N° 1929 - Rapport de M. Patrice Carvalho sur la proposition de loi , adoptée par le Sénat, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d'art de rétablissement des voies (n°60)




N
° 1929

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 mai 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI, adoptée par le Sénat, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies (n° 60).

PAR M. Patrice CARVALHO

Député

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Voir les numéros :

Sénat : 745 rectifié (2010-2011), 71, 72 et T.A. 47 (2011-2012).

Assemblée nationale : 60.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

TRAVAUX DE LA COMMISSION 9

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 9

II. EXAMEN DES ARTICLES 19

Article 1er(art. L. 2123-9 à L.2123-12 [nouveaux] du code général de la propriété des personnes publiques) : Établissement d’une convention répartissant les charges et les responsabilités des ouvrages de rétablissement des voies 19

Article 2 : Gage financier 21

Article 3 : Maintien de la qualité des ouvrages nouveaux de rétablissement des voies 21

TABLEAU COMPARATIF 23

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 26

INTRODUCTION

La proposition de loi (n° 745 rect.) de Mme Évelyne Didier a été déposée le 11 juillet 2011 au Sénat, votée en première lecture le 17 janvier 2012 et elle se trouvait donc en instance de discussion devant l’Assemblée nationale au moment où se sont tenues les élections législatives des 10 et 17 juin 2012. N’ayant pu être examinée sous la XIIIe législature, elle a donc été redéposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 2 juillet 2012 et elle est inscrite à l’ordre du jour de la séance publique du jeudi 22 mai 2014, réservée au groupe GDR.

Cette proposition vise à répartir plus équitablement les charges financières qu’implique l’entretien des ouvrages d’art rétablissant les voies de communication coupées par des infrastructures de transport nouvelles, en énonçant clairement un principe de répartition des charges et des responsabilités entre les collectivités territoriales et les gestionnaires de ces infrastructures.

Elle s’inscrit dans un contexte marqué par un double mouvement. D’une part, les lois de décentralisation successives – notamment, la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales – ont transféré la gestion des routes nationales aux collectivités territoriales et, plus particulièrement, aux conseils généraux. D’autre part, l’évolution du statut des principaux opérateurs des domaines ferroviaire et fluvial a eu pour conséquence de rapprocher leur fonctionnement de celui de sociétés privées.

 Un régime de répartition des charges de nature essentiellement jurisprudentielle. – En l’absence de dispositions législatives et réglementaires précises et impératives, c’est la jurisprudence administrative qui a dégagé les principes qui s’appliquent en matière de charges d’entretien et de responsabilités juridiques liées à la réalisation d’ouvrages d’art de rétablissement des voies, tels que les ponts ou les tunnels.

Depuis l’arrêt fondateur du Conseil d’État Préfet de l’Hérault en date du 14 décembre 1906 (Rec., p. 948) le juge administratif estime que les ouvrages d’art de rétablissement de voies interrompues par la construction d’une infrastructure de transport nouvelle sont parties intégrantes des voies dont ils assurent la continuité. En effet, « les ponts sont au nombre des ouvrages constitutifs des voies publiques, dont ils relient les parties séparées de façon à assurer la continuité du passage et (…) le soin de veiller à l’entretien des ponts incombe [donc], en principe, au service chargé des travaux concernant les voies publiques qu’ils desservent. ».

Dans l’affaire du pont de Languevoisin (Somme), le tribunal administratif d’Amiens avait rejeté la demande du département de la Somme tendant à ce que l’État soit condamné à lui payer la somme de 1,3 million de francs correspondant aux frais de réparation que nécessitait la remise en état dudit pont. Saisi d’un arrêt confirmatif de la cour administrative d’appel de Douai, le juge de cassation a rappelé le principe selon lequel « les ponts sont au nombre des éléments constitutifs des voies dont ils relient les parties séparées de façon à assurer la continuité du passage ». Il précise même que « les circonstances que la construction du pont en cause résulte de la décision de l’État de percer une voie fluviale nouvelle et qu’elle a été adaptée au gabarit de la navigation sur cette voie ne sauraient avoir pour effet de faire regarder ce pont comme incorporé au domaine public fluvial » (Conseil d’État, 26 septembre2001, Département de la Somme, req. n° 219338).

En d’autres termes, un ouvrage d’art est incorporé à l’infrastructure dont il relie les deux parties. Ce principe est valable alors même que l’ouvrage d’art a été construit par une personne morale autre que celle assurant l’entretien de la voie portée et il s’applique aussi bien aux voies nationales et départementales que communales. Par voie de conséquence, le propriétaire de la voie portée est nécessairement propriétaire de l’ouvrage d’art de rétablissement de la voie interrompue.

L’ouvrage d’art étant incorporé au domaine public routier de la collectivité territoriale dont il supporte la voie, cette collectivité est responsable de sa surveillance, de son entretien, de sa rénovation et de son renouvellement éventuel. Elle est donc tenue de prendre toutes les mesures nécessaires pour maintenir les ouvrages, situés sur son territoire, en bon état d’entretien et d’en assurer la sécurité à l’égard des tiers, même en l’absence de remise expresse de ces ouvrages. Elle pourra voir sa responsabilité administrative (responsabilité sans faute), voire sa responsabilité pénale, engagée en cas de non-respect de ces obligations.

Il faut néanmoins remarquer que l’État s’est lui-même affranchi de cette règle pour ce qui concerne les autoroutes concédées. Des directives ministérielles en date des 2 mai 1974 et 13 avril 1976 imposent en effet aux concessionnaires d’être maîtres d’ouvrage des ouvrages de rétablissement au-dessus du domaine public autoroutier concédé. (1) Cette solution présente l’avantage, pour les gestionnaires ayant réalisé les ouvrages de rétablissement, de s’assurer que les ouvrages sont correctement entretenus et ne risquent pas de mettre en danger les usagers de l’infrastructure franchie.

 Un régime qui pénalise les collectivités territoriales. – Cette situation pénalise les collectivités territoriales pour plusieurs raisons.

En premier lieu, les collectivités gestionnaires de voies portées par des ouvrages d’art de rétablissement n’ont souvent pas une vision claire de leurs obligations d’entretien et de leurs responsabilités. En l’absence de tout document matérialisant le transfert, elles peuvent en effet, en toute bonne foi, se croire dispensées de ou incompétentes pour l’entretien et la gestion de ces ouvrages, qui assurent pourtant la continuité de leur réseau routier – ce qui est potentiellement lourd de conséquences, notamment pénales, en cas d’accident imputé à cette inaction.

Ensuite, la charge financière qui résulte de l’application des principes jurisprudentiels susmentionnés est si importante que les collectivités de taille modeste ne peuvent faire face de manière satisfaisante à leurs obligations.

En effet, le coût d’un ouvrage de rétablissement de voies est estimé entre six cent mille et un million d’euros, alors que le coût moyen de surveillance et d’entretien d’un tel ouvrage est évalué entre deux mille et quatre mille euros par an. Bien qu’il n’existe actuellement aucun recensement précis, on évalue aujourd’hui à plusieurs dizaines de milliers le nombre d’ouvrages concernés. Dès lors, l’enjeu financier global peut être estimé à plusieurs dizaines de millions d’euros par an pour les charges liées à la surveillance et à l’entretien et de plusieurs centaines de millions d’euros par an pour les travaux de renouvellement (grosses réparations ou reconstructions) d’un ouvrage d’art.

Faute de moyens financiers mobilisables et du fait de l’engagement de responsabilité auquel elles s’exposent, certaines collectivités se voient alors contraintes de réduire le service rendu par leur voie, voire d’en interdire l’utilisation pour des raisons de sécurité.

Enfin, les collectivités territoriales apparaissent souvent désarmées face aux gestionnaires des nouvelles infrastructures de transport, qu’il s’agisse de Réseau ferré de France (RFF) ou de Voies navigables de France (VNF). Ceux-ci disposent en effet d’une expertise technique reconnue et de services juridiques compétents, dont de nombreuses collectivités de taille modeste ou moyenne sont dépourvues. Le dialogue s’établit donc, dès l’origine, dans des conditions inégales et les collectivités ne pourront guère solliciter l’appui de l’État, car les politiques libérales conduites dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) ont démantelé l’assistance technique fournie par l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire (ATESAT), qui constituait pour nombre de ces collectivités un outil d’aide et de conseil efficace.

 L’objectif de la proposition de loi : établir un nouveau cadre juridique, équilibré et pérenne. – Face aux conséquences financières et juridiques lourdes qu’entraîne la gestion des ouvrages de rétablissement des voies, la mise en place d’un nouveau cadre juridique plus sécurisant pour les collectivités territoriales s’impose.

La proposition de loi de notre collègue Évelyne Didier pose un principe général de répartition des responsabilités et des charges entre les collectivités territoriales et les gestionnaires des infrastructures de transport nouvelles et définit les obligations de chaque partie, avec pour objectif de sécuriser les collectivités territoriales dans ce domaine.

Dans le respect de ce principe général, la prise en compte des particularités de chaque ouvrage d’art concerné et de la spécificité des situations locales relèverait d’une convention entre les deux parties. Par ailleurs, devraient figurer dans les dossiers préalables aux déclarations d’utilité publique, les premières orientations du contenu des conventions que le maître d’ouvrage se propose de négocier avec les collectivités territoriales : l’objectif est de prévoir, très en amont, la répartition des charges d’entretien des nouveaux ouvrages d’art et de permettre à la collectivité de se pencher, dès le stade de l’enquête publique, sur la soutenabilité de la répartition envisagée des charges d’entretien.

En revanche, la proposition de loi ne remet pas en cause le principe des conventions déjà signées. Elle prévoit explicitement que ces conventions continuent de s’appliquer, sauf en cas de dénonciation. Dans ce cas, elle devrait être renégociée selon le principe général énoncé précédemment.

Dans le respect de la répartition actuelle des compétences entre les différentes parties prenantes et des principes structurants du droit de la domanialité publique, la proposition de loi réussit donc à restaurer un équilibre entre les collectivités et les opérateurs, équilibre que certaines pratiques avaient pu mettre à mal et tant il est vrai « qu’entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit. » (Lacordaire).

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Lors de sa réunion du 13 mai 2014, la Commission a examiné, sur le rapport de M. Patrice Carvalho, la proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d'art de rétablissement des voies (n° 60).

M. Christophe Bouillon, président. Notre commission est saisie au fond de la proposition de loi visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies. Ce texte, adopté par le Sénat au cours de la précédente législature, a été redéposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 2 juillet 2012 et inscrit à l’ordre du jour du jeudi 22 mai, réservé au groupe GDR. Mardi dernier, nous avons désigné comme rapporteur notre collègue Patrice Carvalho.

À l’issue du délai de dépôt des amendements, hier lundi 12 mai à 9 heures, seize amendements du rapporteur avaient été déposés. Aucun n’a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40.

M. Patrice Carvalho, rapporteur. La proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui a été déposée au Sénat par notre collègue Évelyne Didier, sénatrice de Meurthe-et-Moselle, et adoptée en première lecture avec l’assentiment des sénateurs de tous bords politiques. Répondant à une forte attente des maires et des élus, souvent confrontés à des situations difficiles et qui attendent d’urgence cette clarification, elle vise à mieux répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies.

Il était en effet grand temps que les parlementaires se saisissent du sujet, car il y a péril en la demeure : les risques financiers et pénaux pour l’ensemble de nos collectivités, particulièrement pour nos communes, sont réels, sans même parler des enjeux en termes de sécurité pour nos concitoyens.

Chacun sait que, lors de la construction d’une nouvelle infrastructure de transport – par exemple une voie ferrée, une voie navigable ou une autoroute –, des ouvrages d’art sont parfois construits par le gestionnaire – il peut s’agir de Réseau ferré de France (RFF) ou de Voies navigables de France (VNF) – afin de rétablir la continuité des voies communales ou, le cas échéant, départementales lorsque celle-ci a été rompue.

Se posent ensuite la question de la répartition des coûts d’entretien, de réfection, voire de renouvellement et, partant, celle de la responsabilité juridique de ces ouvrages. À l’heure actuelle, en l’absence de dispositions législatives et réglementaires particulières, c’est une jurisprudence ancienne du Conseil d’État – elle remonte à 1906 ! –qui trouve à s’appliquer : le juge estime que ces ouvrages sont des éléments constitutifs des voies, puisqu’ils en assurent la continuité ; par conséquent, la collectivité propriétaire de la voie portée est également entièrement responsable de l’ouvrage, c’est-à-dire qu’elle doit en assurer l’entretien, la réfection et le renouvellement et garantir la sécurité à l’égard des tiers. En d’autres termes, ceux qui décident de la création d’une ligne venant à couper des voies existantes laissent ensuite les ouvrages de rétablissement de ces voies à la charge des collectivités, qui, elles, n’ont rien demandé.

Dès lors, le problème est double. D’une part, si l’ouvrage est correctement dimensionné en fonction de la voie nouvelle, rien n’assure qu’il le soit en fonction du trafic sur la voie interrompue. On a ainsi des exemples de ponts, construits lors de la canalisation de cours d’eau, qui correspondent certes au gabarit des bateaux qu’ils doivent laisser passer mais qui sont largement surdimensionnés pour le trafic qu’ils auront à supporter. Ce sont donc bien les besoins du gestionnaire de l’infrastructure nouvelle qui sont pris en compte, plutôt que ceux des collectivités : pourquoi serait-ce alors à celles-ci de payer ?

D’autre part, les petites communes ignorent parfois totalement que la responsabilité de l’ouvrage d’art leur revient. Lorsqu’elles l’apprennent, c’est que des travaux parfois lourds sont devenus urgents, pour lesquels elles ne disposent ni de l’expertise technique ni des moyens financiers nécessaires. Au cours du débat au Sénat a été cité l’exemple d’une commune du Calvados de 312 habitants, sollicitée par Réseau ferré de France pour effectuer les travaux de renouvellement d’un pont situé sur son territoire. Les coûts, pour elle, étaient estimés à 61 000 euros, soit 60 % de ses dépenses d’équipement annuelles, une charge financière qu’elle était bien évidemment dans l’impossibilité de supporter.

De tels faits sont d’autant plus choquants que l’État a opportunément su s’affranchir du même principe lorsqu’il était lui-même concerné. C’est ainsi que les sociétés d’autoroute ont signé des contrats de concession leur imposant de prendre en charge les ouvrages de rétablissement des voies comme si elles en étaient les maîtres d’ouvrage, ce qu’elles ne sont pas juridiquement. Ces contrats ont été établis au nom de la sécurité des usagers des autoroutes : la sécurité des usagers des autres voies de communication serait-elle d’une moindre importance ?

La complexité du sujet, la méconnaissance des risques, la dérive constatée en matière de prise en charge des ouvrages nous font donc obligation de traiter ce problème et d’en revenir à un principe simple, juste et de bon sens, selon lequel celui qui décide de construire une nouvelle voie doit en assumer les conséquences.

Les auteurs de la proposition de loi avancent une solution pragmatique, qui ne remet pas en cause la domanialité et le droit de propriété des collectivités sur ces ouvrages, mais cherche à établir une répartition des charges plus juste et plus équitable. La règle proposée serait la suivante : au gestionnaire de la nouvelle infrastructure de transport doit revenir la responsabilité de la structure de l’ouvrage d’art, y compris l’étanchéité ; au propriétaire de la voie rétablie, celle de la chaussée et des trottoirs.

En outre, le texte instaure l’obligation pour les parties de signer une convention, dont les principes généraux auront été rendus publics dès le stade du dossier d’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique. Ce mécanisme permet de régler, d’une part, les questions spécifiques posées par chaque cas particulier et, d’autre part, le problème de l’information des collectivités sur leurs propres obligations.

S’agissant des ouvrages de rétablissement existants, le texte donne la possibilité à l’une ou l’autre partie de dénoncer les conventions existantes et d’en conclure de nouvelles sur les bases que je viens de présenter. En l’absence de convention et seulement en cas de litige, les parties auront trois ans pour signer un tel document.

Cette proposition de loi, qui rejoint des initiatives analogues de sénateurs de l’opposition et qui est soutenue par l’Association des maires de France, a bénéficié d’un excellent accueil au Sénat. Elle y a en effet été adoptée dans des conditions proches de l’unanimité. Le caractère pragmatique et aisément compréhensible du dispositif ainsi que les délais laissés à chacun des acteurs pour s’adapter à ce nouveau cadre juridique n’y sont sans doute pas étrangers. J’espère donc qu’elle bénéficiera du même soutien de notre commission, avant le débat en séance publique prévu la semaine prochaine.

M. Florent Boudié. Cette proposition de loi déposée au Sénat en 2011 est issue d’un groupe de travail créé en 2009 par Dominique Bussereau, à l’époque secrétaire d’État aux transports, et qui visait à répartir la responsabilité et les charges afférentes aux infrastructures entre les gestionnaires et les propriétaires de ces dernières.

Notre rapporteur a cité le cas d’une commune du Calvados ; j’évoquerai pour ma part celui de Libourne, où un pont ferroviaire datant de la fin du XIXe siècle et dont l’entretien revenait à la SNCF dans le cadre d’une convention avec RFF a été fermé à la circulation il y a cinq ans sur ordre du préfet, pour des raisons de sécurité publique, ce pont surplombant la voie TGV Bordeaux-Paris. Cette fermeture a entraîné des déports de trafic, notamment de poids lourds, vers des quartiers qui n’y étaient pas préparés. Elle est par ailleurs à l’origine d’un contentieux devant le juge administratif, la facture s’élevant pour la ville de Libourne – dont le budget d’investissement n’excède pas 6 millions d’euros par an – à 3,5 millions d’euros.

Cette proposition de loi, adoptée par le Sénat à l’unanimité, vise à clarifier ce type de situation, en posant un principe simple pour les nouvelles infrastructures : leur gestionnaire devra assumer l’entretien, la rénovation et, le cas échéant, la reconstruction des ouvrages d’art concernés, tandis que leur propriétaire, c'est-à-dire les collectivités territoriales dans la plupart des cas, aura à sa charge la chaussée ou la voirie. Ce partage apparaît à la fois équitable et réaliste. Pour prendre l’exemple de la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux, ce sont cent quatre-vingt-cinq ponts qui traverseront les voies, et donc autant de fois que se posera la question de la responsabilité de leur entretien.

Pour ce qui est des anciennes infrastructures, le texte dispose que les conventions existantes continueront de s’appliquer à moins qu’une des deux parties ne souhaite les dénoncer : dans ce cas, une médiation sera engagée avec le préfet en vue de parvenir à une nouvelle répartition des charges. Cette disposition devrait permettre de réduire notablement le stock des contentieux qui découlent de situations dans lesquelles l’état des ouvrages d’art entraîne un risque pour la sécurité publique mais où personne n’intervient, les collectivités locales n’ayant pas les moyens de financer les rénovations.

J’ajoute que nous sommes en discussion avec le secrétaire d’État aux transports pour apporter quelques améliorations supplémentaires à cette proposition de loi – déjà fort satisfaisante en l’état – avant son examen en séance.

M. Guillaume Chevrollier. L’inscription de cette proposition de loi à notre ordre du jour a été pour moi une heureuse surprise, tant ce texte répond à une attente forte de la part des élus locaux, notamment des élus ruraux. La question de la domanialité des ponts et des routes est un véritable serpent de mer. Dominique Bussereau, alors secrétaire d’État aux transports, avait déjà réuni, en 2009, une commission de travail sur le sujet. À l’issue des travaux de cette commission, deux propositions de loi avaient été déposées au Sénat, l’une émanant du groupe UMP, l’autre du groupe communiste, républicain et citoyen ; le changement de majorité au Sénat a fait que c’est cette dernière qui a été discutée, puis adoptée à l’unanimité le 17 janvier 2012. Elle répond à l’inquiétude des élus dont les communes sont traversées par des routes, des autoroutes, des voies navigables ou des lignes de chemin de fer nécessitant la construction de ponts ou d’ouvrages d’art de rétablissement des voies.

Ce sujet concerne tout particulièrement la Mayenne, la Sarthe et l’Ille-et-Vilaine, dont cinquante-sept communes sont traversées par la nouvelle ligne à grande vitesse Bretagne-Pays de la Loire. C’est ainsi que j’ai été alerté par de nombreux maires au sujet de la domanialité des ouvrages d’art et de ses conséquences. J’ai donc déposé en juillet 2013 une proposition de loi similaire à celle que nous examinons aujourd’hui et qui avait été cosignée par plusieurs de mes collègues.

La jurisprudence du Conseil d’État considère, depuis un arrêt du 26 septembre 2001, que les collectivités territoriales sont nécessairement propriétaires des ouvrages de rétablissement, ce qui n’est pas contesté. Ce qui l’est en revanche, c’est que le Conseil d’État estime en conséquence que la maîtrise d’ouvrage et les obligations de sécurité, d’entretien et de renouvellement de la structure de l’ouvrage d’art incombent aux collectivités, comme pour la chaussée. Or les coûts d’entretien, de réfection, voire de reconstruction, excèdent largement les ressources de la plupart des communes. Pourtant, celle de La Cropte en Mayenne, qui compte 224 habitants, va devoir entretenir le pont qui franchira la ligne à grande vitesse…

L’enjeu financier global s’élève à plusieurs dizaines de millions d’euros par an pour les charges liées à la surveillance et à l’entretien, et à plusieurs centaines de millions d’euros pour les travaux de renouvellement d’un ouvrage d’art. Il faut d’ailleurs noter que beaucoup d’élus ignorent que ces charges leur incombent, d’où leur surprise quand on leur demande d’effectuer et de financer les travaux nécessaires.

C’est donc une réelle épée de Damoclès qui pèse sur eux, car ces ouvrages sont très nombreux : 4 750 rien que pour les routes départementales ! Beaucoup sont heureusement récents et en bon état, mais la question de leur renouvellement va forcément se poser un jour, notamment pour ceux qui ont été construits après-guerre.

L’objet de cette proposition de loi est donc d’établir une répartition claire des charges entre les communes et les maîtres d’ouvrage. Elle pose un principe simple : celui qui décide de construire une nouvelle voie en assume les conséquences. Les collectivités sont donc dispensées de la prise en charge de la gestion, de l’entretien et de l’éventuel renouvellement de la structure de l’ouvrage de rétablissement, mais gardent la responsabilité de la chaussée et des trottoirs.

Le texte pose aussi l’obligation pour les parties de signer une convention, ce qui permettra une clarification des responsabilités et une information de chacune sur celles-ci.

Une autre disposition autorise, en cas de litige, une dénonciation des conventions existantes, permettant qu’une nouvelle convention soit conclue sur la base des principes de répartition établis dans cette proposition pour les ouvrages d’art futurs. Il en serait de même dans les cas où aucune convention n’aurait été passée. Cette disposition est lourde de conséquences et avait justifié, lors du débat au Sénat, les réserves du Gouvernement d’alors. En effet, la renégociation prévue aux alinéas 14, 15 et 16 de l’article 1er peut être source d’instabilité juridique et financière. Elle n’en sera pas moins indispensable pour nombre de communes en cas de travaux importants qu’elles ne pourront assumer.

Je me dois également de signaler une demande des élus de communes traversées par une ligne à grande vitesse. Ces communes subissent de nombreux effets indésirables – bruit, coupure de routes entraînant un allongement des parcours, etc. – qui font fuir certains habitants. En sus de ces nuisances, ces projets d’infrastructures signifient pour les collectivités une perte de base d’imposition sur le bâti et le non-bâti et la création de zones inconstructibles en bordure du tracé. Ces communes réclament donc une redevance annuelle pérenne, comme il en existe pour les autoroutes, les lignes à très haute tension ou les éoliennes. Un fonds de solidarité territoriale a certes été créé mais, là où il faudrait une redevance forfaitaire annuelle pérenne, il ne s’agit que d’ouvrir par ce moyen un droit à subvention, plafonné à 80 %. Le candidat François Hollande avait, en son temps, laissé espérer une compensation qui semble avoir été oubliée par le Président élu.

Cela étant, nous soutiendrons cette proposition de loi, dont nous espérons qu’elle sera adoptée à l’unanimité, comme au Sénat. Nous libérerons ainsi les communes d’une responsabilité trop lourde pour elles tout en garantissant la sécurité de nos concitoyens.

M. Olivier Falorni. Cette proposition de loi répond, comme on l’a dit, à une attente très forte de la part des collectivités territoriales, puisqu’elle vise à clarifier la répartition des charges de gestion des ouvrages de rétablissement des voies interrompues en raison de la réalisation d’une nouvelle infrastructure de transport.

En l’absence de règles législatives, l’entretien, la surveillance et les éventuels travaux de rénovation de ces ouvrages sont imputés à la collectivité gestionnaire des voies concernées. Or les collectivités territoriales ignorent le plus souvent les obligations qui leur incombent à ce titre et qui peuvent entraîner une charge très importante. À La Rochelle par exemple, le pont-route qui enjambe les voies au-dessus de la gare et relie le quartier de Tasdon au centre-ville tombe en ruine, menaçant la sécurité de ceux qui l’empruntent. La SNCF y a réalisé des travaux de conservation pour le compte de RFF, qui reporte cette responsabilité sur la ville. La remise en état de l’ouvrage paraît impossible et le coût de son remplacement est évalué à plusieurs millions d’euros, excédant les possibilités de la municipalité.

Les dispositions de cette proposition de loi doivent s’appliquer aux futurs ouvrages d’art. Elle répartit les charges et les responsabilités entre, d’une part, les collectivités territoriales, qui auront la charge et la gestion des trottoirs, du revêtement routier et des joints en assurant la continuité, et, d’autre part, les gestionnaires de la nouvelle infrastructure, qui devront, eux, assurer l’étanchéité, la surveillance, l’entretien et la reconstruction de la structure de l’ouvrage.

Je regrette toutefois que la question des ouvrages d’art existants n’ait pas été abordée dans ce texte. Nous aurions pu imaginer qu’en cas de litige sur ces ouvrages, les deux parties signent une convention dans un délai de trois ans à compter de la saisine du juge, en respectant les formes qui vont prévaloir pour les ouvrages d’art futurs.

Cette proposition de loi reste néanmoins indispensable. C’est un texte important qui permet de clarifier les responsabilités de chacun, notamment la responsabilité pénale des élus locaux. Les députés du groupe RRDP le voteront donc sans hésitation.

Mme Valérie Lacroute. Comme l’a souligné notre collègue Guillaume Chevrollier, cette proposition de loi apporte une réponse équilibrée au problème de l’entretien d’ouvrages d’art particuliers, auquel sont confrontées de manière récurrente de nombreuses collectivités. Nous connaissons tous dans nos départements – la Seine-et-Marne ne fait pas exception – des situations dans lesquelles l’entretien de tels ouvrages, situés sur des voies routières, ferroviaires ou fluviales, incombe à des communes si petites et au budget si modeste qu’elles ne peuvent y faire face.

Ces situations créent, notamment en Seine-et-Marne, département très vaste, des difficultés de liaison qui peuvent être préjudiciables aux échanges entre territoires. La fermeture, par mesure de précaution, d’un ouvrage d’art oblige dans certains cas les usagers à des détours importants, ce qui complique l’organisation de services de proximité – ramassage scolaire, enlèvement des ordures ménagères… – ainsi que l’activité professionnelle, suscitant craintes et mécontentements.

Quant aux maires, ils ressentent un véritable sentiment d’impuissance lorsque leur commune n’a pas les moyens de remédier à ces difficultés.

Aussi est-il bienvenu de mieux répartir les responsabilités et les charges entre collectivités et gestionnaires d’infrastructures de transport. Comme les collègues de mon groupe, je voterai bien sûr ce texte grâce auquel l’initiative prise dès 2009 par Dominique Bussereau va enfin aboutir !

M. Jean-Pierre Vigier. Cette proposition de loi technique est nécessaire. Il faut en effet clarifier la répartition des charges pour les collectivités, notamment pour les plus petites d’entre elles qui ne peuvent assumer la charge financière à la fois de la surveillance, de l’entretien et de la rénovation des ouvrages d’art incorporés à leur domaine public routier. Les montants en jeu dépassent souvent, et de très loin, leurs moyens financiers. Les conventions proposées de répartition des charges entre gestionnaire et propriétaire constituent une avancée importante. Elles permettront aussi de disposer d’utiles prévisions chiffrées.

On aurait toutefois pu aller plus loin et réduire encore plus nettement, pour les petites collectivités, la part des charges leur incombant.

M. Laurent Furst. Ce texte distingue opportunément sur le plan technique entre l’ouvrage d’art et le passage. Pour avoir réalisé dans ma ville, avec l’aide des services du conseil général, un contournement d’une longueur de 5,7 kilomètres, je sais qu’il n’est plus possible aujourd’hui de construire un ouvrage d’art sans compensation environnementale. C’est ainsi que nous avons dû, pour notre part, aménager des « batrachoducs » sous les ouvrages. De qui sont-ils la propriété et à qui incombe leur entretien ? Sans doute faudra-t-il pour le savoir prendre une nouvelle loi dans quelques années…

M. Martial Saddier. En tant que député d’une zone rurale et vice-président de l’Association des maires de France, je m’associe aux éloges dont ce texte a fait l’objet. Notre Parlement s’honore à montrer, une fois de plus, qu’il n’oublie aucun territoire ni aucun des élus de ce pays. Cette proposition de loi constitue une réelle avancée.

A-t-on une idée du montant financier que représente à court et moyen termes le stock de contentieux ?

M. le rapporteur. Le coût d’un ouvrage d’art de rétablissement des voies serait compris, en moyenne, six cent mille et un million d’euros, tandis que le coût moyen de sa surveillance et de son entretien se situerait entre deux mille et quatre euros par an. Sur ces points, nous avons interrogé le ministre pour avoir des éléments plus précis.

Dans notre pays, bien des ouvrages d’art ont dû être refaits après les destructions intervenues durant la guerre, si bien que beaucoup arrivent aujourd’hui en fin de course, comme c’est le cas dans mon département. Dans ma commune, on dénombre trois ponts enjambant de petites rivières – à la charge de la commune –, deux ponts sous voies ferrées – ce qui est une chance pour nous, puisqu’ainsi leur entretien incombe à la SNCF – et quatre ponts sur des canaux – effectivement à bout de souffle, si bien que le tonnage autorisé a dû être réduit, dans certains cas jusqu’à 3,5 tonnes. Il arrive que des communes ne soient plus en mesure d’assurer totalement la sécurité de leurs administrés, par exemple lorsque les services de secours, appelés pour une urgence cardiaque à quelques centaines de mètres de la caserne, doivent faire un détour de dix kilomètres pour s’y rendre parce que leur véhicule ne peut pas emprunter un pont enjambant une rivière ou un canal ! Se pose aussi le problème du ramassage des ordures ménagères. Je pense également au cas d’une toute petite commune, traversée par une voie rapide et qui se trouve dans l’incapacité d’assumer l’entretien d’un pont dont la responsabilité lui incombe pourtant.

Il nous faudra également aborder en séance publique la question des passages à niveau, pour les exclure du champ d’application du texte. Je déposerai un amendement à cet effet, car il ne faudrait pas que la SNCF vienne à imputer aux collectivités la charge de la réfection de ces infrastructures, dont elle décide à intervalles réguliers.

Au vu du débat, cette proposition de loi devrait pouvoir être adoptée à l’unanimité à l’Assemblée comme elle l’a été au Sénat, il faut s’en réjouir. Reste que le stock de contentieux est lourd.

Les situations de conflit non réglées sont encore nombreuses, en effet. Dans certains cas, les collectivités demandent des actes de rétrocession qui n’ont jamais été pris ; la SNCF et VNF s’appuient sur la jurisprudence et on tourne ainsi en rond, chacun se renvoyant la balle. Mais notre pays peut-il s’accommoder encore longtemps de telles situations qui amènent à limiter le tonnage sur certains ponts, ou même carrément à y interdire la circulation ? N’est-il pas dramatique de ne pas pouvoir transporter le vin comme il le faudrait dans la région de Libourne ? (Sourires.) Alors que les constructions s’étendent, que le trafic augmente, le maillage du territoire devrait être partout assuré de façon efficace, sans restrictions.

Nous avons interrogé le Gouvernement sur la prise en charge du « stock ». Les sommes en jeu sont importantes. Cela représente assurément une charge supplémentaire pour VNF et la SNCF, alors même qu’on demande à cette dernière un effort de redressement. Mais il faut régler ce problème et les investissements indispensables doivent être réalisés. J’ai cru comprendre que le Gouvernement n’était pas fermé à la discussion. Il devrait donc faire des propositions. Il est certes utile de prendre des dispositions pour l’avenir, mais il faut surtout régler les situations héritées du passé car on ne construira jamais autant de nouveaux ponts qu’il en existe aujourd’hui !

Article 1er
(art. L. 2123-9 à L. 2123-12 [nouveaux] du code général de la propriété des personnes publiques)

Établissement d’une convention répartissant les charges et les responsabilités des ouvrages de rétablissement des voies

Cet article crée une section 5 au chapitre III du titre II du livre Ier du code général de la propriété des personnes publiques, intitulée « Rétablissement de voies de communication rendu nécessaire par la réalisation d’un ouvrage d’infrastructures de transport » et comprenant trois articles.

 L’article L. 2123-9 (nouveau) du code général de la propriété des personnes publiques (alinéas 7 à 12) traite de la question des ouvrages nouveaux de rétablissement des voies.

Le dispositif proposé repose sur la négociation de conventions entre les collectivités territoriales propriétaires des voies interrompues par la réalisation d’une nouvelle infrastructure de transport et le gestionnaire desdites infrastructures. Ces conventions devraient obligatoirement s’inscrire dans le cadre d’un principe général de répartition des charges et des responsabilités entre les parties en présence, aux termes duquel :

– le gestionnaire de la nouvelle infrastructure de transport, quelle que soit sa forme juridique (collectivité territoriale ou établissement public industriel et commercial), serait responsable de la structure de l’ouvrage de rétablissement des voies, y compris l’étanchéité de ce dernier ;

– le propriétaire de la voie rétablie serait responsable de la chaussée et des trottoirs.

Dans le respect de ce principe, les conventions particulières négociées entre les parties permettraient de prendre en compte les spécificités liées à chaque ouvrage d’art. Elles auraient notamment à décrire les conditions prévisionnelles d’entretien de l’ouvrage, à évaluer les dépenses prévisibles correspondantes et à fixer les modalités de remise de l’ouvrage et d’ouverture de la voie à la circulation.

Les orientations de ces conventions seraient exposées par le gestionnaire de la nouvelle infrastructure de transports dès la préparation du dossier d’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique. Les linéaments de la future convention seraient ainsi présentés très en amont des travaux, ce qui devrait permettre aux collectivités territoriales concernées d’être précocement informées des orientations du gestionnaire et devrait donc, selon les auteurs de la proposition de loi, faciliter la négociation lorsque celle-ci devrait effectivement débuter.

La proposition de loi ne fixe aucun délai de signature de la convention, même si la situation préférable serait probablement celle où la convention serait négociée parallèlement à l’élaboration du projet. Il ne serait, en toute hypothèse, probablement pas judicieux de retarder ou de bloquer un projet d’intérêt général au seul motif que la convention n’est pas encore signée, d’autant que des ouvrages neufs n’appelleront en principe pas d’interventions particulières au cours de leurs premières années de mise en service.

Le principe général de répartition des charges et des responsabilités et la signature d’une convention assurant la mise en œuvre de ce principe ne s’appliqueraient qu’aux ouvrages nouveaux de rétablissement des voies, dont l’enquête publique aurait débuté postérieurement au premier jour du sixième mois suivant la promulgation de la loi.

 L’article L. 2123-10 (nouveau) du code général de la propriété des personnes publiques (alinéa 13) règle l’hypothèse d’un échec de la négociation préalable à la signature de la convention prévue au paragraphe II de l’article L. 2123-9. Dans ce cas, il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir le juge compétent afin qu’il statue sur le contenu et les dispositions de la convention.

 L’article L. 2123-11 (nouveau) du code général de la propriété des personnes publiques (alinéas 14 à 16) règle la situation des ouvrages de rétablissement des voies déjà existants, qui sont largement majoritaires et auxquels s’attachent les principaux enjeux financiers.

Il convient alors de distinguer selon qu’une convention a d’ores et déjà été ou non signée :

– Dans le cas où existe déjà une convention, signée antérieurement à la promulgation de la loi, le nouvel article L. 2123-10 du code général de la propriété des personnes publiques propose que celle-ci continue de s’appliquer, dans la mesure où les relations déjà nouées entre les différents partenaires ont pu aboutir à des accords satisfaisants pour l’ensemble des parties.

En revanche, en cas de dénonciation de la convention par l’une de ces parties, une nouvelle convention devra être négociée, sur le fondement du principe général et selon les modalités précisées à l’article L. 2123-9 ;

– En cas d’absence de toute convention – ce qui semble être le cas le plus fréquent – et sur le modèle de ce que prévoit la proposition de loi pour les litiges dans le cadre d’une convention ancienne, les deux parties devront, en cas de litige, négocier une convention, dans le respect du principe général énoncé au II de l’article L. 2123-9.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD1 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement – comme trois autres à venir, à savoir les CD2, CD5 et CD8 – vise à remplacer les mots « d’un ouvrage d’infrastructures » par les mots « d’une infrastructure », afin d’éviter toute confusion entre l’infrastructure de transport et l’ouvrage d’art.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels ou de précision CD2, CD9, CD3 à CD7, CD10 à CD13, CD8 et CD14 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement CD15 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement supprime une mention inutile. En effet, si la négociation d’une nouvelle convention en application du II de l’article L. 2123-9 échouait, l’article L. 2123-10, qui permet à la partie la plus diligente de saisir le juge, trouverait automatiquement à s’appliquer.

M. Laurent Furst. Qu’entend-on par « partie la plus diligente » ?

M. Florent Boudié. C’est celle qui a le plus intérêt à agir. (Sourires)

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CD16 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 1er ainsi modifié.

Article 2
Gage financier

Cet article vise à couvrir les éventuelles charges financières résultant, pour l’État, de l’application de la présente proposition de loi par la création, à due concurrence, d’une taxe additionnelle aux droits prévue aux articles 575 et 575 A du code général des impôts (droit d’accise sur les tabacs).

*

* *

La Commission adopte l’article 2 sans modification.

Article 3
Maintien de la qualité des ouvrages nouveaux de rétablissement des voies

Cet article visait à protéger les collectivités territoriales d’un possible effet pernicieux de la mise en œuvre du principe général de répartition des charges énoncé à l’article 1er de la proposition de loi – à savoir, la tentation à laquelle pourraient succomber certains gestionnaires d’infrastructures nouvelles de réaliser des ouvrages d’art de moindre qualité afin de diminuer leurs charges d’entretien et de surveillance, au détriment de la sécurité des voiries.

Sur proposition du rapporteur de la commission saisie au fond, le Sénat a supprimé cet article et inscrit en contrepartie des dispositions d’effet analogue au paragraphe I du nouvel article L. 2123-9 du code général de la propriété des personnes publiques (article 1er, alinéa 5 de la présente proposition de loi), dans le cadre des orientations de la future convention qui seront présentées dans le dossier d’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique.

*

* *

La Commission maintient la suppression de l’article.

Puis elle adopte à l’unanimité l’ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.

TABLEAU COMPARATIF

___

Dispositions en vigueur

___

Texte adopté par le Sénat

___

Texte adopté par la Commission

___

 

Article 1er

Article 1er

Code général de la propriété des personnes publiques

Deuxième partie

Gestion

Livre Ier

Biens relevant du domaine public

Titre II

Utilisation du domaine public

Chapitre III

Modalités de gestion

Le chapitre III du titre II du livre Ier de la deuxième partie du code général de la propriété des personnes publiques est complété par une section 5 ainsi rédigée :

(Alinéa sans modification)

 

« Section 5

(Alinéa sans modification)

 

« Rétablissement de voies de communication rendu nécessaire par la réalisation d’un ouvrage d’infrastructures de transport

« Rétablissement de voies de communication rendu nécessaire
par la réalisation d’une infrastructure de transport

amendement CD1

 

« Art. L. 2123-9. – I. – Le dossier d’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique d’un nouvel ouvrage d’infrastructures de transport expose les principes relatifs aux modalités de rétablissement de voies interrompues ainsi qu’aux obligations futures concernant les ouvrages d’art de rétablissement incombant à chaque partie.

« Art. L. 2123-9. – I. – Le dossier d’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique d’une nouvelle infrastructure de transport expose les principes relatifs aux modalités de rétablissement des voies interrompues ou affectées ainsi qu’aux obligations futures concernant les ouvrages d’art de rétablissement incombant à chaque partie.

amendements CD2, CD9 et CD3

 

« Les caractéristiques des ouvrages de rétablissement des voies tiennent compte, dans le respect des règles de l’art, des besoins du trafic supporté par la voie rétablie définis par les gestionnaires de ces voies et des modalités de la gestion ultérieure.

« Les caractéristiques des ouvrages de rétablissement des voies tiennent compte, dans le respect des règles de l’art, des besoins du trafic supporté par la voie affectée, définis par les gestionnaires de ces voies, et des modalités de la gestion ultérieure.

amendement CD4

 

« II. – Lorsque, du fait de la réalisation du nouvel ouvrage d’infrastructures de transport, la continuité d’une voie de communication existante est rétablie par un ouvrage dénivelé, la superposition des ouvrages publics qui en résulte fait l’objet d’une convention entre le gestionnaire de l’infrastructure de transport nouvelle et le propriétaire de la voie rétablie.

« II. – Lorsque, du fait de la réalisation d’une nouvelle infrastructure de transport, la continuité d’une voie de communication existante est assurée par un ouvrage dénivelé, la superposition des ouvrages publics qui en résulte fait l’objet d’une convention entre le gestionnaire de l’infrastructure de transport nouvelle et le propriétaire de la voie existante.

amendements CD5, CD6 et CD7

 

« La convention répartit les charges de surveillance, d’entretien, de réparation et de renouvellement selon le principe suivant :

(Alinéa sans modification)

 

« 1° Au gestionnaire de la nouvelle infrastructure de transport, la responsabilité de la structure de l’ouvrage, y compris l’étanchéité;

(Alinéa sans modification)

 

« 2° Au propriétaire de la voie rétablie, la responsabilité de la chaussée et des trottoirs.

(Alinéa sans modification)

 

« Elle décrit les conditions prévisionnelles de cet entretien et contient une évaluation des dépenses prévisibles correspondantes. Enfin, elle fixe les modalités de remise de l’ouvrage et de l’ouverture de la voie à la circulation.

« Elle décrit les conditions prévisionnelles de l’entretien et comprend une évaluation des dépenses prévisibles correspondantes. Elle fixe les modalités de remise de l’ouvrage et de l’ouverture de la voie à la circulation.

amendements CD10, CD11 et CD12

 

« III. – Ces dispositions s’appliquent aux ouvrages d’infrastructures de transports nouvelles dont l’enquête publique est ouverte postérieurement au premier jour du sixième mois suivant la promulgation de la loi n° du visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies.

« III. – Les I et II s’appliquent aux infrastructures de transport nouvelles dont l’enquête publique est ouverte postérieurement au premier jour du sixième mois suivant la promulgation de la loi n°       du        visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies.

amendements CD13 et CD8

 

« IV. – Un décret précise les modalités d’application du présent article.

(Alinéa sans modification)

 

« Art. L. 2123-10. – En cas d’échec de la négociation relative à la signature de la convention prévue au II de l’article L. 2123-9, la partie la plus diligente peut saisir le juge compétent.

(Alinéa sans modification)

 

« Art. L. 2123-11. – I. – Les dispositions des conventions conclues antérieurement à la promulgation de la loi n° du visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies prévoyant les modalités de gestion d’un ouvrage de rétablissement de voies continuent à s’appliquer, sauf en cas de dénonciation de la convention par l’une des parties.

(Alinéa sans modification)

 

« En cas de dénonciation de la convention, une nouvelle convention est conclue conformément aux principes énoncés à l’article L. 2123-9, dans un délai de trois ans à compter de la saisine du juge.

« En cas de dénonciation de la convention, une nouvelle convention est conclue en application du II de l’article L. 2123-9, dans un délai de trois ans.

amendements CD14 et CD15

 

« II. – En l’absence de convention et en cas de litige concernant la prise en charge des dépenses ayant pour origine la situation de superposition domaniale résultant du rétablissement de la voie de communication, les deux parties signent une convention dans un délai de trois ans à compter de la saisine du juge, en respectant les principes énoncés au II de l’article L. 2123-9. »

« II. – En l’absence de convention et en cas de litige concernant la prise en charge des dépenses ayant pour origine la situation de superposition domaniale résultant du rétablissement de la voie de communication, les deux parties signent une convention dans un délai de trois ans en application du II de l’article L. 2123-9. »

amendement CD16

 

Article 2

Article 2

 

Les charges résultant, pour l’État, de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

(Sans modification)

 

Article 3

Article 3

 

(Supprimé)

(Suppression maintenue)

     

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Les amendements déposés en Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sont consultables sur le site internet de l’Assemblée nationale. (2)

© Assemblée nationale

1 () Le cahier des charges de concession prévoit ainsi que le concessionnaire assure la surveillance et la maintenance de la structure des ouvrages de rétablissement portant une voie gérée par une collectivité, celle-ci ayant la responsabilité de la maintenance de la chaussée, du revêtement des ponts, des garde-corps et autres accessoires. Une convention permet d’expliciter les modalités de gestion et les responsabilités de chacun.

2 () http://www2.assemblee-nationale.fr/recherche/amendements#listeResultats=tru&idDossierLegislatif=27672&idExamen=&numAmend=&idAuteur=&idArticle=&idAlinea=&sort=&dateDebut=&dateFin=&periodeParlementaire=&texteRecherche=&zoneRecherche=tout&nbres=10&format=html&regleTri=ordre_texte&ordreTri=croissant&start=1