N° 3351
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 décembre 2015.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE (N° 3290) DE MME MARIETTA KARAMANLI ET M. CHARLES DE LA VERPILLIÈRE sur le programme européen de sécurité,
PAR Mme Marietta KARAMANLI,
Députée.
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SOMMAIRE
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Pages
I. LE PROGRAMME EUROPÉEN EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ POUR 2015-2020… 8
II. … VOIT SON AMBITION RENFORCÉE ET SA MISE EN œUVRE ACCÉLÉRÉE DEPUIS LES ATTENTATS DU 13 NOVEMBRE 2015… 15
A. LA RÉPONSE PÉNALE AU TERRORISME 15
B. LA LUTTE CONTRE LA DÉTENTION ET LE TRAFIC D’ARMES 17
C. L’ÉCHANGE D’INFORMATIONS ET LA COOPÉRATION 19
D. LE RENFORCEMENT DES CONTRÔLES AUX FRONTIÈRES EXTÉRIEURES 22
III. …MAIS DEMEURE PERFECTIBLE 25
A. LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE ADOPTÉE PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES 25
B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION DES LOIS 26
PRINCIPAUX APPORTS DE LA COMMISSION
Au cours de sa réunion du 15 décembre 2015, la commission des Lois a adopté la proposition de résolution européenne sur le programme européen de sécurité, en y apportant, sur proposition de sa rapporteure, les modifications présentées ci-après.
La Commission a demandé aux institutions européennes de procéder au plus vite à une révision ciblée du code frontières Schengen, afin de permettre des contrôles systématiques de l’ensemble des voyageurs se présentant aux frontières de l’espace Schengen, et non seulement des ressortissants des pays tiers. Il s’agit ainsi de pouvoir appréhender les personnes originaires des États membres et susceptibles d’y revenir afin de commettre un acte terroriste. Elle a également insisté sur la nécessité d’améliorer la qualité des données saisies dans le système d’information de Schengen ainsi que leur traitement par les États membres.
Elle a salué le compromis trouvé le 2 décembre 2015 par le Parlement européen et le Conseil sur la proposition de directive du 2 février 2011 relative à la mise en place d’un système européen de collecte et de traitement des données des dossiers des passagers ainsi que la déclaration conjointe des États membres et a demandé une adoption et une transposition rapide du texte.
La commission des Lois est saisie, en application de l’article 88-4 de la Constitution, de la proposition de résolution européenne relative au programme européen en matière de sécurité que votre rapporteure a déposée avec son collègue M. Charles de La Verpillière, au nom de la commission des Affaires européennes, sur le bureau de l’Assemblée nationale le 1er décembre 2015.
Contribution de la Commission européenne à l’élaboration de la stratégie de sécurité intérieure de l’Union européenne pour 2015-2020 (1), le programme européen de sécurité a pour objet de préciser les domaines dans lesquels l’Union européenne peut apporter une valeur ajoutée à l’action des États membres en matière de sécurité – la sécurité nationale relevant de la compétence exclusive de ces derniers selon les traités (2) – ainsi que la méthode à suivre.
À cet effet, la Commission européenne arrête tout d’abord cinq grands principes : le respect des droits fondamentaux, la transparence et le contrôle démocratique, l’amélioration de l’utilisation des instruments juridiques en vigueur, l’accroissement de la coopération entre les agences de l’Union et avec les États membres et le renforcement de la prise en considération de la sécurité de l’Union dans ses relations avec les États tiers. Elle retient ensuite trois axes d’intervention au travers desquels l’Union européenne peut apporter une valeur ajoutée en matière de sécurité : l’échange d’informations entre les services répressifs nationaux et les agences de l’Union, la coopération policière et le soutien à la formation et à l’innovation. Elle définit enfin trois domaines prioritaires : le terrorisme et la radicalisation, la criminalité organisée et la cybercriminalité.
Présenté le 28 avril 2015 par la Commission européenne (3), approuvé par les chefs d’État et de gouvernement lors du Conseil européen des 25 et 26 juin et examiné le 9 juillet de la même année par le Parlement européen qui a, à cette occasion, mis l’accent sur la nécessité d’une meilleure prise en considération de la protection des droits fondamentaux et de la prévention de la radicalisation (4), le programme européen de sécurité revêt une actualité particulière depuis les attentats du 13 novembre 2015 qui ont endeuillé la France.
Ainsi que l’a souligné le commissaire européen chargé de la Migration, des affaires intérieures et de la citoyenneté, M. Dimitris Avramopoulos, lors de son audition conjointe par les commissions chargées des lois, des affaires étrangères et des affaires européennes de votre assemblée, le 1er décembre 2015, les attaques terroristes perpétrées à Paris « ont confirmé un renversement des perspectives et des priorités. Le défi migratoire que présente l’arrivée massive de réfugiés et les attaques portées contre notre sécurité par les attentats terroristes répétés depuis le début de l’année occupent désormais le haut de l’échelle des priorités, avant même les questions économiques ».
Le programme européen de sécurité voit donc son ambition renforcée et sa mise en œuvre accélérée depuis la mi-novembre comme en témoignent les engagements et initiatives décidés par le Conseil de l’Union dans sa formation Justice et affaires intérieures (JAI) les 20 novembre et 4 décembre 2015, les nouveaux textes et plans d’action présentés par la Commission européenne et la conclusion de négociations engagées depuis plusieurs années entre le Conseil et le Parlement européen.
Aussi, après un rappel synthétique du programme européen de sécurité –votre rapporteure renvoie, pour plus de détails, au rapport d’information qu’elle a présenté au nom de la commission des Affaires européennes (5) –, le présent rapport vise à présenter les initiatives européennes prises depuis la mi-novembre en matière de sécurité et à préciser l’ambition portée par l’Assemblée nationale pour le programme européen de sécurité pour 2015-2020.
Présenté le 28 avril 2015, le programme européen en matière de sécurité pour 2015-2020 s’inscrit dans la continuité de la stratégie de sécurité intérieure pour 2010-2014 et du programme de Stockholm, tout en mettant l’accent sur la lutte contre le terrorisme, conformément aux conclusions du Conseil européen informel du 12 février 2015 sur la lutte contre le terrorisme, et sur les nouvelles formes de menaces issues des nouvelles technologies.
Ce programme propose que l’action de l’Union européenne en matière de sécurité s’organise, dans les cinq années à venir, selon cinq principes, trois axes et trois domaines.
Dans sa communication du 28 avril 2015, la Commission européenne arrête cinq grands principes devant guider l’action européenne en matière de sécurité entre 2015 et 2020 :
– le respect des droits fondamentaux ;
– la transparence et le contrôle démocratique ;
– l’amélioration de l’utilisation des instruments juridiques en vigueur ;
– l’accroissement de la coopération entre les agences de l’Union et avec les États membres ;
– le renforcement de la prise en considération de la sécurité de l’Union dans ses relations avec les États tiers.
L’enjeu du programme européen de sécurité est de définir un juste équilibre, d’une part, entre la nécessité d’assurer la sécurité des citoyens européens et l’impératif que constitue la protection de leurs droits fondamentaux et, d’autre part, entre répression et prévention.
À cet égard, il convient de souligner que si le Parlement européen insiste plus particulièrement sur la protection des droits fondamentaux dans sa résolution du 9 juillet 2015 sur le programme européen en matière de sécurité, il met davantage l’accent sur la dimension répressive dans sa résolution du 25 novembre 2015 relative à la prévention de la radicalisation et du recrutement de citoyens de l’Union par des organisations terroristes. Il propose en effet notamment d’établir une liste noire européenne des djihadistes, d’adopter une définition commune de la notion de « combattant étranger », afin de pouvoir les poursuivre pénalement à leur retour en Europe, de confisquer les passeports et de geler les avoirs financiers des combattants étrangers présents dans l’Union, de séparer les détenus radicalisés et de permettre que les États membres puissent poursuivre, le cas échéant pénalement, les entreprises de l’Internet qui refusent de donner suite à une demande d’effacement des contenus faisant l’apologie du terrorisme.
Tout en soutenant les principes directeurs posés par la Commission européenne, votre rapporteure regrette que le volet « répressif » du programme européen de sécurité soit davantage détaillé que son volet « préventif » et plaide pour que ce déséquilibre soit corrigé dans le cadre de la mise en œuvre du programme. Elle considère en particulier que le programme présenté appelle des précisions quant aux actions à mener et aux financements à mobiliser en matière de prévention des comportements des délinquants et des criminels, dans le cadre des programmes d’action de l’Union européenne dans les domaines de l’éducation, de la jeunesse et de la culture.
De même, si elle salue la volonté affichée par la Commission européenne de fonder le programme sur le respect des droits fondamentaux ainsi que sur la transparence et le contrôle démocratique, votre rapporteure considère que, pour permettre aux parlements d’assurer le suivi du programme, la communication du 28 avril 2015 doit être complétée de telle sorte que soient associés aux actions du programme des objectifs clairs, assortis d’indicateurs pertinents et d’un financement spécifique.
En tout état de cause, votre rapporteure veillera au respect des principes posés.
La Commission européenne identifie trois axes où l’intervention de l’Union européenne est justifiée : l’échange d’informations, la coopération opérationnelle et le soutien à la formation et à l’innovation.
● En matière d’échange d’informations, la Commission européenne déplore des lacunes importantes dans la mise en œuvre, par les États membres, des nombreux instruments juridiques existants. Elle adopte par conséquent une démarche pragmatique, insistant sur la nécessité d’une application « pleine et entière » des règles en vigueur et de l’adoption des propositions législatives en cours d’examen, avant d’envisager de nouveaux instruments juridiques.
Pour ce qui concerne la mise en œuvre des règles en vigueur, la Commission européenne met plus particulièrement l’accent sur une meilleure appropriation des instruments juridiques européens par les États membres et sur une plus grande collaboration entre les échelons européen (les agences de l’Union) et national (les services des États membres) d’une part et entre secteurs d’activité d’autre part. Ainsi, alors que seule une minorité d’États membres ont intégré dans leurs systèmes nationaux le cadre juridique prévu par le traité de Prüm, qui permet une comparaison automatisée des profils ADN, des données dactyloscopiques et des informations relatives à l’immatriculation des véhicules, la Commission européenne annonce son intention d’exercer pleinement ses attributions pour en garantir la mise en œuvre. La Commission entend également encourager l’utilisation du système d’information Schengen (SIS), qui recense les personnes et objets recherchés, en lien avec la base de données d’Interpol sur les documents de voyage volés ou perdus, afin de renforcer la sécurité aux frontières extérieures. Elle insiste par ailleurs sur la nécessité d’un partage effectif des informations entre services douaniers et autres services répressifs dans le cadre du système douanier d’informations anticipées sur les marchandises.
S’agissant de l’adoption des propositions législatives en cours d’examen, la Commission européenne vise plus particulièrement la proposition de directive dite « PNR » (« Passenger Name Record ») qui a pour objet de mettre en place un système européen de collecte et de traitement des données des dossiers des passagers aériens (6), la proposition de règlement relatif à Europol (7) et la réforme de la protection des données (8).
Au-delà d’une meilleure mise en œuvre des dispositifs existants et de l’adoption des textes en cours de discussion, la Commission européenne considère qu’il convient de procéder au réexamen d’instruments importants comme le système d’information Schengen, le code frontières Schengen et le système européen d’information sur les casiers judiciaires dénommé ECRIS.
Pour autant, elle demeure mesurée dans ses propositions. Ainsi, s’agissant du système d’information Schengen, la Commission européenne, qui a défini, au premier semestre 2015, une première série d’indicateurs de risques communs relatifs aux combattants terroristes étrangers, se contente d’en envisager une évaluation, afin d’ajouter des critères déclencheurs d’alertes. De même, pour ce qui concerne le code frontières Schengen, elle indique qu’elle continuera à en contrôler l’efficacité et étudiera tout nouveau besoin d’amélioration. Elle se montre en revanche plus ambitieuse pour le système européen d’information sur les casiers judiciaires (ECRIS), qui permet d’échanger des informations sur les condamnations antérieures des ressortissants d’États membres. Elle propose en effet d’y inclure les ressortissants de pays tiers ayant fait l’objet d’une condamnation dans l’Union.
Enfin, en réponse à une demande du Conseil JAI du 4 décembre 2014, la Commission européenne s’engage à étudier l’opportunité d’un système d’index européen des registres de la police (EPRIS), destiné à faciliter l’accès transfrontière aux informations conservées dans les registres de police nationaux.
● En matière de coopération opérationnelle, la Commission européenne prône davantage de synergies entre les agences de l’Union, une coordination plus systématique entre les services des États membres, notamment dans le cadre du cycle politique de l’Union pour lutter contre la grande criminalité internationale organisée (9), et une meilleure articulation entre les agences de l’Union et les services des États membres.
La Commission européenne plaide pour une coopération accrue entre les agences de l’Union. Elle demande ainsi à Eurojust et Europol d’intensifier leur collaboration et souligne que l’accord de coopération révisé entre Europol et Frontex devrait leur permettre d’échanger des données à caractère personnel tout en prévoyant des garanties appropriées en matière de protection des données. Elle invite les États membres à recourir davantage aux agences de l’Union pour lutter contre la criminalité. Les États membres devraient ainsi faire plus souvent appel à Eurojust pour coordonner les enquêtes et poursuites transfrontières et faciliter les demandes complexes d’entraide judiciaire avec des pays non membres de l’Union.
Elle insiste également sur la nécessité, pour les États membres, de recourir davantage aux instruments transfrontières que sont les équipes communes d’enquête, constituées pour une durée déterminée sur un dossier spécifique, et les opérations douanières conjointes et d’intensifier leur coopération dans le cadre des réseaux d’unités nationales spécialisées et des centres de coopération policière et douanière, qui rassemblent, dans les régions frontalières, les services répressifs de plusieurs États.
Elle met par ailleurs l’accent sur le rôle que doivent jouer les plateformes de coordination, comme le Centre de coordination de la réaction d’urgence de l’Union européenne, dans la mise en place d’une intervention cohérente en cas de crise, ainsi que sur la coopération entre les États membres et la Commission européenne pour mettre pleinement en œuvre la législation relative à la protection civile (10).
La Commission européenne suggère en outre la création d’un Espace européen de police scientifique, destiné à harmoniser les procédures des prestataires de services de police scientifique dans les États membres et à favoriser leur coopération. Dans cette perspective, la Commission propose de dresser un état des lieux avec les parties prenantes, avant de formuler des propositions.
Si la Commission européenne souligne enfin l’intérêt des instruments de coopération judiciaire en matière pénale que sont la reconnaissance mutuelle des jugements et décisions judiciaires et le mandat d’arrêt européen, elle appelle à un recours plus systématique au gel et à la confiscation des avoirs d’origine criminelle et invite les juges nationaux à tirer parti du Réseau judiciaire européen (RJE), notamment pour l’exécution des mandats d’arrêt européens et des décisions de gel ou de confiscation des avoirs.
Elle note par ailleurs que la mise en œuvre de la décision d’enquête européenne en matière pénale constituera un outil complémentaire essentiel. Toutefois, votre rapporteure tient à rappeler que la directive relative à la décision d’enquête (11), qui prévoit la création d’un régime unique d’entraide judiciaire, n’entrera en vigueur qu’en 2017 et qu’elle n’a, d’ailleurs, pas encore été transposée par la France.
Paradoxalement, la Commission européenne ne fait qu’une brève référence au projet de Parquet européen, envisagé comme devant seulement contribuer à assurer une protection contre les pertes que des activités criminelles causent au budget de l’Union. C’est regrettable, votre rapporteure y reviendra (cf. II. A.).
● Pour ce qui concerne enfin le soutien à la formation et à l’innovation, la Commission européenne envisage trois axes d’intervention.
En matière de formation tout d’abord, la Commission européenne souligne la nécessité d’adopter la proposition législative du 16 juillet 2014 relative au Collège européen de police (Cepol) (12), qui a pour objectif de renforcer sa capacité à préparer des officiers de police à coopérer efficacement et à développer une culture commune. Elle invite les écoles nationales de police à utiliser les fonds européens pour faire de la coopération transfrontière une composante à part entière de leurs formations. Elle considère par ailleurs que les formations dispensées aux magistrats et aux personnels de justice devraient davantage tenir compte des priorités de l’Union, en recourant notamment au réseau européen de formation judiciaire (REFJ) et au portail e-Justice européen. La Commission insiste enfin sur le rôle que peut jouer le Centre européen de formation à la sécurité, qui permet aux États membres d’améliorer leurs capacités de détection et d’identification des matières nucléaires ou radioactives illicites aux fins de la prévention des menaces.
S’agissant ensuite de la recherche et de l’innovation dans le domaine de la sécurité, la Commission européenne souligne l’apport que peut constituer le programme-cadre de recherche Horizon 2020. Elle considère qu’il convient de mettre davantage l’accent sur l’innovation en matière de protection civile, domaine dans lequel la création d’un centre de connaissances dans le cadre du Centre de coordination de la réaction d’urgence ainsi que la constitution d’une communauté d’utilisateurs contribueront à l’élaboration d’une interface entre activités de recherche et utilisateurs finaux.
Enfin, la Commission européenne rappelle que le Fonds pour la sécurité intérieure, doté de 3,8 milliards d’euros, a vocation à financer les priorités définies dans le programme européen de sécurité, en particulier l’intensification des échanges d’informations, la mise à jour des parties nationales du système d’information Schengen, la mise en application du cadre de Prüm et le renforcement de la coopération transfrontière.
● La Commission européenne retient comme premier domaine d’action prioritaire la lutte contre le terrorisme et la radicalisation.
À cet effet, elle propose les initiatives suivantes :
– renforcer les fonctions d’appui d’Europol en centralisant ses capacités de répression du terrorisme au sein d’un Centre européen de lutte contre le terrorisme intégré à Europol ;
– créer un forum de l’Union européenne avec le secteur informatique pour lutter contre la propagande terroriste et répondre aux interrogations suscitées par les nouvelles technologies de cryptage ;
– adopter de nouvelles mesures pour améliorer la lutte contre le financement du terrorisme ;
– combler les lacunes éventuelles de la lutte contre l’incitation à la haine en ligne ;
– réexaminer la décision-cadre sur le terrorisme et soumettre une proposition en 2016 ;
– redéfinir les priorités des cadres et programmes d’action de l’Union dans le domaine de l’éducation, de la jeunesse et de la culture ;
– mettre l’accent sur la prévention de la radicalisation en milieu carcéral et concevoir des programmes de désengagement et de « déradicalisation » efficaces ;
– ouvrir un centre d’excellence dans le cadre du réseau de sensibilisation à la radicalisation, afin d’encourager les échanges entre praticiens, et étendre les travaux de lutte contre la radicalisation avec la Turquie, les Balkans occidentaux, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
● Le deuxième champ d’action privilégié par la Commission européenne concerne la criminalité organisée, pour laquelle elle suggère de retenir les orientations suivantes :
– élargir les travaux du cycle politique de l’Union européenne aux pays voisins ;
– étudier des mesures de confiscation en l’absence de condamnation ;
– réexaminer la législation sur les armes à feu et formuler des propositions en 2016 ;
– adopter une stratégie pour l’après-2016 en matière de traite des êtres humains ;
– lancer des actions conjointes et des stratégies de coopération avec les pays tiers concernés pour lutter contre le trafic de migrants ;
– réexaminer la législation en vigueur dans le domaine de la criminalité environnementale, afin de formuler des propositions en 2016.
● Le dernier domaine prioritaire retenu dans le programme européen de sécurité est la cybercriminalité, pour laquelle la Commission propose de conduire les actions suivantes :
– mettre l’accent sur la mise en œuvre des politiques relatives à la cybersécurité, aux attaques contre les systèmes d’information et à la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants, en particulier la directive du 12 août 2013 relative aux attaques contre les systèmes d’information et la directive du 13 décembre 2011 relative à l’exploitation sexuelle des enfants ;
– réexaminer et, éventuellement, renforcer en 2016 la législation relative à la lutte contre la fraude et la contrefaçon des moyens de paiement autres que les espèces, afin de tenir compte des nouvelles formes de criminalité et de contrefaçon ;
– dresser un bilan des obstacles aux enquêtes pénales sur la cybercriminalité, s’agissant en particulier de la question de la compétence des juridictions et des règles relatives à l’accès aux éléments de preuve et aux informations ;
– renforcer les capacités dans le domaine de la cybersécurité au titre des instruments d’aide extérieure.
II. … VOIT SON AMBITION RENFORCÉE ET SA MISE EN œUVRE ACCÉLÉRÉE DEPUIS LES ATTENTATS DU 13 NOVEMBRE 2015…
Engagements et initiatives décidés par le Conseil de l’Union dans sa formation Justice et affaires intérieures, nouveaux textes et plans d’action présentés par la Commission européenne et conclusion de négociations engagées depuis plusieurs années entre le Conseil et le Parlement européen : le programme européen de sécurité voit son ambition accrue et sa mise en œuvre accélérée depuis les attentats qui ont visé la France le 13 novembre 2015.
● Alors que, dans le programme européen de sécurité, la Commission européenne envisageait de réexaminer la décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 relative à la lutte contre le terrorisme afin d’en proposer une modification en 2016, elle a présenté, dès le 2 décembre 2015, sa proposition de directive relative à la lutte contre le terrorisme (13).
Il s’agit ainsi de prendre en compte, dans le droit de l’Union : la résolution 2178 (2014) du 24 septembre 2014 du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les combattants terroristes étrangers qui demande notamment aux États d’ériger en infractions pénales plusieurs actes préparatoires à des attentats (14) ; le protocole additionnel à la convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme adopté en mai 2015 qui, reprenant la résolution des Nations Unies, érige en infractions pénales la participation intentionnelle à un groupe terroriste, l’entraînement pour le terrorisme, le fait de se rendre à l’étranger à des fins de terrorisme et le financement ou l’organisation de ces voyages (15) ; les recommandations du groupe d’action financière sur le financement du terrorisme relatives à la criminalisation du financement du terrorisme.
Tandis que la décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 relative à la lutte contre le terrorisme criminalisait certains actes terroristes comme la commission d’attaques terroristes ou la participation au financement d’activités terroristes, la proposition de directive propose d’en compléter la liste en créant trois nouvelles infractions en matière de terrorisme :
– le financement et l’organisation de voyages de combattants terroristes étrangers, y compris par un appui logistique et matériel comme la fourniture d’armes à feu et d’explosifs, d’abris ou de moyens de transport ;
– l’entraînement à des fins terroristes ;
– et la collecte et la fourniture de fonds destinés à commettre des actes terroristes.
La proposition de directive vise également à durcir les dispositions relatives au recrutement et à la diffusion de la propagande terroriste, notamment en ligne.
Elle a enfin pour objectif de renforcer les droits des victimes, en prévoyant un accès immédiat à des services d’aide physique et psychosociale et une information rapide sur leurs droits, quel que soit leur lieu de résidence dans l’Union européenne.
Il convient par ailleurs de souligner que, lors de sa réunion du 20 novembre 2015, le Conseil Justice et affaires intérieures s’est engagé à assurer un gel rapide et effectif des avoirs terroristes dans l’ensemble de l’Union.
● La Commission européenne s’est également engagée à présenter en 2016 sa proposition de réforme du système européen d’information sur les casiers judiciaires (ECRIS), afin d’inclure dans ce dispositif d’échange d’informations relatif aux condamnations antérieures des ressortissants d’États membres les ressortissants de pays tiers ayant fait l’objet d’une condamnation dans l’Union.
● Pour sa part, le Conseil Justice et affaires intérieures a, lors de sa réunion du 20 novembre 2015, invité les États membres à renforcer la réponse pénale à la radicalisation conduisant au terrorisme et à l’extrémisme violent grâce notamment à l’élaboration de programmes de déradicalisation et de réintégration dans les prisons et à l’amélioration des échanges d’informations entre les acteurs de la chaîne pénale et, de manière plus générale, entre les services de maintien de l’ordre, les services de sécurité, le ministère public, les autorités locales et les travailleurs sociaux.
Si votre rapporteure salue l’ensemble de ces initiatives, elle déplore que les institutions européennes ne fassent jamais mention, dans le cadre de la réponse pénale à apporter au terrorisme, du projet de Parquet européen. De par la nature transfrontière de leur conception et de leur réalisation, les attentats qui se sont produits depuis le début de l’année 2015 plaident pourtant pour que le champ de compétence du Parquet européen inclue la criminalité grave ayant une dimension transfrontière, conformément à la conception défendue de manière constante par l’Assemblée nationale (16).
Or, le Conseil continue à privilégier une conception restrictive des compétences du Parquet européen (17), limitée à la protection des intérêts financiers de l’Union européenne, conformément à l’article 86 paragraphe 1 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Seraient ainsi concernées les seules infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, qui doivent être définies dans la proposition de directive sur la protection des intérêts financiers de l’Union européenne par le droit pénal (18) actuellement en cours de discussion dans le cadre du « trilogue », en particulier s’agissant de l’inclusion ou non dans le champ de la directive de la TVA.
Plusieurs États membres, comme l’Allemagne, sont en effet opposés à une mise en œuvre de l’article 86 paragraphe 4 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne qui prévoit que le Conseil européen statuant à l’unanimité peut, après approbation du Parlement européen et consultation de la Commission européenne, étendre les attributions du Parquet européen à la lutte contre la criminalité grave ayant une dimension transfrontière.
Tandis que le programme européen de sécurité prévoyait une révision de la législation relative aux armes à feu en 2016, la Commission européenne a présenté, dès le 18 novembre 2015, une proposition de directive modifiant la directive de 1991 relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes et a adopté, ce même jour, un règlement d’exécution définissant des normes minimales communes en matière de neutralisation des armes à feu.
La proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 91/477/CEE du Conseil du 18 juin 1991 relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes prévoit ainsi :
– un durcissement des règles relatives à la détention de certaines armes à feu semi-automatiques par des particuliers, à l’achat en ligne d’armes à feu, à la circulation des armes à feu neutralisées et aux collections d’armes à feu ;
– des règles communes s’agissant des armes d’alarme et du marquage des armes à feu ;
– l’amélioration de l’échange d’informations entre les États membres, s’agissant notamment des refus d’autorisation de détention d’armes à feu et de l’obligation d’interconnecter les registres nationaux de détention d’armes.
Le Conseil JAI a annoncé, le 20 novembre dernier, son intention d’engager sans tarder les discussions sur cette proposition de directive.
Le règlement d’exécution définissant des normes minimales communes en matière de neutralisation des armes à feu définit des critères communs stricts sur la manière dont les États membres doivent neutraliser les armes de façon à les rendre inopérantes. La possession des armes à feu les plus dangereuses – même neutralisées – est par ailleurs interdite.
En complément de ces premières mesures, la Commission européenne a présenté, le 2 décembre 2015, un plan d’action contre le trafic d’armes à feu et d’explosifs, qui a pour objectif d’améliorer la détection et la saisie des armes à feu, explosifs et précurseurs d’explosifs utilisés à des fins criminelles ainsi que les enquêtes en la matière (19).
GRANDES LIGNES DU PLAN D’ACTION CONTRE LE TRAFIC D’ARMES À FEU ET L’UTILISATION D’EXPLOSIFS
Afin de restreindre l’accès aux armes à feu et aux explosifs illégaux, la Commission européenne invite les États membres à créer des points de contact nationaux interconnectés sur les armes à feu et prévoit un renforcement du rôle d’Europol en matière de trafic en ligne et de détournement du commerce légal grâce à son unité de signalement des contenus sur Internet récemment créée.
Pour approfondir la coopération opérationnelle, la Commission européenne engage les États membres à créer des cyberpatrouilles ou à étendre la compétence de celles qui existent aux armes à feu, aux explosifs et aux précurseurs d’explosifs. Elle incite par ailleurs au développement d’un contrôle des marchandises fondé sur les risques, quel que soit leur mode de transport. Elle suggère enfin d’établir une action de contrôle prioritaire en matière douanière avec les États membres s’agissant du trafic d’armes à feu aux frontières extérieures de l’Union.
Dans le but d’améliorer la collecte et l’échange d’informations, la Commission européenne incite les États membres à faire pleinement usage des outils existants pour faciliter l’échange d’informations et à inclure systématiquement les informations sur les armes à feu recherchées dans le système d’information Schengen et dans le Système Interpol de gestion des données sur les armes illicites et du traçage des armes (iARMS). L’échange de données balistiques devrait par ailleurs être renforcé au moyen d’une plateforme spécialisée.
Afin de réduire l’importation illégale d’armes à feu dans l’Union européenne et l’accès aux explosifs sur son territoire, la Commission européenne propose d’inclure systématiquement les thématiques du trafic d’armes à feu et de l’utilisation d’explosifs dans les dialogues sur la sécurité avec les pays et organisations partenaires clés. Elle suggère par ailleurs de renforcer la coopération avec les pays clés des Balkans occidentaux, d’approfondir celle menée avec les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ainsi qu’avec la Turquie et l’Ukraine.
Enfin, dans ses conclusions du 20 novembre 2015, le Conseil JAI s’est déclaré déterminé à renforcer la coopération opérationnelle par l’intermédiaire d’Europol dans le cadre du cycle politique de l’Union européenne pour lutter contre la grande criminalité internationale organisée.
Depuis la mi-novembre 2015, des décisions importantes ont été prises afin d’améliorer les échanges d’informations et la coopération au sein de l’Union européenne. Elles résultent des engagements pris par le Conseil Justice et affaires intérieures le 20 novembre 2015 et des accords trouvés entre le Parlement européen et le Conseil sur deux projets de texte en discussion depuis plusieurs années : la proposition de règlement relatif à l’Agence de l’Union européenne pour la coopération et la formation des services répressifs (Europol) et la proposition de directive relative à la mise en place d’un système européen de collecte et de traitement des données des dossiers passagers, dite directive « PNR ».
● Lors de sa réunion du 20 novembre 2015, le Conseil Justice et affaires intérieures a en effet convenu que les États membres veilleront à ce que les autorités nationales introduisent systématiquement dans le système d’information Schengen II (SIS II) les données concernant tous les combattants terroristes étrangers présumés, mènent des actions de sensibilisation et de formation à l’utilisation du système d’information et définissent une approche commune pour l’utilisation des données du SIS II relatives aux combattants étrangers. Les États membres se sont également engagés à accélérer la mise en œuvre et l’utilisation effective de l’acquis de Prüm, qui prévoit une interconnexion des bases de données nationales concernant l’ADN, les empreintes dactyloscopiques et l’immatriculation des véhicules.
Les États membres ont en outre affirmé leur volonté d’améliorer les échanges d’informations entre les autorités chargées de la lutte contre le terrorisme dans l’Union, grâce à la mise en place de points de contact uniques pour faciliter l’échange d’informations et au renforcement des contributions de leurs services aux systèmes d’échange d’informations d’Europol.
Les États membres se sont par ailleurs engagés à détacher des experts auprès du futur Centre européen de lutte contre le terrorisme qui, constitué au sein d’Europol, offrira, à compter du 1er janvier 2016, une plateforme permettant aux États membres de renforcer l’échange d’informations et la coopération opérationnelle en matière de terrorisme.
Ils ont enfin demandé à la Commission européenne de présenter deux propositions législatives destinées à améliorer les échanges d’informations : l’une destinée à permettre à Europol de faire des recoupements systématiques entre ses bases de données et le système d’information Schengen ainsi qu’à assurer l’interopérabilité des bases de données relatives aux contrôles de sécurité ; l’autre pour améliorer la coopération entre les cellules de renseignement financier, grâce notamment à l’intégration du réseau d’échange d’informations « FIU.net » dans la structure d’Europol.
● Le Parlement européen et le Conseil sont par ailleurs parvenus, le 26 novembre 2015, à un compromis sur la proposition de règlement relatif à l’Agence de l’Union européenne pour la coopération et la formation des services répressifs (Europol), qui avait été présenté par la Commission européenne le 27 mars 2013.
Le mandat d’Europol est ainsi affermi. La création d’unités spécialisées pour réagir sans délai aux menaces terroristes et aux autres formes de criminalité grave et organisée est facilitée. Les procédures d’échange d’informations avec les États membres sont simplifiées, ces derniers devant fournir à Europol les données nécessaires à son action. Dans certains cas, Europol pourra échanger des informations directement avec des entités privées comme des entreprises ou des organisations non gouvernementales. Ainsi, l’Agence pourra contacter directement un fournisseur de service de réseau social comme Facebook pour lui demander de supprimer une page web gérée par Daech.
Europol devra par ailleurs présenter un rapport annuel au Parlement européen, au Conseil, à la Commission européenne et aux parlements nationaux sur les informations fournies par les États membres.
Le renforcement d’Europol s’accompagne de garanties en matière de protection des données et de contrôle parlementaire. Ainsi, le Contrôleur européen de la protection des données est chargé de surveiller la protection des données et l’action d’Europol fera l’objet d’un suivi par un groupe d’examen parlementaire composé de membres des parlements nationaux et du Parlement européen.
● Après plus de quatre années et demie de négociations, le Parlement européen et le Conseil sont enfin parvenus à un accord sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l’utilisation des données des dossiers passagers pour la prévention et la détection des infractions terroristes et des formes graves de criminalité, qui avait été présentée par la Commission européenne le 2 février 2011.
L’accord prévoit ainsi que les données ne peuvent être traitées que pour la prévention et la détection d’infractions graves, ainsi que la réalisation d’enquêtes et de poursuites en la matière. Une liste d’infractions a été établie, incluant notamment la traite d’êtres humains, la participation à une organisation criminelle, la cybercriminalité, la pédopornographie et le trafic d’armes.
Les données collectées seront conservées sous une forme non masquée pendant six mois, puis sous une forme masquée, mais qui restera accessible aux autorités en cas de demandes spécifiques, pendant quatre ans et demi.
Afin d’assurer la protection des données, l’unité nationale de renseignements sur les passagers nommera un délégué, qui sera chargé de contrôler le traitement des données PNR sous des conditions très strictes après la période des six mois. Les passagers devront être informés de la façon dont leurs données sont collectées et de leurs droits.
Les ministres se sont par ailleurs engagés, dans une déclaration politique, à appliquer la directive aux vols intra européens et ont affirmé que les vols charters seraient concernés par la future directive.
La nouvelle version de la proposition de directive sur laquelle le Conseil et le Parlement européen sont parvenus à un accord a fait l’objet d’une approbation par le Conseil JAI du 4 décembre 2015, puis par la commission des Libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen le 10 décembre 2015. La proposition de directive devrait être adoptée par le Parlement européen en séance plénière lors de sa session du 18 au 21 janvier 2016, puis formellement approuvée par le Conseil.
Les États membres auront ensuite deux ans après l’entrée en vigueur de la directive pour la transposer. À cet égard, il convient de rappeler que si le Royaume-Uni et l’Irlande mettront en œuvre cette directive, il n’en ira pas de même du Danemark, en vertu de la clause d’exemption dont bénéficie cet État en matière de justice et d’affaires intérieures.
● Enfin, le 3 décembre 2015, la Commission européenne a organisé, conformément à l’engagement qu’elle avait pris dans le programme européen de sécurité, un forum de l’Union européenne sur l’Internet, qui a réuni les ministres de l’Intérieur de l’Union, des parlementaires européens, des représentants d’Europol et des responsables des entreprises du secteur de l’Internet, afin de définir une approche commune volontaire pour détecter et combattre la diffusion en ligne de contenus à caractère terroriste et de discours de haine.
● Alors que, dans son programme européen de sécurité, la Commission européenne était demeurée assez vague au sujet du code frontières Schengen, indiquant qu’elle continuerait à contrôler son efficacité et étudierait tout besoin d’amélioration, elle a, à l’invitation pressante des États membres réunis en Conseil Justice et affaires intérieures le 20 novembre 2015, présenté dès le 15 décembre 2015 une proposition de révision ciblée du code frontières Schengen.
Dans ses conclusions du 20 novembre 2015, le Conseil JAI avait en effet demandé à la Commission européenne de proposer une « révision ciblée du code frontières Schengen afin de prévoir des contrôles systématiques des ressortissants de l’UE, y compris la vérification des données biométriques, au moyen des bases de données pertinentes aux frontières extérieures de l’espace Schengen, en faisant pleinement usage de solutions techniques afin de ne pas entraver la fluidité de mouvement ».
En conséquence, la Commission européenne a présenté, dès le 15 décembre 2015, une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes, qui prévoit l’obligation de procéder à des vérifications systématiques des citoyens de l’Union aux frontières extérieures terrestres, maritimes et aériennes.
Il s’agit ainsi de s’assurer que l’ensemble des personnes qui se présentent aux frontières de l’Union ne constituent pas une menace pour l’ordre public ou la sécurité intérieure.
En effet, aujourd’hui, les citoyens européens et les autres personnes bénéficiant du droit à la libre circulation en vertu de la législation de l’Union, comme les membres de la famille d’un citoyen de l’Union, font l’objet d’une vérification minimale lors de leur franchissement des frontières extérieures. Cette vérification est effectuée en vue d’établir leur identité sur la base de leurs documents de voyage et consiste en un examen simple et rapide de la validité des documents, comprenant, le cas échéant, la consultation de bases de données relatives aux documents volés, détournés, égarés et invalidés, et de la présence d’indices de falsification ou de contrefaçon. En revanche, les ressortissants des pays tiers sont soumis à une vérification approfondie, qui inclut la vérification des conditions d’entrée, notamment dans le système d’information sur les visas (VIS).
Selon les termes de la proposition de la Commission européenne, ces nouvelles vérifications relatives aux citoyens de l’Union devront être effectuées dans des bases de données comme le système d’information Schengen, la base de données d’Interpol sur les documents de voyage volés ou perdus et les systèmes nationaux pertinents. Elles devront notamment porter sur les identifiants biométriques dans les passeports des citoyens de l’Union en cas de doute sur l’authenticité du passeport ou la légitimité de sa détention.
Les vérifications systématiques dans les bases de données devront se fonder sur une logique dite de « concordance/non-concordance », en conséquence de laquelle si une personne ne présente aucun risque, la vérification n’est pas enregistrée et les données la concernant ne font l’objet d’aucun traitement supplémentaire.
Ces vérifications seront également obligatoires à la sortie de l’Union européenne.
Il convient de souligner que, devançant la Commission européenne, les États membres ont décidé, dès le Conseil JAI du 20 novembre 2015, d’un train de mesures destinées à renforcer les contrôles aux frontières extérieures. Ils se sont ainsi engagés à :
– mettre immédiatement en œuvre les contrôles systématiques nécessaires aux frontières extérieures, y compris des personnes jouissant du droit à la libre circulation ;
– moderniser, d’ici au mois de mars 2016, les systèmes de contrôle aux frontières de l’espace Schengen grâce à la connexion électronique avec les bases de données pertinentes d’Interpol à tous les points de passage des frontières extérieures et à la vérification automatique des documents de voyage ;
– procéder à l’enregistrement systématique, y compris grâce au relevé d’empreintes digitales, des ressortissants de pays tiers entrant illégalement dans l’espace Schengen, effectuer des contrôles de sécurité systématiques en utilisant les bases de données pertinentes, en particulier le SIS II, les bases de données d’Interpol, le VIS et les bases de données policières nationales, avec l’appui de Frontex et d’Europol, et faire en sorte que les « hotspots » soient équipés des technologies appropriées ;
– renforcer les contrôles aux frontières extérieures les plus exposées, en particulier en déployant des équipes d’intervention rapide aux frontières et des agents de police.
● Outre la révision ciblée du code frontières Schengen, le renforcement des contrôles aux frontières devrait également reposer sur l’affermissement des moyens déployés aux frontières extérieures, en particulier par l’agence Frontex.
Ainsi, le Conseil JAI a invité, le 20 novembre 2015, la Commission européenne à prévoir, dans sa proposition visant à actualiser le règlement relatif à l’agence Frontex, une base juridique solide permettant à l’Agence de lutter contre le terrorisme et la criminalité organisée et d’accéder aux bases de données pertinentes. Il a également insisté sur la nécessité que Frontex aide les États membres à renforcer les contrôles aux frontières extérieures et qu’elle travaille en étroite coopération avec Europol et Eurojust, appelant à ce sujet à la conclusion rapide de l’accord de coopération entre Frontex et Europol relatif à l’échange de données à caractère personnel, de telle sorte qu’il puisse entrer en vigueur au 1er janvier 2016.
Le 15 décembre 2015, la Commission européenne est allée au-delà de ces demandes, en proposant de créer, à partir de Frontex, un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes (20).
Elle suggère en effet de mettre en place un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, qui regrouperait, d’une part, une Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes provenant des rangs de Frontex et, d’autre part, les autorités responsables de la gestion des frontières dans les États membres, qui continueraient à assurer la gestion quotidienne des frontières extérieures. L’Agence devrait être dotée, d’ici à 2020, d’un effectif permanent de 1 000 personnes, soit plus du double des effectifs actuels de Frontex. Elle devrait disposer d’une réserve de garde-frontières (1 500) rapidement mobilisable (en moins de trois jours). Elle pourrait acquérir elle-même du matériel et recourir à un parc d’équipements techniques fourni par les États membres.
L’Agence exercerait un rôle de suivi et de supervision. Un centre de suivi et d’analyse des risques serait ainsi créé en son sein avec comme fonction de suivre les flux migratoires à destination et à l’intérieur de l’Union européenne et d’effectuer une analyse des risques. Des agents de liaison seraient détachés dans les États membres dont les frontières présentent des risques. L’Agence pourrait évaluer les moyens opérationnels, l’équipement technique et les ressources dont disposent les États membres pour assurer la sécurité de leurs frontières extérieures et, le cas échéant, exiger de ces États qu’ils les renforcent.
L’Agence aurait par ailleurs pour nouvelle mission d’envoyer des agents de liaison dans des pays tiers voisins et de lancer, avec ceux-ci, des opérations conjointes, y compris sur leur territoire.
Elle participerait aussi à la préservation de la sécurité intérieure. Elle devrait en effet prendre en considération la criminalité transfrontière et le terrorisme dans son analyse des risques et coopérer à la prévention du terrorisme avec d’autres agences de l’Union et des organisations internationales.
La Commission européenne propose enfin de créer « un droit d’intervention » aux frontières extérieures, qui consisterait en la possibilité accordée aux États membres de demander la réalisation d’opérations conjointes et d’interventions rapides aux frontières ainsi que le déploiement des équipes du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes en appui de ces actions. En cas de défaillance d’un État membre, la Commission européenne pourrait adopter une décision d’exécution établissant que la situation, sur une portion précise des frontières extérieures, exige une action urgente au niveau européen, ce qui permettrait à l’Agence d’intervenir et de déployer les équipes du corps européen.
Dans le contexte actuel marqué par une recrudescence des attaques terroristes, votre rapporteure a souhaité que l’Assemblée nationale puisse se prononcer sur le programme européen de sécurité, qui connaît, de fait, une accélération de sa mise en œuvre.
La proposition de résolution européenne adoptée par la commission des Affaires européennes le 1er décembre 2015 et transmise à la commission des Lois a ainsi tout d’abord pour objet d’apporter le soutien de l’Assemblée nationale au principe d’une intervention de l’Union en appui des actions mises en œuvre en matière de sécurité par les États membres (point 1), ainsi qu’aux objectifs, axes et champs d’action retenus par la Commission européenne dans le programme européen de sécurité (points 3, 4 et 6).
Le manque de précision du programme européen de sécurité quant aux actions à mener et aux financements à mobiliser en matière de prévention des comportements des délinquants et des criminels est toutefois dénoncé (point 7).
Tout en insistant sur la nécessité d’une implication forte des États membres et des institutions européennes dans la mise en œuvre du programme européen de sécurité (points 13 et 15), la proposition de résolution demande par ailleurs que soient transmises aux parlements nationaux les informations nécessaires à un suivi régulier de sa réalisation (point 12).
L’accent est également mis, dans un souci d’efficacité, sur l’intérêt d’une meilleure articulation entre le programme européen de sécurité et d’autres plans d’action de l’Union comme celui relatif au trafic de migrants mais également entre politique intérieure et extérieure de sécurité (points 14, 17 et 18). Dans le même objectif, la collaboration entre les agences de l’Union, entre les États membres et, enfin, entre les échelons nationaux et européen est encouragée (points 2 et 11).
Il est enfin proposé de rappeler le soutien de l’Assemblée nationale à plusieurs initiatives européennes, comme la lutte contre le trafic des migrants (point 5) et la constitution d’un corps européen de garde-frontières (point 10), mais également de souligner sa volonté que soit mis en place un système européen de collecte et de traitement des données des dossiers des passagers aériens (PNR) à même d’assurer un équilibre entre la protection des droits fondamentaux et des données personnelles et l’efficacité des contrôles des passagers (points 9 et 16) et de voir les compétences du futur Parquet européen étendues aux formes de la criminalité transfrontière les plus graves (point 8).
Outre des améliorations rédactionnelles et de précision, votre rapporteure a souhaité présenter des amendements destinés à tenir compte des évolutions qui sont intervenues depuis l’adoption le 1er décembre dernier, par la commission des Affaires européennes, de la présente proposition de résolution.
Il s’agit ainsi :
– de prendre en considération les dernières propositions de texte présentées par la Commission européenne (amendement CL5 qui inclut dans les visas les propositions de la Commission européenne du 2 décembre 2015 sur la directive relative à la lutte contre le terrorisme et la communication relative à la mise en œuvre du programme européen de sécurité et présentant le plan d’action de l’Union européenne contre le trafic et l’utilisation illicite d’armes à feu et d’explosifs) ;
– de demander aux institutions européennes de procéder au plus vite à une révision ciblée du code frontières Schengen et d’insister sur la nécessité d’améliorer la qualité des données saisies dans le système d’information Schengen ainsi que leur traitement par les États membres. Portée par la France, soutenue par le Conseil et finalement proposée par la Commission européenne le 15 décembre 2015, cette révision du code frontières Schengen a pour objet de permettre des contrôles systématiques de l’ensemble des voyageurs se présentant aux frontières de l’espace Schengen, et non seulement des ressortissants des pays tiers. Il s’agit ainsi de pouvoir appréhender les personnes originaires des États membres et susceptibles d’y revenir afin de commettre un acte terroriste (amendement CL12) ;
– de saluer l’accord trouvé sur la « directive PNR » et d’encourager une adoption définitive et une transposition rapides de ce texte (amendement CL16).
L’ensemble des amendements présentés par votre rapporteure ont été adoptés par la commission des Lois.
Lors de sa réunion du mercredi 15 décembre 2015, la commission des Lois procède à l’examen, sur le rapport de Mme Marietta Karamanli, de la proposition de résolution européenne sur le programme européen de sécurité (n° 3290).
Mme la rapporteure. La résolution que nous allons examiner a été adoptée à l’unanimité par la commission des Affaires européennes. Sur le fond, il s’agit de nous prononcer sur le programme européen de sécurité, à la suite des terribles attentats du 13 novembre 2015.
Ce programme européen de sécurité constitue la contribution de la Commission européenne à la définition de la stratégie de sécurité intérieure de l’Union européenne pour la période 2015-2020, qui succède à la stratégie de sécurité intérieure 2010-2014, dont le bilan est mitigé.
Dans ce nouveau programme, la Commission européenne arrête cinq grands objectifs : le respect des droits fondamentaux, la transparence et le contrôle démocratique, l’amélioration de l’utilisation des instruments juridiques en vigueur, l’accroissement de la coopération entre les agences de l’Union et avec les États membres, le renforcement de la prise en considération de la sécurité de l’Union dans ses relations avec les États tiers. Elle retient également trois axes d’action dans lesquels l’Union européenne peut apporter une valeur ajoutée en matière de sécurité : l’échange d’informations entre les services répressifs nationaux et les agences de l’Union, la coopération policière, et le soutien à la formation et à l’innovation. Elle définit, enfin, trois domaines d’action prioritaires : le terrorisme et la radicalisation, la criminalité organisée, et la cybercriminalité.
Le programme européen de sécurité a été présenté le 28 avril dernier par la Commission et fait l’objet d’une mise en œuvre accélérée depuis la mi-novembre, notamment sous la pression des Conseils Justice et Affaires intérieures des 20 novembre et 4 décembre 2015.
Des avancées notables ont ainsi été réalisées.
Le 2 décembre dernier, la Commission européenne a présenté un plan d’action contre le trafic d’armes à feu et d’explosifs dont l’objectif est d’améliorer la détection et la saisie des armes à feu, explosifs et précurseurs d’explosifs utilisés à des fins criminelles, ainsi que les enquêtes en la matière. Il complète le règlement d’exécution sur des normes communes en matière de neutralisation adopté le 18 novembre 2015
Ce même 2 décembre 2015, la Commission européenne a présenté une proposition de directive relative à la lutte contre le terrorisme dans l’objectif de créer trois nouvelles infractions en matière de terrorisme : le financement et l’organisation de voyages de combattants terroristes étrangers, l’entraînement à des fins terroristes, et la collecte et la fourniture de fonds destinés à commettre des actions terroristes. Cette proposition de directive permettra d’intégrer au droit de l’Union les obligations résultant de la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les combattants terroristes étrangers, ainsi que celles issues du protocole additionnel à la convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme et les recommandations du groupe d’action financière sur le financement du terrorisme. La proposition de directive tend également à durcir les dispositions relatives au recrutement et à la diffusion de la propagande terroriste. Enfin, elle prévoit un accès immédiat des victimes du terrorisme à des services d’aide physique et psychosociale.
Ces nouvelles propositions de la Commission européenne ont été complétées aujourd’hui même par la proposition de mettre en place un système européen de garde-frontières et de garde-côtes qui prévoit notamment la possibilité d’intervenir à une frontière extérieure de l’Union sans l’avis de l’État membre concerné. De plus, une proposition sur les frontières intelligentes arrivera prochainement. Cette actualité nous amène à présenter un certain nombre d’amendements à la proposition de résolution adoptée par la commission des Affaires européennes, afin de prendre en compte ces évolutions.
Au-delà de ces propositions, il convient de souligner les accords trouvés récemment entre le Conseil et le Parlement européen sur deux textes importants en matière de sécurité.
Le premier, trouvé le 26 novembre dernier, a pour objet de renforcer le mandat d’Europol, qui pourra ainsi plus facilement créer des unités spécialisées pour réagir sans délai aux menaces terroristes et aux autres formes de criminalité grave et organisée, et de faciliter les échanges d’informations avec les États membres.
Le second compromis, trouvé le 2 décembre et fruit de plus de quatre années et demie de négociations, concerne la proposition de directive relative à la mise en place d’un système européen de collecte et de traitement des données des dossiers passagers (PNR). L’accord prévoit que les données ne peuvent être traitées que pour la prévention et la détection d’infractions graves, ainsi que la réalisation d’enquêtes et de poursuites en la matière. Une liste d’infractions a été établie, incluant notamment la traite d’êtres humains, la participation à une organisation criminelle, la cybercriminalité, la pédopornographie et le trafic d’armes. Les données collectées seront conservées sous une forme non masquée pendant six mois, et ensuite sous une forme masquée, mais qui restera accessible aux autorités en cas de demandes spécifiques, pour une durée de quatre ans et demi. Les ministres se sont par ailleurs engagés, dans une déclaration politique, à appliquer la directive aux vols intra-européens et ont affirmé que les vols charters seraient concernés par la future directive.
Des avancées notables ont donc été réalisées depuis l’adoption par la commission des Affaires européennes, le 1er décembre dernier, de la présente proposition de résolution européenne.
Avant d’évoquer très rapidement mes propositions d’amendements, qui tiennent compte des évolutions intervenues, je souhaiterais présenter brièvement l’esprit de cette résolution.
Sur la méthode tout d’abord, il s’agit d’apporter notre soutien au principe d’une intervention de l’Union en appui des actions mises en œuvre en matière de sécurité par les États membres, ainsi qu’aux objectifs, axes et champs d’action retenus par la Commission européenne dans le programme européen de sécurité, tout en demandant les informations nécessaires à un suivi régulier, de la part des parlements nationaux, de la mise en œuvre du programme.
Il s’agit également d’insister sur la nécessité d’une meilleure articulation entre le programme européen de sécurité et d’autres plans d’action de l’Union comme celui relatif au trafic de migrants, mais également entre politique intérieure et extérieure de sécurité.
Sur le fond, il est demandé une meilleure collaboration entre les agences de l’Union, entre les États membres et entre les échelons nationaux et européen. L’accent est également porté sur la mise en place d’un dispositif européen de garde-frontières ainsi que sur une conception ambitieuse du parquet européen, qui apparaît comme le parent pauvre du programme européen de sécurité.
Au-delà des amendements rédactionnels et de mise en cohérence, je vous propose donc aujourd’hui quelques modifications destinées à tenir compte des dernières évolutions.
Il s’agit notamment de prendre en considération les dernières propositions de textes formulées – c’est l’objet de l’amendement CL5 qui inclut dans les visas les propositions de la Commission européenne du 2 décembre 2015 sur la directive relative au terrorisme et la communication sur le trafic d’armes à feu ; de saluer l’accord trouvé sur le PNR et d’encourager à une adoption définitive et à une transposition rapide de la proposition de directive relative au PNR (amendement CL16) et, enfin, d’apporter notre appui à la demande formulée par la France et soutenue par le Conseil d’une révision ciblée du code frontières Schengen et d’une amélioration du système d’information Schengen (amendement CL12).
De façon plus globale, je souhaite ici vous faire part de trois observations partagées par l’ensemble des collègues de la commission des affaires européennes, toutes tendances et opinions confondues.
Tout d’abord, l’adoption de mesures au plus haut niveau ne vaut que si leur déclinaison sur le terrain est effective, ce qui suppose un suivi dans le temps, à échéances régulières, avec la capacité d’adapter les dispositifs pour les rendre opérationnels et efficaces. Cet « après adoption » – si vous permettez l’expression – doit aussi faire partie des compétences exercées par notre assemblée.
Ensuite, si la modernité se fonde sur une spécialisation des fonctions, des acteurs et des systèmes, gage d’efficacité a priori, la véritable efficacité suppose une collaboration institutionnelle, relationnelle et une coopération réelle qui, seules, sont en mesure de rendre efficaces les dispositifs. À un fonctionnement en tuyaux d’orgue doit se substituer un fonctionnement et un esprit harmoniques, au sens où les parties concourent à former une unité, un équilibre entre le niveau national et européen et une aisance dans la lutte contre le terrorisme et le crime.
Enfin, la commission des affaires européennes a beaucoup travaillé, proposé et alerté sur un grand nombre de sujets qui sont aujourd’hui des priorités. La gestion commune des frontières, le passenger name record (PNR) et la nécessité d’une meilleure coordination de la lutte contre les trafics criminels font partie des sujets que nous avons traités, appelant au renforcement des moyens partagés et communs dans l’Union.
Nos résolutions sur le parquet européen, notre appel à renforcer les moyens dédiés aux opérations de contrôle de l’immigration irrégulière au moment où la Commission européenne entendait les diminuer, et notre appui à des moyens nouveaux comme la création d’un corps de garde-frontières constituent autant de points positifs et constructifs d’une politique de sécurité commune que nous soutenons depuis plusieurs années.
Nous ne pouvons que nous féliciter que le bien-fondé de nos orientations raisonnées, cherchant toujours l’équilibre entre les besoins de la force publique et la nécessité des droits et des libertés des citoyens, soit en quelque sorte admis.
La Commission en vient à l’examen de l’article unique de la proposition de résolution.
Mme la rapporteure. Plusieurs amendements rédactionnels ou de précision tendent à prendre en compte les évolutions récentes et les décisions prises au cours des derniers jours.
La Commission adopte successivement l’amendement de précision CL1, l’amendement rédactionnel CL2 et l’amendement de précision CL3, tous de la rapporteure.
Elle en arrive à l’amendement CL4 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Le présent amendement a pour objet d’ajouter un visa relatif au « code frontières Schengen », par cohérence avec l’amendement CL12.
La Commission adopte l’amendement CL4.
Elle examine ensuite l’amendement CL5 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement a pour objet d’insérer parmi les visas les dernières propositions faites par la Commission européenne dans le cadre de la mise en œuvre du programme européen de sécurité.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite successivement l’amendement de précision CL6, les amendements rédactionnels CL7 à CL9, l’amendement de précision CL10 et l’amendement CL11, tous de la rapporteure.
Elle en vient à l’amendement CL12 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement a pour objectif de prévenir toute remise en cause de l’existence de l’espace de libre circulation de Schengen, en assurant un meilleur contrôle, notamment aux frontières extérieures. Nous demandons donc une révision ciblée du « code frontières Schengen ».
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il s’agit du fameux système d’information Schengen, qui a fait l’objet de beaucoup de discussions au cours des derniers jours.
La Commission adopte l’amendement CL12.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL13 de la rapporteure.
Elle en vient à l’amendement CL14 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement doit être rectifié à la suite de la présentation faite, cet après-midi, par la Commission européenne, de la proposition relative à la création d’un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes. Il est proposé que l’Assemblée : « rappelle son soutien à la création d’un corps européen de garde-frontières ».
La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.
Elle est ensuite saisie de l’amendement CL15 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement a pour objet de rappeler la position exprimée lors d’une rencontre avec la commissaire européenne chargée de ces affaires. Nous souhaitons insister afin que la création du parquet européen permette de lutter contre la criminalité grave ayant une dimension transfrontière, notamment le terrorisme, le trafic d’armes ou de stupéfiants, le blanchiment d’argent et le trafic d’êtres humains.
Ce n’est pas le champ de compétences prévu pour l’instant pour le futur parquet européen, la Commission européenne ne mentionnant que : « la protection contre les pertes que des activités criminelles causent au budget de l’Union européenne ». Nous réitérons donc notre préoccupation, qui est d’ailleurs partagée par d’autres États membres.
La Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CL16 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement a pour objet de saluer l’accord trouvé entre le Parlement européen et le Conseil sur la collecte de données personnelles et la durée de conservation de ces dernières dans le cadre du PNR.
La Commission adopte l’amendement.
Elle est ensuite saisie de l’amendement CL17 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Le présent amendement a pour objectif d’élargir le champ des organismes devant mieux collaborer à l’ensemble des agences compétentes dans les domaines de la justice et des affaires intérieures – en particulier Frontex – en ce qui concerne le niveau européen, et aux institutions judiciaires nationales.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite successivement l’amendement rédactionnel CL17 et l’amendement de cohérence CL18, tous deux présentés par la rapporteure.
Puis la Commission adopte l’article unique de la proposition de résolution, modifié, et, par voie de conséquence, la proposition de résolution modifiée, le groupe Les Républicains s’étant abstenu.
*
* *
En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de résolution européenne sur le programme européen de sécurité dont le texte figure dans le document annexé au présent rapport.
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Texte de la proposition ___ |
Texte adopté |
Proposition de résolution européenne sur le programme européen de sécurité |
Proposition de résolution européenne sur le programme européen de sécurité |
Article unique |
Article unique |
L’Assemblée nationale, |
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Vu l’article 88-4 de la Constitution, |
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Alinéa supprimé |
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Vu le traité sur l’Union européenne, en particulier son article 3 paragraphe 2 et son article 4 paragraphe 2, |
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Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en particulier son titre V, amendement CL1 |
Vu la communication de la Commission européenne du 28 avril 2015 au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, intitulée « Le programme européen en matière de sécurité » (COM[2015] 185 final), |
(Alinéa sans modification) |
Vu les conclusions du 20 novembre 2015 du Conseil de l’Union européenne et des États membres, réunis au sein du Conseil, sur la lutte contre le terrorisme, |
Vu les conclusions du 20 novembre 2015 du Conseil de l’Union européenne et des États membres, réunis au sein du Conseil, sur la lutte contre le terrorisme et le renforcement de la réponse pénale à la radicalisation conduisant au terrorisme et à l’extrémisme violent, |
|
Alinéa supprimé amendement CL2 |
Vu la résolution du Parlement européen du 9 juillet 2015 sur le programme européen en matière de sécurité, amendement CL3 | |
Vu la résolution du Parlement européen du 25 novembre 2015 sur la prévention de la radicalisation et du recrutement de citoyens de l’Union par des organisations terroristes, |
(Alinéa sans modification) |
Vu le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), amendement CL4 | |
Vu la proposition de directive du 2 décembre 2015 du Parlement européen et du Conseil relative à la lutte contre le terrorisme, remplaçant la décision-cadre 2002/475/JAI du Conseil relative à la lutte contre le terrorisme (COM [2015] 625), | |
Vu la communication du 2 décembre 2015 de la Commission européenne au Parlement européen et au Conseil relative à la mise en œuvre du programme européen en matière de sécurité et présentant le plan d’action de l’Union européenne contre le trafic et l’utilisation illicite d’armes à feu et d’explosifs (COM [2015] 624), amendement CL5 | |
Vu la résolution européenne n° 814 sur la proposition de directive relative à la mise en place d’un système européen de collecte et de traitement des données des dossiers passagers (données PNR) adoptée par l’Assemblée nationale le 23 décembre 2011, |
(Alinéa sans modification) |
Vu la résolution européenne n° 285 sur la proposition de règlement du Conseil du 17 juillet 2013 portant création du Parquet européen (COM[2013] 534 final), adoptée par l’Assemblée nationale le 31 janvier 2014, |
(Alinéa sans modification) |
Vu la résolution européenne n° 370 sur les orientations pour l’avenir de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, adoptée par l’Assemblée nationale le 27 juin 2014, |
(Alinéa sans modification) |
Vu la résolution européenne n° 499 appelant à un renforcement des politiques européennes en matière de lutte contre l’immigration irrégulière, particulièrement en Méditerranée, adoptée par l’Assemblée nationale le 28 mars 2015, amendement CL6 | |
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Considérant que les nouvelles menaces affectant la sécurité des citoyens de l’Union européenne, qui comportent une dimension transfrontalière croissante, appellent une réponse davantage concertée et coordonnée de la part des États membres et de l’Union européenne ; amendement CL7 |
Considérant que si la sécurité nationale et le maintien de l’ordre public relèvent de la compétence des États membres, l’Union européenne |
Considérant que si la sécurité nationale et le maintien de l’ordre public relèvent de la compétence des États membres, l’Union européenne doit toutefois jouer un rôle d’initiative et de coordination pour lutter efficacement contre des menaces transfrontières ; amendement CL8 |
Considérant que la constitution d’un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures et dans |
Considérant que la constitution d’un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures et dans lequel la liberté, la sécurité et les droits fondamentaux des citoyens sont protégés est un objectif de l’Union européenne ; amendement CL9 |
1. Salue la volonté de la Commission européenne de promouvoir une intervention de l’Union européenne en appui des actions mises en œuvre dans le domaine de la sécurité par les États membres ainsi que la cohérence des actions stratégiques présentées par l’Union européenne depuis 2010 ; |
1. (Sans modification) |
2. Rappelle que les États membres ont, en matière de sécurité, une responsabilité commune et doivent, pour être efficaces, se coordonner et faire preuve de solidarité ; |
2. (Sans modification) |
3. Approuve les grands objectifs stratégiques |
3. Approuve les grands objectifs stratégiques définis pour la période 2015-2020, la méthode retenue qui consiste à renforcer l’échange d’informations, la coopération opérationnelle et le soutien à la formation et à l’innovation ainsi que les trois domaines d’action prioritaires que sont le terrorisme et la radicalisation, la criminalité organisée et la cybercriminalité ; amendement CL10 |
3 bis (nouveau). Soutient la démarche pragmatique adoptée par la Commission européenne pour la mise en œuvre du programme européen de sécurité, qui repose principalement sur des évaluations régulières des dispositifs et des outils existants ; | |
3 ter (nouveau). Demande que soient associés aux actions du programme européen de sécurité des objectifs clairs, assortis d’indicateurs pertinents et d’un financement spécifique, de telle sorte que les parlements nationaux puissent suivre la mise en œuvre du programme de manière éclairée, s’agissant d’un domaine dans lequel ils ont la compétence de droit commun ; | |
3 quater (nouveaux). Regrette le manque de précision du programme quant aux actions à mener et aux financements à mobiliser en matière de prévention des comportements des délinquants et des criminels, en particulier dans le cadre des programmes d’action de l’Union européenne dans les domaines de l’éducation, de la jeunesse et de la culture ; | |
3 quinquies (nouveau). Souligne que le succès du programme dépendra très largement de la volonté des États membres à le mettre en œuvre et à se saisir des outils à leur disposition ; se félicite à cet égard des initiatives et engagements pris par le Conseil de l’Union européenne dans sa formation « Justice et affaires intérieures » depuis le 13 novembre 2015 ; amendement CL11 | |
4. Demande que les efforts visant à une plus grande harmonisation des législations soient poursuivis, en particulier s’agissant de la lutte contre le terrorisme et contre la circulation et le contrôle des armes à feu sur le territoire européen |
4. Demande que les efforts visant à une plus grande harmonisation des législations soient poursuivis, en particulier s’agissant de la lutte contre le terrorisme et contre la circulation et le contrôle des armes à feu sur le territoire européen ; amendement CL11 |
4 bis (nouveau). Demande aux institutions européennes de procéder au plus vite à une révision ciblée du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes, dit code frontières Schengen, afin de permettre des contrôles systématiques aux frontières des États membres de l’espace Schengen des citoyens de l’Union européenne et des autres personnes bénéficiant du droit à la libre circulation en vertu de la législation européenne ; insiste sur la nécessité d’améliorer la qualité des données saisies dans le système d’information de Schengen ainsi que leur traitement par les États membres ; amendement CL12 | |
5. Réaffirme son soutien aux actions spécifiquement mises en œuvre pour lutter contre le trafic |
5. Réaffirme son soutien aux actions spécifiquement mises en œuvre pour lutter contre le trafic des migrants, en particulier en Méditerranée ; amendement CL13 |
5 bis (nouveau). Rappelle son soutien à la création d’un corps européen de garde-frontières ; amendement CL14 rect. | |
6. |
6. Supprimé amendement CL11 |
7. |
7. Supprimé amendement CL11 |
8. |
8. Rappelle son soutien constant à la création d’un Parquet européen, organisé sous une forme collégiale et doté de compétences étendues à la lutte contre la criminalité grave ayant une dimension transfrontière, notamment le terrorisme, les trafics d’armes et de stupéfiants, le blanchiment d’argent et le trafic des êtres humains ; amendement CL15 |
9. |
9. Se félicite du compromis trouvé le 2 décembre 2015 par le Parlement européen et le Conseil sur la proposition de directive du 2 février 2011 relative à l’utilisation des données des dossiers passagers pour la prévention et la détection des infractions terroristes et des formes graves de criminalité ainsi que de la déclaration conjointe des États membres, qui constituent un juste équilibre entre la nécessité de mener des contrôles efficaces et celle de garantir la protection des droits fondamentaux et des données personnelles ; souhaite qu’il soit procédé rapidement à l’adoption définitive de la directive ainsi qu’à sa transposition par les États membres ; amendement CL16 |
10. Réitère ses observations et demandes en matière de mise en œuvre d’un corps de garde-frontières « européen » tout au long des frontières communes ; |
10. Supprimé amendement CL14 rect |
11. |
11. Insiste sur la nécessité d’une coopération accrue entre les agences de l’Union européenne compétentes en matière de justice et d’affaires intérieures, en particulier l’Office européen de police Europol, l’unité de coopération judiciaire Eurojust et l’agence Frontex, ainsi que d’une meilleure collaboration entre ces agences et les services de sécurité et les institutions judiciaires des États membres ; amendement CL17 |
12. |
12. Supprimé amendement CL11 |
13. |
13. Supprimé amendement CL11 |
14. Demande que l’articulation du programme avec d’autres politiques ou plans d’action de l’Union européenne, comme le plan d’action de l’Union européenne contre le trafic des migrants ou l’agenda européen en matière de migration, soit précisée et le financement de certaines actions explicitement abordé ; |
14. (Sans modification) |
15. |
15. Supprimé amendement CL19 |
16. |
16. Supprimé amendement CL16 |
17. Partage l’avis de la Commission européenne sur la nécessité de concilier les dimensions intérieure et extérieure de la sécurité et de veiller à établir un dialogue régulier dans ce domaine avec les pays voisins de l’Union européenne et les candidats à l’adhésion, ainsi qu’avec les organisations régionales et internationales concernées ; |
17. (Sans modification) |
18. Souligne la nécessité de concilier les actions entreprises par l’Union européenne au titre du programme de sécurité avec la politique de sécurité et de défense commune, s’agissant notamment de la lutte contre le financement du terrorisme, et invite les États membres à prendre des mesures visant à |
18. Souligne la nécessité de concilier les actions entreprises par l’Union européenne au titre du programme de sécurité avec la politique de sécurité et de défense commune, s’agissant notamment de la lutte contre le financement du terrorisme, et invite les États membres à prendre des mesures visant à tarir les sources de financement de l’organisation terroriste Daech. amendement CL18 |
19 (nouveau). Engage les États membres et les institutions de l’Union européenne à assurer un suivi attentif et régulier de la mise en œuvre du programme européen de sécurité. amendement CL19 |