______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 3 décembre 2013
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION, tendant à la création d’une commission d’enquête relative aux coûts de la filière nucléaire, à la durée d’exploitation des réacteurs et à divers aspects financiers de cette production (n° 1507)
PAR Mme Brigitte ALLAIN
Députée
——
Voir le numéro : 1507
___
I. LA RECEVABILITÉ JURIDIQUE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION 5
A. L’OBJET DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE 5
B. L’INEXISTENCE D’UNE COMMISSION D’ENQUÊTE AYANT LE MÊME OBJET DANS UN INTERVALLE DE DOUZE MOIS 6
C. L’INEXISTENCE DE POURSUITES JUDICIAIRES EN COURS SUR LES FAITS AYANT MOTIVÉ LE DÉPÔT DE LA PROPOSITION 6
II. PARVENIR À UNE ESTIMATION RÉALISTE ET TRANSPARENTE DU COÛT DE LA FILIÈRE NUCLÉAIRE DANS LA PERSPECTIVE DU DÉBAT PARLEMENTAIRE SUR LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE 7
A. PLUSIEURS RAPPORTS ONT FAIT APPARAÎTRE DES INCERTITUDES MAJEURES SUR DES POSTES DE COÛT DE LA FILIÈRE NUCLÉAIRE DÉCISIFS 7
B. DES ÉLÉMENTS COMPLÉMENTAIRES DOIVENT ÊTRE INTÉGRÉS DANS LE DÉBAT 7
C. L’EXPOSITION FINANCIÈRE DE L’ÉTAT JUSTIFIE LA CRÉATION D’UNE COMMISSION D’ENQUÊTE 10
TRAVAUX DE LA COMMISSION 11
I. DISCUSSION GÉNÉRALE 11
II. EXAMEN DE L’ARTICLE UNIQUE 22
Article unique 22
TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 27
La liste des amendements examinés par la commission des affaires économiques est disponible sur le site internet de l'Assemblée nationale (1).
La recevabilité juridique d’une proposition de résolution s’examine au regard de trois critères, posés par les articles 137 à 139 du Règlement de l’Assemblée nationale.
L’article 137 du règlement de l’Assemblée nationale dispose que :
« Les propositions de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sont déposées sur le bureau de l'Assemblée. Elles doivent déterminer avec précision soit les faits qui donnent lieu à enquête, soit les services ou entreprises publics dont la commission doit examiner la gestion ».
La présente proposition de résolution est relative aux coûts de la filière nucléaire et à la durée d’exploitation des réacteurs et porte donc, de façon incontestable, à la fois sur un service et une entreprise publics.
En premier lieu, le périmètre ainsi déterminé fait référence à un service public : l’approvisionnement en électricité du territoire français. La sécurité d’approvisionnement est le premier objectif de politique énergétique énoncé par l’article L. 100-1 du code de l’énergie. L’article L. 311-1 du code de l’énergie dispose par ailleurs que la production d’électricité est subordonnée à la délivrance d’une autorisation ou à un appel d’offres.
En second lieu, la filière nucléaire est formée principalement d’établissements publics ou d’entreprises publiques :
– le CEA et l’IRSN, les deux acteurs principaux de la recherche nucléaire française, ainsi que l’ANDRA, organisme chargé de la gestion des déchets radioactifs, sont des établissements publics ;
– AREVA, chargée de la confection des combustibles nucléaires et de leur retraitement, est une entreprise publique, détenue à 61,5 % par le CEA, qui est un établissement public, et à 21,7 % directement par l’État ;
– EDF, qui dispose du monopole de la production électronucléaire commerciale sur le territoire français, est une entreprise publique détenue à 84,4 % par l’État.
Selon l’article 138 du règlement de l’Assemblée nationale :
« Est irrecevable toute proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête ayant le même objet qu'une mission effectuée dans les conditions prévues à l'article 145-1 ou qu'une commission d'enquête antérieure, avant l'expiration d'un délai de douze mois à compter du terme des travaux de l'une ou de l'autre. »
La commission d’enquête sénatoriale sur le coût réel de l'électricité afin d'en déterminer l'imputation aux différents agents économiques, présidée par Ladislas Poniatowski et rapportée par Jean Desessard (2), avait en partie le même objet que la commission d’enquête dont il est demandé la création par la présente proposition de résolution.
Cette dernière est cependant tout à fait recevable car les commissions d’enquête sénatoriales ne sont pas prises en compte, les travaux des deux assemblées parlementaires étant indépendants.
C. L’INEXISTENCE DE POURSUITES JUDICIAIRES EN COURS SUR LES FAITS AYANT MOTIVÉ LE DÉPÔT DE LA PROPOSITION
L’article 139 du règlement de l’Assemblée nationale dispose que :
« Le dépôt d'une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête est notifié par le Président de l'Assemblée au garde des sceaux, ministre de la justice.
Si le garde des sceaux fait connaître que des poursuites judiciaires sont en cours sur les faits ayant motivé le dépôt de la proposition, celle-ci ne peut être mise en discussion. Si la discussion est déjà commencée, elle est immédiatement interrompue. »
Ainsi que l’a montré l’examen de la première condition de recevabilité de la proposition de résolution, cette dernière ne porte pas sur des faits mais sur la gestion d’un service public et d’entreprises publiques. La troisième condition est donc nécessairement remplie.
La proposition de résolution a toutefois été transmise à la garde des sceaux, Mme Christiane Taubira, qui, dans une réponse en date du 2 décembre 2013, a indiqué qu’aucune procédure judiciaire n’était en cours, à sa connaissance, sur les faits ayant motivé le dépôt de cette proposition.
II. PARVENIR À UNE ESTIMATION RÉALISTE ET TRANSPARENTE DU COÛT DE LA FILIÈRE NUCLÉAIRE DANS LA PERSPECTIVE DU DÉBAT PARLEMENTAIRE SUR LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE
A. PLUSIEURS RAPPORTS ONT FAIT APPARAÎTRE DES INCERTITUDES MAJEURES SUR DES POSTES DE COÛT DE LA FILIÈRE NUCLÉAIRE DÉCISIFS
Le rapport Charpin-Dessus-Pellat (3), remis au Premier ministre en décembre 2000, était le premier à analyser l’engagement historique de la France dans le programme nucléaire. Il menait une réflexion sur l’ensemble des externalités de la production nucléaire et adoptait une vision prospective de l’énergie, et de l’électricité en particulier, à l’horizon 2050.
Plus récemment, en janvier 2012, la Cour des Comptes a rédigé un rapport sur les coûts de la filière électronucléaire (4) qui chiffre les coûts passés de construction du parc nucléaire, les montants investis en recherche et développement, les dépenses actuelles d’exploitation, et esquisse une vision des charges futures liées au parc nucléaire existant.
La Cour des comptes souligne d’importantes incertitudes financières, notamment la difficulté à chiffrer les externalités positives comme négatives de ce mode de production d’électricité, le coût du démantèlement des installations et du traitement des combustibles usés et des déchets, l’accident majeur ou encore l’assurance du risque d’accidents. En matière financière et économique, l’incertitude a un coût qui n’est pas pris en compte dans le nucléaire, contrairement à d’autres secteurs économiques.
Le Sénat, au travers d’une commission d’enquête demandée par le groupe écologiste et dont les conclusions ont été rendues en juillet 2012 (5), a étudié l’ensemble des composantes du coût de l’électricité. Le nucléaire y occupe donc une place prépondérante, notamment en comparaison des autres modes de production d’électricité.
Depuis la publication des travaux de la Cour des comptes et du Sénat, pour ne considérer que les plus récents, des évolutions significatives justifient que l’Assemblée nationale examine à son tour la question du coût de la filière nucléaire et la problématique de la durée d’exploitation des réacteurs nucléaires.
En premier lieu, le coût d’un accident nucléaire majeur a fait l’objet d’une controverse au début de l’année 2013, date à laquelle l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a mis à la disposition du public une étude réalisée en 2007 dans le cadre d’une demande d’expertise exprimée par l’ASN. Les travaux de 2007 ont fait l’objet d’une réévaluation, dont les résultats conduisent à un coût médian global d’un accident nucléaire majeur de l’ordre de 120 à 430 milliards d’euros. Ce chiffre a d’ailleurs été rappelé par la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, devant l’Assemblée nationale lors d’un débat en séance publique sur la sûreté nucléaire, le 30 mai dernier. Dans le cadre de l’étude de sensibilité des scénarios d’évaluation de l’impact d’un accident nucléaire, l’IRSN estimait que le coût de ce dernier pouvait aller jusqu’à 2000 milliards d’euros selon le contexte (population avoisinante, dommages aux personnes, aux biens, déficit touristique, etc.).
Au cours du débat sur la sûreté nucléaire, la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie avait indiqué que le Gouvernement proposerait « d’augmenter le plafond de responsabilité civile nucléaire des exploitants en cas d’accident. Nous appliquerons l’augmentation du plafond de responsabilité de 91,5 millions, aujourd’hui, à 700 millions, montant issu des négociations du protocole du 12 février 2004 modifiant la Convention de Paris. »
Ces chiffres sont toutefois d’un ordre de grandeur très inférieur aux évaluations scientifiques menées par l’ASN et soulignent l’absence de provisions destinées à couvrir le risque que les industriels font courir à la société, se reposant implicitement sur la garantie de l’État. Il convient donc, au cours de cette commission d’enquête, d’expertiser ces chiffres au regard de la reconnaissance des responsables de la sûreté – reconnaissance intervenue récemment – qu’un accident nucléaire majeur est possible en France, pour examiner son impact financier sur la filière et sur l’État.
En deuxième lieu, le coût du démantèlement des installations de production et du traitement et de la gestion des déchets qu’elles génèrent mérite également une expertise approfondie. Le démantèlement du parc nucléaire, dont les coûts devront être supportés car les centrales ne sont pas éternelles, repose sur les seules estimations du producteur. Pour le financement de ces fonds, des actifs ont été provisionnés – créances de l’État et capitalisation de la filiale de transport d’électricité –, mais ils sont difficilement disponibles.
La Cour des Comptes relève que les charges brutes de démantèlement évaluées par EDF, Areva et le CEA, s’élèvent à 31,9 milliards d’euros (6).Ces sommes comprendraient l’ensemble des charges afférentes aux cinquante-huit réacteurs du parc nucléaire français en fonctionnement, ainsi que l’ensemble des autres installations nucléaires de base. À titre de comparaison, le rapport d’information de M. Michel Grall (7) sur la fin de vie des équipements militaires montre que le démantèlement des installations d’un seul site, l’usine UP 1 de Marcoule, demandera un effort de 6 milliards d’euros.
Quant au coût de la prise en charge des déchets, il a, lui aussi, fait l’objet de débats, retranscrits par la Cour des comptes en ces termes : « les provisions qui sont censées couvrir la gestion à long terme des déchets de haute activité et de moyenne activité à vie longue ne sont pas stabilisées. Elles sont actuellement calculées sur la base d’un devis arrêté en 2003 mais qui a fait l’objet, depuis cette date, d’une révision approfondie par l’ANDRA, aboutissant à un quasi doublement du devis initial en monnaie courante. EDF, AREVA et le CEA seront donc conduits à réévaluer les provisions dès que le montant définitif du devis sera arrêté ».
L’article 25 du projet de loi de finances rectificatives pour 2013 instaure d’ailleurs une contribution spécifique, au profit de l’ANDRA, destinée à financer les études nécessaires à la conception du centre de stockage réversible en couche géologique profonde qui devrait accueillir les déchets radioactifs de haute et moyenne activité à vie longue produits par les exploitants d’installations nucléaires. Le projet entrant dans une phase industrielle, leur coût est amené à augmenter significativement. La contribution créée sera versée à un fonds spécifique géré par l’ANDRA, et financera des dépenses de recherche à hauteur de 110 millions d’euros en 2014.
En dernier lieu, l’évaluation à la hausse du coût de la production nucléaire conduit à une réévaluation incessante du prix de l’électricité. La Commission de Régulation de l’Énergie ne s’y est pas trompée quand, en juin 2013, elle calculait que, pour combler l’écart entre les recettes issues des tarifs et les coûts constatés, il serait nécessaire d’appliquer une hausse de 7,6 % des tarifs bleus en 2013 et des hausses supplémentaires de 3,2 % en 2014 et en 2015 (8). Les centrales vieillissantes sont de moins en moins disponibles, nécessitent des travaux de mise à niveau de plus en plus coûteux.
Le nucléaire futur, qu’il s’agisse de prolonger les centrales existantes ou de construire de nouvelles installations se révèle lui aussi très onéreux. Le prolongement de la durée de vie du parc nucléaire jusqu’à leur quarantième année nécessiterait de mettre en œuvre un programme d’investissements de plus de 50 milliards d’euros d’ici 2025. Quant au coût de l’EPR de Flamanville, il a triplé entre les projections initiales et la facture annoncée aujourd’hui, de 8,5 milliards d’euros. À titre de comparaison, le coût de construction de l’installation la plus onéreuse fonctionnant sur le territoire français – la centrale de Chooz, mise en service en 2000 –, est fixé à 4,8 milliards d’euros par la Cour des comptes. Enfin, au Royaume-Uni, EDF a trouvé un accord avec le gouvernement britannique, avec une garantie d’achat de 92,50 £/MWh pendant 35 ans, contre un tarif de l’ordre de 80 €/MWh accordé à l’éolien terrestre sur le territoire français.
L’État est au centre des problématiques financières relatives au nucléaire. D’une part, comme nous l’avons signalé ci-dessus, il joue le rôle d’assureur en dernier ressort des conséquences économiques d’un accident majeur sur le territoire français. Il gère également les déchets radioactifs, au travers d’un établissement public, l’ANDRA.
D’autre part, en tant qu’actionnaire d’EDF à 84,4 % et d’AREVA à 82,2 % (directement et via le CEA), il supporte les décisions de politique industrielle des grandes entreprises publiques françaises dont l’activité repose majoritairement sur cette filière. La situation d’EDF, notamment, peut interroger, lorsque l’on constate le niveau d’endettement de la société, qui s’élève à 33,7 milliards d’euros au 30 juin 2013. Cette situation est d’autant plus inquiétante dans un contexte incertain, où la technologie nucléaire ancienne prolongée, comme le nucléaire nouveau, ont des coûts supérieurs à ceux annoncés et exigent des investissements qui se chiffrent en dizaines de milliards d’euros. Ces éléments ont conduit l’agence de notation Fitch à abaisser la perspective de la note d’EDF de « stable » à « négative ».
Au regard de ces éléments, il est donc tout à fait opportun que notre Assemblée se saisisse de la question du coût de production de l’électricité nucléaire. La Représentation nationale doit disposer de l’ensemble des documents juridiques et financiers lui permettant d’évaluer l’ampleur des engagements de l’État liés à la production d’électricité nucléaire sur le territoire, ce qui justifie la création d’une commission d’enquête et non d’une mission d’information. Ce n’est qu’à cette condition que le débat parlementaire sur la loi de programmation sur la transition énergétique pourra s’engager en toute transparence.
La commission a examiné la proposition de résolution de M. Denis Baupin tendant à la création d’une commission d’enquête relative aux coûts de la filière nucléaire, la durée d’exploitation des réacteurs et à divers aspects financiers de cette production (n° 1507) sur le rapport de Mme Brigitte Allain.
M. le président François Brottes. C’est à notre commission que revient la responsabilité d’examiner la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur les coûts de la filière nucléaire, déposée par le groupe écologiste dans le cadre de son droit de tirage. Si elle est adoptée par notre commission, cette proposition, qui comprend un article unique, sera ensuite examinée en séance publique. Je signale par ailleurs que plusieurs amendements ont été déposés sur ce texte, qui va nous être présenté par la rapporteure, Mme Brigitte Allain.
Mme Brigitte Allain, rapporteure. Nous examinons aujourd’hui une proposition de résolution présentée par M. Denis Baupin et le groupe écologiste en application des articles 137 et suivants de notre règlement, et visant à la création d’une commission d’enquête relative aux coûts de la filière nucléaire, à la durée d’exploitation des réacteurs et à divers aspects financiers de cette production. Transmise à notre commission saisie au fond, la proposition a vu sa recevabilité confirmée par les services de l’Assemblée nationale : son objet porte en effet incontestablement à la fois sur un service et une entreprise publics. En outre, conformément à l’article précité, aucune commission d’enquête sur le sujet n’a été menée par notre Assemblée au cours des douze mois qui précèdent. Enfin, le ministère de la justice a confirmé le 2 décembre dernier qu’aucune procédure judiciaire n’était en cours sur les faits ayant motivé le dépôt de cette proposition.
Dans son exposé des motifs, ce texte mentionne plusieurs études, parmi lesquelles le rapport Charpin-Dessus-Pellat remis en septembre 2000 au Premier ministre de l’époque, Lionel Jospin. Ce fut le premier rapport à analyser l’engagement historique de la France dans le programme nucléaire et à présenter l’ensemble des externalités induites par la filière ainsi qu’une vision prospective de l’énergie, et en particulier de l’électricité, à l’horizon 2050. Plus récemment, la Cour des Comptes a produit en 2012 un rapport sur les coûts de la filière électronucléaire, chiffrant les coûts passés de construction du parc nucléaire, les montants investis en recherche et développement ainsi que les dépenses actuelles d’exploitation, et esquissant une vision des charges futures liées au parc nucléaire existant. La Cour y souligne également d’importantes incertitudes financières, et notamment la difficulté à chiffrer les externalités positives et négatives de ce mode de production d’électricité, le coût du démantèlement des installations et du traitement des combustibles usés et des déchets, le coût d’un accident majeur ou encore la question de l’assurance du risque d’accidents. Car, en matière financière et économique, l’incertitude a un coût en soi. Enfin, dans le cadre d’une commission d’enquête créée à l’initiative des écologistes et dont les conclusions ont été publiées en juillet 2012, le Sénat a pour sa part étudié les coûts de l’électricité. Le nucléaire occupe une place prépondérante dans cette étude, comparé aux autres modes de production d’électricité.
Depuis la publication de ces deux rapports – pour ne considérer que les plus récents –, des évolutions significatives sont intervenues, tant en termes d’évaluation financière que d’orientations politiques, justifiant que notre assemblée y consacre une commission d’enquête. Ces évolutions ont trait à l’évaluation du coût de l’accident majeur, du stockage et du devenir des déchets nucléaires et des filières de traitement, et des adaptations rendues nécessaires par la catastrophe de Fukushima, notamment.
Le coût de l’accident nucléaire majeur a fait l’objet d’une controverse au début de l’année 2013, lorsque l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) l’a estimé à un niveau situé entre 120 et 430 milliards d’euros, ce chiffre pouvant atteindre jusqu’à 2 000 milliards d’euros selon le contexte, notamment selon la population avoisinante, les dommages portés aux personnes et aux biens et le déficit touristique induit. Or, comme l’avait justement rappelé Mme Delphine Batho, alors ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, devant notre assemblée lors d’un débat en séance publique le 30 mai dernier, après les interventions de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l’IRSN, le provisionnement actuel du risque est bien trop faible et repose en grande partie sur l’État. Il convient donc d’expertiser ces chiffres dans le cadre de cette future commission d’enquête, afin d’évaluer l’impact financier, sur la filière et sur l’État, d’un éventuel accident nucléaire majeur – dont les responsables de la sûreté ont récemment admis la possibilité en France. Lors de cette audition, la ministre avait annoncé une hausse du plafond de responsabilité du producteur, de 91,5 à 700 millions d’euros, ce qui reste bien inférieur aux coûts annoncés. Cette question mérite donc d’être expertisée.
Le coût du démantèlement des installations ainsi que de la gestion et du traitement des déchets nucléaires mérite également une expertise approfondie de notre part. Les centrales n’étant pas éternelles, le démantèlement du parc nucléaire finira bien par se faire un jour. Or, il repose sur des estimations établies par le seul producteur et est assis sur des créances de l’État et sur la capitalisation de la filiale de transport d’électricité – c’est-à-dire sur des fonds difficilement disponibles. La Cour des Comptes a elle-même relevé que 31,9 milliards d’euros étaient ainsi provisionnés, quand un rapport d’information publié en 2011 par notre collègue Michel Grall montrait que le seul démantèlement d’un site nucléaire militaire à Marcoule avait nécessité 6 milliards d’euros. Or, nous disposons actuellement de cinquante-huit réacteurs, pour ne parler que des instruments de production d’énergie en fonctionnement.
S’agissant des déchets, alors que le projet de loi de finances rectificative discuté cette semaine propose l’instauration d’une contribution des producteurs à hauteur de 110 millions d’euros par an pour la préfiguration d’un centre de stockage en grande profondeur, faut-il rappeler que le coût officiel de ce centre reste établi à 16,5 milliards d’euros, alors même que la Cour des comptes estime qu’il faut ajouter au moins 20 milliards d’euros à cette facture ?
Enfin, la production nucléaire est de plus en plus onéreuse. La Commission de régulation de l’énergie (CRE) ne s’y est pas trompée puisque, en juin 2013, elle préconisait une hausse de 7,4 % pour combler le déficit d’exploitation, et une hausse supplémentaire de plus de trois points pour les deux années à venir. Les centrales vieillissantes sont de moins en moins disponibles et nécessitent des travaux de mise à niveau de plus en plus coûteux. Que l’on prolonge les centrales existantes ou que l’on construise de nouvelles installations, le nucléaire futur se révèle lui aussi très onéreux : selon EDF, plus de 50 milliards d’euros sont d’ores et déjà nécessaires pour maintenir les centrales à niveau jusqu’à leur quarantième année. Le coût de l’EPR de Flamanville a plus que triplé entre les projections initiales et la facture annoncée aujourd’hui : il s’élève à 8,5 milliards d’euros quand l’installation la plus onéreuse que nous ayons sur notre territoire en avait coûté 4,75 – sans parler de l’exemple des Îles britanniques, où EDF construit un EPR à 19 milliards d’euros, avec une garantie d’achat plus chère que les énergies renouvelables, de 109 euros par mégawattheure (MWh) pendant trente-cinq ans, quand l’éolien est à moins de 80 euros.
L’État est concerné au premier chef par ces enjeux, non seulement en tant que garant en cas d’accident, mais aussi en tant qu’actionnaire majoritaire d’EDF – à 85 % –, et d’AREVA – dont la propriété est détenue à 83 % au total par l’État, pour partie directement mais aussi par le biais du Commissariat à l’énergie atomique (CEA). EDF est par ailleurs une société cotée en bourse faisant partie du panier du CAC 40, tandis que l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) et le CEA sont des établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC). Au-delà de l’impulsion politique que l’État peut apporter, force est de constater que le coût de cette technologie est important pour lui puisque EDF est lourdement endettée – à hauteur de 42,5 milliards d’euros en 2009 selon la Cour des comptes. Cette situation est d’autant plus inquiétante que le contexte est incertain : le prolongement de la technologie nucléaire ancienne ou son renouvellement ont des coûts supérieurs à ceux qui sont annoncés et requièrent des investissements de l’ordre de plusieurs dizaines de milliards d’euros. L’agence Fitch a d’ailleurs récemment dégradé la note d’EDF en raison des investissements majeurs à venir, mais aussi des incertitudes actuelles.
In fine, c’est bien l’État qui est concerné, en tant qu’actionnaire et garant du risque, mais aussi en tant que gestionnaire des déchets et responsable de la recherche dans le cadre de plusieurs EPIC. Il est donc nécessaire que notre assemblée se saisisse de la question des coûts du nucléaire et aille au-delà de l’établissement d’un simple rapport parlementaire en créant une commission d’enquête, afin que ceux de nos collègues qui en seront membres disposent de moyens suffisants pour faire la lumière sur le coût total du nucléaire actuel et futur. C’est pourquoi je vous invite à donner un avis favorable à cette proposition de résolution.
M. Denis Baupin. Si nous proposons la création de cette commission d’enquête, c’est afin que les parlementaires soient éclairés le mieux possible d’ici à l’examen du projet de loi sur la transition énergétique. Nous aurons alors à faire des choix coûteux pour notre pays – qu’il s’agisse de prolonger les installations nucléaires existantes ou de les remplacer, ou encore de développer les énergies renouvelables et de promouvoir l’efficacité énergétique. Cette commission d’enquête doit ainsi nous permettre d’établir la vérité sur ces coûts. Certains parlementaires affirment qu’il suffirait de prolonger les centrales nucléaires existantes et ce, à coût zéro, ce qui nous épargnerait la transition énergétique. Or ces centrales auront une durée de vie d’une quarantaine d’années environ, selon la doctrine de l’ASN qui, certes, évoque la possibilité de prolonger cette durée pour certaines d’entre elles, mais sans rien garantir pour autant. Le référentiel de sûreté ne sera d’ailleurs défini qu’en 2015. Et, à supposer que cela soit effectivement possible, cela nécessitera des investissements significatifs. Il pèse donc une double incertitude sur l’éventualité de prolonger la durée de vie des réacteurs : la première porte sur la faisabilité de cette prolongation et sur la sûreté de l’opération. De fait, certains éléments consistants du réacteur, tels que la cuve ou l’enceinte de confinement, ne pouvant être modifiés, leur capacité de résistance au-delà de quarante ans doit être évaluée, ainsi que n’a cessé de le rappeler Pierre-Franck Chevet, président de l’ASN. Une seconde incertitude, d’ordre financier, pèsera sur la rentabilité d’un tel choix. L’évolution du coût du parc nucléaire est considérable ; ainsi, par exemple, celui de l’opération de « grand carénage » lancée par EDF est chiffré à environ 50 milliards d’euros. Or cette opération vise non pas à prolonger la durée de vie des réacteurs, mais seulement à les remettre à niveau afin qu’ils durent quarante ans. À cela s’ajoutent les incertitudes, évoquées par la rapporteure, portant sur les coûts d’un accident nucléaire majeur, qu’a mesurées la Cour des comptes. Nous proposons donc, dans le cadre de cette commission d’enquête, d’évaluer les coûts de ce type d’accident, le provisionnement d’une assurance, le coût de gestion des déchets radioactifs – sachant que nous débattrons du potentiel centre d’enfouissement de Bure – et celui du démantèlement.
Nous pourrons alors comparer la totalité de ces coûts à ceux qu’induiraient des choix alternatifs. Parmi tous les choix d’avenir possibles aujourd’hui en France en matière d’énergie, il n’est pas de voie qui soit gratuite. Il suffit d’ailleurs d’observer les politiques énergétiques menées par la Grande-Bretagne, l’Allemagne ou d’autres pays européens, pour s’apercevoir que toutes ont un coût. La politique énergétique de la France en aura donc un elle aussi : nous souhaitons simplement disposer de tous les éléments nécessaires pour pouvoir apprécier les coûts de ces choix, le moment venu. Tel est l’objectif de cette commission d’enquête.
M. Patrice Prat. Les commissaires du groupe socialiste, républicain et citoyen s’associent à cette proposition de résolution qui vise à nous éclairer sur les coûts de la filière nucléaire. La création d’une commission d’enquête sur le sujet nous paraît en effet répondre à un besoin de transparence et de pédagogie sur un sujet majeur s’inscrivant dans un contexte international, compte tenu de la catastrophe de Fukushima et du fait que certaines nations se sont désengagées du domaine nucléaire tandis que d’autres ont choisi d’investir dans cette filière. Ces éléments conduisent ainsi la France à se repositionner sur la question ou, du moins, à réviser sa politique. L’enjeu central de la transition énergétique a fait l’objet d’un débat national qui vient de s’achever et devrait déboucher sur un projet de loi. La création d’une commission d’enquête permettra donc de baliser le chemin d’ici au débat législatif du printemps prochain.
Sans doute, s’agissant d’un sujet aussi complexe, convient-il d’éviter les écueils consistant à diaboliser la filière et l’industrie nucléaires, à adopter une posture idéologique figée plutôt qu’une approche pragmatique ou encore à empiéter sur les débats relatifs au projet de loi sur la transition énergétique. Demandons-nous également quelle valeur ajoutée cette commission d’enquête est susceptible d’apporter, sachant que nous disposons déjà de plusieurs rapports financiers sur la filière.
Nos débats doivent en outre s’inscrire dans le cadre de l’objectif ambitieux, fixé par le Président de la République, de réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % d’ici à 2025. Si la transition énergétique est vouée à être financée en grande partie par le secteur du nucléaire, qui reste au cœur de notre politique énergétique, j’insiste sur la dimension pluridisciplinaire de l’enjeu qui ne doit pas uniquement être envisagé sous les angles strictement environnemental et financier, mais aussi du point de vue de l’indépendance énergétique, des emplois créés en France, de la balance commerciale et de la compétitivité de nos entreprises. Tous ces éléments méritent donc d’être intégrés à la réflexion de cette commission d’enquête.
Enfin, la question du coût de la filière nucléaire étant récurrente, comme l’illustre le dernier rapport de la Cour des comptes sur le sujet, il convient désormais de mettre un terme au mythe des coûts cachés, qui galvaude les débats sur le nucléaire.
En conclusion, le groupe SRC est favorable à la création de cette commission d’enquête et entend prendre part activement à ses travaux.
M. Éric Straumann. Cette proposition de résolution tombe à point nommé, alors qu’Anne Lauvergeon, femme proche du pouvoir et experte incontestable de la filière nucléaire, vient juste de déclarer ce matin sur France Inter que l’on ne pouvait « se permettre de passer de 75 à 50 % d’énergie nucléaire d’ici à 2025 », contrairement à ce qui a été annoncé. Une telle politique poserait, selon elle, « un grave problème. Cela voudrait dire arrêter une vingtaine de réacteurs nucléaires. » Elle ajoute qu’elle ne pense pas que cela soit réaliste aujourd’hui sur les plans économique et pratique.
Quant à mes collègues et moi-même, nous serions plutôt enclins à voter en faveur de la création de cette commission d’enquête, à condition que soit adopté l’amendement de Michel Sordi visant à intégrer au champ de cette réflexion la question de la fermeture anticipée de la centrale de Fessenheim, annoncée par le Gouvernement. Il serait intéressant d’en cerner le coût économique et financier ainsi que les conditions techniques et l’impact de l’arrêt de cette centrale sur le bassin de vie haut-rhinois.
M. Franck Reynier. Si cette proposition de résolution est intéressante, je regrette que sa rédaction soit orientée. Son exposé des motifs souligne que certains pays décident de sortir du nucléaire. Mais qui souhaite rester objectif se doit aussi de reconnaître que d’autres s’engagent au contraire dans le développement de leur parc. En tout état de cause, un tel sujet mérite autre chose qu’un traitement à charge.
Notre politique énergétique doit répondre aux objectifs que nous nous sommes fixés dans le Grenelle de l’environnement, conformément au paquet climat-énergie défini par l’Union européenne. Nous devons également veiller à notre indépendance énergétique et intégrer à notre réflexion le facteur du coût de l’énergie – qui a un impact sur la compétitivité de nos entreprises et sur le pouvoir d’achat des ménages – afin de poser la bonne équation.
Le groupe UDI considère la sûreté de nos installations nucléaires comme un préalable non négociable. La transparence en la matière devant être maximale, il convient qu’une autorité indépendante en soit la garante, comme c’est le cas actuellement. En outre, la France s’est fixé des objectifs et le Président de la République a réaffirmé sa volonté de diversifier et de rééquilibrer le mix énergétique. Compte tenu du débat sur la transition énergétique qui s’ouvrira prochainement au sein du Parlement, il me paraît regrettable de limiter l’analyse des coûts de l’énergie à la seule filière nucléaire. Car, si la vérité des coûts est importante pour notre mix énergétique, c’est le cas pour tous les modes de production. J’ajoute que de nombreux organismes indépendants ont déjà procédé à ce type d’analyses – que ce soit l’ASN, l’IRSN, la CRE ou le CEA. Il nous serait donc utile de travailler sur les documents existants et d’étendre le champ de réflexion de cette commission d’enquête aux différentes sources d’énergie pouvant contribuer à notre bouquet énergétique. Adopter une vision globale nous éviterait en effet de tomber dans la caricature. C’est pourquoi, si le périmètre de réflexion de cette commission n’est pas élargi, le groupe UDI ne votera pas la proposition de résolution.
M. le président François Brottes. Je rappelle que nous ne voterons pas sur un exposé des motifs, mais sur un article.
M. Dino Cinieri. Si nous avons tous en tête le drame de Fukushima, il ne doit pas occulter la réalité économique du nucléaire civil. Les centrales nucléaires de la gamme de 1 000 mégawatts – c’est-à-dire de 1 million de kilowatts –, produisant environ 7 milliards de kilowatts par an, ont été construites en France dans le cadre de notre programme nucléaire pour un coût unitaire qui serait aujourd’hui de l’ordre de 2,5 à 3,5 milliards d’euros par unité de 1 000 mégawatts. Il s’agit certes d’un investissement très important, mais qui s’est avéré justifié sur le plan économique. Comme les énergies renouvelables, le nucléaire se caractérise par un investissement élevé et des coûts de fonctionnement faibles. Les études réalisées par le ministère de l’industrie – qui tiennent compte de ce coût d’investissement, du prix de l’uranium, des coûts d’exploitation et de maintenance et des provisions nécessaires aux futures dépenses de démantèlement et de stockage des déchets radioactifs – concluent à un prix de revient du kilowattheure nucléaire inférieur à 4 centimes. Ce coût est comparable à celui de 1 kilowattheure produit à partir de gaz lorsque ce dernier est à son prix le plus bas, et est bien inférieur à celui des autres modes de production. Alors que le prix de revient du kilowattheure produit à partir de gaz varie très fortement en fonction du prix de celui-ci, le kilowattheure nucléaire est très stable vis-à-vis de celui de l’uranium. Il dépend donc peu des conditions des marchés des matières premières. Corrélativement, lorsqu’une centrale est amortie, le prix de revient du kilowattheure nucléaire devient très bas, peu supérieur à 1 centime, ce qui explique la tendance actuelle à prolonger la durée de vie des centrales sur avis de l’ASN, garante de la sécurité nucléaire.
Les activités de l’industrie nucléaire ont un impact important sur la balance commerciale de la France puisque, en 2010, elles représentaient environ 25 milliards d’euros, soit la somme de deux composantes. La première correspond aux exportations de l’industrie nucléaire – c’est-à-dire à la vente de composants et de services liés aux réacteurs, à celle de produits et services du cycle du combustible et à l’exportation d’électricité. Au cours des dernières années, cette composante est restée stable à environ 6 milliards d’euros en moyenne par an. La seconde réside dans l’économie réalisée en termes d’importation de gaz, du fait du recours à l’énergie nucléaire, compte tenu de l’achat d’uranium à l’étranger pour l’alimentation des centrales nucléaires. Elle varie en fonction du prix du gaz et des fluctuations du dollar par rapport à l’euro, et l’on pourrait l’évaluer sur la période 2009-2010 à environ 18 à 22 milliards d’euros par an.
Chers collègues écologistes, la lutte contre le nucléaire est certes votre fonds de commerce, mais il vous faut admettre que notre économie ne peut s’en passer !
Mme Delphine Batho. Si je n’approuve pas toutes les analyses figurant dans l’exposé des motifs de cette proposition de résolution, cette démarche me paraît cependant nécessaire. La transparence démocratique des décisions prises dans le domaine de l’énergie nucléaire constitue depuis longtemps un enjeu que le législateur a cherché à faire progresser au fil des textes. Nous avons donc tout à gagner en créant une commission d’enquête qui pourra compléter les travaux de la Cour des comptes et de la commission d’enquête sénatoriale sur l’électricité. Quant à la feuille de route définie par la majorité, elle doit effectivement être tenue.
J’adresserai cependant une question de calendrier à la rapporteure et au président de la Commission : le Gouvernement s’étant engagé à présenter le projet de loi sur la transition énergétique au printemps 2014, il me semble qu’aucun d’entre nous ne souhaiterait que la création de cette commission d’enquête soit instrumentalisée pour retarder cette présentation. Or, s’il est vrai que les travaux de cette commission pourront utilement éclairer le débat parlementaire, comment leurs calendriers respectifs pourront-ils s’articuler, sachant qu’une commission d’enquête dure six mois ?
M. Damien Abad. Je ne suis pas certain que, si Mme Batho était restée ministre, elle aurait adopté la même position sur cette proposition de résolution…
Mme Delphine Batho. Bien sûr que si !
M. Damien Abad. D’autre part, je veux bien que l’on nous invite à distinguer l’article unique de son exposé des motifs. Il reste que le premier découle du second, et que ce dernier est accusateur puisqu’il y est fait mention des « coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire » sans tenir compte du coût du démantèlement de la centrale de Fessenheim, de celui des autres modes de production, ni même des conséquences économiques, sociales, environnementales et énergétiques des choix opérés en ce domaine. Votre article unique est donc déjà idéologiquement orienté en tant que tel. Si vous décidez de soutenir l’adoption de cette proposition de résolution, assumez au moins le choix de créer une commission d’enquête à charge sur le nucléaire !
Nous avons besoin de disposer d’une vision globale de la situation. C’est pourquoi je trouve regrettable qu’il nous soit impossible dans ce pays de réfléchir sereinement aux avantages et aux inconvénients d’une filière et d’un véritable mix énergétique ainsi qu’aux coûts supportés par le consommateur. En effet, pourquoi ne pas analyser l’impact sur le prix de l’électricité d’un éventuel abandon progressif de la filière nucléaire ?
Nous ne souhaitons en aucune manière contribuer au fait que le nucléaire soit une variable d’ajustement des stratégies électorales internes à la majorité. Vous n’êtes pas non plus sans savoir que la France s’est engagée dans le projet de fusion nucléaire, dit projet ITER, à Cadarache. La ministre ayant elle-même affirmé qu’elle le soutenait et qu’elle souhaitait qu’on lui alloue des crédits, allez donc expliquer aux autres pays impliqués dans le projet que la France s’en désengage. J’entends bien, Monsieur le président, que vous vous efforcerez, grâce à vos amendements, d’étendre le périmètre d’étude de cette commission d’enquête. Cela étant, cette proposition de résolution manque de sérieux et cette lubie empêche tout débat serein dans cette assemblée !
Mme Frédérique Massat. Il ne me semble pas que cette proposition de résolution soit une lubie. D’abord, nous ne nous trouvons pas encore dans le cadre de cette commission d’enquête, puisque nous sommes là pour nous prononcer sur le principe de sa création. En outre, plusieurs amendements ont été déposés par les élus socialistes afin d’élargir le périmètre de cette commission d’enquête et de faire le point sur les atouts et les faiblesses de la filière nucléaire – sur les risques mais aussi sur les opportunités qu’elle représente. Cet élargissement nous permettra d’apporter une juste contribution au projet de loi à venir sur la transition énergétique. C’est pourquoi je suis favorable à la création de cette commission d’enquête : puissent ses membres apporter leur contribution et avoir une discussion raisonnée et éclairante pour la suite de nos débats.
M. Michel Sordi. Je souhaite que la commission d’enquête étudie également les conséquences énergétiques, environnementales, économiques, financières et sociales d’un démantèlement de la centrale nucléaire de Fessenheim – tel est l’objet de mon amendement CE2 que je considère comme défendu.
Monsieur le président, lorsque je vous ai sollicité pour procéder à cette étude, vous m’avez expliqué que la charge de travail de notre commission ne le permettait pas. Cette commission d’enquête ne pourrait-elle être le véhicule approprié ?
Je rappelle que la fermeture de la centrale de Fessenheim, qui produit à l’heure actuelle, sans dégagement de gaz à effet de serre, 70 % de la consommation de la région Alsace, engendrera un recours accru aux énergies fossiles tout en entraînant des importations. Or, en garantissant aux entreprises françaises une énergie au moindre coût, le nucléaire demeure l’un des éléments de notre compétitivité. La fermeture de Fessenheim, sans lien avec un éventuel défaut de sûreté relevé par l’ASN, devrait entraîner pour l’opérateur et ses partenaires suisse et allemand une compensation financière de l’État qui pourrait approcher plusieurs milliards d’euros. Compte tenu de l’état des finances publiques et de l’endettement du pays, ce serait une nouvelle fois reporter sur les générations futures les conséquences financières de décisions prises aujourd’hui. La fermeture de Fessenheim, en touchant 2 200 emplois directs et indirects, pèserait sur toute l’économie locale. Les collectivités haut-rhinoises seraient également concernées puisque la centrale de Fessenheim contribue à leur financement à hauteur de 50 millions d’euros chaque année.
Les conséquences d’une telle fermeture doivent donc être évaluées de façon beaucoup plus précise, dans la perspective de la discussion du projet de loi relatif à la transition énergétique annoncé par le Gouvernement.
M. Yves Blein. Notre commission examine ce soir l’article unique de la proposition de résolution : si l’exposé sommaire, qui est argumenté, semble prendre partie, l’article unique, lui, ne pose aucun problème particulier. Aussi, monsieur Abad, pourquoi monter sur vos grands chevaux ? Le département de l’Ain et la région Rhône-Alpes sont concernés au plus haut point par l’industrie nucléaire : il est donc éminemment bénéfique qu’une commission d’enquête parlementaire se penche sur l’évaluation du coût de production de l’électricité nucléaire et ses conséquences sur le coût du mix énergétique pour les ménages et l’industrie.
Le groupe SRC sera favorable à cette proposition de résolution, notamment parce qu’il ne faut pas négliger l’option d’un allongement des durées d’amortissement des centrales. Le coût des investissements nécessaires à la prolongation de la durée du parc nucléaire doit être rapporté au gain d’une telle prolongation en termes d’amortissement des installations.
M. Lionel Tardy. La lecture de l’exposé des motifs de la proposition de résolution, voire celle de l’article unique, suffit à nous persuader que la commission d’enquête sera à charge. L’objectif d’une commission d’enquête est d’étudier un sujet avec le moins d’a priori possible. Or, tel qu’il a été déterminé, le périmètre de l’article unique ne vise qu’à aboutir à la conclusion que le nucléaire, c’est mal parce que ça coûte cher, nos collègues écologistes dissimulant à peine leur parti pris.
Étudier le coût du nucléaire en termes budgétaires est très partiel : le nucléaire coûte cher, c’est vrai, monsieur Baupin, mais depuis quand la majorité et ses alliés jugent-ils les choix de l’État uniquement en fonction de leur coût ? Pour arriver à des conclusions exploitables et fiables, il faut peser les coûts et les bénéfices sans s’arrêter aux seuls aspects financiers. C’est la raison pour laquelle mon amendement CE1 vise à inclure les questions économiques, moins restrictives que la seule vision pécuniaire, et énergétiques – le nucléaire n’est pas sans lien avec l’indépendance énergétique –, sans oublier la comparaison du coût du nucléaire à celui d’autres sources d’énergie. La commission d’enquête doit également se pencher sur les aspects environnementaux – les écologistes préfèrent-ils une source d’énergie moins coûteuse mais plus polluante ? – et sociaux : je pense aux emplois qui pourraient être détruits ou créés en cas de remise en cause de la filière.
Il faut peser le pour et le contre : les commissions d’enquêtes ne sont pas des motions de congrès écologistes. On peut être contre le nucléaire tout en voulant effectuer un travail objectif. Si vous êtes convaincu que la place du nucléaire dans le mix énergétique français n’est pas justifiée, alors tous les arguments doivent être étudiés, faute de quoi un soupçon de partialité persistera.
M. le président François Brottes. Une commission d’enquête travaille avec des moyens considérables, puisqu’elle dispose d’un pouvoir d’investigation très important. Son cadre doit donc être le plus précis possible. C’est la raison pour laquelle nous devons ce soir nous intéresser non pas à l’exposé des motifs, mais au seul cadre dans lequel la commission d’enquête agira, défini par l’article unique de la résolution.
Madame Batho, après l’adoption de la proposition de résolution en séance publique la semaine prochaine et l’appel à candidatures dans les différents groupes, la commission d’enquête devrait pouvoir se réunir une première fois avant la suspension des travaux parlementaires fin décembre. Elle aura alors six mois pour rendre ses conclusions. Quant au projet de loi sur la transition énergétique, qui n’a toujours pas été présenté en conseil des ministres, il semble, à en croire le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, qu’il pourrait être examiné autour de l’été. Je ne dispose d’aucune information supplémentaire. Quoi qu’il en soit, les travaux de la commission d’enquête pourraient utilement nourrir le débat sur la transition énergétique, d’autant que le projet de loi fera certainement l’objet de deux lectures.
Mme la rapporteure. Cette commission d’enquête vise à évaluer les coûts de la filière nucléaire pour les comparer avec ceux d’autres modes d’énergie, qui ont déjà été évalués ou qui peuvent faire l’objet d’autres travaux. La commission d’enquête ne vise que l’énergie nucléaire.
M. Prat, en soulignant le pragmatisme avec lequel la question était posée, a rappelé les objectifs du Président de la République qui doivent guider nos travaux.
Je suis surprise d’entendre évoquer une fermeture anticipée de Fessenheim, compte tenu de l’âge de la centrale. Cette fermeture est annoncée depuis longtemps : la date est désormais fixée.
L’exposé des motifs se contente de faire un état des lieux de l’évolution du poids du nucléaire en France et dans le monde.
Monsieur Cinieri, le coût du nucléaire doit inclure les externalités, qu’elles soient positives ou négatives : tel est l’objet de la commission d’enquête.
Madame Massat a rappelé que la commission d’enquête aurait pour objet d’évaluer les risques, les avantages, les coûts et les opportunités du nucléaire : il ne s’agit pas de prendre parti avant son ouverture.
C’est considérer que les centrales nucléaires sont éternelles qui revient à reporter sur les générations futures le coût financier de leur démantèlement ainsi que les risques liés à leur prolongation, lesquels augmentent avec les années.
Jamais encore le coût de la filière nucléaire n’a été évalué : si les évolutions énergétiques, les aspects environnementaux et sociaux peuvent être étudiés par ailleurs, ils ne constituent pas l’objet de la commission d’enquête. Je vous remercie, Monsieur le président, d’avoir rappelé que, ce soir, nous devons uniquement définir le cadre de la commission d’enquête qui mobilisera une trentaine de parlementaires. Si, comme le pensent certains, l’exposé des motifs est partial, la composition de la commission d’enquête permettra de rétablir l’impartialité.
La liste des amendements examinés par la commission des affaires économiques est disponible sur le site internet de l'Assemblée nationale (9).
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CE3 de M. François Brottes et CE1 de M. Lionel Tardy.
M. le président François Brottes. La commission d’enquête doit s’intéresser aux aspects économiques et financiers – et non aux seuls aspects financiers – de la production et de la commercialisation de l’électricité nucléaire. Pour être totale, la transparence doit en effet prendre en compte les modalités de calcul du prix de l’ARENH – accès régulé à l’électricité nucléaire historique –, qui sont liées au coût de production du nucléaire historique, lequel a un impact direct sur le marché de l’électricité, puisque l’ensemble des opérateurs peut accéder sous condition à l’ARENH. Il convient également d’étudier les contrats ou accords passés notamment avec Exeltium, consortium d’industriels électro-intensifs, leur permettant de s’approvisionner directement aux centrales nucléaires – les prix font l’objet d’un contrat pluriannuel qui a été négocié, non sans mal, dans le cadre de la réglementation européenne.
Enfin, le coût du grand carénage des centrales nucléaires, si leur prolongation est décidée, doit être, lui aussi, évalué.
M. Lionel Tardy. Aux aspects économiques et financiers mis en avant dans l’amendement CE3, il convient d’ajouter les aspects énergétiques – la problématique de l’indépendance énergétique –, les problèmes environnementaux – veut-on d’une source d’énergie moins coûteuse mais plus polluante que le nucléaire ? – et les questions sociales – il convient d’évaluer les suppressions et les créations d’emplois consécutives à la remise en cause de la filière nucléaire.
Mme la rapporteure. Monsieur Tardy, les six mois de travaux impartis à toute commission d’enquête ne suffiraient pas à couvrir tous les sujets que votre amendement aborde. Du reste, les aspects environnementaux ont été étudiés par ailleurs ; quant aux aspects sociaux, ils peuvent l’être également dans un autre cadre. De plus, toute fermeture impliquant un démantèlement, il faudrait étudier son impact social sur plusieurs années, les emplois créés par le recours à d’autres sources énergétiques devant également être pris en compte.
Tel n’est pas l’objet de la commission d’enquête proposée dans le cadre de cette résolution. Je suis donc défavorable à l’amendement CE1.
En revanche, je suis favorable à l’amendement CE3 qui complète utilement l’article unique : il convient d’adjoindre les aspects économiques aux aspects financiers.
M. Denis Baupin. N’ayez pas peur, mes chers collègues de l’UMP ! Si le nucléaire est aussi bénéfique que vous le pensez, la commission d’enquête le prouvera.
J’ignore si le nucléaire coûte cher, comme l’a souligné Monsieur Tardy, ou est d’un coût modeste, comme le pense Monsieur Cinieri : l’objectif de la commission d’enquête est précisément de faire la transparence sur ce point. Le rapport de la Cour des comptes, qui n’est pas complet, a également porté sur les coûts de la filière nucléaire : estimez-vous dès lors que la Cour des comptes a rendu un rapport à charge ? Votre amendement, monsieur Tardy, consiste à proposer une commission d’enquête sur l’ensemble de la politique énergétique de la France : ce serait un travail colossal.
Comme Madame Batho l’a rappelé, les aspects financiers de la filière nucléaire sont mal connus.
M. Damien Abad. Monsieur Baupin, chacun connaît vos positions.
L’amendement de M. Tardy ne vise pas l’ensemble de la politique énergétique de la France mais l’ensemble de la filière nucléaire, ce qui n’est pas la même chose. Comment vous, écologistes, pouvez-vous vous désintéresser des aspects sociaux et environnementaux de la filière nucléaire alors que vous êtes les premiers, au sein de cette commission, à rappeler qu’il convient de prendre en compte l’ensemble des questions soulevées par cette filière ? Vous êtes en pleine contradiction ! La vérité est que vous voulez faire un rapport à charge sur le coût du nucléaire.
Madame la rapporteure, comment pouvez-vous prétendre qu’étudier les aspects sociaux et environnementaux prendrait trop de temps et aussitôt ajouter que ces aspects ont déjà été étudiés ? Si tel est le cas, il suffira de joindre ces travaux à ceux de la commission d’enquête.
Si vous n’avez pas peur, vous non plus, adoptez l’amendement de M. Tardy ! Ce serait faire preuve d’ouverture d’esprit.
La Commission adopte l’amendement CE3.
En conséquence, l’amendement CE1 tombe.
Puis la Commission examine l’amendement CE4 de M. François Brottes.
M. le président François Brottes. L’amendement CE4 vise à délimiter le champ d’investigation de la commission d’enquête en précisant que les aspects économiques et financiers de la filière nucléaire doivent être étudiés « dans le périmètre du mix électrique français et européen ». La commission d’enquête ne peut pas faire le tour du monde !
Mme la rapporteure. Cet amendement de précision permet de mieux cadrer le champ de la commission d’enquête.
Avis Favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CE2 de M. Michel Sordi et CE6 de la rapporteure.
M. Michel Sordi. Il me paraît difficile d’étudier la filière nucléaire sans évoquer les conséquences énergétiques, environnementales, économiques, financières et sociales d’un démantèlement de la centrale de Fessenheim.
M. le président François Brottes. Monsieur Sordi, ma réponse à votre demande d’une commission dédiée à la fermeture de Fessenheim n’avait rien de dilatoire, car notre charge de travail sur les questions énergétiques est effectivement considérable, mais cette commission d’enquête constitue à mes yeux un véhicule tout à fait approprié pour répondre à votre demande.
Mme la rapporteure. C’est pourquoi l’amendement CE6 vise à inclure dans le champ d’investigation de la commission d’enquête la fermeture de Fessenheim comme exemple type du coût de fermeture d’une centrale nucléaire.
À cette fin, je propose de compléter l’article unique par les mots : « ainsi qu’aux conséquences d’une fermeture des réacteurs nucléaires, notamment de la centrale de Fessenheim. ».
M. Denis Baupin. J’approuve cette rédaction qui ouvre un champ plus large que l’amendement CE2. Le démantèlement créera des emplois, contrairement à une simple fermeture. Du reste, la doctrine de l’Autorité de sûreté nucléaire est bien de démanteler les centrales.
M. le président François Brottes. La rédaction de l’amendement CE6 ouvre un champ d’étude très large puisque aucune conséquence particulière de la fermeture d’une centrale n’est visée.
M. Lionel Tardy. Il serait préférable d’ajouter le mot « démantèlement » au mot « fermeture », afin d’être plus précis.
M. le président François Brottes. Toute fermeture implique un démantèlement.
M. Lionel Tardy. Non : voyez le site de Brennilis, en Bretagne ! Son démantèlement prendra encore dix ans. Et Creys-Malville ?
M. le président François Brottes. Ce site est en cours de démantèlement.
M. Denis Baupin. Le coût du démantèlement est compris dans les coûts de la filière nucléaire : il est abordé dans le rapport de la Cour des comptes et cité de façon très claire dans celui de Mme Allain et dans l’exposé des motifs de la proposition de résolution. Le coût du démantèlement des cinquante-huit réacteurs français doit être pris en compte, celui du démantèlement de Fessenheim permettant de donner une indication précise.
M. le président François Brottes. Je propose d’ajouter le mot « démantèlement » au mot « fermeture », ce qui donnerait la rédaction suivante : « ainsi qu’aux conséquences de la fermeture et du démantèlement de réacteurs nucléaires, notamment de la centrale de Fessenheim ».
Monsieur Sordi, retirez-vous votre amendement au profit de l’amendement CE6 rectifié ?
M. Michel Sordi. Oui, si l’étude du coût précis du démantèlement de la centrale de Fessenheim entre dans le champ de la commission d’enquête.
M. le président François Brottes. C’est le cas.
L’amendement CE2 est retiré.
La Commission adopte l’amendement CE6 ainsi rectifié.
Titre
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement de coordination CE5 de M. François Brottes.
M. Damien Abad. Si l’objet de la commission d’enquête avait été neutre, l’article unique aurait prévu l’étude à la fois des coûts et des bénéfices de la filière nucléaire.
La Commission adopte la proposition de résolution modifiée.
TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION
En application des articles 137 et suivants du Règlement, il est créé une commission d’enquête de trente membres relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d’exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l’électricité nucléaire, dans le périmètre du mix électrique français et européen, ainsi qu’aux conséquences de la fermeture et du démantèlement de réacteurs nucléaires, notamment de la centrale de Fessenheim.
© Assemblée nationale