmer, financer et réaliser les aménagements nécessaires à l’accessibilité des personnes handicapées, il y a peu de chances que le pari de 2015 soit tenu.
Par ailleurs, alors que la question de l’accessibilité des ERP focalise toutes les attentions, force est de constater qu’aucun bilan sérieux n’est disponible s’agissant de la mise en accessibilité des logements. Mme Claire-Lise Campion, sénatrice, fait ainsi état, dans le rapport qu’elle a remis à la ministre déléguée chargée des personnes handicapées en mars 2013 (11), d’importantes difficultés pour connaître avec précision le nombre de logements accessibles en France.
Selon les données qu’elle a recueillies, sur près de 33,8 millions de logements, 80 % seraient soit en rez-de-chaussée (y compris les maisons individuelles), soit desservis par un ascenseur. Toutefois, en l’absence d’indications sur l’accessibilité et les dimensions des ascenseurs, mais également de données concernant l’accessibilité ou l’adaptabilité des maisons individuelles construites par les particuliers pour leur propre usage, notre collègue sénatrice reconnaît que ces chiffres ne peuvent que donner une estimation vague du nombre de logements potentiellement accessibles ou adaptables (12).
S’agissant des constructions neuves, entre 84 et 99 % des logements nouveaux construits chaque année seraient, d’après ce même rapport, accessibles. Mais, là aussi, notre collègue estime que ces données doivent être maniées avec précaution et nécessiteraient d’être vérifiées. En effet, l’association nationale pour l’intégration des handicapés moteurs (ANPIHM) conteste la progression du nombre de logements neufs accessibles : dans une étude de janvier 2013, reposant sur un indicateur qu’elle a construit, l’association évalue que le nombre de logements potentiellement accessibles pour 100 habitants serait passé de l’indice 74 en 2006 à 68 en 2009, soit une baisse de 7 %. Ainsi, d’après l’association, les appartements en rez-de-chaussée ou desservis par ascenseur ne représenteraient guère plus de 16 % du parc existant et tout au plus 20 % des constructions nouvelles.
S’agissant enfin du logement social, l’ANPIHM estime également que le nombre d’habitations à loyer modéré (HLM) desservis par ascenseur disponibles rapporté à la population en situation de handicap a diminué ces quatre dernières années. Les données INSEE relatives aux résidences principales en habitat collectif attestent d’un parc de logements HLM desservis par ascenseur fort de 1 375 966 unités en 2009, correspondant à une progression de 9 272 appartements depuis 2006 (soit une progression très limitée de 0,68 % en quatre ans). L’association considère toutefois que ces données globales ne tiennent pas compte de la grande disparité de l’offre locale : si, de 2006 à 2009, 1 725 communes ont étoffé leur parc de 75 310 logements desservis par ascenseur, 1 253 communes en ont perdu 66 038. Or, sauf à contraindre les demandeurs d’accessibilité à migrer, les gains constatés dans certaines villes ne peuvent compenser les pertes relevées dans d’autres. En outre, dans le même temps, la demande de logements accessibles a crû de manière exponentielle : la population des personnes handicapées et des personnes âgées de plus de 80 ans, potentiellement la plus demandeuse d’un habitat accessible, a en effet augmenté de 440 000 individus (+11,8 %) sur la même période. En conclusion, c’est bien une récession de l’offre que l’association constate : si le parc HLM disposait de 37 appartements desservis par ascenseur pour 100 personnes à mobilité réduite en 2006, il n’en propose plus que 34 en 2009, actant une régression de l’offre à hauteur de 9,94 %.
Plus globalement, l’ANPIHM considère la question de l’accessibilité des logements comme le « parent pauvre » de la loi du 11 février 2005. L’association estime ainsi indispensable de « remettre sur la table le corpus législatif actuel en la matière, tant celui-ci est insuffisamment précis, truffé de directives contradictoires » et appelle de ses vœux la tenue d’une table ronde avec tous les financeurs potentiels pour réformer le mode de financement de l’adaptation des logements des personnes handicapées et assurer un financement pérenne et des modalités d’attribution plus rapide pour répondre aux situations particulièrement difficiles de nombreuses personnes. Le bilan que l’association dresse de la loi du 11 février 2005 est donc particulièrement sévère : « Ainsi donc, apparaît de manière incontestable, la nécessité impérieuse d’apporter des réponses législatives et réglementaires nouvelles à des textes ignorants les contraintes des personnes à mobilité réduite, quand ils ne constituent pas une régression par rapport à la loi du 30 juin 1975. Et cette nécessité est d’autant plus impérieuse, que contrairement au contenu de la circulaire du Premier ministre selon laquelle tout projet de loi devrait prévenir à l’avenir, voire résoudre, les situations de handicap, le projet de loi sur le logement déposé par le Gouvernement ne contient aucune mesure de nature à améliorer la situation des personnes dites handicapées ! » (13).
B. FAVORISER L’AUTONOMIE ET LE MAINTIEN À DOMICILE DES PERSONNES HANDICAPÉES : UNE PRIORITÉ À RÉAFFIRMER
Vivre avec un handicap ou vieillir en sécurité, dans un environnement où l’habitat est organisé pour fluidifier vos déplacements (entre et au sein des espaces publics, des espaces collectifs et des logements), devrait être un droit. L’accessibilité pour tous n’étant toutefois pas une réalité, tout doit être mis en œuvre pour faciliter les adaptations nécessaires de ces espaces à la survenue d’un handicap ou d’une perte d’autonomie.
En France, les personnes les plus âgées (75 ans ou plus) sont de plus en plus nombreuses : en vingt ans leur nombre a augmenté de plus de 1,7 million, soit une hausse de 45 %. Elles représentent désormais près de 9 % de la population. D’après les projections de l’INSEE, à l’horizon 2030, elles devraient atteindre 12 % puis 15 % en 2045. Quant au taux de dépendance, il devrait croître parallèlement. Le scenario retenu par l’INSEE (14) table sur une hausse de 50 % du nombre de personnes dépendantes entre 2000 et 2040 (soit environ 1,2 million de personnes).
Mais il convient également désormais de tenir compte du phénomène du vieillissement de la population handicapée. Au cours des dernières décennies, l’espérance de vie des personnes handicapées a en effet fortement augmenté, ainsi que le remarquait déjà le sénateur Paul Blanc dans son rapport de juillet 2006 (15). Certes, cet allongement de la durée de vie n’est pas uniforme et dépend fortement du type de handicap (16). Il induit toutefois une hausse globale du nombre de personnes handicapées et, notamment, de personnes handicapées âgées. Or ces dernières ont souvent des besoins accrus en matière d’adaptation du logement. D’après l’Observatoire prospectif des métiers et des qualifications de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale (17), les personnes handicapées âgées sont davantage sujettes à la fatigue et au cumul de pathologies que les autres sujets âgés. En outre, l’avancée en âge s’accompagne souvent de modifications de la situation familiale de la personne handicapée (décès ou vieillissement des aidants) qui nécessitent elles-aussi une réponse adaptée, notamment en termes de logement.
Plus globalement, si le vieillissement n’est pas une maladie, il expose à des risques, tels que la survenue de « poly-mini-handicaps » sensoriels (auditif, visuel), exacerbés par les inadaptations de l’environnement (voie publique ou logement). Comme le rappelle Muriel Boulmier, présidente du groupe de travail « Évolutions démographiques et vieillissement » du comité européen de coordination de l’habitat social (CECODHAS) intervenue comme expert logement en 2011 dans le cadre du débat national sur la dépendance (18), les accidents de la vie courante après soixante-cinq ans (des chutes pour 80 % d’entre eux), se produisent à 62 % à domicile ; ils entraînent presque 10 000 décès annuels mais aussi de nombreuses incapacités qui compromettent le maintien à domicile.
Vivre chez soi le plus longtemps possible est le souhait majoritairement formulé par les personnes âgées ou à mobilité réduite, comme en témoignent les chiffres cités dans le rapport de 2010 de Valérie Rosso-Debord (19) : en 2007, les personnes âgées demeurant à leur domicile, avec éventuellement une assistance hospitalière ou infirmière, représentaient respectivement 98,9 % des personnes de soixante-cinq à soixante-quatorze ans, 95,5 % des personnes de soixante-quinze à quatre-vingt-quatre ans, 78,6 % des personnes de quatre-vingt-cinq à quatre-vingt-quatorze ans et 57,4 % des personnes de quatre-vingt-quinze ans et plus. Par ailleurs, d’après la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), 60 % des Français jugent inenvisageable le fait de vivre eux-mêmes dans un établissement spécialisé.
Aujourd’hui, en moyenne, seulement 5 % des plus de 70 ans vivent en institution. Si aucune mesure n’est prise pour prévenir la dépendance et adapter le logement des personnes âgées dans cette perspective, le nombre de celles appelées à rejoindre un lieu collectif d’hébergement devrait croître très fortement, générant un coût exponentiel pour la collectivité.
Existe-t-il une alternative viable et généralisable au maintien à domicile ? Outre le souhait quasi unanime des personnes âgées et handicapées de vivre et de vieillir à leur domicile, il existe un bénéfice collectif évident à l’adaptation du logement, en lieu et place de l’accueil dans une structure spécialisée, ne serait-ce qu’en termes de finances publiques. D’après le rapport conjoint de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l’Inspection générale des finances (IGF) d’octobre 2012 (20), 16 milliards d’euros sont dépensés par les pouvoirs publics chaque année pour le financement des établissements et services accueillant des personnes handicapées, tous types d’établissements confondus, l’hébergement étant le poste de dépenses connaissant la plus forte hausse. Si l’on ajoute à ces dépenses celles relatives à l’accueil des personnes âgées, on comprend aisément l’importance des enjeux financiers et par conséquent l’intérêt que devraient trouver les pouvoirs publics à subventionner l’adaptation des logements afin de rendre possible des solutions pragmatiques susceptibles de repousser voire d’éviter une prise en charge collective. À cet égard, Muriel Boulmier cite dans le cadre de son rapport de 2009 (21) plusieurs estimations concordantes qui concluent dans tous les cas de figure à un bénéfice pour l’État lorsqu’il octroie une aide à l’adaptation du logement, dès lors que la prolongation du maintien à domicile en résultant atteint trois ou quatre années.
Ce constat a été récemment confirmé par le rapport Broussy (22) qui situe dans une fourchette allant de 6 000 à 8 000 euros le coût moyen d’adaptation d’un logement pour pallier une perte d’autonomie quand un an de séjour en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) coûte en moyenne 25 500 euros : « une bonne adaptation réalisée à temps est, en tout état de cause, préférable pour les individus comme pour la collectivité, à un recours contraint à un EHPAD ».
Dès 2008, la Grande-Bretagne, confrontée à un constat similaire au nôtre (23) a clairement fait le choix du maintien à domicile et mis en œuvre un plan intitulé « Lifetime homes, lifetime neighbourhoods », plaçant l’adaptation du logement au cœur de la politique de prévention des risques liés au vieillissement. L’objectif poursuivi est d’adapter les logements des personnes âgées fragiles, grâce à des subventions publiques, afin de diminuer le coût de la création de nouveaux établissements.
La France apparaît quant à elle à la traîne comparée à la Grande-Bretagne ou d’autres pays voisins. L’enquête SHARE menée en 2006 sur 15 pays européens fait globalement apparaître un faible taux de logements équipés pour les personnes handicapées, seulement 6 % des personnes interrogées ayant déclaré habiter dans un logement équipé pour des personnes âgées ou handicapées. Cette proportion varie toutefois fortement selon les pays : de 2 % en Pologne et en Grèce à 17 % aux Pays-Bas. Si la France se situe dans la moyenne, ses résultats sont bien moindres que ceux de l’Espagne (près de 10 %) ou du Danemark (plus de 13 %).
L’absence d’accessibilité complète des logements rend aujourd’hui d’autant plus nécessaire de favoriser l’adaptation par les particuliers des logements existants que le vieillissement de la population va renforcer la demande globale de logements susceptibles de répondre aux besoins des personnes souffrant d’un handicap moteur ou à mobilité réduite. Or, si, comme le clame le rapport Broussy, le maintien à domicile est une priorité, la question de l’adaptation du logement doit devenir centrale.
Le rapport dresse à cet égard le constat selon lequel, au-delà d’un discours favorable au maintien à domicile, les efforts des pouvoirs publics se sont jusqu’à présent très largement concentrés sur les établissements, en général, et les EHPAD en particulier. Si ces efforts ont permis de résoudre – momentanément – la situation de pénurie de l’offre qui a pu caractériser certaines périodes, il est temps, selon l’auteur que ceux-ci soient réorientés sur le maintien à domicile : « le domicile privé doit désormais devenir une affaire publique » (24). Le défi de l’adaptation des logements ne représente certes qu’un aspect de la problématique qui exige de « créer un véritable écosystème favorable à un séjour sûr et serein chez soi le plus longtemps possible ». Tout en recommandant d’élargir la notion de domicile (« Résidences-sénior, foyers-soleil, logements-foyers revisités et modernisés, habitat intergénérationnel avec services partagés… : nombreuses sont les solutions envisageables entre le domicile stricto sensu et l’EHPAD »), le rapport Broussy ne fait pas moins de l’adaptation des logements le premier défi à relever de cette nouvelle politique publique du maintien à domicile.
Rappelant que le président de la République a fixé l’objectif de 80 000 logements adaptés sur cinq ans, le rapport Broussy invite même les pouvoirs publics à faire mieux. Dans cette perspective, il recommande :
– d’amplifier l’action de l’Agence nationale de l’amélioration de l’habitat (ANAH) (25) afin que celle finance l’adaptation de 15 000 logements par an, soit 75 000 sur cinq ans. Cette proposition repose toutefois sur une hausse des recettes de l’agence provenant de la vente des quotas carbone, qui n’est pas sans soulever un certain nombre de difficultés (26) ;
– de pérenniser le crédit d’impôt équipement et de le rendre transférable aux enfants qui souhaiteraient aider au financement de l’adaptation du logement de leurs parents ;
– dans le parc social, de flécher plus efficacement les logements adaptés lors des attributions.
On notera par ailleurs que s’agissant des nouvelles constructions, le rapport propose que les documents d’urbanisme puissent désormais cibler et définir des territoires propices à un bon vieillissement (proche des commerces et des transports, accessibles…) et qu’un quota minimal de logements adaptés soit institué pour toute nouvelle construction sur ces zones. « Si un quota de 20 % de logements adaptés obligatoires portait sur 50 % des nouvelles constructions, plus de 30 000 nouveaux logements adaptés pourraient sortir de terre chaque année, soit un volume deux fois supérieur aux adaptations financées par l’ANAH ».
Enfin, le rapport propose l’instauration d’un diagnostic Habitat-Mobilité à partir de 75 ans afin que les questions du logement et de la mobilité soient appréhendées le plus tôt possible par les seniors. Ce diagnostic, qui, selon le rapport, pourrait être pris en charge par les mutuelles et les institutions de retraite complémentaire, permettrait à chaque senior d’évaluer les conditions d’adaptation de son logement et, le cas échéant, de décider si le déménagement ne serait pas la solution la plus adéquate.
Votre rapporteur ne peut que souscrire à ces pistes de travail. Il souligne néanmoins que leur mise en œuvre nécessitera une volonté politique qui ne transparaît pas aujourd’hui dans l’action du Gouvernement, ce dernier ayant notamment refusé à plusieurs reprises le vote d’un amendement porté par votre rapporteur et plusieurs de ses collègues visant, comme le recommande le rapport Broussy, à mieux orienter les logements sociaux accessibles vers les personnes handicapées et, plus précisément, à réserver prioritairement les appartements situés en rez-de-chaussée à ces dernières. Quant à l’efficacité des aides de l’ANAH et du crédit d’impôt équipement, celle-ci est examinée dans la deuxième partie de ce rapport, qui tend à démontrer leurs limites ainsi que les incertitudes qui pèsent actuellement sur ces dispositifs.
II. METTRE EN PLACE DES MESURES SIMPLES ET OPÉRATIONNELLES POUR RÉPONDRE AUX ATTENTES DE NOS CONCITOYENS
Il existe aujourd’hui divers mécanismes d’aides publiques visant à faciliter l’aménagement du logement des personnes handicapées. Ces dispositifs comportent néanmoins un certain nombre de lacunes, que leur niveau soit trop modeste, le champ de leurs bénéficiaires potentiels trop limité, leur attribution complexe ou aléatoire ou, encore, leur pérennité susceptible d’être remise en question dans les mois qui viennent.
En outre, la multiplicité des organismes financeurs ainsi que la variabilité des critères exigés et des conditions d’octroi des aides ne contribuent pas à la lisibilité de ces dispositifs dont il est bien difficile de savoir auquel recourir en fonction de ses propres besoins.
Pour toutes ces raisons, votre rapporteur juge nécessaire de mettre en place un dispositif simple et opérationnel permettant de garantir à toutes les personnes handicapées l’accès à un financement peu onéreux des travaux d’aménagement indispensables de leur résidence principale et d’améliorer leurs conditions d’accès à la propriété d’un logement adapté. Aucune piste ne saurait être négligée aujourd’hui pour favoriser l’adaptation des logements.
Un certain nombre d’aides financières permettant de financer la réalisation de travaux d’accessibilité et d’adaptation des immeubles ou des logements existants aux personnes en situation de handicap existent mais diffèrent selon que les intéressés sont propriétaires ou locataires du secteur privé, locataires du secteur social ou bénéficiaires du 1 % logement. Ces dispositifs permettent, sous conditions, de prendre en charge une partie seulement du coût des travaux (de 35 % à 50 %) dont le montant est lui-même plafonné (entre 13 000 et 20 000 euros).
Les propriétaires bailleurs et les propriétaires occupants du secteur privé peuvent recevoir une subvention de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) pour la réalisation de travaux d’accessibilité et d’adaptation des logements (achevés depuis au moins 15 ans) aux besoins des personnes handicapées, utilisés à titre de résidence principale. Peuvent ainsi bénéficier des aides de l’ANAH :
– les propriétaires occupants qui envisagent de réaliser des travaux d’accessibilité ou d’adaptation de leur résidence principale. Ces travaux peuvent leur être destinés ou être effectués pour l’un de leurs proches qui habite le logement ou y vient régulièrement en visite ou encore pour la ou les personnes âgées ou handicapées accueillies à titre onéreux. Les aides sont attribuées sous condition de ressources (27) ;
– les propriétaires bailleurs pour répondre aux besoins d’un locataire en place handicapé ou âgé ou pour les logements vacants dans le cadre d’une offre nouvelle adaptée. Si aucune condition de ressources n’est exigée, les bénéficiaires potentiels sont en revanche tenus de signer avec l’ANAH une convention à loyer maîtrisé fixant un certain nombre d’engagements à respecter tenant au montant du loyer, aux ressources du locataire etc... À titre d’exemple, le bailleur est tenu de louer (ou mettre à disposition) le logement réhabilité à titre de résidence principale pendant une durée de 6 ans minimum lorsque les travaux réalisés avec l’aide de l’agence relèvent de l’accessibilité ou de l’adaptation du logement aux personnes en situation de handicap et ont eu pour objet de répondre aux besoins spécifiques de la personne logée ;
– les locataires qui effectuent eux-mêmes, avec l’accord exprès de leur bailleur, des travaux d’accessibilité ou d’adaptation au handicap de leur logement. Les mêmes plafonds de ressources leur sont applicables que pour les propriétaires occupants
Les travaux réalisés pour l’autonomie de la personne, c’est-à-dire destinés à adapter le logement et les accès au logement aux besoins spécifiques d’une personne en situation de handicap ou de perte d’autonomie liée au vieillissement ouvrent droit à une aide attribuée aux propriétaires occupants (et locataires), dans la limite d’un plafond de travaux de 20 000 euros hors taxes, avec un taux de subvention de 50 % pour les propriétaires disposant de ressources « très modestes » ou de 35 % pour les propriétaires aux ressources « modestes » (28). Pour les propriétaires bailleurs, le plafond de travaux est fixé à 750 euros hors taxes/m² et 60 000 euros par logement, avec un taux de subvention de 35 %.
Pour bénéficier de l’aide, le demandeur doit justifier de la nécessité des travaux au regard de son handicap. Ainsi, le dossier de demande d’aide doit comporter à la fois :
– un justificatif de handicap ou de perte d’autonomie (décision de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées reconnaissant l’éligibilité à l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, à l’allocation pour adulte handicapé ou à la prestation de compensation du handicap ; décision de la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) mentionnant le taux d’incapacité permanente et rendue à l’occasion d’une demande de carte d’invalidité ; évaluation de la perte d’autonomie en groupe iso-ressources réalisée par un organisme de gestion des régimes obligatoires de la sécurité sociale ou le conseil général) ;
– et un document permettant de vérifier l’adéquation du projet de travaux aux besoins : évaluation complète réalisée à l’occasion de la demande de prestation compensatoire de handicap (PCH), lorsque la demande concerne des aides liées au logement (cf infra) ; rapport d’ergothérapeute ; diagnostic « autonomie » réalisé par un architecte ou un technicien compétent.
L’action de l’ANAH en faveur de l’adaptation des logements des personnes handicapées s’inscrit dans une dynamique globale visant à favoriser le maintien à domicile et l’autonomie dans le logement des personnes en situation de handicap. Toutefois, les nouvelles orientations de la politique d’aide arrêtées en mars 2013, mettent désormais l’accent, conformément au plan d’investissement pour le logement décidé par le Gouvernement qui vise, entre autres, à favoriser la rénovation énergétique des logements et à réduire de 38 % d’ici à 2020 la consommation d’énergie dans le secteur du bâtiment, sur le financement des travaux permettant de réaliser des économies d’énergie, ainsi que sur le financement des travaux lourds de traitement de l’habitat indigne et très dégradé. Ainsi, en 2013, si les moyens dédiés à l’adaptation des logements à la perte d’autonomie devaient augmenter pour atteindre 47 millions d’euros dans le budget d’intervention de l’agence, ils n’en restaient pas moins le plus petit poste de dépenses.
D’un point de vue pratique, il convient également de souligner que l’attribution d’une subvention de l’ANAH n’est jamais de droit : la décision est prise au niveau local en fonction à la fois des priorités nationales et du contexte propre à chaque territoire ainsi que des moyens disponibles. Elle peut donc s’avérer très aléatoire d’un département à un autre. Les délais de traitement sont en outre parfois très longs. Comme le reconnaît le rapport Broussy (29), il peut arriver que les délais entre la demande et la réalisation des travaux excède 12 mois voire puisse aller jusqu’à 18 mois notamment à cause de la complexité du tour de table des financeurs. Or, quand une personne âgée sollicite des aides pour financer des travaux d’adaptation, c’est généralement qu’elle est déjà en situation de fragilité et que sa demande fait suite à une chute ou à un problème de santé. Enfin, il faut également souligner que l’avance de frais peut constituer également un obstacle pour certaines personnes : « Au moment de l’accord donné pour les travaux, la personne âgée va devoir verser un acompte. Et parfois, elle abandonnera toute velléité de travaux faute de disposer des moyens de préfinancer 2 000 ou 3 000 euros ». Le rapport Broussy recommande d’ailleurs la mise en place d’un système d’avances pour les propriétaires occupants modestes.
Une subvention de l’État peut être accordée aux bailleurs sociaux pour entreprendre des travaux d’amélioration et d’accessibilité des logements locatifs sociaux. La personne handicapée locataire doit donc s’adresser à son organisme bailleur qui fera les démarches pour l’obtention de l’aide.
Lorsque les travaux sont destinés à l’adaptation des logements aux besoins des personnes handicapées, la subvention peut atteindre 40 % du coût prévisionnel des travaux, dans la limite de 13 000 euros, ce plafond pouvant être porté à 20 000 euros en cas d’augmentation de la surface habitable d’au moins 10 %. Le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) souligne toutefois, dans son rapport 2010 (30), le manque de mobilisation de ce dispositif par les bailleurs sociaux.
Tout salarié d’une entreprise privée employant plus de 10 personnes peut bénéficier d’une aide du 1 % logement, dès lors qu'une personne occupant le logement est handicapée. Les ascendants et descendants du salarié peuvent également bénéficier de cette aide si cette même condition est remplie.
L’aide est accordée, par l’intermédiaire d’un organisme collecteur, sous la forme de subvention ou de prêt. Le montant de l’aide est au plus égal à 50 % du prix de revient final de l’opération. Le prêt peut être majoré pour la réalisation de travaux d’accessibilité. Cette majoration est limitée à 50 % du coût des travaux d’accessibilité.
La prestation de compensation du handicap (PCH), instituée par la loi du 11 février 2005, est affectée à la couverture de diverses charges auxquelles doivent faire face les personnes handicapées en raison d’un besoin d’aides humaines, d’aides techniques, d’aides animalières, d’aides à l’aménagement du logement ou du véhicule, ou d’aides spécifiques ou exceptionnelles telles que les aides à l’acquisition ou l’entretien de produits liés au handicap.
Les aménagements du logement pris en compte au titre de la PCH doivent avoir pour objectif de maintenir ou améliorer l’autonomie de la personne handicapée. Ils doivent lui permettre de circuler, d’utiliser les équipements indispensables à la vie courante, de se repérer et de communiquer, sans difficulté et en toute sécurité. Ils peuvent également être destinés à faciliter l’intervention des aidants qui accompagnent une personne handicapée à domicile pour la réalisation des actes essentiels de l’existence. Peuvent ainsi être pris en compte au titre de la prestation de compensation :
– les frais d’aménagement du logement, y compris consécutifs à des emprunts, qui concourent à maintenir ou améliorer l’autonomie de la personne handicapée par l’adaptation et l'accessibilité du logement ;
– les coûts entraînés par le déménagement et l’installation des équipements nécessaires lorsque l’aménagement du logement est impossible ou jugé trop coûteux au regard de l’évaluation réalisée par la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) dans son plan de compensation (cf. infra) et que le demandeur fait le choix d’un déménagement dans un logement répondant aux normes réglementaires d’accessibilité.
Les tarifs de prise en charge diffèrent selon le prix des travaux :
– pour la tranche de travaux inférieure ou égale à 1 500 euros, le tarif est égal à 100 % du coût des travaux ;
– pour la tranche de travaux prévus au-delà de 1 500 euros, le tarif est de 50 %, dans la limite du montant maximum attribuable.
Ce montant maximum est égal à 10 000 euros pour une période de 10 ans.
Lorsque la personne handicapée est hébergée par un membre de sa famille, la PCH peut être accordée pour financer les travaux d’aménagement du domicile de la personne qui l’héberge. À noter que les titulaires de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) peuvent également bénéficier de l’élément de la prestation de compensation liée à l’aménagement du logement et du véhicule.
Les travaux d’aménagement du logement doivent débuter dans les douze mois suivant la notification de la décision d’attribution et être achevés dans les trois ans suivant cette notification. Une prolongation des délais peut, dans la limite d’un an, être accordée par le président du conseil général sur demande dûment motivée du bénéficiaire de la prestation de compensation, lorsque des circonstances extérieures à la volonté de l’intéressé ont fait obstacle à la réalisation des travaux.
Le montant limité du volet logement de la PCH constitue sa première faiblesse : le plafonnement de celui-ci à 10 000 euros sur 10 ans ne permet pas en effet à toutes les personnes souffrant de handicaps moteurs d’adapter convenablement leur logement. Le CNCPH, dans son rapport 2010 précité, rappelle à cet égard qu’une plateforme élévatrice coûte à elle seule au moins 15 000 euros.
Le volet aménagement du logement de la PCH ne constituant qu’une partie de la prestation, il doit en outre être évalué au regard des conditions dans lesquelles celle-ci est attribuée. Or cette prestation concentre aujourd’hui de nombreuses critiques, tant dans sa conception, qui ne répond qu’imparfaitement à l’objectif de compensation intégrale du handicap, que dans sa mise en œuvre.
Sur le premier point, il faut rappeler que si l’accès à PCH n’est pas soumis à une condition de ressources, la loi a néanmoins mis en place un système de « ticket modérateur » sous la forme d’une participation laissée à la charge du bénéficiaire en fonction de son niveau de ressources. Ainsi, si les ressources de la personne handicapée prises en compte sont supérieures à un plafond équivalant à deux fois le montant annuel de la majoration pour tierce personne versée par la Sécurité sociale, la prise en charge sera de 80 %, les sommes non couvertes devant être acquittées par le bénéficiaire de la prestation. En théorie, ces sommes peuvent toutefois être en partie financées par le fond départemental de compensation du handicap, de manière à ce que le reste à charge n’excède pas 10 % des ressources personnelles nettes d’impôts de la personne handicapée. L’abondement et le fonctionnement de ce fonds rendent toutefois très aléatoire et très variable d’un département à un autre l’octroi d’un tel financement complémentaire.
Ensuite, il faut rappeler qu’une limite d’âge pour pouvoir solliciter l’attribution de la PCH a été instituée, empêchant un nombre important de seniors d’en bénéficier. Le rapport d’information du Sénat de juillet 2012 sur l’application de la loi du 11 février 2005 (31) et le rapport 2012 du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) soulignent ainsi tous les deux que cette limite d’âge constitue une entorse majeure à l’application du principe de compensation pour les personnes âgées. De fait, seules les personnes handicapées de moins de 60 ans ou celles de moins de 75 ans qui remplissaient les conditions d’éligibilité à la prestation avant l’âge de 60 ans, peuvent demander la PCH. Or, certaines personnes âgées de 75 ans et plus qui n’ont pas demandé à bénéficier de la prestation auparavant peuvent se trouver démunies suite à une modification de leur environnement (décès ou vieillissement de la personne qui apportait une aide humaine ou financière) et avoir un réel besoin d’adaptation de leur logement : elles ne peuvent cependant pas prétendre à la PCH.
S’agissant de la mise en œuvre de la PCH, plusieurs écueils sont également à signaler :
– tout d’abord, une procédure d’attribution complexe. La demande afférente à la PCH est déposée auprès de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) au sein de laquelle une équipe pluridisciplinaire évalue les besoins de la personne sur la base de son projet de vie et établit un plan personnalisé de compensation énonçant les mesures à prendre à son égard. La commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées de la MDPH arrête ensuite la décision d’attribution de la prestation en fixant le montant des différentes aides qui la composent. D’après le rapport d’information du Sénat de juillet 2012, l’incertitude portant sur le montant de l’aide finalement octroyée conduit de nombreux bénéficiaires de l’allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) à opter pour la conservation de cette aide plutôt que pour la PCH. Or l’ACTP ne finance que des prestations d’aide humaine et ne contient aucun volet relatif à l’aménagement du logement des personnes handicapées. Les chiffres publiés par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) témoignent à cet égard d’une baisse continue du taux d’attribution de la PCH depuis 2009 : si ce taux était de 66 % en 2007, il est ensuite passé à 57 % en 2010 et à 51 % en 2012 (32) ;
– ensuite, le manque de moyens des MDPH. Le rapport d’information précité relève que la part de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) dans le financement de la PCH est passée de 60 % en 2009 à 37 % en 2011, faisant porter un poids croissant aux départements. Ces derniers cherchent parfois à réduire le coût du dispositif en durcissant les critères d’attribution de la PCH, ce qui peut conduire à l’exclusion de certaines personnes handicapées ou à sous-estimer leurs besoins. On notera également que cette période coïncide avec une « pause » du financement par l’État du fonds départemental de compensation.
– enfin, ce même rapport du Sénat met également en évidence l’existence de grandes disparités dans les décisions d’attribution et de composition de la PCH entre les différentes MDPH, entraînant une inégalité de traitement entre les personnes handicapées selon leur département de résidence. On notera également que les MDPH, qui se sont substituées à la fois aux commissions départementales de l’éducation spécialisée (CDES) et aux commissions techniques de l’orientation et du reclassement professionnel (COTOREP), ont hérité de leur retard dans la gestion des dossiers, ce qui donne lieu à des délais d’instruction des demandes relativement longs.
Parmi les crédits d’impôt pour dépenses d’équipements de l’habitation principale (qui concernent notamment l’amélioration du bilan énergétique des habitations), figure un dispositif spécifique pour l’aménagement du logement des personnes handicapées, créé par la loi de finances pour 2005.
En vertu de l’article 200 quater A du code général des impôts, les dépenses d’installation ou de remplacement d’équipements spécialement conçus pour les personnes âgées ou handicapées ouvrent droit à un crédit d’impôt applicable à tous les contribuables, qu’ils soient propriétaires, locataires ou occupants à titre gratuit de leur habitation principale, située en France.
Les équipements concernés, dont la liste est fixée par l’article 18 ter de l’annexe IV du code général des impôts, doivent être attachés à perpétuelle demeure ; il s’agit essentiellement d’équipements sanitaires (par exemple, des WC pour personnes handicapées) ou d’éléments de sécurité et d’accessibilité (élévateurs verticaux, commandes électriques, revêtements de sols, etc…). Notons à cet égard que certains de ces équipements sont également éligibles au taux réduit de TVA à 5,5 % applicable aux aides techniques et autres appareillages conçus exclusivement pour les personnes handicapées en vue de la compensation d’incapacités graves dont la liste est fixée par l’article 30-0B de l’annexe IV du code général des impôts (par exemple, les élévateurs et releveurs hydrauliques ou électriques). Les deux listes ne se recoupent toutefois pas.
Le crédit d’impôt est égal à 25 % du montant des dépenses d’installation ou de remplacement des équipements. Par ailleurs, pour un même contribuable et une même habitation, le montant des dépenses ouvrant droit au crédit d’impôt ne peut excéder, pour une période de cinq années consécutives, la somme de 5 000 euros pour une personne seule, et 10 000 euros pour un couple soumis à imposition commune.
Le crédit d’impôt est accordé sur présentation des factures. En outre, il ne prend en compte que les dépenses relatives aux équipements pour les personnes âgées ou handicapées qui ont été installés par un professionnel. L’installation d’équipement par des membres de la famille ou par un aidant n’ouvre donc pas le droit à une aide financière.
Enfin, ce dispositif arrive prochainement à échéance : en effet, l’article 200 quater A du code général des impôts précise que le crédit d’impôt s’applique aux dépenses d’équipements :
– payées entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2014 dans le cadre de travaux réalisés dans un logement achevé ;
– intégrées à un logement acquis neuf entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2014 ;
– intégrées à un logement acquis en l’état futur d’achèvement ou que le contribuable fait construire, achevé entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2014.
Si la date butoir fixée lors de la création du dispositif au 31 décembre 2009 a déjà été repoussée à trois reprises en loi de finances, le Gouvernement actuel ne s’est toujours pas prononcé sur la pérennisation de cette mesure au-delà du 31 décembre 2014. On signalera à titre de comparaison que la mise en œuvre du crédit d’impôt relatif aux dépenses afférentes à l’acquisition d’ascenseurs électriques dans les immeubles collectifs (non spécifiques aux personnes handicapées mais entrant dans le même dispositif fiscal et susceptible de contribuer au même objectif) s’est arrêtée le 31 décembre 2011.
a. Création d’un prêt à taux zéro pour le financement des travaux d’aménagement des logements des personnes handicapées
L’article 1er insère tout d’abord un nouveau dispositif au sein du code général des impôts afin de permettre aux banques de bénéficier d’un crédit d’impôt lorsqu’elles accordent des prêts à taux zéro aux particuliers en situation de handicap en vue de financer des travaux d’aménagement de leur résidence principale (installation ou remplacement d’équipements spécialement conçus pour les personnes handicapées). Ce crédit d’impôt vise à compenser la différence de rémunération entre le prêt accordé et celui qui aurait été accordé au taux du marché.
Un certain nombre de conditions sont prévues afin d’encadrer le recours à ce dispositif, dont les modalités reprennent en grande partie celles du prêt à taux zéro pour la rénovation énergétique des logements anciens (éco-prêt à taux zéro). Il est ainsi renvoyé à un arrêté du ministre du budget pour fixer la liste des travaux éligibles au prêt à taux zéro. Les personnes susceptibles d’en bénéficier sont définies comme les personnes invalides en sens de l’article L. 341-4 du code de la sécurité sociale. Celles-ci doivent répondre à un critère de niveau de ressources, à déterminer par décret. Enfin, le montant du prêt est plafonné, à hauteur de 32 500 euros.
L’article 2 vise quant à lui à modifier les conditions prévues par l’article 244 quater J du code général des impôts pour ouvrir droit au prêt à taux zéro pour la première accession à la propriété. À l’heure actuelle, ce dispositif ne peut bénéficier aux personnes déjà propriétaires de leur résidence principale dans les deux années précédant la demande, sauf dérogations limitativement prévues par la loi. Ces dérogations concernent notamment les invalides de deuxième et troisième catégories : l’objectif poursuivi ici est d’y inclure également les invalides de première catégorie.
Lors de l’examen de la proposition de loi en commission, votre rapporteur a proposé plusieurs modifications visant à améliorer la rédaction de ses dispositions, ainsi qu’un amendement de fond, cosigné par plusieurs de ses collègues, tendant à compléter le dispositif proposé dans le domaine du logement social.
Cet amendement visait à réserver, de façon prioritaire, les appartements sociaux situés au rez-de-chaussée pour les personnes handicapées ou à mobilité réduite. Beaucoup de personnes handicapées disposent en effet de faibles revenus et bénéficient de ce fait de logements sociaux. Si, depuis 2001, l’accessibilité au logement social pour les personnes handicapées, notamment avec la loi du 5 mars 2007 sur le droit au logement opposable (DALO), s’est considérablement améliorée, des efforts restent à fournir pour adapter l’offre de logements aux contraintes des personnes en situation de handicap moteur ou aux personnes âgés ayant des difficultés à se déplacer. Même dans les immeubles dotés d’un ascenseur, l’accès au logement peut très vite devenir un obstacle lorsque ce dernier ne se situe pas au rez-de-chaussée. Pour éviter ces complications, l’amendement proposait de revoir le mode d’attribution des logements sociaux au sein des immeubles, afin que les rez-de-chaussée soient prioritairement réservés aux personnes handicapées ou à mobilité réduite ou aux familles ayant à leur charge une personne en situation de handicap. Il prévoyait ainsi que le décret en Conseil d’État qui, en application de l’article L. 441-1 du code de la construction et de l’habitation, fixe les critères d’attribution des logements sociaux, détermine également les conditions dans lesquelles cette priorité d’accès aux rez-de-chaussée doit être mise en œuvre.
Ni cet amendement ni aucun autre amendement soumis à la commission des affaires sociales n’a toutefois été adopté et la proposition de la loi a été rejetée, en raison de l’opposition globale de la majorité, ce que votre rapporteur ne peut que regretter au regard des enjeux exposés dans le présent rapport.
La Commission examine, sur le rapport de M. Gérald Darmanin, la présente proposition de loi au cours de sa première séance du mardi 17 septembre 2013.
Mme la présidente Catherine Lemorton. Inspirée du dispositif en faveur de l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments, cette proposition de loi, dont les auteurs sont M. Gérald Darmanin et plusieurs députés du groupe UMP, sera examinée en séance publique le jeudi 3 octobre.
M. Gérald Darmanin, rapporteur. Je remercie cette Commission de m’avoir accueilli en son sein et de m’avoir désigné pour rapporteur. La proposition de loi que j’ai déposée avec David Douillet et de nombreux collègues a un objet assez simple : il s’agit d’étendre le champ du prêt à taux zéro à la réalisation de travaux d’aménagement au domicile des personnes handicapées. L’idée nous en est venue, à David Douillet et à moi, de la rencontre que nous avons faite d’une famille dont la petite fille est devenue, après un accident, handicapée à 80 % : ces parents, appartenant à la classe moyenne, se sont heurtés à d’énormes difficultés pour aménager leur logement, faute de financements adéquats et d’une écoute attentive de la part des institutions. Les travaux nécessaires se montaient à peu de choses – par exemple, changer les poignées de porte, remplacer les éviers et la baignoire, agrandir l’entrée de leur salon –, mais ils auraient eu besoin, si ce n’est d’une subvention, du moins d’un prêt à taux zéro pour les réaliser.
Cette proposition de loi n’a pas pour autant été conçue sous le coup de l’émotion et ses dispositions pourront trouver à s’appliquer à de nombreux cas, d’enfants comme d’adultes. Elle a d’ailleurs rencontré un écho favorable auprès des associations représentant les personnes handicapées que j’ai rencontrées.
La France compte en effet aujourd’hui plus de deux millions de citoyens à mobilité réduite, pour qui l’autonomie représente un enjeu important. Cette question se pose d’ailleurs tant aux collectivités locales qu’à l’État, qui doivent accompagner au mieux les personnes handicapées. Or, dans ma région, de nombreux enfants et adultes handicapés partent en Belgique parce qu’il n’y a pas suffisamment de structures d’accueil en France. Il est nécessaire et urgent de prendre des mesures positives dans ce domaine d’autant que, depuis un an et demi, la nouvelle majorité n’a toujours pas présenté de texte en faveur des personnes handicapées. Nous souscrivons pourtant tous à l’engagement n° 32 de l’actuel Président de la République, qui garantissait « l’existence d’un volet handicap dans chaque loi ».
Le dispositif proposé présenterait un avantage important pour les personnes handicapées souhaitant rester à domicile. En effet, la véritable autonomie consiste précisément à pouvoir continuer à vivre chez soi, chez ses parents ou chez ses enfants – selon son âge et son handicap – en toute sécurité et sans trop de difficultés. Nous avançons donc ici une solution alternative à celle qui est proposée d’ordinaire – l’hébergement en maison de retraite ou en résidence spécialisée – et qui serait à la fois bien plus souhaitable pour les intéressés et moins coûteuse pour eux comme pour l’État et pour les collectivités locales. Il n’est bien sûr pas dans notre idée d’obliger les personnes en situation de handicap à contracter un prêt : notre intention est de leur offrir la possibilité d’un meilleur épanouissement et d’une plus grande autonomie. Or, si l’État contribue déjà à leur intégration en favorisant l’accessibilité et le maintien à domicile, il est possible de faire encore davantage pour elles, dans le prolongement de la loi du 11 février 2005, en les aidant à aménager leur logement.
Ce que nous proposons n’est pas une subvention, mais un prêt à taux zéro, comme il en existe pour d’autres incitations relevant de l’État et des collectivités locales. En effet, nous partons du principe que les personnes contractant un tel prêt ont simplement besoin d’un « coup de pouce » à un moment difficile de leur vie qu’ils n’avaient pas forcément prévu, comme dans le cas d’un handicap survenu à la suite d’un accident.
Les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ont parfois bien du mal à instruire les dossiers dans un temps raisonnable. Nous connaissons d’ailleurs tous dans nos circonscriptions des exemples de personnes confrontées à un handicap – le leur ou celui de leur enfant – qui doivent attendre de six mois à un an que leur cas soit traité. Le dispositif que nous proposons aujourd’hui permettrait de leur venir en aide plus facilement et plus rapidement.
Cette proposition comprend trois mesures. L’article 1er crée un prêt à taux zéro financé grâce à un crédit d’impôt accordé aux banques. En effet, s’il existe aujourd’hui des dispositifs servant des fins similaires, ils arriveront à échéance à la fin de 2014 et je n’ai pour l’heure pas entendu le Gouvernement exprimer sa volonté de les remplacer ou de les proroger. La tenue d’un comité interministériel du handicap a certes été prévue, mais elle a été reportée à la fin du mois de septembre et il est urgent de prendre des décisions sur le sujet.
La procédure proposée aurait l’avantage de la simplicité : la famille s’adresserait à la banque qui, bénéficiant d’un crédit d’impôt financé par l’État, accorderait un prêt à taux zéro dont nous avons fixé le plafond à 32 500 euros, après une évaluation du coût des aménagements en cause réalisée avec le concours de plusieurs associations.
L’article 2 assouplit les conditions d’accès des personnes handicapées au prêt à taux zéro pour une première accession à la propriété. Enfin, je propose, par un amendement portant article additionnel après l’article 2, que les logements sociaux situés en rez-de-chaussée soient prioritairement réservés aux personnes à mobilité réduite – mesure dont tous les élus locaux peuvent mesurer l’utilité.
Ayant vocation à être transpartisane, cette proposition de loi ne devrait susciter aucune opposition, si ce n’est sur des points techniques. Je vous invite donc à adopter ces mesures simples et de bon sens, auxquelles tous nos concitoyens ont à gagner.
Mme Martine Pinville. L’adaptation du logement des personnes handicapées est un sujet auquel nous sommes tous sensibles et sur lequel nous sommes d’ailleurs régulièrement sollicités dans nos circonscriptions. Il nous faut cependant faire preuve de prudence dans la manière de l’aborder. Vous nous proposez la création d’un prêt à taux zéro destiné à des familles relativement modestes qui ne peuvent bénéficier des aides existantes. Cependant, votre dispositif repose sur un crédit d’impôt, ce qui revient à en exclure les 50 % de foyers non imposables. Dès lors, il serait sans doute préférable de travailler à une meilleure articulation des aides existantes, telles que la prestation compensatoire du handicap (PCH), les aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) et le crédit d’impôt de l’article 200 quater du code général des impôts, tout en les faisant mieux connaître du grand public.
Le Comité interministériel pour le handicap (CIH) se réunira le 25 septembre prochain, donc très bientôt, pour traiter de ces sujets. En outre, une réflexion visant à réformer les dispositifs actuels est en cours en vue de les étendre à l’accueil des ascendants âgés et des descendants handicapés. Ces améliorations de l’existant lui semblant prioritaires, le groupe socialiste, dans l’attente des décisions qui seraient prises lors du prochain CIH, ne votera pas la proposition de loi, si bonne que soit l’intention.
Mme Bérengère Poletti. Cette excellente initiative s’inscrit parfaitement dans l’esprit de la grande loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui a consacré un droit à compensation du handicap et une obligation de mise en accessibilité des espaces publics, des systèmes de transport et du cadre bâti neuf
– la conformité à ces nouvelles normes devant être acquise en 2015.
Nous recevons tous très régulièrement, dans nos permanences parlementaires, des personnes en situation difficile, contraintes par un accident ou par la naissance ou la maladie d’un enfant handicapé à des dépenses auxquelles elles ne peuvent faire face. Certes, plusieurs dispositifs existent déjà, tels que les aides de l’ANAH au profit des propriétaires occupants, des locataires aux faibles revenus et des propriétaires bailleurs, le 1 % Logement pour les salariés et surtout la prestation de compensation du handicap délivrée par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). On pourrait encore ajouter à la liste un crédit d’impôt équipement couvrant 25 % des dépenses, mais celui-ci arrivera malheureusement à expiration à la fin de l’année 2014. Qui plus est, ces dispositifs sont incomplets et insuffisants. Et il me paraît difficilement concevable, en cette période où le budget est sous tension, d’accroître ces aides financières dans une proportion utile pour aider les personnes concernées à aménager leur appartement ou leur maison. Le dispositif que vous nous proposez permettrait en revanche de répondre en grande partie à leurs besoins. C’est pourquoi le groupe UMP soutiendra cette proposition de loi, dont je félicite M. Darmanin.
Il conviendrait en outre d’ouvrir des discussions avec les professionnels du bâtiment – de même qu’au niveau européen – sur les normes de construction. En effet, si l’on prévoyait des portes de largeur suffisante avant toute construction d’un bâtiment, on aurait moins à dépenser par la suite pour adapter les logements.
M. Arnaud Richard. Nous retrouvons dans cette proposition de loi une idée qui a souvent été avancée dans les débats relatifs au prêt à taux zéro. Si la disette budgétaire actuelle peut conduire à s’interroger sur l’opportunité d’étendre le champ des bénéficiaires de ce prêt – champ qui a d’ailleurs été restreint au cours des derniers mois –, le moyen est sans doute le plus approprié pour faciliter l’accession à la propriété ou, dans le cas des handicapés qui nous occupe, l’aménagement d’un logement.
Je salue également l’amendement du rapporteur et de David Douillet après l’article 2, définissant les conditions dans lesquelles les personnes handicapées pourront accéder aux logements sociaux situés en rez-de-chaussée.
Mme Sylviane Bulteau. M. Darmanin a raison de souligner les difficultés que rencontrent les personnes handicapées ou leur famille pour financer l’adaptation de leur logement. Cependant, comme on l’a rappelé, des aides existent déjà, telles celles des fonds départementaux de compensation du handicap et les prestations légales relevant des caisses primaires d’assurance maladie, de l’ANAH et de l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH). Il conviendrait toutefois, afin de retrouver l’esprit de la loi du 11 février 2005 qui vise à la compensation intégrale du handicap, de réviser dans chaque département le règlement intérieur du fonds de compensation car il est anormal que l’on ne puisse faire appel à celui-ci pour changer des poignées de porte ou des éviers. En effet, à chaque département sa MDPH et son règlement intérieur propre.
Cette proposition de loi pose par elle-même problème : comment, compte tenu de leurs ressources généralement très modestes, les personnes handicapées pourront-elles rembourser le prêt qui leur sera consenti ? Dans plusieurs départements et communes, des efforts importants sont déployés pour adapter les logements au handicap : sans doute conviendrait-il, d’une part, d’améliorer le pilotage de ces opérations afin de construire partout – en milieu urbain comme en milieu rural – des logements accessibles et, d’autre part, de rendre les aides financières existantes plus lisibles et de les faire connaître afin d’éviter aux familles d’avoir à subir un véritable parcours du combattant.
M. Élie Aboud. Faisons un peu de politique-fiction : si le rapporteur avait appartenu au groupe SRC, cette proposition de loi n’aurait-elle pas été reçue tout différemment ? J’entends certes les observations faites sur tel ou tel aspect de ce texte, mais le sujet vaudrait qu’on dépasse les clivages politiques.
En dépit de toutes les aides existantes, la société a parfois du mal à accompagner les personnes handicapées vieillissantes. C’est au regard de cette difficulté que je trouve votre proposition de loi extrêmement intéressante, monsieur le rapporteur. Il est vrai que les bailleurs sociaux ont l’obligation d’adapter des logements, mais elles y satisfont dans des proportions variables. Or aucun locataire n’ira contracter un prêt pour réaliser des travaux dans un logement social. Il y a donc ici un vide à combler. D’autre part, pourriez-vous être plus explicite sur les obstacles auxquels se heurteraient les personnes propriétaires depuis plus de deux ans qui voudraient acquérir un logement plus modeste ou pour faire des travaux ?
Mme Véronique Louwagie. Je félicite le rapporteur pour cette proposition de loi simple et de bon sens, en faveur de personnes fragiles.
Les MDPH et les conseils généraux interviennent différemment selon les départements. Ainsi le département de l’Orne distribue-t-il des subventions aux personnes en situation de handicap afin de leur permettre de se doter des équipements dont elles ont besoin dans la vie quotidienne. Sachant que certaines modalités d’application de votre proposition seront définies par décret en Conseil d’État, il conviendra de veiller à ce que ce prêt à taux zéro soit également ouvert aux personnes bénéficiaires de ces aides départementales. Enfin, si plusieurs personnes en situation de handicap vivent dans un même logement, le plafond du prêt sera-t-il relevé à proportion de leur nombre ?
M. Fernand Siré. En tant que médecin, je ne puis que m’associer à cette proposition de loi : tout ce que l’on peut faire en faveur des personnes handicapées est bienvenu. Cela étant, le handicap peut être de naissance, lié à la vieillesse, dû à un accident, aux séquelles d’une maladie ou encore à une maladie évolutive, conduisant la faculté à émettre un avis réservé sur l’espérance de vie de l’intéressé. Il conviendra donc que l’État ou un autre organisme se porte caution pour les personnes en fin de vie ou dont on sait l’avenir compromis, afin d’éviter que les banques ne refusent de leur prêter comme elles le font chaque fois que le risque de décès de l’emprunteur est élevé.
M. Jean-Pierre Door. Je félicite à mon tour M. Gérald Darmanin pour cette proposition de loi qui étend le champ d’application du prêt à taux zéro
– excellent dispositif visant à aider les primo-accédants à la propriété mais dont certaines catégories de personnes, notamment les personnes handicapées, avaient été en partie exclues. De ce point de vue, le texte améliore heureusement l’excellente loi Montchamp de 2005. Quant à l’amendement du rapporteur visant à attribuer en priorité les logements sociaux situés en rez-de-chaussée aux personnes handicapées ou à mobilité réduite, il répond à nombre de demandes formulées tant auprès des MDPH qu’auprès de nos permanences. Je regrette donc comme M. Aboud que des dispositions aussi simples qu’humaines ne recueillent pas l’unanimité de la Commission.
M. Gilles Lurton. Même si toutes les personnes handicapées ne peuvent en bénéficier, cette proposition de loi sera indéniablement utile à beaucoup. En effet, en dépit de toutes les mesures déjà prises, nombre d’entre elles ont les plus grandes difficultés à obtenir des banques le prêt dont elles auraient besoin pour acquérir ou aménager leur logement. Cela étant, le rapporteur pourrait-il nous confirmer que, dans son amendement portant article additionnel après l’article 2, la priorité qu’il propose d’accorder aux personnes à mobilité réduite ne vaut pas exclusivité ? Présidant une commission d’attribution des logements, je sais qu’il n’est pas toujours possible de satisfaire ce genre de demandes.
Mme Isabelle Le Callennec. Puisque la majorité reconnaît des mérites à cette proposition de loi, ne serait-ce que celui de poser une vraie question, n’attendons pas : simplifions sans attendre les dispositifs existants et complétons-les dans un souci de cohérence. En effet, ils ne couvrent pas tous les cas et cela justifie la présentation de ce texte comme cela justifierait son approbation unanime.
Cela étant, la proposition renvoie à un arrêté du ministre chargé du budget le soin de fixer la liste des travaux entrant dans le champ d’application du dispositif. Cet arrêté ne devrait-il pas être cosigné par le ministre chargé des personnes handicapées ?
M. Bernard Perrut. Cette proposition de loi complète heureusement les dispositions déjà prises sur ce sujet du handicap et est en particulier conforme à l’esprit de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Je regrette par conséquent qu’elle ne fasse pas consensus.
Déjà, le 25 avril dernier, nos collègues du groupe SRC ont rejeté la très intéressante proposition de loi relative à l'égalité des droits et à l'intégration des personnes en situation de handicap, présentée par Damien Abad. Aujourd’hui, une fois de plus, voici que nous ne nous accorderons pas sur un dispositif qui n’a pourtant rien de politique, puisqu’il tend uniquement à améliorer la qualité de vie de nos concitoyens handicapés !
M. Denis Jacquat. Le coût de l’aménagement du domicile des personnes handicapées moteur représente une lourde charge financière et, malgré les aides existantes, le reste à payer demeure très important. Nous le constatons souvent dans nos circonscriptions, certains ont à s’acquitter de factures hors de proportion avec leurs revenus, même pour des personnes aisées. Le complément assuré par cette proposition de loi serait donc bienvenu.
J’ai bien entendu les remarques de notre collègue Martine Pinville, mais elles peuvent se traduire en amendements. J’ai peur en effet qu’un rejet du texte ne bloque toute évolution ou, tout du moins, ne reporte de plusieurs mois la résolution d’un problème réel. Or les personnes handicapées attendent de bénéficier d’une politique sociale substantielle, dont elles ont grand besoin – on n’en fait jamais assez en France pour elles !
Mme la présidente Lemorton. Le Premier ministre, dès son entrée en fonction, a pris des mesures pour que le handicap soit pris en compte dans tous les textes de loi.
M. Christian Paul. Je vous remercie, madame la présidente, de le rappeler ; et, même s’il s’agissait de donner des orientations pour les travaux préparatoires des lois de la République, je ne trouve pas choquant que le Premier ministre ait procédé par voie de circulaire : le moyen est rapide et efficace.
Je note une égale motivation de la part des députés de la majorité et de ceux de l’opposition pour résoudre les problèmes très concrets des personnes en situation de handicap – en l’espèce leurs problèmes de logement – et loin de nous également l’idée de dénier à l’opposition le droit de déposer des propositions de loi. Nous serions même disposés à voter celles-ci si elles traitaient d’un domaine laissé en jachère. Il se trouve simplement que la question du handicap n’entre pas dans cette catégorie. Le Gouvernement travaille sur le sujet et des mesures ont été prises au cours des dix-huit premiers mois de la législature. En outre, un comité interministériel du handicap se tiendra le 25 septembre prochain : ce sera l’occasion pour le Gouvernement de proposer au pays, en particulier aux associations concernées, des dispositions concrètes, y compris sur le logement.
Nous ne pouvons donc pas voter cette proposition de loi. Sur un sujet aussi important, le Parlement et le Gouvernement ne doivent pas cheminer séparément, mais ensemble. C’est dans cet esprit que nous travaillons avec l’exécutif – tout spécialement Martine Carrillon-Couvreur, Martine Pinville et Jérôme Guedj, qui suivent ces questions pour notre groupe – et nous sommes confiants dans les résultats de ce comité interministériel.
M. le rapporteur. Je vous remercie, mes chers collègues, d’être intervenus si nombreux.
Peut-être me suis-je très mal exprimé, mais je n’ai pas compris votre objection relative aux effets d’exclusion qu’aurait le crédit d’impôt, madame Pinville. La proposition de loi dispose que les personnes en situation de handicap pourront bénéficier d’un prêt à taux zéro, et non d’un crédit d’impôt : celui-ci sera consenti aux banques qui leur prêteront. Votre critique sur ce point n’est donc pas fondée.
C’est la troisième fois que je propose ce dispositif – je l’ai d’abord fait en séance à l’occasion de l’examen du projet de loi sur le logement présenté par Mme Duflot ; ensuite en complément de la proposition de loi de M. Abad ; enfin aujourd’hui. À chaque fois, on m’a opposé la tenue prochaine d’un comité interministériel mais, initialement prévue pour janvier dernier, celle-ci a été reportée au mois de juin et, finalement, à la fin du mois de septembre. Comme le sujet qui nous occupe est de l’avis de tous un sujet important, je proposerai une solution de compromis : cette proposition de loi ne devant être examinée en séance publique que le 3 octobre, le groupe SRC, pour prouver sa bonne foi, ne pourrait-il s’abstenir aujourd’hui en attendant les conclusions du comité interministériel ? Ainsi, le 3 octobre, nous pourrions tous faire preuve d’esprit constructif, et non politicien.
Je remercie tous les parlementaires qui soutiennent cette proposition de loi que j’ai déposée avec David Douillet.
Je partage tout à fait votre avis, madame Poletti, à propos des normes de construction. Conformément à la circulaire du Premier ministre, chaque texte de loi devrait comporter un volet handicap dès lors qu’il concernerait un domaine dans lequel on peut faciliter la vie des personnes handicapées. Prévoir coûtera toujours moins cher que réparer. En tant que rapporteur ou, si la Commission n’y consent pas, à titre individuel, je serai donc heureux de soutenir en séance les amendements que vous pourriez déposer sur le sujet.
Madame Bulteau, c’est avant tout une mesure de simplification que nous proposons. Quiconque a affaire à une Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ou à une caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) est confronté à une technostructure dont le moins que l’on puisse dire est que ses relations avec les usagers, avec les élus locaux et parfois même avec les parlementaires ne sont pas toujours très faciles, même si ses agents font formidablement bien leur travail. D’autre part, comme le rappelle l’exposé des motifs, un certain nombre de dispositifs viendront à échéance en 2014. Le comité interministériel se prononcera-t-il le 25 septembre sur leur pérennisation ? Or de nombreuses personnes handicapées appartenant à des familles de classe moyenne, qui n’ont pas les moyens d’assumer ces accidents de la vie, attendent de savoir ce que vont devenir ces dispositifs. Nous espérons tous qu’ils seront prorogés, mais nous n’avons pour le moment aucune assurance à cet égard. Cette proposition de loi a au moins le mérite d’ouvrir le débat et de signifier au Gouvernement que nous sommes parties prenantes comme force de proposition.
Texte de simplification, cette proposition de loi est aussi en faveur de l’unité nationale : d’une CPAM à une autre, d’une MDPH à une autre, l’action menée n’est pas toujours très cohérente et nous faisons ici en sorte que la même règle du jeu s’applique à tous les Français.
Je remercie Arnaud Richard pour son soutien à mon amendement permettant d’attribuer prioritairement aux personnes handicapées les logements de rez-de-chaussée. Ayant déjà soutenu en séance une disposition identique, il fait là preuve d’une cohérence qui ne m’étonne pas de sa part.
Je sais gré à Élie Aboud de ses propos sympathiques. Lorsqu’elles vieillissent, les personnes handicapées se retrouvent en effet en situation très difficile. Or, sauf erreur de ma part, le prêt à taux zéro n’est actuellement pas accessible à toutes les personnes handicapées lorsqu’elles sont déjà propriétaires de leur logement depuis plus de deux ans. Il s’agit donc de permettre à toutes les personnes souffrant d’un handicap reconnu – et non plus, comme aujourd’hui, aux seules personnes invalides de deuxième et troisième catégories – de bénéficier d’un tel prêt : leur faciliter l’achat d’une nouvelle maison, d’un nouvel appartement mieux adaptés à leur handicap coûterait sans doute beaucoup moins cher à l’État que la construction de logements neufs ou de maisons spécialisées.
Je me suis posé la même question que vous, monsieur Siré, mais la durée du prêt – 120 mois – limite les risques de non-remboursement et un fonds de garantie est prévu, le même que pour le prêt à taux zéro de droit commun : autant d’éléments de nature à apaiser vos inquiétudes.
Certes, monsieur Lurton, « prioritairement » ne signifie pas « exclusivement ». Si vous posiez la question dans l’hémicycle, le rapporteur ne manquerait pas de souligner, afin que cela figure au compte rendu des débats, que l’on ne peut garantir à tout le monde un logement en rez-de-chaussée.
Mme Le Callennec a tout à fait raison de proposer que la ministre des affaires sociales cosigne l’arrêté prévu à l’article 1er, ce sera l’objet d’un de mes amendements.
Enfin, je crois avoir répondu à M. Paul avec ma proposition de compromis, dans l’intérêt général et dans celui, avant tout, des personnes handicapées.
Article 1er
(art. 244 quater W [nouveau] du code général des impôts)
Création d’un prêt à taux zéro pour le financement de travaux d’aménagement des logements des personnes handicapées
Le présent article s’inspire des dispositions de l’article 244 quater U du code général des impôts instituant un crédit d’impôt au titre des avances remboursables ne portant pas intérêt pour le financement de travaux d’amélioration de la performance énergétique des logements anciens (éco-prêt à taux zéro) afin de proposer un dispositif permettant aux personnes handicapées moteur ou aux ménages ayant à charge une personne handicapée moteur de mener à bien les travaux nécessaires à l’adaptation de leur logement.
Pour ce faire, il introduit au sein du code général des impôts un nouvel article, l’article 244 quater W, qui crée un crédit d’impôt au titre des avances remboursables ne portant pas intérêt pour le financement des travaux d’installation ou de remplacement d’équipements spécialement conçus pour les personnes handicapées.
Il s’agit donc de permettre à l’État de financer la distribution par les établissements bancaires de prêts ne portant pas intérêt lorsque ceux-ci sont destinés à l’adaptation du logement des personnes handicapées.
● Le premier paragraphe (I) définit le champ de la mesure en précisant :
– les établissements éligibles au crédit d’impôt. Il s’agit, comme à l’article 244 quater U des établissements de crédit mentionnés à l’article L. 511-1 du code monétaire et financier passibles de l’impôt sur les sociétés, de l’impôt sur le revenu ou d’un impôt équivalent, ayant leur siège dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d’assistance administrative, en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale (1) ;
– les personnes physiques susceptibles de bénéficier d’un prêt à taux zéro, en l’occurrence, les personnes considérées comme invalides en sens de l’article L. 341-4 du code de la sécurité sociale (33), sous réserve de remplir les conditions de ressources qui seront fixées par voie réglementaire (1 et 3) ;
– le type de travaux entrant dans le cadre de la mesure, qui sont définis comme « les travaux d’installation ou de remplacement d’équipements spécialement conçus pour les personnes handicapées ». Il est cependant renvoyé à un arrêté du ministre chargé du budget le soin de déterminer la liste précise de ces travaux, qui ne peuvent en outre concerner que la résidence principale (2).
Ce même paragraphe fixe également à 32 500 euros (34) le plafond du montant du prêt à taux zéro susceptible d’être accordé dans le cadre du dispositif (4) ainsi que conditions dans lesquelles le prêt peut être accordé. Il précise à cet égard que la fourniture d’un descriptif et d’un devis détaillés des travaux envisagés est obligatoire, de même que l’envoi, dans un délai de deux ans à compter de l’octroi du prêt, de l’ensemble des éléments justificatifs de la réalisation des travaux (5). Ces dispositions sont strictement semblables à celles de l’article 244 quater U.
● Le deuxième paragraphe (II) détaille le mécanisme du crédit d’impôt. Il précise en premier lieu que son montant correspond à la différence totale entre les mensualités dues au titre de l’avance remboursable sans intérêt et les mensualités qui auraient été dues dans le cadre d’un prêt consenti au taux du marché, dans la limite de dix ans.
Il définit ensuite le régime de la créance née du crédit d’impôt dans les mêmes termes, là encore, que ceux utilisés pour l’éco-prêt à taux zéro. La créance, considérée comme « inaliénable et incessible » constitue un produit imposable ; en cas de fusion, elle est transférée à la « société absorbante ».
● Le troisième paragraphe (III) subordonne le bénéfice du crédit d’impôt à la signature d’une convention avec l’État, à l’instar du dispositif retenu pour le crédit d’impôt afférent à l’éco-prêt à taux zéro. Cette convention autorise les établissements de crédit à distribuer des avances remboursables sans intérêt pour financer des travaux d’adaptation de l’équipement des logements utilisés ou destinés à être utilisés comme habitation principale par des personnes en situation de handicap. Elle doit être conforme à une convention type approuvée par arrêté conjoint du ministre chargé de l’économie, du ministre chargé du logement et du ministre chargé de l’environnement.
● Le quatrième paragraphe (IV) renvoie quant à lui à la signature d’une convention entre l’établissement de crédit et la société chargée de gérer le Fonds de garantie de l’accession sociale à la propriété (SGFGAS), prévoyant les modalités de déclaration par l’établissement de crédit des avances remboursables, le contrôle de l’éligibilité de ces avances ainsi que le suivi des crédits d’impôt. Rappelons que la Société de gestion du fonds de garantie de l’accession sociale (SGFGAS), créée par l’article 126 de la loi de finances du 30 décembre 1992 (35), a pour mandat de gérer pour le compte de l’État le versement aux établissements de crédit des subventions afférentes aux prêts à taux zéro et d’assurer, par délégation, le contrôle du respect de la réglementation. Par ailleurs, la garantie du FGAS, qui est une garantie d’État, peut également être mise en œuvre par le biais de conventions conclues entre la SGFGAS et les établissements prêteurs.
● Les cinquième et sixième paragraphes (V et VI) reprennent enfin les dispositions des paragraphes VI et VII de l’article 244 quater U, d’une part, afin de prévoir, sous certaines conditions, la possibilité, pour les associés d’utiliser le crédit d’impôt proportionnellement à leurs droits et, d’autre part, de renvoyer à un décret en Conseil d’État pour fixer les modalités d’application de l’article, et notamment les caractéristiques financières et les conditions d’attribution du prêt à taux zéro.
*
La Commission rejette successivement les amendements rédactionnels AS 6 et AS 5 du rapporteur.
Elle est saisie de l’amendement AS 4 du même auteur.
M. le rapporteur. C’est encore un amendement rédactionnel. Les députés du groupe SRC pourraient-ils m’expliquer pourquoi ils rejettent même les amendements de cette sorte ?
Mme la présidente Lemorton. Il s’agit sans doute de vous préparer à une conclusion douloureuse…
M. Christian Paul. Pour vous éviter de nous interroger, à chaque amendement, sur la façon dont nous souhaitons voter, je vous répondrai une fois pour toutes : par souci de cohérence, nous n’allons pas entrer dans le détail de l’examen d’un texte que nous ne souhaitons pas adopter. En effet, nous l’avons répété, le Gouvernement travaille sur cette question et nous avons un rendez-vous le 25 septembre prochain. Vous avez du reste une chance inouïe : celle de pouvoir interroger en séance publique la ministre sur son programme quelques jours plus tard à peine. L’agenda politique vous sert donc et nous nous retrouverons alors avec grand plaisir dans l’hémicycle.
La Commission rejette l’amendement.
La Commission examine l’amendement AS 3 du rapporteur.
M. le rapporteur. Cet amendement répond en partie à la demande de Mme Le Callennec : il s’agit de substituer, à la fin de l’alinéa 11, la signature du ministre chargé des affaires sociales à celle du ministre chargé de l’environnement.
La Commission rejette l’amendement.
Elle rejette l’article 1er.
Article 2
(art. 244 quater J du code général des impôts)
Assouplissement des conditions d’accès des personnes handicapées au prêt à taux zéro pour l’accession à la première propriété
Le prêt à taux zéro pour l’accession à la première propriété, défini à l’article 244 quater J du code général des impôts est destiné à financer :
– la construction d’un logement, accompagnée le cas échéant de l’acquisition de droits de construire ou du terrain destiné à la construction de ce logement ;
– l’acquisition d’un logement en vue de sa première occupation ;
– l’aménagement à usage de logement de locaux non destinés à l’habitation.
Ce prêt ne peut être accordé qu’aux personnes qui n’ont pas été propriétaires de leur résidence principale au cours des deux années précédant la demande. Cette condition n’est toutefois pas exigée lorsque le bénéficiaire du prêt ou l’un des occupants du logement à financer avec le prêt à taux zéro est :
– titulaire d’une carte d'invalidité correspondant au classement dans la deuxième ou la troisième des catégories prévues à l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale (a) ;
– bénéficiaire de l’allocation adulte handicapé (AAH) ou d’une allocation d’éducation spéciale (b) ;
– victime d’une catastrophe ayant conduit à rendre inhabitable de manière définitive sa résidence principale (c).
Le présent article vise à modifier la rédaction de l’article 244 quater J afin d’élargir le champ de cette exception à des personnes handicapées qui n’en bénéficieraient pas aujourd’hui grâce à une formulation du handicap plus générale. La solution retenue consiste à ouvrir à la première catégorie d’invalidité définie par l’article L. 341-4 du code de la sécurité sociale (36) le dispositif de prêt à taux zéro pour l’accession à la première propriété auquel ne sont aujourd’hui éligibles que les deuxième et troisième catégories définies par ce même article (37). La rédaction du a) du I de l’article 244 quater J ne mentionnerait donc plus désormais les différentes catégories d’invalidité mais renverrait, plus globalement, à la notion d’invalidité au sens de l’article L. 341-4 du code de la sécurité sociale.
*
La Commission rejette l’article 2.
La Commission est saisie de l’amendement AS 2 du rapporteur, portant article additionnel après l’article 2.
M. le rapporteur. Avec M. Douillet et d’autres signataires membres de la Commission, nous souhaitons que les rez-de-chaussée des logements sociaux soient réservés prioritairement aux personnes handicapées ou à mobilité réduite, ainsi qu’aux ménages ayant à leur charge une personne en situation de handicap. Chacun peut comprendre cette mesure de simplification, ne serait-ce que grâce au bon sens qu’il aura acquis chaque jour au contact de ses administrés.
M. Jean-Pierre Door. Chacun devrait se retrouver dans cet amendement puisque chacun ici est confronté dans sa circonscription à ce genre de problème. Il s’agit d’obliger les bailleurs sociaux à prendre en compte une demande légitime des personnes à mobilité réduite ou affectées d’un autre handicap. Nous devrions donc tous voter cette disposition.
M. Élie Aboud. Certes, certains bailleurs appliquent cette mesure de bon sens, mais ce n’est malheureusement pas le cas partout. Comment nos collègues de la majorité peuvent-ils s’opposer à cette disposition ? Et que prépare le Gouvernement en la matière ?
Mme la présidente Lemorton. Il me semble, monsieur Aboud, que M. Paul et Mme Pinville ont déjà répondu. J’ai cru comprendre – je parle ici sous le contrôle des députés du groupe SRC – que ce point était inclus dans une réflexion interministérielle globale.
Mme Martine Pinville. Le comité interministériel du handicap va en effet se pencher sur la situation des personnes handicapées et, notamment, sur cette question de l’aménagement de leur logement.
M. Arnaud Richard. Je ne comprends pas bien, moi non plus, la position du groupe SRC. Mme Pinville affirme que le comité interministériel va travailler sur le sujet mais rien ne nous empêche de voter des dispositions en commission. J’espère que les députés socialistes ne se retrouveront pas en position difficile si, par hasard, à la suite des travaux du comité, la ministre venait à faire les mêmes propositions que le rapporteur.
Mme Isabelle Le Callennec. Chat échaudé craint l’eau froide. Quand j’ai présenté la proposition de loi visant à permettre le cumul du revenu d’un travail avec le minimum vieillesse, je me souviens que, dans l’hémicycle, on m’a répondu que l’on ne pouvait pas la voter mais que je ne devais pas m’inquiéter, que la majorité travaillait sur le sujet et que je retrouverais ces dispositions dans le projet de loi sur la réforme des retraites. Or tel n’est pas le cas. Il serait donc dommage de laisser passer, ici, l’occasion de voter une proposition de bon sens, qui résout un certain nombre de problèmes.
M. le rapporteur. Peut-être parce que je suis un jeune parlementaire, je m’étonne que des législateurs puissent se retrancher ainsi derrière les décisions à venir d’un comité interministériel ! En vertu de la séparation des pouvoirs, le Parlement est libre de discuter et d’adopter les dispositions qu’il juge souhaitables – et qui pourraient en l’espèce aider l’exécutif à prendre des décisions.
Sur le fond, notre collègue Aboud a tout à fait raison : certains bailleurs sociaux – souvent sous la pression des élus locaux – appliquent déjà la disposition prévue par cet amendement, parce qu’elle relève du bon sens. Mais ce n’est pas le cas de tous, d’où des distorsions entre territoires. Le dispositif proposé est un moyen assez efficace de les forcer à prendre en compte un problème qui, pardonnez l’expression, pourrit la vie des personnes handicapées.
M. Christian Paul. Je n’entends pas faire l’éducation du rapporteur qui est déjà expérimenté bien qu’il soit arrivé récemment parmi nous. Je puis néanmoins faire valoir à ceux qui, comme lui, n’ont pas eu la chance ou le malheur de vivre pendant dix ans dans l’opposition au sein de cette assemblée, que je n’ai pas le souvenir qu’une seule de nos propositions de loi ait été adoptée…
Mme Bérengère Poletti. Si !
M. Denis Jacquat. Vous faites preuve d’amnésie !
M. Jean-Pierre Door. Et la proposition de loi tendant à réduire la consommation de sucre outre-mer, par exemple ?
Mme la présidente Lemorton. Vous n’avez pas voté ce texte, monsieur Door.
M. Christian Paul. …cela, il est vrai, à quelques très rares exceptions près.
Monsieur le rapporteur, il y a un chantier gouvernemental sur le handicap…
M. le rapporteur. On peut parler de chantier, en effet !
M. Christian Paul. Certaines des propositions qui seront avancées dans ce cadre peuvent être d’ordre législatif. À nous, le moment venu, de vérifier que le Gouvernement n’a pas laissé en jachère la question du logement des handicapés. Or je crois pouvoir vous dire que ce comité interministériel fera des propositions sur le sujet. Vous les soupèserez et, le 3 octobre, vous nous ferez part, je l’espère, de votre entier contentement.
M. le rapporteur. Monsieur Paul, j’ai été directeur de cabinet d’un ministre des sports qui a accepté deux propositions de loi socialistes. Je n’ai donc pas trop de leçons à recevoir de votre part, mon cher collègue.
M. Fernand Siré. J’ai présenté un amendement à un projet de loi sur la restauration que la majorité et le Gouvernement ont rejeté. Mais, ensuite, le Gouvernement en a fait une « photocopie » pour le présenter en son nom. Je vous souhaite le même sort, monsieur le rapporteur, le principal étant que votre proposition de loi soit adoptée. Si le Gouvernement est intelligent, qu’il la copie donc pour la faire voter !
La Commission rejette l’amendement.
Le présent article prévoit un gage visant à garantir la recevabilité financière de la présente proposition de loi.
La création d’un dispositif de prêt à taux zéro et l’élargissement du nombre de bénéficiaires du dispositif de prêt à taux zéro pour l’accession à la propriété, qui prennent la forme de crédits d’impôts au bénéfice des établissements de crédit accordant ces prêts à taux zéro, représentent en effet une perte de recettes pour le budget de l’État, qui doit être compensée.
Il est en outre précisé que les dispositifs prévus ne sont applicables qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû ; dans le cas contraire, ils constitueraient en effet une charge pour les finances publiques.
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La Commission examine l’amendement AS 1 du rapporteur.
M. le rapporteur. Il s’agit de gager la perte de recettes pour l’État résultant des dispositions du texte par une augmentation du prélèvement, non sur le produit de la vente du tabac, mais sur le produit brut des jeux.
La Commission rejette l’amendement.
Elle rejette ensuite l’article 3.
La Commission examine l’amendement AS 7 du rapporteur.
M. le rapporteur. Cet amendement vise à mettre en conformité le titre de la proposition de loi avec son objet.
La Commission rejette l’amendement.
Mme la présidente Lemorton. Le rejet de tous les articles vaut rejet de l’ensemble de la proposition de loi.
En conséquence, aux termes de l’article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique aura lieu sur le texte initial de cette proposition de loi.
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Dispositions en vigueur ___ |
Texte de la proposition de loi ___ |
Texte adopté par la Commission ___ |
Proposition de loi visant à accorder un prêt à taux zéro pour l’aménagement du domicile des personnes |
La commission n’a pas adopté de texte | |
Code des impôts |
Article 1er |
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Après l’article 244 quater U du code général des impôts, sont insérés une division et un article ainsi rédigés : |
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« XLVIII. – Crédit d’impôt au titre des avances remboursables ne portant pas intérêt pour le financement de travaux d’installation ou de remplacement d’équipements spécialement conçus pour les personnes handicapées. |
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« Art. 244 quater W. – I. – 1. Les établissements de crédit mentionnés à l’article L. 511-1 du code monétaire et financier passibles de l’impôt sur les sociétés, de l’impôt sur le revenu ou d’un impôt équivalent, ayant leur siège dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d’assistance administrative, en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale, peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt, au titre d’avances remboursables ne portant pas intérêt consenties à des personnes physiques, soumises à des conditions de ressources, pour la réalisation de travaux d’installation ou de remplacement d’équipements spécialement conçus pour les personnes handicapées et versées au cours de l’année d’imposition ou de l’exercice. |
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« 2. La liste des travaux entrant dans le champ d’application du 1 est fixée par arrêté du ministre chargé du budget. Pour pouvoir ouvrir droit au bénéfice d’une avance remboursable ne portant pas intérêt, ils doivent être effectués dans un logement utilisé ou destiné à être utilisé en tant que résidence principale. |
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« 3. L’avance remboursable sans intérêt peut être consentie aux personnes considérées comme invalides en sens de l’article L. 341-4 du code de la sécurité sociale. |
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« 4. Le montant de l’avance remboursable sans intérêt est plafonné à 32 500 euros. |
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« 5. L’emprunteur fournit à l’établissement de crédit mentionné au 1, à l’appui de sa demande d’avance remboursable sans intérêt, un descriptif et un devis détaillés des travaux envisagés. Il transmet, dans un délai de deux ans à compter de la date d’octroi de l’avance par l’établissement de crédit mentionné au 1, tous les éléments justifiant que les travaux ont été effectivement réalisés conformément au descriptif et au devis détaillés et satisfont aux conditions prévues aux 1 et 2. Un décret fixe les modalités d’application du présent 5. |
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« II. – Le montant du crédit d’impôt est égal à la somme actualisée des écarts entre les mensualités dues au titre de l’avance remboursable sans intérêt et les mensualités d’un prêt consenti sur une durée maximale de cent vingt mois à des conditions normales de taux, à la date d’émission de l’offre de l’avance remboursable sans intérêt. |
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« Le crédit d’impôt fait naître au profit de l’établissement de crédit une créance, inaliénable et incessible, d’égal montant. Cette créance constitue un produit imposable rattaché à hauteur d’un cinquième, au titre de l’exercice au cours duquel l’établissement de crédit a versé des avances remboursables sans intérêt et par fractions égales sur les quatre exercices suivants. |
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« En cas de fusion, la créance de la société absorbée est transférée à la société absorbante. En cas de scission ou d’apport partiel d’actif, la créance est transmise à la société bénéficiaire des apports, à la condition que l’ensemble des avances remboursables ne portant pas intérêt y afférentes et versées par la société scindée ou apporteuse soit transféré à la société. |
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« III. – Le bénéfice du crédit d’impôt est subordonné à la conclusion d’une convention entre l’établissement de crédit mentionné au 1 du I et l’État, conforme à une convention type approuvée par arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie, du logement et de l’environnement. |
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« IV. – Une convention, conclue entre l’établissement de crédit mentionné au 1 du I et la société chargée de gérer le Fonds de garantie de l’accession sociale à la propriété mentionnée à l’article L. 312-1 du code de la construction et de l’habitation, définit les modalités de déclaration par l’établissement de crédit des avances remboursables, le contrôle de l’éligibilité des avances remboursables et le suivi des crédits d’impôt. |
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« V. – Lorsque les sociétés de personnes mentionnées aux articles 8 et 238 bis L, ou groupements mentionnés aux articles 239 quater, 239 quater B et 239 quater C ne sont pas soumis à l’impôt sur les sociétés, le crédit d’impôt peut être utilisé par les associés, proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements, à condition qu’il s’agisse de redevables de l’impôt sur les sociétés ou de personnes physiques participant à l’exploitation au sens du 1° bis du I de l’article 156. |
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« VI. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article, et notamment les modalités de calcul du crédit d’impôt et de détermination du taux mentionné au II, ainsi que les caractéristiques financières et les conditions d’attribution de l’avance remboursable sans intérêt. » |
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Article 2 |
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Art. 244 quater J. – I – Les établissements de crédit mentionnés à l'article L. 511-1 du code monétaire et financier passibles de l'impôt sur les sociétés, de l'impôt sur le revenu ou d'un impôt équivalent, ayant leur siège dans un État membre de l'Union européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre d'avances remboursables ne portant pas intérêt consenties à des personnes physiques, soumises à des conditions de ressources, pour l'acquisition ou la construction d'une résidence principale en accession à la première propriété et versées au cours de l'année d'imposition ou de l'exercice. Le montant de l'avance remboursable sans intérêt peut, le cas échéant, financer l'ensemble des travaux prévus par le bénéficiaire de cette avance lors de l'acquisition de cette résidence. Remplissent la condition de première propriété mentionnée au premier alinéa les personnes physiques bénéficiaires de l'avance remboursable sans intérêt n'ayant pas été propriétaires de leur résidence principale au cours des deux dernières années précédant l'offre de ladite avance. Toutefois, cette condition n'est pas exigée dans les cas suivants : a) Lorsque le bénéficiaire de l'avance remboursable ou l'un des occupants du logement à titre principal est titulaire de la carte d'invalidité correspondant au classement dans la deuxième ou la troisième des catégories prévues à l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale ; …………………………………………. |
Au a du I de l’article 244 quater J du même code, les mots : « titulaire de la carte d’invalidité correspondant au classement dans la deuxième ou la troisième des catégories prévues à » sont remplacés par les mots : « invalide au sens de ». |
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Article 3 |
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La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. |
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Les dispositions des articles 1 et 2 de la présente loi ne sont applicables qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû. |