N° 3127 - Avis de M. Dominique Lefebvre sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 (n°3106)



INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE : L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL 9

I. L’ANALYSE DES RECETTES ET DE L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL 9

A. UN RÉTABLISSEMENT DES COMPTES DES RÉGIMES OBLIGATOIRES EN BONNE VOIE 9

1. La trajectoire financière de la sécurité sociale sur longue période 9

2. L’équilibre financier récent des régimes obligatoires de base 10

3. La situation financière du régime général et des autres régimes 11

a. La situation financière du régime général 11

b. Le solde des autres régimes de base 14

c. Les comptes des organismes concourant au financement des régimes 14

B. LA GESTION DE LA DETTE SOCIALE, UN SUJET CRUCIAL 15

1. Le solde des comptes de l’ACOSS et sa structure de financement 16

a. La gestion de la trésorerie 16

b. Les charges financières de l’ACOSS 17

c. Le rôle de recouvrement de l’ACOSS 18

2. Les conditions actuelles d’amortissement de la dette sociale 19

a. La mission et la durée de vie de la CADES 19

b. L’évolution de l’amortissement de la dette sociale par la CADES 20

c. Les conditions financières actuelles de l’amortissement 23

II. UN EFFORT SUBSTANTIEL SUR LA MAÎTRISE DES DÉPENSES SOCIALES 23

A. UNE DYNAMIQUE GÉNÉRALE DE RÉDUCTION DES DÉPENSES ENCOURAGEANTE MAIS CONTRASTÉE 23

1. La progression des dépenses sociales depuis les années 1980 a conduit à l’accumulation d’une dette considérable 24

2. La baisse des dépenses sociales est partie intégrante d’un vaste plan d’économies décidé par l’actuelle majorité 24

B. LE DÉSÉQUILIBRE DE LA BRANCHE MALADIE PERSISTE MALGRÉ DES EFFORTS DE RATIONALISATION ET UN ONDAM RESPECTÉ EN 2015 27

1. Les dépenses de la branche maladie progresseraient de 3,4 % malgré un ONDAM exécuté à + 2,05 % 27

2. La difficile maîtrise de la dépense de soins de ville 32

3. Les dépenses hospitalières 33

C. LE RALENTISSEMENT PROGRESSIF DES DÉPENSES DE LA BRANCHE VIEILLESSE 36

1. Depuis les années 1990, les réformes ont pour effet de retarder l’âge moyen de départ à la retraite 36

a. Les réformes de 1993 et 2003 37

b. La réforme de 2010 visait un retour à l’équilibre en 2018 38

c. Les mesures prises depuis 2012 40

2. Le ralentissement de la croissance des charges de la branche retraite en 2014 et 2015 43

a. La baisse continue du nombre de départs en retraite 45

b. La moindre revalorisation des pensions dans un contexte de faible inflation 45

3. L’accroissement des charges du FSV est porté par les prises en charge de cotisations au titre de périodes validées gratuitement 46

D. LA DYNAMIQUE DES CHARGES DE LA BRANCHE FAMILLE INFLÉCHIE PAR LA RÉFORME DE LA POLITIQUE FAMILIALE ET LA FAIBLE INFLATION 48

1. Les mesures d’économies prises depuis 2012 ont contribué à la réduction du déficit d’un milliard d’euros en 2015 48

a. Une action sur les modalités de revalorisation 49

b. Les conditions de versement des aides ont été modifiées 49

2. Le ralentissement de l’inflation a entraîné de moindres revalorisations de prestations 50

DEUXIÈME PARTIE : LES PRINCIPALES MESURES DU PLFSS POUR 2016, UNE TRAJECTOIRE DE RETOUR À L’ÉQUILIBRE PÉRENNISÉE 53

I. LES PRINCIPALES MESURES PRÉSENTÉES EN PARTIE RECETTES – LE TRANSFERT ANTICIPÉ DE DETTE À LA CADES 53

A. LES MESURES EN RECETTES DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2016 53

1. Les prévisions de trajectoire financière associées au présent projet de loi 53

a. Les prévisions macroéconomiques 53

b. La réduction dynamique du déficit de la sécurité sociale en 2016 54

2. La poursuite du pacte de responsabilité et de solidarité 56

a. La mise en place du dispositif « zéro charges URSSAF » au niveau du SMIC 56

b. L’extension de l’allégement de cotisation patronale de la branche famille 61

c. La confirmation de la suppression progressive de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés 62

3. Les autres mesures de recettes du projet de loi 64

a. Un objectif légitime de rationalisation de la dépense publique 64

b. La mise en œuvre d’une démarche de simplification du recouvrement des cotisations 69

B. LA RÉPARTITION DES RESSOURCES FINANCIÈRES 72

1. Les relations financières entre l’État et la sécurité sociale 72

a. Les mesures à compenser, résultent essentiellement du pacte de responsabilité et de solidarité 72

b. La compensation opérée de la façon suivante 73

2. Une tentative poursuivie de simplification des relations financières entre les branches de la sécurité sociale 74

a. La mise en conformité avec l’arrêt Ruyter de la CJUE 74

b. La résorption des déséquilibres internes aux branches de la sécurité sociale 79

C. LE TRANSFERT DE DETTE PRÉVU PAR LE PRÉSENT PROJET DE LOI, UNE OPTIMISATION DU FINANCEMENT DE LA DETTE SOCIALE 82

1. Une démarche volontariste de la part du Gouvernement 82

2. Un traitement de la dette sociale non encore achevé 83

II. LE PLFSS POUR 2016 : AMÉLIORER L’ÉQUILIBRE DES COMPTES TOUT EN GARANTISSANT LA QUALITÉ DU SYSTÈME DE PROTECTION SOCIALE 84

A. REDRESSER LA BRANCHE MALADIE EST UN IMPÉRATIF 86

1. Un ONDAM historiquement faible fixé à 1,75 % pour 2016 86

2. La question de l’efficacité pour les années à venir des mesures de régulation de la dépense doit être posée dès aujourd’hui 89

3. Les mesures du présent PLFSS dans le champ de la branche maladie 92

B. LES MESURES D’ÉCONOMIE DÉCIDÉES PERMETTRAIENT UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE DE LA BRANCHE VIEILLESSE CONSOLIDÉ EN 2016 94

1. Après plus d’une décennie de déficits, la branche retraite serait en excédent de 0,9 milliard d’euros en 2016. 94

2. Construire un équilibre sur le long terme pour notre système de retraites 95

3. Le déficit structurel du FSV reste problématique 97

C. LA BRANCHE ATMP CONFIRME SA BONNE SANTÉ FINANCIÈRE 98

1. L’évolution des charges de la branche ATMP 98

2. Les mesures du PLFSS pour 2016 dans le champ de la branche ATMP 99

D. LA BRANCHE FAMILLE DEVRAIT ATTEINDRE L’EQUILIBRE EN 2018 99

1. La trajectoire pluriannuelle de la branche famille favorisée par la budgétisation des aides au logement. 99

2. Les mesures du présent PLFSS dans le champ de la branche famille 101

E. LES MESURES DU PLFSS POUR 2016 COMMUNES À L’ENSEMBLE DES BRANCHES 103

1. La réforme des modalités de revalorisation annuelle des prestations sociales 103

a. L’harmonisation des dates de revalorisation des prestations 103

b. La simplification du mode de calcul du taux de revalorisation 104

2. Le renforcement des moyens de lutte contre la fraude 105

EXAMEN EN COMMISSION 107

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 109

INTRODUCTION

« La fraternité n’est qu’une idée humaine, la solidarité est une idée universelle. »

Victor Hugo, « Proses philosophiques, L’Âme », 1865

La solidarité universelle qu’évoquait Victor Hugo transparaît dans l’organisation même de notre système de protection sociale, et doit être préservée et pérennisée pour les générations à venir.

La majorité actuelle s’est donc attachée à redresser les comptes de nos régimes de sécurité sociale afin d’offrir des perspectives d’avenir sereines pour notre organisation sociale.

La trajectoire financière de la sécurité sociale est de longue date dégradée. En 2011, sous l’ancienne majorité, le déficit du régime général s’est élevé à plus de 17 milliards d’euros. Depuis lors, il n’a cessé de se réduire, pour atteindre 9,7 milliards d’euros en 2014 et 9 milliards d’euros (en prévision) en 2015. Ces résultats sont nettement plus satisfaisants que ceux initialement prévus en loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. Cette dynamique positive devrait se poursuivre en 2016, où le régime général réduirait son déficit de 3 milliards d’euros, pour atteindre son plus bas niveau depuis 2003.

Le chemin ainsi parcouru résulte d’un effort considérable sur les dépenses sociales, aussi bien que d’une progression soutenue des recettes. En ce qui concerne la branche vieillesse, son retour à l’équilibre est acté dès 2016. En recettes, les décrets de juillet 2012 et décembre 2013 ont permis de relever progressivement les taux de cotisations vieillesse, ce qui a représenté en 2014 une augmentation de 2 milliards d’euros des recettes de la branche vieillesse. En dépenses, la montée en charge des mesures décidées en 2010 et 2014 a entrainé et continuera d’entraîner une hausse de l’âge moyen de départ à la retraite, en jouant tant sur l’âge légal de départ que sur l’augmentation de la durée de cotisation requise.

En ce qui concerne la branche famille, le déficit se réduit également pour atteindre 1,6 milliards d’euros en 2015. Là encore, le retour à l’équilibre est proche. Cette situation est le résultat de la réforme de la politique familiale décidée par l’actuelle majorité. En particulier, la modulation des allocations familiales permettra d’améliorer les comptes de la branche de près de 800 millions d’euros en année pleine. Par ailleurs, le rendement lié à la diminution de l’avantage fiscal lié au quotient familial, environ 1 milliard d’euros, est entièrement affecté à la branche famille.

La branche des accidents du travail et des maladies professionnelles, à l’équilibre depuis trois ans, confirme sa bonne santé financière.

La branche maladie représente toujours un enjeu essentiel pour le rétablissement des comptes. En 2015, elle présenterait un déficit de 7,2 milliards d’euros, en augmentation de 0,9 milliard d’euros par rapport à 2014.

Les déterminants des dépenses de santé sont connus : l’accroissement de la demande, d’une part (vieillissement, démographie), l’amélioration de l’offre, d’autre part (progrès technique, démographie médicale). Malgré ces facteurs d’aggravation tendancielle de la dépense, le rapporteur pour avis tient à souligner que l’exécution prévisionnelle de l’ONDAM 2015 serait de seulement 2 %, son niveau le plus bas depuis 1998.

Le Fonds de solidarité vieillesse présente quant à lui une situation plus contrastée du fait de la structure même de ses dépenses, étroitement liées à la conjoncture économique. Son déficit se stabiliserait entre 2015 et 2017 aux alentours de 3,7 milliards d’euros.

Cette amélioration des comptes s’accompagne d’une démarche volontariste du Gouvernement dans le traitement de la dette sociale. Ainsi, le présent PLFSS prévoit le transfert à la CADES de 23,6 milliards d’euros. Cette somme représente le reliquat des 62 milliards d’euros de dette qui restaient à transférer à l’horizon 2017 selon la LFSS pour 2011.

Une telle mesure est particulièrement opportune : elle permet de se prémunir contre une remontée des taux d’intérêt à moyen terme. Cette solution préserve par ailleurs une reprise de la croissance économique, dans la mesure où elle ne pèsera pas sur le niveau des prélèvements obligatoires. Enfin, la question du traitement des déficits futurs des organismes de sécurité sociale devra impérativement être traitée.

Le rapporteur pour avis soutient cette politique courageuse, à la fois garante de la qualité de notre système de soins et attentive à sa soutenabilité financière. Néanmoins, seul un retour à l’équilibre, tel que prévu par le Gouvernement à l’horizon 2019, permettra sur le long terme, d’assurer la pérennité de notre système de protection sociale.

PREMIÈRE PARTIE : L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL

La trajectoire financière de la sécurité sociale est de longue date dégradée. Depuis 1990, le solde consolidé du régime général n’a été positif que trois années, de 1999 à 2001. La dynamique des dépenses n’a en effet pas été compensée par une évolution équivalente des recettes. Dès lors, les régimes de sécurité sociale font face à un problème de financement structurel depuis le début des années 1990, comme l’illustre le graphique suivant.

Source : commission des finances ; données : CNAMTS.

Le déficit du régime général s’est aggravé à partir de 2003, celui-ci n’ayant plus jamais été inférieur à 5 milliards d’euros par an et dépassant régulièrement 10 milliards d’euros. Les déséquilibres financiers de la branche maladie et de la branche vieillesse sont les principales causes de ce déficit chronique et persistant.

Ce solde déficitaire récurrent entraîne l’accumulation d’une dette sociale considérable, qui est d’autant plus illégitime qu’elle fait peser sur les générations futures les charges de protection sociale des générations actuelles et passées. La dette, dont le transfert à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) est déjà prévu, s’élève à 269,8 milliards d’euros, soit 13 % du produit intérieur brut de la France.

 

2012

2013

2014

2015 (p)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

178,8

184,7

– 5,9

182,2

189,1

– 6,9

186,7

193,2

– 6,5

190,5

198,0

– 7,5

Vieillesse

203,4

209,5

– 6,1

212,2

215,8

– 3,6

219,1

219,9

– 0,8

223,5

223,8

– 0,2

Famille

54,1

56,6

– 2,5

54,9

58,2

– 3,3

56,3

59

– 2,7

52,8

54,4

– 1,6

Accidents du travail

13,1

13,7

– 0,6

13,5

12,8

0,7

13,8

13,1

0,7

13,9

13,2

0,6

Total

436,3

451,4

– 15,1

449,8

462,9

– 13,1

462,8

472,1

– 9,3

467,3

475,9

– 8,6

FSV

14,7

18,9

– 4,1

16,8

19,7

– 2,9

17,2

20,6

– 3,5

16,5

20,3

– 3,8

Source : PLFSS 2015 et PLFSS 2016.

(p) : prévisions

L’équilibre financier des régimes obligatoires de base de sécurité sociale poursuit son rétablissement de manière dynamique.

L’exécution 2014 des régimes obligatoires de base a été meilleure que les prévisions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. Le déficit anticipé s’établissait à 11,7 milliards d’euros, dont 461,2 milliards d’euros de recettes et 472,9 milliards d’euros de dépenses. Les recettes perçues ont été plus dynamiques que prévu – supérieures de 1,6 milliard d’euros – tandis que les dépenses constatées ont été sensiblement mieux maîtrisées – en baisse de 800 millions d’euros par rapport aux anticipations.

Cette dynamique positive permet de fixer un solde prévisionnel des régimes obligatoires de base pour 2015 plus favorable que les prévisions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. Le déficit anticipé pour l’année 2015 s’établissait à 10,1 milliards d’euros, dont 466,5 milliards d’euros de recettes et 476,6 milliards d’euros de dépenses. Le présent projet de loi de financement prévoit un déficit de 8,6 milliards d’euros pour l’année 2015, soit un niveau inférieur de 1,5 milliard d’euros.

En revanche, le FSV n’est pas engagé sur une trajectoire de réduction de son déficit. À l’inverse, ce dernier devrait s’aggraver de 900 millions d’euros entre les années 2013 et 2015.

L’évolution des principales ressources nettes (1) des différentes branches du régime général est présentée dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION DES RESSOURCES DES BRANCHES DU RÉGIME GÉNÉRAL

(en milliards d’euros)

   

2013

2014

2015 (p)

Maladie

Cotisations *

75,1

76,4

77,9

En pourcentage

49,3 %

49,1 %

48,7 %

Recettes fiscales **

77,1

79,1

82

En pourcentage

50,7 %

50,9 %

51,3 %

Total

152,2

155,5

159,9

Vieillesse

Cotisations

70,5

73,2

75,6

En pourcentage

85,1 %

85,3 %

83,9 %

Recettes fiscales

12,3

12,6

14,5

En pourcentage

14,9 %

14,7 %

16,1 %

Total

82,8

85,8

90,1

Famille

Cotisations

35,5

35,4

33,1

En pourcentage

66,1 %

63,9 %

63,8 %

Recettes fiscales

18,2

20

18,8

En pourcentage

33,9 %

36,1 %

36,2 %

Total

53,7

55,4

51,9

Accidents du travail

Cotisations

11,5

11,9

12,1

En pourcentage

99,1 %

99,2 %

99,2 %

Recettes fiscales

0,1

0,1

0,1

En pourcentage

0,9 %

0,8 %

0,8 %

Total

11,6

12

12,2

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

* Cotisations sociales nettes et cotisations prises en charge par l’État nettes.

** Recettes fiscales : CSG nette + impôts, taxes et autres contributions sociales.

On constate une progression relativement dynamique des recettes des branches maladie et vieillesse, avec une légère érosion pour les deux branches de la part des cotisations par rapport aux recettes fiscales sur la période. La branche accidents du travail bénéficie également d’une croissance de ses recettes, toujours composées quasi-exclusivement de cotisations. Enfin, la branche famille se distingue par une évolution irrégulière de ses recettes, en net recul en 2015. Cette décrue des recettes résulte d’une baisse de rendement des cotisations et des recettes fiscales, en raison notamment de la mise en place de l’allégement de cotisations patronales pour les salaires jusqu’à 1,6 SMIC.

Cette évolution des principales recettes nettes est à comparer avec la dynamique des dépenses de prestations nettes du régime général.

PROGRESSION DES PRESTATIONS NETTES DU RÉGIME GÉNÉRAL

(en milliards d’euros, évolution en %)

 

2012

2013

2014

2015 (p)

Maladie

150,1

2,7 %

154

2,4 %

158,3

2,8 %

162,6

2,7 %

Vieillesse

101,6

3,9 %

105,9

3,9 %

108,5

2,4 %

111

2,3 %

Famille

33,9

3 %

45,2

2,4 %

46,1

2 %

41,4

– 10,2 %

Accidents du travail

8,8

1 %

8,7

– 0,9 %

8,7

0,6 %

8,8

0,7 %

Régime général

294,4

3,2 %

302,8

2,9 %

310,1

2,4 %

316,6

2,1 %

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

La branche maladie connaît une progression régulière des prestations nettes servies, avec une accélération prévisionnelle en 2015. La branche vieillesse réduit de façon notable le rythme de progression de ses prestations sur la période 2012-2015. La branche famille connaît une baisse substantielle de ses prestations nettes servies en 2015, en raison du transfert au budget de l’État de l’allocation de logement familiale pour 4,75 milliards d’euros.

La réduction du déficit du régime général est sensible en 2014 avec une amélioration de 2,8 milliards d’euros par rapport à 2013 ; le niveau de déficit est en outre inférieur de 1,9 milliard d’euros aux prévisions contenues en loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. Cette réduction du déficit se poursuit en 2015 à un rythme plus élevé qu’initialement prévu en loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

ÉVOLUTION DES COMPTES DES BRANCHES
DU RÉGIME GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

(en milliards d’euros)

   

2012

2013

2014

2015 (p)

Maladie

Charges nettes

160,9

164,7

168,4

174,1

Produits nets

155

157,9

161,9

166,6

Solde

– 5,9

– 6,8

– 6,5

– 7,5

Vieillesse

Charges nettes

110,2

114,6

116,8

120,5

Produits nets

105,5

111,4

115,6

119,9

Solde

– 4,8

– 3,1

– 1,2

– 0,6

Famille

Charges nettes

56,3

57,8

59

54,4

Produits nets

53,8

54,6

56,3

52,8

Solde

– 2,5

– 3,2

– 2,7

– 1,6

Accidents du travail

et maladies professionnelles

Charges nettes

11,7

11,3

11,7

11,8

Produits nets

11,5

12

12,3

12,4

Solde

– 0,2

0,6

0,7

0,6

Total

Charges nettes

327,5

336,4

343,7

348,3

Produits nets

314,2

323,9

334,1

339,3

Solde

– 13,3

– 12,5

– 9,7

– 9

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

Les différentes branches du régime général, à l’exception de la branche maladie, bénéficient d’une trajectoire de réduction de leur déficit depuis 2012. La branche vieillesse est clairement engagée vers un retour imminent à l’équilibre financier. Le déficit de la branche a été divisé par huit entre 2012 et 2015. La branche famille connaît une réduction dynamique de son déficit sur la même période. La branche accidents du travail et maladies professionnelles est à un niveau stable en position excédentaire depuis 2013.

En revanche, le déficit de la branche maladie s’accroît de 2014 à 2015 en raison d’un accroissement des charges nettes supérieur au rythme d’augmentation des recettes nettes. Cette comparaison entre la dynamique des dépenses et l’évolution des recettes est primordiale pour comprendre la trajectoire financière des différentes branches du régime général.

DYNAMIQUE DES DÉPENSES DU RÉGIME GÉNÉRAL
PAR RAPPORT À LA DYNAMIQUE DES RECETTES

   

2012

2015

Évolution 2012/2015

Maladie

Charges nettes

160,9

174,1

8,2 %

Produits nets

155

166,6

7,5 %

Vieillesse

Charges nettes

110,2

120,5

9,3 %

Produits nets

105,5

119,9

13,6 %

Famille

Charges nettes

56,3

54,4

– 3,4 %

Produits nets

53,8

52,8

– 1,9 %

Accidents du travail et maladies professionnelles

Charges nettes

11,7

11,8

0,9 %

Produits nets

11,5

12,4

7,8 %

Total

Charges nettes

327,5

348,3

6,4 %

Produits nets

314,2

339,3

8 %

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

On constate une dynamique relativement similaire des produits et des charges de la branche maladie entre 2012 et 2015. La branche vieillesse bénéficie d’une croissance plus dynamique des recettes par rapport à ses charges sur la même période. La branche famille connaît un changement de périmètre important en matière de charges (budgétisation de la part de l’aide personnalisée au logement (APL) financée initialement par le Fonds national d’aide au logement à partir de 2015) ; parallèlement les produits de la branche n’ont pas été réduits de façon aussi substantielle. La branche accidents du travail et maladies professionnelles a une dynamique de ses dépenses très supérieure à ses recettes sur la période, pour des montants en jeu limités.

Au total, le régime général connaît une croissance plus dynamique de ses recettes – 8 % – que de ses charges – 6,4 %. Ce résultat explique la tendance à la réduction du déficit du régime général sur la période. Le rapporteur pour avis tient à souligner l’importance de raisonner en termes de solde global pour analyser la trajectoire financière des comptes de la sécurité sociale, en particulier du régime général. En effet, le circuit de financement des organismes de la sécurité sociale est caractérisé par une imbrication complexe et des évolutions fréquentes. Parallèlement, le champ des prestations sociales subit des modifications régulières de périmètre de prises en charge entre branches.

 

2012

2013

2014

2015 (p)

Autres régimes de base

– 1,8

– 0,6

0,4

0,4

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

Le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) a pour mission principale de prendre en charge les avantages d’assurance vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale (2). Le FSV prend notamment en charge les cotisations vieillesse – qui représentent 63 % de ses charges – au titre des périodes de chômage, de maladie, ou d’invalidité. Le FSV prend également en charge des prestations – représentant 35 % de ses charges – au titre du minimum vieillesse ou du versement de la prime exceptionnelle de 40 euros accordée aux retraités touchant une pension inférieure à 1 200 euros.

Les comptes du FSV traduisent logiquement l’évolution de la conjoncture économique, et notamment du taux de chômage. Ainsi, le FSV est en déficit permanent depuis 2009, situation qui n’a pas eu tendance à s’améliorer au cours de la période la plus récente.

ÉVOLUTION DES COMPTES DU FSV

(en milliards d’euros)

 

2012

2013

2014

2015 (p)

Charges nettes

18,9

19,7

20,6

20,3

Produits nets

14,7

16,8

17,2

16,5

Résultat

– 4,1

– 2,9

– 3,5

– 3,8

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

Le déficit du FSV s’aggrave de 2013 à 2015 principalement sous l’influence d’une conjoncture économique défavorable avec un taux de chômage élevé persistant. Néanmoins, le rapporteur pour avis relève une nouvelle fois la relative stabilité des charges nettes du FSV, ce qui est encourageant dans un contexte économique difficile. En revanche, les produits nets du FSV subissent une baisse de 700 millions d’euros entre 2014 et 2015, ce qui représente une évolution préoccupante. Il est indispensable d’engager les mesures de nature à garantir un niveau adéquat de ressources au FSV conforme au montant de ses charges.

Contrairement aux prévisions annexées au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) bénéficie d’un résultat excédentaire de 25,4 millions d’euros en 2014. Ce résultat positif résulte notamment de recettes de CSG et de contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA) supérieures de 47,9 millions d’euros aux prévisions. La CNSA enregistre également une sous-consommation de l’objectif global de dépenses de 78,5 millions d’euros.

ÉVOLUTION DES COMPTES DE LA CNSA

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015 (p)

Charges nettes

20 157,4

21 112,8

21 632,1

22 895

Produits nets

20 132,9

21 101,6

21 657,5

22 661,3

Résultat

– 24,5

– 11,3

25,4

– 233,7

Source : annexe 8 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

En revanche, le budget primitif pour 2015 prévoit une progression des charges de la CNSA de 4,4 %. Dans la perspective de l’adoption de la loi d’adaptation de la société au vieillissement, la CNSA a également programmé une augmentation de ses charges en particulier d’aide à l’investissement. Le résultat financier prévisionnel de la CNSA en 2015 est par conséquent fortement déficitaire. Le Gouvernement a par ailleurs prévu à l’article 15 du présent projet de loi une rationalisation du financement de la CNSA, visant notamment à supprimer l’affectation de CSG (voir infra). Le rapporteur pour avis souligne la nécessité de garantir des ressources pérennes à la CNSA afin de compenser l’augmentation de ses charges liées aux futures évolutions législatives.

Le Fonds de réserve pour les retraites (FRR) a pour mission de gérer les sommes qui lui sont affectées afin de constituer des réserves destinées à contribuer à la pérennité financière des régimes de retraite (3). Le FRR doit verser chaque année 2,1 milliards d’euros à la CADES de 2011 à 2024 afin de participer au financement des déficits, au titre des exercices 2011 à 2018, des organismes du régime de base de l’assurance vieillesse (4). La valeur des actifs du FRR est en légère progression : elle s’établit à 36,7 milliards d’euros au 10 juillet 2015, contre 36 milliards d’euros en juillet 2014. La performance financière annuelle reste satisfaisante, s’élèvant à 4,1 % depuis décembre 2014.

En raison d’un problème persistant de financement des régimes de la sécurité sociale, la France a accumulé une dette sociale considérable. Depuis 1990, le solde de trésorerie du régime général est déficitaire. En 1996, un mécanisme dédié – la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) – a été mis en place de manière provisoire visant à amortir cette dette. L’amortissement de la dette consiste concrètement à rembourser le capital de celle-ci afin d’en éteindre définitivement l’existence. Désormais, la gestion de la dette sociale est répartie entre l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), en charge de la gestion de la trésorerie des différentes branches du régime général, et la CADES, qui a pour mission d’apurer la dette.

L’ACOSS assure la gestion commune et centralisée de la trésorerie des différentes branches du régime général (5). Au 31 décembre 2015, le solde des comptes de l’ACOSS devrait être en déficit de 29,8 milliards d’euros, soit une aggravation de 2,3 milliards d’euros par rapport à l’année précédente. Ce déficit du solde de l’ACOSS tient compte de la reprise de dette par la CADES à hauteur de 10 milliards d’euros au titre de l’année 2015.

L’article 9 de la loi de financement pour 2011 (6) a prévu un transfert de dette à la CADES de 62 milliards d’euros au titre du déficit de la branche vieillesse et du FSV, pour les années 2011 à 2018, sous un plafond annuel de 10 milliards d’euros. La loi de financement pour 2014 (7) a élargi le périmètre des déficits repris par la CADES aux branches maladie et famille, tout en réduisant d’une année l’horizon de transfert de dette, désormais fixé à 2017.

En raison du déficit structurel du régime général, l’ACOSS est autorisée chaque année par le projet de loi de financement de la sécurité sociale à recourir à des ressources non permanentes afin de refinancer ce déficit. Ces plafonds d’autorisation de financement du régime général par des ressources non permanentes sont retracés dans le graphique suivant, tenant compte des reprises de dette régulières de la part de la CADES.

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

La gestion de la trésorerie commune du régime général consiste à garantir la continuité financière de celui-ci, c’est-à-dire le dénouement quotidien des opérations financières réalisées pour le compte des différentes branches. Le déséquilibre entre les encaissements et les tirages du régime général a nécessité la mise en place d’opérations liées à la couverture des besoins de financement.

Initialement, l’ACOSS finançait ses besoins de trésorerie uniquement grâce à des avances de trésorerie ou des prêts auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Depuis 2007, la structure de financement de l’ACOSS s’est diversifiée, elle est désormais habilitée à émettre directement sur les marchés financiers des billets de trésorerie et depuis 2010 un programme d’euro commercial paper (8).

Les charges financières de l’ACOSS se sont élevées à 44,2 millions d’euros en 2014, pour 24,8 milliards d’euros de financement mobilisé en moyenne sur l’année (9). Ce résultat financier se dégrade de 18,3 millions d’euros par rapport à 2013 en raison de la hausse des volumes d’emprunt contractés auprès de la Caisse des dépôts et consignations et de la hausse des taux moyens. Le taux moyen de financement de l’ACOSS ressort à 0,199 % pour l’année 2014 contre 0,137 % en 2013.

L’année 2015 est caractérisée par un contexte atypique des marchés financiers, avec des taux de référence négatifs. Ainsi, le taux EONIA (10) moyen devrait s’établir à – 0,1 % sur l’année 2015. Le résultat financier de l’ACOSS bénéficierait de cette conjoncture favorable de financement : il serait positif à 3,8 millions d’euros, pour des montants moyens empruntés de 28,2 milliards d’euros. En effet, les opérations de bons du Trésor et d’euro commercial paper ont généré des produits financiers permettant de compenser en intégralité les charges financières de l’année.

La structure du financement de l’ACOSS de janvier à juillet 2015 a fait une large place aux instruments de marché afin de bénéficier de l’environnement exceptionnellement bas des taux d’intérêt à court terme :

STRUCTURE DE FINANCEMENT DE L’ACCOS EN 2015

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

En vertu de l’article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale, l’ACOSS est chargée « de recouvrer directement des cotisations et contributions » sociales dues par les employeurs et les personnes exerçant les professions artisanales, industrielles et commerciales, au titre de leurs salariés, dans les cas prévus par la loi.

Dans le cadre de cette mission de recouvrement, l’ACOSS s’est engagée dans une démarche volontariste de dématérialisation de ses relations. Ainsi, le taux de dématérialisation des déclarations des cotisations et contributions sociales des employeurs du secteur privé atteint 95,2 % au 31 décembre 2014, dont 94,9 % pour les employeurs de moins de vingt salariés. Le taux de dématérialisation global – secteur privé et secteur public – s’élève à 97,4 % fin 2014.

Fin 2014, le taux de restes à recouvrer (ou taux d’impayés) global en métropole était de 1,96 % en baisse de 0,11 point par rapport à 2013 (11). Le coût de gestion des sommes encaissées par l’ACOSS est très faible, il s’élève à 0,28 % fin 2014 (12).

L’ACOSS poursuit cette logique de dématérialisation des relations avec les cotisants. La loi de 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives (13) a en effet prévu la mise en œuvre progressive de la déclaration sociale nominative (DSN) à partir de 2013. Cette déclaration a pour objet de regrouper la majorité des déclarations devant être effectuées par les employeurs auprès des organismes de protection sociale.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 (14) a renforcé les obligations de dématérialisation des entreprises, en les élargissant notamment à l’ensemble des cotisants, c’est-à-dire aux autoentrepreneurs et aux travailleurs indépendants.

Depuis le 1er avril 2015, les plus grandes entreprises doivent utiliser cette déclaration dématérialisée (15). La généralisation du dispositif de la DSN devrait intervenir le 1er janvier 2016. Cette DSN prendra la forme d’un fichier mensuel transmis automatiquement à partir du logiciel de paie de l’employeur.

Ce rôle de l’ACOSS et les résultats qu’elle obtient amènent le rapporteur pour avis à être confiant sur la transposition au niveau fiscal d’une démarche similaire. Celle-ci devra à terme permettre l’instauration du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, conformément aux engagements du Gouvernement.

Créée en 1996 (16), la CADES a pour mission d’apurer la dette des différents organismes de sécurité sociale, selon les transferts de dette prévus par voie législative. La CADES met en œuvre une véritable politique d’amortissement de la dette sociale, consistant à rembourser tant les intérêts que le capital.

À l’image de la croissance dynamique de la dette sociale, la durée de vie de la CADES ne cesse de s’allonger depuis sa création. Ainsi, l’ordonnance de 1996 avait initialement fixé la durée de vie de la caisse à treize ans et un mois, soit une extinction prévue en 2009. La loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 a prorogé l’existence de la caisse jusqu’en 2014. Dans un aveu de désespérance, le législateur a prévu en 2004 que la CADES serait pérennisée « jusqu’à l’extinction » de ses missions (17). Cette incertitude, érigée en principe, fonde les conditions d’une date d’extinction aléatoire, aujourd’hui estimée selon le président de la CADES, à 2024.

Néanmoins, la loi organique d’août 2005 (LOLFSS) a modifié l’ordonnance de 1996, prévoyant que tout transfert de dette à la CADES devait dorénavant s’accompagner du transfert des ressources permettant de ne pas accroître la durée d’amortissement de la dette sociale (18). Désormais, l’allongement de la durée d’amortissement de la dette sociale n’est envisageable qu’en vertu d’une modification de cette disposition qui revêt un caractère organique, confirmé par une décision du Conseil constitutionnel (19). Cette éventualité s’est réalisée à une reprise : la loi organique de 2010 a prévu que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 puisse prévoir, à titre dérogatoire, des transferts de dette conduisant à un accroissement de la durée d’amortissement de la dette sociale (20).

La CADES a amorti 96,7 milliards d’euros au 31 décembre 2014, pour 44,3 milliards d’euros d’intérêts payés. L’année 2014 a permis l’amortissement de 12,7 milliards d’euros : l’encours de la dette s’établit au 30 juin 2015 à 134,3 milliards d’euros par rapport aux 236,9 milliards d’euros de dette sociale repris depuis 1996. L’évolution de la dette amortie par la CADES est représentée par le graphique suivant :

ÉVOLUTION DE L’AMORTISSEMENT DE LA DETTE SOCIALE

Source : CADES.

La CADES peut amortir la dette sociale grâce à l’affectation de ressources, qui se sont progressivement diversifiées. Historiquement, la CADES bénéficiait d’une ressource unique, instaurée lors de sa mise en place : la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS). La CRDS est prélevée sur les revenus d’activité et de remplacement à un taux unique resté inchangé de 0,5 %.

En 2009, la CADES a bénéficié de l’attribution de 0,2 point de CSG (21). La loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a relevé la fraction de CSG affectée à la CADES à hauteur de 0,48 point et prévu l’affectation à la CADES de 1,3 point du prélèvement social sur les revenus de placement et du patrimoine et un versement annuel de 2,1 milliards d’euros du Fonds de réserve pour les retraites de 2011 à 2024 (22). L’évolution des ressources de la CADES et leur dynamique respective sont illustrées dans l’histogramme ci-après :

ÉVOLUTION DES RESSOURCES DE LA CADES

Source : CADES.

Pour l’année 2015, le montant des ressources estimées de la CADES s’élève à 16,4 milliards d’euros, qui se répartissent de la façon suivante :

RÉPARTITION DES RESSOURCES DE LA CADES

Source : CADES.

Le présent projet de loi prévoit en son article 15 une rationalisation des ressources de la CADES, en limitant le financement de la dette sociale à deux recettes, la CSG et la CRDS (voir infra).

Le rythme annuel d’évolution de la dépense publique depuis les années 1980 s’est élevé à 3 % en volume dans les années 1980 et de 2 % depuis le milieu des années 1990 et s’explique avant tout par la croissance des dépenses sociales. Cette évolution, non compensée par un accroissement équivalent des recettes, a donné naissance à une dette sociale préoccupante.

Ainsi, les dépenses des administrations de sécurité sociale (ASSO) représentaient, fin 2014, 575,3 milliards d’euros (12,4 milliards d’euros de plus qu’en 2013, en volume), soit 46,9 % des dépenses des administrations publiques et 27 % du produit intérieur brut (PIB). Or, si les dépenses de protection sociale constituent dans tous les pays de la zone euro le premier poste des dépenses publiques, la France se distingue en y consacrant 3,8 points de PIB de plus que ses partenaires (23) : ceci correspond à près de 80 % de l’écart à la moyenne européenne. Dès lors, l’augmentation continue des dépenses de prestations sociales (24) en France explique 66 % de l’accroissement total de la part des dépenses publiques dans le PIB depuis 1978.

Les causes de cette évolution résident en particulier dans le vieillissement démographique et l’accroissement du revenu par habitant. Les dépenses de santé sont ainsi passées de 4 % du PIB en 1960 à 11,7 % en 2013, tandis que la part des dépenses de retraites dans le PIB est passée de 10,3 % en 1980 à 13,9 % en 2013.

En raison de leur poids et de leur dynamisme, les dépenses d’assurance maladie et d’assurance vieillesse contribuent respectivement à hauteur de 45 % et 40 % en 2013 à la croissance des dépenses des régimes de base. Si les dépenses de la branche vieillesse sont actuellement les plus dynamiques, avec 3 % de croissance en 2013 contre 2,4 % pour la branche maladie, les réformes successives des régimes de retraites devraient contenir cette évolution en 2015 et 2016.

La dynamique d’inflexion de la dépense sociale telle que souhaitée par le Gouvernement est partie intégrante de la trajectoire plus générale de redressement des finances publiques. Depuis la loi de finances initiale pour 2014, l’effort repose en totalité sur la maîtrise de la dépense publique.

Le programme de stabilité pour les années 2015 à 2018, présenté à la commission des finances le 15 avril dernier, poursuit un objectif principal : le retour du déficit public sous le seuil de 3 % du produit intérieur brut (PIB) en 2017. Pour atteindre cet objectif, le déficit doit diminuer progressivement de 4 % en 2014 à 3,8 % en 2015 et 3,3 % en 2016.

L’amélioration attendue devra reposer sur la poursuite d’efforts importants de maîtrise de la dépense des administrations publiques. Cette trajectoire s’était d’ailleurs matérialisée par la présentation, dès le programme de stabilité d’avril 2014, d’un plan d’économies important de 50 milliards d’euros d’ici à 2017.

Justement, les dépenses de protection sociale sont celles sur lesquelles sera réalisé l’effort le plus important au cours de la période. Cet effort d’économies est d’autant plus nécessaire que la Cour des comptes, dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2015, souligne que le taux moins élevé de croissance des dépenses sociales entre 2014 (+ 2,2 %) et 2015 (+ 2 %) dépasse encore les taux de croissance du PIB et de la masse salariale (respectivement + 1,3 et + 1,5 %).

La loi financement de la sécurité sociale pour 2015 avait décliné les mesures d’économies à prendre pour parvenir à respecter l’objectif d’une moindre croissance des dépenses sociales de 9,6 milliards d’euros en 2015, dont 3,2 milliards d’euros au titre des seules dépenses d’assurance maladie et 6,4 milliards d’euros au titre des autres dépenses de protection sociale.

OBJECTIFS INITIAUX D’ÉCONOMIES À RÉALISER SUR LA CROISSANCE TENDANCIELLE
DE LA DÉPENSE POUR LA PÉRIODE 2015-2017

 

(en milliards d’euros)

Administration publique

2015

2015-2017

État et agences

7,7

19

Collectivités locales

3,7

11

Protection sociale

9,6

20

dont dépenses d’assurance maladie

3,2

10

dont autres dépenses de protection sociale

6,4

10

Total

21

50

Source : projet de loi de finances pour 2015.

   

En ce qui concerne le champ de la protection sociale, en moyenne près de 6,6 milliards d’euros d’économies par an, par rapport à l’évolution de la dépense tendancielle, seront donc nécessaires.

La révision à la baisse de l’inflation pour les années 2015 à 2017, en affaiblissant le tendanciel de la dépense, a cependant fortement amoindri les prévisions d’économies des administrations. Ainsi, certaines réformes prises en compte dans les économies pour 2015 auront un rendement plus faible que prévu : c’est le cas pour les mesures concernant les modalités de revalorisation des retraites de base et complémentaire.

En 2015, selon le projet de loi de finances pour 2016, les pertes de rendement qui ont résulté du ralentissement de l’inflation s’élèvent à 4,5 milliards d’euros.

En ce qui concerne plus spécifiquement les administrations de sécurité sociale, le montant d’économies supplémentaires à réaliser s’est élevé à un milliard d’euros. Pour 2015, les mesures ayant permis de réaliser ces économies supplémentaires ont été annoncées dans le cadre du programme de stabilité 2015-2018 :

– 0,425 milliard d’euros de moindres dépenses ont été décidées dans le champ de l’ONDAM ;

– 0,5 milliard d’euros ont reposé sur la diminution des dépenses au titre de la gestion et de l’action sociale des caisses de sécurité sociale.

Au total, le montant d’économies qui serait effectivement réalisé en 2016 sur le champ de la protection sociale s’élève à 6,4 milliards d’euros.

Pour 2016, la faible inflation aurait un impact à la baisse sur le volume total d’économie à réaliser de 1,5 milliard d’euros. Le Gouvernement prévoit 7,4 milliards d’euros d’économies sur le champ de la protection sociale.

La moindre progression de l’ONDAM, de + 2 % à + 1,75 %, fait partie de ce plan de maîtrise rigoureuse de la dépense pour l’année à venir, à hauteur de 3,4 milliards d’euros.

Au-delà de ces mesures nécessaires, le rapporteur pour avis se félicite du réel ralentissement de la dépense publique en général, et sociale en particulier. Le tableau suivant retrace cette évolution positive :

TAUX DE CROISSANCE DES DÉPENSES DU RÉGIME GÉNÉRAL
EN TERMES RÉELS (2012-2015)

(en milliards d’euros)

 

2012

2013

2014

2015 (p)

2015 à périmètre constant (p)

Taux de croissance en valeur

+ 2,9

+ 2,7

+ 2,2

+ 1,3

+ 2,0

Inflation (hors tabac)

+ 1,9

+ 0,7

+ 0,4

+ 0,1

+0,1

Taux de croissance en volume

+ 1,0

+ 2,0

+ 1,8

+ 1,2

+ 1,9

Source : Cour des comptes, LFSS 2015, programme de stabilité 2015-2018, note de conjoncture de l’INSEE de juin 2015.

Au total, selon la Cour des comptes (25), l’incidence positive sur les dépenses du régime général de la moindre hausse de l’ONDAM et de la baisse des prévisions d’inflation peut être estimée à – 1,5 milliard d’euros en 2016,
– 2,3 milliards d’euros en 2017 et – 3,1 milliards d’euros en 2018.

Le rapporteur pour avis tient à rappeler les principales mesures d’économies qui ont permis la moindre progression des dépenses sociales. Ainsi, la branche famille commence à bénéficier de la modulation des allocations familiales décidées dans la précédente loi de financement, tandis que la branche vieillesse voit ses dépenses freinées par la montée en charge progressive de la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites (26). L’ensemble des mesures de contrôle des dépenses de fonctionnement des caisses et de rationalisation des parcours de soins portent également leurs fruits.

Mesures d’économies

LFSS 2015

Soins de ville

Pertinence et bon usage des soins

1 155

2 295

Baisse des tarifs des professionnels libéraux

150

Actions de maîtrise des volumes et de la

structure de prescription des médicaments

400

Lutte contre les iatrogénies médicamenteuses

100

Maîtrise médicalisée hors médicament

375

Mise en œuvre des réévaluations de la HAS

130

Produits de santé et promotion des génériques

1 065

Baisse de prix des médicaments

550

Promotion et développement des génériques

435

Biosimilaires

30

Tarifs des dispositifs médicaux

50

Lutte contre la fraude

75

Établissements de santé

Virage ambulatoire et adéquation de la prise

en charge en établissement

210

650

Développement de la chirurgie ambulatoire

100

Réduction des inadéquations hospitalières

110

Efficacité de la dépense hospitalière

440

Optimisation des dépenses des établissements

55

Optimisation des achats et fonctions logistiques

350

Liste en sus

105

Tarification des plasmas thérapeutiques

10

ESMS

Rééquilibrage de la contribution de

l’ONDAM à l’OGD

160

160

Économies ONDAM 2015

3 105

Source : annexe 9 des projets de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 et pour 2015 et Cour des comptes.

L’effort réalisé sur l’évolution des taux d’accroissement de l’ONDAM depuis 2013 est réel, mais ils demeurent supérieurs à la progression du PIB, ce qui explique l’accumulation et la persistance d’un déficit important.

ÉVOLUTION DE L’ONDAM EXÉCUTÉ, DU PRODUIT INTÉRIEUR BRUT EN VALEUR
ET DE L’INFLATION DE 2010 À 2015

(en pourcentage)

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015 (p)

Taux de croissance de l’ONDAM exécuté

2,20

2,76

2,23

2,16

2,41

2,05

Taux d’évolution du PIB

en valeur

3,07

3,04

1,34

1,42

0,75

2

Taux de l’inflation

1,50

2,10

2,00

0,90

0,50

0,1

Part de l’ONDAM dans le PIB

8,10

8,08

8,15

8,20

8,34

8,38

Source : Cour des comptes.

À ce stade, il est par ailleurs intéressant de rappeler le champ des dépenses couvertes précisément par l’ONDAM, et qui figure au sein des annexes au PLFSS.

COMPOSITION DE L’ONDAM ET DES COMPTES DE BRANCHES POUR L’EXERCICE 2016

Objectif de la branche maladie, maternité, invalidité

Objectif de la branche AT-MP

et décès

   

Hors ONDAM

ONDAM

Hors ONDAM

A. Gestion technique

I. Prestations sociales

– part des prestations médico-sociales financée par la CNSA

– prestations en espèce = IJ maternité

– prestations invalidité décès

– prestations extra-légales (action sanitaire et sociale)

– actions de prévention hors FIR

– autres prestations

I. Prestations légales maladie maternité :

– prestations en nature maladie maternité (hors part des prestations médico-sociales financée par la CNSA, hors conventions internationales), minorées des remises conventionnelles pharmaceutiques et de la participation des assurances complémentaires à la rémunération du forfait médecin traitant

– prestations en espèce (hors IJ maternité)

– actions de prévention (INPES, FIR)

I. Prestations pour incapacité temporaire :

– prestations en nature

– prestations en espèce suite à AT

I. Prestations

– prestations pour incapacité permanente

Objectif de la branche maladie, maternité, invalidité

Objectif de la branche AT-MP

décès

   

II. Charges techniques

II. Charges techniques, dont :

– dotation ONDAM médico-social à la CNSA

– prise en charge de cotisations des professionnels libéraux et en centres de santé

– autres transferts (FIR pour les missions ex-FMESPP et ex-FIQCS, ABM, ATIH, FAC dont OGDPC…)

 

II. Charges techniques

– rentes AT

– dotations aux fonds amiante

III. Diverses charges

   

III. Diverses charges

IV. Dotations aux provisions sur les dépenses hors ONDAM

   

IV. Dotations aux provisions sur les dépenses hors ONDAM

V. Charges financières

   

V. Charges financières

B. Gestion courante

 

– aide à la télétransmission

   

Ce tableau démontre que le chevauchement des champs entre l’ONDAM, et les branches maladie et ATMP rend moins lisibles les taux d’évolution de la dépense prévus et constatés pour chaque ensemble. En effet, toutes les dépenses comptabilisées dans l’ONDAM ne sont pas des prestations comptabilisées dans les régimes. Le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale rappelle ainsi que les prises en charge des cotisations des médecins sont des transferts entre régimes, que certaines dotations sont suivies dans des comptes spécifiques, et que les remises conventionnelles sont des recettes en comptabilité générale alors qu’elles entrent dans les moindres dépenses pour le calcul de l’ONDAM. L’ONDAM offre donc une approche économique et non purement comptable des dépenses (27).

Les dépenses d’assurance maladie connaissent ainsi un double encadrement :

– un objectif de dépenses pour la branche maladie, maternité, invalidité et décès ;

– un objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM).

Le tableau suivant présente de façon détaillée l’exécution prévisionnelle pour 2015 de l’ONDAM et de ses composantes :

RÉALISATIONS PRÉVISIONNELLES DANS LE CHAMP DE L’ONDAM EN 2015

(en milliards d’euros)

 

Constat 2014 (1)

Base 2015 réactualisée

Objectifs 2015 arrêtés

Prévisions 2015 (2)

Taux d’évolution

(2/1) en %

Écart à l’objectif arrêté

ONDAM TOTAL

178,0

178,3

182,3

181,9

2,0

– 0,4

Soins de ville

80,9

81,2

83,0

82,9

2,1

– 0,4

Établissements de santé

74,8

75,0

76,8

76,5

2,0

– 0,3

Établissements et services médico-sociaux

17,5

17,5

17,9

17,8

1,7

– 0,1

Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées

8,5

8,5

8,7

8,7

1,9

0,0

Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées

9,0

9,0

9,2

9,1

1,4

– 0,1

Dépenses relatives au Fonds d’intervention régional

3,0

3,0

3,1

3,0

0,5

0,0

Autres prises en charge (28)

1,7

1,6

1,6

1,6

3,2

0,0

Source : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Or là encore, aucun dérapage en dépense ne peut être constaté. Ces prestations hors ONDAM ont représenté 15,8 milliards d’euros en 2014, et 16,2 milliards d’euros en 2015, soit une évolution de + 2,6 %. Les prestations d’invalidité ont toutefois connu une forte progression, à + 3,7 %, tandis que le financement des établissements médico-sociaux à la charge de la CNSA a bondi de + 16,5 % entre 2014 et 2015, passant de 900 millions d’euros à 1,05 milliard d’euros.

En outre, il a été signalé au rapporteur pour avis, lors des auditions menées dans le cadre des travaux préparatoires à l’examen du PLFSS pour 2016, que l’adossement financier de la branche maladie du régime social des indépendants (RSI) au régime général était neutre sur le solde globale de la CNAMTS du fait de l’affectation de ressources correspondantes.

En revanche, les dépenses de soins de ville permettent d’expliquer cette hausse de + 3,4 % des dépenses de santé.

Les soins de ville représentent une enveloppe considérable, qui englobe plus de la moitié des prestations de la branche maladie. En 2014, 81 milliards d’euros ont été consacrés aux dépenses de soins de ville. Cette année (29), ces dépenses devraient s’établir à 82,9 milliards d’euros, soit une hausse de 2,1 % pour l’ensemble des régimes obligatoires de base. En 2014, cette évolution avait été de + 2,9 %, du fait de l’introduction de nouveaux traitements coûteux contre l’hépatite C.

Les soins de ville regroupent plusieurs postes de dépenses, plus ou moins dynamiques. La Cour des comptes a ainsi rappelé que les dépenses liées à l’activité des infirmiers et des masseurs-kinésithérapeutes ont représenté 10,7 milliards d’euros en 2014 et augmentent de 5,7 % par an depuis 2000 en euros constants. Si cette progression est en partie liée au vieillissement de la population, elle tire surtout sa dynamique de la forte croissance démographique de ces professions, dont la répartition sur le territoire est très déséquilibrée.

Le tableau suivant permet de présenter les principaux déterminants de la dépense, pour l’année 2014 et sur le seul champ du régime général :

ÉVOLUTION DES PRESTATIONS DE SOINS DE VILLE

(en millions d’euros)

Régime général

2014

Évolution 2014/2013

Prévisions 2015/2014

Contribution à la croissance

Soins de ville

66 143

3,4 %

2,4 %

100,0 %

Honoraires libéraux

32 191

3,3 %

2,9 %

58,7 %

dont

Honoraires privés

17 538

2,9 %

2,1 %

23,0 %

généralistes

5 698

2,8 %

1,0 %

3,6 %

spécialistes

9 009

3,3 %

2,8 %

15,4 %

sages-femmes

194

11,9 %

10,8 %

1,3 %

dentistes

2 637

1,1 %

2,5 %

4,1 %

Honoraires paramédicaux

8 481

5,2 %

4,9 %

25,6 %

infirmiers

4 854

5,9 %

6,1 %

18,3 %

kinésithérapeutes

3 007

4,3 %

2,6 %

4,9 %

orthophonistes

559

4,6 %

5,2 %

1,8 %

orthoptistes

62

5,3 %

4,7 %

0,2 %

Laboratoires

2 831

– 0,3 %

-0,2 %

-0,3 %

Transports de malades

3 341

3,6 %

3,1 %

6,4 %

Produits de santé

23 837

3,0 %

1,7 %

25,0 %

dont

       

Médicaments yc remises VHC

18 988,6

2,2 %

0,8 %

9,5 %

Médicaments de ville

17 077

– 0,8 %

– 0,7 %

– 7,4 %

Rétrocession yc remises VHC

1 912

38,8 %

14,3 %

16,9 %

Dispositifs médicaux

4 849

6,6 %

5,1 %

15,4 %

Indemnités journalières

9 172

4,6 %

2,8 %

15,6 %

Autres

943

3,5 %

3,9 %

2,3 %

Source : Calculs DSS/SDE/6B et CNAM/DSES/DSP, données CNAM (données brutes en dates de soins à fin mai 2015).

Note de lecture : les taux d’évolution sont calculés à champs constants.

Pour 2015, et si l’on ne considère que les dépenses du régime général, la croissance serait inférieure à celle ci-dessus rappelée, pour s’établir à 2,4 %.

Ce ralentissement serait obtenu grâce au rendement global des mesures d’économies prises en LFSS pour 2015, et du fait d’une moindre croissance en volume sur les médicaments, avec notamment la fin de la montée en charge des traitements contre l’hépatite C, mais aussi sur les dispositifs médicaux et les indemnités journalières. Par rapport à 2014, de moindres revalorisations tarifaires des honoraires médicaux et des transports joueraient également un rôle dans cette évolution positive.

Le rapporteur pour avis salue cet effort de longue haleine visant à maintenir l’augmentation des coûts dans des limites soutenables. Toutefois, il convient de rester très attentif à l’augmentation toujours préoccupante de certains postes de dépenses, notamment les dispositifs médicaux (30), les honoraires paramédicaux, le transport de malades et la rétrocession hospitalière (31).

Deux sous-objectifs de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) concourent à la détermination de l’enveloppe annuelle de dépenses des établissements de santé publics et privés à la charge de l’assurance maladie : le sous-objectif « Établissements de santé tarifés à l’activité » (32) et le sous-objectif « Autres dépenses relatives aux établissements de santé » (33). Pour 2015, 76,9 milliards d’euros avaient été prévus pour ces deux sous-objectifs. Les principaux facteurs de l’évolution tendancielle des charges des hôpitaux sont les dépenses liées à l’activité (plus de 62 % du total en 2012) et à la masse salariale (plus de 20 %).

Le premier des quatre axes qui avait été mis en avant afin de réaliser les 3,2 milliards d’euros d’économies nécessaires à la construction de l’ONDAM 2015 portait sur le renforcement de l’efficacité de la dépense hospitalière, fondé sur des mutualisations toujours plus importantes (0,5 milliard d’euros).

Le deuxième axe portait sur le virage ambulatoire, via l’accélération de la diffusion de la chirurgie ambulatoire, le développement de l’hospitalisation à domicile, l’amélioration de la prise en charge en sortie d’établissement et l’optimisation du parcours pour certaines pathologies ou populations. Ces efforts ont été chiffrés à 0,4 milliard d’euros.

Au total, 0,9 milliard d’euros d’économies ont reposé en 2015 sur la rationalisation de l’offre de soin hospitalière.

Outre ces mesures qui permettent l’amélioration de l’efficience de la prise en charge hospitalière, le rapporteur pour avis tient à souligner l’importance des mises en réserve et des gels de dotations qui permettent d’assurer in fine le respect de l’ONDAM. En effet, dans son avis du 26 mai 2015, le comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie (34) a constaté que des crédits de l’ONDAM hospitalier ont été mis en réserve à hauteur de 400 millions d’euros sous la forme de gel sur la dotation annuelle de financement, d’une réserve prudentielle sur les tarifs hospitaliers et de gel sur les crédits du Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP).

À ces gels s’ajoutent d’ailleurs ceux réalisés sur l’ONDAM médico-social (90 millions d’euros), sur le Fonds d’intervention régional (30 millions d’euros) et sur les autres dotations (25 millions d’euros), portant l’enveloppe totale des crédits gelés à 547.

À la suite de la révision de l’ONDAM par le programme de stabilité, 425 millions d’euros de crédits ont été annulés, notamment sur l’ONDAM hospitalier et l’ONDAM médico-social. Dans son dernier avis (35), le comité d’alerte a mis en exergue que si l’annulation de crédits hospitaliers peut effectivement permettre le respect de l’ONDAM, elle peut conduire parallèlement, et si elle ne s’accompagne pas de mesures structurelles de maîtrise de la dépense, à un accroissement du déficit des établissements, tout particulièrement si elle concerne le financement de projets déjà mis en œuvre.

À ce propos, le rapporteur pour avis souhaite attirer l’attention de la commission des finances sur les difficultés financières du secteur hospitalier français. En 2014, la Cour des comptes avait alerté les parlementaires sur l’ampleur de la dette des hôpitaux publics (36). La Cour avait souligné que la dette des établissements publics de santé (EPS) avait triplé en dix ans, pour atteindre 29,3 milliards d’euros à la fin 2012, soit 1,4 % du PIB. Corrélativement, le montant global des intérêts payés par les EPS est passé de 403 millions d’euros en 2003 à 928 millions d’euros en 2012. Cette évolution s’est d’ailleurs répercutée sur la dette publique notifiée à la Commission européenne, dont la dette hospitalière constitue l’une des composantes. Après plusieurs années de croissance à 15 %, le taux d’aggravation de la dette hospitalière a été ramené aux alentours de 6 % à partir de 2012. La situation semble être stabilisée, si l’on en croit les réponses aux questionnaires transmises par les services du ministère des Affaires sociales au rapporteur pour avis.

Selon ces informations, en 2014 (37) les EPS maintiendraient leurs comptes à l’équilibre, avec un déficit de global de 208 millions d’euros en 2014 (38). Mais les situations sont fortement contrastées en fonction des catégories d’établissements puisque ce résultat est la somme d’un déficit cumulé de 552 millions d’euros dégagé par près de la moitié des établissements et d’un excédent cumulé de 344 millions d’euros. Les établissements déficitaires seraient un peu plus nombreux qu’en 2013 mais les situations déficitaires les plus graves résorbées pour partie. Le déficit resterait concentré, la moitié du déficit cumulé étant imputable à une petite quarantaine d’établissements en 2014 comme 2013.

COMPTES DE RÉSULTATS CONSOLIDÉS DES EPS
DE 2008À2014 ET TAUX DE RÉSULTAT EN 2013 ET 2014 (
39)

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Taux de résultat 2013

Taux de résultat 2014

Centres hospitaliers régionaux (CHR)

–  347

– 341

– 250

– 251

11

– 65

– 97

– 0,2 %

– 0,3 %

AP - HP

11

– 75

– 103

– 72

– 21

– 7

– 10

– 0,1 %

– 0,1 %

Autres CHR

– 357

– 266

– 147

– 179

32

– 58

– 87

– 0,3 %

– 0,4 %

Centres hospitaliers (CH)

2

117

30

– 106

78

– 37

– 111

– 0,1 %

– 0,2 %

CH < 20 millions d’euros

21

17

8

2

6

4

– 5

0,3 %

– 0,4 %

CH 20-70 millions d’euros

– 29

7

– 60

– 105

– 14

– 43

– 56

– 0,5 %

– 0,7 %

CH > 70 millions d’euros

– 92

– 19

– 25

– 77

29

– 14

– 72

– 0,1 %

– 0,3 %

CH ex-CHS

38

35

34

32

20

– 4

3

– 0,1 %

0,0 %

CH ex-HL

65

77

73

41

37

19

19

0,5 %

0,5 %

Autres EPS (SIH, GCS)

7

10

11

8

– 58

5

0

1,3 %

0,0 %

Total des EPS

– 337

– 214

– 208

– 349

31

– 97

– 208

– 0,1 %

– 0,3 %

Source : DGFiP, calculs DGOS

CH ex-CHS : centre hospitalier dénommé avant centre hospitalier spécialisé (en psychiatrie) ; CH ex-HL : centre hospitalier anciennement dénommé hôpital local ; SIH : syndicat inter-hospitalier ; GCS : groupement de coopération sanitaire en M21.

Après avoir atteint des niveaux de l’ordre de 3 milliards d’euros en 2008 et 2009, au plus fort du cycle d’investissement hospitalier, l’endettement serait retombé à 0,9 milliard d’euros en 2013 et 0,1 milliard d’euros en 2014. L’encours de dette des hôpitaux se stabiliserait en 2014 à son niveau de 2012, soit environ 29,2 milliards d’euros.

En termes d’investissement, le ministère des Affaires sociales a indiqué attendre une stabilisation des dépenses au niveau de 2014, à savoir autour de 4,5 milliards d’euros. Si les hôpitaux parviennent à maintenir leur capacité d’autofinancement, l’endettement devrait donc être nul pour les années à venir. Le rapporteur pour avis salue cette stabilisation de la situation des hôpitaux publics, mais souligne que la question de la résorption de la dette accumulée reste devant nous.

Plusieurs leviers peuvent être utilisés afin d’améliorer le solde de la branche vieillesse :

– l’allongement de la durée de cotisation nécessaire à l’obtention d’une retraite à taux plein ;

– l’augmentation des taux de cotisations ;

– le recul de l’âge légal d’ouverture des droits à la retraite ou l’incitation au maintien dans l’activité ;

– une action sur le montant des pensions : désindexation, report de revalorisation des pensions ou modification des paramètres de calcul des droits, étant entendu que la baisse pure et simple du montant des pensions n’a jamais été envisagée en France.

Tous ces outils ont été exploités au cours des vingt dernières années, avec pour conséquence une moindre progression des charges et un retour progressif à l’équilibre de la branche vieillesse.

En revanche, l’augmentation régulière des droits pris en charge par le FSV a conduit à la création d’un déficit structurel pérenne qui reste problématique.

Selon la DREES, les mesures engagées par les réformes des retraites depuis 1993 sur l’âge de départ et la durée de cotisation ont pour effet, notamment, de reculer l’âge moyen de liquidation de 2,5 à 3 ans pour les générations 1960 à 1980 (40). Cette évolution résulte de plusieurs facteurs complexes qui interagissent entre eux : âge légal, durée de cotisation, règles sur le cumul emploi-retraite, mécanismes de décote ou de surcote, conditions de travail, etc.

Les projections financières de 2014 du Conseil d’orientation des retraites (COR) montrent que l’âge moyen actuel de départ à la retraite est de 61 ans et qu’il s’établira à 64 ans à partir de 2045.

ÉVOLUTION DE L’ÂGE MOYEN DE DÉPART À LA RETRAITE

Source : DREES, Études et résultats, avril 2015.

Les réformes de 1993 (41) et de 2003 (42) ont privilégié le levier de la hausse de la durée d’activité à travers l’allongement de la durée d’assurance requise pour bénéficier d’une retraite à taux plein et l’introduction de dispositifs de maintien en activité.

La réforme des retraites du régime général de 1993 a ainsi instauré une augmentation de 37,5 ans à 40 ans de la durée d’assurance requise pour obtenir une retraite à taux plein.

En 2003, cette durée est portée très progressivement à 41,5 annuités pour les générations nées à partir de 1955, avec une montée en charge étalée entre 2009 et 2015. Selon le rapport parlementaire de M. Bernard Accoyer, qui rapportait le texte pour la commission des affaires sociales, cette mesure devait permettre d’économiser en 2020 3,4 milliards d’euros.

D’autres mesures importantes sont venues compléter ces allongements de la durée d’assurance.

La réforme de 1993 a ainsi décidé que le salaire moyen de référence servant de base pour le calcul de la pension serait calculé progressivement sur les vingt-cinq meilleures années et non plus les dix meilleures. Ce texte a également confirmé l’indice de référence pour la revalorisation annuelle des pensions, effectuée en fonction de l’indice des prix à la consommation et non pas selon l’évolution générale des salaires. Ces dispositions ont eu pour effet le versement de pensions moins élevées pour l’ensemble des retraités présents entre 1994 et 2003. Pour les salariés, elles ont eu pour conséquence de faire baisser le taux de remplacement.

La réforme de 2003 a par ailleurs instauré un dispositif de surcote visant à inciter les assurés à travailler au-delà de la durée requise pour le taux plein, et elle a reporté l’âge à partir duquel un employeur peut mettre un salarié à la retraite d’office de 60 à 65 ans et limité les dispositifs de préretraite (43). La réforme instaure des mécanismes d’ajustement des paramètres de calcul des pensions aux évolutions démographiques en liant la durée d’assurance à l’espérance de vie à 60 ans. L’exposé des motifs de la loi du 21 août précise que l’objectif est « la stabilisation du ratio temps de travail / temps de retraite » au niveau de 2003.

La Cour des comptes a estimé dans son rapport de 2003 consacré à la sécurité sociale que l’effet de la réforme de 1993 sur les dépenses de retraites de l’ensemble du régime général, de l’ARRCO et de l’AGIRC, hors impact des réformes conduites après 1993 dans les régimes complémentaires obligatoires, peut être évalué sur la période 1993-2003 de – 0,9 % à – 1,1 % par an. Les deux tiers de cette évolution sont dus au maintien de l’indexation des retraites et des salaires portés au compte sur les prix.

À compter de 2005, la branche vieillesse a enregistré un déficit croissant qui s’est établi, sous l’effet de la crise, à plus de 8 milliards d’euros en 2009 et près de 11 milliards en 2010. Dans ce contexte de forte dégradation de l’environnement économique international et, corrélativement, de nos finances publiques et sociales, il est apparu nécessaire de procéder à de nouveaux ajustements afin de pérenniser le système français de retraites.

La loi du 9 novembre 2010 (44) a donc prévu le relèvement progressif de l’âge légal d’ouverture des droits à la retraite et de l’âge d’annulation de la décote. Ces deux bornes sont progressivement augmentées à deux ans entre les générations 1951 et 1956, passant de 60 à 62 ans et de 65 à 67 ans. La montée en charge du dispositif était prévue jusqu’en janvier 2018.

Selon les projections réalisées par la caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) à l’occasion des débats sur le texte, le relèvement de l’âge légal minorerait le nombre de retraités au régime général de 423 000 environ en 2015, de 900 000 en 2020, et de plus de 1 million à compter de 2030.

En outre, cette réforme a confirmé le principe posé en 2003 d’un allongement de la durée d’assurance requise pour l’obtention d’une retraite à taux plein en fonction des gains d’espérance de vie à soixante ans. Elle a chargé à ce titre le Conseil d’orientation des retraites (COR) de rendre chaque année un avis sur l’évolution de la durée d’assurance pour la génération atteignant 56 ans cette année-là. La durée est ensuite fixée par décret du Gouvernement (45).

Enfin, et pour mémoire, cette même année, le Gouvernement avait décidé de nombreuses mesures en recettes, essentiellement au bénéfice de l’État, les lois financières ayant procédé aux réaffectations nécessaires, afin que les régimes de retraite et le Fonds de solidarité vieillesse bénéficient de ces nouvelles ressources.

Même si la réforme de 2010 a eu un impact significatif sur le montant des dépenses de la branche vieillesse (46), en juin 2011 la Cour des comptes soulignait déjà que l’impact de la réforme des retraites de 2010 sur le solde de l’ensemble des régimes avait été surévalué (47). Notamment, la réforme avait prévu le basculement de cotisations versées à l’UNEDIC vers des cotisations de retraite de l’ordre de 400 millions d’euros en 2015, puis d’un milliard d’euros en 2018. En faisait le pari d’une baisse significative du chômage (7,7 % en 2015 et 5,7 % en 2020) et d’un excédent de l’assurance chômage.

Le Gouvernement donc a entrepris, dès 2012, de consolider la branche vieillesse du régime général en lui affectant une grande partie des mesures de recettes adoptées dans le cadre de la loi de finances rectificative du 16 août 2012 (48), et des lois financières pour 2013 (49). Le décret « carrières longues » du 2 juillet 2012 a quant à lui majoré les cotisations vieillesse (50). Ainsi, en 2013, les régimes de retraite de base et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) ont bénéficié d’un apport total d’environ 7 milliards de recettes supplémentaires.

RENDEMENT CUMULÉ DES HAUSSES DES COTISATIONS VIEILLESSE
PRÉVUES PAR LE DÉCRET DU 2 JUILLET 2012

(en milliards d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

CNAV

0,1

0,9

1,3

1,8

2,3

Autres régimes de base

0,1

0,3

0,5

0,6

0,7

Ensemble des régimes de base

0,2

1,2

1,8

2,4

3,0

Source : DSS/SD6/6A

         

Par ailleurs, une deuxième hausse des cotisations a été décidée à partir du 1er janvier 2014 pour un total de 0,3 point pour les salariés et de 0,3 point pour les employeurs sur la période 2014-2017 (51).

La LFSS pour 2012 a de surcroît prévu une accélération du rythme de recul de l’âge légal de départ en retraite pour que celui-ci atteigne 62 ans dès la génération 1955 (et non plus 1956), anticipant la fin de la montée en charge de la réforme de 2010 à 2017.

Enfin, la réforme de 2014 (52) a de nouveau allongé la durée d’assurance nécessaire à l’obtention d’une retraite à taux plein pour les générations partant en retraite à compter de 2020. Cette durée sera portée de 41,75 ans (167 trimestres) pour la génération née en 1958 à 43 ans (172 trimestres) pour les générations nées à partir de 1973. L’impact de cette mesure sur le solde de l’ensemble des régimes de retraite avait été estimé à 5,4 milliards d’euros en 2030 et à 10,4 milliards d’euros en 2040. Par ailleurs, un report du 1er avril au 1er octobre de la date de revalorisation des pensions avait été décidé, afin de générer, pour l’ensemble des régimes de retraite de base, une économie de 800 millions d’euros en 2014 et de 1,9 milliard d’euros en 2020.

IMPACT DES MESURES DE FINANCEMENT PRÉVUES PAR LA RÉFORME DE 2014
SUR L’ENSEMBLE DES RÉGIMES DE RETRAITE

(en milliards d’euros constants 2011)

 

2014

2020

2030

2040

TOTAL hausses de recettes ou baisses de dépenses

3,2

8

15,0

21,6

Report de six mois de la revalorisation des pensions

0,5

1,9

2,2

2,6

Fiscalisation des majorations de pensions (PLF 2014)

1,2

1,3

1,5

1,7

Hausse des cotisations salariales de 0,15 point en 2014 et de 0,05 point de 2015 à 2017

0,75

2,3

2,8

3,4

Hausse des cotisations employeurs de 0,15 point en 2014 et de 0,05 point de 2015 à 2017

0,75

2,3

2,8

3,4

Économies de gestion des caisses

 

0,2

0,3

0,3

Allongement de la durée d’assurance après 2020

 

0,0

5,4

10,4

Source : Étude d’impact du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.

La LFRSS pour 2014 (53) avait de nouveau choisi d’agir sur le montant des pensions versées, en gelant la revalorisation des droits qui devait intervenir le 1er octobre 2014. L’économie attendue, de l’ordre de 220 millions d’euros en 2014, en retenant une hypothèse d’inflation de 1,1 %, puis de 935 millions d’euros en 2015, a été annulée par le constat d’une inflation nulle, voire négative. Une prime exceptionnelle de 40 euros pour les personnes touchant moins de 1 200 euros par mois avait alors été décidée. Son versement en mars 2015, à la charge du FSV, a mobilisé quelques 240 millions d’euros.

ÉVOLUTION DES BORNES D’ÂGE ET DE LA DURÉE D’ASSURANCE REQUISE POUR UNE PENSION À TAUX PLEIN SELON LE DROIT EN VIGUEUR

Date de naissance

Âge d’ouverture
des droits

Durée d’assurance
pour le taux plein

Âge d’annulation
de la décote

Avant 1949

60 ans

160 trimestres

65 ans

1949

161 trimestres

1950

162 trimestres

Entre le 1er janvier
et le 30 juin 1951

163 trimestres

Entre le 1er juillet
et le 31 décembre 1951

60 ans et 4 mois

163 trimestres

65 ans et 4 mois

1952

60 ans et 9 mois

164 trimestres

65 ans et 9 mois

1953

61 ans et 2 mois

165 trimestres

66 ans et 2 mois

1954

61 ans et 7 mois

66 ans et 7 mois

1955

62 ans

166 trimestres

67 ans

1956

1957

1958

62 ans

167 trimestres

67 ans

1961

 

168 trimestres

 

1964

 

169 trimestres

 

1967

 

170 trimestres

 

1970

 

171 trimestres

 

À partir de 1973

62 ans

172 trimestres

67 ans

ÉVOLUTION DE LA DURÉE D’ASSURANCE REQUISE
POUR LE TAUX PLEIN PAR GÉNÉRATION

ttp://www.senat.fr/rap/a13-076/a13-07611.gif

L’ensemble de ces mesures, qui possèdent des horizons et des durées de montée en charge variés, permettent de prévoir un moindre accroissement des dépenses de la branche vieillesse et un retour à l’équilibre de la branche dès 2016.

 

2013

%

2014

%

2015 (p)

%

Prestations légales nettes

105 598

4,0

108 223

2,5

110 713

2,3

Prestations légales « vieillesse »

105 461

3,9

108 062

2,5

110 633

2,4

Droits propres

95 078

4,0

97 531

2,6

99 962

2,5

Avantages principaux hors majorations

89 378

4,1

91 747

2,7

94 075

2,5

Pensions normales

76 351

4,7

78 776

3,2

81 150

3,0

Âge légal ou plus

74 738

4,3

76 644

2,6

78 470

2,4

Retraite anticipée et départs dérogatoires

1 613

26,2

2 132

32,2

2 679

25,7

Retraite anticipée pour carrières longues

1 533

25,5

2 015

31,5

2 538

25,9

Départs dérogatoires pour pénibilité

27

17,0

39

44,7

44

14,5

Départs dérogatoires pour amante

53

++

79

47,2

97

23,0

Autres

0

-

0

-

1

-

Pension inaptitude

6 769

- 0,6

6 650

- 1,8

6 538

- 1,7

Pension invalidité

6 258

2,7

6 320

1,0

6 388

1,1

Minimum vieillesse

2 118

1,1

2 152

1,6

2 205

2,4

Majorations

3 583

2,7

3 632

1,4

3 682

1,4

Pour enfants

(maj. 10 % art. L.351.12 du CSS)

3 287

3,2

3 344

1,7

3 396

1,6

Pour conjoint à charge

39

- 10,4

35

- 10,0

32

- 8,6

Majorations pour tierce personne

254

- 0,9

250

- 1,8

249

- 0,3

Majoration assurés handicapés

3

33,0

3

31,8

4

32,4

Droits dérivés

10 368

2,8

10 546

1,7

10 670

1,2

Avantages principaux

9 586

3,0

9 760

1,8

9 877

1,2

Pensions de réversion

9 515

3,0

9 691

1,9

9 808

1,2

Pensions de veuf ou veuve
(hors majorations)

72

- 5,4

69

- 4,3

69

1,2

Minimum vieillesse

198

- 4,7

187

- 5,4

183

- 2,1

Majorations

583

2,7

599

2,7

610

1,8

Pour enfants

506

2,7

513

1,3

520

1,3

Majorations de pension de réversion pour retraités

77

3,2

86

11,6

90

5,0--

Divers

15

- 13,0

- 15

--

1

- 3,6

Prestations légales « veuvage »

56

19,9

59

6,4

57

 

Dotations nettes aux provisions et pertes

82

 

102

 

22

 

Source : DSS/SDEPF/6A - CNAV

Note de lecture : les prestations légales sont présentées nettes des admissions en non-valeur, dotations aux provisions pour rappel et reprises pour rappel ; les prestations du FSAVCF sont intégrées à la CNAV à partir de 2013.

En 2014, les départs en retraite au régime général ont été inférieurs de 4 % par rapport aux départs enregistrés en 2013. Le recul de l’âge légal issu de la réforme de 2010 a ainsi permis un report des départs en retraite très élevé, avec près de 158 000 départs reportés en 2014, après 146 000 en 2013.

Cette évolution bénéfique pour les comptes de la branche est quelque peu atténuée par l’accroissement du nombre de départ anticipés, qui représentent près d’un quart du flux de départs. Ces derniers ont augmenté de 8,4 % en 2014, et ont représenté 157 000 personnes (54). D’ailleurs, en faisant abstraction de ces départs, la chute du nombre de départ à la retraite atteint 7,4 % en 2014.

Selon le rapport à la CCSS, pour 2015, le nombre de ressortissants du régime général partant en retraite, y compris leur retraite anticipée, s’élèverait à 610 000, soit une réduction de 7,2 %. Cette baisse serait toujours étroitement liée à la montée en charge de la réforme de 2010. En revanche, la hausse des départs en retraite anticipée continuerait à s’accentuer. Le coût des pensions de retraités ayant bénéficié d’un départ anticipé représenterait ainsi 2,5 milliards d’euros de dépenses en 2015, ce qui représente une augmentation de 26 %.

Les pensions ont subi une augmentation de seulement 0,32 % en 2014, après 1,5 % en 2013, du fait du recul de l’inflation et du décalage de la date de revalorisation du 1er avril au 1er octobre intervenu en 2014. La faiblesse de l’inflation en 2014 (prévision de 0,5 % à l’automne 2014) et l’application d’un correctif négatif de 0,5 point correspondant à la surévaluation de l’inflation prévisionnelle retenue lors de la revalorisation du 1er avril 2013 ont conduit à une absence de revalorisation au 1er octobre 2014.

Compte tenu des prévisions d’inflation, les pensions de retraite devraient être revalorisées de 0,1 % au 1er octobre 2015, soit la prévision d’inflation pour 2015, telle que figurant dans le rapport social, économique et financier annexé au PLF 2016, car le gel initialement prévu lors de l’élaboration de la loi de financement rectificative pour la sécurité sociale d’août 2014 conduit à ne pas retenir de correctif entre l’inflation prévisionnelle de 2014 et l’inflation définitive constatée. En moyenne annuelle, la revalorisation des pensions serait de 0,03 % en 2015.

Depuis 1993, le financement des avantages vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale a vocation à être assuré par le FSV (55).

Les dépenses prises en charges par le FSV sont définies par l’article L.351-2 du code de la sécurité sociale. Régulièrement élargies, elles sont de quatre types :

– les allocations du minimum vieillesse (depuis 2006, le minimum vieillesse a été simplifié en une prestation unique : l’allocation de solidarité aux personnes âgées – ASPA) (56), et ce pour l’ensemble des régimes de base ;

– les majorations de pensions pour enfants et pour conjoint à charge, servies par le régime général (CNAV), le régime agricole (MSA) et le régime des indépendants (RSI) ;

– dans le cadre de la réforme des retraites de 2010, une partie du minimum contributif servi par la CNAV, la MSA et le régime des indépendants ;

– la prise en charge forfaitaire des cotisations de retraite, au titre de la validation gratuite de diverses périodes de la vie, à savoir :

• la validation gratuite des périodes de chômage, de service national, d’indemnités journalières et d’invalidité, pour le régime général et pour les salariés agricoles. À compter du 1er janvier 2001, ce financement a été étendu à certains avantages vieillesse servis par les régimes de retraites complémentaires obligatoires (ARRCO et AGIRC) ;

• ces missions ont de nouveau été élargies, à compter du 1er juillet 2010, à la prise en charge forfaitaire des validations gratuites de trimestres au titre des périodes d’arrêt de travail (maladie, maternité, accidents du travail, maladies professionnelles et invalidité) servies par la CNAV, la MSA et le RSI ;

• à compter du 1er janvier 2014, suite à la réforme des retraites de 2014, le FSV a pris en charge la validation gratuite, auprès des régimes de base de retraite, des trimestres correspondant à la durée des contrats d’apprentissage et de stages de formation professionnelle des chômeurs, ainsi que la validation complémentaire de droits à la retraite pour les apprentis et les stagiaires.

CHARGES DU FSV

(en millions d’euros bruts)

CHARGES

25 500

25 095

A - CHARGES DE GESTION TECHNIQUE

25 499

25 094

II - CHARGES TECHNIQUES

24 967

24 836

Transferts des régimes de base avec les fonds

24 675

24 511

Prises en charge de cotisations

12 960

12 707

Au titre du service national

28

29

Au titre du chômage

11 415

10 861

Au titre de la maladie

1 516

1 571

Au titre des apprentis

0

228

Au titre des stagiaires

0

18

Prises en charge de prestations

11 716

11 804

Au titre du minimum vieillesse (MV)

3 111

3 154

Au titre des majorations de pensions

4 704

4 749

Majoration pour enfants

4 660

4 708

Majoration pour conjoint à charge

44

41

Minimum contributif

3 900

3 900

Prime exceptionnelle de 40 euros

232

0

Transferts avec les régimes complémentaires

292

325

Au titre du chômage (FSV)

292

325

III - DIVERSES CHARGES TECHNIQUES

242

258

ANV, remises/annul/créances sur produits

95

103

Frais d’assiette et de recouvrement

91

98

Autres charges techniques (MV)

56

57

Source : Fonds de solidarité vieillesse.

   
     

Le tableau suivant, synthétise l’évolution financière des charges du FSV entre 2014 et 2015.

Les dépenses du fonds ont été portées par la dynamique des prises en charge de cotisations au titre des périodes de chômage et la prime exceptionnelle versée aux retraités modestes.

Les prises en charge de cotisations représentent en effet 63 % des charges du fonds en 2014 avec 12,9 milliards d’euros de cotisations financées, dont 11,4 milliards d’euros au seul titre du chômage.

L’augmentation des dépenses en 2014 liées à la prise en charge de cotisations (+ 5,7 %) est due à la hausse des effectifs de chômeurs et la hausse de la cotisation forfaitaire par chômeur (57).

Cette dernière prise en charge a elle-même variée dans le temps. En 1994 et 1995, elle reposait sur une assiette correspondant à 60 % du SMIC. Cette base a été portée à 90 % du SMIC à compter de 1996, quand, suite à la création de la CADES, le FSV a été déchargé du remboursement de la dette du régime général à l’État, soit 110 milliards de francs à fin 1993. La part des effectifs de chômeurs non indemnisés pris en charge par le FSV, fixée par arrêté, a été ensuite revue deux fois à la hausse au cours des premières années de fonctionnement du fonds : fixée à 23 % en 1994 et 1995, elle a été portée à 25,5 % de 1996 à 1998 puis à 29 % à compter de 1999.

Par ailleurs, un important décret du 7 octobre 2015 (58) a modifié la durée annuelle sur laquelle est calculée la cotisation d’un chômeur. À partir de 2015, cette cotisation sera calculée sur la base de 1 820 heures annuelles (35 heures hebdomadaires) contre 2 028 (39 heures hebdomadaires) antérieurement, soit une diminution de 10 % de la charge. La cotisation forfaitaire baisserait de 8,5 %, alors qu’elle aurait augmenté de 2 %. L’économie réalisée s’élève à 1,2 milliard d’euros par an, sur la base du nombre de chômeurs actuel.

Au contraire, et de façon moins intuitive, d’autres mesures peuvent venir augmenter les charges du FSV, comme le recul de l’âge de départ à la retraite ou l’augmentation des taux de cotisation, qui provoquent un renchérissement des dépenses du FSV au titre de la prise en charge des périodes validées gratuitement.

La branche famille est administrée par la Caisse nationale des Allocations familiale qui gère les prestations familiales et pilote le réseau des CAF (caisses d’allocations familiales). L’une des principales singularités de la branche famille est que la CNAF verse un volume très important de prestations pour le compte d’autres organismes, ces charges n’étant donc pas retracées in fine dans les comptes de la branche.

La CNAF gère en effet près de 75 milliards d’euros de prestations, dont seulement 50 milliards correspondent à des prestations sociales effectivement supportées par la branche famille. En 2015, les 25 milliards restants sont versés pour le compte des départements au titre du RSA socle (12 milliards d’euros) et de l’allocation aux adultes handicapés (8,5 milliards d’euros), et pour le compte de l’État au titre de la fraction d’aide personnalisée au logement destinée aux familles (4,7 milliards d’euros).

La LFSS pour 2012 a décalé du 1er janvier au 1er avril la date d’effet de la revalorisation de la base mensuelle des allocations familiales (BMAF), qui sert à déterminer le montant des prestations familiales. Celui-ci a ainsi été revalorisé de 1 %, au lieu de 2,3 % si les règles de droit commun avaient été appliquées. Ce texte comportait aussi une sous-indexation de la revalorisation pour 2012 des plafonds de ressources des prestations servies également fixée à 1 %, au lieu de 1,5 %.

Ces mesures ont engendré un montant total d’économies pour la CNAF estimé à plus de 520 millions d’euros.

Parallèlement, dans la LFI pour 2012 les aides personnelles au logement ont été revalorisées à hauteur de 1 % au lieu de 2,1 % au 1er janvier 2012, générant une moindre dépense de l’ordre de 120 millions d’euros pour 2012 et les années suivantes.

La LFSS pour 2014 a gelé les montants de l’allocation de base (AB) de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) et de la prime à la naissance à compter du 1er avril 2014. Ces prestations sont donc maintenues à leur niveau en vigueur au 1er avril 2013 jusqu’à leur alignement sur le montant du complément familial. L’économie occasionnée est estimée à 80 millions d’euros en 2015 et 150 en 2016.

Enfin, l’article 77 de la LFSS pour 2014 a reporté au 1er octobre de chaque année la date de revalorisation des paramètres de calcul de l’allocation de logement familiale, en miroir avec la LFI qui a prévu les mêmes dispositions pour l’allocation de logement sociale (ALS) et l’aide personnalisée au logement (APL). L’économie occasionnée est estimée à 137 millions d’euros en 2015 et les années suivantes.

La LFSS pour 2014 a procédé à plusieurs ajustements :

– il a été décidé de moduler le montant de l’allocation de base de la PAJE en fonction des ressources des familles. Appliquée aux enfants nés ou adoptés depuis le 1er avril 2014, cette mesure a un impact financier estimé à 130 millions d’euros en 2015 et 270 millions d’euros en 2016 et 2017 ;

– la LFSS pour 2014 a également supprimé le complément de libre choix d’activité (CLCA) majoré, pour une économie de 30 millions d’euros par an ;

Par ailleurs, la LFI pour 2014 a diminué le plafond de l’avantage fiscal lié au quotient familial : le rendement de cette mesure, d’environ 1 milliard d’euros pour 2014, a été affecté à la CNAF, via une quote-part de TVA nette, afin qu’elle bénéficie entièrement de l’économie ainsi réalisée.

Enfin, la LFSS pour 2015 a prévu la modulation du montant des allocations familiales (ainsi que de l’allocation forfaitaire et des majorations pour âge) en fonction des ressources des familles, entraînant une économie de l’ordre de 440 millions d’euros en 2015 et 880 millions d’euros en 2016 et les années suivantes.

Le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre le souligne : la faible inflation a grandement limité la progression des charges en 2014, et en 2015. En effet, après une revalorisation de la BMAF de 1,2 % en 2013, et 0,8 % en 2014, la composante « prix » de l’évolution de la masse des prestations se réduit encore en 2015, puisque la BMAF n’a pas été revalorisée au 1er avril.

Ainsi, l’allocation de soutien familial et le complément familial, dont les sur-revalorisations ont été prévues dans le cadre du plan pauvreté (59), seraient quasiment les seules prestations à tirer positivement la croissance de la masse financière des prestations familiales.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE PRESTATIONS FAMILIALES
ET D’AIDES AU LOGEMENT FINANCÉES PAR LA CNAF (2011-2015)

(en millions d’euros)

 

2011

2012

%

2013

%

2014

%

2015 (p)

%

Structure des presta-tions familiales 2015

Prestations d’entretien en faveur de la famille

16 839

17 460

3,7

17 860

2,3

18 282

2,4

18 247

– 0,2

57 %

Allocations familiales

12 432

12 652

1,8

12 965

2,5

13 162

1,5

12 890

– 2,1

40 %

Complément familial

1 650

1 653

0,2

1 678

1,5

1 774

5,7

1 898

7,0

6 %

Allocation de soutien familial

1 267

1 285

1,4

1 302

1,3

1 387

6,5

1 480

6,7

5 %

Allocation de rentrée scolaire (ARS)

1 490

1 870

25,6

1 916

2,4

1 960

2,3

1 978

0,9

6 %

Prestations d’accueil du jeune enfant

12 716

12 893

1,4

13 078

1,4

12 974

– 0,8

12 527

– 3,4

39 %

Prestations d’entretien (allocation de base + primes à la naissance)

4 952

4 955

0,0

4 982

0,6

4 926

– 1,1

4 524

– 8,2

14 %

Complément de mode de garde-assistante maternelle

5 217

5 416

3,8

5 579

3,0

5 561

– 0,3

5 622

1,1

17 %

dont cotisations prises en charge

2 903

3 007

3,6

3 138

4,3

3 120

– 0,6

3 214

3,0

10 %

dont rémunérations prises en charge

2 314

2 409

4,1

2 441

1,3

2 441

0,0

2 408

– 1,3

7 %

Complément de mode de garde - structures

303

293

– 3,3

288

–  1,7

273

– 5,2

269

– 1,4

1 %

dont cotisations prises en charge

176

170

– 3,5

169

–  0,5

158

– 6,3

157

– 0,7

0 %

dont rémunérations prises en charge

127

123

– 3,0

119

–  3,4

115

– 3,6

112

– 2,4

0 %

Complément de mode de garde - structures

126

166

31,5

202

22,1

251

24,0

299

19,4

1 %

Allocation versée pendant le congé parental (CICA…)

2 117

2 064

–  2,5

2 026

–  1,8

1 963

– 3,1

1 813

– 7,7

6 %

Autres prestations

1 217

1 291

6,0

1 319

2,2

1 377

4,4

1 405

2,1

4 %

AEEH

716

773

8,0

783

1,2

825

5,5

843

2,2

3 %

Allocation de présence parentale

57

61

6,7

64

5,3

68

5,6

69

2,1

0 %

Frais de tutelle

341

348

2,1

353

1,6

366

3,6

374

2,3

1 %

Autres

104

109

4,8

119

9,2

118

- 1,0

118

0,5

0 %

Total hors prestations extralégales et hors aides au logement

30 772

31 644

2,8

32 257

1,9

32 634

1,2

32 179

– 1,4

100 %

Total aides au logement financées par la CNAF

8 287

8 468

2,2

8 802

3,9

9 046

2,8

4 504

-

 

Total prestations familiales et de logement financées par la CNAF

39 059

40 112

2,7

41 059

2,4

41 679

1,5

36 683

– 12,0

 

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

 

CNAM Maladie

CNAM

AT-MP

CNAV

CNAF

Régime général

Masse salariale du secteur privé : impact d’une hausse de 1 point du taux de croissance

980

110

580

320

1 990

Source : direction de la sécurité sociale.

La prévision de croissance à 1 % du PIB de la France devrait être tenue pour l’année 2015. L’activité a connu une forte croissance au premier trimestre de l’année, suivie d’une atonie au deuxième trimestre en raison d’un ralentissement de la consommation des ménages et d’une baisse de l’investissement. Néanmoins, à la fin du premier semestre, l’acquis de croissance ressort à 0,9 %.

Le Gouvernement a élaboré les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2016 sur une prévision de croissance du PIB de 1,5 %. Cette prévision est conforme aux anticipations du FMI (60) et de l’OCDE (61). Cette accélération de la croissance française résulterait notamment du maintien de facteurs exogènes favorables, comme la dépréciation de l’euro, la baisse des prix des matières premières et un policy-mix accommodant au sein de la zone euro. La compétitivité des entreprises bénéficierait pleinement de la montée en charge du CICE et de la mise en œuvre de la deuxième étape du pacte de responsabilité et de solidarité en 2016. L’indicateur du climat des affaires publié en septembre 2015 par l’INSEE est à son plus haut niveau depuis quatre ans (62).

Le Haut Conseil des finances publiques estime que la prévision de croissance pour 2016 est « atteignable » (63). De même, les prévisions d’emploi sont, selon le Haut Conseil, « cohérentes avec les hypothèses de croissance ». En revanche, le Haut Conseil considère que la progression de la masse salariale en 2016 pourrait être inférieure aux prévisions du Gouvernement.

Les hypothèses macroéconomiques sous-jacentes au présent projet de loi de financement de la sécurité sociale sont retracées dans le tableau suivant.

PRINCIPALES HYPOTHÈSES MACROÉCONOMIQUES

 

2012

2013

2014

2015 (p)

2016 (p)

Produit intérieur brut (PIB)

Volume

0,4 %

0,4 %

0,2 %

1,0 %

1,5 %

Valeur

1,6 %

1,2 %

0,8 %

2,0 %

2,5 %

Masse salariale

Secteur privé champ URSSAF

2,1 %

1,2 %

1,5 %

1,7 %

2,8 %

Emploi

0,0 %

– 0,6 %

0,0 %

0,1 %

0,6 %

Salaire moyen

2,2 %

1,8 %

1,6 %

1,6 %

2,1 %

Masse salariale plafonnée

2,5 %

1,2 %

1,4 %

1,5 %

2,4 %

Plafond de la sécurité sociale

Montant annuel en euros

36 372

37 032

37 548

38 040

38 616

Variation en %

2,9 %

1,8 %

1,4 %

1,3 %

1,5 %

Hausse des prix et taux de revalorisation

Prix hors tabac

1,9 %

0,7 %

0,4 %

0,1 %

1,0 %

Revalorisation de la BMAF au 1er avril

1,0 %

1,2 %

0,6 %

0,0 %

1,0 %

Effet en moyenne annuelle

0,7 %

1,2 %

0,7 %

0,1 %

0,8 %

Revalorisation des pensions au 1er avril  / 1er octobre (1)

2,1 %

1,3 %

0,0 %

0,1 %

1,0 %

Effet en moyenne annuelle

2,1 %

1,5 %

0,3 %

0,0 %

0,3 %

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

(1) À compter de 2014, la revalorisation des pensions de retraite intervient au 1er octobre.

 

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

194,9

201,1

– 6,2

dont régime général

171,7

177,9

– 6,2

Vieillesse

228,7

227,8

– 0,9

dont régime général

123,6

123,1

0,5

Famille

48,8

49,6

– 0,8

dont régime général

48,8

49,6

– 0,8

Accidents du travail et maladies professionnelles

14

13,4

0,6

dont régime général

12,5

12

0,5

Total (hors transferts entre branches)

472,8

478,3

– 5,6

dont régime général

344

350

– 6

FSV

16,4

20,1

– 3,7

Source : PLFSS 2016.

Le déficit de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale se réduirait de façon dynamique à hauteur de 3 milliards d’euros entre 2015 et 2016. Le régime général de la sécurité sociale bénéficierait d’un niveau équivalent de réduction de son déficit. Cette baisse du déficit résulterait principalement d’un redressement des comptes des branches famille et maladie. Le régime général profiterait en outre, pour la première fois depuis 2004, d’un retour à l’excédent de la branche vieillesse.

Le déficit du FSV est en légère amélioration entre 2015 et 2016, à hauteur de 100 millions d’euros.

La réduction du déficit de la sécurité sociale s’inscrit dans une démarche plus large de maîtrise des dépenses publiques. Le Gouvernement a mis en œuvre un plan d’économies de 50 milliards d’euros sur la période 2015-2017, dont 10 milliards d’euros en matière d’assurance maladie et 11 milliards d’euros pour les dépenses de protection sociale au sens large. Le Gouvernement prévoit un retour à l’équilibre du régime général en 2019. La trajectoire pluriannuelle de réduction du déficit du régime général et du FSV est la suivante :

TRAJECTOIRE PLURIANNUELLE DE RÉDUCTION DU DÉFICIT

(en milliards d’euros)

 

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Maladie

– 6,5

– 7,5

– 6,2

– 4,7

– 2,9

– 0,3

AT-MP

0,7

0,6

0,5

0,6

1,5

1,9

Famille

– 2,7

– 1,6

– 0,8

– 0,3

0,0

0,3

Vieillesse

– 1,2

– 0,6

0,5

1,1

0,4

– 0,1

Régime général

– 9,7

– 9,0

– 6,0

– 3,3

– 1,0

1,8

FSV

– 3,5

– 3,8

– 3,7

– 3,6

– 3,1

– 2,8

Total

– 13,2

– 12,8

– 9,7

– 6,9

– 4,1

– 1,0

Source : annexe B du PLFSS 2016.

Dans son discours de politique générale, le Premier ministre avait annoncé en avril 2014 l’exonération totale de cotisations URSSAF pour les employeurs de salariés rémunérés au niveau du SMIC à partir du 1er janvier 2015. Cet engagement fort s’inscrit dans une tendance historique à la baisse des cotisations patronales pour les salariés rémunérés au niveau du SMIC.

Dès 1993, la politique d’allégement des cotisations patronales a été mise en œuvre, avec la suppression des cotisations familiales de 1 à 1,1 SMIC et la diminution de moitié de ces mêmes cotisations de 1,1 à 1,2 SMIC (64). La mesure dite « ristourne Juppé » est mise en place en 1995 (65: elle se substitue à l’exonération de cotisations familiales et prévoit une réduction de cotisations sociales au niveau du SMIC dégressive jusqu’à 1,2 SMIC. La réduction du temps de travail à la fin des années 1990 a été associée à un approfondissement de la politique d’allégements à travers les dispositifs dits « Aubry I » et « Aubry II » (66). Ces dispositifs ont remplacé la réduction dégressive pour les entreprises passées à 35 heures de durée de travail hebdomadaire, la « ristourne Juppé » continuant de s’appliquer pour les entreprises restées à 39 heures.

En 2003, la réduction générale des cotisations patronales, plus connue sous le nom d’« allégements Fillon » (67), a procédé à une refonte et à une unification des dispositifs existants. Les allégements généraux prévoyaient initialement une réduction unique de 26 points de cotisations pour les salaires au niveau du SMIC, décroissante jusqu’à 1,7 SMIC, seuil ramené à 1,6 SMIC à partir de 2005 (68). En 2007, le taux de réduction a été majoré à 28,1 points de cotisations dans les entreprises de moins de 20 salariés (69).

Cette évolution du taux de prélèvement effectif à la charge des employeurs au niveau du SMIC est retracée dans le graphique suivant.

ÉVOLUTION DU TAUX DE PRÉLÈVEMENT EFFECTIF À LA CHARGE DES EMPLOYEURS AU NIVEAU DU SMIC (EN POURCENTAGE DU SALAIRE BRUT)

Les allégements généraux des cotisations patronales sur les salaires inférieurs à 1,6 SMIC représentaient une perte de recettes globale de 20,1 milliards d’euros en 2014 (70). La loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 (71) a prévu deux mesures de renforcement de ces allégements généraux :

– l’exonération totale des prélèvements recouvrés par les URSSAF (hors contribution d’assurance chômage) – pour un coût budgétaire de 400 millions d’euros en 2015 ;

– un traitement indifférencié des entreprises en fonction de leur taille – pour un coût budgétaire de 1 milliard d’euros.

Par ailleurs, un allégement des cotisations d’allocations familiales pour les travailleurs indépendants a été prévu dans le même texte.

Les allégements généraux portent désormais sur l’ensemble des cotisations URSSAF présentes au niveau du SMIC, dont 1 point de cotisations AT-MP correspondant à la fraction mutualisée c’est-à-dire non-représentative de l’accidentalité propre à l’entreprise. L’imputation des allégements recouvre l’ensemble des cotisations sociales ci-après présentées, soit 27,95 points de cotisations sociales pour les entreprises de moins de 20 salariés et 28,35 points de cotisations pour les entreprises de plus de 20 salariés.

Au 1er janvier 2015, les cotisations patronales de sécurité sociale (72)stricto sensu couvertes par l’exonération sont les suivantes :

TAUX DE COTISATIONS SOCIALES AU NIVEAU DU SMIC
ENTREPRISES DE MOINS DE 20 SALARIÉS

Source : commission des finances.

TAUX DE COTISATIONS SOCIALES AU NIVEAU DU SMIC
ENTREPRISES DE PLUS DE 20 SALARIÉS

Source : commission des finances.

Le principe du « zéro cotisations URSSAF » s’applique donc intégralement à cet ensemble de cotisations sociales dites « de droit commun ». En revanche, il existe encore une série de cotisations et contributions spécifiques, destinées à couvrir des risques spécifiques ou à organiser la mutualisation du financement de certains dispositifs. Ces autres cotisations ou contributions patronales sont les suivantes :

– les cotisations de retraite complémentaire ;

– les contributions diverses, comme la taxe d’apprentissage, la contribution additionnelle au développement de l’apprentissage, la participation à la formation et la participation des employeurs à l’effort de construction ;

– les autres cotisations URSSAF, à savoir le versement transport et les cotisations AT-MP représentatives de l’accidentalité de l’entreprise.

Le graphique suivant présente la décomposition de l’ensemble des prélèvements sociaux patronaux sur les salaires inférieurs au plafond annuel de la sécurité sociale.

DÉCOMPOSITION DE 45,05 POINTS DE PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX PATRONAUX
SUR LES SALAIRES (TAUX 2015)

Source : direction de la sécurité sociale (73).

Le taux de 29,79 % correspond au taux global de cotisations de sécurité sociale de 28,35 % détaillé dans le tableau précédent, auquel est ajouté 1,44 % de cotisations AT-MP, soit le taux moyen national de cotisations pour cette branche hors taux mutualisé.

En tenant compte de l’ensemble des prélèvements patronaux au niveau du SMIC, les allégements mis en œuvre par le Gouvernement conduisent à une exonération équivalente à 62 % de la totalité des prélèvements et cotisations dues dans les entreprises de moins de 20 salariés et 63 % dans les entreprises de plus de 20 salariés.

Toutefois, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) complète ce dispositif d’allégement de cotisations. Le cumul des deux dispositifs a pour effet de créer une exonération réelle intégrale des cotisations sociales.

L’impact financier de ces dispositifs de réduction de cotisations sociales a été estimé par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 de la manière suivante :

IMPACT FINANCIER DE LA BAISSE DES COTISATIONS SOCIALES
DES EMPLOYEURS ET DES TRAVAILLEURS INDÉPENDANTS

Organismes concernés

Mesures

Impact financier en droits constatés

2015

2016

2017

Régime général

+ MSA

Baisse du taux de cotisation d’allocations familiales entre 1 et 1,6 SMIC

– 3

– 3,1

– 3,4

Renforcement des allégements généraux : augmentation du coefficient maximal d’exonération

– 0,4

– 0,45

– 0,45

Renforcement des allégements généraux : suppression du coefficient minoré pour les entreprises de plus de 20 salariés

– 1

– 1

– 1

RSI + MSA

Exonération des cotisations d’allocations familiales des travailleurs indépendants

– 1

– 1

– 1

Coût total pour la sécurité sociale avant compensation

– 5,4

– 5,55

– 5,85

Source : étude d’impact du PLFRSS 2014.

L’ensemble de ces mesures d’allégements de cotisations sociales, couplées à la mise en place du CICE, tend à abaisser concrètement le coût du travail. Celui-ci est une composante déterminante de la compétitivité des entreprises françaises et de la demande de travail, particulièrement sensible à des niveaux proches du SMIC. La mesure du « zéro cotisations URSSAF » devrait créer 35 000 emplois en 2015, selon les estimations de l’étude d’impact du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.

L’étude d’impact annexée au présent projet de loi indique que les mesures du pacte de responsabilité et de solidarité et le CICE ont réduit le coût du travail de 8,4 % au niveau du SMIC entre 2012 et 2015.

La loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 a également posé le principe d’un taux réduit de cotisations patronales familiales fixé à 3,45 % contre 5,25 %, soit une baisse de 1,8 point.

Ce taux réduit s’applique depuis le 1er janvier 2015 aux rémunérations ou gains n’excédant pas 1,6 SMIC, au bénéfice des employeurs entrant dans le champ d’application des allégements généraux. Le Gouvernement s’est engagé à poursuivre cette logique de progressivité des cotisations patronales familiales, en élargissant le bénéfice du taux réduit aux rémunérations comprises entre 1,6 et 3,5 SMIC à partir du 1er janvier 2016.

L’article 7 du présent projet de loi prévoit cette extension du taux réduit de cotisations patronales familiales jusqu’à 3,5 SMIC. Néanmoins, cet article prévoit un report de l’entrée en vigueur de la mesure au 1er avril 2016 dans un souci de réduction de la perte de recettes. Cette modulation des cotisations d’allocations familiales devrait désormais couvrir 90 % des salariés.

Les dispositions relatives aux allégements généraux et au CICE devraient limiter l’effet de seuil propre à cette mesure de modulation du taux de cotisation patronale de la branche famille.

L’impact financier de la mesure de modulation jusqu’à 1,6 SMIC était estimé pour l’année 2015 à 3 milliards d’euros lors du projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale pour 2014. L’extension de cette modulation aux salaires inférieurs à 3,5 SMIC était évaluée à 4,5 milliards d’euros de pertes de recettes supplémentaires. L’étude d’impact annexée au présent projet de loi actualise cette évaluation, en raison de la faible inflation et de l’évolution moins dynamique du SMIC, à un coût de 4,2 milliards d’euros en année pleine, soit 3,08 milliards d’euros pour l’année 2016.

L’article 8 du présent projet de loi poursuit également la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité décidé par le Président de la République en janvier 2014. La loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 a engagé la suppression progressive de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S), afin d’alléger la fiscalité applicable aux entreprises.

La C3S a été instaurée en 1970 (74) et complétée en 2004 (75) par une contribution additionnelle. Ces contributions sont recouvrées par la caisse nationale du Régime social des indépendants (RSI), elles sont à la charge de certaines sociétés limitativement énumérées à l’article L. 651-1 du code de la sécurité sociale. L’assiette de ces contributions est constituée du chiffre d’affaires global hors taxes des sociétés assujetties. Le taux de la C3S est fixé à 0,13 %, auquel s’ajoute 0,03 % au titre de la contribution additionnelle. Ces contributions représentent des charges déductibles pour la détermination du bénéfice imposable des entreprises.

Le régime antérieur à 2015 prévoyait un seuil d’entrée dans le dispositif : seules les sociétés dont le chiffre d’affaires était égal ou supérieur à 760 000 euros étaient redevables de la C3S. Ainsi, la C3S s’appliquait à 300 000 cotisants en 2012 (76). En 2014, le rendement de la C3S devait s’établir à 4,63 milliards d’euros et 1,07 milliard d’euros pour la contribution additionnelle, soit un total de 5,7 milliards d’euros (77).

La C3S était affectée pour 30,89 % de son produit à la branche maladie du régime des exploitants agricoles, au RSI pour les déficits comptables de ses trois régimes de base (maladie, vieillesse des artisans et vieillesse des commerçants) et pour la retraite complémentaire des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics. Le reliquat du produit de la C3S et l’intégralité du produit de la contribution additionnelle étaient affectés au FSV.

L’article 3 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 a substitué au seuil d’application de la C3S un abattement fixé à 3,25 millions d’euros appliqué au chiffre d’affaires à partir du 1er janvier 2015. Cet abattement devrait entraîner une perte de recettes de 1 milliard d’euros, hors impact sur l’impôt sur les sociétés.

Cet abattement bénéficie dès 2015 à toutes les entreprises, il supprime également tout effet de seuil. Il a également pour effet de cibler prioritairement les petites entreprises : les très petites entreprises (TPE (78)) sont en effet intégralement exonérées de C3S dès cette année. Par ailleurs, environ 45 % des petites entreprises (79) sont également exonérées de C3S en 2015. Le nombre de redevables devrait diminuer de 67 % dès cette année, soit un passage de 296 000 redevables en 2014 à 97 650 en 2015.

L’article 8 du présent projet de loi prévoit, conformément aux engagements du Gouvernement en 2014, le relèvement de l’abattement d’assiette de C3S à 19 millions d’euros. Cette mesure a pour effet de réduire le rendement de la C3S de 1 milliard d’euros supplémentaire en 2016 et d’exonérer totalement 79 000 entreprises supplémentaires sur les 97 650 entreprises redevables en 2015. Ce gain de 1 milliard d’euros concernera à 60 % les secteurs du commerce et de l’industrie manufacturière.

En 2016, ne demeureraient redevables que 20 000 entreprises, selon l’étude d’impact annexée au présent projet de loi, réparties entre :

– 12 000 moyennes entreprises (80), dont le montant moyen de C3S passerait de 28 500 euros à 7 400 euros, soit une baisse de 74 % ;

– 8 000 grandes entreprises (81) dont le montant moyen de C3S baisserait de 5,2 % pour atteindre 446 200 euros (82).

Le relèvement de l’abattement a pour effet mécanique de concentrer sur les grandes entreprises la charge de C3S durant la dernière année d’exigibilité ; elles représenteront 94 % des redevables contre 65 % en 2014.

Cet allégement de la fiscalité des entreprises a pour but de leur redonner des marges de manœuvre financières et d’améliorer la pertinence des contributions applicables aux acteurs économiques. Assise sur le chiffre d’affaires, la C3S ne prenait pas en compte la capacité contributive réelle des redevables, reflétée plus fidèlement grâce au bénéfice. Elle pénalisait les entreprises aux faibles marges ou celles exposées à la volatilité des cours des matières premières. La suppression de cette contribution, qui devrait intervenir en 2017, renforcera la compétitivité internationale des entreprises et leur potentiel d’investissement. Le rapporteur pour avis se félicite de la mise en œuvre de cette mesure conformément aux engagements du Gouvernement exprimés en 2014.

v L’article 9 du présent projet de loi vise à rationaliser le dispositif d’exonération de cotisations patronales de sécurité sociale spécifique à l’outre-mer. L’objet du présent article est de mieux cibler les exonérations afin d’accroître l’efficience de la dépense publique et de garantir l’efficacité des dispositifs de réduction du coût du travail. Cet article est la traduction de l’une des préconisations de la revue de dépenses menée en juin 2015 par l’inspection générale des finances (IGF) et l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur les exonérations et exemptions de charges sociales spécifiques.

Depuis leur création en 1994 (83), ces exonérations de cotisations patronales ont pour objectif de soutenir la création d’emplois pérennes dans le secteur marchand et le développement économique au sein de territoires caractérisés par diverses difficultés structurelles (étroitesse de l’économie, insularité, éloignement, relief et climat difficiles).

Les cotisations d’assurances sociales et d’allocations familiales visées sont celles qui sont dues au titre des rémunérations de salariés employés en Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion, Saint-Barthélemy et Saint-Martin. Les exonérations dites « LODEOM » (84) sont modulées en fonction de la taille de l’entreprise – seuil de 11 salariés – de son appartenance à un secteur d’activité et de l’éligibilité ou non des entreprises au CICE.

Le dispositif instaure diverses exonérations en fonction du niveau de rémunération :

– une exonération totale de cotisations sociales patronales, jusqu’à un niveau de rémunération appelé « seuil » ;

– une exonération forfaitaire de cotisations jusqu’à un niveau intermédiaire de rémunération appelé « palier » ;

– à partir de ce palier, l’exonération décroît ensuite progressivement jusqu’à s’annuler à un niveau de rémunération, appelé « plafond » du dispositif.

Ces exonérations sont applicables à environ 41 000 entreprises en 2015, pour près de 170 000 salariés concernés. Le coût moyen de ce dispositif d’exonération s’élève à 5 590 euros par bénéficiaire selon le rapport IGF – IGAS, contre 1 900 euros dans le droit commun.

Conformément à l’article L. 131–7 du code de la sécurité sociale, l’État est tenu de compenser intégralement aux organismes de sécurités sociale les pertes de recettes issues des exonérations de cotisations sociales. Ainsi, le coût budgétaire destiné à assurer le financement de la compensation des exonérations de cotisations patronales outre-mer s’élève à 975 millions d’euros en 2014, selon l’étude d’impact annexée au présent projet de loi.

Cet article s’inscrit dans le prolongement de la loi de finances pour 2009, qui a instauré le principe de la dégressivité au sein de ce dispositif (85). La loi de finances pour 2014 (86) a également resserré le dispositif en ciblant davantage les exonérations de cotisations sociales sur les bas et moyens salaires. Ce recentrage du dispositif était évalué au moment du projet de loi de finances pour 2014 à une économie de 90 millions d’euros en 2014 puis de 108 millions d’euros à partir de 2015.

Il s’agit notamment de diminuer les points de sortie du dispositif, afin de concentrer l’exonération au niveau des salaires les plus faibles. Ces salaires se distinguent par une élasticité élevée de la demande de travail et dès lors un effet plus sensible des exonérations sur l’emploi. Les salariés dont la rémunération est inférieure ou égale à 1,6 SMIC représentent 76 % de l’ensemble des salariés.

Ce nouveau calibrage du dispositif d’exonérations de cotisations sociales patronales dans les outre-mer s’inscrit dans un contexte nouveau à partir de 2016, caractérisé par deux dispositifs :

– l’augmentation du taux spécifique du CICE pour les départements d’outre-mer à 9 % à partir du 1er janvier 2016, contre 6 % pour le taux de droit commun (87) ;

– l’extension de la modulation du taux de cotisations patronales de la branche famille jusqu’à 3,5 SMIC à partir du 1er janvier 2016.

Le rapport IGF – IGAS indique par ailleurs que « l’avantage différentiel du dispositif spécifique d’exonération dédié aux entreprises implantées en outre-mer, éligibles au CICE et de moins de 11 salariés entre 1 et 1,02 SMIC devient négatif entre 2014 et 2015 » (88).

Les modifications apportées au dispositif d’exonérations de cotisations sociales ne remettent en cause ni le périmètre des entreprises ultramarines bénéficiaires, ni les secteurs d’activité éligibles ou les zones considérées comme prioritaires. Par ailleurs, le présent article prévoit un point de sortie plus élevé pour les secteurs les plus exposés à la concurrence internationale, à savoir la recherche et le développement, les technologies de l’information et de la communication, le tourisme, l’environnement, l’agro-nutrition et les énergies renouvelables (89). L’évolution du calibrage du dispositif par rapport au droit existant est donc la suivante :

ÉVOLUTION DU DISPOSITIF D’EXONÉRATIONS DE COTISATIONS SOCIALES PATRONALES DANS LES OUTRE-MER

En nombre de SMIC

Droit en vigueur

Réforme

Entreprises de moins de 11 salariés

Seuil

1,4

1,4

Palier

2,2

2

Plafond

3,8

3

Entreprises de moins de 11 salariés éligibles au CICE

Seuil

1,4

1,4

Palier

1,8

1,6

Plafond

2,8

2,3

Entreprises bénéficiant du dispositif de droit commun

Seuil

1,4

1,4

Palier

1,4

1,4

Plafond

3,8

3

Entreprises bénéficiant du dispositif de droit commun éligibles au CICE

Seuil

1,4

1,3

Palier

1,4

1,3

Plafond

2,6

2

Entreprises bénéficiant du dispositif renforcé

Seuil

1,6

1,7

Palier

2,5

2,5

Plafond

4,5

4,5

Entreprises bénéficiant du dispositif renforcé éligibles au CICE

Seuil

1,6

1,7

Palier

2

2,5

Plafond

3

3,5

Source : étude d’impact du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Cette proposition de recentrage du dispositif d’exonérations de cotisations sociales doit à la fois renforcer l’efficience de la dépense publique et limiter les effets d’aubaine. Elle doit permettre une économie annuelle de 75 millions d’euros pour le budget de l’État. Elle entraînera l’exclusion du dispositif de 10 159 salariés, essentiellement au sein des entreprises de plus de 11 salariés (90), et une diminution du niveau des aides pour 40 896 salariés.

v La revue de dépenses menée en juin 2015 par l’IGF et l’IGAS a également souligné l’inefficience des dispositifs d’exonérations de cotisations patronales fondés sur des critères géographiques. En conséquence, l’article 10 du présent projet de loi procède à la suppression progressive des dispositifs « bassins d’emploi à redynamiser » (BER), « zones de revitalisation rurale » (ZRR) et « zones de restructuration de la défense » (ZRD).

La logique de cet article est similaire à celle de l’article 9 : il s’agit de supprimer des dispositifs d’exonérations de cotisations sociales devenus moins pertinents dans le contexte d’approfondissement de l’allégement général de cotisations sociales, de montée en charge du CICE et d’extension de la réduction du taux de cotisations patronales de la branche famille. Le dispositif de droit commun est devenu, à certains niveaux de rémunération, plus favorable que ces dispositifs zonés.

Le champ d’application géographique du dispositif BER est très circonscrit : il ne vise que deux bassins d’emplois, celui de la vallée de la Meuse dans les Ardennes et celui de Lavelanet dans l’Ariège. Ce zonage restreint, qui n’a pas été mis à jour depuis 2007, conduit à des situations d’inégalité entre territoires. Le coût moyen de ce dispositif par bénéficiaire s’élève à 5 000 euros par an, contre 1 900 euros dans le droit commun. En 2014, le dispositif a coûté 21 millions d’euros pour 4 200 bénéficiaires.

En outre, les rémunérations sont éligibles à ce dispositif d’exonération quel que soit leur niveau. Ce type d’exonération apparaît dès lors peu efficace en termes d’incitation à la création d’emplois et créateur d’un effet d’aubaine important, pour un coût budgétaire significatif.

Ces exonérations sont accordées pendant cinq ans à compter de l’implantation ou de la création de l’entreprise dans la zone, ou à compter de la date d’effet du contrat pour les salariés embauchés au cours de ces cinq années. Ainsi, la non-reconduction de ce dispositif, prévue dans le présent article, entraînerait l’extinction de celui-ci à compter du 31 décembre 2025.

Le dispositif ZRR a été institué en 1997. Il consiste en une exonération des cotisations patronales d’assurance sociale totale pour les rémunérations inférieures ou égales à 1,5 SMIC et dégressive, ensuite, jusqu’à 2,4 SMIC. Cette exonération est applicable aux entreprises de moins de 50 salariés et valable pour une durée de 12 mois.

Ce dispositif, dont le zonage n’est plus actualisé, présente une faible efficacité économique, en concurrence de plus en plus forte avec les dispositifs de droit commun plus lisibles et plus pérennes. Le dispositif ZRR présente par ailleurs un coût élevé de l’ordre de 22 millions d’euros en 2014.

Le dispositif ZRD a été mis en place en septembre 2009 (91: l’avantage social consiste en une exonération totale de cotisations patronales dans la limite de 1,4 SMIC, puis une exonération dégressive jusqu’à 2,4 SMIC. L’exonération est valable cinq ans à partir de l’implantation ou de la création de l’entreprise dans la zone définie. En 2014, le dispositif concernait 2 000 salariés pour un coût global de 11 millions d’euros. Le recours à ce dispositif est donc très limité et les crédits sont saupoudrés. Le coût moyen du dispositif est par ailleurs élevé, soit 5 900 euros contre 1 900 euros dans le droit commun.

L’objet du présent article est de prévoir une extinction progressive de ces différents dispositifs, en refusant toute entrée de nouveau bénéficiaire à partir du 7 octobre 2015, date de présentation en Conseil des ministres du présent projet de loi. L’ensemble de ces dispositifs représente un coût de 54 millions d’euros en 2014. L’économie nette pour l’État, tenant compte d’un effet de report des anciens bénéficiaires vers les allégements généraux, sera moindre à environ 6,5 millions d’euros en 2016 et croissante jusqu’à 27,8 millions d’euros en 2021.

Le rapporteur pour avis soutient la démarche gouvernementale consistant à évaluer précisément et objectivement les différents dispositifs d’aides fiscales et sociales, afin d’en déterminer la pertinence et le bien-fondé. À l’évidence, les dispositifs examinés précédemment apparaissent économiquement inefficaces et redondants avec d’autres dispositifs d’exonérations ; leur extinction progressive apparaît dès lors pleinement justifiée.

v L’article 11 du présent projet de loi vise à ouvrir une possibilité de modulation des redressements opérés en matière de protection sociale complémentaire collective et obligatoire (92).

Un régime social incitatif a été instauré afin d’inciter les entreprises à couvrir leurs salariés par des mécanismes de prévoyance complémentaire. Si ces régimes sont collectifs et obligatoires, l’employeur peut bénéficier de leur exclusion de l’assiette sociale. La contribution patronale est uniquement soumise au forfait social, tandis que la part du salarié bénéficiaire est soumise à la CSG et à la CRDS.

En l’état actuel du droit, un système de garantie ne remplissant pas l’ensemble des conditions requises entraîne une requalification du financement patronale en rémunération et à l’assujettissement dès le premier euro aux diverses contributions et cotisations de sécurité sociale. Un rapport sur les relations entre les URSSAF et les entreprises de nos collègues Bernard Gérard et Marc Goua (93), parlementaires chargés d’une mission temporaire par le Premier ministre, a souligné en juillet 2015 l’absence de possibilité de modulation des redressements.

Les redressements couvrent des situations disparates et hétérogènes, allant de l’irrégularité de forme au non-respect volontaire des règles de droit. La complexité des normes applicables peut également expliquer leur appropriation parfois délicate par les entreprises. In fine, le droit actuel conduit à générer des redressements qui atteignent des montants sans commune mesure avec les sommes litigieuses.

Dans l’esprit du rapport précité, l’objet du présent article est par conséquent d’ouvrir une possibilité raisonnée de modulation des redressements, en vertu de conditions strictement définies. Les redressements ne porteront en pratique que sur une assiette correspondant à la situation des salariés non couverts par un système de garantie, ou pour lesquels l’employeur n’est pas en mesure d’apporter les justificatifs exigés.

Ce redressement proportionnel ne sera appliqué que s’il s’agit du premier contrôle révélant cette irrégularité. L’inspecteur calculera la modulation du redressement en fonction des contributions patronales manquantes, de la façon suivante :

– une fois et demie le montant de ces contributions, lorsque l’erreur repose sur une anomalie de production de justificatifs ;

– trois fois le montant de ces contributions lorsqu’il s’agit d’une méconnaissance des règles de fond.

Le montant des redressements émis au titre de l’application erronée des dispositions relatives à la protection sociale complémentaire s’élève à 45 millions d’euros selon l’étude d’impact annexée au présent projet de loi. Cela correspond à 8 000 motifs de redressement. La modulation des redressements envisagée par le présent article devrait concerner environ 10 % des cas de redressements, pour une perte de recettes estimée à 5 millions d’euros à partir de 2017.

v L’article 12 du présent projet de loi vise à simplifier le recouvrement des cotisations de sécurité sociale des membres des professions libérales autres que les praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés.

En l’état actuel du droit, ces professionnels font face à trois interlocuteurs pour le recouvrement de leurs cotisations et contributions sociales :

– les URSSAF pour les cotisations familiales, la CSG, la CRDS et la contribution à la formation professionnelle (CFP) ;

– la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) ou la Caisse nationale des barreaux français (CNBF) pour la cotisation d’assurance vieillesse de base et d’assurance vieillesse complémentaire, ainsi que pour la cotisation d’assurance invalidité et décès ;

– le RSI pour la cotisation d’assurance maladie-maternité, selon un principe de délégation de gestion (94) à 128 mutuelles ou sociétés d’assurance régionales.

À l’évidence, cette organisation du recouvrement des cotisations sociales n’est ni la plus simple ni la plus lisible. L’objet du présent article est par conséquent de rationaliser cette organisation du recouvrement des cotisations et contributions sociales des professions libérales concernées. Il vise à transférer la délégation de gestion du RSI des mutuelles et sociétés d’assurance aux URSSAF et aux Caisses générales de sécurité sociale (CGSS) dans les départements d’outre-mer. Ainsi, les URSSAF et les CGSS deviendraient également l’interlocuteur direct des professions libérales visées en matière de recouvrement des cotisations d’assurance maladie et maternité. Ce transfert de délégation interviendra après des travaux préparatoires et une campagne de sensibilisation, selon une date fixée par décret entre le 1er janvier 2017 et le 1er janvier 2018.

Du point de vue des professionnels libéraux, le nombre d’interlocuteurs sera réduit à deux entre les URSSAF ou les CGSS et la CNAVPL ou la CNBF. S’agissant du RSI, ce transfert de délégation réduira le coût de délégation, évalué à 16 millions d’euros en 2015. Cette mesure de simplification du recouvrement devrait permettre une économie équivalente en année pleine pour le RSI.

v L’article 13 vise à renforcer les options de lissage des revenus professionnels des non-salariés agricoles soumis à cotisations sociales. Cet article a pour objet de tenir compte du contexte accru de variabilité économique du secteur agricole. Il s’inspire en ce sens du rapport d’information sur la fiscalité agricole déposé le 15 avril 2015 au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale par notre collègue François André.

Cet article constitue le complément des discussions en cours sur le projet de loi de finances pour 2016. En l’espèce, il s’agit de modifier les possibilités de prise en compte des revenus professionnels soumis à cotisations et contributions sociales, selon trois modalités.

Les exploitants agricoles bénéficient d’un dispositif fiscal d’étalement d’un revenu exceptionnel, par fractions égales, sur sept exercices. Le présent article préconise une harmonisation du régime social sur le régime fiscal, avec une détermination de l’assiette sociale lissée sur sept exercices. Le recours à cette option fiscal concerne environ 200 bénéficiaires.

Les exploitants agricoles peuvent également verser un à-valoir, en complément des cotisations appelées au titre d’une année, sur le montant des cotisations exigibles l’année suivante. Ces cotisations payées par anticipation viendront en déduction des cotisations dues au titre de l’année suivante, elles sont par ailleurs considérées comme des charges fiscalement déductibles pour la détermination du bénéfice imposable l’année où elles sont versées. Toutefois, le montant de cet à-valoir est plafonné à 50 % des dernières cotisations appelées. Le présent article propose d’augmenter ce plafond d’à-valoir à 75 %, afin de permettre aux exploitants agricoles de pouvoir acquitter par anticipation une part plus importante de surplus de cotisations sociales.

Enfin, les exploitants agricoles peuvent être, à titre provisoire, assujettis aux cotisations et contributions sociales sur une assiette forfaitaire en cas de début d’activité, lorsque les revenus professionnels ne sont pas encore connus. Le présent article souhaite étendre cette application de l’assiette forfaitaire au cas de transfert de l’exploitation entre époux, suite au décès du chef d’exploitation ou d’entreprise agricole. Cette mesure permettra de répondre à des situations difficiles, tant au plan humain que financier.

L’impact budgétaire de ces trois modifications législatives est négligeable selon l’étude d’impact annexée au présent projet de loi. Ces mesures consistent essentiellement à lisser le versement de cotisations dues.

Enfin, l’article 18 du présent projet de loi prévoit la suppression, entre le 1er janvier 2017 et le 1er janvier 2018, du régime spécial d’assurance maladie, maternité et décès du grand port maritime de Bordeaux. Cette mesure achève l’intégration de ce régime spécial, engagée en 1952, au sein du régime général et rationalise l’architecture globale de la sécurité sociale.

En 2016, les organismes de sécurité sociale subiront une perte de recettes de 5,3 milliards d’euros par rapport à l’année 2015.

Cette perte de recettes résulte notamment de la mise en place de la deuxième phase du pacte de responsabilité et de solidarité à partir du 1er janvier 2016, qui générera pour l’année :

– une perte de 1 milliard d’euros en raison de l’augmentation de l’abattement en matière de C3S (article 8 du présent projet de loi) ;

– une perte de 3,1 milliards d’euros du fait de l’extension du taux réduit de cotisations patronales d’allocations familiales, jusqu’aux rémunérations n’excédant pas 3,5 SMIC (article 7 du présent projet de loi).

La loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (95) devrait susciter une perte de recettes de 193 millions d’euros en 2016 pour les organismes de sécurité sociale, selon l’étude d’impact annexée au présent projet de loi. Cette perte de recettes résulte de :

– l’assouplissement du régime social applicable aux attributions gratuites d’actions ;

– l’instauration d’un taux réduit de forfait social de 16 % pour les plans d’épargne pour la retraite collectifs (PERCO) dits « PERCO + » comportant plus de 7 % d’actifs investis dans des PME et ETI ;

– la suppression de la contribution applicable aux abondements des employeurs supérieurs à 2 300 euros par an et par salarié au titre du PERCO.

Enfin, une disposition adoptée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 nécessitera un complément de compensation pour l’année 2016. L’article 23 de cette loi avait prévu que les entreprises affiliées à des caisses de congés payés versent les prélèvements sociaux sur les droits à congés de leurs salariés directement aux organismes de recouvrement. Ce basculement du versement des prélèvements sociaux des caisses de congés payés vers les organismes de recouvrement devait permettre un surplus de recettes transitoire pour la sécurité sociale de 1,52 milliard d’euros en 2015 et 500 millions d’euros en 2016. Dès lors, il convient de compenser 1 milliard d’euros supplémentaires en 2016.

L’ensemble de ces pertes de recettes pour la sécurité sociale est synthétisé au sein du tableau suivant :

PERTES DE RECETTES POUR LES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE (2016)

(en milliards d’euros)

Création d’un nouvel abattement à l’assiette de C3S

1

Extension du taux réduit de cotisations patronales d’allocations familiales

3,075

Mesures adoptées au sein de la loi croissance, activité et égalité des chances économiques

0,193

Compensation de la disparition progressive de la recette issue de la mesure caisse de congés payés

1,02

Total

5,288

Source : étude d’impact annexée au projet de loi.

L’article 21 du projet de loi de finances pour 2016 prévoit la compensation par l’État des pertes de recettes de la sécurité sociale précédemment présentées. Cet article prévoit :

– le transfert à l’État de l’allocation de logement familiale (ALF), pour un montant de 4,7 milliards d’euros ;

– la prise en charge par l’État du financement du dispositif de protection juridique des majeurs, pour 400 millions d’euros ;

– la prise en charge de l’impact du décret relatif à l’aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens travailleurs migrants (ARFS), pour 60 millions d’euros ;

– le financement sur des crédits budgétaires d’emplois actuellement à la charge des organismes de sécurité sociale (96), soit un coût de 5 millions d’euros ;

– le relèvement de la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale à hauteur de 0,09 point, soit 142 millions d’euros.

Cet ensemble de mesures de compensation est retracé dans le tableau suivant :

MESURES DE COMPENSATION DES PERTES DE RECETTES
DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE (2016)

(en milliards d’euros)

Transfert à l’État de l’allocation de logement familiale (ALF)

4,691

Prise en charge de la protection juridique des majeurs

0,390

Compensation liée à la création de l’ARFS

0,060

Financement des emplois à la charge des organismes de sécurité sociale

0,005

Augmentation de la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale

0,142

Total

5,288

Source : étude d’impact annexée au projet de loi.

Cette compensation des mesures par l’État doit ensuite donner lieu à une réaffectation des recettes internes entre les branches et les organismes de la sécurité sociale afin de garantir un impact financier neutre.

Cet article a également pour objet de mettre en conformité le droit national avec celui de l’Union européenne (UE). Il s’agit de tirer les conséquences d’un arrêt préjudiciel du 26 février 2015 de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) (97), qui a remis en cause la faculté de soumettre à des prélèvements affectés à des régimes de sécurité sociale les revenus du capital perçus par des personnes rattachées à un régime de sécurité sociale d’un autre État membre de l’UE.

Cet arrêt de la CJUE nécessite un bref rappel historique des régimes applicables aux cotisations et aux contributions sociales (98). Selon une jurisprudence constante, les cotisations sociales sont définies au niveau national comme « des versements à caractère obligatoire ouvrant des droits aux prestations et avantages servis » par un régime de sécurité sociale (99). Cette définition affirme la nature « contributive » ou « assurancielle » du système français de sécurité sociale (100), celui-ci reposant sur l’idée que la contribution de chacun est assortie « de la promesse d’une contrepartie individuelle sous forme de prestations, calculée en fonction de l’effort contributif, en cas de réalisation de l’un des risques sociaux pris en charge » (101).

À l’inverse, les impositions de toute nature ont pour caractéristique de n’ouvrir aucun droit à prestations. Elles ont pour finalité la mise en œuvre du principe de solidarité nationale (102), assuré tant par l’État que par la sécurité sociale. Celle-ci se voit affecter des impositions de toute nature à cette fin, la contribution sociale généralisée étant la principale en termes de rendement.

Au niveau du droit interne, la sécurité sociale peut ainsi bénéficier de deux natures de recettes, les cotisations sociales et les impositions de toute nature – ou contributions sociales.

Cependant, la jurisprudence européenne tend progressivement à remettre en cause cette double source de financement de la sécurité sociale française, telle qu’elle est conçue en droit interne. Tout d’abord, la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a considéré qu’un prélèvement affecté à un régime de sécurité sociale français ne saurait être acquitté par une personne affiliée à un régime de sécurité sociale d’un autre État membre (103), en application du règlement communautaire (104) interdisant la double cotisation, constitutive d’une entrave à la liberté de circulation. Cette décision était initialement applicable à la CSG et à la CRDS sur les revenus d’activité et de remplacement, dans le respect du principe d’unicité de la législation sociale applicable à tout travailleur.

Le fondement de la décision de la CJCE est l’attrait de la CSG et de la CRDS dans le champ d’application du règlement communautaire en raison de leur affectation au financement des régimes français de sécurité sociale. Le juge européen ne retient pas la distinction établie en droit interne entre les cotisations sociales et les contributions sociales.

À la suite de ces arrêts, la législation française a été mise en conformité avec la jurisprudence européenne, en prévoyant que l’assujettissement à la CSG et à la CRDS pour les revenus d’activité et de remplacement dépend d’un double critère reposant :

– sur le fait d’être domicilié en France pour l’établissement de l’impôt sur le revenu (critère anciennement applicable) ;

– et, sur l’affiliation à un régime obligatoire français d’assurance maladie (nouveau critère introduit en 2001) (105).

En revanche, le nouveau critère d’affiliation à un régime obligatoire français d’assurance maladie n’a pas été prévu pour l’assujettissement à la CSG sur les revenus du patrimoine et les produits de placement. Le Conseil d’État a par conséquent été saisi du cas d’un résident fiscal en France, travailleur salarié aux Pays-Bas, et qui perçoit, en plus de ses revenus d’activité, des rentes viagères à titre onéreux de source néerlandaise. Le Conseil d’État a posé une question préjudicielle à la CJUE en juillet 2013 relative à l’application du règlement européen aux prélèvements sociaux français sur les revenus du patrimoine.

Par un arrêt du 26 février 2015 (106), la CJUE a remis en cause la faculté de soumettre à des prélèvements affectés à des régimes de sécurité sociale les revenus du capital perçus par des personnes rattachées à un régime de sécurité sociale d’un autre État membre de l’UE. Cette décision remet en question le principe de territorialité sur lequel se fonde l’assujettissement aux prélèvements sociaux des revenus du capital. Comme le relève l’étude d’impact annexée au présent projet de loi, le produit de ces prélèvements sociaux s’élève à plus de 18 milliards d’euros. Les ressortissants étrangers, résidents fiscaux qui ne sont pas affiliés à la sécurité sociale française, pourront se prévaloir de l’arrêt de la CJUE et réclamer, en vertu de l’article L. 190 du livre des procédures fiscales, le remboursement des prélèvements sociaux versés. Les prélèvements sociaux versés par ces résidents fiscaux représentent environ 250 millions d’euros par an. Néanmoins, la perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale sera encadrée par les règles de prescription applicables en matière de réclamation (107). Le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur pour avis que l’ACOSS avait déjà provisionné 211 millions d’euros pour chaque année 2013 et 2014 à hauteur de son exposition au risque de remboursement.

Le Gouvernement souhaite répondre à cette décision de la CJUE en modifiant l’affectation de ces prélèvements afin de garantir qu’ils ne soient plus dirigés vers le financement de prestations « ordinaires » de sécurité sociale française. Ces prélèvements seraient désormais affectés à des dépenses de protection sociale, dites « à caractère non contributif » (PSNC) (108). Le règlement européen prévoit en effet que ces prestations non contributives sont attribuées aux personnes résidant dans un État (sans considération de leur affiliation au régime national de sécurité sociale) et qu’elles sont financées par des contributions fiscales obligatoires.

Le Gouvernement propose donc d’affecter le produit des impositions sociales acquittées sur critère de résidence au financement des prestations sociales non contributives, principalement sous forme d’affectation à une partie des dépenses du FSV.

Les tableaux suivants illustrent les modifications d’affectation des prélèvements sociaux sur le capital, issues du présent projet de loi.

AFFECTATION DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX SUR LES REVENUS DU CAPITAL : SITUATION ACTUELLE

(en milliards d’euros)

 

Total

CNAM

CNAF

CNAV

CNSA

CADES

FSV

CSG

8,2 %

9,4

5,9 %

6,7

0,87 %

1

   

0,1 %

0,1

0,48 %

0,5

0,85 %

1

CRDS

0,5 %

0,6

               

0,5 %

0,6

   

Prélèvement social

4,5 %

5,3

2,05 %

2,5

   

1,15 %

     

1,3 %

1,5

   

0,3 % CSA

0,3 %

0,3

           

0,3 %

0,3

       

Prélèvement de solidarité

2 %

2,3

2 %

2,4

                   

Préciput

 

0,7

 

– 0,4

 

0,7

 

0

 

0

 

– 0,1

 

– 0,1

Total

15,5 %

18,6

9,95 %

11,6

0,87 %

1

1,15 %

1,3

0,4 %

0,5

2,28 %

2,6

0,85 %

1

Source : étude d’impact annexée au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

AFFECTATION DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX SUR LE CAPITAL : SITUATION FUTURE

(en milliards d’euros)

 

Total

CNAM

CNAF

CNAV

CNSA

CADES

FSV

CSG

9,9

       

0,7

9,1

CRDS

0,6

       

0,6

 

Prélèvement social

5,4

     

1,4

 

4

0,3 % CSA

0,4

     

0,4

   

Prélèvement de solidarité

2,4

         

2,3

Total

18,6

     

1,8

1,3

15,5

Source : étude d’impact annexée au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Cette réaffectation des prélèvements sociaux sur le capital entraîne une perte de recettes de 11,6 milliards d’euros pour la CNAM et 1 milliard d’euros pour la CNAF.

Parallèlement, les comptes du FSV seront désormais scindés en deux sections, afin d’identifier clairement les prestations contributives et les prestations non contributives servies, ainsi que leur mode de financement.

LES COMPTES DU FSV PRÉSENTÉS EN DEUX SECTIONS

SECTION 1 : OPÉRATIONS DE SOLIDARITÉ

2016

SECTION 2 : AUTRES PRISES EN CHARGE

2016

CHARGES DE SOLIDARITÉ

16 641,68

CHARGES « AUTRES PRISES EN CHARGE »

3 535

Au titre du service national

29

Minimum contributif

3 490

Au titre du chômage régimes de base

11 031

Majoration pour conjoint à charge

39

Au titre du chômage régimes complémentaires

339

Autres dépenses de l’article L. 135-2 II 2° (ex-article L. 135-2 12°)

0

Au titre de la maladie

1 645

   

Au titre des apprentis

233

   

Au titre des stagiaires

18

   

Sous-total Prise en charge de cotisations

13 295

Sous-total MICO et autres prises en charge

3 529

Au titre du minimum vieillesse (MV)

3 095

   

Majoration pour enfants

0

   

Autres charges techniques (frais MV)

57

   

Sous-total Prises en charge de prestations de solidarité

3 152

   

ANV, remises / annulations de créances sur produits

98

Admissions en non-valeur, remises/annulations de créances sur produits

3

Frais d’assiette et de recouvrement

96

Frais d’assiette et de recouvrement

3

Charges de gestion courante (gestion administrative)

0,8

Charges de gestion courante (gestion administrative)

0,2

Sous-total charges diverses

195

Sous-total charges diverses

6

PRODUITS AFFECTÉS SECTION 1

16 025

PRODUITS AFFECTÉS SECTION 2

506

CSG sur revenus du patrimoine et des placements

9 499

Redevance fréquences (licences UMTS)

37

Prélèvement social sur revenus du capital

4 091

Taxe sur les salaires

270

Prélèvement solidarité s/revenus du capital

2 431

Contribution sur avantages retraite + préretraite (art. L. 135-7)

186

   

Déshérence

12

Produits divers

4

Autres produits

1

SOLDE DE LA SECTION 1 « OPÉRATIONS DE SOLIDARITÉ »

– 616

SOLDE DE LA SECTION 2 « AUTRES PRISES EN CHARGE »

– 3 029

Source : FSV.

 

SOLDE CUMULÉ FSV SECTION 1 + SECTION 2

– 3 645

Cette scission des comptes du FSV est de nature à clarifier le double rôle de cet organisme de sécurité sociale, qui sert à la fois des prestations contributives et des prestations de solidarité. Cette séparation des comptes facilite l’affectation de produits distincts selon leur nature de cotisation sociale ou de contribution sociale.

Cet article 15 de présent projet de loi doit sa complexité à sa volonté de traiter plusieurs sujets simultanément. Outre la réponse à l’arrêt de Ruyter, le présent article assure la compensation des pertes de recettes de la sécurité sociale par l’État. Il tend également à garantir l’équilibre financier entre les différentes branches de la sécurité sociale.

La branche famille bénéficie en effet d’une « surcompensation » en raison de la budgétisation de l’allocation de logement familiale, tandis que les branches maladie et vieillesse subissent des sous-compensations.

Le tableau ci-dessous présente la synthèse des transferts entre branches et organismes de la sécurité sociale issus de l’article 15 du présent projet de loi ; ces transferts sont neutres sur les soldes.

SYNTHÈSE DES TRANSFERTS ENTRE BRANCHES
ET ORGANISMES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

(en milliards d’euros)

 

Maladie

AT-MP

Vieillesse

Famille

Toutes branches

FSV

CNSA

CADES

Sphère ASSO

Transferts intra-sécu

0,8

0

0,7

– 1,8

– 0,2

0,1

0

0

0

CSG capital

– 7,1

   

– 1

– 8,1

8,5

– 0,1

0,1

0,4

Prélèvement de solidarité

– 2,3

     

– 2,3

2,4

   

0,1

Prélèvement social

– 2,4

 

– 1,3

 

– 3,8

4,1

1,4

– 1,5

0,2

C3S

0,5

     

0,5

– 0,5

   

0

Taxe sur les salaires

2,3

 

1

0,2

3,6

– 3,6

   

0

CSG activité remplacement et jeux

9,9

   

– 0,2

9,7

– 9,9

– 1,2

1,4

0

Suppression du preciput

     

– 0,7

– 0,7

     

– 0,7

Suppression de la participation des régimes vieillesse au financement de la CNSA

   

1

 

1

– 1

   

0

Forfait social

   

0,1

 

0,1

 

– 0,1

 

0

Source : annexe 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Parallèlement, le Gouvernement a entrepris une démarche de simplification et de clarification de l’affectation des recettes aux différents organismes de sécurité sociale, dans l’inspiration des « jardins à la française ». Ainsi, le forfait social est intégralement affecté à la branche vieillesse tandis que la C3S est désormais affectée en intégralité à la branche maladie. Le financement de la CADES est rationalisé ; ses recettes sont ramenées à deux sources de financement : la CSG et la CRDS. Cela permettra d’accroître la lisibilité du financement de la caisse. La CNSA ne serait plus financée par une fraction de CSG, celle-ci ayant été selon l’étude d’impact « conçue dès l’origine comme consubstantiellement liée à un financement solidaire des prestations de sécurité sociale au sens strict, champ par rapport auquel les politiques publiques conduites par la caisse apparaissent légèrement distinctes » (109). La CNSA sera affectataire en compensation d’une fraction de prélèvement social.

Enfin, les affectations des différentes CSG sont profondément revues, comme l’illustrent les tableaux suivants.

AFFECTATION DES DIFFÉRENTES CSG (2015)

 

Régimes maladie

CNAF

CNSA

CADES

FSV

Taux total

CSG activité et remplacement

5,20 %

0,87 %

0,1 %

0,48 %

0,85 %

7,5 %

CSG patrimoine

5,90 %

0,87 %

0,1 %

0,48 %

0,85 %

8,2 %

CSG placements

5,90 %

0,87 %

0,1 %

0,48 %

0,85 %

8,2 %

CSG jeux

4,80 %

0,87 %

0,1 %

0,28 %

0,85 %

6,9 %

Source : commission des finances.

AFFECTATION DES DIFFÉRENTES CSG (2016)

 

Régimes maladie

CADES

CNSA

FSV

CNAF

Taux total

CSG activité et remplacement

6,05 %

0,60 %

-

-

0,85 %

7,5 %

CSG patrimoine

-

0,60 %

-

7,6 %

-

8,2 %

CSG placements

-

0,60 %

-

7,6 %

-

8,2 %

CSG jeux

5,75 %

0,30 %

-

-

0,85 %

6,9 %

Source : commission des finances.

Conformément au principe de non-affectation à des prestations contributives, les CSG relatives au patrimoine et aux placements ne sont plus affectées aux régimes maladie, à la branche famille ou à la CNSA. À l’inverse, les CSG sur les revenus d’activité et de remplacement et sur les jeux ne sont plus affectées qu’aux régimes maladie, à la branche famille et à la CADES. Cette évolution de l’affectation des CSG introduit une distinction stricte entre les différentes catégories de contributions sociales.

L’ensemble des réaffectations de recettes entre les différents organismes de sécurité sociale est retracé dans le schéma suivant.

TRANSFERTS DE RECETTES ENTRE ORGANISMES ET RÉGIMES DE SÉCURITÉ SOCIALE

Source : annexe 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Note de lecture : les réaffectations de CSG sont représentées dans les cadres en pointillés. Ce schéma souligne le fait que l’ensemble des recettes de CSG assise sur les revenus du capital (inscrites en gras) sont désormais affectées exclusivement au FSV et à la CADES, tandis que les recettes du FSV issues de la CSG assise sur les revenus d’activité et de remplacement (inscrites en italique) sont réaffectées à la CNAM. Les autres items, cadres grisés sans pointillés, représentent les transferts de contributions et taxes autres que la CSG.

Le rapporteur pour avis loue la volonté du Gouvernement de tirer les conséquences de la jurisprudence de la CJUE, tout en garantissant un niveau de recettes équivalent pour les organismes de la sécurité sociale. Le Gouvernement instaure une affectation différenciée des ressources entre les prestations contributives et les prestations non contributives, dites de solidarité nationale. Dès lors, la nouvelle architecture financière de la sécurité sociale, résultant de l’option choisie par le Gouvernement, semble en conformité avec l’analyse menée par le juge européen.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a prévu le transfert à la CADES des déficits des exercices 2011 à 2017 de la branche vieillesse du régime général et du FSV, selon une double limite :

– un plafond global de transfert fixé à 62 milliards d’euros ;

– un plafond annuel de transfert fixé à 10 milliards d’euros.

Cette reprise de dette a été financée par l’affectation à la CADES :

– de 0,28 point de CSG supplémentaire ;

– de 1,3 point du prélèvement social sur les revenus du capital ;

– du versement par le FRR de 2,1 milliards d’euros par an entre 2011 et 2024, soit un total de 29,4 milliards d’euros.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a élargi le périmètre des déficits repris aux branches maladie et famille et a réduit l’horizon de transfert à 2017.

Le contexte actuel de taux bas conduit le Gouvernement à remettre en cause ce schéma progressif de transfert de dette à la CADES, en envisageant le transfert du reliquat de dette dès 2016. Si l’ACOSS continue à refinancer son déficit à des taux exceptionnellement bas, la perspective à plus ou moins brève échéance d’une remontée des taux longs incite à une reprise anticipée de la dette par la CADES. Cette avancée, par rapport au calendrier initialement fixé, présenterait de nombreux avantages :

– une confirmation de la spécificité des rôles dévolus à l’ACOSS et à la CADES ;

– se prémunir contre une remontée des taux, conduisant à un transfert de dette dans des conditions financières moins avantageuses ;

– le bénéfice des conditions de marché actuellement très favorables pour refinancer la dette à moyen et long terme.

Cette reprise anticipée de dette par la CADES s’élèverait à 23,6 milliards d’euros, soit le reliquat des 62 milliards de dette à transférer. Cette anticipation de reprise permettrait à la CADES de refinancer la dette sociale et de l’amortir dans des conditions de marché optimales. Ce niveau de reprise est conforme avec la capacité de la CADES d’émettre de la dette.

Cette anticipation de la reprise de dette, prévue à l’article 17 du présent projet de loi, serait sans impact sur le niveau des ressources affectées à la CADES. Celle-ci s’inscrit en effet dans le plafond global de 62 milliards d’euros de dette transférée, dont les modalités de financement ont été prévues par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

Le rapporteur pour avis s’exprime en faveur d’un tel transfert anticipé de dette, qui permet de se prémunir contre une remontée des taux d’intérêt à moyen terme. Cette solution préserve par ailleurs une reprise de la croissance économique, dans la mesure où elle ne pèsera pas sur le niveau des prélèvements obligatoires.

La volonté du Gouvernement est de garantir une politique d’apurement de la dette sociale dans les meilleures conditions. Cette démarche s’inscrit dans le cadre d’un désendettement de la sphère sociale, ainsi le niveau total de la dette sociale – dette de la CADES et besoins de financement de l’ACOSS – se réduira en 2016, pour la première fois depuis 2002. Selon l’article 28 du présent projet de loi, la CADES devrait amortir 14,2 milliards d’euros de dette en 2016, pour un déficit du régime général et du FSV estimé à 9,7 milliards d’euros. L’encours de la dette sociale globale (CADES, ACOSS et FSV) devrait passer de 162,4 milliards d’euros fin 2015 à 157,9 milliards d’euros fin 2016.

Néanmoins, le traitement de la dette sociale n’est pas achevé en raison d’un déficit constitué au sein de l’ACOSS. L’agence dispose, en vertu de l’article 29 du présent projet de loi, d’un plafond de financement de 40 milliards d’euros du 1er janvier 2016 au 31 juillet 2016. Le transfert de dette à la CADES permet d’abaisser ce plafond de financement à 30 milliards d’euros à partir du 1er août 2016 jusqu’à la fin de l’année.

Le solde des comptes de l’ACOSS devrait être déficitaire de 29,8 milliards d’euros au 31 décembre 2015. Ce déficit sera aggravé par le déficit du régime général et du FSV à hauteur de 9,7 milliards d’euros en 2016. À l’inverse, l’ACOSS bénéficiera d’un transfert de dette de 23,6 milliards d’euros à la CADES pour l’année 2016. Au total, le solde des comptes de l’ACOSS sera déficitaire à la fin 2016 à hauteur de 15,9 milliards d’euros. Ces déficits ne seront pas transférables à la CADES, de même que les déficits postérieurs, évalués à 12 milliards d’euros pour les années 2017 à 2019. Le montant global de dette susceptible d’être transférée à la CADES s’élèvera donc à environ 28 milliards d’euros à la fin 2019, hors charge de la dette.

Si cette dette supplémentaire devait être transférée à la CADES sans prolongement de la durée de cette dernière, la CRDS devrait être augmentée, aux conditions actuelles, au moins à hauteur de 0,24 point (110). Le transfert de cette dette à des conditions dérogatoires, repoussant la date d’extinction de la CADES, alourdirait mécaniquement la charge cumulée d’intérêts de la dette sociale. En tout état de cause, le rapporteur pour avis souligne la prise en compte impérative de cette dette logée au sein de l’ACOSS. Celle-ci devra nécessairement être reprise à terme par la CADES, dans le respect des dispositions organiques. Il convient de prévoir des modalités de reprise de dette de nature à garantir un amortissement optimal de la dette sociale.

 

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Maladie

Dépenses

168,4

174,1

177,9

182,7

186,2

189,7

Solde

– 6,5

– 7,5

– 6,2

– 4,7

– 2,9

– 0,3

AT/MP

Dépenses

11,7

11,8

12,0

12,1

12,2

12,3

Solde

0,7

0,6

0,5

0,6

1,5

1,9

Famille

Dépenses

59,0

54,4

49,6

50,4

51,6

52,8

Solde

– 2,7

– 1,6

– 0,8

– 0,3

0,0

0,3

Vieillesse

Dépenses

116,8

120,5

123,1

126,3

130,7

135,6

Solde

– 1,2

– 0,6

0,5

1,1

0,4

– 0,1

Toutes branches consolidées

Dépenses

343,7

348,3

350,0

358,6

367,6

377,2

Solde

– 9,7

– 9,0

– 6,0

– 3,3

– 1,0

1,8

Source : annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

DÉPENSES ET SOLDES DU FONDS DE SOLIDARITÉ VIEILLESSE

(en milliards d’euros)

 

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Dépenses

20,6

20,3

20,1

20,2

20,0

20,2

Solde

– 3,5

– 3,8

– 3,7

– 3,6

– 3,1

– 2,8

Source : annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Si l’on considère le seul champ du régime général, le déficit sera ramené en 2016 à un niveau proche de l’équilibre, ce qui n’a jamais été constaté depuis 2002. Le dossier de presse du PLFSS offre une vision synthétique mais pertinente de l’amélioration constatée.

En 2016, le déficit cumulé du régime général et du FSV sera de 9,7 milliards d’euros :

– la branche vieillesse du régime général reviendra à l’équilibre en 2016 ;

– la branche AT-MP devrait enregistrer pour sa part un excédent pour la quatrième année consécutive ;

– la branche famille se rapprochera de l’équilibre, avec un déficit de l’ordre de 800 millions d’euros ;

– le déficit de la branche maladie continuera de se réduire pour s’établir à 6,2 milliards d’euros ;

– le déficit du FSV commencera à diminuer de 0,1 milliard d’euros en 2016.

Le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale a rappelé qu’avant toute mesure nouvelle, les prestations nettes du régime général augmenteraient tendanciellement de 2,8 %.

La hausse serait principalement portée par les prestations versées par la CNAM (+ 3,5 %) et la CNAV (+ 2,5 %). A contrario, les dépenses de prestations servies par la CNAF connaîtraient une faible progression (+ 0,3 %), sous l’effet de la réforme des prestations familiales.

Les mesures du présent PLFSS accompagneront encore davantage l’infléchissement de la dépense sociale pour les années à venir.

À ce stade, il est utile de replacer le champ couvert par le PLFSS au sein du domaine plus large des administrations de sécurité sociale (ASSO), utilisé en comptabilité nationale. Le PLFSS porte sur l’ensemble des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, le FSV, la CADES et le FRR. Mais les ASSO comprennent, outre le champ du PLFSS, l’assurance chômage, les organismes de retraites complémentaires et les hôpitaux. Les comptables nationaux retiennent donc un champ plus large en matière de finances sociales que celui couvert par la sécurité sociale au sens strict. Sur l’ensemble des ASSO, l’amélioration du solde prévue entre 2015 et 2016 est de 7,5 milliards d’euros, passant de – 6,2 à + 1,3 milliards d’euros (111).

Ce résultat est principalement la conséquence :

– d’une amélioration du solde des régimes obligatoires de base de 3 milliards d’euros ;

– d’une amélioration du solde de l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce (Unédic) de 2 milliards d’euros ;

– d’une amélioration du solde des régimes complémentaires de retraite de 300 millions d’euros ;

– d’une amélioration du solde de la CADES de 500 millions d’euros ;

– d’une amélioration du solde de divers organismes de sécurité sociale de 200 millions d’euros ;

– de la compensation par l’État de la disparition progressive de la recette issue de la mesure votée en LFSS pour 2015 relative aux modalités de versement à l’ACOSS des cotisations perçues par les caisses de congés payés, à hauteur d’un milliard d’euros pour 2016 (112) .

 

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Maladie

Dépenses

193,2

198,0

201,1

206,1

209,9

213,7

Solde

– 6,5

– 7,5

– 6,2

– 4,7

– 2,9

– 0,3

AT/MP

Dépenses

13,1

13,2

13,4

13,5

13,6

13,8

Solde

0,7

0,6

0,6

0,6

1,5

1,9

Famille

Dépenses

59,0

54,4

49,6

50,4

51,6

52,8

Solde

– 2,7

– 1,6

– 0,8

– 0,3

0,0

0,3

Vieillesse

Dépenses

219,9

223,8

227,8

232,9

240,1

248,3

Solde

– 0,8

– 0,2

0,9

1,2

0,0

– 1,0

Toutes branches consolidées

Dépenses

472,1

475,9

478,3

489,2

501,2

514,4

Solde

– 9,3

– 8,6

– 5,6

– 3,3

– 1,5

0,8

 

Tendanciel 2015

ONDAM Total

3,6 %

Soins de ville

4,4 %

Établissements de santé

3,0 %

Établissements et services médico-sociaux

2,8 %

Dépenses relatives au FIR

1,0 %

Autres prises en charge

4,6 %

Source : Comité d’alerte, octobre 2015.

L’article 55 du PLFSS pour 2016 fixe l’objectif national de dépenses à 185,2 milliards d’euros, soit une progression de + 1,75 % par rapport au montant prévisionnel des dépenses pour l’année 2015. Ce taux d’évolution suppose la réalisation de 3,4 milliards d’euros d’économies en 2016, soit un montant apparemment supérieur (113) à celui programmé en 2015, qui était de 3,2 milliards d’euros.

Réparties par sous-objectifs de l’ONDAM, les économies attendues s’élèvent à :

– 2,3 milliards d’euros pour les soins de ville ;

– 990 millions d’euros pour les établissements de santé ;

– 160 millions d’euros pour les établissements médicaux sociaux.

ONDAM PRÉVU POUR 2016

(en milliards d’euros)

 

Objectif de dépenses

Dépenses de soins de ville

84,3

Dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l’activité

58,1

Autres dépenses relatives aux établissements de santé

19,8

Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées

8,9

Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées

9,3

Dépenses relatives au Fonds d’intervention régional

3,1

Autres prises en charge

1,7

Total

185,2

Source : PLFSS.

Le programme de stabilité pour les années 2015 à 2018, présenté en avril dernier, prévoit un taux d’évolution identique pour 2017. Le rapporteur pour avis se félicite de l’effort ainsi entrepris, ces prévisions faisant passer pour la première fois le taux d’évolution de l’ONDAM sous le taux d’évolution prévu du PIB.

Le tableau suivant détaille les leviers envisagés pour le respect de l’ONDAM en 2016 :

BRANCHE MALADIE : MESURES D’ÉCONOMIES

Efficacité de la dépense hospitalière

690

Optimisation des dépenses des établissements

65

Optimisation des achats et fonctions logistiques

420

Liste en sus (dont radiations partielles)

205

Virage ambulatoire et adéquation de la prise en charge en établissement

465

Développement de la chirurgie ambulatoire (114)

160

Réduction des inadéquations hospitalières

145

Rééquilibrage de la contribution de l’ONDAM à l’OGD

160

Produits de santé et promotion des génériques

1 045

Baisse de prix des médicaments

550

Promotion et développement des génériques

395

Tarifs des dispositifs médicaux

70

Biosimilaires

30

Pertinence et bon usage des soins

1 210

Baisse des tarifs des professionnels libéraux

125

Actions de maîtrise des volumes et de la structure de prescription des médicaments

00

Lutte contre les iatrogénies médicamenteuses

100

Maîtrise médicalisée hors médicament

315

Réforme des cotisations des professionnels de santé

270

TOTAL

3 410

Source : dossier de presse du PLFSS pour 2016.

Comme les années précédentes, une large part des économies attendues repose sur des baisses de prix des médicaments et des dispositifs médicaux et leur meilleur usage, pour un montant global prévu (ville et établissements de santé) de 1,75 milliard d’euros. S’agissant de la « liste en sus » (115), un programme de vérification de l’ensemble des indications des molécules inscrites sur cette liste sera mis en œuvre. S’agissant des établissements de santé, les économies attendues devraient trouver leur traduction dans les tarifs, notamment pour ce qui concerne le développement de la chirurgie ambulatoire, pour laquelle les économies induites seraient en progression en 2016.

Enfin, le comité d’alerte sur les dépenses d’assurance maladie rappelle, dans son dernier avis (116), que les économies programmées sur l’ONDAM médico-social seront réalisées au moyen d’un prélèvement de 160 millions sur les réserves de la CNSA, comme les années précédentes. Elles ne résultent donc pas d’un freinage des dépenses des établissements pour handicapés et pour personnes âgées, mais d’une modalité différente de leur financement.

Tout d’abord, le rapporteur pour avis souhaite apporter une précision sur les 270 millions d’euros d’économie attendus de la modification du taux des cotisations maladie des personnels de santé exerçant en ville (117). Actuellement fixé à 9,81 %, dont 9,70 % à la charge de la CNAM, ce taux serait ramené au niveau de celui des travailleurs indépendants (6,5 %) en deux étapes (2016 et 2017). Or, cette modification réduit simultanément et d’un même montant les dépenses de l’ONDAM et les recettes de la CNAM, ainsi amputées de l’écart entre l’ancien et le nouveau taux de cotisation. Cette mesure, sans effet sur le solde de la CNAM, ne constitue donc pas une véritable mesure d’économie mais permet de réduire le taux facial d’évolution de l’ONDAM de ville de 0,3 point. Hors cette mesure, le montant des économies à réaliser en 2016, s’établit à 3,1 milliards d’euros et se situe donc dans la continuité de celui de 2015. L’exposé des motifs de l’article 55 précise d’ailleurs que, corrigé de l’effet détaillé ci-dessus, le taux de croissance du sous-objectif « soins de ville » s’élève à 2 %.

Au-delà de ce point précis, vu l’importance des économies attendues des actions de maîtrise médicalisée des dépenses, le rapporteur pour avis estime nécessaire de s’interroger sur la persistance à long terme du rendement élevé de ces mesures.

Schématiquement, les déterminants de l’évolution des prestations d’assurance maladie peuvent être analysés en termes d’effet prix, d’effet volume et de taux de remboursement. L’effet volume est bien le plus important des trois, et c’est sur lui que portent les actions de maîtrise médicalisée.

Les graphiques suivants montrent la nécessité qu’il y a à bien connaître les déterminants d’une dépense donnée, afin d’adapter en conséquence les outils de régulation à la disposition de l’administration :

DÉPENSES REMBOURSÉES DE MÉDICAMENTS

DÉPENSES REMBOURSÉES D’ANALYSES MÉDICALES

Source : commission des comptes de la sécurité sociale.

Le processus de maîtrise médicalisée s’inscrit actuellement dans le cadre de la convention médicale signée en 2011, le corps médical s’étant engagé dans un effort collectif visant au bon usage des soins et au respect des règles de la prise en charge collective. Des objectifs quantifiés, se rapportant à un certain nombre de thèmes, sont ainsi définis chaque année.

La maîtrise médicalisée des dépenses

La maîtrise médicalisée est l’une des composantes de la gestion de risque, qui est la pierre angulaire sur laquelle repose la contractualisation entre l’État et la CNAM.

Elle est définie par l’Union nationale des caisses d’assurance maladie comme « un effort collectif visant à favoriser le bon usage des soins et à veiller à une bonne efficience du système de santé ». Elle implique l’assurance maladie, les patients et les professionnels de santé, pour lesquels elle impose à la fois des obligations déontologiques, et législatives ou réglementaires (118).

Elle s’appuie sur plusieurs leviers :

– la production de référentiels par la Haute Autorité de santé (HAS) (119;

– la contractualisation entre l’assurance maladie et les professionnels de santé qui passe à la fois par des outils collectifs, par exemple les accords de bon usage des soins, et des outils de contractualisation individuelle, notamment le contrat d’accès aux soins ou la rémunération sur objectifs de santé publique ;

– la lutte contre la fraude et le renforcement des contrôles ;

– la sensibilisation des patients : elle est réalisée via des campagnes grand public ou des contrôles individuels du juste recours aux soins pris en charge par la collectivité.

Le rapporteur pour avis estime nécessaire de regarder dès à présent à long terme si l’efficacité de la contractualisation ou de l’action sur les prix des produits pourra se maintenir à son niveau actuel. Il a été sensibilisé au cours des auditions qu’il a pu mener, sur la prochaine révision de la convention des médecins. Il conviendra de rester très attentif aux négociations qui s’ouvriront en 2016, et qui conditionneront pour une grande part, le redressement prochain des comptes de l’assurance maladie.

L’article 3 du PLFSS minore pour 2015 le montant des dotations au Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) et à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), respectivement de 50 et 83 millions d’euros. Ces structures sont en effet alimentées par des versements des régimes obligatoires d’assurance maladie. Cette baisse correspond à une partie de l’effort supplémentaire sur l’ONDAM, décidé dans le cadre du pacte de stabilité.

L’article 39 du PLFSS vise à achever l’universalisation de la prise en charge des frais de santé et à garantir l’effectivité de ce droit tout au long de la vie des assurés. Si la couverture maladie universelle (CMU) a sans conteste permis d’améliorer sensiblement l’accès aux soins, dans les faits, de nombreuses ruptures dans la prise en charge des frais de santé sont encore constatées. Ce constat a été souligné dans un récent rapport du Haut Conseil du financement de la protection sociale (120) : « les agents en charge de la gestion des droits peuvent passer un temps important – et que l’on peut fondamentalement juger inutile puisque les droits seront in fine ouverts – à affecter les dossiers au bon organisme, au prix d’interruptions de droits. Cette situation résulte de ce que la vérification des droits continue à être opérée en fonction de classements professionnels. »

Selon la nouvelle rédaction de l’article L. 111-1 du code de la sécurité sociale, la prise en charge des frais de santé reposera désormais sur deux conditions alternatives : l’exercice d’une activité professionnelle ou la résidence stable et régulière en France (121).

La couverture universelle porte exclusivement sur les prestations « en nature », qui correspondent à la prise en charge des frais de santé. S’agissant des prestations « en espèces », l’alinéa 3 du même article maintient le principe de l’assurance par le travail, en garantissant les travailleurs « contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leurs revenus ».

Par ailleurs l’article supprime progressivement la notion d’ayant droit majeur : il est proposé que chaque assuré majeur dispose désormais d’une affiliation personnelle à la sécurité sociale, lui permettant de percevoir son propre décompte de remboursements.

L’article 39 opère donc une simplification indispensable des circuits administratifs qui permettent l’accès aux soins en France. Mais il convient de garder à l’esprit que cette mesure ne modifie en rien le champ des personnes bénéficiant d’une couverture maladie.

L’impact budgétaire sera donc uniquement lié aux économies de gestion, et, éventuellement, aux résultats d’un contrôle accru, recentré sur le respect de la condition de résidence. Selon l’évaluation préalable de l’article, la mesure pourrait permettre de réduire progressivement d’au moins un quart les effectifs consacrés à la gestion des droits dans les organismes (mutations, gestion des droits CMU), soit environ 2 000 ETP. Une meilleure répartition des activités dans le cadre des délégations de gestion permettra également d’importantes économies s’agissant des systèmes d’information. L’économie à terme se monterait au minimum à 100 millions d’euros. La mise en œuvre de ces évolutions devra être organisée dans le cadre des conventions d’objectifs et de gestion des régimes concernés.

Concernant le volet financier de la réforme proposée à l’article 39, l’article 20 propose de simplifier les transferts financiers entre les différents régimes d’assurance maladie obligatoire afin de clarifier l’architecture de l’assurance maladie et d’achever son intégration financière. Il vise également à adapter les conditions actuelles d’assujettissement aux cotisations d’assurance maladie, sans que l’impact financier soit, là aussi, significatif.

L’article 46 du présent PLFSS prévoit un transfert de charges entre le budget de l’État – programme 157 – et l’assurance maladie, à compter de 2017, de deux catégories de dépenses relatives aux établissements et services d’aide par le travail (ESAT) :

– le budget de fonctionnement des ESAT, prévu pour 2016 à 1,47 milliard d’euros,

– les crédits du plan d’aide à l’investissement, prévus dans le bleu budgétaire à 1,5 million d’euros pour 2016,

soit un total de 1,5 milliard d’euros environ, l’étude d’impact chiffrant ce transfert à 1,5 milliard d’euros.

En intégrant l’ONDAM médico-social, ces dépenses seront pilotées plus finement, mais, a priori, elles seront maintenues à leur niveau. L’étude d’impact indique clairement qu’il s’agit de rassembler sous le même financeur (ARS) les ESAT et les autres établissements sociaux et médico-sociaux afin de pouvoir piloter globalement le budget alloué à ces établissements : contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, fongibilité des enveloppes, maîtrise du taux d’évolution de la dépense, à la différence de la reconduction historique des enveloppes comme c’est le cas actuellement.

Du fait que ce transfert n’est prévu qu’à partir de 2017, il n’en est fait mention ni dans l’ONDAM 2016, ni dans l’annexe 6 au PLFSS sur les mesures de transferts, ni dans le projet annuel de performances du programme 157, ni dans l’exposé des motifs du PLF 2016, qui récapitule ces mouvements de périmètre.

Pour 2016, l’étude d’impact de l’article indique simplement une charge supplémentaire de 0,1 million d’euros pour la branche AT-MP, car l’article intègre également la mise en place d’une couverture AT-MP pour certains travailleurs en ESAT.

Enfin, l’article 47 poursuit le même objectif, à savoir contenir l’évolution de la dépense des établissements pour personnes handicapées. Il modifie leur méthode de tarification (passage d’un financement au prix de journée à une dotation globale, ce qui facilite la conclusion de CPOM). Cette amélioration du suivi de la dépense est chiffrée dans l’étude d’impact à environ 35 millions d’euros par an.

Côté dépenses, deux facteurs expliquent essentiellement cette notable amélioration des comptes de la branche : le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite, qui poursuit sa montée en charge jusqu’en 2017, et la période actuelle de très faible inflation puisqu’en moyenne annuelle, la revalorisation des pensions serait de 0,33 % en 2016. Ces deux facteurs généreraient une économie de 5,1 milliards d’euros en 2016, après 4,1 milliards d’euros en 2015.

Pourtant, 2016 serait l’année du pic des dépenses de retraites anticipées. Au total, les assouplissements successifs des conditions d’accès à la retraite anticipée devraient se traduire par 2,5 milliards de dépenses en 2016, puisque 142 000 assurés supplémentaires partiraient en retraite avant l’âge légal grâce aux réformes sus-évoquées.

FLUX DE DÉPARTS EN RETRAITE ANTICIPÉE (RÉGIME GÉNÉRAL)

En ce qui concerne le FSV, le montant de ses charges se stabiliserait entre 2016 et 2019 autour de 20 milliards d’euros, soit un niveau de dépenses équivalent aux trois années précédentes. Alors que les recettes n’augmentent que faiblement, la réduction du déficit reste lente, même si elle est réellement amorcée.

Il est à noter qu’un changement de périmètre interviendra en 2016, puisque selon l’article 15 du présent PLFSS, le FSV ne prendra plus en charge la majoration de pension pour enfants (4,6 milliards d’euros). Corrélativement, le montant correspondant qui était compensé au FSV par la CNAF sera directement versé à la CNAV.

Cette clarification bienvenue ne résout cependant pas le déficit structurel du FSV.

Dans son dernier rapport annuel, le Conseil d’orientation des retraites s’est attaché à l’analyse de notre système de retraites sur le long terme par rapport à l’évolution de la conjoncture économique et sociale (122). Pour ce faire, le COR retient cinq scénarios économiques, avec pour chacun une hypothèse de stabilisation du chômage à 10 % de la population active.

HYPOTHÈSES DE LONG TERME DANS LES SCÉNARIOS
ET VARIANTES ÉCONOMIQUES DU COR

 

Scénario A*

Variante A* chômage 10 %

Scénario A

Scénario B

Variante B chômage 10 %

Scénario C

Scénario C*

Variante C* chômage 10 %

Croissance annuelle de la productivité du travail

2 %

2 %

1,8 %

1,5 %

1,5 %

1,3 %

1 %

1 %

Taux de chômage

4,5 %

10 %

4,5 %

4,5 %

10 %

7 %

7 %

10 %

Source : hypothèses COR 2015.

Selon le scénario économique, le système de retraites pourrait dégager des excédents à partir du milieu des années 2020, ou bien rester de manière persistante en besoin de financement. En moyenne à l’horizon de 25 ans, le système de retraite serait en excédent dans les scénarios A et A’, et en besoin de financement dans les autres scénarios.

SOLDE FINANCIER PROJETÉ DU SYSTÈME DE RETRAITES (CONVENTION COR)

Source : COR.

Pour 2019, le Gouvernement prévoit d’ailleurs un déficit de l’ordre d’un milliard d’euros, du fait d’une nouvelle dynamique de départs en retraite.

Il convient donc de rester prudent sur la capacité de notre système de retraites à pérenniser la situation d’équilibre, voire d’excédents, aujourd’hui retrouvée. En ce domaine, et même s’il faut se féliciter des efforts accomplis collectivement, il convient de garder à l’esprit qu’en l’absence de mesures structurelles, les jeunes générations subiraient tout à la fois une baisse du montant de leur pension par rapport à leurs revenus moyens, et une hausse de leur taux de cotisation.

Certes, l’espérance est un risque à courir (123) et le pire n’est jamais certain. Mais il convient de rester très vigilant sur la soutenabilité, pour les générations à venir, du régime de retraites tel que nous le construisons.

Étant donné les charges supportées par le FSV au titre de la validation de trimestres pour les personnes sans emploi, le taux de chômage a une incidence directe sur les comptes du fonds. La situation actuelle étant dégradée, le déficit engendré ne peut se résorber à court terme, sans modification des droits pris en charge par la solidarité.

ÉVOLUTION DU COÛT DE LA PRISE EN CHARGE PAR LE FSV DES PÉRIODES DE CHÔMAGE

Source : commission des finances d’après les données du FSV.

Plusieurs informations relatives à l’incidence du niveau de chômage sur le FSV, transmises suite aux auditions menées par le rapporteur pour avis, ont permis de cibler précisément les enjeux qui nous attendent.

Pour 2019, la prévision du nombre de chômeurs pris en charge par le FSV (124) s’établit à 3,634 millions de personnes. Le déficit attendu pour cette année-là serait de 2,8 milliards d’euros. Le déficit moyen du FSV pour la période allant de 2008 à 2019 ressortirait donc à 3,6 milliards d’euros.

Or, quand bien même l’effectif de chômeurs aurait été stabilisé au niveau de 2008 (125), soit 2,738 millions de chômeurs, le FSV serait encore déficitaire de
– 0,2 milliard d’euros fin 2019, ce qui représente un déficit moyen de
– 0,9 milliard d’euros sur la période de 2009 à 2019, et n’enregistrerait aucun excédent au cours de la séquence évoquée.

Comme il a été précisé au rapporteur pour avis, seule une baisse supplémentaire de 1 million de chômeurs (126) par rapport aux effectifs projetés en 2019 permettait de retrouver l’équilibre à cet horizon, avec même un léger excédent de 0,15 milliard d’euros, sur la base de 2,634 millions de chômeurs contre 3,634 dans la projection du présent PLFSS.

En se fondant sur un nombre de chômeurs intermédiaire entre celui de 2008 et celui de 2016, le déficit moyen enregistré sur la période 2009-2019 serait de 2,6 milliards d’euros. Cette approche permet de donne un ordre de grandeur du déficit structurel actuel du fonds.

Actuellement, une personne au chômage représente pour le FSV un montant annuel de cotisations à verser de l’ordre de 2 800 euros, la cotisation progressant par ailleurs de près de 2 % par an en moyenne, du fait de son indexation sur le SMIC et sur le taux de la cotisation vieillesse.

À périmètre de recettes et dépenses inchangé, seules des conditions extrêmement favorables en termes d’emploi pourraient permettre au FSV de retrouver l’équilibre de façon durable.

 

2014

2015

2016

2017

2018

2019

AT/MP

Recettes

12,3

12,4

12,5

12,7

13,6

14,2

Dépenses

11,7

11,8

12,0

12,1

12,2

12,3

Solde

0,7

0,6

0,5

0,6

1,5

1,9

 

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Recettes

56,3

52,8

48,8

50,1

51,6

53,1

Dépenses

59,0

54,4

49,6

50,4

51,6

52,8

Solde

– 2,7

– 1,6

– 0,8

– 0,3

0,0

0,3

Source : annexe B du PLFSS pour 2016.

Si les réformes mises en œuvre ces dernières années contribuent pour beaucoup à cette évolution positive, il convient d’insister sur l’importance pour la branche du transfert de charge sur les aides au logement, intervenu en 2015, et qui se poursuit en 2016.

L’importance des prestations gérées par la CNAF pour le compte d’autrui a été rappelée supra. Les circuits complexes de financement des prestations ont parfois fait l’objet de critiques, en grande partie justifiées. Concernant la prise en charge de certaines aides au logement par l’État, et d’autres par la CNAF, le Cour des comptes faisaient remarquer dès 2007 que les difficultés de coordination rencontrées renvoyaient à la « question de fond de la nature des aides personnelles au logement et de leur cogestion par l’État et la branche famille » (127). 

Elles sont régies par les articles L. 831-1 à L. 835-7 du code de la sécurité sociale.

Dans un plus récent rapport, réalisé à la demande de la commission des finances du Sénat, la Cour a de nouveau souligné la complexité du financement des aides au logement (128).

En réponse à ces critiques, mais aussi et surtout afin de compenser les effets du pacte de responsabilité et de solidarité sur les recettes de la sécurité sociale, le Gouvernement a entrepris le transfert progressif de la fraction des aides au logement fiancées par la branche famille vers le budget de l’État :

– la loi de finances initiales pour 2015 a opéré le transfert vers l’État de la part de l’aide personnalisée au logement (APL) jusqu’alors financée par la branche famille. Cette budgétisation de la dépense d’APL a permis d’alléger de 4,75 milliards d’euros les dépenses de la CNAF ;

– l’article 21 du projet de loi de finances pour 2016 transfère au budget de l’État l’allocation de logement familiale, ce qui représentera en 2016 une moindre dépense de 4,7 milliards d’euros pour la CNAF (129).

Ces deux aides relèveront plus précisément, et à l’instar de l’ALS, du programme « Aide à l’accès au logement » de la mission Égalité des territoires et logement.

Selon les données issues des « comptes du logement », la progression de ces aides est très dynamique. De 13,9 milliards d’euros en 2004, elles ont atteint 17,7 milliards d’euros en 2014, soit une progression de 28 % en dix ans.

Si ces mouvements sont neutres à court terme sur le solde de la CNAF, puisqu’ils interviennent en compensation des baisses de recettes liées au pacte de responsabilité, la modification du périmètre des dépenses peut être analysée comme structurellement favorable à la branche dans la mesure où la charge du financement des aides au logement croissait plus vite que l’ensemble des charges de la branche, comme l’indique le tableau ci-dessous :

PROGRESSION DES CHARGES D’AIDES AU LOGEMENT AU REGARD DE LA PROGRESSION DE L’ENSEMBLE DES CHARGES DE LA CNAF

 

2013

2014

2015

2016

Augmentation des charges nettes de la CNAF hors aides au logement

+ 1,9 %

+ 1,2 %

– 1,4 %

+ 0,1 % (130)

Augmentation au titre de l’APL

+ 5%

+ 4%

+ 4,2%

+ 3,2%

Augmentation au titre de l’ALF

+ 2,9 %

+ 1,6 %

+ 2,2 %

+ 1,7 %

Source : commission des finances d’après les rapports à la Commission des comptes de la sécurité sociale et les projets annuels de performances.

Le Fonds national d’aide au logement retrace désormais, de façon plus cohérente, l’effort de l’État pour cette politique publique à destination des plus vulnérables :

MODALITÉS D’ÉQUILIBRE DU FNAL POUR 2016

(en millions d’euros)

CHARGES DU FNAL

18 188

Prestations APL

8 220

Prestations ALS

5 012

Prestations ALF

4 599

Frais de gestion

357

RESSOURCES DU FNAL

18 188

Cotisations employeurs

2 657

Prélèvement sur la PEEC

100

Surtaxe sur les plus-values immobilières

45

Contribution État

15 386

Source : projet annuel de performances 2016 du programme 209.

Plusieurs dispositions du PLFSS pour 2016 portent sur la branche famille. Il s’agit essentiellement de mesures « techniques » qui n’auront que peu d’incidences sur la trajectoire financière globale de la branche.

L’article 31 propose de généraliser la garantie contre les impayés de pension alimentaire (GIPA), actuellement expérimentée dans vingt départements depuis le 1er octobre 2014.

Le dispositif de la GIPA prévoit :

– le versement d’une allocation de soutien familial (ASF) (131) différentielle dans les situations où la pension alimentaire fixée par le juge et payée est inférieure au montant de l’ASF, soit 100 euros par mois par enfant à charge au 1er avril 2015 (132) ;

– l’ouverture du droit à l’ASF en cas de paiement irrégulier de la pension alimentaire ;

– le renforcement des procédures de recouvrement des pensions alimentaires impayées auprès du parent débiteur en cas de défaillance : en cas d’échec du recouvrement directement auprès du débiteur, la CAF concernée pourra mettre en place une procédure appelée procédure de paiement direct, permettant de récupérer jusqu’à vingt-quatre mois de pensions alimentaires impayées.

Les premiers bilans de l’expérimentation révèlent des résultats probants puisque 2 800 familles bénéficient déjà de la nouvelle ASF différentielle.

En outre, la procédure aménagée de paiement direct, plus efficiente, est source de simplification pour les organismes gestionnaires.

L’évaluation préalable des articles du PLFSS précise que la détermination précise de l’impact financier de la généralisation du dispositif est particulièrement difficile à réaliser : il dépend du recours des allocataires potentiels à la nouvelle ASF différentielle et il implique de prendre en compte les économies, difficilement quantifiables, que l’ensemble du dispositif pourrait générer par ailleurs (133).

Les articles 32 et 33 du PLFSS pour 2016 visent à améliorer la prise en charge par les CAF des droits des personnes résidant outre-mer. Plus précisément, l’article 32 permet de confier aux CAF la gestion des prestations familiales dues aux fonctionnaires en poste en Guyane, Guadeloupe, Martinique et à La Réunion. Actuellement, ces fonctionnaires continuent de percevoir les principales prestations familiales directement de leur employeur. L’article met donc fin à une complexité juridique et financière certaine. L’article 33 étend quant à lui l’ASF et le complément mode de garde (CMG) au territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon. Lors des auditions menées par le rapporteur pour avis, il est apparu que cette amélioration des droits des habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon était juste et bienvenue.

L’article 57 du PLFSS pour 2016 représente un premier volet de la réforme des modalités de revalorisation des prestations, le second volet figurant à l’article 33 du PLF pour 2016 (134).

L’objectif clairement affirmé est de rendre plus lisibles et plus simples ces modalités, en harmonisant les dates de revalorisation des prestations sociales. Par ailleurs, le Gouvernement propose de sécuriser de manière le montant des prestations en cas d’inflation négative, ce qui avait d’ailleurs été décidé en 2015, mais sans qu’une disposition législative ne le prévoie (135). Ce « bouclier », qui permet de fixer un plancher au coefficient de revalorisation des prestations fixé à 1, figure à l’article 33 du PLF pour 2016 et s’appliquera aux prestations de sécurité sociale.

En ce qui concerne le champ des prestations servies par les organismes de sécurité sociale, ces revalorisations interviennent actuellement (136) :

– au 1er avril (prestations familiales, pensions d’invalidité, majoration pour tierce personne, rentes d’accidents du travail et maladies professionnelles, capital décès) ;

– au 1er juillet (plafonds de ressources pour la couverture maladie universelle complémentaire – CMU-c, aide à l’acquisition d’une complémentaire santé – ACS – et aide médicale de l’État – AME) ;

– ou au 1er octobre (pensions de retraite et salaires servant de base au calcul, minima de pension).

Désormais, ces revalorisations seront regroupées sur deux dates seulement :

– au 1er avril : les indemnités en capital et les rentes d’incapacité permanente s’agissant des ATMP, les pensions d’invalidité ou de réforme y compris leurs majorations, l’allocation veuvage et l’ensemble des prestations familiales indexées sur la base mensuelle de calcul des allocations familiales, l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), les plafonds de ressources pour la couverture maladie universelle complémentaire – CMU-c, pour l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS) et pour l’aide médicale de l’État (AME).

– au 1er octobre : l’ensemble des pensions de droit direct et de droit dérivé y compris leurs majorations.

   

2013

2014

2015 (p)

2016 (p)

Prix hors tabac estimés pour l’année n (par le RESF en septembre n)*

(1)

1,2

0,5

0,1

1

Régularisation sur l’inflation n–1

(4) = (2) – (3)

0,1

– 0,5

0**

Inflation définitive constatée pur l’année n–1

(2)

1,9

0,7

0,4

Prix hors tabac estimés en n–1 pour l’année n–1

(3)

1,8

1,2

0,5

Revalorisation effective

(5) = (1) + (4)

1,3

0,0

0,1

1,0

Augmentation en moyenne annuelle

 

1,5

0,32

0,03

0,33

Inflation mesurée par l’INSEE : prix hors tabac de l’année n (publiée en janvier n+1)

 

0,7

0,4

   

*Par la CEN en mars n jusqu’en 2013.

** La régularisation ne s’applique pas en 2015 compte tenu du gel des pensions initialement prévu en LFRSS pour 2014.

Source : Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015.

CALCUL DU TAUX DE REVALORISATION APPLIQUÉ À LA BMAF

(en %)

 

2013

2014

2015 (p)

2016 (p)

Estimation de l’inflation hors tabac retenue pour l’année n (1)

1,2

1,1

0,0

1,0

Ajustement sur n–1* (2)=(4)–(1)

0,0

– 0,5

0,0

 

Revalorisation au 1er avril (3)=(1)+(2)

1,2

0,6

0,0

1,0

Revalorisation en moyenne annuelle

1,2

0,8

0,2

0,8

Coût en millions d’euros

350

230

40

230

Inflation constatée ou prévision actualisée (4)

0,7

0,4

0,1**

 

* L’ajustement sur n-1 représente l’écart entre la prévision d’évolution des prix et la réalisation. En 2015, le correctif (négatif) au titre de 2014 n’a pas été appliqué afin de ne pas diminuer le montant des prestations familiales.

** Pour 2015, l’inflation présentée est celle correspondant aux dernières prévisions.

Source : Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale – septembre 2015

Désormais, il sera fait application d’un indice connu définitivement à la date de revalorisation, soit un coefficient d’évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation hors tabac calculé sur la base des douze derniers indices mensuels de ces mêmes prix publiés par l’INSEE l’avant dernier-mois qui précède la date de revalorisation des prestations concernées.

Le présent article n’emporte en revanche aucun changement pour les aides au logement, qui sont d’ores et déjà revalorisées au 1er octobre selon un indice constaté.

Selon l’évaluation préalable jointe au PLFSS, cette réforme conduirait à une économie de l’ordre de 400 millions d’euros en 2016 pour l’ensemble des régimes de base obligatoires. Cependant, aucune explication n’est fournie à l’appui de cette évaluation. Par ailleurs, l’étude d’impact de l’article miroir du PLF pour 2016 prévoit une économie pour l’ensemble des administrations publiques de 180 millions d’euros.

Pour les années suivantes en revanche, les deux études d’impact précisent que « l’incertitude sur le niveau 2017 de l’impact budgétaire de cette mesure est très élevée, puisque cet impact supposerait de connaître avec précisions, au-delà des prévisions associées aux textes financiers, les variations mensuelles d’inflation. À terme, la mesure est neutre compte tenu de l’alignement sur longue période entre inflation prévisionnelle et inflation constatée. »

Les articles 59, 60 et 61 visent à améliorer les outils dont disposent les organismes de sécurité sociale pour la lutte contre la fraude.

L’article 59 permet de sécuriser juridiquement l’utilisation par un organisme de sécurité sociale de données transmises par un autre organisme et obtenues sur la base de contrôles effectués par ce dernier. Actuellement, un organisme ne peut fonder une sanction que sur la base de contrôles effectués par ses propres agents. Ce doublement des moyens de contrôle ne se justifie pas, puisque les vérifications sont effectuées dans les mêmes conditions et selon les mêmes règles. Selon l’évaluation préalable de l’article, cette mesure pourrait accroître les résultats de lutte contre la fraude pour les autres régimes (MSA, RSI, régimes spéciaux) à hauteur de 2,5 millions d’euros tous risques confondus.

L’article 60 vise à réparer une injustice résidant dans la différence de traitement entre les fraudes commises par des particuliers en situation de surendettement et les fraudes commises par des professionnels faisant l’objet d’une procédure collective. Pour ces derniers, la créance frauduleuse ne pouvait faire l’objet d’une annulation. C’est ce point que vient modifier l’article 60.

Enfin, l’article 61 permet aux organismes de sécurité sociale d’améliorer leurs canaux de transmissions et leurs échanges d’information. Il habilite le conseil national des activités privées de sécurité à échanger des informations relatives au travail illégal.

Par ailleurs, l’article autorise les échanges d’information entre les organismes de sécurité et les services de renseignement, afin notamment d’accentuer le contrôle de la condition de résidence.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission, au cours de sa séance du 14 octobre 2015, examine pour avis le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 (n° 3106).

M. le président Gilles Carrez. Comme de coutume, la commission des finances s’est saisie pour avis de l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) : le budget de la sécurité sociale est, en volume, beaucoup plus important que celui de l’État. Cette année, de nombreuses mesures importantes, en particulier des baisses de prélèvements obligatoires des entreprises, figurent dans le PLFSS et non dans le projet de loi de finances (PLF).

M. Dominique Lefebvre, rapporteur pour avis. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est relativement court – il ne compte que 61 articles. C’est le quatrième de cette législature, et c’est un texte qui s’inscrit dans la continuité des précédents. Il n’y a là aucun bouleversement majeur du financement de notre protection sociale.

Mon rapport, qui sera mis en ligne à la fin de cette semaine, apportera des éclairages qui me paraissent vraiment intéressants. Il comprendra un développement sur la dette sociale, mais aussi sur le financement des allégements de cotisations sociales ; il se penchera par exemple sur l’effet sur le coût du travail des mesures prises depuis les années 1990 – cette perspective historique m’a paru nécessaire. Il examinera également l’évolution des mesures de régulation de la dépense prises notamment depuis le début de cette législature.

Les masses financières en jeu sont importantes, notre président l’a rappelé. Les dépenses des administrations de sécurité sociale (ASSO) représentaient en 2014 575 milliards d’euros, c’est-à-dire 46,9 % des dépenses publiques et 27 % du PIB. Ce niveau nous distingue des autres pays européens, puisque nos dépenses de protection sociale, au sens large, sont supérieures de près de 4 points de PIB à celles de l’ensemble de nos partenaires. Bien sûr, les comparaisons sont difficiles entre ce qui est obligatoire, facultatif, de base, complémentaire… L’Allemagne, par exemple, dispose souvent d’accords d’entreprise : ces sommes relèvent sans doute plutôt de la contribution obligatoire, mais elles n’entrent pas dans les comptes publics.

Il n’est néanmoins contesté par personne que notre niveau de dépenses sociales est particulièrement élevé. Nous devons nous demander s’il en résulte un niveau de protection plus important et si cette dépense est véritablement efficiente.

Depuis la fin des années 1970, l’évolution des dépenses sociales explique les deux tiers de l’augmentation de la dépense publique en France : elles ont progressé davantage que les dépenses de l’État, des organismes divers d’administration centrale (ODAC) et des collectivités territoriales. La cause principale de ce phénomène est le vieillissement de la population, qui entraîne à la fois le versement de pensions plus nombreuses et une hausse des dépenses de santé. Au début des années 1960, les dépenses de santé étaient d’environ 4 points de PIB ; elles s’élèvent aujourd’hui à 11,7 points de PIB. Les dépenses de retraite sont, elles, passées de 10,3 points à 13,9 points. Les dépenses de santé représentent 45 % de l’augmentation de la dépense sociale, et les dépenses de retraite 40 %.

Il faut, en matière de finances sociales, faire attention aux différentes notions que nous utilisons. Les administrations de sécurité sociale englobent l’ensemble des organismes, y compris les régimes complémentaires, et Pôle Emploi… La sécurité sociale proprement dite, ce sont essentiellement les régimes obligatoires de base – nous avons depuis 1945, je le rappelle, une pléiade de régimes, simplifiés au fil du temps. En 2014, leurs dépenses représentaient 472,9 milliards d’euros ; on passera à 475,9 milliards en 2015. Elles se décomposent de la façon suivante : environ 198 milliards pour la maladie, 224 milliards pour la vieillesse, 54 milliards pour la famille et 13 milliards pour les accidents du travail. L’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale présente en 2015 un déficit prévisionnel de 8,5 milliards d’euros, auxquels il convient d’ajouter le déficit de 3,8 milliards du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), ce dernier étant extrêmement dépendant de la conjoncture économique. Au total, le déficit est donc de 12,4 milliards.

Certains des régimes obligatoires de base seront très prochainement en excédent ; le régime général stricto sensu pèse 348,3 milliards en 2015 : 174 milliards pour la maladie, 120 milliards pour la vieillesse, de 54 milliards pour la famille, 12 milliards pour les accidents du travail. Son déficit prévisionnel en 2015 est de 9 milliards.

La question du déficit des régimes obligatoires de base, aujourd’hui, se concentre donc exclusivement sur le régime général.

Le solde des régimes de sécurité sociale s’améliore incontestablement. La trajectoire financière de la sécurité sociale est de longue date dégradée : depuis 1990, c’est-à-dire depuis vingt-cinq ans, ses comptes n’ont été excédentaires – très légèrement – qu’à trois reprises. À partir de 2003, ce déficit s’est aggravé : il n’a plus été inférieur à 5 milliards d’euros, et a régulièrement dépassé les 10 milliards d’euros – niveau auquel nous sommes aujourd’hui revenus. Ces déficits sont pour l’essentiel dus aux branches maladie et vieillesse ; la branche accidents du travail-maladies professionnelles a connu quelques années de déficit, de même que la branche famille.

Les causes de ces déficits sont multiples. La conjoncture compte, bien sûr, mais il faut surtout incriminer les errements de la gouvernance publique, qui a été le fait de tous les gouvernements pendant longtemps. On construisait notamment des budgets sur des prévisions macro-économiques trop optimistes ; les réformes, sur ce point, ont été menées à bien : l’existence du Haut Conseil des finances publiques et les procédures européennes rendent beaucoup plus difficile l’utilisation de prévisions de croissance farfelues. Or être raisonnable sur les prévisions de recettes incite à une certaine rigueur dans la gestion des dépenses… Ce sont là toujours des choix politiques complexes.

Le résultat de ces déficits, c’est une dette sociale, transférée à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), qui s’élève à près de 270 milliards, c’est-à-dire 13,5 points de PIB. Cette dette nous coûte extraordinairement cher, même si les taux moyens de la CADES sont aujourd’hui à peine supérieurs à 2 %, et même si elle est très bien gérée. Le paradoxe, vous le verrez dans le rapport, c’est que l’ACOSS, qui aura plus emprunté sur les marchés en 2015 qu’en 2014, aura gagné de l’argent en 2015 : ses emprunts à court terme avaient en effet des taux d’intérêt négatifs. Pour autant, il ne faudrait pas que cela dure !

Nous avons amorti, depuis la création de la CADES en 1996, un peu moins de 100 milliards d’euros de dette sociale : nous avons ainsi payé, sur la même période, près de 45 milliards d’euros d’intérêts. Le report du retour à l’équilibre des comptes sociaux a donc un coût, important, ce que nos concitoyens constatent sur leur feuille de paye, puisque la CADES est aujourd’hui principalement financée par la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).

Venons-en maintenant aux résultats obtenus durant cette législature. En 2011, le déficit s’est élevé à près de 17 milliards d’euros. Depuis lors, il n’a cessé de se réduire, pour atteindre 9,7 milliards d’euros en 2014. Pour 2015, la prévision de déficit s’établit à 9 milliards d’euros. Sur les trois derniers exercices, les résultats ont été meilleurs que les prévisions, même si ce n’est parfois que de quelques centaines de millions d’euros.

Cet incontestable retour à l’équilibre est inégal selon les différentes branches de la sécurité sociale. La branche accidents du travail et maladies professionnelles est excédentaire, ce qui a fait naître d’ailleurs des revendications du MEDEF. La branche famille présente également un déficit – qui est sans doute le déficit le moins acceptable – mais celui-ci se réduit. La branche vieillesse a divisé son déficit par cinq depuis 2013, sous l’effet des mesures prises par les gouvernements successifs.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est grâce à la réforme de 2010 !

M. le rapporteur pour avis. J’ai bien compris qu’il y avait un débat pour s’attribuer la paternité de ce résultat.

M. Olivier Carré. Ah non, il n’y a pas de débat ! C’est bien grâce à la réforme de 2010 !

M. le rapporteur pour avis. Comme responsable de ces questions au cabinet de Michel Rocard, j’ai rédigé en 1991 le Livre blanc sur les retraites, intitulé « Un contrat entre les générations ». Ce travail a servi à tous les gouvernements suivants. Michel Rocard disait, je vous le rappelle, que le dossier des retraites pouvait faire sauter n’importe quel gouvernement…

Mme Marie-Christine Dalloz. Il fallait du courage pour agir en 2010 et nous l’avons fait !

M. le rapporteur pour avis. Les mesures prises en 2010 étaient insuffisantes ; au cours de cette législature, nous avons pris des mesures sur les dépenses, mais aussi sur les recettes – celles-ci ayant d’ailleurs porté uniquement sur les salariés, puisque les augmentations de cotisations à la charge des entreprises ont été compensées par une baisse des cotisations familiales patronales. C’est l’action cumulée de toutes ces mesures qui permet d’envisager le retour à l’équilibre.

Nous connaissons bien maintenant tous les leviers de maîtrise des comptes des régimes de retraite. Aujourd’hui, tout doit nous mener à une hausse progressive de l’âge moyen de départ à la retraite – un graphique sera consacré dans mon rapport à l’évolution de ce facteur, indicateur principal de l’évolution de la dépense. Pour cela, il faudra jouer tant sur l’âge légal de départ que sur l’augmentation de la durée de cotisation requise. Pour 2015, le nombre d’assurés du régime général partant à la retraite serait réduit de 7,2 % par rapport à 2014, malgré l’accélération du nombre de départs anticipés d’assurés bénéficiant du dispositif relatif aux carrières longues.

En ce qui concerne la branche famille, le déficit se réduit également, pour atteindre 1,6 milliard d’euros en 2015 : là encore, le retour à l’équilibre est proche. Cette situation est le résultat de la réforme de la politique familiale décidée par l’actuelle majorité. Deux mesures principalement ont fait débat entre nous : la mise sous condition de ressources des allocations familiales permet d’améliorer les comptes de la branche de près de 800 millions d’euros en année pleine ; le plafonnement du quotient familial, qui est une forme de redistribution, a permis de dégager en 2014 environ un milliard d’euros, somme qui a été affectée à la branche famille.

La branche accidents du travail et maladies professionnelles (ATMP) dégagera en 2015 un excédent de 600 millions d’euros. C’est la seule branche qui demeure presque purement contributive : cette nature assurantielle impose un objectif d’équilibre annuel. Les gouvernements ont parfois reculé le moment d’ajuster les taux de cette branche, pour profiter des excédents dégagés…

Cela doit nous rappeler que s’il est intéressant de raisonner en solde par branche, il est aussi nécessaire de raisonner en solde global : le solde par branche est très largement une construction, puisqu’il dépend de la façon dont on affecte des ressources qui peuvent évoluer et être réaffectées, année après année.

La branche maladie représente toujours un enjeu essentiel, puisqu’elle pèse pour près de 40 % dans la dépense de protection sociale. En 2015, elle présenterait un déficit de 7,5 milliards d’euros, en augmentation de 0,9 milliard d’euros par rapport à 2014 – paradoxalement, alors que l’ONDAM non seulement diminue, mais n’a jamais été aussi bien respecté. Cette situation est due à la dynamique des dépenses de soins de ville et à l’augmentation des dépenses hors du champ de l’ONDAM, notamment les prestations d’invalidité.

Les facteurs d’évolution des dépenses de santé sont bien connus. D’une part, la demande croît, car la population augmente et vieillit. D’autre part, l’offre s’améliore : des progrès techniques sont réalisés, de nouveaux médicaments inventés – nouveaux médicaments dont le coût doit être régulé, car il est parfois parfaitement irrationnel ; la démographie médicale est également un facteur connu d’augmentation de la dépense. Plus il y a de médecins, d’infirmières, de masseurs-kinésithérapeutes, de dentistes… plus les dépenses sont importantes. Nous n’échapperons donc pas à une réflexion sur la démographie médicale et sur la rationalisation du parcours de soins.

Il convient de signaler que l’exécution prévisionnelle de l’ONDAM en 2015 aboutirait à une hausse de seulement 2 %, soit un niveau historiquement faible, le plus bas depuis 1998.

Au cours de cette législature, le choix de la majorité et du Gouvernement a été d’accorder de nouveaux droits, mais aussi d’améliorer le taux de prise en charge par la sécurité sociale. Même la Cour des comptes considère que ce second objectif est important ; abaisser le taux de prise en charge, en effet, ne peut mener qu’à une maîtrise purement financière des dépenses de santé. Certains diront qu’une amélioration de la prise en charge fait déraper les dépenses ; or, au contraire, je ne sache pas que l’augmentation des dépenses à charge, qui se traduit d’abord par un transfert vers les régimes complémentaires, ait jamais entraîné de rationalisation ou d’optimisation de l’offre de soins, hospitalière ou de ville. Nous devons plutôt responsabiliser les professionnels de santé et les patients.

Les projections pour l’avenir confirment cette tendance au rétablissement des comptes à l’horizon 2020, horizon qui reste pertinent pour des prévisions macro-économiques.

Pour 2016, la branche vieillesse retrouverait un solde positif, pour la première fois depuis 2004. La branche ATMP enregistrerait un excédent pour la quatrième année consécutive, et la branche famille serait à l’équilibre dès 2018. Le Gouvernement prévoit donc un excédent du régime général dès 2019. Dans ce tableau, le FSV fait exception, du fait de la structure même de ses dépenses, étroitement liées à la conjoncture économique. Le FSV souffre d’une insuffisante affectation de recettes, et il a parfois été victime – certains ici s’en souviennent – de sapeurs Camember qui déplacent ses ressources pour les mettre ailleurs… Retirer des recettes au régime structurellement déficitaire qu’est le FSV pour les attribuer à la CADES n’est pas une bonne idée. Le FSV finance principalement le minimum vieillesse, aujourd’hui appelé allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) ; il finance également des validations de trimestres pour la retraite de certaines périodes comme le chômage ou la maternité… ; il finance encore, par exemple, une partie des dépenses du minimum contributif (MICO). Il est donc extrêmement dépendant de la conjoncture, et notamment du niveau du chômage. Aujourd’hui, son déficit s’élève à presque 4 milliards d’euros ; il devrait être ramené en fin de période à 2,8 milliards.

Au-delà de 2019, le maintien à l’équilibre de notre système de protection sociale dépendra bien évidemment d’hypothèses macroéconomiques qu’il serait hasardeux d’anticiper. Je veux insister sur la mise en place, depuis vingt-cinq ans, d’outils de pilotage efficaces : le Haut Conseil des finances publiques, qui impose la construction des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale sur des hypothèses réalistes ; le Conseil d’orientation des retraites (COR), avec des mécanismes de régulation quasi automatique qui empêchent de laisser filer les déficits, ce qui ne nous dispensera pas de prendre d’autres mesures, mais permettra de le faire moins brutalement et plus régulièrement ; le comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie, dont le travail sur la gouvernance et le suivi des dépenses est très important pour nous tous. Ainsi, le COR a prévu différents scenarii d’évolution du système de retraites : il s’agit là de choix de société, qui devront être débattus lors de la prochaine élection présidentielle, en 2017.

Je reste persuadé pour ma part que l’équilibre repose sur un allongement de la durée de l’activité et un relèvement progressif de l’âge moyen de départ à la retraite, qui dépasse aujourd’hui à peine 62 ans – quels que soient les théories et les fétiches des uns et des autres, nous ne sommes donc ni à 60 ans pour tous, ni à 65 ans pour tous.

Quelles sont les mesures importantes de ce PLFSS ?

L’article 7 prévoit une extension du champ de la réduction des cotisations patronales familiales jusqu’à 3,5 SMIC, à partir du 1er avril 2016. Christophe Caresche a déposé un amendement sur cet article, nous y reviendrons donc. Mon rapport, je l’ai dit, présentera un historique de ces mesures de réduction du coût du travail.

L’article 8 met en œuvre la deuxième étape du pacte de responsabilité et de solidarité, avec le relèvement de l’abattement d’assiette de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) à 19 millions d’euros. Il n’y aura donc plus en 2016 que 20 000 entreprises redevables.

Différentes mesures de rationalisation de la dépense publique sont mises en œuvre par ce texte ; elles ne représentent toutefois que 80 millions d’euros d’économies en 2016. L’efficience des exonérations de cotisations sociales spécifiques à l’outre-mer sera améliorée ; trois dispositifs – les bassins d’emplois à redynamiser (BER), qui n’étaient qu’au nombre de deux, les zones de revitalisation rurale (ZRR) et les zones de restructuration de la défense (ZRD) – seront progressivement supprimés.

Les dates et les mécanismes de revalorisation des prestations sont simplifiés. Le seul défaut de cette mesure de simplification intelligente, c’est qu’elle permet une économie de trésorerie en 2016 : elle peut donc paraître suspecte ; mais, à long terme, elle est neutre pour la dépense sociale.

L’ensemble des mesures qui entraînent une perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale en 2016, soit 5,29 milliards d’euros, seront compensées à l’euro près – ce qui explique d’ailleurs la faible réduction du déficit de l’État.

Je voudrais maintenant aborder la question de la clarification des flux financiers entre l’État et la sécurité sociale. Le modeste rapporteur pour avis que je suis ne peut pas vous faire une présentation limpide d’une situation très complexe. Mais je veux insister sur le fait que deux faits conduisent à une clarification des relations entre l’État et la sécurité sociale et de l’affectation des ressources entre les différentes branches.

D’une part, la compensation par l’État des pertes de recettes de sécurité sociale aboutit naturellement à une baisse tendancielle du poids des cotisations par rapport à l’impôt dans le financement de la protection sociale. Vous verrez dans le rapport des tableaux qui, branche par branche, distinguent ce qui relève des cotisations – qui ne sont quasiment plus des cotisations salariales, mais essentiellement des cotisations patronales, sauf pour la branche vieillesse – de ce qui relève de l’impôt. Un débat nous attend sur la fusion entre l’impôt sur le revenu et la contribution sociale généralisée (CSG) : c’est un débat sur la redistribution ; mais il faut aussi, je crois, connaître l’histoire de chaque prélèvement, et de leur affectation. La CSG n’est pas un impôt unique : il en existe quatre, la CSG sur les revenus d’activité et de remplacement, la CSG sur les revenus du patrimoine, la CSG sur les revenus de placements et la CSG sur les jeux, dont les taux diffèrent. C’est de la première que l’on parle en général : or, je vous rappelle qu’elle a pour l’essentiel remplacé des cotisations maladie. La CSG n’a pas été conçue, à l’origine, pour fiscaliser le financement de l’assurance maladie, ni même pour financer l’assurance maladie au moyen d’un impôt progressif ; il s’agissait uniquement d’élargir le financement de la protection sociale.

Permettez-moi une petite digression. Faut-il financer l’assurance maladie par un impôt progressif ? C’est une question qui se pose depuis longtemps. Mais c’est à mon sens le meilleur moyen d’inciter ceux qui ont les revenus les plus élevés à demander, de plus en plus fortement, la fin de l’affiliation obligatoire à la sécurité sociale – en Allemagne, vous le savez, il est possible de renoncer aux assurances de base. Il faut donc toujours réfléchir, lorsque l’on met en place un mécanisme de financement, à ce que l’on finance, et à la légitimité de ce mécanisme. L’assurance maladie, c’est bien une assurance, donc une redistribution entre bien portants et malades ; si on la finance par un impôt progressif, les hauts revenus seront conduits à refuser peu à peu ce système. Je dis à ceux qui tiennent au régime obligatoire de sécurité sociale que plus les dépenses de protection sociale seront financées par un impôt progressif, plus le système obligatoire sera remis en cause. Bien sûr, on peut résister à ces revendications. Mais il y a d’autres moyens de redistribuer les revenus : l’impôt, mais surtout le versement de prestations. C’est là un point de vue personnel, qui m’oppose, sur le plan théorique, à notre collègue Pierre-Alain Muet en particulier.

D’autre part, le Gouvernement, plutôt que de transférer des recettes de l’État aux régimes de sécurité sociale, fait le choix – cohérent, selon moi – d’achever le mouvement enclenché l’an dernier avec la rebudgétisation de l’intégralité des aides au logement. Ainsi, la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) verse environ 85 milliards d’euros de prestations, mais le budget de la branche famille stricto sensu se réduit, pour s’établir à 50 milliards d’euros pour 2016.

Le reclassement s’explique ensuite par les effets de l’arrêt de principe, dit arrêt « de Ruyter », de la Cour de justice de l’Union européenne. M. de Ruyter, citoyen néerlandais et résident fiscal français, affilié à un régime de protection sociale aux Pays-Bas, percevait un revenu lié à un patrimoine situé dans ce pays. S’il a déposé un recours, c’est pour contester le fait qu’il payait un impôt affecté à la protection sociale française alors qu’il n’en bénéficiait aucunement. La Cour de justice lui a donné raison car, selon elle, le facteur décisif n’est pas la distinction que nous faisons entre cotisation sociale et impôt, mais l’affectation du produit du prélèvement quel qu’il soit. Je rappelle que la CSG sur les revenus d’activité n’est due que par les résidents fiscaux en France qui sont affiliés à un régime de protection sociale français.

Dès lors, la solution est toute trouvée : les résidents étrangers dont les revenus du patrimoine ont été soumis à la CSG, voire à la CRDS, seront remboursés des sommes ainsi acquittées depuis 2012 – soit environ 250 millions d’euros par an, alors que la taxation des revenus du patrimoine contribue à hauteur de 18,6 milliards d’euros au financement de la protection sociale. L’exonération de CSG des revenus du patrimoine des résidents français à l’étranger non affiliés en France, comme l’ont d’ailleurs souhaité nos onze députés représentant les Français établis hors de France, ne favorise guère les finances publiques, convenons-en. Le nécessaire reclassement des dépenses qui en découle consiste à ne réaffecter le produit de la fiscalisation des revenus du patrimoine et des revenus de placement jusque-là consacré aux quatre branches du régime général qu’aux seules prestations sociales non contributives.

Le long article 15 du PLFSS qui en résulte prévoit un reclassement d’ensemble qui suppose des transferts de recettes entre organismes et régimes de sécurité sociale, ainsi que la modification du taux de certaines taxes. In fine, le compte est bon. Actuellement, la CSG est pour l’essentiel affectée au financement de la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM) et, dans une moindre mesure, de la CNAF ; elle sera réaffectée au financement quasi intégral de la CADES et, surtout, à celui du FSV. Le texte de l’article est certes ardu, mais il est logique et simplifie le dispositif – un mouvement qui n’est pas encore achevé.

Je conclurai par le traitement de la dette sociale. L’an dernier, j’estimais que le moment n’était pas venu de transférer à la CADES la dette sociale logée à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), qui gère la trésorerie des organismes sociaux. Le fait que l’ACOSS ait ainsi pu lever près de 28 milliards d’euros sur les marchés à court terme nous donne raison a posteriori. En 2011, il avait été décidé d’autoriser une reprise de dette à hauteur de 62 milliards ; cette année, il est proposé d’anticiper cette reprise de dette afin que la CADES profite du faible niveau des taux du marché pour consolider cette dette. La durée de vie prévisionnelle de la CADES, censée s’éteindre en 2024, ne s’en trouve pas modifiée. Créée en 1996, elle devait d’abord disparaître en 2009 mais fut prorogée en 1998 jusqu’en 2014, avant que sa durée de vie soit soumise à l’achèvement de sa mission – soit une date indéterminée. La loi organique de 2005 a interdit tout transfert de dette sans compensation par des ressources correspondantes ; à ce jour, néanmoins, aucun texte ne fixe une date d’extinction de la CADES. Plus les taux d’intérêt sont faibles et plus la CADES est en mesure de rembourser du capital plutôt que des intérêts. Le plafond de 62 milliards sera atteint cette année – et c’est une bonne chose. Selon la trajectoire prévisionnelle, il restera le moment venu 29 milliards à transférer pour retrouver l’équilibre, ce qui supposera soit l’augmentation de 0,24 point de la CRDS, soit la prorogation du mandat de la CADES au-delà de 2024. En tout état de cause, la mesure à court terme que nous proposons permet de prémunir la CADES contre une éventuelle remontée des taux d’intérêt.

M. le président Gilles Carrez. Le déficit public consolidé de 3,3 points table sur l’équilibre, voire un léger excédent de 0,1 point des comptes sociaux. Pouvez-vous éclaircir le mystère consistant à passer du déficit que vous venez de nous présenter à l’équilibre ?

D’autre part, l’arrêt de Ruyter pose des problèmes de reclassement. L’honnêteté commande de rappeler que la précédente majorité avait elle aussi envisagé de soumettre à la CSG les revenus du patrimoine de résidents non affiliés, mais qu’elle y a renoncé compte tenu des risques courus. La majorité actuelle l’a fait en décembre 2012, et ce qui devait arriver arriva. Les ressortissants de l’Union européenne vont donc être remboursés des sommes acquittées entre 2013 et 2015, mais pas les ressortissants d’autres pays. Ne s’expose-t-on pas là à un risque de rupture d’égalité qui conduirait le Conseil constitutionnel à se saisir de ce contentieux, par exemple via une question prioritaire de constitutionnalité ? En outre, le contentieux actuel étant perdu, comment les remboursements à venir sont-ils provisionnés ?

L’Union européenne considère la CSG comme une cotisation contributive, alors que nous y voyons une imposition de toute nature : cette divergence est ancienne. Le Gouvernement propose une solution astucieuse qui consiste à affecter la CSG acquittée par des résidents fiscaux sur les revenus du patrimoine qu’ils possèdent non plus à des dépenses contributives, mais à des dépenses de pure solidarité. Croyez-vous vraiment que l’Europe acceptera cette acrobatie, qui explique les multiples reclassements principalement destinés au FSV ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Le transfert de la dette sociale à la CADES s’inscrit-il sous le plafond de 62 milliards sans nécessiter une quelconque hausse des taux actuels de CSG et de CRDS ? D’autre part, quel est l’impact financier du basculement dans le champ de l’ONDAM de l’ensemble des établissements et services sociaux et médico-sociaux qui accueillent des personnes handicapées ? Ce transfert s’effectuera-t-il à budget constant et, le cas échéant, comment les augmentations seront-elles financées ?

M. Charles de Courson. Selon la présentation qui nous a été faite du projet de loi de finances, la diminution de 0,5 point, en solde effectif, du déficit public s’explique pour partie – 0,1 point – par la baisse du déficit de l’État et des organismes divers d’administration centrale, et pour l’essentiel – 0,4 point – par celle du déficit du « bloc social ». Or, 0,4 point du PIB correspond à 8,8 milliards d’euros. Pourtant, la diminution du déficit du régime de base, en particulier le FSV, est de l’ordre de 3,1 milliards, à quoi s’ajoute l’effort financier des régimes AGIRC et ARRCO – de l’ordre de 1 milliard – et celui de 800 millions de l’UNEDIC, qu’annonce le Gouvernement. N’est-il pas étrange, d’une part, de préjuger du résultat de négociations qui n’ont pas encore abouti et qui n’aboutiront peut-être pas ? D’autre part, la somme de ces trois estimations équivaut à 5 milliards ; restent donc 3,8 milliards pour justifier la baisse de 0,4 point du PIB. D’où viendront-ils ? Peut-être faut-il chercher la réponse du côté du transfert des allocations de logement, pour un montant de 4,7 milliards : sera-t-il neutre pour les comptes sociaux et pour ceux de l’État ?

Ensuite, l’arrêt de Ruyter pose deux problèmes. La rupture d’égalité entre les ressortissants européens et les autres étrangers, tout d’abord : l’argument exposé par la Cour de justice de l’Union européenne ne risque-t-il pas d’être repris par le Conseil constitutionnel via une question prioritaire de constitutionnalité ? Le second problème est symétrique : il concerne les actifs français travaillant à l’étranger tout en étant domiciliés en France, qui demanderont à leur tour le remboursement des cotisations acquittées sur le revenu du patrimoine qu’ils possèdent en France. La solution du Gouvernement consistant à affecter à la CADES une partie des prélèvements sociaux sur les revenus du capital est-elle vraiment si astucieuse ? On pourrait en effet lui opposer que la CADES couvre le déficit des quatre branches du régime général, y compris l’assurance maladie ; c’est pourquoi en affectant le produit de la CSG sur le patrimoine à la CADES, vous ne résolvez aucunement le problème. Ne serait-il pas plus opportun – et moins risqué pour les finances sociales et les finances de l’État – d’affecter l’ensemble de ces fonds à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, et au FSV ?

Enfin, l’ACOSS gérait la dette sociale à des taux très faibles, puisqu’elle s’endettait à court terme. Le transfert de cette dette à la CADES entraînera un surcoût, puisqu’elle sera désormais financée à moyen terme. Comment le financera-t-on, et la CADES arrivera-t-elle à l’équilibre à l’issue de ce transfert ? Autrement dit, combien de temps faudra-t-il pour refinancer la dette transférée, qui est de l’ordre de 26 milliards ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Après le projet de loi de finances, voici le projet de loi de financement : bis repetita ! Ce PLFSS de renoncement tâche d’arranger les choses tout en glissant des dettes inéluctables sous le tapis. La Cour des comptes elle-même estime que rien ne bouge vraiment et que la baisse du déficit ralentira encore très nettement en 2015. Autrement dit, le retour à l’équilibre que le Gouvernement promettait à brève échéance est repoussé au-delà de 2020 au mieux !

M. le rapporteur pour avis nous parle de simplification et de clarification, mais l’article 15 n’est pas autre chose qu’une véritable tuyauterie ! Les transferts de recettes que vous nous présentez suscitent de nombreuses incertitudes. Le déficit de 10,4 milliards du FSV qui sera constaté pour les années 2016 à 2018, par exemple, ne sera pas pris en compte dans le plafond de 62 milliards qui est destiné à être consolidé. Pour qu’il y ait simplification, encore faudrait-il présenter des chiffres clairs !

Enfin, puisque vous vous interrogez sur la paternité de la baisse du déficit de la branche vieillesse, permettez-moi de vous la révéler : c’est la réforme des retraites de 2010 ! Elle a en effet réduit le nombre de départs en retraite en les reportant, y compris dans les administrations. Or, c’est la majorité actuelle qui recueille les bénéfices de cette mesure courageuse ! Quant à l’assurance maladie, vous avez estimé que son déficit se creusait du fait de l’augmentation du nombre de médecins et des mises sur le marché de médicaments. Pourtant, vous ne réduirez pas davantage le passif de la branche maladie en supprimant les médecins et les médicaments que vous ne réduirez celui de la branche vieillesse en supprimant les personnes âgées !

Mme Karine Berger. Le déficit du régime général se réduit : c’est une bonne nouvelle et l’on ne peut qu’espérer que notre système de protection sociale se trouve au plus vite dans une situation de sécurité financière. Toutefois, l’une des mesures prises pour parvenir à ce redressement nécessite un éclaircissement : elle concerne la revalorisation des prestations sociales, dont la date et l’indice de référence sont modifiés – en l’espèce, on substitue le glissement des prix sur les douze derniers mois à leur évolution prévisionnelle en moyenne annuelle. Quelle est la part des économies prévues en 2016 liée à ce changement du mode de calcul de la revalorisation des prestations sociales ?

M. Éric Woerth. Les chiffres qui nous sont communiqués le démontrent ; le système est à bout de souffle, la tuyauterie d’une complexité et d’une opacité excessives. Les problèmes, eux, demeurent. La remise à plat qui s’impose est d’une tout autre ampleur.

Ainsi, il est tout à fait anormal de conserver un tel déficit au sein de l’ACOSS alors que la CADES a été créée pour en reprendre la gestion. On aura beau utiliser ces périodes d’attente, sortes de sas de décompression de la dette sociale, il faudra bien un jour s’attaquer au véritable problème. Le déficit de l’assurance maladie continue d’augmenter : on peut comprendre la hausse de ses dépenses, même si l’ONDAM est plutôt maîtrisé, mais l’accumulation de tels déficits n’est pas viable – sauf à réformer le fonctionnement de la branche maladie. Le temps n’est plus aux mesures comptables mais aux réformes de fond. C’est sans doute aussi le rôle de la commission des finances que de veiller à sous-tendre les chiffres par des politiques concrètes.

S’agissant des régimes de retraites, la hausse de l’âge de départ est évidemment la solution la plus efficace : chaque année de prolongation se traduit par une économie de 7 à 8 milliards d’euros. Certes, la mesure n’est pas facile à prendre, même si elle est juste. Il faut donc poursuivre cette démarche, y compris dans les régimes complémentaires qui, en la matière, prennent souvent davantage de libertés que le régime général. Enfin, on ne comprend guère comment vous pouvez boucler les 16 milliards d’économies annoncées, sachant qu’elles incluent les comptes sociaux.

En clair, le modèle ne fonctionne plus. On ne saurait continuer d’augmenter sans cesse la CSG et la CRDS, car les revenus du capital – si le mot vous gêne, préférez-lui « épargne » – ont un intérêt évident pour l’économie française. Ces hausses, qui font suite à celle des cotisations sociales, sont devenues insupportables.

M. Alain Rodet. Il est possible de réaliser des économies dans le secteur du médicament. L’an dernier, par exemple, Mme Touraine a autorisé l’utilisation, pour traiter la dégénérescence maculaire liée à l’âge, de l’Avastin, un médicament fabriqué par le laboratoire Roche, à la place du Lucentis, distribué par laboratoire Novartis mais mis au point par une filiale de Roche et trente fois plus cher. Roche s’y est naturellement opposé, mais Mme la ministre tient bon, et pour cause : l’emploi de l’Avastin permettrait de réduire le déficit de 5 % ! Il y a là des pistes à explorer.

M. Charles de Courson. A-t-on idée de l’évolution du déficit prévisionnel brut et net des hôpitaux ?

M. Alain Fauré. Et que nous coûtent les cliniques ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Quel est le taux de chirurgie ambulatoire dans les hôpitaux ?

M. Alain Fauré. Autrefois, les décisions de report de la date de départ à la retraite étaient prises par étapes en fonction de la date de naissance. Peut-on déjà mesurer les incidences de la réforme de 2010 ?

M. le rapporteur pour avis. En solde réel, le déficit de 9 milliards d’euros des régimes obligatoires se transforme en compte excédentaire en comptabilité nationale parce que certains régimes – y compris des régimes complémentaires – peuvent être excédentaires à court terme même s’ils sont encore déficitaires aujourd’hui. Tout dépend en outre de la manière dont les dépenses, comme les recettes, sont reclassées. La question demeure pertinente, toutefois : « quand c’est flou, il y a un loup », selon la formule que connaît bien Dominique Baert...

Le débat démocratique concernant la comptabilisation des mesures d’économie est intéressant car, lorsque les économies ne sont pas documentées, c’est, de deux choses l’une, que l’on ne veut pas en parler ou que l’on ne veut pas les faire. Or, c’est l’état des comptes qui fait office de juge de paix et qui attestera à la fin 2015 de la maîtrise des dépenses. Il importera pour l’avenir de constater si, pour y parvenir, les reports de charges n’ont pas été excessifs ; tous les documents fournis pourront en faire état.

Il est vrai qu’au cours des dernières années, une partie de la dette des régimes sociaux a été externalisée vers les hôpitaux. Cette dette, aujourd’hui stabilisée, s’élève à 29 milliards d’euros, alors que le déficit des hôpitaux est stabilisé aux alentours de 200 millions. En réalité, la situation financière des hôpitaux varie selon les cas – tantôt redressée, tantôt aggravée – mais le déséquilibre global s’explique en partie par les difficultés d’un petit nombre d’entre eux. Je fais pleinement confiance à nos collègues de la commission des affaires sociales pour maîtriser la dépense. Certes, le dispositif de régulation est vaste et complexe mais, monsieur Woerth, je ne peux croire que vous, entre tous, n’y compreniez rien. Nous maîtrisons aujourd’hui l’ONDAM comme nous maîtrisons le budget de l’État : par une régulation infra-annuelle et grâce aux recommandations du comité d’alerte, qui incitent l’État à moduler certaines enveloppes. Tous ces éléments doivent être connus car, s’ils permettent de préserver le solde à court terme, ils peuvent s’avérer moins pertinents pour régler les problèmes à long terme. Autrement dit, il nous faut jongler entre mesures structurelles et mesures conjoncturelles. S’agissant de l’assurance maladie, qu’il s’agisse de la dépense hospitalière mais aussi de la médecine de ville, il nous faut recourir à des mesures ponctuelles qui devront être ajustées en cours d’année en fonction de la dérive des dépenses. En effet, ces paquebots massifs ne changent pas aisément de cap.

Si nous faisions tous preuve de responsabilité collective, le débat sur l’évolution de la dépense sociale porterait uniquement sur les branches maladie et vieillesse. En effet, quiconque a mis en déficit la branche famille – par essence un mécanisme de redistribution dont rien ne justifie qu’il soit déficitaire – a sa part de responsabilité, soit qu’il n’ait pas affecté les ressources complémentaires à politique familiale égale, soit qu’il n’ait pas ajusté les dépenses avec les recettes.

Les paramètres et les instruments de pilotage du système de retraites sont aujourd’hui très bien balisés. Les uns et les autres peuvent faire des choix divergents mais, s’ils cessent de brandir leurs totems, en particulier celui de l’âge de départ, chacun constatera que toutes les mesures prises par-delà les majorités – je l’assume en tant que socialiste – concourent à reporter l’âge moyen de départ à la retraite. D’aucuns pensent que cela ne suffira pas, et qu’une mesure générale mettant fin au départ à soixante ans est nécessaire. Ce débat nous oppose : qu’il s’agisse de la longueur des carrières ou de la pénibilité des métiers, plusieurs facteurs expliquent que tous ne sont pas égaux devant la retraite. On ne saurait reporter l’âge de départ à la retraite de manière indifférenciée sans tenir compte de l’état dans lequel les gens y parviennent. Pourtant, je pense aussi, comme vous, que l’on peut travailler plus longtemps – certains plus que d’autres. À cet égard, nos concitoyens ont une opinion très contrastée.

Ce débat concerne naturellement l’État, mais aussi les corps intermédiaires. Aujourd’hui, les régimes complémentaires sont heureusement placés sous l’entière responsabilité des partenaires sociaux – depuis le schéma imaginé par Pierre Bérégovoy. À titre personnel, je ne crois pas que le fait de dessaisir les partenaires sociaux pour les remplacer par l’État, comme le propose M. Sarkozy, soit une solution d’avenir pour la France. En revanche, je serai très attentif aux mesures négociées par les partenaires sociaux – en particulier le MEDEF, la CFDT et FO – et je veillerai surtout à ce qu’ils ne décident d’aucune mesure dont ils souhaitent qu’elles ne soient jamais appliquées dans l’espoir que les pouvoirs publics modifient l’âge de départ à la retraite. Nous verrons si les partenaires sociaux prennent pleinement leurs responsabilités en négociant des mesures sans tenir compte d’aléas politiques liés à une éventuelle alternance.

S’agissant de la branche maladie, madame Dalloz, tous les chiffres montrent que l’augmentation tendancielle de la dépense de santé est estimée à 3,6 % pour 2016.

M. le président Gilles Carrez. Augmentation qu’il convient de corréler à la hausse du nombre d’affections de longue durée et à la prise en charge à 100 % : ce diagnostic est ancien !

M. le rapporteur pour avis. Soit, mais je ne crois pas que l’augmentation annuelle moyenne du reste à charge des assurés améliore l’efficience du système. En 1989, lors de la négociation des conventions médicales, le président de la Confédération des syndicats médicaux français de l’époque nous demandait de « responsabiliser les patients » autrement dit, d’augmenter le ticket modérateur pour réguler par la demande ! Certes, le problème de la demande existe et la prise en charge des soins n’est pas toujours cohérente. Comment prétendre, toutefois, que le système est aujourd’hui régulé de manière responsable ?

Le dérapage budgétaire n’est pas lié au secteur hospitalier. Chacun connaît les mouvements de création des groupements hospitaliers, de rationalisation – qui a provoqué la fermeture des structures les moins performantes, qu’il s’agisse de maternités ou de petits blocs opératoires – et de restructuration des services d’urgences. Tout cela est poli, et vaut aussi pour la médecine de ville. Le président de la Fédération de l’hospitalisation privée dénonçait récemment le projet de loi de Mme Touraine – comme, en son temps, le projet de loi dit « HPST » fut dénoncé par les médecins hospitaliers – en prétendant que l’on sauverait le système en donnant davantage de liberté aux médecins. Il n’y a pourtant pas de liberté sans responsabilité : nous avons fait le choix d’une maîtrise médicalisée de la dépense. De ce point de vue, un amendement pourrait, je l’espère, être déposé pour donner au Gouvernement la base légale lui permettant de sécuriser des conventions de régulation démographique, ou d’en conclure avec les professions qui n’en ont pas encore passé.

Dans ces conditions, nul ne saurait prétendre que l’on peut réguler un système fondé sur le libre choix de l’installation, de la prescription et du médecin par une opération du Saint-Esprit – en l’espèce, un tiers payeur. La Cour des comptes nous demande s’il sera possible de garantir la maîtrise de la dépense dans un contexte où les territoires ruraux sont sous-médicalisés tandis qu’ailleurs existe une « surdémographie » médicale qui explique la croissance de la dépense. De même, on entend souvent dire que l’on prescrit trop de médicaments, mais l’augmentation de la dépense en médicaments n’est pas tant liée au volume qu’au coût du panier, même si certains pharmaciens jouent le jeu du générique, dont le prix est parfois moitié moindre que celui d’un médicament breveté.

En clair, il faut conclure des contrats de régulation avec les professions de santé. Certes, l’enjeu se politise à l’approche d’élections, comme en ce moment, et ce n’est pas nouveau. S’il advenait néanmoins que l’opposition actuelle redevienne majoritaire en 2017, elle se trouverait dans la situation qui a été la nôtre lorsqu’il a fallu faire évoluer la loi « HPST », et elle s’inscrirait dans la droite ligne de la future « loi Touraine » – dénoncée par les médecins – car elle ne parviendrait pas à stabiliser le système autrement qu’en diminuant le taux moyen de prise en charge, ce qui entraînerait un transfert vers les mutuelles et susciterait une inégalité devant les soins.

Le transfert vers la branche ATMP d’une couverture « accidents du travail » pour les établissements et services d’aide par le travail, madame la rapporteure générale, représente environ 0,1 million d’euros en 2016. Je confirme d’autre part que le transfert à la CADES de la dette gérée par l’ACOSS respecte le plafond, puisque la loi l’impose. Les résultats actuels de la CADES, qui sont bons, permettent de reprendre cette dette – capital et intérêts – par anticipation tout en maintenant la date d’extinction à 2024. Je l’ai dit au président de la CADES : si la trajectoire est respectée, il restera à l’ACOSS une dette de 29 milliards d’euros que nous ne pourrons transférer en l’état actuel des choses à la CADES et qui, si elle devait être transférée en 2019, représenterait 0,24 point de la CRDS.

J’insiste sur un point : pour la première fois, la dette sociale diminue en 2015 – et cette tendance devrait se confirmer en 2016. Autrement dit, l’amortissement réalisé par la CADES est supérieur à la dette produite par les régimes sociaux. Elle perçoit en effet 16 milliards d’euros de recettes annuelles ; le déficit atteindra 10 milliards, mais la CADES pourra en rembourser 13 milliards, soit une réduction nette de 3 milliards de la dette sociale – qui reste néanmoins importante.

Dernier point : je comprends les interrogations exprimées au sujet de l’arrêt de Ruyter et du montant de 250 millions d’euros par an qu’il implique pour notre budget. De deux choses l’une : soit ce montant est remboursé et, dans ce cas, une recette ou une économie supplémentaire doit être réalisée, soit il ne l’est pas. La situation financière inciterait plutôt à conserver ces fonds.

M. le président Gilles Carrez. Le passé nous y encourage, en effet…

M. le rapporteur pour avis. Nous saisissons au contraire cette occasion pour poursuivre la simplification – à défaut de l’achever, madame Dalloz. En effet, le produit des prélèvements sociaux sur les revenus du capital était jusqu’à présent réparti de manière inexplicable entre les quatre branches du régime général ainsi que la CADES et le FSV. Il sera désormais affecté dans les proportions suivantes : 15,5 milliards au FSV, 1,3 milliard à la CADES et 1,8 milliard à la CNSA. Sans ce reclassement, d’autres prélèvements pourraient être remis en cause au motif qu’ils sont, pour l’essentiel, contributifs.

Quant au risque constitutionnel, la divergence est ancienne entre la Cour de justice de l’Union européenne et le Conseil constitutionnel, dont la jurisprudence ad hoc ne remet aucunement en cause la CSG – même s’il demeure attentif à la vocation contributive des régimes. L’Europe peut-elle nous imposer que des dépenses de solidarité ne relevant pas d’une logique contributive ne peuvent pas être financées par l’impôt, qu’il s’agisse de cette CSG ou d’un autre ? Je ne le crois pas. Il faut néanmoins tenir bon, faute de quoi l’affectation d’autres impôts – taxation des produits du tabac, TVA – au financement de la protection sociale pourrait être mise en cause.

On peut prétendre que la taxation du capital est trop élevée en France, mais c’est vous, monsieur le président, qui avez augmenté les prélèvements sociaux sur les revenus du capital.

M. le président Gilles Carrez. En effet : entre 2004 et 2012, le taux a été relevé de 5,5 % à 15,5 %.

M. le rapporteur pour avis. Enfin, si la CADES – financée pour 2 milliards d’euros par an par le Fonds de réserve pour les retraites, comme l’a souhaité la précédente majorité – est sollicitée, c’est parce qu’elle reprend à proportion une partie des déficits du FSV. Je précise également qu’à partir de 2016, le compte du FSV sera modifié et réparti en deux sections afin de distinguer entre droits contributifs et droits non contributifs. Le produit de la CSG sur les revenus du capital sera affecté à la section finançant notamment les droits des personnes se trouvant en situation de chômage, de maladie ou d’invalidité, car l’objectif visant à ce qu’elles ne perdent pas leurs droits à la retraite relève d’une politique de solidarité nationale et ne correspond donc pas à des cotisations contributives. On peut certes s’attendre à quelques contentieux dans les prochaines années, et l’amortissement des 250 millions d’euros à rembourser s’étalera au rythme des demandes – tous les intéressés ne demanderont d’ailleurs pas le remboursement des sommes acquittées. Chacun sait que de majorité en majorité, les contentieux s’étalent dans le temps. À ce stade, je ne suis donc pas en mesure de vous indiquer le coût de la mesure : sans doute moins de 750 millions, peut-être la moitié, dont le paiement se répartira sur trois ans.

La Commission en vient à l’examen des articles.

PREMIÈRE PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2014

La Commission émet successivement un avis favorable à l’adoption des articles 1er et 2, sans modification, puis de la première partie du projet de loi, sans modification.

DEUXIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2015

La Commission émet successivement un avis favorable à l’adoption des articles 3, 4, 5 et 6, sans modification, puis de la deuxième partie, sans modification.

TROISIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2016

TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES,
AU RECOUVREMENT ET A LA TRÉSORERIE

Chapitre Ier
Dispositions relatives au pacte de responsabilité et de solidarité et évolutions
de certains dispositifs particuliers en découlant

Article 7 : Élargissement du champ de la réduction de cotisation patronale famille

La Commission examine l’amendement CF1 de M. Christophe Caresche. 

M. Christophe Caresche. Le Gouvernement a décidé, dans le cadre de la deuxième étape du pacte de responsabilité et de solidarité, d’alléger les cotisations familiales à la charge des entreprises pour les salaires compris entre 1,6 et 3,5 SMIC. Mon amendement vise à abaisser le plafond de 3,5 à 2,5 SMIC et à augmenter à due proportion le taux de la réduction des cotisations.

Des économistes ont montré que plus les allégements ciblaient les salaires proches du SMIC, plus grande était leur efficacité en termes d’emploi. Le rapport annexé au projet de loi indique ainsi que l’élasticité de la demande de travail par rapport à son coût se trouve proche de 1 à des niveaux de salaires proches du SMIC contre 0,33 pour la moyenne des rémunérations. Le Gouvernement reconnaît donc que les allégements perdent de leur efficacité à mesure de leur éloignement du SMIC. Compte tenu de la situation économique et de l’emploi, ne faudrait-il pas davantage concentrer notre action sur les niveaux de salaire où l’effet sur l’emploi s’avère le plus fort ?

Le président de la République souhaite fusionner le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) avec les allégements de cotisations. Il me paraît opportun d’aligner dès à présent les deux assiettes et régler ainsi la question du niveau – 2,5 SMIC comme pour le CICE ou 3,5 comme pour les allégements – auquel s’opérera la fusion. Le montant de 3,5 me paraît trop élevé, et mon amendement suggère de retenir le chiffre de 2,5.

M. le président Gilles Carrez. Je vous propose de donner la parole à M. de Courson pour qu’il nous présente l’amendement CF2 de M. Philippe Vigier après l’article 7, qui porte sur la même question.

M. Charles de Courson. L’Union des démocrates et indépendants (UDI) a toujours plaidé pour la baisse des cotisations sociales, mesure simple dont tout le monde bénéficie. Le Gouvernement va donc dans la bonne direction, mais Christophe Caresche a raison de souligner que les seuils ne sont pas harmonisés. Le rapport de M. Louis Gallois a montré que l’efficacité économique commandait de concentrer la réduction des cotisations sur les salaires moyens, et non sur les bas salaires comme la classe politique, toutes tendances confondues, l’a longtemps pensé. En effet, les salaires dans les industries exportatrices sont supérieurs aux niveaux ciblés par les allégements actuels. Il faut choisir entre une mesure d’apparence sociale – celle proposée par notre collègue – et une disposition économiquement efficace.

M. le rapporteur pour avis. Je vous invite à lire la partie de mon rapport consacrée à l’historique de la baisse des charges. Il renvoie tout d’abord à la question du reclassement, posée par la Cour des comptes et à laquelle M. le ministre des finances et des comptes publics souhaite répondre positivement ; il faudra procéder à une consolidation et cesser de parler d’allégements. Pour ce faire, il convient de maîtriser les impacts des allégements pour chaque niveau de revenu, et notamment les effets de seuil de ces dispositifs. Le rapport montre également que les allégements « Aubry I », « Aubry II », « Fillon », « Woerth » et les autres effacent au total les deux tiers des cotisations patronales, montant auquel nous devons ajouter les 6 % de crédit d’impôt sur la masse salariale du CICE : au total, il n’y a plus de charges patronales pour les salariés rémunérés au SMIC. La question politique s’accompagne ici d’un enjeu économique de court, de moyen et de long terme.

La transformation du CICE pour procéder à la consolidation du système interviendra un jour, mais il est aujourd’hui trop tôt ; la Cour des comptes considère que ce bouleversement aura lieu en 2017, puisque le président de la République l’a évoqué, mais les contraintes budgétaires ne permettront pas d’engager une telle évolution à cette date. Le sujet porté par ces amendements n’étant pas d’actualité, j’émets un avis défavorable à leur adoption. La trentaine de milliards d’euros de cotisations patronales continuant de financer la branche famille devra bien être remplacée si l’on décidait de la supprimer, et les 20 milliards d’euros du CICE laissent tout de même un trou de 10 milliards d’euros !

J’ai toujours assimilé la controverse portant sur la date du 1er avril à une tempête dans un verre d’eau, car c’est la mise en place de la mesure de simplification qui importe. Monsieur Caresche, le débat doit avoir lieu en séance publique, car le Gouvernement et nos collègues des commissions des affaires économiques et sociales doivent s’exprimer sur ce sujet. Il y a deux dimensions, celle de la confiance politique et celle de la maximisation de l’effet sur l’emploi à court terme par rapport à l’impact à moyen terme. Chacun a lu les appréciations de M. Louis Gallois et de La Fabrique de l’industrie sur ce thème. Quelle que soit l’option retenue, je doute de l’impact à très court terme sur l’emploi et je perçois les problèmes à plus long terme. Le MEDEF se montre très sensible sur cette question, et je suggère, pour cette année, de rester à un plafond de 3,5 SMIC.

Le débat sur le redéploiement des 41 milliards d’euros se concentre autour des 3,5 milliards d’euros de C3S pour 20 000 entreprises l’année prochaine. On pourrait reprendre cette question sous l’angle d’une baisse du taux de moyen de l’impôt sur les sociétés (IS) à l’automne 2016, période à laquelle une telle évolution aura moins d’impact économique à court terme. Je vous demande de retirer votre amendement, monsieur Caresche, et, si vous le maintenez, je demanderais à la commission de le rejeter.

M. le président Gilles Carrez. La politique de réduction des cotisations patronales, plafonnée pour un certain niveau de salaire au-delà du SMIC, est maintenant ancienne, puisqu’elle a été inaugurée en 1993 par la « ristourne Juppé », qui jouait jusqu’à 1,33 SMIC. Après la compensation de la réduction du temps de travail, elle s’est transformée en système dit « Fillon » qui prévoyait un allégement jusqu’à 1,6 SMIC. En mars 2012, la précédente majorité a essayé de mettre en place la « TVA sociale », qui entraînait une baisse des cotisations jusqu’à 2,4 SMIC. Enfin, le CICE a porté le plafond à 2,5 SMIC. Cet historique montre que nous menons depuis plus de vingt ans une politique structurelle qui coûte aujourd’hui 2 points de PIB, soit 40 milliards d’euros, dont une moitié provient des mesures prises jusqu’en 2012 et une autre du CICE. Au bout de vingt ans, cette politique a obligatoirement des conséquences sur l’organisation de notre économie et de nos entreprises. La distribution de ces allégements favorise des activités domestiques comme la grande distribution et la sécurité.

Tous les économistes affirment que cette politique lourde et coûteuse est la bonne pour l’emploi, mais on met pour une fois en œuvre une autre orientation en allant jusqu’à 3,5 SMIC. Il ne faut pas revenir sur cette mesure, car, comme le dit Dominique Lefebvre, on n’obtiendra pas de résultat à court terme. Il importe de faire autre chose que ce que l’on a fait depuis vingt ans, et il est bon de donner un petit avantage aux entreprises qui luttent dans la compétition internationale.

Mme Monique Rabin. Je soutiens l’amendement proposé par Christophe Caresche. Quel est le coût du relèvement de 2,5 à 3,5 SMIC du plafond de l’allégement des cotisations patronales ? Ne serait-il pas plus intéressant de réfléchir à un mode de calcul reposant sur des progressions logarithmiques qui favoriseraient graduellement les entreprises ?

Nous sommes globalement attachés au pacte de responsabilité, mais la conjoncture devrait nous inciter à répondre à d’autres demandes des entreprises, car la mission Économie du PLF supprime de nombreux dispositifs de soutien. Les chefs d’entreprise que nous rencontrons n’ont pas toujours l’impression de bénéficier d’un allégement de charges, mais ils perçoivent clairement la disparition des mécanismes d’aide.

Si l’amendement de Christophe Caresche était retiré, il faudrait le redéposer pour la séance publique afin que le débat ait lieu.

M. Christophe Caresche. Monsieur le président, votre position rejoint celle de M. Louis Gallois. Je ne nie pas le problème de compétitivité, mais nous devons le régler autrement que par des allégements de cotisations. Ceux-ci, pour des salaires représentant 3,5 SMIC, sont utilisés, selon plusieurs économistes, pour augmenter les rémunérations et ne stimulent pas l’investissement et la recherche ; nous subventionnons ainsi des hausses de salaire, puisque le plein-emploi règne dans les branches industrielles exportatrices.

Je ne nie pas les effets négatifs de trappe à bas salaires induits par les allégements de cotisations sociales pour les salaires proches du SMIC, mais il faut continuer à cibler notre effort sur les bas salaires au vu de la situation de l’emploi.

M. Alain Fauré. Je partage les observations de Christophe Caresche sur les augmentations de salaire liées à l’allégement des cotisations sur les salaires bien supérieurs au SMIC. Il s’agit bien d’une subvention de la hausse des salaires.

La croissance de la production conduit les entreprises à faire appel à de la sous-traitance. Les agences d’intérim font payer aux entreprises le coût de la gestion des salariés qu’elles mettent à leur disposition. Il faut accroître la souplesse et la confiance, et ne pas limiter notre réflexion au coût salarial.

M. le rapporteur pour avis. Le débat doit avoir lieu en séance publique. L’amendement de Christophe Caresche vise à réduire le plafond à 2,5 SMIC, niveau auquel le crédit d’impôt à 6 % joue. Le taux réduit de cotisations tomberait à 2,75 % et, au-dessus de cette limite, on passerait à 5,25 % de taux de cotisation et les 6 % du CICE disparaîtraient, cela créerait un effet de seuil. Je doute que cela ait le moindre effet sur l’emploi à très court terme.

Les allégements ciblés concernent des catégories d’emploi, des secteurs économiques ou des types d’entreprise. Monsieur Caresche, on pourrait mettre de côté le message politique de soutien aux entreprises exportatrices si votre proposition avait un effet à court terme très puissant sur l’emploi. Après la campagne menée par le MEDEF sur le report du 1er janvier au 1er avril 2016 de l’augmentation du plafond, les chefs d’entreprise ne croiraient plus au déploiement de cette mesure en cas de nouveau recul. Nous aurons ce débat l’année prochaine sur la C3S, et ne revenons pas sur cette orientation d’ici là.

M. Christophe Caresche. Je vais retirer mon amendement, mais je me permets de dire quelque chose de très politiquement incorrect : nous sommes le seul pays où les salaires ne se sont pas ajustés avec la crise, et ce à cause des mécanismes qui soutiennent les rémunérations. On constate le même phénomène dans le logement où les aides ont eu un effet inflationniste. Continuons à étudier les effets de ces allégements sur l’emploi et sur les salaires !

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CF3 de M. Philippe Vigier.

M. Charles de Courson. Je maintiens l’amendement, car il s’agit d’une question d’affichage pour les entreprises. On peut prévoir un taux inférieur la première année pour que le coût soit nul, mais le Gouvernement doit montrer qu’il tient ses promesses.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 sans modification.

Après l’article 7

La Commission étudie l’amendement CF2 de M. Philippe Vigier.

M. Charles de Courson. Déjà défendu.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Article 8 : Suppression progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés (étape 2 du pacte de responsabilité et de solidarité)

La Commission est saisie de l’amendement CF4 de M. Philippe Vigier.

M. Charles de Courson. L’UDI a déjà dit à M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics, que la priorité n’était pas de baisser la C3S, mais de diminuer l’IS pesant sur les petites et les moyennes entreprises (PME). Notre amendement va dans le sens inverse afin de prouver par l’absurde que la réduction de la C3S ne constitue pas la première mesure à prendre. M. le ministre m’avait expliqué qu’il s’agissait d’une demande du MEDEF, et je m’étais étonné auprès de lui de voir le patronat élaborer la politique fiscale de ce pays.

M. le rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable à l’adoption de cet amendement, car nous avons fait le choix de voter les mesures du pacte de responsabilité jusqu’à l’année prochaine. En outre, 3,5 milliards d’euros pour 20 000 entreprises méritent un débat de fond, notamment avec le patronat qui se révèle divisé sur cette question. Quelle mesure sera la plus pertinente sur le plan économique dans un an ? S’il s’avère possible de mieux utiliser les ressources publiques pour l’ensemble des entreprises, nous adapterons notre politique. De mon côté, je plaiderai pour une substitution de cette mesure ciblée par une baisse du taux de l’IS. En effet, une baisse de 2,5 milliards d’euros de l’IS est prévue, et on pourrait la compléter par ces 3,5 milliards d’euros pour mettre en œuvre une diminution significative du taux moyen de l’IS en France, ce qui serait psychologiquement important.

La Commission rejette l’amendement.

Elle émet successivement un avis favorable à l’adoption des articles 8 à 30, sans modification, puis à l’adoption de la troisième partie, sans modification.

QUATRIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES POUR L’EXERCICE 2016

La Commission émet successivement un avis favorable à l’adoption des articles 31 à 61, sans modification, puis à l’adoption de la quatrième partie, sans modification.

Enfin, elle émet enfin un avis favorable à l’adoption de l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, sans modification.

ANNEXE
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

1er octobre 2015

Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS)

© Assemblée nationale