N° 3282 tome I - Rapport sur le projet de loi de finances rectificative pour 2015 (n°3217)




N
° 3282

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 novembre 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES,
DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE
SUR LE PROJET DE loi de finances rectificative pour 2015 (n° 3217)

TOME I

EXPOSÉ GÉNÉRAL

EXAMEN DES ARTICLES

Par Mme Valérie RABAULT

Rapporteure générale,

Députée

——

SOMMAIRE

___

Pages

I. FOCUS SUR LES FINANCES PUBLIQUES 11

A. LES PERSPECTIVES DE DÉFICIT POUR 2015 11

B. LES RECETTES FISCALES NETTES POUR 2015 12

C. LES DÉPENSES DE L’ÉTAT EN 2015 12

II. LES PRINCIPALES MESURES 17

A. COP 21 : UNE FISCALITÉ ÉCOLOGIQUE PLUS EFFICACE 17

B. MESURES EN FAVEUR DES ENTREPRISES 20

C. MESURES POUR LES COLLECTIVITÉS LOCALES 26

D. MESURES POUR L’AGRICULTURE ET LA RURALITÉ 27

FICHE N° 1 : LE CONTEXTE MACROÉCONOMIQUE 31

I. LE SCÉNARIO MACROÉCONOMIQUE DU GOUVERNEMENT 31

A. UN SCÉNARIO INCHANGÉ PAR RAPPORT À CELUI PRÉSENTÉ DANS LE CADRE DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2016 31

B. UN SCÉNARIO LÉGÈREMENT REVU PAR RAPPORT À LA LOI DE FINANCES INITIALE 32

II. LA FAIBLESSE DE L’INVESTISSEMENT, PRINCIPAL HANDICAP DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE 35

A. L’INVESTISSEMENT DES ENTREPRISES 36

B. L’INVESTISSEMENT DES MÉNAGES 36

FICHE N° 2 : LE SOLDE PUBLIC ET LE SOLDE DE L’ÉTAT 37

A. LE DÉFICIT NOMINAL 38

B. LE DÉFICIT STRUCTUREL 40

II. LE SOLDE BUDGÉTAIRE DE L’ÉTAT 40

FICHE N° 3 : LES RECETTES 43

I. LES RECETTES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES 43

II. LES RECETTES DE L’ÉTAT 45

A. LES RECETTES FISCALES NETTES 45

B. LES RECETTES NON FISCALES 52

FICHE N° 4 : LES DÉPENSES DE L’ÉTAT 53

I. LA POURSUITE DE LA BAISSE ANNUELLE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT ENGAGÉES DEPUIS 2012 55

II. LE RESPECT DES NORMES DE DÉPENSES 61

A. PRÉSENTATION DES NORMES DE DÉPENSES APPLICABLES AUX DÉPENSES DE L’ÉTAT 61

B. LE RESPECT DES NORMES DE DÉPENSES EN 2015 62

III. L’ÉVOLUTION DE LA RÉSERVE DE PRÉCAUTION 64

FICHE N° 5 : LES MISSIONS DU BUDGET GÉNÉRAL 69

I. UNE HAUSSE GLOBALE DES CRÉDITS DES MISSIONS 69

II. LES OUVERTURES ET ANNULATIONS INTERVENUES EN COURS D’EXERCICE 2015 70

FICHE N° 6 : LES INVESTISSEMENTS D’AVENIR 79

I. LA PART DES PROGRAMMES D’INVESTISSEMENTS D’AVENIR (PIA) DANS LES DÉPENSES D’INVESTISSEMENTS DE L’ÉTAT ET DE SES AGENCES 79

A. LES PIA 1 ET 2 REPRÉSENTENT UNE ENVELOPPE TOTALE DE 47 MILLIARDS D’EUROS 79

B. LA RÉPARTITION DES CRÉDITS PAR MISSION 80

C. LES COFINANCEMENTS CONSTATÉS 87

II. LES PIA REPRÉSENTENT CHAQUE ANNÉE UN CINQUIÈME DES INVESTISSEMENTS DE L’ÉTAT 88

FICHE N° 7 : L’ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE L’ÉTAT EN 2015 91

FICHE N° 8 : LA FISCALITÉ AGRICOLE 95

I. LA LÉGITIMITÉ D’UNE FISCALITÉ PROPRE AU SECTEUR AGRICOLE 95

II. LES DÉPENSES FISCALES DE LA FISCALITÉ AGRICOLE 97

III. LES RECOMMANDATIONS DE LA MISSION D’INFORMATION SUR LA FISCALITÉ AGRICOLE 97

IV. LA MISE EN œUVRE DES RECOMMANDATIONS DE LA MISSION D’INFORMATION 98

A. PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2016 98

B. PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2016 99

C. PRÉSENT PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2015 100

AUDITION DE M. MICHEL SAPIN, MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS, ET M. CHRISTIAN ECKERT, SECRÉTAIRE D’ÉTAT AU BUDGET 103

EXAMEN DES ARTICLES 123

Article liminaire : Prévision de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques pour l’année 2015 123

PREMIÈRE PARTIE : CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER 133

TITRE IER – DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES 133

Avant l’article 1er 133

Article 1er : Compensation des transferts de compétences aux régions et aux départements sous la forme d’une part du produit de la taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE) 134

Article additionnel après l’article 1er : Éligibilité au fonds de compensation pour la TVA des dépenses des collectivités territoriales et de leur groupement pour les dépenses d’investissement consacrées aux travaux de montée en débit 147

Après l’article 1er 149

Article 2 : Prélèvement de 255 millions d’euros sur le fonds de roulement du Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) 152

Article 3 : Création du compte d’affectation spéciale Transition énergétique 162

TITRE II – DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES 187

Article 4 : Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d’autorisation des emplois 187

SECONDE PARTIE  : MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES 197

TITRE IER  – AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2015 : CRÉDITS DES MISSIONS 197

Article 5 : Budget général : ouvertures et annulations de crédits 197

Article 6 : Budgets annexes : ouvertures de crédits 198

Article 7 : Comptes spéciaux : ouvertures et annulations de crédits 199

TITRE II – AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2015 : PLAFONDS DES AUTORISATIONS DES EMPLOIS 201

Article 8 : Plafonds des autorisations d’emplois de l’État 201

Article 9 : Plafonds des emplois des opérateurs de l’État 202

TITRE III – RATIFICATION DE DÉCRETS D’AVANCE 206

Article 10 : Ratification de deux décrets portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance 206

TITRE IV – DISPOSITIONS PERMANENTES 231

I.– Mesures fiscales non rattachées 231

Article 11 : Évolution de la taxation des produits pétroliers, du gaz, du charbon et de l’électricité 231

Après l’article 11 255

Article 12 : Encouragement à l’utilisation du super sans plomb 95-E 10 260

Après l’article 12 267

Article additionnel après l’article 12 : Coordination avec le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement 268

Après l’article 12 270

Article 13 : Mise en conformité du dispositif de réduction d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) au titre des souscriptions au capital des petites et moyennes entreprises (PME) avec les règles européennes d’encadrement des aides d’État en faveur du financement des risques 271

Après l’article 13 289

Article additionnel après l’article 13 : Suppression de l’application de l’abattement pour durée de détention aux moins-values 290

Après l’article 13 291

Article additionnel après l’article 13 : Option pour la barémisation des cessions de bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE) 291

Article additionnel après l’article 13 : Conservation des réductions d’impôt ISF-PME et « Madelin » en cas de réinvestissement dans une PME 292

Après l’article 13 294

Article additionnel après l’article 13 : Application du dispositif « Madelin » aux apports en nature 295

Après l’article 13 295

Article additionnel après l’article 13 : Suppression de la limite d’âge de cinq ans pour l’exonération d’ISF des parts de fonds investis en titres de PME 303

Après l’article 13 303

Article additionnel après l’article 13 : Prorogation de l’imposition dérogatoire des plus-values de cessions d’immeubles transformés en locaux d’habitation 305

Article 14 : Renforcement du plan d’épargne en actions dédié au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire (PEA-PME) 306

Après l’article 14 325

Article additionnel après l’article 14 : Élargissement du PEA-PME aux bons de souscription d’action 325

Article 15 : Extension de l’objet social des organismes de placement collectif immobilier à la location meublée – Conséquences fiscales 326

Article 16 : Mise en conformité du régime des sociétés mères et filiales 336

Article additionnel après l’article 16 : Déduction du bénéfice imposable des sociétés, à hauteur de 40 %, pour les frais d’acquisition d’installations et matériels en fibre optique 345

Article additionnel après l’article 16 : Rattachement aux bénéfices agricoles de l’activité de méthanisation lorsqu’au moins 50 % des matières utilisées proviennent d’exploitations agricoles 347

Article additionnel après l’article 16 : Assouplissement de la déduction pour aléas 350

Article additionnel après l’article 16 : Assouplissement du régime d’établissement des revenus exceptionnels 353

Après l’article 16 353

Article additionnel après l’article 16 : Augmentation du plafond du crédit d’impôt congés dans les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC) 356

Article additionnel après l’article 16 : Augmentation du plafond du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique dans les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC) 357

Après l’article 16 357

Article 17 : Échanges automatiques d’informations financières 358

Article 18 : Réforme des zones de revitalisation rurale 373

Article 19 : Création d’un comité consultatif pour le crédit d’impôt recherche et le crédit d’impôt innovation 389

Après l’article 19 399

Article 20 : Adaptation des dispositions relatives à la révision des valeurs locatives des locaux professionnels 400

Article 21 : Refonte de la taxe pour la création de bureaux et création d’une taxe additionnelle aux DMTO sur les cessions de locaux à usage de bureaux en Île-de-France 419

Article 22 : Constitution de la représentation parcellaire cadastrale unique (RPCU) 434

Article 23 : Refonte de la participation des collectivités territoriales au coût du dégrèvement afférent au plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée 445

Article 24 : Adaptation des dispositions fiscales aux regroupements de communes 456

Article additionnel après l’article 24 : Perception de la taxe d’aménagement par les communes nouvelles 467

Article 25 : Rationalisation et amélioration du caractère incitatif de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères 468

Après l’article 25 476

Article additionnel après l’article 25 : Consolidation des cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises à l’échelle des groupes 480

Après l’article 25 480

Article additionnel après l’article 25 : Versement d’attribution de compensation des EPCI à fiscalité professionnelle unique aux communes où sont implantées des éoliennes 482

Après l’article 25 482

Article additionnel après l’article 25 : Report au 1er novembre des dates limites fixées pour certaines délibérations relatives à la fiscalité directe locale et à la taxe d’enlèvement des ordures ménagères 486

Après l’article 25 486

Article additionnel après l’article 25 : Perception de la taxe sur les surfaces commerciales en cas de rachat d’entreprise sans cessation d’activité 487

Après l’article 25 487

Article 26 : Dématérialisation des procédures de déclaration et de règlement des contributions indirectes 488

Article 27 : Modernisation de la taxe spéciale sur les véhicules routiers (TSVR) 496

Après l’article 27 502

Article 28 : Simplification et sécurisation du recouvrement de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) 503

Après l’article 28 509

Article additionnel après l’article 28 : Élargissement de la taxe générale sur les activités polluantes au gazole non routier 514

Après l’article 28 514

Article additionnel après l’article 28 : Instauration d’une taxe sur le chiffre d’affaires des entreprises de transformation des produits carnés 515

Article 29 : Crédit d’impôt phonographique – Placement sous le règlement général d’exemption par catégorie (RGEC) 517

Article 30 : Taux de TVA applicable aux produits d’origine agricole non transformés 521

Après l’article 30 526

Article additionnel après l’article 30 : Extension de la déductibilité de la TVA à l’essence utilisée par les véhicules de société 527

Article 31 : Amortissement exceptionnel des investissements des entreprises dans les PME innovantes 528

Article 32 : Exonération de la retenue à la source due par une société non-résidente déficitaire et en liquidation 535

Article 33 : Mise en place d’une procédure de restitution de l’excédent de retenue à la source prélevée sur les jetons de présence « ordinaires » versés à des contribuables domiciliés dans un État membre de l’Union européenne 541

Article 34 : Adaptation du dispositif de majoration du minimum de perception pour les droits de consommation perçus sur les produits du tabac 545

Article 35 : Modification du dispositif de plafonnement de la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises 552

Article additionnel après l’article 35 : Instauration d’une obligation de transparence des activités pays par pays pour les entreprises dont le chiffre d’affaires et les effectifs dépassent certains seuils 560

Article additionnel après l’article 35 : Expérimentation de création d’emplois afin de développer la fréquentation des monuments nationaux 561

Après l’article 35 562

Article additionnel après l’article 35 : Demande d’un rapport évaluant les conditions de mise en œuvre de l’assiette communautaire consolidée 563

Article additionnel après l’article 35 : Demande d’un rapport sur les conditions d’exonération et de dégrèvement en matière de fiscalité locale 563

II.– Garanties 564

Article 36 : Garantie des financements nécessaires à l’acquisition par des clients français de navires de flotte de commerce ou d’engins spatiaux civils construits en France 564

Article 37 : Réforme du dispositif de financement des exportations 565

Article 38 : Garantie par l’État des emprunts de l’Unédic émis en 2016 581

Article 39 : Garantie de l’État accordée aux emprunts souscrits par la Société du Grand Paris auprès de la Banque européenne d’investissement (BEI) 592

Article 40 : Reconduction et amélioration du dispositif de garantie à la construction navale de la Caisse française de développement industriel (CFDI) 601

Article 41 : Actualisation de la garantie à l’Agence française de développement (AFD) permettant de mettre en œuvre les engagements de la France à l’égard de la Facilité financière internationale pour l’immunisation (IFFIm) 605

III.– Autres mesures 612

Article 42 : Modalités de répartition transitoire du fonds de solidarité en faveur des départements entre la métropole de Lyon et le département du Rhône 612

Article 43 : Souscription à l’augmentation des ressources en capital de la Société interaméricaine d’investissement (SII) 618

Le déficit public pour 2015, toutes administrations publiques confondues, est désormais évalué à 3,8 % du produit intérieur brut (PIB) dans le présent projet de loi de finances rectificative, au lieu de 4,1 % dans la loi de finances pour 2015 (1).

Le tableau qui suit compare le scénario initialement établi dans le cadre de la loi de finances initiale et celui sur lequel repose le projet de loi de finances rectificative pour 2015. Les chiffres, en valeur, ont été calculés sur la base des informations contenues dans le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2015 et au projet de loi de finances pour 2016. La décomposition du déficit public présentée repose sur des principes de comptabilité budgétaire (encaissements/décaissements). Les chiffres indiqués sont donc légèrement différents de ceux établis sur les bases d’une comptabilité nationale (créances acquises/dettes certaines).

DÉCOMPOSITION DU DÉFICIT PUBLIC EN VALEUR
PAR SOUS-SECTEUR D’ADMINISTRATION

(en milliards d’euros)

Besoin de financement

Scénario

LFI 2015

Scénario

PLFR 2015

Recettes/
dépenses

Besoin de financement

Recettes/
dépenses

Besoin de financement

État (1)

293 / 367,5

74,5

294,4 / 367,7

73,3

Organismes divers d’administration centrale (ODAC)

83,4 / 84,7

1,3

83,5 / 84,5

1,0

Administrations publiques locales (APUL)

249,6 / 255,7

6,1

249,3 / 249,8

0,5

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

574,4 / 579,8

5,4

573,7 / 579,9

6,2

Total

1 117,0 / 1 204,3

87,3

1 117,4 / 1 198,4

81,0

En % du PIB

53,4 % / 57,5 %

4,1 %

53,4 % / 57,2 %

3,8 %

(1) Pour l’État, par convention, le solde des comptes spéciaux a été ajouté aux recettes.

Source : calcul commission des finances sur la base des informations contenues dans le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2015 et au projet de loi de finances pour 2016.

Recettes

2015

Prévision LFI 2015

2015

Prévision PLFR 2015

Impôt sur le revenu

68,9

69,5

Impôt sur les sociétés

33,7

33,5

Taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques

14,0

13,9

Taxe sur la valeur ajoutée

142,6

141,5

Impôt sur la fortune

5,6

5,4

Autres recettes fiscales

19,8

20,3

Total

279,1

278,7

Source : annexes aux projets de loi de finances pour 2016 et de loi de finances rectificative pour 2015.

L’évolution des dépenses au cours de l’exercice 2015 montre que les dépenses sont tenues malgré des montants d’ouvertures et d’annulations de crédits importantes (6,3 milliards d’euros) qui s’expliquent :

– pour un tiers par une mesure de transfert de 2,1 milliards d’euros du compte d’affectation spéciale Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État (CAS hertzien) en faveur de la mission Défense dont le principe avait été adopté par le Parlement dans le cadre de la loi actualisant la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 de manière à sécuriser les ressources du ministère (2) ;

– pour un cinquième par des annonces visant à renforcer la sécurité du territoire national et à intervenir dans certaines zones de conflit au travers de la mise en œuvre d’un plan de lutte contre le terrorisme annoncé le 14 janvier 2015 (400 millions d’euros pour les forces de sécurité et la justice auxquels se sont ajoutés 170 millions d’euros au titre des surcoûts constatés pour l’opération « Sentinelle ») et de l’intensification de certaines opérations extérieures notamment au Sahel, en Irak et au Levant (650 millions d’euros) ;

– pour un dernier tiers par des mesures en faveur de l’hébergement d’urgence (220 millions d’euros), de l’emploi aidé (650 millions d’euros) et de l’agriculture au titre des refus d’apurements communautaires au titre de la politique agricole commune ainsi que les autres mesures prises en faveur de l’agriculture et de l’élevage représentent plus d’un milliard d’euros de dépenses supplémentaires.

Les 10 % restants concernent principalement des ajustements de gestion sur les différentes missions du budget général.

(en milliards d’euros)

Dépenses
(crédits de paiement)

LFI 2015 [A]

Économies prévues en cours d’année [B]

Dépenses supplémentaires annoncées [C]

Solde économies – nouvelles dépenses [B] +[C]

PLFR 2015

Dépenses du budget général (hors dette et pensions)

206

– 2,1
(3 décrets d’avance)

– 0,7
(décret d’annulation)

– 0,3 (PLFR)

= – 3,1

+ 2,1
(3 décrets d’avance)

+ 2 transfert Défense

+ 1,4 mesures nouvelles

+ 0,8 apurements PAC

= + 6,3

+ 3,3

209,3

PSR UE + CT

71,5

– 1,1

0

– 1,1

70,4

Charge de la dette

44,3

– 2

0

– 2

42,3

Pensions

45,7

0

+ 0,1

+ 0,1

45,8

Total dépenses de l’État

367,6

– 6,3

+ 6,4

+ 0,1

367,7

PSR : prélèvement sur recettes.

UE : Union européenne.

CT : collectivités territoriales.

PAC : politique agricole commune.

PLFR : projet de loi de finances rectificative.

2. Les ouvertures supplémentaires au sein des missions du budget général se concentrent sur l’agriculture et la défense

Certaines missions, identifiées par le Gouvernement comme portant des dépenses prioritaires, connaissent ainsi une augmentation de leurs crédits en cours d’exercice. D’autres, au contraire, voient leurs crédits diminuer.

Le tableau ci-dessous présente de manière synthétique les principaux mouvements constatés sur les missions du budget général et les prévisions d’exécution pour 2015 présentée en cette fin de gestion.

ÉVOLUTION DES PLAFONDS DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU BUDGET GÉNÉRAL

(en euros)

Mission

LFI 2015

Crédits disponibles après décrets d’avance (04/15 et 10/15) et décret d’annulation (06/15)

Ouvertures et annulations prévues en PLFR 2015

Ouvertures et annulations prévues par le projet de décret d’avance (11/15)

Crédits disponibles pour l’exercice 2015

écart crédits disponibles/ LFI 2015

Action extérieure de l’État

2 957 493 760

2 921 573 785

94 964 197

2 541 730

3 019 079 712

102,1 %

Administration générale et territoriale de l’État

2 898 046 907

2 858 434 875

– 14 918 121

5 247 311

2 848 764 065

98,3 %

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

2 922 638 996

2 884 251 593

1 068 478 241

2 011 754

3 954 741 588

135,3 %

Aide publique au développement

2 798 352 141

2 772 352 141

609 700

– 84 380 688

2 688 581 153

96,1 %

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

2 741 179 423

2 791 679 423

– 2 600

– 63 147 888

2 728 528 935

99,5 %

Conseil et contrôle de l’État

636 382 447

635 122 447

0

– 6 886 480

628 235 967

98,7 %

Culture

2 596 194 865

2 574 994 865

– 41 000

– 8 770 813

2 566 183 052

98,8 %

Défense

36 790 879 504

36 790 879 504

2 180 869 959

637 266 399

39 609 015 862

107,7 %

Direction de l’action du Gouvernement

1 242 998 006

1 228 498 006

– 39 819 825

– 14 469 601

1 174 208 580

94,5 %

Écologie, développement et mobilité durables

7 288 779 489

7 162 696 520

– 165 000 000

– 313 093 882

6 684 602 638

91,7 %

Économie

1 785 372 363

1 758 514 763

92 551 282

– 25 679 230

1 825 386 815

102,2 %

Égalité des territoires, logement et ville

13 407 100 951

13 473 100 951

166 935 126

– 21 664 149

13 618 371 928

101,6 %

Engagements financiers de l’État

45 219 666 523

45 167 120 032

– 2 111 359 250

– 168 170 557

42 887 590 225

94,8 %

Enseignement scolaire

66 403 620 708

66 320 610 405

82 148 176

62 959 929

66 465 718 510

100,1 %

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

11 213 563 691

11 154 078 912

– 70 982 989

– 39 429 595

11 043 666 328

98,5 %

Immigration, asile et intégration

651 993 727

646 307 167

1 979 500

0

648 286 667

99,4 %

Justice

7 894 234 243

7 932 024 418

– 7 000 300

– 65 570 896

7 859 453 222

99,6 %

Médias, livre et industries culturelles

714 851 851

704 172 197

10 000

– 1 086 228

703 095 969

98,4 %

Outre-mer

2 062 156 757

2 028 556 757

0

– 59 209 101

1 969 347 656

95,5 %

Politique des territoires

746 378 093

732 108 093

– 121 000

– 39 972 647

692 014 446

92,7 %

Pouvoirs publics

988 015 262

988 015 262

0

0

988 015 262

100,0 %

Provisions

14 418 296

14 418 296

0

0

14 418 296

100,0 %

Recherche et enseignement supérieur

25 892 775 731

25 674 015 370

– 51 611 553

– 144 642 237

25 477 761 580

98,4 %

Régimes sociaux et de retraite

6 413 954 690

6 413 954 690

43 865 140

0

6 457 819 830

100,7 %

Relations avec les collectivités territoriales

2 815 911 934

2 791 911 934

17 047 052

0

2 808 958 986

99,8 %

Santé

1 201 495 674

1 186 266 674

87 607 505

– 33 329 973

1 240 544 206

103,2 %

Sécurités

18 222 988 329

18 294 161 276

– 19 837 096

– 9 369 352

18 264 954 828

100,2 %

Solidarité, insertion et égalité des chances

15 738 891 979

15 706 820 979

519 191 081

– 27 988 804

16 198 023 256

102,9 %

Sport, jeunesse et vie associative

468 044 662

524 639 691

– 193 500

– 31 363 453

493 082 738

105,3 %

Travail et emploi

11 367 568 525

11 297 751 850

– 38 772 861

448 198 451

11 707 177 440

103,0 %

total

296 095 949 527

295 429 032 876

1 836 596 864

0

297 265 629 740

100,4 %

Les objectifs poursuivis par cet article sont de :

– suivre précisément les dépenses de la transition énergétique (financer les compensations versées aux fournisseurs d’électricité et de gaz au titre de leurs obligations de soutien aux énergies renouvelables, recettes identifiées) ;

– de conserver ces dépenses hors du périmètre des normes des dépenses « zéro valeur » et « zéro volume ».

En année pleine, 5,5 milliards d’euros seront affectés au CAS Transition énergétique. Ce montant est supérieur aux 4,7 milliards d’euros prévus au titre du soutien aux énergies renouvelables. La différence sert à rembourser la dette de l’État vis-à-vis d’Électricité de France (EDF) qui représente 4,9 milliards d’euros en 2015 (au lieu de 5,4 milliards d’euros en 2014) ; la contribution au service public de l’électricité (CSPE) était en effet insuffisante pour couvrir toutes les charges.

Le rendement de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) « nouvelle formule » sera d’environ 8 milliards d’euros dont 2,5 milliards d’euros affectés au budget général.

Il existe une crainte qu’après 2018 les recettes affectées au CAS soient insuffisantes. La hausse de la fiscalité énergétique sur la composante carbone est votée, mais n’est pas affectée au compte d’affectation spéciale (CAS) à ce stade ; il n’existe aucune obligation de consacrer toutes les recettes tirées de la hausse des énergies fossiles à la compensation des charges d’EDF.

Le coût des rachats d’électricité d’origine renouvelable augmente chaque année et s’élèvera à 4,7 milliards d’euros en 2016. Ces rachats servent à financer le développement des énergies solaire et éolienne.

L’article modifie le financement des charges liées à ces rachats :

– il est actuellement assuré à 100 % par une taxation de l’électricité, qui prend la forme d’une contribution au service public de l’électricité (CSPE), qui augmente chaque année de 3 euros par mégawattheure (MWh) et atteindra 22,5 euros par MWh en 2016 ;

– à partir de 2017, l’augmentation des taxes sur les énergies fossiles (produits pétroliers, gaz et charbon), qui se poursuivra au rythme prévu par la loi de transition énergétique (3), apportera chaque année des recettes supplémentaires estimées à environ 1,9 milliard d’euros ;

– sur cette enveloppe de recettes supplémentaires, en 2017, une somme que l’on peut estimer à environ 1,2 milliard d’euros devrait servir à financer la croissance des charges de rachat (jusque-là compensée par la CSPE) ;

– en contrepartie, la CSPE n’augmentera plus après 2016 : ce sont donc bien les énergies fossiles, et non plus la seule électricité, qui financeront le coût de la transition énergétique en 2017.

3. Encouragement à l’utilisation du super sans plomb 95-E 10 (article 12)

Cet article encourage l’utilisation de l’essence sans plomb 95-E 10 (qui contient jusqu’à 10 % de bioéthanol). Pour ce faire, il propose de moduler légèrement les tarifs de TICPE appliqués aux différentes essences.

Cette modulation ne remet pas en cause celle décidée dans le projet de loi de finances pour 2016 (article 8 bis), mais la complète :

– le projet de loi de finances pour 2016 a déjà prévu, par rapport aux tarifs déjà prévus pour 2016 dans notre droit (article 265 du code des douanes), une hausse de la TICPE d’un centime par litre sur le gazole et une baisse d’un centime par litre sur toutes les essences. Les quantités de gazole consommées étant plus importantes que celles d’essence, cette modulation devrait dégager 250 millions d’euros de recettes supplémentaires pour l’État en 2016 ;

– le présent projet de loi de finances rectificative ajoute à cette première modulation une seconde modulation, qui ne concerne que les essences et vise à soutenir les biocarburants : il s’agit d’une baisse supplémentaire de 1 centime par litre pour l’essence SP 95-E 10, et d’une hausse d’un centime pour les autres essences (SP 95 et SP 98 « classiques »). L’essence SP 95-E 10 représentant environ un tiers des volumes d’essence consommés, cette modulation supplémentaire entre les différentes essences devrait rapporter à l’État environ 46 millions d’euros en 2016.

La combinaison des deux textes aboutira donc, par rapport aux tarifs de TICPE déjà prévus pour 2016 (en hausse de 1,7 centime par litre pour les essences et de 2 centimes par litre pour le gazole, en raison de la « contribution climat énergie ») à :

– une baisse de 2 centimes par litre pour l’essence SP 95-E 10 ;

– aucun impact sur les autres essences ;

– une hausse d’un centime pour le gazole.

Ces évolutions s’ajoutent à celles déjà programmées dans les précédentes lois de finances.

4. Modernisation de la taxe spéciale sur les véhicules routiers (article 27)

Une réforme de la taxe spéciale sur les véhicules routiers (TSVR), dite « taxe à l’essieu », permettra de moderniser sa déclaration et son recouvrement, sans alourdir son barème de taxation.

La TSVR est actuellement payée par les propriétaires de poids lourds de plus de 12 tonnes, en fonction des caractéristiques techniques des véhicules (poids et nombre d’essieux notamment).

Elle entraînera à terme des gains de productivité pour les entreprises et pour les douanes, qui sont certains même s’ils ne peuvent pas être chiffrés précisément.

5. Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) : modernisation et sécurisation du recouvrement de la taxe (article 28)

Il est également prévu une mesure visant à simplifier et sécuriser le recouvrement de la TGAP. Il convient de rappeler que cette taxe est acquittée par les entreprises qui réalisent des activités économiques à l’origine de pollutions dans les milieux naturels.

Il s’agit d’abord de généraliser progressivement la télédéclaration et le télérecouvrement pour les cinq principales composantes de la TGAP, qui sont gérées par l’administration des douanes.

Par ailleurs, une nouvelle composante de TGAP, qui devait porter sur les sacs de caisse en matière plastique, mais n’avait jamais été mise en œuvre faute de décret d’application, sera supprimée.

Cette mesure n’aura pas d’impact budgétaire direct, mais allègera les coûts de gestion de cette taxe.

Elle profitera aussi aux entreprises qui paient la TGAP, et ce dès 2016 s’agissant des 520 entreprises qui sont redevables de plus de 100 000 euros de TGAP et gagneront, grâce aux téléprocédures, un mois de trésorerie pour régler leur premier acompte de TGAP.

L’article 13 procède à la mise en conformité du dispositif de réduction d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) au titre des souscriptions au capital de petites et moyennes entreprises (PME), dit « ISF-PME », avec le règlement général d’exemption par catégorie (RGEC) (4).

Actuellement, l’ISF-PME permet d’imputer sur le montant d’ISF théoriquement dû 50 % des investissements dans une PME non cotée, dans la limite d’une réduction d’impôt de 45 000 euros. Le dispositif en vigueur ne prévoit pas de limite d’âge de la PME financée.

Conformément au RGEC, l’article 13 introduit une limite d’âge de sept ans pour la PME financée avec toutefois une possibilité d’investir au-delà de cette limite en pratiquant un « investissement de suivi » des investissements déjà réalisés avant sept ans.

En outre, il introduit un plafonnement de 15 millions d’euros par entreprise aidée. Ce ciblage doit permettre d’apporter une meilleure réponse au problème du capital amorçage en France et en Europe.

L’impact budgétaire de cet article n’est pas chiffré mais il devrait se traduire par une baisse de la dépense fiscale associée à l’ISF-PME ; cette dépense s’est élevée à 528 millions d’euros en 2014, permettant un investissement total dans les PME de 1,2 milliard d’euros.

2. Renforcement du PEA-PME (article 14)

L’article 14 procède à un élargissement ciblé du plan d’épargne en actions dédié au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire (PEA-PME).

Actuellement, le PEA-PME est limité aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI) cotées ou non, c’est-à-dire aux entreprises de moins de 5 000 personnes et dont le chiffre d’affaires est inférieur à 1,5 milliard d’euros ou le bilan est inférieur à 2 milliards d’euros.

Les titres éligibles sont pour l’essentiel des actions ou parts d’organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM).

Sa fiscalité permet une exonération d’impôt sur le revenu sur les dividendes et les plus-values mobilières au bout de cinq ans ; en cas de retrait anticipé, ces produits sont imposés au taux de 22,5 % (en cas de retrait avant deux ans) ou de 19 % (en cas de retrait entre trois et cinq ans).

L’article procède à deux élargissements :

– les obligations convertibles ou remboursables en actions deviennent éligibles au PEA-PME. L’extension aux bons de souscriptions d’actions n’est pas prévue ;

– pour les sociétés cotées, une simplification des méthodes de consolidation des participations permettra d’élargir à la marge le nombre d’entreprises visées.

En 2014, le PEA a représenté une dépense fiscale de 230 millions d’euros. Le coût de l’élargissement prévu par le présent article n’est pas chiffré.

3. Mise en conformité du régime des sociétés mères et filiales (article 16)

L’article 16 apporte des aménagements au régime des sociétés mères et filiales. Ce régime vise à exonérer de retenue à la source les dividendes payés par une société fille à la société mère Il est modifié pour être mis en conformité avec le droit européen :

– l’exonération s’applique désormais si la mère détient les titres en nue-propriété ;

– une clause anti-abus est transposée (directive du 27 janvier 2015) (5) ;

– une doctrine administrative découlant elle-même de l’interprétation du droit européen est incluse dans la loi ;

– cette exonération est étendue aux sociétés mères domiciliées en Norvège, Liechtenstein et Islande (Espace économique européen).

4. Création d’un comité consultatif pour le crédit d’impôt pour dépenses de recherche et le crédit d’impôt innovation (article 19)

L’article 19 crée un comité consultatif du crédit d’impôt pour dépenses de recherche.

Présidé par un conseiller d’État, ce comité donne un avis consultatif sur les rectifications de l’administration fiscale visant les entreprises bénéficiaires du crédit d’impôt recherche et du crédit d’impôt innovation.

Sa portée est limitée, car cet avis ne lie pas l’administration fiscale.

5. Amortissement exceptionnel des investissements des entreprises dans les PME innovantes (article 31)

L’article 31 procède à une nouvelle mise en conformité avec le droit européen du dispositif d’amortissement exceptionnel des investissements des entreprises dans les PME innovantes.

Ce dispositif, voté dans la loi de finances rectificative pour 2013 (6), a été ajusté une première fois en 2014. Compte tenu du nouveau RGEC du 17 juin 2014, une nouvelle mise en conformité s’impose.

Il permet à une entreprise d’amortir sur cinq ans ses investissements dans une PME innovante. Au sens de cet article, une PME innovante est :

– une PME au sens européen, c’est-à-dire employant moins de 250 personnes et ayant soit un chiffre d’affaires inférieur à 50 millions d’euros soit un bilan total inférieur à 43 millions d’euros ;

– est innovante une entreprise qui réalise des dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche représentant 10 % de ses charges d’exploitation au cours d’un des trois derniers exercices.

L’investisseur ne peut qu’être qu’une société passible de l’impôt sur les bénéfices.

Pour un investissement initial de 100 000 euros, cette société pourra par exemple réduire son résultat imposable de 20 000 euros pendant cinq ans, ce qui représente une économie d’impôt de 6 666 euros par an à supposer que cette société soit imposée sur ses bénéfices à 33,3 %.

6. Exonération de la retenue à la source due par une société non-résidente déficitaire et en liquidation (article 32)

L’article 32 prévoit une exonération de retenue à la source sur les dividendes de source française perçus par certaines sociétés non-résidentes:

Selon le droit en vigueur, lorsqu’une société B française (résidente) détient moins de 5 % d’une société A française (résidente), la société B paie de l’impôt sur les sociétés (IS) sur les dividendes versés par la société A.

Lorsqu’une société B non-résidente détient moins de 5 % d’une société A française, la société A effectue une retenue à la source de 30 % sur les dividendes versés à la société B (15 % en réalité compte tenu des conventions internationales).

L’article exonère de retenue à la source la société B si cette dernière est en déficit et en liquidation.

La Commission européenne a demandé cette exonération pour les sociétés en déficit ou en liquidation.

L’article est moins favorable pour les entreprises que la demande de la Commission européenne.

7. Fiscalité des produits du tabac : adaptation du dispositif de majoration du minimum de perception (article 34)

Le présent projet de loi de finances rectificative modifie un aspect ciblé de la fiscalité spécifique des produits du tabac (les droits de consommation) : les possibilités de majoration du minimum de perception.

Les majorations du minimum de perception actuellement prévues par l’article 575 du code général des impôts sont peu lisibles et trop ciblées pour respecter le droit de l’Union européenne.

Le minimum de perception est une taxation minimale des produits du tabac, fixée actuellement à 4,2 euros pour un paquet de 20 cigarettes, quel qu’en soit le prix de vente au détail.

Cette taxation minimale peut être majorée si les fabricants baissent le prix de certaines de leurs marques : le but est de dissuader financièrement ces pratiques, pour des raisons de santé publique.

Les majorations actuelles ne peuvent plus être mises en œuvre à la suite de récentes décisions de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et du Conseil d’État : elles sont trop ciblées pour respecter la directive européenne du 21 juin 2011 encadrant la fiscalité du tabac dans l’Union européenne (7).

Dans ce contexte, en l’absence de majoration applicable, les fabricants pourraient débuter des pratiques de dumping, qui rendraient ces produits financièrement plus accessibles.

Le nouveau système doit permettre à la France de conserver un système de majoration du minimum de perception, plus clair et moins ciblé pour respecter le droit de l’Union européenne.

La réforme permettra de disposer d’un seul mécanisme de majoration, plus intelligible, au lieu de trois actuellement.

Une majoration de 10 % pourra être décidée par arrêté ministériel si le Gouvernement constate l’apparition de baisses de prix excessives à l’initiative des fabricants.

Cette majoration vaudra pour tous les produits du même groupe (par exemple toutes les cigarettes, ou tous les « tabacs à rouler »), et non plus pour certains produits seulement, afin de respecter les exigences européennes.

8. Réforme du dispositif de financement des exportations (article 37)

L’article 37 transfère de la Compagnie française pour le commerce extérieur (COFACE) à la Banque publique d’investissement (BPI), Bpifrance, les garanties données par l’État, sans que cela créé un avantage pour les entreprises.

Actuellement, l’État donne sa garantie, par l’intermédiaire de la COFACE (partie publique).

Le stock des garanties atteint de 70 milliards d’euros. 13 500 entreprises en bénéficient et ont payé 750 millions d’euros de primes en 2014, reversées à l’État sous la forme de recettes non fiscales versées au budget général. Par ailleurs, l’État verse 65 millions d’euros à la COFACE en rémunération de la gestion de ces garanties.

Le principal objectif poursuivi par ce transfert est de concentrer au sein de Bpifrance l’ensemble des aides aux entreprises, et notamment aux PME et aux ETI, pour leur développement en France et à l’international, bien que cet établissement ne dispose pas actuellement des capacités d’expertise nécessaire à la mise en œuvre des garanties publiques.

Les conséquences financières et les modalités techniques de ce transfert (notamment en ce qui concerne le rattachement éventuel des équipes de la COFACE en charge des garanties publiques à Bpifrance) ne sont pas présentées de manière précise à ce stade.

Les principales interrogations sur cette mesure portent notamment sur les compétences qui seront transférées à Bpifrance pour accomplir cette nouvelle mission dans des conditions satisfaisantes et sur la rémunération qui lui sera accordée à ce titre.

9. Échanges automatiques d’informations financières

L’article 17 prévoit l’échange automatique d’informations financières sur des comptes bancaires de particuliers ou de fondations, fiducies, trustees, etc.

a. Trois démarches parallèles

L’accord FATCA (8) entre la France et les États-Unis commence à s’appliquer, avec de premières transmissions d’informations à l’administration fiscale américaine en septembre 2015.

Deux modèles d’accords FATCA doivent être distingués :

– modèle FATCA 1 (retenu par la France) : échanges d’informations entre administrations fiscales (réciprocité) ;

– modèle FATCA 2 : transmissions d’informations de la part d’établissements bancaires vers l’administration fiscale des États-Unis (pas de réciprocité).

L’accord multilatéral de Berlin du 29 octobre 2014, sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a été signé par soixante-quatorze pays, qui se sont ainsi engagés à procéder à l’échange automatique d’informations.

La directive européenne 2014/107/UE du 9 décembre 2014 (9) reprend la norme commune de déclaration définie par l’OCDE, avec le même calendrier que l’accord de Berlin.

b. La législation française (article 1649 AC du code général des impôts) est modifiée sur deux points

La directive 2014/107/UE relative à la coopération administrative dans le domaine de la fiscalité directe est transposée.

Le champ de l’obligation déclarative à la charge des institutions financières est étendu, pour assurer l’identification de la résidence fiscale des titulaires de tous les comptes.

c. Le calendrier de mise en œuvre de la directive européenne et de l’accord de Berlin est le suivant

À partir du 1er janvier 2016 : collecte des informations par les institutions financières;

Début 2017, transmission aux administrations fiscales;

Avant le 30 septembre 2017, échanges entre administrations fiscales.

Le Fonds national de gestion des risques agricoles (FNGRA) fonctionne selon les modalités suivantes :

– ses recettes annuelles sont de l’ordre de 120 millions d’euros par an, et sont issues de contributions additionnelles aux primes d’assurance payés par les agriculteurs ;

– ses dépenses sont constituées par les indemnisations versées au titre des calamités agricoles : en moyenne 60 millions d’euros par an ;

– en cas de dépenses annuelles supérieures aux recettes annuelles, l’État est légalement obligé de compenser le différentiel. Ainsi, 111 millions d’euros ont été versés en 2012 correspondant au solde des indemnités liées à la sécheresse de 2011.

Au fil des ans, le FNGRA a accumulé 314 millions d’euros de trésorerie.

NIVEAU DE TRÉSORERIE DU FNGRA AU 31 DÉCEMBRE

(en millions d’euros)

Année

2011

2012

2013

2014

2015

Prévision

Fonds de roulement

51,8

56,4

134,3

231,8

314,0

Source : ministère des finances et des comptes publics, direction du budget.

2. Réforme des zones de revitalisation rurale (article 18)

L’article 18 modifie les critères de classement en zones de revitalisation rurale (ZRR) et proroge les avantages fiscaux attachés à ces zones jusqu’en 2020.

14 691 communes sont classées en ZRR aujourd’hui. Ceci leur donne les avantages suivants :

– exonération d’impôt sur les bénéfices, totale puis dégressive, sur huit ans, pour les entreprises de moins de onze salariés créées à partir de 2011 ;

– exonération, sur délibération des collectivités, de CFE, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) ;

– exonérations de cotisations sociales et mesures ciblées sur les investissements immobiliers des PME.

L’article 18 modifie les conditions pour accéder au statut de ZRR à partir du 1er juillet 2017, en posant deux critères :

– la faible densité de population ;

– un revenu fiscal par unité de consommation inférieur à la moyenne.

L’article 18 modifie légèrement les avantages liés au classement en ZRR :

– il supprime les mesures fiscales de faible ampleur portant sur les investissements immobiliers de PME ;

– il proroge jusqu’en 2020 les exonérations d’impôt sur les bénéfices, de CFE et de CVAE.

4 000 communes perdraient le statut de ZRR, et 3 000 communes, non ZRR jusque-là, le deviendraient, sur la base d’une carte des EPCI et de données INSEE de 2014.

L’article 18 coûte 5 millions d’euros à l’État en 2017 et 11 millions d’euros en 2018.

3. Des aménagements à prévoir de la fiscalité agricole

a. Déduction pour aléas (DPA)

Il s’agit d’un outil fiscal permettant d’« épargner » du revenu, en prévision de « mauvaises années ».

Il est envisagé des modifications des conditions d’utilisation de la DPA, avec une extension de la définition de l’aléa.

Aujourd’hui, l’aléa économique, défini comme une baisse de 10 % de la valeur ajoutée est possible.

Plusieurs amendements proposent des assouplissements. L’un propose de remplacer la valeur ajoutée par tout solde intermédiaire de gestion, l’autre de pouvoir apprécier sur deux ans la baisse de la valeur ajoutée (15 %).

D’autres amendements proposent d’assouplir les conditions d’affectation de l’épargne constituée sur un compte bloqué.

b. Les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC)

Il est également envisagé de favoriser les regroupements en étendant aux GAEC les avantages de la fiscalité agricole individuelle. Il est ainsi prévu :

– d’étendre le bénéfice des crédits d’impôt « congés » et « agriculture biologique » jusqu’à quatre associés ;

– d’améliorer le principe de transparence des GAEC en cas de pluriactivité.

c. Réforme du forfait

Une réforme du régime du forfait collectif est également à prévoir avec :

– une suppression du forfait collectif, régime d’imposition complexe aux couts de gestion importants ;

– et son remplacement par un régime micro-bénéfices agricoles (BA) avec abattement de 87 % sur le chiffre d’affaires.

d. Soutien à l’investissement

Les principaux indicateurs nécessaires à l’élaboration d’un budget

Le scénario macroéconomique qui préside à l’élaboration d’un projet de loi finances fait intervenir de multiples indicateurs et hypothèses macroéconomiques (tels que le taux de croissance, l’inflation, les taux de change, les taux d’intérêt, etc.).

Taux de croissance

La prévision de taux de croissance est l’une des plus importantes pour l’élaboration du budget de l’État. Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), chargé d’apprécier le réalisme des prévisions macroéconomiques, consacre généralement, dans ses avis, la majeure partie de ses développements à l’appréciation de l’hypothèse de taux de croissance.

L’hypothèse de croissance permet de bâtir une prévision au titre des recettes fiscales. Le taux de croissance de l’année précédant celle du budget est aussi très important car l’exigibilité de certains impôts présente un décalage d’une année avec leur assiette (par exemple : l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les sociétés sauf pour les entreprises soumises au cinquième acompte).

Inflation

La prévision d’inflation participe à la prévision des recettes (impact immédiat sur les bases taxables de la taxe sur la valeur ajoutée, par exemple) et des dépenses (par exemple, les prestations indexées). L’inflation a également pour effet de réduire le rendement mesuré de certaines mesures d’économies tendancielles (telles que les mesures de gel).

Les taux de change

L’hypothèse des taux de change permet, notamment, d’effectuer une prévision de la demande externe qui sera adressée à la France.

Les taux d’intérêt

La prévision de taux d’intérêt permet, notamment, d’anticiper la charge de la dette de l’État.

Le Gouvernement a indiqué que « le scénario macroéconomique pour 2015 associé au projet de loi de finances rectificative est identique à celui du projet de loi de finances pour 2016 » (10). Il s’agit donc du scénario macroéconomique qui a été présenté dans le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2016. Ce scénario est lui-même très proche de celui qui avait été présenté à l’occasion de la présentation du programme de stabilité en avril 2015.

Les principales hypothèses économiques du Gouvernement pour 2015 sont récapitulées dans le tableau qui suit.

PRINCIPALES HYPOTHÈSES ÉCONOMIQUES DU GOUVERNEMENT POUR 2015

Variable

2015

Croissance du PIB en volume

+ 1 %

Inflation (indice des prix à la consommation)

+ 0,1 %

Taux de change euro/dollar

1,11

Pouvoir d’achat des ménages

+ 1,5 %

Consommation des ménages

+ 1,8 %

Taux d’épargne

14,8 %

Investissement des ménages

 4,2 %

Consommation publique

+ 1,1 %

Emploi salarié

+ 0,1 %

Masse salariale privée

+ 1,7 %

Investissement hors construction des entreprises

+ 2,5 %

Prix du baril de Brent (en dollars)

57

Exportations

+ 6,0 %

Importations

+ 6,1 %

Demande mondiale adressée à la France

+ 3,7 %

Contribution du commerce mondial adressé à la croissance

− 0,1 point de PIB

Emploi marchand

+ 60 000 postes

Dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2015 (11), le Haut Conseil des finances publiques avait jugé « optimiste » la prévision de croissance du Gouvernement de 1 % pour 2015. Selon le Haut Conseil, cette prévision supposait « un redémarrage rapide et durable de l’activité que n’annoncent pas les derniers indicateurs conjoncturels ».

Le 30 septembre dernier, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2016, le Haut Conseil a revu son appréciation initiale en estimant que cette prévision « devrait se réaliser » (12).

Désormais, le Haut Conseil considère que cette prévision est « prudente » (13).

Autrement dit, alors que la prévision était initialement considérée comme trop élevée, elle désormais jugée comme légèrement en retrait par rapport à ce qui devrait advenir.

b. L’acquis de croissance après trois trimestres est d’ores et déjà supérieur à la prévision pour l’ensemble de l’année

Selon les dernières publications de l’INSEE, postérieures au dernier avis du Haut Conseil, l’acquis de croissance au troisième trimestre s’élève d’ores et déjà à 1,1 % du PIB (14).

Dans sa dernière note de conjoncture, l’institut indiquait : « Au total, au-delà des à-coups trimestriels, le PIB conserverait au second semestre 2015 un rythme comparable à celui du premier semestre (+ 0,2 % au troisième trimestre puis + 0,4 % au quatrième trimestre). La croissance atteindrait ainsi + 1,1 % en moyenne sur l’ensemble de l’année (après + 0,2 % en 2014). » (15)

c. L’ensemble des prévisions internationales sont meilleures ou identiques à celle du Gouvernement pour 2015

De même, dans ses prévisions économiques de printemps publiées le 5 mai dernier (16), la Commission européenne se montrait plus optimiste que le Gouvernement puisqu’elle anticipait une croissance pour la France de 1,1 % pour 2015. Elle a maintenu cette prévision dans ses prévisions économiques d’automne (17).

L’OCDE a publié des prévisions en ligne avec celles du Gouvernement pour 2015. Dans ses prévisions du 16 septembre 2015 (18), elle prévoit, ainsi, pour la France un taux de croissance de 1 % pour 2015, en baisse de 0,1 point pour 2015 par rapport à sa précédente prévision. Elle s’interroge notamment sur la reprise moins rapide qu’attendu de la zone euro en dépit de nombreux facteurs favorables (prix pétroliers, taux de change avec le dollar, politique monétaire accommodante de la Banque centrale européenne – BCE). La vulnérabilité des pays émergents et le calendrier de la hausse probable des taux d’intérêt constituent, pour l’OCDE, deux fortes incertitudes qui pèsent sur la situation économique mondiale.

Enfin, le Fonds monétaire international (FMI) a publié le 6 octobre 2015 ses dernières prévisions pour la croissance mondiale. Il demeure plus optimiste que le Gouvernement pour 2015 en prévoyant une croissance pour la France de 1,2 % (19).

LES PRÉVISIONS DE CROISSANCE POUR 2015 CONCERNANT LA FRANCE

(en pourcentage de PIB)

Gouvernement (projet de loi de finances rectificative pour 2015)

1

INSEE

1,1

OCDE

1

FMI

1,2

Commission européenne

1,1

Source : commission des finances.

2. La prévision d’inflation est ramenée de 0,9 % à 0,1 %

Le principal changement par rapport au scénario retenu pour l’élaboration de la loi de finances initiale pour 2015 concerne la prévision d’inflation. Initialement prévue à 0,9 %, l’inflation est désormais attendue à 0,1 % pour 2015.

La prévision initiale de 0,9 % avait pourtant été jugée « plausible » par le Haut Conseil des finances publiques (20). Dans son dernier avis, le Haut Conseil a jugé que la prévision actualisée à 0,1 % était « réaliste » (21).

L’année 2014 a été marquée par une croissance limitée à 0,2 % et un recul de l’investissement. Le graphique ci-dessous porte sur l’investissement total, c’est-à-dire des entreprises, des ménages et l’investissement public.

Source : INSEE, Comptes nationaux base 2010.

La formation brute de capital fixe (FBCF) – qui mesure en comptabilité nationale le niveau d’investissement des agents économiques – n’a pas encore atteint son niveau d’avant-crise (462,5 milliards d’euros en 2014 au lieu de 470,1 milliards d’euros en 2008, soit 21,7 % du PIB en 2014 au lieu de 23,5 % en 2008). Sur les premiers mois de l’année 2015, l’investissement baisse à nouveau de 0,7 % selon les chiffres issus des comptes nationaux trimestriels du deuxième trimestre 2015 publiés par l’INSEE. La baisse de l’investissement sur les trois premiers trimestres de l’année 2015 serait désormais limitée à 0,4 % selon la dernière publication de l’INSEE (22).

FORMATION BRUTE DE CAPITAL FIXE EN 2015

(variation en pourcentage par rapport au trimestre précédent)

Période

1er trimestre

2e trimestre

3e trimestre

Acquis

Formation brute de capital fixe totale

+ 0,2

– 0,1

+ 0,1

– 0,4

Dont entreprises non financières

+ 0,8

+ 0,5

+ 0,7

+ 1,8

Dont ménages

– 0,8

– 1,1

– 0,5

– 3,0

Dont administrations publiques

– 0,3

– 0,8

– 1,0

– 3,9

Source : INSEE.

Il existe, par ailleurs, des inquiétudes sur le maintien de l’investissement public, notamment en raison de la baisse des dotations aux collectivités locales.

L’investissement public représente 4,5 % du PIB, dont :

– 79 milliards d’euros au titre de la formation brute de capital fixe des administrations publiques (3,7 % du PIB) ;

– et 17 milliards d’euros au titre des subventions des administrations publiques (0,8 % du PIB).

L’investissement des administrations publiques a baissé de 6,9 % en 2014 et baisse encore de 2,3 % sur le premier semestre de l’année 2015. La baisse s’est accélérée au troisième trimestre (– 1 %).

FICHE N° 2 :
LE SOLDE PUBLIC ET LE SOLDE DE L’ÉTAT

Le déficit public pour 2015, toutes administrations publiques confondues, est désormais évalué à 3,8 % du PIB dans le présent projet de loi de finances rectificative, au lieu de 4,1 % dans la loi de finances pour 2015 (23).

La Rapporteure générale a souhaité présenter une vision en valeur, et non pas seulement en point de PIB, du déficit public par sous-secteur d’administration. Ces chiffres sont habituellement publiés par l’INSEE plusieurs mois après la clôture d’un exercice annuel. Ils peuvent néanmoins être d’ores et déjà évalués aux montants récapitulés dans le tableau qui suit (sous réserves de quelques ajustements). Le besoin de financement correspond au déficit du sous-secteur, c’est-à-dire au montant des dépenses qui doivent être couvertes par l’emprunt.

DÉCOMPOSITION DU DÉFICIT PUBLIC EN VALEUR PAR SOUS-SECTEUR D’ADMINISTRATION

(en milliards d’euros)

Besoin de financement

Scénario

LFI 2015

Scénario

PLFR 2015

Recettes/dépenses

Besoin de financement

Recettes/dépenses

Besoin de financement

État

293 (1) / 367,5

74,5

294,4 / 367,7

73,3

Organismes divers d’administration centrale (ODAC)

83,4 / 84,7

1,3

83,5 / 84,5

1,0

Administrations publiques locales (APUL)

249,6 / 255,7

6,1

249,3 / 249,8

0,5

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

574,4 / 579,8

5,4

573,7 / 579,9

6,2

Total

Non signifiant (2)

87,3

Non signifiant (2)

81,0

En %du PIB (hypothèse d’un PIB de 2 155 milliards d’euros pour 2015)

Non signifiant (2)

4,1 %

Non signifiant (2)

3,8 %

Pour l’État, le solde des comptes spéciaux a été traité en recettes.

L’addition des recettes et des dépenses de toutes les administrations publiques n’est pas signifiante compte tenu des doubles décomptes.

Source : calcul commission des finances sur la base des informations contenues dans le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2015 et au projet de loi de finances pour 2016.

Selon le Gouvernement, c’est la première fois depuis 2011 que la prévision de déficit public est améliorée par rapport à la loi de finances initiale.

L’amélioration du solde public résulte, pour une part importante, d’un ralentissement des dépenses des administrations publiques locales plus rapide que prévu.

CAPACITÉ OU BESOIN DE FINANCEMENT PAR SOUS-SECTEUR D’ADMINISTRATION

(en points de PIB)

Capacité (+) ou besoin (-) de financement

2014

2015

État

– 3,5

– 3,4

Organismes divers d’administration centrale (ODAC)

0,1

0,0

Administrations publiques locales (APUL)

– 0,2

0,0

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

– 0,4

– 0,3

Solde public

– 3,9

– 3,8

Source : Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2016.

I. LE SOLDE PUBLIC

SOLDE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES POUR 2015

(en point de PIB)

Soldes

Prévision d’exécution 2015

Solde structurel

– 1,7

Solde conjoncturel

– 2,0

Mesures exceptionnelles et temporaires

– 0,1

Solde effectif

– 3,8

Source : article liminaire du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

DÉFICIT PUBLIC CONSTATÉ DEPUIS 2008

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

 

Déficit public nominal (en points de PIB)

– 3,2

– 7,2

– 6,8

– 5,1

– 4,8

– 4,1

– 3,9

Déficit public nominal (en milliards d’euros)

63,5

138,9

135,8

105,0

100,4

86,4

84,1

Source : INSEE.

 

Le présent projet de loi de finances rectificative constate la poursuite de la réduction du déficit public avec un solde effectif qui sera ramené à – 3,8 % du PIB en 2015.

Dans son avis sur le présent projet de loi de finances rectificative, le Haut Conseil aux finances publiques a estimé que, « compte tenu des informations dont il dispose », la prévision de déficit public de 3,8 % du PIB en 2015 était « vraisemblable » (avis n° HCFP-2015-04 du 6 novembre 2015).

2. La trajectoire de réduction du déficit public est respectée

TRAJECTOIRE DE SOLDE PUBLIC EFFECTIF

(en points de PIB)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

Loi de programmation des finances publiques 2014-2019

– 4,4

– 4,1

– 3,6

– 2,7

– 1,7

Programme de stabilité d’avril 2015

– 4,0

– 3,8

–3,3

– 2,7

– 1,9

Source : commission des finances.

Avec déficit public limité à 3,8 % du PIB, la réduction du déficit est en avance de 0,3 point sur la trajectoire prévue par la dernière loi de programmation des finances publiques, et est conforme à celle définie par le programme de stabilité transmis à la Commission européenne en avril dernier.

La programmation pluriannuelle des finances publiques

Deux types de documents juridiques fixent un cadre pluriannuel pour les finances publiques et déterminent une trajectoire de réduction des déficits public et structurel.

En droit interne, les lois de programmation des finances publiques sont prévues par l’article 34 de la Constitution et « s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ». À ce titre, elles déterminent les trajectoires des soldes structurels et effectifs annuels. Leur contenu est précisé par la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

En droit européen, les programmes de stabilité ont été institués par le Pacte de stabilité et de croissance du 7 juillet 1997 comme outil de la surveillance multilatérale des politiques économiques. Ils sont transmis chaque année au mois d’avril à la Commission européenne.

Année

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Produit intérieur brut

0,3

0,4

1,0

1,7

1,9

2,0

Croissance potentielle

1,0

1,0

1,1

1,3

1,3

1,2

Écart de production (en % du PIB potentiel)

– 2,7

– 3,3

– 3,4

– 3,1

– 2,5

– 1,7

Source : loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

La trajectoire de réduction du solde structurel est en avance sur les objectifs de la loi de programmation des finances publiques. Elle est aussi conforme pour 2014, et à 0,1 point de PIB près pour les années 2015 et 2016, à la trajectoire établie dans le programme de stabilité.

TRAJECTOIRE DE SOLDE STRUCTUREL

(en points de PIB)

Fondement

2014

2015

2016

Article liminaire du projet de loi de finances pour 2016

– 2,0

– 1,7

– 1,2

Loi de programmation des finances publiques du 29 décembre 2014

– 2,4

– 2,1

– 1,8

Programme de stabilité d’avril 2015

– 2,0

– 1,6

– 1,1

Source : données gouvernementales.

Le déficit structurel pour 2015 (1,7 % du PIB) serait ainsi nettement inférieur à l’objectif de 2,1 % fixé dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

Dépenses

367,5

Recettes

293,3

Dépenses du budget général

296,1

Recettes fiscales nettes

279,1

Prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne

20,7

Recettes non fiscales

14,2

Prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales

50,7

Soldes des comptes spéciaux

– 0,2

Déficit à financer

74,4

Source : loi de finances initiale pour 2015.

Le Gouvernement a révisé sa prévision de déficit budgétaire pour 2015 en fonction des éléments d’exécution connus à ce stade. Le déficit budgétaire pour 2015 devrait ainsi s’établir à 73,3 milliards d’euros au lieu de 74,4 milliards d’euros prévus en loi de finances initiale. Le solde budgétaire de l’État est, par conséquent, en amélioration de 1,1 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale.

Cette amélioration est due essentiellement à la révision du solde des comptes spéciaux (+ 1,4 milliard d’euros) et à la baisse du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne (1 milliard d’euros).

FORMATION DU SOLDE BUDGÉTAIRE DE L’ÉTAT
SELON LE PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2015

(en milliards d’euros)

Dépenses

367,7

Recettes

293,2

Dépenses du budget général

297,3

Recettes fiscales nettes

278,7

Prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne

19,7

Recettes non fiscales

14,5

Prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales

50,7

Soldes des comptes spéciaux

1,2

Déficit à financer

73,3

Source : loi de finances initiale pour 2015.

Le déficit budgétaire poursuit ainsi sa décrue. Il a été plus que divisé par deux depuis 2010.

DÉFICIT BUDGÉTAIRE DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

Année

2009

Exécution

2010

Exécution

2011

Exécution

2012

Exécution

2013

Exécution

2014

Exécution

hors PIA

2015

Prévision

actualisée

2016

Prévision

Déficit budgétaire

– 138,0

– 148,8

– 90,7

– 87,2

– 74,9

– 73,6

– 73,3

– 72,0

Source : commission des finances.

En 2014, les recettes de l’ensemble des différentes administrations publiques se sont élevées à 1 142,6 milliards d’euros selon les chiffres consolidés de l’INSEE, soit 53,6 % du PIB. Les prélèvements obligatoires s’élevaient quant à eux à 957,7 milliards d’euros soit 44,9 % du PIB.

Pour 2015, le Gouvernement ne fournit pas de prévision de recettes globales, en valeur, toutes administrations publiques confondues. Le Rapport économique, social et financier, annexé aux projets de loi de finances, se borne à analyser dans le chapitre intitulé Recettes des administrations publiques l’évolution des prélèvements obligatoires. Or, ces derniers ne représentent qu’environ 85 % des recettes des administrations publiques.

En 2015, les prélèvements obligatoires à destination des administrations publiques devraient s’élever à 970,5 milliards d’euros. La hausse en valeur par rapport à 2014 serait ainsi limitée à 12,8 milliards d’euros, soit à seulement 1,3 %.

Les mesures nouvelles joueraient à la baisse pour environ 4 milliards d’euros selon le Gouvernement. Par déduction, l’évolution spontanée des prélèvements obligatoires seraient de l’ordre de 16,8 milliards d’euros, soit de 1,7 %.

La hausse des prélèvements obligatoires serait inférieure à la croissance du PIB en valeur telle qu’elle résulterait des hypothèses initiales du Gouvernement (1 % de croissance en volume et 0,9 % d’inflation). Il s’ensuit que le taux de prélèvements obligatoires par rapport au PIB diminuerait pour s’établir à 44,6 % du PIB, en baisse de 0,3 point par rapport à 2014.

ÉVOLUTION DU TAUX DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN 2015

(Y COMPRIS VERSEMENTS UNION EUROPÉENNE)

Catégorie d’administrations

État

ODAC

ASSO

APUL

UE

APU*

Montants (en milliards d’euros)

292,1

17,6

527,1

131,5

2,1

970,5

Taux de PO (en % de PIB)

13,4

0,8

24,2

6,0

0,1

44,6

Évolution du taux de PO (en %)

− 0,2

0,1

− 0,2

0,1

0,0

− 0,3

Contribution de l’évolution spontanée (en %)

0,0

0,0

− 0,1

0,0

0,0

− 0,1

Contribution des mesures nouvelles (en %)

− 0,2

0,1

− 0,2

0,1

0,0

− 0,2

Contribution des changements de périmètre** (en %)

− 0,1

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

*Le montant intègre les prélèvements obligatoires perçus par les institutions de l’Union européenne.

**Réaffectation de recettes entre sous-secteurs.

PO : prélèvements obligatoires.

ODAC : organismes divers d’administration centrale.

ASSO : administrations de sécurité sociale.

APUL : administrations publiques locales.

UE : Union européenne.

APU : administrations publiques.

Source : Rapport économique, social et financier, annexé au projet de loi de finances pour 2016.

L’année 2015 serait ainsi la première année de baisse des prélèvements obligatoires depuis 2009. Les prélèvements obligatoires avaient augmenté de 2,7 points entre 2009 et 2012 (de 41 % à 43,7 % du PIB). Leur hausse serait ainsi contenue à 0,9 point depuis 2012 (de 43,7 % à 44,6 % prévu en 2015).

TAUX DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES DEPUIS 2002

Année

Taux de prélèvements obligatoires par rapport
au PIB
(en %)

2002

41,9

2003

41,8

2004

41,9

2005

42,5

2006

42,8

2007

42,1

2008

41,9

2009

41,0

2010

41,3

2011

42,6

2012

43,7

2013

44,7

2014

44,9

2015 (prévision)

44,6

Source : INSEE pour les années 2002 à 2014 ; pour 2015, rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2016.

Toutefois, il est possible que la baisse du taux de prélèvements obligatoires soit plus limitée que celle estimée par le Gouvernement compte tenu du ralentissement de l’inflation qui a pour effet de limiter la croissance du PIB en valeur. À l’inverse, le ralentissement de l’inflation a aussi pour effet de modérer l’évolution spontanée de certains impôts tels que la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), et donc de jouer à la baisse sur le taux de prélèvements obligatoires. L’estimation du taux de prélèvements obligatoires pour 2015 est, dès lors, encore affectée par diverses incertitudes.

Selon le présent projet de loi de finances rectificative pour 2015, les recettes totales nettes du budget général s’établiraient à 293,2 milliards d’euros. Cette prévision actualisée est très proche de celle de la loi de finances initiale pour 2015, laquelle évaluait à 293,3 milliards d’euros le montant des recettes de l’État, soit un écart de seulement 0,1 milliard d’euros.

Les recettes pour 2015 se composeraient de :

– 278,7 milliards d’euros de recettes fiscales nettes (recettes fiscales brutes de 381 milliards d’euros sous déduction des remboursements et dégrèvements estimés à 102,3 milliards d’euros), soit une baisse de 0,4 milliard d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale ;

– et 14,5 milliards de recettes non fiscales, soit une hausse de 0,3 milliard d’euros par rapport à loi de finances initiale.

RECETTES DE L’ÉTAT POUR 2015

(en milliards d’euros)

Recettes

LFI 2015

PLFR 2015

Recettes fiscales

279,1

278,7

Recettes non fiscales

14,2

14,5

Total

293,3

292,2

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

En 2015, les recettes fiscales nettes s’établiraient à 278,7 milliards d’euros, en hausse de 4,4 milliards d’euros par rapport l’exécution constatée en 2014. Cette hausse s’expliquerait par deux mouvements contraires :

– un ensemble de mesures nouvelles et de transferts qui aboutirait à une baisse de 0,6 milliard d’euros, selon la dernière actualisation fournie par le Gouvernement dans le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2016 ;

– une évolution spontanée (25) des recettes que l’on peut dès lors estimer, par déduction, à 5 milliards d’euros, soit 1,8 %.

L’élasticité des recettes fiscales au PIB serait, dans ce contexte, très probablement supérieure à l’unité.

La croissance du PIB en valeur devrait, en effet, se limiter à 1,1 % selon les dernières prévisions économiques du Gouvernement (1 % de croissance en volume, et 0,1 % d’inflation). Sur la base de ce dernier chiffre, l’élasticité des recettes fiscales au PIB ressortirait à 1,6 soit le double de ce qui avait été envisagé initialement par le Gouvernement. Ce dernier tablait, en effet, dans son scénario initial, sur une croissance en valeur du PIB de près de 2 % (1 % de croissance en volume et 0,9 % d’inflation).

Pour rappel, le projet de loi de finances pour 2016 prévoit une élasticité des recettes fiscales au PIB de 1,3.

LES RECETTES FISCALES DE L’ÉTAT DEPUIS 2008

(en milliard d’euros)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Exécution

Exécution

Exécution

Exécution

Exécution

Exécution

Exécution

Prévision PLFR 2015

Prévision

PLF 2016

Montant

260,0

214,2

253,6

255,0

268,4

284,0

274,3

278,7

286,0

Source : commission des finances.

Dans le détail, les prévisions actualisées de recettes fiscales pour 2015 sont globalement en ligne avec les prévisions de la loi de finance initiale.

RECETTES FISCALES NETTES

(en milliards d’euros)

Recettes

2014

Exécution

2015

Prévision LFI 2015

2015

Prévision PLFR 2015

2016

Prévision

PLF 2016

Impôt sur le revenu

69,2

68,9

69,5

72,3

Impôt sur les sociétés

35,3

33,7

33,5

32,9

Taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques

13,2

14,0

13,9

15,6

Taxe sur la valeur ajoutée

138,4

142,6

141,5

144,7

Autres recettes fiscales

18,2

19,8

20,3

20,5

Total

274,3

279,1

278,7

286

Source : annexes aux projets de loi de finances pour 2016 et de loi de finances rectificative pour 2015.

ÉCART DE RECETTES FISCALES NETTES PRÉVUES PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2015 PAR RAPPORT À L’EXÉCUTION 2014 ET AUX PRÉVISIONS
DE LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2015

(en milliards d’euros)

Recettes

Écart prévision PLFR 2015 / LFI 2015

Écart prévision PLFR 2015 / exécution 2014

Impôt sur le revenu

+ 0,6

+ 0,3

Impôt sur les sociétés

– 0,2

– 1,8

Taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques

– 0,1

+ 0,7

Taxe sur la valeur ajoutée

– 1,1

+ 3,1

Autres recettes fiscales

+ 0,5

+ 2,1

Total

– 0,4

+ 4,4

Source : annexes aux projets de loi de finances pour 2016 et de loi de finances rectificative pour 2015

Nature de l’impôt

Recettes prévues

Droits de donation

116

Droits de succession

125

Impôt sur la fortune

550

Impôt sur le revenu

878

Prélèvements sociaux

182

TOTAL

1 850

Source : réponses au questionnaire de la Rapporteure générale adressé au Gouvernement.

Les recettes prévues au titre du STDR ont été actualisées à 2,65 milliards d’euros, soit une hausse de 0,8 milliard d’euros. La hausse est limitée à 0,7 milliard d’euros si l’on fait abstraction des prélèvements sociaux, lesquels ne sont pas affectés à l’État.

RECETTES DU STDR PRÉVUES PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2015

(en millions d’euros)

Nature de l’impôt

Recettes prévues

Droits de donation

205

Droits de succession

297

Impôt sur la fortune

911

Impôt sur le revenu

633

Prélèvements sociaux

290

Amendes

314

TOTAL

2 650

Source : réponses au questionnaire de la Rapporteure générale adressé au Gouvernement.

RECETTES NETTES D’IMPÔT SUR LE REVENU DEPUIS 2010

(en milliards d’euros)

Année

2010

Exécution

2011

Exécution

2012

Exécution

2013

Exécution

2014

Exécution

2015

Prévision

PLFR 2015

2016

Prévision

PLF 2016

Montant

47,4

51,5

59,5

67,0

69,2

69,5

72,3

Source : commission des finances.

Par rapport à la loi de finances initiale, la prévision est revue à la hausse de 0,6 milliard d’euros en raison, selon le Gouvernement, du dynamisme des dividendes et des plus-values mobilières en 2014.

La hausse des recettes en 2015 par rapport à 2014 s’expliquerait par une évolution spontanée assez élevée (1,5 milliard d’euros, soit 2,2 %) qui compenserait l’impact des mesures nouvelles ayant fait baisser le rendement de l’impôt sur le revenu de 1,2 milliard d’euros.

Parmi ces mesures nouvelles, deux mesures de baisse de l’impôt sur le revenu ont permis de soutenir le pouvoir d’achat des ménages aux revenus modestes et moyens à hauteur de 4,5 milliards d’euros en 2015.

En premier lieu, l’article 1er de la première loi de finances rectificative pour 2014 (26) a institué une réduction d’impôt exceptionnelle d’un montant maximal de 350 euros pour un contribuable célibataire et de 700 euros pour un couple. Cette mesure a permis de rendre non imposables à l’impôt sur le revenu 2 millions de contribuables. Son coût budgétaire a été évalué à 1,5 milliard d’euros. La réduction d’impôt a été soumise à des conditions de revenus afin qu’elle bénéficie exclusivement aux ménages à revenus modestes et moyens.

En second lieu, l’article 2 de la loi de finances pour 2015 (27) a supprimé la première tranche d’impôt sur le revenu à 5,5 %. Cette mesure, dont le coût budgétaire a été évalué à 3 milliards d’euros, a bénéficié à plus de 9 millions de ménages. Pour que cette mesure soit réservée aux seuls ménages aux revenus modestes et moyens imposés dans la première tranche de l’impôt sur le revenu, la limite inférieure de la tranche suivante, au taux de 14 %, a été abaissée de façon à ce que la hausse d’impôt qui en résulte pour les contribuables concernés soit exactement compensée par la baisse liée à la suppression de la première tranche.

Ces deux mesures ont permis de réduire la proportion de foyers imposés de 52,3 % à 47,9 %.

ÉVOLUTION DE LA PROPORTION DES FOYERS FISCAUX IMPOSÉS
PARMI L’ENSEMBLE DES FOYERS FISCAUX

(en millions)

Année d’imposition

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Nombre de foyers fiscaux

35,08

35,46

36,04

36,39

36,6

36,96

36,39

36,72

37,12

Nombre de foyers imposés

16,92

16,31

16,92

15,78

16,82

17,21

18,15

19,20

17,77

Nombre de foyers non imposés

18,16

19,15

19,11

20,61

19,78

19,75

18,24

17,52

19,34

Proportion de foyers imposés

48,2 %

46 %

46,9 %

43,4 %

46,0 %

46,6 %

49,9 %

52,3 %

47,9 %

Source : ministère des finances et des comptes publics, direction de la législation fiscale.

Le rendement net de l’impôt sur les sociétés (IS) devrait s’établir à 33,5 milliards d’euros, en baisse de 1,8 milliard d’euros par rapport à 2014. Par rapport à la loi de finances initiale, la prévision est revue à la baisse de 0,2 milliard d’euros.

RECETTES NETTES D’IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS DEPUIS 2010

(en milliards d’euros)

Année

2010

Exécution

2011

Exécution

2012

Exécution

2013

Exécution

2014

Exécution

2015

Prévision

PLFR 2015

2016

Prévision

PLF 2016

Montant

32,9

39,1

41,3

47,2

35,3

33,5

32,9

Source : commission des finances.

La baisse de l’impôt sur les sociétés s’expliquerait essentiellement par la montée en charge progressive du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Le coût budgétaire du CICE (qui correspond au montant décaissé chaque année par l’État, sous forme de restitutions ou sous forme d’imputations) a été de 6,4 milliards d’euros en 2014. Pour 2015, il est désormais évalué à 12,5 milliards d’euros selon le Gouvernement au lieu de 10 milliards d’euros dans le tome II de l’annexe des Voies et moyens du projet de loi de finances pour 2015.

Autrement dit, la montée en charge du CICE a pesé à la baisse sur les recettes fiscales d’IS de l’année 2015 par rapport à l’année 2014 pour 6,1 milliards d’euros (12,5 – 6,4) au lieu de 3,6 milliards d’euros prévus initialement (10 – 6,4).

COÛT BUDGÉTAIRE DU CICE

(en milliards d’euros)

Coût/année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Coût évalué en octobre 2014

6,5

10

11,2

15,6

18,9

20,1

Coût évalué en septembre 2015

6,4

12,5

13,0

16,5

18,6

19,6

Source : ministère des finances.

Au total, selon le Gouvernement, les mesures nouvelles et de transferts représenteraient une baisse de l’IS de 3 milliards d’euros.

Par conséquent, l’évolution spontanée de l’IS ressortirait à 1,2 milliard d’euros, soit un niveau nettement supérieur à ce qui était prévu. Le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2015 prévoyait, en effet, une évolution spontanée de l’IS quasi-nulle (0,1 milliard). Ceci pourrait s’expliquer par le fait que les recettes d’IS 2015 comprennent également 1,4 milliard d’euros liés à un contentieux exceptionnel (28).

Cette évolution spontanée assez forte de l’IS compenserait en partie l’impact des mesures nouvelles, ce qui démontre que la baisse de rendement de cet impôt est le choix d’une politique assumée et non d’un effondrement de son assiette.

Le rendement net de la part affectée à l’État de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) devrait s’établir à 13,9 milliards d’euros en 2015, en hausse de 0,7 milliard d’euros par rapport à 2014. Par rapport à la loi de finances initiale, la prévision est revue à la baisse de 0,1 milliard d’euros.

La hausse attendue du rendement de la TICPE résulterait principalement de l’intégration au tarif de cet impôt d’une composante carbone dite « contribution climat-énergie » (14,5 euros la tonne en 2015 au lieu de 7 euros en 2014). En revanche, le relèvement de 2 centimes du tarif sur le gazole a été neutre en 2015, la recette correspondante ayant été affectée à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).

RECETTES NETTES DE TVA DEPUIS 2010

(en milliards d’euros)

Année

2010

Exécution

2011

Exécution

2012

Exécution

2013

Exécution

2014

Exécution

2015

Prévision

PLFR 2015

2016

Prévision

PLF 2016

Montant

127,3

131,9

133,4

136,3

138,4

141,5

144,7

Source : commission des finances.

Le rendement net de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) serait de 141,5 milliards d’euros en 2015, soit une hausse de 3,1 milliards d’euros par rapport à 2014.

La hausse est toutefois plus faible que prévu en loi de finances initiale. La prévision de recette de TVA a, ainsi, été abaissée de 1,1 milliard d’euros dans le cadre du présent projet de loi de finances rectificative, en raison du ralentissement de l’inflation (0,1 % d’inflation au lieu de 0,9 % prévu par le projet de loi de finances pour 2015).

Les mesures nouvelles et de transferts ayant été évaluées par le Gouvernement à 2,9 milliards d’euros, on peut en déduire que l’évolution spontanée de la TVA serait ainsi assez faible (0,2 milliard d’euros, soit 0,1 %).

Selon des informations recueillies par la Rapporteure générale, le produit net d’un point de TVA au taux de droit commun s’élève désormais à 6,5 milliards d’euros.

PRODUIT NET D’UN POINT DE TVA

(en milliards d’euros)

Année

2015

2016

Produit net d’un point de TVA au taux de 5,5 %

1 ¾

2

Produit net d’un point de TVA au taux de 7 % puis 10 %

1 ¼

1 ¼

Produit net d’un point de TVA au taux de 19,6 % puis 20 %

6 ½

6 ½

Source : réponses au questionnaire de la Rapporteure générale adressé au Gouvernement.

RECETTES NETTES D’ISF DEPUIS 2010

(en milliards d’euros)

Année

2010

Exécution

2011

Exécution

2012

Exécution

2013

Exécution

2014

Exécution

2015

Prévision

PLFR 2015

2016

Prévision

PLF 2016

Montant

4,5

4,3

5,0

4,4

5,2

5,4

5,6

Source : commission des finances.

Principaux facteurs de hausse

Principaux facteurs de baisse

+ 1,3 au titre des amendes de l’autorité de la concurrence

+ 0,3 au titre d’un prélèvement sur le fonds de roulement du FNGRA (cf. article 2)

– 0,5 au titre du reversement de la COFACE

– 0,5 au titre des dividendes des sociétés non financières

– 0,4 au titre des intérêts des prêts aux États étrangers

COFACE : Compagnie française pour le commerce extérieur.

FNGRA : Fonds national de gestion des risques en agriculture.

Source : annexes aux projets de loi de finances rectificative pour 2015 et de loi de finances pour 2016.

FICHE N° 4 :
LES DÉPENSES DE L’ÉTAT

Le présent projet de loi de finances rectificative (PLFR) tire les conséquences de l’évolution du contexte macroéconomique et des annonces faites par le Gouvernement au cours de l’année sur les prévisions de dépenses adoptées en loi de finances initiale (LFI) pour 2015 de manière à assurer le respect de la prévision de solde budgétaire fixée par l’article d’équilibre.

Les mesures proposées à ce titre permettent de constater que :

– les ouvertures et annulations de crédits prévues par le PLFR ont pour effet de majorer de 1,8 milliard d’euros les prévisions de dépenses nettes retenues en LFI 2015. Cette majoration s’explique principalement par une mesure de périmètre entre le budget général et le compte d’affectation spéciale Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État (CAS hertzien) (31) ;

– l’effet de cette majoration sur le solde budgétaire dépend de l’évolution des recettes du budget général (+ 900 millions d’euros par rapport aux prévisions de la LFI) et du solde des budgets annexes et des comptes spéciaux (+ 1,3 milliard d’euros), qui en 2015 fait plus que compenser l’augmentation des dépenses (le solde budgétaire s’améliorant de 400 millions d’euros par rapport aux prévisions de la LFI 2015).

OUVERTURES ET ANNULATIONS DE CRÉDITS EN LFR DE 2007 À 2015

(en millions d’euros)

Mouvement

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Ouvertures

1 421

1 084

5 272

3 373,3

849

3 581

791

1 711,5

4 505

Annulations

− 1 422

− 1 013

− 6 510

− 3 666

− 1 478

− 2 083

− 4 738

− 2 732,7

− 2 667

Écart plafonds PLFR/LFI

− 1

71

− 1238

− 292,7

− 629

1498

− 3 947

− 1 021,2

1 838

Source : lois de finances rectificatives (LFR) de fin d’année pour les années 2007 à 2014 et projet de loi de finances rectificative pour 2015.

AMPLITUDE DES ANNULATIONS ET OUVERTURES DE CRÉDITS EN PLFR DE 2007 À 2015

Source : lois de finances rectificatives de fin d’année pour les années 2007 à 2014 et projet de loi de finances rectificative pour 2015.

L’augmentation des dépenses de 1,8 milliard d’euros prévue par le PLFR n’intègre pas l’annulation de 700 millions d’euros sur les crédits du budget général résultant de l’application du décret du 9 juin 2015 (32), dont l’objet était de compenser les effets de la faible inflation sur certaines économies en tendance prévues par le programme d’économies de 50 milliards d’euros pour les années 2015 à 2017.

Cette annulation supplémentaire permet d’améliorer le solde budgétaire de 1,1 milliard d’euros sur l’exercice 2015, tout en augmentant les crédits budgétaires des missions du budget général considérées comme prioritaires d’un montant équivalent (soit la somme des mouvements prévus par le présent projet de loi de finances rectificative de + 1,8 milliard d’euros et par le décret précité de
– 700 millions d’euros).

Le montant du prélèvement sur recettes (PSR) en faveur de l’Union européenne est, quant à lui, révisé à la baisse de 1 milliard d’euros.

Au total, l’ensemble des dépenses de l’État (soit les dépenses du budget général et les PSR en faveur de l’Union européenne et des collectivités territoriales) n’augmentent donc que de 100 millions d’euros entre la LFI 2015 et le PLFR 2015. Les dépenses de l’État sont tenues et respectent la trajectoire adoptée par le Parlement.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT EN 2015

(en milliards d’euros)

Dépenses

LFI 2015

Décret d’annulation du 9 juin 2015

Transfert du CAS hertzien vers le BG

Autres mouvements PLFR

PLFR 2015

Écart

Dépenses du BG

296,1

– 0,7

+ 2,1

– 0,3

297,3

+ 1,1

PSR

71,5

– 1

70,5

– 1

Dépenses totales

367,6

– 0,7

+ 2,1

– 1,3

367,7

+ 0,1

BG : budget général.

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Dépenses

Exécution 2014

LFI
2015

DA du 9 juin 2015

Transfert du CAS hertzien vers le BG

Autres mouvements PLFR

PLFR 2015

Écart LFI 2015/PLFR 2015

Écart exécution 2014/

PLFR 2015

Dépenses du budget général

299,2

296,1

– 0,7

+ 2,1

– 0,3

297,3

+ 1,1

– 1,9

PSR

74,8

71,5

– 1

70,4

– 1

– 4,3

Dépenses totales hors PIA et mesures de périmètre

374

367,6

– 0,7

+ 2,1

– 1,3

367,7

+ 0,1

– 6,3

DA : décret d’annulation.

PIA : programme d’investissements d’avenir.

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Cette baisse est inédite à deux points de vue :

– elle rompt avec l’évolution à hausse des dépenses de l’État constatée au cours des dernières années et particulièrement sous la précédente législature ;

– son montant est exceptionnel quelle que soit l’année de référence retenue : – 6,3 milliards d’euros par rapport à l’exécution 2014 marquée par le lancement du deuxième programme d’investissements d’avenir (PIA 2),
– 5,4 milliards d’euros par rapport à l’exécution 2013 et – 3 milliards par rapport à 2012).

ÉVOLUTION DES DÉPENSES TOTALES DE L’ÉTAT (BUDGET GÉNÉRAL ET PSR)

(en milliards d’euros)

Note de lecture : la baisse constatée sur les dépenses de 2011 par rapport à 2010, très atypique, est liée aux dépenses exceptionnelles consenties dans le contexte de crise des dettes souveraines.

Source : projets de loi de règlement de 2007 à 2014 et projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Ces résultats traduisent l’effort d’ajustement budgétaire engagé par le Gouvernement en cours d’année pour mieux maîtriser l’évolution des dépenses de l’État et respecter les plafonds de dépenses adoptés par le Parlement.

À ce titre, le graphique suivant permet de constater que, si les dépenses en exécution ont systématiquement été supérieures aux prévisions des lois de finances initiales au cours de la précédente législature, cette tendance s’est inversée sous la présente législature.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES BRUTES DU BUDGET GÉNÉRAL
ENTRE LOI DE FINANCES INITIALE ET EXÉCUTION DE 2007 À 2015

(en milliards d’euros)

Source : LFI, lois de règlement des années 2007 à 2014 et PLFR pour 2015.

2. Les facteurs de réduction des dépenses de l’État

La réduction des dépenses de l’État constatée entre l’exécution 2014 (374 milliards d’euros) et l’exécution prévisionnelle pour 2015 (367,7 milliards d’euros) repose sur :

– l’inscription dans les crédits du budget général de 2014 de 12 milliards d’euros au titre du PIA 2 reversés aux opérateurs gestionnaires de ces investissements cette même année. Par conséquent, le montant du PIA ne se retrouve pas dans les crédits de 2015 ;

– les modifications de périmètre relatives aux dépenses du budget général de l’État d’un montant de 7,9 milliards d’euros entre l’exécution 2014 et la LFI 2015, en liaison notamment avec des compensations à la sécurité sociale de mesures de baisses de cotisations sociales, la « rebudgétisation » de certaines dépenses ou des transferts entre secteurs d’administration publique (33). Ce montant est majoré par le transfert de 2,1 milliards d’euros de dépenses du CAS hertzien à la mission Défense, décidé dans le cadre de la loi du 28 juillet 2005 actualisant la loi de programmation militaire (34). Au total, les mesures de périmètre représentent ainsi 10 milliards d’euros entre l’exécution 2014 et les prévisions d’exécution pour 2015 ;

– 2,3 milliards d’économies adoptées en LFI 2015 auxquelles s’ajoutent 700 millions d’euros annulés par le décret d’annulation du 9 juin 2015 et 300 millions d’euros annulés par le PLFR pour 2015 (hors mesure de périmètre sur la mission Défense et y compris diminution de la charge de la dette de 2 milliards d’euros liée à des conditions de financement plus favorables qu’initialement envisagé) ;

– la baisse d’un milliard d’euros du prélèvement sur recettes de l’État au profit de l’Union européenne (au titre d’une correction imputée en 2014 en comptabilité nationale).

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT
ENTRE L’EXÉCUTION 2014 ET LA LOI DE FINANCES POUR 2015

(en milliards d’euros)

Dépenses en exécution 2014

374

écart

PIA 2

– 12

 

Mesures de périmètre

+ 7,9

Nouvelles économies prévues en LFI 2015

– 2,3

Dépenses inscrites en loi de finances 2015

367,6

– 6,3

Décret d’annulation du 9 juin 2015

– 0,7

 

Baisses des dépenses des ministères

– 0,3

Mesures de périmètre (du CAS hertzien à la mission Défense)

+ 2,1

Baisse des PSR

– 1

Dépenses inscrites en PLFR 2015

367,7

+ 0,1

Source : loi de règlement pour 2014, loi de finances pour 2015 et projet de loi de finances rectificative pour 2016.

3. Une évolution maîtrisée des dépenses de l’État compatible avec la mise en œuvre des priorités de la majorité

a. Les annonces de nouvelles dépenses entre la LFI 2015 et le PLFR 2015 d’un montant de 1,5 milliard d’euros

Le Gouvernement a procédé à de nombreuses annonces depuis le début de l’année 2015 en faveur de l’emploi, de l’agriculture, de l’investissement, du pouvoir d’achat des ménages, de la sécurité du territoire national, etc.

L’impact prévisionnel de ces annonces sur le montant des dépenses de l’État en 2015 est rappelé dans le tableau suivant (35).

RÉCAPITULATIF DES PRINCIPALES MESURES ANNONCÉES DEPUIS JANVIER 2015

Mesures annoncées

Date de l’annonce

Coût estimé pour 2015

Coût estimé pour 2016

Plan numérique et plan de mobilisation pour les valeurs de la République à l’école

6 novembre 2014

90 millions d’euros

199 millions d’euros (163 millions d’euros pour le plan numérique 36 millions d’euros pour le plan de mobilisation pour les valeurs de la République à l’école)

Plan de lutte contre le terrorisme

21 janvier 2015

400 millions d’euros

Le Gouvernement a annoncé un plan global de lutte contre le terrorisme dont la réalisation est échelonnée sur 3 ans.

Sur la période 2015-2017 : 2 680 emplois supplémentaires et 425 millions d’euros de crédits

Renforcement du service civique

5 février 2015

60 millions d’euros

300 millions d’euros

Mesures en faveur de l’emploi

5 mars 2015

50 millions d’euros

250 millions d’euros

Déclinaison du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale :

– augmentation des prestations sociales pour les familles nombreuses et les parents isolés

23 mars 2015

157 millions d’euros

160 millions d’euros

Plan en faveur de l’investissement et de l’activité

8 avril 2015

400 millions d’euros

(sur 2,5 milliards d’euros pour la période 2015− 2017)

500 millions d’euros

Révision de la loi de programmation militaire

29 avril

0 euro

600 millions d’euros

100 000 nouveaux contrats aidés (dont 30 000 emplois d’avenir et 70 000 contrats d’accompagnement vers l’emploi (CUI-CAE)

1er juin 2015

350 millions d’euros

500 millions d’euros

Création d’un fonds pour l’investissement local

27 août

 

1 milliard d’euros

Revalorisation de la rémunération des enseignants du primaire

1er septembre

 

61,7 millions d’euros

Plan d’aide en faveur de l’agriculture

22 juillet et 3 septembre

 

160 millions d’euros pour l’État (100 millions d’euros pour la prise en charge des intérêts d’emprunt par le fonds d’allégement des charges, 20 millions pour le dispositif « année blanche devant être mis en place dans le cadre de la restructuration des emprunts des agriculteurs, augmentation de 10 millions d’euros des aides à la promotion et de 30 millions d’euros des aides à la modernisation) et 50 millions d’euros pour les administrations de sécurité sociale.

Baisse d’impôt pour les ménages aux revenus modestes

7 septembre

 

2 milliards d’euros

Total

 

1 507 millions d’euros

6 085 millions d’euros

Source : Gouvernement.

D’autres dépenses supplémentaires ont été également annoncées dans le cadre des décrets d’avance examinés en cours d’exercice ou devant l’être prochainement (36). Elles représentent un montant global de 2,1 milliards d’euros. Toutefois, ces dépenses constatées sur certaines missions sont compensées intégralement par des annulations d’un même montant sur d’autres missions du budget général et n’ont pas d’effet sur l’évolution du montant des dépenses de l’État. Elles sont présentées en détail dans la fiche relative aux missions du budget général du présent rapport.

b. Des mesures prioritaires principalement financées par des économies de constatation sur la charge de la dette

L’évolution des dépenses des missions du budget général permet d’apprécier les économies réalisées pour financer ces nouvelles annonces.

Comme précédemment mentionné, le PLFR 2015 prévoit une augmentation de 1,8 milliard d’euros des dépenses sur les missions du budget général, incluant le coût des nouvelles mesures annoncées et correspondant à la somme des mouvements suivants.

DÉTAIL DE L’ÉVOLUTION DU PLAFOND DES MISSIONS DU PLFR

 

(en euros)

Total des augmentations de plafonds

4 356 256 959

dont augmentation destinée à la défense

2 180 869 959

dont augmentation destinée aux apurements européens au titre de la politique agricole commune (PAC)

812 000 000

dont autres augmentations de plafonds

1 363 387 000*

Total des diminutions de plafonds

– 2 519 660 095

dont diminution au titre de la charge de la dette

– 2 111 359 250

dont autres diminutions de plafonds

– 408 300 845

Évolution globale des dépenses du budget général

+ 1 836 596 864

* Ce montant permet de couvrir à la fois les dépenses supplémentaires annoncées en cours d’année qui n’auraient pas déjà été couvertes par des ouvertures en décret d’avance et le surcoût de certaines mesures constaté en gestion.

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Si l’on exclut de ce total la mesure de périmètre que constitue l’inscription de 2,1 milliards d’euros sur la mission Défense (un même montant étant annulé sur le CAS hertzien), les dépenses du budget général diminuent de 344 millions d’euros entre la LFI 2015 et le PLFR 2015 sans compromettre la mise en œuvre des mesures annoncées en cours d’exercice.

Comme l’illustre le tableau suivant, à périmètre constant, les dépenses de l’État diminuent de 2 milliards d’euros en PLFR 2015 par rapport à la LFI 2015. Hors PIA et autres mesures de périmètre, les dépenses de l’État diminuent de 4,3 milliards d’euros entre l’exécution 2014 et les prévisions d’exécution pour 2015.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT À PÉRIMÈTRE CONSTANT

(en milliards d’euros)

Dépenses

Exécution 2014

LFI 2015

Décret d’annulation du 9 juin 2015

Autres mouvements PLFR

PLFR 2015

Écart LFI 2015/PLFR 2015

Écart exécution 2014/PLFR 2015

Dépenses du BG

299,2

296,1

– 0,7

– 0,3

295,1

– 1

– 4,1

PSR

74,8

71,5

– 1

70,5

– 1

– 4,3

Dépenses totales

374

367,6

– 0,7

– 1,3

365,6

– 2

– 8,4

Dépenses totales hors PIA et mesures de périmètre

369,9

376,6

– 0,7

– 1,3

365,6

– 2

– 4,3

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Les deux normes de dépenses portant sur les dépenses de l’État sont :

– la norme « zéro volume », appliquée à compter de 2004 aux dépenses nettes du budget général (c’est-à-dire hors mission Remboursements et dégrèvements) de manière à ce qu’elles n’augmentent pas plus rapidement que l’inflation prévisionnelle entre deux lois de finances initiales successives (ce plafond peut donc être revu à la hausse ou à la baisse en cas de révision de l’hypothèse d’inflation) ;

– la norme « zéro valeur », appliquée à compter de 2009 aux dépenses du budget général considérées comme pilotables, soit les dépenses nettes, hors programme Charge de la dette et trésorerie de l’État et compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions. Le plafond fixé par cette norme correspond, à champ constant, au niveau des crédits fixé par la loi de finances initiale prise comme référence pour établir la trajectoire pluriannuelle des finances publiques.

À titre d’exemple, les plafonds de la norme « zéro valeur » retenus par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (LPFP 2014-2019) (37) correspondent, à champ constant, au niveau des crédits fixé en loi de finances pour 2014 (38).

Le plafond de la norme de dépense « zéro valeur » fixé à 282,5 milliards d’euros en LFI 2015 correspondait à la trajectoire de réduction des dépenses prévue par la LPFP 2014-2019. En baisse de 4,5 milliards d’euros par rapport à la norme fixée en LFI 2014, elle devait traduire les efforts réalisés par l’État dans le cadre du programme d’économies de 50 milliards d’euros fixé pour les années 2015 à 2017 (39).

Plusieurs mesures adoptées en cours d’année ont conduit à réviser le plafond de cette norme.

En premier lieu, la norme de dépense a été réduite de 700 millions d’euros pour assurer que l’annulation de crédits prévue par le décret du 9 juin 2015 précité se traduise bien par une économie de même montant sur le montant global des dépenses du budget général.

En second lieu, le transfert de 2,1 milliards d’euros du CAS hertzien à la mission Défense est traité comme une mesure de périmètre et vient majorer d’un montant équivalent la norme applicable. Si cette majoration semble légitime, elle renvoie aux critiques récurrentes de la Cour des comptes sur l’imprécision du champ des normes et sur la nécessité de rebudgéter l’ensemble des dépenses relevant des missions du budget général, sauf à affaiblir la solidité de l’effort affiché en dépenses, pourtant bien réel.

Au total, ces mouvements ont pour effet de porter le plafond de la norme à 284 milliards d’euros (soit 282,5 milliards d’euros, minorés de 700 millions d’euros et majorés de 2,1 milliards d’euros).

Le tableau ci-dessous illustre le respect de la prévision d’exécution pour 2015 de la norme « zéro valeur » et de la « norme zéro volume ».

LA NORME DE DÉPENSES DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

En milliards d’euros

LFI 2015

Décret d’annulation du 9 juin 2015

Effet du transfert au

budget général des

dépenses du CAS

hertzien

Norme de dépense

Prévision

d’exécution

fin 2015

Écart à la norme

Dépenses du budget général, hors dette et pensions

206,0

– 0,7

2,1

207,4

208,7*

1,3*

Prélèvement sur recettes

71,5

0,0

0,0

71,5

70,4

− 1,0

PSR • Collectivités territoriales

50,7

0,0

0,0

50,7

50,7

0,0

PSR− UE

20,7

0,0

0,0

20,7

19,7

– 1,0

Plafond des ressources affectées aux opérateurs et organismes divers de chargés de missions de service public

5,1

0,0

0,0

5,1

4,9

– 0,3

Total des dépenses de l’État, hors charge de la dette et pensions

282,5

– 0,7

2,1

284,0

284,0

0,0

Charge de la dette

44,3

0,0

0,0

44,3

42,3

– 2,0

Contributions au CAS "Pensions"

45,7

0,0

0,1

45,8

45,8

0,0

Total des dépenses de l’État, y compris charge de la dette et

pensions"

372,6

– 0,7

2,1

374,2

372,1

– 2,0

* Selon le Gouvernement, pour atteindre cette prévision d’exécution, l’État devra annuler un montant d’un ordre de grandeur de 400 à 500 millions d’euros sur les dépenses du budget général, hors dette et pensions, soit 209,2 milliards d’euros, prévues à l’état B annexé au présent projet de loi de finances rectificative pour 2015 et à l’article d’équilibre (article 4). En effet, les prévisions du PLFR intègrent une marge en vue de couvrir les derniers aléas pouvant intervenir en fin de gestion. En cas de non consommation, cette marge est annulée en la loi de règlement.

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Ces bons résultats illustrent d’autant plus les efforts consentis par le Gouvernement qu’une part importante des dépenses de l’État reste rigide. Sur les 372,1 milliards d’euros de dépenses de l’État comprises dans le champ des normes en valeur et en volume, seules celles du budget général qui ne sont pas liées aux charges de personnel, peuvent être considérées, sous quelques réserves, comme véritablement pilotables. Ces dernières représentent 122 milliards d’euros en 2015 (203 milliards d’euros minorés de 81,2 milliards d’euros de masse salariale), soit un tiers des dépenses sous norme, sur lesquelles se concentrent les efforts budgétaires.

DÉCOMPOSITION DES NORMES DE DÉPENSES DE LA LFI 2015 AU PLFR 2015

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

La qualité de la gestion de la dépense en cours d’année qui garantit le respect des objectifs fixés par le législateur repose principalement sur la constitution d’une réserve de précaution en début d’exercice.

Pour rappel, la réserve de précaution est un dispositif régi par le 4° de l’article 51 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) qui poursuit deux objectifs :

– d’une part, faire face aux aléas de gestion à travers l’annulation de crédits « gelés » ;

– d’autre part, modérer le rythme de progression de la consommation des crédits en cours d’année, en n’autorisant que progressivement la dépense des fonds « gelés ».

Les taux de mise en réserve, de 0,5 % pour les crédits liés aux dépenses de personnel et de 8 % pour les autres crédits, au lieu de 7 % en 2014, ont permis de constituer une réserve théorique de 8 milliards d’euros en crédits de paiement (CP) pour 2015 au lieu de 7,5 milliards d’euros en CP en 2014.

ÉVOLUTION DU TAUX DE MISE EN RÉSERVE

(en %, sauf mention contraire)

Taux

PLF 2012

PLF 2013

PLF 2014

PLF 2015

Taux de mise en réserve des crédits hors titre 2

5

6

7

8

Taux de mise en réserve des crédits du titre 2

0,5

0,5

0,5

0,5

Montant de la réserve en début d’exercice (en milliards d’euros)

5,8

6,5

7,5

8

Selon les informations transmises à la Rapporteure générale, cette réserve a été complétée en cours d’année par des mesures de « surgel » d’un montant total de 600 millions d’euros en CP. Les différents mouvements ayant affecté la réserve de précaution ne seront toutefois connus qu’en fin d’exercice et seront analysés en loi de règlement, notamment par les rapporteurs spéciaux, pour distinguer les rythmes de consommation des crédits des différentes missions du budget général en cours d’exercice.

Pour rappel, la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (40) prévoit que le taux de mise en réserve des crédits s’applique, à compter de 2015, non plus au niveau des programmes, mais au niveau du budget général. Cette mesure ouvre la possibilité de constituer une réserve de précaution crédible au regard des capacités d’économies des différents programmes. De nouveau, l’examen de la consommation des crédits en loi de règlement devrait permettre de porter un jugement sur les effets de ce changement de règle.

Le tableau suivant permet d’apprécier les premiers mouvements budgétaires constatés sur la réserve de précaution. La consommation des crédits gelés devrait sur les derniers mois de l’année toutefois conduire à l’annulation d’une partie des crédits encore disponibles à la date de la rédaction du présent rapport.

ÉVOLUTION DE LA RÉSERVE DE PRÉCAUTION, hors T2 (nov 2015)

(en millions d’euros)

Missions

Mise en réserve initiale

Dégels / surgels

Décret d’annulation (09/06/2015)

Décret d’avance 09/04/2015

Décret d’avance 23/10/2015

Réserve actuelle

Réserve consommée

Action extérieure de l’État

137,1

3,0

– 7,0

0,0

– 15,9

117,2

– 15 %

Administration générale et territoriale de l’État

70,1

78,1

– 10,5

0,0

– 4,1

133,6

91 %

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

136,1

– 30,7

– 11,0

0,0

– 3,4

91,0

– 33 %

Aide publique au développement

207,5

43,0

– 14,0

0,0

0,0

236,5

14 %

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

215,1

– 7,9

0,0

0,0

0,0

207,2

– 4 %

Conseil et contrôle de l’État

7,9

– 7,8

0,0

0,0

0,0

0,1

– 99 %

Culture

118,3

– 46,6

– 2,5

– 10,3

– 5,1

53,8

– 55 %

Défense

1 430,0

– 1 181,9

0,0

0,0

0,0

248,1

– 83 %

Direction de l’action du Gouvernement

69,3

– 26,7

– 4,6

0,0

– 3,5

34,5

– 50 %

Écologie, développement et mobilité durables

365,4

19,8

– 51,2

0,0

– 16,9

317,0

– 13 %

Économie

61,7

10,1

0,0

0,0

0,0

71,9

16 %

Égalité des territoires, logement et ville

975,3

– 52,6

0,0

0,0

– 10,0

912,7

– 6 %

Engagements financiers de l’État

55,6

157,1

0,0

0,0

– 10,0

202,6

265 %

Enseignement scolaire

209,8

– 31,3

0,0

0,0

– 5,0

173,4

– 17 %

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

195,3

25,1

– 10,0

0,0

– 18,2

192,1

– 2 %

Immigration, asile et intégration

49,1

– 13,1

0,0

0,0

0,0

36,1

– 27 %

Justice

240,8

– 54,5

– 26,0

0,0

– 13,5

146,8

– 39 %

Médias, livre et industries culturelles

47,1

6,6

– 4,3

– 5,2

– 1,2

43,0

– 9 %

Outre-mer

153,0

9,0

– 10,0

– 4,0

– 3,6

144,4

– 6 %

Politique des territoires

21,5

4,3

– 4,0

0,0

– 2,5

19,3

– 10 %

Pouvoirs publics

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0 %

Provisions

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0 %

Recherche et enseignement supérieur

671,2

– 54,3

– 65,5

– 2,7

– 38,9

509,9

– 24 %

Régimes sociaux et de retraite

512,6

– 512,6

0,0

0,0

0,0

0,0

– 100 %

Relations avec les collectivités territoriales

216,9

12,0

0,0

0,0

0,0

228,9

6 %

Santé

85,1

0,8

– 5,1

0,0

– 3,1

77,6

– 9 %

Sécurités

197,6

– 85,8

– 19,6

0,0

– 17,5

74,7

– 62 %

Solidarité, insertion et égalité des chances

1 157,2

12,6

– 10,5

0,0

– 2,2

1 157,0

0 %

Sport, jeunesse et vie associative

31,7

– 28,8

0,0

0,0

– 0,4

2,5

– 92 %

Travail et emploi

744,1

– 509,4

– 31,0

0,0

– 0,9

202,9

– 73 %

Total général

8 382,5

– 2 262,6

– 286,8

– 22,2

– 176,0

5 634,8

– 33 %

Les crédits des missions du budget général augmentent de 1,8 milliard d’euros entre la loi de finances (LFI) pour 2015 et le projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2015. Cette hausse est toutefois plus que compensée par une hausse des recettes du budget général (+ 900 millions d’euros) et une amélioration du solde des budgets annexes et des comptes spéciaux (+ 1 300 millions d’euros) qui permettent de constater une diminution du solde budgétaire de 400 millions d’euros venant s’ajouter à celle de 700 millions d’euros découlant du décret d’annulation du 9 juin 2015 (41) (soit un total de – 1,1 milliard d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale).

Certaines missions, identifiées par le Gouvernement comme portant des dépenses prioritaires, connaissent ainsi une augmentation de leurs crédits en cours d’exercice. D’autres, au contraire, voient leurs crédits diminuer.

Le tableau suivant récapitule les mouvements de crédits intervenus depuis l’adoption de la loi de finances initiale pour 2015 (42) et découlant :

– du décret n° 2015-402 du 9 avril 2015 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance de 401,1 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 308,3 millions d’euros en crédits de paiement (CP) principalement au titre de la mise en œuvre du plan de lutte contre le terrorisme annoncé le 14 janvier dernier ;

– du décret n° 2015-639 du 9 juin 2015 portant annulation de crédits à hauteur de 607,9 millions d’euros en AE et de 666,9 millions d’euros en CP pour compenser les effets de la faible inflation sur les objectifs d’économies prévus pour 2015 dans le cadre du programme d’économies de 50 milliards d’euros ;

– du décret n° 2015-1347 du 23 octobre 2015 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance pour 232,5 millions d’euros en AE et 184,5 millions d’euros en CP principalement au titre des surcoûts constatés sur l’hébergement d’urgence ;

– du présent projet de loi de finances rectificative pour 2015, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale 13 novembre 2015 qui ouvre, hors remboursements et dégrèvement et redéploiement de crédits au titre des investissements d’avenir, 5 630,2 millions d’euros en AE et 4 253,5 millions d’euros en CP et annule 2 228,2 millions d’euros en AE et 2 416,9 millions d’euros en CP ;

– du projet de décret d’avance notifié à la commission des finances le 18 novembre 2015 par lettre du secrétaire d’État chargé du budget portant ouverture et annulation de 2 160,5 millions d’euros d’AE et de 1 703,4 millions d’euros de CP.

Au total, les différents mouvements intervenus en cours d’exercice 2015 ont abouti à ouvrir 2,8 milliards d’euros en AE et 1,2 milliard d’euros en CP.

OUVERTURES ET ANNULATIONS DE CRÉDITS EN 2015

(en millions d’euros)

Texte

AE

CP

Ouvertures

DA 9 avril 2015

401,1

308,3

DA 23 octobre 2015

232,5

184,5

Projet DA 18 novembre 2015

2 160,5

1 703,4

PLFR

5 630,2

4 254

Total

8 424,3

6 450

Annulations

DA 9 avril 2015

401,1

308,3

DA 23 octobre 2015

232,5

184,5

D annulation 9 juin 2015

608

667

Projet DA 18 novembre 2015

2 160,5

1 703,4

PLFR

2 228,2

2 416,9

Total

5 630,2

5 280

Solde

2 794,1

1 170

DA : décret d’avance.

D annulation : décret d’annulation.

Source : le Gouvernement.

Comme présenté dans la fiche relative aux dépenses de l’État, en prenant en compte la baisse de 1,1 milliard d’euros du prélèvement sur recette en faveur de l’Union européenne, l’augmentation des dépenses de 1,2 milliard d’euros sur l’exercice découlant des mouvements ci-dessus est ramenée à 100 millions d’euros. Son impact sur le solde budgétaire est donc quasiment nul.

Mission

LFI 2015

Crédits disponibles après décrets d’avance (avril et octobre) et décret d’annulation (juin)

Ouvertures et annulations prévues en PLFR 2015

Ouvertures et annulations prévues par le projet de décret d’avance (novembre)

Crédits disponibles pour l’exercice 2015

Écart crédits disponibles/ LFI 2015

Commentaires sur les principaux mouvements (> 50 millions d’euros)

Action extérieure de l’État

2 957 493 760

2 921 573 785

94 964 197

2 541 730

3 019 079 712

102,1 %

PLFR : + 95 millions d’euros au titre du règlement d’appels à contribution relatifs aux opérations de maintien de la paix

Administration générale et territoriale de l’État

2 898 046 907

2 858 434 875

− 14 918 121

5 247 311

2 848 764 065

98,3 %

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

2 922 638 996

2 884 251 593

1 068 478 241

2 011 754

3 954 741 588

135,3 %

PLFR : + 1,1 milliard d’euros au titre des refus d’apurements de la politique agricole commune (812 millions d’euros), du plan en faveur de l’élevage et autres mesures.

Aide publique au développement

2 798 352 141

2 772 352 141

609 700

− 84 380 688

2 688 581 153

96,1 %

Projet DA 24/11/2015 : – 84 millions d’euros sur la réserve de précaution

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

2 741 179 423

2 791 679 423

− 2 600

− 63 147 888

2 728 528 935

99,5 %

DA 23/10/2015 : + 55 millions d’euros au titre de l’indemnisation des victimes de persécutions antisémites

Projet DA 24/11/2015 : – 63 millions d’euros sur la réserve de précaution

Conseil et contrôle de l’État

636 382 447

635 122 447

0

− 6 886 480

628 235 967

98,7 %

 

Culture

2 596 194 865

2 574 994 865

− 41 000

− 8 770 813

2 566 183 052

98,8 %

 

Défense

36 790 879 504

36 790 879 504

2 180 869 959

637 266 399

39 609 015 862

107,7 %

Projet DA 24/11/2015 : + 843 millions d’euros dont 625 millions d’euros au titre des OPEX autofinancés à hauteur de 104 millions d’euros sur les dépenses du ministère (soit une ouverture nette de 521 millions d’euros), 155 millions d’euros au titre de l’opération « Sentinelle » et 166 millions d’euros au titre des autres dépenses en personnel du ministère ;

– 206 millions d’euros sur le programme Équipement des forces

PLFR : + 2,1 milliards d’euros au titre du transfert des recettes exceptionnelles du CAS hertzien (43)

Direction de l’action du Gouvernement

1 242 998 006

1 228 498 006

− 39 819 825

− 14 469 601

1 174 208 580

94,5 %

 

Écologie, développement et mobilité durables

7 288 779 489

7 162 696 520

− 165 000 000

− 313 093 882

6 684 602 638

91,7 %

D annulation 9 juin 2015 : – 85 millions d’euros, dont 59 millions d’euros sur le programme Infrastructures et services de transports

Projet DA 24/11/2015 : – 313 millions d’euros sur la réserve de précaution

PLFR : – 160 millions de redéploiement de PIA au titre du plan numérique pour l’école (voir mission Enseignement scolaire), du financement de l’industrie (voir mission Économie) et de la rénovation thermique des logements privés (voir mission Égalité des territoires)

Économie

1 785 372 363

1 758 514 763

92 551 282

− 25 679 230

1 825 386 815

102,2 %

PLFR : + 100 millions d’euros de redéploiement de crédits en faveur de l’action Prêts à l’industrialisation

Égalité des territoires, logement et ville

13 407 100 951

13 473 100 951

166 935 126

− 21 664 149

13 618 371 928

101,6 %

DA 23/10/2015 : + 130 millions au titre de l’hébergement d’urgence

Projet DA 24/11/2015 : + 40 millions d’euros au titre de l’hébergement d’urgence

PLFR : + 167 millions d’euros dont 54 millions de remboursement de la part État de l’allocation temporaire d’attente (ALT) à la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) qui ont été utilisés pour financer l’hébergement d’urgence en cours d’exercice, 70 millions d’euros pour les aides personnelles au logement et 43 millions d’euros de redéploiement de programme d’investissements d’avenir (PIA) au profit de l’action Rénovation thermique des logements privés

Engagements financiers de l’État

45 219 666 523

45 167 120 032

− 2 111 359 250

− 168 170 557

42 887 590 225

94,8 %

Projet DA 24/11/2015 : – 168 millions d’euros au titre de la sous-exécution des primes d’épargne-logement

PLFR : – 2,1 milliards d’euros au titre de la charge de la dette

Enseignement scolaire

66 403 620 708

66 320 610 405

82 148 176

62 959 929

66 465 718 510

100,1 %

D annulation 9 juin 2015 : – 64 millions d’euros

Projet DA 24/11/2015 : + 70 millions d’euros de dépenses de personnel

PLFR : + 108 millions de redéploiement des PIA en faveur de l’action Innovation numérique pour l’excellence éducative (plan numérique à l’école)

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

11 213 563 691

11 154 078 912

− 70 982 989

− 39 429 595

11 043 666 328

98,5 %

 

Immigration, asile et intégration

651 993 727

646 307 167

1 979 500

0

648 286 667

99,4 %

 

Justice

7 894 234 243

7 932 024 418

− 7 000 300

− 65 570 896

7 859 453 222

99,6 %

DA 09/04/2015 : + 108 millions d’euros au titre du plan de lutte contre le terrorisme

Projet DA 24/11/2015 : – 72 millions d’euros, dont 40 millions au titre de la révision de la baisse des besoins au titre des projets immobiliers

Médias, livre et industries culturelles

714 851 851

704 172 197

10 000

− 1 086 228

703 095 969

98,4 %

 

Outre− mer

2 062 156 757

2 028 556 757

0

− 59 209 101

1 969 347 656

95,5 %

Projet DA 24/11/2015 : – 61 millions d’euros au titre d’annulation sur la réserve de précaution

Politique des territoires

746 378 093

732 108 093

− 121 000

− 39 972 647

692 014 446

92,7 %

 

Pouvoirs publics

988 015 262

988 015 262

0

0

988 015 262

100,0 %

 

Provisions

14 418 296

14 418 296

0

0

14 418 296

100,0 %

 

Recherche et enseignement supérieur

25 892 775 731

25 674 015 370

− 51 611 553

− 144 642 237

25 477 761 580

98,4 %

DA 09/04/2015 : – 87 millions d’euros dont 63 millions d’euros au titre sur des crédits devenus sans objet (trop versés à Eumestat par exemple)

D annulation 9 juin 2015 : – 93 millions d’euros

Projet DA 24/11/2015 : + 52 millions pour le financement des aides au mérite ;

– 196 millions d’euros au titre dont 100 millions au titre de la réserve de précaution et 51 au titre de redéploiement de crédits des PIA.

Régimes sociaux et de retraite

6 413 954 690

6 413 954 690

43 865 140

0

6 457 819 830

100,7 %

 

Relations avec les collectivités territoriales

2 815 911 934

2 791 911 934

17 047 052

0

2 808 958 986

99,8 %

DA 23/10/2015 : + 50 millions d’euros pour l’indemnisation des collectivités touchées par des calamités publiques

Santé

1 201 495 674

1 186 266 674

87 607 505

− 33 329 973

1 240 544 206

103,2 %

PLFR : + 87 millions d’euros pour l’aide médicale de l’État (AME)

Sécurités

18 222 988 329

18 294 161 276

− 19 837 096

− 9 369 352

18 264 954 828

100,2 %

DA 09/04/2015 : + 110 millions d’euros au titre du plan de lutte contre le terrorisme

Solidarité, insertion et égalité des chances

15 738 891 979

15 706 820 979

519 191 081

− 27 988 804

16 198 023 256

102,9 %

PLFR : + 523 millions d’euros dont 209 millions d’euros pour le fonds national des solidarités actives notamment pour le financement du RSA et 300 millions d’euros au titre du surcoût constaté de l’allocation aux adultes handicapés (AAH)

Sport, jeunesse et vie associative

468 044 662

524 639 691

− 193 500

− 31 363 453

493 082 738

105,3 %

DA 09/04/2015 : + 60 millions d’euros pour le financement de l’Agence du service civique

Travail et emploi

11 367 568 525

11 297 751 850

− 38 772 861

448 198 451

11 707 177 440

103,0 %

Projet DA 24/11/2015 : + 641 millions d’euros pour le financement des contrats aidés (et de l’annonce de la création de 100 000 contrats supplémentaires) ;

– 192 millions d’euros dont 183 millions d’euros au titre des crédits d’exonération liées au régime social des micro-entreprises devenus sans emplois et d’autres exonérations moins dynamiques que prévu

PLFR : + 70 millions d’euros en faveur du Fonds de solidarité (notamment pour l’allocation spécifique de solidarité) ;

– 109 millions d’euros compte tenu de la régularisation de fonds de concours en provenance de l’Unédic

Total

296 095 949 527

295 429 032 876

1 836 596 864

0

297 265 629 740

100,4 %

Deux programmes d’investissements d’avenir (PIA) ont été adoptés successivement entre 2010 et 2014 (44) pour une enveloppe totale de 47 milliards d’euros (soit 35 milliards d’euros au titre du PIA 1 et 12 milliard d’euros au titre du PIA 2).

Ces crédits sont constitués :

– de crédits consommables à hauteur de 28,7 milliards d’euros qui font l’objet de retraits à partir des comptes de correspondants du Trésor sur lesquels ils sont déposés au fur et à mesure de leur versement aux porteurs de projets ou de l’acquisition d’actifs par les opérateurs pour le compte de l’État. Ces crédits prennent la forme de subventions (15 milliards d’euros), de fonds propres (6 milliards d’euros), d’avances remboursables (4,4 milliards d’euros), de prêts (3,1 milliards d’euros) et de dotation en fonds de garantie (0,6 milliard d’euros) ;

– de crédits non consommables à hauteur de 18,3 milliards d’euros : l’opérateur ou le porteur de projet qui en bénéficie et qui les dépose sur un compte ouvert dans les écritures du Trésor n’a pas la possibilité d’opérer de retrait sur ce capital, mais il lui est versé une rémunération au titre de ce dépôt selon une périodicité trimestrielle au taux de 3,413 % pour le PIA 1 et de 2,496 % pour le PIA 2. Ces intérêts bénéficient à l’Agence nationale de la recherche (ANR) qui finance des projets de recherche dans le cadre des crédits dédiés à l’enseignement supérieur et la formation pour un montant estimé à 750 millions d’euros par an (660 millions d’euros au titre du PIA 1 et 80 millions d’euros au titre du PIA 2).

TABLEAU SYNTHÉTIQUE DES FINANCEMENTS DISPONIBLES

(en millions d’euros)

PIA 1 et 2

Enveloppe

Engagement

Contractualisation

Décaissements

Fonds propres

5 522

3 878

2 395

1 376

Dotations en fonds de garantie

574

571

571

594

Prêts

3 150

1 585

1 576

1 566

Avances remboursables

4 326

3 092

2 404

1 166

Subventions

15 088

11 930

10 107

6 260

Dotations non consommables (DNC)

18 295

14 850

13 259

199

Intérêts sur DNC

1 530

Total PIA 1 et PI²A 2

46 955

35 906

30 312

12 691

Source : Commissariat général à l’investissement.

Le Gouvernement a annoncé le lancement d’un troisième PIA en 2016 d’un montant de 10 milliards d’euros pour compléter l’enveloppe actuellement disponible. Dans l’attente de précisions sur les priorités de ce nouveau PIA, la Cour des comptes devrait permettre à la représentation nationale de disposer d’un premier bilan des deux PIA en cours grâce à la publication prochaine d’un rapport public thématique sur ces financements.

Mission de rattachement

Intitulé des actions PIA

Opérateur

Autorisations d’engagement (AE) initiales 2010

AE initiales 2014

Enveloppe fin 2014

AE disponibles début 2015

Décaissements réalisés à la dernière date

Décaissements réalisés à la dernière date par mission de rattachement

Agriculture

Projets agroalimentaires d’avenir

France

AgriMer

0

ouvert par redéploiement

120

120

0

0

Défense

Excellence technologique des industries de défense − nucléaire

CEA

0

1 328

1 696

0

1 646

1 909 = 95 % de l’enveloppe (2 000)

Excellence technologique des industries de défense − recherche duale

CNES

0

ouvert par redéploiement

132

0

132

Excellence technologique des industries de défense − spatial

CNES

0

172

172

0

131

Direction de l’action du gouvernement

Transition numérique de l’État

CDC

0

150

126

126

12

12 = 10 % de l’enveloppe (126)

Écologie, développement et mobilité durables

Démonstrateurs énergies renouvelables

ADEME

1 350

800

1 717

1 061

181

565 = 12 % de l’enveloppe (4 596)

Fonds Écotechnologie

ADEME

ouvert par redéploiement

0

150

0

56

Projets territoriaux intégrés pour la transition énergétique

CDC

0

75

75

75

0

Tri et valorisation des déchets

ADEME

250

0

144

82

25

Véhicules du futur

ADEME

1 000

300

1 120

648

166

Ville de demain

CDC

1 000

0

668

296

89

Ville durable et solidaire

ANRU

0

335

321

321

0

Prêts verts

BPI

0

410

401

401

48

 

Économie

Augmentation de capital d’OSEO

BPI

140

0

505

0

505

4 027 = 37 % de l’enveloppe totale (10 955)

Économie numérique

CDC

2 250

0

662

45

252

Économie sociale et solidaire

CDC

100

0

100

2

60

États généraux de l’industrie − Aides à la réindustrialisation

BPI

200

0

320

115

122

États généraux de l’industrie − Compétitivité des filières industrielles

BPI

300

0

583

10

490

États généraux de l’industrie − Prêts verts

BPI

500

0

380

0

380

FNI Fonds souverain PI

BPI

0

100

100

100

0

FNI Innovation de modèles et de procédés (PRI et FISO)

BPI

0

120

60

60

1

FNI-Culture de l’entrepreneuriat

CDC

0

20

20

20

0

Fonds de fonds multisectoriel (multicap croissance)

CDC

ouvert par redéploiement

0

594

194

30

Fonds national d’amorçage (FNA)

CDC

400

0

600

0

133

Industrialisation des pôles de compétitivité

BPI

ouvert par redéploiement

0

30

0

5

Infrastructure THD

CDC

2 000

0

1 770

800

63

Innovation de rupture (PSIM CMI)

BPI

ouvert par redéploiement

150

300

280

29

Nano2017

CDC

0

ouvert par redéploiement

273

273

98

Prêt numérique

BPI

ouvert par redéploiement

0

76

20

61

 

Prêts à la robotisation

BPI

0

360

360

360

161

Prêts à l’industrialisation

BPI

0

300

300

300

108

Projet industriel d’avenir (PIAVE)

BPI

0

730

739

739

1

Projets structurants pôles de compétitivité

BPI

300

300

528

146

144

Quartiers numériques (French Tech)

CDC

0

215

215

215

6

Réseaux électriques intelligents

ADEME

250

0

149

48

34

Soutien aux usages, services et contenus numériques innovants volet SAR

BPI

ouvert par redéploiement

0

854

64

338

Refinancement d’OSEO

BPI

1 000

0

1 000

0

1 000

Renforcement des pôles de compétitivité − Plateformes mutualisées d’innovation des pôles de compétitivité (PFMI)

CDC

200

0

37

20

6

Usages et technologies du numérique

BPI

0

400

400

400

0

Égalité des territoires et logement

Rénovation thermique des logements privés

ANAH

500

0

365

37

247

281 = 56 % de l’enveloppe (500)

Rénovation thermique des logements-prime exceptionnelle

ASP

ouvert par redéploiement

0

135

103

34

Enseignement scolaire

Internats de la réussite

ANRU

0

150

138

138

0

249 = 39 % de l’enveloppe (638)

Internats d’excellence et égalité des chances

ANRU

500

0

500

0

249

Recherche et enseignement supérieur

Avion du futur et hélicoptère du futur

ONERA

1 500

1 220

2 693

472

1 073

5 514 = 20 % de l’enveloppe (27 358)

Calcul intensif

CEA

0

50

50

13

37

Équipements d’excellence (Equipex)

ANR

1 000

365

1 231

166

439

Espace

CNES

500

0

500

0

327

Fonds national de valorisation − France Brevet

CDC

50

0

50

0

45

Fonds national de valorisation − hors France Brevet : Sociétés d’Accélération du Transfert Technologique et consortiums de valorisation thématiques (SATT-CVT)

ANR

950

0

911

3

308

Initiatives d’excellence (Idex)

ANR

7 700

3 100

10 346

3 200

1 011

Instituts Carnot

ANR

500

0

600

411

29

Instituts d’excellence sur les énergies décarbonnées (IEED)

ANR

1 000

0

889

0

86

Instituts de recherche technologique (IRT)

ANR

2 000

0

1 975

0

205

Instituts hospitalo-universitaires (IHU)

ANR

850

0

870

0

265

KETS

ANR

0

150

60

60

0

Laboratoire d’excellence (Labex)

ANR

1 000

0

1 932

0

336

Nucléaire de demain : réacteur de 4e génération

CEA

652

0

627

0

318

Nucléaire de demain : réacteur Jules Horowitz pour les radio-nucléotides à finalité médicale

CEA

248

0

248

0

137

Opération Campus

ANR

1 300

0

1 300

0

282

Plateau de Saclay

ANR

1 000

0

1 000

202

133

recherche hospitalo-universitaire en santé

ANR

0

400

350

350

0

Recherche sur les déchets nucléaires

ANDRA

100

0

75

55

8

Santé et biotechnologie

ANR

1 550

0

1 540

0

462

Satellites

CNES

0

50

61

61

3

Sûreté nucléaire

ANR

ouvert par redéploiement

0

50

0

10

Sport jeunesse et vie associative

Favoriser des politiques de jeunesse intégrées à l’échelle d’un territoire

ANRU

0

100

84

84

10

10 = 12 % de l’enveloppe (84)

Travail et emploi

Partenariats territoriaux pour l’emploi et la formation

CDC

0

150

126

126

0

120 = 21 % de l’enveloppe (576)

Formation professionnelle en alternance et hébergement

CDC

500

0

450

61

120

 

Total

 

34 640

12 000

46 953

12 883

12 687

12 687 = 25 % de l’enveloppe

Note de lecture : Les concepts d’autorisation d’engagement (AE) et de crédit de paiement (CP) ne sont pas directement applicables au PIA. En effet, les fonds ont été versés aux opérateurs en AE = CP à partir de programmes du budget général qui n’ont existé que l’année du lancement des PIA 1 et 2. Depuis, tous les crédits sont logés dans des comptes des opérateurs, qui s’écoulent progressivement, sans lien avec le budget général et ses modes de gestion. Les colonnes sur les AE disponibles ont donc été remplies en fournissant les données sur les crédits qui n’ont déjà été engagés. De même, L’absence de programme PIA dans le budget général a conduit à indiquer les missions du budget général qui seraient le plus proches de l’action concernée. Enfin, les données de prévisions d’engagement à la fin 2015 ont été remplies en indiquant les dernières données sur les décaissements réalisés.

Source : le Gouvernement.

Ces investissements s’accompagnent de cofinancements dont le montant total atteignait 28,4 milliards d’euros en juin 2015 au moment de la contractualisation des projets au regard des 29 milliards de contractualisation attendus pour la fin de l’année 2015 (effet de levier de un).

Selon l’annexe budgétaire au projet de loi de finances pour 2016 relative à la mise en œuvre et au suivi des investissements d’avenir, les cofinancements constatés se composent essentiellement de :

– 18,9 milliards d’euros provenant du secteur privé concernant pour 11,1 milliards d’euros Bpifrance, pour 1,15 milliard d’euros des projets aéronautiques, pour 1,9 milliard d’euros des projets de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), et enfin pour 3,5 milliards d’euros des projets de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) dont 1,4 milliard d’euros sont des prêts bancaires aux collectivités territoriales (dans le cadre de l’action Ville de demain) ;

– 4,9 milliards d’euros provenant des collectivités territoriales (transport en commun en site propre et le déploiement des réseaux très haut débit) ;

– 1,3 milliard d’euros provenant d’autres financements publics (dont des ressources internationales pour le Centre national d’études spatiales) ;

– 2,7 milliards d’euros provenant des opérateurs.

COFINANCEMENTS PAR CATÉGORIE

Missions

LFI 2012

LFI 2013

LFI 2014

LFI 2015

Part dans le total
(2015)

PLF 2016

Part dans le total
(2016)

Économie

5,0

5,0

3,4

2,9

0 %

2,3

0 %

Enseignement scolaire

55,6

62,2

91,3

102,6

1 %

93,7

1 %

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

533,3

333,5

291,1

223,0

2 %

189,3

2 %

Recherche et enseignement supérieur

136,4

126,7

121,1

94,6

1 %

81,1

1 %

Relations avec les collectivités territoriales

0,9

1,9

1,6

2,0

0 %

2,0

0 %

Action extérieure de l’État

18,8

14,1

15,5

36,0

0 %

50,7

0 %

Administration générale et territoriale de l’État

74,3

74,6

68,5

66,5

1 %

74,5

1 %

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

31,3

27,7

18,9

19,7

0 %

16,9

0 %

Conseil et contrôle de l’État

14,8

12,9

10,4

11,8

0 %

8,4

0 %

Culture

241,5

171,1

152,7

161,9

2 %

155,2

1 %

Défense

9 325,3

8 866,0

7 852,7

7 814,5

79 %

9 310,4

83 %

Direction de l’action du Gouvernement

98,2

118,6

109,1

118,3

1 %

108,0

1 %

Écologie, développement et mobilité durables

225,1

218,0

202,0

195,8

2 %

190,7

2 %

Égalité des territoires et logement

3,0

5,3

5,0

4,7

0 %

4,5

0 %

Immigration, asile et intégration

25,6

14,6

14,2

14,7

0 %

3,5

0 %

Justice

508,3

552,4

580,1

566,1

6 %

463,2

4 %

Médias, livre et industries culturelles

15,6

14,2

9,7

13,2

0 %

9,9

0 %

Outre-mer

44,6

17,8

21,2

24,3

0 %

23,6

0 %

Politique des territoires

0,0

0,0

0,1

0,1

0 %

0,2

0 %

Sécurités

300,6

340,0

352,0

364,5

4 %

413,7

4 %

Sport, jeunesse et vie associative

22,4

20,1

21,8

18,6

0 %

16,6

0 %

Total

11 729

11 016,5

9 946,1

9 855,6

100 %

11 218,3

100 %

Note de lecture : seules les missions ayant bénéficié de dépenses d’investissement en projet de loi de finances pour 2016 sont reprises dans ce tableau.

Source : projets de loi de finances initiales pour les années 2012 à 2016.

À ces crédits du budget général destinés à des dépenses d’investissement s’ajoutent les décaissements annuels au titre des PIA réalisés par les opérateurs. En 2015, les dépenses totales d’investissement pilotées par l’État (via le Commissariat général à l’investissement pour les PIA) atteignent donc 12,1 milliards d’euros et devraient représenter 13,7 milliards d’euros en 2016.

INVESTISSEMENTS PILOTÉS PAR L’ÉTAT

(en millions d’euros)

Source : loi de finances pour les années 2012 à 2015 et projet de loi de finances pour 2016.

FICHE N° 7 :
L’ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE L’ÉTAT EN 2015

Le projet de loi de finances rectificative pour 2015 prévoit une révision à hausse des effectifs de l’État de 2 625 équivalents temps plein travaillé (ETPT) principalement au profit du ministère de la défense.

Si l’appréciation de l’exécution des plafonds d’emplois relève davantage de la loi de règlement (45), une première analyse peut être proposée.

Les hausses d’effectifs proposées par le présent projet de loi de finances rectificative concernent :

– le ministère de la défense pour 2 625 ETPT (46), correspondant à l’effet en 2015 des 7 500 recrutements réalisés au cours de cette même année, en application des dispositions de la loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 ;

– le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt pour 340 ETPT. Ces emplois supplémentaires visent à permettre la mise en œuvre du « plan FEAGA » (Fonds européen agricole de garantie), soit la sécurisation du paiement des aides à la surface au titre de la politique agricole commune via l’actualisation du registre parcellaire graphique agricole français. Pour rappel, le montant des refus d’apurement communautaire atteindrait 812 millions d’euros en 2015.

Cette dernière augmentation est couverte par des suppressions de postes équivalentes pour le ministère des finances et des comptes publics.

Le plafond d’emplois passerait ainsi de 1 901 099 ETPT en loi de finances initiale pour 2015 à 1 903 724 ETPT dans le présent projet de loi de finances rectificative.

ÉVOLUTION DES PLAFONDS D’EMPLOI DE 2014 AUX PRÉVISIONS POUR 2015 ET 2016

(en ETPT)

Ministères

Plafond d’emplois Consommation 2014

Plafond d’emplois

LFI 2015

Plafond d’emplois modifiés

PLFR 2015

Plafond d’emplois PLF 2016

Affaires étrangères et développement international

14 108

14 201

14 020

Affaires sociales, santé et droits des femmes

10 570

10 305

10 206

Agriculture, agroalimentaire et forêt

31 412

31 035

31 375

30 543

Culture et communication

10 833

10 958

11 041

Défense

270 849

265 846

268 471

271 510

Écologie, développement durable et énergie

32 969

31 642

30 722

Économie, industrie et numérique

6 287

6 502

6 465

Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

960 409

983 831

995 243

Finances et comptes publics

138 715

139 504

139 164

136 114

Intérieur

274 788

278 591

279 522

Justice

76 509

78 941

80 280

Logement, égalité des territoires et ruralité

13 463

12 807

12 500

Outre-mer

5 296

5 309

5 309

Services du Premier ministre

9 860

10 268

11 590

Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

9 846

9 750

9 703

Total budget général

1 865 914

1 889 490

1 904 768

Contrôle et exploitation aériens

10 701

10 827

10 726

Publications officielles et information administrative

744

782

785

Total budgets annexes

11 445

11 609

11 511

Total général

1 877 359

1 901 099

1 903 724

1 916 279

Note de lecture : afin de proposer une évolution des plafonds d’emplois à un périmètre constant, les budgets relatifs à chaque ministère ont été retraités en prenant pour base l’architecture des programmes retenue dans le projet de loi de finances pour 2016.

Source : projets de loi de règlement pour 2014, de loi de finances pour 2015, de loi de finances rectificative pour 2015 et de loi de finances pour 2016.

Plus de la moitié des effectifs de l’État relève du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche tandis qu’un tiers de ses effectifs se partage entre le ministère de la défense et le ministère de l’intérieur.

RÉPARTITION DES EFFECTIFS DE L’ÉTAT PAR MINISTÈRE

(en %)

Source : loi de finances pour 2015 et projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Les créations de postes prévues en 2015 au profit de la défense seront complétées, pour 2016, par de nouvelles mesures en cours d’examen au Sénat en première lecture du projet de loi de finances pour 2016.

Dans le contexte actuel d’état d’urgence, annoncé vendredi 13 novembre et prorogé pour trois mois par le Parlement (47), le Président de la République a en effet annoncé, lundi 16 novembre 2015, devant le Parlement réuni en congrès, d’une part, le maintien des effectifs de la défense pour les années 2016 et 2017 et d’autre part, la création pour ces mêmes années de 5 000 postes supplémentaires pour la police et la gendarmerie, de 2 500 postes pour la justice et de 1 000 postes pour les douanes.

Ces augmentations seront présentées en détail dans le rapport de la Rapporteure générale portant sur la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2016.

FICHE N° 8 :
LA FISCALITÉ AGRICOLE

Plusieurs amendements relatifs à la fiscalité agricole ont été adoptés lors de l’examen par notre commission du projet de loi de finances pour 2016 (48). L’adoption de ces amendements faisait suite aux principales recommandations de la mission d’information sur la fiscalité agricole (49).

En séance publique, ces amendements ont été retirés compte tenu de l’engagement pris par le Gouvernement de traiter ce sujet lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative.

Branche

Branche
agriculture

Branche
industrie manufacturière

Ensemble
des branches

Valeur ajoutée (VA) brute
(en milliard d’euros)

25,5

262,1

1 896,9

Consommation brute de capital fixe
(en milliard d’euros)

11,1

72,3

367,3

Consommation brute de capital fixe/VA brute (en %)

44

28

19

Source : comptes nationaux de l’INSEE 2013 et comptes nationaux de l’agriculture 2013.

– la forte variabilité du revenu qui justifie la mise en place de mécanisme de lissage fiscal et des dispositifs d’incitation à la constitution d’une épargne de précaution ;

Exemple relatif à l’impact fiscal de la variabilité des revenus agricoles
en l’absence de correctifs

Hypothèses

Sur un cycle de sept ans, un commerçant et un agriculteur réalisent chacun un bénéfice global de 263 200 euros. Le bénéfice du commerçant est réparti en sept résultats égaux de 37 600 euros. Celui de l’agriculteur varie de la façon suivante : quatre années de cycle haut (60 800), une année déficitaire (– 20 000), et deux années de cycle bas (20 000).

Résultats (sur la base du barème de l’impôt sur le revenu 2014 pour une part)

Le commerçant sera imposé sur la base d’un taux moyen d’imposition de 15 %, soit 5 640 euros par an, ou encore 39 480 euros sur sept ans.

En revanche, l’agriculteur sera imposé sur la base d’un taux moyen de 19,7 %, soit 7 406 euros par an, ou encore 51 847 euros sur sept ans. Dans le détail, il paiera un impôt de 12 601 euros les quatre premières années, puis un impôt nul les deux années suivantes (compte tenu du déficit et de son report), et enfin un impôt de 1 443 euros la dernière année.

Conclusion : dans cet exemple et pour un même revenu, l’agriculteur paie un impôt supérieur de près d’un tiers à celui du commerçant à cause des effets de la progressivité de l’impôt sur le revenu qui pénalisent les revenus cycliques.

Les mécanismes de lissage fiscal du revenu tels que l’étalement des revenus exceptionnels et le calcul sur une moyenne triennale sont, dès lors, parfaitement légitimes et ont pour but, non pas d’accorder un avantage fiscal à une catégorie socioprofessionnelle, mais de rétablir l’équité entre les contribuables.

– l’émergence d’une agriculture de groupe – qu’illustre le tableau qui suit – et qui ne doit pas être freinée par la perte automatique, en cas de regroupement d’exploitants, des avantages fiscaux accordés aux exploitations individuelles.

NOMBRE D’EXPLOITATIONS AGRICOLES SELON LEUR FORME JURIDIQUE EN 1988 ET 2010

 

1988
(arrondi à la centaine)

2010

Exploitations individuelles

946 100

339 872

Ensemble des formes sociétaires

65 500

146 616

dont GAEC

37 700

37 205

dont EARL

1 600

78 610

dont EARL unipersonnelle

42 758

dont EARL pluripersonnelle

35 852

Autres sociétés

26 200

30 801

Autres statuts

5 200

3 489

TOTAL

1 067 000

489 977

GAEC : groupement agricole d’exploitation en commun.

EARL : exploitation agricole à responsabilité limitée.

Source : Agreste – Recensement agricole 1988 et 2010.

(en millions d’euros)

Abattement sur les bénéfices réalisés par les jeunes agriculteurs

55

Remboursement partiel en faveur des agriculteurs de la TICPE

165

Déduction pour aléas

39

Déduction pour investissements

150

Étalement des revenus exceptionnels

23

Crédit d’impôt au titre des dépenses engagées par les exploitants agricoles pour assurer leur remplacement

14

Crédit d’impôt en faveur des entreprises agricoles utilisant le mode de production biologique

21

TICPE : taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques.

Source : fascicule des Voies et moyens, tome II, annexé au projet de loi de finances pour 2016

L’imposition sur une moyenne triennale – qui permet de retenir, pour l’assiette de l’impôt, un bénéfice égal à la moyenne des bénéfices de l’année d’imposition et des deux années précédentes – est considérée comme une modalité particulière de calcul de l’impôt et ne fait donc pas l’objet d’un chiffrage au titre des dépenses fiscales.

Simplifier le régime d’imposition des plus petites exploitations

1. Simplifier le forfait collectif pour tendre vers un régime de type « micro-BA » (bénéfices agricoles) dont l’assiette serait déterminée sur la base des recettes sous déduction d’un abattement forfaitaire représentatif des charges de 87 %.

2. Ouvrir le bénéfice du régime « micro-BA » aux agriculteurs actuellement exclus du régime du forfait collectif.

3. Augmenter le seuil d’assujettissement au régime réel et indexer celui-ci sur la première tranche d’imposition à l’impôt sur le revenu.

Assouplir les mécanismes de lissage fiscal du revenu agricole

4. Réduire le délai d’option pour la moyenne triennale de cinq ans à trois ans.

5. Autoriser la modulation des réintégrations du revenu exceptionnel.

Renforcer l’attractivité et alléger les conditions d’utilisation de la déduction pour aléas (DPA)

6. Élargir les notions d’aléas pour accroître les cas d’utilisation de la DPA.

7. Supprimer l’obligation de dépôt des sommes déduites sur un compte bloqué.

8. Assouplir les conditions de réintégration des sommes utilisées à compter de la survenance de l’aléa.

Renforcer la prise en compte de la variabilité dans la détermination de l’assiette sociale

9. Supprimer l’assiette minimale de cotisation pour la branche assurance maladie, invalidité et maternité de la Mutalité sociale agricole (MSA).

10. Modifier les modalités de calcul de la rente du sol afin qu’elle ne soit plus assise sur des valeurs locatives déconnectées de la valeur foncière réelle.

11. Assouplir les modalités d’application du dispositif de l’à-valoir de 50 % du montant des dernières cotisations appelées à 75 %.

12. Étendre le mécanisme de lissage du revenu exceptionnel pour le calcul des cotisations sociales.

Favoriser la diversification de l’activité agricole

13. Inscrire dans la loi le principe de transparence appliqué au groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC) concernant les seuils de rattachement des revenus issus des activités accessoires.

14. Permettre l’application de la double exonération de plein droit et pour sept ans de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de cotisation foncière des entreprises (CFE) prévues par la loi de finances pour 2015 aux unités de méthanisation mises en place avant le 1er janvier 2015 et depuis moins de sept ans.

Encourager les regroupements

15. Porter le principe de transparence intégrale des GAEC jusqu’à quatre associés.

16. Appliquer le principe de transparence au crédit d’impôt congé jusqu’à quatre associés.

17. Étudier la piste d’un impôt sur les sociétés (IS) agricole dont l’assiette serait calculée selon les modalités applicables aux bénéfices agricoles.

L’article 13 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 met en œuvre les recommandations nos 11 et 12 sur le calcul des cotisations sociales (réforme du mécanisme de l’à-valoir, et lissage au titre de l’assiette sociale du revenu exceptionnel).

Il étend, ainsi, aux cotisations sociales l’option fiscale d’étalement des revenus exceptionnels sur sept ans des non-salariés agricoles.

Il augmente le plafond déductible d’à-valoir des cotisations et contributions sociales de 50 % à 75 %. Autrement dit, l’agriculteur qui dispose de suffisamment de trésorerie, pourra payer et déduire en année N les cotisations dues au titre de N + 1 jusqu’à 75 % du montant des cotisations dues en année N. L’avantage de cette mesure est de permettre aux exploitants qui réalisent une bonne année de diminuer leurs assiettes fiscales et sociales en déduisant de leurs bénéfices une avance versée sur les cotisations sociales dues au titre de l’année suivante. Il s’agit d’un cas très rare en droit fiscal où il est permis de déduire par anticipation une charge non encore exigible.

Cet article a été adopté en termes identiques par l’Assemblée nationale et le Sénat en première lecture.

L’article 7 du projet de loi de finances pour 2016 met en œuvre la recommandation n° 14 permettant d’étendre aux méthaniseurs dits « pionniers » les exonérations d’impôt foncier dont bénéficient les méthaniseurs ayant débuté leur activité après le 1er janvier 2015.

En l’état du droit, les méthaniseurs pionniers, c’est-à-dire ceux ayant débuté leur activité avant le 1er janvier 2015, ne bénéficient pas de l’exonération de plein droit des impôts fonciers locaux (TFPB et CFE) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) dont bénéficient les autres méthaniseurs au titre de leurs sept premières années d’activité.

Sur délibération des collectivités territoriales prise avant le 31 décembre 2014, ils peuvent cependant bénéficier, en application du code général des impôts, d’une exonération temporaire de TFPB au titre de leurs cinq premières années d’activité.

L’état du droit est résumé dans le tableau qui suit.

EXONÉRATION EN FAVEUR DES INSTALLATIONS ET DES ACTIVITÉS DE MÉTHANISATION

Impôt

Méthaniseurs pionniers
(avant le 1er janvier 2015)

Autres méthaniseurs
(à partir du 1er janvier 2015)

TFPB

Article 1387 A du CGI

Article 1387 A bis du CGI

Exonération facultative de 5 ans à compter de l’année qui suit l’achèvement des installations

Exonération de plein droit de 7 ans à compter de l’année qui suit l’achèvement des installations

CFE et CVAE

Aucune exonération

Article 1463 A du CGI

7 ans à compter de l’année qui suit le début de l’activité

CGI : code général des impôts.

Source : commission des finances.

L’article 7 du projet de loi de finances pour 2016 étend aux méthaniseurs pionniers les exonérations de plein droit dont bénéficient les autres méthaniseurs.

INCIDENCE BUDGÉTAIRE POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

(en millions d’euros)

Impôt

2016

2017

2018

2019

2020

2021

Total
2016-2021

TFPB

2,1

2,1

1,9

1,8

1,1

0,7

9,7

CFE

1,7

1,6

1,6

1,5

1,2

0,7

8,3

Total

3,8

3,7

3,5

3,3

2,3

1,4

18

Source : évaluations préalables annexées au projet de loi de finances pour 2016.

L’article 7 a été adopté dans les mêmes termes en première lecture par l’Assemblée nationale et par le Sénat.

Au total, les avantages fiscaux dont bénéficient la méthanisation (pionnière et non pionnière) au titre de l’exonération des impôts fonciers est de l’ordre de 12 millions d’euros par an.

ÉVALUATION DU COÛT GLOBAL DES EXONÉRATIONS DE PLEIN DROIT DE TFPB ET DE CFE POUR LES UNITÉS DE MÉTHANISATION

(en millions d’euros)

Méthanisation agricole

2016

2017

2018

Coût pour l’État

4

Coût pour les collectivités territoriales

8,8

11,7

11,5

Total

12,8

11,7

11,5

Source : commission des finances à partir des données des évaluations préalables annexées au projet de loi de finances pour 2015 et au projet de loi de finances pour 2016.

La commission des finances avait adopté, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2016, des amendements permettant de mettre en œuvre les recommandations de la mission d’information sur la fiscalité agricole n° 5 (autoriser la modulation des réintégrations du revenu exceptionnel), 6, 7, 8 sur la déduction pour aléas (DPA), 13, 15 et 16 sur les GAEC. Ils avaient été retirés au profit d’un débat en projet de loi de finances rectificative.

C’est pourquoi ces amendements ont été redéposés dans le cadre de l’examen du présent projet de loi de finances rectificative pour 2015.

L’adoption de ces amendements doit notamment permettre :

– d’assouplir les conditions d’utilisation de la DPA par une définition plus large de l’aléa économique ;

– d’améliorer le principe de transparence des GAEC en permettant à leurs associés, dans la limite de quatre, de bénéficier pleinement des crédits d’impôt en faveur de l’agriculture biologique et sur les dépenses engagées pour assurer leur remplacement temporaire pendant leurs congés ;

– d’améliorer le principe de transparence des GAEC en cas de pluriactivité de leurs membres ;

– de rendre plus souple le mécanisme d’étalement des revenus exceptionnels, en permettant aux exploitants de déterminer librement le rythme de réintégration du revenu exceptionnel dans la limite de sept ans.

Enfin, la suppression du régime du forfait collectif et son remplacement par un régime micro-BA pourrait intervenir dans le cadre ce projet de loi de finances rectificative par voie d’amendement du Gouvernement. Cette réforme a déjà été annoncée par le Gouvernement lors des Assises de la fiscalité agricole qui se sont tenues en mars 2014. Elle fait l’objet aujourd’hui d’un large consensus. Elle permettrait, en outre, à l’administration fiscale de réaliser des économies en coût de gestion.

AUDITION DE M. MICHEL SAPIN, MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS, ET M. CHRISTIAN ECKERT, SECRÉTAIRE D’ÉTAT AU BUDGET

La Commission entend M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics, et M. Christian Eckert, secrétaire d’État au budget, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2015.

M. le président Gilles Carrez. Monsieur le ministre des finances et des comptes publics, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, je vous souhaite la bienvenue et vous remercie de vous conformer à la tradition en vertu de laquelle tout projet de loi de finances est présenté en commission des finances le jour même de son adoption en conseil des ministres.

Nous examinerons ce projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2015 dans la matinée du 25 novembre, sitôt terminée l’audition de M. Pierre Moscovici menée conjointement par notre commission et la commission des affaires européennes. L’examen en séance plénière commencera le lundi 30 novembre après-midi.

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. La tradition est effectivement, mesdames et messieurs les députés, de vous présenter, au mois de novembre, un projet de loi de finances rectificative, sitôt après son adoption en Conseil des ministres. Celui-ci présente la double caractéristique d’ajuster les prévisions budgétaires et de comporter quelques mesures fiscales qui n’ont pu être intégrées aux projets de loi de finances pour 2015 et 2016.

Cette année, nos prévisions de croissance comme de déficit public sont inchangées. Vous avez tous en tête les chiffres publiés ce matin par l’INSEE : le troisième trimestre aura connu une croissance de 0,3 % du PIB. Compte tenu de la croissance des trimestres précédents, nous sommes assurés d’une croissance de 1,1 % en 2015, supérieure à l’hypothèse retenue en loi de finances initiale – nous avions anticipé une progression de 1 %.

Quelles sont les composantes de cette croissance ? La consommation des ménages continue de progresser, soutenue par un pouvoir d’achat lui-même dynamique, en partie grâce à l’évolution des salaires, en partie aussi grâce à une inflation nulle sur laquelle pèse notamment l’évolution du coût de l’énergie – je songe au fioul et aux carburants automobiles. En outre, l’investissement des entreprises s’accélère, avec une progression de 0,7 % au troisième trimestre. Ainsi, l’investissement aura crû de plus de 2 % au cours de cette dernière année, ce qui marque une rupture par rapport aux années précédentes.

Il n’est pas nécessaire de changer l’hypothèse de croissance sur laquelle le budget a été construit, mais cette évolution témoigne à nouveau de la prudence, au bon sens du terme, et du réalisme du cadrage économique que nous avions retenu il y a un an. Notre démarche fut la même pour l’élaboration du projet de loi de finances (PLF) pour 2016, actuellement soumis à votre examen. Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), dont je vous recommande, comme d’habitude, de lire l’avis, rendu le 6 novembre dernier, qualifie d’ailleurs notre hypothèse de « vraisemblable » – c’est à peu près le meilleur compliment qu’il soit susceptible de faire.

Notre prévision de déficit public, inscrite dans le programme de stabilité et confirmée lors du dépôt du projet de loi de finances pour 2016, reste donc de 3,8 %, chiffre à la fois meilleur que l’objectif de 4,1 % inscrit en loi de finances initiale pour 2015 et conforme aux prévisions de la Commission européenne. C’est la première fois depuis 2011 que la prévision de déficit public est améliorée en cours d’année par rapport à la loi de finances initiale. Que l’on arrête donc de nous dire que le déficit ne cesse de s’aggraver, puisque le solde budgétaire est meilleur que prévu, alors même que la loi de finances initiale marquait déjà une amélioration par rapport au déficit précédent.

Si la réduction de déficit que nous prévoyons pour l’année 2016 peut paraître limitée, je rappelle que cette année 2015 fut celle d’une baisse marquée des impôts, pour les entreprises et pour les ménages, avec la première étape du pacte de responsabilité et de solidarité et la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Nos économies sont en grande partie mobilisées pour financer ces baisses d’impôts. C’était nécessaire, et beaucoup d’entre vous, indépendamment de leur sensibilité politique, trouveront juste que nous ayons agi ainsi.

Depuis le début du quinquennat, nous cherchons à concilier baisse du déficit – le déficit des administrations publiques était supérieur à 5 % en 2011 – et restauration de la compétitivité de nos entreprises. Celle-ci avait décroché dans les années 2000, comme l’avait très bien montré M. Louis Gallois dans son rapport sur la compétitivité de l’industrie française. Nous avons revendiqué le fait de pouvoir réduire le déficit à un rythme compatible avec le retour de la croissance. C’est très exactement ce qu’il se passe : un rythme raisonnable et réaliste de réduction du déficit, combiné à d’autres facteurs, a permis le retour de la croissance. Et, avec un déficit de 3,8 % du PIB, nous faisons mieux que ne le demandait la Commission européenne, qui voulait qu’il soit ramené à 4 % du PIB.

Si, aujourd’hui, nous retrouvons de la croissance, et si notre économie continue à recréer de l’emploi privé – des chiffres publiés ce matin montrent que les créations nettes d’emplois marchands auront été de 50 000 en un an, autre rupture avec les années précédentes –, c’est en particulier le résultat de la baisse du coût du travail.

Nous faisons également baisser les prélèvements obligatoires : le taux de prélèvements obligatoires sera de 44,6 % du PIB cette année, à la suite de cette loi de finances rectificative, alors qu’il était de 44,9 % l’année dernière. C’est la première diminution des prélèvements obligatoires depuis 2009.

M. Charles de Courson. La première diminution de leur taux, plus exactement !

M. le ministre. Oui, la première diminution du taux des prélèvements obligatoires depuis 2009. C’est la première fois que le taux des prélèvements obligatoires aura baissé en France. Je remercie M. de Courson de m’obliger à le dire trois fois.

Nous faisons en même temps baisser les déficits, grâce à la maîtrise des dépenses : la part des dépenses publiques dans la richesse nationale devrait passer de 56,4 % du PIB en 2014 à 55,8 % en 2015.

Notre stratégie et notre cadrage macroéconomique et budgétaire pour 2015 restent donc inchangés. C’est un signe de la stabilité et de la prévisibilité de notre politique. Les acteurs économiques l’apprécieront.

Ce projet de loi de finances rectificative comprend également quelques dispositions fiscales. Vous en connaissez les grands thèmes : fiscalité de l’énergie, mises en conformité diverses avec le droit de l’Union européenne, fiscalité de l’épargne et simplifications. Nous voulions aussi traiter la question de l’érosion de la base d’imposition et du transfert de bénéfices (BEPS), mais des amendements ont été déposés, débattus et adoptés dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2016. J’en remercie particulièrement le groupe Socialiste, républicain et citoyen (SRC). Ainsi le Président de la République pourra se rendra à Antalya, en Turquie, où le projet de l’OCDE de lutte contre ces pratiques en cause doit être adopté, avec, dans sa musette, une disposition adoptée quasiment à l’unanimité.

En ce qui concerne la fiscalité de l’énergie, nous visons trois objectifs. Il s’agit tout d’abord de donner de la visibilité au prix du carbone pour 2017, la question étant réglée pour 2015 et 2016. Il faut permettre aux acteurs économiques de prendre les bonnes décisions. Cette action se traduit dans la contribution climat-énergie, qui constitue la composante carbone des taxes intérieures de consommation sur les énergies fossiles. Il s’agit ensuite, grâce au surplus de recettes dégagé par cette augmentation du prix, de sécuriser à compter de 2017 le financement du service public de l’électricité et des énergies renouvelables, par ailleurs mis en conformité avec le droit de l’Union européenne. Enfin, il s’agit de concrétiser la convergence des tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur l’essence et le gazole, même si l’essentiel a été fait dans le cadre de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2016.

Les dispositifs fiscaux qui encouragent l’investissement, que ce soit par les particuliers, notamment la réduction d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en cas d’investissement dans les petites et moyennes entreprises (PME), ou par les entreprises, sont également adaptés au nouveau cadre européen applicable aux aides d’État en faveur du capital-risque en les recentrant sur les entreprises jeunes ou innovantes, c’est-à-dire celles qui rencontrent le plus de difficultés.

Ce projet de loi de finances rectificative comprend, enfin, d’assez nombreuses mesures de simplification et de modernisation, à mon avis bienvenues. Je citerai notamment la fusion des données cadastrales avec celles de l’Institut géographique national (IGN) pour améliorer le service rendu, ou encore une meilleure lisibilité de l’incitation à s’implanter dans les zones de revitalisation rurale (ZRR), avec des critères simplifiés de densité et de richesse. C’est d’autant plus nécessaire que nous raisonnons maintenant dans le cadre des intercommunalités.

J’insiste sur une mesure de prévisibilité pour les entreprises : la création d’un comité consultatif pour le crédit d’impôt recherche (CIR). Il doit permettre que les entreprises qui font, c’est normal, l’objet d’un contrôle au titre du CIR, notamment en ce qui concerne l’éligibilité des dépenses engagées, puissent dialoguer, non seulement avec l’administration fiscale, qui n’est pas toujours compétente sur tous les sujets, notamment scientifiques et techniques, mais aussi avec des experts de la recherche-développement dans les domaines qui les concernent. Cela permettra aux entreprises concernées de mieux faire valoir leur argumentation et de bénéficier d’une écoute plus compréhensive.

Enfin, nous revoyons le dispositif de garanties publiques à l’exportation, dont la gestion sera confiée au cours de l’année 2016 à une filiale de la Banque publique d’investissement. Ainsi tous les outils nécessaires seront-ils à la disposition de Bpifrance. Cela ne change rien au fait que l’État aura toujours son mot à dire, puisqu’il s’agit de garanties publiques, pays par pays, projet par projet, entreprise par entreprise.

Tels sont, mesdames et messieurs les députés, les principaux éléments de ce projet de loi de finances rectificative.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget. Monsieur le président, madame la Rapporteure générale, mesdames et messieurs les députés, un projet de loi de finances, qu’il soit rectificatif ou initial, ce sont des chiffres et des lettres. Je commencerai par vous parler des chiffres avant d’aborder les lettres.

Que nous disent les chiffres ? Aujourd’hui, 13 novembre 2015, comme le 30 septembre lors du dépôt du projet de loi de finances pour 2016, et comme le 15 avril lors de la présentation du programme de stabilité, ils nous disent une seule et même chose : nos engagements budgétaires pour 2015 sont en passe d’être tenus.

Sur les recettes tout d’abord, certains ont joué les Cassandre tout au long de l’année en nous annonçant des moins-values de recettes de plusieurs milliards d’euros. Ces prédictions n’étaient fondées sur aucune analyse sérieuse et nos prévisions sont aujourd’hui confirmées par les chiffres de recouvrement – et je rappelle que toutes les données de recouvrement sont publiques, la situation du budget de l’État à fin septembre ayant été publiée la semaine dernière.

S’agissant de l’impôt sur le revenu, nous constations à cette date une plus-value de 900 millions d’euros par rapport à septembre 2014 ; le projet de loi de finances rectificative table prudemment, pour l’ensemble de l’année, sur une hausse de seulement 300 millions d’euros par rapport à 2014. Il reste plusieurs aléas jusqu’à la fin de l’année, mais il est aujourd’hui quasiment certain que l’impôt sur le revenu sera, en 2015, en plus-value par rapport à la loi de finances initiale. Ce serait la première fois depuis 2006. Cette plus-value serait de l’ordre de 600 millions d’euros.

S’agissant de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), nous constatons à la fin du mois de septembre une hausse de 3,5 % de son produit par rapport à septembre 2014 ; le projet de loi de finances rectificative anticipe une hausse de 2,3 % seulement. Notre prévision est donc prudente et, en tout cas, on ne constate aucun décrochage de cet impôt, bien au contraire.

S’agissant de l’impôt sur les sociétés, nous anticipons une légère moins-value de 300 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale, le cinquième acompte restant un aléa important.

S’agissant de l’ISF, le produit de l’impôt correspondra à la prévision de la loi de finances initiale, l’écart de 200 millions d’euros s’expliquant uniquement par une répartition des recettes du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR) moins riche en ISF.

S’agissant enfin des contentieux fiscaux de série, ils ont été budgétés prudemment, comme chaque année, et ce projet de loi prévoit une baisse de 447 millions d’euros du coût des décaissements au titre du contentieux relatif aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) en 2015.

Au total, nous avons revu progressivement à la hausse les recettes fiscales depuis le mois d’avril et le programme de stabilité : nous estimons maintenant qu’elles sont en plus-value d’environ 500 millions d’euros par rapport à cette prévision du mois d’avril.

L’ensemble des recettes de l’État, fiscales et non fiscales, correspond à ce que prévoyait la loi de finances initiale, avec une légère moins-value de 100 millions d’euros.

Les dépenses de l’État sont, elles aussi, tenues, comme prévu.

Je rappelle que l’objectif inscrit dans la loi de finances initiale était élevé, puisque nous voulions diminuer de 4,5 milliards d’euros la dépense sous norme, hors charge de la dette et pensions.

En cours d’année, nous avons mis en œuvre un plan d’économies complémentaires de 4 milliards d’euros sur l’ensemble des administrations publiques, afin de compenser l’impact de la diminution de l’inflation sur les économies prévues. Dans le cadre de ce plan, nous avons revu à la baisse de 700 millions d’euros la dépense de l’État.

Toujours en cours d’année, nous avons engagé un ensemble de dépenses nouvelles, principalement pour la sécurité et l’emploi des Français : ce sont près de 800 millions d’euros de dépenses qu’il a fallu financer par des économies supplémentaires dans le décret d’avance du mois d’avril et par une mise en réserve complémentaire de crédits.

Sur l’année 2015, nous visons à la fois une baisse globale de la dépense de l’État – une baisse probablement sans précédent – et la mobilisation en urgence de nouveaux moyens ciblés. Ce PLFR montre qu’il est possible de faire les deux simultanément.

Après avoir financé les dépenses nouvelles, il s’agit maintenant de couvrir les surcoûts traditionnellement constatés en fin d’année, principalement le financement des apurements agricoles communautaires, des opérations extérieures (OPEX) et des emplois aidés. Pour cela, ce sont près de 2,1 milliards d’euros d’annulations de crédits qui doivent être mis en œuvre dans ce collectif et dans le prochain décret d’avance.

Ce que nous disent les chiffres, c’est donc que les recettes sont tenues ; que la dépense est tenue ; et, dès lors, que le déficit de l’État se réduit – de 1,1 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale. C’est donc, désormais, une baisse de 12,3 milliards d’euros du déficit de l’État que nous anticipons en 2015 par rapport à 2014. Cette dernière était, vous vous en souvenez, une année exceptionnelle, en raison du programme d’investissements d’avenir (PIA). À périmètre constant, hors PIA, le déficit de l’État était de 74,9 milliards d’euros en 2014 ; il sera en 2015, selon nos estimations, de 73,3 milliards d’euros. Cela représente une baisse de 1,6 milliard d’euros sonnants et trébuchants.

Je précise que le déficit de l’État est revu en hausse – légère – de 300 millions d’euros par rapport à la prévision du projet de loi de finances pour 2016 qui vous a été présentée à la fin du mois de septembre. Cet écart s’explique par un facteur un peu technique, que je vais m’efforcer d’expliquer aussi clairement que possible.

Dès le début de l’année, nous avons anticipé une économie de 700 millions d’euros sur le prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne au titre de corrections sur les contributions versées au cours des exercices antérieurs ; cette économie était attendue du vote d’un budget rectificatif par le Parlement européen dans le courant de cette année. Or, il s’avère aujourd’hui que le Parlement européen ne votera pas ce budget dans un délai permettant de constater, en comptabilité budgétaire, cette économie sur l’exercice 2015. En conséquence, cette économie ne peut être prise en compte sur le budget de l’État en 2015, ce qui conduit, toutes choses égales par ailleurs, à dégrader le solde de 700 millions d’euros.

Pour compliquer encore un peu les choses, il faut savoir que la perte de cette économie n’a aucun impact sur le déficit public en comptabilité nationale. En effet, elle était déjà considérée comme certaine à la fin de l’année 2014 et avait donc été comptabilisée par l’INSEE au titre de cet exercice.

En résumé, cette dégradation du solde de l’État par rapport à septembre est en trompe-l’œil : en comptabilité nationale – qui est le juge de paix en la matière – c’est bien à une amélioration que nous nous attendons par rapport à septembre, puisque nous avons revu les recettes à la hausse de 400 millions d’euros.

J’en viens aux lettres, et au volet fiscal de ce projet de loi de finances ; compte tenu du peu de temps donc nous disposons, je serai bref, mais je serai bien sûr à votre disposition pour répondre à vos questions.

Je commencerai par la fiscalité écologique. En complément de la présentation de Michel Sapin, qui connaît très bien tous ces problèmes, il est important de décrire le mouvement de « rebudgétisation » que vous propose ce texte.

En effet, l’ensemble des recettes et dépenses de l’actuelle contribution au service public de l’électricité (CSPE) et de ses équivalents pour le gaz, qui constituaient jusqu’à présent des dispositifs extrabudgétaires, seront intégrées au budget de l’État, qui disposera ainsi plus directement de l’ensemble des moyens en faveur de la transition énergétique et du service public de l’énergie. Le contrôle et l’information du Parlement et du Gouvernement sur ces moyens très importants – plus de 6 milliards d’euros de recettes et de dépenses en 2016 – s’en trouveront renforcés. Cette intégration de la CSPE au budget de l’État se traduira par la création d’un compte d’affectation spéciale (CAS) Transition énergétique qui financera l’ensemble des tarifs de rachat d’énergies renouvelables, soit plus de 4 milliards d’euros en 2016, et par la création au sein du budget général de l’État d’un nouveau programme Service public de l’énergie qui regroupera les moyens en faveur de la péréquation géographique et sociale de l’énergie. Il sera doté d’environ 2 milliards d’euros en 2016.

En ce qui concerne la fiscalité sur les tabacs, nous vous proposons d’ajuster le dispositif du « minimum de perception majoré », qui nous permet d’augmenter instantanément la fiscalité sur les cigarettes les moins chères, notamment en cas d’amorce de guerre des prix. L’efficacité de cet outil n’est pas en cause ; il a été mobilisé avec succès pour neutraliser les tensions baissières observées sur le marché en 2014 puis en 2015. Mais la récente jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) nous invite à faire évoluer le dispositif, qui sera désormais moins « chirurgical », si j’ose dire, mais pas moins puissant, et toujours au service de la protection des recettes de la sécurité sociale et surtout de nos objectifs de santé publique.

Le projet de loi de finances rectificative comporte également des mesures relatives à la fiscalité locale, en particulier le report de 2016 à 2017, déjà annoncé, de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, qui a été lancée à l’initiative des commissions des finances des deux assemblées. Je vous transmets, monsieur le président, le résultat très détaillé des importants travaux d’analyse des conséquences de la révision menés par la direction générale des finances publiques (DGFiP) sur ce sujet. Le PLFR proposera également de lisser sur dix ans les effets de la révision, afin d’en atténuer les effets pour les contribuables, la révision demeurant à produit fiscal constant pour les collectivités territoriales.

J’ai proposé hier que nous tenions une réunion sur ce sujet, afin de débattre des points délicats – qui sont nombreux, en raison de l’ancienneté des bases et des risques d’effets brutaux si nous ne prévoyons pas de garde-fous adéquats. Nous pourrions ainsi envisager dès ce PLFR, outre la prolongation du lissage, des mesures qui permettront la bonne mise en œuvre de cette réforme dès le début de l’année 2017.

Voilà, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, une présentation aussi synthétique que possible de ce texte très riche et très varié.

M. le président Gilles Carrez. Il est exact que les objectifs du Gouvernement pour 2015 – objectifs de recettes, de dépenses, et donc de déficit – sont en passe d’être atteints. Je rappelle toutefois que l’objectif d’un déficit public à 3,8 % n’est que de 0,1 point inférieur au chiffre de l’exécution 2014.

Cette situation préoccupe la Commission européenne, qui prévoit que notre déficit public s’élèvera en 2016 à 3,4 %, au lieu des 3,3 % espérés, et surtout en 2017 à 3,3 % – c’est-à-dire très loin des prévisions du Gouvernement. Alors que la procédure pour déficit excessif qui visait la France a été suspendue en juillet, ne risque-t-elle pas d’être reprise ?

Vous vous flattez de respecter l’objectif de 3,8 %, mais celui-ci est finalement très modeste. N’auriez-vous pas intérêt à essayer de faire un peu mieux – 3,7 % par exemple ? Vous seriez ainsi moins en difficulté vis-à-vis de la Commission européenne. Nous le vérifierons sans doute le 25 novembre, lorsque nous recevrons M. Moscovici.

En ce qui concerne les dépenses, l’objectif est tenu, mais c’est encore grâce à 2 milliards d’annulations de crédits sur les intérêts de la dette ! Cette situation durera-t-elle indéfiniment ? Rien n’est moins sûr.

M. le ministre. Vous avez parfaitement raison, monsieur le président, de vous intéresser aux prévisions de la Commission, qui rendra son avis officiellement mardi prochain. Nous agissons d’abord pour la France, mais toujours dans le cadre de la solidarité européenne : il est donc légitime de respecter les règles qui lient les États de la zone euro.

De l’avis de la Commission, dont nous connaissons déjà certains éléments auxquels vous avez fait allusion, je retiens d’abord que, pour la première fois, elle est parfaitement d’accord avec nos prévisions en évaluant le déficit pour 2015 à 3,8 %. Pour la première fois également, elle se retrouve, à 0,1 % près, dans les orientations que nous avons adoptées pour l’année prochaine. Le premier constat qui apparaît donc à la lecture de ces prévisions est que la France est en ligne ! Cela n’était plus arrivé depuis de nombreuses années.

Pour 2017, le service de prévisions de la Commission européenne a utilisé l’expression convenue « à politique inchangée », pouvant laisser entendre que l’on ne faisait rien ; or, ce n’est pas exactement le cas, et il a d’ailleurs intégré les baisses d’impôt. Le programme d’économies n’a pas pu être pris en compte, mais, sans lui, le chiffre n’a aucun sens !

Vous ne me pousserez pas à la faute en me demandant d’élaborer une hypothèse plus exigeante à 3,7 %, monsieur le président ! Si toutefois, comme pour la croissance, nous devions constater un résultat meilleur qu’annoncé, nous nous réjouirions d’une situation qui, là encore, romprait avec le passé proche.

M. le président Gilles Carrez. Monsieur le ministre, vous n’avez pas convaincu la Commission européenne sur les dépenses, mais vous y êtes parvenu sur les baisses d’impôt. En revanche, vous n’avez pas convaincu votre groupe parlementaire sur la diminution de l’imposition des entreprises. Nous assistons depuis hier matin aux déchirements de la majorité sur l’application du pacte de responsabilité ; des amendements visant à conditionner le CICE et à reporter la suppression de la surtaxe de l’impôt sur les sociétés (IS) ont ainsi été déposés. En voyant cela, on peut se demander ce qu’il se passera dans un an lorsque nous discuterons de la dernière phase de la disparition de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), qui représente un montant supérieur à 3 milliards d’euros. Ces remises en cause permanentes minent le retour de la confiance, car les entreprises vivent dans la crainte de l’instabilité fiscale et du reniement des engagements. Le Gouvernement tient bon, et ses successeurs en retireront les bénéfices en obtenant la confiance des chefs d’entreprise, aujourd’hui malmenée par la majorité.

J’approuve la réforme de la CSPE, que l’on aurait dû mettre en œuvre depuis longtemps. La CSPE représente à la fois une fiscalité dissimulée, une dette cachée de l’État envers EDF de plus de 5 milliards d’euros, et des dépenses non maîtrisées en faveur des énergies renouvelables. Il me paraît très opportun de répartir ces dépenses entre des crédits budgétaires – placés dans un programme dédié qui renvoie à la notion de service public de l’électricité par les tarifs sociaux et la péréquation territoriale – et un CAS.

Le recentrage du dispositif de réduction d’ISF pour investissement dans les PME sur les entreprises de moins de sept ans et son alignement sur la réduction d’impôt dite « Madelin », présentés comme une obligation européenne, font courir un risque pour l’alimentation en fonds propres des PME. Une entreprise qui fabrique des brioches depuis cinquante ans a tout autant besoin de fonds propres pour l’emploi et pour sa compétitivité qu’une entreprise innovante dans le domaine de l’internet. Ce dispositif et celui du « Madelin » aboutiront à une hyperconcentration sur les jeunes entreprises.

Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Un tableau de la page 13 de ce PLFR montre que les dépenses supplémentaires en fin de gestion atteignent presque 6 milliards d’euros, dont 1,7 milliard d’euros correspondant à des ouvertures de crédits supplémentaires qui seront notifiées à la commission par un décret d’avance à la fin du mois de novembre. Ces dépenses supplémentaires sont couvertes par des annulations de crédits de 4,1 milliards d’euros prévues par le PLFR et le décret d’avance à venir. Les 1,9 milliard d’euros restants à couvrir le seront par une amélioration des recettes de 900 millions d’euros, notamment liée à un moindre prélèvement sur recettes destiné à l’Union européenne et par l’amélioration du solde des comptes spéciaux de 1,3 milliard d’euros. Messieurs les ministres, pouvez-vous préciser la nature de ce montant lié aux comptes spéciaux ? Au total, on obtient donc un solde entre les dépenses et les recettes de l’État près de 400 millions d’euros auquel il faut ajouter les 700 millions d’euros d’économie au titre du décret d’annulation pris en juin pour retrouver l’amélioration du solde de l’État de 1,1 milliard d’euros que vous mentionnez.

L’article 17 du projet de loi porte sur la transposition des échanges automatiques d’informations financières : pouvez-vous nous confirmer qu’il se contente de transposer stricto sensu la directive européenne ?

L’article 19 relatif au crédit d’impôt recherche (CIR) constitue une très bonne avancée.

Les articles 13 et 14 sont centrés sur les dispositifs touchant les PME : pouvez-vous nous présenter plus précisément vos objectifs à long terme en matière de capital et de financement des PME ?

Je regrette profondément que ce PLFR ne contienne aucune modification des dispositifs fiscaux en faveur de l’agriculture. Au moment de l’examen du PLF pour 2015, les amendements en la matière avaient été reportés au PLFR pour 2014, puis au rapport d’information sur la fiscalité agricole présenté en juillet dernier, puis au PLF pour 2016 ! Seul l’article 2 traite d’agriculture, et il m’inquiète au demeurant, car il prévoit un prélèvement de 255 millions d’euros sur les ressources du Fonds national de gestion des risques agricoles (FNGRA).

De nombreux articles, enfin, ont trait aux garanties accordées par l’État à différents organismes : serait-il possible de disposer d’une consolidation globale de l’ensemble de ces garanties ?

M. Dominique Lefebvre. Au nom du groupe Socialiste, républicain et citoyen, je me félicite que ce PLFR traduise le respect des engagements pris par le Gouvernement et la majorité parlementaire pour l’exécution budgétaire et l’évolution du déficit des finances publiques. Monsieur le président, certes la pente de réduction des déficits est modérée, mais la route est droite, pour parler comme l’ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin le 3 juillet 2002. Trois ans plus tard, le 21 septembre 2005, ce dernier préconisait d’ailleurs la « positive attitude »... Je m’inspire de ces « raffarinades » : certes, on peut toujours faire mieux, mais la trajectoire ne dévie pas. Elle diffère en revanche des orientations arrêtées en 2012 dans la loi de programmation des finances publiques, mais les circonstances économiques internationales nous ont imposé d’arbitrer entre la nécessaire réduction des déficits par la maîtrise des dépenses publiques et le soutien à l’activité et à la croissance.

Suivant les recommandations du HCFP, le PLFR montre notre vigilance pour la fin de l’exécution budgétaire ; par ailleurs, il comporte un volet sur la fiscalité des entreprises, qui répond notamment à des exigences d’harmonisation européenne, et des dispositions sur la fiscalité écologique. Le Gouvernement ne souhaite pas éluder les questions reportées dans le passé auxquelles a fait allusion Mme la Rapporteure générale, mais des amendements parlementaires les reprendront afin d’assurer un traitement global ; messieurs les ministres, nous vous remercions par avance de préciser vos intentions et de nous rassurer sur ce point, car certains de nos collègues, comme François André qui a beaucoup travaillé sur ces sujets, avaient accepté de retirer leurs amendements au motif qu’ils seraient intégrés à la loi de finances rectificative.

M. Hervé Mariton. Le HCFP a souligné la modestie de l’amélioration du solde structurel. Les incertitudes pesant sur notre relation financière avec l’Union européenne ne se limitent pas aux procédures et tiennent également aux chiffres que vous transmettez, messieurs les ministres, d’un acte budgétaire à un autre.

Monsieur le ministre des finances et des comptes publics, vous avez beaucoup raisonné « à 0,1 % près » ; si l’on retenait cette méthode, le taux de prélèvements obligatoires rapporté au PIB ne diminuerait pas en 2016 ! Pourtant, plusieurs ministres se sont flattés, lors des récentes commissions élargies, des baisses d’impôt à venir l’année prochaine ; en réalité, les prélèvements progresseront en valeur absolue et leur taux restera stable.

L’évolution des périmètres intercommunaux soulève certes des questions de cohérence pour les ZRR, mais le Gouvernement ne souhaite-t-il pas restreindre l’étendue de ces zones ? J’aimerais comprendre quelles sont ses intentions.

Monsieur le président, veuillez me pardonner, mais je ne suis pas aussi optimiste que vous au sujet de la réforme de la CSPE. Avec le CAS, vous proposez, messieurs les ministres, une procédure budgétaire qui représente en effet un progrès. Mais, à la suite de décisions prises ces dernières années et d’accords de subventionnement d’investissements dans les énergies renouvelables – certains s’étant avérés fondés, d’autres très hasardeux –, des « stocks » se sont constitués. Comment les traitez-vous ? À combien le Gouvernement évalue-t-il l’ampleur des stocks, compte tenu des engagements agréés par l’exécutif ces dernières années ?

Enfin, dans l’exposé des motifs, le Gouvernement rappelle les enjeux de la lutte contre le changement climatique, au nom de laquelle il taxe une énergie non carbonée. Quelle contradiction ! La CSPE atteint là ses limites, me semble-t-il.

M. Charles de Courson. Le Gouvernement partage-t-il le diagnostic du Haut Conseil des finances publiques quant au caractère « modeste » de la réduction des déficits publics ramenés de 3,9 % à 3,8 % du PIB ? Croit-il comme lui qu’une incertitude plane sur le produit total de l’impôt sur les sociétés, et peut-il estimer l’impact du CICE en la matière ?

D’autre part, le PLFR tient-il compte des effets liés aux remboursements d’impôts promis aux retraités et, le cas échéant, pour quel montant ?

S’agissant des finances locales, le Haut Conseil estime que « l’ampleur effective du freinage des dépenses reste toutefois incertaine ». Partagez-vous cet avis, et confirmez-vous que l’hypothèse de 1 % de baisse des dépenses de fonctionnement des collectivités est celle que vous avez retenue ?

Autre question, fondamentale celle-ci, sur l’évolution du solde structurel : qui a raison, du Gouvernement, pour qui le déficit structurel sera de 1,7 % du PIB en 2015, ou de la Commission européenne, pour qui il sera de 2,7 %, ou encore du FMI qui l’estime à 2,1 % ?

Par ailleurs, le Gouvernement indique que la dépense publique, hors crédits d’impôt, progressera de 1 % en 2015. Or, le PIB – compte tenu de l’inflation – augmentera de 1,1 %. Comment la part de la dépense publique dans le PIB peut-elle, dès lors, passer de 56,4 % à 55,8 % ?

Enfin, pourquoi ne pas avoir intégré dans ce PLFR les articles concernant la fiscalité agricole ?

Mme Eva Sas. En tant que rapporteure spéciale de la mission Remboursements et dégrèvements, je me réjouis des mesures de mise en conformité avec le droit européen prévues aux articles 13 et 16, ce dernier concernant le régime des sociétés mères et filiales, car le risque de contentieux imposait d’agir. Je regrette en revanche que le comité consultatif pour le crédit d’impôt recherche ne soit, comme son nom l’indique, qu’une instance consultative devant se prononcer en cours de contrôle fiscal : cela ne correspond ni à l’objectif de sécurisation des PME, dont bon nombre s’inquiètent de savoir si leurs dépenses de recherche sont éligibles au crédit d’impôt, ni à celui de limitation des effets d’aubaine.

J’en viens à la budgétisation de la CSPE et à la fiscalité énergétique en général. La transition énergétique, monsieur Mariton, n’a pas pour but de remplacer les énergies fossiles par le nucléaire ! L’un des objectifs – que je croyais consensuel – de la contribution climat-énergie consistait à réaliser des économies d’énergie. De ce point de vue, nous comprenons certes les baisses de fiscalité énergétique dont bénéficient les entreprises électro-intensives, mais elles devraient être subordonnées à des plans d’économies d’énergie, car ces entreprises doivent, comme les autres, consentir des efforts en la matière. D’autre part, il faut inscrire la trajectoire de la contribution climat-énergie en loi de finances. Enfin, je note une fois de plus, pour m’en désoler, la diminution de 165 millions d’euros des crédits de la mission Écologie, en matière de prévention des risques notamment : comment l’expliquez-vous ?

M. Jean-François Lamour. Je me félicite du rétablissement de crédits budgétaires en lieu et place, d’une part, des recettes exceptionnelles qui devaient être liées à la vente de la bande de fréquences des 700 mégahertz – soit 2,14 milliards d’euros – et, d’autre part, pour couvrir le reliquat des dépenses engagées dans le cadre de la vente des deux bâtiments navals de projection et de commandement. Il nous faut toutefois demeurer vigilants sur plusieurs points, en particulier sur notre capacité à commander et à acheter les matériels. Quand le décret d’avance sera-t-il pris ? Le risque d’un nouveau report de charges existe en effet, alors même que les reports actuels atteignent déjà 3,4 milliards d’euros.

D’autre part, le dispositif des opérations intérieures (OPINT) – autrement dit, l’opération Sentinelle – sera-t-il soumis à la même ventilation financière que les opérations extérieures ? Le surcoût lié aux OPEX est de l’ordre de 610 millions, celui des OPINT d’environ 180 millions, soit près de 800 millions en tout. Si la ventilation est la même dans les deux cas, comment expliquer l’annulation de crédits de 190 millions d’euros alors que la part réservée à la défense n’est que de 160 millions environ ?

Mme Christine Pires Beaune. Compte tenu des chiffres du troisième trimestre, la croissance pour 2015 atteint déjà 1,1 % : cette bonne nouvelle permettra de rassurer le Haut Conseil des finances publiques, selon lequel l’hypothèse de 1 % était prudente. Les recettes fiscales sont conformes aux prévisions ; quant aux dépenses, je crois comprendre qu’elles sont inférieures au montant inscrit en loi de finances initiale.

Hier, l’Assemblée a adopté un amendement du Gouvernement sur la fiscalité locale permettant d’éteindre un incendie brutal que d’autres avaient allumé. Cette mesure se traduira-t-elle en fin d’année par un surplus de trésorerie pour les collectivités locales et, le cas échéant, de quel ordre sera-t-il ?

Je me réjouis d’autre part que l’article 20 confirme la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, même si elle est reportée d’une année, car ce vaste chantier est attendu depuis longtemps.

Enfin, qu’en sera-t-il de la dette et de la balance commerciale au 31 décembre ?

M. Jean Launay. En tant que rapporteur spécial du budget de la défense, je me félicite tout particulièrement de l’inscription, dans ce bon PLFR, d’un montant de 2,2 milliards d’euros, aussi bien en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement, pour l’équipement des forces armées – inscription qui représente plus de la moitié des crédits ouverts dans le présent projet de loi de finances et qui est conforme non seulement à l’arbitrage du Président de la République, chef des armées, mais aussi à l’approbation par une très large majorité de notre assemblée de l’actualisation de la loi de programmation militaire.

L’incertitude concernant les recettes exceptionnelles liées à la vente de la bande de fréquence des 700 mégahertz est donc levée, puisque des crédits budgétaires sont désormais prévus ; en outre, cette recette sera certainement perçue en 2016 pour un montant supérieur. L’équipement des forces était en souffrance et, compte tenu de notre engagement sur de nombreux fronts, il était impossible de tarder davantage pour budgétiser ces crédits et prendre un décret d’avance. Une dizaine de programmes pourront ainsi être lancés. Face aux menaces terroristes qui pèsent sur notre pays, il est important que les moyens de nos armées soient confirmés, car ils sont conformes à leur mission et à la confiance que nous plaçons en elles.

Un dernier mot sur la CSPE : je partage l’analyse du président Carrez et j’irai même plus loin. Un bon impôt, dit-on, a une base large et un taux faible ; cela vaut pour des contributions de ce type. Je regrette que la loi relative à la transition énergétique pour la croissante verte n’ait pas permis d’élargir l’assiette de la CSPE au fioul et au gaz, voire à l’eau : en tant que président du Comité national de l’eau, je crois en effet que cela aurait contribué à résoudre les problèmes des fonds sociaux destinés à remédier à l’incapacité de certaines personnes en difficulté à payer ces services.

Mme Karine Berger. Je me réjouis vivement de l’article 17 sur l’échange automatique d’informations financières, qui est une sorte d’équivalent européen du Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA) américain. Cet article transpose telle quelle la directive européenne ; sans doute des mesures réglementaires devront-elles donc être prises, notamment pour mettre en place les mécanismes de peer review auxquels l’OCDE tient beaucoup, et qui servent à comparer la remontée et l’échange d’informations entre pays. De ce point de vue, le ministre des finances peut-il d’ores et déjà nous apporter des précisions sur la déclinaison réglementaire de cet article ?

Plusieurs d’entre nous ont tenté de préserver les exonérations sociales applicables dans les ZRR par un amendement au dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Or, l’article 18 du présent projet proroge précisément ce dispositif, mais laisse entendre qu’il disparaîtra à compter de l’entrée en vigueur de la réforme des ZRR. Comment le Gouvernement envisage-t-il l’avenir des exonérations sociales dans les ZRR ?

Ma dernière question est de nature macro-économique. Dans le scénario du Haut Conseil des finances publiques pour 2015, l’investissement des administrations publiques diminuerait de 0,2 %, soit une quasi-stabilité. Or, l’acquis de croissance publié ce matin même indique que l’investissement public recule de 4 % en fin de troisième trimestre. Il lui faudrait donc bondir de 16 % au dernier trimestre pour compenser cette baisse : c’est irréaliste. Que pensez-vous, messieurs les ministres, de ces prévisions concernant l’investissement public en 2015 ?

M. Romain Colas. Je veux exprimer ma satisfaction devant les chiffres qui nous sont annoncés. Nous pouvons espérer une croissance de 1,1 % cette année, alors qu’en 2012, en 2013 et en 2014, elle s’élevait respectivement à 0,2 %, 0,7 % et 0,2 %. Vous le disiez ce matin même, monsieur le ministre : nous sortons d’un cycle de très faible croissance. Pour ma part, je ne puis m’empêcher d’y voir le résultat des politiques conduites avec constance depuis plus de trois ans.

Je comprends l’embarras de l’opposition pour commenter ces résultats, habituée qu’elle était, lorsqu’elle gouvernait, à un décalage perpétuel entre ses annonces et ses résultats. Elle est aujourd’hui contrainte de se livrer à un véritable exercice d’équilibre sémantique visant à atténuer la réalité. Mais, mes chers collègues, quelle que soit la manière dont vous cherchez à présenter les choses, le fait est que les déficits baissent comme les taux de prélèvements obligatoires – bien sûr, nous souhaiterions tous que ces baisses soient encore plus amples et plus rapides.

Mes questions concernent davantage l’exécution budgétaire que le collectif lui-même.

J’aimerais, messieurs les ministres, connaître le coût du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) en 2015, et savoir ce que vous attendez de ce dispositif pour l’exercice 2016.

Après plusieurs années d’excellents résultats en matière de lutte contre la fraude fiscale, quelles sont les performances enregistrées en 2015 par le STDR ?

Cette année, une centaine de milliards d’euros devaient être levés sur les marchés pour refinancer la dette contractée lors de la précédente législature : quel bilan tirez-vous de cette opération ? Quel est son impact sur le service de la dette et sur l’équilibre des finances publiques ?

Mme Marie-Christine Dalloz. L’article 24 porte sur l’adaptation des dispositions fiscales aux regroupements de communes. Je croyais pourtant que toutes les dispositions relatives à ce sujet, notamment aux communes nouvelles, avaient été adoptées dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2016 ! Pourquoi y revenons-nous ?

Le Gouvernement a été particulièrement inspiré, si je puis dire, avec l’article 21 : « Refonte de la taxe pour la création de bureaux et création d’une taxe additionnelle aux droits de mutation à titre onéreux sur les cessions de locaux à usage de bureaux en Île-de-France » !

Madame Berger, malgré les bonnes intentions qui ont présidé à la rédaction de l’article 17, nous ne sommes pas près, étant donné le faible taux de transposition des directives dans notre droit, de voir s’appliquer en France un FATCA européen !

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, vos annonces sont intéressantes : nous économisons 2 milliards d’euros sur les intérêts de la dette, nous gagnons 600 millions supplémentaires grâce à la fiscalité sur les ménages, et vous annoncez des dépenses en baisse. Pourtant le Haut Conseil des finances publiques considère que la réduction du déficit se fait a minima, et il note que « le respect de l’objectif d’équilibre structurel est encore lointain ». Une amélioration du solde structurel de 0,3 point en 2015, c’est bien, mais c’est un net ralentissement de l’effort par rapport aux années antérieures, 2011 compris.

Pour conclure, je me contente de noter que ce projet de loi de finances rectificative est totalement habillé de vert à la veille de la vingt-et-unième Conférence des états signataires de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP21). Je constate que notre pays risque de passer trois semaines un peu monocolores…

M. le président Gilles Carrez. J’ai signé ce matin, au nom de ma commune, la Charte de la COP21 !

M. le ministre. La Commission européenne rendra son avis mardi prochain. Il m’étonnerait que la France soit, comme l’année dernière et celles qui précédaient, dans une situation dite de « non-compliance ». Notre pays sera globalement « conforme », ce qui ne sera peut-être pas le cas de l’Espagne ou de l’Italie. La France est rentrée dans la catégorie des pays qui tiennent leurs engagements, et qui respectent les objectifs. Ce n’est sans doute pas une nouvelle absolument extraordinaire, mais c’est inhabituel : cela ne s’était pas produit depuis des années – et ce qui se produit en 2015 se reproduira en 2016 selon la Commission européenne.

Je note que les termes utilisés par le Haut Conseil des finances publiques dans son avis sont les plus élogieux qu’il ait employés depuis qu’il existe et qu’il donne des avis sur les textes budgétaires présentés par le Gouvernement. Pour le reste, il est dans son rôle quand il pointe les risques et les dangers pour l’avenir. Tous les observateurs objectifs ne peuvent que constater que les choses s’améliorent ; d’autres peuvent choisir de ne pas regarder la réalité en face.

Nous pourrions sans doute débattre très longuement des déficits structurels. Si les chiffres sont différents d’une institution à l’autre, c’est parce qu’il existe une grande diversité des modes de calcul. M. le président Gilles Carrez et moi-même sommes d’accord sur le fait que le déficit nominal est un chiffre incontestable. Nous respecterons notre engagement en termes de déficit nominal, et nous éviterons ainsi d’avoir à nous poser de façon trop précise la question de l’évolution du déficit structurel – qui n’est examiné par la Commission européenne que lorsque lorsqu’un État membre n’a pas respecté ses engagements en termes nominaux. Cela ne nous empêchera évidemment pas de poursuivre les réformes destinées à la maîtrise des dépenses.

Madame Dalloz, pourquoi voulez-vous à tout prix être désagréable ? L’article 17 transcrit une directive européenne qui est la conséquence d’un accord international majeur sur l’échange d’informations financières. Aucune autre disposition n’est introduite, et toute la directive est transcrite, à l’exception des mesures entrant en contradiction avec le dispositif de sécurisation des données mis en place par les banques en réponse aux exigences de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Les dispositions réglementaires sont en cours de rédaction et le décret d’application et une instruction seront publiés dans très peu de temps. Ce dispositif ne relève pas du plan de l’OCDE relatif à l’érosion des bases taxables et au transfert de bénéfices dit « BEPS », mais il contribue aux résultats du STDR et permet d’inscrire 2,6 milliards d’euros de recettes supplémentaires en 2015, et 2,3 milliards l’année prochaine. Il est donc efficace avant même d’être transcrit.

Nous sommes particulièrement attentifs aux questions de défense. Nous ne pouvons pas engager notre armée à l’extérieur et à l’intérieur du pays comme nous le faisons sans nous engager budgétairement. Nous avons travaillé sur les crédits avec le ministre de la défense pour faire en sorte que nos armées aient les moyens de faire face aux nouvelles menaces et aux nouvelles missions. Au-delà des OPEX, nous créons une ligne budgétaire particulière pour les OPINT afin de retracer les dépenses exceptionnelles occasionnées par les opérations exceptionnelles.

M. Jean-François Lamour. La ventilation est-elle identique pour les OPEX et les OPINT ?

M. le ministre. Oui. Je rappelle que l’exercice global de maîtrise des dépenses effectué en cette fin d’année amène la défense à consentir un effort de 200 millions d’euros – qui n’est pas pris sur les lignes OPEX ou OPINT, toutes deux en progression.

Madame Pires Beaune, en septembre 2015, le déficit de la balance commerciale s’élevait à 1,6 milliard d’euros ; elle est donc quasiment équilibrée. Je rappelle qu’en 2013, ce déficit s’élevait à 43 milliards d’euros. Nous pouvons constater un redressement exceptionnel qui s’explique aussi par l’évolution du cours de l’euro.

M. le secrétaire d’État. Monsieur le président, arrêtez de dire que nous respectons notre objectif de dépenses grâce aux économies réalisées sur les intérêts de la dette ! Il faut être sérieux et rigoureux, et vous êtes trop au fait de ces questions pour ne pas savoir que ces derniers sont exclus de la norme de dépenses. Certes, nous profitons de la baisse de la charge des intérêts, mais elle nous permet de faire mieux, notamment de parvenir à une réduction du déficit plus importante que celle que nous avions prévue en loi de finances initiale.

Par ailleurs, c’est bien parce que Bruxelles nous met en demeure de respecter le règlement général d’exemption par catégorie (RGEC) et que nous nous sommes engagés à le faire avant la fin de l’année que nous révisons le dispositif ISF-PME. Ce faisant, nous n’aurons à régler ni remboursements ni pénalités. Je rappelle que cette réforme consiste à recentrer le dispositif sur des entreprises de moins de sept ans après la première vente commerciale dont le chiffre d’affaires est inférieur à 250 000 euros et sur les entreprises plus anciennes qui ont un besoin d’investissement supérieur à 50 % de leur chiffre d’affaires. Tels sont les grands principes de cette réforme, qui est indispensable si nous ne voulons pas être, passez-moi l’expression, « rattrapés par la patrouille » bruxelloise.

À ceux d’entre vous qui s’interrogent sur la faiblesse de la réduction du déficit, je rappelle que l’État supporte intégralement les baisses d’impôts et de cotisations, dont certaines apparaissent dans le PLFSS. Ainsi, la baisse de 1,8 point des cotisations d’allocations familiales sur les salaires compris entre 1,6 et 3,5 fois le SMIC coûte 4,5 milliards d’euros, monsieur le président.

M. le président Gilles Carrez. Je parlais du déficit public global.

M. le secrétaire d’État. En ce qui concerne la CSPE, monsieur Mariton, sa « dette », comme vous dites, envers EDF, c’est-à-dire son déficit de compensation, apparaît clairement à la page 206 du « bleu » budgétaire : elle s’élève à 5,5 milliards d’euros. Il faut bien entendu veiller à ajuster les recettes aux dépenses : tel est l’objectif de notre réforme. Par ailleurs, je rappelle à Mme Sas, qui nous a interrogés sur les crédits de la mission Écologie, que la CSPE augmente de 1,2 milliard d’euros par an. Cela doit être pris en compte dans l’appréciation que l’on porte sur les dépenses de l’État en matière de fiscalité environnementale. Enfin, vous avez raison, monsieur Mariton : l’évolution envisagée consisterait à conserver le « stock » sur l’électricité et à élargir l’assiette, notamment aux carburants, sur le flux, à compter de 2017. Étendre l’assiette sur l’ensemble aurait été, en effet, un bouleversement trop brutal.

S’agissant du régime des sociétés mères et de leurs filiales, l’amendement vise à transcrire, à la lettre, dans notre droit le mécanisme anti-abus prévu par la directive européenne de 2015, à quoi s’ajoute une extension aux nus-propriétaires suite à un arrêt de la CJUE.

En ce qui concerne le CIR, un comité est créé afin de faciliter le dialogue entre l’administration et les entreprises, mais je vous rappelle qu’il existe aussi un dispositif de rescrit, que nous souhaitons du reste développer.

J’en viens à la fiscalité agricole. Nous examinerons avec bienveillance les amendements qui seront déposés pour faciliter la mise en œuvre de la déduction pour aléas (DPA) et assouplir les conditions de réintégration. Nous ferons également un certain nombre de propositions au sujet de la mise aux normes des bâtiments d’élevage. Par ailleurs, nous avons prévu de prélever 255 millions d’euros sur le FNGRA, en accord avec le ministère de l’agriculture. Ce fonds, consacré à l’indemnisation de dégâts liés notamment aux aléas climatiques, dispose en effet d’une trésorerie surabondante par rapport aux besoins.

Mme la Rapporteure générale. Il dit pourtant qu’il n’a pas d’argent !

M. le secrétaire d’État. Aucun de mes collègues ministres n’est venu me voir en me disant qu’il avait trop d’argent, madame la Rapporteure générale... Vous ne voterez pas la disposition : c’est votre choix et je le respecte. Mais le budget du ministère de l’agriculture a fait l’objet de nombreuses discussions, notamment sur la question du reversement des apurements agricoles, qui sont pris en charge de façon très solidaire. Des contreparties ont été discutées et le résultat de l’arbitrage est celui-là. Cependant, si des besoins supplémentaires apparaissaient, comme cela a pu arriver, nous procéderions à une adaptation.

Le coût de la mesure relative aux impôts locaux des personnes âgées s’élèvera, en régime permanent, à 400 millions d’euros, dont un tiers sera pris en charge, comme c’est déjà le cas, par les collectivités. Pour 2015, ces 400 millions d’euros ayant déjà été perçus par celles-ci, ils seront intégralement pris en charge par l’État. Nous réglerons cette question au cours du débat, car la mesure ne figure pas encore dans le PLFR. M. le président nous disait tout à l’heure que nous pourrions ramener le déficit à 3,7 % au lieu de 3,8 %. Nous souhaitons tenir notre trajectoire, mais nous pourrons, me semble-t-il, trouver les moyens nécessaires pour couvrir cette dépense. Je confirme qu’en termes de trésorerie, si l’on totalise 2015 et 2016, cela se traduira par un surplus de recettes pour les collectivités locales.

M. Lamour m’a interrogé sur la défense. Nous avons ouvert 3 milliards d’euros de crédits et nous en avons annulé 300 millions ; il reste donc 2,7 milliards, avec lesquels nous avons à couvrir 2,1 milliards d’euros liés au retard pris par les ventes de fréquences, 600 millions d’euros de dépenses supplémentaires pour les OPEX et 200 millions pour les OPINT. Les 200 millions manquants correspondent à la participation de la défense aux mesures nécessaires pour couvrir les dépassements.

Madame Dalloz, en ce qui concerne la fiscalité des communes nouvelles, les amendements au PLF ont été retirés au profit des dispositions du PLFR. Il n’y a donc aucune surprise dans ce domaine.

Monsieur Colas, le CITE aura coûté 900 millions d’euros en 2015 – c’est un démenti à ceux qui prétendaient que ce dispositif ne fonctionnait pas – et son montant devrait atteindre 1,4 milliard d’euros en 2016.

S’agissant des ZRR, la question des exonérations sociales a été traitée dans le PLFSS ; je n’y reviens pas. Aucune modification n’est prévue en ce qui concerne les exonérations fiscales. Le seul changement, à ma connaissance, porte sur le périmètre, qui sera revu en fonction de deux critères : la densité et la richesse. Le nombre des communes éligibles, qui est actuellement de 14 691, devrait ainsi baisser d’un millier environ.

Enfin, en ce qui concerne le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne, il n’y a ni malice ni difficulté, monsieur Mariton. Le montant est connu ; l’incertitude porte sur la date du vote. La Commission européenne ne sait pas si celui-ci interviendra avant ou après le 15 décembre, ce qui peut avoir une incidence sur la comptabilité budgétaire.

EXAMEN DES ARTICLES

Article liminaire
Prévision de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble
des administrations publiques pour l’année 2015

Aux termes de l’article 7 de la loi organique n° 2012–1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, l’article liminaire du projet de loi de finances rectificative présente un tableau de synthèse retraçant, pour l’année sur laquelle il porte, l’état des prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques.

SOLDES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES POUR 2015

(en points de PIB)

Soldes

Prévision d’exécution 2015

Solde structurel

– 1,7

Solde conjoncturel

– 2,0

Mesures exceptionnelles et temporaires

– 0,1

Solde effectif

– 3,8

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Les prévisions de soldes pour 2015 sont identiques à celles figurant dans l’article liminaire du projet de loi de finances pour 2016.

SOLDES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES POUR 2015
2014-2016

(en points de PIB)

Soldes

Exécution

2014

Prévision

d’exécution

2015

Prévision

2016

Solde structurel

– 2,0

– 1,7

– 1,2

Solde conjoncturel

– 1,9

– 2,0

– 1,9

Mesures exceptionnelles et temporaires

– 0,1

– 0,1

Solde effectif

– 3,9

– 3,8

– 3,3

Source : projet de loi de finances pour 2016.

I. LA PROGRAMMATION PLURIANNELLE DE RÉDUCTION DU DÉFICIT PUBLIC

Les objectifs de réduction du déficit fixés dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 et par le programme de stabilité sont les suivants :

TRAJECTOIRE DE SOLDE PUBLIC EFFECTIF

(en points de PIB)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

Loi de programmation des finances publiques 2014-2019

– 4,4

– 4,1

– 3,6

– 2,7

– 1,7

Programme de stabilité d’avril 2015

– 4,0

– 3,8

–3,3

– 2,7

– 1,9

Source : commission des finances.

La programmation pluriannuelle des finances publiques

Deux types de documents juridiques fixent un cadre pluriannuel pour les finances publiques et déterminent une trajectoire de réduction des déficits public et structurel.

En droit interne, les lois de programmation des finances publiques sont prévues par l’article 34 de la Constituions et « s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ». À ce titre, elles déterminent les trajectoires des soldes structurels et effectifs annuels. Leur contenu est précisé par la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

En droit européen, les programmes de stabilité ont été institués par le pacte de stabilité et de croissance du 7 juillet 1997 comme outil de la surveillance multilatérale des politiques économiques. Ils sont transmis chaque année au mois d’avril à la Commission européenne.

II. UN DÉFICIT PUBLIC NOMINAL RAMENÉ À 3,8 % DU PIB EN 2015

A. L’ÉVOLUTION DU DÉFICIT NOMINAL

1. Un déficit public moins important que prévu en loi de finances initiale

Le déficit public poursuit sa décrue. Le point le plus bas de solde effectif a été atteint en 2009, année qui a suivi la crise financière de 2008, avec un déficit de 7,2 % du PIB.

En 2011, le déficit public atteignait 5,1 % du PIB. En 2014, il a été ramené à 3,9 % du PIB. Ainsi, le déficit public aura reculé de 1,2 point de PIB sur l’ensemble des exercices 2012, 2013 et 2014.

DÉFICIT PUBLIC CONSTATÉ DEPUIS 2008

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

 

Déficit public nominal (en points de PIB)

– 3,2

– 7,2

– 6,8

– 5,1

– 4,8

– 4,1

– 3,9

Déficit public nominal (en milliards d’euros)

63,5

138,9

135,8

105,0

100,4

86,4

84,1

Source : INSEE.

 

Le présent article liminaire constate la poursuite de la réduction du déficit public avec un solde effectif qui sera ramené à – 3,8 % du PIB en 2015.

Ce niveau de déficit est moins important que celui qui avait été prévu par la loi de finances initiale pour 2015 (50), qui prévoyait, en effet, un déficit public de 4,1 %.

Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit une nouvelle baisse du déficit public. Il s’établirait ainsi à 3,3 % du PIB en 2016 soit un niveau proche de celui constaté en 2008.

2. Une prévision de déficit jugée « vraisemblable » par le Haut conseil des finances publiques

En application de l’article 15 de la loi organique du 17 décembre 2012 précitée, le Haut Conseil des finances publiques a rendu un avis sur les prévisions économiques retenues pour l’élaboration du projet de loi de finances rectificative (avis n° HCFP-2015-04 du 6 novembre 2015).

Dans son avis, le Haut Conseil aux finances publiques a estimé que, « compte tenu des informations dont il dispose », la prévision de déficit public de 3,8 % du PIB en 2015 était « vraisemblable ».

Cette appréciation est confortée par l’analyse des moyens mis en œuvre pour atteindre cet objectif.

B. LES MOYENS MIS EN œUVRE POUR ATTEINDRE L’OBJECTIF DE RÉDUCTION DU DÉFICIT NOMINAL À 3,8 % EN 2015

En 2014, le déficit public a été de 3,9 % du PIB, soit 84,1 milliards d’euros pour un PIB de 2 132,4 milliards d’euros.

DÉFICIT PUBLIC 2014

Agrégat

En milliards d’euros

En % du PIB

Dépenses des administrations publiques

1 226,7

57,5

Recettes des administrations publiques

1 142,6

53,6

Déficit des administrations publiques

84,1

3,9

Source : INSEE.

Selon le scénario de la loi de finances pour 2015 (51), le déficit nominal aurait dû progresser de 5,7 milliards d’euros, à raison d’une hausse des dépenses de 26,9 milliards d’euros et d’une hausse plus limitée des recettes de 20,4 milliards d’euros.

DÉFICIT PUBLIC 2015 SELON LE SCÉNARIO INITIAL DU GOUVERNEMENT (LFI 2015)

Solde

En milliards d’euros

En % du PIB

Dépenses des administrations publiques y compris crédits d’impôts

1 253,6

57,5

Recettes des administrations publiques (brutes des crédits d’impôts)

1 163,8

53,4

Déficit des administrations publiques

89,8

4,1

Source : ministère des finances et des comptes publics, direction générale du Trésor.

Le scénario actualisé sur lequel repose le présent projet de loi de finances rectificative pour 2015 prévoit un déficit de seulement 82 milliards, soit une baisse de 2,1 milliards d’euros par rapport à 2014.

DÉFICIT PUBLIC 2015 SELON LE SCÉNARIO ACTUEL DU GOUVERNEMENT (PLFR 2015)

Solde

En milliards d’euros

En % du PIB

Dépenses des administrations publiques y compris crédits d’impôts

1 245,8

57,3 %

Recettes des administrations publiques (brutes des crédits d’impôts)

1 163,7

53,4 %

Déficit des administrations publiques

82,0

3,8 %

Source : ministère des finances et des comptes publics, direction générale du Trésor.

La différence entre les deux scénarios repose uniquement sur l’effort en dépenses : par rapport à 2014, elles n’augmentent, en effet, que de 19,1 milliards d’euros, soit une progression inférieure de près de 8 milliards à celle qui était initialement prévue.

La bonne tenue des dépenses a, ainsi, permis d’atteindre l’objectif de réduction du déficit public à 3,8 % du PIB.

III. UN AJUSTEMENT STRUCTUREL DE 0,3 POINT DU PIB EN 2015

A. LA NOTION DE DÉFICIT STRUCTUREL

Pour assurer un pilotage plus fin des finances publiques dans un contexte de crise, la Commission européenne a adopté en 2005 la notion de « déficit structurel » (« l’effort structurel » correspondant à la réduction du déficit structurel), permettant de considérer le déficit nominal comme la somme de deux composantes : le déficit conjoncturel et le déficit structurel.

Le déficit conjoncturel est le déficit qui provient de la conjoncture, et en l’occurrence à la crise économique et financière qui a touché le continent européen depuis 2007.

Le déficit structurel est le déficit qu’afficherait notre pays si sa croissance était égale à celle qui serait obtenue en mobilisant à 100 % tous les facteurs de production et toutes les possibilités de création économique dont dispose la France à l’instant T. Cette croissance est appelée « croissance potentielle ». Dès lors, le niveau de déficit structurel dépend du niveau de croissance potentielle : plus la croissance potentielle est élevée, plus le déficit structurel est faible.

Introduire la notion de déficit structurel permet de comprendre « où le pays se situe dans le cycle économique » : si le déficit public provient majoritairement de sa composante conjoncturelle, il devrait être résorbé une fois la conjoncture économique rétablie. Si, au contraire, il provient essentiellement de sa composante structurelle, ceci signifie que la réduction du déficit ne pourra être obtenue que via des « réformes structurelles », c’est-à-dire celles qui permettent de mobiliser toutes les potentialités non utilisées du pays, afin de créer de la richesse qui permettra de résoudre le déficit.

Le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance prévoit, depuis 2005 (52), un effort structurel de 0,5 % du PIB par an, tant que l’État membre n’a pas atteint son objectif budgétaire de moyen terme, qui lui-même doit être fixé entre
– 0,5 % de PIB et l’excédent structurel selon les règles du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG).

B. LA DÉTERMINATION DU NIVEAU DE CROISSANCE POTENTIELLE

La « croissance potentielle » étant, par définition, un indicateur non observable, la détermination de son niveau peut bien entendu donner lieu à débat.

Dans le présent projet de loi de finances rectificative pour 2015, le Gouvernement n’a pas modifié son hypothèse de croissance potentielle pour 2015 par rapport à celle qui avait été retenue dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019. La croissance potentielle est ainsi estimée à 1,1 % du PIB.

En revanche, dans le projet de loi de finances pour 2016, le Gouvernement a retenu comme hypothèse de croissance potentielle celle qu’il avait adoptée à l’occasion de la transmission du programme de stabilité à la Commission européenne le 15 avril 2015. La croissance potentielle pour 2016 a, ainsi, été évaluée à 1,5 % au lieu de 1,3 % du PIB dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (53).

Ce niveau de croissance potentielle :

– est en ligne avec le vote de notre commission lors de sa séance du 18 juin 2014 via un amendement au projet de loi de finances rectificative pour 2014, vote confirmé par l’Assemblée nationale le 23 juin 2014 ; toutefois, l’article liminaire avait été rétabli dans sa version initiale par amendement du Gouvernement adopté en nouvelle lecture lors de la séance du 15 juillet 2014 ;

– est supérieur à celui retenu par la Commission européenne comme l’illustre le graphique ci-dessous, qui montre le niveau de croissance potentielle estimé pour la France par la Commission européenne, ainsi que ses différentes réévaluations ;

ÉVOLUTION DE LA CROISSANCE POTENTIELLE SELON LA COMMISSION EUROPÉENNE

(en % du PIB)

Source : Commission européenne : prévisions économiques d’hiver 2013, 2014 et 2015 ; prévisions économiques de printemps 2013 et 2014.

– ne fait pas l’objet d’un avis par le Haut Conseil des finances publiques, qui ne se prononce pas sur cet indicateur qui est par définition non observable. Toutefois, le Haut Conseil des finances publiques a émis des réserves sur cette révision de la croissance potentielle dans le programme de stabilité au motif qu’elle « ne permet pas de suivre convenablement l’évolution de la composante structurelle du déficit » (avis n° 2015-03 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2016).

Évaluer la pertinence du niveau de croissance potentielle retenu peut consister à analyser l’écart entre ce niveau et la croissance réalisée.

Selon le rapport annexé à la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, la croissance effective a décroché de 5 points de PIB par rapport à la croissance potentielle au cours des années 2008 et 2009.

En 2010 et 2011, avec une croissance effective en volume de 2 % et 2,1 %, la croissance effective a été supérieure à la croissance potentielle, évaluée par la même loi à 1,7 % sur la période. Depuis 2012, la croissance effective est inférieure à la croissance potentielle (0,2 % en 2012, 0,7 % en 2013, 0,2 % en 2014) alors que la croissance potentielle avait été évaluée entre 1,4 et 1,5 % sur la période par la loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

C. L’ÉCART DE PRODUCTION

L’écart de production est la différence entre le PIB potentiel et le PIB effectif. Il permet de calculer la composante structurelle du déficit public. Plus l’écart de production est élevé, plus la composante structurelle du déficit est importante.

Dans son avis, le Haut Conseil aux finances publiques met en doute « la persistance d’un écart de production aussi marquée ».

HYPOTHÈSES D’ÉCART DE PRODUCTION DE LA LOI DE PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES POUR LES ANNÉES 2014 À 2019

(en point de PIB)

Année

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Produit intérieur brut

0,3

0,4

1,0

1,7

1,9

2,0

Croissance potentielle

1,0

1,0

1,1

1,3

1,3

1,2

Écart de production (en % du PIB potentiel)

– 2,7

– 3,3

– 3,4

– 3,1

– 2,5

– 1,7

Source : loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

HYPOTHÈSES D’ÉCART DE PRODUCTION DU PROGRAMME DE STABILITÉ

(en point de PIB)

Année

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Produit intérieur brut

0,3

0,4

1,0

1,5

1,5

1,7

Croissance potentielle

1,0

1,0

1,1

1,5

1,5

1,4

Écart de production (en % du PIB potentiel)

– 2,7

– 3,3

– 3,5

– 3,5

– 3,5

– 3,2

Source : loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

Selon le Haut Conseil, le déficit structurel (1,7 % du PIB pour 2015) calculé par le Gouvernement dans l’article liminaire est inférieur à celui estimé par la Commission européenne (2,7 %) et le FMI (2,1 %).

« Cette différence s’explique par un écart de production négatif (écart entre la production effective et la production potentielle) plus creusé dans la prévision du Gouvernement qui correspondrait à une capacité de rattrapage importante de l’économie française. » (avis n° HCFP-2015-04 relatif au projet de loi de finances rectificative pour 2015, 6 novembre 2015).

D. LA TRAJECTOIRE DE DEFICIT STRUCTUREL

En application de l’article 15 de la loi organique précitée, le Haut Conseil des finances publiques a également rendu un avis sur la cohérence, avec les orientations pluriannuelles de solde structurel, de l’article liminaire du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Dans son avis du 6 novembre 2015, il a souligné le ralentissement de la réduction du déficit structurel :

« Le Haut Conseil constate que le déficit structurel (– 1,7 % du PIB) serait inférieur de 0,3 point à celui prévu dans la loi de programmation, reconduisant l’écart constaté en 2014.

« Le Haut Conseil note que l’amélioration du solde structurel serait limitée à 0,3 point de PIB en 2015, en net ralentissement par rapport aux années antérieures (amélioration de 1 point de PIB par an en moyenne entre 2011 et 2013 et de 0,6 point de PIIB en 2014), alors que le respect de l’objectif d’équilibre structurel est encore lointain. »

La trajectoire de solde structurel est, toutefois, en avance sur les objectifs de la loi de programmation. Elle est aussi conforme pour 2014, et à 0,1 point de PIB près pour les années 2015 et 2016, à la trajectoire établie dans le programme de stabilité.

TRAJECTOIRE DE SOLDE STRUCTUREL

(en points de PIB)

Fondement

2014

2015

2016

Article liminaire du projet de loi de finances pour 2016

– 2,0

– 1,7

– 1,2

Loi de programmation des finances publiques du 29 décembre 2014

– 2,4

– 2,1

– 1,8

Programme de stabilité d’avril 2015

– 2,0

– 1,6

– 1,1

Source : données gouvernementales.

Le déficit structurel pour 2015 (1,7 % du PIB) serait ainsi nettement inférieur à l’objectif de 2,1 % fixé dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

Par ailleurs, l’ajustement structurel devrait à nouveau progresser en 2016 pour s’établir à 0,5 % du PIB, conformément aux préconisations du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance.

*

* *

La commission est saisie de l’amendement CF 49 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Il s’agit d’un amendement traditionnel, qui vise à inscrire dans le tableau le solde structurel sans le distinguer du solde conjoncturel, qui n’a plus de sens dans le contexte de crise actuel. Je vous fais cependant observer que M. Pierre Moscovici nous a apporté tout à l’heure un élément nouveau, puisqu’il a indiqué que la Commission européenne estimait le taux de croissance potentiel de la France entre 0,8 % et 1 %.

M. Alain Fauré. C’est faux, ce sera davantage…

M. Charles de Courson. C’est peut-être faux, mais c’est ce qu’il a dit ! Vous prenez vos souhaits pour des réalités… En tout cas, c’est une vraie question.

Mme la Rapporteure générale. M. Moscovici vous a répondu sur ce point. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement CF 49.

La commission adopte l’article liminaire sans modification.

*

* *

PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

Avant l’article 1er 

La commission est saisie d’un amendement CF 174 de M. Christophe Bouillon.

M. Christophe Bouillon. Cet amendement vise à introduire un mécanisme correcteur permettant aux opérateurs économiques soumis à l’obligation de détenir des stocks stratégiques, notamment énergétiques, en France, d’imputer sur leurs résultats futurs les pertes liées aux fluctuations des cours internationaux de référence.

M. le président Gilles Carrez. Autre amendement très connu…

Mme la Rapporteure générale. Cet amendement vise à compenser les baisses de valeurs que subissent les produits pétroliers, mais je considère que la gestion de ces fluctuations de prix fait partie du fonctionnement de ces entreprises. Lorsque le prix du baril est à 140 dollars, personne ne vient demander un soutien… Avis défavorable.

M. le président Gilles Carrez. Les rapporteurs généraux successifs ont toujours donné un avis défavorable à ce type d’amendement.

La commission rejette cet amendement CF 174.

Elle en vient à l’amendement CF 52 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Marronnier !

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette cet amendement CF 52.

*

* *

Article 1er
Compensation des transferts de compétences aux régions
et aux départements sous la forme d’une part du produit
de la taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE)

Le présent article propose des ajustements des fractions de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) attribuées aux départements et aux régions pour le financement des charges liées à des compétences transférées par l’État. Il s’agit des charges résultant du transfert :

– de l’aide sociale à destination des personnes âgées et handicapées au département de Mayotte ;

– de la formation des infirmiers aux régions ;

– de compétences prévu par la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale aux régions (54) ;

– définitifs des services et parties de services chargés de la gestion des programmes européens aux régions ;

– de la prime à l’apprentissage pour les contrats d’apprentissage signés avant le 1er janvier 2014.

Conformément au II de l’article 119 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (55), ainsi que – pour les fonds européens – à l’article 91 de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (56), « la compensation financière des transferts de compétences s’opère, à titre principal, par l’attribution d’impositions de toute nature, dans des conditions fixées par la loi de finances ». Le présent article poursuit le transfert d’une imposition de toute nature aux régions. L’objectif constitutionnel d’autonomie financière inscrit à l’article 72-2 de la Constitution qui dispose que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l’ensemble de leurs ressources ».

Les principes de la compensation financière des transferts de compétences

La compensation financière doit se conformer à cinq principes définis aux articles L. 1614-1 à L. 1614-7 et L. 4332-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

La compensation doit être :

– intégrale (article L. 1614-1), les ressources transférées devant être équivalentes aux dépenses directes et indirectes précédemment réalisées par l’État au titre des mêmes compétences ;

– concomitante (article L. 1614-1) et garantie dans le temps (article L. 1614-1-1), les transferts de ressources devant s’effectuer au même rythme que les transferts de compétences ;

– contrôlée (articles L. 1614-3 et L. 1614-3-1), l’accroissement de charges résultant des transferts étant défini par arrêté interministériel après avis de la commission consultative sur l’évaluation des charges (CCEC), qui constitue une formation restreinte du Comité des finances locales (CFL) ;

– conforme à l’objectif d’autonomie financière (articles L. 1614-4 et L. 1614-5) inscrit à l’article 72-2 de la Constitution. La loi organique du 25 juillet 2004 relative à l’autonomie financière des collectivités territoriales dispose que la part des ressources propres dans les ressources de chaque catégorie de collectivités territoriales ne peut être inférieure au niveau constaté en 2003.

En outre, la compensation doit satisfaire le principe d’une répartition équilibrée des crédits en fonction des besoins territoriaux (article L. 4332-1 du CGCT).

La révision à la hausse du montant de compensation à verser aux régions est neutre pour le solde des administrations publiques, mais représente en 2015 :

− pour l’État une perte de recettes de 42,3 millions d’euros ;

− et un gain équivalent pour les régions.

RÉPARTITION DES MONTANTS DE TICPE PRÉVUE PAR LE PRÉSENT ARTICLE

(en millions d’euros)

§ de l’article 1er

Transfert de compétences à financer

Montant
(en millions d’euros)

Collectivités concernées

Base légale

I

RSA socle

Aucune incidence financière

Départements

Loi du 18 décembre 2003 RMI RMA

Art. 59 LFI 2004

II

Aide sociale à destination des personnes âgées et handicapées

0,045

Mayotte

Ordonnance n° 2012-785

Art. 44 LFI 2014

III

Réforme de la formation des infirmiers

Hors ROM

1,7

Régions

Loi LRL du 13 août 2004

Arrêté du 31 juillet 2009

III

Formation professionnelle

5,2

Régions

Art. 27 de la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle

Art. 25 LFI 2015

Décret 2015-672

III

Institut technique européen des métiers de la musique (ITEMM du Mans)

0,3

Région Pays de la Loire

Art. 13 de la loi du 5 mars 2014 précitée

III

Total du III

7,2

Régions

 

IV et VI

Réforme du diplôme d’État d’infirmier

Hors ROM

Rattrapage 2010-2014 : 8,5

Régions

Loi LRL du 13 août 2004

Arrêté du 31 juillet 2009

V et VI

Services chargés de la gestion des programmes européens

3,5

Régions

Loi MAPTAM du 27 janvier 2014

Décret n° 2015-783

VI

Total du VI, pour les IV et V

12

Régions

 

VII

Prime à l’apprentissage

23

Régions

Art. 140 LFI 2014

Art. 40 LFI 2014

Art. 1er

Total

42,3

   

RSA : revenu de solidarité active.

RMI-RMA : revenu minimum d’insertion-revenu minimum d’activité.

LRL : Loi relative aux libertés et responsabilités locales.

LFI : loi de finances initiale.

ROM : region d’outre-mer.

MAPTAM : loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

La TICPE représente un tiers de la fiscalité transférée aux collectivités territoriales.

AFFECTATION DE TICPE SELON LES DIFFÉRENTS BÉNÉFICIAIRES

(en millions d’euros)

Bénéficiaires

2013

(exécution)

2014

(exécution)

2015

(prévision)

2016

(prévision)

État

13 759

13 225

13 905

15 595

Régions

3 850

4 276

4 768

4 823

Régions part Grenelle

517

587

527

527

Départements

6 522

6 536

6 546

6 548

AFITF

1 139

715

Total

24 648

24 624

26 885

28 208

AFITF : Agence de financement des infrastructures de transport de France.

Source : Voies et moyens, tome 1, annexe au projet de loi de finances pour 2016.

MONTANTS DE TICPE TRANSFÉRÉS AUX DÉPARTEMENTS ET AUX RÉGIONS

(en millions d’euros)

Collectivité

Catégorie de compensation

2013

(exécution)

2014

(exécution)

2015

(prévision)

2016

(prévision)

TICPE Régions

Total

3 202

3 651

3 913

4 189

Acte II décentralisation

3 202

3 233

3 213

3 437

Prime d’apprentissage

118

256

233

Réforme du financement de l’apprentissage

146

148

Réforme de la formation professionnelle

300

298

305

Prime au recrutement d’un apprenti supplémentaire

60

TICPE Départements

Total

6 516

6 587

6 526

6 569

RMI RSA

5 853

5 908

5 861

5 881

Acte II décentralisation hors RSA

654

659

655

671

Mayotte départementalisation

9

20

10

17

Source : Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales, annexe au projet de loi de finances pour 2016.

I. LE RSA SOCLE

A. L’ÉTAT DU DROIT

La loi du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d’insertion et créant un revenu minimum d’activité (57) a décentralisé, aux départements, le revenu minimum d’insertion (RMI) et attribué les ressources équivalentes au montant des dépenses exécutées par l’État en 2003 au titre de l’allocation de revenu minimum d’insertion et de l’allocation de revenu de solidarité et au montant des dépenses exécutées par les départements en 2004 au titre de l’allocation de revenu minimum d’activité.

La loi du 18 décembre 2003 précitée prévoit que les charges résultant, pour les départements, des transferts et création de compétences réalisés par la présente loi sont compensées par l’attribution de ressources constituées d’une partie du produit d’un impôt perçu par l’État dans les conditions fixées par la loi de finances.

À ce titre, l’article 59 de loi de finances pour 2004 (58) prévoit la répartition d’une part du produit de la TICPE aux départements au titre des charges transférées par l’État en matière de RMI devenu RSA socle.

B. LE PROBLÈME POSÉ

L’article 26 de la loi de finances pour 2015 (59) est venu tirer les conséquences de la création de la métropole de Lyon par la loi MAPTAM du 27 janvier 2014 précitée (60) a modifié le tableau de l’article 59 de la loi de finances pour 2004 afin d’inscrire la clé de répartition applicable à la part du produit de la TICPE reçue auparavant par le département du Rhône pour le calcul du droit à compensation de la métropole de Lyon et du nouveau département du Rhône.

Cette modification a entraîné une erreur matérielle sans remettre en cause le droit à compensation des départements.

C. LA MODIFICATION PROPOSÉE

Le I du présent article (alinéas 1et 2) vise à corriger cette erreur. Il met à jour le tableau de répartition de la fraction de TICPE affectée aux départements pour le financement du RSA socle par l’article 59 de la loi de finances pour 2004.

Cette mise à jour ne modifie pas le montant de la compensation des départements et est, selon l’évaluation préalable, sans incidence financière.

D. LE FINANCEMENT DU RSA PÈSE DE PLUS EN PLUS LOURD SUR LES FINANCES DES DÉPARTEMENTS

Dans son rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités territoriales et de leurs établissements publics publié en octobre 2015 (61), la Cour des comptes souligne que les dépenses liées au RSA ont augmenté de 9,2 % en 2014. Cette hausse s’explique à la fois par un accroissement de 5,76 % du nombre de foyers bénéficiaires et par la double revalorisation de l’allocation de 1,3 % au 1er janvier 2014 et de 2 % au 1er septembre 2014.

Une étude de l’Observatoire national de l’action sociale (ODAS) (62) parue en juin 2015 présente l’évolution du taux de couverture des allocations AIS par les abondements de l’État entre 2009 et 2014.

TAUX DE COUVERTURE DES ALLOCATIONS RSA PAR LES ABONDEMENTS DE L’ÉTAT

(en France métropolitaine, en millions d’euros)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Évolution
2013-2014

Dépense nette d’allocation

5 720

6 590

6 840

7 150

7 850

8 570

9,2 %

Concours TICPE-FMDI

5 170

5 580

5 720

5 700

5 600

5 630

0,5 %

Taux de couverture

90,4 %

84,7 %

83,6 %

79,7 %

71,3 %

65,7 %

– 7,9 %

Charge nette d’allocation

550

1 010

1 120

1 450

2 250

2 940

30,7 %

TICPE-FMDI : taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques-fonds de mobilisation départementale pour l’insertion

Source : Observatoire national de l’action sociale (ODAS).

Alors que la contribution des départements au redressement des finances publiques (CRFP) dans le cadre du pacte de confiance et de responsabilité s’est élevée à 476 millions d’euros en 2014 et 1,148 milliard d’euros en 2015, deux nouvelles ressources leur ont été transférées afin de compenser une partie du déficit de financement des allocations individuelles de solidarité (AIS) : les frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties des départements, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), à hauteur de 827 millions d’euros en 2014, ainsi que le produit résultant de la possibilité de relever les taux plafonds des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de 3,8 à 4,5 %. Quatre-vingt-dix départements ont fait le choix d’augmenter ce taux dès 2014, pour un produit supplémentaire évalué à 700 millions d’euros.

En 2014, les dépenses des départements liées au financement du RSA ont atteint 9,7 milliards d’euros, compensées par l’État à hauteur de 6,4 milliards, soit un reste à charge de 3,3 milliards pour les départements. En 2015, le reste à charge devrait atteindre 4 milliards d’euros, selon l’Association des départements de France (ADF).

Lors du congrès de l’ADF le 15 octobre 2015, la ministre chargée de la décentralisation, Mme Marylise Lebranchu, a annoncé une aide d’urgence pour une dizaine de départements, attribuée en fonction des difficultés rencontrées et du niveau du reste à charge, mais aussi des « efforts de gestion » réalisés ces dernières années par les départements. Les modalités de cette aide devraient être prévues par un amendement au présent projet de loi de finances rectificative.

Un groupe de travail du Gouvernement et des départements doit poursuivre ses travaux sur la question d’une recentralisation du RSA, jusque début 2016.

II. L’AIDE SOCIALE À DESTINATION DES PERSONNES ÂGÉES ET HANDICAPÉES À MAYOTTE

A. L’ÉTAT DU DROIT

L’article 39 de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 (63) a mis en place un dispositif de transfert d’une part de TICPE destiné à compenser les charges résultant pour le département de Mayotte de la mise en œuvre du RSA dans ce territoire à compter du 1er janvier 2012, comparable au dispositif de compensation des charges liées au RMI et au RSA mis en place pour les autres départements.

L’article 44 de la loi du 30 décembre 2013 de finances pour 2014 (64) a étendu ce dispositif à la compensation de deux nouvelles créations de compétences : l’aide sociale à destination des personnes âgées et handicapées et le financement de la formation des assistants maternels.

B. LA MODIFICATION PROPOSÉE

De nouvelles données ont permis d’actualiser la compensation provisionnelle due au titre du transfert de la compétence relative à l’aide sociale à destination des personnes âgées et handicapées.

Non pérenne, l’ajustement au titre de 2014 et 2015 du montant du financement de l’aide sociale obligatoire à destination des personnes âgées et handicapées est évalué, de manière définitive, en tenant compte du nombre de bénéficiaires des allocations d’aide sociale facultative pour personnes âgées et personnes handicapées servies par le département de Mayotte en 2013 (2 273 bénéficiaires), du montant moyen annuel des dépenses d’aide sociale obligatoire par habitant, hors dépenses d’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de prestation de compensation du handicap (PCH), constaté en 2013 dans les quatre autres départements d’outre-mer (975 euros/an, contre 953 euros/an en 2012) et de la proportion de ces dépenses revenant aux personnes âgées et aux personnes handicapées à La Réunion, soit respectivement 4,1 % et 8,5 %.

De 256 787 euros ont été versés en 2015 à ce titre. Un ajustement non pérenne de 45 082 euros doit être mis en œuvre en 2015 au titre de 2014 et 2015.

C’est l’objet du II du présent article (alinéa 3).

III. LA RÉFORME DE LA FORMATION DES INFIRMIERS

A. L’ÉTAT DU DROIT

La loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle précitée constitue le dernier acte de décentralisation de compétences en matière de formation professionnelle aux régions. L’attribution des ressources équivalentes aux collectivités territoriales a été effectuée par l’article 25 de la loi de finances pour 2015 (65). Cet article a modifié l’article 40 de la loi de finances pour 2006 (66). Les modalités d’évaluation du droit à compensation sont définies dans le décret n° 2015-672 du 15 juin 2015 (67).

B. LA MESURE PROPOSÉE

Le présent article ajuste la compensation des charges résultant pour cet exercice de la modification par l’État, par voie réglementaire, des règles relatives au diplôme d’État d’infirmier, dans la mesure où ces réformes modifient l’exercice par les régions de la compétence, transférée par l’article 73 de loi du 13 août 2004 précitée, relative au financement du fonctionnement et de l’équipement des écoles et instituts de formation des sages-femmes et des professionnels paramédicaux.

Le montant de compensation de la réforme du diplôme d’État d’infirmier, fixé à 13,8 millions d’euros en année pleine, était contesté par les élus locaux, les régions prenant en charge les demandeurs d’emplois en formation paramédicale sans que l’État compense cette charge au motif qu’ils relevaient d’un financement facultatif des régions. Afin toutefois de clarifier la situation de ces publics spécifiques, une enquête conjointe État-régions a été menée. Elle a révélé l’existence de 3 087 demandeurs d’emploi qui étaient en réalité des étudiants poursuivant leurs études dans le cadre de leur formation initiale.

Sur cette nouvelle base, le montant du droit à compensation en base, à compter de 2013, a été réévalué à hauteur de 15,6 millions d’euros. La fraction de TICPE est donc ajustée de façon pérenne de 1,7 million d’euros, hors régions d’outre-mer (ROM), par le III du présent article (alinéas 4 et 5) tandis qu’un rattrapage est effectué pour les années 2010-2014 à hauteur de 8,5 millions d’euros (hors ROM) par le présent article. Le IV (alinéa 6) détermine ce montant, tandis que le VI (alinéas 8 et 9) répartit le produit de TICPE correspondant entre les régions.

IV. LA FORMATION PROFESSIONNELLE

A. L’ÉTAT DU DROIT

La loi du 5 mars 2014 précitée constitue le dernier acte de décentralisation de compétences en matière de formation professionnelle aux conseils régionaux. Il a porté sur :

– le transfert des centres de formation des apprentis (CFA) nationaux ;

– la prévention et la lutte contre l’illettrisme, l’organisation des formations relatives au socle de connaissances et de compétences, la formation professionnelle des détenus et des Français établis hors de France, l’accompagnement des candidats à la validation des acquis de l’expérience (VAE), les actions de sensibilisation et de promotion de la VAE, l’organisation du réseau des centres et points d’information et de conseil sur la VAE, le financement de la part précédemment à la charge de l’État de la rémunération de différents publics stagiaires de la formation professionnelle (travailleurs handicapés, apprentis en rupture de contrat, personnes détenues et Français établis hors de France).

L’attribution des ressources équivalentes aux collectivités territoriales a été effectuée en dernier lieu par l’article 25 de la loi de finances pour 2015, qui a modifié l’article 40 de la loi de finances pour 2006. Les modalités d’évaluation du droit à compensation sont définies dans le décret du 15 juin 2015 précité.

Cette compensation s’est élevée à 206,85 millions d’euros. Elle équivaut à la moyenne des dépenses actualisées constatées au cours des exercices 2011, 2012 et 2013.

B. LA MODIFICATION PROPOSÉE

En application de l’article 27 de la loi de finances pour 2015, ce droit à compensation provisionnel doit être établi au regard de la dépense exécutée sur la période 2012 à 2014, le transfert des compétences étant effectif à compter du 1er janvier 2015. En outre, la dotation inscrite n’intègre pas l’exhaustivité de la dépense exécutée par la région Poitou-Charentes. Il convient donc d’ajuster la compensation provisionnelle, ce à quoi procède le III du présent article (alinéas 4 et 5).

À l’issue de cet ajustement de l’ordre de 5,2 millions d’euros, le droit à compensation est évalué à 212 millions d’euros.

V. LES SERVICES CHARGÉS DE LA GESTION DES FONDS EUROPÉENS

A. L’ÉTAT DU DROIT

En application de la loi MAPTAM du 27 janvier 2014 et du décret du 29 juin 2015 relatif aux dates et aux modalités de transfert définitif des services ou parties de services de l’État qui participent aux missions de l’autorité de gestion des programmes européens (68), les régions ont bénéficié de la première vague de transfert des services à compter du 1er juillet 2015. Ces transferts s’accompagnent notamment de la compensation financière des coûts de fonctionnement attachés à ces personnels et des emplois devenus vacants.

B. LA MODIFICATION PROPOSÉE

La compensation financière est calculée conformément aux dispositions de la loi MAPTAM précitée et aux principes retenus par la commission consultative sur l’évaluation des charges (CCEC).

Les personnels dont la rémunération était en partie financée par l’État avec les crédits de l’assistance technique sont transférés avec ces crédits : les dépenses effectuées par l’État en tant qu’autorité de gestion des fonds européens s’entendent donc nettes des crédits de l’assistance technique. Les personnels ayant exercé leur droit d’option (intégration ou maintien en détachement) sont compensés au coût réel. La compensation financière des fractions d’emplois ou devenus vacants est quant à elle effectuée sur la base du coût en début de carrière.

Le IV (alinéa 6) détermine le montant de la compensation, fixé à 3,5 millions d’euros, tandis que le VI (alinéas 8 et 9) répartit le produit de TICPE correspondant entre les régions.

VI. LA PRIME À L’APPRENTISSAGE

A. LE DROIT PROPOSÉ

L’article L. 6243-1-1 du code du travail qui prévoit que la conclusion d’un contrat d’apprentissage dans une entreprise de moins de deux cent cinquante salariés ouvre droit à une aide de 1 000 euros à l’issue de la période d’essai de l’apprenti, dès lors que l’entreprise justifie à la date de conclusion du contrat soit de ne pas avoir employé d’apprentis depuis le 1er janvier de l’année précédente, soit d’employer au moins un autre apprenti dont le contrat est toujours en cours pendant la période d’essai.

Elle se substitue à l’indemnité compensatrice forfaitaire (ICF). Elle est versée par la région aux employeurs d’apprentis de moins de onze salariés suivant des modalités qu’elle définit, en respectant un plancher de 1 000 euros par année du contrat. Une période transitoire a été mise en place pour les contrats d’apprentissage signés avant le 1er janvier 2014. La prime à l’apprentissage est donc désormais ciblée sur ces entreprises pour lesquelles cette aide constitue un véritable effet levier pour l’embauche d’apprentis.

Cette prime est compensée aux régions sous la forme de crédits budgétaires issus du programme 103 Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi sur la mission Travail et emploi et d’une fraction TICPE. Les nouvelles primes d’apprentissage ont été financées en contrepartie d’un recentrage du crédit d’impôt apprentissage sur les niveaux de qualification les plus bas (jusqu’à bac + 2) pour un montant équivalent et sont compensées aux régions sous la forme d’une affectation de TICPE de l’ordre de 260 millions d’euros (elles ne s’imputent donc plus sur le budget de l’emploi).

À compter du 1er janvier 2016, elle sera compensée exclusivement par une fraction de TICPE.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 103

(en millions d’euros)

2012

2013

2014

2015

801

801

463

279

Source : rapports annuels de performances 2012, 2013, 2014, projet de loi de finances pour 2015.

Le montant de cette compensation est déterminé en fonction des effectifs d’apprentis ayant conclu un contrat d’apprentissage dans les établissements de la région avant le 1er janvier 2014. Ce montant transitoire a donc vocation a s’éteindre après 2016.

Jusqu’alors, la compensation aux régions prenait la forme d’une dotation budgétaire versée par l’État et d’une part des produits de la TICPE.

Le VII du présent article (alinéas 10 à 16) vient minorer également les recettes de TICPE à hauteur de 23 millions d’euros dans le cadre de la compensation de la prime d’apprentissage due aux régions.

ÉVOLUTION DU FINANCEMENT DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET DE L’APPRENTISSAGE DE 2015 À 2016

(en millions d’euros)

Mesure

Montant 2015

Financement 2015

Montant 2016

Financement 2016

Évolution 2015/2016

Ressource régionale pour l’apprentissage

146

Fraction de TICPE

148

Fraction de TICPE

+ 1,4 %

Du fait de l’indexation de la fraction de TICPE sur l’évolution de la masse salariale du secteur privé en année N-2

1 544 +

92

51 % de la taxe d’apprentissage, sur le CAS FNDMA = part fixe + part dynamique

1 544 +

95

51 % de la taxe d’apprentissage, sur le CAS FNDMA = part fixe + part dynamique

Affectation de ressources fiscales aux régions en substitution de la dotation globale de décentralisation de la formation professionnelle continue et d’apprentissage

Au moins 901

Fraction des produits de CVAE, CFE, TH,

et TICPE

Sans changement

Prime à l’apprentissage d’au moins 1 000 euros par année de formation, pour les employeurs de moins de 11 salariés

255

Dotations budgétaires

Fraction de TICPE

233

Fraction de TICPE

L’évolution de la compensation par région est retracée dans le tableau ci-après.

– 8,6 %

Du fait de l’extinction de l’indemnité compensatrice forfaitaire (ICF)

À titre transitoire, prime de 200 euros, 500 euros ou 1 000 euros pour les contrats d’apprentissage conclus avant le 1er janvier 2014 – en extinction

Aide au recrutement d’un apprenti supplémentaire, d’au moins 1 000 euros pour les contrats conclus à compter du 1er juillet 2014 dans une entreprise de moins de 250 salariés, sous conditions

60

Compensation budgétaire

60

TICPE

Compétences transférées aux régions par la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et au dialogue social (programme « compétences clés », personnes détenues, Français résidant à l’étranger, etc.)

207

Fraction de TICPE

Sans changement

AIDES EN FAVEUR DES APPRENTIS DANS UNE ENTREPRISE DE MOINS DE ONZE SALARIÉS
EN PREMIÈRE ANNÉE D’APPRENTISSAGE

Taille entreprise

<11

<11

<11

<11

<11

<11

Diplôme préparé

III-V

I-II

III-V

I-II

III-V

I-II

Âge de l’apprenti

<18

<18

18-20

18-20

>20

>21

Année du cycle de formation

1

1

1

1

1

1

Salaire réglementaire en pourcentage du SMIC

25 %

25 %

41 %

41 %

53 %

53 %

SMIC 2015 (euros/heure)

9,61

9,61

9,61

9,61

9,61

9,61

Coût théorique pour l’entreprise avant aides de l’État et des régions (euros/an)

6 097

6 097

9 999

9 999

12 926

12 926

Cotisations patronales (euros/an)

1 725

1 725

2 828

2 828

3 656

3 656

Salaire brut de l’apprenti (euros/an)

4 373

4 373

7 171

7 171

9 270

9 270

Aides de l’État (euros/an)

– 6 292

– 6 292

– 4 695

– 3 095

– 5 824

– 4 224

Prise en charges des cotisations patronales (euros/an)

– 1 630

– 1 630

– 2 665

– 2 665

– 3 668

– 3 668

Aide TPE Jeune apprenti (euros/an)

– 4 400

– 4 400

0

0

0

0

CICE (euros/an)

– 262

– 262

– 430

– 430

– 556

– 556

Crédit d’impôt apprentissage (euros/an)

0

0

– 1 600

0

– 1 600

0

Aides des régions (euros/an)

– 1 000

– 1 000

– 1 000

– 1 000

– 1 000

– 1 000

Prime à l’embauche dans les TPE (LFI 2014) (euros/an)

– 1 000

– 1 000

– 1 000

– 1 000

– 1 000

– 1 000

Coût résiduel à la charge de l’employeur (euros/an)

– 1 195

– 1 195

4 304

5 904

6 102

7 702

Hypothèses retenues :

– salaire minimal réglementaire (L. 6222-27 du code du travail), sans accessoire au salaire ;

– taux d’ATMP moyen à 2,44 % : le taux varie fortement entre les différentes branches en fonction du risque ;

– taux de cotisations salariales total de 14,20 % ;

– pas de prise en compte de la prime « Apprenti supplémentaire » (soit 1 000 euros par an) ni de crédit impôt apprentissage quand les aides sont supérieures au coût théorique ;

– la rémunération des apprentis n’est pas assujettie à la CSG et à la CRDS.

CICE : crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.

Source : Gouvernement.

*

* *

La commission adopte l’article 1ersans modification.

*

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Article additionnel après l’article 1er
Éligibilité au fonds de compensation pour la TVA des dépenses des collectivités territoriales et de leur groupement pour les dépenses d’investissement consacrées aux travaux de montée en débit

La commission est saisie d’un amendement CF 43 de M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Les opérations de montée en débit de l’internet, qui consistent à amener la fibre jusqu’aux sous-répartiteurs de lignes téléphoniques dans les zones qui ne pourront bénéficier à court terme d’un raccordement direct des habitations, bénéficiaient, jusqu’à la fin 2014, d’un remboursement de la TVA à travers le Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA). Depuis le printemps dernier, la direction générale des finances publiques (DGFiP) les a déclarées inéligibles à ce mécanisme de récupération, justifiant sa décision par l’insuffisance des recettes liées à ces opérations, qui les empêcherait de bénéficier de la qualification d’activité commerciale. C’est pour le moins paradoxal : la faiblesse des recettes commerciales est par définition le lot des projets couvrant les zones les moins denses ; s’il y avait des perspectives de forts profits commerciaux, le secteur privé s’y serait intéressé.

Ce sont donc à nouveau les territoires les moins denses qui vont être pénalisés par cette nouvelle règle. Les futurs travaux vont ainsi coûter 20 % plus cher et les travaux en cours devront supporter une dépense non prévue liée à l’acquittement de la taxe, dans le contexte de tension budgétaire que nous connaissons.

La non-compensation de la TVA est l’exact contraire de la politique annoncée par le Gouvernement, qui comptait favoriser le déploiement de l’internet très haut débit en zone rurale grâce à un assouplissement des règles d’éligibilité aux financements du plan « France très haut débit ».

Mon amendement CF 43 a pour objet de rendre à nouveau éligibles au FCTVA les travaux de montée en débit réalisés dans le cadre de ce plan. Le 29 octobre dernier, lors de la réunion de la commission élargie consacrée aux crédits de la mission Économie, M. Emmanuel Macron s’est déclaré favorable à cette évolution.

Mme la Rapporteure générale. Je vous remercie d’avoir précisé le contexte dans lequel intervient votre proposition. Ce problème me semble en passe d’être réglé : le Sénat a adopté cette semaine, avec l’avis favorable du Gouvernement, un amendement de sa commission des finances prévoyant que « les collectivités territoriales et leurs groupements, bénéficient des attributions du FCTVA au titre de leurs dépenses d’investissement, réalisées sur la période 2016-2022, sous maîtrise d’ouvrage publique, en matière d’infrastructures intégrant leur patrimoine dans le cadre du plan "France très haut débit" ». Le coût de cette mesure serait de 45 millions d’euros pour 2016, d’après le Sénat.

M. Jean Launay. Je soutiens l’amendement CF 43 et je pense que je ne serai pas le seul au sein de mon groupe. Lundi après-midi et mardi matin, Patrice Martin-Lalande et moi-même avons assisté au colloque organisé par l’Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel (AVICCA) et ce sujet a bien entendu été abordé, y compris avec la ministre Axelle Lemaire.

Ces questions représentent un grand enjeu pour les zones rurales. D’autres amendements porteront sur la compensation de la TVA pour les travaux liés à la voirie ou au bâtiment mais j’estime que s’il y a un choix à opérer, il vaut mieux privilégier les opérations de montée en débit, afin de ne pas freiner le déploiement du plan « France très haut débit ».

Je ne crois pas que cet amendement soit en contradiction avec celui du Sénat. Si nous l’adoptions, cela montrerait au contraire que les deux chambres ont la même position.

Le plan avance très lentement pour ce qui est du déblocage des financements. Adopter cette mesure permettrait de donner un signal aux collectivités et les inciterait à s’engager.

M. Patrice Martin-Lalande. L’amendement voté au Sénat, dont je me réjouis, porte sur le projet de loi de finances pour 2016 alors que le présent amendement vise à couvrir les travaux effectués pendant l’année 2015. Si nous ne l’adoptons pas, nous risquons d’être confrontés à une année blanche avec tous les effets catastrophiques que j’ai évoqués. Il ne faudrait pas qu’il y ait de trou dans le financement de ces opérations.

M. Charles de Courson. Modifier par voie administrative l’éligibilité pose problème. Dans les zones AMII (Appel à manifestation d’intention d’investissement), les opérateurs privés resteront éligibles. Il faut adopter cet amendement car celui du Sénat ne résout qu’une partie du problème, notamment du fait de son périmètre plus restreint. Il se réduit en effet au plan « France très haut débit » alors que certains investissements sont réalisés en dehors de ce cadre, par exemple, pour le Wi-Fi ou les systèmes radio. Il nous faudra discuter avec le Gouvernement pour bien définir le champ de l’éligibilité.

Mme Karine Berger. C’est avec stupéfaction que nous avons découvert que le syndicat mixte chargé du déploiement du haut débit dans les Alpes du Sud ne serait plus éligible au remboursement de TVA à compter du 1er janvier prochain. Je dois dire que je n’ai pas compris pourquoi : soit il y a un motif légitime, et la DGFiP doit nous l’expliquer ; soit il s’agit d’un « bug » et il faut adopter l’amendement de notre collègue.

M. Lionel Tardy. Aujourd’hui, beaucoup de départements ont des projets de déploiement du très haut débit, mais ils n’arriveront pas à échéance avant cinq, six ou sept ans. En attendant, les opérations de montée en débit sont indispensables. Ainsi en Haute-Savoie, un plan recourant à des solutions NRA-ZO (nœud de raccordement en zone d’ombre) va permettre à plus de 6 000 foyers de bénéficier de telles montées en débit. Il est illusoire de croire que tout le monde sera raccordé à la fibre, notamment dans les zones rurales. Dans de très nombreux cas, la montée en débit est la bonne solution pour nos concitoyens.

M. Joël Giraud. Il ne s’agit pas d’un « bug », mais d’un problème juridique. La compensation avait un caractère transitoire dès le début et personne ne s’en est rendu compte. Si nous ne votons pas l’amendement de notre collègue, nous nous retrouverons avec une année blanche catastrophique pour les territoires ruraux.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement est de nature à assurer l’égalité des territoires. Ces opérations sont en effet beaucoup plus coûteuses dans les territoires ruraux et les rendre inéligibles au FCTVA les pénalisent. Nous devons remédier à cette situation.

Mme la Rapporteure générale. L’amendement initial du Sénat couvrait la période 2015-2022 et c’est un sous-amendement du Gouvernement qui l’a décalée à 2016-2022. Votre amendement, monsieur Martin-Lalande, couvre en effet un champ plus large et j’émets finalement un avis favorable.

La commission adopte l’amendement CF 43 (amendement 309).

*

* *

Après l’article 1er

La commission est saisie d’un amendement CF 254 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Nous ne connaissons pas le montant exact des abattements de taxe foncière sur les propriétés bâties accordés aux bailleurs et financées par les collectivités locales. J’ai déjà fait une demande en ce sens en commission lors de la première lecture du projet de loi de finances, on m’avait promis un tableau et des explications ; j’ai dû refaire la même demande en séance et l’on m’a fait la même promesse ; je la formule à nouveau aujourd’hui…

Mme Karine Berger. C’est un têtu !

Mme la Rapporteure générale. Votre amendement pose un problème de forme : il est contraire à l’article 10 du projet de loi de finances en cours de navette.

M. François Pupponi. C’est un amendement d’appel !

M. Jean-Louis Dumont. D’appel au secours !

Mme la Rapporteure générale. Je vous propose de le retirer afin que vous le redéposiez pour la nouvelle lecture du projet de loi des finances.

M. François Pupponi. Je veux bien, mais je tiens tout de même à rappeler que lorsque je l’avais déposé sur le projet de loi de finances, en première lecture, on m’avait déjà demandé de le retirer pour le redéposer ensuite.

Mme la Rapporteure générale. Certes, mais il ne vous avait pas été demandé de le redéposer dans le cadre du projet de loi des finances rectificative…

Mme Christine Pires Beaune. J’aimerais appeler l’attention de François Pupponi et de Marc Goua sur les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine-cible, en rappelant que sa progression va à 93 % aux 250 premières, qui bénéficient de 155 millions d’euros sur un total de 180. Or au-delà de ces 250 communes, il y a des communes très pauvres, comme Créteil.

M. François Pupponi. Qu’il n’y ait pas d’ambiguïté : j’entends ce qui est dit. La seule chose que je demande, c’est de la transparence : j’aimerais disposer d’informations précises sur le solde net entre augmentations de DSU et diminutions des compensations d’abattement. Il ne faut pas se focaliser sur la DSU, car les communes qui enregistrent des augmentations de cette dotation peuvent voir diminuer les compensations dans des proportions équivalentes.

M. Marc Goua. J’ajoute que l’amendement présenté par François Pupponi est relativement restrictif. Les nôtres étaient plus larges. Outre l’abattement de 30 % de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les immeubles situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, il existe une exonération pour les logements sociaux, qui voit son financement par l’État baisser chaque année. Je connais une commune – ce n’est pas la mienne – où la baisse, si elle s’accentue, risque de représenter des montants deux fois supérieurs à la hausse prévisionnelle de la DSU. Comme François Pupponi le demande, il nous faudrait une étude globale. Je crois savoir que les exonérations ne sont compensées qu’à hauteur de 27 %…

M. François Pupponi. Les exonérations sont compensées au maximum à hauteur de 25 % et en moyenne autour de 18 %.

Cela dit, j’accepte de retirer mon amendement, tout comme le suivant, l’amendement CF 255.

Les amendements CF 254 et CF 255 sont retirés.

La commission en vient à l’examen, en présentation commune, de deux amendements de M. Christophe Caresche CF 141 et CF 140.

M. Christophe Caresche. L’année dernière a été votée en loi de finances une réforme de l’assiette de l’impôt sur les spectacles, jeux et divertissements consistant à sortir de son champ d’assujettissement les recettes brutes générées par les réunions sportives. Cette évolution a été rendue nécessaire par la mise en conformité de notre droit avec celui de l’Union européenne, qui imposait que les recettes de billetterie soient désormais assujetties à la TVA.

Il a été prévu une compensation des pertes de recettes subies par les collectivités égale au produit de l’impôt levé en 2013 sur les recettes brutes des manifestations sportives. Par l’amendement CF 141, nous proposons d’actualiser cette compensation en prenant pour référence l’impôt levé par les collectivités en 2014.

Il n’est pas illogique que la compensation versée par l’État – qui s’y retrouve bien, puisqu’il bénéficie des nouvelles recettes liées à la TVA – suive l’évolution des recettes et donc des impôts qui en dépendent, dans la mesure où l’organisation de ces manifestations sportives représente des charges pour les communes, notamment pour ce qui concerne les stades.

Mme la Rapporteure générale. Je serais assez d’accord avec Christophe Caresche d’un point de vue de logique économique. Le problème est que la question se pose pour d’autres types de compensation. Lors de la première lecture du projet de loi de fincances, j’avais demandé un tableau récapitulant l’ensemble des exonérations votées, avec les montants des compensations en regard. Je ne l’ai malheureusement pas obtenu.

Je vous proposerai donc de retirer vos amendements afin que nous reposions la question au ministre en séance ; j’aimerais avoir une vision globale des exonérations et des compensations avant de prendre une décision.

M. Christophe Caresche. J’accepte de les retirer, tout en notant le bon accueil de principe que vous leur avez réservé, madame la Rapporteure générale.

Les amendements CF 141 et CF 140 sont retirés.

*

* *

Article 2
Prélèvement de 255 millions d’euros sur le fonds de roulement
du Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA)

Le présent article opère un prélèvement de 255 millions d’euros sur les ressources du Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA).

Il doit être mis en relation avec l’article 14 du présent projet de loi de finances, adopté en première lecture par l’Assemblée nationale et par le Sénat. Cet article diminue les recettes annuelles du fonds de 60 millions d’euros via une baisse du taux de 11 % à 5,5 % de la contribution additionnelle aux primes et cotisations afférentes aux conventions d’assurance.

NIVEAU DE TRÉSORERIE DU FNGRA AU 31 DÉCEMBRE

(en millions d’euros)

Année

2011

2012

2013

2014

2015

Prévision

Fonds de roulement

51,8

56,4

134,3

231,8

314,0

Source : ministère des finances et des comptes publics, direction du budget.

FONDS DE ROULEMENT DU FNGRA AVANT ET APRÈS LE PRÉLÈVEMENT
PRÉVU PAR LE PRÉSENT ARTICLE

(en millions d’euros)

Fonds de roulements du FNGRA au 31 décembre 2015

Prélèvement sur fonds de roulement

Fonds roulement du FNGRA après prélèvement

314

255

59

Source : ministère des finances et des comptes publics, direction du budget.

DIFFÉRENCE ENTRE LES RECETTES COURANTES ET LES DÉPENSES D’INTERVENTION
DU FNGRA DEPUIS 2011

(en millions d’euros)

Année

Recettes

Dépenses d’intervention

Solde

2011

135,6

232,8

− 97,2

2012

243,5

259,1

− 15,6

2013

142,5

63,0

79,5

2014

141,7

40,8

100,9

2015 (prévision)

149,8

82,5

67,3

2016 (prévision)

60

60

0

Source : calcul commission des finances.

I. LE FNGRA PROTÈGE LES AGRICULTEURS CONTRE LES RISQUES NON ASSURABLES

L’agriculture est une activité à risques, soumise à des forts aléas naturels. Ces risques peuvent être pris en charge par les exploitants eux-mêmes grâce à une épargne préalable (69) de précaution ou par des assurances privées.

Cependant, certains risques, en raison de leur nature exceptionnelle et systémique, ne sont pas assurables. Ils doivent être pris en charge par la collectivité. Tel est le cas de certains événements qualifiés de calamités agricoles. Ceux-ci sont d’une importance exceptionnelle due à des variations anormales d’intensité d’un agent naturel (sécheresse, inondation, gel...). Les moyens techniques de lutte préventive ou curative employés habituellement sont inefficaces contre ce type d’événements.

Le FNGRA est un fonds d’indemnisation spécifique à ce type de risques agricoles. Il a été institué par la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Il succède au Fonds national des calamités agricoles (FNGCA) issu de la loi n° 64-706 du 10 juillet 1964 organisant un régime de garantie contre les calamités agricoles.

Son objet est de participer au financement des dispositifs de gestion des aléas climatique, sanitaire, phytosanitaire et environnemental dans le secteur agricole. Ce fonds public est géré pour le compte de l’État par la Caisse centrale de réassurance (CCR).

Ses règles de fonctionnement, son mode de financement et son champ d’intervention sont définis aux articles L. 361-1 à L. 361-8 du code rural et de la pêche maritime.

A. FINANCEMENT DU FNGRA

Le financement du FNGRA est fondé sur le principe de solidarité. Il est assuré par une subvention du budget général de l’État et par des contributions payées par les agriculteurs.

LES RECETTES DU FNGRA DEPUIS 2011

(en millions d’euros)

Année

Subvention du budget général

Contribution additionnelle exploitations conchylicoles

Contribution additionnelle aux cotisations d’assurance

Total

2011

34,2

0,6

100,8

135,6

2012

130,2*

0,9

112,4

243,5

2013

22,2

1,0

119,3

142,5

2014

19,2

1,1

121,4

141,7

2015 (prévision)

25,4

1,0

123,4

149,8

2016 (prévision)

0

0,0

60,0

60,0

* dont 111 millions d’euros correspondant au solde des indemnités liées à la sécheresse de 2011.

Source : ministère des finances et des comptes publics, direction du budget.

1. La subvention de l’État

En premier lieu, l’article L. 361-2 du code rural et de la pêche maritime autorise l’octroi d’une subvention du budget de l’État au FNGRA. Ce versement ne revêt toutefois pas la nature d’une subvention d’équilibre (70). Ces crédits sont inscrits à l’action 12 du programme 154 Économie et développement durable de l’agriculture et des territoires rattaché à la mission Agriculture, Alimentation, foret et affaires rurales.

Avant 2016, et hors crise exceptionnelle, la subvention versée avait essentiellement pour objet de couvrir les besoins du dispositif d’aide à la souscription d’un contrat d’assurance récolte pour environ 20 millions d’euros par an. L’objectif de ce dispositif est de renforcer le niveau de couverture des agriculteurs et de leur proposer des produits plus adaptés à la situation particulière de leur exploitation. Cette fraction de la subvention ne sera plus versée au FNGRA à compter de 2016 puisque le dispositif « assurance-récolte » sera désormais financé intégralement sur crédits européens (au lieu d’un cofinancement à hauteur de 25 % pour l’État et de 75 % pour l’Union Européenne jusqu’en 2015).

Par le passé, le montant de la subvention a été ajusté en cas de crises exceptionnelles au titre desquelles les recettes habituelles du FNGRA n’étaient pas suffisantes pour couvrir les besoins. Ainsi, en 2012, la subvention du budget général de l’État a atteint 130,2 millions d’euros dont 111 millions d’euros correspondant au solde des indemnités liées à la sécheresse de 2011.

À compter de 2016, et hors crises exceptionnelles, le FNGRA ne devrait donc pas recevoir de subvention du budget général. Toutefois, selon les renseignements recueillis par la Rapporteure générale auprès du Gouvernement, dans l’hypothèse d’une occurrence d’un événement climatique d’ampleur exceptionnelle, le besoin de financement serait couvert – et comme cela a été le cas depuis sa création – par une contribution du budget général. Cet appel à la solidarité nationale n’interviendrait qu’en cas d’aléa climatique majeur et en cas d’insuffisance des ressources du fonds.

2. Les contributions payées par les agriculteurs

En second lieu, le financement du FNGRA est assuré par deux contributions additionnelles aux primes ou cotisations afférentes aux conventions d’assurance payées par les agriculteurs pour couvrir divers risques supportés par leurs exploitations (article L. 361-2 du code rural et de la pêche maritime) :

– l’une applicable aux exploitations conchylicoles (élevage de coquillages) ; son montant est égal à 100 % des primes versées pour la garantie incendie qui couvre les « bâtiments d’exploitation, les ateliers de triage et d’expédition, le matériel et les stocks » et à 100 % des primes versées pour la garantie couvrant les risques nautiques des exploitations ;

– l’autre prélevée sur les cotisations d’assurance couvrant à titre exclusif ou principal, d’une part, les dommages relatifs aux bâtiments et au cheptel mort affectés aux exploitations agricoles et, d’autre part, les risques de responsabilité civile et de dommages relatifs aux véhicules utilitaires affectés aux exploitations agricoles ; elle est assise sur la totalité des primes et cotisations d’assurance versées ; son taux est actuellement de 11 %.

L’article 14 du projet de loi de finances pour 2016 prévoit une baisse du taux de 11 % à 5,5 % de la contribution additionnelle aux primes et cotisations afférentes aux conventions d’assurance. Le rendement de cette contribution devrait ainsi être divisé par deux, soit une baisse d’environ 60 millions d’euros. Cette mesure constitue un allégement de la fiscalité applicable au secteur agricole.

Ces contributions additionnelles sont versées soit par l’assureur lui-même, si l’assureur est une société ou compagnie française ou un assureur étranger ayant en France un établissement ou un représentant responsable, soit par le courtier ou l’intermédiaire ou par l’assuré lui-même, si l’assureur étranger n’a en France ni établissement ni représentant responsable.

Le rendement de ces contributions pour 2016 est évalué à environ 60 millions d’euros. Elles devraient être les seules ressources du FNGRA pour 2016, sauf événement exceptionnel justifiant une contribution du budget général.

B. DÉPENSES PAR SECTION

LES DÉPENSES D’INTERVENTION PAR SECTION DU FNGRA DEPUIS 2011

(en millions d’euros)

Année

1ère section :

fonds de mutualisation

2e section :

assurance-récolte

3e section :

calamités agricoles

Total

2011

0

44

188,8

232,8

2012

0

24,7

234,4

259,1

2013

0

22,2

40,8

63,0

2014

0

19,2

21,6

40,8

2015 (prévision)

1,1

24,3

57,1

82,5

2016 (prévision)

5

0

55

60

Source : ministère des finances et des comptes publics, direction du budget.

Les dépenses du FNGRA sont réparties en trois sections qui correspondent respectivement aux fonds de mutualisation, à l’assurance récolte et aux calamités agricoles :

– la première section contribue au financement de l’indemnisation des pertes économiques liées à l’apparition d’un foyer de maladie animale ou végétale ou à un incident environnemental, par des fonds de mutualisation agréés par l’autorité administrative ;

– la deuxième section relative à « l’assurance-récolte » contribue au financement des aides au développement de l’assurance contre les dommages causés aux exploitations agricoles (prise en charge d’une partie des cotisations d’assurance afférentes à certains risques agricoles de façon forfaitaire et variable suivant l’importance du risque et la nature des productions) ;

– la troisième section contribue à l’indemnisation des calamités agricoles et intervient pour les récoltes non engrangées et les cultures non assurables ou non exclues du fonds, y compris les cultures sous serre, les animaux en plein air, les sols, les ouvrages, les plantations y compris les pépinières, à l’exclusion des bois et forêts ; les calamités agricoles sont définies comme des dommages qui résultent de risques autres que ceux considérés comme assurables ; le caractère de calamité agricole est reconnu par un arrêté du ministre chargé de l’agriculture, pris sur proposition du préfet du département après avis du Comité national de gestion des risques en agriculture (CNGRA).

Les dépenses de la première section sont peu importantes et devraient être intégralement financées sur les crédits européens du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) à compter de 2017 (71). Seulement 5 millions d’euros sont prévus à ce titre pour 2016.

Les dépenses de la deuxième section sont également appelées à s’éteindre, dès 2016, puisque le dispositif « assurance-récolte » sera financé intégralement sur crédits européens (au lieu d’un cofinancement à hauteur de 25 % pour l’État et de 75 % pour l’Union Européenne jusqu’en 2015).

Ce sont les dépenses de la troisième section qui constituent la majeure partie des dépenses du FNGRA au titre de l’indemnisation des conséquences des calamités agricoles. La prévision de dépenses pour 2016 s’élève à 55 millions d’euros en 2016.

Les dépenses de cette troisième section ne peuvent être qualifiées de dépenses obligatoires dans la mesure où la reconnaissance du caractère de calamité agricole ne revêt aucun caractère contraignant pour l’administration (72) : conformément à l’article D. 361-21 du code rural et de la pêche maritime, « le préfet de la région [concernée par l’aléa climatique] peut proposer la reconnaissance du caractère de calamité agricole des dommages », sur la base d’un rapport de la mission d’enquête menée sur le terrain par les services de l’État (DDT) et de l’avis du comité départemental d’expertise.

Ceci explique que l’éventuelle subvention de l’État versée pour faire face à des besoins exceptionnels ne peut être qualifiée de subvention d’équilibre. Pour autant, il est raisonnable de penser qu’en cas d’événements climatiques majeurs, il serait difficilement possible pour l’administration de s’opposer à la reconnaissance du caractère de calamité agricole.

II. LE FNGRA DISPOSE D’UNE TRÉSORERIE D’ENVIRON 314 MILLIONS D’EUROS

Depuis 2013, le FNGRA est régulièrement excédentaire. Il apparaît que les recettes dépassent largement les besoins du fonds, hors aléas climatiques de nature exceptionnelle. Lorsque de tels aléas surviennent, une contribution du budget général de l’État intervient pour faire face aux besoins du fonds.

DIFFÉRENCE ENTRE LES RECETTES COURANTES ET LES DÉPENSES D’INTERVENTION
DU FNGRA DEPUIS 2011

(en millions d’euros)

Année

Recettes

Dépenses

Solde

2011

135,6

232,8

− 97,2

2012

243,5

259,1

− 15,6

2013

142,5

63,0

79,5

2014

141,7

40,8

100,9

2015 (prévision)

149,8

82,5

67,3

2016 (prévision)

60

60

0

Source : commission des finances.

Les excédents constatés depuis 2013 ont eu pour effet d’accroître régulièrement le niveau de la trésorerie du FNGRA.

NIVEAU DE TRÉSORERIE DU FNGRA AU 31 DÉCEMBRE

(en millions d’euros)

Année

2011

2012

2013

2014

2015

Prévision

Fonds de roulement

51,8

56,4

134,3

231,8

314,0

Source : ministère des finances et des comptes publics, direction du budget.

Un équilibre entre les recettes et les dépenses devrait être réalisé en 2016 grâce à l’article 14 du projet de loi de finances pour 2016 qui diminue de moitié le taux de la contribution additionnelle sur les cotisations d’assurance.

Le rendement de la taxe sera ainsi ramené à 60 millions d’euros – et corrélativement diminué de 60 millions d’euros. Les recettes seront ainsi égales à la prévision de dépenses pour 2016 fixée à 60 millions d’euros. Cette prévision de dépenses correspond au montant annuel moyen des indemnisations versées par le FNGRA. En effet, selon la direction du budget du ministère des finances et des comptes publics, « sur la période 2000-2014 les dépenses du fonds (hors assurance-récolte) s’élèvent, en moyenne et hors aléas climatiques de nature exceptionnelle, à 60 millions d’euros par an ».

III. LE PRÉLÈVEMENT PRÉVU SUR LA TRÉSORERIE DU FNGRA S’ÉLÈVE À 255 MILLIONS D’EUROS

Le présent article opère un prélèvement sur le fonds de roulement du FNGRA à hauteur de 255 millions d’euros. Le Gouvernement a indiqué avoir calibré le prélèvement sur fonds de roulement de manière à ne pas porter atteinte à la capacité d’intervention du FNGRA.

Il est indiqué, dans l’évaluation préalable du présent article que la trésorerie du FNGRA sera équivalente à une année de dépenses d’indemnisation hors crise exceptionnelle, après le prélèvement sur fonds de roulement.

Le fonds de roulement après prélèvement devrait, en effet, se situer à environ 60 millions d’euros correspondant au montant annuel moyen des indemnisations hors événement exceptionnel et hors « assurance-récolte ».

FONDS DE ROULEMENT DU FNGRA AVANT ET APRÈS LE PRÉLÈVEMENT PRÉVU
PAR LE PRÉSENT ARTICLE

(en millions d’euros)

Fonds de roulements du FNGRA au 31 décembre 2015

Prélèvement sur fonds de roulement

Fonds roulement du FNGRA après prélèvement

314

255

59

Source : ministère des finances et des comptes publics, direction du budget.

La Rapporteure générale estime que ce prélèvement appelle plusieurs remarques :

1. L’État est légalement contraint d’abonder le fonds en cas de besoins non couverts. Par conséquent, prélever une partie du fonds de roulement ne remet pas en cause la solidarité nationale en direction du monde agricole, puisque quelle que soit la situation du fond les besoins seront couverts.

2. Le fonds de roulement correspond à de l’argent « placé », qui par conséquent n’est actuellement pas directement utilisé pour l’agriculture.

3. La Rapporteure générale considère que si le prélèvement peut s’entendre d’un point de vue économique (afin d’utiliser des fonds non utilisés aujourd’hui), il est indispensable que ce prélèvement soit utilisé pour l’agriculture (ce qui n’est pas explicitement indiqué dans l’article).

*

* *

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CF 55 de M. Charles de Courson, CF 108 de M. Hervé Mariton et CF 117 de Mme Marie-Christine Dalloz, ainsi que l’amendement CF 97 de M. Joël Giraud et l’amendement CF 56 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Le Gouvernement prend cette année deux mesures qui viennent affecter le Fonds national de gestion des risques agricoles (FNGRA), fonds géré par une société de droit public, qui se présente comme un compte dans ses écritures. La première mesure, adoptée lors de la première lecture du projet de loi de finances pour 2016, consiste à baisser de 11 % à 5,5 % le taux de la taxe sur les contrats d’assurance payés par les exploitants agricoles qui vient alimenter ce fonds. Son produit passerait ainsi de 120 millions d’euros à 60 environ, montant correspondant aux dépenses constatées ces dernières années. La deuxième mesure, proposée dans cet article 2, consiste à ponctionner de 255 millions d’euros les excédents cumulés du fonds, qui s’élèvent actuellement à 330 millions.

Ces deux mesures ont suscité un grand émoi dans le monde agricole, nous le savons. Ce sont les agriculteurs qui paient et qui couvrent la totalité des charges. Certes, un taux de 11 % était peut-être trop élevé, mais il peut toujours arriver un gros pépin. Et désormais, pour couvrir les coûts, il faudra ouvrir des crédits sur le budget de l’État afin d’alimenter le fonds.

M. Alain Fauré. C’est ce qui se produit à chaque fois !

M. Charles de Courson. Lisez les chiffres, mon cher collègue, ce n’est pas le cas.

Je propose deux solutions : ou bien nous supprimons cet article 2 pour laisser au FNGRA ses excédents – c’est l’objet de mon amendement CF 55 ; ou bien nous ramenons pendant deux ans à 0 % le taux de la taxe sur les contrats d’assurance, ce qui réduira mécaniquement le montant des excédents cumulés – c’est l’objet de mon amendement CF 56. Je dois dire que ma préférence va à ce dernier amendement.

M. Olivier Carré. On observe un parallélisme avec les ponctions opérées l’année dernière par le Gouvernement sur les chambres de commerce et d’industrie et les chambres d’agriculture. La même logique est à l’œuvre : prélever sur les excédents de trésorerie parce que ces sommes sont censées trouver un meilleur usage dans le budget de l’État qu’en étant affectées. Cette taxe est assise sur des contrats d’assurance qui reposent sur une mutualisation des risques. Comment l’État peut-il s’approprier ces sommes, dévolues à un objet d’intérêt général ?

J’ajoute que certains contributeurs, les conchyliculteurs par exemple, répondent à d’autres critères d’appel sur ce fonds et ont un intérêt spécifique à y contribuer.

Bref, puiser sur les excédents du FNGRA ne me paraît être ni une bonne manière ni une façon efficace de gérer les fonds publics. D’où l’amendement CF 108.

Mme Marie-Christine Dalloz. Il me paraît essentiel que ce fonds, créé par la loi du 27 juillet 2010, reste doté de montants importants alors que la sécurité alimentaire et la sécurité animale ainsi que l’environnement juridique de la santé font aujourd’hui l’objet de préconisations de plus en plus fortes. À l’heure où un nouveau contrat socle d’assurance climatique est mis en place dans chaque grand secteur de production, il me paraît peu justifié d’opérer de telles ponctions.

En cas d’urgence, l’État compenserait, nous dit-on. Pourquoi ne pas laisser les agriculteurs disposer eux-mêmes des ressources du fonds ?

Il faut supprimer cet article 2, comme le propose mon amendement CF 117.

M. Joël Giraud. Mon amendement CF 97 est moins maximaliste que les amendements de suppression puisqu’il propose de limiter le prélèvement à 155 millions d’euros au lieu de 255, soit une restitution de 100 millions d’euros. Le monde agricole œuvre actuellement au lancement d’un dispositif assurantiel novateur et ambitieux qui aboutira à dégager des moyens budgétaires supplémentaires. Pour cela, il est nécessaire de ménager des marges de manœuvre au FNGRA.

M. Charles de Courson. En tant que rapporteur spécial de la mission Agriculture, j’avais demandé l’état des comptes du FNGRA et le cabinet du ministre vient de me fournir un document que je tiens à disposition de Mme la Rapporteure générale. À la fin du mois de décembre 2016, le solde prévisionnel est de 6 millions d’euros. Autrement dit, le moindre pépin nécessitera d’ouvrir des crédits en collectif budgétaire.

Mme la Rapporteure générale. Il faudra en effet que nous confrontions nos documents, monsieur de Courson : d’après mes informations, il resterait 55 millions d’euros après prélèvement. Si vous tenez les vôtres du cabinet du ministre, il nous faudra vérifier ce point…

Rappelons que si le fonds n’est pas suffisamment alimenté, l’État est obligé de « mettre au pot » pour que les besoins puissent être couverts. Je trouve dommage qu’il y ait de l’argent dormant ; il vaut mieux qu’il soit utilisé. Cela étant, j’estime qu’il est nécessaire que les sommes prélevées soient fléchées vers l’agriculture, qui en a bien besoin – je pense à l’assurance récolte –, au lieu d’être affectées au budget général et donc à d’autres domaines. Je déposerai des amendements en ce sens en séance, car je n’ai pas eu le temps de finaliser leur rédaction pour nos réunions de commission, après les nombreux échanges que j’ai eus avec divers interlocuteurs du monde agricole.

M. Dominique Lefebvre. J’ai déjà eu l’occasion de dire que la maîtrise de la dépense publique relevait d’une ascèse. Il y a plusieurs manières de s’y astreindre. On peut préférer prendre des mesures qui remettent en cause des droits ; on peut aussi faire preuve d’intelligence dans la gestion des deniers publics et faire en sorte d’éviter les thésaurisations inutiles sans remettre en cause des droits.

La seule question qui se pose à propos de l’article 2 est de savoir s’il remet en cause les missions du FNGRA et les droits des agriculteurs à bénéficier d’indemnisations en cas de calamités ? La réponse est non.

Maintenant, si l’on préfère prendre des mesures qui remettent en cause des droits, il faut l’assumer, tout simplement…

M. Yves Censi. N’allons pas faire croire que la mesure proposée par le Gouvernement serait une simple opération comptable menée en toute transparence et sans conséquences. Le FNGRA a été créé pour mettre en place une garantie sur les aléas, déterminée à partir de calculs d’actuaires. Cela a supposé d’amener tout le monde à cotiser pour construire un esprit assurantiel commun. La mesure proposée à l’article 2 n’a rien de neutre, monsieur Lefebvre : elle implique une allégeance à l’État. Pour financer la couverture des aléas, le monde agricole devra rebasculer dans un système de subventions, qui suppose des négociations avec le Gouvernement, alors qu’il était entré dans une logique de responsabilisation.

Par ailleurs, je ne considère pas que la trésorerie d’un tel fonds puisse être assimilée à de l’argent dormant, madame la Rapporteure générale, puisqu’elle fait l’objet d’une gestion active, grâce notamment à des placements.

Mme Véronique Louwagie. Le montant que vous avancez, madame la Rapporteure générale, correspond aux années les plus basses en trésorerie, ce qui nous ramène à 2011. Autrement dit, il nous faudra cinq ans pour le reconstituer… Par ailleurs, c’est une question de loyauté à l’égard des agriculteurs, qui ont abondé le FNGRA. Alors que le monde agricole n’a jamais connu autant de difficultés, nous prélevons des sommes sur un fonds qui leur appartient et qui donne par ailleurs toute satisfaction. Je considère que l’amendement CF 56 de Charles de Courson, qui prévoit de suspendre les prélèvements sur les agriculteurs en 2016 et 2017, serait plus intéressant, afin de ne pas mettre le fonds à mal.

Mme la Rapporteure générale. Je propose que les amendements soient retirés afin que nous travaillions d’ici à la séance sur un amendement permettant de flécher l’argent vers les agriculteurs.

M. Charles de Courson. Compte tenu de l’ouverture de la Rapporteure générale, je suis prêt à retirer les amendements CF 55 et CF 56, quitte à les redéposer en vue de la séance publique ; mais attention, nous n’avons plus que quelques jours : il faut que l’amendement soit prêt rapidement.

Ce document m’a été adressé en tant que rapporteur spécial de la mission Agriculture, car ces fonds sont placés à la Caisse centrale de réassurance (CCR), société anonyme propriété de l’État.

Mme Marie-Christine Dalloz. J’accepte de retirer mon amendement. Le mieux serait que l’amendement présenté en séance soit un amendement collectif de notre commission.

Les amendements CF 55, CF 108, CF 117, CF 97, CF 56 sont retirés.

La commission adopte l’article 2 sans modification.

*

* *

Article 3
Création du compte d’affectation spéciale Transition énergétique

Le présent article ouvre un compte d’affectation spéciale (CAS) intitulé Transition énergétique.

L’ouverture d’un compte d’affectation spéciale relève du domaine exclusif des lois de finances par application de l’article 19 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Elle doit figurer en première partie par application du 3° de l’article 34 de la même loi organique.

Le présent article doit être mis en relation avec deux dispositions de l’article 11 du présent projet de loi de finances rectificative qui procèdent :

– au remplacement, à partir de 2016, de l’actuelle contribution au service public de l’électricité (CSPE) par une taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) renforcée et élargie ;

– et à la fusion de la contribution biométhane et de la contribution au tarif spécial de solidarité gaz (CTSSG) avec la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN).

Les objectifs poursuivis par la création du CAS sont :

– de suivre précisément les dépenses de la transition énergétique (financer les compensations versées aux fournisseurs d’électricité et de gaz au titre de leurs obligations de soutien aux énergies renouvelables, recettes identifiées) ;

– de contribuer au remboursement de la dette de l’État à l’égard d’EDF. Cette dette représente 4,9 milliards d’euros en 2015 ;

– de conserver ces dépenses hors du périmètre des normes des dépenses « zéro valeur » et « zéro volume » ;

En année pleine, 5,5 milliards d’euros seront affectés au CAS Transition énergétique. Ce montant est supérieur aux 4,7 milliards d’euros prévus au titre du soutien aux énergies renouvelables. La différence sert à rembourser la dette de l’État vis-à-vis d’EDF (la contribution au service public de l’électricité était en effet insuffisante pour couvrir toutes les charges).

Il existe deux grandes catégories de fiscalité énergétique dont l’ensemble représente plus de 40 milliards d’euros de recettes : les taxes intérieures de consommation (TIC), pour un peu plus de 30 milliards d’euros, et des contributions spécifiques sur l’électricité et le gaz naturel, pour environ 10 milliards d’euros.

Sur les 40 milliards d’euros de fiscalité énergétique, les taxes sur les produits pétroliers représentent environ 28 milliards d’euros (taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques) et celles sur l’électricité et le gaz environ 12 milliards d’euros (12,6 milliards d’euros en 2016). Les taxes sur l’électricité et le gaz augmenteraient de 30 % entre 2014 et 2016 en l’état du droit. Le tableau qui suit récapitule l’état de la fiscalité applicable à ces deux énergies. Il n’a, toutefois, pas été possible de présenter deux tableaux distincts dans la mesure où le Gouvernement n’a pu fournir à la Rapporteure générale une ventilation précise, entre le gaz et l’électricité, du rendement de la contribution tarifaire d’acheminement.

LES TAXES SUR L’ÉLECTRICITÉ ET LE GAZ NATUREL

(en millions d’euros)

Année

2014

exécution

2015

Prévision

2016

Prévision

Contribution au service public de l’électricité (CSPE)

5 627

7 002

7 970

Contribution tarifaire d’acheminement (CTA)

1 467

1 493

1 529

Taxe communale/départementale sur la consommation finale d’électricité (TCCFE et TDCFE)

2 214

2 236

2 270

Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE)

61

61

61

Taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN)

232

404

684

Contribution pour le tarif spécial de solidarité gaz (CTSSG)

87

98

90

Contribution biométhane

3

8

23

Total

9 691

11 302

12 627

Source : Voies et moyens, tome 1, annexe au projet de loi de finances pour 2016 ; évaluations préalables des articles du projet de loi de finances rectificative pour 2015 ; réponses au questionnaire de la Rapporteure générale adressé au Gouvernement.

1. Les taxes intérieures de consommation

Les TIC poursuivent un objectif de rendement budgétaire. Elles relèvent de la directive 2003/96/CE du Conseil du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité.

Leurs recettes sont affectées à l’État (environ 16 milliards d’euros en 2016) mais aussi aux collectivités territoriales (environ 14 milliards d’euros en 2016) et à l’Agence de financement des infrastructures des transports de France (AFITF) (0,7 milliard en 2016). Leur tarif est fixé par le code des douanes, à l’exception des taxes communale et départementale sur la consommation finale d’électricité qui relèvent du code général des collectivités territoriales.

Pour les énergies carbonées (produits pétroliers, gaz naturel et charbon), le tarif est calculé de telle manière à inclure une part fixe et une part carbone, parfois dénommée « contribution climat énergie » bien que cette appellation n’ait pas d’existence juridique. La part carbone, qui était de 7 euros la tonne en 2014, et de 14,50 euros en 2015, est appelée à croître ces prochaines années selon la trajectoire suivante définie par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique (73) : de 56 euros la tonne de carbone en 2020 à 100 euros en 2030. Elle sera ainsi de 22 euros en 2016, et serait de 30,50 euros en 2017 par application de l’article 11 du présent projet de loi de finances rectificative. Pour tenir la trajectoire prévue, elle devrait progresser, sous réserve des votes à venir du Parlement, de 8,50 euros la tonne par an entre 2018 et 2020.

Avec 28,2 milliards de rendement attendu en 2016, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), assise sur les produits pétroliers, est la plus importante des TIC. Les autres TIC, dont les rendements sont plus modestes, sont la taxe intérieure sur la consommation des houilles, lignites et cokes (TICC), la TICGN sur le gaz naturel et la TICFE sur l’électricité.

Bien que leurs tarifs puissent être fixés par les collectivités concernées, on peut également assimiler aux TIC les taxes communale et départementale sur la consommation finale d’électricité (TCCFE et TDCFE) dont le rendement est important (2,3 milliards d’euros prévus en 2016). Ces taxes relèvent, en effet, de la directive 2003/96/CE précitée.

2. Les contributions spécifiques sur la consommation finale d’électricité et de gaz naturel

Les contributions spécifiques sont, comme les TIC, des impositions de toutes natures au sens de l’article 34 de la Constitution. Elles visent à compenser des charges supportées par diverses entités, essentiellement les charges de service public de certains opérateurs électriques et de certains fournisseurs de gaz naturel. La plus importante est la CSPE dont le rendement était estimé à 8,3 milliards d’euros en 2016. La contribution tarifaire d’acheminement (CTA), dont le produit est affecté à la Caisse nationale de retraite des industries électriques et gazières, devrait rapporter 1,5 milliard d’euros en 2016. La CTSSG et la contribution biométhane ont des rendements plus modestes. Ces différentes contributions, à l’exception de la CTA, sont régies par le code de l’énergie.

AFFECTATION ET RENDEMENT DES TAXES SUR LES ÉNERGIES AVANT LA RÉFORME

Catégorie d’impôt

Impôt

Fondement juridique

Énergie taxée

Rendement et affectation (prévision 2016)

(en millions d’euros)

TIC

Taxes intérieures de consommation

Principe d’universalité : le montant des taxes ne couvre pas des charges identifiées des bénéficiaires

TICPE

Taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques

Code des douanes

Produits pétroliers

28 208

---------------------------------

15 595 État (budget général)

715 AFITF

6 548 départements

527 régions part Grenelle

4 823 régions

TICC

Taxe intérieure sur la consommation des houilles, lignites et cokes

Charbon

5 à 10

État (budget général)

TICGN

Taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel

Gaz naturel

684

État (budget général)

TICFE

Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité

Électricité

État (budget général)

61

TCCFE et TDCFE

Taxe communale/départementale sur la consommation finale d’électricité

Code général des collectivités territoriales

Électricité

2 270

-------------------------------

1 542 communes

728 départements

Contributions spécifiques

Régies par le code l’énergie (sauf la CTA)

Principe de spécialité : le montant des contributions est ajusté au regard des charges qu’elles visent à compenser

CTA

Contribution tarifaire d’acheminement

Art. 18 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004

Gaz naturel et électricité

1 529

Caisse nationale de retraite des industries électriques et gazières (CNIEG)

CSPE

Contribution au service public de l’électricité

Code de l’énergie

Électricité

7 970

--------------------------------

3 Médiateur de l’énergie

1 Agence des services des paiements et caisse des dépôts et consignations

7 873 opérateurs électriques

93 industriels (compensation carbone)

CTSSG

Contribution pour le tarif spécial de solidarité gaz

Gaz naturel

90

--------------------------------

86 fournisseurs de gaz

3 Médiateur de l’énergie

1 Agence des services des paiements et caisse des dépôts et consignations

Contribution biométhane

Gaz naturel

23 fournisseurs de gaz

Source : Voies et moyens, tome 1, annexe au projet de loi de finances pour 2016 ; évaluations préalables des articles du projet de loi de finances rectificative pour 2015 ; réponses au questionnaire de la Rapporteure générale adressé au Gouvernement.

B. DROIT PROPOSÉ

Le présent article 3 modifie substantiellement les modalités d’affectation de la fiscalité énergétique applicable à l’électricité et au gaz naturel.

Il doit être mis en relation avec l’article 1er, qui modifie à la marge les modalités d’affectation de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques (TICPE), et l’article 11 qui réforme profondément la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) et la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN).

Les règles fiscales et les modalités d’affectation de la fiscalité énergétique proposées par le projet de loi de finances rectificative pour 2015 peuvent être résumées ainsi :

Les règles fiscales

La TICPE, la TICC, et les taxes communale et départementale TCCFE et TDCFE ne sont pas modifiées.

En revanche, TICGN absorbe la CTSSG et la contribution biométhane.

De même, la TICFE absorbe la CSPE.

Cette réforme vise un objectif de simplification, en réduisant le nombre de taxes pesant sur le consommateur de gaz naturel.

Les taxes sur l’électricité et le gaz augmenteraient de 30 % entre 2014 et 2016 (de 9,7 milliards d’euros en 2014 à environ 12,6 milliards en 2016).

LES TAXES SUR L’ÉLECTRICITÉ ET LE GAZ PRÉVUES
PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2015

(en millions d’euros)

Impôt

Rendement

en année pleine

Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE)

8 009

Contribution tarifaire d’acheminement (CTA)

1 529

Taxe communale/départementale sur la consommation finale d’électricité (TCFE)

2 270

Taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN)

800

Total

12 608

Source : Voies et moyens, tome 1, annexe au projet de loi de finances pour 2016 ; évaluations préalables des articles du projet de loi de finances rectificative pour 2015 ; réponses au questionnaire de la Rapporteure générale adressé au Gouvernement.

Les affectations

L’article 1er modifie la part de TICPE affectée aux régions et départements à titre de compensation des transferts de compétences.

La TICGN « nouvelle formule » et la TICFE « nouvelle formule » sont intégralement affectées à l’État ; une quote-part est affectée au nouveau CAS Transition énergétique et le surplus au budget général ;

Les autres règles d’affectation ne sont pas modifiées.

Les affectations du produit de la fiscalité énergétique, telles qu’elles résulteraient de l’adoption du projet de loi de finances rectificative, sont récapitulées dans le tableau ci-dessous.

AFFECTATION DES TAXES SUR LES ÉNERGIES PROPOSÉE
PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2015

Catégorie

d’impôt

Impôt

Énergie taxée

Affectation

État

Budget général

Affectation

État

CAS Transition énergétique

Autres affectations

TIC

Taxes intérieures de consommation

TICPE

Produits pétroliers

en partie

AFITF, départements et régions

TICC

Charbon

en totalité

TICGN

« nouvelle formule »

Gaz naturel

à 97,84 %

à 2,16 %

TICFE

« nouvelle formule »

Électricité

– 2 043 millions en 2016

– 2 548 millions à partir de 2017

Totalité sous déductions de :

– 2 043 millions en 2016,

– 2 548 millions à partir de 2017

TCCFE

TDCFE

communes et départements

Contributions spécifiques

CTA

Gaz naturel et électricité

Caisse nationale de retraite des industries électriques et gazières (CNIEG)

Source : commission des finances.

La réforme portée par le présent projet de loi de finances rectificative vise, ainsi, à mettre un terme au financement extrabudgétaire des charges de service public de l’électricité et de fourniture du gaz naturel. Les compensations versées aux opérateurs électriques et fournisseurs de gaz naturel seront désormais prises en charge directement par l’État.

II. L’ÉTAT DU DROIT : LE FINANCEMENT EXTRABUDGÉTAIRE DES CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L’ÉLECTRICITÉ ET DE FOURNITURE DU GAZ NATUREL

Les entreprises du secteur de l’électricité et du gaz supportent des obligations de service public qui sont définies, pour l’électricité, par les articles L. 121-1 à L. 121-5 du code de l’énergie et, pour le gaz naturel, aux articles L. 121-32 à L. 121-34 du même code.

Ces charges de service public sont des dépenses publiques d’organismes divers d’administration centrale (ODAC) au sens de la comptabilité nationale.

Les articles L. 121-6, pour l’électricité, et L. 121-35, pour le gaz naturel, du même code pose le principe d’une compensation des charges imputables aux missions de service public assignées à ces opérateurs électriques et fournisseurs de gaz.

Le financement des compensations des charges de service public est assuré à ce jour par un dispositif extrabudgétaire, via des comptes spécifiques gérés par la Caisse des dépôts et consignations alimenté par plusieurs contributions spécifiques :

– pour l’électricité, la CSPE ;

– pour le gaz naturel, la CTSSG et la contribution biométhane.

Le rôle de la Caisse des dépôts et consignations

Les recettes de CSPE, de CTSSG et de contribution biométhane recouvrées sont reversées par les fournisseurs d’électricité et de gaz naturel à la Caisse des dépôts et consignations.

Concernant la CSPE, la Caisse des dépôts reverse quatre fois par an aux opérateurs électriques qui supportent des charges de service public, les sommes collectées au prorata de leurs droits à compensation.

Pour la CTSSG et la contribution biométhane, la Caisse des dépôts reverse périodiquement aux fournisseurs de gaz naturel la différence entre le montant des charges de service public supportées et le montant de la contribution due par ces derniers.

La Caisse des dépôts retrace ces opérations dans des comptes spécifiques.

A. LES CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L’ÉLECTRICITÉ ET DE FOURNITURE DU GAZ NATUREL

1. Les charges de service public de l’électricité

Ces obligations de service public sont imposées aux fournisseurs historiques d’électricité (EDF pour l’essentiel, Électricité de Mayotte et les entreprises locales de distribution).

Article L 121-1 du code de l’énergie

« Le service public de l’électricité a pour objet de garantir, dans le respect de l’intérêt général, l’approvisionnement en électricité sur l’ensemble du territoire national.

« Dans le cadre de la politique énergétique, il contribue à l’indépendance et à la sécurité d’approvisionnement, à la qualité de l’air et à la lutte contre l’effet de serre, à la gestion optimale et au développement des ressources nationales, à la maîtrise de la demande d’énergie, à la compétitivité de l’activité économique et à la maîtrise des choix technologiques d’avenir, comme à l’utilisation rationnelle de l’énergie.

« Il concourt à la cohésion sociale, à la lutte contre les exclusions, au développement équilibré du territoire, dans le respect de l’environnement, à la recherche et au progrès technologique, ainsi qu’à la défense et à la sécurité publique.

« Matérialisant le droit de tous à l’électricité, produit de première nécessité, le service public de l’électricité est géré dans le respect des principes d’égalité, de continuité et d’adaptabilité et dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de coûts, de prix et d’efficacité économique, sociale et énergétique. »

a. Définition des charges de service public de l’électricité

Les quatre grandes catégories de charges de service public de l’électricité sont définies aux articles L. 127-7 et L. 121-8 du code de l’énergie et portent sur :

– le soutien aux énergies renouvelables (74) ;

– le soutien à la cogénération ;

– la péréquation tarifaire des zones non interconnectées (ZNI) au territoire métropolitain ;

– les dispositifs sociaux tels que la « tarification spéciale produit de première nécessité ».

b. Des dépenses dynamiques depuis 2010

Entre 2002 et 2006, les charges de service public de l’électricité ont évolué dans une fourchette comprise entre 1,4 et 1,6 milliard d’euros avant d’être portées à 1,99 milliard en 2007 et 1,84 milliard en 2008.

De 2009 à 2015, ces charges ont progressé de 2,66 milliards d’euros à 6,34 milliards d’euros. Elles devraient dépasser les 7 milliards d’euros en 2016. Les charges de service public de l’électricité ont ainsi été multipliées par cinq depuis leur création.

Cette dynamique s’explique essentiellement par le soutien aux énergies renouvelables qui s’élevait à 560 millions d’euros en 2009 et devrait atteindre 4,7 milliards d’euros en 2016. Les dispositifs sociaux connaissent également une évolution dynamique (de 62 millions d’euros en 2010 à 350 millions d’euros prévus en 2015).

CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L’ÉLECTRICITÉ DEPUIS 2009

(en millions d’euros)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

prévision

2016

prévision

Énergies renouvelables

559,9

754,6

1 464,0

2 673,4

3 156,1

3 749,1

4 041,4

4 720,1

Cogénération : contrat d’achats hors énergies renouvelables

(dont complément de rémunération)

1 002,2

867,7

838,5

766,1

554,1

480,8

465,0

618,6

(17)

Péréquation tarifaire

1 033,2

969,8

1 198,3

1 296,7

1 422,1

1 584,0

1 484,3

1 375,1

Dispositifs sociaux

66,3

61,7

68,5

93,8

133,4

223,0

350,2

321,0

Total

2 661,6

2 653,8

3 569,2

4 830,1

5 265,7

6 037,0

6 340,9

7 034,8

Source : Commission de régulation de l’énergie.

En outre, les charges pour l’année 2016 doivent prendre en compte, au-delà des charges estimées par la Commission de régulation de l’énergie (CRE), les dépenses du dispositif de compensation carbone, votées en première lecture du projet de loi de finances pour 2016 à l’Assemblée nationale, pour un montant de 93 millions d’euros, ainsi que les dépenses en faveur du Médiateur national de l’énergie, de l’Agence de services et de paiement (ASP) et de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) pour un montant de 4 millions d’euros qui sont également supportées par la CSPE, soit un total de 7 132 millions d’euros de charges pour l’année 2016.

2. Les charges du service public de fourniture de gaz naturel

a. La fourniture de gaz au tarif spécial de solidarité.

Le tarif spécial de solidarité (TSS), régi par les articles L. 445-5 et L. 445-6 du code de l’énergie, consiste en un abattement forfaitaire du tarif de gaz. Il a bénéficié à 677 000 consommateurs en 2013, clients de 25 fournisseurs différents de gaz naturel. Ces derniers devraient supporter un manque à gagner de 112,7 millions d’euros en 2015 au titre de ce dispositif.

CHARGES DE SERVICE PUBLIC LIÉES À LA FOURNITURE DE GAZ
AU TARIF SPÉCIAL DE SOLIDARITÉ DEPUIS 2008

(en millions d’euros)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

prévision

2015

prévision

2016

prévision

Coût du tarif spécial de solidarité

5,7

18,4

18,1

20,4

31,7

49,2

80,2

112,7

101,6

Source : Commission de régulation de l’énergie.

b. L’obligation d’achat du biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturel

L’obligation d’achat de biométhane est codifiée à l’article L. 446-2 du code de l’énergie.

Article L. 446-2 du code l’énergie

« Sous réserve de la nécessité de préserver le bon fonctionnement des réseaux de transport et de distribution de gaz naturel, tout producteur de biogaz peut conclure avec un fournisseur de gaz naturel un contrat de vente de biogaz produit sur le territoire national suivant des modalités précisées par décret en Conseil d’État. Les surcoûts éventuels qui en résultent pour le fournisseur font l’objet d’une compensation.

« L’autorité administrative désigne, par une procédure transparente, un acheteur en dernier recours tenu de conclure un contrat d’achat de biogaz avec tout producteur de biogaz qui en fait la demande. »

Le montant des charges de service public liées à l’achat de biométhane est estimé à 23 millions d’euros au titre de l’année 2016. Ce montant est près de neuf fois supérieur aux charges constatées au titre de l’année 2014 (2,7 millions d’euros) et trois fois supérieur aux charges prévisionnelles au titre de 2015 (7,6 millions d’euros). Cette augmentation très importante des charges est due à l’émergence de la filière à la suite de la mise en place du dispositif de soutien fin 2011. Alors que six installations injectaient en 2014, leur nombre devrait augmenter en 2015 et en 2016 et représenter respectivement vingt et trente-neuf installations.

B. LE FINANCEMENT DES COMPENSATIONS

1. La contribution au service public de l’électricité (CSPE)

a. L’assiette et taux

La CSPE a été instituée par la loi du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l’électricité (75). Elle relève de la catégorie des « impositions de toutes natures » au sens de l’article 34 de la Constitution. Elle est destinée à couvrir les charges de service public de l’électricité : le soutien aux énergies renouvelables, la péréquation tarifaire, les tarifs sociaux, le soutien à la cogénération, une partie du budget du médiateur de l’énergie, et la prime aux opérateurs d’effacement.

La CSPE est assise sur la consommation finale d’électricité. Des exonérations et des plafonnements sont toutefois prévus pour les électro-intensifs : exonération des auto-producteurs jusqu’à 240 gigawattheures par site de production, plafonnement à 659 000 euros (pour l’année 2016) par site de consommation, et plafonnement à 0,5 % de la valeur ajoutée des sociétés industrielles consommant plus de 7 gigawattheures. La Commission de régulation de l’énergie (CRE) estime ainsi, qu’en 2015, sur une consommation intérieure globale de 461,6 térawattheures, environ 359,1 térawattheures devraient être soumis à la CSPE, soit 78 % de la consommation intérieure.

Son taux, qui évolue chaque année, n’est pas fixé par le Parlement mais par des autorités administratives selon les modalités définies par l’article L. 121-13 du code de l’énergie qui prévoit que, « à défaut d’arrêté fixant le montant de la contribution due pour une année donnée avant le 31 décembre de l’année précédente, le montant proposé par la Commission de régulation de l’énergie […] entre en vigueur le 1er janvier, dans la limite toutefois d’une augmentation de 0,003 euro par kilowattheure par rapport au montant applicable avant cette date ».

Une question prioritaire de constitutionnalité transmise au Conseil constitutionnel à l’encontre de ce mode de fixation du taux de la CSPE n’a pas prospéré, pour un motif d’irrecevabilité, dès lors que « la méconnaissance par le législateur de l’étendue de sa compétence dans la détermination de l’assiette ou du taux d’une imposition n’affecte par elle-même aucun droit ou liberté que la Constitution garantit » (76). Pour autant, il est raisonnable de penser que de telles modalités de fixation du taux de cette contribution ne seraient pas jugées conformes à la Constitution dans le cadre d’un contrôle a priori de la loi.

Le taux de la CSPE serait ainsi de 22,5 euros par mégawattheure en 2016 au lieu de 3 euros en 2002. Le tarif de la CSPE est cependant inférieur aux propositions de la CRE depuis 2008 (77).

TARIF PAR ANNÉE DE LA CSPE PROPOSÉ PAR LA COMMISSION DE RÉGULATION DE L’ÉNERGIE COMPARÉ AU TARIF RETENU

Année

Proposition de la Commission de régulation de l’énergie / mégawattheure

(en euros)

Tarif retenu / mégawattheure

(en euros)

2002

3,0

3,0

2003

3,3

3,3

2004

4,5

4,5

2005

4,5

4,5

2006

4,2

4,5

2007

3,4

4,5

2008

4,9

4,5

2009

5,8

4,5

2010

6,5

4,5

2011

12,9

7,5

puis 9 à partir du 31 juillet

2012

13,7

9

puis 10,5 à partir du 1er juillet

2013

18,8

13,5

2014

22,5

16,5

2015

25,93

19,5

2016

27,05

22,5

Source : commission des finances.

b. Le déficit de compensation

Le rendement de la CSPE a fortement progressé ces dernières années sous l’effet des augmentations de taux.

PART DE CPSE AFFECTÉE AUX OPÉRATEURS ÉLECTRIQUES

(en millions d’euros)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

prévision

2 016

prévision

CSPE

1 694

1 656

1 936

2 882

3 627

5 146

5 623

7 115

8 261

Source : Commission de régulation de l’énergie et tome I de l’annexe Voies et moyens au projet de loi de finances pour 2016.

Toutefois, son rendement a longtemps été insuffisant pour faire face aux diverses compensations auxquelles ont droit les opérateurs électriques.

Ainsi, sur la période 2008-2014, le rendement de la CSPE a été inférieur de 4,3 milliards d’euros aux besoins. En 2015 et 2016, en revanche, grâce au dynamisme de la CSPE, le déficit de compensation cumulé sur la période 2008-2016 devrait se réduire à 2,8 milliards d’euros.

COMPARAISON ENTRE LA PART DE CSPE AFFECTÉE AUX OPÉRATEURS ÉLECTRIQUES ET LEURS CHARGES DE SERVICE PUBLIC D’ÉLECTRICITÉ

(en millions d’euros)

Période

Part de CSPE affectée aux opérateurs électriques

Charges de service public des opérateurs électriques

Solde de compensation

2008

1 694

1 840

– 146

2009

1 656

2 662

– 1 006

2010

1 936

2 654

– 718

2011

2 882

3 570

– 688

2012

3 627

4 830

– 1 203

2013

5 146

5 266

– 120

2014

5 623

6 037

– 414

2008-2014

22 564

26 859

– 4 295

2015 prévision

7 002

6 341

+ 661

2016 prévision

7 970

7 132

+ 838 

2008-2016

37 536

40 332

– 2 796

Source : calcul commission des finances et réponses au questionnaire de la Rapporteure générale adressé au Gouvernement.

Le déficit de compensation est subi intégralement par Électricité de France (EDF), les autres opérateurs étant prioritaires dans la perception de leur part de CSPE.

La dette de l’État à l’égard d’EDF est ainsi passée de 527 millions d’euros en 2009 à près de 5,5 milliards d’euros en 2014. Elle devrait diminuer en 2015 et 2016 grâce à une compensation supérieure aux charges de service public supportées. Elle devrait ainsi être de 4,9 milliards d’euros en 2015, puis de 3,4 milliards d’euros en 2016 selon les estimations actuelles de la CRE – ces estimations ne tiennent pas compte de la réforme portée par le présent projet de loi de finances rectificative.

Selon des informations recueillies par la Rapporteure générale, le Gouvernement s’est engagé auprès d’EDF à ce que cette dette soit intégralement résorbée d’ici la fin de l’année 2018.

Le tableau qui suit montre comment s’est constituée la dette de l’État à l’égard d’EDF (78).

CONSTITUTION DE LA DETTE DE L’ÉTAT À L’ÉGARD D’EDF
AU TITRE DES CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L’ÉLECTRICITÉ

(en millions d’euros)

Année

Charges de service public d’électricité à la charge d’EDF au titre de l’année N

Compensation reçue au titre de l’année N

Défaut de recouvrement au titre de l’année N

Défaut de recouvrement cumulé

2002

1 299

1 254

45

45

2003

1 450

1 206

244

288

2004

1 667

1 633

34

323

2005

1 460

1 664

– 204

119

2006

1 559

1 626

– 67

52

2007

1 238

1 421

– 183

– 131

2008

1 571

1 637

– 66

– 198

2009

2 275

1 550

725

527

2010

2 371

1 809

562

1 089

2011

4 015

2 662

1 352

2 441

2012

4 459

3 377

1 081

3 523

2013

5 633

4 896

736

4 259

2014

6 484

5 272

1 212

5 471

2015

Prévision

6 186

6 772

– 587

4 885

2016

Prévision

6 558

8 079

– 1 521

3 363

Source : Commission de régulation de l’énergie.

EDF a par ailleurs revendiqué une indemnité au titre des frais financiers qu’elle expose pour le portage de ce déficit de compensation. Un accord a été conclu entre l’État et EDF en janvier 2013 en vue de solder le déficit de compensation d’EDF.

L’article 59 de la loi de finances rectificative pour 2013 (79), prévoit ainsi que, pour les opérateurs soumis à des charges imputables aux missions de service public définies aux articles L. 121-7 et L. 121-8 du code de l’énergie, si le montant de la compensation des charges effectivement perçu est inférieur (ou supérieur) au montant constaté des charges subies, il en résulte une charge (ou un produit) qui porte intérêt à un taux fixé par décret.

Le même article a mis en place un dispositif spécifique pour le règlement des arriérés accumulés par EDF jusqu’au 31 décembre 2012. Il prévoit que la compensation due à EDF au titre de l’article L. 121-10 du code de l’énergie afin de compenser ses charges imputables aux missions de service public soit exceptionnellement majorée d’un montant fixé par arrêté des ministres chargés de l’énergie et du budget correspondant aux coûts de portage engendrés par le retard de compensation des charges qu’elle a supportées jusqu’au 31 décembre 2012.

L’arrêté du 18 septembre 2014 relatif à la compensation des charges de service public de l’électricité et pris en application de l’article précité a fixé le montant de cette majoration à 627 millions d’euros. Cela représente une somme de l’ordre de 1,60 euro par mégawattheure en termes de contribution unitaire pour le consommateur.

2. La contribution au tarif spécial de solidarité gaz (CTSSG)

L’article L. 121-37 du code de l’énergie institue une contribution due par les fournisseurs de gaz pour compenser les pertes de recettes et les coûts de gestion subis par ceux d’entre eux qui ont des clients bénéficiaires du tarif spécial de solidarité gaz.

TARIF DE LA CONTRIBUTION AU TARIF SPÉCIAL DE SOLIDARITÉ GAZ (CTSSG)

(en euros)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

prévision

2015

prévision

Tarif de la CTSSG /MWh

0,026

0,089

0,045

0,045

0,045

0,1

0,2

0,2

Source : Commission de régulation de l’énergie.

Le rendement de la CTSSG a été d’environ 87 millions d’euros en 2014 et devrait être de 99 millions d’euros en 2015.

Il n’existe pas de déficit de compensation au titre de ce mécanisme. Le compte CTSSG de la Caisse des dépôts et consignations affichait même un excédent de 14 millions d’euros selon la Commission de régulation de l’énergie (80).

3. La contribution biométhane

L’article L. 121-43 du code de l’énergie dispose que les charges imputables aux obligations de service public assignées aux fournisseurs de gaz naturel au titre de l’obligation d’achat du biométhane sont compensées par une contribution biométhane.

Le tarif de la contribution biométhane est de 0,0153 euro par mégawattheure pour 2015. Pour 2016, elle aurait dû s’élever à 0,0492 euro pour couvrir la montée en puissance du dispositif. Le rendement de la contribution biométhane serait alors d’environ 23 millions d’euros.

Il n’existe pas de déficit de compensation au titre de ce dispositif.

III. DROIT PROPOSÉ : LA BUDGÉTISATION DES COMPENSATIONS DE CHARGES DU SERVICE PUBLIC DE L’ÉLECTRICITÉ ET DE FOURNITURE DU GAZ NATUREL

La suppression de la CSPE, de la CTSSG et de la contribution biométhane entraîne un certain nombre de mesures de coordination qui ne modifient pas le champ et l’étendue des charges de service public de l’électricité et de fourniture du gaz naturel.

Le III du présent article modifie ou supprime, en conséquence, les dispositions du code l’énergie relatives à la CSPE, à la CTSSG et à la contribution biométhane. Le IV modifie, par mesure de coordination, le III de l’article 201 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Le V modifie, par mesure de coordination, l’article 238 bis HW du code général des impôts. Le VI abroge, par mesure de coordination, l’article L. 135 N du livre des procédures fiscales.

La transformation du comité de gestion de la CSPE en comité de gestion des charges de service public de l’électricité

Le comité de gestion de la CSPE changerait de dénomination pour tenir compte de la suppression de la CSPE. Il s’intitulerait désormais « comité de gestion des charges de service public de l’électricité ».

Il conserverait sa mission de suivi et d’analyse prospective de l’ensemble des charges de service public de l’électricité. En revanche, sa mission de suivi de la CSPE deviendrait, de fait, sans objet. Il n’est ainsi pas prévu d’étendre sa compétence à la TICFE.

La réforme portée par le présent projet de loi de finances rectificative s’effectue, de ce point de vue, à droit constant.

Le droit proposé vise à traiter en dépenses de l’État, et non en plus en dépenses d’ODAC, l’ensemble des charges de service public de l’électricité et de fourniture du gaz naturel :

– les dépenses se rattachant à la politique publique de transition énergétique seraient rattachées à un nouveau compte d’affectation spéciale ;

– celles relevant d’autres politiques (dispositifs sociaux, péréquation territoriale, soutien à la cogénération, budget du médiateur l’énergie) seraient inscrites dans le budget général de l’État.

Le droit proposé permet donc d’accroître la visibilité et le suivi de ces dépenses par le Parlement. De même, un meilleur suivi des recettes serait permis puisque les contributions spécifiques dont le tarif n’est pas voté par le Parlement seraient supprimées (CSPE, CTSSG, contribution biométhane).

Le VII du présent article prévoit, d’une part, que l’entrée en vigueur de la réforme interviendrait au 1er janvier 2016, d’autre part que les dispositions actuelles du code l’énergie resteraient applicables pour les consommations d’électricité et les ventes de gaz naturel effectuées jusqu’au 31 décembre 2015.

Un aménagement de la périodicité des versements des compensations

Le II du présent article dispose que la Caisse des dépôts et consignations assure, pour le compte de l’État, le versement des compensations versées aux opérateurs électriques et aux fournisseurs de gaz naturel.

Par application du III du présent article, le reversement des contributions aux entreprises concernées interviendrait selon un rythme mensuel et non plus trimestriel.

Les recettes de TICFE et de TICGN seraient toujours gérées la Caisse des dépôts.

La Caisse des dépôts verserait mensuellement des acomptes aux opérateurs électriques et aux fournisseurs de gaz naturel qui supportent des charges de service public. Une régularisation interviendrait l’année suivante lorsque le montant des acomptes versés au titre d’une année ne correspondrait pas au montant constaté des charges de l’année.

La Caisse des dépôts retracerait toujours ces opérations dans des comptes spécifiques.

A. LES COMPENSATIONS PRISES EN CHARGE PAR LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

Le 1° et le 2° du I du présent article définissent, respectivement, les recettes et les dépenses de ce nouveau compte d’affectation spéciale.

1. Les recettes du CAS Transition énergétique

Le CAS Transition énergétique comprendrait, outre d’éventuels versements du budget général, deux types de recette : une quote-part du produit de la nouvelle TICFE ainsi qu’une quote-part de la nouvelle TICGN. Ces recettes, assises sur les consommations énergétiques d’électricité et de gaz naturel, sont en relation directe avec les dépenses du compte d’affectation spéciale visant à compenser, auprès des fournisseurs d’électricité et de gaz naturel, les charges de service public de l’électricité et de fourniture du gaz naturel supportées au titre de la transition énergétique.

a. Une quote-part du produit de la nouvelle TICFE

En premier lieu, serait affectée au CAS Transition énergétique l’intégralité de la TICFE (dans sa nouvelle formule telle qu’elle résulterait de l’adoption de l’article 11 du présent projet de loi de finances rectificative), sous déduction d’une somme de 2 043 millions pour l’année 2016, et de 2 548 millions pour les années 2017 et suivantes.

Autrement dit, la TICFE « nouvelle formule » alimenterait :

– le budget général pour 2 043 millions d’euros en 2016, et pour 2 548 millions à partir de 2017 ;

– le CAS Transition énergétique pour le surplus.

AFFECTATION DE LA TICFE EN 2016 ET 2017

(en millions d’euros)

Année

Rendement budgétaire de la TICFE

Affectation budget général

Affectation CAS Transition énergétique

2016

6 416

2 043

4 373

2017

8 031

2 548

5 483

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

i. Affectation au budget général pour 2016 et 2017

En année pleine, la TICFE revenant au budget général correspond à la somme de :

– la TICFE « historique », en l’absence de réforme, pour un montant de 61 millions d’euros ;

– la TICFE permettant de couvrir les dépenses de service public de l’électricité qui seront imputées sur le budget général (péréquation avec les zones non interconnectées, tarifs sociaux de l’électricité, cogénération, compensation carbone, intérêts de la dette, Médiateur de l’énergie, frais de l’agence des services des paiements et de la Caisse des dépôts et consignations) pour un montant de 2 487 millions.

La TICFE revenant au budget général a donc été fixée à 2 548 millions d’euros.

Pour l’année 2016, seulement 79,7 % des charges de service public de l’électricité prévues pourront être couvertes par des crédits budgétaires au cours de l’année en raison d’un décalage de perception de la TICFE sur 2017. Cela correspond à 79,7 % de 2 487 millions d’euros, soit 1 982 millions d’euros.

L’estimation de cette montée en charge progressive correspond également à la diminution du système actuel de CSPE. Ainsi la transition entre le système actuel et le schéma budgétaire cible ne devrait pas occasionner de rupture dans la compensation des charges aux opérateurs qui les supportent.

ii. Affectation au CAS pour 2016

La prévision de rendement de la TICFE due au titre de l’année 2016 est de 8,03 milliards d’euros selon le Gouvernement. Son tarif est fixé à 22,50 euros par mégawattheure soit le tarif initialement prévu pour la CSPE en 2016.

Toutefois, seule une quote-part estimée à 79,7 % pourra être recouvrée en 2016 en raison d’un décalage de perception en 2017 qui s’explique notamment par les modalités de facturation aux consommateurs finals. La recette budgétaire de TICFE pour 2016 est dès lors évaluée à 6,4 milliards d’euros (81).

Compte tenu de la déduction opérée au profit du budget général (2,04 milliards d’euros), le montant des recettes du CAS Transition énergétique est évalué pour 2016 à 4,4 milliards d’euros.

iii. Affectation au CAS pour 2017

Pour 2017, en dépit de la hausse de la quote-part allouée au budget général (2,55 milliards d’euros), la part revenant au CAS Transition énergétique augmenterait. Ceci s’explique par le fait que le rendement budgétaire de la TICFE atteindrait son régime de croisière (8 milliards d’euros) : le reliquat de TICFE due au titre de 2016 et perçue en 2017 compenserait le reliquat de TICFE due au titre de 2017 et à percevoir en 2018. Le montant des recettes du CAS Transition énergétique est, ainsi, évalué pour 2017 à 5,5 milliards d’euros par le Gouvernement.

b. Une quote-part du produit de la nouvelle TICGN

Serait affectée, en second lieu, au CAS Transition énergétique une part de la TICGN (dans sa nouvelle formule telle qu’elle résulterait de l’adoption de l’article 11 du présent projet de loi de finances), fixée à 2,16 %. Cette part de TICGN « nouvelle formule » correspondrait à la contribution biométhane, supprimée et intégrée dans la nouvelle TICGN par l’article 11. Le rendement global de la TICGN étant évalué à 800 millions d’euros pour l’année 2017, la recette affectée au CAS Transition énergétique devrait s’élever à 17 millions d’euros (82).

AFFECTATION DE LA TICGN EN 2016 ET 2017

(en millions d’euros)

Année

Rendement budgétaire de la TICGN

Affectation

budget général

Affectation CAS Transition énergétique

2016

800

783

17

2017

800*

777*

23*

* calcul commission des finances.

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Le tarif de la TICGN est fixé pour 2015 à 2,93 euros (83) par mégawattheure. Afin de pouvoir financer les charges relatives au tarif spécial de solidarité et au biométhane, évaluées par la CRE à 113 millions d’euros par sa délibération du 15 octobre 2015, le taux de TICGN doit être relevé en 2016 de 0,33 euro/mégawattheure.

2. Les dépenses

Deux nouveaux programmes sont créés au titre des dépenses du CAS Transition énergétique :

– le premier correspond aux dépenses de soutien aux énergies renouvelables (programme 764 Soutien à la transition énergétique) ;

– et le second au remboursement de la dette de l’État à l’égard d’EDF (programme 765 Engagements financiers liés à la transition énergétique).

Le Gouvernement a indiqué que ces programmes seront insérés dans le projet de loi de finances pour 2016 durant la navette parlementaire via un amendement de coordination.

a. Les dépenses de soutien à la transition énergétique

Les dépenses de ce programme correspondraient aux charges de service public de l’électricité qui participent à la politique publique de transition énergétique, c’est-à-dire les dépenses de soutien aux énergies renouvelables. Les crédits inscrits à ce titre pour 2016 s’élèvent à 3,63 milliards d’euros

Cela correspond à environ 77 % de la prévision de dépenses de la CRE au titre du soutien aux énergies renouvelables pour 2016 (4,72 milliards d’euros).

Il est également prévu une dépense de 17 millions d’euros au titre de l’achat de biogaz alors que les dépenses prévues à ce titre sont estimées à 23 millions d’euros par la CRE.

La différence entre les crédits prévus au programme 764 et les charges prévisionnelles de service public s’expliquerait, selon le Gouvernement, par un décalage d’environ 20 % des dépenses prévues au titre de 2016 sur l’exercice 2017.

b. Le traitement de la dette de l’État à l’égard d’EDF

La dette de l’État à l’égard d’EDF devrait être de 4,88 milliards en 2015 au titre du déficit de compensation des années antérieures.

Le remboursement de cette dette interviendra via le programme 765 Engagements financiers liés à la transition énergétique. Des crédits sont inscrits à ce titre pour 744 millions d’euros en 2016.

Selon des renseignements recueillis par la Rapporteure générale auprès d’EDF, le remboursement prévu pour 2017 serait de l’ordre de 1,2 milliard d’euros.

3. Les avantages de la création d’un compte d’affectation spéciale pour financer la transition énergétique

a. Assurer un meilleur contrôle du parlement

En l’état du droit, le tarif de la CSPE progresse de 3 euros par mégawattheure chaque année de façon automatique. En revanche, le tarif de la TIFCE, qui serait fixé au tarif 2016 de la CSPE (soit 22,50 euros par mégawattheure) sera fixe : un vote du Parlement sera nécessaire à chaque augmentation. Il va de même pour le tarif de la TICGN.

La suppression des contributions spécifiques sur l’électricité et le gaz naturel et leur basculement sur la TICFE et la TICGN doit permettre un meilleur contrôle du Parlement sur une part importante de la fiscalité énergétique (environ 10 milliards d’euros).

De même, les dépenses de soutien aux énergies renouvelables deviendraient des dépenses d’État et non des dépenses d’ODAC. Elles feraient ainsi l’objet d’un examen et d’un vote annuel par le Parlement.

b. Stabiliser la fiscalité sur l’électricité

La réforme doit permettre de stabiliser la fiscalité sur l’électricité en décorrélant la trajectoire d’augmentation des charges de service public liées au soutien aux énergies renouvelables de celle du tarif des taxes sur cette énergie.

Autrement dit, l’augmentation inéluctable des dépenses de soutien aux énergies renouvelables n’entraînera plus une hausse automatique de la fiscalité sur l’électricité.

c. Élargir les sources de financement de la transition énergétique

La création d’un compte d’affectation spéciale permet d’envisager l’affectation de nouvelles recettes au financement des charges de service public de l’électricité afférentes au soutien aux énergies renouvelables.

Le financement de la transition énergétique ne pèsera plus sur la seule consommation d’électricité.

Ainsi, dans l’exposé des motifs du présent article, le Gouvernement a précisé qu’à compter de 2017, la hausse du prix de la tonne de carbone – intégrée dans les tarifs de la TICPE, de la TICGN, et de la TICC – pourra être affectée au CAS Transition énergétique.

Néanmoins, l’affectation d’une part des recettes des TIC n’est pas prévue par le dispositif du présent article.

d. Maintenir les dépenses liées à la transition énergétique hors du champ des normes zéro valeur et zéro volume

Actuellement, les compensations versées par le biais des contributions spécifiques sur le gaz et l’électricité n’entrent pas dans le champ des normes de dépenses car ces taxes ne sont pas plafonnées. Une prise en charge par le budget général de l’État aboutirait à les inclure dans le champ des normes de dépenses « zéro valeur » et « zéro volume ».

L’évolution des dépenses de l’État obéit à deux normes de progression

La norme « zéro valeur » s’applique aux dépenses du budget général hors charges de la dette et hors charge de pensions, aux prélèvements sur recettes et aux recettes affectées plafonnées.

La norme « zéro volume » s’applique à périmètre plus large que la norme « zéro valeur » puisqu’elle inclut également les charges de pension et les charges d’intérêts.

En revanche, les dépenses des comptes d’affectation spéciale ne sont pas soumises aux normes de dépenses. Cela s’explique par le fait que ces comptes doivent, en tout état de cause, être équilibrés.

Or, les dépenses de soutien aux énergies renouvelables sont très dynamiques et sont appelées à progresser de façon importante. Il est dès lors opportun de les isoler au sein d’un compte d’affectation spéciale afin de les maintenir en dehors du champ des normes de dépenses À défaut, le dynamisme de ces dépenses obligerait l’État à réaliser des économies sur d’autres secteurs.

En outre, la nécessité d’équilibrer le compte et la règle d’antériorité de la recette sur la dépense propre aux comptes d’affectation spéciale garantiront que le dynamisme de ces dépenses sera financé par des hausses de recettes et non par le déficit et l’endettement public. Les principes originels de la CSPE, selon lesquels la recette doit s’ajuster aux besoins, seront donc toujours respectés.

4. L’équilibre du compte n’est pas assuré sans recettes supplémentaires

a. Le déséquilibre du compte en l’état du projet d’article présenté

Selon un calcul de la Rapporteure générale, l’équilibre du CAS Transition énergétique n’est pas assuré pour 2017 compte tenu du dynamisme des dépenses de soutien aux énergies renouvelables et du remboursement de la dette de l’État à l’égard d’EDF.

Ainsi, en 2017, au moins 6,2 milliards d’euros de dépenses sont à prévoir (au moins 5 milliards d’euros au titre du soutien aux énergies renouvelables) et 1,2 milliard d’euros au titre du remboursement de la dette d’EDF selon des renseignements recueillis auprès de cette entreprise.

Or, les recettes du CAS seraient limitées à 5,5 milliards d’euros.

Ce déséquilibre est, en outre, appelée à s’accentuer avec la montée en puissance des énergies renouvelables prévue par la politique publique de transition énergétique.

b. L’affectation nécessaire d’une fraction des TIC au titre de la hausse de leur composante carbone

Selon un calcul de la Rapporteure générale, la hausse de la fiscalité sur les TIC au titre de l’augmentation de la contribution climat énergie devrait être de l’ordre de 1,5 milliard d’euros par an (voir commentaire de l’article 11 du présent rapport).

Il serait dès lors nécessaire de prévoir l’affectation d’une partie de ces ressources au CAS Transition énergétique afin d’assurer son équilibre à partir de 2017.

Interrogé sur ce point par la Rapporteure générale, le Gouvernement a indiqué que des recettes supplémentaires seraient affectées au CAS dans le cadre de la loi de finances pour 2017. Le Gouvernement a confirmé qu’une fraction des autres TIC, correspondant à la hausse de la « contribution climat énergie », serait bien affectée au CAS.

B. LES COMPENSATIONS PRISES EN CHARGE PAR LE BUDGET GÉNÉRAL DE L’ÉTAT

Les compensations permettant de financer les charges de service public liées à la péréquation tarifaire, aux tarifs sociaux, au soutien à la cogénération, au budget du médiateur de l’énergie et à la prime aux opérateurs d’effacement seront prises en charge par le budget général de l’État dans un nouveau programme 345 Service public de l’énergie rattaché à la mission Écologie, développement et mobilités durables.

Le Gouvernement a indiqué que ce programme sera inséré dans le projet de loi de finances pour 2016 durant la navette parlementaire via un amendement de coordination. Des crédits sont prévus à ce titre à hauteur de 2,05 milliards d’euros pour 2016.

CRÉDITS POUR 2016 DU PROGRAMME 345 SERVICE PUBLIC DE L’ÉNERGIE

(en millions d’euros)

Action 1 Solidarité avec les zones interconnectées au réseau métropolitain

1 072,7

Action 2 Protection des consommateurs en situation de précarité énergétique

316,1

Action 3 Soutien à la cogénération

468,2

Action 4 Compensation carbone

93

Action 5 Frais de support

93,9

Action 6 Médiateur de l’énergie

5,7

Total

2 049,6

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015, annexe explicative des modalités de financement en 2016 des charges budgétaires relatives au service public de fourniture d’électricité et de gaz ainsi qu’à la transition énergétique.

*

* *

Suivant l’avis favorable de la Rapporteure générale, la commission adopte l’amendement CF 142 de M. Jean Launay.

Elle adopte ensuite l’article 3 modifié.

*

* *

TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES
ET DES CHARGES

Article 4
Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d’autorisation des emplois

L’article d’équilibre du projet de loi de finances rectificative pour 2015 clôt la première partie. Il ne porte que sur le budget de l’État.

En application de l’article 35 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les lois de finances rectificatives doivent comporter un tableau d’équilibre présentant les données générales de l’équilibre budgétaire et fixer les plafonds des dépenses du budget général et de chaque budget annexe, les plafonds des charges de chaque catégorie de comptes spéciaux, ainsi que le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État.

L’article d’équilibre tend à garantir qu’il ne sera pas porté atteinte, lors de l’examen des dépenses en seconde partie, aux grandes lignes de l’équilibre général préalablement défini. Ainsi, en application de l’article 42 de la LOLF, la seconde partie du projet de loi de finances rectificative ne peut pas être mise en discussion tant que n’a pas été votée et adoptée « la disposition qui arrête en recettes et en dépenses les données générales de l’équilibre » (84).

Le I du présent article ajuste les prévisions de ressources pour 2015, détaillées à l’état A annexé au projet de loi de finances rectificative, les plafonds de charges et l’équilibre général du budget de l’État. Ces ajustements sont présentés dans un tableau qui fait apparaître une amélioration du solde budgétaire de l’État de 399 millions d’euros. Cette amélioration s’ajoute aux annulations de crédit de 0,7 milliard d’euros réalisées par le décret n° 2015-639 du 9 juin 2015 portant annulation de crédits. Au total, l’amélioration du solde budgétaire de l’État s’élève donc à 1,1 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2015 (85).

Le II actualise le tableau de financement de l’État pour 2015.

Le III augmente le plafond des autorisations d’emplois rémunérés par l’État pour le porter à 1 903 724 équivalents temps plein travaillé (ETPT) au lieu de 1 901 099 en loi de finances initiale pour 2015.

Les chiffres clés de l’article d’équilibre
du projet de loi de finances rectificative pour 2015

Recettes totales nettes du budget général : 293,2 milliards d’euros

dont recettes fiscales nettes : 278,7 milliards d’euros

dont recettes non fiscales : 14,5 milliards d’euros

Prélèvements sur recettes : 70,4 milliards d’euros

Dépenses nettes du budget général : 297,3 milliards d’euros

Solde général : – 73,3 milliards d’euros

dont solde du budget général : – 74,5 milliards d’euros

dont solde des budgets annexes et comptes spéciaux : + 1,2 milliard d’euros

Besoin de financement : 192,3 milliards d’euros

dont amortissement de la dette : 116,5 milliards d’euros

dont déficit à financer : 73,3 milliards d’euros

dont autres besoins de trésorerie : 2,5 milliards d’euros

Plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État : 1 903 724 équivalents temps plein travaillé

Le 5° de l’article 34 de la LOLF dispose que la première partie de la loi de finances comporte une évaluation de chacune des recettes budgétaires.

Tel est l’objet de l’état A, annexé à la loi de finances initiale pour 2015 qui évalue le montant des recettes brutes du budget général, des budgets annexes, des comptes d’affectation spéciale et des comptes de concours financiers. En application du 4° de l’article 34 de la LOLF précitée, l’état A comporte également une évaluation des prélèvements sur recettes.

Ces éléments sont récapitulés dans le tableau d’équilibre général, mentionné par le 7° de l’article 34 de la LOLF, qui fait apparaître séparément les ressources du budget général, des budgets annexes, et des comptes spéciaux. Le tableau d’équilibre général comporte également, dans la colonne des ressources, une évaluation des remboursements et dégrèvements afin de faire ressortir le montant net des recettes.

Contrairement aux dépenses, les éléments relatifs aux ressources constituent de simples évaluations et non des plafonds à ne pas dépasser. L’autorisation de percevoir ces recettes a été délivrée par l’article 1er de la loi de finances initiale pour 2015.

En application de l’article 35 de la LOLF, seule une loi de finances rectificative peut modifier en cours d’année ces évaluations de recettes budgétaires et de prélèvements sur recettes.

Il ressort de l’actualisation du tableau d’équilibre présentée dans l’exposé des motifs que les recettes totales nettes du budget général s’établiraient à 293,2 milliards d’euros et se composeraient de :

– 278,7 milliards d’euros de recettes fiscales nettes (recettes fiscales brutes de 381 milliards d’euros sous déduction des remboursements et dégrèvements estimés à 102,3 milliards d’euros) ;

– et 14,5 milliards de recettes non fiscales.

Le montant net des ressources pour le budget général s’établirait à 222,7 milliards d’euros après les prélèvements sur recettes de 70,4 milliards d’euros, dont 50,7 milliards au profit des collectivités territoriales et 19,7 milliards au profit de l’Union européenne.

Après prise en compte des fonds de concours (4,8 milliards d’euros), le montant net des ressources pour le budget général s’élèverait à 227,6 milliards d’euros.

Les ressources du budget gÉnÉral de l’État pour 2015

(en millions d’euros)

Recettes fiscales brutes

+ 380 995

À déduire : remboursements et dégrèvements

– 102 336

Recettes non fiscales

+ 14 524

Prélèvements sur recettes

– 70 434

Fonds de concours

+ 4 825

Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

227 574

Source : extraits du tableau d’équilibre présenté dans l’exposé des motifs de l’article 4 du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

A. LES RECETTES FISCALES NETTES

RECETTES FISCALES NETTES DE L’ÉTAT DEPUIS 2008

(en milliards d’euros)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Exécution

Exécution

Exécution

Exécution

Exécution

Exécution

Exécution

Prévision PLFR 2015

Prévision

PLF 2016

Montant

260,0

214,2

253,6

255,0

268,4

284,0

274,3

278,7

286,0

Source : commission des finances.

En 2015, les recettes fiscales nettes s’établiraient à 278,7 milliards d’euros, en hausse de 4,4 milliards d’euros par rapport l’exécution constatée en 2014. Elles seraient toutefois inférieures de 0,4 milliard d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale.

RECETTES FISCALES NETTES

(en milliards d’euros)

Recettes

2014

Exécution

2015

Prévision LFI 2015

2015

Prévision PLFR 2015

2016

Prévision

PLF 2016

Impôt sur le revenu

69,2

68,9

69,5

72,3

Impôt sur les sociétés

35,3

33,7

33,5

32,9

Taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques

13,2

14,0

13,9

15,6

Taxe sur la valeur ajoutée

138,4

142,6

141,5

144,7

Autres recettes fiscales

18,2

19,8

20,3

20,5

Total

274,3

279,1

278,7

286

Source : annexes aux projets de loi de finances pour 2016 et de loi de finances rectificative pour 2015.

ÉCART DE RECETTES FISCALES NETTES PRÉVUES PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2015 PAR RAPPORT À L’EXÉCUTION 2014 ET AUX PRÉVISIONS
DE LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2015

(en milliards d’euros)

Recettes

Écart prévision PLFR 2015 / LFI 2015

Écart prévision PLFR 2015 / exécution 2014

Impôt sur le revenu

+ 0,6

+ 0,3

Impôt sur les sociétés

– 0,2

– 1,8

Taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques

– 0,1

+ 0,7

Taxe sur la valeur ajoutée

– 1,1

+ 3,1

Autres recettes fiscales

+ 0,5

+ 2,1

Total

– 0,4

+ 4,4

Source : annexes aux projets de loi de finances pour 2016 et de loi de finances rectificative pour 2015

1. Impôt sur le revenu

Le rendement net de l’impôt sur le revenu devrait être de 69,5 milliards d’euros en 2015 au lieu de 69,2 milliards d’euros en 2014, soit une hausse de 0,3 milliard d’euros.

RECETTES NETTES D’IMPÔT SUR LE REVENU DEPUIS 2010

(en milliards d’euros)

Année

2010

Exécution

2011

Exécution

2012

Exécution

2013

Exécution

2014

Exécution

2015

Prévision

PLFR 2015

2016

Prévision

PLF 2016

Montant

47,4

51,5

59,5

67,0

69,2

69,5

72,3

Source : commission des finances.

La hausse des recettes en 2015 par rapport à 2014 s’explique par une évolution spontanée assez élevée (1,5 milliard d’euros, soit 2,2 %) qui compense l’impact des mesures nouvelles ayant fait baisser le rendement de l’impôt sur le revenu de 1,2 milliard d’euros.

Par rapport à la loi de finances initiale, la prévision est revue à la hausse de 0,6 milliard d’euros en raison, selon le Gouvernement, du dynamisme des dividendes et des plus-values mobilières en 2014.

2. Impôt sur les sociétés

Le rendement net de l’impôt sur les sociétés (IS) devrait s’établir à 33,5 milliards d’euros, en baisse de 1,8 milliard d’euros par rapport à 2014. Par rapport à la loi de finances initiale, la prévision est revue à la baisse de 0,2 milliard d’euros.

RECETTES NETTES D’IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS DEPUIS 2010

(en milliards d’euros)

Année

2010

Exécution

2011

Exécution

2012

Exécution

2013

Exécution

2014

Exécution

2015

Prévision

PLFR 2015

2016

Prévision

PLF 2016

Montant

32,9

39,1

41,3

47,2

35,3

33,5

32,9

Source : commission des finances.

La baisse de l’impôt sur les sociétés s’explique essentiellement par la montée en charge progressive du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Le coût budgétaire du CICE (qui correspond au montant décaissé chaque année par l’État, sous forme de restitutions ou sous forme d’imputations) a été de 6,4 milliards d’euros en 2014. Pour 2015, il est désormais évalué à 12,5 milliards d’euros selon le Gouvernement au lieu de 10 milliards d’euros dans le tome II de l’annexe des Voies et moyens du projet de loi de finances pour 2015.

Autrement dit, la montée en charge du CICE a pesé à la baisse sur les recettes fiscales d’IS de l’année 2015 par rapport à l’année 2014 pour 6,1 milliards d’euros (12,5 – 6,4) au lieu de 3,6 milliards d’euros prévus initialement (10 – 6,4).

COÛT BUDGÉTAIRE DU CICE

(en milliards d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Montant

6,4

12,5

13,0

16,5

18,6

19,6

3. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

Le rendement net de la part affectée à l’État de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) devrait s’établir à 13,9 milliards d’euros en 2015, en hausse de 0,7 milliard d’euros par rapport à 2014. Par rapport à la loi de finances initiale, la prévision est revue à la baisse de 0,1 milliard d’euros.

La hausse attendue du rendement de la TICPE résulte principalement de l’intégration au tarif de cet impôt d’une composante carbone dite « contribution climat-énergie » (14,5 euros la tonne en 2015 au lieu de 7 euros en 2014). En revanche, le relèvement de 2 centimes du tarif sur le gazole a été neutre en 2015, la recette correspondante ayant été affectée à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).

4. Taxe sur la valeur ajoutée

Le rendement net de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) serait de 141,5 milliards d’euros en 2015, soit une hausse de 3,1 milliards d’euros par rapport à 2014.

La hausse est toutefois plus faible que prévu en loi de finances initiale. La prévision de recette de TVA a, ainsi, été abaissée de 1,1 milliard d’euros dans le cadre du présent projet de loi de finances rectificative, en raison du ralentissement de l’inflation (0,1 % d’inflation au lieu de 0,9 % prévu par le projet de loi de finances pour 2015).

5. Autres recettes fiscales

Les autres recettes fiscales sont estimées pour 2015 à 20,3 milliards d’euros au lieu de 18,2 milliards en 2014, soit une hausse de 2,1 milliards. Cette prévision actualisée de recettes est en hausse de 0,5 milliard par rapport à la prévision de la loi de finances initiale pour 2015. Cette augmentation prend notamment en compte la révision à la baisse des décaissements constatés en 2015 à raison des contentieux « précompte » (87) et « OPCVM » (88).

B. LES RECETTES NON FISCALES

En 2015, le produit des recettes non fiscales augmenterait de 0,6 milliard d’euros par rapport à 2014 pour s’établir à 14,5 milliards.

La prévision initiale de la loi de finances initiale pour 2015 était de 14,2 milliards. Elle a donc été revue à la hausse de 0,3 milliard d’euros en raison de différents mouvements contraires récapitulés dans le tableau ci-dessous.

ACTUALISATION DE LA PRÉVISION DE RECETTES NON FISCALES
PAR RAPPORT À LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2015

(en milliard d’euros)

Principaux facteurs de hausse

Principaux facteurs de baisse

+ 1,3 au titre des amendes de l’autorité de la concurrence

+ 0,3 au titre d’un prélèvement sur le fonds de roulement du FNGRA (Cf. article 2)

– 0,5 au titre du reversement de la COFACE

– 0,5 au titre des dividendes des sociétés non financières

– 0,4 au titre des intérêts des prêts aux États étrangers

Source : annexes aux projets de loi de finances rectificative pour 2015 et de loi de finances pour 2016.

II. LES CHARGES ET L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE L’ÉTAT

A. LE PLAFOND DES CHARGES DE L’ÉTAT

En application de l’article 35 de la LOLF, la loi de finances rectificative fixe les plafonds des dépenses du budget général et de chaque budget annexe ainsi que les plafonds des charges de chaque catégorie de comptes spéciaux.

Contrairement aux recettes, les montants ainsi fixés ne sont pas des évaluations mais des plafonds, autrement dit des autorisations limitatives de dépenses.

Le détail des actualisations des plafonds de charges est prévu aux états B (répartition des crédits par mission), C (répartition des crédits par budget annexe) et D (répartition des crédits par compte d’affectation spéciale et compte de concours financiers) visés respectivement par les articles 5, 6 et 7 du présent projet de loi de finances rectificative.

Le tableau d’équilibre général du présent article ajuste le plafond des charges du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux.

Les dépenses nettes du budget général en crédits de paiement sont, ainsi, plafonnées à 297,3 milliards d’euros hors fonds de concours (soit 399,6 milliards d’euros de dépenses brutes sous déduction des remboursements et dégrèvements) au lieu de 296,1 milliards d’euros hors fonds de concours prévus en loi de finances initiale pour 2015.

Dépenses nettes de l’État

À noter que, dans le tableau d’équilibre général, les prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne et des collectivités territoriales ne sont pas traités pas comme des charges mais comme des moindres ressources. Si l’on retraite le prélèvement sur recettes comme une dépense, le total des dépenses nettes de l’État prévu pour 2015 s’élève à 367,7 milliards d’euros dans le projet de loi de finances rectificative au lieu de 367,5 milliards d’euros dans la loi de finances initiale.

Avec les fonds de concours, le montant des charges de l’État ressort à 302,1 milliards d’euros pour 2015.

B. LE SOLDE GÉNÉRAL DE L’ÉTAT

Le solde du budget général ressortirait en 2015 à – 73,3 milliards d’euros compte tenu :

– d’un montant de charges de 302,1 milliards d’euros (297,3 milliards hors fonds de concours) ;

– et d’un montant de ressources de 227,6 milliards d’euros (293,2 milliards d’euros de recettes totales nettes, desquelles il convient de déduire les prélèvements sur recettes et les fonds de concours à hauteur, respectivement, de 70,4 milliards d’euros et de 4,8 milliards d’euros).

Après prise en compte du solde des budgets annexes (13 millions d’euros), et des comptes spéciaux (1,2 milliard d’euros), le déficit budgétaire de l’État est estimé à 73,3 milliards d’euros pour 2015 dans le projet de loi de finances rectificative au lieu de 74,4 milliards d’euros dans la loi de finances initiale.

III. LE BESOIN ET LES RESSOURCES DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT

En vertu du 8° du I de l’article 34 de la LOLF, l’article d’équilibre « comporte les autorisations relatives aux emprunts et à la trésorerie de l’État » et « évalue les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à l’équilibre financier, présentées dans un tableau de financement ».

En application de l’article 35, seule une loi de finances rectificative peut modifier ces autorisations et ces évaluations en cours d’année.

Le du II du présent article comporte ainsi un tableau de financement avec les ressources et les charges de trésorerie de l’État qui concourent à la réalisation de son équilibre financier.

Le besoin de financement pour 2015 est prévu à 192,3 milliards d’euros, soit un montant inchangé par rapport à la loi de finances initiale. Il se décompose ainsi :

– 116,5 milliards au titre de l’amortissement de la dette (remboursement du capital) ;

– 73,3 milliards au titre du déficit budgétaire ;

– et 2,5 milliards au titre d’autres besoins de trésorerie.

Les émissions de dette pour l’ensemble de l’année 2015 sont évaluées à 187 milliards d’euros pour couvrir la majeure partie de ce besoin de financement, soit un montant inchangé par rapport à la loi de finances initiale.

Le solde du besoin de financement est couvert par d’autres ressources de trésorerie.

Il est précisé dans le du II du présent article que le plafond de la variation nette de la dette négociable de l’État demeure inchangé par rapport à ce que prévoit la loi de finances initiale. En conséquence, ce plafond demeure fixé à 72,9 milliards d’euros pour 2015.

IV. LE PLAFOND D’AUTORISATION DES EMPLOIS RÉMUNÉRÉS PAR L’ÉTAT

En application de l’article 35 de la LOLF, la première partie de la loi de finances rectificative fixe un plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État. Les emplois sont exprimés en « équivalents temps plein travaillé » (ETPT), notion qui permet de comptabiliser les agents au prorata de leur période de présence et de leur quotité de travail par rapport à un temps plein.

À la différence des plafonds de dépenses qui sont ventilés entre le budget général, chaque budget annexe et chaque catégorie de comptes spéciaux, ce plafond recouvre l’ensemble des emplois rémunérés par l’État.

Le III du présent article fixe ce plafond à 1 903 724 ETPT au lieu de 1 901 099 ETPT en loi de finances pour 2015.

Il est toutefois important de rappeler que ce plafond d’emplois n’a pas vocation à être intégralement consommé, comme cela fut le cas en 2013 et 2014. Ce plafond constitue simplement un stock maximal d’emplois à ne pas dépasser en exécution.

AUTORISATION, EXÉCUTION ET SOUS-EXÉCUTION
DES EMPLOIS POUR L’ÉTAT EN ETPT

Année

2013

2014

Plafond d’emplois autorisé

1 914 921

1 906 424

Exécution

1 883 713

1 877 359

Sous-exécution

31 208

29 065

Source : commission des finances.

L’article 8 du présent projet de loi de finances rectificative modifie les plafonds d’autorisation d’emplois de l’État pour le budget général et plusieurs ministères.

Ces plafonds ministériels complètent le dispositif de plafonnement de la masse salariale (crédits du titre 2), conformément au III de l’article 7 de la LOLF aux termes duquel « les crédits ouverts sur le titre des dépenses de personnel sont assortis de plafonds d’autorisation des emplois rémunérés par l’État. Ces plafonds sont spécialisés par ministère ».

*

* *

La commission adopte l’article 4 sans modification.

Elle adopte ensuite la première partie du projet de loi de finances rectificative modifiée.

*

* *

SECONDE PARTIE
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE IER 
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2015 : CRÉDITS DES MISSIONS

Article 5
Budget général : ouvertures et annulations de crédits

Le présent article tend à ouvrir et à annuler des crédits sur le budget général, selon la répartition donnée à l’état B annexé au présent projet de loi de finances rectificative. Ces ouvertures et annulations sont commentées dans l’exposé général du présent rapport.

OUVERTURES ET ANNULATIONS DE CRÉDITS DU BUDGET GÉNÉRAL

(en millions d’euros)

Autorisations d’engagement

Ouvertures

8 742,3

annulations

2 479,2

Solde

6 263,1

Crédits de paiement

Ouvertures

7 365,5

annulations

2 667,9

Solde

4 697,6

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Au total, le plafond des autorisations d’engagement est ainsi porté de 411,1 milliards d’euros à 417,4 milliards d’euros et celui des crédits de paiement de 395,6 milliards d’euros à 400,3 milliards d’euros.

*

* *

La commission examine, en présentation commune, les amendements CF 86, CF 87 et CF 88 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Ces amendements rappellent trois points soulevés dans mon rapport spécial sur la mission Agriculture.

Mme la Rapporteure générale. Le plan de soutien à l’élevage annoncé par le Premier ministre prévoit un abondement supplémentaire de 100 millions d’euros en 2016, et vous proposez, par votre amendement CF 86, d’ajouter 8 millions d’euros en 2015. Le deuxième amendement, CF 87, propose de majorer les crédits de subvention aux assurances agricoles de 10 millions d’euros. L’assurance récolte est financée par les crédits communautaires dans le cadre du second pilier de la politique agricole commune (PAC), qui augmenteront en 2016. Vous considérez que ce n’est pas assez ; il me semble surtout que la question de l’assurance récolte devrait être mise sur la table, car elle coûte très cher pour certaines cultures. Je demande le retrait de ces deux amendements, à défaut de quoi j’y donne un avis défavorable. Enfin, avis défavorable sur votre amendement CF 88, qui propose de majorer les crédits alloués aux mesures agro-environnementales et climatiques.

M. Charles de Courson. Il y a des agriculteurs en difficulté hors élevage. La dotation, de 1,5 million d’euros, est insuffisante. Quant à mon amendement CF 87, il est purement technique : d’après les chiffres qui m’ont été communiqués par le ministère, il manque environ 10 millions d’euros. Il sera toujours possible de redéployer des crédits en cours d’année, mais un budget sincère serait préférable. Mon troisième amendement tient également compte du fait que les mesures votées sont techniquement insuffisantes, pour quelque 15 millions d’euros en autorisations d’engagement et 7 en crédits de paiement.

La commission rejette successivement les amendements CF 86 à CF 87.

Elle adopte ensuite l’article 5 sans modification.

*

* *

Article 6
Budgets annexes : ouvertures de crédits

Le présent article tend à ouvrir des crédits sur les budgets annexes, selon la répartition donnée à l’état C annexé au présent projet de loi de finances rectificative. Ces ouvertures sont commentées dans l’exposé général du présent rapport.

OUVERTURES DE CRÉDITS DES BUDGETS ANNEXES

(en millions d’euros)

Crédits

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Crédits ouverts en LFI 2015

2 369,1

2 340,2

Crédits ouverts en PLFR 2015

2,7

2,7

Total

2 371,8

2 342,9

Comptes d’affectation spéciale

AE

Ouvertures

2 000

annulations

4 144

Solde AE

– 2 144

CP

Ouvertures

2 000

annulations

4 148

Solde CP

– 2 148

Comptes de concours financiers

AE

Ouvertures

21

annulations

1 647

Solde AE

– 1 626

CP

Ouvertures

21

annulations

1 852

Solde CP

– 1 831

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Au total, les crédits ouverts en fin de gestion pour les comptes spéciaux représenteraient 179,5 milliards d’euros en autorisations d’engagement au lieu de 183,3 milliards d’euros en loi de finances pour 2015 et 179,2 milliards d’euros en crédits de paiement au lieu de 183,2 milliards d’euros.

*

* *

La commission adopte l’article 7 sans modification.

*

* *

TITRE II
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2015 : PLAFONDS DES AUTORISATIONS DES EMPLOIS

Article 8
Plafonds des autorisations d’emplois de l’État

Le projet de loi de finances rectificative pour 2015 prévoit une révision à hausse des effectifs de l’État de 2 625 équivalents temps plein travaillé (ETPT), principalement au profit du ministère de la défense.

Les évolutions présentées dans le tableau suivant sont commentées dans la fiche sur les effectifs de l’État de l’exposé général du présent rapport.

ÉVOLUTION DES PLAFONDS D’EMPLOI DE 2014 AUX PRÉVISIONS POUR 2015 ET 2016

(en ETPT)

Ministères

Plafond d’emplois Consommation 2014

Plafond d’emplois

LFI 2015

Plafond d’emplois modifiés

PLFR 2015

Plafond d’emplois PLF 2016

Affaires étrangères et développement international

14 108

14 201

14 020

Affaires sociales, santé et droits des femmes

10 570

10 305

10 206

Agriculture, agroalimentaire et forêt

31 412

31 035

31 375

30 543

Culture et communication

10 833

10 958

11 041

Défense

270 849

265 846

268 471

271 510

Écologie, développement durable et énergie

32 969

31 642

30 722

Économie, industrie et numérique

6 287

6 502

6 465

Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

960 409

983 831

995 243

Finances et comptes publics

138 715

139 504

139 164

136 114

Intérieur

274 788

278 591

279 522

Justice

76 509

78 941

80 280

Logement, égalité des territoires et ruralité

13 463

12 807

12 500

Outre-mer

5 296

5 309

5 309

Services du Premier ministre

9 860

10 268

11 590

Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

9 846

9 750

9 703

Total budget général

1 865 914

1 889 490

1 904 768

Contrôle et exploitation aériens

10 701

10 827

10 726

Publications officielles et information administrative

744

782

785

Total budgets annexes

11 445

11 609

11 511

Total général

1 877 359

1 901 099

1 903 724

1 916 279

Note de lecture : afin de proposer une évolution des plafonds d’emplois à un périmètre constant, les budgets relatifs à chaque ministère ont été retraités en prenant pour base l’architecture des programmes retenue dans le projet de loi de finances pour 2016.

Source : projets de loi de règlement pour 2014, de loi de finances pour 2015, de loi de finances rectificative pour 2015 et de loi de finances pour 2016.

*

* *

La commission adopte l’article 8 sans modification.

*

* *

Article 9
Plafonds des emplois des opérateurs de l’État

Le présent article augmente le plafond d’emploi des opérateurs de l’État de 233 équivalents temps plein travaillé (ETPT) afin de prendre en compte et de régulariser des mouvements intervenus en cours d’exercice 2015 et de poursuivre la fiabilisation des décomptes d’emplois chez les opérateurs. Ce plafond global passerait ainsi de 397 682 ETPT en loi de finances pour 2015 (89) à 397 915 ETPT dans le présent projet de loi de finances rectificative.

Ces ajustements ont été intégrés à l’article 29 du projet de loi de finances pour 2016 qui, à l’issue de la première lecture à l’Assemblée nationale, fixe les plafonds d’emplois des opérateurs à 397 544 ETPT (soit + 60 ETPT par rapport au texte initial du Gouvernement et – 371 ETPT par rapport au plafond proposé pour la fin de gestion 2015 par le présent article).

 

(en équivalents temps plein travaillé)

Mission/Programme

PLF pour 2015

PLFR pour 2015

PLF pour 2016

Action extérieure de l’État

6 941

6 971

6 939

Diplomatie culturelle et d’influence

6 941

6 941

6 939

Administration générale et territoriale de l’État

322

322

322

Administration territoriale

109

109

109

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

213

213

213

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

15 005

15 005

14 456

Économie et développement durable de l’agriculture et des territoires

4 192

4 192

4 041

Forêt

9 525

9 525

9 123

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

1 281

1 281

1 285

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

7

7

7

Aide publique au développement

26

26

/

Solidarité à l’égard des pays en développement

26

26

/

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

1 311

1 311

1 307

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

1 311

1 311

1 307

Culture

14 597

14 597

14 539

Patrimoines

8 452

8 452

8 464

Création

3 627

3 627

3 607

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

2 518

2 518

2 468

Défense

6 236

6 236

6 236

Environnement et prospective de la politique de défense

5 100

5 100

5 100

Soutien de la politique de la défense

1 136

1 136

1 136

Direction de l’action du Gouvernement

620

620

616

Coordination du travail gouvernemental

620

620

616

Écologie, développement et mobilité durables

20 919

20 919

20 474

Infrastructures et services de transports

4 881

4 881

4 839

Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture

240

240

237

Météorologie

3 158

3 158

3 080

Paysages, eau et biodiversité

5 395

5 395

5 304

Information géographique et cartographique

1 631

1 631

1 575

Prévention des risques

1 481

1 481

1 451

Énergie, climat et après-mines

493

493

482

Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

3 640

3 640

3 506

Économie

2 637

2 637

2 628

Développement des entreprises et du tourisme

2 637

2 637

2 628

Égalité des territoires et logement

298

298

293

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

298

298

293

Enseignement scolaire

3 508

3 508

3 438

Soutien de la politique de l’éducation nationale

3 508

3 508

3 438

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

1 354

1 354

1 354

Fonction publique

1 354

1 354

1 354

Immigration, asile et intégration

1 326

1 352

1 386

Immigration et asile

525

530

545

Intégration et accès à la nationalité française

801

822

841

Justice

509

528

534

Justice judiciaire

171

181

192

Administration pénitentiaire

230

239

236

Conduite et pilotage de la politique de la justice

108

108

106

Médias, livre et industries culturelles

3 053

3 053

3 034

Livre et industries culturelles

3 053

3 053

3 034

Outre-mer

129

129

127

Emploi outre-mer

129

129

127

Politique des territoires

94

94

80

Politique de la ville

94

94

80

Recherche et enseignement supérieur

256 343

256 343

258 493

Formations supérieures et recherche universitaire

161 228

161 228

163 833

Vie étudiante

12 716

12 716

12 716

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

70 551

70 551

70 522

Recherche spatiale

2 417

2 417

2 417

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement
et de la mobilité durables

4 560

4 560

4 486

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

2 563

2 563

2 243

Recherche culturelle et culture scientifique

1 093

1 093

1 061

Enseignement supérieur et recherche agricoles

1 215

1 215

1 215

Régimes sociaux et de retraite

344

352

344

Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins

344

352

344

Santé

2 527

2 527

2 295

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

2 527

2 527

2 295

Sécurités

272

272

272

Police nationale

272

272

272

Solidarité, insertion et égalité des chances

8 819

8 819

8 748

Inclusion sociale et protection des personnes

31

31

31

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport,
de la jeunesse et de la vie associative

8 788

8 788

8 717

Sport, jeunesse et vie associative

1 656

1 664

576

Sport

1 601

 

535

Jeunesse et vie associative

55

63

41

Travail et emploi

48 002

48 154

48 151

Accès et retour à l’emploi

47 681

47 833

47 833

Accompagnement des mutations économiques et développement
de l’emploi

86

86

84

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

77

77

76

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

158

158

158

Contrôle et exploitation aériens

828

828

812

Soutien aux prestations de l’aviation civile

828

828

812

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

6

26

30

Contrôle et modernisation de la politique de la circulation
et du stationnement routiers

6

26

30

Total

397 682

397 915

397 484

*

* *

La commission adopte l’article 9 sans modification.

*

* *

TITRE III
RATIFICATION DE DÉCRETS D’AVANCE

Article 10
Ratification de deux décrets portant ouverture et annulation
de crédits à titre d’avance

En application de l’avant-dernier alinéa de l’article 13 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), le présent article procède à la ratification des ouvertures et annulations de crédits réalisées par :

– le décret n° 2015-402 du 9 avril 2015 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance de 401,1 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 308,3 millions d’euros en crédits de paiement (CP) principalement au titre de la mise en œuvre du plan de lutte contre le terrorisme annoncé le 14 janvier dernier ;

– le décret n° 2015-1347 du 23 octobre 2015 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance pour 232,5 millions d’euros en AE et 184,5 millions d’euros en CP principalement au titre des surcoûts constatés sur l’hébergement d’urgence ;

Par ailleurs, un décret n° 2015-639 du 9 juin 2015 portant annulation de crédits a été pris à hauteur de 607,9 millions d’euros en AE et de 666,9 millions d’euros en CP pour compenser les effets de la faible inflation sur les objectifs d’économies prévus pour 2015 dans le cadre du programme d’économies de 50 milliards d’euros. Conformément à l’article 14 de la LOLF, ce décret ne donne pas lieu à ratification.

Les projets de ces décrets ont recueilli l’avis favorable de la commission des finances de l’Assemblée nationale et de celle du Sénat.

Il conviendra que le Gouvernement propose par amendement la validation du troisième décret d’avance pour 2015, dont le projet a été notifié à la commission le 18 novembre 2015, et qui a également recueilli un avis favorable de la commission des finances de l’Assemblée nationale et de celle du Sénat.

Les avis de la commission sur ces trois décrets sont reproduits ci-après.

La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire,

Vu les articles 12, 13 et 14 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances,

Vu la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015,

Vu le projet de décret d’avance notifié à la Commission le 24 mars 2015 par lettre du ministre délégué chargé du budget portant ouverture et annulation de 401 128 893 euros d’autorisations d’engagement et de 308 305 664 euros de crédits de paiement,

Vu le projet de rapport de motivation joint au projet de décret d’avance,

Considérant que ce projet de décret tend à ouvrir :

pour le financement du plan de lutte contre le terrorisme annoncé par le Gouvernement le 21 janvier 2015 :

– 123,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au profit du ministère de l’intérieur, dont 27,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement pour des dépenses de personnel ;

– 108,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au profit du ministère de la justice, dont 28,2 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement pour des dépenses de personnel ;

– 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au profit du ministère des affaires étrangères ;

– 5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au profit du ministère des finances et des comptes publics ;

b) ainsi que :

– 61 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au profit du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports au titre du financement de nouvelles dépenses en faveur du service civique ;

– 92,8 millions d’euros en autorisations d’engagement au profit du ministère de l’intérieur au titre du financement des dépenses de maintien en condition opérationnelle des avions de la sécurité civile ;

Considérant que ce même projet de décret tend en contrepartie à annuler 401 128 893 euros en autorisations d’engagement et 308 305 664 euros en crédits de paiement sur vingt-deux missions et quarante-huit programmes du budget général ;

EST D’AVIS,

compte tenu des informations dont elle dispose, de formuler les observations suivantes :

Le présent projet de décret d’avance ouvre et annule 401,1 millions d’euros d’autorisations d’engagement (AE) et 308,3 millions d’euros de crédits de paiement (CP) sur le budget général de l’État afin de financer des dépenses supplémentaires pour l’année 2015.

Le montant de ces ouvertures et annulations respecte les limites quantitatives fixées par les articles 13 et 14 de la loi organique du 1er août 2001 susvisée.

Les besoins supplémentaires identifiés découlent, à titre principal, de la mise en œuvre du plan de lutte contre le terrorisme annoncé le 21 janvier dernier à la suite des attentats commis à Paris les 7,8 et 9 janvier dernier et de l’augmentation des risques pesant sur la France et ne pouvaient, en conséquence, être anticipés. La condition d’urgence posée par le dernier alinéa de l’article 13 est donc remplie.

Cette procédure dérogatoire et exceptionnelle garantit l’information du Parlement et respecte à la fois la possibilité pour les commissions des finances des deux assemblées de s’exprimer sous forme d’avis et la faculté pour le Parlement de ratifier ou non ce dispositif dans le cadre de la plus prochaine loi de finances.

Les principales ouvertures de crédits proposées par le présent projet de décret d’avance concernent la mise en œuvre du plan de lutte contre le terrorisme précédemment mentionné. Quatre ministères sont concernés par ces ouvertures.

En premier lieu, le ministère de l’intérieur bénéficie d’une ouverture de crédits supplémentaires de 123,9 millions d’euros en AE et en CP, dont 96,4 millions d’euros hors dépenses de personnel et de 27,6 millions d’euros pour les dépenses de personnel. Ces crédits sont répartis entre plusieurs programmes.

Le programme 176 Police nationale de la mission Sécurité bénéficie de 61,5 millions d’euros en AE et CP, hors dépenses de personnel, dont :

– 32,9 millions d’euros pour des dépenses d’équipement ;

– 20 millions d’euros pour abonder le fonds interministériel de la prévention de la délinquance (FIPD), financer des actions de vidéo-protection et renforcer les moyens des polices municipales et de la lutte contre la radicalisation ;

– 6,3 millions d’euros au titre de la modernisation technologique des services ;

– 2,4 millions d’euros pour couvrir les frais liés à l’organisation des recrutements supplémentaires devant intervenir au cours de l’année 2015.

Au titre des dépenses de personnel, le présent projet de décret prévoit l’ouverture de 13,8 millions d’euros permettant de financer d’une part, 400 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires (pour 5,8 millions d’euros) et, d’autre part, la mobilisation des réserves civile et opérationnelle (pour 8 millions d’euros).

Au total, ce programme bénéficie donc d’une ouverture de crédits de 75,3 millions d’euros en AE et CP.

Le programme 152 Gendarmerie nationale de la même mission bénéficie de 23 millions d’euros en AE et CP, hors dépenses de personnel, répartis comme suit :

– 18,9 millions d’euros au titre de dépenses d’équipement ;

– 2 millions d’euros au titre de la modernisation technologique des services ;

– 2,1 millions d’euros pour couvrir les frais liés à l’organisation des recrutements supplémentaires devant intervenir au cours de l’année 2015.

Au titre des dépenses de personnel, le présent projet de décret prévoit l’ouverture de 12 millions d’euros, dont 2,9 millions d’euros destinés au financement de 100 ETP supplémentaires et 9,1 millions d’euros destinés au financement des réserves civile et opérationnelle.

Au total, ce programme bénéficie d’une ouverture de crédits de 35 millions d’euros en AE et CP.

Le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur de la mission Administration générale et territoriale de l’État bénéficie d’une ouverture de crédits de 11,3 millions d’euros en AE et CP, dont 11,2 millions d’euros au titre de la modernisation technologique des services et 100 000 d’euros au titre de l’organisation des recrutements. À ces crédits supplémentaires s’ajoutent 1,8 million d’euros destinés à assurer le financement de 38 ETP supplémentaires.

Au total, ce programme bénéficie d’une ouverture de crédits de 13,2 millions d’euros en AE et en CP.

Enfin, le programme 307 Administration territoriale de la même mission reçoit 500 000 euros au titre du renforcement de la protection des préfectures.

En deuxième lieu, le ministère de la justice bénéficie d’une ouverture de crédits de 108,3 millions d’euros en AE et en CP, dont 80,1 millions d’euros hors dépenses de personnel et 28,2 millions d’euros pour les dépenses de personnel. Ces crédits sont répartis au sein de plusieurs programmes.

Le programme 107 Administration pénitentiaire de la mission Justice bénéficie de 31 millions d’euros en AE et en CP, hors dépenses de personnel au titre de :

– la prévention et de l’accompagnement des personnes suivies par l’administration pénitentiaire, notamment pour améliorer la prise en charge par les agents des détenus radicalisés, pour 4,9 millions d’euros ;

– le renforcement de la sécurité des établissements et du renseignement pénitentiaire pour 3,4 millions d’euros ;

– l’amélioration de la prise en charge et du suivi des individus radicalisés (mesures de préventions, dont notamment la création de quartiers leur étant réservés au sein de certains établissements pénitentiaires) pour 19,1 millions d’euros ;

– la formation des agents pénitentiaires nouvellement recrutés dans le cadre du plan de lutte contre le terrorisme pour 3,6 millions d’euros.

Au titre des dépenses de personnel, ce programme bénéficie de 11,4 millions d’euros supplémentaires en AE et en CP permettant de financer 402 ETP répartis comme suit :

– 100 ETP dédiés à la prévention et à l’accompagnement des personnes détenues, dont 30 aumôniers et 70 comblements de vacances de postes de surveillants ;

– 117 ETP correspondant à la création de postes de surveillants supplémentaires et à l’amélioration de la surveillance des télécommunications ;

– 88 ETP destinés au renseignement pénitentiaire ;

– 97 ETP destinés à améliorer la prise en charge des personnes radicalisées (notamment des psychologues, des éducateurs, etc.) ;

– 9 ETP affectés à l’École nationale de l’administration pénitentiaire.

Au total, ce programme bénéficie d’une ouverture de crédits de 42,4 millions d’euros en AE et CP.

Le programme 166 Justice judiciaire de la même mission bénéficie de l’ouverture de crédits pour 29,7 millions d’euros en AE et en CP, hors dépenses de personnel répartis comme suit :

– 17,4 millions d’euros pour permettre l’amélioration la protection des sites sensibles et exposés ;

– 9 millions d’euros pour renforcer les moyens technologiques et informatiques ainsi que les moyens alloués aux interceptions judiciaires dans un contexte de hausse des enquêtes réalisées par les services de police et de gendarmerie estimée à 10 % en année pleine ;

– 2,4 millions d’euros pour répondre aux besoins des équipes de magistrats dédiées à la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée ;

– 900 000 euros pour financer des stages de laïcité dans le cas de peines complémentaires proposées pour certains publics.

Au titre des dépenses de personnel, ce programme bénéficiera de 9 millions d’euros supplémentaires pour financer 202 ETP et renforcer ainsi :

– les moyens de l’École nationale des greffes (+ 5ETP) et de l’École nationale de la magistrature (+ 10 ETP) ;

– les équipes des juridictions anti-terroristes (+ 197 ETP dont 114 greffiers et 83 assistants de justice et assistants spécialisés).

Au total, ce programme bénéficie d’une ouverture de crédits de 38,7 millions d’euros supplémentaires en AE et en CP.

Le programme 182 Protection judiciaire de la jeunesse de la même mission bénéficiera de 3,5 millions d’euros de crédits supplémentaires en AE et en CP pour améliorer la formation des agents et prévenir la radicalisation des jeunes, ainsi que de 7 millions d’euros en AE et CP destinés au financement de 163 ETP permettant de créer une unité de veille et d’information au sein de la protection judiciaire de la jeunesse (10 ETP) et de renforcer les services existants par le recrutement de psychologues, d’éducateurs et de référents laïcité et citoyenneté (153 ETP).

Au total, ce programme bénéficie de l’ouverture de 10,5 millions d’euros en AE et en CP.

Le programme 310 Conduite et pilotage de la politique publique de la justice de la même mission bénéficiera de 16 millions d’euros en AE et en CP destinés à financer des investissements informatiques (à l’instar de la plateforme nationale d’interception judiciaire) ainsi que de 700 000 euros permettant de financer 14 ETP supplémentaires en vue du déploiement de ces projets informatiques par le secrétariat général du ministère.

Au total, ce programme bénéficie de l’ouverture de 16,7 millions d’euros en AE et en CP.

En troisième lieu, le ministère des affaires étrangères bénéficie d’une ouverture de crédits de 10 millions d’euros en AE et en CP en vue de renforcer la sécurité des ambassades et des consulats et d’élargir le plan d’action de la sécurité diplomatique aux instituts culturels. Ces crédits se répartiraient comme suit :

– 6 millions d’euros au titre de la sécurité et de l’achat de matériel ;

– 1,2 million d’euros au titre du financement des compléments de contrats de gardiennage des postes à l’étranger ;

– 1 million d’euros au titre de la maintenance des dispositifs de sécurité dite « passive » ;

– 1,8 million d’euros pour l’achat de véhicules blindés.

En quatrième lieu, le ministère des finances et des comptes publics bénéficie d’une ouverture de crédits de 5 millions d’euros en AE et CP destinés à financer des matériels de télécommunication et de protection visant notamment à renforcer la coordination des actions des différentes administrations de contrôle.

Les créations d’emplois prévues dans le cadre du plan de lutte contre le terrorisme pour ce ministère (soit 40 emplois par an en 2015 et en 2016 à la direction générale des douanes et des droits indirects et au service Tracfin) ne nécessitent pas l’ouverture de crédits en urgence dans le cadre du présent projet de décret d’avance.

Au total, le montant des dépenses supplémentaires du plan de lutte contre le terrorisme prises en compte par le présent projet de décret atteint 247,3 millions d’euros en AE et en CP. Ces ouvertures de crédits sont urgentes puisqu’elles garantissent la mise en œuvre de mesures destinées à assurer la sécurité de notre territoire et de nos personnels à l’étranger.

Par ailleurs, les service du Premier ministre bénéficient d’une ouverture de crédits de 1,5 million d’euros destinée à couvrir le financement par le Service d’information du Gouvernement (SIG) du deuxième volet de la campagne de lutte contre le djihadisme qui doit être mis en œuvre, dans le cadre du plan de lutte contre le terrorisme, au cours du premier semestre 2015. Cette ouverture concerne le programme 129 Coordination du travail gouvernemental de la mission Direction de l’action du Gouvernement. Elle est toutefois intégralement compensée par l’annulation de 2 millions d’euros prévue par ailleurs sur ce même programme. Par conséquent, cette ouverture n’apparaît pas explicitement dans le décret d’avance qui retient, en revanche, une annulation nette de 500 000 euros.

Pour rappel, ces ouvertures de crédits seront éventuellement complétées par le redéploiement de 150 millions d’euros de crédits au sein des différents programmes budgétaires du ministère de la défense pour financer les mesures prises par ce ministère dans le cadre de la mise en œuvre du plan de lutte contre le terrorisme. Les mouvements de crédits qui en résulteraient seraient déterminés dans le cadre du schéma de fin de gestion 2015.

Ce redéploiement et les ouvertures de crédits prévues par le présent projet de décret correspondent au montant global prévisionnel du plan de lutte contre le terrorisme pour 2015, soit 397,3 millions d’euros.

Au-delà des ouvertures de crédits dont la nécessité impérieuse est justifiée par la mise en œuvre du plan de lutte contre le terrorisme, le présent projet de décret d’avance prévoit l’ouverture de crédits pour financer l’élargissement du service civique à tout jeune qui en ferait la demande à compter du 1er juin 2015, tel qu’annoncé par le Président de la République le 5 février dernier.

En effet, alors que les crédits du programme 163 Jeunesse et vie associative de la mission Sport, jeunesse et vie associative avaient été adoptés en loi de finances initiale pour 2015 en vue de parvenir à un objectif de 45 000 jeunes en service civique au titre de cette même année, cette annonce conduit à revoir cet objectif à la hausse. L’Agence de service civique estime ainsi que 70 000 jeunes pourraient en bénéficier.

Pour atteindre ce nouvel objectif, l’ouverture de 61 millions d’euros supplémentaires en AE et en CP est nécessaire. Cette ouverture de crédits, au profit du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports, doit permettre de répondre au besoin de financement de l’Agence du service civique et d’assurer la délivrance rapide de nouveaux agréments aux organismes d’accueil (69 800 agréments devraient ainsi être délivrés en 2015).

Enfin, 92,8 millions d’euros supplémentaires en AE sont ouverts sur le programme 163 Sécurité civile de la mission Sécurité de manière à couvrir le changement de périmètre du projet de maintien en condition opérationnelle (MCO) des vingt-six avions de la sécurité civile. En effet, ce projet n’avait pu aboutir en octobre 2014.

Cette ouverture de crédits vient donc compléter les crédits ouverts en 2014 à ce titre et reportés sur l’exercice 2015 afin de permettre la réalisation de ce projet dans des délais raisonnables (soit avant juillet 2015).

Les annulations de crédits sont réparties sur vingt-deux missions et quarante-huit programmes du budget général. Elles visent à garantir le respect de l’équilibre budgétaire défini par la loi de finances pour 2015.

Parmi les ministères concernés, certains, bénéficiaires des ouvertures de crédits précédemment décrites, participent également à leur financement par l’annulation de crédits relevant de leur périmètre.

Les annulations intervenant sur le périmètre du ministère de l’intérieur portent sur le programme 232 Vie politique, culturelle et associative de la mission Administration générale et territoriale de l’État pour 15,5 millions d’euros en AE et en CP qui correspondent à l’économie attendue du report à la fin de l’année 2015 des élections régionales, tel que prévu par la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales.

Les annulations intervenant sur le périmètre du ministère de la justice portent sur le programme 101 Accès au droit et à la justice de la mission Justice pour 1,5 million d’euros en AE et en CP et sur le programme 335 Conseil supérieur de la magistrature de la même mission pour 50 000 euros. Ces annulations sont liées à une meilleure maîtrise des dépenses que celle qui avait été anticipée.

Les annulations intervenant dans le périmètre du ministère des finances et des comptes publics (soit au total, 37 millions d’euros en AE et en CP) portent sur les programmes suivants :

– le programme 220 Statistiques et études économiques de la mission Économie pour 600 000 euros du fait d’une meilleure maîtrise des dépenses de fonctionnement ;

– le programme 305 Stratégie économique et fiscale de la même mission pour 2,5 millions d’euros du fait d’économies réalisées par la Banque de France ;

– le programme 156 Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines pour 12,3 millions d’euros, dont 12 millions d’euros sur les dépenses de personnel. Cette annulation est rendue possible par l’amélioration des perspectives d’exécution du programme ;

– le programme 218 Conduite et pilotage des politiques économiques et financières de la même mission pour 4,4 millions d’euros du fait d’une meilleure maîtrise des dépenses de fonctionnement de l’administration centrale ;

– le programme 309 Entretien des bâtiments de l’État de la même mission pour 2,2 millions d’euros à nouveau du fait de la révision à la baisse des perspectives d’exécution du programme ;

– le programme 145 Épargne de la mission Engagements financiers de l’État pour 15 millions d’euros pour la même raison.

Les annulations intervenant sur le périmètre du ministère des affaires étrangères et du développement international portent, quant à elles, sur le programme 151 Français à l’étranger et affaires consulaires de la mission Action extérieure de l’État pour 16 millions d’euros en AE et CP. Cette annulation porterait sur des crédits devenus sans objet à la suite d’une régularisation comptable.

Par ailleurs, les services du Premier ministre participent également aux annulations proposées par le présent projet de décret à hauteur de 8 millions d’euros en AE et en CP. Ces annulations, rendues possibles par l’amélioration des perspectives d’exécution de certains programmes, se répartissent comme suit :

– 2 millions d’euros sur le programme 129 Coordination du travail gouvernemental. Ce programme bénéficiant également d’une ouverture de crédits de 1,5 million d’euros devant alimenter le budget du SIG, comme mentionné précédemment, l’annulation nette prévue par le présent projet de décret est limitée à 500 000 euros ;

– 2 millions d’euros sur le programme 333 Moyens mutualisés des administrations déconcentrés ;

– 4 millions d’euros sur le programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire ;

– 270 000 euros sur le programme 162 Interventions territoriales de l’État ;

– 800 000 euros sur le programme 165 Conseil d’État et autres juridictions administratives ;

– 200 000 euros sur le programme 164 Cour des comptes et autres juridictions financières ;

– 200 000 euros sur le programme 340 Haut Conseil des finances publiques ;

– 60 000 euros sur le programme 126 Conseil économique, social et environnemental.

Les ministères bénéficiant d’ouvertures de crédits contribuent donc à hauteur de 78,1 millions d’euros à leur financement (soit à hauteur de 19,4 % des ouvertures en AE et 25,3 % des ouvertures en CP).

Les autres annulations d’un montant de 323 millions d’euros en AE et de 230 millions d’euros en CP reposent sur des ministères n’ayant pas bénéficié d’ouverture de crédits supplémentaires et se répartissent entre les missions suivantes :

– la mission Santé au titre du programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins pour 2 millions d’euros en AE et en CP. Cette annulation est liée à une meilleure maîtrise des dépenses d’intervention de ce programme ;

– la mission Solidarité, insertion et égalité des chances au titre du programme 157 Handicap et dépendance pour 7 millions d’euros en AE et en CP du fait de la maîtrise des dépenses de fonctionnement des établissements et services d’aide par le travail (ESAT) et de la garantie de ressources des travailleurs handicapés (GRTH), ainsi que du programme 124 Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative pour 2 millions d’euros en AE et en CP du fait de la maîtrise des dépenses de fonctionnement de ce programme ;

– la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales au titre du programme 206 Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation pour 2 millions d’euros en AE du fait d’un contexte sanitaire favorable, du programme 215 Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture pour 500 000 euros en AE par l’amélioration des dépenses de fonctionnement de ce programme et du programme 149 Forêt pour 10 millions d’euros en CP du fait du recours à la trésorerie disponible sur les dispositifs d’intervention gérés par l’Agence de service et de paiement (ASP) ;

– la mission Culture au titre du programme 175 Patrimoines pour 13,1 millions d’euros en AE et en CP portant sur des crédits mis en réserve ;

– la mission Médias, livre et industries culturelles au titre du programme 334 Livre et industries culturelles pour 5,2 millions d’euros en AE et en CP au titre de crédits mis en réserve ;

– la mission Recherche et enseignement supérieur au titre du programme 193 Recherche spatiale pour 63 millions d’euros en AE et en CP au titre de crédits devenus sans objet, du programme 231 Vie étudiante pour 8 millions d’euros en AE et en CP également au titre de crédits devenus sans objet, du programme 186 Recherche culturelle et culture scientifique pour 2,7 millions d’euros en AE et CP au titre d’une meilleure maîtrise des dépenses d’Universciences, du programme 190 Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables pour 5,5 millions d’euros en AE et CP, du programme 192 Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle pour 7,4 millions d’euros en AE et CP, ces dernières annulations étant dues à une meilleure maîtrise des dépenses que celle qui avait été anticipée ;

– la mission Relations avec les collectivités territoriales au titre du programme 119 Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements pour 12 millions d’euros en AE et CP ;

– la mission Écologie, développement et mobilité durables au titre du programme 203 Infrastructures et services de transports pour 16,6 millions d’euros, du programme 205 Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture pour 1 million d’euros en AE et en CP, du programme 170 Météorologie pour 1,1 million d’euros en AE et en CP, du programme 113 Paysages, eau et biodiversité pour 1,5 million d’euros en AE et en CP, du programme 159 Information géographique et cartographique pour 100 000 euros en AE et en CP, du programme 181 Prévention des risques pour 1,1 million d’euros en AE et en CP, du programme 174 Énergie, climat et après-mines pour 500 000 euros en AE et en CP, du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer pour 2,8 millions d’euros en AE et en CP. Ces annulations sont rendues possibles par la révision à la baisse des perspectives d’exécution des différents programmes ;

– la mission Économie au titre du programme 134 Développement des entreprises et du tourisme pour 3,6 millions d’euros en AE et en CP du fait de la meilleure maîtrise des dépenses d’intervention et des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs de ce programme ;

– la mission Enseignement scolaire au titre du programme 230 Vie de l’élève pour 7 millions d’euros en AE et en CP et du programme 214 Soutien de la politique de l’éducation nationale pour un montant identique du fait de l’optimisation de la trésorerie du dispositif des emplois d’avenir professeurs ;

– la mission Égalité des territoires, logement et ville au titre du programme 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat pour 15 millions d’euros du fait de la révision à la baisse des perspectives d’exécution du programme ;

– la mission Outre-mer au titre du programme 138 Emploi outre-mer pour 4 millions d’euros et du programme 123 Conditions de vie outre-mer pour 8 millions d’euros ;

– la mission Travail et emploi au titre du programme 103 Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi pour 23 millions d’euros au regard des perspectives d’exécution des contrats de génération en 2015 ;

– la mission Crédits non répartis au titre du programme 552 Dépenses accidentelles et imprévisibles pour un montant de 100,3 millions d’euros en AE.

4. Le présent avis ne préjuge pas de la décision de la Commission lors de l’examen de la demande de ratification du décret dans le prochain projet de loi de finances afférent à l’exercice 2015.

La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire,

Vu les articles 12, 13 et 14 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances,

Vu la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015,

Vu le décret n° 2015-402 du 9 avril 2015 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance,

Vu le projet de décret d’avance notifié à la Commission le 8 octobre 2015 par lettre du secrétaire d’État chargé du budget portant ouverture et annulation de 232 500 000 euros d’autorisations d’engagement et de 184 500 000 euros de crédits de paiement,

Vu le projet de rapport de motivation joint au projet de décret d’avance,

Considérant que ce projet de décret tend à ouvrir :

– 130 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sur le programme 177 Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables de la mission Égalité des territoires et logement au titre de l’hébergement d’urgence et de la veille sociale ;

– 54,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sur le programme 158 Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation au titre de l’indemnisation de certaines victimes de la Shoah déportées depuis la France et non couvertes par un programme d’indemnisation français ;

– 48 millions d’euros en autorisations d’engagement sur le programme 122 Concours spécifiques et administration de la mission Relations avec les collectivités territoriales au titre de l’indemnisation des collectivités touchées par des calamités publiques ;

Considérant que ce même projet de décret tend en contrepartie à annuler 232 500 000 euros en autorisations d’engagement et 184 500 000 euros en crédits de paiement sur vingt missions et quarante programmes du budget général ;

EST D’AVIS,

compte tenu des informations dont elle dispose, de formuler les observations suivantes :

Le présent projet de décret d’avance ouvre et annule 232,5 millions d’euros d’autorisations d’engagement (AE) et 184,5 millions d’euros de crédits de paiement (CP) sur le budget général de l’État afin de financer des dépenses supplémentaires pour l’année 2015.

Le montant de ces ouvertures et annulations respecte les limites quantitatives fixées par les articles 13 et 14 de la loi organique du 1er août 2001 susvisée.

Les besoins supplémentaires identifiés découlent, à titre principal, d’un surcroît de dépenses constaté en cours d’année au titre de l’hébergement d’urgence et de la veille sociale.

La condition d’urgence posée par le premier alinéa de l’article 13 est remplie dès lors que le montant des crédits supplémentaires proposé par le présent décret d’avance correspond à des dépenses qui ne pouvaient être anticipées en loi de finances initiale et répondent à un besoin immédiat.

Cette procédure dérogatoire et exceptionnelle garantit l’information du Parlement et respecte à la fois la possibilité pour les commissions des finances des deux assemblées de s’exprimer sous forme d’avis et la faculté pour le Parlement de ratifier ou non ce dispositif dans le cadre de la plus prochaine loi de finances.

L’augmentation des flux de personnes déplacées ou en transit sur le territoire national au cours des derniers mois a accru les tensions budgétaires constatées de manière récurrente sur le programme 177 susmentionné.

De manière à répondre aux besoins supplémentaires qui en découlent, le plan Répondre au défi des migrations : respecter les droits – faire respecter le droit, annoncé le 17 juin dernier par le Gouvernement, prévoit la création de nouvelles places d’hébergement, un suivi renforcé des capacités du parc d’hébergement et la poursuite des mesures de lutte contre l’immigration irrégulière et les filières d’immigration clandestine.

Les ouvertures proposées par le présent projet de décret doivent permettre notamment de financer ces objectifs et d’améliorer la prise en charge des personnes concernées.

Les crédits du programme 177 se sont élevés à 1 366 millions d’euros en loi de finances pour 2015 (soit 50 millions d’euros de plus qu’en loi de finances pour 2014), dont 41 millions d’euros placés dans la réserve de précaution au 1er janvier 2015.

Ces crédits adoptés dans le cadre de la loi de finances pour 2015 sont toutefois inférieurs de 100 millions d’euros aux crédits consommés en fin d’exercice 2014 : en effet, deux ouvertures de crédits supplémentaires ont été adoptées en cours d’année d’un montant de 54,4 millions d’euros dans le cadre du décret d’avance du 2 décembre 2014 (90) et de 43,8 millions d’euros dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2014 (91).

Les besoins supplémentaires constatés en 2014 le sont à nouveau sur l’exercice 2015 pour un montant équivalent, auquel s’ajoutent 30 millions d’euros au titre de nouveaux besoins.

Dans ce contexte, les ouvertures de crédits proposées par le présent projet de décret doivent financer :

– la création de 5 000 places de logement accompagné pour 6 millions d’euros ;

– la création de 1 500 places d’hébergement d’urgence pour 7 millions d’euros ;

– la mise en œuvre de moyens d’accueil supplémentaires dans certaines régions, dont l’Île-de-France et le Nord-Pas-de-Calais (62 millions d’euros).

Par ailleurs, les responsables des budgets opérationnels régionaux du programme ont été, selon le rapport de motivation joint au projet de décret d’avance, « exceptionnellement autorisés à redéployer de manière temporaire une partie des dotations versées aux centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), qui sont versées par douzième tous les mois, vers les dispositifs d’hébergement d’urgence et de veille sociale ».

Une partie des crédits destinés au logement adapté aurait également été redéployée.

Par conséquent, parmi les ouvertures de crédits proposées, 55 millions d’euros ont pour objet de compenser ces redéploiements à hauteur de 11 millions d’euros pour le logement adapté et de 44 millions d’euros pour les CHRS.

Au total, les ouvertures sur le programme 177 atteignent donc 130 millions d’euros.

b. Les ouvertures de crédits pour l’indemnisation des collectivités touchées par des calamités publiques

i. Sur le fond

Plusieurs évènements climatiques qualifiés de « calamités publiques » ont touché les collectivités territoriales entre la fin de l’année 2014 et l’année 2015, soit :

– les événements climatiques de septembre et octobre 2014 dans les départements d’Ardèche, de l’Aude, de l’Aveyron, du Gard, de l’Hérault et de la Lozère ;

– les intempéries de novembre 2014 dans les départements de l’Ardèche, de l’Aude, de l’Aveyron, de l’Hérault, des Pyrénées-Orientales et du Tarn ;

– les inondations survenues du 27 au 30 novembre 2014 dans les départements de la Haute-Corse et du Var ;

– les évènements climatiques d’avril et de mai 2015 dans le département de la Haute-Savoie.

La prise en charge de ces évènements se traduit par le versement d’indemnités par l’État aux collectivités territoriales concernées de manière à financer les travaux de remise en état de leurs biens. Le montant de ces indemnités est déterminé par des missions d’inspection interministérielles, dont l’objet est d’évaluer les dégâts éligibles ainsi que le taux et le montant d’indemnisation applicable.

ii. Sur le plan budgétaire

Ces indemnisations se traduisent par des ouvertures en urgence de crédits en AE qui font l’objet d’une couverture pluriannuelle en CP, les travaux entrepris se poursuivant en général sur plusieurs exercices budgétaires.

Au titre de l’année 2015, les travaux à financer relèvent ainsi principalement d’évènements intervenus en 2014, précédemment cités, du fait de la procédure d’évaluation des dégâts à indemniser (92).

Ceux-ci ont donné lieu à de premiers financements (93), rendus possibles par des redéploiements internes au programme 122 Concours spécifiques et administration de la mission Relations avec les collectivités territoriales pour un montant de 43,4 millions d’euros.

Ces premiers financements et les autres besoins identifiés pour 2015 doivent désormais être couverts par une ouverture de crédits de 48 millions d’euros, correspondant au montant des indemnisations totales prévues en AE pour 2015 (55,3 millions d’euros), minoré des premiers versements en CP réalisés au profit des départements concernés (6,3 millions d’euros).

c. Les ouvertures de crédits au titre de l’indemnisation des victimes de la Shoah déportées depuis la France et non couvertes par un programme français

i. Sur le fond

L’accord franco-américain signé à Washington le 8 décembre 2014 vise à permettre l’indemnisation de personnes déportées depuis la France au cours de la seconde guerre mondiale et qui n’ont pas accès au régime de droit interne de pension d’invalidité des victimes civiles de la guerre du fait de leur nationalité, ni à des mesures de réparations versées par d’autres pays ou institutions.

Les autorités américaines, en charge de la gestion du fonds d’indemnisation et de la fixation des montants d’indemnités à verser par bénéficiaire, procéderont, à compter de l’entrée en vigueur de l’accord, le 1er novembre 2015, à une campagne d’information et recenseront les demandes d’indemnisation qui leur seront soumises.

Chaque année, un rapport sur la mise en œuvre de ce fonds sera adressé au Gouvernement français jusqu’à l’épuisement des crédits.

ii. Sur le plan budgétaire

L’article 4 de l’accord susmentionné prévoit le transfert de 60 millions de dollars du gouvernement français au gouvernement des États-Unis dans les trente jours suivant son entrée en vigueur.

En vue de ce transfert, le présent projet de décret prévoit une ouverture de crédits de 54,5 millions d’euros en AE et CP (94) au profit du programme 158 Indemnisations des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation.

3. Sur les annulations de crédits

Les annulations de crédits sont réparties sur vingt missions et quarante programmes du budget général, à l’exception de la mission Défense. Trois missions prioritaires sont néanmoins mises à contribution. Ces annulations visent à garantir le respect de l’équilibre budgétaire défini par la loi de finances pour 2015.

Toutes les annulations prévues portent sur des crédits mis en réserve en début d’exercice.

Parmi les ministères bénéficiaires des ouvertures de crédits précédemment décrites, le ministère du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité et les services du Premier ministre participent également à leur financement par l’annulation respective de 10 millions d’euros de crédits (95) sur le programme 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat et de 3,5 millions d’euros sur le programme 129 Coordination du travail gouvernemental.

Les autres annulations d’un montant de 222,5 millions d’euros en AE et de 183,5 millions d’euros en CP reposent sur des ministères n’ayant pas bénéficié d’ouverture de crédits supplémentaires et se répartissent entre les missions suivantes :

– la mission Action extérieure de l’État au titre du programme 185 Diplomatie culturelle et d’influence pour 12 millions d’euros et du programme 151 Français à l’étranger et affaires consulaires pour 3,9 millions d’euros ;

– la mission Administration générale et territoriale de l’État au titre du programme 307 Administration territoriale pour 4,1 millions d’euros ;

– la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales au titre du programme 215 Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture pour 0,4 million d’euros en AE et du programme 149 Forêt pour 2,71 millions d’euros en AE et 3,39 millions d’euros en CP ;

– la mission Culture au titre du programme 175 Patrimoines pour 1 million d’euros et du programme 224 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture pour 4,1 millions d’euros ;

– la mission Écologie, développement et mobilité durables au titre du programme 203 Infrastructures et services de transports pour 1,5 million d’euros, du programme 205 Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture pour 1,8 million d’euros, du programme 113 Paysages, eau et biodiversité pour 2 millions d’euros, du programme 181 Prévention des risques pour 3,8 millions d’euros et du programme 174 Énergie, climat et après-mines pour 6,2 millions d’euros ;

– la mission Engagements financiers de l’État au titre du programme 145 Épargne pour 10 millions d’euros ;

– la mission Enseignement scolaire au titre du programme 214 Soutien de la politique de l’éducation nationale pour 5 millions d’euros en CP ;

– la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines au titre du programme 156 Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local pour 17 millions d’euros et du programme 148 Fonction publique pour 1,2 million d’euros ;

– la mission Justice au titre du programme 166 Justice judiciaire pour 2 millions d’euros, du programme 107 Administration pénitentiaire pour 11,9 millions d’euros, dont 6,9 millions d’euros de dépenses de personnel (titre 2), du programme 182 Protection judiciaire de la jeunesse pour 1,6 million d’euros sur le titre 2, du programme 101 Accès au droit et à la justice pour 3,5 millions d’euros, du programme 310 Conduite et pilotage de la politique de la justice pour 56 millions d’euros en AE et 3 millions d’euros en CP et du programme 335 Conseil supérieur de la magistrature pour 11 millions d’euros sur le titre 2 ;

– la mission Médias, livre et industries culturelles au titre du programme 334 Livre et industries culturelles pour 1,17 million d’euros en AE et 1,18 million d’euros en CP ;

– la mission Outre-mer au titre du programme 138 Emploi outre-mer pour 3,6 millions d’euros ;

– la mission Politique des territoires au titre du programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire pour 2,5 millions d’euros ;

– la mission Recherche et enseignement supérieur au titre du programme 193 Recherche spatiale pour 27 millions d’euros, du programme 190 Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables pour 7,8 millions d’euros, du programme 192 Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle pour 4 millions d’euros, du programme 186 Recherche culturelle et culture scientifique pour 0,13 million d’euros en AE et 0,12 million d’euros CP et du programme 142 Enseignement supérieur et recherche agricoles pour 0,28 million d’euros en AE ;

– la mission Santé au titre du programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins pour 3,1 millions d’euros en CP ;

– la mission Sécurité au titre du programme 176 Police nationale pour 6,4 millions d’euros, du programme 152 Gendarmerie nationale pour le même montant et du programme 161 Sécurité civile pour 4,7 millions d’euros ;

– la mission Solidarité, insertion et égalité des chances au titre du programme 124 Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative pour 5,3 millions d’euros en AE et 2,2 millions d’euros en CP ;

– la mission Travail et emploi au titre du programme 155 Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail pour 0,9 million d’euros.

4. Le présent avis ne préjuge pas de la décision de la Commission lors de l’examen de la demande de ratification du décret dans le prochain projet de loi de finances afférent à l’exercice 2015.

III. AVIS DE LA COMMISSION DES FINANCES DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE SUR LE PROJET DE DÉCRET D’AVANCE DU 24 NOVEMBRE 2015

La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire,

Vu les articles 12, 13 et 14 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances,

Vu la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015,

Vue le projet de loi de finances rectificative pour 2015, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale 13 novembre 2015,

Vu le décret n° 2015-402 du 9 avril 2015 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance,

Vu le décret n° 2015-639 du 9 juin 2015 portant annulation de crédits,

Vu le décret n° 2015-1347 du 23 octobre 2015 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance,

Vu le projet de décret d’avance notifié à la Commission le 18 novembre 2015 par lettre du secrétaire d’État chargé du budget portant ouverture et annulation de 2 160 452 834 euros d’autorisations d’engagement (AE) et de 1 703 440 492 euros de crédits de paiement (CP),

Vu le projet de rapport de motivation joint au projet de décret d’avance,

Considérant que ce projet de décret tend :

– à ouvrir 441,8 millions d’euros en AE et CP au titre des dépenses de personnel des ministères ainsi que 1 718,6 millions d’euros en AE et 1 261,6 millions d’euros en CP sur leurs autres dépenses ;

– à annuler, en contrepartie, 35 millions d’euros en AE et CP au titre des dépenses de personnel et 2 125,4 millions d’euros en AE et 1 668,4 millions d’euros en CP sur les autres dépenses ;

EST D’AVIS,

compte tenu des informations dont elle dispose, de formuler les observations suivantes :

1. Sur la conformité du projet de décret d’avance aux prescriptions de la loi organique du 1er août 2001 susvisée :

Le présent projet de décret d’avance ouvre et annule 2 160,5 millions d’euros d’autorisations d’engagement (AE) et de 1 703,4 millions d’euros de crédits de paiement (CP) sur le budget général de l’État afin de financer des dépenses supplémentaires constatées en cours d’année.

Le montant de ces ouvertures et annulations respecte les limites quantitatives fixées par les articles 13 et 14 de la loi organique du 1er août 2001 susvisée.

La condition d’urgence posée par le dernier alinéa de l’article 13 est remplie dès lors que les besoins supplémentaires identifiés découlent de l’augmentation significative de certains postes de dépenses à l’automne 2015 qui ne pouvait être anticipée. La nécessité de prendre toutes les mesures pour assurer notamment le financement des dépenses de personnel des ministères en fin d’exercice, comme celui de mesures visant à assurer la continuité de l’action publique dans des domaines particulièrement sensibles (à l’instar de l’aide aux personnes vulnérables) ou le respect des engagements de l’État (par exemple, au titre des contrats aidés) renforcent cette notion d’urgence.

Cette procédure dérogatoire et exceptionnelle garantit l’information du Parlement et respecte à la fois la possibilité pour les commissions des finances des deux assemblées de s’exprimer sous forme d’avis et la faculté pour le Parlement de ratifier ou non ce dispositif dans le cadre de la plus prochaine loi de finances.

2. Sur les ouvertures de crédits :

Les principales ouvertures de crédits proposées par le présent projet de décret d’avance concernent, cette année encore, principalement le ministère de la défense. Les ouvertures prévues atteignent 930 millions d’euros en AE et 843 millions d’euros en CP, soit respectivement 43 % et 49 % du total des ouvertures demandées.

Elles se répartissent entre différents postes de dépenses.

Le besoin de crédits supplémentaires, hors dépenses de personnel, liés aux opérations extérieures (OPEX) représente 502,2 millions d’euros. Ces crédits doivent permettre de financer une partie du surcoût résultant de ces opérations estimé en 2015 à 1 107 millions d’euros, soit un niveau stable par rapport à 2014, année au cours de laquelle ces dépenses avaient atteint 1 118 milliards d’euros. L’écart entre ce montant d’exécution prévisionnel pour 2015 et le montant des crédits inscrits en loi de finances initiale (450 millions d’euros) s’explique notamment par le lancement de l’opération « Barkhane » au Sahel (dans le prolongement des opérations au Mali et au Tchad), qui représente un montant de 556 millions d’euros et 3 865 hommes déployés, et de l’opération « Chammal » contre la coalition internationale de Daech en Irak et au Levant, qui représente en 2015 la deuxième opération extérieure la plus coûteuse, pour 235,7 millions d’euros et 1 400 hommes déployés.

Ces opérations représentent également une dépense en personnel estimée à 304 millions d’euros pour l’année 2015 (au lieu de 322 millions d’euros en 2014). Le présent projet de décret prévoit de couvrir ce montant à hauteur de 123,1 millions d’euros.

L’opération intérieure (OPINT) « Sentinelle », lancée le 14 janvier dernier, représente en 2015 un coût de 200 millions d’euros, dont 160 millions d’euros de dépenses de personnel pour 7 000 hommes déployés. Toutefois, des besoins de financement supplémentaires sont apparus en cours d’année pour un montant de 170,6 millions d’euros répartis entre 119 millions d’euros hors dépenses de personnel (soit 25 millions d’euros pour l’activité opérationnelle, 4 millions d’euros pour l’entretien du matériel, 42 millions d’euros pour l’équipement et 48 millions d’euros pour d’autres dépenses spécifiques ou ponctuelles de soutien) et 51,6 millions d’euros sur les dépenses de personnel (au titre du surcoût des indemnités opérationnelles et des soldes de réservistes mobilisés dans le cadre de l’opération « Sentinelle »).

Au titre des OPEX et de l’opération « Sentinelle », les besoins de financement, hors dépenses de personnel, représentent ainsi 605,4 millions d’euros (soit respectivement 502,2 millions d’euros et 103,2 millions d’euros) dont il faut toutefois déduire 17 millions d’euros en autorisations d’engagement et 104 millions d’euros en crédits de paiement au titre d’économies réalisées sur le programme 178 Préparation et emploi des forces de la mission Défense. Par conséquent, le présent projet de décret ne propose d’ouvrir que 588 millions d’euros en AE et 501,4 millions d’euros en CP. Au titre des dépenses de personnel, les ouvertures prévues pour ces opérations représentent 174,7 millions d’euros en AE et CP.

L’ouverture de ces crédits est nécessaire afin d’assurer la continuité des opérations extérieures de la France et la sécurité des personnels engagés.

Il est également proposé de compléter les crédits alloués aux dépenses de personnel du ministère de la défense, hors OPEX et opération « Sentinelle », pour un montant net de 166,9 millions d’euros, se décomposant en 21,3 millions d’euros au titre des cotisations de l’État employeur au compte d’affectation spécial Pensions et de 145,6 millions d’euros résultant principalement, d’une part, de l’annulation de la déflation des effectifs du ministère (qui devait représenter 7 500 équivalents temps plein) prévue par la loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 (pour un surcoût estimé à 60 millions d’euros) et, d’autre part, des perturbations liées au déploiement du logiciel unique à vocation interarmées de la solde (LOUVOIS) (50 millions d’euros). Selon le Gouvernement, ces perturbations seraient toutefois en diminution.

L’urgence de la situation ne permet pas de procéder à l’ouverture des crédits dans la loi de finances rectificative de fin d’année, puisque ces crédits seront consommés au titre de la paie de décembre.

Par ailleurs, des ouvertures de crédits sont également proposées au bénéfice de dix autres ministères :

– le ministère du travail, de l’emploi et du dialogue social qui bénéficie de crédits pour compléter le financement des contrats aidés prévus en loi de finances initiale pour 2015 (3,4 milliards d’euros) de 1 004 millions d’euros en AE et 641,1 millions d’euros en CP au titre des versements devant intervenir aux mois de novembre et décembre. Ces ouvertures représentent respectivement 46 % et 38 % des ouvertures en AE et CP prévues par le présent projet de décret. Elles ont pour objet de permettre le financement 100 000 contrats aidés supplémentaires, annoncés le 1er juin 2015 et se décomposant en 70 000 contrats d’accompagnement vers l’emploi (CUI-CAE) et 30 000 emplois d’avenir. Au total, 445 000 contrats aidés pourraient être conclus en 2015 de manière à conforter la stabilité du taux chômage constaté en 2015 (10 %), puis de permettre sa diminution progressive à compter de 2016 (9,7 %). Selon le Gouvernement, les ouvertures de crédits proposées ont également pour objet de financer les surcoûts constatés au titre des entrées nettes dans le dispositif des contrats aidés en cours d’année et des conditions sous lesquelles ces contrats ont été conclus. L’ouverture de crédits proposée par le présent projet de décret répondrait donc à une situation d’urgence pour assurer le paiement des aides aux employeurs au titre des mois de novembre et de décembre ;

– le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche bénéficie de 70,4 millions d’euros supplémentaires en AE et en CP pour financer ses dépenses de personnel. Ces ouvertures ont pour objet de financer un coût de l’emploi supérieur aux estimations de la loi de finances initiale pour 2015, notamment s’agissant du glissement vieillesse et technicité sans que des facteurs explicatifs plus précis puissent être présentés par le Gouvernement d’ici à l’analyse de l’exécution budgétaire qui sera conduite en début d’année prochaine. Par ailleurs, 51,2 millions d’euros en AE et 51,8 millions d’euros en CP sont ouverts pour couvrir les besoins prévisionnels au titre des bourses sur critères sociaux ou des aides au mérite ;

– le ministère du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité bénéficie à nouveau de crédits supplémentaires au titre du programme 177 Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables à hauteur de 40,1 millions d’euros en AE et en CP. Ces ouvertures viennent s’ajouter aux 130 millions d’euros ouverts par le décret d’avance du 23 octobre 2015 susvisé. L’augmentation significative de la demande d’hébergement d’urgence et la nécessité de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer un logement aux personnes en situation de grande précarité, dont principalement des familles avec enfants, à l’approche de la période hivernale assurent l’urgence de ces ouvertures ;

– les autres ministères concernés par des ouvertures de crédits bénéficient de respectivement 3 % (soit 64,7 millions d’euros) et 3,4 % (soit 57,1 millions d’euros) des crédits supplémentaires en AE et en CP prévus par le présent projet de décret.

3. Sur les annulations de crédits :

Les annulations de crédits sont réparties sur vingt-six missions et soixante-dix programmes du budget général. Elles visent à garantir le respect de l’équilibre budgétaire défini par la loi de finances pour 2015. Ces annulations concernent certains des ministères qui bénéficient par ailleurs d’ouvertures de crédits.

Ces annulations concernent ainsi :

– le ministère de l’écologie, de l’industrie et du numérique à hauteur de 337,6 millions d’euros en AE et 313,1 millions d’euros en CP (soit respectivement 16 % et 18 % des annulations prévues en AE et CP). Ces annulations portent quasi exclusivement sur la réserve de précaution ;

– le ministère de la défense pour 312,7 millions d’euros en AE et 205,7 millions d’euros en CP, (soit respectivement 14 % et 12 % des annulations prévues en AE et CP). Celles-ci reposent, hors dépenses de personnel, principalement sur le programme 146 Équipement des forces ;

– le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche pour 188,5 millions d’euros en AE et 196,4 millions d’euros en CP (soit respectivement 9 % et 12 % des annulations prévues en AE et CP). Les annulations prévues portent notamment sur la recherche spatiale du fait de moindres contributions aux organisations internationales (– 63 millions d’euros) et sur la réserve de précaution de la plupart des programmes du ministère ;

– le ministère de la justice pour 302,1 millions d’euros en AE et 72,8 millions d’euros en CP (soit respectivement 14 % et 4 % des annulations prévues en AE et CP). Les annulations en AE correspondent pour 249,1 millions d’euros à une économie réalisée à l’occasion du renouvellement de marchés délégué.

Les autres ministères sont, quant à eux, sollicités à hauteur de 1 019,1 millions d’euros et 915 millions d’euros en CP pour des montants moins élevés et principalement au titre de l’annulation de crédits de la réserve de précaution.

4. Le présent avis ne préjuge pas de la décision de la Commission lors de l’examen de la demande de ratification du décret dans le projet de loi de finances rectificative afférent à l’exercice 2015.

*

* *

La commission adopte l’article 10 sans modification.

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TITRE IV
DISPOSITIONS PERMANENTES

I.– Mesures fiscales non rattachées

Article 11
Évolution de la taxation des produits pétroliers, du gaz, du charbon et de l’électricité

Cet article, qui doit s’apprécier en lien avec l’article 3 qui crée un compte d’affectation spéciale Transition énergétique (96), prévoit de réformer plusieurs aspects importants de la fiscalité de l’énergie pour les années 2016 et 2017, de façon à rééquilibrer les sources du financement des énergies renouvelables, en stabilisant en 2017 la taxation de l’électricité à son niveau de 2016.

Les réformes proposées par cet article sont les suivantes :

– arrêt de l’augmentation, intervenue chaque année depuis 2010 sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), de la taxation de l’électricité. Ainsi, à partir de 2017, il n’y aura plus de hausse de la contribution au service public de l’électricité (CSPE) ;

– augmentation des taxes sur les énergies fossiles, conformément aux objectifs fixés dans la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique (97;

– nouvelles modulations tarifaires pour poursuivre le rapprochement progressif de la taxation du gazole et des essences et pour préserver la compétitivité des industries électro-intensives. Concrètement, en 2017, l’écart de taxation entre le gazole et les essences sera réduit de 2 centimes supplémentaires par litre de carburant. Cette modulation s’ajoutera au maintien en 2017 d’un avantage tarifaire pour l’essence E 10 (voir article 12 pour la création en 2016 de cette modulation entre essences).

I. L’ÉTAT DU DROIT

La taxation des produits énergétiques, qu’il s’agisse des énergies fossiles ou de l’électricité, se caractérise par le cumul de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de droits d’accises. Ces dernières prennent la forme de diverses taxes intérieures de consommation : taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN), taxe intérieure sur la consommation des houilles, lignites et cokes utilisés comme combustible, dite « taxe charbon » (TICC), et taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE).

Leur régime législatif, défini par le chapitre Ier du titre X du code des douanes (articles 265 à 266 quinquies C), s’inscrit dans le cadre européen fixé par la directive du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité (98). Il existe par ailleurs des taxes locales sur la consommation d’électricité, prévues par le code général des collectivités territoriales (99), mais celles-ci ne sont pas concernées par le présent article.

Ces taxes intérieures de consommation sont complétées, pour l’électricité, par une imposition au régime législatif original et problématique, la CSPE et, pour le gaz, par deux prélèvements fiscaux à finalité spécifique, prévus par le code de l’énergie : la contribution biométhane et la contribution au tarif spécial de solidarité du gaz (CTSSG).

Dans un souci de clarté, les différentes taxes et contributions concernées par la réforme prévue par le présent article sont présentées ci-après de façon synthétique, en distinguant successivement celles qui concernent les produits pétroliers, celles qui concernent le gaz et le charbon, ainsi que celles qui concernent l’électricité.

Par ailleurs, le tableau ci-dessous résume l’évolution, actuellement prévue jusqu’en 2016, des principales composantes de la TICPE, de la TICGN, de la TICC, de la TICFE et de la CSPE, en prenant en compte, à ce stade, les changements prévus dans l’article 8 bis du projet de loi de finances pour 2016, mais pas ceux qui pourraient résulter du présent projet de loi de finances rectificative pour 2015.

ÉVOLUTION DES PRINCIPAUX TARIFS DE TICPE, TICGN ET DE LA CSPE DE 2014 À 2016

Type de taxe et d’énergie

Indice d’identification

2014

2015

2016

(droit actuel,

prévu LFI 2014 + LFI 2015)

2016

prévu PLF 2016

(changements par rapport à LFI 2014 en gras)

ÉNERGIES FOSSILES

Valeur de référence retenue pour la tonne de carbone afin d’établir le tarif des TIC sur les énergies fossiles

(en euros)

7

14,5

22

22

TICPE sur le supercarburant SP 95 « classique »

(en centimes d’euro par litre)

11

60,69

62,41

64,12

63,12

TICPE sur le supercarburant SP 98

(en centimes d’euro par litre)

11 bis

63,96

65,68

67,39

66,39

TICPE sur le supercarburant SP 95 dit « E 10 »

(en centimes d’euro par litre)

11 ter

60,69

62,41

64,12

63,12

TICPE sur le fioul domestique

(en centimes d’euro par litre)

21

5,66

7,64

9,63

9,63

TICPE sur le gazole

22

42,84

46,82

48,81

49,81

TICPE sur le GPL carburant

(en euros pour 100 kg nets)

30 ter, 31 ter et 34

10,76

13

15,24

15,24

TICGN (gaz naturel)

(en mégawattheure)

1,41

2,93

4,45

4,45

TICC (charbon)

(en mégawattheure)

2,29

4,75

7,21

7,21

ÉLECTRICITÉ

TICFE sur l’électricité

(en mégawattheure)

0,5

0,5

0,5

0,5

CSPE sur l’électricité

(en mégawattheure)

16,5

19,5

22,5

(prévision)

22,5

(prévision)

LFI : loi de finances initiale.

PLF : projet de loi de finances.

Sources : Légifrance, Commission de régulation de l’énergie (CRE), projet de loi de finances rectificative pour 2015 et projet de loi de finances pour 2016 tel qu’adopté par l’Assemblée nationale (article 8 bis).

A. LA TAXATION DES PRODUITS PÉTROLIERS ET ASSIMILÉS

Prévue par les articles 265 à 265 nonies du code des douanes, la TICPE, dénommée taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) jusqu’en 2011, est une taxe ancienne, puisqu’une taxe intérieure pétrolière avait déjà été mise en place par une loi du 30 mars 1928 relative au régime d’importation du pétrole. Elle frappe l’ensemble des produits pétroliers et assimilés, dès lors qu’ils sont destinés à être utilisés comme carburants ou combustibles, la taxe étant exigible dès la mise à la consommation des produits, conformément à une directive du 16 décembre 2008 (100).

Le recouvrement de la taxe est confié à l’administration des douanes, qui l’effectue auprès des compagnies pétrolières et des distributeurs auxquels un statut d’entrepositaire agréé a été attribué par l’État. Comme pour les autres droits d’accises et pour la TVA, même si ce sont les entreprises vendant les produits qui sont redevables de l’impôt, le poids de cette taxation est en réalité supporté par le consommateur final : en effet, le prix de vente des carburants intègre déjà ces différentes taxes, qui se cumulent, la TVA intégrant en outre la TICPE dans son assiette.

Le barème de cette taxe est actuellement prévu au B du 1 de l’article 265 du code des douanes (Cf. tableau supra). Après avoir connu une phase de stabilité de 2006 à 2014, ces tarifs connaissent une augmentation progressive, qui a commencé à s’appliquer à compter du 1er janvier 2015, sous l’effet de la « contribution climat énergie » dont l’intégration aux tarifs des taxes intérieures de consommation a été décidée par la loi de finances pour 2014 (101). Cette contribution, qui ne prend la forme ni d’une taxe séparée ni d’une composante identifiée de manière distincte pour le tarif de TICPE applicable à chaque produit, est destinée à favoriser la lutte contre le réchauffement climatique. Elle est ainsi calculée, pour chaque produit, en fonction de la quantité de carbone qu’il comprend et d’une valeur fiscale théorique donnée, pour chaque année, à une tonne de carbone. Cette valeur augmente chaque année : de 7 euros en 2014, elle est passée à 14,5 euros en 2015 et 22 euros en 2016 – l’article 265 du code des douanes n’ayant pas encore fixé les tarifs de TICPE pour les années ultérieures.

B. LA TAXATION DU GAZ ET DU CHARBON

Le gaz naturel fait actuellement l’objet d’une taxation par le biais de trois prélèvements fiscaux : la TICGN, la CTSSG et la contribution biométhane, qui sont toutes concernées par le présent article (102).

1. La taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN)

Le principal prélèvement fiscal sur le gaz, au regard de son rendement (voir II), est la TICGN, mise en place en 1986 et dont le régime est défini par l’article 266 quinquies du code des douanes. À l’instar de la TICPE, cette taxe a pour fait générateur la livraison à l’acquéreur de gaz naturel à usage combustible et est exigible lors de la facturation de cette vente. Elle est recouvrée chaque trimestre par l’administration des douanes et est normalement due par l’entreprise qui fournit ou importe l’énergie, à charge pour elle de répercuter la taxe dans ses prix auprès du consommateur final.

L’article 266 quinquies du code des douanes prévoit plusieurs cas d’exonération de la TICGN. Ainsi, la TICGN n’est pas due par l’entreprise importatrice ou le fournisseur lorsque le gaz naturel est utilisé :

– autrement que comme combustible (notamment comme matière première) ;

– avec un double usage dans certains procédés métallurgiques, de réduction chimique ou d’électrolyse ;

– pour la fabrication de produits minéraux non métalliques ou de produits énergétiques ;

– pour la production d’électricité ;

– et, enfin, pour les besoins de son extraction et de sa production.

La loi de finances pour 2014 a prévu que, sous l’effet de la hausse progressive de la « contribution climat énergie », le tarif de cette taxe augmente nettement en 2015 et 2016. Ainsi, alors qu’il s’élevait à 1,41 euro par mégawattheure (MWh) en 2014, il a été porté à 2,93 euros par MWh en 2015 et devrait, en l’état du droit, atteindre 4,45 euros par MWh en 2016 : cette taxe aura donc plus que triplé en l’espace de seulement deux ans. Par ailleurs, l’exonération de TICGN dont bénéficiaient les particuliers pour leur consommation de gaz naturel a été supprimée à compter du 1er avril 2014, en application de l’article 32 de la loi de finances pour 2014.

Toutefois, en application de l’article 265 nonies du code des douanes, les entreprises consommant de grandes quantités d’énergie (103) peuvent bénéficier de tarifs préférentiels, qui s’élèvent à :

– 1,19 euro par MWh pour les entreprises soumises, pour leurs activités grandes consommatrices d’énergie, au marché des quotas de gaz à effet de serre (système dit « ETS » défini par une directive du 13 octobre 2003 (104)) ;

– et à 1,27 euro par MWh, pour la seule période 2015-2019, pour les entreprises qui, sans faire partie du marché des quotas de gaz à effet de serre, exercent des activités grandes consommatrices d’énergie qui ont été considérées par la Commission européenne comme relevant de secteurs exposés à un risque important de fuite de carbone (105).

2. Les prélèvements complémentaires prévus par le code de l’énergie pour compenser des charges spécifiques aux fournisseurs de gaz naturel

Par ailleurs, le gaz est soumis à deux prélèvements de nature fiscale, dont le régime est fixé par les articles L. 121-35 à L. 121-44 du code de l’énergie et qui sont destinés à compenser les surcoûts résultant de charges spécifiques que la puissance publique a mis à la charge des fournisseurs de gaz naturel :

– une contribution au tarif social de solidarité du gaz (CTSSG), mise en place à partir de 2009, conformément à un décret du 13 août 2008 (106), codifiée par une ordonnance du 9 mai 2011 (107). La CTSSG vise à compenser aux fournisseurs de gaz naturel les charges de service public résultant de l’application du tarif spécial de solidarité dont bénéficient, pour le gaz naturel, les personnes disposant de faibles ressources, ainsi que du dispositif prévu au profit des personnes en situation de précarité énergétique. En application de l’article L. 121-38 du code de l’énergie, le tarif de la CTSSG est fixé par arrêté du ministre chargé de l’énergie, sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) qui calcule le montant des charges à compenser ainsi que les frais de gestion de la taxe par la Caisse des dépôts et consignations. Ce tarif, qui ne peut dépasser 2 % du tarif réglementé de vente du KWh de gaz naturel, a été fixé à 0,2 euro par MWh pour l’année 2015 ;

– une contribution au titre des charges imputables à l’achat de biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturel, dite « contribution biométhane », créée en 2010 (108) et destinée, conformément à l’article L. 121-43 du code de l’énergie, à compenser aux fournisseurs de gaz naturel les charges qu’ils supportent au titre de l’obligation d’achat de biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturel. Les charges à compenser sont égales à la différence entre le coût d’achat de ce biométhane et celui de l’approvisionnement en gaz naturel. Un décret du 21 novembre 2011 (109) a précisé que le montant des charges à compenser doit être calculé par la CRE, sur la base des déclarations adressées chaque année par les fournisseurs de gaz naturel, et que la Caisse des dépôts et consignations est chargée de la gestion de cette taxe. Le montant de cette contribution demeure à ce jour modeste, même s’il a tendance à augmenter à mesure que les quantités de biométhane rachetées augmentent : il a été, sur proposition de la CRE, fixé pour l’année 2015 à 0,0153 euro par MWh par un arrêté du 10 décembre 2014 (110).

3. La taxe intérieure de consommation sur le charbon (TICC)

Le régime de la taxe intérieure sur les houilles, les lignites et les cokes, dite « taxe charbon » (TICC), est actuellement prévu à l’article 266 quinquies B du code des douanes. La taxe est due par le fournisseur de ces produits à usage combustible, lors de leur livraison au consommateur final, qui supporte économiquement le poids de la taxe à travers les prix TTC. Elle est recouvrée par l’administration des douanes sur une base trimestrielle et son tarif, en application de la loi de finances pour 2014, devrait passer de 4,75 euros par MWh en 2015 à 7,21 euros par MWh en 2016.

A. LA TAXATION DE L’ÉLECTRICITÉ

1. La contribution au service public de l’électricité (CSPE)

Créée par la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité (111) et confortée par la loi du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l’électricité (112), la CSPE est une imposition de toute nature, dont le statut juridique a longtemps paru incertain et qui a pris un poids financier croissant au fil des années. Cette contribution, dont sont redevables les fournisseurs d’électricité (ou les entreprises locales de distribution), est imputée sur les factures des consommateurs finaux, qui en supportent donc le poids économique. Son régime législatif, codifié aux articles L. 121-6 à L. 121-28 du code de l’énergie, a été précisé par un décret du 28 janvier 2004 (113). Ces articles dressent la liste des missions de service public mises à la charge des opérateurs électriques, dont le coût doit leur être compensé au terme d’un calcul effectué chaque année par la CRE. Ces missions sont les suivantes :

– obligations de rachats d’énergie d’origine renouvelable (énergie éolienne et photovoltaïque notamment) ;

– surcoûts de production dans les parties non continentales du territoire français : départements d’outre-mer (DOM), collectivités d’outre-mer (COM) d’Amérique, Corse et plusieurs petites îles ;

– charges liées à la mise en œuvre des tarifs sociaux de l’électricité, au profit des personnes à faibles ressources ou en situation de précarité ;

– couverture des frais financiers des opérateurs supportant des charges de service public, ainsi que des frais de gestion de la Caisse des dépôts et consignations, par qui transitent les sommes collectées ;

– alimentation du budget du Médiateur de l’énergie, lequel bénéficie également, depuis 2013, du versement d’une fraction de la CTSSG ;

– versement de la prime prévue au profit des opérateurs d’effacement, l’effacement consistant à faire baisser la consommation électrique en cas de pic de demande, ce qui éviter de devoir soudainement importer de l’électricité ou en produire à partir de centrales thermiques.

Après avoir longtemps été considérée par le Conseil d’État comme une imposition innommée, la CSPE a été clairement rangée parmi les « impositions de toutes natures » par une décision rendue par le Conseil constitutionnel le 8 octobre 2014 (114), dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité. Or, bien que l’article 34 de la Constitution prévoie que « la loi fixe les règles concernant […] l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures », le taux de la CSPE n’est pas actuellement fixé directement par la loi. En effet, l’article L. 121-13 du code de l’énergie prévoit que le taux de la CSPE, après que la CRE ait calculé le montant des charges à compenser, est fixé chaque année par un arrêté du ministre chargé du budget, pris sur proposition de la CRE. En outre, ce même article précise qu’en l’absence d’arrêté ministériel avant la fin de l’année précédente, la proposition de tarif formulée par la CRE devient applicable à compter du 1er janvier. Le seul garde-fou législatif actuellement prévu consiste à limiter la hausse annuelle du tarif de la CSPE à un maximum de 3 euros par MWh, ce qui ne paraît pas suffisant au regard du rôle démocratique que le Parlement doit jouer en matière fiscale.

En pratique, le taux a bien été fixé ces dernières années par la CRE. Cette autorité administrative indépendante, compte tenu de la forte hausse des charges à compenser et des créances à rembourser aux opérateurs électriques au titre des compensations insuffisantes accumulées au fil des années, a augmenté le tarif de la CSPE de ce maximum de 3 euros par MWh chaque année depuis 2010 (115). Ce taux s’est établi à 16,5 euros par MWh en 2014 et 19,5 euros par MWh en 2015.

Par ailleurs, la CSPE prévoit actuellement, au bénéfice des entreprises électro-intensives, plusieurs mécanismes d’exonération ou de plafonnement, au sujet desquels la Commission européenne a ouvert, le 27 mars 2014, une enquête au titre de son contrôle sur les aides d’État. Ces mécanismes sont actuellement de trois types :

– l’électricité autoproduite est exonérée dans la limite de 240 gigawattheures (GWh) par site industriel (article L. 121-11 du code de l’énergie) ;

– le montant de CSPE dû pour un même site est plafonné à 627 783 euros (article L. 121-12 du code de l’énergie) ;

– ce montant est également plafonné, pour les seules entreprises qui consomment plus de 7 GWh d’électricité par an, à 0,5 % de leur valeur ajoutée (article L. 121-21 du code de l’énergie).

Le régime actuel de la CSPE apparaît donc non seulement contestable sur le plan constitutionnel et démocratique, mais aussi fragile au regard du droit de l’Union européenne.

2. La taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE)

En application de la loi du 7 décembre 2010 relative à la nouvelle organisation du marché de l’électricité (116), qui transposait en matière électrique les dispositions de la directive précitée du 27 octobre 2003, l’électricité fait l’objet de deux types de taxes, en fonction de la puissance souscrite par le consommateur :

– pour les puissances électriques inférieures à 250 kilovoltampères (kVA), des taxes communales et départementales sont perçues et ont remplacé, depuis la loi du 7 décembre 2010, les anciennes taxes locales sur l’électricité. Ces taxes ne sont pas concernées par la réforme prévue par le présent article ;

– pour les puissances électriques supérieures à 250 kVA, une taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) est perçue au profit de l’État, conformément à l’article 266 quinquies C du code des douanes. Comme pour les autres taxes intérieures de consommation, le fait générateur de la taxe est constitué par la livraison de l’électricité, et la taxe est recouvrée trimestriellement par l’administration des douanes auprès des fournisseurs d’électricité. L’assiette de la TICFE est constituée de la quantité d’électricité fournie ou consommée dans le cadre d’une puissance électrique supérieure à 250 kVA, et le tarif de la taxe est actuellement très faible, puisqu’il est fixé à seulement 0,5 euro par MWh.

Par ailleurs, des exonérations de TICFE sont prévues au profit de :

– l’électricité utilisée pour produire de l’électricité ou maintenir cette capacité de production ;

– l’électricité utilisée pour transporter des personnes ou des marchandises par des moyens de transport collectif (train, métro, tramway et trolleybus) ;

– l’électricité produite à bord de bateaux ;

– l’électricité produite par de petits producteurs d’électricité (moins de 240 millions de kWh par site de production) qui la consomment pour les besoins de leur activité ;

– l’électricité utilisée par des entreprises grandes consommatrices en énergie, définies comme celles dont les achats d’électricité de haute puissance atteignent au moins 3 % de leur chiffre d’affaires, ou pour lesquelles le montant de TICFE dû représenterait au moins 0,5 % de leur valeur ajoutée.

I. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE OU BUDGÉTAIRE

A. DES TAXES DYNAMIQUES QUI FINANCENT L’ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES

Les différentes taxes sur l’énergie concernées par le présent article sont dynamiques et représentent un produit global qui devrait atteindre au total, pour l’année 2015, un montant de 34,5 milliards d’euros.

La TICPE a rapporté en 2014, tous produits confondus (la taxation du gazole a représenté à elle seule près de 73 % du produit de la TICPE), un total de 24,6 milliards d’euros. Ce produit pourrait atteindre, sous l’effet des hausses de tarifs déjà décidées en loi de finances pour 2014 et en loi de finances pour 2015, 26,9 milliards d’euros en 2015, puis 28,2 milliards d’euros en 2016. Selon les données transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, le nombre de sociétés redevables de cette taxe, au titre des carburants qu’elles ont mis à la consommation, s’élevait à 1 510 en 2014.

Il convient de rappeler qu’en 2014, plus de 46 % du produit total de la TICPE a été reversé aux départements et aux régions. Pour l’année 2015, si l’on tient compte du reversement de 1,14 milliards d’euros accordé à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), la part du produit de la TICPE revenant à l’État ne devrait plus représenter, d’après les prévisions, que 51,7 % du produit total.

Ainsi, en 2015, le produit prévisible de la TICPE devrait être réparti de la manière suivante :

– 13,9 milliards d’euros destinés à l’État ;

– 6,5 milliards d’euros reversés aux départements ;

– 5,3 milliards d’euros reversés aux régions ;

– 1,1 milliard d’euros affecté à l’AFITF.

La TICGN présente un rendement beaucoup plus modeste, puisque son produit n’aurait représenté que 232 millions d’euros en 2014. Ce dernier devrait toutefois, grâce à l’intégration de « contribution climat énergie » à son barème, telle qu’elle a été décidée par la loi de finances pour 2014, augmenter de façon très dynamique en 2015 et 2016. Ainsi, pour l’année 2015, le produit de la TICGN (dont on peut regretter qu’il ne soit pas présenté dans le tome I de l’évaluation des Voies et moyens annexée au projet de loi de finances) devrait, selon les estimations transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, atteindre 404 millions d’euros pour l’année 2015. Selon les données transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, 114 entreprises ont été redevables de cette taxe en 2014, au titre du gaz qu’elles ont mis à la consommation.

S’agissant de l’électricité, les recettes les plus importantes proviennent de la CSPE, puisque celle-ci, sous l’effet de la croissance continue de son tarif au cours des dernières années, aura vu son produit presque doublé en trois ans, passant de 3,7 milliards d’euros en 2012 à 7,1 milliards d’euros en 2015. Cette évolution s’explique presque exclusivement par le coût croissant du financement des tarifs de rachat des énergies d’origine renouvelable. Alors, le rachat de l’électricité produit à partir des seules énergies éolienne et photovoltaïque a représenté respectivement 15,2 % et 35,3 % de l’ensemble des charges à compenser en 2015 (à comparer à 23,4 % pour la péréquation tarifaire), soit plus de 3,5 milliards d’euros, qui sont payés par les consommateurs finaux d’électricité par le biais de la CSPE intégrée dans la facturation de l’électricité.

Compte tenu de l’importance des charges à compenser, en l’état actuel du droit, il est actuellement vraisemblable que le tarif de la CSPE passerait de 19,5 euros à 22,5 euros par mégawattheure en 2016, soit l’augmentation maximale autorisée par l’article L. 121-13 du code de l’énergie, ce qui conduirait alors le produit de la CSPE à atteindre le montant de 8,3 milliards d’euros en 2016. Cette hausse annuelle de 3 euros par mégawattheure du tarif de la CSPE et du produit qui en résulte, si elle était poursuivie, serait problématique à plusieurs égards. Elle paraît inopportune non seulement pour des raisons liées au statut juridique de cette contribution et au fait qu’elle n’est pas actuellement placée sous le contrôle direct du législateur, mais aussi parce qu’elle ferait reposer l’effort de financement de la transition énergétique sur les seuls consommateurs d’électricité, ce qui ne serait ni juste, ni écologiquement cohérent.

Comparé au rendement de la CSPE, celui de l’actuelle TICFE, dont le produit alimente le budget de l’État, apparaît extrêmement modeste : selon l’évaluation préalable de l’article, il ne devrait pas dépasser 61 millions d’euros pour l’année 2015 et 62 millions d’euros pour l’année 2016 (avant l’intervention de la réforme prévue par l’article). Selon les données transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, le nombre d’entreprises redevables de cette taxe ne dépassait pas 130 en 2014.

Enfin, les montants recouvrés dans le cadre de la CTSSG et de la contribution biométhane demeurent relativement modestes, mais ont tendance à augmenter. Ainsi, le produit de la CTSSG, qui n’était encore que de 27,4 millions d’euros en 2012, a atteint respectivement 49,6 et 86 millions d’euros en 2013 et 2014, avant d’atteindre un montant estimé à 98,6 millions d’euros pour 2015. La contribution biométhane, encore plus limitée mais très dynamique, a vu son produit passer de 0,7 million d’euros en 2013 à 2,9 millions d’euros en 2014, puis 7,54 millions d’euros en 2015. En l’état actuel du droit, le produit prévisible de la CTSSG et de la contribution biométhane pour 2016 pourrait atteindre respectivement 93,4 et 23 millions d’euros.

B. LA TAXATION ACCRUE DES ÉNERGIES FOSSILES EST PLUS QUE COMPENSÉE PAR LA BAISSE DES COURS MONDIAUX

Pour toutes les énergies fossiles, il convient de rappeler que l’article 1er de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique a fixé pour objectif au Gouvernement, pour le calcul des tarifs des taxes intérieures de consommation, de parvenir à une valeur de 56 euros par tonne de carbone en 2020 et de 100 euros par tonne en 2030. La valeur de la tonne de carbone retenue en fiscalité énergétique étant fixée à 22 euros pour l’année 2016, cet engagement ne pourra être tenu que si la taxation des énergies fossiles est régulièrement relevée avant ces échéances. En pratique, une progression linéaire de ces tarifs impliquerait de faire augmenter la valeur fiscale de la tonne de carbone de 8,5 euros par an d’ici 2020, puis de 4,4 euros par an de 2021 à 2030. Pour les prochaines années, la valeur de référence de la tonne de carbone à prendre en compte dans le tarif de ces taxes devrait donc atteindre 30,5 euros en 2017, 39 euros en 2018 et 47,5 euros en 2019.

L’orientation actuelle des cours mondiaux du pétrole, qui ont baissé de plus de 60 % depuis le mois de juin 2014, crée un contexte particulièrement favorable pour poursuivre sur cette voie, qui correspond aux perspectives que le Parlement a voulu tracer. En effet, entre les mois de septembre 2014 et de septembre 2015, en dépit du relèvement de la TICPE intervenu au 1er janvier 2015 sur les carburants (relèvement, si l’on inclut l’effet de la TVA, qui a été de l’ordre de 2,1 centimes par litre pour l’essence sans plomb 95 et de 4,8 centimes pour le gazole), les prix de vente des carburants « à la pompe » ont baissé d’environ 19 centimes par litre pour l’essence comme pour le gazole. Cela signifie que, si le niveau actuel des cours du pétrole devait se maintenir pendant plusieurs années – hypothèse relativement plausible compte tenu de l’émergence des huiles de schiste et du contexte international – les prix à la pompe du gazole comme de l’essence resteraient inférieurs en 2020 à leur niveau du milieu de l’année 2014 même si la hausse prévue de la valeur de la tonne de carbone conduisait à augmenter chaque année le tarif de la TICPE de plus de 2 centimes par litre. Pour résumer, le contexte économique actuel rend tout à fait soutenable la trajectoire prévue actuellement pour l’évolution des taxes intérieures de consommation après 2016, même s’il convient de rester prudent à plus long terme sur l’évolution, parfois imprévisible, du coût hors taxe des énergies.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ ET LES ENJEUX JURIDIQUES

A. LA POURSUITE DE L’AUGMENTATION DES TARIFS DE LA TICPE AU TITRE DE LA « CONTRIBUTION CLIMAT ÉNERGIE »

Le A du paragraphe I de l’article complète le barème de la TICPE pour l’année 2017, alors que celui-ci, qui figure au B du 1 de l’article 265 du code des douanes, s’arrête actuellement à l’année 2016. Il poursuit ainsi la démarche de « verdissement » de ce droit d’accise, en prenant en compte, pour calculer ses tarifs, une valeur théorique croissante de la tonne de carbone : alors que la valeur de la tonne de carbone retenue pour 2016 dans les tarifs de la TICPE s’établissait à 22 euros, celle-ci atteindra ainsi 30,5 euros en 2017.

L’évolution du tarif des principaux produits pétroliers et assimilés est présentée dans le tableau ci-après, qui permet de comparer la situation en 2016 telle qu’elle est prévue actuellement par l’article 265 du code des douanes, celle qui devrait résulter des dispositions prévues par l’article 8 bis du projet de loi de finances pour 2016 (modulation tarifaire entre le gazole et les essences) et par l’article 12 du présent projet de loi (modulation tarifaire entre essences au profit du carburant E 10), enfin, celle qui sont proposée pour 2017.

ÉVOLUTION PROPOSÉE DES PRINCIPAUX TARIFS DE LA TICPE DE 2016 À 2017

Type de taxe et d’énergie

Indice d’identification

2016

(droit actuel,

prévu LFI 2014 + LFI 2015)

2016

(droit proposé par le PLF 2016 + PLFR 2015)

(article 12)

2017

(droit proposé)

Évolution 2016-2017

Valeur de référence retenue pour la tonne de carbone afin d’établir le tarif des TIC sur les énergies fossiles

(en euros)

22

22

30,5

+ 8,5

TICPE sur le supercarburant SP 95 « classique »

(en centimes d’euro par litre)

11

64,12

64,12

65,07

+ 0,95

TICPE sur le supercarburant SP 98

(en centimes d’euro par litre)

11 bis

67,39

67,39

68,34

+ 0,95

TICPE sur le supercarburant SP 95 dit « E 10 »

(en centimes d’euro par litre)

11 ter

64,12

62,12

63,07

+ 0,95

TICPE sur le fioul domestique

(en centimes d’euro par litre)

21

9,63

9,63

11,89

+ 2,26

TICPE sur le gazole

22

48,81

49,81

53,07

+ 3,26

TICPE sur le GPL carburant

(en euros pour 100 kg nets)

30 ter, 31 ter et 34

15,24

15,24

17,77

+ 2,53

Source : Légifrance, projet de loi de finances rectificative pour 2015 et projet de loi de finances pour 2016 tel qu’adopté par l’Assemblée nationale (article 8 bis).

Il convient de souligner que les tarifs proposés pour 2017 prennent déjà en compte les changements précités qui sont prévus pour 2016 en faveur des essences et du carburant E 10 (essence sans plomb 95 comprenant jusqu’à 10 % de bioéthanol). Par rapport à cette base 2016 rénovée, ils appliquent :

– d’une part, une augmentation tarifaire générale en fonction de la valeur croissante donnée à la tonne de carbone pour chaque carburant, qui est conforme à la trajectoire définie jusqu’en 2020 par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique ;

– et, d’autre part, une modulation supplémentaire d’un centime d’euro par litre au profit de l’essence et aux dépens du gazole. Le différentiel de taxation entre ces deux carburants sera ainsi réduit à nouveau de 2 centimes (2,4 centimes en ajoutant l’effet TVA) en 2017, après l’avoir déjà été en 2016 (sous réserve de l’adoption de l’article 8 bis du projet de loi de finances pour 2016). Cette évolution est conforme à l’engagement pris par le Gouvernement, au mois d’octobre dernier, de rapprocher en cinq ans la fiscalité du gazole et de l’essence.

B. LA POURSUITE DE L’AUGMENTATION DES TARIFS DE LA TICGN ET DE LA TICC AU TITRE DE LA « CONTRIBUTION CLIMAT ÉNERGIE »

Le B du paragraphe I vise à majorer de 0,33 euro par MWh, en pouvoir calorifique supérieur (117), le tarif préférentiel de TICGN dont bénéficient certaines entreprises grandes consommatrices d’énergie en application de l’article 265 nonies du code des douanes. Il s’agit, ainsi, de compenser financièrement l’effet de la suppression prévue de la CTSSG et de la contribution biométhane : ces contributions seront intégrées au sein de la TICGN.

Le C et D du paragraphe I définissent un nouveau tarif pour la TICGN et la TICC en 2017, ce tarif étant défini en tenant compte de la valeur théorique de 30,5 euros que l’on souhaite donner à la tonne de carbone en 2017 (soit 8,5 euros de plus qu’en 2016), ce qui conduit logiquement à augmenter à nouveau le tarif de ces énergies fossiles. En outre, le tarif de la TICGN sera désormais exprimé en pouvoir calorifique supérieur, et non plus inférieur ; selon les précisions fournies par le secrétariat d’État chargé du budget, la conversion d’un pouvoir calorifique inférieur en pouvoir calorifique supérieur s’obtient en divisant les résultats par un facteur de 1,11. Cela explique que ce tarif de TICGN donne l’impression de diminuer en 2016 par rapport à 2015 : en réalité, il augmentera à la fois pour tenir compte de la valeur plus élevée donnée à la tonne de carbone et pour tenir compte de la disparition de la CTSSG et de la contribution biométhane. Du fait de ces changements, les tarifs de la TICGN et de la TICC atteindront respectivement 5,88 euros par MWh (en pouvoir calorifique supérieur) et 9,99 euros par MWh en 2017.

À cette occasion, il est prévu, pour ces deux taxes, que les redevables devront transmettre leur déclaration trimestrielle de quantité d’énergie livrée ou importée non plus dans un délai de deux mois suivant la fin de ce trimestre, mais au plus tard le 25 du mois suivant ce trimestre, étant précisé que la déclaration devra être conforme au modèle arrêté par l’administration des douanes. Le recours croissant à la déclaration électronique devrait bien s’accorder avec ce changement, qui ne peut que contribuer à mieux sécuriser le recouvrement de ces taxes.

C. LE BASCULEMENT DE LA CSPE ACTUELLE DANS UNE TICFE RÉNOVÉE, PERMETTANT DE STABILISER EN 2017 LA TAXATION DE L’ÉLECTRICITÉ

Le E du paragraphe I organise le basculement, à partir de 2016, de la CSPE vers la TICFE, qui est du même coup fortement modifiée. Cette dernière conservera bien les caractéristiques des taxes intérieures de consommation, permettant de respecter exigences de la directive européenne du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité.

Les principaux changements proposés sont les suivants :

– cette TICFE sera en même temps « dénommée “contribution au service public de l’électricité” ». Ce choix, sans doute symbolique, permettrait certes de bien établir la filiation avec la CSPE originelle, mais pourrait aussi prêter à confusion, dès lors que cette taxe ne ressemblera certes pas à la « petite » TICFE qui préexistait, mais pas non plus à la CSPE actuelle, qui est si imparfaite. En outre, cette TICFE rénovée demeurera juridiquement une taxe intérieure de consommation, figurant d’ailleurs au sein d’un chapitre du code des douanes explicitement consacré aux « taxes intérieures » ;

– l’assiette de la TICFE sera élargie à toutes les puissances souscrites, alors qu’elle est actuellement limitée aux seules quantités d’électricité consommées dans le cadre d’une puissance souscrite supérieure à 250 kVa ;

– le taux de la TICFE, qui n’est à l’heure actuelle que de 0,5 euro par MWh, sera porté, dès 2016, à 22,5 euros par MWh, c’est-à-dire exactement au niveau du taux qu’aurait atteint l’actuelle CSPE en 2016. Cela signifie que l’actuel produit, très limité, de la « petite » TICFE sera entièrement supprimé et remplacé par celui de la CSPE. Le basculement de la CSPE vers la TICFE n’entraînera donc aucun alourdissement de la pression fiscale des entreprises qui serait lié au taux de taxation. Surtout, il est prévu une stabilité de ce tarif après 2016 : il demeurera ensuite fixé à 22,5 euros par MWh en 2017 ;

– des tarifs réduits et dégressifs de TICFE sont créés pour les industries électro-intensives, c’est-à-dire celles qui consomment plus de 7 GWh par an d’électricité et qui seraient redevables, sans mesure spécifique, d’un montant de TICFE supérieur ou égal à 0,5 % de leur valeur ajoutée. Ces tarifs avantageux débutent à 8,5 euros par MWh et peuvent descendre jusqu’à 2 euros par MWh, pour les entreprises qui ont le plus recours à l’électricité au sein de leur valeur ajoutée ;

– un tarif super-réduit de TICFE de seulement 0,5 euro par MWh est créé pour les entreprises hyper-électro-intensives, définies comme celles qui consomment plus de 6 kWh d’électricité par euro de valeur ajoutée et qui appartiennent à un secteur d’activité où l’intensité des échanges avec des pays tiers est supérieure à 25 %, ainsi que pour des transports par rail ou assimilés (train, métro, tramway et trolleybus). On peut toutefois remarquer que ces modes de transport, qui méritent effectivement d’être fiscalement soutenus parce qu’ils sont plus économes en énergie, étaient, jusqu’ici, entièrement exonérés de TICFE ;

– comme pour les autres taxes intérieures de consommation, la déclaration trimestrielle devrait désormais être transmise à l’administration avant le 25 du mois suivant la fin du trimestre concerné, et non plus dans les deux mois suivant ce terme. Il serait en outre prévu que la taxe fait l’objet d’un versement mensuel, avant le 15 de chaque mois, sur la base d’une déclaration estimative des livraisons effectuées – l’éventuelle régularisation du montant exact de taxe dû étant faite par le redevable lors de l’envoi de sa déclaration trimestrielle.

D. LES DATES D’APPLICATION DE LA RÉFORME

Le paragraphe II de l’article dispose que l’ensemble des changements prévus seront applicables dès le 1er janvier 2016, à l’exception de deux changements présentant une sensibilité particulière au regard du droit de l’Union européenne :

– la légère majoration (de 0,33 euro par MWh en pouvoir calorifique supérieur) du tarif préférentiel de TICGN dont pourront continuer à bénéficier les entreprises grandes consommatrices d’énergie, en application de la nouvelle rédaction proposée pour l’article 265 nonies du code des douanes ;

– les tarifs réduits de TICFE dont pourront bénéficier les entreprises électro-intensives et hyper-électro-intensives, ainsi que les transports collectifs terrestres, dans le cadre de l’article 266 quinquies C rénové, afin de conserver le plus possible les avantages tarifaires qui existaient jusqu’ici pour ces catégories de redevables dans le cadre de la CSPE.

Pour ces deux dispositifs, l’application ne pourra débuter qu’à partir d’une date qui sera fixée par un décret mais, en tout état de cause, ne pourra être située plus de trois mois après la réception par le Gouvernement de la réponse positive de la Commission européenne à notification de ces régimes au titre du contrôle européen des aides d’État. Le délai ici proposé paraît raisonnable.

En revanche, les modifications tarifaires proposées pour l’année 2017, dans le cadre de la poursuite de la « trajectoire carbone » prévue pour les taxes intérieures de consommation, n’auront bien sûr aucun effet en 2016.

II. L’IMPACT ÉCONOMIQUE ATTENDU

A. LA RÉFORME PROPOSÉE CONDUIRAIT À 720 MILLIONS D’EUROS DE RECETTES FISCALES SUPPLÉMENTAIRES EN 2017

La réforme proposée dans cet article ne s’inscrit pas dans une logique de recherche de recettes fiscales accrues. Même si elle prévoit des augmentations tarifaires pour les énergies fossiles, elle obéit bien davantage à des considérations de rééquilibrage du financement des énergies renouvelables, selon une logique plus écologique, qui permet en même temps de renforcer le contrôle démocratique que le Parlement doit exercer sur la fiscalité énergétique, y compris pour l’électricité. Ainsi, malgré la poursuite de la montée en puissance de la « contribution climat énergie » conformément aux objectifs récemment fixés par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique, la réforme prévue par le présent article devrait, selon l’évaluation préalable de l’article, avoir un impact très limité sur les finances publiques en 2016, soit un surcroît de recettes estimé à environ 30 millions d’euros. Il sera en revanche plus important en 2017, puisque le produit supplémentaire serait, toutes taxes confondues, de l’ordre de 720 millions d’euros. Pour effectuer ses estimations de l’incidence budgétaire de la réforme en 2017, le secrétariat d’État chargé du budget a indiqué s’être fondé sur les consommations d’énergies fossiles constatées en 2014, seuls ces chiffres étant connus avec certitude.

Il convient de rappeler, à cet égard, que comme l’indique le commentaire de l’article 3 du présent projet de loi de finances rectificative, un nouveau compte d’affectation spéciale (CAS) sera créé à compter du 1er janvier 2016 pour financer la compensation des charges de service public liées au développement des énergies renouvelables, qui étaient prises en charge jusqu’à présent par la CSPE. Il est ainsi prévu qu’une fraction des recettes de la TICPE et de la TICGN soit versée à ce CAS, ce qui explique que la hausse attendue du rendement de la taxation des énergies fossiles doive demeurer limitée à l’avenir, alors qu’une augmentation de 8,5 euros de la valeur de la tonne de carbone prise en compte dans le barème des taxes intérieures de consommation devrait en principe, d’après l’évaluation préalable de l’article, augmenter d’environ 1,9 milliard d’euros le rendement net global de ces deux taxes. Ainsi, une partie de cette hausse, que l’on peut estimer à environ 1,2 milliard d’euros par an au vu du rythme de progression annuelle jusqu’ici constaté pour la CSPE, ne devrait pas bénéficier pas au budget général de l’État, mais à ce CAS.

Pour les ménages, la taxation de l’électricité sera enfin stabilisée en 2017. Ainsi, le gel prévu en 2017 du tarif de la nouvelle TICFE à son niveau de 2016 marquera la fin d’une période qui avait vu le tarif de la CSPE augmenter chaque année de 3 euros par mégawattheure : leur facture d’électricité cessera donc d’être alourdie, ce qui sera particulièrement appréciable pour ceux d’entre eux qui utilisent l’électricité comme mode de chauffage.

En revanche, la hausse de taxation se poursuivra en 2017 pour les ménages utilisant des énergies fossiles pour chauffer leur logement ou pour se déplacer. Cette hausse sera très légèrement supérieure à celle qui avait été prévue pour les années 2015 et 2016, du fait d’une hausse de 8,5 euros par an de la valeur de la tonne de carbone (contre une hausse de 7,5 euros par an les années précédentes).

B. POUR LES MÉNAGES, LA RÉFORME DOIT S’APPRÉCIER GLOBALEMENT, NOTAMMENT AU REGARD DES GAINS DE POUVOIR D’ACHAT PERMIS PAR UNE MOINDRE CONSOMMATION ÉNERGÉTIQUE

Depuis la loi de finances pour 2015, le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) a été renforcé : 30 % du montant financé est remboursé via un crédit d’impôt, contre 15 % ou 25 % auparavant. Pour l’année 2015, 780 000 foyers fiscaux en ont bénéficié, pour une dépense fiscale de l’ordre de 900 millions d’euros ; ces chiffres devraient être de 1,035 million de foyers en 2016, pour une dépense fiscale de 1,4 milliard d’euros (soit un montant de travaux bénéficiant du crédit d’impôt de 4,7 milliards d’euros).

Sur la base des estimations rendues publiques par la Rapporteure générale dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2015, une hausse de deux centimes de la taxation du gazole représente en moyenne une hausse de 28 euros par an du budget en carburant d’un ménage possédant un véhicule diesel – ce qui est le cas d’environ un ménage sur deux. Du fait de la modulation des tarifs entre gazole et essences, le tarif de la TICPE sur le gazole progressera en 2017 de 3,26 centimes par litre, ce qui permet d’estimer l’impact moyen de la hausse sur le budget annuel de carburant de ces ménages à environ 45,6 euros. En revanche, la hausse du tarif de TICPE ne dépassant pas 1 centime par litre pour les essences, par rapport aux tarifs prévus pour 2016, l’impact sur le budget des ménages qui utilisent un véhicule fonctionnant à l’essence sera, comme en 2016, sans doute de l’ordre de 10 euros par an, le nombre moyen de kilomètres parcourus par ces véhicules étant plus faible que celui des véhicules diesel.

En outre, pour ces carburants comme pour le fioul domestique et le gaz naturel utilisés par les ménages comme mode de chauffage, la très forte baisse des cours des matières premières constatée depuis l’été 2014, si elle n’est pas remise en cause, leur permettra, malgré la hausse des taxes, d’acheter leur énergie moins chère en 2016 ou 2017 qu’elle ne l’était en 2013 ou 2014. On estime que, pour un ménage, le gain moyen en 2016 sur le carburant oscille entre 150 et 200 euros par an (sur la base de 20 pleins de carburant de 50 litres).

C. POUR LES ENTREPRISES, AUCUNE ESTIMATION DES TRANSFERTS DE CHARGES INDUITS PAR CET ARTICLE NE FIGURE DANS L’ÉVALUATION PRÉALABLE

Enfin, les entreprises électro-intensives et hyper-électro-intensives continueront à bénéficier de tarifs de taxation réduits dans le cadre de la TICFE rénovée, à l’instar des avantages tarifaires qui leur sont consentis actuellement pour la CSPE – ce qui est essentiel pour préserver leur compétitivité économique. Il est vrai que les réductions tarifaires proposées dans le cadre de la CSPE et dans celui de la TICFE rénovée ne pourront pas être identiques, et la Rapporteure générale n’a malheureusement pas pu obtenir du Gouvernement davantage de précisions sur les transferts de charges entre entreprises qui pourraient résulter de ces changements. Toutefois, le secrétariat d’État chargé du budget estime que le montant global des avantages tarifaires ainsi accordés aux entreprises utilisant de grandes quantités d’énergie devrait, en 2016 et les années suivantes, rester semblable à ce qu’il est actuellement.

*

* *

La commission examine en discussion commune les amendements identiques CF 109 de M. Hervé Mariton et CF 206 de Mme Marie-Christine Dalloz, l’amendement CF 181 de Mme Eva Sas, ainsi que les amendements identiques CF 262 de la commission des affaires économiques et CF 182 de M. Éric Alauzet.

Mme Marie-Christine Dalloz. La progression de la taxe carbone est conséquente, et l’État entend y remédier en stabilisant les tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Mon amendement CF 206 propose de maintenir en 2017 les tarifs de 2016. Nous avons affaire, qu’on le veuille ou non, à une nouvelle fiscalité sur les ménages, et si les prix du pétrole évoluent, ce sera catastrophique pour eux.

Mme Eva Sas. Mon amendement CF 181 vise à inscrire dans la loi de finances la trajectoire de la contribution climat-énergie votée dans la loi de transition énergétique. J’appelle l’attention de mes collègues sur l’importance de projeter la contribution climat-énergie jusqu’en 2020, car les acteurs économiques ont besoin de savoir quelle sera la rentabilité de leurs investissements en matière de transition énergétique, et pour cela d’avoir une vision à long terme de l’évolution du coût de l’énergie. Ce serait envoyer un mauvais signal que de ne pas transcrire en loi de finances cette disposition de la loi de transition énergétique. Mais je retire mon amendement à ce stade car je pense qu’il vaut mieux avoir le débat en séance.

L’amendement CF 181 est retiré.

Mme Béatrice Santais, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. L’amendement CF 262, adopté hier en commission des affaires économiques, vise à modérer la hausse de la TICPE sur le carburant GPL, de manière à maintenir l’écart de fiscalité avec l’essence, afin d’envoyer un signal positif sur un carburant respectueux de l’environnement. Cette moindre recette serait peu coûteuse car le GPL concerne malheureusement moins de 1 % du parc automobile français.

M. Éric Alauzet. L’impact financier est en effet très faible. Cette proposition est la conséquence de la décision du « moins un plus un » : moins un sur l’essence, plus un sur le gazole. Cette mesure a été prise eu égard aux émissions des moteurs diesel en termes de particules et de dioxyde d’azote ; de ce point de vue, le GPL est au moins aussi performant que l’essence, et même plus en réalité. Il est important que le GPL suive la trajectoire de l’essence. D’où mon amendement CF 182.

Mme la Rapporteure générale. Avis favorable sur les amendements CF 262 et CF 182, qui proposent une moindre augmentation de la taxe prévue sur le GPL afin de maintenir l’écart avec l’essence. Le coût en est estimé à 1,4 million d’euros, en moindres recettes.

L’avis est en revanche défavorable sur l’amendement de Marie-Christine Dalloz, qui vise à maintenir en 2017 le tarif de 2016 sur les énergies fossiles, car nous ne tendrions plus vers notre objectif en matière de transition énergétique.

M. Charles de Courson. Cet article me plonge dans des abîmes de perplexité. En avez-vous mesuré les conséquences économiques ? Certains secteurs ne vont-ils pas nous dire : « Vous nous tuez », en l’absence de la moindre coordination européenne ? Des industriels ont tenu à m’alerter sur les conséquences en termes d’emplois, notamment dans les industries où le coût de revient a une composante énergétique importante. Ce serait une rupture de l’égalité avec leurs concurrents européens, et, par ailleurs, des entreprises européennes fermeraient leurs activités en France pour les transférer dans des pays à la fiscalité énergétique moins lourde. Avez-vous, en outre, une idée de son impact sur les ménages ? Les ruraux, par exemple, seront-ils davantage touchés que les urbains ? C’est la mesure la plus importante en termes de montants qui nous est proposée, et l’étude d’impact n’offre aucune information fine sur ses conséquences pour les ménages.

M. Denis Baupin. Soit nous ne lisons pas, M. de Courson et moi, les mêmes communications des entreprises, soit nous n’en avons pas la même interprétation. Toutes les entreprises du domaine énergétique nous répètent qu’elles ont besoin d’une visibilité sur le prix du carbone. L’article 1er de la loi de transition énergétique a fixé une trajectoire afin précisément de permettre aux acteurs économiques de faire en toute connaissance de cause leurs choix dans la durée.

M. Olivier Carré. Il y a des réalités de marché. La baisse du prix des hydrocarbures remet en cause l’architecture globale montée il y a une dizaine d’années sur les investissements dans les énergies renouvelables. De même, la baisse des tarifs de rachat, de 1,3 milliard d’euros, conduit à une diminution significative des plans d’investissement dans l’éolien et le solaire. Il n’y a plus d’incitation pour investir dans les énergies renouvelables, et la dimension punitive est totalement décorrélée du marché. Cela ne pourra que finir mal…

Mme Véronique Louwagie. L’étude d’impact indique que les dispositions proposées sont sans incidence sur l’emploi et le marché du travail, ce dont je doute car les entreprises recourent fortement au gazole. En outre, Charles de Courson a raison de souligner que cela pourrait modifier les choix d’investissement entre France et pays voisins.

Mme la Rapporteure générale. En ce qui concerne le 1,9 milliard d’euros de fiscalité supplémentaire sur les énergies fossiles en 2017, Monsieur de Courson, environ deux tiers sont payés par les ménages, soit 1,2 milliard d’euros et un tiers par les entreprises, soit 700 millions d’euros. Les entreprises qui paieront ce supplément sont celles qui consomment du gazole. Nous sommes en train d’étudier comment ces 700 millions d’euros se distribuent et sont absorbables.

M. Éric Alauzet. La contribution climat-énergie, madame Louwagie, exclut les transports routiers (poids lourds), aéronefs, bateaux de pêche. Cela a été prévu ainsi dès le début.

Vous ne pouvez pas imaginer ce que les gens économisent avec le covoiturage. La petite augmentation prévue n’est rien comparée aux économies réalisées quand les gens parviennent à s’organiser. Je suis ouvert à un débat sur la ventilation de cette taxe, mais il ne faut pas changer l’objectif.

M. Charles de Courson. Nous parlons de 2 milliards d’euros par an pendant cinq ans, madame la Rapporteure générale, autrement dit de 10 milliards d’euros pour la période 2017-2021… Un tiers sur les entreprises, cela fait quelque 3,5 milliards d’euros. Qui va payer ? Puisque c’est fait dans un cadre national, et non communautaire, des industriels sont venus me dire qu’ils en tireraient les conséquences. Quant aux deux autres tiers sur les particuliers, cela représente 6,5 milliards d’euros. Là encore, qui va payer ? Les ruraux, ceux qui se déplacent beaucoup, ceux qui se chauffent au gaz ? Il n’y a rien à ce sujet dans l’étude d’impact.

La commission rejette les amendements CF 109 et CF 206, puis elle adopte les amendements CF 262 et CF 182.

Elle examine ensuite en discussion commune les amendements identiques CF 110 de M. Hervé Mariton, CF 207 de Mme Marie-Christine Dalloz et l’amendement CF 143 de M. Jean Launay.

Mme Marie-Christine Dalloz. Le Gouvernement a pris conscience que l’augmentation récurrente, annuelle de la contribution au service public de l’électricité (CSPE) ne pouvait durer indéfiniment, et il déplace aujourd’hui les augmentations sur la TICPE et la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN). La fiscalité écologique reposait sur un élément à 80 % décarboné : c’est le problème. Mon amendement CF 107 vous propose pour l’électricité en 2016 et 2017, plutôt que de prévoir un tarif de taxation de 22,50 euros par mégawattheures, de le maintenir à 19,50 euros comme en 2015.

Mme Christine Pires Beaune. Ce collectif budgétaire maintient la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) en 2017 à son niveau de 2016, ce qui entraîne un prix du carbone différent entre l’électricité et les autres énergies. Notre amendement CF 143 vise à éviter cette distorsion en relevant le niveau de la TICFE à due concurrence.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable sur ces deux amendements rigoureusement opposés : Marie-Christine Dalloz propose de maintenir le tarif de 2015 et Christine Pires Beaune d’augmenter un peu plus la taxe sur l’électricité, alors que le principe de l’article est de ne plus augmenter la fiscalité en 2017 de l’électricité et d’augmenter celle sur les énergies fossiles.

La commission rejette successivement les amendements CF 110, CF 207 et CF 143.

Elle examine ensuite l’amendement CF 183 de M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Pour les écologistes, le soutien aux entreprises énergo-intensives ne va pas forcément dans le bon sens, mais nous avons estimé, dans la loi de transition énergétique, qu’il était logique de soutenir ces entreprises dès lors que le prix de l’énergie augmente, afin d’éviter qu’elles se délocalisent, tout en polluant autant ailleurs. Cependant, il ne faut pas que ces aides les incitent à reporter les efforts qu’impose la transition énergétique. C’est pourquoi la loi a conditionné ces aides à la réalisation d’un plan de maîtrise de la consommation d’énergie. Les décrets d’application sont en cours de rédaction.

Nous proposons que l’aide apportée à ces entreprises par le biais de la CSPE entre dans le même cadre, à savoir que ce soient les entreprises qui s’inscrivent dans une démarche d’efficacité énergétique qui bénéficient des tarifs réduits.

Mme la Rapporteure générale. Il semble que, dans votre amendement, le tarif pourrait être corrigé a posteriori, ce qui serait une forme de rétroactivité. Par ailleurs, les critères environnementaux ne sont pas très précis, et nous risquons d’être critiqués, au regard des exigences constitutionnelles, pour incompétence négative. Je demande le retrait de l’amendement, à défaut de quoi mon avis sera défavorable.

M. Denis Baupin. Le dispositif existe, ses critères sont connus. Le Conseil supérieur de l’énergie, dont je suis vice-président, a eu à en valider les décrets d’application. La suppression de l’aide a posteriori, au cas où le bénéficiaire n’aurait pas rempli ses obligations, est la mesure la plus logique, et elle a été adoptée dans la loi de transition énergétique.

Nous avons rencontré ce matin, en commission des affaires économiques, nos homologues du Bundestag, qui ont exactement les mêmes préoccupations que nous en matière d’entreprises énergo-intensives. Ils nous ont fait remarquer qu’il était très important de prévoir un contrôle sur l’utilisation des avantages accordés, ainsi que des contreparties, pour éviter d’induire des comportements contraires à l’intérêt collectif alors même que les acteurs sont subventionnés.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 183.

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 152 et CF 154 de M. Gérard Cherpion.

Mme Marie-Christine Dalloz. Défendus.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements CF 152 et CF 154.

Puis elle est saisie de l’amendement CF 184 de M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Cet amendement, qui poursuit le même objectif que celui que je viens de défendre, propose que les entreprises bénéficiant de taxes réduites sur leur consommation d’électricité s’engagent à baisser leur consommation d’énergie dans les mêmes conditions que celles définies par l’article L. 351-1 du code de l’environnement.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement CF 184.

Puis elle étudie les amendements identiques CF 263 de la commission des affaires économiques et CF 91 de M. Joël Giraud.

Mme Béatrice Santais, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires économiques. Notre amendement CF 263 a pour objet de faire bénéficier les transports par câble de personnes ou de marchandises d’un taux réduit de taxe intérieure de consommation finale d’électricité sur les produits énergétiques (TICFE) de 0,50 euro par mégawattheure. Ces moyens de transport représentent l’avenir en Savoie comme dans de nombreuses zones urbaines.

M. Joël Giraud. Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, a publié la semaine dernière une ordonnance sur le transport par câble, qui lui donne enfin les mêmes servitudes d’utilité publique que les autres types de transport. Il est utile ailleurs qu’en montagne, comme l’atteste le Poma 2000 qui relie la gare SNCF de Laon à la vieille ville. Les agglomérations de Lyon et de Grenoble ont inscrit le développement du transport par câble dans la catégorie de « transport public ».

L’activité du groupement Leitner-Poma, leader du marché de ces transports aériens ou guidés, se situe majoritairement à l’étranger. En effet, ce mode de transport doux ne s’avère pas très répandu en France.

Mon amendement CF 91 permettrait à ce type de transport de bénéficier de la même réduction de la TICFE que le métro, le tramway, le trolleybus et le train, soit l’ensemble des transports propres.

Mme la Rapporteure générale. Ces amendements sont intéressants, mais comme j’ignore le coût induit par la mesure proposée, je m’en remettrai à la sagesse de la commission.

La commission adopte les amendements CF 263 et CF 91 (amendement 312).

Puis elle en vient à l’amendement CF 153 de M. Gérard Cherpion.

Mme Marie-Christine Dalloz. Il s’agit, conformément à la directive européenne CE 2003/96, de permettre aux entreprises énergo-intensives – et non pas seulement électro-intensives – de conserver leur compétitivité par rapport à la concurrence. Sans cette mesure, des pans entiers de notre industrie, essentiels pour nos territoires, risqueraient de disparaître.

L’amendement CF 153 vise donc à combattre une réelle distorsion de concurrence.

Mme la Rapporteure générale. Une extension aussi large du tarif réduit de TICFE représenterait certainement un coût de plusieurs centaines de millions d’euros, si bien que j’émets un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

La commission rejette l’amendement CF 153.

Puis elle adopte l’article 11 modifié.

*

* *

Après l’article 11

La commission examine les amendements identiques CF 264 de la commission des affaires économiques et CF 194 de M. Denis Baupin.

Mme Béatrice Santais, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Cet amendement vise à supprimer, à partir de 2019, l’exonération de taxation dont bénéficie le kérosène, carburant des avions. L’extinction de l’exonération concernerait les vols intérieurs effectués en métropole. Datant de la convention de Chicago de 1944, ce régime fiscal ne s’avère plus adapté à notre temps, et une directive européenne de 2003 a ouvert la possibilité de limiter le champ d’application de la convention aux vols internationaux et intracommunautaires.

Cette exonération va à l’encontre des objectifs de développement durable et a coûté 3,5 milliards d’euros à l’État en 2009, dont 400 millions pour les seuls vols intérieurs.

Mme Eva Sas. Il est important que la commission des affaires économiques soutienne cet amendement, que nous présentons depuis plusieurs années. Le contexte de la vingt et unième conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP21) renforce la nécessité de supprimer cette exonération fiscale bénéficiant au mode de transport le plus émetteur de gaz à effet de serre par passager et par kilomètre.

La rédaction de notre amendement permet de cibler les vols à bas prix et ceux effectués en catégorie affaires. On ne touche ainsi pas au cœur de métier des compagnies nationales et on envoie un signal à l’aviation civile, comme à l’ensemble des transports utilisant des énergies fossiles, pour qu’elle contribue à la lutte contre le dérèglement climatique.

Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les vols intérieurs a été augmentée le 1er janvier 2014. En outre, différencier les vols métropolitains des autres rendrait complexe la gestion de la taxe. Enfin, l’amendement contredit la hiérarchie des normes, car il introduit dans la loi une référence à un texte réglementaire. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de ces amendements.

Mme Eva Sas. Nous faisons référence à un article réglementaire pour exclure les liaisons soumises à une obligation de service public, ce qui renforce la solidité de notre proposition.

La fiscalité écologique s’applique déjà aux vols intérieurs dans plusieurs pays de l’Union européenne, et il s’avère tout à fait possible de transposer ce mécanisme en France. C’est uniquement une question de volonté politique : si vous refusez cette mesure, dites-le, mais n’invoquez pas de fausses raisons techniques de faisabilité, madame la Rapporteure générale !

M. Charles de Courson. La convention de Chicago ne s’applique pas en la matière, et le traité de l’Union européenne ne permet de légiférer que sur les vols intérieurs. Le problème, madame Sas, tient aux correspondances : comment votre dispositif s’appliquerait-il dans le cas d’un voyage entre Bordeaux et New York constitué de deux vols et d’une escale à Paris ? Et dans celui de trajets comprenant un tronçon en France mais partant de l’étranger ? Je ne comprends pas non plus comment vous distinguerez les lignes dites d’aménagement du territoire – pour celles qui subsistent – des autres vols.

Il est vrai que certains pays de l’Union européenne ont instauré la fiscalité écologique pour les vols intérieurs, mais leur territoire est très petit. Aux Pays-Bas, la bicyclette sert plus que l’avion pour se rendre d’une ville à l’autre ! L’échelle européenne est la seule pertinente pour mettre en œuvre votre mesure, madame Sas. Si toutes les lignes intérieures de l’Union étaient taxables, alors votre dispositif aurait un sens.

La commission rejette les amendements CF 264 et CF 194.

Puis elle étudie l’amendement CF 188 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas. Cet amendement traite d’un sujet important sur lequel il convient d’avancer. Les poids lourds bénéficient d’un remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur la base d’un tarif fixe, si bien que l’augmentation de la TICPE par la contribution climat-énergie ne s’est pas appliquée aux transporteurs de marchandises. Nous avons déposé un amendement l’année dernière pour que s’impute la hausse du gazole.

Cet amendement vise donc à ce que la hausse de la contribution climat-énergie, supportée par les ménages, soit étendue aux poids lourds et propose d’asseoir le remboursement de la TICPE non plus sur la base d’un tarif fixe, mais sur celle d’un montant fixe.

Mme la Rapporteure générale. Madame Sas, votre amendement, intéressant sur le plan économique, pose de vraies questions. Vous souhaitez que l’avantage dont jouissent les poids lourds n’augmente pas avec la hausse de la taxe climat-énergie. Nous avons consenti une augmentation de 4 centimes de la TICPE l’année dernière pour le transport routier, et vous aimeriez l’accroître encore de 3 centimes dès l’année prochaine. Je vous propose de retirer votre amendement et de le redéposer pour la séance publique, afin que nous en discutions avec le Gouvernement.

M. Charles de Courson. Cet amendement, sympathique du point de vue budgétaire, se heurte à un problème de compétitivité. Le transport routier européen perd presque trois points de parts de marché chaque année : il atteignait 60 % du marché mondial il y a une quinzaine d’années et il en représente moins de 30 % aujourd’hui. Madame Sas, l’adoption de votre amendement pénaliserait davantage les transporteurs routiers français par rapport à leurs concurrents étrangers. Dans le marché intérieur, le cabotage permet aux camions de prendre du carburant au Luxembourg où les prix sont moins élevés. Là encore, seul le cadre européen s’avère approprié pour prendre une telle mesure.

Mme Eva Sas. J’accepte de retirer mon amendement, mais je rejette l’argument du cadre européen, éternel allié de l’immobilisme. Le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a montré que, dans la pratique du cabotage, l’alimentation en carburant en dehors de nos frontières se révélait très marginale. Enfin, l’Allemagne et la Suisse ont instauré une écotaxe pour les poids lourds ; ces derniers, en France, ne sont pas soumis à une telle contribution et sont loin d’être perdants sur le plan fiscal.

L’amendement CF 188 est retiré.

La commission est saisie de l’amendement CF 249 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Cet amendement propose d’ajuster la TICPE sur le gazole acquittée par les poids lourds, afin de stabiliser le niveau fixé par les lois de finances rectificative de 2014 et initiale de 2015. Ainsi, nous souhaitons palier la suppression de l’écotaxe sur les poids lourds, qui représente un coût net de 800 millions d’euros. En effet, avec l’augmentation progressive de la fiscalité sur les carburants – qui ne touche pas le gazole consommé par les poids lourds –, le remboursement augmente automatiquement et réduit d’autant plus les recettes de l’État. Il s’agit donc d’adapter la TICPE pour maintenir en 2016 un remboursement de TICPE au profit des poids lourds strictement identique à celui de 2015.

Mme la Rapporteure générale. Il s’agit du même amendement que celui de d’Eva Sas que nous venons d’examiner, sauf qu’il concerne l’année 2016. J’entends votre souhait, monsieur Alauzet, de ne pas augmenter l’avantage fiscal dont bénéficient les poids lourds, mais je vous propose également de retirer votre amendement et de le redéposer en séance publique pour en débattre avec le Gouvernement.

L’amendement CF 249 est retiré.

La commission en vient à l’amendement CF 248 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. C’est un problème que j’essaie d’expliquer depuis un moment. La contribution climat-énergie est aujourd’hui appliquée au biométhane, qui est une énergie renouvelable. Que le gaz naturel de ville, qui est une énergie fossile d’origine minérale, y soit soumis, c’est normal, mais pas le biométhane, d’origine végétale ! Je pense que tout le monde est assez d’accord sur ce point. Le biogaz est d’ailleurs exempté de cette contribution. Or la différence entre le biogaz et le biométhane, c’est que le biogaz est produit, par exemple, par les agriculteurs, qui le réutilisent directement dans leur propre installation, alors que le biométhane est réinjecté dans le circuit énergétique.

Les douanes prétendent qu’on ne sait pas distinguer les molécules de gaz issues du biométhane de celles du gaz naturel de ville, mais je m’inscris en faux contre cet argument. Le biométhane injecté permet l’obtention de garanties d’origine attestant de la nature renouvelable du gaz vendu. Elles sont attribuées à tout fournisseur qui, ayant conclu avec un producteur de biométhane un contrat d’achat, le demanderait.

Les garanties d’origines sont enregistrées dans un registre national, dans lequel tout fournisseur acheteur de biométhane doit ouvrir un compte. Ce registre des garanties d’origine permet donc d’assurer la traçabilité du biométhane. Il permet aussi au redevable de la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN), le fournisseur de gaz, de distinguer comptablement le gaz renouvelable mis à la consommation. Une exonération de biométhane de TICGN est donc possible, sans alourdir les démarches, puisque les outils existent déjà.

Mme la Rapporteure générale. Nous entrons dans un débat d’experts : selon vous, cher collègue, cette traçabilité est possible ; les douanes prétendent le contraire. Je ne saurais, pour ma part, trancher. Je vous propose donc de retirer cet amendement, que nous avons déjà examiné. Nous pouvons en rediscuter d’ici à la séance publique et appeler ensemble les douanes pour lever les incertitudes.

M. Hervé Mariton. Comment pouvez-vous, monsieur Alauzet, assimiler le biométhane à une énergie non carbonée ?

M. Éric Alauzet. C’est comme le bois, monsieur Mariton. J’entends depuis longtemps des gens prétendre que le bois n’est pas renouvelable parce que cela produit du carbone.

Vous savez bien faire la différence entre le carbone minéral, qui a mis des centaines de milliers d’années à se constituer, et le carbone végétal. Quand vous rejetez du carbone minéral, il faut à nouveau des centaines de milliers d’années pour le restocker. Quand vous stockez du carbone végétal, par exemple issu du bois, il se fixe dans une échelle de temps qui est celle du végétal. Il est recyclé immédiatement. Prenez un arbre. Si vous le brûlez, replantez un arbre, et l’équivalent se refixe sur l’arbre que vous venez de planter. C’est assez simple à comprendre.

M. Hervé Mariton. Il y a, de toute manière, une émission de carbone !

M. Charles de Courson. Notre collègue Alauzet a raison de soulever cette question, mais il faut la poser en des termes plus généraux. J’appelle ainsi votre attention sur le fait qu’on ne tient pas compte de la part « oxygénée » des carburants. Le SP 95-E 10, par exemple, devrait bénéficier d’un abattement de 10 % par rapport à une essence non « oxygénée » – je défends cette thèse depuis des années.

Le problème que soulève notre collègue Alauzet ne concerne pas que le biométhane, mais il a raison.

Les services fiscaux objectent qu’on ne sait pas différencier les molécules, mais il suffit que la taxe soit payée sur le lieu de production pour que le problème soit résolu ! C’est ainsi que l’on procède dans les raffineries : on paie, non pas lors de la distribution, mais dans les raffineries.

Je suis plutôt favorable à la proposition d’Éric Alauzet, quand bien même son amendement est perfectible. Je déposerai, pour ma part, d’autres amendements pour que seule la partie de CO2 qui relève d’énergies non renouvelables soit taxée – ce n’est pas si facile à rédiger.

M. Alain Rodet. Pardonnez-moi, mais quid des digesteurs d’étables qui recyclent les flatulences des bovins ?

M. Charles de Courson. C’est déjà prévu, le biogaz est exonéré.

L’amendement CF 248 est retiré.

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Article 12
Encouragement à l’utilisation du super sans plomb 95-E 10

Cet article, afin de soutenir davantage l’incorporation de carburants d’origine renouvelable dans l’essence, introduit une différence à partir de 2016 entre les tarifs de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) applicables d’une part aux essences sans plomb SP 98 et SP 95 classiques d’une part et, d’autre part, à l’essence SP 95-E 10 (contenant de 5 à 10 % d’éthanol pur), d’autre part.

Par rapport à ce qui est déjà prévu pour 2016 pour ces carburants, le tarif de cette dernière forme d’essence baisserait de 1 centime d’euro par litre, tandis que celui des autres formes d’essence augmenterait de 1 centime d’euro par litre.

L’essence destinée aux véhicules automobiles est, comme les autres carburants en France, soumise à la TICPE, qui a succédé depuis 2011 à la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), elle-même issue d’une taxe datant de 1928. La TICPE frappe l’ensemble des produits pétroliers et assimilés qui sont destinés à être utilisés comme carburants ou combustibles, conformément à une directive européenne du 27 octobre 2003 (118) et elle est exigible lors de la mise à la consommation des produits, comme le prévoit une directive du 16 décembre 2008 (119). Cette taxe est perçue par l’administration des douanes auprès des compagnies pétrolières et des centres commerciaux disposant d’un statut d’entrepositaire agréé (son produit étant d’abord destiné à l’État, même si près de la moitié est reversée aux régions et aux départements). Il revient donc aux distributeurs, qui vendent les carburants à un prix comprenant à la fois la TICPE et la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), de décider de répercuter les évolutions des tarifs de TICPE sur les prix – le poids de cette fiscalité étant habituellement supporté par les consommateurs finaux.

Les tarifs de la TICPE sont fixés par le tableau du B du 1 de l’article 265 du code des douanes. Alors qu’ils étaient, pour le gazole comme pour les essences, restés stables depuis 2006, ces tarifs ont commencé à augmenter à partir de 2015, en application de la loi de finances pour 2014 (120). En effet, celle-ci a mis en application le principe selon lequel, pour lutter contre le réchauffement climatique, il est souhaitable de taxer d’autant plus un produit énergétique que sa consommation émet des gaz à effet de serre. À ce titre, il est prévu que les tarifs de la TICPE augmentent chaque année pour les différents carburants, en proportion de la quantité de dioxyde de carbone émise par leur combustion. Cette augmentation, souvent qualifiée de « contribution climat-énergie », a été calculée sur la base d’une valeur croissante donnée à la tonne de carbone : 7 euros en 2014, 14,5 euros en 2015 et 22 euros en 2016. L’évolution des tarifs de la TICPE n’a pas encore été fixée pour 2017, mais l’article 11 du présent projet de loi de finances rectificative prévoit de le faire (voir le commentaire de cet article). Cette logique explique que le tarif de la TICPE perçue sur l’essence soit déjà passé, de 2014 à 2015 :

– pour l’essence sans plomb 98, de 63,96 à 65,68 centimes par litre ;

– pour l’essence sans plomb 95 (classique ou « E 10 », comprenant jusqu’à 10 % d’éthanol pur), de 60,69 à 62,41 centimes par litre.

Il convient de souligner que le tarif de TICPE sur l’essence est plus élevé (d’un peu plus de 3 centimes par litre) pour l’essence sans plomb 98 que pour les essences sans plomb 95. En revanche, aucune différence de taxation n’a jusqu’ici été établie entre l’essence sans plomb 95 « classique » et l’essence sans plomb 95 dite « E 10 », carburant contenant jusqu’à 10 % d’éthanol, qui peut être utilisé par toutes les voitures récentes fonctionnant à l’essence.

Par ailleurs, il a été décidé très récemment par l’Assemblée nationale, à l’article 8 bis du projet de loi de finances pour 2016, de procéder à une légère modulation des tarifs de TICPE applicables respectivement au gazole et aux essences, en augmentant, par rapport aux tarifs déjà prévus pour 2016, d’un centime supplémentaire par litre le tarif du gazole et en baissant, à l’inverse, d’un centime le tarif des trois types d’essence. L’évolution des tarifs de TICPE applicables aux essences dites « supercarburants », pour la période 2014-2016, peut donc être résumée par le tableau suivant.

ÉVOLUTION DES TARIFS DE TICPE SUR LES ESSENCES SP 95 ET SP 98 DE 2014 À 2016

(en centimes d’euros par litre de carburant)

Type d’essence

Indice d’identification

2014

2015

2016

prévu LFI 2014

2016

prévu PLF 2016

Supercarburant SP 95 « classique »

11

60,69

62,41

64,12

63,12

Supercarburant SP 98

11 bis

63,96

65,68

67,39

66,39

Supercarburant SP 95 dit « E 10 »

(contenant jusqu’à 10 % d’éthanol)

11 ter

60,69

62,41

64,12

63,12

Source : Légifrance (article 265 du code des douanes) et projet de loi de finances pour 2016 adopté par l’Assemblée nationale (article 8 bis).

II. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE OU BUDGÉTAIRE

La baisse des prix du pétrole, très marquée depuis le mois de juin 2014
– en moins d’un an et demi, le cours mondial officiel du baril de pétrole (Brent) est passé de 110 à 43 dollars – a permis au prix moyen toutes taxes comprises (TTC) des essences, comme du gazole, de baisser en France pendant cette période. Ainsi, entre septembre 2014 et septembre 2015, le prix de vente moyen en France a baissé d’environ 19 centimes par litre, pour atteindre en moyenne 1,30 euro par litre pour l’essence sans plomb 95, classique comme « E 10 ».

ÉVOLUTION RÉCENTE DU PRIX DE VENTE MOYEN TTC DES SUPERCARBURANTS

(en euros par litre de carburant)

Type d’essence

Septembre 2014

Septembre 2015

Évolution sur un an

Supercarburant SP 95 « classique »

1,492

1,301

- 12,8 %

Supercarburant SP 98

1,556

1,368

- 12,1 %

Supercarburant SP 95 dit « E 10 »

(contenant jusqu’à 10 % d’éthanol)

1,488

1,297

- 12,8 %

Source : Bulletin mensuel du Comité professionnel du pétrole, n° 645 du 20 octobre 2015.

Cette baisse de prix considérable, provenant de facteurs extérieurs, a représenté pour les consommateurs réguliers de ces carburants un gain de pouvoir d’achat important. Elle s’est appliquée de façon parallèle aux deux formes d’essence sans plomb 95, dont les prix demeurent généralement extrêmement proches. Si des différences de prix sont parfois observées « à la pompe » par le consommateur, entre les deux types d’essence sans plomb 95, celles-ci ne s’expliquent pas actuellement par un traitement fiscal différent, mais par des raisons économiques ou commerciales propres aux circuits de production et de consommation de ces carburants.

La consommation d’essence sans plomb 95-E 10 demeure moins importante que celle d’essence sans plomb 95 « classique » dans notre pays, puisque ces deux types d’essence ont représenté, au cours des douze derniers mois pour lesquels les données sont disponibles (période allant de septembre 2014 à août 2015), respectivement 32,8 % et 46,6 % de l’ensemble des supercarburants mis à la consommation. Toutefois, un rééquilibrage semble s’être récemment amorcé au profit du carburant E 10, car les volumes consommés ont, pour ce carburant, augmenté pendant cette période de 8 %, tandis que ceux de l’essence sans plomb 95 « classique » baissaient de 5 %.

Cette évolution s’explique sans doute par l’amélioration de la distribution de ce carburant – même si la Rapporteure générale n’a pas pu obtenir du secrétariat d’État chargé du budget la proportion exacte des stations-services distribuant ce carburant – ainsi que par l’image plus écologique, aux yeux des consommateurs, d’un carburant contenant une proportion accrue de carburants d’origine renouvelable.

ÉVOLUTION DES VOLUMES D’ESSENCES SANS PLOMB CLASSIQUES ET SP 95-E 10 CONSOMMÉS DE 2010 À 2014

Année

Essences SP 95 et 98 « classiques »

(en mégahectolitres)

Essence SP 95-E 10

(en mégahectolitres)

Proportion d’essence E 10 dans le total des essences consommées

2010

93,17

14,39

13,4 %

2011

83,4

18,04

17,8 %

2012

71,8

24,24

25,2 %

2013

64,91

28,07

30,2 %

2014

62,8

30,09

30,1 %

Source : secrétariat d’État chargé du budget.

L’évolution des consommations constatées entre l’essence SP 95-E 10 et l’essence SP 95 « classique » (également appelée E 5 car elle peut contenir jusqu’à 5 % d’éthanol), montre une nette montée en puissance de ce premier carburant. Ainsi, selon les données transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, la proportion de l’essence SP 95-E 10 dans l’ensemble des volumes d’essences consommés en France est passée de 13,4 % en 2010 à 30,1 % en 2014.

Il est souhaitable que ce rééquilibrage se poursuive, car une utilisation accrue de carburants d’origine végétale présente plusieurs avantages. Ainsi, le bioéthanol directement incorporé dans le carburant « E 10 » provient essentiellement de transformation du saccharose issu de la betterave, et dans une moindre mesure de celle de l’amidon issu du maïs ou de blé : contrairement aux produits pétroliers d’origine fossile, ces substances peuvent donc être produites sur le territoire français. Cela signifie qu’en incorporant une plus grande quantité de ces biocarburants, la France peut à la fois privilégier une source d’énergie renouvelable, conforter son indépendance énergétique et offrir de nouveaux débouchés à son agriculture.

Certes, la production même des biocarburants actuels présente encore certains inconvénients – on peut penser à la pression exercée sur les milieux naturels du fait des engrais et produits phytosanitaires utilisés pour les productions végétales, ou encore à une possible concurrence entre ces productions à finalité énergétique et celles qui sont destinées à l’alimentation. Toutefois, les deuxième et troisième générations de biocarburants annoncées, qui pourraient reposer sur la production de cellulose à partir de bois et sur celle d’éthanol issu d’algues, ne devraient plus présenter ces inconvénients. Or, pour favoriser le développement de ces nouvelles formes de biocarburants, il est souhaitable que les investissements réalisés dans la première génération des biocarburants puissent être amortis par les industries concernées. Il en va de même pour la filière de l’ETBE (121), fabriqué par l’industrie pétrochimique en mélangeant de l’éthanol à de l’iso-butylène, qui présente des caractéristiques techniques intéressantes (en particulier, faible volatilité et facilité de transport par oléoducs) et peut être considéré comme complémentaire de l’incorporation directe d’éthanol pur dans l’essence.

Sur le plan budgétaire, la TICPE perçue sur les différentes formes d’essence a représenté, en 2014, une recette brute de 5,7 milliards d’euros. Cette recette est, certes, trois fois moins élevée que celle issue de la taxation du gazole (17,8 milliards d’euros), mais demeure tout de même considérable et essentielle pour le financement du budget de l’État, des régions et des départements. À cet égard, l’augmentation progressive des tarifs de TICPE en général, dans le cadre de la « contribution climat-énergie », présente non seulement un sens environnemental, mais aussi un intérêt budgétaire majeur.

III. LE DISPOSITIF PROPOSÉ ET LES ENJEUX JURIDIQUES

L’article, qui s’appliquera aux carburants mis à la consommation à partir du 1er janvier 2016, procède à deux changements :

– il précise, dans le tableau du B du 1 de l’article 265 du code des douanes, la définition de l’essence sans plomb 95 « classique ». Il serait désormais indiqué que celle-ci pourra comprendre jusqu’à 5 % d’éthanol (ce qui pourra conduire à nommer couramment ce carburant « E 5 »), par opposition à l’essence sans plomb 95 dite « E 10 », pour laquelle il était déjà précisé que la proportion d’éthanol incorporée ne peut pas dépasser 10 %. Il convient de souligner que ce dernier seuil ne pourrait pas, à l’heure actuelle, être relevé au-delà de 10 %, pour des raisons techniques liées au bon fonctionnement des moteurs utilisant l’essence sans avoir fait l’objet de modifications spécifiques ;

– il prévoit que les tarifs prévus par l’article 265 du code des douanes pour la TICPE applicable aux essences feront l’objet d’une modulation, consistant à augmenter d’un centime par litre la taxation des essences sans plomb 98 et 95 classiques et, en sens inverse, à baisser d’un centime par litre la taxation de l’essence sans plomb 95 « E 10 », qui contient jusqu’à 10 % d’éthanol.

En conséquence, compte tenu de la modulation tarifaire entre le gazole et l’essence déjà décidée par l’Assemblée nationale, en première lecture, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, les tarifs de TICPE devraient, en 2016, s’établir de la manière suivante pour ces trois types d’essence :

– 64,12 centimes par litre pour l’essence SP 95 « classique » ;

– 67,39 centimes par litre pour l’essence SP 98 ;

– 62,12 centimes par litre pour l’essence SP 95 – E 10.

RÉSUMÉ DE L’ÉVOLUTION PROPOSÉE DES TARIFS DE TICPE SUR LES ESSENCES POUR L’ANNÉE 2016

(tarifs en centimes d’euro par litre)

Type d’essence

Tarifs en 2015

Tarifs en

2016

prévu par le droit actuel

(art. 265 du code des douanes)

Tarifs 2016 avec la réforme proposée

(PLF 2016 + le PLFR 2015)

Impact de la réforme proposée (PLF + PLFR) pour 2016

Évolution 2015-2016

devant en résulter

(compte tenu de la « contribution climat énergie » déjà prévue depuis la LFI 2014)

Supercarburant SP 95 « classique »

62,41

64,12

62,12

– 2 centimes

– 0,29 centime

Supercarburant SP 98

65,68

67,39

67,39

Pas d’impact

+ 1,71 centime

Supercarburant SP 95 dit « E 10 »

(contenant jusqu’à 10 % d’éthanol)

62,41

64,12

64,12

Pas d’impact

+ 1,71 centime

Source : Légifrance (article 265 du code des douanes) et projet de loi de finances pour 2016 adopté par l’Assemblée nationale en première lecture (article 8 bis).

Ainsi, malgré la montée en puissance de la « contribution climat-énergie » prise en compte pour établir le tarif de la TICPE, qui aurait de toute façon conduit à majorer de 1,71 centime par litre le prix des essences en 2016, l’addition de cette modulation tarifaire et de celle entre les essences et le gazole aboutira à faire baisser en 2016 le tarif de TICPE appliqué à l’essence SP 95 – E 10 (passage de 62,41 centimes par litre en 2015 à 62,12 centimes par litre en 2016).

Par ailleurs, sur le plan juridique, on peut noter que l’orientation consistant à encourager fiscalement un recours accru aux biocarburants est bien en phase avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (122), qui a fixé pour objectif à notre pays de parvenir, d’ici 2020, à utiliser 10 % d’énergie d’origine renouvelable dans l’ensemble des modes de transport – cet objectif étant ensuite relevé à 15 % à l’horizon 2030.

IV. L’IMPACT ÉCONOMIQUE ATTENDU

Cet article devrait aboutir à une différence de taxation de 2 centimes d’euro par litre entre l’essence sans plomb 95 « classique » et le carburant « E 10 », au profit de ce dernier. Si l’on prend en compte l’impact de cette modulation tarifaire sur la TVA, l’écart de taxation entre ces deux carburants devrait atteindre 2,4 centimes en 2016. Si les distributeurs répercutent cette différence de taxation sur les prix de vente, les consommateurs utilisant des véhicules essence, soit environ 32 % des ménages en France, seront donc incités à acheter, autant que possible, du carburant E 10 plutôt que de l’essence sans plomb 95 ordinaire.

Cette mesure ne devrait donc pas avoir d’impact négatif sur le pouvoir d’achat des ménages concernés, pourvu que la distribution de ce carburant soit correctement assurée sur l’ensemble du territoire national. Or, selon les données transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, la distribution de l’essence SP 95-E 10 concerne déjà 57 % des stations-services distribuant plus de 500 mètres cubes de carburant par an, soit environ 5 000 stations-services significatives, et ces chiffres sont en augmentation. Elle permettra même, combinée à la modulation tarifaire entre le gazole et les essences, décidée à l’article 8 bis du projet de loi de finances pour 2016 (que le Sénat vient de décider de supprimer, ce qui n’empêchera pas cette mesure de pouvoir être reprise), de réduire non plus de 2,28 centimes, mais de 3,28 centimes, l’écart de taxation (hors TVA) existant entre le gazole et l’essence SP 95-E 10, ce qui est positif pour la réduction de la pollution atmosphérique.

Sur le plan industriel, cette mesure ponctuelle ne devrait pas conduire à remettre en cause l’utilisation d’éthanol pour l’incorporation d’ETBE dans les essences, y compris au sein de l’essence sans plomb 95 « classique ». En effet, pour ce dernier carburant, comme pour l’essence sans plomb 98, la mesure proposée aura pour seul effet d’annuler la baisse de 1 centime par litre de la TICPE décidée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, et donc de maintenir le tarif initialement prévu par l’article 265 du code des douanes pour ce carburant l’an prochain. Pour les années 2017 et au-delà, il conviendra de veiller à préserver la compétitivité économique de la filière ETBE, qui offre aussi des débouchés aux productions végétales françaises et doit donc être considérée complémentaire de celle de l’incorporation d’éthanol pur dans l’essence.

Sur le plan agricole, la mesure devrait accroître la demande d’éthanol adressée aux producteurs agricoles français, ce qui est d’autant plus opportun que ceux-ci sont actuellement confrontés à des difficultés économiques. Elle a d’ailleurs été annoncée par le Premier ministre, le 3 septembre dernier, dans le cadre du plan d’urgence agricole.

Sur le plan budgétaire, l’évaluation préalable du présent article indique que la modulation tarifaire proposée devrait aboutir, en tenant compte de l’effet sur la TVA et les autres impôts, à un surcroît de recettes estimé à 46 millions d’euros au profit du budget de l’État. Cette légère augmentation du produit fiscal s’explique par le fait que le carburant E 10, qui bénéficiera de la baisse tarifaire supplémentaire, représente actuellement un peu moins d’un tiers de l’ensemble des essences vendues en France. Ainsi, selon la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI), sur la base des volumes habituellement mis à la consommation, une variation de 1 centime par litre du tarif de TICPE applicable au carburant E 10 a un effet pour l’État de l’ordre de 30 millions d’euros (hors TVA), tandis qu’une variation de même ampleur portant sur les essences sans plomb 98 et sans plomb 95 « classiques » a un effet évalué à environ 63 millions d’euros (hors TVA).

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M. Charles de Courson. L’article 12 a pour objet, conformément à l’annonce du Premier ministre du 3 septembre 2015 dans le cadre du plan d’urgence agricole, de distinguer, au sein des essences, celles qui contiennent entre 5 % et 10 % de bioéthanol (SP 95-E 10) et de leur appliquer une baisse de 1 centime de la taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE) en 2016. Dans le même temps, la TICPE de l’essence SP 95-E5, contenant uniquement jusqu’à 5 % en volume de bioéthanol, sera augmentée de 1 centime afin d’accroître l’avantage prix pour le SP 95-E 10.

Si nous approuvons l’idée, nous proposons d’accélérer un peu le mouvement, et de porter la variation à 2 centimes. Le système proposé dégage 45 millions d’euros de recettes supplémentaires. L’idée est de redéployer, à coût nul. D’après nos calculs, ça correspondrait plutôt à 2 centimes si on veut que ça soit neutre.

Mme la Rapporteure générale. Nous appliquons déjà une modulation plus un moins un. Vous, vous voulez une modulation plus deux moins deux, pour que ce soit neutre, dites-vous. Certes, mais, derrière tout cela, il y a quand même des gens qui paient. Avec votre amendement, en 2016, l’hectolitre d’essence classique passerait à 65,12 euros, et celui de SP 95-E 10 à 61,12 euros, soit un écart de 4 euros. Je propose que l’on s’en tienne au dispositif actuel de l’article 12.

M. Charles de Courson. Le problème, c’est que le Gouvernement nous propose une nouvelle recette : 46 millions d’euros d’impôts en plus. Je propose, pour ma part, une modulation de 2 euros, pour favoriser l’oxygénation, tout en parvenant, d’après mes calculs, à la neutralité budgétaire. Peut-être vos propres calculs, madame la Rapporteure générale, indiquent-ils qu’une modulation de 1,50 euro suffirait à assurer la neutralité budgétaire.

Mme la Rapporteure générale. Restons-en là. Je suis défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement CF 57.

Puis elle adopte l’article 12 sans modification.

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Après l’article 12

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 50 et CF 51 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. C’est un marronnier. En raison de la suppression de l’exonération des majorations des retraites pour charges de famille, 200 000 personnes seules sont devenues imposables au titre de la taxe d’habitation ou de la taxe foncière ; l’entrée de 600 000 contribuables dans les impôts locaux vient pour un tiers de cette mesure ! Il faut rappeler d’où viennent les problèmes.

Mme la Rapporteure générale. Vous avez parfaitement raison de rappeler d’où viennent les difficultés, mais une solution a été proposée et adoptée dans le cadre du projet de loi de finances.

Je suis donc défavorable à ces amendements.

M. Charles de Courson. La solution en question n’en est pas une, puisque le problème se reposera dans deux ans.

Mme la Rapporteure générale. Non, avec le relèvement du seuil du revenu fiscal de référence à hauteur d’une demi-part – puisqu’il passe de 10 686 euros à 13 353 euros – le problème est résolu.

M. Charles de Courson. L’amendement gouvernemental a pour objet de conserver le bénéfice de l’exonération à ceux qui l’avaient en 2014, mais c’est temporaire. Cela dure deux ans puis disparaît.

Mme la Rapporteure générale. Non !

M. Charles de Courson. Vous n’avez pas résolu le problème, et cela explique l’assujettissement de 200 000 des 600 000 nouveaux contribuables aux impôts locaux. Je me permets de le rappeler gentiment à la majorité.

La commission rejette successivement les amendements CF 50 et CF 51.

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Article additionnel après l’article 12
Coordination avec le projet de loi d’adaptation
de la société au vieillissement

La commission examine les amendements identiques CF 161 de M. Charles de Courson et CF 171 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. La création d’un régime unique d’autorisation pour les services d’aide à domicile des personnes fragiles prévue par le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement aura pour conséquence de supprimer, pour les personnes âgées dépendantes et les personnes handicapées, le bénéfice des avantages fiscaux attachés aux activités de services à la personne. Cela dépendra désormais du statut de l’opérateur intervenant auprès d’elles.

L’amendement CF 171 vise à garantir les mêmes avantages fiscaux pour tous les bénéficiaires de services à domicile. En adaptant le dispositif fiscal au changement de statut juridique des services à la personne induit par le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement, il remédie à une difficulté qui se présentera lors de l’entrée en vigueur de ce texte, prévue pour le début de l’année 2016.

Mme la Rapporteure générale. Nous avions déjà examiné cet amendement en première lecture du projet de loi de finances et il interférait avec le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement, dont le texte, entre travaux en commission et travaux en séance, n’a cessé de changer. La commission mixte paritaire (CMP) doit se tenir la semaine prochaine.

La date d’entrée en vigueur de la réforme a été plusieurs fois modifiée. Tout d’abord, ce devait être en 2021. Il a ensuite été prévu une expérimentation à partir du 1er janvier 2016, avant une généralisation en 2021. Pour l’heure, l’entrée en vigueur de la mesure est prévue pour le 1er juillet 2016, mais, selon certains échos qui nous sont parvenus, cette date pourrait encore être modifiée en CMP. Je ne sais pas ce qu’il en sera finalement, mais une coordination n’en est pas moins nécessaire. Je m’en remets donc à la sagesse de la commission.

Par ailleurs, selon les services de Bercy, un simple commentaire de l’administration fiscale pourrait suffire à régler la question, mais je ne suis pas favorable à cette solution. Je préfère que les questions soient tranchées ici, à l’Assemblée nationale.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est un vrai problème qui se pose. Évitons aux personnes âgées une forme de marathon administratif.

Je suis prête à m’engager à revenir sur cette disposition en nouvelle lecture, si vous adoptez l’amendement et que le problème est finalement réglé par la CMP. Mais, en attendant, prenons nos précautions. Il est toujours bon de pouvoir se fonder sur des dispositions juridiques adoptées par le Parlement.

M. Charles de Courson. Absolument ! Adoptons ces amendements. Si le Gouvernement nous promet que la coordination requise interviendra bien, nous pourrons supprimer l’article additionnel que nous aurons ainsi introduit, mais je crains toujours l’absence de dispositions de coordination – cela arrive souvent. Prenons une précaution, quitte à devoir revenir dessus plus tard.

M. Éric Alauzet. J’avais déposé une disposition analogue lors de l’examen du projet de loi de finances initiale. Je n’ai pas fait de même dans le cadre de l’examen de ce projet de loi de finances rectificative, car la mise en œuvre de la réforme avait semblé reportée à une date lointaine, mais ces amendements me paraissent utiles.

La commission adopte les amendements CF 161 et CF 171 (amendement 313).

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Après l’article 12

La commission se saisit de l’amendement CF 189 de Mme Michèle Bonneton.

Mme Eva Sas. Cet amendement vise à mettre fin au dispositif dit « Censi-Bouvard » de défiscalisation des investissements dans l’immobilier neuf de loisir. Nous insistons depuis trois ans sur le fait qu’il n’a jamais fait l’objet d’une véritable évaluation. Aujourd’hui, il est coûteux pour les finances publiques. D’un point de vue environnemental, il favorise les constructions dans des zones qui devraient, au contraire, être préservées.

Il est plus que temps de mettre fin à ce dispositif reconduit d’année en année dont rien ne prouve qu’il ait des effets économiques positifs.

Mme la Rapporteure générale. Nous connaissons bien cet amendement, que vous aviez présenté lors de l’examen du projet de loi de finances initiale. Je vous avais alors indiqué que nous attendions le rapport d’évaluation de ce dispositif demandé dans le cadre de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR). Nous l’avons reçu en novembre. Il présente les enjeux du dispositif « Censi-Bouvard » pour les différentes catégories de résidence, mais non la ventilation de la dépense fiscale en fonction des catégories de résidences. Il n’en préconise pas moins un recentrage de ce dispositif sur la réhabilitation des résidences de tourisme, option également défendue par nos collègues Bernadette Laclais et Annie Genevard dans leur rapport sur la montagne.

Je vous invite donc à retirer cet amendement pour en déposer une nouvelle mouture, recentrée sur la réhabilitation. Ainsi sera-t-il en ligne tant avec le rapport nos collègues qu’avec celui remis dans le cadre de la « loi ALUR ».

Mme Bernadette Laclais. Nous avons effectivement proposé un tel recentrage à la lumière de ce que nous avons pu constater dans les stations de sport d’hiver. Cette proposition a reçu un accord de principe du Conseil national de la montagne réuni le 25 septembre dernier à Chamonix, comme l’a annoncé le Premier ministre. Il s’agit donc d’une logique largement partagée.

Ne nous privons pas des moyens nécessaires à la réhabilitation de logements dont certains ne sont pas adaptés à la demande internationale et, surtout, qui n’ont pas l’efficacité énergétique souhaitable.

Mme Eva Sas. Je suis tout à fait d’accord avec les conclusions du rapport parlementaire cité, je retire cet amendement, en exprimant le souhait que nous puissions travailler ensemble en vue de déposer un amendement qui recueille l’assentiment du Gouvernement. Le recentrage sur la réhabilitation est tout à fait souhaitable, et éviterait d’encourager des constructions nouvelles.

L’amendement CF 189 est retiré.

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Article 13
Mise en conformité du dispositif de réduction d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) au titre des souscriptions au capital des petites et moyennes entreprises (PME) avec les règles européennes d’encadrement des aides d’État en faveur du financement des risques

Le présent article a pour objet de mettre en conformité avec le droit de l’Union européenne le dispositif de réduction d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) au titre des souscriptions au capital de petites et moyennes entreprises (PME), dit « ISF-PME », régi par l’article 885-0 V bis du code général des impôts.

Cette mise en conformité se traduit pour l’essentiel par un ciblage plus restrictif des entreprises au capital desquelles le redevable de l’ISF pourra investir pour bénéficier de l’ISF-PME.

Par cohérence, le présent article procède également, dans le code monétaire et financier, à la mise en conformité du régime des deux fonds d’investissement ouvrant le bénéfice de l’ISF-PME, à savoir les fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI) et les fonds d’investissements de proximité (FIP).

Cette mise en conformité a été notifiée à la Commission européenne, qui l’a validée le 5 novembre 2015 (123).

I. LE DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN VIGUEUR

De manière générale, l’encadrement des aides d’État résulte de l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) qui prévoit que :

– les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions sont par principe incompatibles avec le marché intérieur ;

– par dérogation, certaines aides limitativement énumérées sont compatibles avec le traité (aides à caractère social, aides destinées à remédier aux calamités naturelles, etc.), tandis que d’autres « peuvent » être compatibles avec le traité, notamment les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités économiques.

L’article 108 du même traité prévoit plusieurs mesures permettant la mise en œuvre de ces principes :

– la Commission procède à l’examen « permanent » des régimes d’aides existants et propose les mesures utiles exigées par le développement progressif du marché intérieur ;

– elle peut décider que l’État doit supprimer ou modifier tout régime d’aide incompatible avec ce principe ;

– elle doit être informée, sous la forme d’une notification préalable réalisée « en temps utile » par les États membres, des projets tendant à instituer ou modifier des aides.

L’article 109 du même traité stipule enfin que « le Conseil, sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, peut prendre tous règlements utiles en vue de l’application des articles 107 et 108 et fixer notamment les conditions d’applications de l’article 108, paragraphe 3, et les catégories d’aides dispensés de cette procédure », c’est-à-dire de la procédure de notification préalable mentionnée ci-dessus.

Pour la mise en œuvre pratique de ces principes, plusieurs dispositions établissent :

– un régime dit « de minimis » (124), qui définit un seuil d’aide par entreprise en-deçà duquel l’État membre n’est pas soumis à l’obligation de notification du dispositif ;

– le régime général fixé par le règlement général « d’exemption par catégorie » (RGEC) récemment modifié (125), qui prévoit une dérogation à l’obligation de notification applicable à plusieurs catégories d’aides : aides en faveur de la culture et de la conservation du patrimoine, aides à finalité régionale, aides en faveur des PME, aides à la formation, aides à la protection de l’environnement, aides au financement des risques, etc.

A. L’APPLICATION DU RÉGIME DES AIDES D’ÉTAT AU DISPOSITIF ISF-PME

Créé par l’article 16 de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (TEPA) (126), le dispositif ISF-PME a fait l’objet, conformément aux dispositions du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne mentionnées ci-dessus, d’une notification à la Commission européenne le 11 octobre 2007. L’ensemble du dispositif a été autorisé par la Commission européenne par une décision du 11 mars 2008.

À compter de cette validation, le dispositif ISF-PME comporte donc, au regard du droit européen, deux compartiments :

– un dispositif pour lequel le bénéfice des aides, pour les sociétés bénéficiaires des versements au titre de souscriptions à leur capital, est constitutif d’un régime d’aides d’État autorisé par la Commission européenne. Le bénéfice de ce dispositif pour les sociétés bénéficiaires des versements suppose qu’elles satisfassent un ensemble de critères prévus par les lignes directrices spécifiquement applicables au capital-investissement ;

– dans l’hypothèse où les entreprises bénéficiaires ne satisfont pas à ces critères, le bénéfice des aides reçues à raison des versements de capitaux est subordonné au respect de la réglementation relative aux aides de minimis, ce qui conduit de fait à en plafonner le montant.

1. Les critères du régime d’aide autorisé par la Commission européenne

Compte tenu de la décision du 11 mars 2008 précitée, la Commission a autorisé la mise en œuvre du dispositif ISF-PME sous réserve que les entreprises bénéficiaires remplissent les critères prévus par les lignes directrices encadrant le capital-investissement (127) :

– être une PME au sens européen, c’est-à-dire une entreprise occupant moins de 250 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros ou dont le total du bilan annuel n’excède pas 43 millions d’euros ;

– être en phase d’amorçage, de démarrage ou d’expansion au sens des lignes directrices précitées ; ces lignes directrices définissent le capital d’amorçage comme le financement visant à étudier, évaluer et développer un concept de base préalablement à la phase de démarrage ; le capital de démarrage désigne le financement fourni aux entreprises qui n’ont pas commercialisé de produits, tandis que le capital d’expansion désigne le financement visant à assurer la croissance et l’expansion d’une entreprise qui peut toutefois ne pas encore avoir atteint son seuil de rentabilité ;

– l’entreprise bénéficiaire ne doit pas être qualifiable d’entreprise en difficulté au sens des lignes directrices spécifiques aux entreprises dans cette situation ;

– le montant total des apports en capitaux ne doit pas excéder un plafond de 2,5 millions d’euros par période de douze mois. Le point 5.1 des lignes directrices de 2006 prévoit par principe que le montant des investissements doit être de 1,5 million mais que « la Commission est disposée, dans certains cas, à envisager de déclarer compatibles avec le marché commun des mesures de capital-investissement prévoyant des tranches d’investissement supérieures au seuil de 1,5 million d’euros par entreprise et par an, à condition que la défaillance du marché soit dûment établie ».

Saisie en ce sens par le Gouvernement français, la Commission européenne a accepté que le seuil soit porté à 2,5 millions d’euros le 16 mars 2009 (128) jusqu’au 31 décembre 2010.

Le 1er décembre 2010, la Commission a par ailleurs autorisé la modification des lignes directrices en portant de 1,5 à 2,5 millions le montant maximal des apports en capitaux possibles au titre d’une telle aide.

Les notions d’amorçage, de démarrage et l’expansion font l’objet de précisions, en droit interne, par le biais du Bulletin officiel des finances publiques-Impôts (BOFiP-I) :

– l’amorçage s’entend d’une société en phase de formation. Les versements effectués pendant cette période par des personnes physiques ne peuvent donc être éligibles à l’ISF-PME avant la constitution de la société dans la mesure où ces versements n’ont pas pour contrepartie l’octroi de droits sociaux ;

– le démarrage correspond à la période au cours de laquelle l’entreprise est juridiquement constituée mais n’a pas commercialisé de produit, donc entre la constitution officielle de la société et la première commercialisation ;

– la croissance et l’expansion correspondent à la période où l’entreprise a commencé à commercialiser ses produits ou ses services ; cette qualification est évaluée à l’aune de deux critères cumulatifs : la croissance de l’entreprise doit être soit interne soit externe, notamment en cas de prises de participations en capital dans d’autres entreprises ; en outre, les versements doivent être utilisés pour l’augmentation des capacités de production, le développement d’un marché ou d’un produit ou le renforcement du fonds de roulement.

À titre d’exemple, le BOFiP-I mentionne les sociétés qui développent une activité nouvelle, investissent dans de nouveaux outils de production ou encore les sociétés holding animatrices de leur groupe dont les versements sont utilisés pour l’acquisition de nouvelles participations.

Ni le droit européen ni le droit interne ne sont parfaitement clairs sur les critères permettant de déterminer à quel moment l’entreprise quitte la phase de croissance et d’expansion pour atteindre un régime que l’on pourrait qualifier « de croisière ».

2. Le régime subordonné au respect du règlement de minimis

Si la société bénéficiaire de l’aide ne respecte par l’ensemble des critères mentionnés ci-dessus, l’aide ne peut être octroyée que si elle respecte le règlement de minimis précité, en respectant par conséquent un plafond par entreprise de 200 000 euros sur trois exercices fiscaux consécutifs.

Une communication de la Commission du 22 janvier 2009, destinée à tirer les conséquences de la crise économique, a autorisé les États membres à solliciter un relèvement du plafond à 500 000 euros.

B. UN RENFORCEMENT DU CADRE APPLICABLE AUX INVESTISSEMENTS EN FAVEUR DU FINANCEMENT DES RISQUES

Dans le courant de l’année 2014, le cadre européen applicable à l’ISF-PME a été renforcé par deux dispositifs :

– les nouvelles lignes directrices relatives aux aides d’État visant à promouvoir les investissements en faveur du financement des risques du 22 janvier 2014 (129) ;

– le nouveau RGEC du 17 juin 2014 prévoyant un dispositif nettement plus complet d’encadrement des aides d’État en faveur du financement des PME (130).

1. Les lignes directrices relatives au financement des risques

Comme il a été rappelé ci-dessus, les lignes directrices sont susceptibles d’être appliquées par la Commission européenne dès lors qu’il s’agit d’évaluer la comptabilité avec le droit de l’Union européenne d’un dispositif qui lui a été notifié, dans l’hypothèse où un tel dispositif n’aurait pas été dispensé de cette formalité en application du RGEC.

À ce titre, les lignes directrices contiennent des principes, plus que des dispositions juridiques pratiques :

– le point 15 de ces lignes commence par rappeler clairement qu’elles ne s’appliqueront qu’à défaut d’application du RGEC ;

– le point 21 indique que « la Commission estime qu’il n’existe pas de défaillance générale de marché pour l’accès des grandes entreprises au financement » ; les mesures de financement des risques doivent donc prioritairement cibler les petites entreprises ;

– les mesures d’aide accordées en faveur du financement des risques en l’absence totale d’investisseurs privés ne seront pas déclarées compatibles avec le marché intérieur ;

– les aides au financement des risques ne peuvent pas être utilisées pour soutenir des rachats d’entreprises ;

– la Commission précise en outre, dans le point 34, que le financement fourni par des investisseurs privés indépendants des entreprises dans lesquelles ils investissent doit être « important », évoquant à titre indicatif un seuil de 30 % ;

– d’une manière générale, la Commission indique qu’elle exigera des États membres une évaluation approfondie des dispositifs qui visent des entreprises ne remplissant pas les critères du RGEC, considérant qu’il convient de démontrer, en pareil cas, qu’il existe une défaillance de marché ;

– s’agissant des entreprises qui recevraient un investissement initial plus de sept ans après leur première vente commerciale, la Commission admet que certaines entreprises peuvent ne pas avoir atteint leur phase d’expansion au terme de ce délai ou qu’un besoin complémentaire de financement peut apparaître pour évoluer vers une activité à grande échelle.

Le point 74 indique donc qu’en conséquence, « il est envisageable d’autoriser des mesures prévoyant un investissement initial plus de sept ans après la première vente commerciale », la Commission exigeant, en pareil cas, que la mesure définisse clairement les entreprises admissibles.

En résumé, il ressort des lignes directrices que la Commission européenne n’exclut pas a priori un dispositif de financement des risques qui ne vise pas particulièrement les entreprises de moins de sept ans, à l’instar du dispositif ISF-PME actuellement applicable.

En se plaçant sous le régime de ces lignes directrices, le Gouvernement français aurait pu, en droit, notifier le dispositif ISF-PME actuellement applicable afin d’obtenir sa validation par la Commission européenne.

Il ressort toutefois des échanges avec l’administration fiscale française qu’une telle démarche aurait été fortement aléatoire, risquant de remettre en cause l’ensemble du dispositif.

L’option retenue, sous-jacente au présent article, consiste donc à adapter le dispositif ISF-PME afin de la soumettre au nouveau RGEC, dont les conditions sont à la fois plus claires et plus restrictives que celles des lignes directrices.

2. Le nouveau régime du RGEC de 2014

Comme il a été indiqué, le RGEC permet de dispenser un dispositif d’aide d’État de l’obligation de notification et, partant, de le considérer comme compatible avec le droit de l’Union européenne, à condition de ne pas dépasser certains seuils.

Dans le domaine du financement des risques des PME, l’article 4 du RGEC de 2014 prévoit qu’un dispositif conduisant à attribuer à l’entreprise bénéficiaire plus que 15 millions d’euros par entreprise ne peut plus bénéficier du régime du RGEC.

L’article 21 du RGEC définit en outre le champ des entreprises admissibles, le type d’investissements réalisables et le rôle des intermédiaires financiers.

a. Les entreprises admissibles

Le point 5 de cet article 21 définit le champ des entreprises éligibles comme les PME non cotées remplissant au moins l’un des conditions suivantes :

– elles n’exercent leur activité sur aucun marché ;

– elles exercent leurs activités sur un marché depuis moins de sept ans après leur première vente commerciale ;

– elles ont un besoin d’investissement en faveur des risques qui, sur la base d’un plan d’entreprise visant à développer un nouveau marché, est supérieur à 50 % de leur chiffre d’affaires annuel moyen des cinq années précédentes.

Cette dernière disposition doit être comprise comme permettant d’octroyer une aide, lorsque celle-ci vise à financer la croissance d’une entreprise, y compris au-delà de la limite de sept ans, à condition que le besoin de financement soit supérieur à 50 % du chiffre d’affaires annuel moyen des cinq dernières années. L’investissement doit donc être particulièrement significatif.

Ces dispositions relatives à l’âge des entreprises admissibles ou à leur besoin de financement sont celles qui, à titre principal, ont rendu nécessaires la mise en conformité du dispositif ISF-PME prévue par le présent article.

b. Les investissements éligibles aux aides

Les points 4 et 6 de cet article du RGEC indiquent que les aides peuvent être reliées à des investissements en fonds propres ou en quasi-fonds propres, de prêts, de garanties ou d’une combinaison de ces instruments.

À titre accessoire, les aides au financement des risques peuvent également couvrir des investissements de suivi fournis à des entreprises admissibles, y compris après la période de sept ans, à condition de respecter cumulativement les conditions suivantes :

– le montant maximal du financement par entreprise, de 15 millions d’euros, ne doit pas être dépassé ;

– de possibles investissements de suivi étaient prévus dans le plan d’entreprise initial. Cette notion d’investissement de suivi n’est pas définie par le RGEC autrement que par référence au plan d’entreprise initial de l’entreprise.

c. Le rôle particulier des intermédiaires financiers

L’article 21 du RGEC prévoit que lorsque l’investissement est réalisé par le biais d’un intermédiaire financier, celui-ci doit veiller à atteindre un taux de participation privée représentant 40 % du financement des risques.

D’une manière générale, toute mesure de financement des risques doit être réalisée par le biais d’investisseurs financier, sauf dans le cas de souscriptions directes.

Selon le RGEC, le financement des risques doit être motivé par la recherche de profit, sachant que, selon cet article, ce critère est réputé acquis en présence d’un intermédiaire financier.

Il ressort de l’économie générale de ces dispositions que la Commission entend soutenir le rôle des intermédiaires dans le financement des risques, par rapport à la souscription directe.

En conclusion, l’analyse du RGEC démontre que le dispositif ISF-PME, tel qu’il existe actuellement, comporte plusieurs éléments devant être adaptés afin que cette réduction d’impôt puisse dans son ensemble être placée sous le régime de ce règlement.

Ces ajustements portent, pour l’essentiel, sur les conditions tenant à l’âge de l’entreprise admissible et au plafond d’investissement par entreprise.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article comporte trois volets portant respectivement sur :

– l’ajustement du dispositif ISF-PME afin de le rendre conforme au RGEC (alinéas 1 à 59) ;

– l’ajustement du régime des FCPI qui permet de bénéficier, sous certaines conditions, du dispositif ISF-PME (alinéas 60 à 102);

– l’ajustement du régime des FIP qui ouvre de la même manière le bénéfice du régime ISF-PME (alinéas 103 à 131).

Les ajustements des régimes des FCPI et des FIP résultent de leur mise en conformité non pas avec le RGEC, mais avec les lignes directrices mentionnées précédemment. Cette réforme a donc dû faire l’objet d’une notification formelle à la Commission européenne, qui l’a approuvée le 5 novembre 2015 (131).

Il en résulte, pour l’ajustement du régime de ces fonds, une plus grande latitude que le Gouvernement a exploitée dans le cadre des négociations menées avec la Commission européenne ; il ressort en particulier de cette négociation que les FCPI sont recentrés sur les entreprises de moins de dix ans et non pas sept ans comme le prévoit le RGEC.

A. L’AJUSTEMENT DU DISPOSITIF ISF-PME

Le présent commentaire n’a pas pour objet d’exposer dans son ensemble le dispositif ISF-PME, dans la mesure où, d’une manière générale, l’ampleur de l’avantage fiscal offert au redevable (taux, montant maximal de la réduction, modalités de calcul de cette réduction) n’est pas modifiée.

Afin d’éclairer les options retenues par le Gouvernement pour transposer le RGEC, il convient toutefois de rappeler l’architecture générale de cette réduction d’impôt en trois compartiments, qui offre à la fois des montants maximaux de réduction et des modalités de calcul différents.

En particulier, il convient de rappeler qu’en cas de souscription par le biais d’une holding ISF-PME ou d’un fonds réglementé (FCPI et FIP), la réduction d’impôt dont bénéfice le redevable correspond à 50 % du montant apporté au capital de ces véhicules financiers pondéré en fonction du quota qu’ils investissent dans des titres de sociétés entrant dans le champ de l’ISF-PME.

LES DIFFÉRENTS MODES DE CALCUL DE LA RÉDUCTION D’IMPÔT « ISF-PME »

Souscription

Taux applicable

Montant maximal du crédit d’impôt

Modalité de calcul

Souscription directe

50 %

45 000 euros

Prise en compte de la totalité du montant souscrit

Souscription via des holdings ISF-PME

45 000 euros

Le montant souscrit par le redevable est pondéré en fonction du quota que la holding investit en titres éligibles à l’ISF-PME

Souscription via des FIP ou FCPI (1)

18 000 euros

(à l’intérieur du plafond de 45 000 euros en cumulant avec la souscription directe ou via une holding)

Le montant souscrit par le redevable est pondéré en fonction du quota que le fonds investit en titres éligibles à l’ISF-PME

(1) Un FIP est un fonds d’investissement de proximité et un FCPI est un fonds commun de placement dans l’innovation. Leur régime est exposé infra.

1. Les souscriptions éligibles

Les alinéas 5 à 11 modifient le champ des souscriptions éligibles au dispositif ISF-PME.

Actuellement, l’ensemble des souscriptions, en numéraire ou en nature par apports de biens nécessaires à l’exercice de l’activité, sont éligibles à la réduction d’impôt. Ces souscriptions peuvent indifféremment concerner le capital initial ou toutes les augmentations de capital de la PME.

La nouvelle rédaction conduit à cibler les souscriptions en numéraire, en supprimant la faculté d’imputer les apports en nature. Cet alignement, qui semble résulter des négociations avec la Commission européenne, constitue un alignement par le bas avec le dispositif de réduction d’impôt sur le revenu dit « Madelin ».

Le récent rapport de la mission d’information de nos collègues Olivier Carré et Christophe Caresche consacrée aux investissements productifs de long terme (132) préconisait au contraire de prendre en compte les deux modes de souscriptions dans les deux dispositifs.

Cette rédaction conduit en outre à créer trois catégories de souscriptions éligibles :

– les souscriptions au capital initial ;

– les souscriptions aux augmentations de capital d’une entreprise dont le redevable n’est ni associé ni actionnaire ;

– les souscriptions au titre des « investissements de suivi » dont la définition est prévue par le RGEC, à la triple condition que le redevable ait déjà bénéficié de l’avantage fiscal au titre de « son premier » investissement au capital de la même société, que des investissements de suivi aient été prévu dans le plan d’entreprise initial de la société et que la société ne soit pas devenue liée à une autre entreprise au sens du RGEC.

Par comparaison avec le dispositif prévu par le RGEC, ces alinéas posent plusieurs questions :

– en premier lieu, cette rédaction conduit à exclure les souscriptions aux augmentations de capital des personnes qui sont déjà actionnaires (en dehors des cas d’investissement de suivi) alors que le RGEC n’impose pas une telle restriction ; d’un point de vue économique, il peut en outre paraître discutable d’exclure d’un éventuel second tour de table l’investisseur historique au motif que le plan d’entreprise initial ne l’avait pas prévu ;

– la notion d’investissement de suivi prévue par cette rédaction est plus restrictive que celle du RGEC ; si le RGEC prévoit bien que l’investissement de suivi permet d’investir au-delà de sept ans de l’entreprise à condition que cet investissement ait été prévu par le plan d’entreprise, il ne prévoit pas que l’investisseur ait réalisé un premier investissement avant sept ans et encore moins qu’il ait déjà bénéficié d’un avantage fiscal au titre du premier investissement ;

– la portée de la notion de « premier » investissement n’apparaît pas clairement.

2. Les sociétés éligibles

La présente rédaction reprend en partie le champ des entreprises actuellement éligibles à l’ISF-PME, à savoir les PME au sens européen qui ne sont pas cotées sur un marché réglementé, qui ne sont pas qualifiables d’entreprises en difficultés et qui ont une véritable activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole.

À titre d’ajustement, l’alinéa 26 prévoit que les PME cotées sur un système multilatéral de négociation spécifiquement dédié à la négociation des PME, ce qui permet de prendre en compte la mise en place d’Enternext, filiale d’Euronext dédiée au financement des PME, en mai 2013.

Reprenant le dispositif du RGEC, les alinéas 20 à 23 prévoient que la PME doit remplir au moins l’une des conditions suivantes :

– n’exercer son activité sur aucun marché ;

– exercer son activité depuis moins de sept ans suivant sa première vente commerciale ;

– avoir un besoin d’investissement, établi sur un plan d’entreprise destiné à financer une opération de croissance, de plus de 50 % de son chiffre d’affaires annuel moyen des cinq années.

Ainsi qu’il a été indiqué précédemment, cette dernière condition permettra de continuer à faire bénéficier du dispositif ISF-PME certaines entreprises existantes depuis plus de sept ans, notamment des PME régionales anciennes visant, par une rupture technologique ou commerciale, à reconquérir de nouveaux marchés.

L’alinéa 29, reprenant le RGEC, indique par ailleurs que le montant total des investissements reçus par la PME par le biais de l’ISF-PME ne doit pas dépasser 15 millions d’euros.

Les effets de ces nouvelles restrictions sur le marché du capital-investissement ont été commentés dans le rapport de la mission d’information précitée ; s’il peut paraître rationnel d’orienter le capital-investissement davantage vers l’amorçage, les effets de ce ciblage sur les modalités de financement en fonds propres des entreprises plus grandes ou plus anciennes peuvent être préoccupants.

3. Les divers ajustements complémentaires

L’alinéa 41 porte sur la condition de conservation des titres par le redevable conditionnant le bénéfice de l’ISF-PME. Il est actuellement prévu que l’avantage fiscal est perdu en cas de remboursement des apports au souscripteur avant la septième année suivant la souscription.

À titre dérogatoire, il est prévu que cette condition ne s’applique pas aux entreprises de l’économie sociale et solidaire ou aux sociétés dont l’objet est de financer des entreprises.

Le présent article conduit à supprimer le régime dérogatoire dont bénéficient ces entreprises de l’économie sociale et solidaire, le RGEC ne prévoyant pas expressément la possibilité d’une telle dérogation.

L’alinéa 50 complète la liste des circonstances dans lesquelles le fait de ne pas conserver les titres acquis en bénéficiant du dispositif ISF-PME pendant cinq ans n’entraîne pas la perte de l’avantage fiscal.

Dans l’état du droit, pour l’ISF-PME, ces conditions sont essentiellement centrées sur des considérations financières (fusion ou scission de l’entreprise, annulation des titres).

Reprenant une dérogation existant dans le dispositif « Madelin », cet alinéa prévoit que l’avantage n’est pas perdu quand la durée de détention n’est pas respectée du fait d’un licenciement, d’une invalidité ou du décès du souscripteur ou de son conjoint.

B. L’AJUSTEMENT DU RÉGIME DES FCPI

a. Le régime des FCPI

Les alinéas 60 à 102 opèrent des ajustements de conséquence du régime des FCPI tel que prévu dans le code monétaire et financier.

Actuellement, les FCPI sont des fonds dont l’objectif est d’orienter l’épargne financière vers les entreprises innovantes. Leur commercialisation est soumise à la régulation de l’Autorité des marchés financiers (AMF), et ouvre le droit au bénéfice de l’ISF-PME et du « Madelin » mais aussi à une exonération pérenne d’ISF dans les conditions prévues à l’article 885 I ter du code général des impôts (CGI).

Ils constituent, avec le FIP, l’une des catégories de fonds communs de placement à risques (FCPR) et sont, à ce titre, soumis à de nombreux ratios d’investissement que la mission sur les investissements productifs de long terme précitée proposait d’alléger.

Actuellement, l’actif d’un FCPI doit être composé au minimum à hauteur de 70 % de titres financiers de sociétés ou d’avances en compte courant à des sociétés qui ne sont pas cotées, qui comptent entre 2 et 2 000 salariés et qui ont réalisé, au cours de l’exercice précédent, des dépenses de recherches telles que définies pour l’application du crédit d’impôt recherche (CIR) correspondant à 15 % des charges de l’exercice au moins (ou 10 % pour les entreprises industrielles).

À défaut de respecter ce dernier critère, l’entreprise peut justifier qu’elle entend procéder à la création de produits, de procédés ou de techniques innovantes.

Dans la limite de 20 % de l’actif du fonds, le FCPI peut en outre acquérir des titres de sociétés cotées de petite capitalisation boursière (inférieure à 150 millions d’euros), qui seront comptabilisés dans le quota de 70 %.

L’actif du fonds est enfin constitué pour 40 % au moins de titres de capital ou d’obligations des sociétés mentionnées ci-dessus.

Il ressort des dispositions ci-dessus que le champ d’investissement des FCPI est assez large ; pour peu que la société cible respecte le critère tenant à l’innovation et à sa non-cotation, le FCPI peut acquérir les titres de sociétés de taille importante et indépendamment de leur âge.

b. Les ajustements prévus par le présent article

Afin d’introduire davantage de cohérence entre le régime des FCPI et l’ISF-PME, le présent article procède à un alignement des sociétés ciblées par les deux dispositifs.

À cet effet, les alinéas 68 à 83 modifient le champ des entreprises éligibles au FCPI pour ne retenir que les PME non cotées remplissant l’un des trois conditions suivantes :

– n’exercer leur activité sur aucun marché ;

– exercer son activité sur un marché depuis moins de dix ans après sa première vente commerciale ; comme pour l’ISF-PME, l’alinéa 94 prévoit toutefois que les investissements de suivi dans les sociétés déjà présentes à l’actif du fonds pourront être réalisés au-delà de cette limite de dix ans, à condition d’être prévu dans le plan d’entreprise et ne pas conduire à accorder à l’entreprise une aide supérieure à 15 millions d’euros ;

– avoir un besoin de financement en faveur du financement des risques établi sur la base d’un plan d’entreprise supérieur à 50 % de son chiffre d’affaires annuel des cinq dernières années.

On peut s’interroger sur cette limite de dix ans qui ne correspond pas aux limites posées par le RGEC ; selon l’administration, ce délai plus long est le fruit d’un compromis avec la Commission européenne.

Cette limitation aux entreprises de moins de dix ans ne résulte pas des limites posées par le RGEC mais des principes découlant des lignes directrices applicables en matière de financement des risques ; le Gouvernement ayant opté pour le maintien du régime des FIP et des FCPI sous le régime de ces lignes directrices, qui impose notamment une notification lors de chaque changement de ces régimes, il en résulte une plus grande latitude de négociation qui s’est traduite, pour le seul régime des FCPI, par cette limite de dix ans.

Ces conditions viennent s’ajouter au critère actuel permettant de déterminer que l’entreprise est innovante. L’alinéa 73 procède toutefois à un assouplissement du critère tenant à la proportion de dépenses éligibles au CIR ; alors que le droit en vigueur prévoit que les dépenses de recherche doivent représenter 15 % des charges de l’exercice précédent, cette rédaction prévoit que ce montant ne doit plus atteindre que 10 % des charges de l’un ou moins des trois exercices précédents.

L’alinéa 81 prévoit en outre que, lors de chaque investissement par le fonds dans la société, celle-ci doit respecter le critère, par ailleurs applicable pour l’ISF-PME, visant à ne pas dépasser un montant total d’investissement de 15 millions d’euros.

Les alinéas 86 à 98 conduisent enfin à ajuster en conséquence les ratios d’investissement actuellement applicables aux FCPI :

– la possibilité d’investir 20 % de l’actif du fonds dans des sociétés cotées de petite capitalisation boursière est supprimée ;

– entrent dans le quota de 70 % le rachat de titres d’une société lorsque le fonds s’engage à souscrire à l’émission de titre qui suivra cette opération de rachat de titres.

Les autres alinéas procèdent à des aménagements de nature légistique.

C. L’AJUSTEMENT DU RÉGIME DES FIP

a. Le régime des FIP

Le FIP constitue une forme de FCPR dont l’actif est constitué à 70 % de société non cotées ou d’avances en compte courant à ces mêmes sociétés. Contrairement au FCPI, le FIP ne peut acquérir que des titres de PME au sens européen.

Au sein de ce quota, au moins 20 % de l’actif doit en outre être placé en titres d’entreprises constituées depuis moins de huit ans.

Les entreprises éligibles doivent exercer leurs activités dans une zone géographique déterminée par le fonds et limitée au plus à quatre régions limitrophes.

Le FIP peut également investir 20 % de son actif dans des PME cotées de petite capitalisation boursière.

Il ressort de ces dispositions que les possibilités d’investissement des FIP sont davantage ciblées sur les PME jeunes. L’ajustement à opérer pour mettre ces possibilités en cohérence avec la réforme de l’ISF-PME est par conséquent d’ampleur plus limitée que pour les FCPI.

b. Les ajustements prévus par le présent article

L’alinéa 106 supprime la mention selon laquelle 20 % de l’actif du FIP est composé d’entreprises de moins de huit ans.

L’alinéa 111, par un renvoi aux dispositions de l’article 885-0 V bis du CGI, prévoit par cohérence avec l’ISF-PME que l’entreprise ciblée ne doit, au moment de l’investissement initial du fonds :

– exercer son activité sur aucun marché ;

– exercer son activité sur un marché depuis moins de sept ans après sa première vente commerciale ; comme pour l’ISF-PME, l’alinéa 123 prévoit toutefois que les investissements de suivi dans les sociétés déjà présentes à l’actif du fonds pourront être réalisés au-delà de cette limite de sept ans ;

– avoir un besoin de financement en faveur du financement des risques établi sur la base d’un plan d’entreprise supérieur à 50 % de son chiffre d’affaires annuel des cinq dernières années.

La présente rédaction précise en outre qu’en tout état de cause, l’entreprise cible ne doit pas être cotée au moment de l’investissement initial et ne pas avoir bénéficié d’un investissement au titre du financement des risques, au sens du RGEC, de plus de 15 millions d’euros.

Par cohérence avec le nouveau régime des FCPI, le présent article supprime également la possibilité de consacrer 20 % de l’actif du FIP à l’acquisition de titres de sociétés cotées de petite capitalisation boursière.

*

* *

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 106 du président Gilles Carrez et CF 89 de M. Charles de Courson.

M. le président Gilles Carrez. J’ai déposé cet amendement CF 106 faute de trouver quelque chose de plus efficace. Il s’agit de rallonger un peu la durée au-delà de laquelle une entreprise n’est plus éligible au dispositif ISF-PME, en ne faisant courir le délai de sept ans qu’à partir de la date de clôture du premier exercice.

Le recentrage du dispositif ISF-PME sur les entreprises de moins de sept ans est quand même risqué. Certes, selon l’étude d’impact, 12 % seulement des entreprises bénéficiant du dispositif auraient plus de sept ans, mais ce chiffre m’inspire quelques doutes. Par ailleurs, l’enjeu n’est pas négligeable : comme le disait la Rapporteure générale ce matin, la dépense fiscale est d’un peu plus de 500 millions d’euros. La réduction d’ISF s’élevant à 50 % du montant investi, c’est donc 1 milliard d’euros d’investissement en fonds propres qui est en jeu. Il me paraît très hasardeux de priver d’un trait de plume les entreprises de plus de sept ans d’une part non négligeable de fonds propres.

M. Charles de Courson. Nous sommes très nombreux à nous interroger sur l’impact qu’aurait ce recentrage sur les entreprises de moins de sept ans.

J’ai trouvé des chiffres qui concernent la filière bois, grâce à Bpifrance, qui a créé un fonds bois, lequel a investi 20 millions d’euros en fonds propres dans la filière. Des investisseurs ont investi 5 millions d’euros dans dix-huit entreprises de cette filière, dont dix avaient plus de sept ans et représentaient 40 % des investissements réalisés. Cela veut dire que seuls 60 % des investissements concerneraient des entreprises de moins de sept ans. Ces chiffres ne sont pas forcément significatifs, mais ils permettent de poser le problème.

M. le président Gilles Carrez. L’exploitation du bois est une activité ancestrale.

Mme la Rapporteure générale. Ce n’est, en effet, pas une filière de start up.

L’amendement du président Carrez pose de bonnes questions, mais j’en demande le retrait. Le nouveau règlement général d’exemption par catégorie est extrêmement précis : les entreprises éligibles « exercent leurs activités sur un marché quel qu’il soit depuis moins de sept ans après leur première vente commerciale ».

Mme Marie-Christine Dalloz. Cela n’a aucune pertinence au regard des règles comptables !

M. Christophe Caresche. Cette réforme est importante. Le régime des aides d’État nous contraint à une harmonisation et le Gouvernement a décidé de mettre le dispositif ISF-PME en conformité avec le règlement général d’exemption par catégorie. Un certain nombre d’entreprises n’en bénéficieront plus, effectivement, mais les besoins les plus forts se manifestent sur les capitaux d’amorçage des entreprises naissantes.

Bien sûr, certains fonds qui investissent dans des entreprises plus anciennes, comme Kusmi Tea, reprise par des investisseurs, ne pourront plus bénéficier du dispositif, mais le texte offre tout de même une certaine souplesse. Une espèce de droit de suite est instaurée, qui permet de conserver le bénéfice du dispositif si un investissement commencé au cours de ces sept années se poursuit ensuite.

Mme la Rapporteure générale. En effet, il y a une souplesse, qui permet d’investir en conservant le bénéfice du dispositif si un premier investissement est intervenu au cours des sept premières années.

M. le président Gilles Carrez. En attendant, je vais retirer mon amendement.

M. Charles de Courson. Mme la Rapporteure générale pourrait-elle obtenir un ordre de grandeur ? Qu’est-ce que cela représente par rapport au système actuel ? Les chiffres dont je dispose concernant la filière bois ne sont, en effet, pas forcément représentatifs.

Quant au fait que le délai de sept ans court à compter de la date de première commercialisation, il est des start up, par exemple dans le domaine pharmaceutique, qui n’engrangent pas un sou de recette pendant cinq ou six ans. Ce sont donc cinq ou six ans qui s’ajoutent à ce délai de sept ans. Cela fait tout de même douze ou treize ans ! Ce sont cependant des cas extrêmement particuliers, la plupart des entreprises ont des recettes dès la première année.

M. Olivier Carré. L’article 13 procède à une importante réforme du dispositif puisqu’il touche aussi aux véhicules d’investissement, comme les fonds d’investissement de proximité (FIP) ou les fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI) et autres mécanismes de capital-risque.

D’après les professionnels, ces mesures concernent 50 % des fonds pour les FIP, qui ont tendance à investir dans des sociétés qui sont plus matures que les sociétés dédiées à l’innovation, et à peu près un quart pour les FCPI, ce qui est significatif.

Se posent également des questions d’interprétation, car le chiffre d’affaires est lié aux ventes. Or, les sociétés qui fonctionnent avec un « pipeline de l’innovation » n’en tirent pas nécessairement de recettes commerciales directes, même si en général elles vendent quand même de petites prestations en même temps qu’elles développent leurs futurs produits.

N’oublions pas que la France est, après le Royaume-Uni, le pays qui a le meilleur taux de financement du démarrage de l’entreprenariat – c’est un de nos atouts malgré un léger déclin au cours de ces toutes dernières années. Or, le nouveau dispositif constitue un net retour en arrière. Je maintiens qu’il aurait fallu regarder plus attentivement si nous avions ici réellement affaire à des aides d’État, car je persiste à penser que ce n’est pas le cas et qu’il s’agit uniquement d’instruments permettant de limiter l’appréhension du risque par les investisseurs.

Les amendements CF 106 et CF 89 sont retirés.

La commission en vient à l’amendement CF 144 de M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. Cet amendement vise à harmoniser le dispositif « Madelin » et le dispositif ISF-PME. Dans le premier, le contribuable peut défiscaliser 18 % du montant total de la souscription, tandis que, dans le second, il peut défiscaliser 50 % du quota que le fonds investit dans les PME, ce qui induit des comportements qui ne sont ni vertueux ni productifs. Nous proposons donc d’aligner les deux dispositifs en retenant un pourcentage du montant investi. En tout état de cause, les fonds communs de placement resteraient soumis à l’obligation d’investir dans les PME éligibles au « Madelin » ou à l’ISF-PME.

Mme la Rapporteure générale. En me fondant sur un exemple concret, j’émets un avis défavorable sur cet amendement. Actuellement, lorsqu’un FIP investit dans une société A, éligible à l’ISF-PME, et une société B, qui ne l’est pas, l’avantage est pondéré. Or votre amendement suggère d’étendre l’éligibilité à l’ensemble des fonds investis par le FIP, ce qui n’incitera pas ces derniers à se tourner vers les sociétés de type A, qui sont pourtant celles vers lesquelles on veut orienter l’investissement à long terme et la prise de risque des investisseurs. Par ailleurs, cela procurerait aux sociétés de type B un avantage fiscal dont elles n’ont pas besoin.

La mesure aurait donc un coût pour un effet que nous ne souhaitons pas. Avis défavorable.

L’amendement CF 144 est retiré.

La commission discute de l’amendement CF 44 de M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. Le nouveau dispositif ISF-PME maintient l’obligation prévoyant qu’au moins 40 % du fonds éligible est composé d’actions ou d’obligations converties. Il est proposé de supprimer ce critère qui n’est pas une obligation européenne mais vise à éliminer le risque d’un produit trop investi en obligations convertibles. Or ce risque nous semble extrêmement limité.

Mme la Rapporteure générale. En d’autres termes, vous proposez d’accepter de la dette d’entreprise. Je m’en remets à la sagesse de la commission.

M. Charles de Courson. J’ai du mal à comprendre cet amendement qui parle d’obligations converties, ce qui n’existe pas. Soit une obligation est convertible, et elle a été convertie en actions, soit vous ne faites pas jouer la convertibilité, et cela reste de la dette. Pourquoi, dans ce cas, ne pas accepter toutes les formes de dette ?

Mme la Rapporteure générale. Je pense, en effet, que nous pouvons accepter toutes les formes de dette, ce qui, j’en conviens, change l’économie générale du dispositif.

M. Charles de Courson. C’est un choix.

M. Christophe Caresche. Le risque qu’il s’agit de prévenir est très limité puisqu’il existe aujourd’hui des primes de non conversion, et que le risque est donc pris en charge.

M. Charles de Courson. Reste qu’il y a des cas où vous avez intérêt à convertir, et d’autres non.

M. Olivier Carré. L’obligation prévoyant que 40 % du fonds soient composés d’actions ou d’obligations converties vise à éviter que 100 % d’un fonds soit composé de titres de créance qui ne renforceront pas les fonds propres de l’entreprise. Cela justifie qu’il existe un certain nombre d’avantages fiscaux, qui rémunèrent le risque. En modifiant cet équilibre, on risque de voir les allocations d’actifs se déplacer vers les titres de créances, alors que l’objectif originel du dispositif était de renforcer les fonds propres des entreprises, la seule exception admise étant le cas de rachat indirect d’entreprise, cas dans lequel l’apport de fonds propres n’est pas obligatoire.

L’amendement CF 44 est retiré.

La commission adopte l’article 13 sans modification.

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Après l’article 13

La commission est saisie de l’amendement CF 131 de M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. Lorsqu’un contribuable bénéficie d’un report d’imposition, il n’est pas mis fin à celui-ci, en cas de cession par la société bénéficiaire des titres dans un délai de trois ans à compter de l’apport, à la condition que la société bénéficiaire prenne l’engagement d’investir au moins 50 % du produit de cession des titres, dans un délai de deux ans à compter de la cession, dans une activité économique.

En l’état des textes, il existe une incertitude quant au maintien du report d’imposition dans le cas où le produit de cession est réinvesti dans la souscription de parts de fonds de capital investissement ayant vocation à investir dans les PME.

Il s’agit donc de clarifier cette situation, en inscrivant dans la loi, conformément à une décision du Comité de l’abus de droit fiscal, que la souscription de parts de fonds de capital investissement ayant vocation à investir dans les PME constitue un réinvestissement éligible pour le maintien du report d’imposition.

Mme la Rapporteure générale. Cette question a déjà été réglée lors de l’examen de la loi de finances rectificative de 2012. Pour qu’une cession de titres soit exonérée de taxation sur les plus-values, il faut que la holding à laquelle ils ont été vendus les conserve trois ans. Dans le cas où ces titres seraient cédés, comme vous le proposez, à des fonds, il devient difficile de contrôler qu’ils sont bien conservés pendant trois ans. Compte tenu du danger d’optimisation, je suis défavorable à l’amendement.

La commission rejette l’amendement CF 131.

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Article additionnel après l’article 13
Suppression de l’application de l’abattement pour durée de détention
aux moins-values

La commission examine les amendements identiques CF 45 du président Gilles Carrez et CF 17 de M. Olivier Carré.

M. le président Gilles Carrez. Il s’agit de supprimer l’application de l’abattement pour durée de détention aux moins-values mobilières. Pour alléger la fiscalité sur les plus-values, on a instauré en 2013 un abattement progressif, fonction de la durée de détention. Or l’administration fiscale pratique, contre toute logique, le même raisonnement pour les moins-values.

M. Olivier Carré. Dans l’esprit du législateur, l’instauration de cet abattement progressif visait à encourager la détention de titres à long terme. Or, par effet de symétrie, l’effet sur les moins-values est exactement inverse, ce qui est d’autant plus absurde que lorsque l’on gère un portefeuille en bon père de famille, on possède des titres qui, après avoir connu une mauvaise année, peuvent se redresser. Or, la logique de l’administration fiscale incite à vendre et à réaliser sa moins-value. Elle incite donc à faire de l’optimisation fiscale alors qu’il s’agissait au départ de favoriser un actionnariat stable.

Il me semble, d’ailleurs, qu’une jurisprudence récente va dans notre sens.

Mme la Rapporteure générale. Ces amendements reprennent l’une des propositions du rapport Carré-Caresche, qui a été validée de fait par le Conseil d’État. Celui-ci a, dans un arrêt du 12 novembre 2015, annulé la doctrine du bulletin officiel des finances publiques (BOFIP) au motif qu’elle ne traduisait pas l’esprit du législateur, et a retenu le principe d’une imputation sur les plus-values nettes. Je suis favorable à l’adoption des amendements, qui renforcerait la portée de la jurisprudence du Conseil d’État.

La commission adopte les amendements CF 45 et CF 17 (amendement 314).

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Après l’article 13

La commission en vient à l’amendement CF 115 de Mme Bernadette Laclais.

Mme Bernadette Laclais. Cet amendement concerne ce que l’on appelle le « coup d’accordéon », à savoir une augmentation de capital précédée d’une réduction de capital par imputation des pertes accumulées et reports à nouveau débiteurs, les titres annulés disparaissant et de nouveaux titres étant créés. C’est cette dernière date de création qui est prise en compte pour déterminer la durée de détention dans le calcul de l’imposition des plus-values, alors que, de fait, la détention réelle est plus ancienne. Nous considérons que cette situation peut être préjudiciable aux entreprises et à leurs investissements.

Mme la Rapporteure générale. Je suis gênée par le fait que votre amendement ne précise pas si les opérations concernent toujours le même investisseur. Il serait préférable que vous le précisiez pour la séance.

M. Charles de Courson. Vous faites l’hypothèse d’un coup d’accordéon à 100 %, mais il y a parfois des réductions de capital de 50 % ou 60 %. Il faut examiner tous les cas de figure.

Mme Véronique Louwagie. Il est même rare que l’on parvienne exactement à 100 %.

L’amendement CF 115 est retiré.

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Article additionnel après l’article 13
Option pour la barémisation des cessions de bons de souscription de parts
de créateurs d’entreprise (BSPCE)

La commission est saisie de l’examen de l’amendement CF 5 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. Les bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE) sont imposés au taux forfaitaire de 19 %. Pour certains contribuables aux revenus modestes, il peut toutefois arriver que la barémisation soit plus avantageuse qu’une imposition forfaitaire. Il s’agit donc de leur permettre d’opter pour le barème s’ils le souhaitent.

Mme la Rapporteure générale. Je m’en remets à la sagesse de la commission.

M. Jean-Claude Buisine. Il me semble que cette option a toujours été possible avant le 31 décembre de l’année suivante.

M. Olivier Carré. Pas dans ce cadre-là.

La commission adopte l’amendement CF 5 (amendement 317).

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Article additionnel après l’article 13
Conservation des réductions d’impôt ISF-PME et « Madelin »
en cas de réinvestissement dans une PME

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 111, CF 107, CF 120 et CF 118 de Mme Bernadette Laclais et les amendements identiques CF 150 de M. Christophe Caresche et CF 14 de M. Olivier Carré.

Mme Bernadette Laclais. Dans son rapport, la mission Carré-Caresche a souligné la nécessité de renforcer la portée des avantages fiscaux. Elle préconise donc, dans sa proposition n° 3, d’augmenter les plafonds et les taux des avantages « Madelin ». L’amendement CF 111 propose donc, d’une part, de revenir au taux historique de déduction de 25 %, pour encourager la création d’emplois par le financement d’entreprises en développement, et, d’autre part, de définir un plafond identique à celui des sociétés pour le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle (SOFICA).

L’amendement CF 107 reprend la proposition n° 2 du rapport Carré-Caresche et aligne la définition des sociétés éligibles aux réductions d’impôts sur le revenu sur celle des sociétés éligibles à la réduction d’ISF.

L’amendement CF 120 propose que les sociétés en participation puissent opter pour leur assujettissement volontaire à l’impôt sur les sociétés.

L’amendement CF 118 reprend, quant à lui, la proposition n° 10 du rapport Carré-Caresche, qui consiste à maintenir le bénéfice de la réduction d’ISF ou d’impôt sur le revenu sous condition de réemploi, quelle que soit la cause de la cession, si celle-ci intervient deux ans après la souscription. Pendant une première période de deux ans, l’avantage serait conservé aux conditions actuelles, limitativement prévues dans le code général des impôts ; puis, pendant une période de trois ans, l’avantage serait conservé quelle que soit la raison de la sortie du capital, sous condition de réinvestissement dans un délai de douze mois.

M. Christophe Caresche. La condition permettant de bénéficier de l’avantage fiscal « Madelin » ou ISF-PME est la détention des titres pendant une durée de cinq ans. L’amendement CF 150 propose qu’entre la troisième et la cinquième année de détention, l’avantage fiscal ne soit pas remis en cause si le prix de cession net d’impôt est réinvesti dans une autre PME, dont les titres seront conservés jusqu’au même terme.

Mme la Rapporteure générale. Dans l’amendement CF 111, Bernadette Laclais propose de faire passer le taux de l’avantage « Madelin » de 18 % à 25 % et de le placer sous le plafond de 18 000 euros. Cette proposition avait certes fait l’objet d’une discussion, mais elle ne figure pas dans les propositions du rapport de nos collègues Caresche et Carré. Je suis donc défavorable à cet amendement.

Pour ce qui est de la proposition de l’amendement CF 107 de placer l’avantage « Madelin » sous le plafond de 18 000 euros, nous en avions débattu lorsque nous avions baissé ce plafond à 10 000 euros. Un contribuable peut faire ce qu’il veut de cette enveloppe de 10 000 euros – investir dans une entreprise ou choisir une autre dépense fiscale. Il me semble raisonnable de s’en tenir à ce principe de 10 000 euros.

L’avantage fiscal lié au dispositif « Madelin » est subordonné à la conservation des titres pendant cinq ans. L’amendement CF 120 tend à faire bénéficier de cet avantage les sociétés en participation. Or, celles-ci n’ont pas que des actifs éligibles à l’ISF-PME. Par conséquent, j’émets un avis défavorable à cet amendement.

Quant à l’amendement CF 118, notre commission l’avait adopté, mais le Gouvernement avait émis un avis défavorable. Pour ma part, je maintiens mon avis favorable.

Je suis également favorable aux amendements CF 150 et CF 14.

M. Olivier Carré. S’agissant des fonds d’investissement de proximité (FIP) et des fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI), il existe une restriction liée au champ d’application, qui concernera tant l’assiette que les objectifs.

Il eût été de bon ton de donner un coup de pouce dans ce domaine, et donc, de suivre les premiers amendements, même s’ils ont une incidence en termes de dépense fiscale – mais je comprends qu’on veuille l’éviter. Un tel signal aurait contrebalancé l’impact négatif ressenti aujourd’hui par le monde du capital-risque. Le contexte a un peu changé sur ce sujet, mais s’agissant de la modification de l’environnement réglementaire, qui restreint les cibles, on devrait avoir un autre élément permettant aux contribuables qui le souhaitent d’avoir plus de possibilités d’investir dans ces domaines.

Mme Bernadette Laclais. Je retire les amendements qui n’ont pas la faveur de la Rapporteure générale, mais je les représenterai parce que j’estime que le débat mérite d’avoir lieu en séance.

Les amendements CF 111, CF 107 et CF 120 sont retirés.

La commission adopte l’amendement CF 118 (amendement 318).

En conséquence, les amendements identiques CF 150 et CF 14 tombent.

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Après l’article 13

La commission examine l’amendement CF 93 de M. Joël Giraud.

M. Jérôme Lambert. La transition énergétique prévoit de développer l’investissement participatif dans les énergies renouvelables, et les initiatives de citoyens dans ce secteur se multiplient et créent des emplois. Toutefois, la réalisation d’un montage juridique et financier pour parvenir à faire financer par une majorité de particuliers, notamment riverains du projet, un moyen de production exploitant des sources d’énergie renouvelables est très complexe et rencontre de nombreux risques et obstacles. Le but de l’amendement CF 93 est donc de lever les obstacles relatifs à la réduction d’impôt sur le revenu obtenue au titre d’investissements dans les PME, afin de faciliter l’essor de tels projets locaux portés par des citoyens au travers de structures ayant l’agrément « Entreprises solidaires d’utilité sociale ».

Cette mesure, d’un coût estimé de 1 million d’euros en année pleine, permettrait de lever jusqu’à 6 millions d’euros d’investissement dans les énergies renouvelables.

Mme la Rapporteure générale. J’émets un avis défavorable car cet amendement conduirait à permettre de cumuler deux avantages, à la fois la réduction d’impôt du « Madelin » et le tarif de rachat.

La commission rejette l’amendement CF 93.

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Article additionnel après l’article 13
Application du dispositif « Madelin » aux apports en nature

La commission examine les amendements identiques CF 151 de M. Christophe Caresche et CF 12 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. L’amendement CF 12 vise, une fois encore, à harmoniser les dispositifs « Madelin » et ISF-PME, afin de supprimer certains biais anormaux, qui nuisent à l’efficacité de l’intermédiation.

Mme la Rapporteure générale. Favorable, car ces amendements portent sur le numéraire.

La commission adopte les amendements CF 151 et CF 12 (amendement 319).

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Après l’article 13

La commission examine l’amendement CF 123 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. J’avais déposé cet amendement dans le cadre du projet de loi de finances. On m’a demandé de le retirer afin de le représenter lors de l’examen du présent projet.

Il concerne les entreprises solidaires d’utilité sociale, qui bénéficient déjà de certains dispositifs de défiscalisation. Il s’agit de leur permettre de bénéficier des dispositifs « Madelin » et ISF-PME, y compris lorsque leur activité procure des revenus garantis en application d’un tarif réglementé de rachat de la production. Ainsi, les entreprises solidaires produisant des énergies renouvelables pourraient y prétendre.

Mme la Rapporteure générale. Cet amendement suscite un dilemme. L’article 13 supprime toutes les dérogations qui existaient pour les entreprises sociales et solidaires. Or, je viens de dire qu’on ne pouvait pas cumuler tarif de rachat et avantage fiscal. Cela étant, s’agissant de la portée de l’article 13 pour les entreprises sociales et solidaires, le point que vous soulevez mériterait d’être débattu avec le Gouvernement.

Je vous propose de retirer cet amendement afin d’en rediscuter en séance. Peut-être faudrait-il, d’ailleurs, à cette occasion, l’intégrer à l’article 13.

M. Jérôme Lambert. Je tiens à souligner que l’amendement qui a été rejeté proposait cet avantage pour les entreprises ayant obtenu l’agrément « Entreprise solidaire d’utilité sociale ».

M. Charles de Courson. Nous avons déjà eu ce débat, s’agissant principalement des éoliennes, pour savoir s’il fallait rendre éligible, soit à l’ISF-PME, soit au dispositif « Madelin », des investissements dont le prix est garanti par l’État. Il ne faut pas oublier que l’objectif est d’inciter à prendre des risques. Quand vous ne prenez aucun risque, il est logique d’être exclu du bénéfice de cette disposition. Si vous rendez ces investissements éligibles, cela veut dire que vous dopez un rendement prédéterminé par une mesure fiscale. Je pense que ce n’est pas raisonnable.

M. le président Gilles Carrez. Cela susciterait une ruée, comme pour le photovoltaïque, à l’époque.

M. Charles de Courson. Quant au cumul des dispositifs « Madelin » et ISF-PME, cela veut dire que l’on pourrait cumuler les 50 % à l’ISF et les 18 % à l’impôt sur le revenu, ce qui ferait au total 68 %. À 68 %, il n’y a plus de capitalisme ! En ce qui concerne l’ISF-PME, nous étions arrivés à 75 %, puis nous sommes redescendus à 50 %. Qu’est-ce qu’un investissement pour lequel vous êtes subventionné fiscalement à 75 % ? La logique même du capitalisme est éradiquée si c’est l’État qui paie tout !

L’amendement CF 123 est retiré.

La commission est saisie de l’amendement CF 11 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. Je retire cet amendement.

Aujourd’hui, il est possible de bénéficier d’un traitement particulier pour l’amorçage, c’est-à-dire pour les entreprises qui ont moins de deux ans, grâce à un règlement européen de 2014. Au regard de ce qui nous a été dit en commission par des économistes sur l’importance de bien financer cette partie de la création d’entreprise, je proposerai un petit dispositif venant compléter les dispositifs ISF-PME et « Madelin », c’est-à-dire, en gros, un montant plus important de déductions, avec un pourcentage plus faible, de façon à produire un effet de levier maximal.

L’amendement CF 11 est retiré.

La commission en vient à l’amendement CF 6 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. Il s’agit d’harmoniser les dispositifs ISF-PME et « Madelin ».

Mme la Rapporteure générale. L’amendement semble satisfait par l’article 13.

L’amendement CF 6 est retiré.

L’amendement CF 13 de M. Olivier Carré est également retiré.

La commission est saisie de l’amendement CF 10 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. Cet amendement vise à élargir le dispositif ISF-dons aux réseaux de création d’entreprises. Ce dispositif diffère de l’ISF-PME ; il est plus marginal, bien qu’il reste dans le même champ.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 10.

Elle en vient à l’amendement CF 7 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. Nous en revenons à ce qui a été dit tout à l’heure à propos de l’amendement de Bernadette Laclais. Mon amendement ne devrait pas être placé à cet endroit.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 7.

Elle passe ensuite à l’amendement CF 8 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. L’idée est de faire passer le dispositif « Madelin » à 30 %. De toute façon, c’est le plafond qui compte.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 8.

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CF 158 de M. Christophe Caresche et CF 19 de M. Olivier Carré, et l’amendement CF 22 également de M. Olivier Carré.

M. Christophe Caresche. L’amendement CF 158 porte sur le pacte « Dutreil », qu’il vise à simplifier et à rendre plus opérationnel.

M. Olivier Carré. Le pacte « Dutreil » a contribué à résoudre un problème prégnant concernant le rôle de l’ISF et l’évolution du capitalisme, et notamment le capitalisme des entreprises familiales. Dès lors que le pacte « Dutreil » est posé dans une entreprise parce que le tour de table a changé, il n’y a pas de problème.

Sauf que le pacte va « vieillir ». Au fur et à mesure des successions, des échanges et des évolutions patrimoniales au sein du pacte, celui-ci évolue de façon exponentielle, c’est-à-dire qu’il faut de plus en plus de contrats entre les différentes parties prenantes, ces pactes devenant très lourds à gérer, voire source de contentieux. À la sortie, cela donne une rigidification de l’ensemble de l’actionnariat de l’entreprise qui peut être extrêmement préjudiciable.

Il y a deux solutions. La première consiste à supprimer l’ISF, mais ce n’est pas dans cette enceinte ni à ce stade que la question peut être débattue. La deuxième solution se trouve dans de petits aménagements techniques qui faciliteraient la vie des pactes « Dutreil », au regard de ce que nous ont dit tous les professionnels, comme le fait de ne pas reconduire le pacte chaque année lorsqu’il n’y a pas de changement d’actionnaires. Mais je pense qu’il ne s’agit pas de créer de nouveaux biais pour exonérer d’ISF des entreprises qui ne le seraient pas aujourd’hui.

Mme la Rapporteure générale. Le pacte « Dutreil » représente 500 millions d’euros de dépenses fiscales. C’est un montant conséquent. Des conditions sont fixées, avec différents blocages, mais vous pouvez considérer que si le redevable détient des parts de holding, qui détient elle-même les parts des entreprises transmises, il en bénéficie. Même si vous passez par une société interposée, vous pouvez bénéficier du pacte « Dutreil », ce qui conduit en quelque sorte à figer le capital pendant deux ans puisque le pacte doit être maintenu.

Vous considérez que les verrouillages sont trop rigides, mais au regard des montants de dépenses fiscales engagés, il faut maintenir des conditions sérieuses.

Vous évoquez ensuite des éléments qui ne figurent pas dans votre amendement, comme l’obligation d’une déclaration annuelle. Compte tenu des enjeux financiers, il nous faut, je le répète, maintenir des conditions sérieuses qui puissent être vérifiées par l’administration fiscale.

Avis défavorable.

M. Christophe Caresche. Je vais retirer l’amendement CF 158. Il reste qu’il y a énormément de contentieux à propos du pacte « Dutreil » et du rôle des holdings animatrices. J’ai entendu ce que vous avez dit, mais il faudra tout de même que nous parvenions à simplifier et à sécuriser juridiquement le dispositif.

L’amendement CF 158 est retiré.

M. Olivier Carré. Les dépenses fiscales qui visent à inciter sont une forme de subvention publique. Telle n’est pas la situation dans le cadre du pacte « Dutreil ». Il a été reconnu, à peu près sur tous les bancs, que l’ISF perturbait le champ capitalistique français, notamment les entreprises familiales et les entreprises de taille intermédiaire (ETI), que c’était un frein à leur expansion et à la croissance. D’où le pacte « Dutreil ».

Si l’on considère qu’une dépense fiscale est le fait de ne pas prélever un impôt là où l’impôt bloque la croissance des entreprises, je suis d’accord. Mais, en l’occurrence, ce dispositif n’a pas tout à fait la même consistance que certaines autres déductions fiscales, niches fiscales ou crédits d’impôt. Il faut avoir cela en tête lorsqu’on parle de ces dispositifs, car le but est qu’ils soient efficaces pour les entreprises.

Les amendements CF 19 et CF 22 sont retirés.

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CF 159 de M. Christophe Caresche et CF 20 de M. Olivier Carré.

M. Christophe Caresche. Il s’agit de simplifier le pacte « Dutreil » sur le plan administratif en supprimant l’obligation de déclaration annuelle très complète demandée auprès de l’administration. Le contribuable serait, en revanche, tenu de fournir une attestation sur demande de celle-ci.

Mme la Rapporteure générale. Aujourd’hui, dans le cadre d’un pacte « Dutreil », c’est le bénéficiaire qui doit prouver chaque année qu’il remplit toutes les conditions pour en bénéficier. Vous proposez d’inverser la charge de la preuve, en quelque sorte. Il ne serait plus nécessaire de fournir ces données, sauf si l’administration en fait la demande.

M. Olivier Carré. Seulement en cas de changement de l’actionnariat.

Mme la Rapporteure générale. J’ai pourtant l’impression que vous voulez inverser la charge de la preuve. C’est-à-dire que, dans un cas, vous faites une déclaration chaque année pour montrer que vous remplissez bien toutes les conditions pour bénéficier du pacte « Dutreil », dans l’autre cas, ce serait uniquement sur demande de l’administration.

Avis défavorable.

M. Olivier Carré. Je vais retirer l’amendement et le réécrire en indiquant que la déclaration doit être faite à l’administration à chaque modification. En revanche, s’il n’y a pas de changement, on pourra s’exonérer du rituel annuel.

Les amendements CF 159 et CF 20 sont retirés.

La commission en vient à l’amendement CF 24 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. Cet amendement concerne les transferts de titres dans le cadre d’une société holding. Il s’agit de border la situation de ces holdings.

Mme la Rapporteure générale. Prenons l’exemple d’un dirigeant souhaitant faire une donation de l’entreprise à l’un de ses enfants qui désirerait gérer ladite entreprise. Cet héritier loge les titres qu’il a reçus dans une holding, en mettant au passif de celle-ci l’indemnisation des ayants droit, soit les autres frères et sœurs qui pourraient bénéficier de la holding. Le code général des impôts précise que, dans ce cas, le pacte « Dutreil » n’est pas remis en cause pendant les quatre dernières années du pacte. Or dans votre amendement, vous proposez de rendre cette faculté applicable dès les premières années du pacte.

Le verrou qui a été mis a été prévu pour qu’il n’y ait pas d’instabilité dans le capital juste après la transmission. C’est l’entreprise que nous voulons sécuriser. J’ai l’impression que le code est précis sur ce point. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable à votre amendement.

L’amendement CF 24 est retiré.

La commission est saisie de l’amendement CF 23 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. Cet amendement vise une autre situation. Pour des raisons fiscales, certains dirigeants très âgés sont obligés de rester dans la structure, car s’ils en sortent, le château de cartes s’écroule. Cela conduit à des situations qui ne sont pas saines.

Mon amendement tend à assouplir le système en imposant une condition d’âge, fixée à soixante-dix ans, de façon qu’à partir de cet âge, on considère que l’implication du dirigeant suffit, et l’on diminue son rôle au sein de l’entreprise sans que cela puisse remettre en cause l’ensemble du dispositif.

Mme la Rapporteure générale. Aujourd’hui, la seule chose que peut faire un dirigeant de plus de soixante-dix ans qui a transmis son entreprise et en a conservé l’usufruit, c’est voter la répartition du bénéfice à la fin de l’exercice de ladite entreprise. Il ne peut pas avoir de droit de vote sur le reste de la vie de l’entreprise. Dans votre amendement, vous proposez de lui redonner beaucoup de pouvoir, un peu comme s’il était dirigeant.

Je pense, monsieur Carré, que vous devriez protéger ceux qui prennent la suite de l’entreprise, les inciter à prendre un peu plus de liberté et à ne pas rester sous la tutelle de leur donateur. Par conséquent, j’émets un avis défavorable à votre amendement.

M. le président Gilles Carrez. S’agissant des droits de succession, les engagements de conservation avec abattement fiscal à la clé ont été mis en place en 2001, dans le cadre de ce que l’on appelé les pactes « Migaud-Gattaz ». Didier Migaud avait rêvé d’appliquer ce dispositif à l’ISF ; il n’a pas pu le faire. Nous l’avons fait, deux ans plus tard, sous le nom de pacte « Dutreil ». Un an après, on nous a dit, du côté des entreprises, qu’il conviendrait d’ouvrir les pactes « Migaud-Gattaz » aux donations et, dans un deuxième temps, aux donations avec réserve d’usufruit.

La brèche ayant été ouverte, pratiquement chaque loi de finances a généré des amendements allant dans le sens de l’élargissement. Or, nous nous sommes aperçus que les donations avec réserve d’usufruit conduisaient les anciens dirigeants à garder le pouvoir. Nous avons donc été conduits à limiter l’exercice de l’usufruit uniquement à la répartition des dividendes.

Voilà pourquoi je suis plutôt de l’avis de la Rapporteure générale. Il faut savoir s’arrêter. Je rappelle que, s’agissant des donations, l’idée était que le donateur quitte l’entreprise et que le donataire en prenne les rênes.

L’amendement CF 23 est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CF 27 de M. Olivier Carré et CF 76 de M. Charles de Courson, les amendements identiques CF 25 de M. Olivier Carré et CF 74 de M. Charles de Courson et les amendements identiques CF 26 de M. Olivier Carré et CF 75 de M. Charles de Courson.

M. Olivier Carré. L’amendement CF 27 porte sur le statut de l’investisseur de long terme.

M. Charles de Courson. L’intérêt du rapport Carré-Caresche est qu’il nous permet de poser des questions de fond. Le statut d’investisseur de long terme nous permettrait d’être à peu près à parité avec nos principaux partenaires européens.

Le dispositif est très simple. Cet amendement tend, dans son I, à encourager la transmission d’entreprise en exonérant totalement la transmission, en contrepartie d’une durée de détention de dix ans des parts après transmission. C’est le système pratiqué en Espagne, en Italie et en Allemagne.

Le II propose de déconnecter la fiscalité du patrimoine de l’outil productif en sortant les parts d’entreprise de la base de calcul de l’ISF, en contrepartie d’un engagement de conservation individuelle des titres de l’entreprise sur une période de dix ans. Le surcoût de cette mesure est estimé à 80 millions d’euros.

Le statut de l’investisseur de long terme induirait une simplification profonde des textes fiscaux en vigueur et serait de nature à libérer tout le potentiel de croissance à long terme des entreprises de taille intermédiaire.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable à tous ces amendements. Vous citez souvent, monsieur Carré, l’exemple allemand du Mittelstand. Mais, en juillet 2015, le gouvernement allemand a précisément déposé un projet de loi visant à établir une fiscalité moins généreuse quant à la transmission d’entreprises, de sorte qu’elle s’établirait finalement au niveau que nous connaissons en France.

Mme Véronique Louwagie. Il me semble important d’apporter aux entreprises de la stabilité. Nos PME connaissent de vraies difficultés pour se transformer en entreprises de taille intermédiaire. En faisant la promotion d’une épargne tournée vers les entreprises grâce à des exonérations de droits de mutation et d’ISF, nous nous donnons un outil attrayant pour les faire évoluer.

La durée de détention fixée à dix ans me paraît un délai long pour ces investisseurs qui prennent un risque. Il ne s’agit en rien d’un cadeau, si l’on se rappelle que le coût de la mesure est estimé à 80 millions d’euros. Le dispositif permettrait de flécher de la trésorerie vers les entreprises qui en manquent aujourd’hui. Il n’y a pas de notion d’investissements de long terme en France, car nous ne savons pas établir de différence entre un investisseur en capital, qui s’engage dans l’entreprise et y prend des risques, et un investisseur mû seulement par un intérêt financier à court terme. Nous aurions, je crois, intérêt à développer cette notion.

M. Olivier Carré. En adoptant cet amendement, nous lèverions beaucoup d’ambiguïtés sur l’actionnariat et la détention d’actions. Alors que les parts de SOFICA emportent une réduction d’impôt sur les revenus et que les œuvres d’art font l’objet d’un traitement particulier au regard de l’ISF, les entreprises ne bénéficient d’aucun de ces régimes. Elles sont oubliées.

L’investissement à long terme constitue pourtant une question différente. Lui accorder un statut aurait un intérêt. Cela éviterait beaucoup de pages du code général des impôts actuel, qui sont autant de sources de contentieux.

Alors que lève une nouvelle génération d’entrepreneurs qui amorce un nouveau cycle d’entreprenariat en France, nous devons répondre à ses besoins en matière d’approche capitalistique, notamment du point de vue de la fiscalité.

Mme Arlette Grosskost. Je m’associe à ces propos. Depuis des années, nous cherchons un levier pour transformer des PME en ETI. Les entreprises ont besoin de stabilité de leur actionnariat et de hauts de bilan stables. La fixation d’une durée de dix ans serait suffisante pour convaincre des financeurs extérieurs. Nous avons enfin trouvé l’outil qui nous manque !

Mme Karine Berger. La France connaît, en effet, une problématique de financement à long terme des entreprises. Ce n’est pas qu’elles manquent de fonds propres, comme c’était le cas au début des années 1990. Mais si nous adoptons cet amendement, je peux d’avance tracer un parallèle avec l’évolution que nous avons connue en matière de fiscalité des plus-values : si nous adoptons en 2015 une durée de dix ans, en la considérant comme de long terme, nous la ramènerons à huit ans en 2016, puis à deux ans en 2017. Telle est, en effet, la dernière version de la législation sur l’exonération des plus-values, qui considère qu’une détention de deux ans constitue une détention de long terme !

Si la durée proposée était plus longue, ce serait différent.

M. Christophe Caresche. Cette proposition était au nombre de celles que nous avons formulées dans notre rapport conjoint, Olivier Carré et moi. Le dispositif allemand est, en effet, favorable à la transmission des entreprises. Mais il me semble que la cour constitutionnelle de Karlsruhe a demandé au Bundestag de revenir sur ce traitement trop généreux. Peut-être la France pourrait-elle s’aligner sur le nouveau niveau bientôt défini par le Bundestag ? J’estime qu’il faudrait poursuivre le travail d’harmonisation fiscale avec l’Allemagne sur ces questions, tel qu’il avait été amorcé par Didier Migaud.

La commission rejette successivement les amendements identiques CF 27 et CF 76, CF 25 et CF 74, et CF 26 et CF 75.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CF 21 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. Il s’agit d’une variante des propositions précédentes sur l’investisseur de long terme. Elle s’appliquerait aux parts faisant l’objet d’un engagement de conservation ou pacte « Dutreil ».

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable.

L’amendement CF 21 est retiré.

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Article additionnel après l’article 13
Suppression de la limite d’âge de cinq ans pour l’exonération d’ISF des parts de fonds investis en titres de PME

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 136 et CF 135 de M. Christophe Caresche.

Mme la Rapporteure générale. Je suis favorable à l’amendement CF 136, qui conduit à rendre applicable l’exonération d’ISF aux parts de fonds d’investissement de proximité (FIP) et de fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI) qui investissent dans des PME qui ont plus de cinq ans. Peut-être qu’une mise en cohérence avec la limite de sept ans retenue pour l’ISF-PME serait cependant une bonne idée.

La commission adopte l’amendement CF 136 (amendement 316).

En conséquence, l’amendement CF 135 tombe.

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Après l’article 13

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 137 de M. Christophe Caresche.

Elle en vient à l’amendement CF 134 de M. Christophe Caresche.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable.

L’amendement CF 134 est retiré.

La commission examine ensuite l’amendement CF 28 de M. Olivier Carré.

M. Olivier Carré. Assez radical, cet amendement fait sortir les parts d’entreprises de l’assiette de l’ISF, à moins qu’elles ne constituent des parts dans des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM). Dans notre groupe de travail, nous avons demandé à Bercy de chiffrer le coût de cette mesure, mais nous n’avons jamais obtenu de réponse. En réalité, très peu d’actions en vif sont frappées par l’ISF. Il s’agit d’un amendement d’appel.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 28.

Elle en vient à l’examen des amendements identiques CF 157 de M. Christophe Caresche et CF 18 de M. Olivier Carré.

M. Christophe Caresche. Il s’agit d’un amendement assez important. Pour l’application du régime des biens professionnels permettant d’être exonéré d’ISF, l’article 885 O bis prévoit que le dirigeant doit exercer effectivement ses fonctions dans l’entreprise, mais aussi que cet exercice doit donner lieu à une rémunération normale.

Cette condition est en réalité parfois difficile à remplir, car, pour préserver la trésorerie de leur entreprise, ces dirigeants peuvent décider de ne pas se verser de rémunération. L’objet de l’amendement est donc de supprimer cette condition de rémunération dite « normale ».

Mme la Rapporteure générale. Je conviens de ce que le critère d’une rémunération normale est vague et ambigu. Il permet toutefois de vérifier que le dirigeant travaille effectivement dans l’entreprise.

M. Olivier Carré. Il existe nombre de situations où un dirigeant ne perçoit pas de vrai salaire. Un dirigeant qui percevrait un salaire de 1 000 euros aurait-il une rémunération normale ? En définissant dans la législation des conditions à remplir qui ne correspondent pas à la réalité, nous contribuons à multiplier la recherche de biais permettant de s’y insérer. Cela ne peut que faire naître des tentations de contournement, et partant du contentieux. Nous sommes décidément bien loin du but recherché.

M. Charles de Courson. Notre collègue Christophe Caresche a raison. Le législateur cherche à s’assurer de la participation effective. Tel est le vrai critère, défini en premier, le deuxième n’étant qu’un adjuvant. Il y a longtemps, j’avais du reste proposé que l’âge de ces dirigeants fût plafonné à soixante-quinze ans, pour éviter le phénomène gérontologique induit par l’ISF, ce désastre économique qu’est la « papycratie ». Nous pourrions supprimer ce deuxième critère.

Mme Karine Berger. Il faudrait alors en trouver un autre pour définir la participation effective, pour laquelle n’existe aucune définition législative. La distinction établie sert à marquer la différence entre les investissements personnels visant à faire vivre l’entreprise et les simples placements. En effet, les gérontes seraient à placer dans la catégorie de ceux qui pratiquent ce deuxième type d’investissements.

Si le salaire n’est pas défini, nous supprimons cependant toute référence utile et créons un problème pour l’administration fiscale.

Mme Véronique Louwagie. La législation actuelle dispose, premièrement, que le dirigeant exerce effectivement et, deuxièmement, que cet exercice donne lieu à une rémunération normale. L’existence d’une rémunération normale ne constitue qu’une condition supplémentaire. Or qu’est-ce qu’une rémunération normale ? Au passage, la « loi Macron » fait, quant à elle, appel à la notion de rémunération raisonnable. Nous nous trouvons ainsi en présence de deux notions, donc deux difficultés d’appréciation.

Cet amendement a donc une pertinence, car la première condition suffit. De plus en plus de dirigeants renoncent à une rémunération normale pour des raisons de trésorerie. Il ne serait pas justifié qu’ils s’en trouvent pénalisés.

Les amendements CF 157 et CF 18 sont retirés.

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Article additionnel après l’article 13
Prorogation de l’imposition dérogatoire des plus-values de cessions d’immeubles transformés en locaux d’habitation

La commission examine l’amendement CF 46 du président Gilles Carrez.

M. le président Gilles Carrez. Cet amendement vise à prolonger d’un an l’application du taux réduit de l’impôt sur les sociétés aux plus-values de cession de locaux à usage de bureaux ou à usage commercial, lorsque la société cessionnaire s’est engagée à donner à ce local un usage d’habitation. Ce dispositif intéresse principalement les zones tendues ou celles comptant de nombreux immeubles de bureaux vides, comme la région parisienne.

Mme la Rapporteure générale. Ce dispositif est arrivé à échéance le 31 décembre 2014, et aucun amendement tendant à le prolonger n’a été présenté. La mesure coûterait 5 millions d’euros.

M. Christophe Caresche. Elle serait bienvenue. Dans les zones tendues, là où elle serait par hypothèse appliquée, il existe un potentiel important de logements à développer à partir de bureaux.

M. le président Gilles Carrez. Cette mesure pourrait même déclencher des opérations.

M. Jean-Louis Dumont. Le logement intermédiaire a également un potentiel fort dans cet environnement. Mais ai-je mal compris ? Si l’engagement émane de la société cessionnaire, rien n’assure qu’il sera respecté, puisque sa mise en œuvre reviendra à l’acquéreur.

M. le président Gilles Carrez. L’engagement serait, en effet, un engagement du cédant, mais le taux réduit ne s’appliquerait naturellement qu’en cas de transformation effective.

La commission adopte l’amendement CF 46 (amendement 315).

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Article 14
Renforcement du plan d’épargne en actions dédié au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire (PEA-PME)

Le présent article renforce le plan d’épargne en actions (PEA) dédié au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire (PME-ETI), dit « PEA-PME », par deux moyens :

– il l’élargit aux obligations convertibles ou remboursables en actions lorsqu’elles sont négociables sur un marché réglementé ;

– il modifie le champ des entreprises dont les titres sont éligibles à cet instrument de placement, en procédant à un élargissement ciblé sur certaines entreprises cotées.

Les tableaux ci-dessous offrent une vision synthétique d’ensemble de ces deux évolutions.

LES TITRES ÉLIGIBLES AU PEA ET AU PEA PME

Instrument

PEA

PEA-PME

Investissement direct

Actions (hors actions de préférence) et autres certificats d’investissement (notamment mutualistes)

Actions ou certificats d’investissement

Parts de SARL

Parts de SARL

Bons de souscription d’action (supprimé par l’article 13 de la LFR 2013)

Investissement intermédié

Actions de SICAV dont l’actif est composé à plus de 75 % de titres ci-dessus

Actions de SICAV dont l’actif est composé à plus de 75 % de titres ci-dessus

Parts de FCP dont l’actif est composé à plus de 75 % de titres ci-dessus

Parts de FCP dont l’actif est composé à plus de 75 % de titres ci-dessus

Parts ou actions d’OPCVM dont l’actif est composé à plus de 75 % de ci-dessus

Parts ou actions d’OPCVM dont l’actif est composé à plus de 75 % de ci-dessus

Parts de FCPR

Assurance-vie en unités de compte (investie en titre ci-dessus)

Assurance-vie en unités de compte (investie en titre ci-dessus)

Article 14

Obligations convertibles en actions cotées

Obligations remboursables en actions cotées

SARL : société à responsabilité limitée.

SICAV : société d’investissement à capital variable.

OPCVM : organisme de placement collectif en valeurs mobilières.

FCP : fonds commun de placement.

FCPR : fonds commun de placement à risques.

LA DÉFINITION DES PME OU ETI DONT LES TITRES SONT ÉLIGIBLES AU PEA-PME

Droit en vigueur

Droit proposé

Régime unique

Entreprises cotées ou non cotées

2 catégories

Régime général
(reprise intégrale du régime unique)

Entreprises cotées ou non cotées

Régime spécifique

Entreprises cotées

1 Moins de 5 000 personnes employées

1 Moins de 5 000 personnes employées

1 Moins de 5 000 personnes employées

Chiffre d’affaires annuel inférieur à 1,5 milliard d’euros

Chiffre d’affaires annuel inférieur à 1,5 milliard d’euros

Chiffre d’affaires annuel inférieur à 1,5 milliard d’euros

ou

ou

ou

Bilan total inférieur à 2 milliards d’euros

Bilan total inférieur à 2 milliards d’euros

Bilan total inférieur à 2 milliards d’euros

Consolidation

Pour l’appréciation de ces seuils, les données de l’entreprise sont consolidées avec les entreprises partenaires ou liées

Pour l’appréciation de ces seuils, les données de l’entreprise sont consolidées avec les entreprises partenaires ou liées

Pour l’appréciation de ces seuils, les données de l’entreprise sont consolidées uniquement avec ceux de ses filiales

     

Capitalisation boursière de moins d’un milliard d’euros

     

4 Aucune personne morale ne détient plus de 25 % de son capital

L’impact budgétaire du présent article n’a pas fait l’objet d’une évaluation par le Gouvernement.

Le PEA-PME a été créé par l’article 70 de la loi de finances pour 2014 (133) ; ce dispositif est le fruit d’un engagement du Président de la République annoncé le 20 septembre 2012 et réitéré lors de son discours de clôture des Assises de l’entrepreneuriat le 29 avril 2013.

Cet engagement est le fruit des recommandations du rapport de M. Louis Gallois sur la compétitivité de l’industrie française (134) et du rapport de Mme Karine Berger et de M. Dominique Lefebvre sur l’épargne financière (135).

Ce dernier rapport proposait notamment de rendre le PEA plus attractif grâce au relèvement du plafond des versements ouvrant droit au régime fiscal dérogatoire attaché à ce plan et à la création d’un PEA-PME, réservé au financement en fonds propres de PME ou d’ETI, bénéficiant de ce même régime fiscal.

Les sommes versées sur un PEA-PME sont destinées à l’acquisition d’actions, de parts ou de droits et autres titres assimilés de sociétés qui emploient moins de 5 000 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 1,5 milliard d’euros ou un total de bilan de 2 milliards d’euros.

Ces seuils correspondent à la définition statistique des entreprises de taille intermédiaire, précisée par le décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d’appartenance d’une entreprise pour les besoins de l’analyse statistique et économique.

Pour l’appréciation de ces seuils, l’article D 221-113-5 du code monétaire et financier, dans sa rédaction résultant du décret du 4 mars 2015 pris pour la mise en œuvre du PEA-PME (136), prévoit que « le nombre de salariés, le chiffre d’affaires et le total de bilan de la société émettrice des titres (…) sont appréciés dans les conditions définies aux articles 1er, 3, 5 et 6 de l’annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d’aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité ».

L’article 6 de cette annexe prévoit que, dans le cas d’une entreprise autonome, la détermination des données, y compris de l’effectif, seffectue uniquement sur la base des comptes de cette entreprise.

Les données, y compris l’effectif, d’une entreprise ayant des entreprises partenaires ou liées, sont déterminées sur la base des comptes et autres données de l’entreprise consolidés avec les autres entreprises.

S’agissant plus particulièrement des entreprises partenaires, cet article précise que la consolidation doit être opérée avec les entreprises « situées immédiatement en amont ou en aval » de l’entreprise considérée.

L’article 3 de cette annexe définit l’entreprise liée comme une entreprise qui détient la majorité des droits de vote, qui a un droit de nomination ou de révocation d’un organe d’administration, de direction ou de surveillance ou qui exerce une influence dominante sur une autre entreprise en vertu d’un contrat.

Cet article définit l’entreprise partenaire comme l’entreprise qui détient, seule ou conjointement avec d’autres entreprises, plus de 25 % du capital ou des droits de vote d’une autre entreprise.

Les sommes versées sur le PEA-PME peuvent également être employées dans la souscription :

– d’actions de sociétés d’investissement à capital variable (SICAV) dont l’actif est constitué pour plus de 75 % de titres d’entreprises éligibles en directe au PEA-PME, parmi lesquels au moins les deux tiers sont des titres de capital ;

– de parts de fonds communs de placement (FCP) dont l’actif respecte les mêmes ratios que ceux mentionnés ci-dessus ;

– de parts ou actions d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) français ou européens, ou établis dans un État ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ;

– de parts de fonds communs de placement à risques (FCPR).

Les sommes versées sur un PEA-PME peuvent également être employées dans un contrat d’assurance-vie en unités de compte régi par le code des assurances et investi dans une ou plusieurs catégories de titres mentionnés ci-dessus.

Pas de retrait, rachat ou clôture quelle que soit la durée du plan

Clôture d’un PEA ouvert depuis moins de cinq ans

Clôture d’un PEA ouvert depuis plus de cinq ans et moins de huit ans

Retrait ou rachat partiel sur un PEA ouvert depuis plus de huit ans

Clôture d’un PEA ouvert depuis plus de huit ans

Exonération d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux

Imposition à l’impôt sur le revenu au taux de :

– 22,5 % si le plan est liquidé avant deux années de détention ;

– 19 % si le plan est liquidé entre deux et cinq années de détention

Imposition aux prélèvements sociaux

Exonération à l’impôt sur le revenu et imposition aux prélèvements sociaux

Exonération à l’impôt sur le revenu et imposition aux prélèvements sociaux

Exonération à l’impôt sur le revenu et imposition aux prélèvements sociaux

Le régime fiscal des plans d’épargne en actions est très favorable à condition que le titulaire du plan n’opère pas de retrait ou de rachat sur son plan pendant au moins cinq ans à compter de son ouverture.

Sous réserve que cette condition soit respectée, les produits et les gains réalisés dans le cadre d’un PEA sont capitalisés en franchise d’impôt sur le revenu en application du 5° de l’article 157 du code général des impôts.

Les sorties en rente viagère d’un PEA, détenu depuis plus de huit ans, sont également exonérées en totalité.

En cas de retrait ou de rachat partiel entre cinq et huit années de détention, le contribuable est exonéré d’impôt sur le revenu au titre du gain qu’il réalise, mais perd le bénéfice de l’exonération pour les produits et les gains que procurent les sommes demeurant sur le plan et réalisés à compter de la date de cet événement.

En cas de retraits ou de rachats partiels intervenant après huit années de détention, le contribuable conserve le bénéfice de l’exonération totale pour les produits et gains qui seraient réalisés à la suite de cet événement au titre des sommes restant sur le plan, mais ne peut plus effectuer de nouveaux versements.

Lorsque les titres détenus sur un PEA sont cédés après la clôture de ce dernier, le gain réalisé est imposé selon le régime d’imposition de droit commun des plus-values mobilières, réformé par l’article 11 du présent projet de loi de finances rectificative.

Afin d’inciter à la détention de titres à moyen terme, le régime d’imposition est modulé en fonction de la durée de détention du plan.

En application du 2 du paragraphe II de l’article 150-0 A du code général des impôts, est imposable à l’impôt sur le revenu le gain net réalisé en cas de retrait des sommes ou de rachat du contrat de capitalisation avant l’expiration de la cinquième année de détention du plan, sauf si ces sommes sont réinvesties dans une entreprise exploitée directement par le titulaire du plan ou un de ses proches, dans le capital initial d’une société, dans l’achat d’une entreprise ou dans une entreprise individuelle créée depuis moins de trois mois.

Ce gain net représente la différence entre la valeur liquidative du plan lors de sa clôture et le montant des versements effectués depuis son ouverture, minorée le cas échéant, des retraits ou rachats n’ayant pas entraîné la clôture du plan et de la fraction des produits des placements réalisés dans des sociétés non cotées déjà imposée dans les conditions décrites précédemment.

Le 5 de l’article 200 A prévoit que ce gain est imposable à un taux forfaitaire de :

– 22,5 % si le retrait ou le rachat intervient avant l’expiration de la deuxième année de détention du plan ;

– 19 % s’il intervient entre la deuxième et cinquième année de détention.

Dans ces deux cas, le plan est clôturé.

Les différents prélèvements sociaux auxquels sont assujettis les produits et gains réalisés dans le cadre d’un PEA sont la contribution sociale généralisée (CSG), la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), le prélèvement social et les contributions additionnelles à ce prélèvement.

En application des articles L 136-6 et L 136-7 du code de la sécurité sociale, sont assujettis à ces prélèvements sociaux :

– les gains nets réalisés en cas de retrait des sommes ou valeurs contenues dans le plan ou de rachat du contrat de capitalisation, quelle que soit la durée de détention du PEA ;

– la rente viagère acquise après huit années de détention d’un PEA ;

– les revenus distribués afférents aux titres non cotés détenus dans le PEA et imposables à l’impôt sur le revenu pour la fraction du montant de ces revenus excédant 10 % de la valeur des titres.

L’exonération d’impôt sur le revenu n’entraîne donc pas l’exonération au titre des prélèvements sociaux.

De façon dérogatoire, la fraction du gain net correspondant aux produits et plus-values afférents aux titres de FCPR et de sociétés de capital-risque (SCR) détenus dans le plan est exclue de l’assiette des prélèvements sociaux en application du 5° du II de l’article L 136-7 du code de la sécurité sociale.

Les dividendes versés par les FCPR et les SCR étant assujettis aux prélèvements sociaux lors de leur distribution, le législateur a expressément prévu que les gains réalisés au titre du retrait de sommes ou valeurs ou du rachat d’un PEA, issus des dividendes versés par ces fonds et sociétés, ne soient pas soumis une deuxième fois aux prélèvements sociaux.

L’augmentation progressive des taux des prélèvements sociaux portant
sur les revenus de placement et les revenus du patrimoine

Les prélèvements sociaux ont vu leur taux fortement augmenter au cours des dernières années.

La CSG est la première de ces contributions à avoir été instaurée à titre permanent par la loi de finances pour 1991 du 29 décembre 1990 (1) Applicable dans un premier temps aux seuls revenus du capital soumis au prélèvement libératoire, elle est étendue à compter de 1997 à l’ensemble des revenus du patrimoine et de placement (à l’exception des produits des livrets d’épargne réglementés) Son taux a progressé par vagues successives, passant de 1,1 % en 1991, à 2,4 % en 1993, 3,4 % en 1997, 7,5 % en 1998, pour atteindre 8,2 % en application de l’article 72 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie.

Cette augmentation de taux s’est accompagnée du relèvement à due concurrence du taux de déductibilité partielle du revenu imposable de la CSG perçue sur les revenus du patrimoine imposés à l’impôt sur le revenu au barème progressif à compter du 1er janvier 2004 La part de CSG déductible a ainsi été portée de 5,1 % à 5,8 % de sorte que la part non déductible demeure de 2,4 %.

La CRDS, introduite par l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale et dont le taux est fixé à 0,5 %, porte depuis l’origine sur l’ensemble des revenus du patrimoine et de placement.

Le prélèvement social sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, introduit par la loi n° 97-1164 du 19 décembre 1997 de financement de la sécurité sociale pour 1998 au taux de 2 %, a connu quant à lui trois augmentations de taux La loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a porté ce taux à 2,2 %, la loi n° 2011-1117 du 19 septembre 2011 de finances rectificative pour 2011 à 3,4 % et la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012 à 5,4 %.

Enfin, deux contributions additionnelles au prélèvement social ont été créées : une contribution au taux de 0,3 %, destinée à financer la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) par la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et handicapées, et, en janvier 2009, une contribution au taux de 1,1 % destinée à financer le revenu de solidarité active (RSA).

Le taux global des prélèvements sociaux en vigueur est donc de 15,5 %.

L’article 118 du code général des impôts dispose que les revenus d’obligations comprennent :

– les intérêts, arrérages et tous autres produits des obligations, titres participatifs, effets publics et tous autres titres d’emprunt négociables émis par l’État, les départements, communes et établissements publics français, les associations de toute nature et les sociétés, compagnies et entreprises quelconques, financières, industrielles, commerciales ou civiles françaises ;

– les lots et primes de remboursement payés aux porteurs des mêmes titres.

L’article 119 du même code précise en outre que le revenu est déterminé :

– pour les obligations, titres participatifs, effets publics et emprunts par l’intérêt ou le revenu distribué dans l’année ;

– pour les lots, par le montant même du lot ;

– pour les primes de remboursement par la différence entre la somme remboursée et le taux d’émission des emprunts.

Conformément à l’article 119 bis du même code, ces revenus font l’objet d’une retenue à la source dont le taux est fixé à :

– 17 % pour les intérêts des obligations négociables émises avant le 1er janvier 1965 et pour les lots et primes de remboursement afférents à des valeurs émises avant le 1er janvier 1986 ;

– 15 % pour ces revenus afférents à des titres émis postérieurement à ces dates.

Cette retenue à la source ne s’applique pas aux obligations émises par l’État, les départements, les communes et certains établissements publics.

La retenue à la source fait l’objet d’un crédit d’impôt imputable sur le montant effectif de l’impôt exigible sur ces revenus Il est éventuellement restituable si le montant de la retenue est supérieur à l’impôt effectivement dû.

Une obligation négociable étant susceptible de créer une plus-value, celle-ci sera prise en compte fiscalement comme une plus-value mobilière classique.

Cette plus-value sera également soumise au barème de l’impôt sur le revenu après application des modalités spécifiques de détermination du montant à intégrer s’agissant des plus-values mobilières :

– lorsque le redevable est concerné par un ensemble de plus et de moins-values mobilières, les moins-values subies au cours d’une année sont imputables exclusivement sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année ou des dix années suivantes Sont considérées comme de même nature, les plus ou moins-values de cessions de valeurs mobilières classiques mais aussi celles qui sont imposables aux taux de 22,5 ou 19 % ou exonérées à la suite de la clôture d’un PEA ou d’un PEA-PME, selon les modalités rappelées ci-dessus ;

– toutefois, ces plus ou moins-values ne peuvent pas faire l’objet de l’abattement pour durée de détention avant leur imputation ; pour mémoire, cet abattement est de 50 % pour les titres détenus entre deux et huit ans et de 65 % au-delà de huit ans.

Cet abattement pour durée de détention ne s’applique pas non plus aux gains nets réalisés depuis l’ouverture d’un PEA ou d’un PEA-PME en cas de retrait des titres ou de liquidités avant cinq ans, ni en cas de clôture d’un tel plan après cinq ans dans le cas où une perte globale a été enregistrée sur ce plan depuis son ouverture.

(en pourcentage)

Source : INSEE.

Les dernières études de l’INSEE concernant le patrimoine financier des ménages mettent en évidence le fait que la France ne fait pas partie des États membres de l’Union européenne dont le taux d’épargne financière est important.

ACTIFS FINANCIERS DES MÉNAGES DANS QUELQUES ÉTATS DE L’UNION EUROPÉENNE EN 2012

États

Stocks

dont en %

en milliards d’euros

en %
du PIB

Monnaies
et dépôts

Actions et autres titres

Provisions d’assurances

Allemagne

4 939

187

41

22

36

Autriche

529

173

45

34

19

Belgique

1 030

274

32

42

25

Bulgarie

44

111

43

39

8

Danemark

659

270

19

27

53

Espagne

1 781

173

48

34

15

Estonie

14

83

38

39

14

Finlande

235

122

38

40

20

France

4 220

208

30

25

37

Grèce

259

134

73

15

4

Hongrie

98

102

38

46

11

Italie

3 592

229

33

48

18

Lituanie

25

77

43

37

9

Pays-Bas

1 984

331

22

14

63

Pologne

338

86

45

25

27

Portugal

388

235

39

33

16

Roumanie

98

74

33

53

4

Royaume-Uni

5 576

291

23

14

54

Slovaquie

49

70

64

8

22

Slovénie

36

106

52

29

12

Suède

973

235

17

43

39

Source : INSEE.

La partie détenue en valeurs mobilières est, en particulier, assez réduite Dans son étude sur le patrimoine des ménages en 2010, l’INSEE note en effet que « un cinquième des ménages détiennent des valeurs mobilières en 2010, contre un quart en 2004. Ce repli concerne à la fois le compte-titres ordinaire et le plan d’épargne en actions (PEA). Pour la première fois depuis sa création en 1992, ce dernier recule. La crise financière et la forte chute des indices boursiers qui s’en est suivie peuvent avoir incité des ménages à se retirer de ces produits risqués et à se replier sur des produits potentiellement moins rentables mais plus sûrs ».

TAUX DE DÉTENTION D’ACTIFS PATRIMONIAUX DANS LA POPULATION TOTALE

(en %)

Instrument

1998

2004

2010

Livrets défiscalisés

82,5

82,6

84,7

Livrets soumis à l’impôt

62

5,9

6,3

Ensemble des livrets d’épargne

83,5

83,2

85,0

Épargne-logement

40,9

41,3

31,2

Valeurs mobilières

21,2

24,2

19,3

Assurance-vie ou décès volontaire

34,6

35,3

41,8

Épargne retraite (hors PERP)

9,2

9,7

9,1

Plan d’épargne retraite populaire (PERP)

4,0

Plan d’épargne populaire (PEP)

14.9

9,2

4,4

Ensemble assurance-vie, épargne retraite

45,8

43,8

48,3

Épargne salariale

12,7

16,7

15,1

Ensemble autres produits financiers

4,8

2,1

4,0

ENSEMBLE PATRIMOINE FINANCIER

91,6

91,4

92,1

Résidence principale*

53,3

55,7

58,0

Autres logements

18,1

17,7

18,7

ENSEMBLE PATRIMOINE IMMOBILIER

58,5

60,5

61,9

PERP : plan d’épargne retraite populaire.

Source : INSEE, Le patrimoine des ménages en 2010.

Titulaire

Nature d’instruments

Encours PEA-PME

Encours PEA

2014-06

2014-09

2014-12

2015-03

2015-06

2014-06

2014-09

2014-12

2015-03

2015-06

Résidents

Actions cotées

64

100

120

169

239

40 757

40 297

39 766

44 047

49 072

Actions non cotées

5

15

23

30

5 907

6 050

6 442

6 551

Autres (essentiellement des OPC Action)

88

107

119

153

171

44 803

43 228

41 978

46 068

43 596

Encours
(en millions d’euros)

156

222

62

351

410

91 467

89 575

88 186

96 666

92 670

Non-Résidents

Encours
(en millions d’euros)

0,0

0,0

0,0

0,2

-

149

162

184

237

nc

Total encours (en millions d’euros)

156

222

262

352

410

91 616

89 737

88 370

96 902

92 670

Nombre de plans

28 553

32 956

38 189

42 281

         

Encours moyen par plan (en euros)

7 774

7 955

9 204

9 697

         

Source : Banque de France.

Un observatoire du PEA-PME, mis en place dans le cadre d’une initiative privée par la société de bourse ARKEON Finance (138), permet en outre d’évaluer la montée en puissance de l’encours et de la collecte des fonds éligibles au dispositif PEA-PME.

ollecte nette et encours des fonds PEA PME

Selon cet observatoire, au mois d’octobre 2015, il existait 64 fonds éligibles au PEA-PME dont la collecte s’est élevée à 49 millions d’euros au cours de ce mois La collecte nette mensuelle continue de progresser et établit un nouveau record annuel.

Les encours de ces fonds ont atteint 1 996 millions d’euros à la fin du mois d’octobre La collecte nette des fonds éligibles au PEA-PME s’élèverait ainsi à 443 millions d’euros depuis le lancement du dispositif le 5 mars 2014.

Cet attrait résulte en partie d’une performance boursière des PME et des ETI qui est, sur une période récente, tendanciellement supérieure à celle du CAC 40 Afin de mesurer cette performance, Enternext, la plateforme d’Euronext dédiée au financement des PME et des ETI, a lancé un indice spécifique intitulé « PEA-PME 150 » qui permet de suivre l’évolution boursière des 150 principales entreprises éligibles au PEA-PME.

ÉVOLUTION DE L’INDICE « PEA-PME 150 » DEPUIS SA CRÉATION

Source : Enternext

Dans le cadre de l’examen du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (139), le Sénat a inséré un article prévoyant un abattement renforcé, allant jusqu’à l’exonération totale au-delà de huit années, sur les plus-values mobilières liées à la cession de titres financiers, à condition que le produit correspondant à ces cessions soit versé sur un PEA-PME et investit en titres éligibles dans un délai de douze mois.

Dans le cadre de l’examen de ce même projet de loi, le sénateur Philippe Adnot a, en outre, proposé un dispositif permettant de transférer les liquidités en attente sur un PEA classique, par exemple sous forme d’une SICAV monétaire, vers un PEA-PME en franchise d’impôt sur les plus-values mobilières La logique est donc plus ciblée que le dispositif adopté au Sénat qui vise toutes les sortes de plus-values mobilières Le dispositif proposé par M. Philippe Adnot était, tout comme celui voté au Sénat, limité dans le temps (pour l’essentiel à une année suivant le vote de la loi).

L’Assemblée nationale a écarté ces propositions, considérant qu’elles conduiraient à superposer les avantages fiscaux, la fiscalité du PEA-PME étant en elle-même particulièrement attractive.

La mission d’information sur les investissements productifs de long terme précitée a, par ailleurs, formulé une proposition consistant à étendre le PEA-PME à divers titres donnant accès au capital :

– les bons de souscription d’actions (ou « stock-options ») ; en l’état actuel du droit fiscal, la différence entre le prix de l’action au moment de sa souscription et celui au moment de la levée de l’option est taxable dans la catégorie des salaires (donc sans l’abattement pour durée de détention applicable aux plus-values mobilières) En logeant ces bons dans un PEA, le résultat serait d’amoindrir les rigueurs du barème de l’impôt sur le revenu par le biais de la prise en compte de la durée de détention ;

– les droits préférentiels de souscription (DPS) aux augmentations de capital qui, aux termes de l’article L 225-132 du code de commerce, sont négociables indépendamment de l’action pendant la période de souscription.

Le 1° du I permet l’utilisation des liquidités déposées sur le PEA-PME pour l’acquisition d’obligations convertibles en actions ou d’obligations remboursables en actions, à condition toutefois que ces titres soient admis aux négociations sur un marché réglementé ou un système multilatéral de négociation.

L’obligation convertible est une obligation classique à laquelle est adjointe une option de conversion Cette option donne la faculté à son porteur de convertir l’obligation en actions émises par la société.

Un régime spécifique leur était applicable aux termes de l’article L 225-161 du code de commerce abrogé par une ordonnance du 24 juin 2004 (140) ; désormais, l’émission d’obligations convertibles en actions est encadrée par une sous-section du code de commerce traitant de manière plus générale des valeurs mobilières donnant accès au capital, auxquelles se rattachent les obligations convertibles en actions (141).

L’émission de tels titres, par définition ouverte uniquement aux sociétés par actions, est soumise à une décision du conseil d’administration ou du directoire, sauf si les statuts de l’entreprise attribuent ce pouvoir à l’assemblée générale des actionnaires.

Le code de commerce précise d’une manière générale les informations auxquelles les détenteurs de tels titres ont droit, les restrictions de modification du capital pesant sur la société après l’émission de tels titres ou les garanties dont doit bénéficier le détenteur de ces titres pour pouvoir effectivement accéder à un titre de capital.

Contrairement aux obligations convertibles, pour lesquelles il peut toujours exister un risque de non-conversion, les obligations remboursables se transforment obligatoirement en capitaux propres L’opération d’échange se réalise à l’échéance finale de l’emprunt et non pas à tout moment.

Le cadre juridique applicable à l’émission de tels titres, prévu par la partie du code de commerce applicable aux valeurs mobilières donnant accès au capital, est identique à celui des obligations convertibles.

Le présent article prévoit que ces titres seront éligibles au PEA-PME à condition qu’elles soient admises à la négociation :

– sur un marché réglementé au sens de l’article L 421-1 du code monétaire et financier ou sur un marché équivalent d’un autre État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen ;

– sur un système multilatéral de négociation dont le régime est prévu par l’article L 424-9 du même code ; sans avoir la qualité de marché réglementé, ces systèmes doivent permettre d’assurer la rencontre transparente de la demande et de l’offre des titres qui y sont admis Un tel marché peut être géré par un prestataire de services d’investissement.

Au niveau français, la première catégorie désigne en pratique Euronext et Enternext, une filiale de ce marché réglementé destinée à structurer l’offre aux PME et aux ETI.

La seconde catégorie vise Alternext, une plateforme de transaction organisée créée le 17 mai 2005 par Euronext à destination des petites et moyennes entreprises de la zone euro.

Le 2° du I procède à un élargissement ciblé des entreprises dont les titres deviendront éligibles au PEA-PME.

Dans l’état du droit, sont éligibles les entreprises (cotées ou non cotées) de moins de 5 000 employés et dont le chiffre d’affaires est inférieur à 1,5 milliard d’euros ou dont le bilan est inférieur à 2 milliards d’euros Ainsi qu’il a été indiqué précédemment, l’appréciation de ces seuils est effectuée après consolidation avec les entreprises liées et les entreprises partenaires « situées immédiatement en amont ou en aval de celle-ci ».

Le présent article y ajoute, pour les seules sociétés cotées soit sur un marché réglementé, soit sur un système multilatéral de négociation, les entreprises dont la capitalisation boursière est inférieure à 1 milliard d’euros et dont aucune personne morale ne détient plus de 25 % du capital.

En outre, les seuils mentionnés ci-dessus relatifs nombre d’employés, au chiffre d’affaires ou bilan sont également applicables ; toutefois, l’alinéa 10 précise que la consolidation sera effectuée uniquement entre la société émettrice et ses filiales Cette mention devrait permettre d’élargir le nombre des sociétés cotées éligibles au dispositif.

Cas

Droit en vigueur

Droit proposé

Commentaire

Cas n° 1 : cession d’une obligation détenue depuis 4 ans créant une plus-value de 100

L’abattement pour durée de détention ne s’applique pas

Le redevable étant au taux marginal de l’IR, le prélèvement au titre de l’IR sera de 45

Le retrait anticipé du PEA-PME fait obstacle à l’application de l’abattement pour durée de détention et entraîne l’application d’un taux forfaitaire de 19 %. Le prélèvement sera de 19

Lorsque le redevable a des revenus importants et pratique un retrait anticipé, le nouveau régime entraine un allègement significatif

Cas n° 2 : cession d’une obligation détenue depuis 9 ans créant une plus-value de 100

L’abattement pour durée de détention ne s’applique pas

Le prélèvement est de 45 dans les mêmes conditions

Exonération d’IR

En cas de durée de détention supérieure à 8 ans, l’avantage devient très significatif

Cas n° 3 : l’obligation génère un revenu de 20

Le revenu est barémisé ; si le redevable est au taux marginal, le prélèvement est de 9

Si le revenu est capitalisé dans le PEA-PME, il est exonéré d’IR En cas de retrait anticipé, les taux forfaitaires de 22,5 ou 19 % sont applicables

Le redevable est incité à conserver son revenu obligataire sous forme d’épargne financière

Cas n° 4 : le redevable est détenteur d’une obligation depuis 10 ans ; il décide de la loger dans un PEA-PME en 2016. Il opère une cession en 2017 créant une plus-value de 100

Au taux marginal, le prélèvement est de 45

Le retrait anticipé du PEA-PME en 2017 entraîne l’application du taux forfaitaire de 22,5 % et fait obstacle à l’application de l’abattement pour durée de détention. Le prélèvement est de 22,5

 

IR : impôt sur le revenu.

*

* *

La commission adopte l’article 14 sans modification.

*

* *

Après l’article 14

L’amendement CF 16 de M. Olivier Carré est retiré.

*

* *

Article additionnel après l’article 14
Élargissement du PEA-PME aux bons de souscription d’action

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 15 de M. Olivier Carré et CF 105 de Mme Bernadette Laclais.

M. Olivier Carré. Mon amendement vise à élargir le type de titres éligibles au PEA-PME aux droits ou bons de souscriptions d’action, ainsi qu’aux droits préférentiels de souscription.

Mme Bernadette Laclais. Le mien est semblable, mais porte sur les seuls bons de souscriptions d’action. Il s’appuie sur une préconisation du rapport Carré-Caresche.

Mme la Rapporteure générale. Avis de sagesse sur l’amendement CF 105 et avis défavorable à l’amendement CF 15, qui englobe les droits de souscription d’action.

M. Olivier Carré. Je souligne que ces bons sont déjà éligibles au PEA lui-même. Si l’on ne sait y souscrire à l’intérieur d’un PEA-PME, il me semble qu’il y a un problème. Les droits de souscription ne durent que le temps d’une émission, tandis que les bons sont limités dans le temps, même s’il peut s’agir d’un temps long. Il s’agit d’un problème très technique.

M. Charles de Courson. Ne pourrait-on ajouter la mention des droits de souscription à l’amendement CF 105 ? Quant aux droits préférentiels de souscription, ils ne seraient pas mentionnés, car ils peuvent faire l’objet d’un marché. Ils ne sont pas cités dans la version initiale de l’amendement CF 105.

M. Olivier Carré. Oui, contrairement à l’administration fiscale qui a une interprétation restrictive de la notion de droits préférentiels, ayons une vision large de la souscription.

Je veux bien retirer mon amendement pour que nous puissions en discuter en séance.

L’amendement CF 15 est retiré.

La commission adopte l’amendement CF 105 (amendement 320).

*

* *

Article 15
Extension de l’objet social des organismes de placement collectif immobilier
à la location meublée – Conséquences fiscales

Cet article tire les conséquences fiscales de l’article 139 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (142).

Issu d’un amendement du rapporteur thématique M. Christophe Castaner adopté à l’Assemblée nationale, il vise à répondre à une demande forte des professionnels de l’immobilier en prévoyant que les organismes de placement collectif immobilier (OPCI) peuvent, à titre accessoire, acquérir des meubles ou des biens d’équipement affectés aux immeubles dont ils assurent la location ; indirectement, cet article leur permet de pratiquer les locations meublées et non plus seulement les locations nues.

Cette extension permet de répondre à une demande importante de financement des locations meublées destinées principalement à des résidences pour étudiants ou séniors. Elle devrait également permettre un meilleur financement de l’immobilier loué meublé dans le secteur du tourisme.

Cette extension de compétence impose toutefois un aménagement des règles fiscales applicables à certains OPCI – ceux qui sont constitués sous la forme de fonds – afin de garantir que le régime fiscal applicable sera homogène selon que le redevable réalise son investissement en location meublée en direct ou par le biais d’un tel fonds.

En effet, lorsqu’il effectue une location meublée en direct à titre professionnel ou non professionnel, un redevable est imposé dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

L’objet du présent article est, en résumé, de prévoir que ce régime pourra s’appliquer de la même manière au porteur de parts de ces fonds. Cette transparence fiscale permettra à l’investisseur d’effectuer son choix sans biais fiscal. Rappelons, toutefois, que l’investissement via un fonds régulé par l’Autorité des marchés financiers (AMF) présente, pour les épargnants, un degré de sécurité supérieur à un investissement direct.

I. L’ÉTAT DU DROIT

Dans l’ensemble des placements collectifs soumis à la régulation de l’AMF, les OPCI sont rattachés à la catégorie des fonds d’investissement dits « alternatifs » (FIA) distincte de celle des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM).

Cette classification résulte en grande partie du droit européen, qui opère cette même distinction avec la directive dite « OPCVM IV » (143) et la directive « AIFM » (144).

LES DIFFÉRENTS PLACEMENTS COLLECTIFS RÉGULÉS PAR L’AMF

Organismes de placement collectif, dits « OPC »

« Autres FIA »

« Autres placements collectifs »

OPCVM

FIA
(par nature)

Véhicules d’investissement qui, bien que FIA, ne sont pas désignés par le code monétaire et financier

Placements collectifs qui ne sont ni des OPCVM ni des FIA.

Véhicules d’investissement relevant de la directive 2009/65/CE (directive OPCVM IV).

Véhicules dont la liste est fixée par le code monétaire et financier : fonds de capital-investissement, fonds d’épargne salariale, OPCI, organismes de titrisation, etc.

Source : AMF.

A. LE RÉGIME JURIDIQUE DES OPCI

En droit interne, le régime juridique des OPCI est établi par un paragraphe spécifique du code monétaire et financier.

1. Les OPCI peuvent être constitués sous deux formes juridiques

Les principes qui régissent les OPCI sont les suivants :

– l’objet des OPCI ne peut être que l’investissement dans des immeubles destinés à la location ou qu’ils font construire exclusivement en vue de leur location, qu’ils détiennent directement ou indirectement, y compris en l’état futur d’achèvement.

Ils peuvent également effectuer toutes les opérations nécessaires à leur usage, à leur revente ou la réalisation de travaux.

La constitution, la transformation ou la liquidation de ces organismes sont soumises à l’agrément de l’AMF ; le dossier d’agrément doit définir la politique d’investissement de l’organisme et ses choix de financement, notamment par le biais de l’endettement ;

– les OPCI sont constitués soit sous la forme de sociétés soit sous la forme de fonds. Conformément à l’article L. 214-33 de ce même code, on parle alors de sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable (SPPICAV) ou de fonds de placement immobilier (FPI).

La SPPICAV est une société, dotée de la personnalité morale, obligatoirement constituée sous la forme d’une société anonyme (SA) ou d’une société par actions simplifiée (SAS).

A contrario, l’article L. 214-71 de ce code prévoit que le FPI n’a pas la personnalité morale et qu’il constitue une copropriété d’actifs immobiliers, d’instruments financiers et d’autres actifs dont les parts sont émises et rachetées à la demande des porteurs à leur valeur liquidative. Un tel fonds ne peut être constitué que par une société de gestion de portefeuille régulièrement déclarée, qui établit le règlement du fonds et le représente à l’égard des tiers.

– les OPCI sont en outre soumis à une obligation de distribution de leur résultat variable suivant leur forme juridique.

LES OBLIGATIONS DE DISTRIBUTION DES OPCI

(en pourcentage du résultat)

Fonds

Revenus locatifs

Plus-values de cessions
d’actifs immobiliers

SPPICAV

85

50

FPI

85

85

Source : articles L. 214-69 et L. 214-81 du code monétaire et financier.

2. L’actif des OPCI est un mélange d’actifs immobiliers, d’actifs mobiliers et de liquidités

L’actif d’un OPCI, défini par l’article L. 214-37 du code monétaire et financier, doit être constitué à hauteur de 60 % d’actifs immobiliers et à hauteur de 5 % de dépôts et instruments financiers liquides ou d’autres liquidités. Le reste du capital peut donc être librement investi en titres immobiliers ou en titres mobiliers.

LA COMPOSITION DE L’ACTIF DES OPCI

Source : Association française de la gestion financière.

Conformément à l’article L. 214-39 du même code, les OPCI peuvent en outre contracter des emprunts dans la limite de 40 % de la seule valeur des actifs immobiliers. Ils peuvent également procéder à des emprunts d’espèces dans la limite de 10 % de leurs actifs non immobiliers.

Compte tenu de la composition très particulière de l’actif d’un OPCI, l’article L. 214-51 précise la manière dont doit être calculé le résultat net d’un tel organisme. Ce résultat net est égal à la somme :

– des produits des actifs immobiliers ;

– des produits divers générés par les autres actifs diminués du montant des frais et charges correspondant ;

– des autres produits qui peuvent être rattachés aux actifs mentionnés ci-dessus.

3. L’extension de la compétence des OPCI prévue par la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques

L’article 139 de la loi du 6 août 2015 précitée prévoit qu’à « titre accessoire, les organismes de placement collectif immobilier peuvent acquérir directement ou indirectement, en vue de leur location, des meubles meublants, des biens d’équipement ou tous biens meubles affectés aux immeubles détenus nécessaires à leur fonctionnement, à leur usage ou leur exploitation par un tiers ».

Selon les informations transmises par l’Association française des sociétés de placement immobilier (ASPIM), cette extension permet de faciliter certains investissements dans la location meublée.

Si cette extension répond à une demande formulée par le réseau Alliance 46.2, qui regroupe une vingtaine d’entreprises représentant l’essentiel du marché du tourisme, elle permettra surtout d’améliorer les modalités de financement des résidences meublées louées à des étudiants ou des personnes âgées.

B. LE RÉGIME FISCAL DES OPCI

1. Plusieurs catégories de revenus et de plus-values suivant la nature
de l’actif

Le traitement fiscal des revenus et plus-values d’OPCI varie en fonction de trois éléments :

– la nature du détenteur des parts de ces organismes, l’imposition d’un particulier étant différente de celle d’une entreprise soumise à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu ;

– la forme juridique de l’OPCI, qui détermine une imposition relativement classique s’agissant des SPPICAV mais complexe s’agissant des FPI ;

– la nature de l’actif (immobilier ou mobilier) générant le revenu ou la plus-value qui détermine, s’agissant des FPI, l’application de régimes différents.

Il en résulte plusieurs catégories de revenus et de plus-values dont le traitement fiscal est résumé ci-dessous.

LES RÉGIMES JURIDIQUES ET FISCAUX DE LA SPPICAV ET DU FPI

Instrument

SPPICAV

FPI

Forme juridique

Société (SA ou SAS) à capital variable, sur le modèle des SICAV

Personnalité morale

Fonds, qui représente juridiquement une copropriété d’actifs

Pas de personnalité morale

Imposition de l’OPCI

Exonération d’IS (imposition des associés)

Hors champ de l’IS (imposition des porteurs de parts)

Impôt sur les revenus distribués

Pas de revenus locatifs pour détenteurs de parts de SPPICAV.

Ensemble des revenus distribués traité comme des revenus de capitaux mobiliers :

– Barémisation sans abattement proportionnel de 40 %

Imposition dans la catégorie des revenus fonciers pour les produits des actifs immobiliers du FPI :

– Option possible pour le régime « micro-foncier »

– À défaut, barémisation et imputation des moins-values sur le revenu global sous certaines conditions

Imposition dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers pour les produits des autres actifs du FPI :

– Régime des revenus de capitaux mobiliers (barémisation sans abattement proportionnel de 40 %)

Impôt sur les plus-values de cession

Fiscalité classique des cessions de valeurs mobilières :

– Barémisation

– Abattement pour durée de détention des plus-values mobilières (PVM) (50 % entre deux et huit ans, 65 % au-delà)

Cession d’actifs immobiliers soumise au régime des plus-values immobilières :

– Imposition sur le revenu à 19 %

– Abattement pour durée de détention sur 22 ans

Cession d’autres éléments d’actifs est soumise au régime des PVM :

– Barémisation

– Abattement pour durée de détention des PVM (50 % entre deux et huit ans, 65 % au-delà)

2. Le régime fiscal des FPI est adapté pour les locations nues

Il ressort du tableau ci-dessus que la situation la plus simple est celle du détenteur d’une action de SPPICAV : quelle que soit la nature de l’actif générant le revenu ou la plus-value, le redevable est imposé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ou des plus-values mobilières. En outre, compte tenu de l’extension de la compétence des OPCI prévue par la loi du 6 août 2015 précitée, ces régimes trouveront également à s’appliquer de la même manière en cas de location meublée.

S’agissant en revanche du détenteur d’une part de FPI, les revenus et plus-values issus de locations nues sont rattachés aux produits issus du patrimoine immobilier du fonds.

À ce titre, le revenu procuré par la détention de parts de FPI est actuellement fiscalisé comme un revenu foncier.

Le redevable peut opter pour l’imposition selon le régime dit « micro-foncier » lorsque le revenu brut foncier annuel ne dépasse pas 15 000 euros. Un abattement forfaitaire de 30 % représentatif des charges est opéré avant l’application à ces revenus du barème progressif de l’impôt sur le revenu (« barémisation »).

Au-delà de cette limite ou lorsque le redevable décide de ne pas opter pour le régime « micro-foncier », le régime réel d’imposition entraîne l’imposition de ces revenus au barème de l’impôt sur le revenu après imputation des charges déductibles. Les éventuels déficits fonciers sont imputables sur le revenu global sous certaines conditions et dans la limite de 10 700 euros.

En outre, les plus-values de cessions de parts de FPI qui peuvent être rattachées à son patrimoine immobilier entrent, pour l’imposition du détenteur de ces parts, dans la catégorie des plus-values immobilières.

Le taux applicable au titre de l’impôt sur le revenu est un taux proportionnel de 19 % ; l’abattement pour durée de détention est étalé sur vingt-deux années :

– 6 % pour chaque année entre la cinquième et la vingt-et-unième année ;

– 4 % au titre de la vingt-deuxième année.

Il ressort de ce dispositif fiscal que le régime juridique du FPI, tel qu’il figure actuellement dans le code général des impôts (CGI), est inadapté pour traiter fiscalement les revenus et les plus-values issus de locations meublées qui bénéficient, lorsqu’elles ne sont pas réalisées par le biais d’un fonds, du régime fiscal plus avantageux de la location meublée.

C. LE RÉGIME DE LA LOCATION MEUBLÉE

Dans l’état du droit, les produits issus de locations meublées, qu’elles soient exercées à titre professionnel ou non professionnel, sont imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux selon deux régimes distincts.

1. La location meublée non professionnelle

a. Les règles d’imputation des déficits

Le 1° ter du I de l’article 156 du CGI prévoit en premier lieu que les déficits provenant de l’activité de location meublée exercée à titre non professionnel ne peuvent s’imputer sur le revenu global.

Ces déficits non professionnels s’imputent exclusivement sur les revenus provenant d’une telle activité au cours de celles des dix années suivantes pendant lesquelles l’activité n’est pas exercée à titre professionnel. Ainsi, un déficit subi au cours d’une année où l’activité a été exercée à titre non professionnel est uniquement imputable sur des bénéfices générés par une activité de location meublée exercée à titre non professionnel.

Lorsque le contribuable, ultérieurement, exerce son activité de location meublée à titre professionnel, les déficits qu’il a accumulés durant les années où il exerçait son activité à titre non professionnel ne peuvent être déduits ni de son revenu global ni des bénéfices qu’il générerait par son activité de location meublée exercée à titre professionnel.

b. Le régime des plus-values

Les plus-values réalisées lors de la cession de locaux destinés à être loués meublés et faisant l’objet d’une location directe ou indirecte à titre non professionnel sont soumises au régime des plus-values immobilières. Elles ne relèvent donc pas du régime des plus-values professionnelles (BIC).

2. La location meublée exercée à titre professionnel

a. Les règles d’imputation des déficits

Les déficits retirés de l’activité de location meublée exercée à titre professionnel sont imputables sur le revenu global du contribuable sans limitation de montant.

b. Le régime des plus-values

Les loueurs en meublé professionnels sont soumis au régime des plus-values professionnelles (BIC) sur la cession de l’immeuble si celui-ci est inscrit à l’actif de leur exploitation.

Les plus-values sont soumises au régime des plus ou moins-values à long terme, prévu par l’article 39 duodecies du CGI.

Conformément à ce régime, les plus-values liées à la cession d’éléments d’actifs détenus depuis plus de deux ans font l’objet d’une imposition distincte au taux de 16 %.

Les modalités d’imputation des plus et moins-values de long terme sont en outre encadrées par la loi :

– elles ne peuvent faire l’objet que d’une compensation par exercice, cette opération consistant à faire la somme algébrique du montant total des plus-values à long terme réalisées au cours de l’exercice considéré et du montant total des moins-values à long terme de même nature subies pendant le même exercice ;

– à l’issue de cette compensation, un éventuel montant net de plus-values à long terme est affecté à la compensation du déficit d’exploitation de l’exercice ou des moins-values à long terme subies au cours des dix exercices antérieurs.

En outre, ces plus-values sont susceptibles de bénéficier du régime d’exonération défini à l’article 151 septies du CGI.

Ce régime, qui n’est ouvert qu’aux contribuables exerçant leur activité depuis au moins cinq ans, fait l’objet d’une exonération à condition que la plus-value ne dépasse pas 90 000 euros. Lorsque la plus-value est comprise entre 90 000 et 126 000 euros, une exonération partielle est pratiquée.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LES MESURES DU PRÉSENT ARTICLE

Le présent article vise à transposer, pour les porteurs de part de FPI, le régime de la location meublée bénéficiant du régime des BIC, que l’activité soit réalisée à titre professionnel ou non professionnel.

a. La prise en compte des revenus issus des locations meublées gérées par un FPI dans la catégorie des revenus soumis au régime des BIC

Les alinéas 1 et 2 modifient l’article 14 A du CGI, qui dispose que les revenus distribués par un FPI au titre de ses seuls actifs immobiliers sont compris dans la catégorie des revenus fonciers.

Ces alinéas précisent que cette qualification ne s’appliquera pas à la fraction des revenus afférents aux loyers issus de biens meublés.

En conséquence, les alinéas 3 et 4 prévoient l’insertion d’un article 35 A dans le CGI afin que ces revenus soient pris en compte dans la catégorie des BIC.

b. L’application du régime des plus et moins-values de long terme du régime des BIC

Les alinéas 5 et 6 du présent article prévoient que le régime des plus et moins-values de long terme, aujourd’hui applicable dans le cadre du régime des BIC, sera également applicable aux cessions de parts d’un FPI, à condition que l’actif global du fonds soit, au moment de la cession des parts, majoritairement constitué par des immeubles meublés en vue de leur location.

La présente rédaction précise que ces meubles doivent être strictement affectés à ces immeubles et nécessaires à leur fonctionnement.

Conformément à ce qui a été exposé précédemment, cette rédaction précise que le régime des plus ou moins-values de long terme ne sera applicable, pour la cession de telles parts, qu’aux porteurs exerçant la location meublée à titre professionnel.

c. L’ajustement de l’application du régime des plus-values immobilières aux cessions de parts de FPI pratiquement la location meublée

Dans l’état du droit, l’article 239 nonies du CGI prévoit que la cession d’actifs immobiliers d’un FPI est soumise au régime des plus-values immobilières.

En l’état, cette rédaction fait obstacle à ce que les plus ou moins-values d’actifs immobiliers en location meublée soient soumises au régime des plus ou moins-values du régime des BIC.

Les alinéas 12 et 15 ajustent cette rédaction, afin de préciser que le régime des PVI ne s’appliquera en tout état de cause qu’à la cession d’immeubles en location nue pour les porteurs de parts non professionnels.

Conformément à l’alinéa 15, les porteurs de parts professionnels seront ainsi soumis au régime des plus ou moins-values du régime des BIC, selon les règles spécifiques mentionnées précédemment.

B. LES EFFETS PRINCIPAUX DE L’ARTICLE

Cet article tend à assurer une certaine neutralité selon que la location meublée est pratiquée en direct ou par le biais d’un FPI. Cette neutralité constitue, en elle-même, une incitation des investisseurs à avoir recours à ce type d’investissements.

Selon l’administration, la rédaction actuelle du CGI offrait probablement la souplesse nécessaire pour assurer cette neutralité, au prix du développement d’une doctrine qui n’est pas de nature à assurer ni la transparence du droit applicable ni, d’une certaine manière, sa solidité.

À cet égard, le présent article, tirant les conséquences de l’élargissement des compétences des OPCI, clarifie le droit applicable à la fiscalisation des produits issus de locations meublées pratiquées par un FPI.

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La commission adopte l’article 15 sans modification.

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Article 16
Mise en conformité du régime des sociétés mères et filiales

Cet article modifie le régime des sociétés mères et filiales pour le mettre en conformité avec le droit européen et donner suite à deux récentes décisions du Conseil constitutionnel. Il introduit six modifications :

– extension du régime aux titres détenus en nue-propriété ;

– extension de l’exonération de retenue à la source aux dividendes versés par une société française à une société dont le siège de direction effective est situé dans l’Espace économique européen ;

– abaissement à 5 % du taux de détention du capital requis pour l’application de l’exonération de retenue à la source prévue à l’article 119 ter du code général des impôts (CGI) lorsque la société mère européenne est privée de la possibilité d’imputer localement la retenue à la source ;

– transposition de la nouvelle clause anti-abus prévue par la directive (UE) 2015/121 du Conseil du 27 janvier 2015 (145) ;

– rétablissement de plusieurs exclusions particulières relatives à des sociétés distributrices bénéficiant d’une exonération d’impôt sur les sociétés après que le Conseil constitutionnel a déclaré non conformes à la Constitution, sur le fondement de l’incompétence négative, des dispositions de l’article 72 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 (146) qui substituaient à ces exclusions particulières une exclusion générale de l’exonération des dividendes prélevés sur des bénéfices non soumis à l’impôt sur les sociétés ;

– introduction d’une clause de sauvegarde permettant de maintenir l’exonération des dividendes provenant d’une société située dans un État ou territoire non coopératif (ETNC) lorsque la preuve qu’il n’y a pas de volonté délibérée de fraude fiscale est apportée.

L’impact de ces modifications sur le coût du régime des sociétés mères et filiales n’a pu être évalué. Pour mémoire, ce régime spécial, considéré comme une modalité particulière du calcul de l’impôt, et non comme une dépense fiscale, concernait 43 700 entreprises en 2014 et représente un coût d’environ 23 milliards d’euros par an.

I. L’ÉTAT DU DROIT

A. UN RÉGIME ANCIEN CRÉÉ POUR ÉVITER LA DOUBLE IMPOSITION DES PRODUITS DISTRIBUÉS PAR DES FILIALES

Créé en 1920 pour éviter la double imposition des produits distribués par des filiales, le régime des sociétés mères et filiales est défini à l’article 216 du CGI. Il exonère d’impôt sur les sociétés les produits nets de participation. En effet, les dividendes constituent le résultat de la filiale après impôt. S’ils étaient imposés chez la mère, les bénéfices de la filiale feraient l’objet d’une double imposition. Toutefois, est réintégrée au résultat imposable une quote-part pour frais et charges de 5 % des dividendes bruts.

Ce régime ne doit pas être confondu avec le régime de l’intégration fiscale.

Régime mère-fille et régime de l’intégration fiscale

Le régime mère-fille, prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts, permet d’exonérer la société mère du paiement de l’impôt sur les sociétés sur les dividendes perçus par ses filiales. Une quote-part, fixée à 5 % des dividendes remontés, est seulement réintégrée au résultat imposable.

Le régime de l’intégration fiscale, prévu aux articles 223 A et suivants du même code, est une modalité d’imposition permettant à une société tête de groupe de se constituer seule redevable de l’impôt sur les sociétés pour l’ensemble du groupe. Ainsi, l’ensemble des bénéfices et des déficits fiscaux de la mère et de ses filiales sont consolidés et viennent se compenser entre eux. À cette fin, la société tête de groupe doit détenir, directement ou indirectement, au moins 95 % des sociétés filles pour qu’elles puissent être intégrées.

Les conditions pour bénéficier de ce régime facultatif sont fixées par l’article 145 du CGI. La société mère doit détenir 5 % des titres d’une filiale depuis au moins deux ans. En cas de non-respect du délai de conservation, la société mère est tenue de verser au Trésor une somme égale au montant de l’impôt dont elle a été exonérée indûment, majoré de l’intérêt de retard.

Plusieurs exceptions sont prévues afin d’éviter les effets d’aubaine, la double non-imposition ou lutter contre l’évasion fiscale. Sont exclus à cette fin :

– les produits des titres d’une société dans la proportion où les bénéfices distribués sont déductibles du résultat imposable ;

– les produits des titres auxquels ne sont attachés aucun droit de vote, sauf si l’entreprise investisseuse détient déjà 5 % du capital et des droits de vote de la société filiale ;

– les produits et titres des sociétés situées dans des États ou territoires non coopératifs (ETNC), au sens de l’article 238-0-A.

En application de l’article 119 ter du CGI, pour garantir que soient traitées de manière identique les sociétés mères (françaises et non françaises) détenant des filiales françaises, les sociétés mères établies dans l’Union européenne et qui ne bénéficient pas d’un régime équivalent au régime mère-fille dans le pays où elles sont établies, bénéficient d’une exonération de la retenue à la source de 30 %, prévue à l’article 119 bis. Cette dernière concerne en principe toutes les sociétés étrangères dont les profits réalisés en France sont réputés distribués à des associés n’ayant pas leur domicile fiscal ou leur siège social en France, sous réserve de l’application des conventions internationales tendant à éviter les doubles impositions.

Le régime des sociétés mères et filiales fait régulièrement l’objet d’adaptations pour répondre aux besoins des entreprises. Ainsi, un amendement de notre collègue Dominique Lefebvre a été adopté en première lecture du second projet de loi de finances rectificative pour 2014, avec l’avis favorable du Gouvernement, pour faire en sorte que l’apport de titres dans un patrimoine d’affectation d’une fiducie – qui permet un transfert temporaire d’actifs aux fins de sûreté – soit neutre d’un point de vue fiscal au regard du régime mère-fille et du régime de l’intégration fiscale. L’enjeu était d’éviter que le recours à la fiducie-sûreté par une entreprise en difficulté désireuse de trouver des financements ne dégrade davantage sa situation, du fait de la perte des avantages fiscaux afférente au transfert des titres de ses filiales au fiduciaire.

B. DES ÉVOLUTIONS RENDUES NÉCESSAIRES PAR L’INTÉGRATION EUROPÉENNE

D’autres évolutions résultent de l’adoption de normes européennes.

Des efforts d’harmonisation pour faciliter le fonctionnement du marché intérieur et lutter contre la fraude et l’évasion fiscale

Depuis 1990, l’Union européenne travaille à la mise en place de règles fiscales neutres au regard de la concurrence en ce qui concerne les dividendes et bénéfices distribués par des filiales à leur société mère. Il s’agit de mettre en place un régime commun destiné à faciliter les regroupements de sociétés à l’échelle de l’Union européenne, en vue d’assurer le bon fonctionnement du marché intérieur.

Une première directive du Conseil de l’Union européenne du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et aux filiales d’États membres différents (147) a eu pour but de supprimer les obstacles fiscaux au regroupement de sociétés dans l’Union en supprimant les retenues à la source sur les paiements des dividendes entre les sociétés associées d’États membres différents et en prévenant la double imposition des sociétés mères sur les bénéfices de leurs filiales. Elle a été révisée à plusieurs reprises en 2003, 2006, 2011 et 2014 pour apporter des précisions sur les types de sociétés concernés, assouplir les conditions d’exonération de la retenue à la source sur les dividendes par la diminution du seuil d’exonération (passé de 25 % à 10 % aujourd’hui), compléter les dispositions visant à éviter les doubles non-impositions et mettre fin à des abus ou des pratiques d’optimisation fiscale.

Sous l’influence des travaux de l’OCDE, les dernières révisions de la directive ont renforcé les mesures de lutte contre l’optimisation fiscale agressive au niveau européen et international.

Le 8 juillet 2014, le Conseil de l’Union européenne a adopté des dispositions empêchant les groupes d’entreprises de s’appuyer sur des dispositifs de prêts « hybrides » pour bénéficier de la double non-imposition au titre de la directive (148).

Les instruments « hybrides » ont en effet été considérés par l’OCDE comme l’un des principaux enjeux du projet « BEPS » (Base Erosion and Profit Shifting) visant à lutter contre l’érosion des bases fiscales et le transfert de bénéfices. Les prêts « hybrides » permettent par exemple aux entreprises, lorsqu’elles financent une filiale à l’étranger, de souscrire de la dette convertible en actions émise par cette dernière. Selon le pays où elle se trouve, la filiale pourra rémunérer la société mère en versant des intérêts, qu’elle pourra déduire fiscalement, tandis que la société mère touchera des dividendes, partiellement exonérés. Il en résulte une double non-imposition. L’action 2 du projet « BEPS », rendue publique le 16 septembre 2014, vise précisément à « assurer la cohérence internationale de la fiscalité des entreprises, grâce à de nouvelles dispositions conventionnelles types destinées à neutraliser les effets des montages hybrides ».

Pour lutter contre ces situations de double non-imposition, la directive du Conseil du 8 juillet 2014 précitée a donc interdit aux États membres d’exonérer d’impôt sur les sociétés les bénéfices reçus sous forme de dividendes par la mère lorsque ceux-ci sont déductibles du résultat imposable de la filiale.

Un autre accord politique est intervenu en décembre 2014 sur une clause anti-abus commune, donnant lieu à la publication d’une nouvelle directive le 27 janvier 2015 (149) pour lutter contre des montages ou séries de montages « non authentiques », qui ne sont pas mis en place « pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique ». La clause se présente sous la forme d’une règle minimale, ce qui signifie que les États membres pourront appliquer des règles plus strictes au niveau national, pour autant qu’ils respectent les exigences minimales prévues par l’Union européenne.

Les États membres ont jusqu’au 31 décembre 2015 pour transposer ces deux dispositions.

Une tentative de transposition de la directive du 8 juillet 2014 destinée à éviter la double non-imposition déclarée contraire à la Constitution

Un amendement de notre collègue Roger-Gérard Schwartzenberg a été adopté en première lecture du second projet de loi de finances rectificative pour 2014 avec l’avis favorable du Gouvernement, pour éviter des situations de double non-imposition liées aux montages dits « hybrides ».

L’article 145 du CGI a ainsi été modifié pour exclure du bénéfice du régime mère-fille :

– d’une part, les produits des titres prélevés sur les bénéfices d’une société afférents à une activité non soumise à l’impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent ;

– d’autre part, les produits des titres d’une société dans la proportion où les bénéfices ainsi distribués sont déductibles du résultat imposable de cette société.

Cette dernière exclusion visait à transposer la directive du 8 juillet 2014.

La première, en revanche, introduite au a) du 6 de l’article 145 du CGI dans un souci de simplification, a été déclarée contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2014-708 DC du 29 décembre 2014, au motif qu’elle était insuffisamment précise.

Le Conseil a soulevé d’office le grief tiré de l’incompétence négative du législateur et considéré que « la disposition contestée subordonne le bénéfice du régime des sociétés mères à la condition que les bénéfices sur lesquels sont prélevés les produits des titres perçus par la société mère soient afférents à une activité soumise à l’impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent ; qu’en faisant référence au fait que les bénéfices doivent être “afférents à une activité soumise à l’impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent”, le législateur n’a pas permis d’apprécier les activités soumises à l’impôt au sens de cette disposition ; qu’en particulier, celle-ci ne permet pas de savoir si cette appréciation s’effectue pour les activités de la filiale, y compris lorsque cette dernière a été exonérée de l’impôt en application du régime fiscal des sociétés mères, ou si elle s’effectue aussi pour les activités des filiales de cette filiale ; qu’eu égard à l’imprécision qui résulte de cette indétermination, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence » (cons. 31).

La disposition censurée avait remplacé plusieurs exclusions particulières relatives aux produits d’actions ou dividendes distribués par des sociétés bénéficiant d’une exonération d’impôt sur les sociétés telles que :

– les sociétés d’investissement ;

– les sociétés de développement régional ;

– les sociétés immobilières pour le commerce et l’industrie visés au dixième alinéa du 3° quater de l’article 208 ;

– les sociétés agréées pour le financement des télécommunications visées à l’article 1er de la loi n° 69-1160 du 24 décembre 1969 de finances rectificative pour 1969 ;

– les sociétés qui redistribuent les dividendes d’une société immobilière pour le commerce et l’industrie en application du huitième alinéa du 3° quinquies de l’article 208 ;

– les sociétés de capital-risque (SCR) exonérées en application du 3° septies de l’article 208 ;

– les sociétés d’investissements immobiliers cotées (SIIC) et leurs filiales ;

– les sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable (SPPICAV) mentionnées au 3° nonies de l’article 208.

Ces exclusions conservant toute leur pertinence, il convient de les restaurer.

II. LE DROIT PROPOSÉ

A. LES OBJECTIFS POURSUIVIS

La réforme du régime des sociétés mères et des filiales présentée par le Gouvernement dans le présent projet de loi de finances rectificative se présente comme une réforme technique. Il s’agit de transposer des dispositions prévues par les directives européennes précitées, de légaliser des solutions dégagées par la doctrine administrative et de tirer les conséquences de deux décisions du Conseil constitutionnel.

Les changements proposés sont au nombre de six.

Quatre visent à mettre le droit français en conformité avec le droit européen.

● Extension du régime aux titres détenus en nue-propriété, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), alors Cour de justice des Communautés européennes (CJCE), ayant eu l’occasion de préciser que si la notion de « participation dans le capital » prévue par la directive excluait les participations détenues en usufruit du régime des sociétés mères et filiales, en revanche une participation détenue en nue-propriété « remplit de façon évidente le critère d’une participation au capital au sens de l’article 3 de la directive » (150).

● Extension de l’exonération de retenue à la source aux dividendes versés par une société française à une société dont le siège de direction effective est situé dans l’Espace économique européen. En application de la directive 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011 (151), il convient de remplacer les références à la Communauté européenne, disparue lors de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne le 1er décembre 2009 au profit de l’Union européenne, par des références à l’Espace économique européen (EEE), c’est-à-dire l’Union européenne et de trois des membres de l’Association européenne de libre-échange (AELE) : l’Islande, la Norvège et le Liechtenstein (152).

● Abaissement à 5 % du taux de détention du capital requis pour l’application de l’exonération de retenue à la source prévue à l’article 119 ter du CGI lorsque la société mère européenne est privée de la possibilité d’imputer localement la retenue à la source. L’exonération de retenue à la source pour les dividendes distribués à une société d’un autre État membre est possible dès lors que la société mère détient au moins 10 % des titres. Toutefois, en pratique, la doctrine administrative prévoit que, lorsqu’une société européenne bénéficie de dividendes de source française afférents à une participation au moins égale à 5 %, la restitution de la retenue à la source peut être demandée dans les conditions exposées au Bulletin officiel des finances publiques (153). Cette doctrine résulte elle-même d’un arrêt de la CJCE du 14 décembre 2006 (154).

● Transposition de la nouvelle clause anti-abus prévue par la directive du 27 janvier 2015 précitée. Les États membres doivent transposer cette clause avant le 31 décembre 2015 (voir supra).

Deux autres modifications sont imposées par des décisions récentes du Conseil constitutionnel.

● Rétablissement de plusieurs exclusions particulières relatives à des sociétés distributrices bénéficiant d’une exonération d’impôt sur les sociétés, qui fait suite à la censure de certaines dispositions de l’article 72 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 (voir supra).

● Introduction d’une clause de sauvegarde permettant de maintenir l’exonération des dividendes provenant d’une société située dans un État ou territoire non coopératif (ETNC) lorsque la preuve qu’il n’y a pas de volonté délibérée de fraude fiscale est apportée, en conséquence de la décision du Conseil constitutionnel n° 2014-437 QPC du 20 janvier 2015 ayant déclaré conforme à la Constitution l’exclusion du régime des sociétés mères et des filiales des dividendes provenant des sociétés situées dans des États ou territoires non coopératifs, dès lors que la société mère est admise à apporter la preuve que la prise de participation correspond à des opérations réelles qui n’ont ni pour objet, ni pour effet de permettre, dans un but de fraude fiscale, la localisation de bénéfices dans un tel État ou territoire.

B. LE DISPOSITIF ET LES QUESTIONS QU’IL SOULÈVE

Le I remplace d’abord les références obsolètes à la Communauté européenne par des références à l’EEE qui constitue le champ visé par la directive mère-fille et ses actes modificatifs depuis 2011.

Le A modifie le 3 de l’article 115 quinquies du CGI relatif au calcul des bénéfices réalisés en France par les sociétés étrangères pour exclure de la retenue à la source prévue à l’article 119 bis du même code les sociétés établies dans l’EEE, et non plus uniquement dans l’Union européenne.

Le B concerne l’article 119 ter relatif à l’exonération de retenue à la source pour les sociétés mères étrangères ayant des filiales françaises. L’exonération est étendue par les a), b) et d) du ainsi que par le à tous les États de l’EEE à condition qu’ils aient conclu avec la France « une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ».

Ensuite, le c) du B du I procède à trois modifications. En application de la directive 2011/96/UE précitée, les conditions d’exonération de la retenue à la source sur les dividendes par la diminution du seuil d’exonération sont triplement assouplies :

– le seuil ouvrant droit à l’exonération exprimé en pourcentage du capital de la filiale diminue, passant de 25 % à 10 % ;

– ce seuil est ramené à 5 % lorsque la société mère européenne est privée de la possibilité d’imputer localement la retenue à la source ;

– les titres pris en compte pour le calcul de ce seuil de capital ne sont plus uniquement les titres détenus en pleine propriété mais aussi ceux détenus en nue-propriété.

Le du B a vocation à transposer la clause anti-abus prévue par la directive du 27 janvier 2015 précitée à l’article 119 ter. Les dispositions de la directive ont été reprises littéralement. Est visé un montage ou une série de montages « non authentique compte tenu de l’ensemble des faits et circonstances pertinents » mis en place pour obtenir « à titre d’objectif principal ou au titre d’un des objectifs principaux, un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité de ces mêmes dispositions ». Il est précisé qu’un montage peut comprendre « plusieurs étapes ou parties ». La non-authenticité vise des montages qui ne sont « pas mis en place pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique ».

La Rapporteure générale se félicite de la volonté du Gouvernement de transposer la directive du Conseil du 27 janvier 2015 mais s’interroge sur le degré de précision de ces nouvelles dispositions. Elle rappelle notamment la déclaration de non-conformité à la Constitution dont ont fait l’objet les dispositions de l’article 100 de la loi de finances pour 2014, qui visaient à élargir la définition de l’abus de droit, en substituant à la condition que les actes des auteurs n’aient pu « être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales » la condition que ces actes aient pu avoir ce motif principal (155). Dans cette décision, le Conseil a jugé que l’acte constitutif de l’abus de droit était insuffisamment défini, de sorte qu’il conférait une importante marge d’appréciation à l’administration fiscale.

Le C modifie ensuite l’article 145 qui fixe les conditions d’accès au régime des sociétés mères et filiales.

Le étend le régime des sociétés mères et filiales aux titres détenus en nue-propriété, conformément au droit européen.

Le rétablit les exonérations particulières relatives à des sociétés distributrices bénéficiant d’une exonération d’impôt sur les sociétés.

Le c) du introduit une nouvelle clause de sauvegarde permettant à une société mère prenant des participations dans une filiale établie dans un État ou territoire non coopératif (ETNC) d’apporter la preuve que cet établissement ne résulte pas d’une volonté délibérée de fraude fiscale.

Pour mémoire, les ETNC font l’objet d’une liste mise à jour au 1er janvier de chaque année par arrêté des ministres chargés de l’économie et du budget, pris après avis du ministre des affaires étrangères. La dernière mise à jour (156) a conduit à sortir de la liste les Bermudes, les Îles Vierges britanniques et le Jersey. Sont donc inscrits sur la liste le Botswana, le sultanat de Brunei, le Guatemala, les Îles Marshall, ainsi que les îles de Montserrat, Nauru et Niue.

Cet alinéa introduit également la clause anti-abus au k) du 6 de l’article 145 qui suscite les mêmes réserves qu’au du B.

La Rapporteure générale s’interroge sur l’exhaustivité de cette liste d’exclusions particulières et sur l’opportunité de rétablir le droit antérieur, plutôt que de proposer une nouvelle rédaction de l’exclusion générale prévue initialement par l’article 72 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014.

Le II prévoit une entrée en vigueur rapide de ces nouvelles dispositions. Toutes les dispositions s’appliquent aux exercices clos à compter du 31 décembre 2015 sauf la clause anti-abus et la clause de sauvegarde qui s’appliqueront aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016.

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La commission adopte l’article 16 sans modification.

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Article additionnel après l’article 16
Déduction du bénéfice imposable des sociétés, à hauteur de 40 %, pour les frais d’acquisition d’installations et matériels en fibre optique

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 240 de Mme Karine Berger, et CF 251 et CF 252 de M. Razzy Hammadi.

Mme Karine Berger. Cet amendement a pour objet d’élargir aux investissements dans la fibre optique le bénéfice du dispositif de suramortissement en matière d’investissement robotique, mis en place par notre majorité, et qui, de l’avis général, fonctionne plutôt bien.

Pourquoi la fibre optique ? Nous faisons face au plus important déploiement d’un réseau national depuis le développement du réseau téléphonique. C’est un investissement indispensable qui fait l’objet d’un plan décennal de la part du Gouvernement, et ce mécanisme de suramortissement pourrait accélérer le déploiement du réseau de fibres optiques.

M. Razzy Hammadi. Le Gouvernement s’est exprimé en faveur de cette mesure dans Les Échos. De plus, des parlementaires de toute sensibilité ont participé à une réunion de travail ce midi, et je crois qu’un consensus s’est dégagé.

Pour la puissance publique, ce dispositif se fait une seule année et son coût est ensuite lissé sur une vingtaine d’années, sachant que le taux de retour sur PIB est d’un pour six et celui de retour sur taxes est d’un pour trois.

La commission européenne fait état d’un retard du déploiement du très haut débit en France, même si s’agissant d’une technologie très particulière, le FTTH (la fibre optique jusqu’à l’abonné), notre situation n’est pas identique à celle de la Grande-Bretagne et de l’Allemagne. Il est toutefois urgent d’avancer, dans le cadre d’un dispositif existant, pour encourager l’accélération nécessaire du déploiement du très haut débit.

Mme la Rapporteure générale. Ces trois amendements se ressemblent mais ne sont pas identiques. L’amendement CF 252 de Razzy Hammadi utilise la notion de communication électronique « en zone moyennement dense », qui n’est pas définie. Je vous propose donc de le retirer.

Entre les amendements CF 251 et CF 240, la différence réside dans la mention des réseaux « non cofinancés » à l’amendement CF 240. Peut-être faudrait-il préciser la rédaction en remplaçant cette expression par : « ne faisant pas l’objet d’une aide versée par une personne publique ».

Sous réserve de cette modification, je donnerai un avis de sagesse appuyé, de sagesse « plus ». Ce matin, nous avons voté un amendement permettant aux communes de récupérer la TVA sur les investissements qui portent sur ces questions de fibrage et de câblage, pour éviter les zones blanches dans un certain nombre de nos communes. Si l’on veut donner un coup d’accélérateur et proposer un dispositif global, cet amendement s’inscrit dans cette logique.

Seulement, il y a un coût. Il n’a pas été précisé, mais on l’évalue entre 50 et 100 millions d’euros. Je pense que cet amendement est nécessaire pour l’équipement de notre pays, mais ma responsabilité de Rapporteure générale sensible à l’impact sur les finances publiques m’incite à donner cet avis de sagesse « plus », pourvu que la modification que j’ai mentionnée soit effectuée.

Mme Karine Berger. Je retire l’amendement CF 240 et me rallie au CF 251 ainsi rectifié.

L’amendement CF 240 est retiré.

M. Charles de Courson. Cette mesure porte en fait sur l’investissement dans les zones d’appel à manifestation d’intention d’investissement (AMII). Reste la question de la situation hors de ces zones.

M. Patrice Martin-Lalande. Les zones AMII, qui sont maintenant les zones d’intention d’investissement privé (ZIIP), sont celles dans laquelle des investisseurs privés ont manifesté leur intention d’investir. Ce sont les zones urbaines les plus denses. Mais l’investisseur privé peut également aller dans les autres zones où, par définition, il y a moins de clientèle. Il est d’autant plus salutaire d’encourager l’investissement privé dans ces zones et il ne faut donc pas limiter la mesure aux anciennes zones AMII.

M. Razzy Hammadi. Je vous invite à voter cet amendement, qui va dans le bon sens. Nous pourrons ensuite travailler toutes sensibilités confondues sur les zones AMII, même si, en pratique, elles ne présentent pas, à ce jour, de problème. Les retards sont constatés hors des zones AMII.

J’accepte donc la rectification proposée par la Rapporteure générale, et je retire l’amendement CF 252.

L’amendement CF 252 est retiré.

Mme la Rapporteure générale. Bercy ne nous a fourni aucune évaluation du coût de cette mesure. Nous l’avons estimée à quelques dizaines de millions d’euros. C’est peu, mais c’est tout de même une somme, même si la mesure sera rentable à long terme.

La commission adopte l’amendement CF 251 rectifié (amendement 322).

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Article additionnel après l’article 16
Rattachement aux bénéfices agricoles de l’activité de méthanisation lorsqu’au moins 50 % des matières utilisées proviennent d’exploitations agricoles

La commission examine ensuite les amendements identiques CF 265 de la commission des affaires économiques et CF 190 de M. Paul Molac.

Mme Béatrice Santais, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. L’amendement CF 265 tend à appliquer le régime fiscal des bénéfices agricoles plutôt que celui des bénéfices industriels à la valorisation des déchets agricoles, quelle que soit la forme légale sous laquelle cette activité est exercée.

La méthanisation est un processus écologique et durable qui permet de valoriser les déchets agricoles pour produire du biogaz. Elle répond vraiment à la définition d’activité agricole, et il est important d’en clarifier le régime fiscal.

M. Paul Molac. Par l’amendement CF190, il s’agit de permettre aux exploitants agricoles de s’approvisionner en biomasse dans des exploitations dépourvues de méthaniseur. Ainsi l’exploitant qui apportera du lisier à celui qui dispose d’un méthaniseur pourra récupérer le digestat en échange.

Il n’y a pas d’opération commerciale puisque l’un prête son lisier au méthaniseur, qui va produire un peu de gaz et d’électricité, et récupère ensuite du digestat. Pourtant, les services fiscaux considère qu’une telle opération constitue une transaction commerciale de type industriel.

Mme la Rapporteure générale. Aujourd’hui, on peut loger l’activité de méthanisation dans la catégorie des bénéfices agricoles pourvu qu’elle se fasse avec au moins 50 % de matière première provenant de l’exploitation. On sort du champ des bénéfices agricoles si la part de lisier provenant d’autres exploitations dépasse 50 % de l’activité du méthaniseur, et l’on perd alors les avantages liés au régime des bénéfices agricoles.

Je suis plutôt favorable à cet amendement, notamment au vu de la forte accélération de l’activité de méthanisation que l’on a constatée en Allemagne. Dans la chaîne de valeur ajoutée de l’agriculture allemande, une grande part vient de cette activité.

M. Charles de Courson. Nous n’avons pas traité ce secteur de façon correcte, en créant une discrimination entre les méthaniseurs à la ferme et les méthaniseurs collectifs, qui regroupent un ensemble d’agriculteurs. Je me tue à le dire au ministre de l’agriculture, sans être entendu.

De mémoire, l’administration fiscale ne considère pas les méthaniseurs comme des bâtiments agricoles. Elle considère même que les cuves ne sont pas des bâtiments, mais des matériels. Nous avions essayé de modifier cela, mais on nous a répondu que tout l’édifice fiscal risquait de s’effondrer – la bonne vieille technique de ceux qui ne veulent rien faire.

Je ne pense pas que l’amendement règle toutes ces questions. L’exposé sommaire de l’amendement CF265 indique que les agriculteurs qui exploitent le méthaniseur ne sont pas soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties. Ce n’est pas exact.

Mme la Rapporteure générale. L’exposé sommaire ne correspond pas parfaitement au dispositif de l’amendement. Je vous invite à vous rapporter à celui de l’amendement CF190.

M. Jean-Claude Buisine. Tous les bâtiments agricoles, en général, sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties. La question est de savoir si nous sommes dans le cadre d’une activité agricole ou d’une activité commerciale. Je ne sais pas comment il est possible de contrôler la limite de 50 % d’apports extérieurs dans un méthaniseur. L’énergie fournie par ces méthaniseurs étant revendue à des fournisseurs d’énergie, j’ai tendance à considérer qu’il s’agit plutôt d’une activité de nature commerciale qu’une activité agricole, et à en tirer les conséquences sur le plan fiscal.

M. Paul Molac. En fonction de ce que l’on met dans le méthaniseur, le pouvoir méthanogène varie grandement. En France, le choix a été fait de favoriser la méthanisation à la ferme par rapport à la méthanisation de type industriel.

Le plus simple, pour la méthanisation, est d’utiliser des graisses et du maïs. Cela offre le meilleur rendement et permet de payer rapidement son investissement. Les matières d’élevage telles que le lisier ont un pouvoir méthanogène beaucoup plus faible. Il faut alors équilibrer la ration avec des cultures intermédiaires. Or, cela nécessite des surfaces de stockage et des cuves plus importantes alors que le pouvoir méthanogène est plus faible.

Nous militons pour que ce type de méthanisation à faible rendement soit considéré comme une activité agricole, car le but est d’obtenir des digestats plus faciles à utiliser par la plante que les lisiers et laissant beaucoup moins de résidus dans les eaux. Il y a tout un aspect écologique à prendre en compte. Voilà pourquoi les deux types de méthanisation ne me paraissent pas de même nature.

Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Du point de vue juridique, l’activité agricole est définie par l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime. Sont visées « les activités correspondant à la maîtrise et à l’exploitation d’un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ». La méthanisation correspond bien à cette définition.

M. Charles de Courson. Je ne suis pas tout à fait d’accord avec Paul Molac. Le plan « mille méthaniseurs » n’a pas explicitement choisi entre les méthaniseurs à la ferme ou des méthaniseurs collectifs rassemblant dix ou quinze exploitants. Ce sont les mesures fiscales prises qui sont favorables aux méthaniseurs à la ferme, alors que l’optimum au niveau local, l’équilibrage des approvisionnements, est beaucoup mieux assuré avec des méthaniseurs collectifs. Contrairement à ce que l’on peut croire, les effluents d’élevage, notamment porcins, ont un pouvoir méthanogène très faible et variable dans le temps. Pour faire tourner le méthaniseur toute l’année, il faut donc plusieurs sources.

Il me semble que nous n’avons pas fait le bon choix et que nous sommes dans un entre-deux.

M. Paul Molac. Que Charles de Courson se rassure, nous savons avoir besoin de l’expertise des bonnes personnes. Cet amendement a été travaillé avec les méthaniseurs eux-mêmes, je ne l’ai pas rédigé seul.

La commission adopte les amendements CF 265 et CF 190 (amendement 321).

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Article additionnel après l’article 16
Assouplissement de la déduction pour aléas

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 31, CF 32 et CF 33 de M. François André et les amendements CF 83, CF 82 et CF 84 de M. Charles de Courson.

M. François André. La quinzaine d’amendements que nous allons maintenant étudier fait suite aux travaux de la mission sur la fiscalité agricole. Permettez-moi une courte intervention pour expliquer où nous en sommes, car nous tenions hier encore à Matignon une réunion d’arbitrage sur les dernières modifications envisagées sur le sujet.

Trois sujets principaux ont émergé de nos travaux.

En premier lieu, la simplification du forfait qui s’applique aux petites exploitations dont le chiffre d’affaires est inférieur à 76 300 euros. L’idée, issue des assises de la fiscalité et que notre mission a confirmé, est de substituer à ce forfait une sorte de microbénéfice agricole. Nous aurions un régime plus simple, plus équitable d’un département à l’autre et moins coûteux en frais de gestion. Même s’il y a un accord général sur ce point, nous ne présentons pas d’amendement ce soir. Je le ferai en séance, en me fondant sur les ultimes travaux du Gouvernement.

Le deuxième sujet, qui était au centre de nos travaux, porte sur l’assouplissement de la déduction pour aléa (DPA). C’est une réserve qui permet à un exploitant agricole de provisionner en charges dans ses comptes les années fastes, et de mobiliser cette épargne les années où son revenu baisse. Ce dispositif existe depuis plusieurs années en droit fiscal, mais il était tellement verrouillé qu’il n’était pas utilisé, ou l’était très peu, par les exploitants agricoles. Sur ce point, je représente des amendements que j’avais déjà déposés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016. Nous y reviendrons en séance sur la base d’un amendement que le Gouvernement présentera.

Le troisième sujet concerne l’encouragement de l’agriculture de groupe. Il s’agit d’étendre le principe de transparence des groupements agricoles d’exploitation en commun – GAEC – de trois à quatre associés, et d’y étendre les avantages fiscaux existant. Là encore, j’avais déjà proposé des amendements analogues au projet de loi de finances ; je les présente à nouveau.

Enfin, un dernier sujet ne fait pas partie des préconisations de notre rapport, même si nous en avons débattu. Il s’agit de la dotation pour investissement (DPI). Ces dernières années, la réserve destinée à encourager les exploitants agricoles à investir a été réduite, et le matériel agricole en a été exclu. Par effet d’aubaine, en effet, de nombreuses fermes renouvelaient leurs tracteurs sans que cela ne corresponde à une nécessité économique réelle. Il a été décidé de ne pas toucher à cette DPI. Toutefois, après la crise de l’élevage de l’été dernier, le Gouvernement proposera en séance un dispositif d’amortissement accéléré pour les travaux sur les bâtiments d’élevage, tels que les mises aux normes.

Concernant spécifiquement les amendements CF 31, CF 32 et CF 33, ils portent sur l’assouplissement de la déduction pour aléa. Le premier est minimaliste, le deuxième est plus large et le dernier propose un assouplissement très large de la DPA. Ces amendements sont absolument conformes à ceux que j’avais présentés lors du projet de loi de finances et que nous avions adoptés.

M. Charles de Courson. Ma proposition, qui fait l’objet de l’amendement CF 83, est de libéraliser le système de la DPA. Face à la volatilité croissante des revenus agricoles, si des agriculteurs veulent mettre de l’argent de côté pour le ressortir lorsque les choses vont mal, faisons leur confiance. Il ne s’agit que d’un différé dans le temps. Il n’y a aucune exonération en la matière, il est simplement question de permettre un lissage des revenus dans le temps.

Cet amendement va un peu plus loin que l’amendement « maximaliste » de notre collègue. S’il fallait se rallier à un amendement de la majorité, je vous inviterais à voter ce dernier, qui est le plus libéral.

Cette mesure ne coûte rien à moyen terme. Elle rapporte en phase de montée du revenu, et coûte la première et la deuxième année lorsque les revenus baissent, avant de remonter, suivant en cela les cycles agricoles. Actuellement, nous sommes plutôt en phase de déprime, donc elle coûtera, mais pas cher. Elle aura pour effet de différer dans le temps le paiement de l’impôt et surtout des cotisations sociales. C’est, en effet, sur ces dernières que l’impact est le plus fort puisque 32 % des revenus agricoles sont versés en cotisations sociales, l’impôt sur le revenu éventuel portant sur les 68 % restants. L’impact sur la Mutualité sociale agricole (MSA) est donc plus important, puisque ces amendements affectent l’assiette des cotisations de celle-ci.

Les amendements CF 84 et CF 82 sont des variantes.

M. François André. Je précise qu’autant les amendements de Charles de Courson que les miens maintiennent la limite de sept ans au terme desquels le revenu doit être réintégré.

Mme la Rapporteure générale. La DPA consiste à mettre de l’argent de côté
– 27 000 euros au maximum sur une année – pour le réinjecter l’année où l’on en a besoin, suite à un aléa climatique.

Monsieur André, vous proposez d’introduire la notion d’aléa économique, afin de récupérer l’argent en cas de chute des prix. Aujourd’hui, il est possible de réintégrer cet argent dans l’exploitation quand la valeur ajoutée baisse de 10 % par rapport à l’année n-1. Vous proposez de remplacer cet indicateur de valeur ajoutée par tout solde intermédiaire de gestion : valeur ajoutée, résultat brut d’exploitation, résultat net ou tout ce qui figure dans le compte de résultat.

Je crois savoir que le Gouvernement redoute que cette possibilité ne favorise l’optimisation. Il devrait proposer en séance de conserver la valeur ajoutée comme indicateur mais d’augmenter le pourcentage.

S’agissant de l’amendement CF 32, la prise en compte de l’aléa économique est très importante. En revanche, les indicateurs que vous proposez me semblent trop larges. J’émets donc un avis de sagesse « moins ».

Je suis plutôt favorable au CF 31.

Quant au CF 33, la référence aux difficultés économiques est très vague. Mon avis est donc défavorable.

Les amendements de Charles de Courson sont assez similaires. J’émets un avis de sagesse « moins » sur le CF 83 et un avis défavorable sur le CF 82, qui laisse une trop grande liberté, ainsi que sur le CF 84.

M. François André. Pour vous éviter de graduer vos avis de sagesse, madame la Rapporteure générale, je suis prêt à retirer les trois amendements, quitte à les reprendre une fois que nous aurons pris connaissance de l’amendement du Gouvernement qui, semble-t-il, vise à assouplir la DPA ainsi qu’à allonger la période de référence au cours de laquelle le constat de la diminution de la valeur ajoutée peut être fait.

M. Charles de Courson. Je suis prêt à faire de même. Je note toutefois que Bercy a une curieuse conception de l’économie agricole qui lui fait penser que les exploitants ont pour seule obsession l’optimisation fiscale. On s’étonne que le dispositif ne fonctionne pas alors qu’on a multiplié les contraintes à l’entrée et à la sortie !

Je propose une approche différente : faire confiance aux gens ! Si des abus sont constatés, nous modifierons le texte. Soyons empiriques !

La commission devrait choisir un des amendements pour ouvrir la discussion avec le Gouvernement.

M. le président Gilles Carrez. Il me semble, en effet, préférable que nous adoptions un amendement.

M. François André. Dans ce cas, je maintiens l’amendement CF 32.

M. Charles de Courson. Je retire les miens.

Les amendements CF 31, CF 33, CF 83, CF 82 et CF 84 sont retirés.

La commission adopte l’amendement CF 32 (amendement 325).

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Article additionnel après l’article 16
Assouplissement du régime d’établissement des revenus exceptionnels

La commission examine ensuite l’amendement CF 34 de M. François André.

M. François André. Une disposition fiscale permet aujourd’hui à un exploitant agricole d’étaler la réintégration d’un revenu exceptionnel. Celui-ci n’est pas obligé de l’imputer sur un seul exercice mais peut le lisser sur sept ans.

Cet amendement vise à introduire davantage de souplesse dans ce mécanisme en permettant à l’exploitant de réintégrer le revenu exceptionnel, sur la même durée, en fractions non égales.

Mme Véronique Louwagie. Le revenu exceptionnel est divisé par sept. Un septième est imputé sur l’année au cours de laquelle le revenu exceptionnel est constaté. Le reste est étalé sur six exercices.

Suivant l’avis favorable de la Rapporteure générale, la commission adopte l’amendement CF 34 (amendement 326).

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Après l’article 16

La commission est saisie de l’amendement CF80 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. J’espère que toutes les femmes vont voter cet amendement qui lutte contre une violence fiscale qui leur est faite et qui répare un déni de justice.

Je me suis insurgé l’année dernière contre la disposition plafonnant le revenu du conjoint d’exploitant, disposition discriminatoire à l’égard des femmes puisqu’elles représentent 95 % des conjoints. Je m’interroge d’ailleurs sur la décision que pourrait rendre le Conseil constitutionnel s’il devait se prononcer sur cette mesure, qui porte atteinte à l’égalité entre les conjoints.

Mon amendement propose de rétablir la déduction du montant effectif des salaires. L’administration fiscale prétend lutter contre les rémunérations fictives qui sont versées aux conjoints pour justicier cette violence fiscale faite aux femmes. C’est une conception tout à fait archaïque.

M. le président Gilles Carrez. Auparavant, dans le droit commun, la déductibilité des salaires des conjoints était plafonnée alors qu’elle était totale pour les adhérents aux organismes de gestion agréés. Lors de l’examen de la loi de finances pour 2006, il a été décidé, dans le cadre de la réforme de l’impôt sur le revenu, de maintenir l’avantage principal que confère l’adhésion à un organisme de gestion agréé. Pour ce faire, les revenus de ceux qui ne sont pas adhérents à ces organismes font l’objet d’une majoration fictive de 25 %. À ma grande surprise, cette disposition n’a pas été annulée par le Conseil constitutionnel.

Parallèlement à cet avantage principal, la Cour des comptes avait pointé l’existence de trois avantages accessoires parmi lesquels l’absence de plafonnement de la déductibilité du salaire du conjoint et la réduction d’impôt au titre des frais de comptabilité. En loi de finances pour 2015, le Parlement a adopté des amendements que j’avais présentés pour supprimer ces avantages annexes. Il est vrai que Charles de Courson, qui a toujours défendu la cause féminine, s’était opposé au rétablissement du plafonnement de la déductibilité du salaire du conjoint.

Mme la Rapporteure générale. Je trouve, au contraire, que l’amendement de Charles de Courson est machiste, présumant que monsieur est le chef d’entreprise et que madame est sa salariée. C’est ignorer les cas dans lesquels madame a son commerce.

M. Charles de Courson. Je n’ignore pas que dans certains cas monsieur est « prince consort ».

Mme la Rapporteure générale. Avec cette seule expression, vous me donnez raison : votre approche est biaisée.

Les entreprises visées ne relèvent pas de l’impôt sur les sociétés mais de l’impôt sur le revenu. Dans le premier cas, le chef d’entreprise déduit du chiffre d’affaires les charges – salaires, achat de matériel – pour déclarer un résultat net qui est taxé à 33,3 %. Dans le second cas, le chef d’entreprise déclare 100 – ou 125 s’il n’est pas adhérent d’un organisme de gestion agréé – et peut encore déduire à hauteur de 17 500 euros les salaires du conjoint ou de la conjointe. Si le régime de l’impôt sur le revenu ne lui convient pas, le chef d’entreprise est toujours libre de passer à l’impôt sur les sociétés. S’il le conserve, c’est qu’il y trouve un avantage.

Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie. Je partage l’appréciation de la Rapporteure générale sur le caractère sexiste de l’argumentation de Charles de Courson. En revanche, je ne rejoins pas son analyse sur le fond.

Pendant longtemps, les conjoints des commerçants, artisans ou exploitants n’ont pas été déclarés. Ils étaient dépourvus de statut. Aujourd’hui, ils ont l’obligation d’en avoir un. Lorsque l’entreprise relève de l’impôt sur les sociétés, le conjoint a le plus souvent un statut de salarié, même s’il peut être associé exploitant et déclarer ses revenus comme travailleur non salarié. En revanche, si l’entreprise relève de l’impôt sur le revenu, le conjoint peut choisir soit le statut de salarié, soit celui de collaborateur qui n’offre qu’une protection sociale minimale. Le statut le plus confortable est celui de salarié.

Je ne comprends pas que la déduction des salaires soit limitée à 17 500 euros. Pour déterminer le résultat imposable, c’est bien l’ensemble des charges nécessaires à l’exercice normal de l’activité qui sont prises en compte. La déduction est plafonnée pour le conjoint alors qu’elle ne connaît aucune limite pour les autres salariés. C’est incompréhensible !

Mme la Rapporteure générale. Les cotisations ne sont pas les mêmes.

M. Jean-Claude Buisine. La possibilité a été ouverte aux professions artisanales, agricoles, commerciales et industrielles d’adhérer à des organismes de gestion agréés entre 1974 et 1981. Ceux qui exerçaient à titre individuel bénéficiaient alors d’un abattement sur leur bénéfice imposable équivalent à celui des salariés, c’est-à-dire 10 % et 20 %. Sur un bénéfice de 100 000 euros, 72 000 euros étaient taxés. Cette disposition visait à lutter contre la fraude fiscale dans ces entreprises.

Est ensuite venue s’ajouter la déduction du salaire du conjoint. Celui-ci pouvait bénéficier du statut de salarié et des avantages qui y étaient attachés, mais la déduction était plafonnée afin d’éviter que le chef d’entreprise ne transfère une partie de son bénéfice imposable sur le salaire du conjoint. C’est la raison pour laquelle la déduction a toujours été plafonnée.

Mme Karine Berger. Nous devrions tous voter l’amendement de Charles de Courson ! Ce n’est pas parce que l’impôt sur le revenu est « tordu » pour des motifs louables que deux personnes, quel que soit leur sexe, peuvent être traitées de manière différente au regard de celui-ci. On viole le principe même de l’impôt sur le revenu.

M. le président Gilles Carrez. Le conjoint, qu’il soit homme ou femme, est traité de la même manière.

Mme Karine Berger. Il n’est pas traité de la même manière que l’autre membre du couple. C’est ce qui doit nous choquer. Je comprends l’objectif qui est poursuivi, mais en créant une différenciation entre deux personnes à l’intérieur du couple en matière d’impôt sur le revenu, on commet une erreur fiscale.

Nous devons voter l’amendement et inviter le Gouvernement à réfléchir à une autre manière d’aborder cette question.

La commission rejette l’amendement CF 80.

La commission en vient à l’amendement CF 81 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Cet amendement vise à rétablir la déduction des frais de comptabilité et d’adhésion.

Mme la Rapporteure générale. Même avis que précédemment.

La commission rejette l’amendement CF 81.

L’amendement CF 37 de M. François André est retiré.

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Article additionnel après l’article 16
Augmentation du plafond du crédit d’impôt congés dans les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC)

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 35 de M. François André et CF 41 de Mme Christine Pires Beaune.

M. François André. Cet amendement propose d’étendre le principe de transparence intégrale des groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC). Il propose de porter le plafond du crédit d’impôt pour les dépenses engagées pour le remplacement en cas de congé à un montant correspondant à l’addition des sommes dont pourraient bénéficier individuellement au titre de ce crédit quatre associés.

Mme Christine Pires Beaune. Aujourd’hui, le bénéfice du crédit d’impôt pour congé est individuel. L’amendement prévoit, dans le cas d’un GAEC, de relever le plafond de ce crédit en le multipliant par le nombre d’associés, dans la limite de trois.

M. Charles de Courson. Je suis favorable à ces amendements, mais pourquoi limiter à trois membres dans un cas et à quatre dans l’autre ?

Mme Christine Pires Beaune. Cette limite est justifiée par le fait que l’exploitant au sein d’un GAEC, à la différence de l’exploitant individuel, peut recevoir une aide de ses associés.

Mme la Rapporteure générale. Je suis favorable à l’amendement CF 35 qui porte sur quatre associés.

La commission adopte l’amendement CF 35 (amendement 323).

En conséquence, l’amendement CF 41 tombe.

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Article additionnel après l’article 16
Augmentation du plafond du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique dans les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC)

La commission est saisie de l’amendement CF 36 de M. François André.

M. François André. Dans le même esprit, cet amendement étend de trois à quatre associés d’un groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC) le plafond du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique.

Suivant l’avis favorable de la Rapporteure générale, la commission adopte l’amendement CF 36 (amendement 324).

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Après l’article 16

La commission en vient à l’amendement CF 119 de M. Gilles Carrez.

M. le président Gilles Carrez. Cet amendement est destiné à interpeller le Gouvernement.

Par l’arrêt Steria en date du 2 septembre dernier, la Cour de justice de l’Union européenne a condamné la France en raison du régime d’intégration fiscale. Lorsqu’une société mère détient une filiale à plus de 95 %, elle peut choisir le bénéfice de l’intégration fiscale, auquel cas les dividendes versés par la filiale à la société mère sont exonérés de la réintégration de la quote-part de 5 %. Ce mécanisme d’exonération ne s’applique pas aux filiales d’une société mère française établies dans d’autres pays de l’Union européenne. C’est cette distorsion qui a été condamnée.

Deux solutions s’offrent à nous pour régler le problème : soit la suppression de la neutralisation de la quote-part dans le régime de l’intégration fiscale, avec des conséquences très lourdes pour les entreprises françaises, de l’ordre de 1 milliard d’euros d’impôts supplémentaires ; soit l’application du jugement, avec un manque à gagner fiscal évalué entre 300 et 400 millions d’euros.

Avec cet amendement, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement.

Mme la Rapporteure générale. Cette question doit impérativement être tranchée.

Il ressort de mes échanges avec l’administration fiscale que la portée de l’arrêt Steria pourrait être modifiée par un arrêt du 6 octobre 2015, dit arrêt Finanzamt Linz. Je ne sais pas, à ce stade, quelles conclusions l’administration compte en tirer.

Je vous invite à retirer cet amendement et à la redéposer pour que le débat ait lieu en séance.

M. Charles de Courson. Il existe une troisième solution consistant à fixer un taux unique pour tout le monde calculé pour éviter une perte de recettes fiscales.

M. le président Gilles Carrez. Je crois savoir que la réflexion de Bercy s’oriente dans cette voie. Je retire l’amendement CF 119.

L’amendement CF 119 est retiré.

La commission examine, en présentation commune, les amendements CF 104 et CF 98 de Mme Bernadette Laclais.

Mme Bernadette Laclais. Ces amendements visent à élargir la liste des associations reconnues d’utilité publique éligibles au dispositif de mécénat d’entreprise, pour que puisse notamment y figurer la fédération regroupant les associations comme France Angels.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette successivement les amendements CF 104 et CF 98.

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Article 17
Échanges automatiques d’informations financières

Le présent article adapte les dispositions législatives existantes afin de transposer la directive de l’Union européenne 2011/16/UE telle que modifiée par la directive 2014/107/UE (157), et d’assurer l’entrée en vigueur de l’échange automatique et obligatoire d’informations fiscales entre les États membres de l’Union à compter de 2017, sur la base d’informations collectées par les institutions financières à partir du 1er janvier 2016.

Les dispositions européennes prévues en matière d’échanges d’informations étant similaires à celles définies par la norme commune de déclaration définie par l’OCDE, le présent article permet également la mise en œuvre de la norme d’échange automatique de renseignement, que soixante-quatorze États, dont la France, se sont engagés à appliquer en signant l’accord multilatéral de Berlin du 29 octobre 2014.

Cet article modifie les dispositions définissant les obligations déclaratives incombant aux institutions financières, en faisant explicitement référence à l’application de la directive 2011/16/UE révisée, et en donnant un cadre juridique aux diligences à la charge de ces institutions financières destinée à déterminer la résidence fiscale et les numéros d’identification fiscale (NIF) de l’ensemble des titulaires de comptes, et ainsi identifier les comptes déclarables.

I. TROIS DÉMARCHES PARALLÈLES AFIN DE METTRE EN œUVRE DES ÉCHANGES AUTOMATIQUES D’INFORMATIONS FISCALES AU NIVEAU INTERNATIONAL

Dans un contexte de crise financière et économique, la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales s’est imposée au cours des cinq dernières années comme une priorité internationale, portée au niveau du G20. Elle concerne aussi bien l’optimisation fiscale des entreprises multinationales, qui fait l’objet du plan d’action dit « BEPS » (158) conduit par l’OCDE, que sur la dissimulation par les particuliers – et également par les entreprises d’ailleurs – de leurs avoirs dans des comptes à l’étranger, notamment dans des paradis fiscaux.

S’agissant de l’identification des contribuables détenant des avoirs non déclarés à l’étranger, les modalités de coopération entre administrations fiscales, largement fondées sur l’échange d’informations à la demande dans le cadre de conventions d’assistance administrative (159), ont montré leurs limites. De fait, elles supposent de savoir au préalable ce que l’on recherche, ce qui protège de facto une bonne part des comptes dissimulés à l’étranger – d’autant que les renseignements demandés par un État doivent être « vraisemblablement pertinents », pour permettre le traitement de la demande par l’État sollicité, sans que soit autorisé le fait d’« aller à la pêche aux renseignements » (pratique du fishing). Par ailleurs, de tels échanges reposent sur la bonne volonté des États et territoires partenaires, qui est loin d’être acquise pour certains d’entre eux : certains États retiennent une lecture particulièrement restrictive du champ des accords, ou adoptent des pratiques dilatoires, avec la formulation de demandes de justification ou de renseignements complémentaires.

Le passage à l’échange automatique d’informations entre administrations fiscales doit permettre de lever ces difficultés. S’il est longtemps apparu comme un objectif de long terme, se heurtant aux réticences des pays souhaitant protéger leur secret bancaire, l’adoption de la loi américaine dite « FATCA » (Foreign Account Tax Compliance Act) en 2010 a changé la donne, en donnant une impulsion décisive au niveau international et en ouvrant la voie à une initiative internationale. Celle-ci a conduit à la signature de l’accord multilatéral de Berlin concernant l’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers le 29 octobre 2014 sous l’égide de l’OCDE, tandis que parallèlement, l’Union européenne a adopté la directive 2014/107/UE instaurant cet échange automatique d’informations entre ses États membres.

Trois démarches sont ainsi mises en œuvre parallèlement : la première issue d’une initiative unilatérale des États-Unis, donnant lieu à la conclusion d’accords bilatéraux entre les États-Unis et différents pays ; la deuxième, multilatérale, sous l’égide de l’OCDE, fondée sur l’engagement volontaire des États ; la dernière dans le cadre de l’Union européenne, applicable dans les vingt-huit États membres.

A. L’INITIATIVE UNILATÉRALE DES ÉTATS-UNIS, PAR L’ADOPTION DE LA LOI FATCA DU 18 MARS 2010

Adoptée le 18 mars 2010, la loi dite « FATCA » fait obligation aux établissements financiers du monde entier de transmettre à l’administration fiscale américaine les informations dont ils disposent sur les contribuables américains, sous peine d’une retenue à la source de 30 % sur l’ensemble des flux financiers versés depuis les États-Unis sur les comptes susceptibles d’appartenir à des contribuables américains. Au regard de l’importance du marché américain pour les grandes banques étrangères, aucune d’entre elles ne peut se permettre de refuser la mise en œuvre des dispositions de la loi FATCA.

L’adoption de cette loi s’inscrit dans une logique unilatérale et extraterritoriale ; elle s’impose aux États et aux banques du monde entier. Toutefois, les États-Unis ont accepté le 7 février 2012 que sa mise en œuvre puisse intervenir sur la base d’accords intergouvernementaux négociés entre États.

Ces accords intergouvernementaux peuvent être conclus selon deux modèles différents, élaborés par le Trésor américain, dits « FATCA 1 » et « FATCA 2 » :

– l’accord FATCA 1 prévoit que les informations sont centralisées et transmises par voie intergouvernementale, l’administration fiscale du pays signataire collectant les données auprès de ses institutions financières, pour les transmettre une fois par an à l’Internal Revenue Service (IRS). Une réciprocité des échanges d’informations est également prévue ;

– l’accord FATCA 2 est destiné aux États qui refusent la levée immédiate du secret bancaire : il prévoit que les données sont transmises directement par les institutions financières, sans passer par l’administration fiscale de leur pays. La transmission des données nominatives requiert le consentement du client ; dans le cas contraire, la transmission n’a lieu que sous la forme de données agrégées. Ce n’est que dans un second temps que l’administration fiscale américaine peut demander, dans le cadre du droit commun de la coopération bilatérale, des données nominatives. En contrepartie, il n’y a pas de réciprocité de la part des États-Unis.

L’accord conclu entre la France et les États-Unis en vue de mettre en œuvre la « loi FATCA » relève du modèle dit « FATCA 1 » : il a été signé le 14 novembre 2013, et approuvé par la loi du 29 septembre 2014 (160).

La majorité des pays ayant conclu des accords bilatéraux avec les États-Unis ont d’ailleurs opté pour ce modèle « FATCA 1 », soit soixante-et-onze États à ce jour, tandis que seuls huit pays ont retenu le modèle dit « FATCA 2 » (Autriche, Suisse, Bermudes, Chili, Hong Kong, Japon, Moldavie, Saint-Marin).

En application de l’accord conclu en novembre 2013, les institutions financières françaises sont tenues de collecter des informations sur les personnes considérées comme des contribuables américains, à savoir les personnes physiques qui, à raison de leur citoyenneté ou de leur résidence fiscale, paient des impôts aux États-Unis, ainsi que les personnes morales passives – c’est-à-dire les entités financières, mais non les entités industrielles et commerciales. Doivent être identifiés leurs comptes financiers, leurs comptes de dépôt, leurs comptes titres ainsi que leurs contrats d’assurance (notamment d’assurance-vie), en indiquant pour chacun le nom, l’adresse et le numéro d’identification fiscale du contribuable, le numéro de compte, les intérêts et dividendes versés sur ce compte et son solde à la fin de l’année civile.

Après une période de mise en œuvre des infrastructures techniques nécessaires, permettant le recueil par l’administration fiscale des informations collectées par les institutions financières, la direction générale des finances publiques (DGFiP) a procédé aux premières transmissions d’informations à l’administration fiscale américaine le 29 septembre 2015.

Il convient de relever qu’à ce jour, les États-Unis n’ont transmis à l’administration fiscale française aucune information ; pour l’heure, le principe de réciprocité n’est donc pas appliqué. Par ailleurs, cette réciprocité ne devrait pas être complète, puisqu’aux termes de l’accord conclu le 14 novembre 2013, les États-Unis ne sont pas tenus de transmettre les soldes des comptes et les valeurs de rachat pour les contrats d’assurance détenus par des contribuables français, qui constituent pourtant des informations essentielles. Cette situation ne devrait pas perdurer toutefois, compte tenu des engagements du gouvernement américain, mais à ce stade, son évolution se heurte au blocage du Congrès. En tout état de cause, l’administration fiscale française pourra obtenir, en se fondant sur les informations transmises automatiquement, communication du solde du compte ou de la valeur de rachat, dans le cadre de l’échange d’informations à la demande.

B. L’ÉLABORATION D’UNE NORME COMMUNE DE DÉCLARATION SOUS L’ÉGIDE DE L’OCDE, QUE 74 PAYS SE SONT ENGAGÉS À RESPECTER EN SIGNANT L’ACCORD DE BERLIN DU 29 OCTOBRE 2014

● Dans le sillage de la loi FATCA et des accords bilatéraux conclus avec les États-Unis pour son application, l’échange automatique d’informations promu par l’OCDE dans le cadre du Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales a bénéficié d’une forte mobilisation internationale. Lors du sommet de Mexico de novembre 2012, les ministres du G20 ont ainsi mandaté l’OCDE pour élaborer une norme mondiale en matière d’échange automatique d’informations sur les comptes financiers. Ces travaux ont débuté en 2013, et le modèle d’accord et la norme commune de déclaration (NCD) ont été approuvés par les ministres des finances du G20 à Sydney en février 2014. Les commentaires et le schéma technique du standard ont quant à eux été adoptés par l’OCDE le 15 juillet suivant.

Cette norme a été endossée par le G20 au niveau des ministres des finances en septembre 2014 à Cairns, puis par les chefs d’État et de gouvernement en novembre 2014 à Brisbane. Entre-temps, les négociations lancées en septembre 2014, auxquelles la France a pris une part active, ont abouti à l’élaboration d’un accord multilatéral par lequel les États s’engagent à appliquer cette norme, à Berlin, le 29 octobre 2014. Lors de sa présentation, quatre-ving-quatorze États et territoires se sont engagés à mettre en œuvre cette nouvelle norme mondiale : cinquante-sept d’entre eux doivent procéder à de premiers échanges dès 2017, tandis que les trente-sept restants ont pour échéance 2018. Les États-Unis ne figurent d’ailleurs pas parmi ces quatre-vingt-quatorze États.

Année des premiers échanges

Juridictions

2017

(57 juridictions)

Afrique du Sud, Allemagne, Anguilla, Argentine, Barbade, Belgique, Bermudes, Bulgarie, Chypre, Colombie, Corée du Sud, Croatie, Curaçao, Danemark, Dominique, Espagne, Estonie, Finlande, France, Gibraltar, Grèce, Groenland, Guernesey, Hongrie, Îles Caïman, Île de Man, Îles Féroé, Îles Turques et Caïques, Îles Vierges Britanniques, Inde, Irlande, Islande, Italie, Jersey, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Malte, Maurice, Mexique, Montserrat, Niue, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République Tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Saint-Marin, Seychelles, Slovaquie, Slovénie, Suède, Trinidad et Tobago, Uruguay

2018

(37 juridictions)

Albanie, Andorre, Antigua et Barbuda, Arabie Saoudite, Aruba, Australie, Autriche, Bahamas, Belize, Brésil, Brunei, Canada, Chili, Chine, Costa Rica, Émirats Arabes Unis, Ghana, Grenade, Hong Kong, Îles Marshall, Indonésie, Israël, Japon, Macao, Malaisie, Monaco, Nouvelle-Zélande, Qatar, Russie, Saint-Christophe et Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Martin (Royaume des Pays-Bas), Saint-Vincent et les Grenadines, Samoa, Singapour, Suisse, Turquie

NB : figurent en gras, les juridictions ayant d’ores et déjà signé l’accord multilatéral sur l’échange automatique.

Source : évaluation préalable du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord multilatéral entre autorités compétentes concernant l’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers, publiée en juillet 2015.

Cet accord s’inscrit dans le cadre posé par la convention multilatérale du 25 janvier 1988 concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale, dont l’article 6 ouvre la possibilité de l’échange automatique, sans pour autant le rendre obligatoire ni en préciser les modalités.

À ce jour, l’accord a été effectivement signé par soixante-quatorze États, dont cinquante-trois – dont la France – pour de premiers échanges en 2017 et vingt-et-un pour de premiers échanges en 2018. Le projet de loi autorisant l’approbation de cet accord (161) a été adopté par le Sénat le 29 octobre 2015, et a été déposé ce même jour sur le Bureau de l’Assemblée nationale – laquelle devrait l’examiner dans les semaines qui viennent.

● Les principes de cette norme mondiale de déclaration sont proches de ceux fondant la loi FATCA. Toutefois, cette norme s’inscrit dans un cadre multilatéral, entre juridictions signataires de l’accord de Berlin, et non dans une logique bilatérale. L’accord de Berlin prévoit ainsi que les États et territoires signataires doivent demander à leurs institutions financières de collecter auprès de leurs clients non-résidents, identifiés comme tels au moyen de règles de diligences définies dans la norme mondiale, différentes informations relatives à l’identification de leurs clients et de leurs actifs financiers et qu’elles les transmettent à l’administration fiscale. Celle-ci doit adresser ces informations aux autorités compétentes de la juridiction partenaire dans laquelle le client est résident fiscal, pour qu’elles puissent les utiliser aux fins d’appliquer leur législation fiscale.

À la différence de la loi FATCA, les échanges d’informations transitent nécessairement par les administrations fiscales des pays signataires (162), et aucune retenue à la source n’est prévue pour les institutions financières ne respectant pas ses dispositions (163). De plus, le champ d’application de ces deux dispositifs n’est pas le même, puisque la loi FATCA s’applique aux contribuables américains, qui sont définis à la fois par la citoyenneté et la résidence, alors que l’accord de l’OCDE s’appuie sur le seul critère de résidence, qui est applicable dans la grande majorité des États. Il convient enfin de noter que certains seuils retenus pour les procédures de diligence allégées ou renforcées incombant aux institutions financières ne sont pas les mêmes entre la norme commune de déclaration et les accords FATCA.

Enfin, l’accord de Berlin repose sur l’engagement volontaire des États : son efficacité dépend donc de l’ampleur de l’adhésion à ce processus, sachant que les États ou territoires refusant de signer cet accord pourront devenir (ou rester) une sorte de terre d’accueil pour les comptes non déclarés. Il importe donc que la mobilisation internationale en faveur de l’échange automatique d’informations ne faiblisse pas au cours des prochaines années.

Pour tous les États s’étant engagés pour de premiers échanges en 2017, parmi lesquels figure la France, les institutions financières doivent appliquer les règles de diligences permettant d’identifier les comptes des non-résidents dès le 1er janvier 2016, en vue de transmettre les informations à l’administration fiscale à partir de 2017 : les premiers échanges de renseignements avec les autres pays signataires de l’accord doivent intervenir avant le 30 septembre 2017.

C. LA MISE EN œUVRE D’UN ÉCHANGE AUTOMATIQUE D’INFORMATIONS ENTRE PAYS DE L’UNION EUROPÉENNE, PAR L’ADOPTION DE LA DIRECTIVE 2014/107/UE

● Les prémisses de l’échange d’informations à des fins fiscales entre pays membres de l’Union européenne datent de la directive dite « épargne » de 2003 (164), qui prévoyait un mécanisme d’échange automatique d’informations, mais limité aux revenus perçus sous forme d’intérêts par les non-résidents. Entrée en vigueur au 1er juillet 2005, elle a conduit tous les États membres à mettre en place des systèmes de communication automatique d’informations, à l’exception de la Belgique, du Luxembourg et de l’Autriche : ces trois pays ont été autorisés, pendant une période de transition, à prélever une retenue à la source au lieu de communiquer ces informations : cette retenue s’élevait à 15 % pendant les trois premières années d’application de la directive, puis à 20 % pour les trois années suivantes, et à 35 % par la suite (165). La Belgique a décidé de ne plus appliquer la retenue à la source transitoire à compter du 1er janvier 2010, et d’échanger des informations au même titre que les autres États membres ; le Luxembourg fait de même depuis le 1er janvier 2015.

L’extension du champ de cette directive à d’autres catégories de revenus, proposée à partir de 2008, a toutefois fait l’objet d’un blocage de la part de l’Autriche et du Luxembourg – alors que les décisions en matière de fiscalité requièrent l’unanimité des États membres. Ces deux pays conditionnaient leur accord à la révision de la directive à un engagement de négociations visant à instaurer un dispositif similaire avec cinq États non-membres de l’Union, à savoir la Suisse, le Liechtenstein, Monaco, Andorre et Saint-Marin. Ce n’est qu’en mars 2014 que le veto du Luxembourg et de l’Autriche a été levé, suite à l’engagement de négociations avec ces cinq États tiers : les modifications proposées ont été adoptées par le Conseil par la directive 2014/48/UE du 24 mars 2014 (166).

● Parallèlement, une directive 2011/16/UE a été adoptée par le Conseil le 15 février 2011 (167), afin de renforcer et d’améliorer la coopération administrative fiscale entre les États membres : elle prévoit notamment l’introduction de nouveaux dispositifs, tels que des contrôles simultanés et des échanges de bonnes pratiques et d’expériences. Par ailleurs, son article 8 pose le principe d’un échange automatique et obligatoire d’informations à compter de 2015, mais pour seulement cinq catégories de revenus : les revenus professionnels, les jetons de présence, les produits d’assurance-vie (non couverts par d’autres actes juridiques de l’Union) les pensions, la propriété et les revenus de biens immobiliers.

● S’inscrivant dans le mouvement engagé par la loi FATCA, les ministres de l’économie et des finances de cinq États membres (France, Allemagne, Royaume-Uni, Espagne et Italie) ont adressé le 9 avril 2013 un courrier au commissaire européen en charge de la fiscalité, M. Algirdas Semeta, afin de lui demander d’instaurer un projet multilatéral d’échange de renseignements, inspiré de la législation américaine FATCA, en parallèle des progrès à réaliser sur le dossier de la « directive épargne ».

Cette initiative, en faveur de laquelle la France a joué un rôle moteur, a conduit à la révision de la directive précitée 2011/16/UE, par la directive 2014/107/UE du 9 décembre 2014 portant sur l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal (168) : ce texte complète l’article 8 de la directive 2011/16/UE afin d’instaurer un échange automatique d’informations sur les comptes ou contrats d’assurance-vie détenus par des contribuables résidents dans les autres États membres. Il reprend les dispositions régissant la norme commune de déclaration élaborée par l’OCDE, afin d’assurer la compatibilité des dispositifs et ne pas aboutir à une juxtaposition de règles, qui seraient plus complexes à mettre en œuvre, que ce soit par les institutions financières, qui collectent les informations, ou par les administrations fiscales, qui procèdent à leur échange – et ce d’autant plus que, d’ores et déjà, il existe des discordances entre la norme commune de déclaration et les dispositions des accords de type FATCA, comme vu supra.

Il convient de noter que le dernier alinéa de l’article 8 ainsi révisé indique explicitement que les dispositions de cet article prévalent sur la version révisée de la directive portant sur la fiscalité de l’épargne : ces deux textes se recoupent en grande partie, mais le champ de l’article 8 issu de la directive 2014/107/UE est nettement plus large. La « directive épargne » révisée a donc vocation à être abrogée, une proposition de directive du Conseil visant à cette abrogation ayant été déposée le 18 mars 2015 et étant en cours d’examen par le Parlement européen.

Le calendrier défini par la directive 2014/107/UE est similaire à celui prévu dans le cadre de l’accord de Berlin : aux termes de l’article 2 de la directive, ses dispositions doivent être transposées en droit interne avant le 31 décembre 2015, et appliquées à compter du 1er janvier 2016. En application du d du 2 de l’article 1er de la directive, les informations collectées devront être communiquées « dans les neuf mois qui suivent la fin de l’année civile » ; les premiers échanges d’informations entre administrations fiscales devraient donc intervenir, comme dans le cadre de l’accord de Berlin, à partir du 30 septembre 2017, sur la base des informations recueillies à compter du 1er janvier 2016.

D. L’ENTRÉE EN VIGUEUR DU STANDARD INTERNATIONAL D’ÉCHANGE AUTOMATIQUE D’INFORMATIONS À COMPTER DU 1ER JANVIER 2016 AU SEIN DE L’UNION EUROPÉENNE

● En application de la directive 2014/107/UE, à compter du 1er janvier 2016, les institutions financières établies dans les États membres de l’Union devront donc communiquer un certain nombre d’informations sur les comptes déclarables détenus par des contribuables résidents dans d’autres États membres.

Les institutions financières soumises à ces obligations déclaratives sont définies dans la section VIII de l’annexe I de la directive : elles comprennent les banques et établissements gérant des dépôts de titres, les sociétés d’assurance, mais aussi les entités d’investissement qui ont pour activité principale la gestion individuelle ou collective de portefeuille, ou encore les transactions sur le marché monétaire, le marché des changes ou les valeurs mobilières. En revanche, ne se trouvent pas dans le champ des institutions déclarantes les banques centrales, les caisses de retraite, les fonds de pension publics ou encore certains organismes de placement collectif dispensés.

Les comptes déclarables correspondent aux comptes et contrats d’assurance détenus par des personnes physiques et des entités, ce qui inclut les trusts, les fiducies, les fondations et les structures similaires, pour lesquelles doivent être identifiées les personnes physiques qui, le cas échéant, en ont le contrôle.

● Aux termes du 3 bis de l’article 8 de la directive 2011/16/UE modifiée, les renseignements devant être déclarés par les institutions financières sont les suivants :

– le nom, l’adresse et le ou les numéros d’identification fiscale (NIF) du titulaire du compte, qu’il s’agisse d’une personne physique ou d’une personne morale. Pour une personne physique, doivent être mentionnés la date et le lieu de naissance ; pour une personne morale, doivent figurer ces mêmes informations pour chacune des personnes qui en détiennent le contrôle ;

– le numéro du compte bancaire ou son équivalent fonctionnel en l’absence de numéro de compte ;

– le nom et le numéro d’identification de l’institution financière déclarante ;

– le solde ou la valeur portée sur le compte, y compris la valeur de rachat dans le cas d’un contrat d’assurance-vie ;

– les revenus financiers produits par les actifs détenus sur le compte selon la nature de celui-ci : intérêts, dividendes…

Les sections III à VI de l’annexe I définissent les procédures de diligence incombant aux institutions financières, selon qu’il s’agit de comptes préexistants ou de comptes nouveaux, de comptes détenus par des personnes physiques ou par des entités. Il convient de noter que, s’agissant des comptes ouverts à compter du 1er janvier 2016, l’institution financière doit obtenir une autocertification permettant de déterminer l’adresse du titulaire du compte à des fins fiscales.

La section IX de l’annexe I prévoit par ailleurs qu’il appartient aux États membres de mettre en place les règles et procédures administratives nécessaires pour garantir la mise en œuvre effective des procédures de déclaration présentées supra : ils doivent notamment avoir instauré des règles empêchant les institutions financières, les personnes ou intermédiaires « d’adopter des pratiques destinées à contourner les procédures de déclaration et de diligence raisonnable ».

Enfin, la communication des informations ainsi collectées aux administrations fiscales compétentes est réalisée sur une base annuelle. Ces échanges informatiques doivent être effectués dans un format informatique standard, sous la forme d’un fichier XML, unique pour chaque banque, contenant les données requises pour chacun des comptes concernés.

II. LES ADAPTATIONS À APPORTER AUX DISPOSITIONS LÉGISLATIVES NATIONALES

L’évolution du cadre juridique européen et conventionnel en matière de coopération administrative fiscale implique l’adaptation de notre législation. De premiers aménagements ont été apportés à partir de 2013, et le présent article les complète, pour assurer la sécurité juridique de la mise en œuvre de l’échange automatique d’informations à des fins fiscales.

A. L’INTRODUCTION EN 2013 DU PRINCIPE D’UNE OBLIGATION DÉCLARATIVE INCOMBANT AUX INSTITUTIONS FINANCIÈRES, DANS LA PERSPECTIVE DE FATCA

● En premier lieu, il convient de rappeler que la directive 2011/16/UE relative à la coopération administrative en matière fiscale a donné lieu à des modifications de portée mineure de plusieurs articles du livre des procédures fiscales, réalisées par l’article 72 de la loi de finances rectificative pour 2013 (169). Il s’agissait d’apporter des clarifications aux dispositions applicables en matière de contrôles simultanés, par exemple, et d’inscrire de façon expresse les principes de la directive 2011/16/UE en matière de coopération administrative.

● Par ailleurs, la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires (170) a introduit l’article 1649 AC dans le code général des impôts, afin de donner un fondement juridique à l’obligation déclarative à la charge des institutions financières françaises au titre de l’échange automatique d’informations à des fins fiscales, dans la perspective de la conclusion d’accords de type FATCA – l’accord entre la France et les États-Unis pour permettre la mise en œuvre de la loi FATCA étant alors en cours de négociation. L’article 1649 AC disposait ainsi que les teneurs de comptes, les organismes d’assurance et assimilés et toute autre institution financière mentionnent, sur la déclaration de revenus de capitaux mobiliers mentionnée à l’article 242 ter – dite « formulaire IFU » (171), les informations requises pour l’application des conventions conclues par la France organisant un échange automatique d’informations.

● La première loi de finances rectificative pour 2014 (172) est venue compléter l’article 1649 AC, dans la perspective de l’entrée en vigueur de l’accord FATCA liant la France et les États-Unis, mais aussi de la généralisation de l’échange automatique d’informations dans le cadre de l’accord multilatéral préparé par l’OCDE.

L’article 1649 AC a été aménagé sur deux points : en premier lieu, le support déclaratif prévu pour les institutions financières a été modifié, en substituant au « formulaire IFU » une déclaration spécifique, déposée dans des conditions et délais fixés par décret. Ensuite, un fondement légal a été donné aux diligences incombant aux institutions financières en matière d’identification des comptes, des paiements et des personnes. L’article 1649 AC dispose que pour la réalisation de ces diligences, les institutions peuvent recourir à des traitements de données à caractère personnel, lesquels sont soumis à la loi du 6 janvier 1978, dite « informatique et libertés » (173).

Un décret du 23 juillet 2015 (174) a précisé les conditions et les délais dans lesquels les institutions financières doivent déposer la déclaration prévue par l’article 1649 AC dans le cadre de l’accord FATCA, ainsi que les informations qui doivent y figurer. Ces dispositions devront donc être complétées s’agissant des déclarations déposées dans le cadre de l’échange automatique d’informations au sein de l’Union européenne et avec d’autres États signataires de l’accord de Berlin.

● La première loi de finances rectificative pour 2014 a également prévu la sanction applicable aux institutions financières qui ne respecteraient pas l’obligation déclarative prévue par l’article 1649 AC : aux termes du 5 de l’article 1736 du code général des impôts, la sanction en cas de manquement à cette obligation est fixée à 200 euros par compte déclarable comportant une ou plusieurs informations omises ou erronées. Par ailleurs, la sanction prévue par l’article 1736 n’est pas applicable lorsque l’institution financière concernée établit que ce manquement résulte d’un refus du client ou de la personne concernée de lui transmettre les informations requises et qu’il a informé de ce manquement l’administration fiscale.

Lorsque l’institution financière omet de déclarer un compte qui devrait l’être, ce sont les règles de droit commun définies par le 1 de l’article 1729 B du code général des impôts qui s’appliquent, à savoir les dispositions prévues en cas de défaut de production dans les délais prescrits d’un document qui doit être remis à l’administration fiscale : est alors prévue une amende de 150 euros, sachant que celle-ci n’est pas applicable en cas de première infraction commise au cours de l’année civile en cours et des trois années précédentes, lorsque l’intéressé a réparé l’infraction, soit spontanément, soit dans les trente jours suivant une demande de l’administration.

Ces deux montants de 200 et 150 euros semblent relativement limités au regard des enjeux fiscaux potentiels attachés à un compte déclarable. Il apparaît par ailleurs assez contre-intuitif qu’un établissement bancaire omettant purement et simplement de déclarer un compte déclarable se voit appliquer une amende d’un montant moins élevé qu’un autre établissement bancaire transmettant une déclaration d’un compte déclarable comportant des informations erronées.

B. LES AMÉNAGEMENTS PROPOSÉS PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article apporte deux modifications à l’article 1649 AC relatif aux obligations déclaratives à la charge des institutions financières.

● En premier lieu, il prévoit une référence explicite à l’application des dispositions de la directive 2011/16/UE telle que modifiée par la directive 2014/107/UE relative à l’échange automatique d’informations dans le domaine fiscal (a) : il s’agit de préciser que l’article 1649 AC vise également à transposer cette directive, alors que le texte en vigueur ne fait mention que de l’application des conventions conclues par la France permettant un échange automatique d’informations à des fins fiscales.

● En second lieu, il introduit des dispositions définissant les procédures à la charge des institutions financières, afin de les sécuriser juridiquement : le b prévoit expressément que ces institutions doivent collecter la ou les résidences fiscales et le ou les NIF de leurs clients, que ce soit les titulaires de comptes ou les personnes les contrôlant, ce qui est la condition pour identifier les comptes déclarables dans le cadre de l’échange automatique d’informations.

Cette précision n’était pas indispensable pour l’application de l’accord entre les États-Unis et la France s’agissant de la loi FATCA, les dispositions en vigueur prévoyant que les institutions financières mettent en œuvre les diligences nécessaires en matière d’identification et de déclaration des comptes pour l’application des conventions conclues par la France permettant l’échange automatique d’informations. On peut d’ailleurs noter que, dans le cadre de l’accord FATCA, l’identification de la résidence fiscale n’est pas nécessaire dès lors que le contribuable dispose de la nationalité américaine, puisqu’il se trouve automatiquement dans le champ de l’accord ; elle ne doit être réalisée que pour les contribuables non américains, mais payant des impôts aux États-Unis car ils y sont résidents.

En revanche, il apparaît nécessaire de procéder à une telle évolution de l’article 1649 AC dans la perspective de ce qui est appelé « la revue unique », et qui consiste à ce que les institutions financières réalisent les diligences nécessaires pour identifier la résidence fiscale de tous leurs clients, résidents comme non-résidents, ainsi que leur NIF, sans que ces diligences ne se limitent aux résidents des États avec lesquels a eu lieu, au préalable, la conclusion d’un accord ou d’une convention, ainsi qu’aux résidents de l’Union européenne.

Cette approche globale, qui est d’ailleurs encouragée par l’OCDE, apparaît la plus efficiente, dans un contexte où le nombre d’États participant à l’échange automatique a vocation à être élevé et à croître au cours des prochaines années. Néanmoins, les dispositions en vigueur, qui font référence aux « informations requises pour l’application des conventions conclues par la France permettant un échange automatique d’informations à des fins fiscales », même complétées par le renvoi à la directive 2014/107/UE sus-évoqué, ne s’avèrent pas suffisantes pour fonder juridiquement la « revue unique ».

Il convient de préciser que les institutions financières ne déclareraient à l’administration fiscale que les comptes de clients qui sont résidents fiscaux d’un État de l’Union européenne ou d’un État avec lequel un accord d’échange automatique d’information est applicable. Elles ne transmettraient pas les informations relatives à des clients résidents d’autres États.

Cette approche globale devrait d’ailleurs être adoptée par de nombreux pays : selon l’OCDE, au moins vingt-huit États ont pris, à ce stade, une telle décision, dont l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, les Pays-Bas et le Luxembourg.

PRÉSENTATION DES TROIS DÉMARCHES CONDUITES EN MATIÈRE D’ÉCHANGES AUTOMATIQUES D’INFORMATIONS

Fondement

Genèse

Champ/définition

Date de signature ou d’adoption des accords ou textes

Date d’entrée en vigueur

Modifications législatives apportées ou prévues

Loi FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act)

Loi américaine du 18 mars 2010 imposant à tous les établissements financiers de transmettre automatiquement à l’administration fiscale américaine des informations sur les revenus et actifs des contribuables américains

Dispositif unilatéral et extraterritorial, se traduisant par la conclusion d’accords bilatéraux entre les États-Unis et les autres pays.

Deux types d’accords :

− FATCA 1 : informations centralisées et transmises par voie intergouvernementale, avec réciprocité ;

− FATCA 2 : données transmises directement par les banques, pour les pays refusant la levée immédiate du secret bancaire, sans réciprocité ;

− Accord signé le 14 novembre 2013 entre la France et les États-Unis

− Loi du 29 septembre 2014 autorisant l’approbation de cet accord

Premières transmissions de la DGFiP à l’administration fiscale américaine le 29 septembre 2015

− Introduction de l’article 1649 AC dans le CGI par la loi du 26 juillet 2013 sur la régulation bancaire, prévoyant une obligation déclarative à la charge des institutions financières françaises dans le cadre d’accords de type FATCA

− Adaptation de l’article 1649 AC par la LFR2014-1, dans la perspective de l’entrée en vigueur de l’accord ; modification de l’article 1736 du CGI pour prévoir la sanction applicable en cas de manquement à cette obligation déclarative

OCDE

Premiers engagements lors du G20 de Saint-Pétersbourg en septembre 2013, adoption d’une norme commune de déclaration le 15 juillet 2014 par l’OCDE

Démarche multilatérale, fondée sur le volontariat, par l’engagement des États à mettre en œuvre la norme commune de déclaration

− Accord multilatéral de Berlin signé le 29 octobre 2014 lors de la réunion du Forum mondial sur la transparence et l’échange d’informations à des fins fiscales, sous l’égide de l’OCDE ; 74 États signataires à ce jour

− Projet de loi autorisant l’approbation de cet accord adopté par le Sénat le 29 octobre 2015 et transmis à l’Assemblée nationale

Pour les pays s’étant engagés à une mise en œuvre dès 2017 (comme la France) : collecte d’informations auprès des institutions financières à partir du 1er janvier 2016, pour de premiers échanges d’informations entre administrations fiscales avant le 30 septembre 2017

Modification proposée par le présent article :

− introduction d’une référence à la directive 2011/16/UE révisée par la directive 2014/107/UE

− précisions sur les conditions de collecte des informations, s’agissant de l’identification de la résidence fiscale et du numéro d’identification fiscale des titulaires de comptes

Union européenne

– Directive « épargne » de 2003 permettant des échanges d’informations sur certains revenus ; révision bloquée par l’Autriche et le Luxembourg jusqu’en mars 2014 ; révision intervenue le 24 mars 2014, pour élargir son champ

– Directive 2011/16/UE du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal

Directive applicable dans les 28 États membres

Directive 2014/107/UE du 9 décembre 2014 venant modifier la directive 2011/16/UE sur la coopération administrative, qui reprend la norme OCDE en matière d’échanges automatiques entre États membres

Parallèlement, abrogation proposée de la directive « épargne » révisée, dont le champ est moins large que la directive 2014/107/UE

Transposition à effectuer avant le 31 décembre 2015

Collecte d’informations auprès des institutions financières à partir du 1er janvier 2016, pour de premiers échanges d’informations entre administrations fiscales avant le 30 septembre 2017

Source : commission des finances.

*

* *

La commission adopte l’article 17 sans modification.

*

* *

Article 18
Réforme des zones de revitalisation rurale

Le présent article instaure une nouvelle définition des communes classées en zones de revitalisation rurale (ZRR) sur la base de deux critères, la densité de population de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) et la richesse des habitants.

Par ailleurs, il proroge jusqu’en 2020 le dispositif d’exonération temporaire d’impôt sur les bénéfices pour les micro-entreprises dans ces zones prévu à l’article 44 quindecies du code général des impôts (CGI) et, par conséquent, les exonérations de cotisation foncière des entreprises (CFE) et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) qui lui sont liées.

En revanche, il ne proroge pas les dispositifs de soutien à l’investissement immobilier des PME en zone d’aide à finalité régionale (ZAFR) et en ZRR, qui arriveront à expiration à la fin de l’année.

Le Gouvernement, dans l’évaluation préalable associée à l’article, estime le coût de la réforme à 5 millions d’euros en 2017, 11 millions d’euros en 2018 et jusqu’à 29 millions d’euros en 2021 pour l’État. Ce coût résulte essentiellement de la prorogation des dispositifs précités, la nouvelle définition des ZRR ne devant avoir qu’un impact financier marginal.

Sur les 14 691 communes actuellement classées en ZRR, 4 000 communes sortiraient du classement et 3 000 y entreraient.

Instaurée en 1995 par les articles 42 et 52 de la loi du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire (175), la mise en place des ZRR constitue une politique de solidarité nationale en faveur de territoires confrontés à « des difficultés particulières ». En 2005, dans le cadre de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux (176), a été réaffirmée la volonté d’agir en faveur des territoires ruraux les plus fragiles.

Des aides spécifiques, dont les plus connues reposent sur des exonérations fiscales et sociales présentées dans le tableau infra, ont donc été apportées aux communes classées en ZRR.

S’agissant des mesures de nature législative hors exonérations, les dispositifs sont aussi très nombreux, témoignant de l’importance prise, en vingt ans, par le classement en zone de revitalisation rurale.

Il s’agit, par exemple, d’une majoration de 30 % de la fraction bourg-centre de la dotation de solidarité rurale (DSR), bonification de la dotation d’intercommunalité pour les communautés de communes situées en ZRR de montagne, de la possibilité, à titre expérimental, pour les fonctionnaires de cumuler des emplois à temps partiel ; de facilités de financement des maisons de services au public, de la possibilité pour les collectivités territoriales de verser des aides destinées à favoriser l’installation ou le maintien de professionnels de santé, de l’assouplissement des conditions de création d’officines de pharmacie, d’une affectation prioritaire pour les internes en médecine et les étudiants en médecine dentaire, etc. Toutes ces normes spécifiques ont été recensées par nos collègues Alain Calmette et Jean-Pierre Vigier, dans un rapport d’octobre 2014, fait au nom de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire (177).

PRINCIPAUX DISPOSITIFS D’EXONÉRATION EN ZONES DE REVITALISATION RURALE

(en millions d’euros)

Base légale

Prélèvement concerné

Exonération fiscale

Coût 2014

Évolution

Mesures à la charge de l’État

1

Article 44 quindecies du CGI

IS

IR

Exonération d’impôt sur les bénéfices pendant cinq ans, suivie d’un abattement dégressif pendant trois ans (75 %, 50 %, 25 %), dans les entreprises de moins de 10 salariés.*

14

Prorogé jusqu’en 2020 par le présent article

2

Article 722 bis du CGI

DMTO

Exonération des droits de mutation pour la part revenant à l’État pour les acquisitions de fonds de commerce et de clientèle (à la fois pour les ZRR et les zones franches urbaines (ZFU))

7

Mesure non limitée dans le temps

3

Article 1465 A du CGI

CFE

Exonération de CFE de cinq ans maximum pour les entreprises qui créent certaines activités nouvelles (compensée par l’État)

3

Prorogé jusqu’en 2020 par le présent article

4

Article 1586 nonies du CGI

CVAE

Exonération de CVAE sur délibération de la collectivité territoriale pour les entreprises bénéficiaires de l’exonération temporaire de CFE prévue aux articles 1464 B, 1464 D et 1465 A du CGI (partiellement compensée)

n.c.

Modalités alignées sur celles des articles 1464 B, 1464 D et 1465 A du CGI

5

Article 39 quinquies D du CGI

IS

Amortissement exceptionnel égal à 25 % du prix de revient des immeubles à usage industriel ou commercial construits pour les PME ou pour les travaux de rénovation pour les TPE et PME

> 0,5

Expire le 1er janvier 2016

6

Article 239 sexies D du CGI

IS

Dispense de réintégration de la fraction des loyers versés au cours d’un contrat de crédit-bail dans le résultat fiscal en cas de levée d’option d’achat en fin de contrat

n.c.

Expire le 31 décembre 2015

7

Article 44 sexies du CGI

IS

IR

Exonération d’IR et d’IS pour les entreprises nouvelles pendant 5 ans (à la fois pour les zones d’aide à finalité régionale, les zones de redynamisation urbaine et les ZRR)

112

Régime clos depuis le 1er janvier 2011, remplacé par l’article 44 quindecies

8

Article 31-I-1°-k du CGI

IR

Déduction complémentaire de 26 % dans le cadre des dispositifs « Robien » et « Scellier » pour les ménages qui louent un logement à usage d’habitation

10

Dispositifs clos depuis 2009 (« Robien ») et 2013 (« Scellier »)

9

Article 199 decies E du CGI

IR

Réduction d’impôt pour l’achat d’un logement dans une résidence de tourisme

n.c.

Clos depuis le 31 décembre 2010

10

Article 199 decies F du CGI

IR

Réduction d’impôt pour travaux dans une résidence de tourisme

n.c.

Clos depuis le 31 décembre 2012

Base légale

Prélèvement concerné

Exonération fiscale

Coût 2014

Évolution

Mesures à la charge des collectivités territoriales

11

Article 1464 B du CGI

CFE

Exonération temporaire de CFE entre 2 et 5 ans pour les entreprises visées à l’article 44 quindecies du CGI, sur délibération de la collectivité territoriale

n.c.

Modalités alignées sur celles de l’article 44 quindecies du CGI

12

Article 1464 D du CGI

CFE

Exonération temporaire de CFE entre 2 et 5 ans pour les médecins, les auxiliaires médicaux et les vétérinaires, sur délibération de la collectivité territoriale

> 0,05

Mesure non limitée dans le temps

13

Article 1407-III du CGI

TH

Exonération de TH pour les gîtes ruraux, les meublés de tourisme et les chambres d’hôtes, sur délibération de la collectivité territoriale

> 0,05

Mesure non limitée dans le temps

14

Article 1383 A du CGI

TFPB

Exonération temporaire de TFPB entre 2 et 5 ans pour les entreprises créées ou reprises, sur délibération de la collectivité territoriale

> 0,4

Mesure non limitée dans le temps

15

Article 1383 E du CGI

TFPB

Exonération de TFPB pour les logements locatifs acquis et améliorés avec l’aide de l’ANAH, sur délibération de la collectivité territoriale

> 0,05

Mesure non limitée dans le temps

16

Article 1383 E bis du CGI

TFPB

Exonération de TFPB pour les hôtels, les gîtes ruraux, les meublés de tourisme et les chambres d’hôtes, sur délibération de la collectivité territoriale

> 0,05

Mesure non limitée dans le temps

17

Article 1594 F ter du CGI

Taxe publicité foncière

Taxe d’enregistrement

Abattement pour l’acquisition d’immeubles affectés à l’habitation ou de garages

> 2

Mesure non limitée dans le temps

18

Article 1594 F quinquies du CGI

Taxe publicité foncière

Taxe d’enregistrement

Taux réduit de 0,70 % pour l’acquisition d’immeubles ruraux pour les jeunes agriculteurs

> 0,6

Mesure non limitée dans le temps

Base légale

Prélèvement concerné

Exonération fiscale

Coût 2014

Évolution

Mesures relatives à la sécurité sociale mais compensée par l’État

19

Article L. 131-4-2 du code de la sécurité sociale

Cotisations patronales de sécurité sociale

Exonération pour embauche de douze mois de cotisations patronales de sécurité sociale totale pour les salaires n’excédant pas 1,5 SMIC, puis linéairement dégressive pour s’annuler à 2,4 SMIC dans les entreprises de moins de 50 salariés

22

Abrogation prévue par l’article 10 du PLFSS pour 2016, supprimée par l’Assemblée nationale en première lecture, suppression confirmée par le Sénat

20

Article L. 131-4-3 du code de la sécurité sociale

Cotisations patronales de sécurité sociale

Exonération pour embauche par les établissements des organismes d’intérêt général (OIG)

21

Non codifié

Cotisations sociales

Exonération de cotisations d’assurances sociales et d’allocations familiales, versement transport et contribution au Fonds national d’aide au logement pour les établissements des organismes d’intérêt général (OIG) de moins de 500 salariés, pour les contrats conclus avant le 1er novembre 2007, totale pour les salaires n’excédant pas 1,5 SMIC, puis linéairement dégressive pour s’annuler à 2,4 SMIC

119

Mesure non limitée dans le temps

(*) L’article 4 du projet de loi de finances pour 2016 prévoit de relever le seuil de l’effectif à onze salariés.

ANAH : Agence nationale de l’habitat.

CFE : cotisation foncière des entreprises.

CVAE : cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.

DMTO : droits de mutation à titre onéreux.

IR : impôt sur le revenu.

IS : impôt sur les sociétés.

PLFSS : projet de loi de financement de la sécurité sociale.

TFPB : taxe foncière sur les propriétés bâties.

TFPNB : taxe foncière sur les propriétés non bâties.

TH : taxe d’habitation.

Source : MM. Alain Calmette et Jean Pierre Vigier, Rapport d’information sur les zones de revitalisation rurale (ZRR), Assemblée nationale, XIVe législature, n° 2251, octobre 2014, annexes 1 et 2.

Si nos collègues ont réaffirmé le caractère indispensable d’un dispositif d’aide aux territoires ruraux les plus fragiles, ils ont aussi pointé la fragilité des dispositifs actuels.

B. UN ZONAGE EN SURSIS DEPUIS DE NOMBREUSES ANNÉES

En application de l’article 1465 A du CGI, les communes en ZRR doivent satisfaire aux critères cumulatifs suivants, dont les seuils sont fixés par décret.

● Un critère institutionnel : la commune doit appartenir à un EPCI à fiscalité propre.

● Un critère de faible densité démographique, apprécié au niveau de l’arrondissement, du canton ou de l’EPCI à fiscalité propre. En application du décret n° 2013-548 du 26 juin 2013 (178), la commune doit relever d’un canton ou d’un EPCI à fiscalité propre dont la densité de population est inférieure à 35 habitants par km², ou d’un arrondissement dont la densité de population est inférieure à 37 habitants par km².

● Un critère sociodémographique : l’arrondissement, le canton ou l’EPCI à fiscalité propre de faible densité concerné devaient également répondre à au moins un des trois critères suivants :

– un déclin de la population, apprécié au regard de l’écart avec la situation prévalant cinq années auparavant ;

– un déclin de la population active, également apprécié sur la même durée ;

– une forte proportion d’emplois agricoles, fixée par le décret du 26 juin 2013 précité au double de la moyenne nationale, soit 7,4 % de la population active.

En pratique, comme l’ont indiqué nos collègues Alain Calmette et Jean-Pierre Vigier dans leur rapport précité, le dernier classement tenant compte de ces critères date de 2005. Le principe d’une révision tous les cinq ans du classement en ZRR n’a pas été pleinement appliqué. Une mise à jour du zonage a été effectuée chaque année par arrêté mais elle repose uniquement sur le critère institutionnel. Selon nos collègues, « le classement annuel ne tient pas compte du critère démographique – lequel repose par ailleurs sur des seuils figés, aucune périodicité de révision des seuils n’étant prévue dans le décret n° 2013-548 précité – et encore moins de l’évolution du critère sociodémographique. Ces deux critères sont supposés être appréciés tous les cinq ans, sur la base du dernier recensement de la population. Dans les faits, il n’est plus tenu compte des critères démographique et sociodémographique depuis 2005 pour classer les communes en ZRR. Il n’a ainsi jamais été tenu compte des données induites par le recensement général de la population de 2009 en raison des bouleversements auxquels il aurait conduit ». Le recensement de la population de 2009 aurait conduit à exclure 15 % des communes du zonage.

De fait, le nombre de communes classées en ZRR a crû mécaniquement depuis 2009 sous l’effet de l’essor de l’intercommunalité. Mais le classement en ZRR ne reflète plus l’évolution démographique et socio-économique des territoires ruraux.

Depuis 2011, un groupe de travail commun à l’Assemblée nationale, au Sénat et à l’ancienne DATAR a été constitué sur les modalités de classement des communes en ZRR. Il a abouti, en 2013, au relèvement des seuils déterminant les communes à faible densité démographique. Par arrêté du 10 juillet 2013, le Premier ministre a appliqué les nouveaux critères de classement, excluant 1 891 communes et intégrant pour la première fois 1 213 communes. Au total, 12 399 communes auraient été classées.

Mais cette réforme n’a pas été appliquée. Faute d’un mécanisme de sortie progressive, les 1 891 communes auraient en effet été exclues brutalement du dispositif. L’arrêté du 24 juillet 2013 a donc réintégré les 1 891 communes dans le classement ZRR.

Enfin, par arrêté du 30 juillet 2014, le Gouvernement a intégré 401 nouvelles communes répondant aux critères, dont 201 entrantes car intégrées à un EPCI, et a maintenu, à titre dérogatoire, le bénéfice du classement pour les communes qui auraient dû en sortir.

S’agissant plus spécifiquement des départements d’outre-mer (DOM), aucune commune n’est classée en ZRR en Guadeloupe, en Martinique et à Mayotte, tandis que la totalité des 22 communes de Guyane relève de ce zonage, ainsi qu’une seule commune à La Réunion.

C. DES DISPOSITIFS FISCAUX ET SOCIAUX DIFFICILES À ÉVALUER

Les lacunes du suivi des dispositifs fiscaux et sociaux en ZRR ont fait l’objet de critiques récurrentes. Dans son rapport d’information présenté en 2008 (179), notre collègue Yves Bur soulignait déjà l’absence d’évaluation des dispositifs en faveur des ZRR. Une mission interministérielle de 2009 regrettait que, « de façon générale, les informations transmises ne permettent pas d’identifier les bénéficiaires finaux des exonérations, que ce soit en termes géographique, sectoriel ou par taille d’établissement » (180).

D’après nos collègues Alain Calmette et Jean-Pierre Vigier, le montant total des exonérations fiscales et sociales en ZRR se montait à environ 235 millions d’euros en 2014. En se basant sur cette enveloppe de 235 millions d’euros et sur le nombre de communes classées en ZRR en 2013, celles-ci bénéficieraient en moyenne d’un peu plus de 16 000 euros au titre des exonérations applicables.

L’efficacité de ces dispositifs en termes de créations d’emplois ou d’installations d’entreprises semble limitée. Ils créent des effets d’aubaine et ne constituent pas, à proprement parler, un véritable outil d’attractivité. Ils sont toutefois considérés par les élus locaux comme un « filet de sécurité », un acquis.

Nos collègues Alain Calmette et Jean-Pierre Vigier ont identifié plusieurs facteurs explicatifs de cette relative inefficacité, qui désigne les faiblesses du dispositif actuel :

« – les exonérations ne constituent pas le facteur majeur d’implantation des entreprises : le critère du marché – donc des débouchés potentiels – demeure fondamental, la perspective d’allégements de charges ne pouvant seule contribuer à la création d’activités ;

« – les mesures offertes semblent partiellement connues et souffrent d’une technicité excessive, notamment en termes d’éligibilité, surtout pour les plus petits projets où l’enjeu consiste à créer son propre emploi ;

« – la possible remise en cause du classement d’une commune en ZRR d’une année sur l’autre, conjuguée aux éventuelles révisions des dispositifs en loi de finances ou en loi de financement de la sécurité sociale, ne permettent pas de garantir la pérennité des aides attribuées et nuisent de ce fait à la lisibilité des projets ;

« – la multiplication des exonérations de droit commun, notamment en matière de cotisations sociales, a banalisé et réduit la portée des discriminations " positives " en faveur des ZRR. »

Après ces constats, les solutions à mettre en œuvre méritent un débat. Les discussions sur l’article 10 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 en ont donné l’exemple. Cet article prévoyait la suppression de plusieurs exonérations de cotisations sociales en ZRR, au motif qu’elles seraient inefficaces et peu attractives au regard des dispositifs d’allégements généraux de charges sociales entrés en vigueur depuis leur création. L’Assemblée nationale a adopté un amendement de suppression de cet article, considérant qu’une réflexion s’imposait sur la manière de rendre ces exonérations de charges sociales plus simples et plus efficaces avant d’envisager leur suppression.

Nos collègues Alain Calmette et Jean-Pierre Vigier avaient réaffirmé la nécessité d’un dispositif d’aide aux territoires ruraux les plus fragiles. Ils mettaient en cause la « mort lente » de cette politique dont le budget a baissé de 50 % en cinq ans et le saupoudrage des aides.

II. LES MODIFICATIONS PROPOSÉES

Cet article simplifie la définition des ZRR et proroge jusqu’en 2020 le dispositif d’exonération temporaire d’impôt sur les bénéfices pour les micro-entreprises dans ces zones prévu à l’article 44 quindecies du CGI.

A. LE DISPOSITIF

L’article est divisé en deux parties : le I modifie le code général des impôts tandis que le II prévoit des mesures d’application transitoires.

Au I, deux articles du code général des impôts sont modifiés : l’article 44 quindecies () et l’article 1465 A ().

En premier lieu, les dispositions de l’article 44 quindecies (mesure n° 1 dans le tableau récapitulatif supra) sont prorogées pour cinq ans, jusqu’au 31 décembre 2020 (a) du ). Les entreprises de moins de dix salariés (ce seuil est porté à onze par l’article 4 du projet de loi de finances pour 2016) pourront donc continuer à bénéficier d’une exonération d’impôt sur les bénéfices pendant cinq ans, suivie d’un abattement dégressif pendant trois ans (75 %, 50 %, 25 %).

En conséquence, les entreprises pourront également, sur délibération de la commune ou de l’EPCI intéressé, continuer de bénéficier d’une exonération de CFE jusqu’au 31 décembre 2020, conformément à l’article 1464 B du même code (mesure n° 11), laquelle exonération ouvre automatiquement la possibilité d’exonérer les mêmes entreprises de la CVAE en application de l’article 1586 nonies du CGI (mesure n° 4).

Les dispositifs de soutien à l’investissement immobilier des PME en ZAFR et en ZRR arriveront à expiration à la fin de l’année 2015. Ils ne sont pas prorogés par le présent article. Le rapport d’évaluation du dispositif de revitalisation rurale de juillet 2014 n’a pas permis, en effet, d’identifier un impact significatif de ces dispositifs.

Le b) duinsère une nouvelle clause anti-abus destinée à décourager des pratiques de « nomadisme fiscal » qui consisteraient à délocaliser une activité dans une autre commune à l’occasion de changements de la carte des ZRR. Elle est inspirée de clauses similaires dans des articles du CGI relatifs à d’autres dispositifs zonés, par exemple, au quatrième alinéa de l’article 44 terdecies du CGI relatif aux zones de restructuration de la défense.

En second lieu, les a) et b) du B redéfinissent les critères de classement en ZRR en réécrivant plusieurs alinéas de l’article 1465 A du CGI. Les multiples critères prévus par le droit existant sont remplacés par deux critères simples, inspirés de ceux retenus pour la politique de la ville mais adaptés aux territoires ruraux :

– la densité de population de l’EPCI ;

– le revenu fiscal par unité de consommation de l’EPCI.

Ces deux critères sont appréciés par rapport à la médiane nationale des EPCI à fiscalité propre métropolitains.

L’alinéa suivant apporte des précisions quant à l’établissement des données du classement par l’INSEE. En particulier, « la population prise en compte pour le calcul de la densité de la population est la population municipale telle que définie à l’article R. 2151-1 du code général des collectivités territoriales ».

Le classement sera révisé tous les six ans, au 1er janvier de l’année qui suit le renouvellement général des conseils communautaires. Les changements de périmètre des EPCI à fiscalité propre n’auront donc pas d’effet immédiat sur le classement.

Dans les DOM, l’information relative aux revenus n’étant pas disponible, les critères définis par le présent article ne seront pas applicables. Les ZRR outre-mer sont donc identifiées directement dans le dispositif. Sont ainsi concernées :

– les communes de la Guyane ;

– les communes de La Réunion définies par l’article 2 du décret n° 78-690 du 23 juin 1978 portant création d’une zone spéciale d’action rurale dans le département de La Réunion.

Feront l’objet du classement les EPCI à fiscalité propre. Les communes autorisées à déroger au principe général de regroupement au sein d’EPCI à fiscalité propre en application de l’article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) seront évaluées au niveau communal. Conformément à l’article L. 5210-1-1 du CGCT, « sur le territoire des îles maritimes composées d’une seule commune, les schémas départementaux de coopération intercommunale ne sont pas dans l’obligation de prévoir la couverture intégrale du territoire par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ».

Dans les faits, cette dérogation est en tout état de cause limitée puisque seules neuf (dont seulement six métropolitaines) des quinze îles maritimes mono-communales ne sont aujourd’hui pas membres d’un établissement public. Il s’agit de Bréhat (Côtes d’Armor), Sein (Finistère), Ouessant (Finistère), Hoëdic (Morbihan), Houat (Morbihan), Yeu (Vendée), La Désirade (Guadeloupe), Terre-de-Bas (Guadeloupe), Terre-de-Haut (Guadeloupe).

Les six autres îles composées d’une seule commune sont rattachées à une intercommunalité : Aix en Charente-Maritime, Batz et Molène dans le Finistère, Groix, Île-aux-Moines et Île d’Arz dans le Morbihan.

Le III de l’article 1465 A conserve les mêmes conditions de maintien dans le dispositif et les obligations déclaratives des entreprises à l’égard de l’administration fiscale par un renvoi à l’article 1465 du CGI. Un nouvel alinéa introduit toutefois une disposition nouvelle en faveur des entreprises dont la commune d’implantation sortirait de la liste des communes classées. Elles pourront se prévaloir de l’exonération de CFE prévue à l’article 1465 A pour la durée restant à courir.

Le c) repousse la limite temporelle qui s’appliquait à l’article 1465 A de 2015 à 2020. Le bénéfice des exonérations accordées est en effet subordonné au règlement européen relatif aux aides de minimis. Toutefois, sur option, le bénéfice de l’exonération peut être subordonné au respect des dispositions européennes relatives aux aides à finalité régionale, plus favorables quoique plus ciblées. Cette option était ouverte aux entreprises rentrant dans le champ du premier alinéa de l’article 1465 jusqu’au 31 décembre 2015. Cette limite est repoussée au 31 décembre 2020.

Le II prévoit une entrée en vigueur du dispositif en deux temps. La prorogation de l’exonération d’impôt sur les bénéfices pendant cinq ans prévue à l’article 44 quindecies du CGI entrera en vigueur dès le 1er janvier 2016. En revanche, les nouveaux critères et la nouvelle carte des ZRR n’entreront en vigueur qu’au 1er juillet 2017. Il s’agit d’attendre la fin des travaux de rationalisation de la carte des intercommunalités prévue par la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (181). Le seuil minimal de population des EPCI à fiscalité propre a été relevé de 5 000 à 15 000 habitants. Les arrêtés permettant la mise en œuvre des nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI) peuvent être pris jusqu’au 31 décembre 2016.

B. L’IMPACT DU DISPOSITIF

Les effets du nouveau classement

Les deux nouveaux critères correspondent à ceux qu’avaient retenus nos collègues André Calmette et Jean-Pierre Vigier, qui en appelaient à des critères « indiscutables, simples et “lisibles” par nos concitoyens, correspondant mieux à la réalité des territoires ».

Le nombre de communes en ZRR était de 14 691 en 2014. Le Gouvernement estime à 1 800 le nombre de communes maintenues dans le zonage alors qu’elles ne respectent plus les critères actuellement en vigueur.

Une simulation de classement en ZRR a été effectuée avec les données de l’INSEE et la carte des EPCI en vigueur au 1er janvier 2014 : 4 000 communes sortiraient du classement et 3 000 y entreraient. Mais ces chiffres sont théoriques. Du fait de la prochaine entrée en vigueur d’une nouvelle carte des intercommunalités, les listes élaborées aujourd’hui avec les critères du présent article évolueront très significativement par la suite. De très nombreux EPCI devraient en effet voir leurs périmètres modifiés. Il est donc impossible d’obtenir la carte des ZRR qui résulterait de ces réformes avant le premier semestre 2017.

Une fois la nouvelle carte de l’intercommunalité et les nouveaux critères entrés en vigueur, la carte des ZRR devrait être relativement stable. Le dispositif proposé prévoit un classement calé sur les mandats communautaires, donc jusqu’en 2020, puis tous les six ans.

Dans ces conditions, la réforme réduit légèrement le « saupoudrage » dénoncé par nos collègues Calmette et Vigier. Les dispositifs fiscaux et sociaux sont maintenus, à l’exception de deux dispositifs de soutien à l’investissement immobilier peu utilisés, de sorte que les moyens consacrés aux ZRR seront désormais recentrés sur un nombre moins important de communes. Selon une première estimation, chaque commune pourrait ne plus bénéficier de 16 000 euros mais de 17 000 euros environ.

Nos collègues Alain Calmette et Jean-Pierre Vigier avaient proposé un mécanisme de sortie progressive de deux ans pour les communes déclassées. Le Gouvernement a retenu une autre option pour atténuer les effets d’une sortie d’une commune du classement ZRR pour les entreprises qui y sont implantées. Elles pourront continuer de se prévaloir de l’exonération de CFE prévue à l’article 1465 A pour la durée restant à courir. Le Gouvernement estime en effet que le mécanisme proposé par nos collègues Calmette et Vigier serait source de complexité et qu’il allongerait en réalité la durée du classement en ZRR d’un tiers de sa durée nominale, soit huit ans au lieu de six. Il aurait également un coût budgétaire important. La simulation avec les données INSEE au 1er janvier 2014 a conclu à la sortie de 4 000 communes et à l’entrée de 3 000 nouvelles communes dans le classement ZRR. Le mécanisme de sortie progressive aboutirait en conséquence à classer environ 17 500 communes, soit près de la moitié des communes françaises

Enfin, la réforme prévoit l’appréciation des critères au niveau communal pour les communes dispensées d’appartenir à un EPCI, notamment les îles maritimes composées d’une seule commune. En d’autres termes, les communes concernées (îles d’Yeu, d’Ouessant, de Bréhat, de Sein, de Hoëdic et d’Houat) verront leur densité de population et leur richesse comparée à la moyenne nationale des EPCI.

SITUATION DES COMMUNES DISPENSÉES D’APPARTENIR À UN EPCI
AU REGARD DES NOUVEAUX CRITÈRES

Données au 1er janvier 2014

Population

Densité de population

(habitants/km2)

Revenu disponible médian
(en euros)

Bréhat (Côtes-d’Armor)

404

130,7

21 363

Sein (Finistère)

203

32,8

n.d.

Ouessant (Finistère)

893

57,3

17 038

Hoëdic (Morbihan)

121

58,2

17 770

Houat (Morbihan)

249

85,6

17 925

Yeu (Vendée)

4 575

196

19 864

Valeurs médianes nationales

58,1

18 033

Source : secrétariat d’État au budget.

Le Gouvernement n’a pas souhaité adapter les critères pour ces îles maritimes mono-communales, considérant que le critère de densité n’est pas systématiquement supérieur à la médiane nationale de densité des EPCI, tout comme le revenu. En outre, communes bénéficient, dans le cadre des volets territoriaux des contrats de plan État-région (CPER), de politiques prenant en compte leur insularité.

À titre complémentaire, il a été demandé au Gouvernement si la proposition de nos collègues Calmette et Vigier de créer un observatoire des aides en ZRR – qui ne relève pas nécessairement de la loi – avait été examinée. Il s’avère qu’une telle option n’a pas été retenue, le Gouvernement estimant que les dispositifs généraux de suivi et d’évaluations des données d’exonérations fiscales et sociales permettent de disposer des éléments nécessaires. En outre, il précise que l’évaluation de la prorogation des dispositifs d’exonérations fiscales interviendra dans les trois ans suivant leur entrée en vigueur, conformément aux dispositions générales de gouvernance et d’évaluation des dépenses fiscales prévues à l’article 21 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (182).

Un impact budgétaire difficile à mesurer

L’évaluation préalable du Gouvernement évalue le coût de la réforme à 5 millions d’euros en 2017, 11 millions d’euros en 2018 et jusqu’à 29 millions d’euros en 2021 pour l’État.

COÛT GLOBAL DE LA RÉFORME POUR L’ÉTAT

(en millions d’euros)

Exercices

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

2026

2027

2028

Total

2016

5

6

6

6

6

4

3

1

       

37

2017

 

5

6

6

6

6

4

3

1

     

37

2018

   

5

6

6

6

6

4

3

1

   

37

2019

     

5

6

6

6

6

4

3

1

 

37

2020

       

5

6

6

6

6

4

3

1

37

Total

5

11

17

23

29

28

24

20

14

8

4

1

183

Source : évaluation préalable de l’article 18 du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Ce coût résulte de deux effets :

– une perte de recettes d’impôt sur le revenu et d’impôt sur les sociétés du fait de la prorogation de l’article 44 quindecies du CGI ;

– une augmentation des exonérations de CFE et de CVAE prévues aux articles 1465 A et 1586 nonies III du même code, compensées par l’État.

L’impact sur les recettes d’impôt sur le revenu et d’impôt sur les sociétés a été évalué de la manière suivante.

La dépense fiscale relative à l’exonération prévue à l’article 44 quindecies du code général des impôts est estimée à 14 millions d’euros en 2014 par l’évaluation préalable. La dépense concernant les entreprises créées depuis 2011, le coût moyen annuel de l’exonération à taux plein par génération est estimée à 4,6 millions d’euros. Par convention, il est estimé que le coût en première année de création est de 4 millions d’euros puis de 5 millions d’euros en régime de croisière.

À la suite de la modification des ZRR, 4 000 communes sortiront du dispositif et 3 000 y entreront. Le coût de la dépense fiscale associée aux 4 000 communes sortantes est estimé à 4 millions d’euros sur les 14 millions d’euros que coûte le dispositif en 2014. Le coût futur du dispositif sur les 3 000 communes entrantes n’a pu être estimé. Le solde de communes étant négatif (1 000 communes), le coût générationnel avec le nouveau zonage devrait être légèrement inférieur au coût générationnel avec l’ancien zonage. Par prudence, il est néanmoins considéré inchangé dans la suite des calculs. Les coûts calculés ci-après constituent donc de légers majorants.

Sur cette base, la chronique du coût de l’exonération à 100 % les cinq premières années d’exercice, à 75 %, 50 % et 25 % respectivement sur les sixième, septième et huitième années d’exercice est présentée dans le tableau suivant.

SURCOÛT LIÉ AUX MOINDRES RECETTES
D’IMPÔT SUR LE REVENU ET D’IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS

(en millions d’euros)

Exercices

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

2026

2027

2028

Total

2016

4

5

5

5

5

4

3

1

       

32

2017

 

4

5

5

5

5

4

3

1

     

32

2018

   

4

5

5

5

5

4

3

1

   

32

2019

     

4

5

5

5

5

4

3

1

 

32

2020

       

4

5

5

5

5

4

3

1

32

Total

4

9

14

19

24

24

21

18

13

8

4

1

158

Source : évaluation préalable de l’article 18 du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

Ensuite, l’impact sur les recettes de CFE et de CVAE a été évalué de la manière suivante.

Le coût de l’exonération de CFE prévue à l’article 1465 A du code général des impôts est estimé à 1 million d’euros en 2015. Le coût de l’exonération de CVAE prévue par les articles 1465 A et 1586 nonies III du code général des impôts est estimé à 2 millions d’euros.

Ces exonérations s’appliquant aux entreprises créées depuis 2011, le coût global concerne trois générations, soit un coût annuel par génération d’1 million d’euros et un coût générationnel sur cinq ans d’exonération de 5 millions d’euros.

Sur cette base, la chronique du coût de l’exonération à 100 % les cinq premières années d’exercice est présentée dans le tableau suivant.

SURCOÛT LIÉ AUX MOINDRES RECETTES DE CFE ET DE CVAE

(en millions d’euros)

Exercices

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

2026

2027

2028

Total

2016

1

1

1

1

1

             

5

2017

 

1

1

1

1

1

           

5

2018

   

1

1

1

1

1

         

5

2019

     

1

1

1

1

1

       

5

2020

       

1

1

1

1

1

     

5

Total

1

2

3

4

5

4

3

2

1

0

0

0

25

Source : évaluation préalable de l’article 18 du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

L’impact financier des nouveaux critères de classement en ZRR est donc considéré comme marginal.

Un chiffre de 2 millions d’euros est avancé pour le coût supporté par les collectivités territoriales mais le mode de calcul n’est pas détaillé. En tout état de cause, ce coût dépendra des décisions prises par chaque collectivité, ce qui le rend difficile à prévoir.

*

* *

La commission est saisie de l’amendement CF 228 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Jusqu’à présent, 14 691 communes étaient classées en zone de revitalisation rurale (ZRR). L’article 18 réforme la définition de ces zones en la fondant sur deux nouveaux critères : la faible densité de population et un revenu fiscal par unité de consommation inférieur à la moyenne. Cela me paraît trop vague.

Par cet amendement qui se veut constructif, je propose d’ajouter trois critères qui me paraissent pertinents pour définir la ruralité : un nombre d’infrastructures routières inférieur à la densité moyenne nationale, un nombre d’infrastructures ferroviaires inférieur à la densité moyenne nationale et une quantité de services publics inférieure à la densité moyenne nationale.

Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Il en résulte une définition plus restrictive des ZRR. Votre intention est-elle donc de réduire le nombre de communes qui sont classées en ZRR ?

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Je souhaite surtout qu’elles le soient à bon escient.

Mme la Rapporteure générale. Il me semble néanmoins que nous avons intérêt à conserver ce statut à un certain nombre de communes. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement CF 228.

Elle examine ensuite l’amendement CF 209 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Aux termes de cet amendement, afin de ménager une transition progressive, les quelque 4 000 communes que le nouveau classement exclut des ZRR auraient trois ans pour s’adapter à leur nouvelle situation. Pendant cette période, elles continueraient de bénéficier de toutes les mesures liées au dispositif.

Mme la Rapporteure générale. Si une société a droit cette année à une exonération fiscale parce qu’elle est installée dans une commune classée en ZRR, elle en bénéficiera jusqu’à son terme. L’exonération d’impôt sur les bénéfices s’étendant sur huit ans, elle continuera d’en bénéficier. L’article 18 permet également aux sociétés de rester exonérées de cotisation foncière des entreprises (CFE) et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) pour la durée qui reste à courir, même après le déclassement de la commune. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement 209.

Puis elle adopte l’article 18 sans modification.

*

* *

Article 19
Création d’un comité consultatif pour le crédit d’impôt recherche
et le crédit d’impôt innovation

Conformément aux orientations formulées par le Comité national de lutte contre la fraude du 22 mai 2014 et à l’annonce du ministre des finances et du secrétaire d’État au budget le 1er avril dernier dans le cadre de leur conférence de presse sur l’amélioration des relations entre administration fiscale et entreprises, le présent article instaure un comité consultatif du crédit d’impôt pour dépenses de recherche.

Intervenant avant la fin d’un contrôle fiscal, en cas de désaccord du contribuable sur les rectifications notifiées par l’administration fiscale, cette instance de conciliation doit donner un avis sur l’éligibilité des dépenses au crédit d’impôt recherche (CIR) ainsi qu’au crédit d’impôt innovation (CII), lequel est réservé aux petites et moyennes entreprises (PME) au titre de leurs dépenses d’innovation. La création d’une telle instance spécifique correspond à la technicité des dépenses de recherche, qui implique de disposer de compétences particulières pour définir leur éligibilité au regard des conditions définies par l’article 244 quater B. Les avis délivrés par ce comité sont consultatifs ; ils ont vocation à être communiqués au contribuable.

● En application de l’article 244 quater B du code général des impôts (CGI), les entreprises qui exposent des dépenses de recherche peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt, dit « crédit d’impôt recherche ». Institué en 1983, ce crédit d’impôt a été progressivement étendu à toutes les entreprises et son mode de calcul a été modifié pour le rendre plus incitatif.

Assis, à l’origine, sur les dépenses supplémentaires de recherche, le crédit d’impôt a été majoré par la loi de finances pour 2004 (183) d’une part calculée sur le volume total des dépenses de recherche. La part calculée sur l’accroissement des dépenses a ensuite diminué progressivement jusqu’à sa disparition, en 2006.

Depuis 2008, l’excédent de CIR qui n’a pu être imputé constitue une créance auprès de l’État qui peut être utilisée pour le paiement de l’impôt pendant trois ans et il est possible de demander le remboursement de l’éventuel reliquat existant à l’issue de cette période. Le plafond de 16 millions d’euros a été supprimé.

Le CIR est désormais égal à 30 % des dépenses de recherche lorsque celles-ci sont inférieures ou égales à 100 millions d’euros et 5 % pour la fraction des dépenses de recherche au-delà de ce seuil.

Les dépenses prises en compte pour le calcul du CIR sont définies aux a à j du II de l’article 244 quater B et peuvent être regroupées en cinq grandes catégories :

– amortissements des immobilisations affectées à la recherche ;

– dépenses de personnel et dépenses de fonctionnement ;

– dépenses de recherche externalisées ;

– dépenses relatives aux brevets et certificats d’obtention végétale ;

– dépenses de normalisation afférentes aux produits de l’entreprise et dépenses de veille technologique.

● L’article 71 de la loi de finances pour 2013 (184) a étendu le régime du CIR à certaines dépenses d’innovation en faveur des entreprises qui répondent à la définition des micro, petites et moyennes entreprises au sens du droit de l’Union européenne. Ce dispositif, qui correspond au crédit d’impôt innovation (CII), est codifié au même article que le CIR « général », par l’introduction d’un k au sein du II de l’article 244 quater B du CGI : alors que les dépenses « en aval » de la recherche sont exclues du CIR (185), le CII permet aux PME de prendre en compte dans la base de calcul de leur crédit d’impôt certaines dépenses relatives à la réalisation d’opérations de conception de prototypes ou installations pilotes de nouveaux produits.

Les dépenses éligibles au nouveau dispositif sont plafonnées à hauteur de 400 000 euros par an et le taux du crédit d’impôt calculé au titre de ces dépenses est fixé à 20 %.

Pour l’application du k du II de l’article 244 quater B du CGI, est considéré comme nouveau produit un bien corporel ou incorporel qui satisfait aux deux conditions suivantes :

– il n’est pas encore mis sur le marché ;

– il se distingue des produits existants ou précédents par des performances supérieures sur le plan technique, de l’écoconception, de l’ergonomie ou de ses fonctionnalités.

● Du fait de ces réformes successives, le CIR est devenu la première source de soutien public des dépenses de recherche et développement (R&D) des entreprises. Le nombre de bénéficiaires a plus que triplé depuis 2008, atteignant 20 465 entreprises en 2014.

La dépense fiscale afférente au CIR a crû de manière continue depuis 2007, pour être portée à plus de 5 milliards d’euros en 2014, soit un montant représentant 0,24 % du PIB. Il convient de noter que les montants très élevés constatés en 2009 et 2010 résultaient de la possibilité, introduite dans le cadre du plan de relance, pour les entreprises d’obtenir le remboursement anticipé de leurs créances de CIR au titre d’exercices précédents et à venir.

ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE FISCALE ET DU NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

CIR

Dépense fiscale
(en millions d’euros)

1 000

1 500

6 200

4 900

3 070

3 370

3 269

5 108

5 270 

5 510 

Nombre de bénéficiaires

nd

5 600

12 800

14 000

14 300

15 000

16 200

20 465

CII

Dépense fiscale
(en millions d’euros)

68

70

70

Nombre de bénéficiaires

3 125

Source : tome 2 de l’annexe Voies et moyens annexés aux projets de lois de finances

Le CII représente des montants plus modestes, de l’ordre de 70 millions d’euros, pour 3 125 bénéficiaires en 2014 (186).

B. LE CONTRÔLE DES DÉPENSES ÉLIGIBLES

● Le CIR et le CII peuvent être vérifiés dans le cadre de contrôles fiscaux globaux ou ciblés de droit commun. En outre, l’administration fiscale peut demander des compléments d’information à la suite de la déclaration.

L’administration fiscale demeure seule compétente pour l’application des procédures de rectification. Néanmoins, la procédure de contrôle du CIR et du CII s’avère spécifique puisque, en application de l’article L. 45 B du livre des procédures fiscales, elle peut faire intervenir des agents du ministère chargé de la recherche et de la technologie pour vérifier la réalité de l’affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du CIR. Pour effectuer ce contrôle, ils peuvent se rendre dans les entreprises après envoi d’un avis de visite pour consulter les documents comptables et autres justificatifs en vue de s’assurer de la réalité des dépenses affectées à la recherche mais aussi consulter les documents techniques, effectuer toutes constatations matérielles, procéder à des vérifications techniques en vue de s’assurer de la réalité de l’activité de recherche à laquelle les dépenses sont affectées. Leur rôle est déterminant pour se prononcer sur l’éligibilité des projets de recherche, mais il n’est que consultatif, l’administration fiscale garantissant les droits du contribuable vérifié durant la procédure de contrôle.

Un rapport de la Cour des comptes sur l’évolution du crédit d’impôt en faveur de la recherche, publié en juillet 2013 (187), indiquait d’ailleurs que le nombre d’expertises demandées au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche avait fortement crû entre 2008 et 2012, passant ainsi de 458 à 1 578, soit un triplement en l’espace de cinq ans.

● Cette forte hausse illustre la technicité du contrôle fiscal opéré en matière de CIR, et fait écho à ce que la Cour des comptes qualifie dans ce même rapport de « zones de risques propres au crédit d’impôt recherche ». Si la doctrine administrative définit désormais les opérations de recherche et développement (R&D) par référence au manuel de Frascati (188), les retours de pratiques auprès des entreprises montrent leur difficulté à extraire la R&D du reste de leurs activités et à les chiffrer. En dépit de l’existence d’une procédure de rescrit spécifique (189), qui permet aux entreprises de demander à l’administration si le projet de dépenses de recherche est éligible au CIR, l’appréciation de l’éligibilité de certaines dépenses peut soulever des questions, lorsqu’elles sont trop en amont des travaux de recherche et développement (études de faisabilité, études de conception industrielle) ou lorsqu’elles sont trop en aval (essais, ingénierie industrielle).

Selon la Cour, l’éligibilité de ces projets de R&D constitue ainsi le principal motif de rectification par l’administration fiscale, aux côtés du calcul des dépenses de personnel éligibles et de la prise en compte des dépenses de sous-traitance.

● En application de l’article L. 60 du livre des procédures fiscales, les résultats de ce contrôle sont notifiés à l’entreprise et communiqués à l’administration fiscale. Cette dernière engage un débat oral et contradictoire avec l’entreprise et est seule compétente pour notifier les rectifications.

Il n’existe actuellement aucune instance de recours permettant au contribuable de contester l’avis rendu par les fonctionnaires du ministère de la recherche et sur la base duquel sont motivées les rectifications notifiées par les services fiscaux.

II. LE DROIT PROPOSÉ

A. L’OBJECTIF : FACILITER LES RELATIONS ENTRE L’ADMINISTRATION ET LES CONTRIBUABLES, DIMINUER LE NOMBRE DE CONTENTIEUX

La création d’une « commission de recours spéciale pour les questions d’éligibilité au crédit d’impôt recherche » faisait déjà partie des orientations du Comité national de lutte contre la fraude du 22 mai 2014. Elle a été formellement annoncée le 1er avril 2015 par le ministre de finances et des comptes publics et le secrétaire d’État chargé du budget au cours de la conférence de presse sur l’amélioration des relations entre l’administration fiscale et les entreprises.

La mesure proposée permettra de soumettre les questions relatives à l’éligibilité des dépenses de recherche à un comité disposant des compétences techniques nécessaires. Les contribuables pourront présenter leurs arguments devant des personnes n’ayant pas pris part à la procédure de rectification, et disposer d’un deuxième avis sur la nature des dépenses engagées. Cette instance sera consultative : les avis qu’elle rendra ne lieront pas l’administration fiscale pour l’établissement de ses rectifications.

La création d’une instance spécifique a été préférée à un élargissement des compétences de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires (190), ou de la commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires (191) – laquelle est compétente pour les entreprises dont le chiffre d’affaires excède certains seuils. Ces commissions peuvent être amenées à intervenir dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire, lorsqu’un désaccord entre l’administration fiscale et le contribuable porte sur certains domaines, limitativement énumérés par l’article L. 59 A du livre des procédures fiscales (192).

Néanmoins, comme le souligne l’évaluation préalable du présent article, ces commissions comprennent des représentants des contribuables et de l’administration ; au-delà de la question de la technicité des sujets abordés dans le cadre de l’examen des dépenses éligibles au CIR et au CII, l’exposé des litiges portant sur ces deux crédits d’impôts devant ces commissions soulèverait des difficultés au regard du secret commercial des entreprises – les projets en matière de recherche et d’innovation impliquant en effet des investissements matériels et financiers que les entreprises protègent par le secret commercial.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

1. Composition du comité consultatif

Le I insère un nouvel article 1653 F dans le chapitre de la troisième partie du CGI consacré aux commissions administratives des impôts et au comité de l’abus de droit fiscal.

Le nouvel article 1653 F institue le comité consultatif du crédit d’impôt pour dépenses de recherche.

Sa composition est précisée au deuxième alinéa : le conseiller d’État assurant la présidence du comité sera désigné par le vice-président du Conseil d’État et pourra être suppléé par deux magistrats administratifs nommés dans les mêmes conditions.

Le 2 du nouvel article 1653 F décrit les trois formations possibles du comité :

− une formation « recherche », pour l’examen des litiges relatifs aux dépenses prévues aux a à j du II de l’article 244 quater B, soit les dépenses ouvrant droit au CIR, avec un haut fonctionnaire du ministère chargé de la recherche et un de l’administration fiscale ;

– une formation « innovation », pour l’examen des litiges relatifs aux dépenses prévues au k du II de l’article 244 quater B, soit les dépenses ouvrant droit au CII, avec un haut fonctionnaire du ministère chargé de l’innovation et un de l’administration fiscale ;

− une formation mixte « recherche & innovation », pour l’examen des litiges relatifs aux dépenses prévues aux a à j et au k du II de l’article 244 quater B, soit à la fois les dépenses relevant du CIR et du CII, avec un haut fonctionnaire du ministère chargé de la recherche, un du ministère chargé de l’innovation et un de l’administration fiscale.

Trois règles sont également précisées :

– tant le fonctionnaire du ministère chargé de la recherche que celui du ministère chargé de l’innovation, selon la formation concernée, pourront, s’ils l’estiment utile, être assistés de toute personne susceptible d’apporter une expertise sur la qualification des dépenses ;

– les personnes ayant déjà eu à connaître du litige ont un devoir de retrait ;

– le président a voix prépondérante.

2. Modalités de saisine du comité consultatif et portée de ses avis

Le II modifie ensuite le livre des procédures fiscales.

Le A du II définit les modalités de saisine du comité consultatif ainsi créé dans le cadre de la procédure de redressement contradictoire, en complétant l’article L. 59 du livre des procédures fiscales. Ces modalités de saisine sont alignées sur celles prévues pour les commissions départementales et nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires (193) : en cas de désaccord persistant entre l’administration fiscale et le contribuable sur les rectifications notifiées en matière de CIR ou de CII, lorsque le contribuable le demande, l’administration fiscale soumet le litige à l’avis du comité consultatif pour dépenses de recherche. Le comité peut également être saisi à l’initiative de l’administration.

Le B du II insère un nouvel article L. 59 D au sein du livre des procédures fiscales, précisant le mandat du comité consultatif créé à l’article 1653 F du CGI : celui-ci n’intervient que lorsque le désaccord entre l’administration fiscale et le contribuable porte sur la réalité de l’affectation à la recherche des dépenses. Un deuxième alinéa, reprenant les termes de l’article L. 59 A applicable aux commissions des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, précise que le comité ne tranche pas de questions de droit ; il se prononce uniquement sur les faits susceptibles d’être pris en compte pour l’examen de cette question de droit, qui continue de relever de l’administration fiscale et du juge.

Il s’agit d’un avis consultatif, de même que ceux formulés par les commissions précitées, qui permet de disposer d’un deuxième regard sur l’éligibilité des dépenses au titre du CIR. À la différence de la procédure prévue devant le comité de l’abus de droit, par exemple, dans le cadre de laquelle l’administration fiscale doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification si elle ne s’est pas conformée à l’avis du comité, il appartient à l’administration de s’appuyer sur l’avis du comité consultatif, sans être toutefois liée par lui. Ainsi que l’indique l’évaluation préalable, « la création de cette instance est de nature à améliorer les relations entre l’administration et les entreprises et contribuera à réduire les contentieux portés devant les juridictions en matière de CIR et de CII. » Cet avis sera communiqué au contribuable avant la mise en recouvrement des impositions supplémentaires.

3. Règles de fonctionnement et entrée en vigueur

Le C du II garantit au contribuable l’accès à tous les documents utilisés par l’administration à l’appui de sa thèse et, notamment, au rapport du comité consultatif, là encore selon les mêmes modalités que dans le cadre des travaux des commissions des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, en modifiant l’article L. 60 du livre des procédures fiscales. Cette communication doit être faite sous réserve du secret professionnel relatif aux renseignements concernant d’autres contribuables.

Le D et le E du II permettent aux agents de l’administration fiscale, du ministère de la recherche et du ministère chargé de l’innovation de communiquer toutes les informations utiles au comité consultatif, en instaurant une nouvelle dérogation à la règle du secret professionnel à laquelle sont soumises ces administrations, par l’introduction d’un article L. 136 A au sein du livre des procédures fiscales.

Le III prévoit une entrée en vigueur de la mesure au 1er juillet 2016 afin de permettre l’adoption des textes réglementaires qui s’imposent, à savoir :

– un décret en Conseil d’État pour la modification des articles R. 59-1, R. 60-1, R. 60-2, R. 60-3 et R. 201-1 du livre des procédures fiscales ;

– un décret simple pour la modification des articles R. 60-1 A et R. 60-2 A du livre des procédures fiscales et la création des articles R. 60-2 B du livre des procédures fiscales et 350 CA de l’annexe III au CGI ;

– la publication de commentaires au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP).

*

* *

La commission aborde l’amendement CF 211 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. L’article 19 crée un comité consultatif pour le crédit d’impôt recherche (CIR) et le crédit d’impôt innovation (CII), ce qui préfigure une remise en cause future du CIR. Ce faisant, on suggère que le CIR donne lieu à de nombreux précontentieux. J’estime qu’il doit être maintenu en l’état et que ses dérives éventuelles doivent être traitées dans le cadre du contentieux fiscal classique. C’est pourquoi je propose de supprimer l’article.

Mme la Rapporteure générale. Il me semble au contraire que la création de ce comité sécurise le CIR, notamment pour les PME. Des rescrits, indiquant clairement la doctrine de l’administration fiscale sur tel ou tel point, pourront être demandés en amont, avant que les entreprises aient eu besoin d’aller au contentieux. Cette étape bienvenue est demandée par les bénéficiaires, qui peuvent se trouver soumis à des contrôles fiscaux sans bien comprendre pourquoi. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Si je comprends bien, l’avis du comité est purement consultatif.

Mme la Rapporteure générale. Oui, mais il est possible de demander un rescrit.

M. Charles de Courson. Mais c’est de l’administration fiscale qu’émane ce rescrit.

Mme la Rapporteure générale. Il n’empêche que le comité peut interpréter la situation de telle ou telle entreprise et formuler son avis.

M. Charles de Courson. Soit la dépense est éligible, soit elle ne l’est pas !

Mme la Rapporteure générale. Si elle ne l’est pas, le comité ne sollicitera pas l’administration fiscale. Mais, s’il estime qu’elle l’est, cela donnera du poids à cette position.

M. Charles de Courson. Comment fonctionne la saisine ? Est-ce le contribuable ou l’administration qui saisit le comité ? Prenons garde de ne pas rejouer l’affaire de la commission des infractions fiscales !

Mme la Rapporteure générale. Le contribuable s’adresse au comité, qui peut demander un rescrit à l’administration fiscale. Il n’est pas prévu que ce soit l’administration qui saisisse le comité : elle est le dernier recours. Mais rien ne lui interdit de le consulter.

M. Charles de Courson. Par ailleurs, l’article précise que « ce comité peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d’être pris en compte pour l’examen de cette question de droit ». C’est de la haute voltige ! Pourquoi le comité ne pourrait-il se prononcer à l’occasion de sa saisine par tel ou tel contribuable ? À l’administration de confirmer ou d’infirmer cet avis.

Mme la Rapporteure générale. Présidé par un conseiller d’État, ce qui lui confère une certaine autorité, le comité donne son avis sur l’éligibilité d’une dépense au CIR. Il s’agit d’un avis consultatif, sur lequel l’administration fiscale est libre de s’appuyer ou non. Si l’administration juge cet avis intéressant, elle peut ensuite émettre un rescrit.

La commission rejette l’amendement CF 211.

Elle en vient ensuite à l’amendement CF 100 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Année après année, nous constatons l’efficacité du CIR. Même s’il est coûteux, le jeu en vaut la chandelle. Toutes les entreprises bénéficiaires, notamment les start-up, nous demandent de ne plus toucher au CIR. La stabilité fiscale est respectée cette année : on peut s’en féliciter, même si certains n’ont de cesse de vouloir détricoter le dispositif.

Un problème demeure, dont m’ont fait part de nombreux chefs d’entreprise : recourir au CIR, c’est très souvent s’assurer un contrôle fiscal destiné à vérifier la réalité des dépenses de recherche. Ces contrôles, qu’il ne s’agit évidemment pas de contester, sont quasi systématiques et vécus comme l’effet d’une méfiance ciblée.

La majorité ne nie pas ce problème puisque, pour le résoudre, l’article 19 crée un comité consultatif destiné à régler les litiges liés à l’utilisation du CIR. Toutefois, à titre personnel, je ne suis pas d’accord avec ce choix, pour deux raisons. Premièrement, ce comité, présidé par un conseiller d’État, aura un coût, qui n’est d’ailleurs pas précisé. Deuxièmement, il sera installé au niveau national, ce qui signifie qu’il n’interviendra pas au plus près des entreprises.

Je propose donc que l’on s’appuie plutôt sur des structures départementales qui existent déjà : les commissions départementales des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires. La seule modification apportée à leur composition consisterait à y faire siéger un expert du ministère de la recherche en cas de litige relatif au CIR.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable. Selon les départements, on apprécie diversement ce que sont les dépenses de recherche. Or, il s’agit ici d’harmoniser les points de vue, au profit d’une conception généralisée de l’éligibilité au dispositif.

M. Dominique Lefebvre. Nous sommes plusieurs à avoir été informés de litiges concernant l’interprétation et les modalités d’application du CIR. Dans le cas d’une entreprise de ma circonscription, l’expert désigné par le ministère de la recherche, sur l’avis duquel l’administration fiscale doit s’appuyer, était le même lors du recours qu’en première instance : cela créait un biais. S’il est tout à fait possible de déclarer que certaines dépenses ne sont pas éligibles au CIR, il faut le faire dans le cadre d’une procédure d’appel simple. Et, s’agissant de certains critères, ce n’est pas l’administration fiscale qui peut en décider. La création de ce comité au niveau national, à des fins d’harmonisation, est donc effectivement une très bonne chose.

Mme Véronique Louwagie. Si j’ai bien compris, le comité intervient en cas de désaccord, ce qui implique que le contact soit déjà établi entre l’administration et l’entreprise.

L’avis émis par le comité est-il opposable à l’administration ? Il semble que non. Que se passera-t-il si le comité estime que les dépenses sont éligibles et si l’administration se prononce ensuite différemment, par une rectification, un redressement ?

Mme la Rapporteure générale. La question est tout à fait pertinente. L’avis est consultatif : il n’est donc pas opposable. En revanche, il permet un dialogue avec l’administration fiscale, s’agissant généralement de PME — car ce ne sont pas les grandes entreprises qui font l’objet de ces redressements — ayant déclaré de bonne foi des dépenses qui se révèlent inéligibles. Dans un cas tel que celui que vous évoquez, le comité jouit d’une forme d’autorité. Mais, je le répète, son avis est purement consultatif.

La commission rejette l’amendement CF 100.

Puis elle en vient à l’amendement CF 101 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Selon le texte, au sein du comité, « l’agent du ministère chargé de la recherche et l’agent du ministère chargé de l’innovation peuvent, s’ils l’estiment utile, être assistés par toute personne susceptible d’apporter une expertise sur la qualification des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d’impôt [recherche] ». Il serait utile d’ajouter que ces experts supplémentaires ne participent pas au vote, pour éviter qu’ils ne puissent le faire basculer.

Cette précision me semble être d’ordre législatif, à l’instar de l’alinéa 9, qui concerne également les modalités de vote : il indique que le président a voix prépondérante.

Mme la Rapporteure générale. Sagesse.

La commission adopte l’amendement CF 101 (amendement 327).

Puis elle adopte l’article 19 modifié.

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Après l’article 19

La commission est saisie de l’amendement CF 1 de M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Pour ceux qui auraient manqué les précédents épisodes du feuilleton, rappelons que l’activité touristique de nos départements d’outre-mer (DOM) étouffe à cause de la concurrence de leurs voisins immédiats, dont les coûts de main-d’œuvre sont cinq à dix fois inférieurs aux leurs. Nous proposons de compenser partiellement ce défaut de compétitivité en portant à 18 % le taux du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) applicable dans ces départements.

Nos discussions précédentes à ce sujet, en commission et en séance publique, ont permis des progrès : tout le monde a reconnu qu’il y avait là un véritable problème, propre à ces régions ultrapériphériques. Nous avons également progressé s’agissant de la compatibilité avec le droit communautaire, puisque j’ai montré, textes à l’appui, qu’il n’y aurait pas lieu de notifier cette disposition à la Commission européenne.

Reste le montant de la dépense fiscale, évaluée à une trentaine de millions d’euros. Elle pourrait être compensée par la résorption des dettes sociales et fiscales des professionnels du tourisme, qui représentent 17 millions d’euros pour la seule Martinique, au moins quatre fois plus pour l’ensemble des DOM ; par les recettes supplémentaires issues du développement de l’activité ; enfin par la réduction des dépenses de chômage, un chômage qui touche deux fois plus de personnes dans les DOM qu’en métropole.

Si ces compensations ne suffisent pas à rassurer Bercy, que le ministère examine au moins, au cours des mois qui viennent, la possibilité, en maintenant la même enveloppe de dépense fiscale destinée au CICE, de limiter la hausse du taux s’agissant d’activités moins exposées à la concurrence immédiate et de consacrer au tourisme l’économie ainsi réalisée.

Mme la Rapporteure générale. Nous avons examiné le même amendement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, et le ministre avait apporté plusieurs précisions en séance.

En effet, tout le monde a reconnu le problème et la nécessité de soutenir les établissements touristiques ultramarins face à la concurrence des îles voisines qui ne sont pas françaises. Mais le CICE est-il l’outil le plus adapté pour résoudre ce problème ?

Je suis favorable à ce que nous en débattions à nouveau en séance ; mais, à ce stade et faute d’un éclairage supplémentaire du Gouvernement, mon avis est défavorable.

M. Patrice Martin-Lalande. En séance, le ministre a simplement émis un avis défavorable : je ne vois là nul argument nouveau qui ferait progresser la discussion. Mais j’espère que l’ouverture que vous ménagez nous permettra d’obtenir en séance de plus amples explications, alors même que la compatibilité européenne n’est plus discutée et que seul perdure le problème de la dépense.

La commission rejette l’amendement CF 1.

Elle aborde ensuite l’amendement CF 114 de M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Cet amendement reprend le précédent, en modifiant simplement la date d’entrée en vigueur de la mesure.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 114.

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Article 20
Adaptation des dispositions relatives à la révision des valeurs locatives
des locaux professionnels

Le présent article apporte plusieurs corrections au dispositif de révision des valeurs locatives des locaux professionnels, dont les principes ont été posés dans l’article 34 de la quatrième loi de finances rectificative du 29 décembre 2010 (194).

Il vise à permettre la prise en compte des dernières simulations réalisées par le Gouvernement au cours de l’été 2015, qui font état de transferts potentiels importants entre contribuables.

Afin de neutraliser ce problème, le présent article prévoit plusieurs mesures :

– la prise en compte de la revalorisation des valeurs locatives dans les bases d’imposition est reportée de 2016 à 2017, conformément à l’annonce du secrétaire d’État chargé du budget le 25 mars 2015 ;

– le dispositif de lissage des variations de cotisations sera renforcé : l’étalement des augmentations, actuellement prévu sur cinq années, est porté à dix ans. Ce lissage concernera l’ensemble des variations et non plus seulement les plus importantes ;

– par symétrie, le dispositif d’écrêtement dégressif des baisses de cotisations résultant de la réforme est porte de cinq à dix ans.

Le présent dispositif ne concerne donc pas la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation prévue l’article 74 de la loi de finances rectificative pour 2013 (195).

I. L’ÉTAT DU DROIT

A. LA NÉCESSITÉ D’UNE RÉVISION DES VALEURS LOCATIVES

La révision des valeurs locatives est un projet politique de grande ampleur demandé par de nombreux élus depuis de nombreuses années ; constituant l’assiette des principaux impôts locaux, cette révision est donc un préalable indispensable à la modernisation de ces taxes et à la dynamisation de leur produit.

1. Un système d’évaluation complexe caractérisé par l’obsolescence des bases

Les valeurs locatives cadastrales servent d’assiette à l’essentiel de la fiscalité directe locale : taxe d’habitation, taxes foncières, cotisation foncière des entreprises et taxes additionnelles dont la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.

Elles sont évaluées selon un processus d’une grande complexité qui fait obstacle à la fois à la lisibilité des impôts locaux et à leur modernisation.

La complexité des mécanismes actuels d’évaluation de la valeur locative servant d’assiette a fait l’objet de nombreux rapports, au premier rang desquels un rapport de la Cour des comptes de 2009 (196) et un rapport du Sénat destiné à évaluer le processus de révision des valeurs locatives professionnelles et commerciales (197).

a. Les propriétés à usage d’habitation

Si la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation n’entre pas à proprement parler dans le champ de la réforme opérée par le présent article, la Rapporteure générale a rappelé que celles-ci font par ailleurs l’objet d’une réforme parallèle.

Il n’est donc pas inutile de rappeler leurs modalités de calcul, compte tenu notamment des débats qui ont eu lieu lors de l’examen en première lecture du projet de loi de finances initiale pour 2016 sur les difficultés d’évaluer les effets des réformes opérées dans le domaine de la fiscalité locale.

Les propriétés à usage d’habitation représentent 30 millions de locaux. Le calcul de leur valeur locative revient à multiplier une surface pondérée, obtenue après de nombreuses opérations, par le tarif de la catégorie dans laquelle est classé le bien.

Afin de déterminer cette valeur locative, l’administration suit treize étapes distinctes qui sont retracées dans le tableau ci-dessous.

LES DIFFÉRENTES ÉTAPES DE LA DÉTERMINATION DE LA VALEUR LOCATIVE
D’UNE HABITATION

1

La propriété à usage d’habitation est d’abord classée dans une catégorie en fonction des éléments de confort qu’elle est supposée détenir.

Il existe 8 catégories elles-mêmes subdivisées en sous-catégories allant du local très dégradé (catégorie 8) au grand luxe (catégorie 1).

2

Une surface pondérée comparative est ensuite calculée.

L’administration fiscale part de la surface au sol du local, différente des modalités de calcul en « loi Carrez » ; cette surface est ensuite pondérée par l’appartenance à plusieurs catégories de locaux : pour une maison individuelle, les premiers 20 m2 sont affectés d’un coefficient variant de 3 (en catégorie 1) à 1,1 (en catégorie 8) ; les mètres carrés suivants sont affectés d’un coefficient uniforme de 0,9 jusqu’à un plafond correspondant à la norme de la catégorie ; les mètres carrés supplémentaires sont affectés d’un coefficient de 0,75.

3

La surface pondérée nette est alors déterminée grâce à un correctif appliqué à la surface pondérée comparative, pour tenir compte de l’état d’entretien de la partie principale.

4

Un coefficient de situation générale et particulière est affecté à la surface pondérée nette en fonction de la situation générale du bien dans la commune (proximité ou éloignement du centre-ville, cadre tranquille, risques d’inondation) et de sa situation particulière (exposition, présence d’espaces verts, présence ou absence de dépendantes non bâties, etc.).

5

Le confort de l’habitation est examiné pour obtenir une équivalence superficielle. Les divers éléments, supposés illustrer un surcroît ou une déficience de confort, ajoutent ou retranchent des mètres carrés.

Ainsi, une salle de bain augmente la surface de 5 m2. Chaque pièce de l’habitation bénéficiant d’un chauffage central accroît la surface de 2 m2. Un vide-ordures compte pour 3 m2 et l’eau courante pour 4 m2.

6

Les mêmes calculs sont effectués pour les dépendances tels que les garages, les places de stationnement, les hangars, etc. Un garage ou une place de stationnement dans un garage collectif doté d’une prise d’eau courante est, par exemple, davantage taxé que la même dépendance qui n’en bénéficie pas.

7

Le total de ces pondérations successives donne la surface pondérée totale.

8

La surface pondérée totale est multipliée par le tarif de la catégorie dans la partie de commune concernée pour donner la valeur locative de 1970, date de la dernière révision des bases.

9

Cette valeur locative de 1970 est ensuite actualisée en valeur de 1980, année de la dernière et unique actualisation intervenue pour tenir compte de l’évolution locale du prix des loyers, qui s’était faite au moyen de coefficients départementaux.

10

La valeur locative de 1980 est enfin revalorisée par un taux annuel voté en loi de finances.

11

Cette valeur revalorisée est divisée par deux pour donner le montant du revenu cadastral.

12

Le revenu cadastral se voit affecter un taux voté par chaque collectivité concernée (commune, intercommunalité, département, région), auquel s’ajoute la part de la taxe pour l’enlèvement des ordures ménagères (TEOM). Le produit du revenu cadastral par le taux détermine l’impôt dû à chaque collectivité

13

Le total de l’impôt, toutes collectivités confondues, est majoré d’un taux de 3 % représentant le prélèvement de l’État pour frais de gestion.

Après ces treize opérations successives, les services fiscaux sont en mesure de déterminer le montant de la taxe sur le foncier bâti. À partir de la valeur locative, ils procèdent au calcul de la taxe d’habitation qui fait entrer en jeu des éléments qui ne sont plus seulement liés à la valeur du bien comme le revenu des habitants ou le nombre de personnes à charge.

L’encadré ci-après fournit un exemple concret de calcul à partir d’un exemple précis.

EXEMPLE DE CALCUL DU MONTANT EXIGIBLE POUR UN LOCAL DE CATÉGORIE 5

Source : Cour des comptes.

b. Les locaux industriels

La détermination de la valeur locative cadastrale est une opération moins complexe, dans la mesure où elle se fonde sur une méthode comptable, à savoir le prix de revient des différents éléments (terrain, constructions), revalorisé annuellement par les coefficients prévus en matière de révision des bilans.

c. Les locaux commerciaux

Trois méthodes distinctes peuvent être utilisées.

– Le local peut être évalué au moyen des baux sous réserve qu’il ait été loué à des conditions de prix normales au 1er janvier 1970 ou, à défaut, par la méthode d’appréciation directe.

L’évaluation à partir des baux conclus avant 1970 représente désormais moins de 4 % de l’ensemble de ces locaux.

– L’évaluation par comparaison, qui est aujourd’hui la plus utilisée, consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d’autres biens de même nature pris comme cas types.

L’exercice de la comparaison suppose qu’il existe une possibilité de comparer. Les agents des services fiscaux doivent donc trouver un local type, existant en 1970, ce qui n’est pas forcément le cas par exemple pour les hypermarchés ou les complexes cinématographiques souvent apparus après cette date.

– Enfin, l’évaluation par appréciation directe consiste à déterminer la valeur locative à partie de la valeur vénale du local appréciée en valeur de l’année 1970, affectée d’un taux d’intérêt. Elle concerne environ 1 % des évaluations mais s’applique à des entreprises de taille importante.

2.  Un processus fragile, incertain et coûteux

Au-delà de la complexité du dispositif et de l’obsolescence des bases de calcul, qui suscitent par construction des inégalités entre contribuables pourtant situés dans une situation comparable, cette méthode est juridiquement incertaine et budgétairement coûteuse.

Malgré la multiplicité des critères mentionnés ci-dessus pour établir la valeur du bien, l’administration fiscale ne peut, en premier lieu, que s’appuyer sur les permis de construire pour évaluer la surface d’un bien. Or, la précision de l’indication fournie dans ce document est d’une grande inégalité suivant les communes ; en outre, de nombreux changements de consistance du bien ne sont plus portés à la connaissance de l’administration, en particulier les travaux dont l’effet est la création d’une surface inférieure à 2 m2. Les travaux conduisant à la création d’une surface inférieure à 20 m2 sont soumis à simple déclaration. Enfin, ces formalités ne concernent pas, en tout état de cause, les modifications ou améliorations intérieures du bien.

De surcroît, la complexité du processus d’établissement augmente les risques d’erreurs. Si certaines des opérations mentionnées précédemment sont automatisées, l’évaluation du bien relève de l’appréciation subjective (classification dans une catégorie, appréciation de l’état d’entretien, situation générale du bien dans la commune). Il n’existe pas de statistiques de l’administration fiscale et les contrôles sont relativement limités en nombre.

Selon les évaluations réalisées dans le rapport de la Cour des comptes de 2009 précité, l’administration fiscale disposait en 2009 plus de 3 000 agents, sur un total de 6 000 agents du cadastre dans les services déconcentrés, affectés uniquement à ces tâches.

Pour financer l’établissement de ces impôts, le montant total de l’imposition du contribuable est majoré de divers frais de dégrèvement et de non-valeur dont le taux est fixé, par l’article 1641 du code général des impôts, à 2 % pour les impôts locaux, auquel il faut ajouter une majoration de 1 % au titre des frais d’assiette et de recouvrement.

B. LA MÉTHODE DE RÉVISION RETENUE EN 2010 : UN CIBLAGE SUR LES VALEURS LOCATIVES PROFESSIONNELLES

Les éléments exposés ci-dessus constituant des éléments objectifs largement partagés, la nécessité d’une réforme des valeurs locatives fait l’objet d’un consensus mais suppose une méthode permettant d’éviter que celle-ci ne s’oriente vers des transferts massifs d’imposition qui la conduiraient vers une impasse politique.

À cet effet, l’article 34 de la loi de finances rectificative mentionnée précédemment repose sur des principes permettant en principe d’éviter un tel écueil :

– la conservation de valeurs locatives administrées servant de base à la fiscalité directe locale, sans prise en compte de la valeur vénale des biens évoquée de temps en temps par certains interlocuteurs ;

– une révision s’opérant à pression fiscale constante pour chacune des grandes catégories de contribuables, les ménages et les entreprises ;

– une révision amorcée tout d’abord sur les locaux commerciaux et professionnels, pour mettre fin en priorité à l’inégalité dans l’évaluation des propriétés dont est victime le secteur industriel et éprouver une méthode de révision, sans susciter les inquiétudes légitimes sur les effets de transferts entre les ménages.

Le champ de cette révision porte donc sur :

– les locaux commerciaux évalués selon les dispositions de l’article 1498 du code général des impôts ;

– les locaux professionnels affectés à une activité mentionnée à l’article 92 du même code, c’est-à-dire imposables dans la catégorie des bénéfices des professions non commerciales.

1. Un principe : une évaluation simplifiée de la valeur locative de certains locaux

L’article 34 précité prévoit un nouveau mode de calcul de la valeur locative simplifié par rapport au calcul actuel, ainsi qu’une méthode d’évaluation subsidiaire.

Ce nouveau mode de calcul repose, comme le dispositif actuel, sur l’application à la superficie du local d’un revenu locatif au mètre carré déterminé par référence à sa localisation et sa destination.

a. Étape 1 : la taille du local

i. L’utilisation de la surface des parties

La surface pondérée du local sera obtenue par l’addition de la surface de toutes ses parties, réduite le cas échéant pour tenir compte de leur utilisation et de leurs caractéristiques physiques. En pratique, la pondération consistera donc à distinguer au sein du local la partie dite principale et ses annexes, la superficie de ces dernières étant affectée d’un coefficient de minoration. La pondération sera donc considérablement simplifiée par rapport à la situation actuelle, puisqu’elle devrait ne conduire qu’à distinguer les surfaces principales, celles des annexes couvertes et celles des annexes non couvertes.

ii. La pondération de cette surface

La pondération de la surface, analysée actuellement comme une source de complexité, est une nécessité liée à l’utilisation de valeurs locatives. Il est donc prévu de la conserver dans le futur dispositif.

b. Étape 2 : la nature du local

La deuxième étape du calcul consiste à placer le local dans la catégorie de locaux professionnels à laquelle il se rattache selon sa destination, son utilisation effective et ses caractéristiques particulières.

i. L’abandon de la méthode par comparaison avec un local type

Cet article 34 a prévu d’abandonner la méthode de 1970 dite « par comparaison » au profit d’une grille tarifaire. En effet, il a été observé que la gestion de la comparaison avec des locaux types souffre de deux faiblesses majeures :

– d’une part, les locaux types sont figés dans le temps de sorte qu’il devient de plus en plus difficile d’établir des comparaisons significatives ;

– d’autre part, l’actualisation des tarifs de chaque local type est une opération plus lourde que celle d’une grille tarifaire.

ii. La détermination des sous-groupes et des catégories

Le présent article propose donc de classer les propriétés dans une arborescence de sous-groupes de locaux professionnels, chacun étant subdivisé en catégories. À cette occasion, il est envisagé de réduire le nombre de catégories qui avaient été envisagées à l’occasion de la révision de 1990, tant dans une optique de simplification qu’afin de mieux correspondre à la réalité des activités économiques.

En application de cette disposition législative, le décret n° 2011-1267 du 10 octobre 2011 a défini 10 sous-groupes de locaux à usage commercial ou professionnel, chaque sous-groupe se subdivisant ensuite en plusieurs catégories. Au total, 39 catégories de locaux ont donc été établies.

LES CATÉGORIES DE LOCAUX PROFESSIONNELS POUR LA RÉVISION
DES VALEURS LOCATIVES

Sous-groupe

Catégorie

Sous-groupe I : magasins et lieux de vente
(MAG)

Catégorie 1 : boutiques et magasins sur rue

Catégorie 2 : commerces sans accès direct sur la rue

Catégorie 3 : magasins appartenant à un ensemble commercial

Catégorie 4 : magasins de grande surface (surface principale comprise entre 400 et 2 500 m²)

Catégorie 5 : magasins de très grande surface (surface principale supérieure ou égale à 2 500 m²)

Catégorie 6 : stations-service, stations de lavage et assimilables

Catégorie 7 : marchés

Sous-groupe II : bureaux et locaux divers assimilables (BUR)

Catégorie 1 : locaux à usage de bureaux d’agencement ancien

Catégorie 2 : locaux à usage de bureaux d’agencement récent

Catégorie 3 : locaux assimilables à des bureaux mais présentant des aménagements spécifiques

Sous-groupe III : lieux de dépôt ou de stockage et parcs de stationnement (DEP)

Catégorie 1 : lieux de dépôt à ciel ouvert et terrains à usage commercial ou industriel

Catégorie 2 : lieux de dépôt couverts

Catégorie 3 : parcs de stationnement à ciel ouvert

Catégorie 4 : parcs de stationnement couverts

Catégorie 5 : installations spécifiques de stockage

Sous-groupe IV : ateliers et autres locaux assimilables (ATE)

Catégorie 1 : ateliers artisanaux

Catégorie 2 : locaux utilisés pour une activité de transformation, de manutention ou de maintenance

Catégorie 3 : chenils, viviers et autres locaux assimilables

Sous-groupe V : hôtels et locaux assimilables (HOT)

Catégorie 1 : hôtels « confort » (4 étoiles et plus, ou confort identique)

Catégorie 2 : hôtels « supérieur » (2 ou 3 étoiles, ou confort identique)

Catégorie 3 : hôtels « standard » (1 étoile, ou confort identique)

Catégorie 4 : foyers d’hébergement, centres d’accueil, auberges de jeunesse

Catégorie 5 : hôtels-clubs, villages de vacances et résidences hôtelières

Sous-groupe VI : établissements de spectacles, de sports et de loisirs (SPE)

Catégorie 1 : salles de spectacles et locaux assimilables

Catégorie 2 : établissements ou terrains réservés à la pratique d’un sport ou à usage de spectacles sportifs

Catégorie 3 : salles de loisirs diverses

Catégorie 4 : terrains de camping confortables (3 étoiles et plus, ou confort identique)

Catégorie 5 : terrains de camping ordinaires (1 ou 2 étoiles, ou confort identique)

Catégorie 6 : établissements de détente et de bien-être

Catégorie 7 : centres de loisirs, centres de colonies de vacances, maisons de jeunes

Sous-groupe VII : établissements d’enseignement et locaux assimilables (ENS)

Catégorie 1 : écoles et institutions privées exploitées dans un but non lucratif

Catégorie 2 : établissements d’enseignement à but lucratif

Sous-groupe VIII : cliniques et établissements du secteur sanitaire et social (CLI)

Catégorie 1 : cliniques et établissements hospitaliers

Catégorie 2 : centres médico-sociaux, centres de soins, crèches, haltes-garderies

Catégorie 3 : maisons de repos, maisons de retraite (médicalisées ou non)

Catégorie 4 : centres de rééducation, de thalassothérapie, établissements thermaux

Sous-groupe IX : carrières et établissements industriels non évalués selon la méthode comptable (IND)

Catégorie 1 : établissements industriels nécessitant un outillage important autre que les carrières et assimilés

Catégorie 2 : carrières et établissements assimilables

Sous-groupe X : établissements présentant des caractéristiques exceptionnelles :

Catégorie 1 : locaux ne relevant d’aucune des catégories précédentes par leurs caractéristiques sortant de l’ordinaire

c. Étape 3 : la situation du local

Le classement du local dans l’une des catégories permet d’appliquer à sa surface pondérée le tarif au mètre carré fixé pour sa catégorie dans son secteur géographique, ce qui constitue la dernière étape du calcul.

i. La sectorisation des départements en fonction des loyers

L’article 34 précité fixe les modalités de sectorisation du marché locatif. L’unité de détermination serait le département, chaque secteur pouvant regrouper des communes ou des parties de communes, pourvu qu’il soit caractérisé par une certaine homogénéité des tarifs de location.

Les tarifs par mètre carré, dans chaque secteur ainsi déterminé et pour chaque catégorie de locaux, seront établis en fonction des relevés des loyers pratiqués. Faute de loyers en nombre suffisamment représentatif, le tarif du secteur pour une catégorie donnée peut être estimé à partir de celui d’une autre catégorie, voire d’un autre sous-groupe dans un autre secteur du département, à la condition que les niveaux de loyer y soient comparables.

ii. Le coefficient de localisation

Au terme de cette troisième étape, chaque local est affecté d’une valeur locative. L’article 34 précité reconduit cependant la faculté existant actuellement de la pondérer par un coefficient de localisation. Ce coefficient peut majorer ou minorer la valeur locative de 10 % ou de 15 %.

Cette souplesse applicable pour chaque local est un élément important, car elle permet d’alléger les contraintes pesant sur la détermination des secteurs homogènes pour chaque catégorie.

2. La prévision de mécanismes correctifs préalables à la généralisation

Avant même un quelconque retour des effets des principes de la réforme, le XVI de l’article 34 de la loi de finances rectificative pour 2010 précitée a prévu des mécanismes correctifs permettant de limiter les effets de transfert d’imposition prévisibles.

Selon ce paragraphe, le résultat de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels devait être pris en compte pour l’établissement des bases de l’année 2016.

Pour l’application de cette mesure, la valeur locative de propriétés bâties devait être corrigée d’un coefficient dit « de neutralisation » égal au rapport entre :

– d’une part, la somme des valeurs locatives de ces propriétés situées dans le ressort territorial de la collectivité ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, après application du coefficient de revalorisation annuel prévu à l’article 1518 bis du code général des impôts pour l’année 2013 ;

– et, d’autre part, la somme des valeurs locatives révisées au 1er janvier 2013 de ces propriétés.

Le coefficient de neutralisation

Dans le cadre de la révision, seules les valeurs locatives des locaux professionnels seront définies avec les nouvelles règles, la définition des valeurs locatives des locaux d’habitation et des locaux industriels demeurant inchangée. Or, tous ces locaux font partie du même ensemble de taxation pour le calcul des bases de taxe foncière.

De ce fait, avec la révision et sauf exceptions marginales, la valeur locative des locaux professionnels va augmenter par rapport à celle définie à partir des règles en vigueur en 1970. Dès lors, en l’absence de dispositif de correction, la révision conduirait à augmenter le niveau relatif des valeurs de ces locaux par rapport à celle des autres types de locaux et donc à créer un effet de transfert des bases de taxe foncière, aboutissant à accroître proportionnellement le poids de la fiscalité des locaux professionnels et à diminuer celui des autres types de locaux.

Les dispositions du paragraphe XVI de l’article 34 précité prévoient donc un maintien des équilibres actuels, en termes de proportions contributives, au niveau de chaque collectivité ou EPCI à fiscalité propre, pour les différents types de locaux.

Pour éviter ce transfert de charges, les équilibres contributifs actuels sont maintenus par la loi entre deux ensembles de locaux :

– d’une part, la contribution des contribuables imposés au titre de locaux d’habitation (c’est-à-dire ceux pour lesquels la valeur locative restera pour l’instant évaluée de manière non actualisée) ;

– et, d’autre part, la contribution des autres contribuables, c’est-à-dire les locaux professionnels concernés par la révision, les établissements industriels évalués à la valeur comptable et les propriétés relevant des modalités particulières.

Par exemple, si dans une commune avant révision, les propriétaires de locaux à usage d’habitation acquittent 60 % de la taxe foncière et les propriétaires de locaux professionnels et d’établissements industriels (et locaux évalués par barème) 40 %, les mêmes proportions doivent être maintenues après la révision.

C. UNE MÉTHODE : L’EXPÉRIMENTATION PRÉALABLE

L’article 34 de la loi de finances rectificative précitée a prévu une période d’expérimentation dans cinq départements représentatifs : l’Hérault, le Haut-Rhin, le Pas-de-Calais, Paris et la Haute-Vienne.

Dans chacun de ces départements, cet article 34 a prévu d’adjoindre à l’obligation déclarative classique des propriétaires une seconde déclaration permettant de préfigurer la révision des valeurs locatives.

Cet article a prévu la remise d’un rapport au Parlement sur le résultat de cette expérimentation avant le 30 septembre 2011.

1. Les leçons de l’expérimentation menée en 2011

Comme prévu par la loi, la direction générale des finances publiques (DGFiP) a rendu public le résultat de cette expérimentation par un rapport remis au Parlement en janvier 2012.

Selon ce rapport, l’ensemble des locaux soumis l’objectif de révision s’élève à 3,3 millions de locaux. L’expérimentation a, pour sa part, porté sur 397 269 locaux professionnels, soit 12 % du volume national. Les propriétaires concernés par la révision représentent 196 000 locaux, soit une moyenne de deux locaux par propriétaire.

Chaque département a fait l’objet d’un découpage en 6 secteurs ; dans chaque secteur, 39 tarifs ont été calculés en fonction des catégories mentionnées précédemment.

Le rapport met en premier lieu en évidence des effets néfastes du coefficient de neutralisation ; selon le rapport, « ce coefficient de neutralisation isole les locaux à usage d’habitation des effets de la révision. En revanche, le mécanisme du coefficient de neutralisation inclut dans un même ensemble les locaux professionnels, les établissements industriels évalués selon la méthode comptable et les locaux évalués selon la méthode du barème ».

Selon le rapport, « le fonctionnement des coefficients de neutralisation a des effets très marqués sur la valeur locative et la cotisation des établissements industriels et des locaux évalués selon la méthode du barème ».

Les résultats sont présentés suivant deux scénarios : le scénario A est élaboré avec un coefficient de neutralisation intégrant les locaux industriels alors que le scénario B exclut les locaux industriels et les locaux évalués selon la méthode du barème.

Sur cette base, le rapport dresse trois constats :

– l’hétérogénéité des résultats obtenus ; si une seule catégorie de locaux augmente en moyenne dans l’ensemble des départements, dans une proportion qui est variable selon les départements, pour l’ensemble des autres catégories étudiées le sens de la variation et son ampleur changent suivant les départements.

Selon le rapport, cette hétérogénéité est normale en fiscalité directe locale et il faut en conclure qu’il « ne serait pas pertinent d’en tirer des moyennes nationales pour considérer que la valeur locative de tel type de local professionnel augmente ou diminue, puisque l’évolution de la valeur locative d’un local dépend en réalité non seulement de sa catégorie mais aussi de sa zone d’implantation » ;

– la nécessité d’envisager un dispositif renforcé pour lisser les effets de la revalorisation des valeurs locatives. En effet, à défaut, certaines entreprises pourraient voir d’une année sur l’autre leur cotisation augmenter ou baisser significativement ;

– le troisième constat est celui de l’impact central du mode de calcul du coefficient de neutralisation.

Avec le scénario A, sur les 22 catégories de locaux étudiés, 20 catégories représentant près de 110 000 locaux, soit 94 % des locaux étudiés devaient enregistrer une augmentation.

Avec le scénario B, sur les 22 catégories étudiées, 14 catégories portant sur près de 65 000 locaux représentant 56 % du nombre de locaux étudiés voient leur cotisation moyenne augmenter.

Le scénario A conduirait en outre à pénaliser les départements industriels comme le Pas-de-Calais. Dans ce département, le poids total des cotisations de taxe foncière des locaux professionnel augmente de 38 % avec le scénario A mais reste stable avec le scénario B.

Quel que soit le scénario retenu, l’étude démontre une augmentation de la cotisation des tarifs des boutiques et magasins de rue, en particulier à Paris. Pour la catégorie des magasins sur rue, la hausse de cotisation serait, dans la capitale, de 31 % avec le scénario A et de 28 % avec le scénario B.

Une étude par département en ciblant les catégories de locaux les plus représentées permet en outre d’appréhender l’hétérogénéité des évolutions.

LES ÉVOLUTIONS DES CATÉGORIES DE LOCAUX LES PLUS SIGNIFICATIVES DE COTISATIONS DANS CHAQUE DÉPARTEMENT

Département

1ère catégorie la plus représentée

2e catégorie la plus représentée

3e catégorie la plus représentée

Scénario A

Scénario B

Scénario A

Scénario B

Scénario A

Scénario B

Hérault

Boutiques et magasins sur rue (44 % du total)

Bureaux anciens

(18 % du total)

Bureaux récents

(10 % du total)

+ 11 %

=

+ 3 %

– 7 %

+ 2 %

– 7 %

Pas-de-Calais

Boutiques et magasins sur rue (48 % du total)

Bureaux anciens

(19 % du total)

Lieux de dépôts couverts (8 % du total)

+ 36 %

=

+ 67 %

+ 21 %

+ 10 %

– 20 %

Bas-Rhin

Boutiques et magasins sur rue (37 % du total)

Bureaux anciens

(22 % du total)

Bureaux récents

(9 % du total)

+ 34 %

+ 6 %

+ 34 %

+ 9 %

+ 11 %

– 9 %

Paris

Boutiques et magasins sur rue (49 % du total)

Bureaux anciens

(29 % du total)

Bureaux récents

(5 % du total)

+ 31 %

+ 28 %

–7 %

– 9 %

– 20 %

– 22 %

Haute-Vienne

Boutiques et magasins sur rue (43 % du total)

Bureaux anciens

(21 % du total)

Bureaux récents

(7 % du total)

+ 22 %

– 3 %

+ 35 %

+ 7 %

+ 21 %

– 2 %

Source : rapport de la DGFiP sur la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, 2012.

2. Les simulations menées en 2015

Les simulations réalisées durant l’été 2015 ont fait l’objet d’un second rapport de la DGFiP, transmis à la Rapporteure générale lors de la présentation du présent projet de loi de finances rectificative devant la commission des finances le vendredi 13 novembre 2015.

a. La méthode retenue

Cette simulation a été réalisée à partir des informations traitées dans 33 départements avec les paramètres d’évaluation définitifs ; les 68 autres départements ont été pris en compte avec des paramètres non stabilisés par les commissions locales de révision des valeurs locatives des locaux professionnels.

Elle a donc porté sur 2,5 millions de locaux sur un total national de 3,3 millions de locaux de ce type.

Outre l’analyse au niveau national, la DGFiP a procédé dans le cadre de ce rapport à une analyse plus fine des impacts de la révision dans cinq départements représentatifs : les Ardennes, les Landes, le Nord, la Haute-Savoie et Paris.

Sur ces départements, quatre avaient entièrement finalisé le processus de fixation de leurs paramètres d’évaluation, à l’exception du département de Paris.

En préambule, le rapport rappelle que la définition du coefficient de neutralisation n’est actuellement pas suffisamment précise : l’article 34 de la loi de finances rectificative pour 2010 précité ne permet pas, en particulier, de savoir si les locaux entrant en compte dans le calcul de ce coefficient sont les locaux effectivement imposés ou s’il faut prendre en compte les locaux exonérés.

Les simulations sont donc réalisées avec deux scénarios, le premier retenant un périmètre large des locaux entrant dans le calcul du coefficient (locaux imposés et exonérés), le second ne retenant par conséquent que les locaux effectivement imposés.

Les résultats présentés dans le rapport ont été réalisés uniquement à partir du second scénario.

b. Les principaux résultats

Sur les 2,5 millions de locaux professionnels étudiés, 49,6 % des locaux voient leur cotisation augmenter (soit 1,256 million de locaux).

Sur les 10 sous-groupes, 5 d’entre eux enregistrent une diminution de cotisation moyenne.

IMPACT DE LA RÉVISION DES VALEURS LOCATIVES PAR SOUS-GROUPE

Libellé

Évolution moyenne de cotisation
(en %)

Nombre de locaux

Poids des locaux dans la population totale (en %)

Établissements industriels n’étant pas évalués selon la méthode comptable

– 16,8

10 169

0,4

Ateliers et autres locaux assimilables

– 5,5

243 514

9,6

Magasins et lieux de vente

– 3,8

889 540

35,1

Hôtels et locaux assimilables

– 3,6

120 522

4,8

Bureaux et locaux assimilables

– 3,3

604 451

23,9

Lieux de dépôt ou de stockage et parcs de stationnement

5,0

530 034

20,9

Établissements de spectacles, de sports et de loisirs et autres locaux assimilables

14,2

53 390

2,1

Les locaux exceptionnels évalués par appréciation directe

22,3

1 485

0,1

Établissements d’enseignement et locaux assimilables

28,0

21 657

0,9

Cliniques et établissements du secteur sanitaire et social

44,0

57 802

2,3

Total

2 532 564

100,0

Source : rapport de la DGFiP sur la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, 2015.

Une analyse affinée à partir des 39 sous-catégories exposées précédemment permet d’identifier les sous-catégories les plus « gagnantes » et les plus « perdantes » (les plus gagnantes étant celles dont la cotisation moyenne va baisser).

LES SOUS-CATÉGORIES LES PLUS GAGNANTES ET LES PLUS PERDANTES DE LA RÉFORME

Catégorie

Sous-catégorie

Évolution (en % de cotisation)

Les catégories les plus « gagnantes »

Boutiques et magasins de rue d’une surface inférieure à 400 m2

+ 101

Maisons de repos, maisons de retraite et locaux assimilés

+ 83,2

Lieux de dépôt à ciel ouvert et terrains à usage commercial ou industriel

+ 82,8

Les catégories les plus « perdantes »

Magasins de très grande surface (plus de 2 500 m2)

– 31

Installations spécifiques de stockage

– 24,7

Magasins de grande surface (400 à 2 499 m2)

– 22,5

Les catégories pour lesquelles la réforme sera quasiment neutre

Ateliers artisanaux

– 2,3

Salles de spectacles

– 1,6

Bureaux anciens

– 0,6

Terrains de camping confortables

+ 2,5

Source : rapport de la DGFiP sur la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, 2015.

c. La nécessité de corriger les évolutions les plus significatives

Le rapport de la DGFiP précité fournit en outre des éléments importants concernant la ventilation des augmentations et des baisses de cotisations les plus significatives.

Répartition locaux

Il en ressort que la proportion des locaux touchée par des augmentations que l’on pourrait qualifier d’extrêmes (entre 100 et 200 % et de plus de 200 %) est encore trop importante pour que la réforme puisse être envisagée sans mécanismes correctifs renforcés.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. UN REPORT DE LA PRISE EN COMPTE DE LA RÉFORME

L’alinéa 5 du présent article reporte de 2016 à 2017 la prise en compte des résultats de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels ; s’agissant de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), il est en outre précisé que le reversement par l’État de son produit aux collectivités locales ne sera opéré en fonction de cette révision qu’en 2018, compte tenu du décalage d’un an entre la perception de la CVAE et son reversement aux collectivités concernées.

B. UNE PRÉCISION SUR LES MODALITÉS DE CALCUL DU COEFFICIENT DE NEUTRALISATION

Les alinéas 7 à 10 apportent en outre certaines précisions concernant les modalités de calcul du coefficient de neutralisation.

Celui-ci correspond, pour chaque taxe et pour chaque collectivité, au rapport entre :

– la somme des valeurs locatives non révisées au 1er janvier 2017 des propriétés bâties imposables en 2017 dans le ressort d’une collectivité territoriale ;

– et la somme des valeurs locatives révisées de ces propriétés à la date de référence du 1er janvier 2013.

Le coefficient s’appliquera en outre aux taxes annexes à chaque imposition, notamment la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM).

Cette rédaction confirme le fait que les valeurs locatives exonérées ne seront pas prises en compte dans son mode de calcul. Le coefficient cessera de s’appliquer à compter de la prise en compte complète des effets de la réforme.

En outre, elle prend en compte la proposition issue du rapport de 2012 consistant à intégrer les locaux industriels au numérateur de ce coefficient.

L’alinéa 11 prévoit en outre un coefficient de neutralisation spécifique pour l’entreprise publique La Poste.

C. UN RENFORCEMENT DU MÉCANISME DE LISSAGE JUSQU’EN 2015

Le XXII de l’article 34 de la loi de finances rectificative pour 2010 précitée prévoit actuellement un mécanisme de lissage des augmentations d’impôts locaux liés à la réforme.

Techniquement, ce lissage prend la forme d’une exonération dégressive d’impôts locaux par cinquième entre 2016 et 2020. Ce lissage n’est actuellement applicable qu’aux redevables dont la cotisation augmenterait de plus de 200 euros et à 10 % de nouveau montant exigible.

Le présent dispositif renforce le lissage sur deux points :

– l’exonération dégressive sera opérée par dixième entre 2017 et 2026 ;

– elle sera applicable quel que soit le montant de l’augmentation de cotisation.

Par cohérence, le présent article prévoit un lissage similaire des baisses d’impôts qui pourraient résulter de la réforme.

*

* *

La commission est saisie de l’amendement CF 212 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Nous abordons un sujet dont j’ai déjà parlé maintes fois. Paradoxalement, la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, qui bénéficie aux grandes surfaces, va entraîner, s’agissant des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) un surcoût colossal, du fait de ses conséquences sur l’imposition foncière. Lorsque l’établissement est public, c’est-à-dire dans la plupart des cas, les départements devront répercuter la hausse sur le prix de journée.

Si l’on porte de cinq à dix ans la durée de la période de lissage, et d’une année la mise en œuvre de la mesure elle-même, c’est bien que l’on s’est aperçu — un peu tard — de ce problème. En tout état de cause, il faut exclure les EHPAD du dispositif pour ne pas accabler les finances départementales.

Mme la Rapporteure générale. Vous soulevez un problème essentiel. C’est en effet parce que l’on en a pris conscience que le présent article reporte la réforme et ménage le temps nécessaire pour la calibrer, notamment dans le cas des EHPAD. Je vous suggère de retirer votre amendement et de le redéposer en vue de la séance, afin qu’il puisse donner lieu à un échange avec le ministre sur les moyens de remédier à ce problème.

M. Charles de Courson. En effet, le problème est réel, mais il doit être posé de manière plus générale. Ainsi, les locaux des établissements d’enseignement privé sous contrat — d’association ou simple — ne sont pas exonérés, contrairement à ceux des écoles primaires, collèges et lycées publics, alors même que ces établissements contribuent au service public de l’éducation, à la différence des établissements hors contrat.

C’est en présidant la commission des valeurs locatives de mon département que j’ai découvert la situation : on a introduit des valeurs locatives de marché, qui n’existaient pas puisque la plupart des locaux font l’objet d’un commodat ou prêt à usage ; dès lors, les bases explosent.

Les EHPAD ne relèvent-ils pas du même cas de figure que ces établissements d’enseignement ? Il ne s’agit que de deux exemples parmi bien d’autres.

L’amendement CF 212 est retiré.

La commission en vient à l’amendement CF 58 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. J’ai l’impression de revenir vingt-cinq ans en arrière : je n’étais pas député, mais, à l’époque où la réforme de 1992-1993 a échoué, je présidais une commission départementale.

Je me demande si nous ne nous sommes pas tous trompés en croyant que les valeurs de marché seraient plus justes que les bases actuelles. Cet amendement vise en conséquence à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport d’information étudiant la possibilité de substituer progressivement la cotisation sur la valeur ajoutée à l’assiette des bases d’impositions des valeurs locatives.

L’utilisation des valeurs de marché ne résiste pas vraiment à une analyse fine. Partout, les bases d’imposition des grandes surfaces régressent de 40 à 50 %, alors que celles des commerces de centre-ville progressent de 25 % à 30 %. Cela n’est dû qu’aux écarts des prix des terrains entre centre et périphérie et non à l’activité économique réelle des entreprises et à leur capacité contributive.

Mme la Rapporteure générale. Le Gouvernement vient de me remettre son rapport sur les valeurs locatives. Je demanderai à ce qu’il soit transmis à chaque député de notre commission. En attendant que cela soit fait et que vous ayez pu le lire, je vous suggère de retirer votre amendement.

L’amendement CF 58 est retiré.

La commission adopte l’article 20 sans modification.

*

* *

Article 21
Refonte de la taxe pour la création de bureaux et création d’une taxe additionnelle aux DMTO sur les cessions de locaux à usage de bureaux
en Île-de-France

Le présent article vise à moderniser la fiscalité pesant, dans la région Île-de-France, sur les locaux à usage de bureau tout en garantissant une stabilité des ressources pour la région.

À cet effet, il procède, en premier lieu, à une refonte d’ensemble de la redevance pour création de bureaux applicable en Île-de-France – rebaptisée « taxe pour création de bureaux ».

En pratique, cette redevance concerne également la construction de locaux commerciaux et de locaux de stockage ; la refonte opérée par le présent article ne concerne donc pas la taxe annuelle sur les bureaux existants, dont le régime est prévu par l’article 231 ter du code général des impôts (CGI).

« Redevance » pour création de bureaux
et « taxe annuelle » pour création de bureaux

– La redevance et la taxe répondent à des régimes juridiques différents, la redevance étant en principe la contrepartie proportionnée d’un service rendu.

– En l’occurrence, la « redevance pour création de bureau » est une taxe.

– Perçue à l’occasion de la construction des locaux, elle se distingue donc de la taxe annuelle qui est assise sur leur surface existante.

– Le présent article supprime toutefois la dénomination de « redevance pour création de bureaux » au profit de celle, plus exacte d’un point de vue juridique, de « taxe pour la création de bureaux ».

– Il y aura donc désormais une « taxe pour création de bureaux » dans le code de l’urbanisme et une « taxe annuelle sur les bureaux » dans le code général des impôts.

A. LE RÉGIME DE LA REDEVANCE POUR CRÉATION DE BUREAUX

1. Le régime applicable jusqu’en 2010

Jusqu’en 2010, la RCB avait un champ d’application relativement ciblé. Conformément à l’article L 520-1 du code de l’urbanisme alors en vigueur, la RCB était uniquement perçue à l’occasion de la construction de locaux à usage de bureaux et de locaux de recherche ainsi que de leurs annexes.

La personne redevable de la RCB est le propriétaire des locaux à la date de l’émission de l’avis de mise en recouvrement, qui doit être émis dans un délai de deux ans suivant la délivrance du permis de construire. Cette disposition, qui est encore en vigueur, vise à permettre que l’éventuel maître d’ouvrage, lorsqu’il est distinct du propriétaire, ou le maître d’œuvre ne soient pas soumis au paiement de cette imposition, dont le recouvrement ne sera effectué in fine qu’après livraison de l’ouvrage à son propriétaire final.

S’agissant des tarifs applicables, le code de l’urbanisme prévoyait, dans sa partie législative, un tarif maximal de 244 euros, en renvoyant au décret le soin de moduler ce tarif en fonction de périmètres déterminés.

Son assiette était la surface utile de plancher prévue pour la construction.

Le produit de cette RCB est affecté à la région d’Île-de-France.

La partie réglementaire du code de l’urbanisme alors en vigueur fixait les tarifs de la RCB en fonction d’un zonage déterminé de la manière suivante :

LES TARIFS PAR ZONE DE LA RCB EN VIGUEUR EN 2010

Zone

1ère zone

2e zone

3e zone

Tarif

244 euros/m²

152 euros/m²

61 euros/m²

Définition de la zone

Paris : 12 arrondissements (1)

Hauts-de-Seine : 24 communes (2)

Hauts-de-Seine : 9 Communes « intermédiaires » (3)

Yvelines : 8 Communes proches de Paris (4)

Paris : autres arrondissements

Hauts-de-Seine : 3 communes

Seine-Saint-Denis : Toutes les communes sauf 4

Yvelines : 42 communes (5)

Essonne : 35 communes (6)

Val-d’Oise : 38 communes (7)

Seine-et-Marne : 4 communes (8)

(1) 1er, 2e, 3e, 4e, 6e, 7e, 8e, 9e, 14e, 15e, 16e et 17e arrondissements. On notera que le 5e arrondissement n’entrait pas dans cette catégorie.

(2) Asnières, Bois-Colombes, Boulogne-Billancourt, Châtillon, Colombes, Clichy, Courbevoie, Garches, Issy-les-Moulineaux, La Garenne-Colombes, Gennevilliers, Levallois-Perret, Malakoff, Marnes-la-Coquette, Nanterre, Neuilly-sur-Seine, Puteaux, Rueil-Malmaison, Saint-Cloud, Sèvres, Suresnes, Vanves, Vaucresson et Ville-d’Avray.

(3) Bagneux, Bourg-la-Reine, Chaville, Clamart, Fontenay-aux-Roses, Meudon, Montrouge, Le Plessis-Robinson et Sceaux.

(4) Bougival, Carrières-sur-Seine, La Celle-Saint-Cloud, Chatou, Croissy-sur-Seine, Le Mesnil-le-Roi, Montesson et Le Vésinet.

(5) Achères, Aigremont, Les Alluets-le-Roi, Andrésy, Bailly, Carrières-sous-Poissy, Chambourcy, Chanteloup-les-Vignes, Chavenay, Le Chesnay, Crespières, Davron, L’Etang-la-Ville, Feucherolles, Fontenay-le-Fleury, Fourqueux, Houilles, Jouy-en-Josas, Louveciennes, Maisons-Laffitte, Mareil-Marly, Marly-le-Roi, Medan, Morainvilliers, Noisy-le-Roi, Orgeval, Le Pecq, Poissy, Le Port-Marly, Rennemoulin, Rocquencourt, Saint-Cyr-l’Ecole, Saint-Germain-en-Laye, Saint-Nom-la-Bretêche, Sartrouville, Triel-sur-Seine, Vélizy-Villacoublay, Verneuil-sur-Seine, Vernouillet, Versailles, Villennes-sur-Seine, Villepreux et Viroflay.

(6) Athis-Mons, Bièvres, Boussy-Saint-Antoine, Brunoy, Bures-sur-Yvette, Chilly-Mazarin, Crosne, Draveil, Epinay-sous-Sénart, Epinay-sur-Orge, Gif-sur-Yvette, Gometz-le-Châtel, Igny, Juvisy-sur-Orge, Longjumeau, Massy, Montgeron, Morangis, Morsang-sur-Orge, Orsay, Palaiseau, Paray-Vieille-Poste, Quincy-sous-Sénart, Savigny-sur-Orge, Les Ulis, Vauhallan, Verrières-le-Buisson, Vigneux-sur-Seine, Villebon-sur-Yvette, Villemoisson-sur-Orge, Villiers-sur-Orge, Viry-Châtillon, Wissous et Yerres.

(7) Andilly, Argenteuil, Arnouville-lès-Gonesse, Beauchamp, Bessancourt, Bezons, Bonneuil-en-France, Bouqueval, Chennevières-lès-Louvres, Deuil-la-Barre, Eaubonne, Enghien-les-Bains, Epiais-les-Louvres, Ermont, Franconville, Garges-lès-Gonesse, Gonesse, Goussainville, Groslay, Louvres, Margency, Montlignon, Montmagny, Montmorency, Le Plessis-Bouchard, Roissy-en-France, Saint-Gratien, Saint-Leu-la-Forêt, Saint-Prix, Sannois, Sarcelles, Soisy-sous-Montmorency, Taverny, Le Thillay, Vaudherland, Vemars, Villeron et Villiers-le-Bel.

(8) Mauregard, Le Mesnil-Amelot, Mitry-Mory et Villeparisis.

Source : article R. 520-12 du code de l’urbanisme en vigueur en 2010.

Ce zonage fixé par voie réglementaire est resté en vigueur entre 1972 et 2010 ; il a donc semblé opportun, à cette date, de le revoir en fonction des nouvelles dynamiques du marché de l’immobilier de bureau dans la capitale.

2. La réforme opérée par la quatrième loi de finances rectificative pour 2010

a. Une réforme motivée par le besoin de financement du Grand Paris

La réforme opérée à la fin de l’année 2010 a été en grande partie motivée par la nécessité de financer le déploiement du réseau de transport en commun du « Grand Paris », dont le projet a été arrêté, au plan législatif, dans le cadre de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris.

Le besoin de financement concernait au premier chef la « société du Grand Paris » (SGP) créée par l’article 7 de cette loi.

L’enjeu était alors d’affecter un financement pérenne à cette société de 300 millions d’euros par an :

– 118 millions d’euros au titre de la modernisation de la taxe annuelle sur les bureaux ; cette modernisation devait en réalité entraîner un surcroît de recette de 236 millions d’euros, dont 23 millions d’euros affectés à la région d’Île-de-France. Sur les 213 millions restants, 95 millions d’euros ont fait l’objet d’un prélèvement exceptionnel entre 2011 et 2013 pour combler un besoin de financement exceptionnel de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) ;

– la mise en place d’une taxe additionnelle à la taxe spéciale d’équipement a créé une recette annuelle de 117 millions d’euros affectée à la SGP ;

– dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, la mise en place d’une imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) applicable au matériel roulant utilisé sur les lignes de transport en commun de voyageurs gérées par la Régie autonome des transports parisiens (RATP) a permis une augmentation des recettes de la SGP de 61 millions d’euros.

Au-delà de 2013, la recette pérenne de la SGP devait s’élever à près de 400 millions d’euros par an.

Dans le cadre de ce plan de financement, il est en outre apparu important d’assurer un complément de financement à la région d’Île-de-France, au titre de son financement indirect des nouveaux réseaux de transport par le biais du Syndicat des transports en Île-de-France (STIF).

À cet effet, la quatrième loi de finances rectificative pour 2010 a opéré une modernisation du versement transport, qui devait se traduire par une augmentation de 105 millions d’euros de la recette de cette imposition affectée au STIF.

En complément, la modernisation de la RCB prévue par l’article 31 de la quatrième loi de finances rectificative pour 2010 précitée devait procurer à la région une recette supplémentaire de 90 millions d’euros.

b. Une augmentation des tarifs et une modification du zonage

Issu d’un amendement du Rapporteur général, l’article 31 de la quatrième loi de finances rectificative pour 2010 précitée a prévu à la fois une réforme du zonage et des tarifs dont les évolutions sont synthétisées dans les tableaux ci-dessous.

Un alignement avec la taxe sur les bureaux prévu par l’article 231 ter du CGI a permis d’intégrer dans le champ de la taxe à la fois les locaux commerciaux et les locaux de stockage. Cet alignement s’est également traduit par l’application du tarif de la troisième zone pour les communes à la fois éligibles à la dotation de solidarité urbaine (DSU) et au fonds de solidarité de la région d’Île-de-France (FSRIF).

ÉVOLUTION DES TARIFS DE LA RCB ENTRE 2010 ET 2011

(en euros par mètre carré)

zone

1ère zone

2e zone

3e zone

Locaux à usage de bureaux

2010

244

152

61

2011

344

214

86

Locaux commerciaux

2010

0

0

0

2011

120

75

30

Locaux de stockage

2010

0

0

0

2011

52

32

13

ÉVOLUTION DU ZONAGE DE LA RCB ENTRE 2010 ET 2011

Zone

1ère zone

2e zone

3e zone

2010

Arrondissements « riches » de Paris et communes « riches » du 92

Communes intermédiaires du 92, communes « riches » du 78

Reste de Paris et du 92, certaines communes du 93, 94 et 91

2011

Paris et 92

Unité urbaine de Paris

Autres communes de la région Île-de-France

L’ensemble des évolutions ci-dessus sont entrées en vigueur dès le 1er janvier 2011 sans dispositif de lissage particulier des augmentations.

Or, il est rapidement apparu que cette réforme entraînerait des augmentations considérables pour certains locaux et dans certaines communes :

– plusieurs communes ont basculé à cette occasion de l’ancien tarif de la troisième zone au nouveau tarif de la première zone, ce qui se traduisait, pour les locaux à usage de bureau, par une augmentation du tarif du jour au lendemain de 464 % ;

– plusieurs autres communes de grande banlieue sont en outre passées de la troisième zone à la deuxième zone ou d’une zone « hors tarification » à la deuxième zone, entraînant également de fortes hausses.

– les locaux à usage commercial et les locaux de stockage, qui n’étaient pas dans le champ de la RCB en 2010, y sont entrés en 2011 sans dispositif de lissage particulier, entraînant ainsi une augmentation forte non anticipée par les acteurs économiques.

La carte ci-dessous illustre les communes touchées par les augmentations les plus fortes.

LES CHANGEMENTS DE ZONE PAR COMMUNE ENTRE 2010 TET 2011

Source : direction régionale et interdépartementale de l’équipement et de l’aménagement d’Île-de-France.

3. Le lissage adopté dans la première loi de finances rectificative pour 2011

Afin de remédier au caractère relativement brutal de ces augmentations, un dispositif spécifique de lissage a été préparé par le Rapporteur général au printemps 2011 en consultant les professionnels et les administrations concernées.

Traduisant ce travail, un amendement du Rapporteur général, devenu l’article 34 de la première loi de finances rectificative pour 2011 (199), a prévu plusieurs dispositions particulières :

– un dispositif permanent de lissage des augmentations de tarifs applicable aux communes perdant leur éligibilité à la DSU et au FSRIF a été prévu sous la forme d’un abattement des trois quarts, de la moitié et du quart de l’augmentation de tarif durant les trois années suivant cette perte d’éligibilité ;

– un dispositif ponctuel de lissage de l’augmentation affectant les bureaux, par sixième sur six ans, a été mis en place pour les communes concernées par les augmentations les plus importantes (soit en passant de la troisième zone à la première zone, soit en entrant dans le champ de la taxe pour être soumise au tarif de la deuxième zone) ;

– un second dispositif de lissage plus progressif, sous la forme d’une augmentation par quart sur quatre ans, a été prévu pour ces mêmes bureaux pour les communes affectées uniquement par le passage dans la zone supérieure ;

– un dispositif similaire de lissage a été prévu pour les locaux commerciaux et de stockage entrant dans le champ de la taxe.

À la demande des professionnels, l’assiette de la taxe a été adaptée pour s’appliquer à la surface de construction et non à la surface de plancher.

L’ensemble de ces dispositions ont été appliquées rétroactivement au 1er janvier 2011.

B. LES ENJEUX BUDGÉTAIRES

Le produit de l’actuelle redevance pour création de bureau, affecté à la région Île-de-France, est assez volatile dans la mesure où il peut varier d’une année sur l’autre en fonction d’opérations immobilières importantes.

Selon un rapport de la direction régionale de l’équipement d’octobre 2014 (200), le produit de la taxe a enregistré des évolutions marquées depuis 1994.

Selon les fascicules des Voies et moyens annexés aux différents projets de loi de finances, le produit de cette imposition a enregistré une augmentation tendancielle sur une période plus récente. Ce produit est en outre significativement plus élevé en exécution que dans les évaluations initiales.

ÉVOLUTION DU PRODUIT DE LA REDEVANCE POUR CRÉATION DE BUREAUX

(en millions d’euros)

2011

2012

2013

2014

2015 (évaluation)

2016 (évaluation)

49

80

127

153

154

157

Source : Voies et moyens des PLF 2013 à 2016.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LA REFONTE DE LA TAXE SE TRADUIT PAR UNE PERTE DE RECETTES DE 32 MILLIONS D’EUROS

1. Une réforme du zonage

Les alinéas 37 à 41 du présent article prévoient, en premier lieu, une réforme du zonage de cette imposition.

ÉVOLUTION DU ZONAGE DE LA TAXE POUR CRÉATION DE BUREAU (EX-REDEVANCE POUR CRÉATION DE BUREAUX)

Zone

1ère zone

2e zone

3e zone

4e zone

Droit en vigueur

Paris et 92

Unité urbaine de Paris

Autres communes de la région Île-de-France

LFR 2015

Paris et 92

Métropole du Grand Paris

Unité urbaine de Paris

Autres communes de la région Île-de-France (uniquement pour les locaux de stockage)

Cette évolution se traduit :

– par un maintien du périmètre de la première zone ;

– par un recentrage conséquent de la deuxième zone de l’unité urbaine de Paris sur la métropole du Grand Paris. De ce fait, de nombreuses communes vont basculer du tarif de la deuxième zone vers celui de la troisième zone ;

– de la même manière, la troisième zone est recentrée sur l’unité urbaine de Paris (soit l’ancienne deuxième zone), ce qui conduit de nombreuses communes des périphéries de la région à basculer dans une quatrième zone qui est créée par le présent dispositif.

Cette évolution du zonage conduit soit à maintenir les communes dans leur zone actuelle soit, dans la majorité des cas, à les faire passer dans une zone dont le tarif est inférieur. Aucune commune n’évolue vers les tarifs d’une zone supérieure du fait de cette refonte.

Les cartes annexées au présent commentaire permettent de visualiser les effets de cette évolution.

2. Une réforme des tarifs applicables en fonction des zones

Les alinéas 42 à 51 conduisent par ailleurs à faire évoluer le tarif applicable à chaque zone, selon des modalités indiquées dans le tableau ci-dessous

ÉVOLUTION DES TARIFS APPLICABLES À CHAQUE ZONE

(en euros par mètre carré)

Zone

1ère zone

2e zone

3e zone

4e zone

Locaux à usage de bureaux

Droit en vigueur

368,95

229,52

92,24

LFR 2015

400

90

50

0

Locaux commerciaux

Droit en vigueur

128,71

80,44

32,18

LFR 2015

129

80

32

0

Locaux de stockage

Droit en vigueur

13,95

13,95

13,95

LFR 2015

14

14

14

14

Les tarifs indiqués dans ce tableau au titre du droit en vigueur sont ceux prévus par le code de l’urbanisme après ajustement annuel en fonction du dernier indice du coût de la construction publié par l’INSEE.

L’alinéa 52 du présent article conduit à modifier l’indice retenu pour l’ajustement annuel de ces tarifs, puisqu’il lui substitue la prévision de l’indice des prix à la consommation hors tabac retenue dans le projet de loi de finances.

La Rapporteure générale s’interroge sur l’opportunité de retenir un tel indice, qui n’est à la fois que prévisionnel et déconnecté du marché de la construction. Sur une période récente, cet indice a en effet enregistré des reculs résultant de la dépression du marché immobilier, qui sont ainsi automatiquement répercutés sur le tarif de la taxe.

S’agissant de l’évolution des tarifs, il ressort du tableau ci-dessus que l’ensemble de ces tarifs enregistrent soit des baisses soit des ajustements non significatifs, à l’exception notable du tarif applicable pour la construction de locaux à usage de bureaux dans la première zone qui enregistre une hausse de près de 8,4 %.

3. Une suppression du régime dérogatoire applicable aux communes éligibles à la DSU et au FSRIF

L’article 231 ter du CGI, fixant le régime de la taxe annuelle sur les bureaux, prévoit qu’à titre dérogatoire les communes éligibles à la fois à la DSU et au FSRIF bénéficient de tarif applicable à la troisième zone.

L’article L. 520-3 du code de l’urbanisme en vigueur rend cette disposition applicable à la RCB.

a. La suppression de l’application du tarif de la troisième zone pour les communes éligibles à la DSU et au FSRIF

Le présent article conduit à supprimer ce régime dérogatoire à compter de 2016, ce qui conduira ces communes à se voir appliquer le tarif de la zone à laquelle elles appartiennent.

Selon les informations transmises par le ministère du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité, un basculement du tarif de la troisième zone vers le tarif de la première zone est susceptible de concerner les villes suivantes des Hauts-de-Seine : Bagneux, Châtenay-Malabry, Colombes, Fontenay-aux-Roses, Gennevilliers, Malakoff et Villeneuve-la-Garenne.

Pour ces communes, le tarif passe donc potentiellement de 92,24 à 400 euros par mètre carré. Afin d’amortir cette augmentation, un dispositif de lissage de l’augmentation par sixième sur 6 ans est donc prévu par l’alinéa 85 du présent article.

Il en résulte donc une évolution des tarifs qui sera la suivante, avec une hypothèse d’inflation de 1 % par an.

ÉVOLUTION DES TARIFS DES COMMUNES ÉLIGIBLES À LA DSU ET AU FSRIF
DE LA PREMIÈRE ZONE

(en euros par mètre carré)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

Locaux à usage de bureaux

92,24

143,53

196,16

250,14

305,49

362,24

420,40

Locaux commerciaux

32,18

48,32

64,88

81,89

99,33

117,23

135,58

En outre, une cinquantaine de communes éligibles à la DSU et au FSRIF sont susceptibles de basculer de la troisième zone vers la deuxième zone, pour lesquelles l’alinéa 90 du présent article prévoit un lissage de l’augmentation par quart sur quatre années applicable uniquement pour les locaux commerciaux

ÉVOLUTION DES TARIFS DES COMMUNES ÉLIGIBLES À LA DSU
ET AU FSRIF DE LA DEUXIÈME ZONE

(en euros par mètre carré)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

Locaux commerciaux

32,18

44,14

56,49

69,25

82,42

b. Le prolongement temporaire de l’abattement des communes ayant perdu leur éligibilité à la DSU ou au FSRIF en 2013 ou 2014

Pour les communes ayant perdu leur éligibilité à la DSU ou au FSRIF en 2013 ou 2014, l’augmentation du tarif fait l’objet d’un lissage en cours en application de l’article 34 de la loi de finances rectificative pour 2011 précitée.

Afin de prolonger ce lissage, les alinéas 88 et 89 du présent article prévoient de prolonger le lissage de l’augmentation par quart pendant quatre ans entre 2016 et 2019.

Ce lissage est applicable pour la construction de bureaux de la première zone et les locaux commerciaux de la première et de la deuxième zone.

4. Un ensemble de précisions annexes sur les modalités de perception de la taxe

Outre ces modifications d’ampleur du régime de la taxe, le présent article apporte plusieurs précisions annexes aux modalités de perception de la RCB.

En premier lieu, la présente refonte conduit à clarifier le fait générateur de la taxe et la personne redevable. Afin de ne pas faire peser la taxe sur le maître d’ouvrage ou sur le maître d’œuvre mais bien sur le propriétaire final, le dispositif en vigueur prévoit que la taxe est due par le propriétaire de l’immeuble à la date de mise en recouvrement de cette imposition. Cet avis de recouvrement doit être émis dans les deux ans de la délivrance du permis de construire.

Ce dispositif peut conduire, dans certains cas, à ne pas permettre de déterminer clairement la personne redevable et le moment où sa perception doit être enclenchée.

Afin de clarifier ces modalités de perception, le présent article dispose, dans ses alinéas 16 à 21 que la taxe sera perçue selon les modalités suivantes :

– la taxe est due par le propriétaire des locaux à la date de délivrance de l’autorisation de construire ;

– lorsque ce propriétaire n’est pas connu, le titre de perception est émis au nom du maître de l’ouvrage ou, à défaut, du responsable des travaux, qui peuvent ensuite en demander le remboursement au propriétaire ;

– en cas de cession des locaux avant la date d’exigibilité de la taxe, le redevable peut également en demander le remboursement au nouveau propriétaire.

La logique consiste donc à percevoir immédiatement la taxe en laissant aux partenaires du projet immobilier le soin de la répercuter entre eux.

Aux alinéas 63 à 65, le présent article définit en outre une pénalité spécifique de 10 % du montant de la taxe en cas de dépôt tardif d’une obligation de déclaration de ces constructions, prévue par le présent article et dont les modalités seront fixées par décret.

Cette pénalité sera en outre de 80 % de ce montant lorsque la déclaration n’est pas déposée dans un délai de trente jours suivant la mise en demeure de l’administration.

B. LA CRÉATION D’UNE TAXE ADDITIONNELLE AUX DMTO AFFECTÉE À LA RÉGION D’ILE-DE-FRANCE

Afin de compenser la perte de recettes pour la région d’Île-de-France résultant de la refonte de la RCB, perte estimée à 32 millions d’euros, le présent article crée une taxe additionnelle aux DMTO pesant sur la cession des bureaux, locaux commerciaux et locaux de stockage.

1. L’impact budgétaire de la refonte de la RCB

Compte tenu de cette perte de recettes, le rendement de la taxe devrait passer de 157 millions d’euros en 2016, selon le fascicule Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2016, à 125 millions d’euros selon l’évaluation préalable du présent article.

Selon cette évaluation, une extrapolation des chiffres de 2014 conduirait à un rendement probable de la taxe de 121,2 millions d’euros. Compte tenu de l’effet de relance sur la construction, un produit total de 125 millions d’euros est retenu.

LE RENDEMENT DE LA TAXE EN 2017 À PARTIR D’UNE EXTRAPOLATION DE 2014

(en millions d’euros)

Zone

Bureaux

Commerces

Entrepôts

TOTAL

Zone 1

84,3

5,7

0,0

90,0

Zone 2

10,5

4,0

0,5

15,0

Zone 3

10,5

3,1

1,6

15,2

Hors unité urbaine de Paris

0

0

0,8

0,8

Totalité de la région

105, 4

12,8

3,0

121,2

2. La compensation par la création d’une taxe additionnelle aux DMTO

Afin de compenser la perte de recettes pour la région liée à la refonte de la RCB, le présent article crée, dans ses alinéas 1 à 6, une taxe additionnelle aux droits de mutations à titre onéreux pesant spécifiquement sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et de stockage soumis au champ d’application de l’actuelle RCB.

Le taux de cette taxe additionnelle sera de 0,6 % du prix de revient de la cession.

Cette taxe additionnelle permet de transférer une partie de la fiscalité pesant sur ces opérations du stade de la construction vers le stade de la cession, ce qui est probablement économiquement moins sensible pour les acteurs économiques concernés.

Les DMTO des départements sont perçus au taux de 3,8 % ; le département peut délibérer pour fixer ce taux entre 1,2 et 3,8 %. La taxe est ramenée à 0,7 % pour les terrains à bâtir ou immeubles neufs dont la mutation est soumise à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), pour les opérations de rénovation urbaine ou les acquisitions d’immeubles ruraux.

La loi de finances pour 2014 (201) a en outre prévu la possibilité de remonter ces droits à 4,5 %, ce qui a été voté par l’ensemble des départements sauf sept.

Une taxe additionnelle aux DMTO existe déjà au taux de 1,6 % pour les immeubles, les meubles corporels vendus publiquement, les mutations d’offices ministériels, les fonds de commerce ou les droits à bail.

La part communale des DMTO est pour sa part fixée à 1,2 %.

La présente taxe additionnelle vient ainsi compléter un ensemble de fractions de droits perçus à l’occasion des cessions immobilières, dont le produit est affecté à plusieurs niveaux de collectivités.

LA MODIFICATION DU ZONAGE DE LA REDEVANCE POUR CRÉATION DE BUREAU

1. L’ANCIEN ZONAGE DE LA « REDEVANCE POUR CRÉATION DE BUREAUX »

C:\Users\JLGRZEGORCZYK\AppData\Local\Microsoft\Windows\Temporary Internet Files\Content.Outlook\1FI5QZM3\redevance2011_ZFU (3).png

2. LE NOUVEAU ZONAGE DE LA « TAXE POUR CRÉATION DE BUREAUX » (EX-REDEVANCE POUR CRÉATION DE BUREAUX)

*

* *

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 147 à CF 149 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Les amendements CF 147 et CF 149 sont retirés. La réforme proposée par l’article 21 va dans le bon sens. Une simplification rend plus acceptable la collecte des taxes concernées. Cependant, certaines communes vont devoir payer 400 euros par mètre carré pour la construction de locaux commerciaux ou de stockage. L’amendement CF 148 vise à permettre aux communes qui sont éligibles à la fois à la dotation de solidarité urbaine (DSU) cible et au fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF) de passer au tarif de la troisième circonscription lorsqu’elles sont en deuxième circonscription, et au tarif de la deuxième circonscription lorsqu’elles sont en première circonscription. Dans les quartiers en difficulté, il ne faut pas que le niveau des taxes empêche l’installation d’activités économiques.

Les amendements CF 147 et CF 149 sont retirés.

Suivant l’avis favorable de la Rapporteure générale, la commission adopte l’amendement CF 148 (amendement 328).

Elle adopte ensuite l’article 21 modifié.

*

* *

Article 22
Constitution de la représentation parcellaire cadastrale unique (RPCU)

La représentation parcellaire cadastrale unique (RPCU) a vocation à se substituer aux deux représentations parcellaires actuelles – le plan cadastral géré par la direction générale des finances publiques (DGFiP) et la base de données parcellaire gérée par l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) – afin d’offrir une version modernisée et améliorée du plan cadastral.

L’article 22 du présent projet de loi de finances rectificative n’impose pas la constitution de la RPCU, mais donne une base légale à certaines opérations nécessaires à sa réalisation.

Les dispositions du présent article trouvent leur place en loi de finances, au titre des articles 34 et 35 de la LOLF (202) : la loi de finances peut comporter dans la seconde partie des dispositions relatives à l’assiette des impositions de toute nature qui n’affectent pas l’équilibre budgétaire. La fiabilisation de la représentation des parcelles devrait permettre d’asseoir la fiscalité directe locale sur une base plus solide et de faciliter la mise à jour des valeurs locatives des biens non bâtis. L’amélioration de la continuité géographique des feuilles cadastrales facilitera le rapprochement des données cadastrales avec les plans locaux d’urbanisme nécessaire à la transmission de données par les communes afin d’établir certaines taxes.

I. L’ÉTAT DU DROIT : DEUX REPRÉSENTATIONS PARCELLAIRES

A. LE CADASTRE

1. Le plan cadastral

Le plan cadastral se compose aujourd’hui d’environ 600 000 feuilles de plan et 100 millions de parcelles. Géré par la DGFiP, c’est le seul document à caractère légal en matière foncière (représentation du bâti et découpage parcellaire), constitue la donnée de référence, conformément à l’article L. 127-10 du code de l’environnement, qui n’est pas modifié par le présent article. Il est largement utilisé par les collectivités territoriales, notamment pour l’établissement des valeurs locatives servant de base à l’assiette de la fiscalité directe locale.

La mise en œuvre d’un cadastre parcellaire général résulte d’une loi du 15 mars1807, suivie par un règlement impérial du 27 janvier 1808. La confection en a été achevée en 1850 pour le territoire métropolitain.

Le plan cadastral représente graphiquement le territoire communal dans tous les détails de son morcellement en propriétés et en nature de culture ainsi que certains détails utiles à sa compréhension, généralement à l’échelle 1/5000. Il donne également la figuration de l’emprise au sol des bâtiments fixés à perpétuelle demeure. Il est subdivisé en sections et lieux-dits. Une section peut comporter une ou plusieurs feuilles parcellaires.

Le plan cadastral d’une commune se compose de sections cadastrales découpées dans certains cas en feuilles parcellaires et lieux-dits, d’un tableau d’assemblage ou d’une mappe d’ensemble en une feuille à l’échelle 1/10 000.

La documentation cadastrale littérale, contenant de nombreuses informations fiscales et foncières, se subdivise en plusieurs parties. Elle comprend des fichiers fonciers (le fichier des propriétaires d’immeuble, des propriétés bâties, des propriétés non bâties, le fichier relatif à la description des propriétés divisées en lots, le fichier des voies, les évaluations foncières des propriétés bâties et non bâties, ainsi que, en Île-de-France, la documentation relative à la taxe sur les locaux à usage de bureaux) et plusieurs bases ou applications permettant de consulter ces données.

Les plans cadastraux font l’objet d’une mise en ligne sur le site www.cadastre.gouv.fr.

2. Le service du cadastre

Au sein de la DGFiP, le service du cadastre détermine les valeurs locatives qui servent de base à l’assiette de la fiscalité directe locale, recense les terrains et les constructions, établit et met à jour le plan cadastral.

B. LA BASE DE DONNÉES PARCELLAIRE DE L’IGN

1. La couverture du territoire par la RPCU fait partie des missions de l’IGN

L’IGN est un établissement public de l’État à caractère administratif, placé sous la tutelle des ministres chargés du développement durable et des forêts.

Les missions de l’IGN sont définies par un décret du 27 octobre 2011 (203). Elles consistent notamment à décrire, d’un point de vue géométrique et physique, la surface du territoire national et l’occupation de son sol, à en faire toutes les représentations appropriées et à diffuser les informations correspondantes.

Les moyens de l’IGN sont prévus par le programme n° 159 Information géographique et cartographique, relevant de la mission Écologie, développement et mobilité durables. Les subventions de l’État à l’IGN devraient s’élever à 95,3 millions d’euros en 2016. Ses ressources propres s’élèvent en 2015 à 90,4 millions d’euros dont 64,1 millions d’euros de recettes liées à son activité commerciale. La couverture du territoire par la RPCU constitue l’un des indicateurs de performance du programme.

2. La base de données parcellaire (BD)

Le référentiel à grande échelle (RGE®), établi et diffusé par l’IGN, est un ensemble de bases de données géographiques de précision métrique structuré en six composantes, orthophotographique, topographique, parcellaire, adresse, altimétrique et relative à l’occupation du sol.

La BD parcellaire® est la version informatisée et géoréférencée du plan cadastral (convention d’échange de données entre l’IGN et la DGFiP renouvelée le 25 mars 2010). Elle ne se substitue pas au plan cadastral dématérialisé, mais constitue un assemblage de ce plan sur tout le territoire national. Elle se compose en tout point du territoire d’une couche de dalles de 1 km² géoréférencées et d’une couche d’objets vecteurs.

Le processus de vectorisation s’appuie sur le parcellaire cadastral informatisé (PCI) sous forme d’image et sur le fichier de localisants fournis par la DGFiP pour créer des objets vectoriels superposables aux fichiers image et identifiés avec les numéros de parcelles correspondants.

L’IGN définit le vecteur en indiquant que les objets contenus dans la BD parcellaire sont constitués de formes simples (points, polygones) localisées par des coordonnées ou des listes de coordonnées.

Le RGE est concédé aux utilisateurs selon des licences d’utilisation ou d’exploitation. Il est notamment utilisé par les gestionnaires de réseaux de téléphonie, d’eau ou d’énergie et les assurances, ainsi que par des acteurs de l’Internet (Google, Apple, Pages jaunes), de la navigation et de la géolocalisation. De nombreuses données sont visualisables gratuitement sur le site de l’IGN (204).

Fin juin 2015, 6 691 organismes utilisaient les données IGN de façon gratuite, dont 5 253 organismes pour les seules missions de service public. La valeur de cet usage est estimée à 24 millions d’euros.

II. LA MODIFICATION PROPOSÉE

A. LE PROJET DE RPCU

Considérant que ni le plan cadastral ni la BD parcellaire ne sont satisfaisants, notamment au regard de la continuité géographique, la DGFiP, le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE) et l’IGN ont convenu de constituer une nouvelle représentation du parcellaire cadastral à partir du plan cadastral de la DGFiP, plus en adéquation avec les besoins des utilisateurs de l’information géographique, notamment les collectivités territoriales. La RPCU sera le nouveau plan cadastral, géré et mis à jour par la DGFiP.

Le projet de RPCU remonte à une décision interministérielle du 20 mai 2011 lançant une expérimentation. La définition et les objectifs de la RPCU ont été validés le 8 septembre 2011, selon quatre principes :

– continuité géographique, sur l’ensemble du territoire national, des limites des parcelles cadastrales, des feuilles cadastrales et des limites de communes en conformité avec la réalité du terrain et les actes réglementaires ;

– niveau d’exactitude atteignant au moins celui du RGE ou du plan cadastral ;

– disponibilité des données en mode vectoriel sur l’ensemble territoire national ;

– cohérence avec les autres couches du RGE et du plan cadastral.

Une convention a été signée le 22 mai 2014 entre l’État (DGFiP et MEDDE) et l’IGN. Elle organise le rôle des parties, détermine leurs droits en matière de propriété intellectuelle et définit les critères des programmations et les modalités de suivi de sa mise en œuvre. Les étapes identifiées sont les suivantes.

PRINCIPALES ÉTAPES DU SCÉNARIO DE CONSTITUTION DE LA RPCU

Étape

Administration responsable

Méthodologie

Extraction des données du PCI vecteur

DGFiP et IGN

 

Analyse des plans

DGFiP

Recensement de données externes et internes à la DGFiP pour fiabiliser les plans

Analyse et reprise du géoréférencement

IGN

 

Traitement des raccords de feuilles (infra et intercommunaux) et des limites indécises

IGN et DGFiP

Recensement par l’IGN des variations de surface des parcelles, listes des déplacements de points

En cas de fortes divergences géométriques, les limites sont dites indécises

Traitement de l’ensemble des objets du plan cadastral

IGN

Recalage de l’ensemble des objets du PCI vecteur à partir des paramètres des transformations géométriques appliquées dans les phases de géoréférencement et de raccord

Traitement des zones complexes

DGFiP

Zones définies par concertation locale selon des critères administratifs (aire urbaine), tenant à la qualité du cadastre, à un potentiel économique, à des projets d’infrastructures ou pour lesquelles la représentation cadastrale emporte des conséquences réglementaires fortes

Fiabilisation des limites intercommunales

DGFiP

Comme pour les zones complexes, la DGFiP évalue la qualité des traitements, et procède éventuellement à une reprise des travaux

Elle évalue la représentation des limites intercommunales au regard de la documentation juridique (PV et croquis de délimitation intercommunale)

Contrôle de la RPCU

IGN et DGFiP

Identification des parcelles dont les traitements ont été réalisés en dehors des tolérances admises

Mesure du degré de précision des feuilles

Recherche des variations fortes de géométrie et de l’impact local des traitements effectués

Communication de la RPCU

DGFiP

A minima : pour les propriétaires de parcelles pour lesquelles la constitution de la RPCU a engendré des variations significatives de la surface et de la géométrie parcellaire ou pour lesquelles un travail de terrain a été nécessaire

Source : note technique du ministère de l’écologie du 7 novembre 2014 portant information de la signature de la convention relative à la constitution de la RPCU.

Une phase de pré-généralisation composée de trois vagues de deux départements a débuté en 2015 : une première vague en Ille-et-Vilaine – Loiret (travaux débutés en janvier), une deuxième vague en Charente-Maritime – Val de Marne (travaux débutés en avril), une troisième vague en Loire-Atlantique – Ain (lancement des travaux d’ici fin 2015).

La RPCU doit être généralisée en sept ans à partir de 2016.

B. DONNER UN FONDEMENT LÉGISLATIF À L’ADAPTATION GÉOMÉTRIQUE DU CADASTRE

Le I du présent article complète le décret du 30 avril 1955 relatif à la rénovation et à la conservation du cadastre (205). Antérieur à la Constitution de 1958, dont l’article 34 dispose que la loi fixe les règles concernant l’assiette des impositions de toutes natures et détermine les principes fondamentaux du régime de la propriété et des droits réels, ce décret a été pris sur habilitation législative (206).

Est inséré un titre III, relatif à la gestion informatisée du cadastre (alinéa 3).

1. Gestion du cadastre par des procédés informatiques

La rédaction proposée par les alinéas 4 et 5 pour l’article 34-1 (nouveau) dispose que le plan cadastral est géré par des procédés informatiques.

Lorsqu’il est décrit par une série de coordonnées, le plan cadastral informatisé doit être rattaché au système national de référence de coordonnées géographiques, planimétriques et altimétriques français. Ce système est prévu à l’article 89 de la loi du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire (207). Un décret du 26 décembre 2000 (208) définit le système national de référence géographique pour la métropole et les départements d’outre-mer. Le système national de référence est le réseau géodésique français 1993 (RGF93). Il a été établi par l’IGN et ses caractéristiques sont les suivantes : tridimensionnel, ellipsoïde, avec pour origine le méridien international de Greenwich.

CATÉGORIES DE COORDONNÉES DU SYSTÈME DE RÉFÉRENCE

Géographiques

latitude, longitude et hauteur ellipsoïdale

Planimétriques

géographiques : longitude, latitude

cartésiennes : Est, Nord

Altimétriques

altitude

Source : BOI-CAD-TOPO-10-20120912.

L’informatisation du plan cadastral et la politique conventionnelle de vectorisation du plan cadastral menée par la DGFiP font l’objet d’un commentaire au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP(209), qui présente la phase administrative, la phase technique et les travaux menés par la DGFiP ainsi que la gestion courante.

2. L’adaptation géométrique du cadastre

La rédaction proposée par l’alinéa 6 pour l’article 34-2 (nouveau) dispose que le service du cadastre procède à l’adaptation géométrique des plans cadastraux afin d’améliorer leur cohérence, entre eux comme avec les données géographiques nationales de référence. L’adaptation géométrique peut être opérée par des procédés informatiques.

Les opérations d’adaptation géométrique consistent, selon l’évaluation préalable, à modifier la représentation des limites cadastrales pour améliorer le géoréférencement des feuilles et résoudre les discontinuités entre elles, sans opération de terrain ni délimitation en présence des propriétaires.

Cette mission s’ajoute à la rénovation et la conservation du cadastre, déjà prévues par les titres I et II du décret du 30 avril 1955 précité.

La rénovation du cadastre est effectuée soit par voie de révision lorsqu’il peut être procédé d’une manière utile à une simple mise à jour du plan cadastral, soit par voie de réfection reposant sur un nouvel arpentage parcellaire. Ces deux modes de rénovation peuvent être appliqués concurremment dans une même commune.

À des fins de conservation, tous les cadastres rénovés font l’objet annuellement d’une tenue à jour réalisée aux frais de l’État. L’exécution des travaux de conservation du cadastre est assurée en régie au moyen des crédits ouverts annuellement au service du cadastre.

Le service du cadastre est habilité à constater d’office, pour la tenue des documents dont il a la charge, les changements de toute nature n’affectant pas la situation juridique des immeubles.

Une troisième procédure, de remaniement, intervient lorsque le plan présente des insuffisances qui ne permettent plus d’en assurer la conservation annuelle de manière satisfaisante et que sa qualité est devenue insuffisante pour permettre l’identification et la détermination physique correcte des immeubles. Elle implique la création de feuilles cadastrales nouvelles.

Au même titre que la rénovation du cadastre, les opérations de remaniement sont à la charge de l’État lorsqu’elles sont reconnues indispensables pour la détermination et l’identification physique des immeubles. À défaut, le remaniement n’est entrepris qu’à la demande du conseil municipal et avec la participation financière de la commune.

3. La précision des limites communales

La rédaction proposée par les alinéas 7 à 10 pour l’article 34-3 (nouveau) concerne la détermination des limites de territoire, en particulier des limites communales. La représentation au plan cadastral de ces limites peut être adaptée géométriquement, pour coïncider avec les procès-verbaux de délimitation en vigueur.

La reconnaissance des limites entre les communes est effectuée de manière contradictoire par les communes concernées à partir de ces procès-verbaux. Le service du cadastre peut provoquer une nouvelle opération de reconnaissance pour mettre à jour les procès-verbaux de délimitation. Il met à jour la documentation cadastrale selon les énonciations des procès-verbaux.

4. L’information et le droit au recours des propriétaires

La rédaction proposée par les alinéas 11 à 15 pour l’article 34-4 (nouveau) vise à garantir l’information et le droit au recours des propriétaires à l’encontre des travaux d’adaptation géométrique. Leur garantie passe par la publication d’arrêtés municipal, préfectoral et ministériel.

L’alinéa 11 prévoit que la date d’ouverture des travaux d’adaptation géométrique est fixée par arrêté préfectoral, comme cela est déjà le cas pour l’article 5 du décret de 1955 précité pour les travaux de rénovation. La date d’entrée en vigueur du plan cadastral adapté géométriquement est fixée par arrêté préfectoral (alinéa 14). Les arrêtés préfectoraux sont publiés au recueil des actes administratifs de la préfecture du département et affichés en mairie (alinéa 15).

Dans chaque commune, un arrêté du maire informe les propriétaires de la mise à disposition des résultats des travaux d’adaptation géométrique et de la période pendant laquelle ils peuvent formuler auprès du service local du cadastre des observations et des réclamations sur ces résultats (alinéa 12). Pour des raisons essentiellement budgétaires, il est ainsi renoncé à une information individuelle des propriétaires, même lorsque les résultats de ces travaux dépassent une certaine ampleur.

La durée de la mise à disposition des résultats, comprise entre un mois et trois mois selon le nombre de feuilles de plan et le nombre de propriétaires, est fixée par arrêté du ministre chargé du budget (alinéa 13).

Enfin, rédaction proposée par l’alinéa 16 pour l’article 34-5 (nouveau) permet aux propriétaires de demander une rectification du plan adapté géométriquement. Ces réclamations sont présentées au service local du cadastre.

5. Coordination

L’alinéa 17 (2° du I du présent article) rassemble les articles 35 à 38 du décret du 30 avril 1955, sans modifier leur rédaction, en un titre IV intitulé « Dispositions diverses ». L’article 36 rappelle que les dispositions du décret ne dérogent en rien aux droits de recours des propriétaires devant les juridictions compétentes.

Enfin, l’article 37 a abrogé toutes les dispositions contraires à celles du décret.

6. Application aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin, de la Moselle et d’outre-mer

En vertu de l’article 35, les dispositions du présent décret – donc du présent article qui le modifie – ne sont pas applicables aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ni aux départements d’outre-mer. L’adaptation aux départements d’outre-mer sera faite par voie réglementaire.

Les alinéas 18 à 32 (II du présent article) prévoient des dispositions similaires à celles qui viennent d’être présentées, pour les départements d’Alsace-Moselle. À cette fin, il est inséré un titre III bis, relatif à la gestion informatisée du cadastre au sein de la loi du 31 mars 1884 concernant le renouvellement du cadastre, la péréquation de l’impôt foncier et la conservation du cadastre en Alsace-Moselle.

III. L’IMPACT ÉCONOMIQUE, BUDGÉTAIRE ET FISCAL

1. L’ampleur prévisible des variations de la représentation parcellaire

Les variations affectant les surfaces graphiques des parcelles ou les superficies des communes ont été mesurées pendant l’expérimentation de 2012 sur des échantillons représentatifs.

Sur un échantillon comprenant 93 452 parcelles de la zone expérimentale, les variations entre le plan initial et celui issu de la RPCU se répartissaient ainsi :

RÉPARTITION DES VARIATIONS DE SURFACE DES PARCELLES

Variation surfacique des parcelles

Pourcentage de parcelles

[0 % ; 1 %]

84,4 %

]1 % ; 2 %]

9,1 %

]2 % ; 5 %]

4,9 %

]5 % ; 10 %]

1,1 %

> 10 %

0,4 %

Source : secrétariat d’État au budget.

Il ressort que 93,5 % des parcelles de l’échantillon ont subi une variation surfacique inférieure à 2 %.

Les variations de superficie des communes sont négligeables. À la demande de l’Association des maires de France (AMF), membre du comité de coordination technique de la RPCU, une étude a été conduite en 2012 pour mesurer la variation des surfaces communales, et en particulier celle du domaine non cadastré (voirie) générée par le processus de constitution de la RPCU.

Sur un échantillon de 379 feuilles réparties au sein de 30 communes, il ressort que :

– les surfaces communales de la RPCU augmentent de 0,06 % par rapport au plan cadastral initial ;

– le domaine non cadastré voit sa surface accrue de 0,18 % par rapport au plan cadastral initial.

2. L’impact sur la fiscalité directe locale

La convention du 22 mai 2014 relative à la constitution de la RPCU prévoit que seules les surfaces graphiques des parcelles seront modifiées, et pas les contenances servant à l’assiette de la taxe foncière des propriétés non bâties (TFPNB).

Les incidences budgétaires ne sont pas chiffrées. Il est indiqué dans l’évaluation préalable que la disposition proposée n’a pas d’incidence financière sur les personnes physiques ou morales, « le contenu des prestations concernées demeurant inchangé » (210).

Toutefois, il est également indiqué dans l’évaluation préalable que la constitution de la RPCU, notamment du fait des opérations d’adaptation géométrique, facilitera la détermination de l’assiette de la fiscalité directe locale, notamment de la TFPNB et des taxes annexes (majoration de TFPNB sur les terrains constructibles).

Les surfaces issues de la RPCU pourront être prises en compte fiscalement lors de l’établissement de l’assiette des taxes foncières sur les propriétés non bâties (TFPNB) résultant de divisions parcellaires (détachement d’une partie pour vente, lotissement, etc.).

Elle facilitera également la mise à jour des valeurs locatives, notamment des biens non bâtis.

Enfin, l’amélioration de la continuité géographique des feuilles cadastrales facilitera le rapprochement des données cadastrales avec les plans locaux d’urbanisme nécessaire à la transmission de données par les communes afin d’établir certaines taxes (taxe d’aménagement, participations pour voirie et réseaux).

Indirectement, ces dispositions pourraient aussi avoir un impact sur les droits d’enregistrement et les impôts sur les revenus et le patrimoine fonciers.

*

* *

La commission examine l’amendement CF 213 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. La représentation parcellaire cadastrale unique doit se substituer à la fois au plan cadastral géré par la direction générale des finances publiques (DGFiP) et à la base de données parcellaires gérée par l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN). Il est proposé que le Gouvernement remette au Parlement un bilan de l’application de ce nouveau dispositif dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable. La mise en œuvre de la représentation parcellaire cadastrale unique doit avoir lieu progressivement. Chaque étape concernera quinze départements et le processus durera sept ans. Il me semble en conséquence prématuré de demander un rapport et un bilan dès l’année prochaine.

M. Jean-Claude Buisine. M. Bruno Parent, directeur général des finances publiques, que notre commission entendait hier, a indiqué que la représentation parcellaire cadastrale unique ne se substituait pas au plan de l’IGN : les deux plans superposés fusionneront à terme. J’ajoute que, en principe, il n’y a pas de velléité de modification des valeurs locatives foncières.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. J’avoue que je n’ai pas tiré les mêmes conclusions de la lecture de l’article 22. Et puis, dans huit ans, il sera trop tard !

La commission rejette l’amendement CF 213.

Puis elle adopte l’article 22 sans modification.

*

* *

Article 23
Refonte de la participation des collectivités territoriales au coût du dégrèvement afférent au plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée

Le présent article vise à corriger les défauts du mode actuel de calcul de la participation des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) au plafonnement de la contribution économique territoriale (CET) en fonction de la valeur ajoutée (VA). Compte tenu de ces défauts, cette participation des collectivités n’est pas mise en œuvre. Le coût pour l’État est estimé à 111 millions d’euros pour 2014 et à 167 millions d’euros pour 2015.

Conformément à l’article 1647 B sexies du code général des impôts, lorsque le montant dû de CET est supérieur à 3 % de la valeur ajoutée produite, l’entreprise redevable peut demander un dégrèvement, sous la forme d’un plafonnement de la taxe. Le taux de plafonnement est fixé à 3 % de la valeur ajoutée produite par l’entreprise au cours de la période de référence.

Pour les micro-entreprises, auto-entrepreneurs, professions libérales ou artistes-auteurs rémunérés en droits d’auteur, la valeur ajoutée prise en compte correspond à 80 % de la différence entre le montant des recettes et celui des achats réalisés au cours de l’année d’imposition.

Est prise en compte, pour calculer le dégrèvement, la somme de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), diminuée des réductions ou dégrèvements qui les concernent et, éventuellement, augmentée des impositions supplémentaires (taxes spéciales d’équipement)

Ne sont pas pris en compte dans le calcul : le crédit d’impôt en faveur des entreprises implantées en zone de restructuration de la défense (ZRD), le dégrèvement pour cessation d’activité, les taxes consulaires (taxes pour frais de chambres de commerce et d’industrie et de chambres de métiers et de l’artisanat).

Le dégrèvement s’impute sur la CFE uniquement. Il ne peut pas avoir pour effet de ramener la CET due à un montant inférieur à la cotisation minimale de CFE fixée par la commune.

L’entreprise peut réduire son acompte ou son solde de CFE du montant du plafonnement de la valeur ajoutée (PVA) attendu. Elle doit en informer le service des impôts des entreprises (SIE) dont elle dépend et adresser sa demande de dégrèvement avant le 31 décembre de l’année suivant la mise en recouvrement de la CFE auprès du SIE dont dépend son établissement principal.

La moitié du dégrèvement obtenu ou attendu pour l’année N − 1 peut être imputée par anticipation sur l’acompte de CFE de l’année N sous la responsabilité du contribuable. Le dégrèvement attendu au titre de l’année d’imposition peut également être imputé sur le solde de la CFE de la même année.

Le montant de ce dégrèvement évolue en fonction de la valeur ajoutée, ainsi que de l’évolution des bases et des taux de CFE. Les collectivités locales qui augmentent leur taux de CFE augmentent donc le montant du dégrèvement et majorent son coût pour l’État.

Afin de les responsabiliser, l’article 1647-0 B septies du code général des impôts met à la charge des communes et des EPCI à fiscalité propre ayant un taux de CFE supérieur à celui de 2010 la hausse du coût des dégrèvements accordés aux entreprises bénéficiaires du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée deux années consécutives (entreprises dites « structurellement plafonnées »).

Institué par l’article 77 de la loi de finances pour 2010 (211), ce dispositif se substituait à la participation au plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée.

L’article 1647-0 B septies définit les modalités de participation des collectivités au coût du plafonnement de la valeur ajoutée (PVA), à compter de 2013. Une fraction du montant du dégrèvement de la CET en fonction de la valeur ajoutée prévu à l’article 1647 B sexies est mise à la charge des communes et des EPCI. Cette participation est calculée la deuxième année suivant celle au titre de laquelle le dégrèvement est accordé.

2. Les modalités actuelles de calcul de la PVA

Le dispositif actuel détermine, en effet, le montant mis à la charge de chaque collectivité territoriale en trois étapes.

• Première étape : détermination de la participation globale nationale (PGN)

La PGN est égale à la différence entre le montant total du dégrèvement PVA accordé en N − 2 aux entreprises qui en bénéficiaient en N − 3 et le montant total du dégrèvement PVA accordé en 2010 (année de référence) aux entreprises qui en bénéficiaient également en 2009.

• Deuxième étape : répartition de la PGN

La PGN est ensuite répartie entre les EPCI à fiscalité professionnelle unique (FPU) et les communes non membres d’un tel EPCI qui ont augmenté leur taux de CFE depuis 2010, au prorata du produit des bases de CFE des entreprises situées sur leur territoire bénéficiaires du PVA au titre de deux années consécutives et de la variation de leur taux de CFE.

L’écart de taux est égal à la différence positive entre :

– d’une part la moyenne, sur le territoire de cet EPCI ou de cette commune, de la somme des taux communal et intercommunal de CFE applicables la deuxième année précédant celle pour laquelle la répartition est calculée, ainsi que du taux additionnel appliqué, le cas échéant, par un syndicat de communes, pondérée par les bases communales de CFE ;

– d’autre part la moyenne, sur ce même territoire, de la somme des taux communal et intercommunal de référence (2010), ainsi que du taux additionnel appliqué, le cas échéant, par un syndicat intercommunal, pondérée par les bases de CFE imposées au titre de 2010.

● Troisième étape : plafonnement de la PVA

La PVA est plafonnée si l’écart entre 1,5 % de l’assiette de la CVAE afférente au territoire de la commune ou de l’EPCI imposée au titre de l’année 2010 et 1,5 % de la même assiette imposée au titre de l’année N est positif.

Dans ce cas, la participation mise à la charge de la commune ou de l’EPCI est réduite d’un montant égal à cette différence multipliée par le rapport entre :

– les bases de la CFE des entreprises bénéficiaires du dégrèvement pour la deuxième année consécutive

– et les bases de CFE des entreprises imposées au profit de cette commune ou de cet EPCI.

La participation de chaque commune ou EPCI à fiscalité propre vient en diminution de ses attributions mensuelles des taxes et impositions perçues par voie de rôle. Toutefois, si elle est inférieure à 50 euros, elle n’est pas mise à la charge de cette commune ou de cet établissement.

3. Les nombreux biais de ce dispositif ont empêché sa mise en œuvre

Dans l’évaluation préalable, le Gouvernement met en évidence trois biais du dispositif actuel.

● La PGN n’est pas strictement liée au coût global du PVA

Le calcul de la participation globale nationale conduit à mettre à la charge des collectivités :

– la hausse des dégrèvements dont bénéficient une partie seulement des entreprises (dites « structurellement plafonnées ») ;

– la fraction de la somme de ces dégrèvements qui dépasse le montant enregistré l’année de référence, sans tenir compte finement des facteurs d’évolution (évolution des taux, des bases, de la valeur ajoutée).

● La répartition n’est pas strictement liée à l’incidence des politiques de taux des collectivités

La participation individuelle de chaque collectivité, qui est déclenchée par la hausse de leur taux de CFE, est renforcée par un effet base. La contribution de certaines communes peut être supérieure au produit supplémentaire résultant de sa politique de taux. Tel est le cas lorsque les bases de l’entreprise diminuent.

Si le dispositif avait été mis en œuvre en 2013, il aurait conduit plus d’une trentaine de communes à supporter une participation représentant plus de 50 % de leurs ressources de CET, avec dans près de dix cas des participations dépassant 100 % des ressources de CET.

Exemple 1

Soient deux communes A et B ayant chacune augmenté son taux de CFE de un point et disposant chacune d’un établissement d’une même entreprise (respectivement A et B) dégrevée à hauteur de 1,1 million d’euros chacune en 2013 contre 1 million d’euros en 2010. La PGN est de 200 000 euros.

Or les bases de l’établissement A sont trois fois plus élevées que les bases de l’établissement B. La participation de la commune A s’élèvera donc à 150 000 euros contre 50 000 euros pour la commune B.

Au cas particulier, la participation de la commune A est supérieure à l’incidence de sa politique de taux sur le coût du dégrèvement (100 000 euros).

Exemple 2

Soient deux entreprises E1 et E2 situées respectivement dans deux communes C1 et C2. Leurs bases de CFE étaient de 8 333 et 12 500 en 2010 et sont de 8 333 et 12 000 en N – 2. Par ailleurs, le plafond de valeur ajoutée est de 500 pour E1 et de 900 pour E2.

Les communes C1 et C2 ont relevé leur taux de 10 à 12 %. La mise à la charge de C2 (210) est supérieure au produit résultant de sa politique de taux (190).

Source : évaluation préalable de l’article 23.

● Les élus ne peuvent pas mesurer l’impact de leur politique de taux de CFE

En effet, pour la détermination du montant de la PVA due par les collectivités au titre de l’année N, les taux pris en compte sont ceux votés en N – 2. Les élus constatent donc avec un décalage de deux ans le montant des prélèvements sur les douzièmes de fiscalité qu’ils supporteraient à raison du taux de CFE voté en N – 2. Ce décalage est aggravé par la circonstance que la participation ne peut être calculée qu’en fin d’année, une fois les dégrèvements au titre de N – 2 recensés, et ne peut donc en pratique être prélevée que sur les douzièmes de fin d’année. Cette absence de visibilité empêche le PVA de remplir son objectif principal : inciter à la modération des augmentations de taux de CFE.

● Les EPCI ne contribuent pas directement au financement du PVA

Alors même que les EPCI à fiscalité additionnelle votent un taux de CFE, ils ne contribuent pas directement au financement du PVA. Ils versent une compensation budgétaire à celles de leurs communes membres qui sont redevables de la PVA. Cette compensation est égale au produit de la participation acquittée par chaque commune par le rapport entre les produits intercommunaux et communaux de CFE, de sorte qu’elle n’est pas en lien direct avec le taux de CFE de l’EPCI à fiscalité additionnelle.

II. CONTEXTE ÉCONOMIQUE, FINANCIER ET BUDGÉTAIRE

La CFE perçue par les collectivités s’est établie à 6,97 milliards d’euros en 2014, dont 0,94 milliard d’euros pris en charge par l’État au titre de ce dégrèvement. Le coût en est croissant, puisqu’il devrait s’élever à 1,03 milliard d’euros en 2016.

ÉVOLUTION DU PRODUIT DE CFE ET DU MONTANT DU PLAFONNEMENT À LA VA

(en millions d’euros)

Année

2010

2011

2012

2013

2014

2015
(prévisions)

Bases nettes de CFE

28 196

29 322

30 367

30 322

31 024

Produit de CFE

6 327

6 662

6 935

6 970

nd

Dégrèvement de CFE/plafonnement à la VA

434

937

868

1 029

nd

Dégrèvement de TP/ plafonnement à la VA

10 508

1 344

272

143

42

nd

Pourcentage des recettes au titre des impôts économiques (TP, CFE, CVAE, IFER), prises en charge par l’État

ns (1)

29,6 %

25,4 %

23,7 %

22,8 %

nd

(1) En 2010, ce rapport n’est pas calculé car les recettes contiennent pour l’essentiel la compensation relais de la taxe professionnelle versée de façon transitoire.

Source : Observatoire des finances locales, 2015.

COÛT DU PLAFONNEMENT DE CET À LA VALEUR AJOUTÉE

(en millions d’euros)

Année

2012

2013

2014

2015
(prévisions)

2016
(prévisions)

Nombre de bénéficiaires

30 000

30 000

35 000

nc

nc

Coût pour l’État

937

868

1 068

1 037

1 033

Coût pour les collectivités

0

0

0

0

0

Coût total

937

868

1 068

1 037

1 033

Source : secrétariat d’État au budget.

III. LA MODIFICATION PROPOSÉE

Cet article prévoit une participation des collectivités au plafonnement :

– proportionnelle : la participation est définie selon la fraction des dégrèvements des entreprises due à la hausse de taux de CFE depuis 2010 ;

– prévisible : les collectivités pourront évaluer leur participation dès le vote de leur taux de CFE ;

– plafonnée : au montant des dégrèvements au titre du plafonnement à la VA accordés par une collectivité sur son territoire.

Le I de cet article (alinéas 1 à 35) propose une nouvelle rédaction globale pour l’article 1647-0 B septies du code général des impôts.

Le III (alinéa 37) prévoit que la réforme s’applique à compter de la participation due au titre de 2016, avec un premier impact pour les collectivités et l’État en 2017.

A. LA PARTICIPATION DES COMMUNES AU PLAFONNEMENT À LA VALEUR AJOUTÉE

La nouvelle rédaction proposée pour le I de l’article 1647-0 B septies du code général des impôts (alinéa 2) met à la charge des communes et EPCI à fiscalité propre une fraction des dégrèvements accordés au titre du PVA.

La nouvelle rédaction proposée pour le II de l’article 1647-0 B septies du code général des impôts (alinéas 3 à 9) définit les modalités de calcul de cette participation.

La participation due par une commune ou un EPCI au titre d’une année N (alinéa 4) est égale à la somme des participations calculées pour chacun des établissements :

– situés sur leur territoire,

– relevant d’une entreprise non soumise à la cotisation minimum sur la valeur ajoutée des entreprises,

– bénéficiaire du PVA à raison d’une imposition établie au cours de cette année N.

B. LE CALCUL DE LA PARTICIPATION PAR ÉTABLISSEMENT

La participation pour chaque établissement se calcule comme suit (alinéas 5 à 9).

Le produit de la base nette de CFE de l’établissement par l’écart de taux défini ci-après permet d’établir une participation individuelle brute. Deux corrections peuvent lui être appliquées (alinéa 6).

● La participation individuelle est minorée du produit suivant (alinéas 7 et 8) :

somme des réductions et dégrèvements appliqués à la part communale de CFE (212)

×

écart de taux ÷ somme des taux d’imposition appliqués aux bases
de l’établissement

● Elle se voit appliquer le coefficient suivant (alinéa 9), s’il est supérieur à 1 :

montant du dégrèvement demandé au cours de l’année N + 1 et accordé au contribuable

÷

somme des participations individuelles minorées afférentes aux établissements de l’entreprise concernée.

● Les règles de calcul de l’écart de taux

L’écart de taux intervenant dans le calcul de la participation de chaque établissement est déterminé conformément aux dispositions présentées dans le tableau ci-après. Ces dernières dépendent des catégories de communes et d’EPCI.

DÉTERMINATION DE L’ÉCART DE TAUX POUR L’APPLICATION DE LA MINORATION DE PARTICIPATION INDIVIDUELLE BRUTE
PRÉVUE À L’ALINÉA 6

Alinéas

Catégorie de communes ou EPCI

Mode de calcul de l’écart de taux : différence positive

Observations

10 à 12

Commune isolée

Taux communal de CFE

Moins

(Somme des taux moyens communal et intercommunal de référence (2010) pondérés par l’importance relative des bases de CFE imposées au titre de 2010 sur le territoire de la commune)

Alinéa 28 : ces règles s’appliquent également

pour les EPCI à fiscalité additionnelle substitués aux communes membres pour les dispositions relatives à la CFE acquittée par les entreprises implantées dans une zone d’activités économiques ou afférente aux éoliennes

13 à 15

Commune membre d’un EPCI à fiscalité additionnelle, déjà membre d’un tel EPCI en 2010

Taux communal de CFE

Moins

Taux communal de CFE de référence

16 à 18

Commune membre d’un EPCI à fiscalité additionnelle, sans avoir été membre d’un tel EPCI en 2010

Taux communal de CFE

Moins

(Somme des taux moyens communal et intercommunal de référence pondérés par l’importance relative des bases de CFE imposées au titre de 2010

minorée du taux intercommunal appliqué l’année de rattachement effectif de la commune à l’EPCI)

 

19 à 21

EPCI à fiscalité propre dont le périmètre et le régime fiscal n’ont pas évolué depuis 2010

Taux intercommunal de CFE

Moins

Taux intercommunal de CFE de référence

 

22 à 24

EPCI à fiscalité professionnelle unique dont le périmètre ou le régime fiscal ont été modifiés depuis 2010

Taux intercommunal de CFE

Moins

Somme des taux moyens communal et intercommunal de référence pondérés par l’importance relative des bases de CFE imposées au titre de 2010 sur le territoire de l’EPCI)

 

25 à 27

EPCI à fiscalité additionnelle issu d’une création ou d’une fusion ou de la modification d’EPCI à fiscalité propre à compter du 1er janvier 2011

(Taux intercommunal de CFE majoré du taux moyen du taux moyen communal de CFE appliqué l’année où la création, modification ou fusion a pris effet fiscalement) pondéré par les bases de CFE imposées au titre de cette dernière année sur le territoire de cet établissement

Moins

Somme des taux moyens communal et intercommunal de référence pondérés par l’importance relative des bases de CFE imposées au titre de 2010 sur le territoire de l’EPCI

 

29 et 30

Pour l’application de ces dispositions, les taux communaux et intercommunaux sont, le cas échéant, majorés des taux additionnels appliqués au profit des syndicats dont la commune ou l’EPCI est membre

C. LE PLAFONNEMENT DE LA PARTICIPATION

La rédaction du IV proposée pour l’article 1647-0 B septies du code général des impôts vise à plafonner la participation des communes et EPCI au plafonnement à la valeur ajoutée.

La PVA mise à la charge de la commune ou de l’EPCI au titre d’une année N ne peut excéder le produit de l’écart de taux par les bases prévisionnelles de CFE notifiées, afférentes aux entreprises qui ne sont pas soumises à la cotisation minimale de CFE et ont bénéficié d’un dégrèvement au cours de l’année N – 2 (alinéa 32).

Le montant de la participation vient en diminution des douzièmes versés à la commune ou l’EPCI en année N + 1 (alinéa 33).

Seuls les montants supérieurs ou égaux à cinquante euros sont mis à la charge des communes et EPCI (alinéa 34).

Si le montant mis à la charge d’une commune ou EPCI excède la participation due en N + 1 au titre de l’année N, la différence lui est reversée avant la fin de l’année N + 2.

D. APPLICATION À MAYOTTE

L’article 19 de l’ordonnance du 19 septembre 2013 (213) comporte des modifications de l’article 1647-0 B septies, applicables à Mayotte, à compter du 1er janvier 2018. Par cohérence avec la réécriture de cet article 1647-0 B septies proposée par le présent article, l’alinéa 36 (II) abroge ces modifications.

La nouvelle rédaction proposée pour l’article 1647-0 B septies précité s’appliquera à Mayotte à compter des impositions dues au titre de 2016. Pour le calcul de l’écart de taux, l’année de référence sera 2014 et non pas 2010 (alinéa 31).

IV. IMPACT BUDGÉTAIRE

L’évaluation préalable ne comporte pas de chiffrage de l’impact de cette réforme. Celui-ci est globalement neutre pour l’ensemble des administrations publiques, puisqu’il s’agit d’une répartition entre l’État d’une part, les communes et EPCI d’autre part.

De plusieurs indications glissées dans l’évaluation préalable, on peut toutefois comprendre que le coût pour les collectivités et le gain pour l’État serait de l’ordre de 110 à 120 millions d’euros au moins.

D’une part, la perte de recettes pour l’État résultant de la non-application du dispositif en vigueur est estimée (214) en 2014 à 111 millions d’euros, répartie entre 697 EPCI à fiscalité professionnelle unique (FPU) et 1 560 communes non membres d’un EPCI à FPU. Pour 2015, ce coût est estimé à 167 millions d’euros, selon les informations transmises à la Rapporteure générale.

D’autre part, le dispositif proposé reprend largement le dispositif appliqué entre 2007 et 2010 de plafonnement de la taxe professionnelle à la valeur ajoutée (215). Pour sa dernière année, au titre de 2010, la participation des collectivités au plafonnement s’est élevée à 1,369 milliard d’euros, répartis entre 8 4141 collectivités. Elle a couvert 12 % du coût du dégrèvement (11,6 milliards d’euros). Le coût du dégrèvement de CET au titre du PVA est beaucoup plus faible (1 milliard d’euros). L’application d’un même taux de couverture conduirait à mettre à la charge des collectivités un montant de l’ordre de 120 millions d’euros.

*

* *

La commission examine l’amendement CF 256 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Cet amendement vise à exonérer les communes éligibles à la dotation solidarité urbaine (DSU) cible de la participation des collectivités territoriales au plafonnement de la contribution économique territoriale (CET) en fonction de la valeur ajoutée. Il est paradoxal de donner de la DSU d’une main et de plafonner les recettes de l’autre.

Mme la Rapporteure générale. Nous ne disposons d’aucun chiffrage. Mon avis est en conséquence plutôt défavorable.

L’amendement CF 256 est retiré.

La commission adopte ensuite l’article 23 sans modification.

*

* *

Article 24
Adaptation des dispositions fiscales aux regroupements de communes

Le régime fiscal des communes nouvelles est actuellement limité aux règles relatives aux taux des impôts fonciers – taxe d’habitation (TH), taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties (TFPB et TFPNB), cotisation foncière des entreprises (CFE) – et à la base minimum de CFE. Le présent article la complète sur les points suivants.

– le mécanisme de correction des abattements de TH mis en place après le transfert de la TH des départements vers le bloc communal est supprimé à compter de l’harmonisation des abattements de TH sur le territoire de la commune nouvelle ;

– les modalités de calcul du taux de la taxe additionnelle à la TFPNB lorsque les communes nouvelles sont à cheval sur deux départements, deux régions, ou se situent en Île-de-France, sont précisées ;

– possibilité est donnée aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dont le périmètre évolue du fait du retrait d’une commune de modifier la procédure d’unification des taux de fiscalité directe locale en cours ;

– les conditions de recours à l’intégration fiscale progressive (IFP) sont assouplies, pour les communes nouvelles comme pour les EPCI à fiscalité propre ;

– les règles relatives aux délibérations (hors taux) prises par les communes préexistantes sont précisées. En l’absence de délibération de la commune nouvelle ou des communes préexistantes, les délibérations relatives aux exonérations et abattements sont maintenues pour leur durée et leur quotité lorsqu’il s’agit de dispositifs limités ou pour un an pour les dispositifs non bornés.

La loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales (216) a instauré un nouveau dispositif de fusion de communes. La loi du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle (217) n’est pas revenue sur la procédure de création des communes nouvelles en lieu et place de communes contiguës. Codifiée aux articles L. 2113-1 à L. 2113-22 du code général des collectivités territoriales (CGCT), celle-ci repose sur une procédure engagée :

– soit par tous les conseils municipaux ;

– soit par les deux tiers au moins des conseils municipaux des communes membres d’un même EPCI à fiscalité propre représentant plus des deux tiers de la population de celui-ci ;

– soit par l’organe délibérant de l’EPCI en vue de la création d’une commune nouvelle en lieu et place de cet EPCI ;

– soit par le préfet.

Dans tous les cas, la création de la commune nouvelle suppose des délibérations concordantes de l’ensemble des conseils municipaux des communes concernées. Si seuls les deux tiers au moins des conseils municipaux des communes membres, représentant plus des deux tiers de la population totale de celles-ci, sont favorables au projet de fusion, la population des communes membres est appelée à se prononcer sur le projet de fusion.

Lorsque les communes concernées par une demande de création d’une commune nouvelle ne sont pas situées dans le même département ou dans la même région, la décision de création ne peut être prise qu’après modification des limites territoriales des départements ou régions concernés par décret en Conseil d’État pris après accord des conseils généraux et conseils régionaux concernés ou à défaut d’accord, par la loi.

L’article L. 2113-5 du CGCT détaille les conséquences pour les EPCI à fiscalité propre de la création d’une commune nouvelle. Il y a lieu de distinguer deux cas de figure.

● En cas de création d’une commune nouvelle en lieu et place de communes appartenant à un même EPCI à fiscalité propre, l’arrêté portant création de la commune nouvelle emporte également suppression de l’EPCI à fiscalité propre dont étaient membres les communes intéressées. L’ensemble des biens, droits et obligations de l’EPCI à fiscalité propre supprimé et des communes dont est issue la commune nouvelle est transféré à cette dernière.

● En cas de création d’une commune nouvelle en lieu et place de communes appartenant à des EPCI à fiscalité propre distincts, le conseil municipal de la commune nouvelle délibère dans le mois de sa création sur l’EPCI dont il souhaite que la commune soit membre. En cas de désaccord du préfet, celui-ci saisit la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI) d’un projet de rattachement de la commune nouvelle à un autre EPCI. Si la CDCI appuie alors, à la majorité des deux tiers de ses membres, la décision de la commune nouvelle, celle-ci devient membre de l’EPCI à fiscalité propre en faveur duquel elle avait délibéré.

Un arrêté du représentant de l’État prononce obligatoirement le rattachement de la commune nouvelle à un EPCI à fiscalité propre. Jusqu’à cet arrêté, la commune nouvelle reste membre de tous les EPCI dont étaient membres ses anciennes communes.

2. Le régime fiscal des communes nouvelles est encore incomplet

Il est actuellement limité aux règles relatives aux taux des impôts fonciers et à la base minimum de CFE.

Règles relatives aux taux des impôts fonciers

L’article 1638 du code général des impôts applique aux communes nouvelles le dispositif d’intégration fiscale progressive. Ce régime fiscal transitoire permet d’organiser, sur une période de douze années, la convergence des taux des quatre impôts directs sur lesquels les communes disposent d’un pouvoir de modulation : TFPB, TFPNB, TH et CFE.

Durant cette période transitoire, il est possible de maintenir des taux d’imposition différents sur les territoires correspondant aux anciennes communes et d’organiser leur rapprochement progressif, en réduisant les écarts d’un treizième chaque année. La convergence est ainsi totale à compter de la treizième année.

La décision de recourir à ce dispositif d’intégration fiscale progressive peut être prise :

– soit, avant la fusion, par délibérations concordantes des conseils municipaux des communes ;

– soit, avant la fusion, par délibération du conseil municipal d’une seule commune, si pour chacun des impôts considérés, le taux d’imposition appliqué dans la commune préexistante la moins imposée est égal ou supérieur à 80 % du taux d’imposition correspondant appliqué dans la commune préexistante la plus imposée ;

– soit, après la fusion, par le conseil municipal de la commune nouvelle.

Base minimum de CFE

L’assujettissement à la CFE minimum consiste à imposer chaque redevable de la CFE au lieu de son principal établissement sur une base minimum substituée à la base nette de cet établissement lorsque celle-ci est plus faible.

Cette base minimum est fixée par le conseil municipal ou l’organe délibérant de l’EPCI à fiscalité propre en fonction d’un barème prévu par l’article 1647 D du code général des impôts. La CFE minimum est égale au produit de la base minimum par le taux global de CFE applicable pour l’année d’imposition, augmenté des frais de gestion de la fiscalité directe locale. Pour les communes nouvelles créées à compter du 1er janvier 2013, le montant de la base minimum applicable est égal, sous réserve d’un plafonnement :

– la première année où l’opération est fiscalement effective : au montant de la base minimum applicable l’année précédente sur le territoire de chaque commune ou de chaque EPCI à fiscalité professionnelle unique (FPU) ou de zone (FPZ) préexistant ;

– les années suivantes : à la moyenne des bases minimum applicables la première année où l’opération prend fiscalement effet, pondérée par le nombre de redevables soumis à la cotisation minimum cette même année.

3. Les incitations financières à la création de communes nouvelles

● L’article 133 de la loi de finances pour 2014 (218), introduit à l’initiative de M. Jacques Pélissard, permet aux communes nouvelles créées avant le 1er janvier 2016 regroupant une population inférieure ou égale à 10 000 habitants, ainsi qu’à toutes les communes nouvelles créées avant mars 2014, de bénéficier d’un montant garanti de dotation globale de fonctionnement (DGF) pendant trois ans.

● La loi du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelleprécitée, issue d’une proposition de loi de nos collègues Bruno Le Roux et Christine Pires Beaune, a prévu le maintien du dispositif d’exonération de la baisse de la dotation forfaitaire pour les communes nouvelles créées au plus tard le 1er janvier 2016 et regroupant soit toutes les communes d’un ou plusieurs EPCI, soit une population totale égale ou inférieure à 10 000 habitants.

De plus, les communes nouvelles dont la population est comprise entre 1 000 et 10 000 habitants bénéficient également d’une majoration de 5 % de leur dotation forfaitaire sur les trois premières années suivant leur création tandis que les communes nouvelles regroupant toutes les communes membres d’un ou plusieurs EPCI bénéficieront pour leur part, de la part « compensation » et de la dotation de consolidation antérieurement détenues par le ou les EPCI intégrés.

● Des amendements au projet de loi de finances pour 2016, adoptés par l’Assemblée nationale à l’initiative de la commission des finances, visent à modifier les conditions posées aux communes souhaitant fusionner : elles devront regrouper plusieurs communes contiguës et une population inférieure ou égale à 10 000 habitants ou toutes les communes membres d’un ou plusieurs EPCI à fiscalité propre dont la population est inférieure ou égale à 15 000 habitants, par coordination avec les dispositions de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) (219) relatives à la refonte de la carte intercommunale.

Le bénéfice des incitations financières est maintenu pour les communes nouvelles lorsque tous les conseils municipaux concernés ont adopté une délibération en ce sens avant le 31 mars 2016 et que l’arrêté préfectoral instituant la commune nouvelle est publié au plus tard le 30 juin 2016.

Enfin, l’extension d’une commune nouvelle ne lui ferait plus perdre le bénéfice de ces avantages.

4. Un nombre encore limité de communes nouvelles

Au 17 novembre 2015, 96 communes nouvelles sont constituées par arrêté préfectoral et 130 projets sont recensés.

IMPACT FINANCIER DU RÉGIME D’ENCOURAGEMENT À LA CRÉATION

DE COMMUNES NOUVELLES

(en millions d’euros)

Année

2015

2016

Montant des exonérations de contribution au redressement des finances publiques (CRFP)

1,0

5,0

Montant des autres bonifications

0,5

1,05

Total sur la DGF

1,5

6,05

Source : secrétariat d’État au budget.

   

Pour 2015, le régime d’encouragement à la création des communes nouvelles représente une enveloppe de 1,5 million d’euros au sein de la DGF, soit un million d’euros pour l’exonération contribution au redressement des finances publiques (CRFP) et 0,5 million d’euros pour la bonification à 5 % pour les communes de 1 000 à 10 000 habitants. Pour 2016, l’impact au sein de la DGF est estimé à 6,05 millions d’euros, soit 5 millions pour la CRFP, 0,35 million pour la somme des écrêtements de l’ensemble des communes fusionnant et 0,7 million d’euros pour la bonification à 5 %.

B. LA REFONTE DE LA CARTE INTERCOMMUNALE

Les articles 33, 35 et 40 de la loi NOTRe du 7 août 2015 précitée organisent une refonte de la carte intercommunale à travers l’élaboration et la mise en œuvre de nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI). Ceux-ci devront notamment tenir compte du relèvement du seuil de constitution d’un EPCI à fiscalité propre de 5 000 à 15 000 habitants. Ils doivent être arrêtés avant le 31 mars 2016. Au 15 juin 2016, les préfets devront avoir élaboré l’arrêté de projet de périmètre pour chaque EPCI et syndicat. Les SDCI devront être publiés avant le 31 décembre 2016, pour une prise d’effet le 1er janvier 2017. Le Gouvernement a invité les préfets à créer des EPCI les plus grands possibles, le seuil des 15 000 habitants étant une limite basse et à prononcer la dissolution de tout syndicat mixte qui deviendrait inutile en raison du transfert envisagé de ses compétences.

Selon les projets de schémas soumis aux CDCI le 15 octobre 2015, le nombre d’EPCI à fiscalité propre pourrait atteindre moins de 1 300 EPCI au lieu de 2 133 aujourd’hui, soit une réduction de leur nombre de près de 40 %. 460 fusions seraient envisagées. Parmi elles, 142 regrouperaient plus de 50 communes.

II. LES MODIFICATIONS PROPOSÉES

A. SUPPRESSION DU MÉCANISME DE CORRECTION DES ABATTEMENTS DE TH

Le II quater de l’article 1411 du code général des impôts prévoit la correction du montant des différents abattements (abattement obligatoire pour charges de famille ou abattements facultatifs à la base) diminuant la valeur locative afférente à l’habitation principale de chaque contribuable pour tenir compte du transfert, depuis 2011, de la taxe d’habitation départementale aux communes et EPCI à fiscalité propre.

L’abattement est corrigé d’un montant égal à la différence entre :

– d’une part, la somme de l’abattement en 2010 de la commune ou de l’EPCI à fiscalité propre bénéficiaire du transfert et de l’abattement départemental en 2010, chacun de ces abattements étant affecté du rapport entre le taux de la collectivité territoriale ou de l’EPCI concerné et la somme des taux de la commune ou de l’EPCI et du département en 2010 ;

– d’autre part, le montant en 2010 de l’abattement de la commune ou de l’EPCI à fiscalité propre bénéficiaire du transfert.

Le montant de l’abattement ainsi corrigé ne peut être inférieur à zéro.

Les alinéas 2 et 3 (1° du I du présent article) suppriment ces corrections, en cas de création de commune nouvelle, à compter de l’année au cours de laquelle les abattements appliqués sur son territoire sont harmonisés.

Cette disposition s’inscrit dans la logique de l’article 1411 précité, qui offre déjà la possibilité, aux conseils municipaux et les organes délibérants des EPCI à fiscalité propre qui délibèrent pour fixer le montant des abattements applicables sur leur territoire, de supprimer la correction des abattements.

B. PRÉCISION DES MODALITÉS DE CALCUL DU TAUX DE LA TAXE ADDITIONNELLE À LA TFPNB

L’article 1519 I du code général des impôts institue au profit des communes et des EPCI à fiscalité propre une taxe additionnelle à la TFPNB pour les propriétés suivantes :

1° carrières, ardoisières, sablières, tourbières ;

2° terrains à bâtir, rues privées ;

3° terrains d’agrément, parcs et jardins et pièces d’eau ;

4° chemins de fer, canaux de navigation et dépendances ;

5° sols des propriétés bâties et des bâtiments ruraux, cours et dépendances.

Son produit est obtenu en appliquant, chaque année, aux bases imposables la somme des taux départemental et régional de la TFPNB appliqués en 2010 sur le territoire de l’EPCI, multipliée par un coefficient de 1,0485.

Lorsque le territoire de l’EPCI est situé sur plusieurs départements ou régions, le taux départemental ou le taux régional s’entendent de la moyenne des taux départementaux ou régionaux appliqués en 2010 sur le territoire de l’EPCI, pondérés par l’importance relative des bases départementales ou régionales de la taxe situées sur le territoire de l’EPCI, telles qu’issues des rôles établis au titre de 2010.

Lorsque le territoire des communes et EPCI se situe au moins en partie dans la région Île-de-France, le taux régional s’entend du taux de l’année 2010 de la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties prévue à l’article 1599 quinquies dans sa rédaction en vigueur au 1er janvier 2010.

Les alinéas 4 et 5 (2° du I du présent article) transposent ces dispositions aux communes nouvelles regroupant des communes situées sur le territoire de plusieurs départements ou régions, ou sur celui de la région Île-de-France.

C. POSSIBILITÉ POUR LES EPCI DONT LE PÉRIMÈTRE ÉVOLUE DU FAIT DU RETRAIT D’UNE COMMUNE DE MODIFIER LA PROCÉDURE D’UNIFICATION DES TAUX DE FISCALITÉ DIRECTE LOCALE EN COURS

Afin de faciliter la mise en place des nouveaux schémas territoriaux issus de la loi NOTRe, le III de l’article 1609 nonies C du code général des impôts permet au conseil d’un EPCI à FPU de modifier, par une délibération adoptée à la majorité simple de ses membres, la durée de la période de réduction des écarts de taux de CFE, sans que cette durée puisse excéder douze ans.

La durée de droit commun dépend du rapport observé, l’année précédant la première année de substitution, entre le taux de la commune la moins taxée et celui de la commune la plus taxée, le taux de CFE applicable dans chaque commune membre devant être rapproché du taux de l’EPCI jusqu’à application d’un taux unique, l’écart étant réduit chaque année par parts égales.

La délibération doit intervenir dans les conditions prévues à l’article 1639 A du même code, au cours de la première année de substitution de l’EPCI à ses communes membres pour la perception de la CFE.

Cette délibération ne peut être modifiée ultérieurement, sauf en cas de retrait d’une ou plusieurs communes en application des articles L. 5211-41-1, L. 5215-40-1 et L. 5216-10 du CGCT.

La réduction des écarts de taux s’opère, chaque année, par parts égales ; dans le cas où le dispositif de réduction des écarts de taux est déjà en cours, l’écart est réduit chaque année, par parts égales en proportion du nombre d’années restant à courir conformément à la durée fixée par la délibération.

L’alinéa 6 (3° du I du présent article) étend la possibilité de modifier la procédure d’unification des taux de fiscalité directe locale en cours aux EPCI à FPU. Ceux-ci pourront modifier la durée de la procédure d’unification de leur taux de CFE dans les cas de retrait de communes visés par la loi NOTRe du 7 août 2015 et la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM) (220).

Ces cas sont les suivants : création d’un EPCI à fiscalité propre, modification du périmètre d’un tel EPCI, ou fusion d’EPCI dont l’un au moins est à fiscalité propre. Dans le cadre du schéma régional de coopération intercommunale, dans les départements de l’Essonne, de Seine-et-Marne, du Val-d’Oise et des Yvelines ou du schéma départemental de coopération intercommunale dans les autres départements, l’arrêté préfectoral fixant le périmètre de ces EPCI emporte retrait des communes concernées des EPCI à fiscalité propre dont elles sont membres.

D. ASSOUPLISSEMENT DES CONDITIONS DE RECOURS À L’INTÉGRATION FISCALE PROGRESSIVE

L’article 1638 du code général des impôts permet actuellement l’application de taux différents de fiscalité directe locale sur le territoire de chaque commune participant à la création d’une commune nouvelle pendant une période transitoire qui ne peut excéder douze ans. Les taux appliqués sur le territoire de chaque commune préexistante sont progressivement rapprochés du taux voté par la commune nouvelle, chaque année par parts égales. À l’issue de cette période d’IFP, un taux unique de fiscalité directe locale est appliqué sur l’ensemble du territoire de la commune nouvelle. La durée de la période de réduction des écarts de taux d’imposition ne peut être modifiée ultérieurement.

Cette procédure peut concerner l’ensemble des taux de fiscalité directe locale (TFPB, TFPNB, TH, CFE) ou une partie d’entre eux. Elle est précédée d’une homogénéisation des abattements appliqués pour le calcul de la taxe d’habitation.

Il est proposé aux alinéas 8 et 9 du présent article (a) du 4° du I) que cette homogénéisation puisse être décidée dans les mêmes conditions que le recours à l’intégration fiscale progressive (IFP).

Serait ainsi prévue une dérogation à l’article 1639 A bis du code général des impôts. Le I de cet article dispose que « les délibérations des collectivités locales et des organismes compétents relatives à la fiscalité directe locale, autres que celles fixant soit les taux, soit les produits des impositions, et que celles instituant la taxe d’enlèvement des ordures ménagères doivent être prises avant le 1er octobre pour être applicables l’année suivante. Elles sont soumises à la notification prévue à l’article 1639 A au plus tard quinze jours après la date limite prévue pour leur adoption ».

Le recours à l’IFP est décidé dans les conditions suivantes : la décision est prise, soit par le conseil municipal de la commune nouvelle, soit en exécution de délibérations de principe concordantes prises antérieurement à la création de la commune nouvelle par les conseils municipaux des communes intéressées. L’arrêté de création de commune nouvelle pris par le représentant de l’État dans le département ne produit ses effets au plan fiscal à compter de l’année suivante qu’à la condition qu’il intervienne avant le 1er octobre de l’année.

Cette procédure d’IFP n’est pas applicable lorsque le taux appliqué dans la commune préexistante la moins imposée est supérieur ou égal à 80 % du taux appliqué dans la commune préexistante la plus imposée.

Le présent article propose d’assouplir cette condition. À cette fin, l’alinéa 10 (b) du 4° du I) vise à remplacer le plancher de 80 % par un plancher de 90 %.

Le même assouplissement est prévu à l’alinéa 11 en cas de fusion d’EPCI à fiscalité propre (modification de l’article 1638-0 bis du CGI). Sont visés les EPCI à fiscalité propre additionnelle comme ceux à fiscalité professionnelle unique.

E. RÈGLES RELATIVES AUX DÉLIBÉRATIONS (HORS TAUX) PRISES PAR LES COMMUNES PRÉEXISTANTES

Les mesures proposées visent à accompagner les créations de communes nouvelles. Le présent article prévoit qu’en l’absence de délibération de la commune nouvelle ou des communes préexistantes, les délibérations relatives aux exonérations et abattements sont maintenues pour leur durée et leur quotité lorsqu’il s’agit de dispositifs limités ou pour un an pour les dispositifs non bornés.

De nombreux impôts locaux sont concernés : TH, TF, CFE et CVAE, taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), taxe de balayage, taxe sur la cession de terrains devenus constructibles, taxe sur les friches commerciales, taxe pour la gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, taxe communale sur la consommation finale d’électricité (TCCFE).

Les alinéas 15 à 25 (7° du I du présent article) rétablissent à cette fin un article 1640 du code général des impôts et les alinéas 26 à 29 (1° du II) un article L. 2113-5-1 dans le CGCT.

TH, TFPB, TFPNB, CFE et CVAE

Le I de la rédaction proposée pour l’article 1640 (alinéa 16) prévoit que la commune nouvelle, ou, par des délibérations de principe concordantes prises avant le 1er octobre de l’année précédant celle de sa création, les communes et, le cas échéant, l’EPCI à fiscalité propre participant à sa création, prennent les délibérations applicables à compter de l’année suivante sur son territoire.

À défaut de telles délibérations, les délibérations relatives aux exonérations et abattements sont maintenues pour leur durée et leur quotité lorsqu’il s’agit de dispositifs limités (alinéa 19) et que ces dispositions sont en cours d’application ou sont applicables pour la première fois l’année où la création prend fiscalement effet.

Elles sont maintenues pour un an pour les dispositifs non bornés (alinéa 20).

Lorsqu’un EPCI à FPU participe à la création de la commune nouvelle, ses délibérations, sont, à défaut, maintenues dans les mêmes conditions (alinéas 21 à 23).

TEOM

Les alinéas 12 et 13 complètent l’article 1369 A bis du code général des impôts, relatif aux conditions et au calendrier de délibération des communes et des EPCI instituant la TEOM. Aux différents cas déjà prévus (communes, EPCI, EPCI issus d’une fusion, rattachement d’une commune ou d’un EPCI à un EPCI ou un syndicat mixte, ayant institué ou non une part incitative), ces alinéas ajoutent celui des communes nouvelles.

La commune nouvelle, ou, par des délibérations de principe concordantes prises avant le 15 octobre de l’année précédant celle de sa création, les communes et, le cas échéant, l’EPCI à fiscalité propre participant à sa création, prennent les délibérations instituant la taxe d’enlèvement des ordures ménagères et celles instituant une part incitative.

À défaut de délibérations prises par la commune nouvelle, les communes préexistantes ou le cas échéant, l’EPCI, les délibérations relatives à l’instauration de la TEOM, à la part incitative et à l’institution d’exonérations sont maintenues pour une durée de cinq ans (alinéa 14).

Taxe de balayage, taxe sur la cession de terrains devenus constructibles, taxe sur les friches commerciales et taxe pour la gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations

Ces taxes sont respectivement prévues par les articles 1528, 1529, 1530 et 1530 bis du code général des impôts.

La commune nouvelle ou, à défaut, les communes préexistantes et le cas échéant l’EPCI par des délibérations concordantes prises avant le 1er octobre de l’année précédant celle de sa création, pourront délibérer afin d’instituer ces taxes dès la première année où la création de la commune nouvelle prend fiscalement effet (alinéa 24).

À défaut de délibération, ces taxes sont maintenues pour une année, sauf pour la taxe sur les friches commerciales (alinéa 25).

Taxes relevant du code général des collectivités territoriales

À défaut de délibérations prises par la commune nouvelle, les communes préexistantes ou le cas échéant, l’EPCI, les délibérations prises antérieurement sont maintenues l’année où la création de la commune nouvelle prend fiscalement effet. À cette fin, les alinéas 27 à 29 (1° du II du présent article) insèrent un article L. 2113-5-1 au sein de la section du CGCT consacrée à la procédure de création d’une commune nouvelle. Il n’est pas fixé de date limite pour ces délibérations.

Outre la TCCFE pour laquelle des dispositions spécifiques sont déjà prévues, on peut citer, parmi les taxes relevant du CGCT, la taxe locale sur la publicité extérieure, la taxe de séjour et la taxe de séjour forfaitaire, la taxe communale sur les entreprises exploitant des engins de remontées mécaniques ou les prélèvements sur le produit des jeux dans les casinos.

TCCFE

Le 2 du II du présent article prévoit des dispositions en matière de TCCFE, et complète en ce sens l’article L. 2333-4 du CGCT.

Les dispositions relatives à la TCCFE et à la perception de son produit qui étaient en vigueur sur le territoire de chaque commune préexistante sont maintenues l’année où la création de la commune nouvelle produit ses effets au plan fiscal (alinéa 31).

Les délibérations prises en application des articles L. 2333-4 et L. 5212-24 par les communes préexistantes sont rapportées au 31 décembre de l’année au cours de laquelle la fusion produit ses effets au plan fiscal (alinéa 32).

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La commission est saisie des amendements identiques CF 92 de M. Joël Giraud et CF 121 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Jeanine Dubié. L’article 34 de la loi du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 a modifié les dispositions fiscales de l’article 1638-0 bis du code général des impôts qui concernent les fusions d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), afin de simplifier l’intégration fiscale progressive (IFP) entre établissements. Toutefois, par suite de l’insertion de la phrase « la durée de la période d’intégration fiscale progressive ne peut être modifiée ultérieurement », qui ne figurait pas jusqu’à présent dans le code général des impôts, il n’est plus possible de revenir par délibération sur une IFP qui se révélerait inopérante. Or, dans les faits, des EPCI nouvellement créés qui ont voté l’extension de leurs compétences sont actuellement en difficulté. Pour leur permettre de mettre fin par délibération à une IFP que les administrés des communes concernées ne pourraient supporter financièrement, l’amendement vise à supprimer cette disposition qui n’est en vigueur que depuis janvier 2015.

Mme Christine Pires Beaune. Mon argumentation est identique.

Suivant l’avis favorable de la Rapporteure générale, la commission adopte les amendements CF 92 et CF 121 (amendement 329).

Puis elle adopte l’article 24 modifié.

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Article additionnel après l’article 24
Perception de la taxe d’aménagement par les communes nouvelles

La commission en vient à l’amendement CF 125 de M. Jean Launay.

Mme Christine Pires Beaune. Afin d’homogénéiser la situation fiscale des administrés d’une commune nouvelle, il faut prévoir que, à titre dérogatoire, la délibération d’une commune renonçant à la taxe d’aménagement ne crée plus de droits l’année suivant son intégration dans une commune nouvelle.

Mme la Rapporteure générale. « Sagesse plus ». Je me demande par ailleurs si l’amendement ne devrait pas modifier l’alinéa 9 de l’article visé plutôt que son alinéa 7.

La commission adopte l’amendement CF 125 (amendement 330).

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Article 25
Rationalisation et amélioration du caractère incitatif de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères

Cet article modifie les articles 1520, 1521 et 1522 bis du code général des impôts, ainsi que l’article L. 2338-78 du code général des collectivités territoriales, afin de permettre aux communes et à leurs groupements, d’une part, d’utiliser la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) pour financer la gestion des déchets non dangereux des entreprises et, d’autre part, d’expérimenter, pour une durée maximale de cinq ans, la mise en place de la part incitative de la TEOM sur une partie de leur territoire.

Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) qui exercent la compétence relative à la collecte des déchets ménagers et assimilés disposent de plusieurs possibilités pour financer ces activités. Ainsi, elles peuvent, au choix :

– mobiliser directement les ressources de leur budget général ;

– mettre en place à la fois une TEOM, impôt direct créé en 1926 et prévu à l’article 1520 du code général des impôts pour financer la collecte des déchets ménagers, et une redevance spéciale (RS), créée en 1975 et prévue à l’article L. 2333-78 du code général des collectivités territoriales pour financer la collecte des déchets assimilés produits par les entreprises. Pour les communes et EPCI disposant d’une TEOM, la mise en place d’une RS est devenue obligatoire depuis le 1er janvier 1993, en application de la loi du 13 juillet 1992 relative à l’élimination des déchets ainsi qu’aux installations classées pour la protection de l’environnement (221). Les collectivités peuvent en outre, si elles gèrent les déchets provenant des terrains de camping et de caravanes, ajouter à ces deux outils une redevance, prévue à l’article L. 2333-77 du même code, qui est spécifiquement perçue auprès des exploitants de ces terrains (de ce fait exonérés de TEOM), cette redevance étant alors calculée en fonction du nombre de places disponibles sur ces terrains ;

– mettre en place une redevance d’enlèvement des ordures ménagères (REOM), prévue à l’article L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales, le montant de la redevance étant alors calculé en fonction du service rendu. La REOM est instituée par délibération de l’assemblée délibérante de la collectivité locale ou de l’EPCI, qui en fixe le tarif – lequel peut inclure une part fixe et une part variable (en fonction du nombre de résidents, du poids ou du volume des déchets collectés). L’article L. 2333-79 du même code prévoit que, lorsqu’une REOM est instituée, elle entraîne la suppression de la TEOM et de la redevance portant spécifiquement sur les terrains de camping et de caravanes, si elle a été mise en place.

La RS et la REOM sont calculées en fonction de l’importance du service rendu et, notamment, de la quantité de déchets collectés – même si la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 2333-78 du code général des collectivités territoriales permet, pour la RS, de fixer un montant de redevance forfaitaire « pour la gestion de petites quantités de déchets ».

En revanche, la TEOM, qui est perçue auprès du propriétaire sur les propriétés bâties soumises à la taxe foncière, est en principe établie sur la base de la taxe foncière, la valeur locative des locaux retenue dans ce cadre pouvant toutefois être plafonnée à deux fois la valeur locative moyenne des locaux d’habitation, comme le prévoit l’article 1522 du code général des impôts (222). Cette absence de lien entre le niveau de taxation et la quantité de déchets produits, qui permettait traditionnellement de distinguer la TEOM de la REOM et de la RS, n’est plus aujourd’hui systématique. En effet, la loi de finances pour 2012 (223) a inséré dans le code général des impôts un article 1522 bis, qui autorise les communes et les EPCI compétents en matière de collecte des déchets à mettre en place, à partir de 2013, en complément de la part fixe de la TEOM, une « part incitative », dont le montant est fonction de la « quantité et éventuellement la nature des déchets produits, exprimée en volume, en poids et en nombre d’enlèvements ». Le tarif de cette part incitative, qui peut varier selon la nature du déchet, doit être fixé chaque année par l’organe délibérant de la commune ou de l’EPCI de façon à ce que le produit de cette part représente de 10 % à 45 % du produit total de la TEOM.

La loi qualifie cette part de TEOM d’« incitative » car elle vise à encourager financièrement les redevables à produire moins de déchets, en privilégiant par exemple le réemploi des produits, l’achat de produits créant intrinsèquement moins de déchets (moins d’emballages ou de produits jetables, par exemple), ou encore l’achat de produits recyclables ou faciles à valoriser (produits biodégradables ou transformables en compost), grâce à un tri pratiqué en amont de la collecte. Ce mécanisme permet ainsi aux personnes ayant le comportement le plus responsable d’un point de vue écologique d’être soumises à une TEOM moins lourde que les redevables qui produisent de grandes quantités de déchets, dont le traitement ultérieur sera difficile ou polluant.

Par ailleurs, la loi de finances rectificative pour 2013 (224) a modifié l’article 1522 bis du code général des impôts, afin d’élargir les possibilités offertes aux communes s’agissant de la méthode de quantification des déchets collectés. Ainsi, alors que la commune ou l’EPCI devaient jusqu’alors choisir de faire varier de montant de TEOM dû au titre de la part incitative en fonction d’un unique critère, à choisir entre le poids des déchets, leur volume ou le nombre de levées effectuées, il est désormais possible de combiner deux de ces critères, ce qui permet de mieux appréhender la réalité des déchets collectés pour chaque local. Cette récente réforme de la part incitative a également autorisé les communes et EPCI à exonérer de part incitative de TEOM, par délibération prise avant le 15 octobre de l’année précédente, les constructions nouvelles et les reconstructions, cette exonération étant toutefois limitée à la seule année suivant celle de l’achèvement des locaux concernés. Enfin, il a aussi été mis fin, à cette occasion, à la dérogation temporaire qui permettait de calculer la part incitative de TEOM en proportion du nombre de personnes composant le foyer – critère qui, il est vrai, était peu incitatif quant à la baisse des quantités de déchets produits par les ménages concernés.

Enfin, sur le plan réglementaire, l’annexe II de l’article R. 541-8 du code de l’environnement dresse la liste des déchets ménagers et assimilés. Les déchets assimilés sont ainsi définis comme « les déchets d’origine commerciale ou artisanale qui, eu égard à leurs caractéristiques et aux quantités produites, peuvent être éliminés sans sujétions techniques particulières et sans risques pour les personnes ou l’environnement ».

II. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE OU BUDGÉTAIRE

La taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) est actuellement la principale ressource utilisée par les communes et leurs groupements pour financer les services locaux de collecte et de traitement des déchets. Ainsi, 67 % des communes, représentant 85 % de la population française, prélèvent, directement ou par le biais d’un EPCI, une TEOM, tandis que 30 % des communes ont préféré mettre en place la REOM et 3 % utiliser plutôt leur budget général pour financer la gestion des déchets.

En revanche, la redevance spéciale (RS), qui doit financer la gestion des déchets des entreprises « assimilés » à des déchets ménagers (c’est-à-dire leurs déchets non dangereux) pour les communes ayant mis en place une TEOM, n’a été instituée, en 2013, que dans 16,6 % des communes percevant la TEOM. Selon le rapport de la mission d’évaluation de politique publique intitulé La gestion des déchets par les collectivités territoriales, publié au mois de décembre 2014 (225), ce pourcentage n’a que légèrement augmenté depuis 2009, année où il s’établissait à 13,5 %. Les montants de RS collectés ont, eux aussi, légèrement augmenté, passant de 97,8 millions d’euros en 2009 à 117,6 millions d’euros en 2013.

LE LENT DÉVELOPPEMENT DE LA REDEVANCE SPÉCIALE (RS) ENTRE 2009 ET 2013

Année

2009

2010

2011

2012

2013

Part des collectivités locales ayant institué la RS

(en % de celles qui perçoivent la TEOM)

13,5

14,4

15

15,5

16,6

Montant total de RS collectée

(en millions d’euros)

97,8

105,5

105,5

112,5

117,6

Source : Mission d’évaluation de politique publique, La gestion des déchets par les collectivités territoriales, décembre 2014, annexe IV (calculs de la mission à partir de données fournies par la direction générale des finances publiques-DGFiP).

Selon l’évaluation préalable de l’article, le fait que cette proportion demeure faible, alors même que la plupart des communes et intercommunalités collectent également les déchets assimilés des entreprises, s’expliquerait par la relative complexité de gestion de la RS. Celle-ci implique, en effet, de distinguer précisément des déchets ménagers des ménages les déchets assimilés des entreprises, en mettant en place deux circuits de collecte distincts et en assurant un suivi particulier des déchets assimilés, de façon à pouvoir évaluer le service ainsi rendu aux entreprises.

Même s’il s’agit de fiscalité locale, le produit de la TEOM représente, au niveau national, des masses financières considérables, puisqu’elle a rapporté au total 6,4 milliards d’euros en 2014 (et devrait rapporter 6,5 milliards d’euros en 2015), tandis que le produit de la REOM ne dépasse pas 700 millions d’euros. Il s’agit d’une recette dynamique, puisque le produit de la TEOM augmente chaque année (hausse de 2,7 % en 2013 et de 1,6 % en 2014) depuis une douzaine d’années – il était inférieur à 4 milliards d’euros en 2003. Selon le rapport 2015 de l’Observatoire des finances locales, en 2014, le produit moyen de la TEOM s’élevait à 113 euros par habitant, tandis que celui de la REOM s’élevait à 87 euros par habitant. Par ailleurs, la compétence relative à la gestion des déchets étant de plus en plus fréquemment exercée au niveau intercommunal, plutôt que communal, une proportion toujours plus importante de la TEOM est perçue par les EPCI plutôt que par les communes : ainsi, en 2014, 84 % du produit total de la TEOM a été perçu par des EPCI, alors que cette proportion était de 56 % en 2003.

Enfin, le nombre de communes et de groupements de communes ayant mis en place la part incitative de la TEOM est encore très limité : selon le rapport 2015 de l’Observatoire des finances locales, ce mécanisme n’était appliqué, en 2014, que dans 6 EPCI à fiscalité propre, regroupant 122 communes. Selon les derniers éléments communiqués par le secrétariat d’État chargé du budget, 8 groupements de communes seraient concernés en 2015. Ce résultat est encore faible, mais il s’agit d’un dispositif récent puisque les collectivités n’ont pu décider qu’à partir de 2012 de se doter de cet outil pour l’année 2013 : l’année 2014 n’était donc que la deuxième année au cours de laquelle la part incitative de la TEOM pouvait être appliquée. Pour autant, la relative complexité de gestion de cette part incitative – qui suppose de recenser, pour chaque local soumis à la TEOM, la quantité (poids, volume, nombre de levées) et éventuellement la nature des déchets collectés l’année précédente – implique un effort particulier des services communaux et intercommunaux afin de se familiariser avec ce nouvel outil.

III. LE DISPOSITIF PROPOSÉ ET LES ENJEUX JURIDIQUES

Le A du paragraphe I de l’article modifie le premier alinéa du I de l’article 1520 du code général des impôts afin d’élargir l’objet de la TEOM au financement des dépenses engagées par les communes et leurs groupements pour la collecte non seulement des déchets des ménages, mais aussi des autres déchets non dangereux, c’est-à-dire des déchets assimilés pouvant provenir d’entreprises. L’article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales précise bien qu’il doit s’agir de déchets dont la collecte et le traitement peuvent être effectués « sans sujétions techniques particulières ».

Par ailleurs, le B du même paragraphe reprend, à l’article 1521 du code général des impôts, le contenu de l’actuel second alinéa de l’article L. 2333-78 du code général des collectivités territoriales, qui permet aux conseils municipaux d’exonérer de TEOM les locaux des entreprises qui sont déjà assujetties à la RS. Il introduit toutefois, à cette occasion, deux changements ponctuels par rapport au dispositif déjà applicable :

– l’exonération ne devrait plus prendre la forme d’une délibération motivée. En effet, cette lourdeur procédurale paraît inutile s’agissant d’une décision qui vise à éviter le cumul, pour les mêmes locaux, d’une taxe et d’une redevance ayant un objet similaire, dès lors que le produit de la TEOM pourra aussi financer l’enlèvement des déchets des entreprises ;

– il serait précisé que le maire doit, avant le 1er janvier de l’année d’imposition, transmettre à l’administration fiscale la liste des locaux ainsi exonérés de TEOM. Il ne s’agit ici que de s’assurer que les services chargés du recouvrement de la TEOM disposeront bien de l’ensemble des informations leur permettant d’établir la liste des personnes redevables de la taxe.

Le C de ce même paragraphe insère au sein de l’article 1522 bis du code général des impôts un nouveau paragraphe I bis, dont l’objet est de permettre aux communes et à leurs groupements d’instituer, pour une durée maximale de cinq ans, la part incitative de la TEOM sur une partie seulement de leur territoire. Il est précisé qu’à l’issue de cette période, la taxe pourrait soit être généralisée pour l’ensemble du territoire communal ou intercommunal, soit être entièrement supprimée – ce qui supposera, dans ce dernier cas, une délibération de l’organe délibérant de la commune ou de l’EPCI.

Le paragraphe II de l’article propose une réécriture de l’article L. 2333-78 du code général des collectivités territoriales, afin de rendre facultative, et non plus obligatoire, la création de la RS pour les communes, EPCI et syndicats mixtes n’ayant pas mis en place une REOM, mais disposant d’une TEOM. Ce choix est logique, dès lors que la TEOM pourra désormais financer également la collecte des déchets assimilés des entreprises, et non des seuls déchets des ménages. En revanche, les communes et leurs groupements resteront tenus de disposer d’une RS pour financer la collecte des déchets des entreprises s’ils n’ont mis en place ni une REOM, ni une TEOM susceptible de couvrir ce champ, ce qui est là encore cohérent. En outre, il restera, comme actuellement, impossible d’instituer une TEOM dans les zones déjà couvertes par une REOM, ces deux outils ayant également vocation à financer, d’une manière générale, la collecte de l’ensemble des déchets.

Enfin, le paragraphe III de l’article prévoit que ces différents changements seront applicables à partir du début de l’année 2016. Il ajoute toutefois que les délibérations qui, avant le 1er janvier 2016, auraient déjà été prises par des collectivités sur le fondement de la loi actuelle, resteront applicables après cette date aussi longtemps qu’elles n’auront pas été remises en cause par une délibération différente de la collectivité ou de l’établissement concerné. Cette précision est apportée uniquement dans un souci de sécurité juridique, pour éviter une remise en cause involontaire de délibérations instituant la RS qui auraient été prises récemment.

D’une manière générale, les changements proposés apparaissent limités et devraient permettre de remédier au respect très imparfait de l’obligation faite aux communes et EPCI de mettre en place une RS lorsqu’ils ne disposent pas d’une TEOM et qu’ils assurent pourtant la collecte des déchets assimilés des entreprises comme des déchets ménagers. Cela permettra aussi d’éviter que la jurisprudence administrative (226) ne puisse aboutir, comme cela est logique en l’état de la loi, à considérer que la TEOM n’a vocation qu’à financer les dépenses de collecte des déchets ménagers, et non celle des déchets assimilés des entreprises, au risque d’aboutir à une invalidation du taux de TEOM fixé par une commune (situation qui peut alors conduire, en cas de contestation des contribuables, à un dégrèvement de toutes les sommes perçues au titre de la TEOM).

Par ailleurs, le recours à une expérimentation, d’une durée raisonnable, apparaît comme une solution pragmatique pour permettre aux collectivités et établissements de se familiariser progressivement avec la gestion d’une part incitative de TEOM et d’apprécier concrètement l’intérêt ou les inconvénients de cet outil encore peu utilisé.

IV. L’IMPACT ÉCONOMIQUE ATTENDU

Les aménagements prévus par cet article devraient, d’après l’évaluation préalable, n’avoir aucune incidence directe sur le montant global des recettes perçues par les collectivités locales.

En revanche, la possibilité de recourir à la TEOM pour financer la gestion des déchets assimilés des entreprises, alors que la loi prévoyait jusqu’ici que ce financement devait être assuré par la redevance spéciale, conduira mécaniquement à augmenter les recettes locales ayant un caractère fiscal, en remplacement de recettes non fiscales (cas des redevances).

Par ailleurs, à plus long terme, le développement attendu de la part incitative dans la TEOM d’un nombre accru des communes et d’EPCI devrait conduire, grâce à une évolution du comportement des ménages et des entreprises, à une diminution des quantités de déchets ménagers et assimilés produits. Ainsi, la mission d’évaluation de politique publique sur la gestion des déchets par les collectivités territoriales dans son rapport du mois de décembre 2014 (227) a estimé, sur la base d’évaluation des résultats déjà obtenus par les collectivités disposant d’une expérience dans ce domaine, qu’une éventuelle généralisation de la tarification incitative « serait susceptible de se traduire par une baisse sensible des DMA [déchets ménagers et assimilés] ». Elle estime que les quantités de déchets produits pourraient ainsi baisser de 5,6 % par rapport à 2011, cette baisse représentant jusqu’à 47,8 kilogrammes de déchets par habitant et par an dans les collectivités rurales (31,9 kilogrammes dans les collectivités d’habitat mixte et 23,9 kilogrammes dans les autres types de collectivités). Le rapport de cette mission a aussi estimé, dans les communes où la part incitative de la TEOM est appliquée, le poids moyen annuel des ordures ménagères résiduelles par habitant était de 48 % moins élevé que dans les communes ne disposant pas d’une redevance incitative. Le tri des déchets est aussi facilité dans ces communes, puisque le pourcentage de déchets recyclés y est 27 % plus élevé. Ainsi, grâce à un recours progressivement plus étendu à la part incitative de la TEOM, les coûts de gestion liés à la collecte et au traitement de ces déchets, qui pèsent dans le budget des communes et de leurs groupements, devraient progressivement baisser.

Ces efforts des ménages et des entreprises pour mieux prévenir la production des déchets et mieux les trier en amont de leur collecte devraient avoir, en outre, un impact écologique positif : prévenir la production de déchets permet de réduire les activités de stockage et d’incinération des déchets, qui peuvent être à l’origine de diverses pollutions de l’environnement. Ainsi, cette orientation aidera notre pays à atteindre, d’ici l’année 2020, l’objectif d’une baisse de 10 % des quantités de déchets ménagers et assimilés produits par habitants par rapport à 2010, tel qu’il a été fixé par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août dernier (228).

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* *

La commission examine l’amendement CF 103 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. L’article 1521 du code général des impôts prévoit une exonération de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) lorsque le service en question ne fonctionne pas, exonération qu’une délibération des communes ou groupements peut toutefois supprimer.

Je conçois que les communes puissent être à la recherche de financements, mais cette dernière possibilité me semble défier le bon sens. Je propose qu’il soit désormais impossible de remettre en cause cette exonération.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable. Monsieur Tardy, la TEOM, parce qu’elle est une taxe et non une redevance, n’a juridiquement pas besoin de correspondre à un service rendu. L’adoption de cet amendement porterait de plus atteinte à la liberté de décision des communes. Il me semble que les conseils municipaux et les organes délibérants concernés sont les mieux à même d’apprécier la réalité sur le terrain.

M. Dominique Lefebvre. Alors que la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », transfère la compétence de la collecte aux EPCI à fiscalité propre, on s’aperçoit progressivement que la TEOM est souvent prélevée par les communes pour couvrir des dépenses qui vont au-delà de ce que le code général des collectivités territoriales définit comme l’enlèvement des déchets ménagers. Sans doute au motif qu’elle est politiquement plus acceptable par ceux qui en sont redevables que les autres impôts et taxes, ces derniers finissent par financer au travers de la TEOM des dépenses de propreté et même parfois bien d’autres choses.

Cela dit, j’avoue que je ne comprends pas bien un amendement qui supprime cette facilité en obligeant à un affichage strict des dépenses couvertes par la taxe.

M. Jean-Claude Buisine. Lorsque la benne à ordures ne parvient pas à accéder à une rue, je sais que l’on peut exonérer de TEOM les contribuables concernés, puisque le service n’est pas rendu.

La commission rejette l’amendement CF 103.

Puis elle adopte l’article 25 sans modification.

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Après l’article 25

La commission est saisie de l’amendement CF 221 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Le délai de quinze jours laissé aux EPCI nouvellement créés pour choisir leur régime fiscal ou le mode de financement du service de collecte et traitement des ordures ménagères est trop court. Nous proposons de le porter à trois semaines, avec, pour contrepartie, l’obligation d’une transmission rapide aux services de l’État concernés.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable. Ce report retarderait la date limite de communication aux services fiscaux des délibérations en matière de TEOM. Par ailleurs, la communication des bases prévisionnelles, qui permet de déterminer le taux d’imposition de TEOM, étant moins fiable, les organes délibérants subiraient une perte en termes d’information. Enfin, il est déjà prévu que, à défaut de délibération, les régimes préexistants en matière de TEOM continuent de s’appliquer pendant une période maximale de cinq ans.

La commission rejette l’amendement CF 221.

Puis elle en vient à l’amendement CF 220 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Il s’agit d’harmoniser les délais d’option pour les régimes fiscaux de la fiscalité professionnelle de zone et la fiscalité éolienne unique sur celui de l’option pour la fiscalité professionnelle unique.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable : l’harmonisation proposée n’est pas complète.

La commission rejette l’amendement CF 220.

Elle examine ensuite l’amendement CF 266 de la commission des affaires économiques.

Mme Béatrice Santais, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Cet amendement vise à exonérer de taxe foncière sur les propriétés bâties toutes les unités de méthanisation, comme cela est déjà le cas pour les autres bâtiments agricoles et ceux qui produisent de l’électricité d’origine photovoltaïque.

Je signale que l’exposé sommaire de l’amendement n’est pas exact et devra être corrigé.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable. Les méthaniseurs pionniers, ceux qui ont été construits avant le 1er janvier 2015, bénéficient d’une exonération facultative de taxe foncière pendant cinq ans — aucune exonération n’étant prévue pour la cotisation foncière des entreprises (CFE) et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Les méthaniseurs construits après le 1er janvier 2015 bénéficient d’une exonération de plein droit de taxe foncière durant sept ans à compter de l’année qui suit l’achèvement des installations, ainsi que d’une exonération de CFE et de CVAE durant sept ans à compter de l’année qui suit le début de l’activité.

J’ajoute que, après l’article 7 du projet de loi de finances pour 2016 en cours de navette, il est prévu une exonération de plein droit de sept ans de CFE et de CVAE pour tous les méthaniseurs. Cela me paraît suffisant pour compléter le dispositif actuel.

M. Charles de Courson. L’administration fiscale estime que la méthanisation est une activité commerciale et non une activité agricole, ce qui pose un certain nombre de problèmes aggravés par le fait que les grandes installations sont considérées non comme du foncier bâti, mais comme du matériel. Les montants d’impôt à payer sont énormes.

M. Jean-Claude Buisine. Il faut distinguer selon les statuts juridiques : il est logique que les structures qui ont adopté un statut de nature agricole comme les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC) ou les exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) soient exonérées ainsi que nous en avons décidé, et que celles qui sont organisées sous forme commerciale, comme les SARL ou les sociétés anonymes, ne le soient pas.

Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la Rapporteure générale, vous avez accepté un amendement affirmant que la méthanisation était une activité agricole.

Mme la Rapporteure générale. Je n’ai jamais dit le contraire !

La commission rejette l’amendement CF 266.

Elle en vient à l’amendement CF 267 de la commission des affaires économiques.

Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Dans la même logique que celle de l’amendement précédent, nous demandons une exonération de CFE pour les méthaniseurs agricoles.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 267.

Elle examine ensuite l’amendement CF 138 de M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. Je ne cache pas qu’il s’agit d’un amendement très parisien, visant à combattre la multiplication des résidences secondaires dans la capitale. Il est déjà possible d’augmenter la taxe d’habitation de 20 % pour les locaux d’habitation non affectés à l’habitation principale ; nous proposons aujourd’hui d’aller plus loin en donnant aux collectivités la possibilité de supprimer l’abattement de 50 % utilisé pour le calcul de la taxe foncière applicable à ces biens immobiliers.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable.

M. Pascal Cherki. Madame la Rapporteure générale, votre réponse m’attriste et me surprend un peu, car, lors d’un précédent débat de notre commission, vous m’aviez demandé de retirer l’un de mes amendements qui visait à supprimer systématiquement cet abattement au motif qu’un amendement de Christophe Caresche, permettant aux communes concernées de délibérer et de faire ce choix elles-mêmes, vous paraissait plus intéressant. Malheureusement, Christophe Caresche n’avait pas été en mesure de soutenir son amendement, et nous présentons à nouveau celui-ci aujourd’hui. J’insiste sur le fait que nous n’ouvrons qu’une possibilité. Les communes pourront opter pour cette solution ou non.

Les prix de l’immobilier parisien sont élevés pour la population, mais ils ne le sont pas en comparaison de ceux enregistrés dans les autres grandes capitales européennes. Cette situation est à l’origine de mouvements spéculatifs d’acquisition par des étrangers dans le centre de la capitale. Les logements en question ne sont pas habités et servent parfois à des locations temporaires alors que 130 000 personnes sont inscrites sur le fichier des demandes de logement à Paris — parmi lesquels de nombreux habitants de la première couronne et de la grande couronne. Dans une zone de forte densité, où le foncier est très contraint, il ne nous est pas possible de construire pour répondre à tous les besoins. Nous avons besoin de récupérer des logements afin de les louer. Cet amendement vise à inciter des propriétaires à remettre des logements sur le marché.

Par ailleurs, il ne vous a pas échappé que, depuis les attentats du 13 novembre, l’activité économique des secteurs liés au tourisme connaît une chute brutale à Paris. La collectivité a donc besoin de ressources. Le vote de cet amendement constitue aussi un acte de solidarité.

M. Christophe Caresche. Je retire l’amendement CF 138.

L’amendement CF 138 est retiré.

La commission examine l’amendement CF 205 de M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Cet amendement vise à préciser l’alinéa premier du I de l’article 1407 ter du code général des impôts, qui prévoit la possibilité de majorer, par délibération, la cotisation communale de taxe d’habitation pour les logements meublés non affectés à l’habitation principale. Nous avons constaté que la majoration n’était appliquée qu’au logement des personnes physiques, alors qu’il y a aussi des personnes morales qui occupent des logements inhabités, telles que des sociétés civiles immobilières (SCI).

Mme la Rapporteure générale. Je ne vois pas ce qu’est la résidence secondaire d’une personne morale.

M. Pascal Cherki. La surtaxe ne doit pas concerner que les personnes physiques. Les SCI doivent être assujetties à la majoration, si elle est décidée.

M. Jean-Claude Buisine. Ce type de problème se rencontre dans le cas de baux commerciaux, souvent signés avec des personnes morales qui sont censées utiliser des logements associés à des commerces.

M. Charles de Courson. Vous demandez à l’administration fiscale un travail énorme. Doit-elle inspecter toutes les habitations ? Quand une personne a plusieurs résidences, elle peut choisir où elle déclare son domicile. Le domicile des parlementaires de province, par exemple, doit-il être au lieu de leur activité principale, à Paris ou en proche banlieue, ou bien dans leur circonscription ? Paris compte 6 ou 7 % de résidences secondaires. Un homme d’affaires peut avoir un pied à terre à Paris et déclarer que c’est sa résidence principale. Qui le contrôlera ? Je mets en garde quant aux multiples contentieux possibles.

Mme la Rapporteure générale. Sans même parler du fond, il y a un problème de rédaction. Vous visez le I de l’article, qui parle des personnes physiques ; or votre objet porte sur les personnes morales, ce qui implique une rédaction cohérente avec l’article 1407.

M. Dominique Lefebvre. L’article 1407 ter précise les locaux auxquels s’applique la taxe d’habitation. Sont visées les personnes physiques ainsi que les personnes morales, mais avec la précision que l’on ne peut pas à la fois payer la taxe d’habitation et la cotisation foncière des entreprises (CFE). Les personnes morales qui ne sont pas assujetties à la CFE le sont à la taxe d’habitation, mais il ne faudrait pas que cet amendement conduise à ce que celles assujetties à la CFE le soient aussi à la taxe d’habitation.

L’amendement CF 205 est retiré.

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Article additionnel après l’article 25
Consolidation des cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises à l’échelle des groupes

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 163 et CF 164 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Cela fait cinq ans que nous discutons de la répartition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) au sein des groupes. Certains groupes pratiquent l’optimisation en situant la valeur ajoutée en fonction de leurs intérêts. L’idée nous est donc venue qu’il conviendrait de calculer la CVAE au niveau du groupe, et d’appliquer ensuite des critères de répartition pour la localiser au niveau de la commune. Un rapport a été produit par le sénateur Charles Guené, concluant à la nécessité d’introduire une mesure de consolidation des cotisations à l’échelle des groupes. Je vous propose de traduire cette idée dans la loi.

Mme la Rapporteure générale. Défavorable. Il existe également un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale de l’administration (IGA), qui considère que la différence entre les niveaux consolidé et non consolidé n’est pas significative.

Mme Christine Pires Beaune. Le rapport de l’IGF et de l’IGA souffre d’un défaut de cohérence interne, entre le corps du texte et les annexes. J’ai déposé le même amendement sur le projet de loi de finances pour 2016 et le Gouvernement a demandé que je le retire en me promettant qu’un groupe de travail serait créé.

Mme la Rapporteure générale. Les seuls éléments dont je dispose sont ceux du rapport de l’IGF et de l’IGA. Je vous suggère de retirer l’amendement et de le redéposer en séance ; la ministre pourra vous répondre.

L’amendement CF 163 est adopté (amendement 331).

En conséquence, l’amendement CF 164 tombe.

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Après l’article 25

La commission examine l’amendement CF 167 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Il s’agit de prévoir explicitement que l’organe délibérant de l’EPCI à fiscalité propre peut décider de réduire les attributions de compensation, dans les mêmes proportions entre les communes, en cas de diminution du produit provenant de la fiscalité professionnelle unique.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable. En diminuant les attributions de compensation en cas de baisse du produit de la fiscalité professionnelle sans décision de la commune concernée, vous imposez les choses de manière brutale.

Mme Christine Pires Beaune. Je suis également défavorable à cet amendement. La diminution du produit est souvent liée à la disparition d’un établissement intercommunal, et cela signifie que la commune perd elle aussi sa taxe foncière. Ce serait une double peine pour la commune, qui aurait moins de taxe foncière et verrait en même temps réduire son attribution de compensation.

M. Charles de Courson. Le problème est qu’on ne peut pas aujourd’hui répercuter une baisse liée à une fermeture d’établissement au niveau de l’ensemble de l’intercommunalité, qui a été bien contente de profiter de la richesse mutualisée. Si ma solution n’est pas la bonne, comment faire ?

Mme Christine Pires Beaune. L’attribution de compensation peut déjà être révisée, dans certaines limites.

L’amendement CF 167 est retiré.

La commission examine l’amendement CF 218 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Cet amendement tend à insérer un article précisant que, concernant l’application du régime de fiscalité professionnelle unique, la liste des produits à prendre en considération dans le calcul de droit commun en matière de compensation n’est pas exhaustive. Il s’agit de tenir compte de l’allocation compensatrice de taxe d’habitation liée au transfert de la part départementale de la taxe aux communes.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable. Nous n’avons pas de simulation sur les effets possibles de ce nouveau mode de calcul, dans lequel je vois un risque de double compte. Il est toujours possible à un EPCI et à ses communes membres de déroger à la répartition de droit commun des attributions de compensation en optant pour la répartition libre, par un vote de l’ensemble des communes.

Mme Christine Pires Beaune. Nous sommes revenus sur la règle de l’unanimité l’an dernier : il faut à présent une majorité qualifiée de l’EPCI, et des délibérations des communes à la majorité simple.

La commission rejette l’amendement CF 218.

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Article additionnel après l’article 25
Versement d’attribution de compensation des EPCI à fiscalité professionnelle unique aux communes où sont implantées des éoliennes

La commission examine l’amendement CF 217 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Il s’agit de favoriser la neutralité des transferts de fiscalité résultant d’une fusion d’EPCI. Conformément à la volonté du législateur, il y a lieu d’inclure dans le régime de la fiscalité professionnelle unique la possibilité du versement d’une attribution de compensation tenant compte de l’implantation d’installations éoliennes dans le périmètre de l’EPCI.

Mme la Rapporteure générale. Sagesse.

M. Charles de Courson. J’ai eu dans ma circonscription un contentieux à ce sujet, pour des champs d’éoliennes. Comme nous étions en fiscalité unique, la part communale allait entièrement à l’intercommunalité. La décision a donc été prise de reverser un prorata. Le préfet a indiqué que ce n’était pas possible, parce que la loi interdit de reverser des impôts, et il faut donc jouer sur les allocations compensatrices. L’avantage de cet amendement est qu’il permettrait d’éviter une telle usine à gaz.

La commission adopte l’amendement CF 217 (amendement 332).

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Après l’article 25

La commission examine l’amendement CF 216 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Il convient, afin de garantir la sécurité juridique et l’équité de traitement des communes, qu’un protocole financier général contenant une dimension de neutralisation fiscale, appréciable au moment du vote des taux, soit adopté selon la procédure dérogatoire prévue lorsque le montant des attributions de compensation est fixé librement.

Mme la Rapporteure générale. Je ne comprends pas ce qu’est la neutralité fiscale.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. L’application de nouveaux taux intercommunaux implique des variations de pression fiscale au sein du même périmètre. L’inclusion dans le calcul des attributions de compensation d’une « compensation de neutralisation fiscale » est dans ce cas conforme aux principes généraux de l’article 1609 nonies C. Ce dispositif a tout lieu d’être intégré au protocole financier général.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 216.

Elle examine ensuite l’amendement CF 166 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Le présent amendement vise à étendre, dans un objectif de péréquation, le dispositif légal par lequel l’organe délibérant d’un EPCI à fiscalité propre peut décider la réduction des attributions de compensation selon des proportions différentes entre communes et selon des règles de majorité qualifiée et non plus d’unanimité. Le législateur avait encadré à juste titre ce dispositif pour garantir sa vocation péréquatrice et éviter toute baisse brutale des attributions de compensation.

L’amendement tient compte de nombreuses évolutions récentes, qui imposent de modifier les relations financières entre communes et communautés. Dans de nombreux territoires, les attributions de compensation étaient justifiées par la compensation de l’ancienne taxe professionnelle. L’intercommunalité issue de la loi du 12 juillet 1999 était financée par la croissance des ressources : taxe professionnelle et dotations globales de fonctionnement incitatives de l’État. Les communautés restituaient les recettes historiques en préservant le flux lié à la croissance. Le nouveau contexte budgétaire – évolutions erratiques de la contribution économique territoriale, baisses drastiques de dotations d’ici à 2017… –impose une réévaluation objective des recettes et des charges.

Le présent amendement propose de généraliser le dispositif existant à l’ensemble des groupements de communes à fiscalité professionnelle unique ; d’instituer une majorité qualifiée des deux tiers des suffrages exprimés au sein de l’assemblée délibérante de l’EPCI à fiscalité propre pour décider d’une telle réduction, dans des proportions différentes, des attributions de compensation ; de fixer à 20 % l’écart de potentiel financier par habitant par rapport à la moyenne à partir duquel certaines communes peuvent voir leurs attributions de compensation réduites selon ces règles ; enfin, d’augmenter de 5 à 10 % les montants maximaux de la réduction d’une année sur l’autre des attributions de compensation pouvant être décidées selon cette règle.

Mme la Rapporteure générale. Cet amendement est partiellement satisfait par l’article 61 bis du projet de loi de finances, en navette avec le Sénat. Il ne l’est que partiellement, car vous souhaitez en outre modifier les attributions de compensation selon des règles de majorité qualifiée et non plus d’unanimité des communes, alors que le Gouvernement estime que cela pourrait être contraire à la Constitution. Je demande le retrait de l’amendement.

M. Charles de Courson. Quel est le problème constitutionnel invoqué par le Gouvernement ?

Mme la Rapporteure générale. La commune se verrait imposer des attributions sur lesquelles elle n’aurait eu aucun mot à dire.

L’amendement CF 166 est retiré.

La commission examine l’amendement CF 225 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Il est proposé d’abandonner la prise en compte de l’évolution du taux moyen pondéré de la taxe d’habitation et des taxes foncières pour la détermination du taux maximal de contribution foncière des entreprises (CFE). Cette évolution se justifie par le fait, d’une part, que cette contribution représente une charge bien moins importante que la taxe professionnelle, et, d’autre part, que la liaison entre taxe d’habitation et CFE est maintenue. Les décisions fiscales locales visant à favoriser les ménages au détriment des entreprises restent toujours strictement encadrées par la loi tant que la liaison entre taxe d’habitation et CFE subsiste.

Mme la Rapporteure générale. Défavorable. Le guide pratique de la direction générale des collectivités locales (DGCL) sur le vote des taux fait soixante-douze pages : le sujet est complexe. Vous proposez de modifier le régime de variation libre des taux des quatre taxes locales, mais il y a des risques de hausse des taux de CFE.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Je vais retirer l’amendement et le redéposerai pour la séance. Admettez tout de même que cet article 1636 B sexies, qui fait référence au « taux moyen pondéré de la taxe d’habitation et des taxes foncières soit à la plus importante de ces diminutions lorsque ces taux sont en baisse », a ouvert une boîte de Pandore.

L’amendement CF 225 est retiré.

La commission examine l’amendement CF 224 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Les restructurations intercommunales entraînent des modifications de taux intercommunaux. Cet amendement a donc pour objet de donner aux communes membres les moyens d’adapter leurs propres taux pour éviter des transferts injustifiés de pression fiscale entre catégories de contribuables à l’occasion de la fusion ou de l’extension d’un établissement public de coopération intercommunale. Pour ce faire, nous proposons d’étendre le dispositif déjà prévu à l’article 1636 B decies pour les EPCI à fiscalité professionnelle unique aux EPCI à fiscalité additionnelle.

Mme la Rapporteure générale. Cet amendement offre la possibilité de faire varier librement le taux des quatre taxes — CFE, taxe foncière sur le bâti et sur le non-bâti et taxe d’habitation —, et non celui de la seule taxe foncière sur les propriétés non bâties.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Il s’agit d’éviter les variations de taux trop importantes lors de l’intégration fiscale progressive. Nous allons en effet rencontrer de véritables difficultés, qu’il nous faut anticiper. Je maintiens donc l’amendement.

La commission rejette l’amendement CF 224.

Puis elle est saisie de l’amendement CF 222 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Le code général des impôts est imprécis sur les délais des délibérations relatives aux intégrations fiscales progressives. L’amendement vise donc à accorder aux collectivités un délai suffisant pour prendre leurs décisions tout en sécurisant l’encadrement législatif de la procédure. Aussi proposons-nous de transposer dans la loi les précisions doctrinales apportées par la DGCL dans une note du 11 septembre 2014.

Mme la Rapporteure générale. Vous évoquez les conditions de délibération, alors que l’article que vous proposez de modifier porte sur la notification par les collectivités aux services fiscaux de leurs décisions en matière de fiscalité directe locale. En conséquence, peut-être conviendrait-il de modifier votre amendement et de le redéposer en vue de l’examen du texte en séance publique.

L’amendement CF 222 est retiré.

La commission examine l’amendement CF 223 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. L’état actuel de la législation ne prévoit pas les successions de fusions d’EPCI. Il s’agit de permettre l’égalité et la continuité de traitement de la part départementale de la taxe d’habitation transférée au bloc communal en 2011.

Mme la Rapporteure générale. Vous soulevez un véritable problème, mais nous n’avons pas pu expertiser votre amendement, notamment établir la liste exhaustive des articles du code général des impôts concernés. Je vous demande donc de le retirer.

M. Charles de Courson. Il s’agit en effet d’un véritable problème. Peut-être notre collègue n’a-t-elle pas trouvé la bonne solution, mais je me demande s’il ne faudrait pas que nous adoptions l’amendement afin que le Gouvernement nous indique la manière dont il envisage de sortir de cette situation. Le nombre des fusions qui vont intervenir au 1er janvier 2017 sera tellement important que je ne sais pas comment nous allons nous en tirer.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Je retire l’amendement, et je le redéposerai en séance publique afin d’ouvrir le débat.

L’amendement CF 223 est retiré.

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Article additionnel après l’article 25
Report au 1er novembre des dates limites fixées pour
certaines délibérations relatives à la fiscalité directe locale et
à la taxe d’enlèvement des ordures ménagères

La commission examine l’amendement CF 219 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Le délai d’adoption des délibérations d’assiette est actuellement trop bref pour permettre aux collectivités de délibérer dans de bonnes conditions. Nous vous proposons donc d’allonger les délais concernant la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) et les autres taxes et de les harmoniser.

Suivant l’avis favorable de la Rapporteure générale, la commission adopte l’amendement CF 219 (amendement 333).

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Après l’article 25

La commission est saisie de l’amendement CF 186 de Mme Eva Sas.

M. Éric Alauzet. Il s’agit de permettre la pleine application du versement transport interstitiel. Les entreprises implantées dans des territoires situés à la périphérie des collectivités qui ont organisé un système de transport en commun doivent en effet être également assujetties au versement transport et contribuer ainsi au financement des transports en commun, dans la mesure où ceux-ci bénéficient également à leurs salariés.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 186.

Puis elle examine l’amendement CF 185 de Mme Eva Sas.

M. Éric Alauzet. Cet amendement vise à créer un versement transport additionnel au profit des régions qui, bien qu’elles soient des autorités organisatrices de transport, ne bénéficient pas, à l’exception de la région Île-de-France, d’une taxe affectée. Nous souhaitons leur permettre d’assumer leur rôle dans la modernisation et le développement des transports collectifs.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 185.

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Article additionnel après l’article 25
Perception de la taxe sur les surfaces commerciales en cas de rachat d’entreprise sans cessation d’activité

La commission examine l’amendement CF 122 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Il s’agit de permettre aux collectivités de percevoir la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) en cas de rachat d’une entreprise sans cessation d’activité. La taxe sera ainsi acquittée par le cédant et le cessionnaire au prorata du temps d’exploitation.

Mme la Rapporteure générale. Notre commission avait adopté, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2016, un amendement analogue qui avait ensuite été retiré en séance publique, à la demande du ministre, mais pour des raisons que je n’avais pas comprises. Depuis, nous n’avons pas obtenu davantage d’explications. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement CF 122 (amendement 334).

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Après l’article 25

La commission est saisie de l’amendement CF 200 de Mme Brigitte Allain.

M. Éric Alauzet. Cet amendement vise à bonifier la dotation globale de fonctionnement (DGF)en donnant accès à un fonds de compensation doté de 50 millions d’euros aux collectivités qui soutiennent l’achat d’au moins 50 % de produits alimentaires de qualité par les crèches, maisons de retraite ou établissements d’hébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD), notamment, situés sur leur territoire. Par produits de qualité, il faut entendre des produits durables comprenant des signes de qualité (appellation d’origine contrôlée, indication géographique protégée, spécialité traditionnelle garantie), des produits répondant au cahier des charges de l’agriculture biologique, des produits de saison ou fermiers. Il s’agit de récompenser les externalités positives de ce mode de développement de l’alimentation et d’encourager les collectivités à s’engager dans un projet alimentaire territorial, projet qui a été créé par la loi d’avenir pour l’agriculture.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable.

Mme Christine Pires Beaune. Votre idée est bonne, monsieur Alauzet, mais la DGF ne me semble pas être le vecteur approprié, surtout dans le contexte de sa diminution.

La commission rejette l’amendement CF 200.

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Article 26
Dématérialisation des procédures de déclaration et de règlement
des contributions indirectes

Cet article vise à simplifier et moderniser les modalités de déclaration et de règlement des contributions indirectes, en généralisant progressivement le recours à des procédures dématérialisées, au plus tard d’ici la fin de l’année 2019, ce qui sera plus économique, plus rapide et plus écologique.

Il permettra aussi aux entreprises ayant le statut d’entrepositaire agréé de produits alcooliques de choisir, dans le cadre des procédures dématérialisées mises en place à partir de 2016, entre un rythme mensuel ou annuel pour la déclaration et le règlement des droits d’accises dont elles sont redevables, cet assouplissement pouvant faciliter leur gestion financière.

Les divers produits soumis à des contributions indirectes (alcools et boissons alcooliques, boissons sucrées ou édulcorées, boissons énergisantes, eaux minérales, produits du tabac, farines, céréales, recettes de cercles et maisons de jeux) doivent faire l’objet de déclarations périodiques, permettant de suivre l’évolution des stocks et de la circulation des produits et d’établir la base d’imposition.

Ainsi, en matière d’alcools et boissons alcoolisées, les articles 286 I et 286 J de l’annexe II au code général des impôts prévoient que les opérations réalisées par les personnes redevables de ces taxes doivent faire l’objet de déclarations récapitulatives mensuelles et de déclarations annuelles d’inventaire. Pour les bières et les boissons non alcoolisées, l’article 520 A du même code impose au redevable, pour le calcul de l’impôt dû, de déposer chaque mois au service des impôts « le relevé des quantités livrées au cours du mois précédent », l’impôt devant être « acquitté avant le 25 de chaque mois ». En matière de produits du tabac, l’article 575 C du même code oblige le fournisseur à déclarer chaque mois à l’administration les quantités de tabacs manufacturés mis à la consommation, afin de calculer le montant des droits de consommation dus, et à payer ces derniers « au plus tard le 5 du deuxième mois suivant celui au titre duquel la liquidation a été effectuée ». Dans le même esprit, l’article 150 de l’annexe IV au code général des impôts prévoit une déclaration mensuelle pour les recettes des cercles et maisons de jeux.

Par ailleurs, l’article 572 du code général des impôts impose aux débitants de tabac, lorsque le prix de vente homologué pour certains produits change, de déclarer à l’administration « dans les cinq jours qui suivent la date d’entrée en vigueur des nouveaux prix, les quantités en leur possession à cette date ».

Enfin, le III de l’article 302 D bis du même code impose aux personnes souhaitant bénéficier d’une exonération de droits sur les alcools purs ou dénaturés qu’elles utilisent (fabricants de parfums, producteurs de vinaigres et d’arômes alimentaires, laboratoires et établissements médicaux notamment) de remettre à l’administration une déclaration préalable de profession.

Ces multiples déclarations sont actuellement effectuées sous format papier, parfois en de multiples exemplaires, aucune disposition législative ne prévoyant, pour ces impositions indirectes, une télédéclaration, c’est-à-dire une déclaration dématérialisée et effectuée par voie électronique. S’agissant d’impôts dus uniquement par des entreprises, et non par des particuliers, il s’agit donc d’une différence notable par rapport à la TVA ou à l’impôt sur les sociétés, pour lesquels la télédéclaration a déjà été généralisée, respectivement depuis le 1er octobre 2014 et le 1er janvier 2013, en application de l’article 1649 quater B quater du code général des impôts.

Par ailleurs, le paragraphe III de l’article 302 D du code général des impôts prévoit que les droits sur les alcools et boissons alcooliques doivent normalement être réglés mensuellement par l’entreprise redevable (celle qui a mis les produits à la consommation), et plus précisément dans un délai d’un mois à compter de leur liquidation, qui est elle-même mensuelle. Il est ainsi prévu, dans ce cas général, que la liquidation de ces droits doit intervenir « au plus tard le dixième jour de chaque mois, sur la base d’une déclaration des quantités de produits mis à la consommation au cours du mois précédent ».

Toutefois, la périodicité de règlement est obligatoirement annuelle pour les entreprises ayant le statut douanier d’entrepositaires agréés de ces produits, lorsqu’elles sont dispensées de l’obligation de fournir une caution solidaire pour exercer cette activité. Ce rythme annuel de déclaration résulte de la loi de finances rectificative pour 2007 (229) et avait été essentiellement motivé, à l’époque, par le souhait d’alléger la charge de saisie manuelle des données reçues par les services de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI). Ces entreprises doivent, en application du 4 du III de ce même article, payer ces droits d’accises « auprès de l’administration en une échéance annuelle unique », avant le 10 janvier (ou, dans le cas des produits vitivinicoles, avant le 10 septembre) de chaque année. Il convient de rappeler qu’en application de l’article 302 G du code général des impôts, qui définit les obligations à respecter afin de pouvoir bénéficier du statut d’entrepositaire agréé requis pour la production, la transformation, la réception, le stockage et l’expédition de produits alcooliques, l’entreprise peut être dispensée de caution solidaire dans trois cas :

− s’il s’agit d’un récoltant ou d’un brasseur produisant, transformant ou stockant ces produits ;

− s’il s’agit d’un petit récoltant de vin mettant en circulation ces produits ;

− si cette entreprise détient et expédie des alcools, des produits intermédiaires, du vin, du cidre ou de la bière, dans des limites fixées par décret. L’entreprise doit ainsi être redevable d’un faible montant de droits d’accises (moins de 20 492 euros, à comparer à un seuil beaucoup plus bas de 4 220 euros qui était applicable jusqu’au 15 octobre 2013 (230)).

Enfin, s’agissant de la forme prise par le règlement des droits indirects, qu’il s’agisse de la taxation des alcools ou d’autres produits, l’article 1698 D du code général des impôts ne prévoit pas actuellement le recours au télérèglement. Il impose en revanche aux entreprises, lorsqu’elles sont redevables, à l’échéance, d’un montant de taxe supérieur à 50 000 euros, de procéder au règlement « par virement directement opéré sur le compte du Trésor ouvert dans les écritures de la Banque de France », cette forme de paiement plus directe et sécurisée étant adaptée à des sommes importantes.

II. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE OU BUDGÉTAIRE

Selon les données transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, le nombre de redevables du secteur des contributions indirectes est relativement stable. Ainsi, la réforme proposée par l’article devrait, à terme, concerner environ 70 000 opérateurs (hors bouilleurs de cru) et environ un million de déclarations par an. Cette estimation regroupe environ 53 000 opérateurs du secteur des alcools et boissons alcooliques (y compris les opérateurs n’acquittant pas de droits), 9 000 opérateurs du secteur de la garantie, 3 000 opérateurs du secteur des farines et céréales, 4 600 opérateurs du secteur des boissons non alcooliques et environ 40 opérateurs du secteur des tabacs.

Le produit de l’ensemble des contributions indirectes concernées par cet article, qui est récapitulé dans le tableau ci-après, apparaît relativement stable depuis 2012.

ÉVOLUTION DU PRODUIT DES CONTRIBUTIONS INDIRECTES CONCERNÉES PAR LA GÉNÉRALISATION PROGRESSIVE DES PROCÉDURES DÉMATÉRIALISÉES

(recettes en euros)

Produits

2012

2013

2014

Total vins et autres boissons fermentées

122 215 797

120 910 769

121 853 819

Total alcools

2 219 272 613

2 228 040 850

2 239 469 596

Total produits intermédiaires

104 697 409

76 023 276

76 157 706

Total bières

307 829 190

670 327 228

863 632 796

Taxe sur les boissons dites « prémix »

2 306 710

706 738

1 389 140

Cotisation sécurité sociale (boissons dont la teneur en alcool est supérieure à 18c)

655 192 663

706 213 535

726 904 722

Total taxes additionnelles

657 499 373

706 920 274

728 293 862

Droit spécifique sur les eaux et boissons non alcoolisées

72 899 851

73 755 208

74 506 347

Surtaxe sur les eaux minérales

19 885 421

20 275 156

20 665 871

Contribution sur les boissons sucrées

265 087 258

305 966 289

307 105 194

Contribution sur les boissons édulcorées

58 420 156

60 279 432

57 694 469

Tabacs

11 149 154 661,93

11 133 000 740,63

11 221 058 452,39

Farines

63 758 659,00

64 314 419,00

64 077 182,00

Céréales

22 113 535,00

19 897 866,00

22 809 118,00

Source : secrétariat d’État chargé du budget (DGDDI).

Le cadre juridique actuel, en ne prévoyant pas de télédéclaration et de télérèglement pour ces multiples contributions indirectes, contrairement aux autres grands impôts dont les entreprises sont redevables, conduit à privilégier le recours aux documents papiers. Or, la gestion de nombreux documents papiers est consommatrice d’effectifs et de temps, tant pour les entreprises chargées de la remplir que pour les services de la DGDDI chargés de saisir manuellement les données qu’ils contiennent, de les contrôler et de stocker physiquement ces documents – la Rapporteure générale n’a pas pu obtenir davantage de précisions sur les effectifs consacrés actuellement par l’administration des douanes aux tâches de saisies informatique des données contenues dans ces déclaration sur papier. En outre, l’utilisation du papier s’avère nettement moins favorable à l’environnement que l’utilisation de procédures dématérialisées, du fait de la matière utilisée pour la fabrication du papier et de la nécessité de transporter physiquement les documents papiers, notamment par voie postale. À cet égard, il paraît donc souhaitable, tant pour améliorer la compétitivité économique de nos entreprises que pour des raisons écologiques, de développer le recours à ces téléprocédures pour les déclarations et les règlements des contributions indirectes, partout où cela est techniquement possible.

Par ailleurs, le relèvement récent, le 15 octobre 2013, du montant de taxe en-dessous duquel les entreprises détenant ou expédiant de l’alcool peuvent être dispensées de caution, a conduit à soumettre un nombre accru de redevables à l’obligation de régler les droits d’accises annuellement, plutôt que mensuellement. L’obligation, en conséquence, pour ces entreprises de provisionner des sommes plus importantes en vue de règlements moins fréquents, représente pour celles-ci une contrainte importante, qui peut être mal comprise ou mal acceptée. Un assouplissement de cette contrainte, consistant à permettre aux redevables, s’ils le souhaitent, de régler ces droits d’accises de manière plus progressive, tout au long de l’année, serait donc positif tant pour faciliter la gestion de leur trésorerie que pour favoriser un recouvrement efficace et serein de ces impositions.

III. LE DISPOSITIF PROPOSÉ ET LES ENJEUX JURIDIQUES

Le du paragraphe I de cet article assouplit les règles actuellement applicables, au III de l’article 302 D du code général des impôts, pour la périodicité du règlement des droits d’accises sur les alcools et boissons alcooliques. Ainsi, alors qu’actuellement le règlement est obligatoirement annuel pour les entrepositaires agréés qui sont dispensés de caution (même s’ils doivent continuer à faire des déclarations mensuelles), un choix serait laissé aux redevables ayant opté pour la télédéclaration : ils pourraient soient payer leur contribution chaque mois, soit continuer la régler annuellement (au plus tard le 10 janvier de l’année suivant celle au titre de laquelle la taxe a été liquidée ou 10 septembre dans le cas particulier des produits vitivinicoles).

Le b) du prévoit toutefois une règle particulière pour les plus petits entrepositaires agréés, au sein de ceux qui sont dispensés de caution : ceux dont la production annuelle et le montant de droit d’accises dû seraient inférieurs à des seuils fixés par décret, pour chaque type de production. Pour ces redevables, la liquidation et le règlement des droits d’accises devraient toujours intervenir annuellement, mais un peu plus tard qu’actuellement. Ainsi, ces petits entrepositaires bénéficieraient, pour calculer et payer leur impôt, d’un délai d’une quarantaine de jours suivant la clôture de leur comptabilité matières (ou suivant celle de la compagne viticole s’il s’agit de produits vitivinicoles). Il est également prévu que le modèle et le contenu des déclarations prévues par l’article 302 D sera fixé par un arrêté du ministre chargé du budget.

Les et du paragraphe I complètent les articles 302 D bis et 572 du code général des impôts pour prévoir que devront être effectuées par voie électronique, sauf impossibilité technique due à une absence de couverture de la zone par un réseau, les déclarations concernant respectivement :

− la déclaration de profession que doivent transmettre à l’administration les entreprises qui souhaitent être exonérées de droits d’accises ;

− la déclaration relative à l’état de leurs stocks (quantités de produits en leur possession) que doivent transmettre les débitants de tabac dans les cinq jours suivant l’entrée en vigueur de nouveaux prix de vente ayant été homologués par la DGDDI pour des produits du tabac ;

Le du paragraphe I complète l’article 1649 quater B quater du code général des impôts, pour appliquer la même obligation de télédéclaration s’agissant, cette fois, des déclarations que doivent transmettre les redevables des droits d’accises sur les boissons alcooliques, les tabacs manufacturés, les farines et les céréales, ou encore les redevables de l’impôt sur les cercles et les maisons de jeux. Là encore, l’obligation de déclarer par voie électronique, plutôt que par l’envoi d’un document papier, ne sera pas applicable dans les lieux où il sera impossible de se connecter à un réseau donnant accès à internet, ce qui est logique.

Le de ce même paragraphe modifie la rédaction de l’article 1698 D du code général des impôts, afin d’étendre l’obligation de virement direct sur le compte du Trésor aux montants supérieurs à 50 000 euros qui seront dus pour un plus grand nombre de contributions indirectes. Ainsi, seront désormais concernées aussi par cette obligation de virement direct :

− la cotisation de solidarité à la charge des producteurs de blé et d’orge (article 564 quinquies de ce code) ;

− le droit de licence des débitants de tabac (article 568) ;

− l’impôt sur les cercles et maisons de jeux (article 1559) ;

− la taxe sur les boissons dites « prémix » (article 1613 bis) ;

− la contribution sur les boissons dites « énergisantes » (article 1613 bis A) ;

− la taxe sur les boissons sucrées ou édulcorées (articles 1613 ter et 1613 quater) ;

− la taxe sur les farines (article 1618 septies) ;

− la taxe sur les céréales (article 1619).

En outre, il est prévu, dans le second alinéa de l’article 1698 D nouvellement rédigé, que les opérateurs qui seront tenus d’adresser leur déclaration à l’administration par voie électronique pour les contributions indirectes visées au VII de l’article 1649 quater quater, devront également payer ces impôts par voie électronique. Il est effectivement rationnel, et nullement problématique s’agissant d’entreprises équipées en informatique, de coupler ici la modernisation des modalités déclaratives et de règlement de ces contributions.

Enfin, le du paragraphe I complète l’article 1798 bis du code général des impôts, qui prévoit actuellement des amendes fiscales applicables à l’encontre d’un redevable de contributions indirectes qui manque à certaines de ses obligations. Ainsi, cet article permet actuellement à l’administration fiscale d’infliger au redevable une amende de 15 à 750 euros lorsqu’elle se heurte à un défaut de présentation ou de tenue d’un document comptable ou à un défaut d’information dans les délais impartis (231). Il est proposé de permettre à l’administration d’appliquer la même sanction à l’encontre du redevable qui n’aurait pas respecté ses obligations de déclaration électronique pour les opérations économiques ayant concerné des tabacs manufacturés et des alcools et produits alcooliques. Cette obligation vaudra également pour les vins et cidres, catégorie de boissons alcooliques particulière pour laquelle la déclaration électronique sera obligatoire dès 2017, en application de l’article 407 du code général des impôts, qui vient d’être modifié par une ordonnance du 7 octobre 2015 (232). L’amende proposée s’appuie sur un dispositif préexistant et paraît correctement proportionnée à la gravité limitée du manquement constaté : celui-ci ne porte que sur la forme même de transmission des informations demandées, et non sur le contenu des informations elles-mêmes.

Par ailleurs, le paragraphe II de l’article fixe la date à partir de laquelle chacune des mesures sera applicable.

Il est ainsi prévu, pour laisser aux entreprises le temps de s’adapter, que la généralisation de la télédéclaration pour les droits indirects n’interviendra pas avant une date, fixée par décret, qui serait « comprise entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019 ». Ce procédé consistant à renvoyer au pouvoir réglementaire la fixation de la date d’application d’une réforme législative paraît de prime abord un peu étonnant, mais, pourvu que la période ne soit pas trop étendue, il ne paraît pas en l’occurrence trop problématique pour une question qui ne concerne finalement qu’une modalité technique de la déclaration. Cette incertitude permettra, en pratique, au Gouvernement de conserver pour la suite une certaine latitude pour fixer cette date plus ou moins tardivement, en fonction de l’évolution des pratiques et équipements informatiques des entreprises redevables de ces taxes. En tout état de cause, même dans l’hypothèse où la date la plus précoce serait retenue, plus de deux ans se seraient écoulés entre la publication de la présente loi de finances rectificative et la date d’application de ces nouvelles obligations, ce qui paraît a priori raisonnable.

En revanche, les autres mesures prévues par l’article entreraient en application dès le 1er janvier 2016. Cette date prévaudrait donc pour l’assouplissement de la périodicité du règlement des droits d’accises pour les entrepositaires agréés d’alcools qui sont dispensés de caution, d’une part, et pour l’application de la nouvelle amende fiscale prévue en cas de manquement aux obligations déclaratives. Dans ce dernier cas, l’obligation de télédéclaration ne devant intervenir qu’à compter du 1er janvier 2018 au plus tôt (en fonction de la date que fixera le futur décret), la nouvelle amende fiscale ne serait applicable, en 2016 et 2017, qu’aux seuls manquements actuellement prévus au paragraphe III de l’article 302 D bis, c’est-à-dire l’absence de déclaration préalable de profession pour des entrepositaires agréés d’alcools qui souhaiteraient bénéficier d’une exonération de droits d’accises pour leurs activités.

IV. L’IMPACT ÉCONOMIQUE ATTENDU

L’extension du recours à la télédéclaration et au télérèglement, grâce à une généralisation qui devrait être achevée avant 2020, devrait représenter une modernisation importante pour le recouvrement et le contrôle de ces contributions indirectes. La mesure proposée, tout en étant ambitieuse, demeure réaliste compte tenu de la nature des redevables concernés – les entreprises concernées peuvent disposer d’un équipement informatique suffisant – et du délai de deux à quatre ans prévu avant la généralisation. En outre, l’utilisation de documents papiers restera possible pour les entreprises situées dans des zones où, en raison d’une couverture insuffisante en réseau, il ne serait pas possible d’accéder à internet. Il est certain que cela permettra des gains de productivité tant pour les entreprises que pour les services de la DGDDI, même si l’évaluation préalable de l’article ne comporte aucune estimation à ce sujet.

Par ailleurs, cet article permettra de mieux prendre en compte les contraintes de la gestion financière des entreprises qui détiennent et expédient des quantités d’alcools limitées et sont à ce titre dispensées de caution. En effet, pour ces petits entrepositaires agréés, la possibilité de choisir entre un règlement mensuel ou annuel pour acquitter les droits d’accises représentera une souplesse appréciable et ne pourra que faciliter le recouvrement de ces impositions.

Enfin, le secrétariat d’État chargé du budget a indiqué que cette réforme avait été mise au point en étroite concertation avec le comité national des interprofessions viticoles, par le biais de groupes de travail consacrés tant aux problématiques propres à ces métiers qu’aux implications techniques de la dématérialisation. Dans ce cadre, le projet de réforme a été bien accueilli par les représentants de ces professions, ceux-ci y voyant également une opportunité pour disposer de données plus complètes et fiables, lesquelles pourraient être utiles pour réguler plus efficacement le marché viticole en France. En outre, dans le domaine de la viticulture, les services des douanes mettront en place un accompagnement spécifique des opérateurs, y compris au niveau local, et expérimenteront avec un panel de viticulteurs le bon fonctionnement de la nouvelle application informatique prévue, avant qu’elle ne soit déployée au cours de l’année 2016.

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La commission adopte l’article 26 sans modification.

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Article 27
Modernisation de la taxe spéciale sur les véhicules routiers (TSVR)

Cet article propose de simplifier et d’unifier, à partir du 1er juillet 2016, les modalités de liquidation et de recouvrement de la taxe spéciale sur les véhicules routiers (TSVR), couramment appelée « taxe à l’essieu », tout en consolidant juridiquement la liste des véhicules qui en sont exonérés. Sans modifier le niveau de taxation actuellement prévu pour chaque catégorie de véhicules routiers, ces changements devraient alléger et faciliter les démarches tant des redevables que des services douaniers.

Créée par la loi de finances pour 1968 (233), la taxe spéciale sur les véhicules routiers est un impôt que doivent acquitter auprès de services des douanes et des droits indirects les personnes propriétaires de poids lourds de plus de 12 tonnes, en fonction du poids et des caractéristiques techniques des véhicules, dont le nombre d’essieux. Sa logique économique consiste à prendre en compte l’usure plus forte des routes résultant de la circulation de véhicules lourds, qui déforment la chaussée et accroissent ainsi les dépenses requises pour l’entretien de ces routes.

Le régime législatif de cette taxe est fixé par le chapitre IV bis du titre X du code des douanes (articles 284 bis à 284 sexies bis). Celui-ci prévoit que cette taxe concerne l’ensemble des véhicules dont l’article 284 ter dresse la liste (véhicules automobiles porteurs de plus de 12 tonnes, véhicules articulés composés d’un tracteur et d’un semi-remorque de plus de 12 tonnes et remorques de plus de 16 tonnes), sauf s’ils sont spécialement conçus pour le transport de personnes. Elle est exigible dès la mise en circulation des véhicules, l’établissement de l’assiette et le recouvrement étant confiés à la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI).

Le barème de la taxe, qui comportait initialement une trentaine de tranches au total en fonction du poids et du type de véhicules, a été simplifié par la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier (234). Il a ensuite été revu par la loi de finances pour 2009 (235), qui a, en particulier, abaissé les tarifs applicables aux véhicules de moins de 27 tonnes.

Les tarifs de la taxe sont d’autant plus élevés que le véhicule est lourd.

Ils sont actuellement compris :

● pour les véhicules équipés d’une suspension pneumatique de l’essieu moteur (ou des essieux moteurs) :

– de 31 à 91 euros par trimestre s’agissant des véhicules porteurs ;

– de 4 à 129 euros par trimestre s’agissant des véhicules articulés composés d’un tracteur et d’un semi-remorque (le tarif étant d’autant plus élevé que la semi-remorque comporte davantage d’essieux) ;

– de 30 euros par trimestre s’agissant des remorques de plus de 16 tonnes.

● pour les véhicules équipés de systèmes de suspension non pneumatiques de l’essieu moteur (ou des essieux moteurs) :

– de 69 à 135 euros par trimestre s’agissant des véhicules porteurs ;

– de 8 à 175 euros par trimestre s’agissant des véhicules articulés composés d’un tracteur et d’un semi-remorque (le tarif étant d’autant plus élevé que la semi-remorque comporte davantage d’essieux) ;

– de 30 euros par trimestre s’agissant des remorques de plus de 16 tonnes.

La taxe est exigible d’avance et doit être recouvrée sur la base du tarif trimestriel – toute somme non réglée dans les deux mois étant majorée de 10 %. Toutefois, le redevable peut aussi choisir de la régler sur la base d’un « tarif journalier », qui égal au tarif trimestriel divisé par vingt-cinq (en application du dernier alinéa du 1 du I de l’article 284 ter du code des douanes).

Enfin, un décret du 23 décembre 1970 (236) a arrêté une liste de véhicules routiers n’entrant pas dans le champ d’application de la taxe. Cette liste comprend les véhicules suivants :

– les engins spéciaux, véhicules et matériels agricoles, forestiers ou de travaux publics ;

– les véhicules exclusivement affectés aux transports intérieurs dans les chantiers ou les entreprises ;

– les véhicules destinés à la vente ou effectuant des essais, faisant l’objet d’une immatriculation spécifique et ne transportant pas de marchandises ;

– les véhicules de la défense nationale, de la protection civile, d’incendie, de secours ou de maintien de l’ordre ;

– les engins de levage et de manutention automoteurs ;

– les pompes ou stations de pompage mobiles installées à demeure sur un châssis routier ;

– les groupes moto compresseurs mobiles installés à demeure sur un châssis routier ;

– les bétonnières et pompes à béton installées à demeure sur un châssis routier ;

– les groupes générateurs mobiles installés à demeure sur un châssis routier ;

– les engins de forage mobiles installés à demeure sur un châssis routier.

Contrairement aux autres premières catégories de véhicules, qui sont exonérés de manière permanente, les six derniers cas d’exonération sont actuellement applicables uniquement jusqu’au 31 décembre 2019, à condition que les véhicules concernés soient utilisés dans le cadre de travaux publics et industriels. La date à laquelle ces exonérations doivent prendre fin a été repoussée, par un décret du 11 mars 2015 (237), de la fin de l’année 2014 à la fin de l’année 2019, conformément à la décision rendue à ce sujet par la Commission européenne le 29 octobre 2014, dans le cadre de la directive du 17 juin 1999 relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures (238).

II. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE OU BUDGÉTAIRE

Comparée au produit des principales accises recouvrées par la DGDDI, la TSVR se caractérise par un produit relativement limité : d’après le tome I des Voies et moyens annexé aux derniers projets de loi de finances, le rendement de cette taxe demeure relativement stable, autour de 170 millions d’euros par an, perçus par les services douaniers au profit du budget de l’État.

ÉVOLUTION DU PRODUIT DE LA TSVR DE 2011 À 2015

(en millions d’euros)

Année

2011

2012

2013

2014

2015

(prévisions)

Produit

170,3

171,7

170,8

169,8

170

Source : Voies et moyens (tome I) annexé aux projets de loi de finances pour 2013, 2014, 2015 et 2016.

Le nombre de redevables acquittant cette taxe chaque trimestre est estimé à 70 000, tandis que le paiement par tarif journaliers concerne 31 200 véhicules, soit environ 6,5 % du parc total des véhicules routiers.

Au mois de novembre 2015, les 482 218 véhicules lourds déclarés au titre de la TSVR sont répartis de la manière suivante :

NOMBRE DE VÉHICULES LOURDS DÉCLARÉS AU TITRE DE LA TSVR PAR CATÉGORIES

Véhicules autoporteurs

Total = 254 802,

soit 53 %

À 2 essieux

151 533

À 3 essieux

76 672

À 4 essieux et plus,

d’un poids compris entre 12 et 27 tonnes

214

À 4 essieux et plus,

d’un poids supérieur à 27 tonnes

26 383

Ensembles articulés

(tracteur routier + semi-remorque)

Total = 193 485,

soit 40 %

Semi-remorque à 1 essieu,

d’un poids compris entre 12 et 20 tonnes

151

Semi-remorque à 1 essieu,

d’un poids supérieur à 20 tonnes

1 266

Semi-remorque à 2 essieux,

d’un poids compris entre 12 et 27 tonnes

882

Semi-remorque à 2 essieux,

d’un poids compris entre 27 et 33 tonnes

415

Semi-remorque à 2 essieux,

d’un poids compris entre 33 et 39 tonnes

16 254

Semi-remorque à 2 essieux,

d’un poids supérieur à 39 tonnes

4 393

Semi-remorque à 3 essieux et plus,

d’un poids compris entre 12 et 38 tonnes

980

Semi-remorque à 3 essieux et plus,

d’un poids supérieur à 38 tonnes

169 144

Remorques, soit 7 %

d’un poids supérieur à 16 tonnes

33 931

Source : secrétariat d’État chargé du budget (DGDDI).

Cette taxe, qui existe depuis plus de quarante ans et que notre pays doit maintenir pour les raisons européennes précédemment mentionnées, n’est pas dépourvue de logique économique : elle permet de compenser les dommages causés au réseau routier par les véhicules lourds qui y circulent. Toutefois, elle se caractérise par une organisation du recouvrement trop complexe, voire datée, et des coûts de gestion excessifs.

Ainsi, selon l’évaluation préalable de cet article, les sommes dues chaque trimestre par les redevables de la TSVR sont souvent inférieures à 100 euros, et les coûts d’assiette et de recouvrement sont proches de 10 %, ce qui est environ 10 fois supérieur à la moyenne. La complexité de la gestion et du contrôle du régime des tarifs journaliers explique en partie cette faible efficience. Ainsi, dans le cadre de ce régime, un véhicule routier qui circule moins de huit jours par mois et souhaite acheter 5 journées de circulation doit obtenir un document spécifique, le TVR2 ; pour ce faire, il est d’abord nécessaire de remplir un bon de commande au bureau de douane (ou par courrier), puis de faire éditer le document sur papier sécurisé – ce qui nécessite la passation d’un marché avec l’Imprimerie nationale –, ce qui suppose une gestion de stocks dédiés par les bureaux des douanes, voire un acheminement des documents par voie postale.

Par ailleurs, même indépendamment des contraintes disproportionnées liées à la gestion de ce régime journalier, le rythme trimestriel actuellement prévu par la loi pour le recouvrement de cette taxe conduit, là encore, à multiplier les opérations administratives, tant pour les redevables que pour l’administration des douanes. Il est donc souhaitable de moderniser le régime de cette taxe pour aboutir à une organisation plus efficace et moins coûteuse, comme le propose l’article.

III. LE DISPOSITIF PROPOSÉ ET LES ENJEUX JURIDIQUES

La réforme, sans modifier le niveau et la progressivité des tarifs de la taxe, procède à quatre changements, qui seront applicables à compter du 1er juillet 2016 (comme le précise le paragraphe II de l’article) :

– les et du paragraphe I confèrent une valeur législative aux exonérations de certains véhicules routiers, prévues actuellement par le décret du 23 décembre 1970 précité. Celles-ci seraient ainsi codifiées dans un nouvel article 284 bis B du code des douanes, sans être modifiées sur le fond. Ce choix est effectivement plus respectueux de l’article 34 de la Constitution, dont le cinquième alinéa fait obligation au législateur de définir avec précision « l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures », sans qu’il puisse déléguer cette responsabilité au pouvoir réglementaire ;

– les a) et b) du et le a) du du paragraphe I diminuent de moitié la fréquence du recouvrement de la taxe : ainsi, la périodicité du recouvrement ordinaire, actuellement trimestrielle, deviendrait semestrielle. Ce changement rend techniquement nécessaire la modification de l’ensemble du barème, afin de doubler l’ensemble des tarifs, sans autre changement et en maintenant les tranches actuellement applicables – le niveau de taxation n’est donc pas alourdi ;

– les c) et d) du 3° du paragraphe I suppriment le système de déclaration et de paiement de la taxe sur la base d’un tarif journalier, en raison de sa lourdeur de gestion et des fraudes qu’il occasionne. Pour conserver une certaine souplesse au profit de véhicules routiers ne circulant que par intermittence, il sera désormais précisé que le redevable pourra demander à l’administration de ne supporter, pour un véhicule ne circulant qu’une partie du semestre, qu’une taxation proportionnelle au temps de circulation, ce dernier étant calculé en mois, avec un arrondi du nombre de mois à l’unité supérieure.

– enfin, le b) du du paragraphe I met en place un arrondi à l’euro le plus proche pour la liquidation de la taxe, afin de simplifier la liquidation de la taxe pour les plus petits montants.

IV. L’IMPACT ÉCONOMIQUE ATTENDU

L’évaluation préalable de l’article ne fournit pas de données chiffrées quant à l’impact économique et budgétaire de la réforme, car elle ne fera sentir ses effets que progressivement. Les tarifs de la taxe demeurant inchangés, les entreprises de transport routier concernées ne devraient pas connaître de variation de la charge fiscale correspondante – si ce n’est un léger gain en termes de trésorerie du fait de la suppression des échéances de paiement du 1er avril et du 1er octobre.

Toutefois, l’unification et la modernisation du régime déclaratif de la TSVR devraient bien avoir, à terme, plusieurs effets positifs. En premier lieu, les professionnels des secteurs concernés bénéficieront d’une baisse de la fréquence des déclarations et des paiements auxquels ils sont actuellement astreints pour cette taxe : ce changement simplifiera donc leurs démarches administratives. L’évaluation préalable de l’article souligne d’ailleurs que le passage à un recouvrement semestriel est souhaité tant par l’Association des utilisateurs de transport de fret (AUTF) que par la Fédération nationale des transporteurs routiers (FNTR).

Par ailleurs, l’adoption d’un unique mode de recouvrement semestriel de la taxe, combiné au système d’arrondi proposé pour les calculs, devrait aussi alléger et faciliter le travail des services douaniers. La suppression du régime de paiement journalier de la taxe devrait aboutir à une diminution du nombre de fraudes constatées dans ce domaine. Enfin, la réforme devrait s’accompagner d’une centralisation, prévue en 2017, de la gestion de la taxe en un lieu unique (site de la DGDDI situé à Metz) ; ce changement d’organisation administrative, combiné à la dématérialisation croissante des procédures, favorisera aussi les gains de productivité.

En pratique, selon les informations transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, depuis le 1er juillet 2015, le service national douanier de la fiscalité routière (SNDFR) concentre progressivement la gestion de la TSVR afin de constituer un interlocuteur unique. Ce service unique exerce actuellement sa compétence sur le territoire des régions Alsace, Lorraine et Champagne-Ardenne. À partir du 1er janvier 2016, il étendra ses missions aux redevables résidant dans les autres régions, de façon à ce que le processus de centralisation couvre l’ensemble du territoire national au plus tard le 1er janvier 2017. Dans ce nouveau cadre, les services déconcentrés de l’administration des douanes garderont leurs prérogatives de contrôle en matière de TSVR.

Enfin, ce projet de réforme de la TSVR a été présenté aux organisations professionnelles du transport routier, dont l’avis, d’après les indications du secrétariat d’État chargé du budget, a été globalement positif. La crainte d’une éventuelle refonte du barème de la TSVR avait alors été exprimée, mais elle ne figure pas dans le projet de réforme.

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La commission adopte l’article 27 sans modification.

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Après l’article 27

La commission examine l’amendement CF 195 de M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Cet amendement — qui est lié à l’amendement CF 180, que nous examinerons après l’article 30 — vise à augmenter la taxe sur les véhicules de société (TVS) pour les véhicules fonctionnant au gazole. Nous avons adopté, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2016, un début de rattrapage en augmentant la taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE) applicable au gazole. Mais une autre niche fiscale a été créée pour favoriser les véhicules fonctionnant au gazole ; il s’agit de la déductibilité de la TVA sur le gazole consommé par les véhicules de société. De fait, 96 % des véhicules de sociétés fonctionnent au gazole. Or plus de la moitié des véhicules neufs vendus aujourd’hui en France sont des véhicules de société.

Pendant des années, nous avons proposé de supprimer cette déductibilité, mais une telle mesure est, semble-t-il, contraire à une directive européenne datant des années 1970. Nous proposerons donc, par l’amendement CF 180, d’étendre cette déductibilité aux autres carburants, notamment à l’essence. Cette disposition entraînerait cependant une perte de recettes pour l’État, que nous proposons de compenser par une augmentation de la TVS sur les véhicules diesel. Tel est l’objet de l’amendement CF 195.

Mme la Rapporteure générale. Cet amendement nous avait déjà été présenté sous une autre forme avec des augmentations de tarifs plus fortes. En l’espèce, vous nous proposez une hausse sensible, monsieur Baupin, puisqu’il s’agit d’augmenter de 20 % à 50 % la composante « Air » de la TVS ! J’observe d’ailleurs que cette augmentation serait de 50 % sur les véhicules diesel les plus récents, c’est-à-dire les plus propres. Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2016 et le projet de loi de finances rectificative comportent des dispositions visant à taxer davantage le gazole que l’essence et davantage les énergies fossiles que l’électricité. Pour ces deux raisons, avis défavorable.

M. Denis Baupin. L’amendement CF 180 est plus important que celui-ci, qui a pour objet de compenser la perte de recettes pour l’État. Par ailleurs, je rappelle que, lorsque le ministre délégué au budget actuel était rapporteur général, il avait proposé d’augmenter la TVS dans une proportion beaucoup plus importante. Mais, si les montants étaient plus faibles, notre amendement pourrait-il recueillir un avis favorable en séance publique ou êtes-vous opposée au principe même d’une augmentation ? Songez que les chauffeurs de taxi seraient prêts à acheter des véhicules hybrides et qu’ils y renoncent, car, actuellement, il est plus intéressant pour eux de continuer à acheter des véhicules diesel puisqu’ils peuvent récupérer la TVA sur le carburant. C’est absurde et stupide !

La commission rejette l’amendement CF 195.

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Article 28
Simplification et sécurisation du recouvrement de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP)

Cet article modifie une série d’articles du chapitre Ier du titre X du code des douanes, consacré aux taxes intérieures, afin de faciliter et moderniser le recouvrement de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), dont le régime est fixé par les articles 266 sexies à 266 terdecies, tout en supprimant des dispositions devenues juridiquement inutiles.

Créée par la loi de finances pour 1999 (239), la TGAP comprend six composantes, correspondant à d’anciennes taxes fiscales ou parafiscales, qui sont dues par les personnes exploitant des installations dont l’activité cause des dommages à l’environnement (pollution de l’air, des sols et de l’eau notamment)
– la liste des redevables étant fixée par l’article 266 sexies du code des douanes. La logique de cette taxe consiste, outre la recherche de rendement budgétaire, à sensibiliser financièrement les agents économiques au coût résultant, pour la société, de la pollution occasionnée par certaines activités productives.

À l’exception de la composante portant spécifiquement sur l’activité des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), qui est recouvrée par les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), la TGAP est normalement recouvrée par l’administration des douanes, pour les cinq composantes portant sur les activités suivantes :

– stockage ou traitement thermique de déchets ;

– livraison ou utilisation d’huiles ou produits lubrifiants susceptibles de produire des huiles usagées ;

– première livraison ou utilisation de lessives ou produits auxiliaires ;

– première livraison ou utilisation de matériaux d’extraction ;

– exploitation d’une installation émettant dans l’atmosphère des quantités importantes de substances polluantes (oxydes de soufre, acide chlorhydrique, oxydes d’azote, composés organiques volatils, arsenic, mercure, plomb, etc.).

Enfin, depuis la dernière loi de finances rectificative pour 2010 (240), la TGAP comprend en principe une composante complémentaire, portant sur la première livraison ou la première utilisation de « sacs de caisse à usage unique en matière plastique ». En application du 7 du II de l’article 266 sexies, les sacs en matière plastique biodégradable ne sont pas concernés par cette taxe s’ils sont constitués de matières végétales pour au moins 40 % de leur masse. Toutefois, cette composante n’a pas été réellement mise en place à compter du 1er janvier 2014 comme la loi le prévoyait, car le décret qui devait définir les caractéristiques de ces sacs n’a jamais été publié.

D’une manière générale, le produit de la TGAP est affecté en priorité à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), dans la limite d’un plafond fixé en loi de finances (449 millions d’euros en 2014), l’éventuel surplus de recettes alimentant le budget général de l’État (à hauteur de 390 millions d’euros en 2014).

S’agissant du recouvrement de la TGAP, l’article 266 undecies du code des douanes précise que les personnes qui y sont assujetties doivent liquider et payer cette taxe « sous la forme d’une déclaration annuelle et de trois acomptes », le montant de taxe dû étant obtenu, pour chaque composante, en appliquant le tarif prévu l’année en cours à la base d’imposition constatée l’année précédente. La déclaration et les éléments nécessaires à son contrôle doivent être déposés auprès des bureaux des douanes « au plus tard le 30 avril de chaque année » et conservés sous un format papier, même si une transmission électronique de la déclaration est possible. L’entreprise redevable de la TGAP doit verser les trois acomptes au plus tard les 30 avril, 31 juillet et 31 octobre, chaque acompte étant d’un montant égal au tiers de la somme due pour l’ensemble de l’année. Ces acomptes devaient, jusqu’à la dernière loi de finances rectificative pour 2009 (241), être versés vingt jours plus tôt, c’est-à-dire aux 10 avril, 10 juillet et 10 octobre de chaque année.

Enfin, la loi n’impose pas actuellement de forme particulière pour le paiement de la taxe, si ce n’est lorsque le montant de taxe excède 7 600 euros : il doit alors être effectué par le biais d’un virement direct sur le compte du Trésor ouvert auprès de la Banque de France.

Par ailleurs, l’article 268 ter du code des douanes prévoit, depuis la loi de finances rectificative pour 2000 (242), que les échanges de produits entrant dans le champ d’application de la TGAP, lorsqu’ils sont effectués entre le territoire métropolitain et celui d’un département d’outre-mer (DOM), ou encore entre DOM, sont « assimilés à des opérations d’importation ou d’exportation ». Cela signifie qu’en application de l’article 266 decies de ce même code, les livraisons de matériaux d’extraction, de lubrifiants ou de produits lessiviels entre ces territoires pourront donner lieu, au profit de l’entreprise fournissant le produit, à remboursement de la TGAP perçue par les douanes les concernant. Toutefois, cette assimilation aux importations et exportations ne prévaut pas pour les échanges entre la Guadeloupe et la Martinique, ces collectivités étant réunies au sein du Marché unique antillais pour leurs relations commerciales.

II. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE OU BUDGÉTAIRE

La TGAP, dont le produit total a atteint 644 millions d’euros en 2014 selon les données détaillées transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, constitue une recette importante pour assurer le financement notamment de l’ADEME, mais aussi pour inciter financièrement les entreprises à privilégier des activités et modes de production moins susceptibles de dégrader ou menacer l’environnement.

Le nombre d’opérateurs et le rendement des différentes composantes de la TGAP peuvent se présenter de la manière suivante :

PRODUIT ET NOMBRE DE REDEVABLES DES COMPOSANTES DE LA TGAP

Composante

Nombre de redevables

Produit recouvré en 2014

(en millions d’euros)

Déchets

382

423,4

Produits lessiviers

311

50,3

Produits lubrifiants

348

23,6

Matériaux d’extraction

1 230

69

Substances polluant l’atmosphère

828

53,1

ICPE

10 573

25

Sources : secrétariat d’État chargé du budget et projet de loi de finances rectificative pour 2015.

La gestion administrative de cette taxe a déjà été améliorée, puisque depuis 2015, les cinq composantes relevant de l’administration des douanes sont contrôlées et recouvrées par un unique centre national, auquel tous les redevables peuvent s’adresser. Elle peut être modernisée encore davantage, grâce au développement des téléprocédures : en effet, seuls 401 opérateurs ont effectué, en 2015, une télédéclaration pour la TGAP due au titre de leurs activités de l’année 2014, ce qui est encore trop peu. Il convient d’aller plus loin car, pour la TGAP comme pour les autres contributions indirectes, la gestion de nombreux documents papiers – qu’il faut expédier, classer, stocker et dont il faut souvent saisir les données –, consomme inutilement les ressources humaines et financières des entreprises et de l’administration, ainsi que des ressources naturelles (production du papier et transport des documents).

Par ailleurs, s’agissant de la composante de TGAP qui devait être mise en place sur les sacs plastiques à usage unique, l’évaluation préalable de l’article souligne qu’une concertation, menée entre les services du ministère chargé du budget et les professionnels concernés, a « montré que l’outil fiscal n’était pas le plus adapté pour lutter contre la pollution générée par [ces] sacs ». Le problème écologique posé par ces sacs plastiques a, effectivement, pu être résolu d’une autre façon, puisqu’il a été décidé, plus simplement, de les interdire à compter du 1er janvier 2016, ce qui privera alors, effectivement, de tout intérêt la composante de TGAP qui avait été prévue pour décourager l’utilisation de ces produits.

III. LE DISPOSITIF PROPOSÉ ET LES ENJEUX JURIDIQUES

Le A du paragraphe I de cet article supprime le dispositif législatif actuellement applicable à la composante de la TGAP devant peser sur les sacs de caisse à usage unique en matière plastique. En effet, la loi relative à la transition énergétique du 17 août 2015 (243) a prévu qu’à compter du 1er janvier 2016, il serait « mis fin à la mise à disposition, à titre onéreux ou gratuit », de tels sacs de caisse – il en ira de même, à partir du 1er janvier 2017, pour tous les sacs en plastiques destinés à l’emballage de marchandises autres que les sacs de caisse, sauf s’ils sont biodégradables et biosourcés. Cela signifie qu’il n’existera plus d’assiette taxable l’an prochain pour cette composante de TGAP, qui sera alors devenue sans objet. Il est donc logiquement proposé d’abroger les parties des articles 266 sexies, 266 septies et 266 octies du code des douanes, qui définissent actuellement les redevables, le fait générateur et l’assiette de cette taxe.

Les B et C ainsi que le du D du même paragraphe tirent les conséquences logiques de ce choix, en procédant aux coordinations requises aux articles 266 nonies, 266 decies et 266 undecies (premier alinéa) du code des douanes, qui concernent respectivement le tarif, le remboursement éventuel et les modalités de déclaration, de liquidation et de recouvrement de cette taxe.

Les 2° à 5° du D de ce paragraphe procèdent à plusieurs changements au sein de l’article 266 undecies du code des douanes, afin de commencer dès le 1er janvier 2016 (voir les dates d’application prévues au paragraphe IV) à moderniser les modalités de déclaration et de paiement de la TGAP :

– en cas de télédéclaration de la TGAP, le redevable pourra disposer d’un mois supplémentaire (date butoir du 31 mai au lieu du 30 avril) pour déclarer sa taxe et en régler le premier acompte ;

– la télédéclaration et le télérèglement de la TGAP deviendront obligatoires pour toutes les entreprises redevables d’un montant annuel de taxe supérieur à 100 000 euros ;

– en-deçà de ce montant, la taxe ne pourra faire l’objet d’un télépaiement que si elle a également donné lieu à une télédéclaration ; il est effectivement souhaitable, pour la bonne administration du système de gestion dématérialisée de la taxe par l’administration des douanes, que les deux types d’informations soient disponibles sur le même type de support, afin de pouvoir être facilement recoupées ;

– le non-respect de ces modalités de règlement (utilisation de supports papier et non de la téléprocédure lorsqu’elle est requise) conduira l’administration à majorer de 0,2 % le montant de taxe dû. Cette majoration restera donc modérée et de même ampleur que celle déjà prévue lorsqu’un paiement de plus de 7 600 euros n’a pas été fait par le redevable au moyen d’un virement direct sur le compte du Trésor à la Banque de France.

Le E du paragraphe I supprime, à l’article 268 ter du code des douanes, qui concerne l’assimilation aux importations et exportations des échanges entre la métropole et les DOM ou entre ces derniers, la référence à la TGAP. En effet, celle-ci avait été justifiée, lors de son introduction par la loi de finances rectificative pour 2000 (244), par l’extension alors prévue du champ d’application de la TGAP aux produits énergétiques. Or, le dispositif procédant à cet élargissement avait finalement été déclaré contraire à la Constitution (245), retirant du même coup son sens initial à l’ajout de cette référence dans le texte de l’article 268 ter. Le secrétariat d’État chargé du budget a confirmé que la réforme technique de la TGAP prévue par cet article n’aurait aucune conséquence sur son application dans les DOM (où il existe notamment des tarifs réduits sur la TGAP portant sur les déchets en Guyane et à Mayotte).

Enfin, le F de ce même paragraphe procède à mise à jour de la rédaction de l’article 285 sexies du code des douanes, techniquement nécessaire dès lors que celui-ci, relatif au seuil de recouvrement minimal de 61 euros applicable en matière de TGAP, fait référence à un article 266 sexies A qui n’existe plus dans ce code.

Le paragraphe II de l’article prévoit d’apporter, seulement à partir du 1er janvier 2017, une série de modifications à l’article 266 undecies du code des douanes, afin de rendre obligatoire à cette date la télédéclaration et le télérèglement de la TGAP pour toutes les entreprises qui en sont redevables. La date limite prévue pour la transmission de la déclaration, comme pour le paiement du premier acompte de taxe, serait du même coup reportée du 30 avril au 31 mai pour toutes les entreprises.

Le paragraphe III de l’article tire les conséquences logiques de la suppression, prévue au E du paragraphe I de l’article, de la référence à la TGAP à l’article 268 ter du code des douanes, qui concerne les conditions d’assimilation aux importations ou exportations des échanges entre la métropole et les DOM ou entre ces derniers. En effet, l’article L. 151-1 du code de l’environnement, qui se borne à renvoyer à différents articles du code des douanes pour les conditions de déclaration, de recouvrement et de contrôle de la TGAP, cite actuellement cet article, ce qui ne sera plus nécessaire.

Enfin, le paragraphe IV de l’article prévoit qu’il s’appliquera dès le 1er janvier 2016, sauf pour les modifications prévues par son paragraphe II, prévoyant une généralisation de la télédéclaration et du télérèglement de la TGAP, qui ne s’appliquera qu’à partir du 1er janvier 2017.

IV. L’IMPACT ÉCONOMIQUE ATTENDU

Cet article, bien qu’essentiellement technique et dépourvu d’impact budgétaire direct, aura pour intérêt de moderniser les conditions de recouvrement de la TGAP, ce qui devrait favoriser les gains de productivité tant chez les entreprises qui en sont redevables qu’au sein de l’administration des douanes.

La démarche sera progressive, puisque les entreprises soumises à l’obligation de déclarer et régler leur TGAP par voie électronique dès l’année 2016 seront uniquement les plus importantes. Ainsi, il s’agira de celles qui doivent s’acquitter de plus de 100 000 euros de TGAP au titre d’une même année et qui, selon l’évaluation préalable de l’article, sont au nombre de 520 (dont 110 ont déjà réglé leur taxe par voie électronique). Pour les autres entreprises, il n’existera qu’une incitation financière pendant l’année 2016, cette incitation prenant la forme d’un gain de trésorerie, rendu possible par le report d’un mois de la date limite fixée pour le versement du premier acompte de la taxe.

Enfin, la généralisation des téléprocédures à toutes les entreprises redevables de la TGAP ne sera applicable qu’à compter de 2017, ce qui leur laissera le temps de mettre à niveau, si nécessaire, leur équipement informatique et leur organisation interne – démarche qui leur sera aussi utile pour d’autres activités. Là encore, la nouvelle date butoir proposée pour le règlement du premier acompte de la taxe permettra un gain appréciable de trésorerie.

S’agissant de l’administration des douanes, la suppression des tâches de saisies informatique des données figurant actuellement dans les déclarations effectuées sur papier permettra de réorienter le travail des agents du service gestionnaire de la TGAP vers la réalisation d’analyses de risques et de ciblage des contrôles à effectuer. La Rapporteure générale n’a pas pu obtenir davantage de précisions sur les possibles gains en ressources humaines qui pourraient résulter, à terme, d’une gestion dématérialisée des déclarations et des règlements de TGAP par le centre unique mis en place en 2015 par les douanes. Toutefois, même en tenant compte des besoins accrus pour la maintenance et la gestion des outils informatiques, ces gains de productivités paraissent assurés à terme. Sans devoir aboutir à une baisse des effectifs douaniers, ils devraient permettre à un certain nombre d’agents de consacrer à d’autres tâches le temps ainsi libéré.

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La commission adopte l’article 28 sans modification.

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Après l’article 28

La commission examine l’amendement CF 30 de M. Daniel Gibbes.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Il s’agit de prendre en compte les contraintes spécifiques de l’insularité, en exonérant de la taxe de solidarité, dite « taxe Chirac », les vols d’une distance inférieure à 50 kilomètres. Prenons l’exemple d’un passager se rendant de Saint-Barthélemy à l’aéroport international de Juliana, situé dans la partie néerlandaise de l’île de Saint-Martin. Cet aéroport, qui est à quelques kilomètres seulement de l’aéroport de Grand-Case, étant considéré comme un aéroport non européen, le passager doit acquitter une taxe de 4,51 euros, soit la même somme que celui qui ferait un Paris-Tokyo. Il s’agit d’un amendement de bon sens déposé par mon collègue Daniel Gibbes.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. J’ai été l’un des rares à combattre, en tant que rapporteur spécial à l’époque, la « taxe Chirac ». Pourquoi ne pas créer une taxe sur les voyages en TGV, tant qu’on y est ? Si l’on voulait financer ONUSIDA, il suffisait de le faire par redéploiement, et l’affaire était réglée ! Par ailleurs, les sommes en jeu sont ridicules. C’est « t’as pas cent balles ! »

La commission rejette l’amendement CF 30.

Puis elle est saisie de l’amendement CF 169 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Le projet de loi de finances pour 2016 a augmenté le taux de la taxe « télécom » sans que soit prise en considération la situation des MVNO (Mobile virtual network operator), encore très fragile malgré leurs 11 % de parts de marché, qui n’ont d’ailleurs pas été pris en compte dans le calcul du rendement de cette mesure. Il s’agit, par cet amendement, de s’aligner sur les conditions fixées pour la taxe sur les services de télévision due par les distributeurs (TST-D) — qui ont été définies pour ne pas fragiliser les plus petits acteurs du marché —, afin que ces opérateurs alternatifs ne pâtissent pas de cette hausse inattendue de la taxe « télécom ».

Mme la Rapporteure générale. Les opérateurs dont le chiffre d’affaires est inférieur à 5 millions d’euros, c’est-à-dire les petits opérateurs, sont déjà exonérés de la taxe. Vous proposez de doubler le plafond, en le portant à 10 millions d’euros. Ce faisant, vous offririez également une forme de cadeau fiscal aux gros opérateurs, puisque ceux-ci seraient exonérés de la taxe sur la partie de leur chiffre d’affaires inférieure à 10 millions d’euros. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Pour une entreprise du secteur des télécoms, un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros, ce n’est rien !

La commission rejette l’amendement CF 169.

Puis elle est saisie des amendements identiques CF 170 de M. Charles de Courson et CF 246 de M. Jean-Marie Beffara.

M. Charles de Courson. Par cet amendement, nous proposons que les MVNO bénéficient, sur le paiement de la taxe, d’un abattement forfaitaire de 50 % des sommes versées au titre des prestations d’accès.

M. Jean-Marie Beffara. L’amendement CF 246 fait suite à l’augmentation de la taxe sur les opérateurs de communication électronique. Parmi ces derniers, on distingue entre ceux qui disposent d’un réseau, et donc d’une infrastructure d’émission — ils sont au nombre de trois : Bouygues Télécom, Orange et SFR —, et les MVNO, qui louent l’utilisation du réseau de ces trois opérateurs. Sur un chiffre d’affaires global de l’ordre de 60 milliards d’euros, celui de l’ensemble des MVNO s’élève à 1 milliard d’euros. Or, non seulement leur marge est bien moins importante que celle des trois opérateurs historiques, mais ils ne peuvent pas, contrairement à ces derniers, déduire de l’assiette de la taxe « télécom » leurs dotations aux amortissements, soit 50 % du chiffre d’affaires, puisqu’ils n’ont pas d’infrastructures.

Nous proposons donc que les MVNO puissent bénéficier d’un abattement de 50 % des loyers qu’ils versent aux gros opérateurs, puisqu’ils participent par ce biais aux investissements de ces derniers. Cette mesure permettrait de neutraliser, pour les tout petits opérateurs, l’effet de l’augmentation de la taxe sur les opérateurs de communication électronique. J’ajoute que ces petits opérateurs ont, depuis le début, été à l’origine d’un certain nombre d’innovations techniques et commerciales, notamment en matière de forfaits.

Mme la Rapporteure générale. Vous évoquez les petits opérateurs, mais ceux dont le chiffre d’affaires est inférieur à 5 millions d’euros sont déjà exonérés du paiement de la taxe. Quel est le chiffre d’affaires moyen des petits opérateurs dont vous parlez ?

M. Jean-Marie Beffara. Ils sont une dizaine ; le chiffre d’affaires de chacun d’entre eux est donc compris en moyenne entre 10 et 15 millions d’euros.

Mme la Rapporteure générale. S’ils sont une dizaine à se partager un chiffre d’affaires de 1 milliard d’euros, chacun d’entre eux réalise en moyenne un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros. On ne peut donc pas dire qu’il s’agit de petits opérateurs !

M. Charles de Courson. Les grands opérateurs, qui disposent d’un réseau, bénéficient d’un avantage fiscal, puisqu’ils peuvent déduire de l’assiette de la taxe leurs dotations aux amortissements, soit une réduction d’environ 50 %, alors que les MVNO ne peuvent pas bénéficier de cet avantage, puisqu’ils n’ont pas de réseau.

Mme la Rapporteure générale. S’ils n’ont pas de réseau, ils n’ont pas d’investissements à amortir !

M. Charles de Courson. Mais, contrairement aux autres, ils ne bénéficient pas de la réduction de la taxe. Or, il est nécessaire de rétablir une égalité entre les MVNO et les opérateurs qui disposent de réseaux.

M. Jean-Marie Beffara. En effet, les MVNO n’investissent pas, mais, dans le loyer qu’ils versent aux opérateurs munis d’un réseau, la dotation aux amortissements est en partie prise en compte.

Mme la Rapporteure générale. Tout d’abord, des entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros ne peuvent pas, je le répète, être considérées comme de petits opérateurs. Ensuite, les avantages fiscaux visent à soutenir l’investissement. Les entreprises qui font du crédit-bail et ont une activité de location sont dans la même situation que ces petits opérateurs : n’étant pas propriétaires, elles ne peuvent pas déduire leurs investissements. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements CF 170 et CF 246.

Puis elle examine l’amendement CF 202 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Les papiers, emballages, imprimés non sollicités, déchets électroniques ou l’ameublement sont soumis à des dispositifs de responsabilité élargie du producteur (REP), c’est-à-dire à une taxe acquittée par les « metteurs sur le marché », dont le produit permet aux collectivités de financer la filière de traitement des déchets. Cependant, les produits qui ne sont pas recyclables ne sont pas soumis à cette taxe. Autrement dit, les produits les plus vertueux sont défavorisés par rapport aux produits les moins vertueux. Nous proposons donc de soumettre également ces derniers à une taxe minimale, afin de rétablir une forme de justice entre les entreprises qui s’inscrivent dans l’économie circulaire et celles qui ne le font pas. Je précise qu’il ne s’agit pas de créer une charge supplémentaire, mais de procéder à un transfert de charges puisque, au bout du compte, l’entreprise répercutera sur le consommateur la charge supplémentaire qui lui est imputée. Non seulement cette mesure vertueuse contribuerait à la baisse des prélèvements obligatoires, mais cette charge serait mieux acceptée par les usagers qu’elle ne l’est par les contribuables. Cet amendement n’a donc que des avantages !

Mme la Rapporteure générale. Nous avons déjà examiné cet amendement à de multiples reprises et, chaque fois, nous nous sommes demandé ce qu’est un produit « générateur de déchets », puisque tout produit peut l’être. Avis défavorable.

M. Éric Alauzet. Tous les produits terminent dans une poubelle. Ceux qui sont jetés dans les poubelles jaunes sont recyclables : ils bénéficient d’une filière REP et les metteurs sur le marché sont mis à contribution. Ceux qui finissent dans les poubelles grises sont soit incinérés, soit jetés dans une décharge : ce sont les produits générateurs de déchets. Il s’agit de ceux qui échappent aux filières de recyclage. Il n’est pas très difficile de faire la différence entre les uns et les autres.

La commission rejette l’amendement CF 202.

Puis elle est saisie de l’amendement CF 245 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. L’amendement précédent avait trait à la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) amont, celle que le metteur sur le marché paie ; celui-ci porte sur la TGAP aval, qui concerne les déchets incinérés ou enfouis en décharge. En effet, dans le cadre du Grenelle de l’environnement, on a créé une TGAP sur l’incinération, qui augmente progressivement, et une TGAP sur la mise en décharge, qui est beaucoup plus importante puisqu’il existe une hiérarchie dans le traitement des déchets : plus le déchet est évité, trié, recyclé, moins on paie. Cette TGAP « incinération et décharge » fait l’objet de réfactions si les installations sont performantes, peu polluantes, etc. Or, l’objectif est atteint par la quasi-totalité des collectivités, de sorte que l’on peut considérer que ces modulations sont caduques. Le moment est donc venu d’inscrire cette TGAP dans la hiérarchie des déchets : ces réfactions ne doivent plus dépendre de la performance des installations, mais du niveau de tri des déchets.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable à cet amendement qui soulève quatre questions. Il présente tout d’abord un risque de rupture du principe d’égalité devant les charges publiques entre redevables de la taxe, du fait du tarif privilégié qui serait prévu lorsque les déchets viennent de collectivités locales ayant des modes de gestion « performants en termes de la valorisation matière des déchets ». Ensuite, le caractère vertueux des pratiques des collectivités locales ne pourra pas réellement être contrôlé par l’administration des douanes. Quant au barème proposé, il est imprécis et crée un risque d’incompétence négative. Enfin, le dispositif est compliqué, de sorte que nous n’avons pas été en mesure d’en évaluer l’impact financier.

M. Éric Alauzet. S’agissant des deux premiers arguments, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) a créé une matrice du nom de ComptaCoût qui permet de calculer les quantités de déchets dans chacune des filières. Nous disposons donc des éléments de base suffisants pour procéder à cette évaluation. Concernant l’imprécision du barème proposé, je ne suis pas en mesure de vous répondre tout de suite. Enfin, le curseur peut être placé de sorte que l’impact financier de la mesure soit neutre.

J’avais par ailleurs proposé, dans un amendement qui a été déclaré irrecevable, que le ministère des finances s’empare de cette question et en fasse l’expertise : ainsi pourrait s’affirmer la volonté politique nécessaire pour faire évoluer ces modulations.

Le comité pour la fiscalité écologique et le Conseil national des déchets ont mené pendant deux ans un travail de réflexion sur cette disposition dans le cadre du Grenelle de l’environnement. Ce n’est donc pas moi qui ai rédigé cet amendement seul dans mon coin.

La commission rejette l’amendement CF 245.

Puis elle examine l’amendement CF 196 de M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA) telles qu’AIRPARIF en Île-de-France, ont des problèmes de financement, car les collectivités locales s’en désengagent progressivement, alors même que nous leur confions des tâches nouvelles, notamment en matière de lutte contre le dérèglement climatique. Nous proposons donc de permettre aux entreprises soumises à la TGAP d’effectuer des versements libératoires plus importants.

Mme la Rapporteure générale. Nous avons déjà examiné cet amendement dans le cadre du projet de loi de finances.

M. Denis Baupin. On m’avait alors demandé de le redéposer en loi de finances rectificative !

Mme la Rapporteure générale. Effectivement, car l’ensemble des mesures liées à la Conférence de Paris sur les changements climatiques (COP21) a vocation à y être intégré. Vous proposez qu’à partir de 2017, le plafond de 171 000 euros soit appliqué non plus par entreprise exploitante, mais par installation, ce qui élargirait les possibilités de déduction. À ce stade, je ne dispose d’aucune évaluation des pertes de recettes pour l’État, mais je ne suis pas certaine qu’elles soient très élevées. J’émets donc un avis de « sagesse moins » à cet amendement.

La commission rejette l’amendement CF 196.

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Article additionnel après l’article 28
Élargissement de la taxe générale sur les activités polluantes
au gazole non routier

La commission en vient à l’amendement CF 4 de M. Jean-Yves Caullet.

M. Christophe Caresche. Cet amendement, qui a trait aux biocarburants comme les trois qui suivent, résulte d’un travail accompli par Jean-Yves Caullet à la commission du développement durable après consultation des acteurs concernés. Il vise à élargir l’assiette de la TGAP au gazole non routier. L’objectif est d’inciter les distributeurs à incorporer des biocarburants dans ce gazole non routier dans la mesure où l’incorporation de 7,7 % leur permettrait d’être totalement exonérés de TGAP. Cette mesure est déjà applicable en Allemagne et n’aurait pas d’incidence sur les recettes de la TGAP, puisque les industriels français considèrent qu’ils ont la capacité de faire face à ce nouveau marché.

Suivant l’avis favorable de la Rapporteure générale, la commission adopte l’amendement CF 4 (amendement 335).

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Après l’article 28

La commission examine l’amendement CF 192 de M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. Nous proposons que les biocarburants d’origine animale puissent être comptabilisés, au-delà de ce que l’on appelle le double comptage qui donne lieu à exonération de TGAP, en compte simple — ce dernier étant aujourd’hui assuré pour l’essentiel par les biocarburants d’origine végétale. Par ailleurs, cet amendement tend, en instaurant un principe de traçabilité, à lutter contre la fraude et favorise donc le renforcement de la qualité des matières premières.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable. Sur le plan rédactionnel, l’exigence de traçabilité est insuffisamment précisée. D’autre part, vous créez une distorsion entre la filière végétale et la filière animale des biocarburants : je ne suis pas certaine que ce soit opportun dans le contexte actuel de notre agriculture.

L’amendement CF 192 est retiré.

La commission est saisie de l’amendement CF 38 de M. Jean-Yves Caullet.

M. Christophe Caresche. L’exigence de traçabilité des matières premières étant importante pour éviter des importations massives de produits de mauvaise qualité, notamment d’huiles usagées recyclées, nous proposons de la renforcer tout au long de la chaîne de valeur en octroyant un avantage fiscal, dont les modalités seraient définies par voie réglementaire.

Mme la Rapporteure générale. Je comprends votre intention, mais cet amendement présente un risque d’incompétence négative, cette « exigence de traçabilité » n’étant pas définie. Je vous suggère donc de le retirer. J’émettrai en revanche un avis de sagesse concernant l’amendement CF 39 qui suit.

L’amendement CF 38 est retiré.

La commission en vient à l’amendement CF 39 de M. Jean-Yves Caullet.

M. Charles de Courson. Cet amendement est-il compatible avec le droit européen ? Ne risque-t-on pas d’être accusé d’opérer une discrimination entre les importations et la production nationale ? De plus, dans l’exposé sommaire, les auteurs de l’amendement soulèvent le cas des huiles usagées, mais il en existe bien d’autres : peut-on raisonnablement accepter d’assimiler à des biocarburants renouvelables des huiles d’origine pétrolière ?

La commission rejette l’amendement CF 39.

Puis elle aborde l’amendement CF 187 de Mme Eva Sas.

M. Éric Alauzet. Compte tenu de l’abandon de l’écotaxe nationale et du débat qui a suivi, nous proposons de laisser la possibilité aux régions d’instaurer une écotaxe, dans une fourchette de prix fixée entre 0,025 et 0,20 euro par kilomètre.

Mme la Rapporteure générale. Nous avons déjà examiné un amendement du même type dans le cadre du projet de loi de finances et, pour les mêmes raisons, j’y suis défavorable.

La commission rejette l’amendement CF 187.

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Article additionnel après l’article 28
Instauration d’une taxe sur le chiffre d’affaires des entreprises de transformation des produits carnés

La commission examine l’amendement CF 229 de M. Michel Vergnier.

M. Yves Daniel. La crise que traverse la filière de l’élevage a conduit, au mois de juin dernier, le ministre de l’agriculture à demander à l’ensemble des acteurs économiques de faire preuve de responsabilité afin que les prix d’achat des animaux retrouvent un niveau suffisamment rémunérateur pour les producteurs. Si ces initiatives ont permis une légère augmentation de la cotation de la viande, notamment au travers du plan de soutien exceptionnel pour l’élevage, les objectifs fixés sont encore loin d’être atteints et les producteurs peinent à obtenir une juste rémunération. De fait, le partage de la valeur est inéquitable et s’effectue au détriment des éleveurs.

Aussi, cet amendement vise à la création d’une taxe exceptionnelle assise sur le chiffre d’affaires des entreprises de transformation de produits carnés dépassant les 250 millions d’euros, seuil qui avait été retenu lors de l’instauration de la contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés, et par ailleurs suffisamment élevé pour ne pas concerner les producteurs transformateurs, les petits abattoirs et les bouchers charcutiers. À l’instar de la contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés, le taux serait établi à 5 %.

Le produit de cette taxe permettrait d’abonder un fonds de soutien conjoncturel aux éleveurs français en difficulté. Ce fonds serait destiné non seulement à court terme à soutenir le revenu des agriculteurs, mais encore, à plus long terme, à abonder le soutien aux investissements et à la modernisation des élevages. Il pourrait également soutenir les initiatives prises dans les territoires pour favoriser les circuits courts et l’approvisionnement local de la restauration collective.

Mme la Rapporteure générale. Je comprends l’idée qui sous-tend votre amendement, et qui a été abordée lors de la table ronde organisée par le ministre de l’agriculture avec les distributeurs, les transformateurs et les agriculteurs. Les taxes sur le chiffre d’affaires me posent néanmoins toujours problème.

M. Charles de Courson. Cette mesure paraît incompatible avec la septième directive européenne sur la TVA.

Mme la Rapporteure générale. Nous appliquons pourtant déjà quelques taxes sur le chiffre d’affaires. Je comprends bien votre intention, monsieur Daniel, mais je souhaiterais que nous en débattions avec le ministre en séance publique. J’émets donc un avis de sagesse.

M. Charles de Courson. D’une part, l’instauration de cette taxe ne me semble pas conforme au droit européen : la septième directive prévoit en effet une exclusivité de la TVA comme taxation du chiffre d’affaires. D’autre part, sur le plan économique, l’assiette de la taxe est-elle le bon outil pour la filière ?

Mme Véronique Louwagie. L’amendement risque de créer un effet de seuil puisqu’il vise les entreprises dont le chiffre d’affaires excède le seuil de 250 millions d’euros par an.

La commission adopte l’amendement CF 229 (amendement 336).

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Article 29
Crédit d’impôt phonographique – Placement sous le règlement général d’exemption par catégorie (RGEC)

Le présent article prévoit que le bénéfice du crédit d’impôt pour la production, le développement ou la numérisation d’œuvres phonographiques ou vidéographiques musicales imputable sur l’impôt sur les sociétés, dit « crédit d’impôt phonographique », est subordonné au respect de l’article 53 du règlement général d’exemption par catégorie (RGEC) de la Commission européenne (246).

Cet article du RGEC, qui encadre d’une manière générale les aides en faveur de la culture et de la conservation du patrimoine, s’applique en particulier à « l’écriture, l’édition, la production, la distribution, la numérisation et la publication d’œuvres musicales et littéraires, y compris de traductions ».

Dans ce domaine, le point 9 de cet article 53 du RGEC prévoit que le montant maximal de l’aide ne doit pas excéder :

– soit la différence entre les coûts admissibles et les revenus actualisés du projet ;

– soit 70 % des coûts admissibles.

Le crédit d’impôt phonographique a fait l’objet d’un élargissement par le biais de l’article 50 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 (247). Son économie générale donc déjà fait l’objet d’une présentation exhaustive dans le cadre de l’examen de ce qui était l’article 23 du projet de loi initial, dont les éléments figurent dans le rapport relatif à l’examen de cette loi (248).

Le montant actualisé de la dépense fiscale liée au crédit d’impôt phonographique est retracé dans le tableau ci-après.

COÛT DU CRÉDIT D’IMPÔT PHONOGRAPHIQUE

(en millions d’euros)

2011

2012

2013

2014

2015 (prévisions)

2016 (prévisions)

2017 (prévisions)

2018

(prévisions)

2019

(prévisions)

2

6

6

10

11

11

13

13

13

I. L’APPLICATION DU RGEC AU CRÉDIT D’IMPÔT PHONOGRAPHIQUE

A. LES AIDES D’ÉTAT SONT EN PRINCIPE INTERDITES PAR LE DROIT EUROPÉEN AVEC PLUSIEURS EXCEPTIONS

De manière générale, l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) prévoit que :

– les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions sont par principe incompatibles avec le marché intérieur ;

– par dérogation, certaines aides limitativement énumérées sont compatibles avec le traité (aides à caractère social, aides destinées à remédier aux calamités naturelles, aides en faveur de l’ex-République démocratique allemande), tandis que d’autres « peuvent » être compatibles avec le traité, notamment « les aides destinées à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges et la concurrence dans l’Union dans une mesure contraire à l’intérêt commun ».

L’article 108 du même traité prévoit plusieurs mesures permettant la mise en œuvre de ces principes :

– la Commission européenne procède à l’examen « permanent » des régimes d’aides existants et propose les mesures utiles exigées par le développement progressif du marché intérieur ;

– elle peut décider que l’État doit supprimer ou modifier tout régime d’aide incompatible avec ce principe ;

– elle doit être informée, sous la forme d’une notification préalable réalisée « en temps utile » par les États membres, des projets tendant à instituer ou modifier des aides.

L’article 109 du même traité prévoit enfin que « le Conseil, sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, peut prendre tous règlements utiles en vue de l’application des articles 107 et 108 et fixer notamment les conditions d’applications de l’article 108, paragraphe 3, et les catégories d’aides dispensés de cette procédure », c’est-à-dire de la procédure de notification préalable mentionnée ci-dessus.

Pour la mise en œuvre pratique de ces principes, plusieurs dispositions établissent :

– un régime dit « de minimis » (249), qui définit un seuil d’aide par entreprise en-deçà duquel l’État membre n’est pas soumis à l’obligation de notification du dispositif, ce seuil étant fixé pour l’essentiel des cas à 200 000 euros sur trois exercices fiscaux ;

– le régime général fixé par le règlement général précité « d’exemption par catégorie » (RGEC) récemment modifié (250), qui prévoit une dérogation à l’obligation de notification applicable à plusieurs catégories d’aides (aides en faveur de la culture et de la conservation du patrimoine, aides à finalité régionale, aides en faveur des PME, aides à la formation, aides à la protection de l’environnement, aides aux œuvres audiovisuelles, etc.).

B. LE RGEC DÉFINIT LES CONDITIONS D’OCTROI DE CERTAINES AIDES SECTORIELLES

Conformément à son titre même, le RGEC tend à définir certaines catégories d’aides qui sont considérées par les autorités de l’Union européenne comme « compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité » et dispensées de notification à condition de ne pas dépasser certains plafonds d’aides.

L’article 4 du RGEC prévoit en particulier que celui-ci ne s’applique pas, en ce qui concerne les aides en faveur de la culture et de la conservation du patrimoine, lorsque l’aide dépasse :

– 100 millions d’euros par projet s’agissant des aides à l’investissement ;

– 50 millions d’euros par entreprise et par an pour les aides au fonctionnement.

Compte tenu du montant total du crédit d’impôt phonographique, le RGEC lui est donc applicable.

II. LES DISPOSITIONS DU RGEC EN MATIÈRE DE PRODUCTION PHONOGRAPHIQUE

A. L’ARTICLE 53 DU RGEC

L’article 53 prévoit que les aides en faveur de la culture et de la conservation du patrimoine sont compatibles avec le régime des aides d’État à condition d’être octroyées en faveur de certains objectifs et activités culturels identifiés, dont « l’écriture, l’édition, la production, la distribution, la numérisation et la publication d’œuvres musicales et littéraires, y compris de traductions ».

Dans ces domaines, les aides peuvent d’une manière générale prendre la forme d’aides à l’investissement, notamment d’aides à la construction ou à la modernisation d’infrastructures culturelles ou d’aides au fonctionnement.

Dans le domaine plus particulier des aides en faveur de la publication d’œuvres musicales et littéraires, le point 9 de cet article précise que les coûts admissibles à l’aide sont les coûts de publication de ces œuvres, y compris la rémunération des auteurs (coûts de droits d’auteurs), la rémunération des traducteurs, la rémunération des éditeurs, d’autres coûts d’édition (relecture d’épreuves, correction, révision), les coûts de mise en page et de prépresse et les coûts d’impression ou de publication en ligne.

Cet article prévoit en outre que le montant maximal de l’aide ne doit pas excéder :

– soit la différence entre les coûts admissibles et les revenus actualisés du projet. On comprend de cette formulation que, dans l’hypothèse où ces coûts sont supérieurs aux revenus du projet musical, donc dans le cas d’un projet musical déficitaire, le montant de l’aide ne peut avoir pour objet que de compenser ce déficit, sans créer un bénéfice qui ne serait assuré que par le biais de l’aide d’État ;

– soit 70 % des coûts admissibles dans les autres hypothèses.

B. LES EFFETS SUR LE SECTEUR PHONOGRAPHIQUE

Le présent dispositif conduit à prévoir un plafonnement par projet musical, alors que l’article 220 octies du code général des impôts en vigueur prévoit un plafonnement global par entreprise.

Le paragraphe VI du 1 ° de cet article prévoit en effet que la somme des crédits d’impôts calculés au titre des dépenses éligibles ne peut excéder 1,1 million d’euros par entreprise et par exercice.

La mise en œuvre de cet article du RGEC devait donc conduire à un plafonnement de l’aide pour les projets déficitaires mais aussi pour ceux qui sont bénéficiaires, afin que ce bénéfice ne résulte pas outre mesure du soutien public.

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La commission adopte l’article 29 sans modification.

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Article 30
Taux de TVA applicable aux produits d’origine agricole non transformés

Cet article vise à clarifier le champ d’application du taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 10 % aux opérations commerciales relatives aux produits d’origine agricole n’ayant subi aucune transformation, afin de mieux respecter les exigences du droit de l’Union européenne dans ce domaine et, ainsi, d’éviter l’apparition d’un contentieux entre la France et la Commission européenne.

La TVA, qui pèse d’une manière générale sur les livraisons de biens et prestations de services effectuées en contrepartie d’un prix par des opérateurs économiques agissant de manière indépendante, peut faire l’objet de taux réduits pour certaines opérations limitativement énumérées par la loi. En l’absence de mention législative spécifique, c’est le taux normal de TVA, fixé à 20 % en application de l’article 278 du code général des impôts, qui prévaut.

La liste des opérations pouvant faire l’objet d’un taux réduit de TVA (de 5,5 % ou de 10 %) est actuellement dressée par les articles 278-0 bis à 279 bis de ce code. Parmi ceux-ci, l’article 278 bis dresse la liste des produits d’origine agricole ou à usage agricole dont la vente fait l’objet d’un taux de 10 %. Cette liste comprend actuellement les opérations commerciales (251) relatives aux :

– produits agricoles, piscicoles ou avicoles non transformés, à l’exclusion des équidés qui ne sont « normalement pas » destinés à être utilisés pour la production agricole ou la fabrication d’aliments, cette formulation étant inspirée de l’annexe III de la « directive TVA » du 28 novembre 2006 (252). La précision relative aux chevaux a été insérée par la dernière loi de finances rectificative pour 2012 (253), à la suite d’un contentieux survenu avec la Commission européenne sur le champ d’application du taux réduit (qui était auparavant trop large pour respecter la directive) (254) ;

– bois de chauffage et autres produits issus de la sylviculture qui sont destinés au chauffage ;

– aliments destinés aux animaux (y compris les poissons et les abeilles) ;

– engrais, matières fertilisantes et produits phytopharmaceutiques dont l’utilisation est possible dans le cadre de l’agriculture biologique.

Comme pour d’autres opérations économiques auparavant soumises au taux de 5,5 %, la loi de finances rectificative pour 2011 du 28 décembre 2011 (255) a, en créant un second taux réduit de TVA à 7 % (couramment qualifié de « taux intermédiaire »), fait augmenter à 7 % le taux appliqué à ces produits à compter du 1er janvier 2012. Ce taux intermédiaire a ensuite été porté, d’une manière générale, de 7 % à 10 % à compter du 1er janvier 2014, comme l’avait prévu la dernière loi de finances rectificative pour 2012.

L’exposé des motifs du présent article indique que la Commission européenne a adressé à la France, le 26 mars 2015, un avis motivé lui enjoignant, s’agissant de l’application du taux réduit de TVA à la commercialisation des produits agricoles non transformés, de mettre sa législation en conformité avec le droit de l’Union européenne. Dans cet avis, la Commission estime en effet que la France ne respecte pas la directive TVA, car le 3° de l’article 278 bis du code général des impôts « offre une base légale à l’application en France d’un taux réduit de TVA aux produits d’origine agricole en général, sans tenir compte de leur usage ». Elle cite ainsi le cas de la laine et du duvet non transformés, ainsi que des céréales utilisées pour produire des biocarburants (qui eux, sont ensuite soumis aux taux normal de TVA) : tous ces produits agricoles non transformés devraient, d’après la Commission européenne, relever du taux normal de TVA et non d’un taux réduit.

Si l’on s’en tient au texte de la directive TVA, les États membres sont autorisés à soumettre à un taux réduit de TVA les opérations suivantes :

– les « livraisons de plantes vivantes et autres produits de la floriculture, y compris les bulbes, les racines et produits similaires, les fleurs coupées et les feuillages pour ornement » (en application de l’article 122 de la directive) ;

– les opérations économiques portant sur des « denrées alimentaires (y compris les boissons, à l’exclusion, toutefois, des boissons alcooliques) destinées à la consommation humaine et animale, les animaux vivants, les graines, les plantes et les ingrédients normalement destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires » (en application du point 1 de l’annexe III de la directive) ;

– les livraisons de biens et prestations de services portant sur une activité ou un produit « d’un type normalement destiné à être utilisé dans la production agricole » (en application du point 11 de cette annexe III).

II. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE OU BUDGÉTAIRE

L’évaluation préalable du présent article ne comporte aucune indication quant à la situation économique des professions concernées par la vente de ces produits agricoles non transformés, la mesure proposée ne devant pas réellement être répercutée sur les prix de vente de ces produits agricoles aux consommateurs finaux. Par ailleurs, le secrétariat d’État chargé du budget n’a pas été en mesure, faute de transmettre à la Rapporteure générale des informations complémentaires à ce sujet : il a en effet précisé ne pas disposer de données sur les recettes de TVA par secteur d’activité.

Il est toutefois utile, pour se faire une idée de la situation de ces secteurs d’activité, de rappeler que les professions concernées ont été confrontées à une première hausse du taux de TVA de 5,5 % à 7 % le 1er janvier 2012 ainsi qu’à d’une seconde hausse générale de ce taux de TVA, lorsque celui-ci a été porté de 7 % à 10 % le 1er janvier 2014. Ces changements ont parfois pu amener les commerces concernés à répercuter la hausse de taxe sur les prix de vente aux consommateurs finaux, au risque d’abaisser la demande de ces produits et le chiffre d’affaires des entreprises – par exemple dans le secteur de l’horticulture et de la floriculture.

Par ailleurs, la question du taux de TVA appliqué aux activités équestres est importante, en raison des craintes qui avaient été exprimées, au début de l’année 2014, d’une remise en cause intégrale de l’application du taux réduit dans ce domaine, à la suite de la décision, précédemment évoquée, qui avait été rendue le 8 mars 2012 par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). À cet égard, il convient de rappeler que les interprétations administratives requises pour résoudre les problèmes alors soulevés ont été présentées dans le Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) depuis le 30 janvier 2014 (Cf. infra).

III. LE DISPOSITIF PROPOSÉ ET LES ENJEUX JURIDIQUES

L’article adapte ponctuellement la rédaction de l’article 278 bis du code général des impôts, en matière d’application du taux intermédiaire de TVA aux produits agricoles non transformés, afin de résoudre le problème de conformité au texte de la directive TVA, qui a été soulevé par la Commission européenne dans son avis motivé – cette démarche visant à éviter l’engagement à l’encontre de notre pays d’un contentieux pour manquement devant la CJUE.

Il est ainsi proposé, pour ces produits d’origine agricole, de rapprocher la rédaction de l’article 278 bis du code général des impôts de celle de la directive, en procédant à deux changements :

– en précisant, au 3° de l’article, que le taux de 10 % ne s’applique qu’aux produits d’origine agricole, piscicole ou avicole non transformés « qui sont normalement destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ou dans la production agricole », alors que cette précision n’était jusqu’ici apportée que pour les seuls équidés. Cela signifie que les produits agricoles non transformés qui sont destinés à un autre usage – par exemple la laine, les peaux ou les plumes d’animaux destinés à la fabrication de vêtements, de matériel de ménage ou de produits liés à la literie –, n’entreraient plus dans le champ du taux de 10 %.

– pour éviter que ce changement n’aboutisse mécaniquement à faire sortir du champ d’application du taux de 10 % les ventes de produits horticoles, en complétant le 3° bis de l’article par une mention spécifiquement consacrée à ces produits et précisant, conformément au droit déjà applicable, que ces produits devront n’avoir « subi aucune transformation ». En effet, les produits horticoles n’étant normalement pas destinés à l’alimentation, contrairement à la condition qui sera désormais posée par le 3° de l’article, l’absence d’une mention législative particulière conduirait à leur appliquer le taux de TVA de 20 %.

La référence aux « produits de l’horticulture et de la floriculture d’ornement » paraît a priori respecter le champ prévu par l’article 122 de la directive TVA pour l’application du taux réduit à ces produits, puisque cet article cite les « livraisons de plantes vivantes et autres produits de la floriculture, y compris les bulbes, les racines et les produits similaires, les fleurs coupées et les feuillages pour ornement ». Il convient de souligner que, comme actuellement, les ornements non végétaux ne relèvent pas du taux réduit de TVA.

D’une manière générale, l’intention du législateur n’est pas de modifier le champ d’application du taux intermédiaire de TVA en matière d’horticulture et de floriculture. Il en est de même s’agissant de l’application de ce même taux et du taux normal aux opérations qui concernent les équidés – les précisions requises pour tenir compte de la jurisprudence de la CJUE ayant été apportées le 31 janvier 2014 par l’administration fiscale et présentées dans le BOFiP. Dans ce dernier, l’administration fiscale précise bien, depuis le 30 janvier 2014 (256), les conditions d’application du taux de 10 % pour les centres équestres
– ce taux réduit étant applicable pour le droit d’accès aux installations sportives et les activités d’animation et de découverte, mais pas pour des activités d’enseignement ou de dressage susceptibles d’y être organisées. Le secrétariat d’État chargé du budget a confirmé que la mesure proposée par cet article n’aurait aucun impact sur les taux de TVA applicables aux activités équestres.

IV. L’IMPACT ÉCONOMIQUE ATTENDU

L’évaluation préalable de l’article indique que, la mesure concernant « pour l’essentiel [des] opérations entre assujettis » à la TVA, elle ne devrait avoir aucun effet sur la croissance, la compétitivité, la concurrence ou les comportements.

La Rapporteure générale constate que, si la modification du champ d’application du taux de 10 %, telle qu’elle est proposée, obéit à des considérations juridiques et non économiques, elle devrait tout de même conduire à un relèvement du taux de TVA appliqué à leurs ventes par les personnes commercialisant des produits agricoles non transformés, qui ne relèvent pas de la filière horticole et ne sont pas destinés à l’alimentation. En pratique, cela devrait concerner essentiellement des produits agricoles bruts, non comestibles, tels que des peaux d’animaux ou des plumes, qui sont essentiellement acquis, non par des consommateurs finaux, mais par d’autres entreprises – dans le secteur de l’habillement ou de la literie par exemple. On peut donc penser que les entreprises acquérant ces produits et supportant, de ce fait, une TVA alourdie, pourront neutraliser l’essentiel de son impact économique en déduisant davantage de TVA d’amont (la TVA supportée sur leurs propres achats) du montant de TVA collectée auprès des consommateurs finaux. L’impact économique et budgétaire de la mesure devrait, dans ce cas, être effectivement marginal.

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La commission en vient à l’amendement CF 90 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. L’article 30, qui tend à mettre notre droit en conformité avec celui de l’Union européenne, vise les produits de l’horticulture et de la floriculture, mais sommes-nous sûrs que les produits de la sylviculture n’ayant subi aucune transformation, tels les arbres vendus sur pied, verront leur taux de 10 % de TVA maintenu ?

Mme la Rapporteure générale. Je crains que votre amendement ne soit contraire au droit de l’Union européenne. En matière végétale, la directive TVA ne permet aux États membres d’appliquer un taux réduit que dans quelques cas : pour les produits destinés au bois de chauffage, comme le prévoit déjà la loi, pour les produits destinés à l’alimentation humaine ou animale ou pour les plantes vivantes et autres produits de la floriculture, y compris les bulbes et les racines. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Je retire mon amendement que je redéposerai en vue de la séance.

L’amendement CF 90 est retiré.

Puis la commission adopte l’article 30 sans modification.

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Après l’article 30

La commission est saisie de l’amendement CF 204 de Mme Isabelle Attard.

M. Éric Alauzet. Cet amendement vise à limiter l’application du taux de TVA réduit sur les livres électroniques à ceux qui sont distribués en format électronique ouvert.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 204.

La commission aborde les amendements identiques CF 162 de M. Charles de Courson et CF 172 de Mme Marie-Christine Dalloz.

M. Charles de Courson. L’amendement CF 162 vise à adapter un dispositif fiscal existant au changement de statut juridique des services à la personne introduit par l’article 32 bis du projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement, dont l’entrée en vigueur est prévue au début de l’année 2016. Afin que les organismes, entreprises ou associations, actuellement agréés, et qui basculeront demain dans le champ de l’autorisation, ne perdent pas le bénéfice de l’application du taux réduit de TVA à 5,5 %, il est proposé de modifier les dispositions du code général des impôts.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. L’amendement CF 172 est défendu.

Mme la Rapporteure générale. Le projet de loi de finances que vous citez étant encore en navette, il me semble préférable d’attendre que le texte définitif soit disponible pour aviser.

Les amendements CF 162 et CF 172 sont retirés.

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Article additionnel après l’article 30
Extension de la déductibilité de la TVA à l’essence utilisée
par les véhicules de société

La commission examine l’amendement CF 180 de M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Le système actuel de récupérabilité de la TVA est tel que 96 % des véhicules de société roulent au gazole, y compris s’ils fonctionnent en ville. Or, non seulement les véhicules diesel sont peu adaptés au milieu urbain, mais en outre, la pollution de l’air y est bien plus importante et bien plus nocive. Aujourd’hui, les professionnels eux-mêmes demandent une neutralité fiscale pour pouvoir avoir le choix. La mesure proposée aurait un faible coût puisque la taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE) applicable à l’essence est plus importante que celle applicable au gazole. En votant cette mesure, nous enverrions un signal important et encouragerions une évolution des comportements.

Mme la Rapporteure générale. Votre amendement vise à faire disparaître l’avantage dont bénéficient les véhicules diesel pour les flottes d’entreprise. Comme on ne peut supprimer cet avantage qui est encadré par la directive européenne, vous proposez de le transférer sur les véhicules essence. Mais vous proposez de faire passer en un an la déductibilité de 0 à 80 %, ce qui semble un transfert assez rapide. De plus, la référence aux essences est très générale au regard des dispositions du tableau B de l’article 265 du code des douanes — qui vise également les essences d’aviation. Enfin, cette mesure a un coût qui pourrait, peut-être, être comprise entre 20 et 50 millions d’euros.

M. Denis Baupin. Selon le secrétaire d’État au budget, ce coût serait au maximum de 20 millions d’euros.

M. Charles de Courson. Denis Baupin a raison : nous ne pouvons minorer les taxes sur les essences oxygénées, augmenter celles qui ne le sont pas et réajuster la fiscalité de l’essence et du gazole, tout en maintenant une disposition qui aboutit à ce que les flottes de société soient composées à plus de 90 % de véhicules diesel. C’est là la conséquence d’un choix fiscal complètement erroné. Je suis sensible aux arguments de la Rapporteure générale, mais j’ai cru comprendre que l’amendement pourrait être retiré et corrigé afin de prévoir un lissage progressif de la déductibilité, à raison de 20 % par an sur cinq ans, par exemple. Si mes collègues Verts corrigeaient leur amendement dans ce sens, je le cosignerais volontiers.

M. Éric Alauzet. Cela ne coûtera guère puisqu’une entreprise, au lieu d’acheter une voiture diesel donnant droit à remise de TVA, achètera un véhicule essence donnant droit à une remise identique. Il convient d’assurer la cohérence de l’ensemble des dispositions que nous adoptons. J’ai d’ailleurs été étonné de constater aujourd’hui que nous avions augmenté d’un centime le prix de l’essence ordinaire.

La commission adopte l’amendement CF 180 (amendement 337).

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Article 31
Amortissement exceptionnel des investissements des entreprises
dans les PME innovantes

Le présent article modifie le régime d’amortissement exceptionnel des investissements des entreprises dans les petites et moyennes entreprises (PME) innovantes, sous forme de souscription directe au capital ou de parts de fonds d’investissement, constitutives d’activités parfois désignées par les termes anglais de « corporate venture ».

Les changements introduits sont au nombre de quatre et font suite à des échanges entre la Commission européenne et le Gouvernement dans le cadre de la procédure de notification du dispositif :

– introduction d’une « limite d’âge » pour les entreprises éligibles ;

– recours à l’expertise de la Banque publique d’investissement (Bpifrance) pour la définition des PME innovantes, alternativement au critère de la part des dépenses de recherche dans les charges d’exploitation ;

– appréciation au niveau du groupe du pourcentage maximum de 1 % d’actif plafonnant la valeur des titres, parts ou actions détenus qui font l’objet d’un amortissement ;

– renvoi au régime des fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI) pour la définition des entreprises innovantes éligibles, lui-même modifié par l’article 13 du présent projet de loi de finances rectificative (Cf. page 271).

Ce mécanisme de soutien à l’investissement dans les PME innovantes devrait coûter, en régime de croisière, i.e. à partir de 2020, 200 millions d’euros par an.

I. LE DROIT EN VIGUEUR

Créé par l’article 15 de la loi de finances rectificative pour 2013 (257), le régime d’amortissement en faveur des investissements d’entreprises dans les PME innovantes, dits corporate ventures, n’est toujours pas entré en vigueur.

Il a déjà été modifié une première fois par la seconde loi de finances rectificative pour 2014 (258), pour tenir compte de l’avis de la Commission européenne rendu à la suite de la notification de ce dispositif, constitutif d’une aide d’État.

A. UN RÉGIME D’AMORTISSEMENT POUR SOUTENIR L’INVESTISSEMENT DANS LES PME INNOVANTES

L’article 15 de la loi de finances rectificative pour 2013 a instauré, à l’article 217 octies du code général des impôts (CGI), un régime d’amortissement exceptionnel, sur cinq ans, des sommes versées par les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés (IS) pour la souscription au capital des PME innovantes ou la souscription de fonds de capital-risque dont l’actif est majoritairement constitué de titres de PME innovantes.

Par exemple, si une entreprise a investi 100 000 euros dans une PME innovante, elle peut, en vertu de ce régime, amortir cet investissement en réduisant de 20 000 euros son résultat annuel imposable pendant cinq ans.

Ce dispositif, qui déroge au principe selon lequel les valeurs mobilières ne peuvent pas être amorties, a cependant été soumis à plusieurs conditions.

N’ont été rendus éligibles que les investissements réalisés :

– dans une PME innovante, c’est-à-dire une PME au sens du droit de l’Union européenne, établie sur le territoire de cette dernière et ayant réalisé des dépenses de recherche représentant au moins 15 % de ses charges, ou justifiant la création de produits, procédés ou techniques labellisés par Bpifrance ;

– dans un fonds commun de placement à risques (FCPR), un fonds professionnel de capital investissement (FPCI), ou une société de capital-risque (SCR), dont plus de 60 % des titres sont investis dans des PME innovantes et dont 40 % des titres correspondent à des souscriptions directes au capital ou à des actions reçues en contrepartie d’obligations converties et non à l’achat d’actions sur le marché secondaire.

En outre, plusieurs précautions ont été introduites pour limiter les effets d’aubaine ou les effets indésirables :

– afin de ne pas inciter au rachat des PME innovantes par de grandes entreprises, l’entreprise qui investit ne peut détenir plus de 20 % du capital ou des droits de vote de la PME innovante cible de l’investissement, directement ou indirectement via un fonds ;

– la valeur des actifs pouvant faire l’objet de l’amortissement exceptionnel ne peut pas dépasser 1 % du total de l’actif de l’entreprise investisseur ;

– pour éviter des situations de double non-imposition, l’article 217 octies prévoit que les entreprises investisseurs ne peuvent pas cumuler le bénéfice de l’amortissement des titres et la déduction des provisions pour dépréciations de ces mêmes titres ;

– en cas de cession moins de deux ans après l’acquisition des titres, l’amortissement doit être réintégré au résultat imposable, majoré d’un intérêt de retard, et ce, afin de favoriser un investissement de long terme dans les PME innovantes.

Dans la mesure où il constitue une aide fiscale à l’investissement dans certaines entreprises, ce dispositif a été notifié par la France à la Commission européenne début 2014. La réponse de cette dernière a posé des conditions à son entrée en vigueur.

B. UNE PREMIÈRE MISE EN CONFORMITÉ AVEC LE DROIT EUROPÉEN

Le 22 janvier 2014, la Commission européenne a publié de nouvelles lignes directrices en matière d’aides d’État visant à promouvoir les investissements en faveur du financement des risques (259). En application de celles-ci, la Commission a demandé plusieurs modifications du régime d’amortissement exceptionnel de l’article 217 octies du CGI.

Le Gouvernement a donc présenté un amendement au cours de la discussion en première lecture à l’Assemblée nationale du projet de seconde loi de finances rectificative pour 2014 (260), devenu l’article 76 de cette loi.

● Le dispositif a été ouvert aux sommes versées pour la souscription de parts ou d’actions de fonds ou de sociétés de capital-risque établis dans l’Espace économique européen (Union européenne, Islande, Norvège et Liechtenstein), sous réserve qu’ils remplissent les conditions exigées pour les fonds établis en France. Ces fonds ne doivent pas nécessairement détenir des parts de PME françaises.

● En application des lignes directrices précitées, le régime a été limité à dix ans. Toujours en vertu des lignes directrices (§ 24), toute prorogation imposera la réalisation d’une évaluation de l’efficacité du régime pendant sa mise en œuvre et une nouvelle évaluation ex ante pour sa prorogation.

● Les critères permettant de qualifier une PME comme innovante ont été réduits au seul critère de la part des dépenses de recherche dans les charges d’exploitation, le seuil passant de 15 % à 10 % sur trois exercices.

● Ont été exclues du dispositif :

– les PME cotées sur un marché réglementé, à l’exception de celles cotées sur des plateformes de négociation alternatives comme par exemple Alternext ;

– les entreprises en difficulté au sens des lignes directrices européennes, ces dernières bénéficiant d’un encadrement spécifique en matière d’aides d’État.

● Le montant des souscriptions éligibles par entreprise bénéficiaire (la PME innovante) a été plafonné à 15 millions d’euros, toujours en application des lignes directrices, qui renvoient elles-mêmes au plafond fixé par l’article 21 § 9 du nouveau règlement général d’exemption par catégorie (RGEC) (261).

● Un possible effet d’aubaine a été supprimé en écartant la possibilité de bénéficier de l’amortissement exceptionnel pour les entreprises détenant déjà des titres de la PME innovante et pour lesquels l’amortissement n’a pas été pratiqué. À l’initiative du rapporteur général de sa commission des finances, avec avis favorable du Gouvernement, le Sénat a toutefois tempéré cette restriction, en ouvrant le bénéfice de l’amortissement « dès lors que l’investissement nouveau est réalisé par l’intermédiaire d’un fonds dont les décisions d’investissement sont prises en toute indépendance du souscripteur et qui investit pour la première fois dans les PME innovantes en question ».

● Les effets des rachats de titres par les fonds de capital-investissement ont été neutralisés. En effet, l’objectif du dispositif est d’inciter au financement proprement dit des PME innovantes, c’est-à-dire à l’injection de capital nouveau. Or, les fonds de capital-investissement et les sociétés de capital-risque combinent dans leur actif à la fois des titres souscrits au moment de leur émission (de l’argent frais) et des rachats de titres déjà émis. Cela permet à un fonds de prendre le relais d’un autre fonds mais ce n’est pas ce que l’aide fiscale doit encourager. Pour ouvrir droit au dispositif, le pourcentage de 40 % d’actif investi en souscriptions au capital de PME innovantes ne doit pas être abaissé par les rachats de titres et chaque PME innovante entrant dans l’actif du fonds ou de la SCR doit recevoir un montant de souscriptions au moins égal au montant des rachats effectués par le fonds dans son capital. C’est pourquoi le 3° du I de l’article 217 octies a été complété par un alinéa ainsi rédigé : « Lorsque les fonds ou sociétés mentionnés aux 2° et 3° procèdent à des rachats de titres, parts ou actions d’une petite ou moyenne entreprise innovante entrant dans la composition de leur actif au titre du premier pourcentage mentionné au même 2°, ils procèdent, au cours de leur période d’investissement, à une souscription au capital de cette même entreprise à hauteur d’au moins la valeur de ces rachats. »

C. DE NOUVELLES DIFFICULTÉS

Ces nouvelles dispositions ont été notifiées à la Commission européenne début 2015. Cette dernière a subordonné l’entrée en vigueur du régime à l’ajout d’une nouvelle condition tenant au stade de développement de l’entreprise, qui ne doit pas dépasser dix ans.

Cette limitation aux entreprises de moins de dix ans ne résulte pas des limites posées par le RGEC mais des principes découlant des lignes directrices applicables en matière de financement des risques ; le Gouvernement ayant opté pour le maintien du présent dispositif sous le régime de ces lignes directrices, qui impose notamment une notification lors de chaque changement de ces régimes, il en résulte une plus grande latitude de négociation qui s’est traduite par cette limite de dix ans.

Par ailleurs, d’après l’évaluation préalable fournie par le Gouvernement, les échanges intervenus dans le cadre de la notification du régime début 2015 et ceux, concomitants, sur le régime de réduction d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) des particuliers ont permis d’obtenir que le caractère innovant de la PME puisse être évalué par Bpifrance. Actuellement, pour être considérée comme innovante, une PME doit avoir réalisé des dépenses de recherche représentant au moins 10 % des charges d’exploitation de l’un au moins des trois exercices précédant celui au cours duquel intervient la souscription. Il convient donc d’introduire la référence alternative à la certification par Bpifrance qui était souhaitée à l’origine par le Gouvernement.

En outre, la mise en conformité avec le droit européen du régime de réduction d’ISF en contrepartie d’un investissement dans une PME au regard des nouvelles lignes directrices sur le financement des risques impose de modifier des dispositions du code monétaire et financier concernant les FCPI. C’est l’objet de l’article 13 du présent projet de loi de finances rectificative (Cf. page 271). Une coordination est souhaitable avec l’article 217 octies qui fait référence à ces fonds.

Enfin, en raison d’un plafonnement de l’investissement en fonction du seul montant de l’actif de l’entreprise investisseur, le dispositif pourrait ne pas atteindre son objectif. En effet, cette limitation à 1 % de l’actif de l’investisseur ne tient pas compte du choix des groupes de spécialiser une ou plusieurs filiales dans l’activité de capital-investissement.

II. LE DROIT PROPOSÉ

A. LE DISPOSITIF

Le du I procède d’abord à une coordination avec l’article L. 214-30 du code monétaire et financier relatif aux FCPI dans la numérotation qui résultera des modifications prévues à l’article 13 du présent projet de loi de finances rectificative.

Le assouplit et précise les modalités d’application de l’obligation faite aux structures d’investissement intermédiaire (FCPR, FPCI ou SCR) de souscrire des titres nouveaux à la suite de rachats de titres. L’obligation de souscrire sera appréciée sur la durée de vie du fonds, ou sur une période de dix ans suivant le rachat pour une SCR puisque celles-ci n’ont pas de durée de vie limitée, et non plus sur la seule période d’investissement. En contrepartie, le suivi de l’obligation est aussi renforcé : les souscriptions ultérieures au rachat doivent être formalisées dans le plan d’entreprise de la PME innovante et l’engagement du fonds ou de la SCR de souscrire des titres nouveaux est formalisé par une déclaration.

Le II procède à une nouvelle définition de la PME innovante par le remplacement des deux derniers alinéas de l’article 217 octies du CGI par six alinéas. Les PME innovantes intéressées sont toujours celles qui « ont leur siège dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ». Les sociétés cotées et les entreprises en difficulté sont toujours exclues du dispositif pour les raisons précédemment exposées.

Le de l’article 217 octies du CGI dans sa nouvelle rédaction indique que la PME innovante doit répondre à au moins l’un des deux critères fixés au 3° du A du I de l’article L 214-30 du code monétaire et financier dans sa rédaction issue du présent projet de loi de finances rectificative à savoir :

– avoir réalisé des dépenses de recherche à hauteur de 10 % des charges d’exploitation pendant l’un des trois exercices précédent, les dépenses de recherche étant définies comme les dépenses prises en compte pour le calcul du crédit d’impôt en faveur de la recherche (article 244 quater B du CGI), à l’exception des dépenses liées à l’élaboration de nouvelles collections dans les entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir ;

– démontrer à un organisme désigné par décret (Bpifrance) qu’elle est en mesure de développer des produits innovants et qui présentent un risque d’échec technologique ou industriel, cette labellisation étant valable trois ans.

Le nouveau 5° de l’article 217 octies apporte des précisions sur le stade de développement de l’entreprise. Le régime d’amortissement est donc restreint aux entreprises de moins de dix ans, à partir de leur première vente commerciale, définie soit par Bpifrance, soit décomptée à partir de l’ouverture de l’exercice suivant celui au cours duquel le chiffre d’affaires de l’entreprise a dépassé pour la première fois 250 000 euros.

Il est précisé que l’ensemble des conditions s’apprécient à la date de la souscription ou du rachat des titres. Dans le cas des souscriptions effectuées à la suite d’un rachat par une structure d’investissement intermédiaire, les conditions sont considérées comme remplies à la date des souscriptions si elles l’étaient au moment du rachat.

Enfin, le dernier alinéa du paragraphe II de l’article 217 octies, dans sa nouvelle rédaction, prévoit un mécanisme de sortie progressive des titres des PME innovantes nouvellement cotées de l’actif des fonds et SCR ouvrant droit au régime d’amortissement. Si la PME innovante est cotée après la souscription ou le rachat de ses titres, ces derniers peuvent continuer à être pris en compte pour calculer le quota d’investissement mentionné au 2° du I de l’article 217 octies pendant cinq ans. Passé ce délai, les titres de la PME innovante sortent du quota d’investissement, quand bien même il s’agissait bien d’une PME innovante à la date de la souscription ou du rachat.

Enfin, le paragraphe III complète l’article 217 octies par un alinéa permettant d’apprécier au niveau du groupe le pourcentage maximum de 1 % d’actif plafonnant la valeur des titres, parts ou actions détenus qui font l’objet d’un amortissement.

B. UN IMPACT MODÉRÉ SUR LE RÉGIME INITIALEMENT PRÉVU

Lors de la présentation du dispositif, à l’automne 2013, le coût annuel de la mesure avait été évalué à 10 millions d’euros la première année, ce montant croissant de manière progressive (40 millions d’euros la deuxième année, 80 millions d’euros la troisième) jusqu’à 200 millions d’euros en régime de croisière.

Selon l’évaluation préalable du Gouvernement, les modifications apportées par le présent article au régime d’amortissement exceptionnel en faveur des investissements dans les PME innovantes n’auraient pas d’effets sur le coût estimé lors de la loi de finances rectificative pour 2013. Les nouveaux critères, portant notamment sur l’âge de l’entreprise, ne devraient pas réduire de manière importante le vivier d’entreprises concernées.

Le dispositif pourrait atteindre son régime de croisière d’ici 2020.

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La commission adopte l’article 31 sans modification.

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Article 32
Exonération de la retenue à la source due par une société non-résidente déficitaire et en liquidation

Le présent article exonère de retenue à la source les dividendes de source française distribués à une société non-résidente lorsque celle-ci se trouve en liquidation judiciaire et que son résultat fiscal est déficitaire, afin de se mettre en conformité avec le droit de l’Union européenne, à la suite d’une mise en demeure de la Commission européenne. En effet, une société résidente se trouvant dans une telle situation n’est pas soumise à l’impôt sur les sociétés et les dividendes qu’elle perçoit ne sont de facto pas imposés.

Toutefois, le dispositif proposé ne répond que partiellement aux observations formulées par la Commission européenne dans sa mise en demeure, en imposant aux sociétés non-résidentes de remplir cumulativement deux conditions pour être exonérées, à savoir être en situation déficitaire et en liquidation judiciaire. En effet, il résulte de l’analyse retenue par la Commission que ces conditions ne devraient pas être cumulatives, mais alternatives, puisque celle-ci estime que l’application de la retenue à la source aux sociétés non-résidentes qui seraient, soit en liquidation judiciaire, soit en situation fiscale déficitaire, se traduit par une différence de traitement par rapport aux sociétés résidentes se trouvant dans l’une ou l’autre de ces situations, en ce qu’elles ne sont pas soumises à une « imposition immédiate » sur les dividendes qu’elles perçoivent.

● Aux termes du 2 de l’article 119 bis du code général des impôts, les produits visés aux articles 108 à 117 bis du même code – soit les produits des actions et des parts sociales, et les revenus fiscalement assimilés – distribués par une société française à une société n’ayant pas son siège en France font l’objet d’une retenue à la source dont le taux est fixé par l’article 187.

Le taux de la retenue à la source varie en fonction de la nature du revenu distribué et de son bénéficiaire. Il s’élève en principe à 30 %, mais il est ramené à 15 % pour les produits prélevés sur les résultats exonérés et distribués à des organismes de placement collectif par les sociétés d’investissements immobiliers cotées (SIIC), les sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable (SPPICAV) et leurs filiales.

Toutefois, les conventions internationales peuvent prévoir l’application d’un taux moins élevé : en pratique, le taux le plus souvent applicable est de 15 %, et il est généralement compris entre 5 % et 20 %.

Par ailleurs, le 2 de l’article 187 dispose que le taux est porté à 75 % pour les produits payés dans un État ou un territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A.

● La retenue à la source ne trouve pas à s’appliquer dans plusieurs configurations. Tel est notamment le cas pour les dividendes distribués par une société française à une société mère de l’Union européenne ou à l’un de ses établissements stables européens, en application de l’article 119 ter, lequel transpose la directive 2011/96/UE du 30 novembre 2011 (262). Ce régime d’exonération suppose que plusieurs conditions soient remplies, notamment que la filiale française soit une société ou un organisme soumis à l’impôt sur les sociétés, que la société mère détienne directement depuis deux ans ou plus 10 % au moins de la société distributrice, ou qu’elle prenne l’engagement de conserver cette participation pendant au moins deux ans, et qu’elle soit passible de l’impôt sur les sociétés dans l’État où elle a son siège de direction effective.

Afin de tirer les conséquences de la décision Denkavit du 14 décembre 2006 de la Cour de justice des Communautés européennes (263), l’administration fiscale estime que sont également exonérés de retenue à la source, en l’absence de montage artificiel, les dividendes de source française afférents à une participation au moins égale à 5 % versés à une société mère ayant son siège dans un État de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen, si cette société ne peut l’imputer dans son État de résidence et à condition qu’elle conserve les titres de participation pendant deux ans au moins.

De ce fait, dans la généralité des cas, les sociétés non-résidentes qui perçoivent des dividendes de filiales françaises dont elles détiennent au moins 5 % des titres ne sont pas soumises, sur ces dividendes, à la retenue à la source prévue par l’article 119 bis. A contrario, les dividendes distribués au titre de participations inférieures à 5 % à une société non-résidente sont assujettis à cette retenue à la source.

Enfin, dans le prolongement du contentieux concernant les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), un autre dispositif d’exonération de retenue à la source a été introduit par l’article 6 de la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 (264) au bénéfice des organismes de placement situés dans un État de l’Union européenne ou dans un État ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative, pour aligner leur régime fiscal sur celui applicable aux OPCVM établis sur le territoire national, et ce à la condition que ces organismes de placement de droit étranger soient comparables à un OPCVM national.

B. L’ANALYSE DE LA COMMISSION EUROPÉENNE : UNE DIFFÉRENCE DE TRAITEMENT ENTRE SOCIÉTÉS RÉSIDENTES ET SOCIÉTÉS NON-RÉSIDENTES, LORSQU’ELLES SONT DÉFICITAIRES OU EN LIQUIDATION JUDICIAIRE

● Les dividendes perçus par une société française passible de l’impôt sur les sociétés sont incorporés dans les résultats imposables de l’entreprise à la date de leur perception – sauf dans le cadre du régime des sociétés mères et filiales, qui permet aux sociétés mères de bénéficier de l’exonération des dividendes reçus de leurs filiales dont elles détiennent au moins 5 % des titres (articles 145 et 216 du code général des impôts) (265). Là encore, dans la généralité des cas, les dividendes perçus par une société française au titre des participations inférieures à 5 % qu’elle détient dans d’autres sociétés françaises sont soumis à l’impôt sur les sociétés.

Or, dans sa mise en demeure n° 2013/4244 en date du 28 mars 2014, la Commission européenne estime que le régime de retenue à la source applicable aux dividendes perçus par une société non-résidente occasionne, lorsque cette société est en liquidation judiciaire ou en situation déficitaire, une charge d’impôt supérieure à celle pesant sur une société résidente percevant des dividendes se trouvant dans la même situation ; la Commission en déduit que sur ce point, le régime de retenue à la source n’est pas compatible avec le droit de l’Union, au regard du principe de libre circulation des capitaux défini par l’article 63 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) et par l’article 40 de l’accord sur l’Espace économique européen.

À l’appui de son raisonnement, la Commission relève qu’une société résidente percevant des dividendes au titre de participations inférieures à 5 % ne paie aucun impôt sur les sociétés lorsqu’elle se trouve en situation de liquidation, et donc que ces dividendes ne font l’objet d’aucune imposition – il convient de noter toutefois qu’une société en liquidation judiciaire n’est pas par principe exonérée d’impôt sur les sociétés, aucune disposition juridique ne prévoyant une telle exonération, mais que c’est probablement en pratique ce qui se produit pour la grande majorité des sociétés concernées.

La Commission relève également que lorsque la société résidente qui perçoit des dividendes se trouve en situation déficitaire, elle « ne supporte finalement aucune imposition effective sur les produits ainsi reçus » ; néanmoins, cette assertion est nuancée – voire contredite – dans les développements suivants, puisque la Commission relève que « lorsque la société est en situation déficitaire l’imposition peut ne pas intervenir pendant plusieurs années et elle ne sera effective qu’au bout d’une parfois très longue période, à savoir qu’à partir du moment où la société redevient bénéficiaire ».

L’analyse de la Commission devrait donc conduire à instaurer une exonération de retenue à la source pour les sociétés non-résidentes qui se trouvent soit en liquidation judiciaire, soit en situation déficitaire.

● Néanmoins, il convient d’observer qu’aucune disposition du droit interne français ne prévoit une exonération au titre des dividendes perçus par une société résidente lorsque ses résultats sont déficitaires : les dividendes sont bien incorporés dans le résultat imposable de cette société, venant en diminution du déficit reportable sur les exercices suivants (266). De ce fait, lorsque le résultat de cette société résidente redevient bénéficiaire, ces dividendes seront effectivement imposés à l’impôt sur les sociétés au titre d’une année ultérieure, et ce au taux de droit commun alors applicable.

Telle est l’analyse retenue par le Conseil d’État dans une décision du 9 mai 2012 relatif à la société GBL Energy (267). Cette société holding établie au Luxembourg demandait l’annulation pour excès de pouvoir des instructions fiscales sur la base desquelles sa demande de restitution de retenue à la source, appliquée au taux de 15 %, sur les dividendes perçus au titre de sa participation dans le capital de la société Total, avait été rejetée. La société GBL Energy soutenait en effet que l’application de la retenue à la source à des dividendes reçus par une société non-résidente était contraire au principe de libre circulation des capitaux, dès lors que cette retenue ne pouvait être imputée sur un impôt dans son État de résidence, dans la mesure où la société était exonérée ou qu’elle se trouvait en situation déficitaire – alors que ces dividendes ne seraient pas soumis à l’impôt si, placée dans une situation identique, la société qui les recevait était établie en France.

Or le Conseil d’État a rejeté la requête de la société GBL Energy, au motif que les sociétés résidentes ne se trouvaient pas exonérées d’imposition sur les dividendes reçus lorsque leurs résultats étaient déficitaires, comme détaillé supra. Le Conseil d’État souligne que « s’il en résulte un décalage dans le temps entre la perception de la retenue à la source afférente aux dividendes payés à la société non-résidente et l’impôt établi à l’encontre de la société établie en France au titre de l’exercice où ses résultats redeviennent bénéficiaires, ce décalage procède d’une technique différente d’imposition des dividendes perçus par la société selon qu’elle est non-résidente ou résidente ; que le seul désavantage de trésorerie que comporte la retenue à la source pour la société non-résidente ne peut ainsi être regardé comme constituant une différence de traitement caractérisant une restriction à la liberté de circulation des capitaux ». La différence de traitement entre sociétés résidentes et non-résidentes en situation déficitaire n’est donc pas caractérisée.

Dans cette même décision, le Conseil d’État ajoute « qu’une société non-résidente en situation déficitaire […] et une société établie en France placée dans la même situation ne peuvent être regardées comme étant dans une situation objectivement comparable ; qu’en effet, la détermination du résultat imposable de ces deux sociétés procède des règles fiscales propres à la législation de chacun de ces États membres ».

L’analyse du Conseil d’État et celle de la Commission européenne divergent donc sur la question des sociétés non-résidentes en situation déficitaire, la Commission estimant quant à elle qu’« une discrimination existe lorsque l’État d’où les dividendes tirent leur source impose une retenue à la source automatique et immédiate lors de la distribution, alors que dans une situation purement nationale, l’imposition effective n’a lieu que lorsque la société française redevient bénéficiaire et les déficits antérieurs peuvent s’imputer sur le résultat fiscal de l’année ».

II. LE DROIT PROPOSÉ : UNE EXONÉRATION DE LA RETENUE À LA SOURCE POUR LES SOCIÉTÉS NON-RÉSIDENTES À LA FOIS DÉFICITAIRES ET EN LIQUIDATION JUDICIAIRE

● Selon l’évaluation préalable, le présent article vise à corriger le dispositif de retenue à la source applicable aux sociétés non-résidentes afin d’assurer sa conformité avec le droit de l’Union, suite à la mise en demeure précitée transmise à la France par la Commission européenne.

À cet égard, l’article dispose que la retenue à la source prévue par le 2 de l’article 119 bis du code général des impôts ne trouve pas à s’appliquer aux dividendes reçus par une société non-résidente dès lors qu’elle se trouve en situation déficitaire et qu’elle fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire. Ces conditions sont cumulatives, et non alternatives.

De ce fait, en imposant que ces deux conditions soient réunies, le dispositif proposé ne répond que partiellement aux observations formulées par la Commission européenne, qui vise la situation des sociétés en liquidation, d’une part, et celle des sociétés déficitaires, d’autre part – et a fortiori les sociétés qui rempliraient ces deux conditions.

● Aux termes du dispositif proposé, l’exonération de retenue à la source sur les dividendes versés à une société non-résidente est applicable dès lors que les conditions suivantes sont réunies :

– le siège de direction effective de la société non-résidente qui reçoit les dividendes est situé dans un État membre de l’Union européenne ou dans un État ou un territoire ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales (État coopératif) ; la société non-résidente doit par ailleurs être soumise à l’impôt sur les sociétés de cet État ou de ce territoire ;

– son résultat fiscal, calculé selon les règles de l’État ou du territoire où est situé son siège, est déficitaire ;

– à la date de la distribution de dividendes, elle fait l’objet d’une procédure comparable à celle mentionnée par l’article L. 640-1 du code de commerce, laquelle correspond à la procédure de liquidation judiciaire. Si une telle procédure n’existe pas dans l’État où est établi le siège de la société, l’exonération s’applique aux sociétés en état de cessation de paiements et dont le redressement est manifestement impossible – soit mot pour mot les conditions définies par l’article L. 640-1 précité.

Il appartient à la société non-résidente d’apporter la preuve, auprès de la société résidente qui distribue les dividendes, que ces trois conditions sont réunies, afin de n’être pas soumise, dans ce cas, à la retenue à la source.

Par ailleurs, le présent article prévoit que l’exonération trouve également à s’appliquer lorsque les dividendes sont reçus non par le siège de la société non-résidente, mais par un de ses établissements stables situé hors de France – les dividendes étant alors inclus dans son résultat imposable. Dans ce cas, les dividendes sont exonérés lorsque :

– le siège de direction de la société et l’établissement stable sont tous deux situés dans un État de l’Union européenne ou dans un État coopératif ;

– lorsque le résultat de l’établissement stable est fiscalement déficitaire ; c’est bien la situation fiscale de l’établissement stable qui est prise en compte, et non celle de la société dont il fait partie ;

– lorsque la société dont il fait partie fait l’objet d’une procédure comparable à celle de la liquidation judiciaire. S’il dispose de la personnalité fiscale, l’établissement stable ne dispose pas de la personnalité morale, et ne peut faire l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire autonome.

Les modifications proposées par le présent article s’appliquent aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2016.

● Aux termes de l’évaluation préalable de l’article, « le dispositif n’a aucune incidence directe sur le montant des recettes des administrations publiques ». Selon les informations recueillies par la Rapporteure générale, l’impact de cette disposition n’est pas chiffrable : le nombre de sociétés se trouvant à la fois en liquidation et en situation déficitaire étant difficile à évaluer en France, il est encore plus malaisé d’identifier des sociétés non-résidentes et redevables d’une retenue à la source sur leurs dividendes qui rempliraient ces deux conditions.

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La commission adopte l’article 32 sans modification.

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Article 33
Mise en place d’une procédure de restitution de l’excédent de retenue à la source prélevée sur les jetons de présence « ordinaires » versés à des contribuables domiciliés dans un État membre de l’Union européenne

Le présent article instaure une procédure de restitution de l’excédent de retenue à la source prélevée sur les jetons de présence « ordinaires » versés à des contribuables domiciliés dans un État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen (EEE), dans le cas où cette retenue serait supérieure à l’impôt qui résulterait de l’imposition de ces jetons de présence au barème progressif de l’impôt sur le revenu. Cet article vise ainsi à mettre en conformité notre droit interne avec le droit européen, au regard du principe de libre circulation des travailleurs.

Les jetons de présence « ordinaires » constituent l’un des modes de rémunération des dirigeants d’entreprise : ils sont versés aux membres de conseil d’administration (pour les sociétés anonymes de type classique) et de conseil de surveillance (pour les sociétés à directoire) en rémunération de leur activité au conseil, comme le prévoient les articles L. 225-45 et L. 225-83 du code de commerce.

De façon générale, les administrateurs ou les membres de conseil de surveillance reçoivent un montant fixe de jetons de présence ainsi qu’un montant variable, afin de prendre en compte leur participation effective aux travaux du conseil d’administration ou de surveillance et de ses comités.

Les jetons de présence « ordinaires » doivent être distingués des jetons de présence « spéciaux », qui sont alloués aux administrateurs à titre de rétribution de leurs fonctions salariées de direction. Ces jetons sont imposables dans les catégories des traitements et salaires et soumis aux cotisations sociales.

En revanche, les jetons de présence « spéciaux » sont imposables au titre de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, lorsqu’ils sont versés à des personnes physiques. Ces jetons de présence n’ouvrent pas droit à l’abattement de 40 %. Ils supportent sur leur montant brut (268), lors de leur paiement, un prélèvement forfaitaire obligatoire à la source de 21 %, sauf cas de dispense (269). Ce prélèvement constitue un acompte d’impôt sur le revenu. Lorsqu’il est supérieur au montant de l’impôt dû, l’excédent est restitué sous forme de crédit d’impôt (article 117 quater du code général des impôts).

Les jetons de présence « ordinaires » sont également soumis aux prélèvements sociaux au taux de 15,5 % ; ils sont prélevés à la source par l’établissement payeur lorsque celui-ci est établi en France. Par ailleurs, ils sont assujettis au forfait social.

Les jetons de présence peuvent également être perçus par une personne morale, en sa qualité d’administrateur d’une société anonyme ; dans ce cas, cette personne morale doit nommer un représentant permanent, qui est en général soit un de ses administrateurs soit un de ses salariés. Dans ce cas, les jetons de présence ordinaires présentent le caractère de revenus mobiliers imposables au nom de la société personne morale.

Aux termes de l’article 117 bis du code général des impôts, les jetons de présence « ordinaires » donnent lieu à la retenue à la source mentionnée à l’article 119 bis lorsqu’ils sont versés à des personnes qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France. En application de l’article 187, le taux applicable est fixé à 30 % : la retenue à la source est libératoire de l’impôt sur le revenu, en application de l’article 199 quater A.

Ce taux de 30 % est porté à 75 % lorsque ces revenus sont payés dans un État ou un territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A.

Néanmoins, le taux de 30 % s’applique sous réserve des conventions internationales conclues avec les États de résidence des bénéficiaires de ces jetons de présence. L’article 16 du modèle de convention fiscale de l’OCDE prévoit que « les tantièmes, jetons de présence et autres rétributions similaires qu’un résident d’un État contractant reçoit en sa qualité de membre du conseil d’administration ou de surveillance d’une société qui est un résident de l’autre État contractant sont imposables dans cet autre État ». La grande majorité des conventions conclues par la France reprend cette règle et prévoit donc l’application de la retenue à la source aux jetons de présence versés par une société française à des non-résidents. Néanmoins, le taux défini par les conventions internationales s’avère généralement nettement moindre que celui de 30 % défini par l’article 187 ; il s’établit le plus souvent à 15 %.

● Si la retenue à la source prévue par le 2 de l’article 119 bis s’avère libératoire de l’impôt sur le revenu, aucun mécanisme de restitution n’est prévu dans le cas où cette retenue prélevée sur les jetons de présence « ordinaires » excède le montant qui serait dû au titre de leur imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu, compte tenu, le cas échéant, des autres revenus de source française perçus par le contribuable au titre de la même année.

Or, dans le cadre de la procédure pré-contentieuse dite « EU-Pilot » engagée à la fin de l’année 2013, la Commission européenne a appelé l’attention des autorités françaises sur le fait que cette différence de traitement constituait une restriction aux libertés de circulation européennes au détriment des personnes physiques établies dans un autre État membre de l’Union européenne ou partie à l’Espace économique européen (EEE) – en pratique, en Norvège, en Islande et au Liechtenstein. Suite aux échanges intervenus avec les autorités françaises sur ce sujet, la Commission a, le 4 décembre 2014, clos négativement la procédure précontentieuse « EU-Pilot ». À défaut d’une mesure de mise en conformité du régime d’imposition des jetons de présence perçus par les contribuables non-résidents, la Commission devrait engager rapidement une procédure d’infraction, par l’envoi d’une mise en demeure aux autorités françaises.

● Le présent article vient donc mettre en conformité les dispositions de l’article 187 du code général des impôts avec le droit européen, en instaurant une procédure de restitution de l’excédent de retenue à la source prélevée sur les jetons de présence pour les personnes physiques non-résidentes ayant leur domicile fiscal dans un État membre de l’Union européenne ou de l’EEE. Pour ce faire, il remplace des dispositions devenues sans objet depuis l’entrée en vigueur de l’article 17 de la loi de finances pour 2014 (270) (I).

La mise en œuvre de cette procédure de restitution suppose de procéder au calcul de l’impôt sur les jetons de présence pour lesquels la procédure de restitution peut être demandée, ainsi que sur les autres revenus de source française perçus le cas échéant par le contribuable, par application du barème progressif tel que prévu par l’article 197 A pour les personnes non-résidentes.

Comme pour les contribuables domiciliés en France, l’impôt sur le revenu dû par les contribuables non-résidents est calculé en appliquant aux revenus de source française le barème progressif et le système du quotient familial, y compris les règles de plafonnement des effets de ce dernier, mais sans appliquer le mécanisme de décote. L’impôt ainsi calculé ne peut être inférieur à 20 % du revenu net imposable. Cependant, ce taux minimum de 20 % n’est pas applicable si le contribuable justifie que le taux moyen qui résulterait de l’imposition en France de l’ensemble de ses revenus de sources française et étrangère serait inférieur à ce taux minimum. Dans ce cas, c’est ce taux moyen qui est retenu pour le calcul de l’impôt exigible sur les seuls revenus de source française.

Est ensuite calculé l’impôt dû au titre des seuls revenus de source française effectivement imposés au barème. La différence entre ce montant d’impôt et le montant de l’impôt sur l’ensemble des revenus, y compris les jetons de présence, permet ainsi d’isoler l’imposition afférente à ces seuls jetons de présence. Le cas échéant, si cette différence s’avère inférieure à la retenue à la source qui a été prélevée, l’excédent de retenue à la source est reversé au contribuable.

Cette procédure de restitution a vocation à s’appliquer aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2016 (II).

● Une telle procédure de restitution est d’ores et déjà prévue dans plusieurs cas, notamment s’agissant de la retenue de 30 % appliquée aux distributions prélevées sur les plus-values de société de capital-risque, lorsque l’actionnaire est une personne physique domiciliée hors de France – que ce soit dans un pays de l’Union européenne ou pas –, en application de l’article 163 quinquies C du code général des impôts. Il en va de même pour le prélèvement de 45 % effectué aux plus-values de cession de participations dites « substantielles », c’est-à-dire supérieures à 25 %, réalisées par un contribuable non-résident, en application de l’article 244 bis B du même code.

Plus largement, les dispositions applicables en matière de retenue à la source sur les revenus perçus par des contribuables non-résidents s’avèrent quelque peu disparates : certaines s’avèrent libératoires de l’impôt sur le revenu, totalement – comme dans le cadre du 2 de l’article 119 bis – ou pour une certaine fraction de revenus – par exemple, pour les traitements, salaires et pensions de source française versés à des non-résidents, en application des articles 182 A et 197 B. En revanche, s’agissant de certains revenus non salariaux au titre de prestations sportives, notamment, et de droits d’auteurs, se trouvant dans le champ de l’article 182 B, la retenue à la source n’est pas libératoire.

La restitution de l’excédent de retenue à la source perçue n’est prévue que dans certaines configurations : outre les deux exemples précités (articles 163 quinquies C et 244 bis B), une telle procédure est également prévue par l’article 197 B pour la retenue à la source acquittée sur les traitements, salaires et pensions (article 182 A), ainsi que sur les revenus artistiques (article 182 A bis) perçus par les non-résidents. Néanmoins, tel n’est pas le cas pour la retenue applicable aux dividendes perçus par des personnes physiques domiciliées dans un État de l’Union européenne ou de l’EEE en application du 2 de l’article 119 bis. Dans le cadre de l’article 182 B, lorsque le montant de la retenue appliquée à certains revenus non salariaux s’avère supérieur au montant de l’impôt exigible, la jurisprudence considère que l’excédent peut être restitué, alors que l’administration fiscale retient la position inverse…

Une remise à plat des dispositifs applicables de retenue à la source pourrait s’avérer utile, au-delà des modifications apportées au cas par cas à certaines dispositions pour assurer leur conformité au droit européen.

● L’impact budgétaire du présent article ne fait l’objet d’aucun chiffrage, mais il est permis de penser que le dispositif proposé ne concerne qu’un nombre restreint de personnes et un volume de recettes budgétaires très limité.

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La commission adopte l’article 33 sans modification.

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Article 34
Adaptation du dispositif de majoration du minimum de perception
pour les droits de consommation perçus sur les produits du tabac

Cet article réforme le système actuel de majoration du minimum de perception, applicable aux accises portant spécifiquement sur le tabac et destiné à dissuader financièrement les fabricants d’essayer de vendre certains de leurs produits à des prix « cassés », au risque d’abaisser le coût d’accès au tabac, qui joue un rôle important en termes de santé publique.

Tout en simplifiant le système actuel, qui est peu intelligible et repose sur trois modalités de majoration différentes, il est proposé de mieux prendre en compte les exigences juridiques européennes, à la suite d’arrêts rendus récemment à ce sujet par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et, dans la foulée, par le Conseil d’État. En effet, ces décisions de justice risquent actuellement, en l’absence d’adaptation législative, de mettre un terme à toute possibilité de majoration dissuasive de ces droits d’accises.

Les produits du tabac, en raison de leur dangerosité sanitaire, sont soumis non seulement à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), mais aussi à une fiscalité spécifique, qui prend la forme de droits de consommation dont le régime est fixé, pour le territoire de la France continentale, par les articles 575 à 575 D du code général des impôts et, pour la Corse et les départements d’outre-mer (DOM), respectivement par les articles 575 E bis et 575 E de ce même code.

Ces droits sont dus mensuellement par les fournisseurs pour tous les produits qu’ils ont importés ou mis à la consommation en France, leur recouvrement étant confié à l’administration des douanes et des droits indirects. Ils reposent, comme le prévoit la directive européenne du 21 juin 2011 régissant la structure et le taux de ces accises (271), sur deux composantes dont l’addition donne le montant de taxe dû :

– la part dite « spécifique », qui dépend des quantités de produits vendus ;

– et la part dite « proportionnelle », qui dépend uniquement de leur prix de vente au détail (prix toutes taxes comprises, la TVA étant égale à 16,67 % du prix de vente au détail).

Les tarifs de ces deux composantes sont fixés, pour chaque groupe de produits du tabac vendus en France continentale, à l’article 575 A du code général des impôts, selon le tableau suivant :

TARIFS DES DROITS DE CONSOMMATION SUR LES PRODUITS DU TABAC APPLICABLES
EN FRANCE CONTINENTALE EN 2015

Groupe de produits

Part proportionnelle

(en pourcentage du prix de vente au détail TTC)

Part spécifique

(en euros, pour 1 000 unités ou 1 000 grammes)

Cigarettes

49,7

48,75

Cigares et cigarillos

23

19

Tabacs « à rouler »

32

67,5

Autres tabacs à fumer

45

17

Tabacs à priser

50

0

Tabacs à mâcher

35

0

Source : Légifrance.

Alors que la part spécifique était, jusqu’au 1er janvier 2015, indexée sur les prix moyens de vente au détail de l’année précédente, cette part spécifique est désormais fixée en valeur absolue. Ce changement, qui résulte de la dernière loi de finances rectificative pour 2014 (272), a conduit en 2015 à geler à leur niveau de 2014 le tarif des droits de consommation sur les produits du tabac, mesure à laquelle la Rapporteure générale n’était, pour des raisons sanitaires et budgétaires, pas favorable.

Concrètement, pour un paquet de 20 cigarettes vendu au détail 7 euros TTC sur le territoire continental, la fiscalité représente 5,63 euros (soit 80,4 % du prix de vente) et se décompose de la manière suivante :

– 3,48 euros de part proportionnelle ;

– 0,98 euro de part spécifique ;

– 1,17 euro de TVA.

B. LE MÉCANISME DU MINIMUM DE PERCEPTION ET SES MAJORATIONS

Par ailleurs, les prix du tabac étant fixés par les fabricants – la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) publie seulement des arrêtés trimestriels homologuant ces prix –, ceux-ci pourraient être tentés de mener des stratégies commerciales consistant à baisser fortement le prix de vente de certaines de leurs références, afin de conquérir de nouvelles parts de marché. Pour limiter ce risque, l’article 575 du code général des impôts prévoit que, quel que soit le prix de vente TTC des produits, le montant des droits de consommation dus par le fabricant sur chaque produit ne pourra être inférieur à un certain seuil, que l’on appelle le « minimum de perception ». Ce seuil est fixé par les deux derniers alinéas de l’article 575 A, pour chaque groupe de produits du tabac, aux niveaux suivants :

– 210 euros pour 1 000 cigarettes (soit 4,2 euros pour un paquet de 20 cigarettes) ;

– 92 euros pour 1 000 cigares ou cigarillos ;

– 143 euros pour un kilogramme de « tabac à rouler » ;

– 70 euros pour un kilogramme d’autres tabacs à fumer (produits du tabac, tels que les tabacs à pipes et ceux qui sont destinés au narguilé, qui ne relèvent d’aucune des autres catégories).

Ce système du minimum de perception signifie, concrètement, que le fabricant d’un paquet de 20 cigarettes devra toujours régler au moins 4,2 euros de droits de consommation, même lorsque le calcul des droits résultant des tarifs normalement prévus par l’article 575 du code des douanes donnerait un chiffre inférieur : les droits d’accises peuvent donc représenter un pourcentage du prix de vente d’autant plus élevé qu’il fait descendre le prix TTC de ses produits.

Pour rendre cette taxation-plancher financièrement plus dissuasive pour les fabricants, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 (273) a créé un mécanisme de majoration, qui s’est progressivement compliqué et peut prendre aujourd’hui plusieurs formes prévues par les trois derniers alinéas de l’article 575 du code général des impôts :

– il est d’abord possible d’appliquer, de plein droit, une majoration de 10 % du montant du minimum de perception dû par le fabricant, lorsque le prix de vente d’un produit est inférieur de plus de 6 % à la « classe de prix de référence » (c’est-à-dire le prix moyen pondéré de vente au détail, établi par arrêté ministériel en année N sur la base des ventes de l’année N − 1) du groupe de produits du tabac dont relève ce produit (274). Selon les informations transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, cette majoration de 10 % a été mise en œuvre une seule fois, en 2015, tandis que les autres formes de majorations actuellement prévues par l’article 575 du code général des impôts n’ont jamais été mises en œuvre.

Par exemple, si la classe de prix de référence pour les cigarettes s’établit à 340 euros pour 1 000 cigarettes, soit 6,8 euros par paquet, et qu’un fabricant propose, parmi ses trois marques de cigarettes A, B et C, des cigarettes B vendues au prix de seulement 6,2 euros par paquet, soit près de 9 % de moins que la classe de prix de référence, cette majoration se déclenche pour les produits de la marque B. Dans ce cas, alors que ce fabricant aurait normalement dû acquitter, sur chaque paquet de cigarettes B, 4,06 euros de droits de consommation en les calculant selon le barème ordinaire (3,08 euros pour la part proportionnelle + 0,98 euro pour la part spécifique), il devra tout de même payer, sur chacun des paquets de cette marque, 4,62 euros de droits de consommation (minimum de perception de 4,2 euros, majoré de 10 %), ce qui réduira d’autant la marge lui restant ;

– depuis 2011 (275), le ministre chargé du budget peut décider en cours d’année, par arrêté, de relever le seuil de prix à partir duquel la majoration précédemment décrite se déclenchera (de 94 % de la classe de prix de référence à 110 % de ce même prix) lorsque la classe de prix de référence d’un groupe de produits (calculée sur la base des prix moyens de l’année N − 1) est inférieure de plus de 3 % à la moyenne des prix homologués de ce groupe de produit pour l’année en cours. Ce système peut avoir un intérêt si, par exemple en raison d’une forte hausse du barème des droits de consommation, les prix moyens de l’année N sont beaucoup plus élevés que ceux de l’année N − 1 : dans ce cas, le mécanisme de majoration ordinaire pourrait être moins dissuasif, et les prix, par exemple, des cigarettes s’écarter davantage les uns des autres.

– enfin, là encore depuis 2011, le ministre du budget peut relever jusqu’à 25 % le minimum de perception (soit 5,25 euros par paquet de 20 cigarettes au lieu de 4,2 euros) s’il apparaît que le prix de vente homologué d’un produit est inférieur de plus de 3 % au prix moyen des produits du même groupe constaté non pas l’année précédente, mais lors du précédent arrêté trimestriel d’homologation des prix. Ce mécanisme vise donc à éviter les baisses de prix au cours d’une même année, d’un trimestre par rapport à l’autre.

Bien qu’il soit devenu excessivement complexe, ce système a jusqu’ici pu demeurer en principe applicable et jouer un rôle dissuasif utile (voir II). Toutefois, il a été récemment fragilisé par deux décisions de justice récentes :

– un arrêt rendu, le 9 octobre 2014, par la CJUE (276), qui a jugé contraire à la directive précitée du 21 juin 2011 sur la fiscalité des tabacs manufacturés le système italien de taxation minimale, lequel ressemblait au système français de majoration du minimum de perception. Dans cet arrêt, la CJUE a indiqué : « Les articles 7, paragraphe 2, et 8, paragraphe 6, de la directive […] du 21 juin 2011 […], doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une disposition nationale, telle que celle en cause au principal, établissant non pas une accise minimale identique qui s’applique à toutes les cigarettes, mais une accise minimale qui s’applique uniquement aux cigarettes ayant un prix de vente au détail inférieur à celui des cigarettes de la classe de prix la plus demandée. » Cela signifie qu’est contraire au droit de l’Union européenne tout mécanisme conduisant à majorer le niveau de taxation-plancher de certaines cigarettes seulement : une éventuelle majoration de taxation plancher doit donc s’appliquer à l’ensemble des produits d’un même groupe (toutes les cigarettes ou tous les cigares et cigarillos, par exemple) ;

– une décision rendue le 27 mars 2015 par le Conseil d’État, annulant, sur la requête de la société British American Tobacco France, une circulaire du ministre délégué, chargé du budget, datée du 12 février 2014, relative à la fiscalité applicable aux tabacs manufacturés en France continentale et Corse, circulaire qui précisait les conditions d’application des majorations de minimum de perception. Dans cette décision, le Conseil d’État a considéré, sur le fondement explicite de la décision rendue le 9 octobre 2014 par la CJUE, que « les dispositions des trois derniers alinéas précités de l’article 575 du code général des impôts, en ce qu’elles prévoient des majorations du minimum de perception, créent des distorsions de concurrence telles que celles relevées par la Cour de justice de l’Union européenne, dès lors que les cas de majorations du minimum de perception entraînent la perception d’une accise minimale différente de celle correspondant au minimum de perception applicable au groupe de produits correspondant ». Le Conseil d’État en a conclu que « dès lors, la circulaire contestée ne pouvait légalement prescrire d’en faire application ».

I. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE OU BUDGÉTAIRE

D’une manière générale, les droits de consommation sur le tabac jouent un rôle essentiel pour assurer le financement des organismes de sécurité sociale (et notamment de l’assurance maladie) auxquels son produit est reversé : le rendement de ces accises a ainsi atteint, en 11,2 milliards d’euros en 2014 et devrait atteindre 11,4 milliards d’euros en 2015 pour la France continentale.

ÉVOLUTION DES VENTES EN VALEUR ET DU PRODUIT DES DROITS DE CONSOMMATION SUR L’ENSEMBLE DES PRODUITS DU TABAC DE 2009 À 2014

(données pour la France continentale)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Montant des ventes en valeur

(en milliards d’euros)

15,74

16,65

17,48

17,84

17,84

17,85

Produit des droits de consommation

(en milliards d’euros)

9,89

10,36

10,96

11,15

11,13

11,22

Source : secrétariat d’État chargé du budget, 2015.

Toutefois, il ne s’agit pas de leur seule vocation : ils jouent aussi un rôle essentiel pour renchérir le prix de ces produits, qui présentent une dangerosité avérée pour la santé de ceux qui les consomment.

Indépendamment de ces aspects strictement budgétaires, il convient de rappeler que la consommation de tabac reste trop élevée en France, alors même que le tabagisme actif cause chaque année 73 000 décès prématurés en France, d’après l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES). Ainsi, la proportion de la population française fumant quotidiennement est désormais supérieure à la moyenne de l’OCDE et s’élevait à 28,2 % en 2014. Cette tendance ne s’améliore pas en 2015, puisqu’au cours des huit premiers mois de l’année, les ventes de produits du tabac ont augmenté de 6,3 % pour le tabac à rouler et de 1,2 % pour les cigarettes.

Le prix à partir duquel le consommateur peut accéder aux produits du tabac demeure donc une question essentielle pour l’efficacité des politiques visant à prévenir le tabagisme. Selon les données transmises par le secrétariat d’État chargé du budget, pour les cigarettes, la référence la moins chère est actuellement proposée au prix de 6,20 euros pour 20 cigarettes, tandis que, pour le « tabac à rouler », la référence la moins chère est vendue au détail au prix de 6,90 euros pour 30 grammes. Les prix les plus hauts, quant à eux, s’établissent actuellement à 7,60 euros pour un paquet de 20 cigarettes et à 7,40 euros pour un poids de 30 grammes de tabacs à rouler.

Dans ce cadre, le minimum de perception joue un rôle important pour éviter une baisse de ce prix d’accès qui favoriserait une hausse supplémentaire de la consommation de tabac et des problèmes sanitaires qui en résultent. En pratique, ce système de majorations à vocation dissuasive a jusqu’ici bien fonctionné pour éviter une guerre des prix entre fabricants. En effet, ceux-ci étant avant tout attentifs à la rentabilité financière de leur activité, ils étudient les prix de leurs produits de façon à les positionner juste au-dessus du seuil de déclenchement du minimum de perception et, ainsi, éviter les pénalités financières.

En revanche, cette analyse positive n’est plus valable dès lors qu’en raison des décisions de justice précédemment évoquées, l’administration des douanes et des droits indirects n’est plus autorisée à appliquer, si nécessaire, une majoration du minimum de perception. Selon les informations recueillies auprès de l’administration des douanes, les fabricants de tabac sont effectivement tentés, dans le contexte actuel, de baisser le prix de vente de certains de leurs produits, afin d’attirer de nouveaux consommateurs. Ainsi, depuis le début de l’année 2015, un fabricant de tabac aurait fait évolué successivement le prix d’une ou deux références de la gamme des tabacs à rouler, en positionnant ce prix juste en-dessous du seuil de déclenchement du minimum de perception (qui, pour ce groupe de produits, s’établit à 7,08 euros pour 30 grammes).

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ ET LES ENJEUX JURIDIQUES

L’article proposé vise à remédier aux difficultés créées par l’arrêt de la CJUE du 9 octobre 2014 et la décision du Conseil d’État du 27 mars 2015, qui ont rendu inapplicables les trois derniers alinéas de l’article 575 du code général des impôts.

Pour y parvenir, il est proposé, dans le paragraphe I de l’article, dans son , de remplacer ces alinéas par une nouvelle rédaction indiquant, beaucoup plus simplement, que le ministre chargé du budget peut, par arrêté, décider de majorer de 10 % le minimum de perception « pour l’ensemble des références de produits du tabac d’une même catégorie », et non plus pour les seuls produits dont les prix seraient trop bas. Par conséquent, si le ministre chargé du budget constate, d’une manière générale, au vu des arrêtés d’homologation des prix, que les fabricants baissent nettement le prix de vente TTC de certaines de leurs références, risquant d’ouvrir une « guerre des prix », il pourra appliquer une majoration uniforme du minimum de perception à l’ensemble des marques du groupe de produits concerné, pour tous les fabricants à la fois (par exemple pour toutes les cigarettes, et non plus pour les seules cigarettes de la marque A de l’un des fabricants).

Afin d’éviter l’introduction d’une ambiguïté juridique au sein de l’article 575 du code général des impôts, du fait de l’utilisation, prévue par l’article, du terme de « catégorie » de produits, en réalité destiné à désigner ce qui a été systématiquement nommé « groupe » de produits jusqu’ici, il sera proposé de préférer cette dénomination unique, qui est bien identifiée également par le barème de l’article 575 A.

En outre, les 1 à 3° du paragraphe I procèdent à quelques changements rédactionnels et de coordinations, destinés à tirer les conséquences logiques de l’évolution des modalités de calcul de la part spécifique des droits de consommation du tabac, décidée dans le cadre de la dernière loi de finances rectificative pour 2014 (le tarif de cette part n’étant plus, pour chaque groupe de produits, indexé sur la classe de prix de référence constatée au titre de l’année précédente).

Enfin, le paragraphe II de l’article précise que ces changements seraient applicables aux livraisons et importations de tabac survenant à compter du 1er janvier 2016.

III. L’IMPACT ÉCONOMIQUE ATTENDU

L’article devrait permettre de rétablir le caractère dissuasif du système des majorations du minimum de perception, tout en le rendant plus intelligible. Grâce au nouveau mécanisme proposé, la DGDDI pourra désormais s’appuyer sur un mécanisme législatif compatible avec le droit de l’Union européenne et ainsi continuer à majorer, si nécessaire, la taxation-plancher des produits du tabac, pour sanctionner financièrement les fabricants qui s’essaieraient à baisser fortement le prix de vente de certains de leurs produits.

Il est certes impossible d’estimer l’impact budgétaire de ce changement, car il est très indirect. Toutefois, il ne peut être que positif financièrement, comparé au maintien d’un système de majoration devenu inapplicable, car il poussera les fabricants à maintenir des prix de vente TTC élevés, confortant d’autant les recettes tirées de la part proportionnelle des droits de consommation.

Par ailleurs, l’impact économique et social devrait, plus généralement, être positif, puisque la mesure, en évitant une éventuelle « guerre des prix » entre fabricants, évitera une exposition excessive de la population à des produits dangereux, à l’origine de maladies requérant des soins coûteux pour la collectivité.

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La commission est saisie de l’amendement CF 214 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Contrairement aux idées reçues, en matière de tabac, la majorité des produits attractifs, notamment auprès des jeunes, sont des produits dits de « haut de gamme ». Or, le minimum de perception ne régule que les prix dits d’« entrée de gamme », sans toucher aux marques attractives pour les jeunes fumeurs. Cet amendement permet donc d’augmenter de façon homogène la fiscalité sur l’ensemble des produits d’une même catégorie.

Mme la Rapporteure générale. Le mécanisme de l’article 34 me paraît plus judicieux. Si l’on veut augmenter la fiscalité sur les cigarettes les plus chères, le bon outil est d’augmenter le taux de la part proportionnelle. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement CF 214.

Puis elle adopte l’article 34 sans modification.

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Article 35
Modification du dispositif de plafonnement de la taxe additionnelle
à la cotisation foncière des entreprises

La taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises (TACFE) est affectée aux chambres de métiers et de l’artisanat (CMA). Le présent article a pour objet de sécuriser le reversement au budget général de l’État de la fraction de la TACFE supérieure au plafond fixé en application de l’article 46 de la loi de finances pour 2012 (277).

En effet, la réforme des modalités de plafonnement de la TACFE affectée aux CMA introduite dans la première loi de finances rectificative pour 2014 (278) ne permettrait pas, selon le Gouvernement, d’assurer le recouvrement de cette fraction devant revenir au budget général de l’État.

Par conséquent, il est proposé de rétablir, sous réserve de quelques ajustements, les règles qui s’appliquaient avant la mise en œuvre de la réforme.

Pour rappel, le plafond appliqué à cette taxe depuis la loi de finances pour 2013 (279) a évolué comme suit.

ÉVOLUTION DU PLAFOND DE LA TACFE

(en milliers d’euros)

Année

2013

2014

2015 (prévisions)

2016 (prévisions)

Rendement

244 842

247 327

248 000

248 000

Plafond

280 000

245 000

244 009

243 018

Écrêtement

0

2 327

3 991

4 982

Source : fascicules des Voies et moyens annexés aux projets de loi de finances pour 2016 et de loi de finances pour 2015.

ÉVOLUTION DE L’ÉCRÊTEMENT DE LA TACFE AU TITRE DU PLAFONNEMENT

(en milliers d’euros)

Source : fascicules des Voies et moyens annexés aux projets de loi de finances pour 2016 et de loi de finances pour 2015.

I. LA RÉFORME ADOPTÉE EN 2014

A. LA COMPOSITION DE LA TACFE AFFECTÉE AUX CHAMBRES DE MÉTIERS

La taxe additionnelle à la CFE affectée aux CMA a été plafonnée par l’article 39 de la loi de finances pour 2013 qui a élargi le périmètre du plafonnement des taxes affectées aux réseaux consulaires. L’écart entre les sommes dues au titre de la taxe et le plafonnement doit être reversé au budget général de l’État, comme précédemment mentionné.

Cette taxe, d’un rendement estimé à 248 millions d’euros en 2015, se compose :

– d’un droit fixe (DF) de 123 euros maximum par assujetti en 2014 et 124 euros en 2015 dont le produit total représente 118 millions d’euros en 2015 ;

– d’un droit additionnel (DA) à la cotisation foncière des entreprises (CFE) correspondant à 60 % du produit du droit fixe (qui est un impôt de répartition, le produit de ce droit étant acquitté par les assujettis en proportion de leurs bases foncières). Toutefois, l’article 1601 du code général des impôts, par convention entre le préfet de région et le président de la chambre régionale de métiers, à porter ce droit à 90 % du produit du droit fixe. Le produit total de ce droit additionnel représente 90 millions d’euros en 2014 pour un taux moyen par rapport au produit du droit fixe de 87 % ;

– un droit additionnel destiné au conseil de la formation de 45 euros par assujetti en 2014 et 46 euros en 2015 représentant un produit de 40 millions d’euros en 2014.

Par ailleurs, les contrôles réalisés en cours d’année conduisent à constater des rendements supplémentaires estimés à 14 millions d’euros par les services du Gouvernement et pris en compte pour l’application du plafonnement.

Le plafond mis en œuvre depuis 2013 doit donc permettre aux chambres de mieux maîtriser leurs dépenses en stabilisant le niveau des recettes qui leur sont affectées. Cette stabilisation est obtenue grâce à l’écrêtement, qui se traduit par un reversement au profit du budget général de l’État découlant de l’application du plafond.

Toutefois, il apparaît que la présentation des ressources de TACFE affectées au réseau et du montant de l’écrêtement appliqué, telle que prévue dans le fascicule des Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2016, ne soit pas exhaustive.

Selon les informations transmises à la Rapporteure générale, depuis que le plafond s’applique à la TACFE perçue par les CMA, le montant moyen annuel de ce reversement atteindrait 20 millions d’euros au lieu des 4 millions d’euros présentés dans le Voies et moyens, du fait notamment de la prise en compte de rôles supplémentaires émis à la suite de contrôles qui viennent majorer le montant des recettes auxquelles s’appliquent ce plafonnement.

Il semble donc important qu’une clarification soit apportée sur ce point de manière à apprécier l’effort réel demandé aux chambres et leur capacité financière à s’en acquitter.

ÉVOLUTION DU PLAFONNEMENT DE LA TAXE ET DE SON ÉCRÊTEMENT

(en millions d’euros)

 

2013

2014

2015 (prévisions)

2016 (prévisions)

Plafond

280

245

244

243

Collecte de taxe de tous les établissements du réseau des CMA (rôles généraux de droit fixe + droit additionnel à la CFE + droit destiné aux conseils de la formation)

255

260

265

276

Majoration au titre de contrôles

(rôles supplémentaires)

0

 5 (au titre droit fixe et droit additionnel à la CFE, et hors rôles supplémentaires du droit conseil formation)

Difficilement prévisible (aléatoire en fonction des contrôles)

Difficilement prévisible (aléatoire en fonction des contrôles)

écrêtement

0

17 (droit fixe + droit additionnel à la CFE par rapport au sous-plafond de 209,

+ 3

(estimation de l’écrêtement du droit destiné aux conseils de la formation par rapport au sous-plafond de 36)

18 + 3

19 + 3

Source : le Gouvernement.

B. LES MOTIVATIONS DE LA RÉFORME DU PLAFONNEMENT ADOPTÉE EN LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2014

À l’initiative de nos collègues Laurent Grandguillaume et Alain Fauré, et avec l’avis favorable du Gouvernement, l’article 1601 du code général des impôts a été modifié de manière à remplacer les plafonds individuels appliqués à chacune des chambres au prorata de la TACFE perçue (280) par un mécanisme de modulation individuelle du plafond applicable à chacune des chambres.

Les raisons de cette réforme étaient les suivantes :

– l’application homothétique du plafonnement aux chambres, au prorata des montants de taxe perçus l’année précédente, ne tenait pas compte de leur situation financière, de la présence de centre de formation des apprentis (CFA) ou d’investissements en cours ;

– ce mécanisme de plafonnement rendait inopérant le principe du conventionnement entre les chambres régionales et l’État dans le cadre d’un contrat d’objectif et de moyens pour la part du droit additionnel de TACFE dépassant 60 %, jusqu’à 90 % maximum, comme mentionné précédemment, puisque les recettes supplémentaires découlant de l’augmentation de taux peuvent être prélevées au titre du plafonnement ;

– il pouvait aboutir à un traitement différencié des chambres puisque le plafond global étant décliné en des plafonds individuels au prorata des recettes perçues par les chambres régionales, certaines d’entre elles pouvaient être plafonnées et d’autres non, et ce même si le montant total de TACFE perçue par le réseau n’atteignait pas le plafond, ce qui revenait à aller au-delà de l’intention du législateur qui a fixé uniquement un montant global.

Il a donc été proposé de remplacer ce mécanisme par un prélèvement sur les réserves des chambres, via un fonds de mutualisation et de péréquation. La réforme devait être neutre pour le Gouvernement et avait été préalablement adoptée à 80 % par une délibération de l’assemblée générale de l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA), les 27 et 28 mai 2014.

C. LE MÉCANISME DE PLAFONNEMENT EN VIGUEUR DEPUIS LA PREMIÈRE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2014

Ce prélèvement sur les réserves des chambres est décliné en deux sous-plafonds :

– un sous-plafond applicable à la somme des produits des deux premières composantes de la taxe : droit fixe et droit additionnel à la CFE ;

– un sous-plafond applicable au droit additionnel destiné au financement d’actions de formation, décomposé en sous-plafonds individuels régionaux au prorata de la collecte de l’année précédente (qui n’a pas eu d’impact significatif sur la gestion des conseils de formation).

PRÉSENTATION DES SOUS-PLAFONDS

Source : commission des finances sur la base de données transmises par la direction générale des entreprises.

Par ailleurs, cette réforme a introduit un fonds de financement et d’accompagnement des chambres dont les ressources proviennent :

– en 2014, d’un prélèvement de 50 % des fonds de roulement excédant 4 mois de charges décaissables (hors réserves pour investissement) ;

– à compter de 2015, d’une contribution obligatoire de chacune des chambres. Le montant global annuel de la dotation et son affectation sont définis chaque année par l’assemblée générale de l’APCMA.

Pour l’application du plafonnement de la taxe, il est opéré un prélèvement correspondant au montant de l’écrêtement sur ce fonds, conformément au schéma suivant.

MODALITÉS DE PERCEPTION DE L’ÉCRÊTEMENT ISSUES DE LA RÉFORME DE 2014

Source : commission des finances.

Toutefois, cette réforme pose plusieurs difficultés :

– pour 2014, les ressources du fonds de financement se sont révélées insuffisantes pour permettre à l’État de recouvrer la totalité de l’écrêtement dû (certaines chambres ayant contesté le montant qui leur était demandé, seuls 12 millions d’euros sur 17 millions d’euros attendus ont été versés) ;

– pour 2015, la fixation par l’APCMA du montant de la contribution obligatoire de chaque chambre rend les ressources disponibles incertaines pour permettre le versement d’un écrêtement au budget général (17 millions sont attendus par l’État dont le fonds ne dispose pas à ce jour selon le Gouvernement).

La réforme n’est donc pas opérationnelle et crée des tensions, voire des contentieux, entre l’État et les chambres.

II. LE DROIT PROPOSÉ

Dans ce contexte, le présent article vise à revenir à un mécanisme de prélèvement proche du droit en vigueur avant la réforme de 2014, sous quelques réserves.

En premier lieu, l’article rétablit un plafonnement individuel pour chaque chambre, appliqué toutefois en tenant compte de deux sous-plafonds pour différencier le traitement du droit additionnel réservé aux actions de formation et celui des droits fixe et additionnel réservés aux autres missions des chambres.

Le A du I de l’article prévoit en ce sens que :

– un plafond individuel s’applique aux chambres au prorata des émissions de TACFE figurant dans les rôles de l’année précédente ;

– pour chacune des chambres, ce plafond est ensuite décomposé en deux sous-plafonds obtenus en répartissant son montant au prorata des émissions de TACFE perçues au titre des droits fixes et additionnels d’une part et du droit affecté au financement d’actions de formation d’autre part.

En deuxième lieu, il maintient l’existence du fonds de financement uniquement pour fournir aux chambres de métiers et de l’artisanat une ressource collective pour la mise en œuvre des mutualisations et restructurations décidées par son assemblée générale.

En troisième lieu, il complète les dispositions permettant aux chambres de majorer le produit du droit additionnel (de 60 % du produit du droit fixe à 90 % de ce produit) en prévoyant que les investissements qui pourraient justifier cette majoration doivent avoir pour objet la mutualisation des fonctions administratives et la restructuration du réseau (B du I).

L’entrée en vigueur est prévue pour le 1er janvier 2016. (II).

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La commission adopte l’article 35 sans modification.

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Article additionnel après l’article 35
Instauration d’une obligation de transparence des activités pays par pays pour les entreprises dont le chiffre d’affaires et les effectifs dépassent
certains seuils

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF 176 de M. Pascal Cherki et CF 260 de M. Éric Alauzet.

M. Pascal Cherki. Cet amendement vise à mettre en œuvre la publicité du reporting pays par pays. Dans la loi bancaire, nous avions agi en deux temps. Nous proposons cette fois d’élargir ces règles à toutes les entreprises qui répondent à au moins deux des trois critères suivants : bilan supérieur à 20 millions d’euros, chiffre d’affaires net supérieur à 40 millions d’euros, nombre moyen de salariés au cours de l’exercice supérieur à 250. Les ONG attendent cette mesure avec impatience. Ce matin même, nous avons entendu le commissaire européen Pierre Moscovici, qui s’est dit, à titre personnel, très favorable à cette mesure et qui considère qu’il s’agit là d’un combat important pour l’Europe. Notre pays doit avoir un rôle moteur dans cette évolution.

M. Éric Alauzet. Nous avons déjà adopté, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2016, un amendement de Bruno Le Roux et Karine Berger tendant à commencer la mise en œuvre du programme BEPS (Base Erosion and Profit Shifting) de l’OCDE. Cet amendement prévoit notamment l’obligation, pour les entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions d’euros, de déposer auprès de l’administration fiscale française la liste de leurs implantations partout dans le monde.

Nous avions eu ce même débat en 2013. Nous avions su lancer un signal en légiférant sur les banques, et l’Europe nous avait suivis. Certes, le projet était déjà à l’étude, mais nous avions su enclencher un mouvement. Il me semble important d’adopter la même démarche pour l’ensemble des grandes entreprises, et c’est ce que vise cet amendement.

Mme la Rapporteure générale. Nous avons en effet adopté, en première lecture du projet de loi de finances, en nous inscrivant dans le cadre du programme BEPS, un amendement déposé par le président du groupe socialiste, républicain et citoyen qui prévoit, outre ce que vous avez dit, un échange automatique d’informations et une amende allant jusqu’à 100 000 euros pour les entreprises qui ne respecteraient pas leurs obligations. Il me semblerait plus judicieux de ne pas voter des choses légèrement différentes dans des textes parallèles. J’émets donc un avis de « sagesse moins ».

M. Dominique Lefebvre. Et voilà que nous en revenons au débat sur l’avant-garde éclairée… Je le dis souvent, je n’ai rien contre le fait que la France soit une locomotive, mais à condition de savoir accrocher les wagons ! Penser, mes chers collègues, que les autres pays s’aligneront parce que la France est un modèle est une pure vue de l’esprit. Nous avons, bien sûr, le droit de nous tirer une balle dans le pied, et d’accrocher des boulets aux pieds de nos entreprises — sans d’ailleurs aucun effet de transparence. Mais il faut être bien conscient que la mesure que vous proposez sera contre-productive. Mme la Rapporteure générale l’a dit : c’est un dossier qui avance, lentement mais sûrement, dans le cadre de négociations internationales, et nous devons nous inscrire dans ce mouvement.

M. Éric Alauzet. Peu importe que nous soyons à l’avant-garde ! Je voudrais que la France envoie un signal. Dans les discussions internationales, on prête attention à la position que tel ou tel pays a prise sur telle ou telle mesure.

M. Dominique Lefebvre. Alors votons une résolution !

La commission adopte l’amendement CF 176 (amendement 340).

En conséquence, l’amendement CF 260 tombe.

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Article additionnel après l’article 35
Expérimentation de création d’emplois afin de développer la fréquentation des monuments nationaux

La commission se saisit de l’amendement CF 261 de la Rapporteure générale.

Mme la Rapporteure générale. J’ai déjà présenté cet amendement lors de la discussion du projet de loi de finances : il a été adopté en commission, puis je l’ai retiré en séance pour éviter l’application d’un gage qui pénaliserait le ministère de la culture. Je présente donc ici une nouvelle rédaction.

Cet amendement propose désormais une expérimentation. Il s’agit de permettre au Centre des monuments nationaux de créer des emplois saisonniers qui permettront d’étendre les plages horaires d’ouverture des principaux monuments. Ces emplois serviront à organiser des visites, à ouvrir les caisses plus longtemps… Un bilan sera réalisé après un an, le coût de ces emplois devant être couvert par le surcroît de recettes.

La commission adopte l’amendement CF 261 (amendement 341).

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Après l’article 35

La commission examine l’amendement CF 79 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Il s’agit d’un problème amusant : aujourd’hui, on ne peut plus régler en espèces un achat qui dépasse 1 000 euros, contre 3 000 auparavant. Cependant, lorsque le paiement en espèces concerne un acompte, le seuil est fixé à 460 euros. Je propose d’aligner ces montants.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 79.

Elle se saisit ensuite de l’amendement CF 197 de M. Denis Baupin.

M. Éric Alauzet. Cet amendement vise à demander un rapport sur l’intégration de véhicules légers comme la Twizy au système de bonus-malus.

Mme la Rapporteure générale. Le système de bonus-malus va aujourd’hui de 6 500 à 10 000 euros. Les quadricycles dont vous parlez ne coûtent que 8 000 euros… Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement CF 197.

Puis elle examine l’amendement CF 198 de M. Denis Baupin.

Mme la Rapporteure générale. Un amendement similaire a déjà été adopté en première lecture du projet de loi de finances. Je vous avais proposé de fusionner deux demandes de rapport, l’une sur l’éventualité d’un accident nucléaire et l’autre sur les coûts de démantèlement.

L’amendement CF 198 est retiré.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette ensuite l’amendement CF 203 de M. Éric Alauzet.

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Article additionnel après l’article 35
Demande d’un rapport évaluant les conditions de mise en œuvre de l’assiette communautaire consolidée

La commission se saisit ensuite de l’amendement CF 199 de Mme Michèle Bonneton.

Mme la Rapporteure générale. Sagesse. Il s’agit de l’assiette communautaire consolidée. Il est en effet judicieux de s’intéresser à l’assiette plutôt qu’aux taux. Mais il existe déjà des rapports de notre commission et de la Cour des comptes.

La commission adopte l’amendement CF 199 (amendement 339).

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Article additionnel après l’article 35
Demande d’un rapport sur les conditions d’exonération et de dégrèvement en matière de fiscalité locale

La commission examine l’amendement CF 244 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement vise à demander un rapport sur les conditions d’exonération et de dégrèvement applicables en matière de taxe d’habitation, de taxe foncière et de contribution à l’audiovisuel public. Je me suis en effet aperçue que les personnes qui reçoivent l’allocation de solidarité spécifique (ASS) — et qui ont donc des revenus de 5 000 euros par an — paient la taxe d’habitation et la redevance audiovisuelle… Il en va de même pour les titulaires de la prime transitoire de solidarité (PTS), que nous avons votée il y a quelques mois et qui constitue un revenu imposable.

Mme la Rapporteure générale. C’est une information dont nous devons disposer pour prendre de bonnes décisions. Bercy vient de me faire parvenir la réponse à des questions que je leur avais posées sur ce sujet essentiel : je la transmettrai à tous les membres de la commission.

Il me paraîtrait en tout cas judicieux d’adopter cet amendement, dont je suis cosignataire, afin de soulever le problème en séance publique.

La commission adopte l’amendement CF 244 (amendement 338).

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II.– Garanties

Article 36
Garantie des financements nécessaires à l’acquisition par des clients français de navires de flotte de commerce ou d’engins spatiaux civils construits
en France

Cet article étend la possibilité de recourir, pour les opérations de financement (crédit-client) relatives à l’acquisition par des entreprises françaises de navires ou d’engins spatiaux produits en France par des entreprises françaises, à deux procédures d’octroi de la garantie publique mises en œuvre par la Compagnie française pour le commerce extérieur (COFACE), soit :

– la garantie exportation ( de l’article) ;

– l’assurance-crédit ().

Un décret en conseil d’État doit fixer les conditions à respecter pour bénéficier de cette extension des garanties publiques ().

Celles-ci ne seraient toutefois accordées que dans le cas de l’exposition d’une entreprise française, qui produit ces navires ou engins, à la concurrence d’une entreprise étrangère bénéficiant d’un soutien public à l’exportation. Elles ne devront avoir pour effet que de permettre à cette première entreprise de proposer des facilités de financement équivalentes à celles proposées par l’entreprise étrangère concurrente.

En effet, l’existence de dispositifs de soutien public aux exportations chez la plupart de nos partenaires économiques peut conduire à :

– favoriser les acquisitions de biens étrangers produits dans ces pays, des entreprises nationales pouvant avoir un intérêt financier à privilégier ce type d’acquisitions au détriment de la production nationale ;

– renchérir le prix des acquisitions de produits domestiques pour les acheteurs français par rapport à des acheteurs étrangers (ce qui peut aboutir à dégrader la compétitivité de nos entreprises) ;

– influencer la localisation de certaines entreprises et de leurs différents établissements.

Le Gouvernement, en limitant l’extension proposée aux secteurs les plus compétitifs, permet ainsi de rétablir la compétitivité des entreprises concernées.

Ces dispositions, commentées à l’article 37 qui prévoit une réforme globale des garanties publiques à l’exportation, entrent en vigueur à la date de la promulgation de la loi.

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La commission adopte l’article 36 sans modification.

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Article 37
Réforme du dispositif de financement des exportations

Cet article prévoit de transférer la mise en œuvre des garanties publiques en faveur du développement du commerce international confiées à la compagnie française d’assurance spécialisée dans l’assurance-crédit à l’exportation depuis 1949, la Compagnie française pour le commerce extérieur (COFACE), à la Banque publique d’investissement (Bpifrance). Ce transfert, à l’étude depuis février 2015, a été confirmé le 29 juillet 2015 par le Gouvernement après la conclusion d’un accord de principe avec la COFACE et la banque publique.

Le principal objectif poursuivi par ce transfert est de concentrer au sein de Bpifrance l’ensemble des aides aux entreprises, et notamment aux petites et moyennes entreprises (PME) et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), pour leur développement en France et à l’international, bien que cet établissement ne dispose pas actuellement des capacités d’expertise nécessaire à la mise en œuvre des garanties publiques.

Les conséquences financières et les modalités techniques de ce transfert (notamment en ce qui concerne le rattachement éventuel des équipes de la COFACE en charge des garanties publiques à Bpifrance) ne sont pas présentées dans l’évaluation préalable de l’article.

Outre ce transfert, les dispositions du présent article prévoient :

– la transformation de la garantie indirecte de l’État actuellement proposée par la COFACE (celle-ci bénéficiant de la garantie de l’État au titre des assurances et garanties qu’elle accorde elle-même aux entreprises exportatrices ou investissant à l’étranger) en une garantie directe de l’État octroyée aux entreprises concernées par l’intermédiaire d’un organisme gestionnaire, Bpifrance (à l’instar du système de garantie à l’export mis en place au Royaume-Uni ou en Allemagne) ;

– l’extension des opérations pouvant bénéficier des garanties publiques aux opérations domestiques relatives aux secteurs de la construction navale et de la construction spatiale civile.

L’article 36 du projet de loi, qui traite également de l’extension du champ de la garantie à ces dernières opérations, est présenté dans les développements suivants.

Pour rappel, les prévisions d’encours global des procédures de garanties publiques proposées par la COFACE atteignent près de 70 milliards d’euros en 2015.

Cet encours se répartit comme suit :

Sous-actions

2014

2015
(prévisions)

1. Assurance-crédit (COFACE)

65 344

68 406

dont moyen terme

65 328

68 390

dont court terme

16

16

2. Assurance prospection * (COFACE)

271

153

3. Garantie de change (COFACE)

941

895

4. Garantie du risque économique (COFACE)

0

0

6. Garantie du risque exportateur (COFACE)

1 724

1 767

* Pour cette procédure, il s’agit du budget accordé et non d’un encours.

Source : Gouvernement.

Les garanties publiques rapportent plus de 60 millions d’euros chaque année à la COFACE pour un chiffre d’affaires annuel moyen de 1 450 millions d’euros (soit 5 %).

CHIFFRE D’AFFAIRES DE LA COFACE PAR ACTIVITÉ AU 31 DÉCEMBRE 2014

(en millions d’euros)

Service

2012

2013

2014

Assurance-crédit et services liés

1 305

1 269

1 275

Primes brutes

1 100

1 071

1 078

Services liés à l’assurance

136

133

134

Gestion des procédures publiques

69

66

63

Services complémentaires

182

171

166

Produits nets des activités bancaires

77

69

71

Cautionnement – primes brutes

60

58

54

Services

45

44

41

Total

1 487

1 440

1 441

Source : COFACE, document de référence 2014, avril 2015.

I. LES PROCÉDURES DE GARANTIES PUBLIQUES MISES EN œUVRE PAR LA COFACE

A. LES GARANTIES PROPOSÉES EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT DU COMMERCE EXTÉRIEUR

En plus des activités qu’elle effectue pour son propre compte (assurance-crédit, information commerciale, recouvrement de créances), la COFACE gère pour le compte de l’État et sous son contrôle les risques liés aux échanges internationaux qui ne peuvent pas être assurés par le marché en raison de leur montant, de leur durée ou de la situation économique et politique des pays avec lesquels ces échanges sont réalisés.

Les conditions dans lesquelles elle exerce cette activité spécifique, sous la tutelle de la direction générale du Trésor, sont définies aux articles L. 432-1 à L. 432-5 du code des assurances (281) et à l’article 84 de la dernière loi de finances rectificative pour 2012 (282). Par ailleurs, deux conventions conclues avec l’État en précisent les modalités : la convention de gestion des procédures publiques et la convention relative aux relations financières entre l’État et la COFACE.

Cette activité, comme l’ensemble des opérations de même nature dès lors qu’elles sont « effectuées pour le compte ou avec la garantie de l’État », n’est pas soumise à l’application des directives européennes sur l’assurance-crédit à l’exportation (283), notamment en ce qui concerne les règles prudentielles. En effet, les risques liés aux garanties proposées sont pris en charge par l’État.

Le ministre chargé de l’économie prend, après avis de la commission des garanties et du crédit au commerce extérieur, toutes les décisions d’attribution des garanties publiques (articles L. 432-3 et R. 442-2).

L’ensemble des flux financiers relatifs aux garanties publiques (primes, indemnités, reversements à l’État) font l’objet d’un enregistrement comptable distinct dans les comptes de la compagnie (hors la rémunération dont elle bénéficie au titre de cette activité inscrite dans son compte de résultat). Les primes et les reversements perçus par celle-ci sont versés sur le compte de l’État et les sommes nécessaires au versement des indemnités à leurs bénéficiaires le sont à partir de ce même compte (article L. 432-4).

En tant que gestionnaire de fonds publics, la COFACE est par ailleurs soumise, pour l’activité de gestion des garanties publiques, au contrôle économique et financier de l’État (contrôle et certification par les commissaires au compte prévus par l’article L. 432-4).

Enfin, le ministre chargé de l’économie désigne un commissaire du Gouvernement chargé de veiller à la mise en œuvre de la garantie de l’État ainsi qu’à l’exercice des responsabilités qui sont confiées par l’État à la COFACE. Celui-ci peut prendre connaissance, à tout moment, de sa comptabilité, ainsi que de tout document ou information nécessaire à l’exécution de sa mission (articles R. 442-4 et R. 442-5). Il peut également s’opposer à une décision du conseil, qui peut alors former un recours devant le ministre chargé de l’économie (article R. 442-5-1 et R. 442-5-2).

Les garanties publiques à l’exportation mises en œuvre par la COFACE reposent sur cinq procédures spécifiques (article L. 432-2).

PRÉSENTATION SYNTHÉTIQUE DES CINQ PROCÉDURES COFACE

(en millions d’euros)

Procédure

Objet

Encours

Solde
(primes – solde – divers)

Assurance-crédit

Couvre un exportateur ou sa banque contre le risque de non recouvrement d’un crédit à l’exportation

68 400

+ 739

Assurance prospection

Protège les PME contre le risque d’échec de leur prospection à l’étranger

153

– 111

Garantie de change

Couvre les baisses éventuelles des devises de facturation des exportations

895

– 4

Garantie des investissements

Protège contre des risques de nature politique ou d’atteinte à la propriété

0

– 5

Garantie risque exportateur

Protège les banques contre la défaillance d’un exportateur

1 767

–5

Source : données COFACE et Gouvernement.

Année

2012

2013

2014

Assurance-crédit

Primes

283,7

376,6

261,1

 

Indemnités

– 272,1

– 120,9

– 55,5

Récupérations*

539,4

528,8

554,8

Convention financière

– 27,4

– 27,4

– 26,5

Résultat financier

6,8

6,5

7,1

Divers

89,7

– 0,5

– 1,8

Solde

620,1

763

739,2

* Les récupérations correspondent aux sommes récupérées auprès du débiteur après indemnisation du sinistre à l’assuré.

Source : Gouvernement.

ÉVOLUTION DES INDEMNITÉS, PRIMES ET RÉCUPÉRATIONS ENTRE 2010 ET 2014

(en millions d’euros)

Source : Rapport d’activité 2014, COFACE, juin 2015.

Selon les informations transmises par le Gouvernement, en exécution 2014, cette procédure se caractérise par :

– une poursuite de soldes excédentaires qui dégage un résultat net continûment positif depuis 1995, reversé au budget de l’État. L’assurance-crédit a ainsi dégagé un excédent de 740 millions d’euros en 2014, grâce à une gestion équilibrée des risques pris et à des primes en hausse ;

– une baisse des sinistres après une forte augmentation en 2011 et 2012 qui s’explique par la fin de l’indemnisation d’un sinistre important relatif à un navire construit par STX France (237 millions d’euros payés en 2012). Les sinistres atteignent toutefois 121 millions d’euros en 2013, contre 35 en 2012, hors indemnisation du navire STX, dont 43 % concernent des contrats réalisés en Iran et 56 millions d’euros en 2014. D’autres sinistres importants concernent des acheteurs privés ukrainiens et mexicains ;

– une tendance à la diminution des récupérations en raison de l’épuisement progressif du stock de créances à récupérer. Les récupérations dépassent toutefois les indemnités sans discontinuer depuis 1995 ;

– une forte variation des primes perçues, liée aux fluctuations de l’activité, ainsi qu’à l’évolution des risque-pays et des taux de primes, qui font l’objet d’un encadrement international (« arrangement de l’OCDE » (285) sur les crédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public). Pour 2014, le montant des primes versées par les bénéficiaires de l’assurance-crédit représente 261 millions d’euros, soit 115 millions de moins qu’en 2013. Selon le Gouvernement, cette baisse s’expliquerait notamment par la baisse sensible du nombre des contrats d’Airbus ayant recours à une assurance-crédit publique (– 50 %), dans un contexte de hausse des exportations aéronautiques (+ 2,5 % en 2014), de facilité d’accès aux liquidités et de confiance du marché dans la valeur de revente des produits d’Airbus.

Pour l’année 2015, la COFACE ne devrait exceptionnellement pas verser de recettes au budget général de l’État au titre des primes perçues du fait de l’indemnisation de l’entreprise DNCS à la suite de l’abandon de la vente à la Russie de deux navires Mistral − le fascicule des Voies et moyens relatif aux recettes de l’État annexé au projet de loi de finances pour 2016 prévoit ainsi l’annulation du reversement de 500 millions d’euros de la COFACE à l’État anticipé en loi de finances pour 2015. En 2016, le bénéfice de l’assurance-crédit serait de 1,6 milliard d’euros du fait d’une forte reprise des garanties octroyés.

Année

2012

2013

2014

Assurance-prospection

Primes

6,8

7

7

Indemnités

– 130

– 143,5

– 161,7

Reversement*

54,1

56,4

66,6

Convention financière

– 22,8

– 22,8

– 20,1

Divers

– 3,2

– 2,6

– 3

Solde

– 95,1

– 105,5

– 111,2

* Les reversements correspondent au remboursement progressif par les entreprises des indemnités perçues au titre des dépenses de prospection réalisées en fonction de l’évolution de leur chiffre d’affaires export.

Source : Gouvernement.

Selon les informations transmises par le Gouvernement au titre de l’exécution 2014, cette procédure se caractérise par :

– un montant stable de primes perçues et un montant d’indemnités versées en hausse du fait de la forte augmentation du nombre de bénéficiaires de la procédure (+ 50 % entre 2011 et 2014), liée au volontarisme de la politique de soutien aux entreprises et aux réformes successives mises en œuvre depuis 2012 qui ont dynamisé ce dispositif ;

– une tendance à la hausse des reversements, qui sont dépendants du nombre total d’entreprises bénéficiaires mais aussi de la conjoncture économique et du succès des démarches de prospection engagées par les bénéficiaires.

Le coût de l’assurance prospection a été maîtrisé sur l’exercice 2014, malgré la mise en place courant 2012 de l’assurance prospection premiers pas (A3P) (286), procédure simplifiée destinée aux entreprises primo-exportatrices, et malgré la hausse des bénéficiaires.

En 2015, le déficit de l’assurance prospection serait stabilisé par rapport à 2014 (111 millions d’euros), puis diminuerait à 96,4 millions d’euros en 2016.

Année

2012

2013

2014

Garantie de change

Primes

34

12,7

7,3

Pertes de change

– 2,9

– 7,7

– 6

Couvertures

– 26,7

– 3,3

– 1,4

Convention financière

– 4,2

– 4,2

– 4,2

Divers

0

0

0

Solde

0,2

– 2,5

– 4,3

Source : Gouvernement.

Selon les informations transmises par le Gouvernement au titre de l’exécution 2014, les résultats constatés au cours des précédentes années s’expliquent par :

– des variations du montant des primes encaissées au cours de la période en fonction du recours des entreprises à la procédure, lui-même lié aux fluctuations des taux de change ;

– des variations du montant des indemnités versées, qui dépend de la volatilité des cours de change et des taux d’intérêts, qui reste toutefois maîtrisé depuis quatre ans par rapport aux niveaux observés antérieurement.

Cette procédure fonctionne généralement sans coût budgétaire pour l’État. Elle enregistre en effet régulièrement un résultat technique proche de l’équilibre. Toutefois, les coûts de gestion conduisent parfois à constater un déficit (4 millions d’euros en 2014 et près de 6 millions en prévision pour 2015 et 2016).

Année

2012

2013

2014

Garantie du risque économique

Primes

– 1,2

0

0

Indemnités

0

0

– 4,2

Convention financière

– 0,2

– 0,2

– 0,1

Divers

– 0,4

– 0,7

– 0,5

Solde

– 1,8

– 0,9

– 4,8

Source : Gouvernement.

Année

2012

2013

2014

Garantie du risque exportateur

Primes

7,8

6,6

6,5

Indemnités

– 12,9

– 0,9

– 4,4

Récupérations

0,5

2,3

2

Convention financière

– 5,4

– 5,4

– 9

Solde

– 9,9

2,6

– 4,9

Source : Gouvernement.

Selon les informations transmises par le Gouvernement sur l’exécution 2014 :

– les primes perçues au titre de ce dispositif ont régulièrement augmenté au cours de la période 2007-2012, en lien avec l’augmentation du nombre de bénéficiaires de la procédure, avant de décroître légèrement en 2013 puis 2014 ;

– le résultat 2013 a été bénéficiaire, grâce à une nette diminution du niveau des sinistres (qui sont passés de 12,9 millions d’euros en 2012 à 0,9 million d’euros en 2013). Tandis que le résultat 2014 a été déficitaire à hauteur de 4,9 millions d’euros notamment du fait de la survenance de nouveaux sinistres. Ce déficit serait stable en 2015 puis atteindrait 25 millions d’euros en 2016 du fait d’une hausse de la sinistralité.

B. LE LANCEMENT D’UN PROJET DE TRANSFERT DES GARANTIES PUBLIQUES DE LA COFACE À BPIFRANCE

Depuis le début de l’année 2015, des discussions sont engagées avec la COFACE et Bpifrance en vue du transfert de la gestion des garanties précédemment décrites à cette dernière (287).

L’objectif poursuivi par le Gouvernement est d’offrir aux entreprises, et notamment aux PME, la possibilité de s’adresser à un guichet unique, compétent sur l’ensemble des aides en faveur du développement de l’activité économique en France et à l’international.

Il s’agit également de regrouper ces activités au sein d’un acteur public afin de sécuriser les informations relatives à des entreprises stratégiques pour le développement du commerce international français (288).

Enfin, le Gouvernement est attaché au développement de Bpifrance, créée en 2012 (289).

Le 29 juillet dernier, la conclusion d’un accord entre les trois acteurs de cette réforme a été annoncée (290). Il repose sur les principes suivants :

– la COFACE bénéficierait du versement d’un montant de 77,2 millions d’euros au moment du transfert effectif qui pourrait intervenir dès le premier semestre 2016 ;

– pendant la période de transition, elle continuerait d’assurer la mise en œuvre des garanties publiques pour le compte de l’État et coopérerait avec Bpifrance ;

– la COFACE et Bpifrance engageront, chacune pour ce qui la concerne, des procédures d’information et de consultation des institutions représentatives du personnel sur ce projet.

La Rapporteure générale regrette que, sur une réforme de cette importance pour les entreprises concernées et pour l’attractivité des exportations françaises plus généralement, l’évaluation préalable de l’article n’aborde pas les modalités envisagées pour mettre en œuvre ce transfert et notamment pour assurer que Bpifrance dispose bien des compétences nécessaires pour accomplir cette nouvelle mission dans des conditions satisfaisantes et d’une rémunération suffisante pour les exercer.

Selon les informations qui lui ont été transmises par le Gouvernement à la date de la rédaction du présent rapport, l’ensemble des équipes de la COFACE chargées du suivi des garanties publiques seraient transférées à Bpifrance dans des conditions qui ne sont pas précisées.

II. LA RÉFORME DES GARANTIES PUBLIQUES À L’EXPORTATION

Pour concrétiser ce projet, les dispositions du présent article prévoient :

– le transfert de la mise en œuvre des procédures de garanties publiques à l’exportation de la COFACE à Bpifrance ;

– la transformation de la garantie indirecte de l’État accordée à la COFACE en une garantie directe des entreprises ;

– la fixation des conditions dans lesquelles les garanties peuvent être accordées ;

– l’extension du champ des opérations concernées par ces procédures à certaines opérations domestiques, mentionnées à l’article 36 du présent projet de loi de finances rectificative commenté dans les développements suivants.

A. TRANSFERT DE LA COFACE À BPIFRANCE DES GARANTIES PUBLIQUES AUX EXPORTATIONS

Le présent article procède à l’ensemble des coordinations nécessaires au transfert de l’activité de gestion des garanties publiques de la COFACE à Bpifrance.

Le A du I remplace le titre du chapitre II du titre III du livre IV du code des assurances, « La compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur ʺ COFACE ʺ », par celui de « Garanties publiques pour le commerce extérieur ».

Le C du I prévoit de remplacer les mentions faites à la COFACE à l’article L. 432-2 par une définition des missions de l’organisme ayant vocation à la remplacer : celui-ci est « chargé par l’État de gérer et de délivrer sous son contrôle, pour son compte et en son nom les garanties publiques pour le commerce extérieur » prévues par la nouvelle rédaction de l’article L. 432-1. Il n’est donc pas fait référence explicitement à Bpifrance dans le droit proposé, comme cela était le cas pour la COFACE dans le droit en vigueur.

Seule l’évaluation préalable permet de confirmer le choix de Bpifrance comme nouveau gestionnaire des activités de garantie publique

Le II prévoit des coordinations visant à supprimer les mentions faites à la COFACE (Bpifrance) à l’article 84 de la dernière loi de finances rectificative pour 2012 (qui prévoit des modalités particulières de recours à l’assurance-crédit pour les aéronefs civils ainsi que pour la réassurance de banques soutenant des entreprises exportatrices).

Le III prévoit à l’article L. 612-3 du code monétaire et financier que les opérations d’assurance-crédit à l’exportation avec la garantie de l’État ne sont pas soumises au contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (notamment parce que la garantie de l’État est directement accordée aux entreprises et que le risque ne porte pas sur l’organisme gestionnaire).

B. TRANSFORMATION DE LA GARANTIE INDIRECTE EN UNE GARANTIE DIRECTE

Le transfert de l’activité de garantie de la COFACE à Bpifrance s’accompagne d’une modification importante de la nature de cette garantie.

Le B du I propose une nouvelle rédaction de l’article L. 432-1 présentant les entreprises auxquelles l’État peut accorder directement sa garantie.

Conformément aux dispositions du C du I, l’article L. 432-2 ne prévoit plus que la garantie de l’État puisse être accordée à la COFACE au titre de ses opérations d’assurance des entreprises contre les risques que présente leur activité internationale (garantie indirecte ou « oblique »), mais que sa garantie puisse être accordée directement à ces entreprises par un organisme intermédiaire « chargé par l’État de gérer et de délivrer sous son contrôle, pour son compte et en son nom les garanties publiques pour le commerce extérieur » (garantie directe).

Selon l’évaluation préalable de l’article, la structure indirecte de la garantie actuellement proposée par la COFACE peut en effet restreindre son attrait : « Un certain nombre de banques ou d’investisseurs ne considérant pas les garanties COFACE comme souveraines ne financent pas les crédits-exports français. (…) L’accès restreint à ces liquidités pénalise notamment les financements aéronautiques garantis par la COFACE. (…) S’agissant du secteur aéronautique, l’estimation de la perte de compétitivité de nos financements peut être évaluée à environ 3 à 10 points de base de taux d’intérêt (soit entre 1/3 et 2/3 du différentiel de taux entre les garanties françaises d’une part et allemande ou britannique d’autre part) ».

La mise en œuvre d’une garantie directe de l’État aux entreprises se rapprocherait de pratiques constatées chez certains de nos partenaires économiques (à l’instar du Royaume-Uni ou de l’Allemagne précités).

C. CONDITIONS ENCADRANT L’ACTIVITÉ DE L’ORGANISME GESTIONNAIRE

1. Absence d’intervention dans la décision d’octroyer la garantie

Le D du I introduit plusieurs modifications à l’article L. 432-3 du code des assurances.

En premier lieu, il supprime l’exception qui était faite à la subordination de l’octroi de la garantie à l’avis préalable à de la commission des garanties et du crédit au commerce extérieur pour les garanties portant sur des opérations de gestion afférents aux opérations de garantie des investissements. Par conséquent, toute garantie ne pourra désormais être accordée qu’après avis de la commission « dans des conditions précisées par décret » ( du D).

En second lieu, il prévoit différentes dispositions permettant d’encadrer les conditions dans lesquelles les garanties sont octroyées :

– les dirigeants, les mandataires sociaux, les membres du conseil d’administration, du conseil de surveillance ou de l’organe délibérant de l’organisme gestionnaire ou de ses filières ne peuvent intervenir dans le processus d’octroi de la garantie de l’État. Une exception est faite toutefois pour le directeur général de Bpifrance (du D) ;

– l’organisme gestionnaire met en œuvre les mesures nécessaires à la protection des secrets de la défense nationale et des autres secrets dont il est dépositaire au titre des missions qui lui sont confiées par l’État ( du D).

2. Conclusion d’une convention entre l’organisme et l’État

L’article L. 432-4 est modifié afin d’enrichir le contenu de la convention qui doit être conclue entre l’organisme gestionnaire et l’État.

Si les dispositions en vigueur prévoient que cette convention fixe les modalités d’enregistrement des opérations réalisées avec la garantie de l’État et les conditions dans lesquelles s’effectuent les contrôles et la certification de l’organisme par la Cour des comptes, le du E ajoute que doivent y figurer « les objectifs fixés par l’État à l’organisme » gestionnaire ainsi que « les conditions de mise en œuvre des garanties publiques à l’exportation au nom, pour le compte et sous le contrôle de l’État ».

Le du E prévoit également que si la convention emporte mandat à l’organisme gestionnaire d’assurer l’encaissement de recettes, le paiement de dépenses, dont les indemnisations de sinistres et de toutes opérations de maniement des fonds issus de son activité de garantie, « l’État demeure le titulaire des droits et obligations nés au titre de ces opérations. En particulier, les actifs figurant dans l’enregistrement comptable demeurent la propriété insaisissable de l’État ».

Ces dispositions ont pour objet de clarifier la répartition des rôles entre l’État accordant une garantie directe aux entreprises exportatrices et en supportant les risques, et l’organisme gestionnaire.

3. Gouvernance et suivi d’activité

Le F du I introduit deux nouveaux articles :

– l’article L. 432-4-1 prévoit que le président de l’organisme gestionnaire délègue ses prérogatives de gestion opérationnelle à son directeur général, nommé après avis du président, par le ministre chargé de l’économie. Par ailleurs, ce dernier désigne auprès de l’organisme un représentant chargé de veiller à la mise en œuvre de la garantie de l’État et de contrôler l’exécution de la convention précitée (équivalent du commissaire du Gouvernement chargé des mêmes missions auprès de la COFACE). À cette fin, il peut prendre connaissance à tout moment de la comptabilité de l’organisme gestionnaire ou de tout document ou information nécessaire. Il peut également adresser des observations et recommandations au directeur général qui lui fait connaître dans un délai de quinze jours à compter de leur réception les suites qui leur ont été données ;

– l’article L. 432-4-2 vise à améliorer l’information disponible en prévoyant qu’à l’occasion de la présentation du projet de loi de finances de l’année, le Gouvernement transmet aux commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur les activités de l’organisme gestionnaire.

Actuellement, les informations détaillées relatives aux activités de la COFACE sont présentées dans les documents budgétaires relatifs à la mission Engagements Financiers de l’État et dans le compte général de l’État.

Ces dispositions seront complétées par des dispositions réglementaires.

D. ÉLARGISSEMENT DES OPÉRATIONS POUVANT BÉNÉFICIER DE LA GARANTIE DE L’ÉTAT

Comme précédemment mentionné, le B du I substitue aux dispositions de l’article L. 432-1 (291) une présentation du champ des entreprises pouvant bénéficier de la garantie de l’État au regard de leurs activités soit :

– pour les opérations concourant au développement du commerce extérieur, les entreprises françaises exportatrices, importatrices ou investissant à l’étranger ;

– les établissements de crédit, les sociétés de financement, les entreprises d’assurance et de réassurance, les mutuelles et institutions de prévoyance de droit français ou étranger ainsi que les organismes et fonds de placements collectifs visés par l’article L. 214-1 du code monétaire et financier ;

– pour les opérations de construction navale ou de construction d’engins spatiaux civils, les entreprises françaises en concurrence avec une personne étrangère bénéficiant d’un soutien public.

Ces dernières opérations sont également visées par l’article 36 du présent projet de loi de finances rectificative pour assurer la compétitivité de ces secteurs sur le marché intérieur. Cet article permet ainsi de garantir les opérations sur le territoire national relatives à ces secteurs d’activité au titre de la garantie exportation ( de l’article 36) et de l’assurance-crédit (). Il prévoit par ailleurs que les conditions d’octroi de la garantie à ces opérations sont définies par décret en Conseil d’État ().

En effet, l’existence de dispositifs de soutien public aux exportations chez la plupart de nos partenaires économiques peut conduire à :

– favoriser les acquisitions de biens étrangers produits dans ces pays. Des entreprises nationales peuvent alors privilégier ce type d’acquisitions au détriment de la production nationale ;

– renchérir le prix des acquisitions de produits domestiques pour les acheteurs français par rapport à des acheteurs étrangers ;

– influencer la localisation de certaines entreprises et de leurs différents établissements.

Cette garantie ne serait accordée que dans le cas de l’exposition de la société française à la concurrence d’une entreprise étrangère bénéficiant d’un soutien public à l’exportation et ne pourrait avoir pour effet que de permettre à cette première de s’aligner sur ce soutien.

Le Gouvernement, en limitant l’extension proposée aux secteurs les plus compétitifs, permettrait ainsi de rétablir la compétitivité des entreprises concernées (292).

Cet élargissement a déjà été mis en œuvre par certains de nos partenaires (Grande-Bretagne, Italie, Belgique, Suède et Finlande, et en dehors de l’Union européenne, Australie, Canada, Japon).

Le tableau ci-après présente les évolutions relatives aux opérations pouvant bénéficier de la garantie de l’État en application du droit en vigueur et qui résulterait du droit proposé. Il permet de souligner que le principe de la réforme est de maintenir l’ensemble des garanties actuellement proposées par la COFACE en les adaptant à la situation particulière de certains secteurs économiques très compétitifs.

LES OPÉRATIONS POUVANT BÉNÉFICIER DE LA GARANTIE DE L’ÉTAT

Droit en vigueur

Droit proposé

Opérations de la COFACE prévues par l’article L. 432-2 du code des assurances :

– garantie exportation (a du ) ;

– assurance-crédit (a bis du ) ;

– opérations de gestion des droits et obligations afférents aux opérations de garantie exportation (c du ) ;

– garantie-investissement (d du ) ;

– opérations de réassurance des entreprises habilitées à pratiquer en France des opérations d’assurance-crédit (e du )

– garantie de change ()

– garantie prospection ()

Opérations identiques sous réserve des deux modifications suivantes :

– ajout d’une garantie interne permettant aux entreprises nationales du secteur de la construction navale ou du secteur de la construction d’engins spatiaux domestiques de bénéficier d’une garantie leur permettant d’offrir un même niveau de soutien public que des sociétés en compétition directe avec elles sur un projet d’acquisition par une autre entreprise nationale (article 36 et B du I de l’article 37) ;

– remplacement des dispositions du c du de l’article L. 432-2 en vigueur par l’extension de la garantie de l’État aux opérations de gestion des opérations et garanties de couverture du risque monétaire de l’organisme gestionnaire (Bpifrance)

Opérations de la COFACE prévues par l’article 84 de la loi de finances rectificative pour 2012 :

– assurance-crédit en faveur du secteur des aéronefs civils ;

– assurance-crédit en faveur des opérations de refinancement des banques ayant accordé un crédit export

Idem (G du I)

E. COORDINATIONS ET ENTRÉE EN VIGUEUR

Le IV prévoit que le portefeuille des polices et de toutes autres garanties, promesses de garanties et contrats d’opérations conclus et détenus par la COFACE pour le compte de l’État, ainsi que tout droit, obligation, contrat et autorisation y afférent, est transféré à l’État et géré pour son compte par le nouvel organisme gestionnaire.

Ce transfert n’entraîne aucun droit à modification, résiliation ou indemnisation pour le cocontractant (dont la situation n’est pas modifiée), ni la mise en jeu des clauses de défaut ou d’accélération.

Le V prévoit que les dispositions du présent article doivent entrer en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 31 décembre 2016.

Pour rappel, les dispositions de l’article 36 relatives à l’extension des garanties exportations aux secteurs de la construction navale et d’engins spatiaux civils entrent en vigueur à la date de la promulgation de la loi et seront donc appliquées par la COFACE pendant la période de transition précédant le transfert effectif de ces garanties à Bpifrance.

*

* *

La commission adopte l’article 37 sans modification.

*

* *

Article 38
Garantie par l’État des emprunts de l’Unédic émis en 2016

Le présent article a pour objet d’autoriser l’octroi de la garantie de l’État aux emprunts contractés par l’Unédic en 2016 dans la limite d’un plafond en principal de 5 milliards d’euros (au lieu de 6 milliards d’euros en 2015).

Cette disposition est prise en application du 5° du II de l’article 34 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) qui prévoit que les autorisations d’octroi de garanties de l’État et la fixation du régime de ces garanties relèvent du domaine exclusif de la loi de finances.

Au total, le plafond de la garantie des emprunts de l’Unédic passerait ainsi de 29,5 milliards d’euros en 2015 à 34,5 milliards d’euros en 2016.

PLAFOND EN PRINCIPAL DE LA GARANTIE DE L’ÉTAT SUR LES EMPRUNTS
CONTRACTÉS PAR L’UNÉDIC

(en milliards d’euros)

 

2011

2012

2013

2014

2015 (prévisions)

2016

(prévisions)

Plafond annuel de la garantie de l’État

4,5

7

5

8

6

5

Plafond total

11,5

16,5

23,5

29,5

34,5

Garantie totale accordée à l’Unédic

2

9,7

14,8

20,5

26,2

31,5

Déficit cumulé

– 2,5

– 13,4

–17,9

– 21,3

– 25,7*

– 29,4*

* Prévisions Unédic, octobre 2015.

Source : Compte général de l’État pour 2014 et prévisions Unédic, octobre 2015.

Ces prévisions intègrent les économies qui doivent résulter de la mise en œuvre de la convention d’assurance chômage du 14 mai 2014. Il convient de faire remarquer, à ce titre, que l’arrêté du ministre du travail rendant obligatoire l’application de cette convention a été annulé le 5 octobre dernier par une décision Conseil d’État (dont l’effet est différé au 1er mars 2016) (293).

Dans le cadre de ses perspectives financières pour les années 2015 à 2018 présentées en juin dernier (294), l’Unédic estimait le montant total de ces économies sur la période à près de 3 milliards d’euros.

EFFET ESTIMÉ DE LA CONVENTION DE 2014 SUR LES RECETTES, LES DÉPENSES
ET LE SOLDE FINANCIER DE L’ASSURANCE CHÔMAGE DE 2014 À 2018

(en millions d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

Effet cumulé 2014-2018

Effets sur les recettes de contribution

+ 90

+ 190

+ 190

+ 190

+ 190

+ 850

Effets sur les dépenses d’allocation

– 210

– 640

– 580

– 420

– 260

– 2 110

Effet sur le solde

300

830

770

610

450

2 960

Source : Unédic, Perspectives financières de l’assurance chômage pour les années 2015 à 2018, juin 2015.

L’évaluation préalable de l’article ne mentionne pas les effets que pourraient avoir cette annulation sur les économies envisagées et indique seulement qu’ « une nouvelle convention d’assurance chômage devrait être mise en place en 2016 ». La Rapporteure générale n’a pas reçu de précision sur ce point.

I. L’AUGMENTATION DU DÉFICIT DE L’UNÉDIC CONTENUE PAR L’AMÉLIORATION DES PRÉVISIONS DE RECETTES

A. UNE HAUSSE DES PRÉVISIONS D’AFFILIATION ET DE CONTRIBUTION À L’ASSURANCE CHÔMAGE

La situation financière de l’Unédic reflète les variations de l’activité économique et du niveau du chômage.

Lorsque la conjoncture est favorable et que le chômage diminue, la progression de la masse salariale, sur laquelle les recettes de l’assurance chômage sont assises, et la diminution des dépenses d’indemnisation du chômage conduisent à des résultats positifs en termes de trésorerie. En cas de ralentissement économique et de dégradation du marché du travail, le phénomène inverse se produit et ces résultats deviennent négatifs (« effet ciseau »).

Selon les prévisions relatives à la situation financière de l’assurance chômage pour les années 2015 et 2016 (295), la reprise de l’activité en 2015 (+ 1 %) et 2016 (+ 1,5 %) et la mise en place du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) devraient se traduire par la création de, respectivement, 87 000 postes et 159 000 postes, après une destruction de 48 000 postes en 2014.

La masse salariale augmenterait également de 1,7 % en 2015 et de 2,2 % en 2016, permettant l’augmentation des contributions d’assurance chômage de 1,2 % en 2015 (après retraitement d’« un fort mouvement fin décembre 2014 de paiement par anticipation de certains établissements ») et de 2,3 % en 2016.

PRÉVISIONS DE CROISSANCE, DE MASSE SALARIALE ET DE CONTRIBUTIONS D’ASSURANCE CHÔMAGE

















Source : Prévisions Unédic, octobre 2015.

B. LE RALENTISSEMENT DES DÉPENSES DE L’UNÉDIC

Les dépenses de l’Unédic sont corrélées à l’évolution du nombre de personnes en situation de chômage indemnisées par l’assurance chômage.

Or, le taux de chômage mesuré par l’INSEE passerait de 10,1 % en 2014 à 10 % en 2015 puis 9,7 % en 2016 du fait d’une progression plus rapide de l’emploi total (liée notamment aux créations d’emplois dans le secteur marchand et aux contrats aidés dans le secteur non marchand) que de la population active.

Ces prévisions permettraient de constater une moindre augmentation du nombre de personnes indemnisées par l’assurance chômage (+ 59 000 en 2015 au lieu de + 139 000 en 2014), puis une diminution en 2016 (– 1 000).

Cette évolution du nombre des bénéficiaires des dépenses d’allocation (aide au retour à l’emploi – ARE) ainsi que les dispositions de la convention d’assurance chômage adoptée le 14 mai dernier et applicable, conformément à la décision du Conseil d’État sauf pour ses dispositions contraires au droit (voir infra), jusqu’en mars 2016, devraient permettre de limiter l’augmentation des dépenses d’allocation à + 2,2 % en 2015 et + 0,9 % en 2016.

PRÉVISION DE CROISSANCE, DE CHÔMAGE INDEMNISÉ ET DE DÉPENSES D’ALLOCATION


















Source : Prévisions Unédic, octobre 2015.

RÉCAPITULATIF DES PRÉVISIONS D’EMPLOI ET DE CHÔMAGE EN 2015 ET 2016

Catégorie

2014

2015

Prévision

2016

Prévision

Emploi, Chômage (niveau en fin de période CVS)

Emploi total

26 530 000

26 675 000

26 847 000

Emplois affiliés à l’Assurance chômage

16 409 000

16 496 000

16 655 000

Taux de chômage BIT

10,1 %

10,0 %

9,7 %

Chômeurs indemnisés Assurance chômage (ARE)

2 418 000

2 477 400

2 476 700

Emploi, Chômage (variation sur la période)

Emploi total

23 000

145 000

172 000

Emplois affiliés à l’Assurance chômage

– 48 000

87 000

159 000

Chômeurs indemnisés Assurance chômage (ARE)

139 000

59 000

– 1 000

Source : INSEE, Pôle emploi, DARES, ACOSS, prévisions Unédic.

La décision du Conseil d’État du 5 octobre 2015, Association des amis des intermittents et précaires et autres

De nombreuses dispositions relatives aux conditions d’application de l’assurance chômage font l’objet de négociation entre les partenaires sociaux avant d’être fixées dans une convention dont l’application est rendue obligatoire par un arrêté du ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social.

Or, l’arrêté pris le 25 juin 2014 au titre de la convention du 14 mai 2014 a été attaqué par plusieurs associations et salariés, puis annulé par le Conseil d’État le 5 octobre 2015.

En effet, celui-ci a estimé illégal le dispositif de « différé d’indemnisation » prévu par l’article 21 du règlement général annexé à la convention non pas sur son principe, mais au regard des modalités retenues pour son application qui pourraient aboutir « à priver certains salariés licenciés illégalement de toute indemnisation des préjudices autres que la perte de revenus liée au licenciement ».

Pour rappel, ce dispositif prévoit la possibilité de différer pour une durée maximale de six mois le point de départ du versement des allocations en fonction des ressources des personnes concernées pour limiter le montant global des allocations à verser dans le cas où ces personnes retrouveraient un emploi avant la fin de leurs droits. Les modalités retenues pour apprécier ces ressources prévoient de prendre en compte l’ensemble des indemnités perçues du fait de la rupture du contrat ne résultant pas directement de l’application d’une disposition législative. Parmi ces indemnités, pouvait être prises en compte les indemnités versées à la suite d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse pour leur part supérieure aux salaires perçus les six derniers mois. Or, le Conseil d’État a soulevé que dans le cas de personnes ayant une ancienneté de moins de deux ans ou étant employées dans une entreprise de moins de onze salariés, un tel plancher n’était pas prévu par la loi, ce qui conduisait à apprécier, dans le cadre du différé d’indemnisation, les ressources des personnes concernées en intégrant la totalité de cette indemnité. Par conséquent, dans le cas de la reprise d’une activité avant la fin des droits à l’assurance chômage les personnes concernées n’auraient pas touché la totalité de l’indemnisation destinée à réparer le préjudice subi au titre de leur licenciement abusif.

Pour « garantir la continuité du régime d’assurance chômage », le Conseil d’État a toutefois reporté au 1er mars 2016 l’annulation de l’arrêté ministériel.

En effet, dans le communiqué accompagnant cette décision, le Conseil d’État souligne avoir « constaté que ce mécanisme du ʺ différé d’imdemnisation ʺ était un des éléments clés retenus par les partenaires sociaux pour assurer l’équilibre de l’assurance chômage, et notamment pour compenser le coût de mesures nouvelles visant à inciter à la reprise d’un emploi. L’illégalité des modalités du ʺ différé d’indemnisation ʺ remet donc en cause l’ensemble de la convention ».

Seules certaines dispositions de moindre portée, jugées illégales pour d’autres motifs et portant sur d’autres dispositions (récupérations de prestations versées à tort et obligations déclaratives des assurés), qui pouvaient être dissociées du reste de la convention ont été immédiatement annulées.

Par conséquent, jusqu’au 1er mars 2016, l’annulation de l’arrêté par le Conseil d’État n’a pas pour effet de remettre en cause les économies liées à l’application du différé d’indemnisation, prises en compte dans la trajectoire de solde de l’Unédic.

D’ici à cette échéance, les partenaires sociaux doivent s’accorder sur un avenant à la convention de 2014 ou négocier une nouvelle convention pour traiter la situation des personnes salariées dans de petites entreprises ou disposant de moins de deux années d’ancienneté au regard de ce mécanisme de différé de manière à permettre au Gouvernement de présenter un nouvel arrêté autorisant la poursuite de sa mise en œuvre et la réalisation des économies afférentes.

Dans le cas contraire, le déficit de l’Unédic pourrait être dégradé de 1,2 milliard d’euros pour les années 2016 à 2018.

C. UN DÉFICIT DE PRÈS DE 30 MILLIARDS D’EUROS EN 2016

Le déficit de l’Unédic atteindrait 29,4 milliards d’euros en 2016, soit la somme du déficit de 3,6 milliards d’euros prévu pour l’année 2016 et du déficit cumulé entre 2011 et 2015 de 25,8 milliards d’euros.

SITUATION FINANCIÈRE DE L’ASSURANCE CHÔMAGE

(en millions d’euros)

Année

2014

2015

Prévision

2016

Prévision

Total des recettes

Dont contribution et autres recettes d’assurance chômage

33 936

33 774 (+ 1,7 %)

34 219

34 199 (+ 1,3 %)

34 889

34 879 (+ 2,0 %)

Total des dépenses

Dont dépenses allocataires

37 746

34 086 (+ 1,2 %)

38 591

34 644 (+ 1,6 %)

38 659

34 784 (+ 0,4 %)

Solde

– 3 810

– 4 372

– 3 770

Éléments exceptionnels *

71

– 55

150

Solde net

– 3 739

– 4 427

– 3 620

Situation de l’endettement net bancaire

– 21 327

– 25 755

– 29 375

* 71 millions d’euros apparaissent en éléments exceptionnels en 2014, − 55 millions d’euros en 2015 et 150 millions d’euros en 2016 aux titres de la variation du compte courant de Pôle Emploi et de cessions immobilières.

Source : Prévisions Unédic, octobre 2015.

Cette augmentation serait contenue du fait notamment des économies résultant de l’application de la convention d’assurance chômage, comme l’illustre le schéma ci-après.

ÉVOLUTION DU DÉFICIT DE L’ASSURANCE CHÔMAGE

Source : Prévisions Unédic, octobre 2015.

D. L’ÉVOLUTION DE LA DETTE DE L’UNÉDIC

Fin 2014, le montant de la dette de l’Unédic représentait 21,3 milliards d’euros soit plus de sept mois de recettes de contributions. Selon les projections présentées par l’Unédic dans ses perspectives financières triennales, cet endettement pourrait atteindre 35,1 milliards d’euros en 2018, soit plus de 11,5 mois de contributions, ce qui l’amène à considérer que « le niveau atteint de la dette lui donne aujourd’hui un caractère durable ».

Malgré cette augmentation continue de l’encours de la dette, la charge qu’elle représente est contenue par des taux d’intérêts faibles (300 millions d’euros en 2014). Cette situation pourrait se dégrader à la suite de la remontée des taux attendue dans un contexte de reprise économique et d’inflation.

ENDETTEMENT ET CHARGES FINANCIÈRES

(en millions d’euros)

Année

2011

2012

2013

2014

2015
(prévisions)

Endettement bancaire au 31 décembre

11 523

13 837

17 588

21 476

25 913

Charges financières

163

187

223

326

388

Source : Unédic, Perspectives financières de l’assurance chômage pour les années 2015 à 2018, juin 2015.

Cette remontée des taux a fait l’objet de projections de la part de l’Unédic et de l’Agence France Trésor (AFT), qui diffèrent sensiblement.

PROJECTIONS DES CHARGES FINANCIÈRES LIÉES À L’ENDETTEMENT DE L’UNÉDIC ENTRE 2015 ET 2018

(en millions d’euros)

Année

2015

2016

2017

2018

Endettement bancaire prévu, au 31 décembre

25 913

29 409

32 422

35 054

Unédic

Projection* de taux de court terme

– 0,03 %

0,1 %

0,4 %

0,8 %

Projection de taux long

0,58 %

0,96 %

1,6 %

2,3 %

AFT

Projection de taux de court terme

– 0,05 %

0,25 %

1 %

1,75 %

Projection de taux long

1,2 %

2,1 %

3 %

3,5 %

Charges financières (projections Unédic) (a)

388

359

428

521

Charges financières (projections AFT) (b)

399

425

592

812

Écart prévisions charges financières (a − b)

– 18

– 57

– 140

– 232

* La durée de vie de la dette est passée de 3 ans de maturité moyenne à 5 ans en 2015.

Source : Unédic, Perspectives financières de l’assurance chômage pour les années 2015 à 2018, juin 2015.

PRÉVISIONS D’ÉVOLUTION DE LA CHARGE DE LA DETTE POUR LES ANNÉES 2013-2018

Source : Unédic, Perspectives financières de l’assurance chômage pour les années 2015 à 2018, juin 2015.

II. LA NÉCESSITÉ D’AUGMENTER LA GARANTIE DE L’ÉTAT POUR COUVRIR LES BESOINS DE FINANCEMENT DE L’UNÉDIC

A. LES CONDITIONS DE FINANCEMENT DU DÉFICIT DE L’UNÉDIC

L’Unédic répond à son besoin de financement par le biais de deux programmes d’émissions de titres.

En premier lieu, elle recourt à un programme d’émissions de billets de trésorerie, non garantis par l’État, dont la maturité est inférieure à un an. La situation financière de l’Unédic la contraint toutefois à mettre chaque année une partie des fonds ainsi levés en réserve en guise de garantie pour les investisseurs.

Le plafond global du programme de billets de trésorerie est de 12 milliards d’euros (conformément à la décision du conseil d’administration de l’Unédic du 27 juin 2014), tandis que l’encours de ce programme s’élevait à 8 millions d’euros fin 2012 et 7 millions d’euros fin 2013 (296).

En second lieu, elle se finance à moyen terme par un programme d’émissions obligataires garanties par l’État.

Fin 2014, la garantie accordée à l’Unédic au titre de ses émissions s’élevait ainsi à 23,5 milliards d’euros en 2014 (au lieu de 14,8 en 2013 et 9,7 fin 2012), soit une hausse de 8,7 milliards d’euros en un an résultant principalement de la création de neuf nouveaux emprunts obligataires (d’un montant total de 7 milliards d’euros).

En 2015, le plafond des émissions de l’Unédic a été majoré de 6 milliards d’euros (sur la base d’un déficit prévisionnel de 3,5 milliards d’euros pour cette même année et de tombées de dette estimées à 2,7 milliards d’euros) pour atteindre un total de 29,5 milliards d’euros.

Pour 2016, l’Unédic devra rembourser 1,5 milliard d’euros de titres arrivant à échéance et financer un déficit estimé à 3,5 milliards d’euros. Son besoin de financement atteindra ainsi 5 milliards d’euros que le présent article vise à garantir. Le plafond de la garantie de l’État accordée à l’Unédic atteindrait 34,5 milliards d’euros.

PLAFOND EN PRINCIPAL DE LA GARANTIE DE L’ÉTAT SUR LES EMPRUNTS
CONTRACTÉS PAR L’UNÉDIC

(en milliards d’euros)

Année

2011

2012

2013

2014

2015

(prévisions)

2016

(prévisions)

Plafond annuel de la garantie de l’État

4,5

7

5

8

6

5

Plafond total

11,5

16,5

23,5

29,5

34,5

Garantie totale accordée à l’Unédic

2

9,7

14,8

20,5

26,2

31,5

Déficit cumulé

– 2,5

– 13,4

–17,9

– 21,3

– 25,7*

– 29,4*

* Prévisions Unédic, octobre 2015.

Source : Compte général de l’État pour 2014 et Prévisions Unédic, octobre 2015.

L’octroi de la garantie de l’État se justifie pour des raisons juridiques liées à l’encadrement des émissions de dette par les associations et par des considérations d’ordre financier, la situation financière de l’Unédic ne lui permettant probablement pas de financer ses déficits accumulés sans cette garantie.

B. LES RAISONS JUSTIFIANT L’OCTROI DE LA GARANTIE DE L’ÉTAT À L’UNÉDIC

En premier lieu, l’Unédic est soumise comme toutes les associations à certaines règles en matière d’émissions d’emprunts obligataires et notamment, à celles prévues par l’article L. 213-15 du code monétaire et financier.

Cet article prévoit que, dans l’hypothèse où les déficits accumulés par une association ont conduit à réduire de moitié ou plus ses fonds propres par rapport au montant atteint à la fin de l’exercice précédant celui de l’émission, l’association doit, dans un délai de deux ans, reconstituer ses fonds propres. À défaut, elle perd le droit d’émettre des obligations et tout porteur de titres déjà émis peut en demander le remboursement anticipé.

L’Unédic a procédé, en 2009, à une émission d’obligations non garanties par l’État. Entre la fin de l’exercice précédant cette émission – l’exercice 2008 – et le 31 décembre 2010, ses fonds propres sont passés de – 4,7 milliards d’euros à
– 9,5 milliards d’euros, soit une dégradation de – 102 %. En l’absence de la garantie de l’État (
297), l’organisme se serait vu appliquer les dispositions précitées de l’article L. 213–15 du code monétaire et financier et n’aurait pas pu se refinancer.

À présent, le rythme de dégradation de la situation financière de l’Unédic la met dans l’incapacité de reconstituer ses fonds propres à court ou moyen terme et le plafond de la garantie de l’État est appelé à être augmenté chaque année jusqu’au rétablissement financier de cet organisme.

PRÉVISIONS D’ENDETTEMENT NET BANCAIRE DE L’UNÉDIC

Source : Unédic, Perspectives financières de l’assurance chômage pour les années 2015 à 2018, juin 2015.

En second lieu, l’octroi de la garantie de l’État assure plusieurs avantages financiers à l’Unédic :

– le bénéfice de conditions de financement proches de celles offertes à l’État ;

– l’absence de mise en réserve d’une partie des fonds levés qui serait demandée par les créanciers si l’Unédic ne bénéficiait pas de la garantie de l’État, cette mise en réserve atteignant actuellement le tiers des fonds levés dans le cadre de ses émissions de titres sans garantie.

À noter enfin que la dette de l’assurance chômage est comptabilisée dans la dette publique des administrations publiques, l’Unédic relevant du champ des administrations de sécurité sociale (ASSO).

*

* *

La commission se saisit de l’amendement CF 215 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Cet amendement de suppression est en quelque sorte un amendement de provocation ! Il vise à alerter le Gouvernement sur la masse de dette accumulée par l’Unédic. Il faudra bien, un jour, revoir les conditions d’indemnisation du chômage.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable, sans aucune provocation.

M. Charles de Courson. Le plafond de 5 milliards d’euros prévu par l’article sera-t-il suffisant, madame la Rapporteure générale ? D’après mes informations, il faudrait au moins 5,12 milliards d’euros : nous en sommes déjà à 1,5 et le déficit prévisionnel est de 3,62.

La commission rejette l’amendement CF 215.

Puis elle adopte l’article 38 sans modification.

*

* *

Article 39
Garantie de l’État accordée aux emprunts souscrits par la Société du Grand Paris auprès de la Banque européenne d’investissement (BEI)

Jusqu’en 2022, le besoin de financement de la Société du Grand Paris (SGP) s’élève à 8,035 milliards pour la réalisation du réseau de transport public du Grand Paris, le Grand Paris Express. La Banque européenne d’investissement (BEI) intervenant à parité avec la Caisse des dépôts et consignations (CDC) dans le financement des investissements de la SGP, elle demande à bénéficier de la même garantie de l’État pour la mise en place de ses crédits que celle prévue par l’article 113 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 (298) pour les emprunts de la SGP contractés auprès de la CDC.

Le présent article autorise ainsi le ministre chargé de l’économie à accorder à titre gratuit, la garantie de l’État en principal, intérêts et accessoires, aux emprunts contractés par la SGP auprès de la BEI, au cours de la période de 2016 à 2023, dans la limite d’un montant de 4,017 milliards d’euros en principal.

I. LA SOCIÉTÉ DU GRAND PARIS ET LE PROJET GRAND PARIS EXPRESS

A. LA SGP

1. Statut et missions

Créée par l’article 7 de la loi du 3 juin 2010 (299), la SGP est un établissement public à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle conjointe du ministre chargé du développement de la région capitale, du ministre chargé de l’économie, du ministre chargé des transports et du ministre chargé de l’urbanisme par le décret du 7 juillet 2010 relatif à la Société du Grand Paris (300).

Elle a pour mission principale de concevoir et d’élaborer le schéma d’ensemble et les projets d’infrastructures composant le réseau de transport public du Grand Paris (RTGP) et d’en assurer la réalisation, ce qui comprend la construction des lignes, ouvrages et installations fixes, la construction et l’aménagement des gares, y compris d’interconnexion, ainsi que l’acquisition des matériels roulants conçus pour parcourir ces infrastructures et leur entretien et leur renouvellement.

À cette fin, la SGP peut acquérir, au besoin par voie d’expropriation ou de préemption, les biens de toute nature, immobiliers et mobiliers, nécessaires à la création et à l’exploitation des infrastructures du réseau de transport public du Grand Paris.

Elle peut financer des projets de création, d’extension, d’amélioration ou de modernisation d’infrastructures prévoyant au moins une correspondance avec le réseau de transport public du Grand Paris lorsqu’elles appartiennent à l’un des réseaux suivants :

– réseau de métropolitain affecté au transport public urbain de voyageurs en Île-de-France ;

– réseau express régional (RER) ;

– réseau ferré national dans la région Île-de-France emprunté par des services de transports publics réguliers de personnes relevant de l’article L. 1241-1 du code des transports.

Elle peut être désignée maître d’ouvrage de projets de création ou d’extension d’infrastructures du réseau de métro prévoyant au moins une correspondance avec le réseau de transport public du Grand Paris. Elle est alors propriétaire des lignes, ouvrages et installations ainsi que des gares, y compris d’interconnexion, qu’elle réalise dans ce cadre.

Elle veille également au maillage cohérent du territoire par une offre de transport de surface permettant la desserte des gares du RTGP.

Elle peut conduire des opérations d’aménagement ou de construction.

Elle peut se voir confier par l’État, le Syndicat des transports d’Île-de-France (STIF), les collectivités territoriales ou leurs groupements, par voie de convention, toute mission d’intérêt général présentant un caractère complémentaire ou connexe à ces missions.

Elle peut, dans les infrastructures du réseau de transport public du Grand Paris ou dans les infrastructures de transport public réalisées sous sa maîtrise d’ouvrage, établir, gérer, exploiter ou faire exploiter des réseaux de communications électroniques à très haut débit et fournir au public tous services de communications électroniques.

Elle peut créer des filiales ou prendre des participations dans des sociétés, groupements ou organismes dont l’objet concourt à la réalisation de ces missions.

2. Ressources et budget

a. Ressources

La loi du 3 juin 2010 précitée attribue à la SGP les ressources suivantes :

– les dotations en capital apportées par l’État ;

– les autres dotations, subventions, avances ou participations apportées par l’État et les dotations, subventions, avances, fonds de concours ou participations apportés par l’Union européenne, les collectivités territoriales et leurs groupements, les établissements publics ou toute autre entité, sous forme de terrains, d’ouvrages ou d’espèces ;

– les emprunts sur les marchés financiers ;

– les participations des aménageurs et constructeurs aux coûts des gares ;

– les produits de la cession, de l’occupation, de l’usage ou de la location de ses biens mobiliers et immobiliers, dont les produits des baux commerciaux conclus dans les gares ;

– les produits des redevances domaniales dues pour l’occupation de ses biens ou ouvrages immobiliers ;

– les produits des redevances et produits pour services rendus ;

– les produits de toute autre redevance ou taxe éventuellement créée ou affectée à son profit par la loi ;

– les dons et legs ;

– tous autres concours financiers.

b. Budget en 2015 et 2016

Le budget de la SGP augmente fortement chaque année, passant de 305 millions d’euros en 2014 à 817 millions d’euros pour 2015 et 1,112 milliard d’euros en 2016, en hausse de 36 %. Le conseil de surveillance de la SGP, présidé par notre collègue Jean-Yves Le Bouillonnec, a approuvé les trois dernières opérations d’investissement pour un montant de plus de 8 milliards d’euros : la ligne 17 nord, la ligne 15 est et la ligne 18.

BUDGET 2015 ET 2016 DE LA SOCIÉTÉ DU GRAND PARIS

(en millions d’euros)

Année

2015

2016

Évolution 2016/2015

Total des dépenses

818

1 112

+ 36 %

Fonctionnement

94

154

+ 63,8 %

Investissement

456

575

+ 26 %

Intervention

268

383

+ 42 %

Total des recettes

501

543

+ 8,4 %

Total des recettes fiscales affectées

497

532

+ 7 %

IFER assise sur le matériel roulant exploité par la RATP

60

65

+ 8,3 %

Taxe sur les bureaux

320

350

+ 9,4 %

Taxe spéciale d’équipement

117

117

IFER : imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux.

Source : Société du Grand Paris.

B. LE GRAND PARIS EXPRESS

Le Grand Paris express consiste en la création de quatre nouvelles lignes de métro automatique (lignes 15, 16, 17 et 18), l’extension de la ligne 14 et la réalisation de 68 nouvelles gares. Il s’intègre au « Nouveau Grand Paris des transports », représentant 25,5 milliards d’euros d’investissement pour la SGP, à horizon 2030.

Les chiffres clés du Grand Paris Express

• 1 métro automatique en rocade autour de Paris

• Plus de 200 kilomètres de réseau, soit autant que le réseau du métro parisien

• 72 gares desservies, dont 57 nouvelles

• 4 nouvelles lignes créées

• 2 millions de voyageurs emprunteront chaque jour ce nouveau réseau

• Un investissement sans précédent de près de 26 milliards d’euros en 15 ans

• 1 maître d’ouvrage : la SGP

• 1 instance de gouvernance : la métropole du Grand Paris (MGP)

II. LE BESOIN DE FINANCEMENT DE LA SGP ET LES PRÊTS DE LA CDC ET DE LA BEI

A. LE BESOIN DE FINANCEMENT DE LA SGP

Selon des informations publiées par la SGP, les dépenses à sa charge d’ici 2030 sont de 25,525 milliards d’euros aux conditions économiques de 2012 :

● 22,625 milliards d’euros pour le Grand Paris Express : la réalisation des lignes 15 à 18 ainsi que les prolongements de la ligne 14 entre Mairie de Saint-Ouen et Saint-Denis Pleyel et entre Olympiades et Orly ; cette enveloppe tient compte du plan d’optimisation de 3 milliards d’euros demandé par le Gouvernement sur cet ensemble d’infrastructures ;

● 2,9 milliards d’euros de contributions financières de la SGP à des projets réalisés par d’autres maîtres d’ouvrages :

– le prolongement de la ligne 14 entre les stations Saint-Lazare et Mairie de Saint-Ouen à hauteur de 55 %, soit 798 millions d’euros. Le STIF et la RATP en assurent conjointement la maîtrise d’ouvrage ;

– l’adaptation des réseaux existants (une provision de 450 millions d’euros étant prévue à cet effet) ;

– des projets du plan de mobilisation de la région Île-de-France pour l’amélioration des transports quotidiens en Île-de-France (par la décision gouvernementale du 6 mars 2013), plus précisément :

o le prolongement du RER E (Eole) à hauteur d’un milliard d’euros ;

o le prolongement de la ligne 11 à l’est entre Mairie des Lilas et Rosny-Bois-Perrier à hauteur de 300 millions d’euros ;

o et les schémas directeurs des RER pour 352 millions d’euros.

Dans un discours du 6 mars 2013, le Premier ministre a réaffirmé la réalisation intégrale du Grand Paris Express, tout en demandant certaines optimisations en termes de coûts. Pour financer ces dépenses, la SGP dispose, dans un premier temps, de recettes fiscales de 500 millions d’euros de recettes fiscales affectées par an à partir de 2014. L’État apporterait un soutien budgétaire à la SGP à hauteur d’un milliard d’euros, qui pourra être engagé à compter de 2015 en fonction des besoins de financement de l’établissement public. De même, l’État demande que les collectivités territoriales apportent 25 % de la contribution prévue dans le protocole du 26 janvier 2011, soit 225 millions d’euros. Enfin, des recettes fiscales affectées supplémentaires pourront être mises en place à compter de 2020, en accompagnement des améliorations de desserte procurées par les premières mises en service.

Dans un deuxième temps, la SGP aura recours à l’emprunt, qu’elle remboursera grâce à trois types d’apports :

– les recettes fiscales affectées ;

– les redevances d’usage payées par les exploitants à compter des mises en services ;

– les recettes complémentaires tirées notamment de l’exploitation commerciale des gares ou d’autres services.

B. LES PRÊTS DE LA CDC ET DE LA BEI

La CDC et la SGP ont signé un protocole de coopération le 12 décembre 2014 prévoyant la mobilisation de quatre milliards d’euros de prêts sur fonds d’épargne pour financer le Grand Paris Express. Cette enveloppe sera consentie en contrats de prêts, accordés en fonction de l’avancement des travaux et des besoins de financement de la SGP.

Jusqu’en 2022, le besoin de financement de la SGP s’élève à 8,035 milliards d’euros, auxquels la Caisse des dépôts contribuera par une enveloppe de prêts de 4 milliards d’euros sur fonds d’épargne qui permettront de financer :

– la construction des lignes, ouvrages et installations du réseau de transport dont la SGP a la maîtrise d’ouvrage ;

– la construction et l’aménagement des gares ;

– l’équipement numérique de ces lignes, ouvrages, installations et gares.

Un premier engagement d’un milliard d’euros de prêts a été formalisé dès 2014. Cette somme doit servir à financer les opérations d’investissement sur la ligne 15 Sud (Pont de Sèvres – Noisy-Champs) et les lignes 16, 17 Sud et 14 Nord (Noisy-Champs – Le Bourget RER – Saint-Denis Pleyel – Mairie de Saint-Ouen). Le prêt a été signé le 9 septembre 2015. Cette première tranche d’un milliard d’euros est conclue au titre de l’enveloppe dédiée aux projets contribuant à la transition écologique et énergétique. Le prêt a été souscrit au taux du livret A + 0,75 % (soit actuellement 1,5 %), sur une durée de quarante ans.

Le protocole de coopération du 12 décembre 2014 s’inscrit à la fois dans le cadre de la convention du 28 mars 2014 entre l’État et la CDC relative au Grand Paris et du partenariat stratégique entre la CDC et la BEI. La CDC et la BEI ont signé le 13 juin 2013 une déclaration d’intention complétée en décembre 2013 par un accord opérationnel, visant à renforcer leur coopération au service de l’économie française.

La SGP appartient aux organismes divers d’administration centrale (ODAC). Conformément à l’article 24 de la loi du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (301), elle est soumise à l’interdiction de contracter auprès d’un établissement de crédit un emprunt dont le terme est supérieur à douze mois ou d’émettre un titre de créance dont le terme excède cette durée. Cette interdiction ne s’applique pas aux emprunts contractés auprès de la BEI ni à ceux de la CDC. Les besoins d’emprunts de la SGP seront donc couverts à parité par les prêts de la CDC sur fonds d’épargne et de la BEI.

III. LES GARANTIES DE L’ÉTAT

A. LA GARANTIE DE L’ÉTAT POUR LES EMPRUNTS CONTRACTÉS AUPRÈS DE LA CDC

L’article 113 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 (302) a autorisé le ministre chargé de l’économie « à accorder, à titre gratuit, la garantie de l’État, en principal et en intérêts, aux emprunts contractés par la Société du Grand Paris auprès du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations pendant les huit années 2015 à 2022, dans la limite d’un montant de 4,017 milliards d’euros en principal ».

L’exposé des motifs de l’amendement du Gouvernement, adopté en séance à l’Assemblée nationale, indiquait que « conformément à la convention-cadre relative au Grand Paris, signée en mars 2013 entre l’État (ministères du logement, de la ville et de l’économie) et la Caisse des dépôts et consignations, la Société du Grand Paris peut accéder aux prêts du fonds d’épargne à condition que le fonds d’épargne bénéficie au préalable de la garantie de l’État apportée en loi de finances ».

En pratique, sur la période 2015-2017, la SGP pourra emprunter jusqu’à 350 millions d’euros sur l’enveloppe « prêt au secteur public local » du fonds d’épargne.

Les emprunts garantis par l’État « sont affectés au financement des projets suivants :

« 1° La construction des lignes, ouvrages et installations fixes composant le réseau de transport public du Grand Paris ainsi que des lignes, ouvrages, installations fixes et gares dont la maîtrise d’ouvrage pourrait lui être confiée ;

« 2° La construction et l’aménagement des gares, y compris d’interconnexion ;

« 3° L’équipement numérique de ces lignes, ouvrages, installations et gares ;

« 4° La contribution au plan de mobilisation des infrastructures de transport et d’adaptation des réseaux existants ;

« 5° L’acquisition des matériels roulants conçus pour parcourir les lignes ».

La mise en œuvre de cette garantie est subordonnée à la signature d’une convention de garantie, signée avant la souscription des emprunts, entre le ministre de l’économie et la SGP. Cette convention doit prévoir les modalités de transmission, par la SGP, aux ministres chargés de l’économie, des transports, du logement et du budget d’un « plan financier pluriannuel permettant de s’assurer de la capacité de remboursement des emprunts ».

Si « le remboursement des emprunts est compromis, les ministres chargés du budget et de l’économie, après concertation avec la Société du Grand Paris, peuvent affecter le produit des taxes perçues par la Société du Grand Paris prioritairement au remboursement des emprunts ».

Enfin, un rapport annuel, remis au 1er octobre de chaque année, doit rendre compte au Parlement de l’utilisation par la Société des prêts sur fonds d’épargne.

Au 23 novembre 2015, aucun des documents mentionnés à l’article 113 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 précitée n’avait été transmis à la Rapporteure générale.

B. LE PARALLÉLISME EXIGÉ PAR LA BEI : DROIT PROPOSÉ

La BEI, intervenant à parité avec la CDC dans le financement des investissements de la SGP, demande à bénéficier de la même garantie de l’État pour la mise en place de ses crédits.

L’alinéa 1 (I) du présent article autorise le ministre chargé de l’économie à accorder à titre gratuit, la garantie de l’État en principal, intérêts et accessoires, aux emprunts contractés par la SGP auprès de la BEI, au cours de la période de 2016 à 2023, dans la limite d’un montant de 4,017 milliards d’euros en principal.

La limite de 4,017 milliards d’euros est donc en réalité une limite basse, ne couvrant pas les intérêts, ni les accessoires, dont il n’est d’ailleurs pas fait mention dans l’article 113 de la loi de finances rectificative pour 2014 précitée. Il y est précisé que la capacité de tirage de la SGP sera limitée à 700 millions d’euros entre 2015 et 2017.

L’évaluation préalable du présent article évoque encore la programmation financière des investissements de la SGP pour la période 2015–2022.

Les alinéas 2 à 8 (II) définissent les projets d’investissement au financement desquels les emprunts garantis peuvent être affectés. Il s’agit de :

– la construction des lignes, ouvrages et installations fixes composant le réseau de transport public du Grand Paris ainsi que des lignes, ouvrages, installations fixes et gares dont la maîtrise d’ouvrage pourrait lui être confiée ;

– la construction et l’aménagement des gares, y compris d’interconnexion ;

– l’équipement numérique de ces lignes, ouvrages, installations et gares ;

– la contribution au plan de mobilisation des infrastructures de transport et d’adaptation des réseaux existants ;

– l’acquisition des matériels roulants conçus pour parcourir les lignes.

Cette énumération est reprise de l’article 113 de la loi de finances rectificative pour 2014 précitée. Si ces différentes catégories de projets d’investissement figurent dans les mêmes termes à l’article 7 de la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris, qui définit les missions de la SGP, il n’en est pas de même du plan de mobilisation des infrastructures de transport et d’adaptation des réseaux existants qui n’y figure pas explicitement.

Ces opérations sont éligibles, que la SGP en soit maître d’ouvrage ou qu’elle y contribue à travers l’apport de contributions ou de subventions.

Les alinéas 9 à 11 (III) prévoient l’établissement d’une convention entre le ministre chargé de l’économie et la SGP avant la souscription des emprunts.

La convention doit notamment définir notamment les modalités selon lesquelles la SGP transmet aux ministres chargés de l’économie, du budget, du logement et de l’écologie un plan financier pluriannuel permettant de s’assurer de la capacité de remboursement des emprunts.

Si, au vu notamment de ce plan financier, le remboursement des emprunts est compromis, les ministres chargés du budget et de l’économie, après concertation avec la SGP, peuvent affecter le produit des taxes perçues par celle-ci prioritairement au remboursement des emprunts.

L’alinéa 12 (IV) prévoit un compte rendu du Gouvernement au Parlement sur l’utilisation des emprunts par la SGP.

L’article 113 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 (303) impose déjà au Gouvernement de remettre au Parlement, avant le 1er octobre de chaque année, un rapport rendant compte de l’utilisation, par la SGP, des prêts sur fonds d’épargne, ainsi que de la situation financière de celle-ci.

L’alinéa 12 prévoit que ce rapport soit complété par un compte rendu de l’utilisation, par la SGP, des emprunts contractés par elle auprès de la BEI.

Enfin, l’alinéa 13 (IV) décale d’un an la période pendant laquelle les emprunts contractés par la SGP auprès de la CDC sont garantis par l’État, de 2016 à 2023 au lieu de 2015 à 2022.

*

* *

La commission examine l’amendement CF 60 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Pourquoi l’État apporterait-il sa garantie aux emprunts du Grand Paris, quand il ne fait rien de tel pour Lyon, Marseille ou Paris ? Une nouvelle fois, on accorde à la métropole parisienne un statut dérogatoire.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement CF 60.

Puis elle adopte l’article 39 sans modification.

*

* *

Article 40
Reconduction et amélioration du dispositif de garantie à la construction navale de la Caisse française de développement industriel (CFDI)

Le présent article a pour objet de relever le plafond de la garantie octroyée par l’État aux entreprises de construction de navires civils de 2 milliards d’euros à 3 milliards d’euros et de le proroger de 2015 à 2025.

La garantie proposée porte sur les cautions et les préfinancements accordés par les établissements de crédits ou les entreprises d’assurance au secteur naval au titre d’opérations de construction de navires civils d’un montant supérieur à 40 millions d’euros. En pratique, seule l’entreprise STX France est concernée par cette disposition.

Par ailleurs, l’article propose de transformer la garantie publique indirecte accordée via la Caisse française de développement industriel (CFDI) en une garantie directe accordée au nom de l’État aux entreprises concernées, dont la gestion serait laissée à la charge de la CFDI.

ÉVOLUTION DU PLAFOND DE LA GARANTIE ET DU MONTANT DE GARANTIE
ENGAGÉE ENTRE 2012 ET 2016

(en millions d’euros)

Année

2012

2013

2014

2015

2016

Plafond des garanties de la CFDI

900

900

2 000

2 000

3 000

Garantie engagée

37,6

632

1 282

1 860*

n.c

Effet budgétaire

(= sinistre constaté)

0

0

0

0

0

* en septembre 2015.

Aux termes du 5° du II de l’article 34 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), la fixation du régime des garanties octroyées par l’État relève du champ exclusif des lois de finances.

L’article 119 de la loi de finances rectificative pour 2005 (304) autorise l’État à octroyer sa garantie, via la CFDI, aux cautionnements et préfinancements accordés par les établissements de crédit, entreprises d’assurance et autres établissements garants aux entreprises du secteur de la construction navale pour la construction de navires civils dont le prix de vente est supérieur à 40 millions d’euros.

Le régime de la garantie, précisé par le décret du 17 mai 2006 (305), est défini de manière à répondre aux exigences de la Commission européenne en matière d’aides d’État sous forme de garanties (306) :

– le dispositif ne peut bénéficier qu’à des entreprises solvables, respectant un ratio minimal de fonds propres sur engagements financiers de 10 % et ne se trouvant pas soumises à une procédure de sauvegarde ;

– chaque demande de garantie fait l’objet d’une instruction par un comité d’engagement qui évalue le montant et la durée de la garantie octroyée, de manière à en mesurer l’étendue ;

– une garantie ne peut couvrir plus de 80 % de ces cautionnements et préfinancements et ne peut avoir une durée supérieure à quatre ans ;

– le dispositif ne peut être déficitaire, ce que respecte la présente garantie dont le montant cumulé de recettes nettes perçues par l’État atteindrait 23 millions d’euros au 30 juin 2013 et qui n’a jamais été appelée ;

– la garantie est accordée aux conditions de marché ;

– le dispositif fait l’objet d’un examen chaque année, qui est l’objet du rapport de la CFDI au ministre sur la mise en œuvre du dispositif.

Compte tenu du respect de l’ensemble des critères ainsi définis, ce régime a été déclaré conforme au traité par la Commission européenne dans une décision du 16 mai 2006 (307).

Initialement limité aux cautions émises ou aux préfinancements accordés jusqu’au 31 décembre 2010, le mécanisme a été prorogé (308) jusqu’au 31 décembre 2015. Cette prorogation a été approuvée par la Commission européenne le 23 février 2011 (309).

En l’état du droit, le plafond de cette garantie est fixé à 2 milliards d’euros (à la suite d’une première majoration adoptée en loi de finances rectificative pour 2013 (310)).

En pratique, ce dispositif bénéficie uniquement à l’entreprise de construction navale STX France qui gère les chantiers navals de Saint-Nazaire et de Lorient.

B. LE RENFORCEMENT DE LA COMPÉTITIVITÉ DU SECTEUR DE LA CONSTRUCTION NAVALE

Ce mécanisme de garantie se fonde sur une double justification.

D’une part, sur le plan de la théorie économique, il tend à répondre à une défaillance du marché du capital. L’activité de construction navale nécessite la mobilisation de cautions (par exemple, lors des appels d’offres) et de préfinancements destinés à financer le besoin en fonds de roulement jusqu’à la livraison du navire. Or, les prêteurs privés pourraient ne pas apporter les cautions et préfinancements en montant suffisant en raison de la faible surface financière de STX France, comparée aux prix de vente des navires et donc au montant des garanties nécessaires. En conséquence, l’intervention publique est nécessaire pour permettre à cette activité de production de se poursuivre malgré les défaillances de marché.

D’autre part, selon l’évaluation préalable annexée au présent projet de loi de finances rectificative, l’ensemble des États européens intéressés ont mis en place des dispositifs similaires au bénéfice de leurs entreprises nationales de construction navale. Ce mécanisme de garantie rétablit donc les conditions d’une concurrence libre et non faussée dans ce secteur économique.

Le présent article prévoit le relèvement du plafond de la garantie octroyée par l’État de 2 milliards d’euros à 3 milliards d’euros et le proroge de 2015 à 2025.

Selon l’évaluation préalable, ce relèvement « permet de refléter l’augmentation structurelle du prix des navires et d’intégrer les besoins à venir de STX France au vu des commandes potentielles indiquées par le chantier et de son niveau d’activité cible. Il ménage également une capacité pour une éventuelle demande d’un autre chantier ».

En effet, la société STX aurait l’intention d’avoir recours au dispositif de garanties publiques pour les commandes de deux navires de type « Edge » par l’armateur américain RCCL conclues au premier semestre 2015, sans pour autant que le plafond d’encours actuellement en vigueur permette une telle émission. STX France est également en discussion avec ses principaux clients pour des commandes dont les livraisons s’étaleraient jusqu’à 2023.

*

* *

La commission adopte l’article 40 sans modification.

*

* *

Article 41
Actualisation de la garantie à l’Agence française de développement (AFD) permettant de mettre en œuvre les engagements de la France à l’égard de la Facilité financière internationale pour l’immunisation (IFFIm)

La France participe depuis 2006 au financement des campagnes de vaccination au profit de pays en voie de développement mises en œuvre par la Global Alliance for Vaccination and Immunisation, désormais dénommée Gavi, l’Alliance pour le vaccin.

Les contributions des États participants sont versées à cette organisation par l’intermédiaire de la Facilité financière internationale pour l’immunisation (IFFIm) qui est un mécanisme de financement permettant de faire appel au marché financier.

Le présent article vise à tirer les conséquences de l’engagement pris par le Gouvernement lors de la conférence des donateurs du 25 janvier 2015 de majorer de 150 millions d’euros sa contribution aux campagnes de vaccination pour la période 2016-2026. Pour rappel, la France s’est déjà engagée à verser 1,24 milliard d’euros sur la période 2006-2026, au titre desquels 420 millions d’euros ont été versés au Gavi et 970 millions restent à verser. Cette annonce porte donc à 1,12 milliard d’euros les sommes à verser pour une contribution totale en faveur des campagnes de vaccination menées par cette organisation de 1,39 milliard d’euros sur la période 2006-2026.

ÉVOLUTION DES ENGAGEMENTS PRIS ET DES DÉCAISSEMENTS RÉALISÉS

(en millions d’euros)

Année

2006

2008

2015

Total pour la période 2006-2026

Engagements initiaux

372,8

867,2

150

1 390

Décaissements réalisés

203,6

216,1

0

419,7

Engagements restants

169,2

651,1

150

970,3

Source : IFFIm et évaluation préalable de l’article.

L’engagement de 2006 est mis en œuvre par l’Agence française pour le développement (AFD), au titre et pour le compte de l’État. Elle verse les contributions dues à l’IFFIm en mobilisant les ressources du Fonds de solidarité pour le développement (FSD) dont elle est gestionnaire et bénéficie à ce titre de la garantie de l’État.

Le deuxième engagement pris en 2007 est mis en œuvre directement par le ministère de l’économie et ne nécessite pas de garantie.

La majoration de 150 millions d’euros de la contribution française ainsi que la poursuite des versements sur la période 2016-2026 liés aux précédents engagements rendent nécessaire d’ajuster à la hausse le plafond de la garantie. Celui-ci est porté par le présent article de 372,8 millions d’euros à 970,3 millions d’euros.

Par ailleurs, il est proposé de préciser la rédaction du dispositif légal permettant d’octroyer la garantie de l’État à l’AFD pour assurer son effectivité.

I. LES ENGAGEMENTS PRIS PAR LA FRANCE AU TITRE DU FINANCEMENT DES CAMPAGNES DE VACCINATION

A. LE FONCTIONNEMENT DE L’IFFIM

L’IFFIm est une initiative lancée conjointement par le Royaume-Uni et la France qui doit permettre de financer le Gavi à travers des levées de fonds destinées à la conduite de programmes de vaccination et au renforcement des systèmes sanitaires de soixante-treize pays en développement. À ce titre, le Gavi concourt à la réalisation du quatrième objectif du millénaire (réduction de deux tiers du taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans) (311).

Les gouvernements donateurs s’engagent à verser une aide financière de long terme à cette organisation par l’intermédiaire de l’IFFIm qui lève des fonds sur les marchés financiers en émettant des obligations, couvertes par les engagements pris. Le remboursement de l’emprunt contracté auprès de financeurs privés est assuré à moyen et long termes par le versement progressif de leur contribution par les États concernés.

Les opérations de vaccination ainsi financées sont conduites par le Gavi et les fonctions de gestion de l’IFFIm, dont la durée de vie est limitée à vingt ans à compter de son lancement en 2006, soit jusqu’en 2026, sont confiées à la Banque mondiale.

RECOURS AU MARCHÉ FINANCIER POUR LE FINANCEMENT DES CAMPAGNES DE VACCINATION

Ce mécanisme de financement permet au Gavi de bénéficier par anticipation du montant des engagements pris alors que les États n’en ont pas versé la totalité et de disposer des ressources nécessaires au lancement de ses campagnes.

Pour les États, ce mécanisme permet d’étaler dans le temps leur contribution, sans ralentir la mise en œuvre des programmes de vaccination.

Le graphique ci-dessous illustre les levées de fonds importantes réalisées par l’IFFIm entre 2006 et 2013 et les versements progressifs des différents donateurs.

LEVÉES DE FONDS DE L’IFFIM ET ÉCHELONNEMENT
DES CONTRIBUTIONS DES PAYS DONATEURS

Source : Banque mondiale, 2014.

Ces levées correspondent à la consommation progressive des engagements pris par les États donateurs qui représentaient fin 2014 près de 5,5 milliards de dollars. La France constitue le deuxième donateur (1,5 milliard de dollars) après le Royaume-Uni (2,54 milliards de dollars).

RÉCAPITULATIF DES ENGAGEMENTS PRIS PAR LES ÉTATS DONATEURS AU FINANCEMENT DES CAMPAGNES DE VACCINATION

État

Année de l’engagement

Période de paiement
(en années)

Devise

Montant de l’engagement

Montant en dollars

Afrique du Sud

2007

20

US$

20

20

Australie

2011

19

A$

250

205

Espagne

2006

15

190

230

France

2006

15

373

453

France

2007

19

867

1 054

Italie

2006

20

474

576

Italie

2011

14

26

31

Norvège

2006

5

US$

27

27

Norvège

2010

10

Nkr

1 500

202

Pays-Bas

2009

7

80

97

Royaume-Uni

2006

20

£

1 380

2 154

Royaume-Uni

2010

19

£

250

390

Suède

2006

20

Skr

276

36

Total

5 475

Source : Rapport financier de l’IFFIm pour 2014, décembre 2014.

B. LES ENGAGEMENTS PRIS PAR LA FRANCE

Les échéances du versement des sommes promises par les États au Gavi sont fixées par un calendrier agréé entre les autorités françaises et cette organisation, contraignant légalement.

Le premier engagement de la France de financer les campagnes de vaccination du Gavi a été pris en marge de la conférence de Paris sur les financements innovants du développement qui s’est tenue du 28 février au 1er mars 2006. Son montant est de 372,8 millions d’euros dont le versement devait s’échelonner sur quinze ans (soit de 2006 à 2021). En 2015, 203,6 millions ont été versés et 169,2 millions restent à verser.

Le deuxième engagement, signé en 2007, a été inscrit jusqu’à présent par le programme Aide économique et financière au développement de la mission Aide publique au développement, relevant du ministère des finances et des comptes publics. Il représente 867,2 millions d’euros pour une période de versement de dix-neuf ans (soit de 2007 à 2026). 216,1 millions d’euros ont été versés et 651,1 millions d’euros restent à verser.

CALENDRIER DES VERSEMENTS DUS PAR LA FRANCE

(en euros)

Année

France
1er engagement

France
2e engagement

Total

2006

0

0

0

2007

20 000 000

0

20 000 000

2008

20 600 000

20 000 000

40 600 000

2009

21 300 000

21 690 000

42 990 000

2010

21 900 000

23 520 000

45 420 000

2011

22 600 000

25 500 000

48 100 000

2012

23 200 000

27 650 000

50 850 000

2013

23 900 000

29 980 000

53 880 000

2014

24 700 000

32 510 000

57 210 000

2015

25 400 000

35 250 000

60 650 000

2016

26 200 000

38 220 000

64 420 000

2017

26 900 000

41 440 000

68 340 000

2018

27 800 000

44 940 000

72 740 000

2019

28 600 000

48 730 000

77 330 000

2020

29 400 000

52 840 000

82 240 000

2021

30 300 000

57 290 000

87 590 000

2022

0

62 120 000

62 120 000

2023

0

67 360 000

67 360 000

2024

0

73 040 000

73 040 000

2025

0

79 200 000

79 200 000

2026

0

85 880 000

85 880 000

2027

0

0

0

2028

0

0

0

2029

0

0

0

2030

0

0

0

Total

372 800 000

867 160 000

1 239 960 000

Source : IFFIm, août 2014.

Enfin, dans le cadre de la campagne lancée par le Gavi pour assurer le refinancement de son programme de vaccination pour la période 2016-2026 et de la conférence des donateurs organisée à cette occasion, la France s’est engagée à majorer de 150 millions d’euros sa contribution.

Cette majoration porte de 820 millions d’euros à 970 millions d’euros les sommes restant à verser à l’organisation au titre de cette période, soit une contribution annuelle moyenne de près de 100 millions d’euros (312).

II. LA SÉCURISATION DU DISPOSITIF DE GARANTIE ACCORDÉE PAR L’ÉTAT À L’AFD

A. LE DISPOSITIF EN VIGUEUR

L’article 97 de la loi de finances pour 2007 (313) prévoit que l’AFD bénéficie de la garantie de l’État pour couvrir la contribution due par cette agence au titre du remboursement en principal et en intérêts de la première émission obligataire de l’IFFIm dans la limite d’un plafond de 372,8 millions d’euros correspondant au montant du premier engagement pris par la France.

Cette garantie ne s’exerce que dans le cas où l’annuité due par l’AFD est supérieure à la part des recettes annuelles du FSD attribuée au financement de cette contribution. Selon l’évaluation préalable, « les décisions de versements à l’IFFIm étant prioritaires sur le reste des autres dépenses possibles du FSD et la gestion de ce fonds étant réalisée de façon prudente, après constat des ressources disponibles en trésorerie, le risque que cette garantie soit appelée est nul en pratique ».

B. LES MODIFICATIONS PROPOSÉES

1. La majoration du plafond de la garantie

Cet article propose de porter le plafond de la garantie de 372,8 millions d’euros à 970,3 millions d’euros de manière à couvrir les engagements pris pour la période 2016-2026 devant faire l’objet de versements échelonnés au cours de la période 2016-2026.

ÉVOLUTION DES ENGAGEMENTS PRIS ET DES DÉCAISSEMENTS RÉALISÉS

(en millions d’euros)

Année

2006

2008

2015

Total pour la période
2006-2026

Engagements initiaux

372,8

867,2

150

1 390

Décaissements réalisés

203,6

216,1

0

419,7

Engagements restants

169,2

651,1

150

970,3

2. L’extension de la garantie à l’ensemble des engagements pris en faveur de l’IFFIm

La rédaction de l’article 97 de la loi de finances pour 2007 ne permet d’octroyer la garantie de l’État à l’AFD qu’au titre du remboursement de la première émission obligataire réalisée par l’IFFIm, intégralement réalisé depuis 2011, et non de la totalité des obligations de l’AFD envers cette organisation.

Cette imprécision conduit à ce qu’aucune garantie publique ne puisse plus formellement être accordée à l’AFD au titre des versements qu’elle doit honorer en faveur de l’IFFIM.

Face à ce constat, le présent article propose une nouvelle rédaction prévoyant que la garantie accordée à l’AFD couvre l’ensemble des engagements souscrits par l’AFD, pour le compte et au risque de l’État, dans la limite du plafond de 970,3 millions d’euros.

*

* *

La commission adopte l’article 41 sans modification.

*

* *

III.– Autres mesures

Article 42
Modalités de répartition transitoire du fonds de solidarité en faveur
des départements entre la métropole de Lyon et le département du Rhône

Le présent article organise un partage de la part de ressources du fonds de solidarité des départements (FSD) que le département du Rhône, dans sa configuration antérieure à la création de la métropole de Lyon, aurait perçu.

Codifié à l’article L. 3335-3 du code général des collectivités territoriales et distinct du fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), le fonds de solidarité des départements complète les dispositifs de péréquation horizontale pour les départements.

L’article 78 de la loi de finances pour 2014 (314) a mis en place un prélèvement de solidarité correspondant à 0,35 % des bases des DMTO des départements en 2013. Destiné à accroître dès 2014 la solidarité financière entre les départements, ce mécanisme correspond à un prélèvement de 9,21 % du produit perçu par les départements, si on le rapporte au taux plafond de 3,80 % prévu alors par le code général des impôts et appliqué par la totalité des départements.

L’article 77 de la loi de finances pour 2014 a ouvert pour vingt-quatre mois, du 1er mars 2014 au 29 février 2016, la faculté pour les conseils généraux de relever jusqu’à 4,50 % le taux de la taxe de publicité foncière ou du droit d’enregistrement, qui constituent la part essentielle des DMTO perçus par les départements.

Le total des prélèvements effectués au titre de la péréquation de cette ressource fiscale est plafonné à 12 % du montant des DMTO de l’année précédente pour éviter de trop forts prélèvements sur les départements concernés.

Créé initialement pour la seule année 2014, le fonds a été pérennisé par l’article 116 de la loi de finances pour 2015 (315). Cet article a également pérennisé la hausse de 3,80 à 4,50 % du plafond des taux des DMTO. Enfin, il a prévu l’application de l’article L. 3335-3 du code général des collectivités territoriales à la métropole de Lyon à compter de 2015.

B. LES MODALITÉS DE RÉPARTITION DES ATTRIBUTIONS DU FONDS

1. La répartition des ressources du fonds en deux fractions

Le reversement s’effectue en fonction des restes à charge par habitant de chaque département au titre des allocations individuelles de solidarité (AIS) : l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), le revenu de solidarité active « socle » (RSA) la prestation de compensation du handicap (PCH).

Les ressources du fonds sont réparties en deux fractions, l’une correspondant à 30 % des ressources, la seconde à 70 % des ressources, conformément aux dispositions de l’article L. 3335-3 du code général des collectivités territoriales.

Première fraction

Sont éligibles les départements dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur au potentiel fiscal moyen par habitant de l’ensemble des départements ou dont le revenu par habitant est inférieur à 1,2 fois le revenu moyen par habitant de l’ensemble des départements.

Cette fraction est répartie en fonction du rapport, porté au carré, entre le solde par habitant du département et le solde par habitant constaté pour tous les départements. Par solde, on entend le reste à charge des départements au titre des trois AIS.

Seconde fraction

Est éligible la première moitié des départements classés en fonction décroissante de leur solde par habitant et éligibles à la première fraction.

Cette fraction est répartie en fonction de la « population DGF » (316) et de l’écart relatif entre le solde par habitant et le solde par habitant médian.

2. Plafonnement et abattement sur les attributions du fonds de solidarité

Les départements dont le montant par habitant des DMTO perçu l’année précédente est supérieur à 1,4 fois le montant par habitant de l’ensemble des départements ne peuvent pas bénéficier d’une attribution au titre du fonds. L’attribution au titre du fonds des départements éligibles à la première fraction ou à la seconde fraction et dont le montant par habitant des droits de mutation à titre onéreux est supérieur à 1,1 fois le montant moyen par habitant des droits perçus par l’ensemble des départements fait l’objet d’un abattement de 50 %.

3. Le calcul du reste à charge

Le solde, c’est-à-dire le reste à charge pour les départements au titre du financement des allocations individuelles de solidarité, se calcule comme suit. Il résulte de l’écart entre :

– les dépenses exposées par le département, au cours de l’année N - 1 au titre du RSA, de l’APA et de la PCH,

– et la somme des montants de compensation

o dus au département au titre du RSA, au cours de l’année de répartition N ;

o versés au département, au cours de l’année N – 1, dans le cadre du fonds de mobilisation départementale pour l’insertion (FDMI) ;

o versés au département, au cours de l’année N – 2, au titre de l’APA, de la PCH et en application de l’article 42 de la loi de finances pour 2014, relatif à la répartition des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties perçus par l’État, transférés aux départements (dispositif de compensation péréquée).

Le solde par habitant est égal au solde divisé par la « population DGF » du département.

4. Le potentiel fiscal corrigé

Le potentiel fiscal utilisé pour la répartition des attributions du fonds est majoré ou, le cas échéant, minoré d’une fraction de correction égale pour chaque département à la différence entre les deux termes suivants :

– la somme du produit déterminé par l’application aux bases départementales de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) et de taxe d’habitation (TH) du taux moyen national d’imposition de chacune de ces taxes au titre de l’année 2010 et du produit déterminé par l’application aux bases départementales de taxe professionnelle du taux moyen national d’imposition de cette taxe au titre de l’année 2009 ;

– la somme du produit déterminé par l’application aux bases départementales de TFPB du taux moyen national de cette taxe au titre de l’année 2011, des produits perçus en 2011 par le département au titre de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et des impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux et des produits perçus en 2011 par le département au titre de l’imposition prévue aux 2° et 6° de l’article 1001 du code général des impôts relatif à la taxe spécial sur les contrats d’assurance et des montants positifs ou négatifs résultant de l’application des 1.2 et 2.2 de l’article 78 de la loi de finances pour 2010 (317), relatif aux dotations de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, perçus ou supportés par le département en 2011.

Cette correction vise à neutraliser les effets de la réforme de la taxe professionnelle en comparant les recettes potentialisées des départements l’année précédant la suppression de la taxe professionnelle avec celles perçues l’année suivant la réforme.

II. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE, FINANCIER ET BUDGÉTAIRE

A. LE POIDS CROISSANT DES ALLOCATIONS INDIVIDUELLES DE SOLIDARITÉ DANS LES DÉPENSES DES DÉPARTEMENTS

Dans son rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités territoriales et de leurs établissements publics publié en octobre 2015 (318), la Cour des comptes souligne que les charges de fonctionnement des départements ont continué d’augmenter en 2014, à hauteur de 2,4 %, essentiellement du fait de la croissance conjuguée des dépenses sociales (+ 4 %) et des dépenses de personnel (+ 1,9 %). Les dépenses liées au RSA et aux allocations aux personnes handicapées ont augmenté respectivement de 9,2 % et de 3,3 % en 2014. L’augmentation des charges dues au titre RSA s’explique à la fois par un accroissement de 5,76 % du nombre de foyers bénéficiaires et par la double revalorisation de l’allocation de 1,3 % au 1er janvier 2014 et de 2 % au 1er septembre 2014. Le montant des allocations personnalisées d’autonomie a augmenté de 1,6 %. La progression des dépenses sociales est à l’origine de 87 % (soit 1,19 milliard sur 1,37 milliard d’euros) de la progression des charges de fonctionnement des départements en 2014.

Une étude de l’Observatoire national de l’action sociale (ODAS) (319) parue en juin 2015 présente l’évolution du taux de couverture des allocations AIS par les abondements de l’État entre 2009 et 2014.

TAUX DE COUVERTURE DES ALLOCATIONS RSA PAR LES ABONDEMENTS DE L’ÉTAT

(en France métropolitaine, en millions d’euros)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Évolution
2013-2014

Dépense nette d’allocation

5 720

6 590

6 840

7 150

7 850

8 570

9,2 %

Concours TICPE-FMDI

5 170

5 580

5 720

5 700

5 600

5 630

0,5 %

Taux de couverture

90,4 %

84,7 %

83,6 %

79,7 %

71,3 %

65,7 %

– 7,9 %

Charge nette d’allocation

550

1 010

1 120

1 450

2 250

2 940

30,7 %

TICPE-FMDI : taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques-fonds de mobilisation départementale pour l’insertion

Source : Observatoire national de l’action sociale (ODAS).

TAUX DE COUVERTURE DES ALLOCATIONS APA PAR LE CONCOURS CNSA

(en France métropolitaine, en millions d’euros)

Année

2010

2011

2012

2013

2014

Évolution
2013-2014

Dépense nette d’APA

4 990

5 110

5 240

5 270

5 390

2,3 %

Taux de couverture

30,1 %

30,1 %

29 %

30,9 %

31,5 %

1 %

CNSA : Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.

Source : ODAS.

TAUX DE COUVERTURE DES ALLOCATIONS PCH-ACTP
PAR LES ABONDEMENTS DE L’ÉTAT

(en France métropolitaine, en millions d’euros)

Année

2006

2012

2013

2014

Évolution
2013-2014

ACTP

730

490

470

450

– 4,3 %

PCH

80

1 400

1 520

1 620

6,6 %

Part de la PCH dans le total des allocations

9,9 %

74,1 %

76,4 %

78,3 %

Concours CNSA

460

520

530

530

0 %

Taux de couverture des allocations

56,8 %

27,5 %

26,6 %

25,6 %

ACTP : allocation compensation pour tierce personne.

Source : ODAS.

B. DE NOUVELLES RECETTES EN 2014 ET DES MESURES D’URGENCE ANNONCÉES POUR 2015

1. De nouvelles recettes attribuées aux départements en 2014

Alors que la contribution des départements au redressement des finances publiques dans le cadre du pacte de confiance et de responsabilité s’est élevée à 476 millions d’euros en 2014 et 1,148 milliard d’euros en 2015, deux nouvelles ressources ont été transférées aux départements afin de compenser une partie du déficit de financement des AIS : les frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties des départements, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), à hauteur de 827 millions d’euros en 2014 ainsi que du produit résultant de la possibilité de relever les taux plafonds des DMTO de 3,8 à 4,5 %. Quatre-vingt-dix départements ont fait le choix d’augmenter ce taux dès 2014, pour un produit supplémentaire évalué à 700 millions d’euros.

En parallèle, la péréquation a été renforcée par la création de nouveaux fonds : le dispositif de compensation péréquée en application de l’article 42 de la loi de finances pour 2014, dont le montant prévisionnel pour 2015 s’élève à 874,4 millions d’euros, le fonds de solidarité pour les départements de la région d’Île-de-France (FSDRIF), dont les ressources globales sont fixées à 60 millions d’euros en 2015. Enfin, le montant du fonds de solidarité des départements était de 559 millions d’euros en 2014.

2. L’annonce de mesures d’urgence pour le financement du RSA en 2015

Selon l’Association des départements de France (ADF), les dépenses liées au RSA ont augmenté de 9,1 % en moyenne par rapport à 2012 (jusqu’à + 20 % pour certains départements). Or, le budget alloué au RSA représente plus de la moitié (58 %) des dépenses d’AIS des départements, devant l’APA et la PCH.

Lors du congrès de l’ADF le 15 octobre 2015, la ministre chargée de la décentralisation, Mme Marylise Lebranchu, a annoncé une aide d’urgence pour une dizaine de départements, attribuée en fonction des difficultés rencontrées et du niveau du reste à charge, mais aussi des « efforts de gestion » réalisés ces dernières années par les départements. Les modalités de cette aide devraient être prévues par un amendement au présent projet de loi de finances rectificative.

Un groupe de travail du Gouvernement et des départements doit poursuivre ses travaux sur la question d’une recentralisation du RSA, jusque début 2016.

III. LES MODIFICATIONS PROPOSÉES

1. Le problème d’application pour la métropole de Lyon

L’article 116 de la loi de finances pour 2015 prévoit que le fonds de solidarité des départements est applicable à la métropole de Lyon dès 2015. Cette disposition, cohérente avec la pérennisation du fonds initialement prévu pour la seule année 2014, est intervenue postérieurement à la publication de l’ordonnance du 6 novembre 2014 relative à l’adaptation et à l’entrée en vigueur de certaines dispositions financières et fiscales applicables à la métropole de Lyon (320).

Les données N – 2 nécessaires au calcul de la répartition du FSD pour 2015 et 2016 ne sont pas disponibles pour la métropole de Lyon puisque celle-ci n’existait pas en 2013 ni en 2014. Cette collectivité territoriale à statut particulier a été instituée au 1er janvier 2015. Il convient donc de prévoir une autre méthode de répartition transitoire des attributions du FSD pour le département du Rhône et la métropole de Lyon au titre des années 2015 et 2016.

2. La clé de répartition proposée

Le présent article propose d’attribuer en 2015 et 2016 à la métropole de Lyon et au département du Rhône un montant de dotation versée au titre des ressources du fonds de solidarité en faveur des départements égal à celui attribué au département du Rhône dans ses limites territoriales antérieures.

La métropole de Lyon percevrait 81,3556 % de ce montant et le département du Rhône, 18,6444 %.

Cette clé de répartition correspond au poids des charges respectives de chacune de ces collectivités au titre du RSA, de l’APA et de la PCH. Elle résulte de la méthode retenue pour la répartition des crédits du dispositif de compensation péréquée, validée par les collectivités concernées lors de l’élaboration de l’ordonnance du 6 novembre 2014 précitée. Cette ordonnance prévoit par ailleurs, pour la répartition des prélèvements et des ressources du fonds de solidarité des DMTO en 2015, en 2016 et en 2017, que les DMTO perçus par le département du Rhône en 2012, en 2013 et en 2014 sont affectés à hauteur de 19,2 % au département du Rhône et de 80,8 % à la métropole de Lyon.

IV. L’IMPACT ÉCONOMIQUE

La disposition proposée est neutre pour l’État.

Au titre de l’année 2015, la dotation revenant au département du Rhône s’établirait à 0,6 million d’euros et celle revenant à la métropole de Lyon s’élèverait à 2,7 millions d’euros.

*

* *

La commission adopte l’article 42 sans modification.

*

* *

Article 43
Souscription à l’augmentation des ressources en capital
de la Société interaméricaine d’investissement (SII)

Le présent article autorise le ministre chargé des finances à souscrire à l’augmentation de capital de la Société interaméricaine d’investissement (SII) pour 706 nouvelles parts, portant la participation de la France à 3 163 parts.

CAPITAL DE LA SII AVANT ET APRÈS AUGMENTATION DE CAPITAL

(en millions de dollars)

Évolution du capital

Capital de la SII

avant l’augmentation de capital

Capital de la SII

après augmentation de capital

Total

703,2

environ 2 700*

Participations de la France

21,6

environ 50*

Participations de la France (en %)

3,1

1,9

(*) Une fraction de l’augmentation de capital (environ 0,7 milliard de dollars) est réalisée par transfert des parts de la Banque interaméricaine de développement (BID) vers la SII. Ce mécanisme reste toutefois conditionné à la situation financière de la BID au sens où une éventuelle dégradation de ses ratios prudentiels entraînerait une diminution marginale du capital transférable. C’est la raison pour laquelle, le montant exact du capital de la SII et de la participation de la France à l’issue de l’opération ne peut pas être déterminé à ce stade.

Source : réponse au questionnaire de la Rapporteure générale adressé au Gouvernement.

La souscription à une augmentation de capital de la SII se rattache au domaine des lois de finances dans la mesure où elle relève de l’approbation d’une convention financière au sens du d) du 7° du II de l’article 34 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

Il est précisé, dans l’évaluation préalable de l’article, que cette augmentation de capital, doit s’élever pour la France, en numéraire, à 11 millions d’euros et qu’elle sera étalée sur sept années durant la période 2017-2023.

Par ailleurs, le capital de la SII sera également augmenté par un transfert des parts détenues au capital de la Banque interaméricaine de développement (BID) à la SII. Au total, par l’effet combiné de ce transfert de droits et de l’augmentation en numéraire, la participation de la France passera de 21,6 millions de dollars à environ 50 millions de dollars. Elle sera, ainsi, ramenée de 3,1 % à 1,9 % du capital.

I. SOCIÉTÉ INTERAMÉRICAINE D’INVESTISSEMENT, FILIALE DE LA BANQUE INTERAMÉRICAINE DE DÉVELOPPEMENT

La Banque interaméricaine de développement (BID) est le partenaire historique de la France en Amérique latine en matière de soutien multilatéral au développement économique. À ce jour, la participation de la France à la BID atteint 1,9 % de son capital. Dans les comptes arrêtés au 31 décembre 2014, cela correspondait à une participation de 101,6 millions de dollars de capital appelé pour la BID.

La SII est une filiale de la BID. Elle est aujourd’hui détenue à près de 54 % par les pays emprunteurs, 23 % par les États-Unis et 19 % par les pays européens. La France en est actionnaire depuis 1986. Elle détient actuellement 3,1 % du capital appelé. Le capital de la SII est de 703,2 millions de dollars (soit une participation pour la France de 21,6 millions de dollars).

À travers sa participation dans la SII, la France participe au développement des pays d’Amérique latine et à la lutte contre la pauvreté. Cette participation lui permet à la France d’exercer son influence dans les instances internationales.

La SII a pour objet de stimuler le développement économique de ses pays membres régionaux en encourageant la création, l’expansion et la modernisation d’entreprises privées, de préférence petites et moyennes, de façon à compléter les activités de la BID. Dans la poursuite de cet objet, la SII exerce les activités suivantes, à l’appui des entreprises qu’elle soutient :

– financer, seule ou en association avec d’autres prêteurs ou investisseurs, l’établissement, l’expansion et la modernisation d’entreprises, en utilisant pour ce faire les instruments et/ou mécanismes qu’elle juge dans chaque cas appropriés ;

– faciliter l’accès des entreprises aux capitaux privés et publics, locaux et étrangers, ainsi qu’aux connaissances techniques et compétences administratives ;

– stimuler le développement de possibilités d’investissement qui favorisent les flux de capitaux publics et privés, locaux et étrangers, vers des investissements dans les pays membres ;

– prendre dans chaque cas les mesures appropriées et nécessaires pour assurer le financement des entreprises, compte tenu de leurs besoins et des principes fondés sur une administration prudente des ressources de la société ;

– fournir une coopération technique pour la préparation, le financement et l’exécution de projets, y compris le transfert de techniques appropriées.

En 2014, la SII a approuvé le financement de 64 projets en Amérique latine et aux Caraïbes, portant sur 426 millions de dollars d’engagements financiers. La SII détenait, fin 2014, un portefeuille de prêts et prises de participations d’environ 1 milliard de dollars. En 2014, son chiffre d’affaires s’est élevé à 61,3 millions de dollars de revenus, pour un résultat net de 13,3 millions de dollars (321).

II. L’ENGAGEMENT DE LA FRANCE EN VUE D’UNE AUGMENTATION
DE CAPITAL

A. LES PRINCIPES DE L’AUGMENTATION DE CAPITAL CONCERNANT
LA FRANCE

L’augmentation de capital de la SII a été décidée lors de la dernière assemblée générale du groupe BID tenue à Busan (République de Corée) les 28 et 29 mars 2015. La participation de la France est donc un engagement international, confirmé par un courrier en date du 23 septembre 2015 adressé à la SII par le ministre des finances et des comptes publics.

Le capital de la SII sera ainsi augmenté de 2 milliards de dollars pour être porté de 0,7 à 2,7 milliards de dollars. Cette augmentation de capital se déroule selon deux modalités.

L’augmentation de capital en numéraire sera de 1,3 milliard de dollars. La participation de la France à cette modalité de l’augmentation de capital est évaluée à 11 millions d’euros. Elle sera étalée sur sept ans, selon un calendrier qui n’est pas encore connu à ce stade. Cela correspond à la souscription de 706 nouvelles parts.

Par ailleurs, le capital de la SII sera augmenté par un transfert des parts détenues au capital de la BID à la SII, à hauteur de 0,7 milliard de dollars.

Au total, à l’issue de l’augmentation de capital, la participation de la France dans le capital de la SII sera portée de 21,6 millions à environ 50 millions de dollars compte tenu de l’augmentation en numéraire (11 millions d’euros) et du transfert des droits détenus au sein de la BID vers la SII.

En pourcentage du capital, la participation de la France sera ainsi ramenée de 3,1 % à 1,9 %. La France a, en effet, décidé de ne pas souscrire la totalité des parts qui lui étaient allouées. Dans un contexte budgétaire contraint, cette décision permet toutefois de continuer à soutenir financièrement notre partenaire historique dans la région, de permettre à des actionnaires émergents – à l’instar de la Chine, dont la part était très résiduelle – de prendre une part plus active et légitime à la gouvernance de cette institution multilatérale.

B. LES RAISONS DE L’AUGMENTATION DE CAPITAL

Il est rappelé, dans l’évaluation préalable du présent article, que les raisons et le contexte de cette augmentation de capital.

Il est ainsi expliqué : « Un bureau indépendant d’évaluation de la BID a établi que l’organisation actuelle, structurée autour de quatre guichets indépendants, insuffisamment coordonnés, aux procédures et aux mandats distincts, obérait son efficacité. La réforme du soutien au secteur privé a été relancée début 2013. Les gouverneurs de la BID et de la SII ont adopté une résolution reposant sur deux piliers pour y remédier :

« a) Un volet organisationnel consistant à redéployer, au sein de la SII, les structures d’appui au secteur privé actuellement logées à la BID. Un plan de mise en œuvre détaille les principales étapes attendues en vue de ce redéploiement ;

« b) Une décision d’augmentation de capital de la SII.

« Lors de la dernière assemblée annuelle du groupe BID tenue à Busan les 28 et 29 mars 2015, il a été décidé de procéder à cette augmentation de capital tout en préservant au maximum la structure actionnariale actuelle de la SII et en minimisant les apports en capital additionnels.

« C’est dans ce cadre qu’il est prévu d’apporter 1,3 milliard de dollars de capital libéré additionnel par les actionnaires de la SII sur la période 2017-2023, selon un calendrier de paiement dégressif, et un transfert de capital de la BID à la SII de 2018 en 2025 de 0,7 milliard de dollars. Cette augmentation de capital permettra de renforcer l’efficacité globale du groupe et de renforcer la solidité financière de la BID.

« C’est dans ce cadre que, par un courrier en date du 23 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics a indiqué auprès de la SII que la France pourrait souscrire 706 actions nouvelles, en plus des transferts de capital de la BID à la SII. À l’issue de cette opération la participation de la France à la SII, actuellement de 3,1 %, serait la même qu’à la BID, à savoir 1,9 %. »

L’augmentation de capital vise à créer une nouvelle entité, dont les résultats financiers ne peuvent, par définition, pas être connus à l’avance. Toutefois, les volumes d’engagements et les résultats financiers seront sensiblement plus élevés que ceux de la SII, dans la mesure où le capital sera, à terme, quasiment multiplié par quatre, passant de 0,7 milliard à 2,7 milliards de dollars.

III. LES IMPACTS BUDGÉTAIRES ET PATRIMONIAUX DE L’AUGMENTATION DE CAPITAL SUR LES COMPTES DE L’ÉTAT

Une dépense de 11 millions d’euros sera constatée sur la période 2017-2023 sur le compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État, selon un calendrier qui n’est pas encore connu à ce stade.

Bien que s’agissant de dépenses budgétaires, les flux de capitalisation de la nouvelle entité, n’entraîneront pas d’appauvrissement de l’État dans sa comptabilité patrimoniale. En effet, la SII réalise des investissements financiers
– prises de participations, prêts – dans des sociétés privées, ayant vocation à créer des profits. Les parts détenues dans cette société sont, dès lors, valorisables au bilan de l’État.

Cette dépense budgétaire n’aura, de même, pas de conséquence en comptabilité nationale car elle est assimilable à une opération financière. Une prise de participations est, en effet, traitée comptablement comme une opération financière en comptabilité nationale lorsque l’État intervient en « investisseur avisé ». Cette dépense ne viendra donc pas aggraver le déficit public (322).

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La commission adopte l’article 43 sans modification.

Elle adopte enfin la seconde partie et l’ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2015 modifiés.

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