N° 3716
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 mai 2016.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LE PROJET DE LOI ORGANIQUE (n° 3200), ADOPTÉ PAR LE SÉNAT APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats
ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature,
PAR Mme Cécile UNTERMAIER,
Députée
——
Voir les numéros :
Sénat : 1ère lecture : 660 (2014-2015), 119 et 120 et T.A. 31 (2015-2016).
SOMMAIRE
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Pages
A. LA DIVERSIFICATION DES RECRUTEMENTS COMME AUDITEUR DE JUSTICE 13
B. LA DIVERSIFICATION DES RECRUTEMENTS À TITRE PROVISOIRE 13
1. Le détachement judiciaire 14
2. Les magistrats à titre temporaire 14
3. Les magistrats honoraires 14
II. LA CARRIÈRE DES MAGISTRATS 15
1. Des perspectives de carrière enrichies 15
2. Une gestion des carrières plus souple et transparente 16
3. Des conditions de formation améliorées 16
4. Une procédure d’évaluation affermie 16
C. LES GARANTIES D’INDÉPENDANCE ENTOURANT L’EXERCICE DE CERTAINES FONCTIONS 17
1. L’inspection générale des services judiciaires 17
2. Le juge des libertés et de la détention 18
3. Les procureurs généraux 18
III. LES DROITS ET OBLIGATIONS DES MAGISTRATS 18
A. L’INSTAURATION DE NOUVELLES GARANTIES STATUTAIRES 19
B. LE RENFORCEMENT DES OBLIGATIONS DÉONTOLOGIQUES DES MAGISTRATS 20
C. LE TEXTE ADOPTÉ PAR LE SÉNAT 20
D. LES COMPLÉMENTS APPORTÉS PAR VOTRE COMMISSION DES LOIS 21
IV. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU CONSEIL CONSTITUTIONNEL 21
A. L’INTRODUCTION D’OBLIGATIONS DÉCLARATIVES POUR LES MEMBRES DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL 22
B. L’ENCADREMENT DES CONDITIONS DE DÉPÔT D’UNE QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ EN MATIÈRE CORRECTIONNELLE ET CONTRAVENTIONNELLE 22
AUDITION DE M. JEAN-JACQUES URVOAS, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, ET DISCUSSION GÉNÉRALE 23
EXAMEN DES ARTICLES 47
TITRE IER – DISPOSITIONS RELATIVES AU STATUT DE LA MAGISTRATURE 47
Chapitre Ier – Dispositions relatives à la composition du corps judiciaire 47
Article 1er(art. 1er de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Appartenance au corps judiciaire des magistrats exerçant des fonctions d’inspection des services judiciaires 47
Article 2 (art. 3 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Création de nouvelles fonctions « hors hiérarchie » 52
Chapitre II – Dispositions relatives au recrutement et à la formation professionnelle 56
Article 3 (art. 14 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Extension du champ des missions de formation de l’École nationale de la magistrature 56
Article 4 (art. 16 et 17 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Assouplissement des exigences de diplôme et de condition physique pour l’accès à l’École nationale de la magistrature 57
Article 5 (art. 18-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Assouplissement des exigences d’activité ou de diplôme pour les candidats docteurs en droit ou ceux ayant exercé une activité professionnelle en lien avec les fonctions judiciaires 59
Article 6 (art. 19 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Aménagement du stage des auditeurs de justice auprès d’un barreau ou d’un avocat 62
Après l’article 6 63
Chapitre III – Dispositions relatives aux conditions de nomination 64
Article 7 (art. 1er de l’ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l’État) : Nomination des procureurs généraux 64
Article 8 (art. 2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Assouplissement des obligations de mobilité pour la nomination au premier grade 66
Article 9 (art. 3-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Réforme du régime juridique relatif aux magistrats placés 67
Article 9 bis (art. 6 et 20 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Suppression de l’adverbe « religieusement » dans la prestation de serment des magistrats de l’ordre judiciaire et des auditeurs de justice 70
Article 9 ter (art. 6 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Lieu de prestation de serment d’un magistrat intégré et nommé dans une juridiction d’outre-mer 72
Article 9 quater (nouveau) (art. 9 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Coordination 74
Article 10 (art. 12-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Évaluation des magistrats 75
Article 11 (art. 13 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Assouplissement de l’obligation de résidence des magistrats 77
Article 11 bis (art. 27 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Coordination liée à la modification des procédures suivies devant la commission d’avancement 79
Article 12 (art. 27-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Extension du principe de diffusion des projets de nomination aux fonctions de substitut chargé du secrétariat général d’une juridiction 80
Article 13 (art. 28 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Modalités de nomination des magistrats du second et du premier grade pour exercer les fonctions d’inspecteur des services judiciaires 82
Article 14 (art. 28-4 (nouveau) de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Nomination aux fonctions de juge des libertés et de la détention 83
Article 14 bis (nouveau) (art. 28-3 et 31 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Règles d’affectation des magistrats à la suite de la suppression d’une juridiction ou d’une fonction 88
Article 15 (art. 34 et 36 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Allègement des procédures suivies devant la commission d’avancement 89
Article 16 (art. 37 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Obligation de rapport d’installation et de bilan d’activité pour les premiers présidents de cour d’appel 90
Article 17 (art. 37-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Extension du principe de diffusion des projets de nomination à l’ensemble des fonctions hors hiérarchie 92
Article 18 (art. 38 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Modalités de nomination des magistrats placés hors hiérarchie pour exercer les fonctions d’inspecteur général et d’inspecteur général adjoint des services judiciaires 94
Article 19 (art. 38-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Obligation de rapport d’installation et de bilan d’activité pour les procureurs généraux près la cour d’appel 96
Article 20 (art. 72, 72-1 (nouveau), 72-2 (nouveau) et 72-3 (nouveau) de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Procédure de réintégration des magistrats en détachement ou en congé parental 97
Chapitre IV – Dispositions relatives aux droits et obligations des magistrats 101
Avant l’article 21 101
Article 21 (art. 7-1 à 7-3 [nouveaux] et 9-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Conflits d’intérêts et obligations déclaratives des magistrats 102
Après l’article 21 115
Article 22 (art. 10-1 [nouveau] de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Droit syndical des magistrats 118
Article 22 bis (nouveau) (art. 10-2 [nouveau] de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire 123
Article 23 (art. 11 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Protection fonctionnelle des magistrats 126
Article 24 (art. 12-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Dossier des magistrats 128
Article 25 (art. 44 et 47 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Procédure d’avertissement et prescription des procédures disciplinaires 130
Article 25 bis (art. 43, 48 et 59 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Exercice du pouvoir disciplinaire à l’égard des magistrats exerçant des fonctions à l’inspection générale des services judiciaires 133
Article 25 ter (nouveau) (art. 50-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Conséquences rédactionnelles de la création de l’inspection générale de la justice 134
Article 26 (art. 50-4 et 50-5 [nouveaux], 63 et 63-1 à 63-3 [nouveaux] de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Délais en matière disciplinaire 134
Chapitre V – Dispositions relatives aux autres modalités de recrutement des magistrats 137
Article 27 (chapitres V bis à V quater de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Modifications légistiques 137
Article 27 bis (nouveau) (art. 40-1, 40-2 et 40-4 de l’ordonnance n° 58-1270 du 2 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Statut des conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire 138
Article 28 (art. 41 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Ouverture aux militaires du détachement judiciaire 140
Article 28 bis (nouveau) (art. 41-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Modalités du détachement judiciaire 141
Article 29 (art. 41-10 à 41-16 et chapitre V quinquies [abrogé] de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Statut des magistrats exerçant à titre temporaire 141
Article 30 (supprimé) (art. 41-19 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Statut des juges de proximité 144
Article 30 bis (supprimé) (art. 41-22 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Conséquences de la suppression des juridictions de proximité sur les incompatibilités applicables aux juges de proximité 146
Article 31 (art. 41-25 à 41-31 [nouveaux] de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles 147
TITRE II – DISPOSITIONS RELATIVES AU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE 152
Article 32 (art. 10-1 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) : Conflits d’intérêts des membres du Conseil supérieur de la magistrature 152
Article 32 bis (nouveau) (art. 10-1-1-A [nouveau] de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) : Déclarations d’intérêts des membres du Conseil supérieur de la magistrature 153
Article 33 (art. 10-1-1 [nouveau] de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) : Déclaration de situation patrimoniale des membres du Conseil supérieur de la magistrature 155
Après l’article 33 156
Article 33 bis (nouveau) (art. 3 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) : Conséquences de la création de l’inspection générale de la justice 157
TITRE III – DISPOSITIONS DIVERSES ET TRANSITOIRES 157
Article 34 (art. 21, 21-1, 25, 35, 76-1-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Diverses dispositions 157
Article 34 bis A (nouveau) (art. 79-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature et art. 164 de la loi n° 2010 1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011) : Exercice par les magistrats honoraires d’activités non juridictionnelles 159
Article 34 bis (supprimé) (art. L.O. 140 du code électoral) : Incompatibilité entre le mandat parlementaire et les fonctions de juge d’un tribunal de commerce 160
Article 34 ter (art. 22 et 23 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Coordinations liées à la création du corps des directeurs de greffe des services judiciaires – Conditions de l’intégration directe 162
Article 34 quater (art. 12, 13, 31, 48, 48-1 et 72 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Modifications rédactionnelles 162
Article 34 quinquies (nouveau) (art. 3-1 et 3-2 [nouveaux] de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel) : Déclarations d’intérêts et déclarations de situation patrimoniale des membres du Conseil constitutionnel 163
Article 34 sexies (nouveau) (art. 23-1 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel) : Dépôt d’une question prioritaire de constitutionnalité en matière correctionnelle et contraventionnelle 171
Article 35 (art. 36 de la loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007 relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats) : Entrées en vigueur différées et report du dispositif de mobilité statutaire 175
Intitulé du projet de loi organique 178
PRINCIPAUX APPORTS DE LA COMMISSION
Lors de ses réunions du mardi 3 mai 2016, la commission des Lois a apporté au projet de loi organique, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature, les principales modifications présentées ci-après :
– elle a ouvert l’accès à la magistrature à titre définitif, en élargissant notamment le champ du recrutement sur titres, en particulier aux juristes assistants (articles 4 et 5) ;
– elle a porté de six à huit ans la durée pendant laquelle un magistrat peut, au cours de sa carrière, occuper les fonctions de magistrat placé (article 9) ;
– elle a précisé les règles d’affectation des magistrats en cas de suppression d’une fonction ou d’une juridiction (article 14 bis) ;
– elle a rétabli le statut du juge des libertés et de la détention proposé initialement par le Gouvernement et fondé sur sa reconnaissance comme fonction spécialisée ;
– elle a tenu compte de la création de l’inspection générale de la justice (articles 1er, 2, 13 et 18) et précisé que l’inspecteur général des services judiciaires, qui devient inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, à compter du 1er janvier 2017, n’est pas soumis à la procédure de la transparence (article 17) ;
– elle a rendu plus attractif le statut des conseillers et des avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire (article 27 bis), ainsi que la procédure de détachement judiciaire (article 28 bis) ;
– elle a fusionné le statut des magistrats à titre temporaire avec celui des juges de proximité (article 29) ;
– elle a renforcé les obligations déontologiques applicables à la magistrature, en créant un collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire, en étendant l’obligation de déclaration d’intérêts au premier président de la Cour de cassation, au procureur général près cette Cour et à l’ensemble des membres du Conseil supérieur de la magistrature (articles 21, 22 bis et 32 bis) ;
– elle a transposé aux membres du Conseil constitutionnel les obligations de déclaration d’intérêts et de situation patrimoniales applicables aux magistrats (article 34 quater) ;
– elle a réformé les conditions de dépôt d’une question prioritaire de constitutionnalité en matière correctionnelle et contraventionnelle (article 34 sexies).
L’Assemblée nationale est saisie, en première lecture, du projet de loi organique relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature, pour lequel le Gouvernement a engagé la procédure accélérée.
Ainsi rebaptisé par le Sénat (1), ce projet de loi organique propose, avec le projet de loi ordinaire « relatif à l’action de groupe et à l’organisation judiciaire » (2), une réforme judiciaire d’ensemble.
Ces textes sont le fruit d’une vaste réflexion lancée, en 2012, par Mme Christiane Taubira, alors garde des Sceaux. Conduit sur le fondement des contributions issues des juridictions et des cours d’appel ainsi que des travaux confiés à plusieurs institutions et groupes de travail (3), qui ont abouti à 268 recommandations sur lesquelles un débat national s’est tenu les 10 et 11 janvier 2014, ce chantier d’ampleur a trouvé son aboutissement dans la présentation, le 10 septembre 2014, en Conseil des ministres, de quinze actions pour la justice du XXIème siècle, dont le volet législatif est aujourd’hui soumis à l’Assemblée nationale.
Le projet de loi organique répond, en particulier, à la volonté d’une République exemplaire, clairement exprimée depuis 2012 avec, notamment, le renforcement des garanties d’indépendance relatives à l’exercice de leurs fonctions par les magistrats, à l’instar de la loi n° 2013-669 du 25 juillet 2013 (4), qui interdit au ministre de la Justice d’adresser aux magistrats du ministère public des instructions dans les affaires individuelles, ou encore du projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature, qui a fait l’objet d’une adoption conforme par l’Assemblée nationale en deuxième lecture le 26 avril 2016.
Il accorde également aux magistrats de l’ordre judiciaire plusieurs garanties statutaires supplémentaires et renforce leurs obligations déontologiques.
Il vise, enfin, à apporter des réponses aux contraintes budgétaires et gestionnaires auxquelles le ministère est confronté.
L’objectif du projet de loi organique est donc d’adapter le statut de la magistrature aux exigences de notre temps. À cet effet, il propose d’ouvrir la magistrature sur la société, d’améliorer les perspectives de carrière des magistrats et d’en assouplir la gestion, de renforcer les garanties en matière d’indépendance et de poser un cadre déontologique.
Votre commission des Lois a apporté plusieurs modifications au texte qui lui a été transmis, rendues nécessaires par des changements intervenus depuis le 4 novembre 2015, date de son adoption par le Sénat, en particulier la définition d’un cadre déontologique relatif aux fonctionnaires (5) et le renforcement du plan de lutte contre le terrorisme. Sont par ailleurs prises en compte les nouvelles priorités de la Chancellerie définies par M. Jean-Jacques Urvoas, devenu, dans l’intervalle, garde des Sceaux, ministre de la Justice.
Le projet de loi organique propose, d’une part, d’ouvrir l’accès à certaines des voies de recrutement à titre définitif (6) – celles permettant l’accès à l’auditorat de justice – et, d’autre part, de diversifier les recrutements à titre provisoire.
Afin d’ouvrir davantage le recrutement et diversifier le corps de la magistrature, les conditions d’accès des concours d’entrée à l’École nationale de la magistrature (ENM) sont assouplies (article 4), de même que celles de l’accès sur titres (article 5).
Votre commission des Lois a renforcé cette ouverture en :
– élargissant au domaine des sciences humaines et sociales le champ du recrutement sur titres des personnes justifiant d’au moins quatre années d’activité les qualifiant pour l’exercice des fonctions judiciaires ;
– étendant le recrutement sur titres aux juristes assistants nouvellement créés dans le cadre du plan de lutte anti-terroriste. Ainsi, les docteurs en droit et les personnes titulaires d’un diplôme sanctionnant cinq années d’études supérieures dans le domaine juridique ou justifiant d’une qualification au moins équivalente pourront, à l’issue d’au moins trois années d’exercice professionnel en qualité de juriste assistant, être nommés directement auditeurs de justice.
Votre commission des Lois a en outre rétabli la date d’appréciation des conditions pour concourir à l’École nationale de la magistrature (ENM), prévue à l’article 4, à la première épreuve du concours, alors que le Sénat l’avait fixée à la publication des résultats d’admissibilité.
L’article 6 du projet de loi organique revient, par ailleurs, sur la durée du stage que doivent accomplir les auditeurs de justice auprès d’un avocat, au cours de leur scolarité à l’ENM. Tandis que le Gouvernement avait proposé d’en ramener de six à trois mois la durée minimale, le Sénat a supprimé toute référence à cette durée. Votre commission des Lois a confirmé la position du Sénat.
Pour remédier au manque de magistrats, tout en diversifiant les recrutements, le projet de loi organique vise à développer les mécanismes d’intégration provisoire au corps judiciaire.
La procédure de détachement judiciaire, qui permet d’exercer pendant cinq ans les fonctions des premier et second grades de la hiérarchie judiciaire, est ouverte aux militaires par l’article 28.
Votre commission des Lois a introduit un article 28 bis visant à rendre cette voie de recrutement plus attractive : il garantit à l’agent sa prise en charge à équivalence de grade et à un échelon indiciaire égal ou immédiatement supérieur à ceux qu’il détenait avant d’être détaché.
Les conditions de recrutement des magistrats exerçant à titre temporaire sont assouplies et rendues plus attrayantes.
La durée d’exercice professionnel requise pour les professionnels du droit est abaissée à cinq ans, au lieu de sept. Les magistrats pourront exercer leurs fonctions à titre temporaire pour une durée de cinq ans renouvelable une fois (au lieu d’un mandat unique de sept ans) – le renouvellement étant de droit, dans la même juridiction, après avis conforme du CSM (article 29).
Votre commission des Lois a fait œuvre de simplification en fusionnant le statut des magistrats à titre temporaire avec celui des juges de proximité (suppression de l’article 30). Elle a également précisé que ces magistrats seront tenus d’établir une déclaration d’intérêts.
Les fonctions juridictionnelles ouvertes aux magistrats honoraires sont élargies : ceux-ci pourront exercer des fonctions d’assesseur dans les formations collégiales des tribunaux de grande instance (TGI) et des cours d’appel, ainsi que des fonctions de substitut près les TGI ou de substitut général près les cours d’appel (article 31).
Votre commission des Lois a complété ces dispositions :
– en permettant aux magistrats honoraires de présider la formation collégiale des TGI et des cours d’appel statuant en matière de contentieux social, dans la perspective de la suppression des tribunaux des affaires de la sécurité sociale (TASS) et des tribunaux du contentieux de l’incapacité (TCI) ;
– en supprimant la limite quantitative à l’intervention de ces magistrats, qu’avait introduite le Sénat ;
– en obligeant ces magistrats à établir une déclaration d’intérêts ;
– en consacrant dans le statut des magistrats la possibilité, aujourd’hui prévue dans le cadre de la « réserve judiciaire », d’exercer des fonctions non juridictionnelles (nouvel article 34 bis A) ;
– en permettant l’accession à l’honorariat aux conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire (dans le cadre de la réforme de leur statut prévue au nouvel article 27 bis).
Outre la modification des termes du serment prêté par les magistrats, le projet de loi organique améliore les perspectives de carrière de ces derniers, en simplifie la gestion, améliore les conditions de formation continue, affermit les exigences en matière d’évaluation et, enfin, renforce les garanties d’indépendance entourant l’exercice de plusieurs fonctions.
Deux dispositions relatives à la prestation de serment ont été introduites par le Sénat et confirmées par votre commission des Lois : la suppression de l’adverbe « religieusement » de la prestation de serment des magistrats (article 9 bis) et une mesure destinée à faciliter le recueil de la prestation des magistrats intégrés et nommés dans une juridiction d’outre-mer (article 9 ter).
L’amélioration des perspectives de carrière repose sur la création de nouvelles fonctions hors hiérarchie, destinée à renforcer les postes d’encadrement intermédiaire et supérieur dans les plus grandes juridictions et, ainsi, enrichir les opportunités de carrière des magistrats et mettre en cohérence la position hiérarchique de certains d’entre eux avec les responsabilités qu’ils sont amenés à exercer (article 2).
Les obligations de mobilité géographique posées pour la nomination au premier grade sont par ailleurs assouplies, dans le souci de promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes (article 8).
Les avantages de carrière liés aux fonctions de magistrat placé sont enfin améliorés, afin d’en renforcer l’attractivité (article 9). Confirmant cet objectif, votre commission des Lois a porté de six à huit ans la durée pendant laquelle un magistrat peut, au cours de sa carrière, occuper ces fonctions.
Plusieurs mesures sont destinées à faciliter la gestion de la carrière des magistrats.
Il en va ainsi de l’assouplissement de l’obligation de résidence (article 11), de l’allègement de la procédure devant la commission d’avancement (article 11 bis introduit par le Sénat et article 15) et des modalités de réintégration des magistrats à la suite d’un détachement ou d’un congé parental (article 20).
Votre commission des Lois a complété ces dispositions en précisant les règles d’affectation des magistrats en cas de suppression d’une juridiction ou d’une fonction (article 14 bis). Un nouveau dispositif a ainsi été introduit afin de garantir les droits des magistrats du siège en cas de suppression de leurs fonctions.
D’autres dispositions vont dans le sens d’une plus grande transparence dans le processus de nomination des magistrats et d’une égalité de traitement accrue. Ainsi, l’article 12 applique le principe de diffusion des projets de nomination (7) aux fonctions de substitut chargé du secrétariat général d’une juridiction – couvrant ainsi l’ensemble des fonctions du premier et du second grade – et l’article 17 étend ce même principe à l’ensemble des fonctions hors hiérarchie, à une exception près. En effet, alors que le Sénat avait supprimé la dérogation prévue pour l’inspecteur général des services judiciaires, votre commission des Lois l’a rétablie.
L’article 3 du projet de loi organique renforce la dimension pratique de la formation continue suivie par les magistrats à l’occasion de leurs changements de fonctions, en prévoyant que ceux-ci peuvent accomplir, à cette occasion, des actes juridictionnels sans pouvoir, toutefois, recevoir de délégation de signature. Il s’agit d’une avancée attendue de la part des magistrats.
Ce même article consacre par ailleurs dans l’ordonnance statutaire le rôle de l’ENM dans la formation professionnelle de personnes qui n’appartiennent pas au corps judiciaire mais sont amenées à exercer des fonctions juridictionnelles ou à contribuer étroitement à l’activité judiciaire ainsi que sa mission de formation des candidats admis aux concours complémentaires et des candidats à une intégration directe.
Les modalités d’évaluation des magistrats sont précisées par l’article 10 du projet de loi organique : le principe d’un bilan d’activité dressé par le magistrat avant son évaluation est consacré, la capacité des chefs de juridiction à gérer une juridiction est expressément inscrite parmi les critères requis et la prise en compte des conditions d’organisation et de fonctionnement du service affirmée. Tirant les conséquences de la réforme prévue aux articles 29 et 30 et modifiée par votre commission des Lois (cf. supra I.B.2), cet article prévoit également une évaluation des magistrats à titre temporaire à l’occasion du renouvellement de leur mandat.
Par ailleurs, le principe d’une évaluation est posé pour les premiers présidents de cour d’appel par l’article 16 et pour les procureurs généraux près lesdites cours par l’article 19. Le dispositif repose sur la rédaction, par ces derniers, d’un rapport d’installation et d’un bilan d’activité. Alors que le Sénat avait ajouté que l’inspection générale des services judiciaires serait chargée de réaliser régulièrement des enquêtes sur le fonctionnement des cours d’appel, dont les éléments seraient versés au dossier des chefs de juridiction, votre commission des Lois a supprimé cette disposition.
Le projet de loi organique renforce les garanties destinées à assurer l’indépendance des magistrats exerçant les fonctions suivantes : inspection générale des services judiciaires, juge des libertés et de la détention et procureur général.
Le projet de loi organique propose une réforme d’ensemble, destinée à affermir l’indépendance des magistrats de l’inspection générale des services judiciaires.
L’article 1erconsacre ainsi l’appartenance au corps judiciaire de ces magistrats, afin de consolider leur assise statutaire. L’article 2 inscrit dans l’ordonnance statutaire les fonctions d’inspecteur général et d’inspecteur général adjoint parmi les fonctions hors hiérarchie, tandis que l’article 13 clarifie les conditions de nomination des inspecteurs et l’article 18 celles de l’inspecteur général et des inspecteurs généraux adjoints, désormais identiques à celles prévalant pour les magistrats du parquet.
Votre commission des Lois a, par ailleurs, adopté plusieurs amendements destinés à tenir compte de la réforme décidée par le nouveau ministre de la justice qui a pour objectif de regrouper, au sein d’une inspection générale de la justice, les trois inspections du ministère (8), l’inspecteur général des services judiciaires devenant l’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, et les inspecteurs généraux et inspecteurs des services judiciaires devenant inspecteurs généraux et inspecteurs de la justice.
À l’initiative de votre rapporteure ainsi que du groupe Socialiste, républicain et citoyen et de M Sergio Coronado, votre commission des Lois a rétabli la réforme du statut du juge des libertés et de la détention prévue à l’article 14 et a modifié en conséquence les articles 2 et 9.
Refusant de faire du juge des libertés et de la détention un juge spécialisé, comme le proposait le Gouvernement, le Sénat avait maintenu le principe d’une désignation de ce dernier par le président du tribunal de grande instance, mais avait transformé l’avis simple de l’assemblée générale des magistrats du siège en avis conforme. Il avait par ailleurs inscrit dans l’ordonnance statutaire les cas dans lesquels le juge des libertés et de la détention pouvait être suppléé.
Votre commission des Lois a considéré, au contraire, qu’il convenait, afin d’apporter au juge des libertés et de la détention les garanties nécessaires à l’exercice de ses responsabilités, qui sont croissantes, et de revaloriser cette fonction souvent considérée comme peu attractive, de lui conférer le statut de juge spécialisé.
La procédure de nomination prévue (nomination par décret du Président de la République, pris sur proposition du garde des Sceaux, après avis conforme de la formation du siège du CSM) présente l’avantage, d’une part, de prévenir tout changement d’affectation arbitraire et toute tentative d’intervention et, d’autre part, de transformer cette fonction souvent « subie » en une fonction « choisie », puisque seuls les magistrats ayant postulé pourront se la voir attribuer.
La limitation de l’exercice de cette fonction dans une même juridiction à dix ans apparaît également comme un garde-fou.
Les cas de suppléance du juge des libertés et de la détention sont, pour leur part, définis à l’article 11 du projet de loi ordinaire.
Destiné à renforcer, au moins symboliquement, l’indépendance des magistrats du parquet, l’article 7 supprime la nomination des procureurs généraux près les cours d’appel par décret délibéré en conseil des ministres. Ceux-ci seront nommés par décret simple du Président de la République.
Le projet de loi organique accorde aux magistrats de l’ordre judiciaire plusieurs garanties statutaires supplémentaires. Il renforce également leurs obligations déontologiques.
L’article 22 consacre le droit syndical des magistrats dans l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. Il définit les conditions de représentativité des organisations syndicales et permet à leurs représentants de bénéficier d’autorisations d’absence, de décharges d’activités et d’un « crédit de temps syndical ».
En outre, la protection fonctionnelle des magistrats s’appliquera désormais, non seulement lors des instances civiles ou pénales mettant en cause un magistrat, mais aussi aux procédures devant la commission d’admission des requêtes du CSM (article 23).
Enfin, les garanties disciplinaires des magistrats sont renforcées.
Chaque magistrat pourra demander le retrait de son dossier des pièces relatives à une poursuite disciplinaire s’étant soldée par un non-lieu à sanction (article 24). Votre commission des Lois a précisé que ce retrait sera de droit.
Aucun avertissement ne pourra désormais être prononcé plus de deux ans après la connaissance des faits en cause. Le magistrat devra bénéficier d’un entretien préalable et, grâce à une disposition introduite au Sénat, pourra se faire assister de la personne de son choix (article 25).
En matière disciplinaire proprement dite (9), le même article 25 instaure un délai de prescription de trois ans – qui ne sera néanmoins pas opposable aux justiciables.
Votre commission des Lois a précisé le point de départ de ces délais de prescription, transposant ainsi les dispositions de la loi du n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.
Afin de réduire la durée des procédures disciplinaires, plusieurs délais sont introduits par l’article 26. Saisi par le Garde des Sceaux, par une autorité judiciaire ou par un justiciable, le CSM devra se prononcer dans les douze mois, sauf prorogation pour une durée de six mois renouvelable. Ces délais sont réduits lorsque le magistrat fait l’objet d’une interdiction temporaire d’exercice : le CSM – ou le Garde des Sceaux à l’égard d’un magistrat du parquet – doit alors se prononcer dans les huit mois, sauf prorogation pour une durée de quatre mois non renouvelable. La méconnaissance de ce dernier délai entraîne le rétablissement de plein droit du magistrat dans ses fonctions, à moins d’une décision contraire du CSM ou du garde des Sceaux si le magistrat est également poursuivi au pénal.
Le projet de loi organique transpose aux magistrats judiciaires certaines mesures déontologiques applicables aux principaux responsables publics depuis les lois organique et ordinaire n°s 2013-906 et 2013-907 du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique, récemment étendues aux agents publics et aux membres des juridictions administratives et financières par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.
À l’initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. François Pillet, le Sénat a sensiblement renforcé les dispositions proposées par le Gouvernement.
L’article 21 du projet de loi organique définit la notion de conflit d’intérêts et ouvre la voie au développement des instruments de prévention et de règlement des conflits d’intérêts – ainsi qu’en témoigne par exemple l’article 12 du projet de loi relatif à l’action de groupe et à l’organisation judiciaire (n° 3204).
Alors que le texte initial du Gouvernement se bornait à prévoir un « entretien déontologique » de chaque magistrat, lors de l’installation dans ses fonctions, avec son chef de juridiction, le Sénat a ajouté l’obligation pour tout magistrat – à l’exception du premier président de la Cour de cassation et du procureur général près cette Cour – de remettre une déclaration d’intérêts à son chef de juridiction.
Par ailleurs, les plus hauts magistrats seront tenus d’adresser à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) une déclaration de situation patrimoniale : le premier président et les présidents de chambre de la Cour de cassation, le procureur général et les premiers avocats généraux près cette Cour, les premiers présidents des cours d’appel, les procureurs généraux près ces cours et, dans le texte adopté par le Sénat, les présidents des tribunaux de première instance et les procureurs de la République près ces tribunaux.
L’article 32 du projet de loi organique transpose au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) la définition du conflit d’intérêts et renforce le mécanisme de sanction des manquements déontologiques en son sein. Tous ses membres seront soumis à l’obligation de déclarer leur situation patrimoniale, en application de l’article 33.
Les conditions d’entrée en vigueur de ces différentes obligations déontologiques sont fixées à l’article 35.
À l’initiative de votre rapporteure et de M. Yves Goasdoué, votre Commission a complété les dispositions relatives à la déontologie des magistrats.
Sur le modèle des collèges de déontologie des juridictions administratives et financières, elle a créé un collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire (nouvel article 22 bis).
Composé de cinq membres, dont trois magistrats judiciaires, ce collège aura une mission consultative. Il rendra des avis ou des recommandations sur la situation individuelle de magistrats, au vu notamment des déclarations d’intérêts qui pourront lui être transmises par les chefs de juridiction.
En conséquence, s’inspirant du droit en vigueur applicable au vice-président du Conseil d’État, au premier président de la Cour des comptes, ainsi qu’au procureur général près cette Cour (10), votre Commission a comblé une lacune du présent projet, en prévoyant que le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette Cour devront remettre une déclaration d’intérêts auprès du nouveau collège de déontologie (article 21).
Votre commission des Lois a également complété les dispositions régissant l’entretien déontologique, les déclarations d’intérêts et les déclarations de situation patrimoniale, en vue de les rapprocher de celles retenues pour les membres des juridictions administratives et financières dans la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.
Afin de tenir compte du caractère organique du statut des magistrats judiciaires, la commission des Lois a, par ailleurs, défini directement dans l’ordonnance organique de 1958 le contenu des déclarations d’intérêts et de situation patrimoniale, les sanctions pénales correspondantes et, en matière de patrimoine, les pouvoirs de contrôle de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Sur le fond, elle a repris l’essentiel des dispositions des lois du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique.
Enfin, votre Commission a étendu à l’ensemble des membres du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), y compris ceux n’ayant pas la qualité de magistrat judiciaire, l’obligation d’établir une déclaration d’intérêts (nouvel article 32 bis).
Alors que le texte issu des travaux du Sénat ne comportait aucune disposition à ce sujet, votre commission des Lois a introduit deux mesures relatives au Conseil constitutionnel.
Inséré sur proposition de M. Yves Goasdoué, le nouvel article 34 quinquies transpose aux membres nommés du Conseil constitutionnel les obligations déclaratives prévues, pour les magistrats judiciaires, par l’article 21 du présent projet de loi organique et, pour les membres des juridictions administratives et financières, par la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.
D’une part, les membres nommés du Conseil constitutionnel devraient remettre une déclaration d’intérêts au Président du Conseil, donnant lieu à un entretien déontologique avec ce dernier, en vue de prévenir tout conflit d’intérêts.
D’autre part, les membres nommés du Conseil constitutionnel – y compris le Président – devraient transmettre une déclaration de situation patrimoniale à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), chargée de la contrôler dans les conditions prévues par la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.
B. L’ENCADREMENT DES CONDITIONS DE DÉPÔT D’UNE QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ EN MATIÈRE CORRECTIONNELLE ET CONTRAVENTIONNELLE
À l’initiative de votre rapporteure, la commission des Lois a introduit un nouvel article 34 sexies, complétant les dispositions organiques régissant la question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
Répondant à une demande formulée conjointement par le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation, cet article vise à mettre fin, en matière correctionnelle et contraventionnelle, au dépôt de QPC dans un but dilatoire.
Il ne serait ainsi plus possible de soulever une QPC :
– lorsque le tribunal correctionnel ou le tribunal de police est saisi à la suite d’une information judiciaire et que la QPC aurait pu être déposée au cours de la phase d’instruction (à moins que le moyen porte sur une disposition de procédure pénale applicable seulement devant la juridiction de jugement) ;
– lorsque l’affaire vient en appel et qu’aucune QPC n’a été déposée en première instance devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de police (à moins que le moyen porte sur une disposition de procédure pénale applicable seulement devant la juridiction d’appel).
Ces dispositions s’inspirent du droit en vigueur en matière criminelle, qui prévoit que la QPC ne peut être soulevée devant la cour d’assises.
AUDITION DE M. JEAN-JACQUES URVOAS, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, ET DISCUSSION GÉNÉRALE
Lors de sa réunion du mardi 3 mai 2016, la commission des Lois auditionne M. Jean-Jacques Urvoas, garde des Sceaux, ministre de la Justice, sur le projet de loi organique, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature (n° 3200) (Mme Cécile Untermaier, rapporteure) et le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'action de groupe et à l'organisation judiciaire (n° 3204) (M. Jean-Michel Clément et M. Jean-Yves Le Bouillonnec, rapporteurs).
M. le président Dominique Raimbourg. Nous allons commencer cet après-midi l’examen de deux textes : le projet de loi organique relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature et le projet de loi relatif à l’action de groupe et à l’organisation judiciaire, connu auparavant sous l’appellation « justice du XXIe siècle », ou « J21 ». Notre Commission a désigné trois rapporteurs : Mme Cécile Untermaier pour le projet de loi organique, MM. Jean-Michel Clément et Jean-Yves Le Bouillonnec pour le projet de loi ordinaire. 530 amendements ont été déposés : 130 sur le projet de loi organique, 400 sur le projet de loi ordinaire.
Nous avons le plaisir d’accueillir M. Jean-Jacques Urvoas, garde des Sceaux, ministre de la justice, qui va participer à nos travaux. Je vais lui donner la parole, puis nous entendrons les rapporteurs et ouvrirons une discussion générale.
D’autres réunions sont prévues, ce soir et demain. Afin que nous ne terminions pas nos travaux trop tardivement dans la soirée de demain, je vous invite à être concis et à ramasser vos arguments. Je vous précise, néanmoins, que j’envisage de suspendre nos travaux vers 18 heures, puis de nouveau vers 18 h 45, afin que ceux qui le souhaitent puissent se rendre en séance pour aller voter sur les motions de procédure qui ont été déposées contre la loi réformant le code du Travail, qui est débattue en ce moment.
M. Alain Tourret. Je comprends parfaitement votre préoccupation, monsieur le président. Cependant, je regrette vivement que l’organisation du travail dans notre assemblée soit aussi difficile à saisir : tous nos collègues ne peuvent pas assister à l’audition du garde des Sceaux et à l’examen des amendements sur ce texte qui est, chacun en convient, très important. C’est d’autant plus vrai pour les groupes politiques les moins nombreux, où il est difficile de se répartir le travail.
M. le président Dominique Raimbourg. Dont acte, monsieur Tourret.
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des Sceaux, ministre de la justice. Vous connaissez la situation de la justice aussi bien que moi et, surtout, l’approche que nos concitoyens en ont. L’année dernière, dans le cadre des débats préparatoires à ces projets de loi, Mme Christiane Taubira, qui m’a précédé dans mes fonctions, avait présenté, lors d’une réunion qu’elle avait organisée à l’UNESCO, les résultats d’un sondage révélant l’avis des Français sur leur justice : 80 % d’entre eux estimaient que la justice était trop complexe et trop lente, et 60 % la jugeaient inefficace. Il est à craindre que ceux qui franchissent le seuil des palais de justice, souvent par contrainte, en tant que justiciables, ne partagent ce sentiment : certes, ils sont plus satisfaits des décisions de justice que l’ensemble des Français, mais ils trouvent les procédures longues et onéreuses.
À cette organisation complexe et au fonctionnement peu compréhensible pour nos concitoyens s’ajoute un troisième mal : la tension grandissante entre les moyens octroyés à la justice et les besoins nécessaires à la bonne mise en œuvre de ses missions.
Nous partageons, je le sais, ce diagnostic. Il est de la responsabilité du Gouvernement de vous proposer des remèdes. Tel est l’objet de ces projets de loi. Ils ont été adoptés en Conseil des ministres en juillet 2015 et débattus au Sénat au mois de novembre suivant. Il me revient de vous les présenter aujourd’hui et, surtout, de vous dire la philosophie qui m’a conduit à déposer, sur les 530 amendements que vient d’évoquer M. le président, 105 amendements au nom du Gouvernement : 22 sur le projet de loi organique et 83 sur le projet de loi ordinaire.
À travers ces amendements, je poursuis en réalité quatre objectifs.
En premier lieu, ne pas ouvrir de nouveaux chantiers en l’absence du temps et des finances qui seraient nécessaires. Je ne crois pas utile de semer l’illusion de nouvelles réalisations ; je crois, au contraire, que cela apporterait de la souffrance à ceux qui vivent déjà mal la lenteur de la justice.
En deuxième lieu, ne pas allumer non plus de nouveaux brasiers : ces textes se veulent des textes d’apaisement, qui résolvent, qui dénouent, qui répondent à des problèmes et à des besoins.
Troisième ambition : mieux utiliser les moyens de la justice pour la rendre plus efficace, moins complexe, plus lisible. Cela ne m’exonère naturellement pas de chercher à en obtenir de nouveaux. À cet égard, j’espère qu’il y aura des avancées notables dans le projet de loi de finances pour 2017.
Enfin, quatrième mission : recentrer l’intervention de la justice sur ses missions essentielles, à savoir prendre des décisions par l’application du droit aux litiges qui lui sont soumis. Dans cet esprit, l’un des amendements du Gouvernement vise à rebaptiser le texte « projet de loi de modernisation de la justice du XXIe siècle », afin qu’il retrouve sa filiation avec le projet présenté par Mme Christiane Taubira au Conseil des ministres l’année dernière. Toutes les mesures de ce texte ont vocation à réconcilier les Français avec leur justice.
Il convient de distinguer le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire. Je salue le travail de la rapporteure du projet de loi organique, Mme Cécile Untermaier, qui a déposé 59 amendements, et, avec le même enthousiasme, celui des rapporteurs du projet de loi ordinaire, MM. Jean-Yves Le Bouillonnec et Jean-Michel Clément, qui en ont déposé 132. Chacun a donc fait œuvre utile pour atteindre les objectifs que j’ai exposés.
Le projet de loi organique s’inscrit dans l’engagement du Président de la République de renforcer l’indépendance de la justice et de mettre en œuvre une République exemplaire. Cela passe par des questions statutaires. À ce titre, il vous est proposé, par amendement, de créer un statut pour le juge des libertés et de la détention (JLD), qui serait nommé comme juge spécialisé. C’est la suite logique de l’accroissement continu des pouvoirs qui lui ont été donnés depuis sa création, tant en matière pénale qu’en matière civile : en tant que juge protecteur des libertés individuelles, il contrôle de façon croissante les actes et les décisions les plus intrusives. Ce faisant, je ne fais d’ailleurs qu’engager un mouvement qui méritera d’être poursuivi, car je crois vraiment que le JLD sera le juge de demain. Toutes les réflexions qui viendraient corroborer ou renforcer cette intuition seront les bienvenues.
Un deuxième amendement important au projet de loi organique vise à créer un collège de déontologie des magistrats. Les magistrats disposeront ainsi d’une structure indépendante, dépourvue de pouvoir disciplinaire, qui sera à même de répondre à toutes les questions d’ordre déontologique auxquelles ils peuvent être confrontés dans l’exercice de leurs fonctions.
Troisième élément sur lequel je souhaite appeler votre attention dans ce propos liminaire : l’allongement de deux ans de la durée maximale d’exercice des fonctions des magistrats placés afin de pallier la désaffection pour cette fonction.
Le projet de loi organique est aussi porteur d’une ouverture du corps de la magistrature par la facilitation des détachements judiciaires et par l’élargissement des origines professionnelles permettant d’y accéder.
Il comporte évidemment bien d’autres dispositions, mais je ne veux pas me livrer à un inventaire à la Prévert. Ainsi que le disait Voltaire : « le secret d’ennuyer est celui de tout dire » !
Avec le projet de loi ordinaire, nous entendons rendre la justice plus simple, plus accessible, plus lisible, plus efficace. Si « J21 », le nom communément donné à ce texte, était un adjectif, je voudrais qu’il soit l’antonyme de « kafkaïen » ! Les justiciables ont des attentes et nous devons tenter d’y répondre. Les juridictions ont des besoins et nous devons les entendre. Je n’évoque, là encore, que quelques-unes des principales mesures du texte.
Avec le titre II, nous avons souhaité favoriser le recours aux modes alternatifs de résolution des litiges. À cette fin, nous vous proposons d’instaurer un préalable obligatoire de conciliation par un conciliateur de justice pour les litiges portant sur moins de 4 000 euros. Le juge n’aura donc à examiner que les affaires les plus contentieuses. Pour une meilleure conciliation dans les petits litiges, il faut donner à tous le choix d’organiser le recours à un tiers pour les trancher.
Par ailleurs, le texte vise à autoriser le recours à une convention de procédure participative, même si un juge est déjà saisi du litige. Cette convention peut, dès lors, tendre à la mise en état du litige. C’est dans ce cadre qu’est introduite la conclusion possible d’actes contresignés par avocats, préfiguration de l’acte de procédure d’avocats.
Enfin, nous élargissons les possibilités pour les parties, si elles le désirent, de recourir à une clause compromissoire, c’est-à-dire de faire appel à un arbitre.
Les titres II et IV visent à renforcer l’efficacité du fonctionnement de la justice. Nous vous proposons de travailler à droit constant, sans chercher à contraventionnaliser les délits routiers, en forfaitisant les sanctions pour certains de ces délits tout en respectant le droit actuel. Il s’agit d’un travail à droit constant : nous ouvrons une possibilité sans bouleverser l’existant.
Nous donnons à l’action de groupe un socle procédural commun, décliné en matière de discrimination, de discrimination au travail, mais aussi, désormais, de santé, d’environnement et de données numériques. Nous disposerons ainsi d’un vrai bloc cohérent plutôt que de dispositions éparses dans des textes thématiques.
Pour mieux traiter le contentieux social, nous proposons de regrouper l’ensemble du contentieux au sein d’une seule juridiction présente dans chaque département et comprenant des magistrats spécialisés. À cette fin, le texte prévoit des habilitations relatives, notamment, à la fusion des tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS) et des tribunaux du contentieux de l’incapacité (TCI). Cette mesure fait suite au rapport conjoint de l’inspection générale des services judiciaires et de l’inspection générale des affaires sociales. Le volume des contentieux concernés est important : 100 000 affaires pour les TASS en 2012, 42 500 pour les TCI en 2013.
Un mot particulier sur la justice des mineurs : j’avais déjà eu l’occasion d’indiquer que le Gouvernement était favorable à la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs. Je donnerai donc un avis favorable aux amendements déposés en ce sens par plusieurs groupes politiques.
Le titre IV tend à recentrer le juge sur ses missions essentielles.
Nous proposons de supprimer la procédure d’homologation des plans de surendettement, 98 % d’entre eux ne faisant l’objet d’aucun litige. Nous avons obtenu l’accord de principe de la Banque de France sur cette disposition.
Nous souhaitons transférer aux officiers d’état civil l’enregistrement des pactes civil de solidarité (PACS), ainsi que la procédure de changement de prénom. En 2013, 168 000 PACS ont été conclus. Les officiers d’état civil sont déjà associés à la procédure. En contrepartie, de nouvelles mesures de simplification en matière d’état civil sont proposées aux communes. J’ai évidemment présenté ces dispositions à M. François Baroin, président de l’Association des maires de France (AMF). J’ai veillé à ce que personne ne soit perdant, ni l’État, ni les collectivités territoriales. J’y reviendrai tout à l’heure.
Enfin, concernant le divorce, nous proposons qu’il ne soit plus nécessaire de passer devant un juge pour le divorce par consentement mutuel. Lorsque les parties sont d’accord pour divorcer, il suffira d’un acte signé par les deux avocats représentant chacune d’elles et enregistré par le notaire. Cela ne pourra se faire naturellement que dans certaines conditions, en présence des deux avocats et dans le respect du droit de chaque enfant à être entendu dans le cadre de la procédure.
L’objectif assigné à ce projet de loi de recentrer l’institution judiciaire sur ses missions essentielles vaut aussi pour les juridictions supérieures, notamment la Cour de Cassation. Celle-ci est en effet submergée par un nombre très important de pourvois et éprouve, de ce fait, des difficultés à assurer sa fonction de régulation de l’application du droit et d’unification de la jurisprudence à l’échelle nationale. À l’instar de ce qui a été fait pour ses homologues dans les pays voisins, je vous propose de mettre en place en son sein un système de filtrage des pourvois. En l’espèce, je souhaite soumettre les différentes possibilités au débat.
La justice du XXIe siècle doit être une justice faite pour l’homme, à la mesure de ses besoins, que ce soit en tant que justiciable ou en tant que professionnel. Mon ambition, je vous l’ai dit en préambule, est modeste : par ce texte, je ne cherche qu’à améliorer le service public rendu au justiciable. Il suffit parfois d’une évolution législative limitée ; nous proposons de nombreux amendements de cette nature. Sur d’autres points, l’évolution doit être plus importante ; dans ce cas, nous ne faisons qu’amorcer, avec ce texte, un mouvement qui sera accentué demain. Vous constaterez que de nombreux amendements traduisent cette envie d’avancer.
Je souhaite que le débat en commission prenne maintenant toute sa place. C’est pourquoi, monsieur le président, j’ai déposé la totalité des amendements du Gouvernement en commission. Mon intention est de n’en déposer aucun en séance publique.
M. le président Dominique Raimbourg. Merci, monsieur le garde des Sceaux. C’est l’application d’une jurisprudence constante et désormais célèbre…
Mme Cécile Untermaier, rapporteure du projet de loi organique. Je vous remercie, monsieur le garde des Sceaux, pour votre intervention, qui nous indique l’esprit dans lequel nous allons travailler pour améliorer la justice, qui nous tient tant à cœur. Je remercie très sincèrement mes collègues Jean-Michel Clément et Jean-Yves Le Bouillonnec, rapporteurs du projet de loi ordinaire, qui ont participé à mon travail, ainsi qu’Yves Goasdoué et Colette Capdevielle. Je remercie enfin les administrateurs du secrétariat de la commission et les membres de votre cabinet, qui ont fait preuve d’une grande disponibilité et d’une grande compétence.
Je poserai quelques questions complémentaires qui permettront d’éclairer le contenu du projet de loi organique.
Vous présentez, monsieur le garde des Sceaux, plusieurs amendements qui prennent acte, dans l’ordonnance statutaire des magistrats, de la fusion des actuelles inspections du ministère de la justice en une seule inspection, dénommée inspection générale de la justice. Je souhaiterais que vous nous donniez des précisions sur les modalités de cette réforme, attendue depuis longtemps, dont la nécessité a été encore rappelée récemment par la Cour des comptes.
En ce qui concerne l’élargissement des voies d’accès à la magistrature et d’ouverture de celle-ci à d’autres professionnels, je note l’effort que vous faites en faveur des doctorants, avec la mise en place de plus de juristes assistants. Je m’interroge, toutefois, sur deux points. D’une part, la formation de deux ans qui leur sera proposée à l’École nationale de la magistrature (ENM) n’est-elle pas trop longue ? Compte tenu de leur cursus prolongé – dix années d’études de droit et trois années de service en tant que juristes assistants –, ils pourraient peut-être bénéficier d’une formation raccourcie d’une année à l’ENM. D’autre part, contrairement à ce que nous souhaitions tous vivement au sein de la majorité, il n’est pas prévu d’élargissement des voies d’accès s’agissant des avocats. Des propositions vous seront sans doute faites à ce sujet, sinon en commission, du moins en séance publique. Pourront-elles prospérer ?
Concernant les magistrats recrutés par le concours complémentaire, quelles sont, au-delà des modifications proposées dans le texte organique, les améliorations que vous entendez apporter à leur mode de recrutement, qui s’avère décourageant pour nombre de candidats ?
J’ai déposé plusieurs amendements visant à rétablir la réforme du statut du JLD qui avait été proposée par le Gouvernement, mais vidée de son sens par le Sénat. Vous avez souligné l’importance de ce rétablissement, et nous vous remercions de cette décision. Au regard de l’accroissement des prérogatives du JLD, il convient, en effet, de lui conférer les garanties à même de lui assurer son indépendance.
Trois ans après les lois sur la transparence de la vie publique, dont vous avez été le rapporteur pour notre commission, je me félicite que la plupart des mesures déontologiques mises en place par ces lois soient aujourd’hui transposées aux magistrats judiciaires. C’est d’autant plus nécessaire que nous venons de renforcer le cadre déontologique applicable aux fonctionnaires et aux membres des juridictions administratives et financières dans la loi du 20 avril 2016.
Je pense malgré tout que le projet de loi organique pourrait aller encore plus loin en matière de déontologie. Il s’agirait, d’abord, de rapprocher ses dispositions de celles de la loi du 20 avril 2016, qui prévoient par exemple des sanctions pénales en cas d’absence de déclaration ou de déclaration incomplète. Je relève également que, en l’état actuel du texte, le premier président et le procureur général près la Cour de cassation ne sont pas tenus de déclarer leurs intérêts.
Il manquait également un organe de conseil en matière de déontologie, le rôle du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) ne pouvant s’étendre aux questions individuelles. Vous avez répondu sur ce point, puisque vous avez pris en considération notre démarche et admis l’idée d’un collège de déontologie, interne à la magistrature judiciaire, sur le modèle des collèges de déontologie de la juridiction administrative et des juridictions financières. Il pourrait notamment recevoir les déclarations des plus hauts magistrats.
Dans le même sens, ne devrait-on pas étendre l’obligation de déclarer leurs intérêts à tous ceux qui exercent la fonction de juger, y compris aux magistrats à titre temporaire et aux magistrats honoraires, ainsi qu’à l’ensemble des membres du CSM ? En outre, que pensez-vous de l’idée d’étendre aux membres du Conseil constitutionnel les obligations déclaratives prévues dans ce projet de loi organique, ainsi que le proposent, par un amendement, Yves Goasdoué et les membres du groupe Socialiste, républicain et citoyen ?
Enfin, dans plusieurs affaires récentes et médiatisées, des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) ont été soulevées au tout dernier moment, en début d’audience, parfois dans le seul but d’obtenir un sursis à statuer. Pourtant, certaines de ces QPC auraient pu être déposées pendant l’instruction, laquelle dure souvent de longues années. De telles pratiques désorganisent le calendrier judiciaire et ralentissent encore un peu plus le fonctionnement de la justice. En matière criminelle, ce problème ne se pose pas, puisque, en 2009, le législateur organique a pris le soin d’interdire le dépôt de QPC devant les cours d’assises, ce moyen devant être soulevé pendant l’instruction. N’est-il pas temps de transposer ce système en matière correctionnelle, pour autant, évidemment, qu’il y ait bien une instruction préalable ?
La technicité de ce texte ne doit cacher ni l’importance de ses objectifs ni le caractère salutaire des avancées qu’il prévoit. Vous l’avez dit avec force, monsieur le ministre : la justice, c’est aussi une question de moyens. En plus de cette avancée législative, il nous faut donc poursuivre avec constance, chaque année, l’amélioration de la situation budgétaire de l’autorité judiciaire, en portant une attention particulière aux magistrats et aux personnels œuvrant dans ce domaine.
M. Jean-Michel Clément, rapporteur du projet de loi ordinaire. Les nombreuses auditions et les visites en juridiction que nous avons réalisées nous ont permis de mesurer l’engagement et la volonté constante de l’institution judiciaire et des auxiliaires de justice d’améliorer l’accès de nos concitoyens à la justice. Je souhaite dire ma reconnaissance à tous ceux qui s’engagent, souvent bénévolement, pour que notre justice au quotidien fonctionne mieux. Je remercie mes collègues Jean-Yves Le Bouillonnec et Cécile Untermaier, qui ont participé à toutes les auditions sur ce vaste chantier, ô combien nécessaire.
Le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire soumis à l’examen de notre commission ont pour objet de mettre en œuvre les préconisations issues des travaux menés depuis 2013 pour favoriser la justice du XXIe siècle. Avant toute chose, je veux rendre hommage à la démarche originale engagée par votre prédécesseur, Mme Christiane Taubira : il s’agit de définir ce que signifie l’accès à la justice pour nos concitoyens, de dire ce qu’est le véritable office du juge et de faire société en privilégiant le recours à des modes alternatifs de règlement des conflits, notamment de ceux du quotidien ; il s’agit de réformer en profondeur notre organisation judiciaire, de rapprocher la justice des citoyens, dont elle a été éloignée par une réforme drastique de la carte judiciaire, et d’améliorer l’efficacité des procédures judiciaires, facteur de justice sociale.
Vous avez parfaitement présenté, monsieur le garde des Sceaux, les principaux enjeux de ces deux projets de loi. Je souhaite vous poser quelques questions sur les sujets que j’ai suivis plus particulièrement, afin d’éclairer l’ensemble de nos collègues sur l’ambition de la discussion au sein de notre assemblée. Je précise que Jean-Yves Le Bouillonnec et moi-même avons conduit nos travaux ensemble et que nos analyses convergent sur tous les sujets abordés dans ce projet de loi.
L’un des objectifs de ce texte est de parachever la réforme des TASS, des TCI et des commissions départementales d’aide sociale (CDAS). Les juridictions sociales occupent une place de choix parmi les sujets essentiels abordés dans ce projet de loi. Cette justice des gens a été décrite avec beaucoup d’humanité et de pertinence par Pierre Joxe dans son livre Soif de justice. Une importante réforme de ces juridictions est à l’œuvre. Entre la lecture au Sénat et la présente lecture à l’Assemblée nationale, un rapport essentiel des inspections générales des services judiciaires et des affaires sociales vous a été remis. Vous nous proposez un amendement qui vient modifier substantiellement la réforme adoptée à l’initiative du Sénat. Pourriez-vous nous en préciser les grandes lignes ? Les inquiétudes sont en effet nombreuses, notamment parmi les agents des tribunaux spécialisés concernés, mais également parmi les justiciables en situation de précarité ou malades.
J’en viens à l’action de groupe. L’accès à la justice doit être facilité pour chacun de nos concitoyens, pris individuellement, mais aussi collectivement, tant les sujets susceptibles de les concerner ensemble sont nombreux. La « loi Hamon » a ouvert la possibilité d’une class action à la française dans le champ de la consommation. Mais, au-delà, c’est une définition claire, encadrée, précisant les droits et les protections de chacun qu’il nous fallait écrire. C’est chose faite avec ce texte, et nous saluons la définition des règles générales qui trouveront à s’appliquer à l’ensemble des actions de groupe. Toutefois, pouvez-vous nous expliquer pourquoi l’action de groupe en matière commerciale sera la seule à ne pas s’inscrire dans le cadre général ? D’autre part, pouvez-vous nous détailler les modalités des nouvelles actions de groupe spécifiques que vous proposez d’introduire dans le texte, notamment pour ce qui touche à l’environnement et à la protection des données personnelles ?
Concernant plus particulièrement l’action de groupe en matière de discrimination, il nous semble important, à l’issue de nos auditions, de prévoir dans ce texte, sans attendre l’examen du projet de loi « Égalité et citoyenneté », l’élargissement de la liste des motifs de discrimination fixée par la loi de 2008 à ceux qui sont aujourd’hui prévus par l’article 225-1 du code pénal. Il est en effet essentiel que l’état de santé soit retenu comme un motif sur le fondement duquel les discriminations sont prohibées. Nous suivrez-vous dans cette voie, monsieur le garde des Sceaux ?
S’agissant des actions de groupe qui pourront être engagées à la suite de discriminations pratiquées par un employeur, pouvez-vous expliciter le raisonnement sur lequel repose votre définition des personnes auxquelles la qualité à agir pourrait être reconnue ? Qu’en sera-t-il pour les syndicats et les associations ? Pour ces dernières, quels seront les critères retenus (agrément national ou régional, ancienneté) ? Par ailleurs, il nous semble essentiel que la réparation des préjudices, y compris moraux, soit envisagée comme objet de l’action de groupe en matière de discrimination, de manière générale et au travail en particulier. Partagez-vous notre opinion, monsieur le garde des Sceaux ?
Enfin, pourquoi limiter les déclinaisons de l’action de groupe en matière de discrimination dans les relations avec un employeur aux seuls préjudices qui trouvent leur origine dans un fait générateur ou un manquement postérieur à l’entrée en vigueur du présent projet de loi ? Cette disposition, souvent présentée comme destinée à limiter l’insécurité juridique pour les défendeurs, revient à priver d’action de groupe toutes les victimes identifiées à ce jour. Qui plus est, elle apparaît surprenante au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel : ce dernier a considéré, dans ses décisions sur la loi relative à la consommation et sur la loi de modernisation de notre système de santé – qui ne prévoyaient, ni l’une ni l’autre, une telle disposition –, que les règles relatives à l’action de groupe, qui sont de nature procédurale, « ne modifient pas les règles de fond qui régissent les conditions de [la] responsabilité [du défendeur] ; que, par suite, l’application immédiate de ces dispositions ne leur confère pas un caractère rétroactif ». Elles peuvent, par conséquent, s’appliquer immédiatement aux préjudices déjà constitués. Pourquoi laisser en l’état l’article 46, ce qui limiterait singulièrement la portée des nouvelles actions de groupe en matière de discrimination ?
En matière de justice commerciale, plusieurs évolutions importantes ont été adoptées par le Sénat. Il nous revient de les compléter. J’ai participé aux travaux de la mission d’information sur le rôle de la justice en matière commerciale, aux côtés de mes collègues Cécile Untermaier et Marcel Bonnot. Certaines propositions ont déjà été prises en compte dans le cadre de la « loi Macron », mais il reste encore du chemin à parcourir : comme vous le savez, d’autres améliorations sont attendues.
En premier lieu, les artisans deviennent éligibles aux fonctions de délégués et de juges consulaires. Cette avancée, qui a fait l’objet de nombreux travaux au cours des précédentes années et qui avait notamment été recommandée par le rapport d’information précité, s’accompagne d’une extension des compétences de ces tribunaux aux litiges entre artisans. Sur ce point, nous vous proposons deux évolutions législatives : la première vise à étendre la compétence des tribunaux de commerce à tous les litiges relatifs à une activité artisanale, et non plus seulement à ceux qui sont constatés entre artisans ; la seconde, à revoir la définition des collèges électoraux.
En effet, les circonscriptions des chambres de commerce et d’industrie (CCI), qui ont actuellement la charge d’organiser les élections consulaires, ne sont compatibles ni avec celles des chambres de métiers et de l’artisanat (CMA) – lesquelles seront chargées, pour l’avenir, d’organiser ces élections pour les artisans –, ni véritablement avec le ressort des tribunaux de commerce. Il convient d’aller au bout de cette réforme en fixant le collège des électeurs en fonction du ressort des tribunaux de commerce, avec le soutien des chambres consulaires. D’ici à la séance publique, nous pourrons affiner, si besoin, le dispositif que nous proposons, notamment pour traiter la situation particulière des petits tribunaux.
Par ailleurs, nous avons déposé, de même que certains collègues, plusieurs amendements visant à renforcer encore la prévention des conflits d’intérêts, ainsi qu’un amendement de compromis tendant à limiter le cumul des mandats dans le temps et à instaurer une limite d’âge pour l’exercice des fonctions de juge consulaire.
Il nous semble que cette réforme, qui s’inspire de précédents travaux parlementaires, devrait ainsi être bénéfique à la justice commerciale et aux justiciables.
Enfin, au-delà de différentes mesures de simplification, par exemple en matière de surendettement ou de publicité foncière, le présent texte contient des dispositions importantes en faveur des entreprises en difficulté – sujet auquel je suis particulièrement attaché. Il conviendra toutefois de rétablir des dispositions supprimées ou modifiées par le Sénat, car le maintien du texte en l’état aurait pour effet, selon nous, de fragiliser certaines procédures collectives, à l’instar de la procédure de sauvegarde. En outre, je déposerai plusieurs amendements concernant le secteur agricole, lequel connaît en ce moment des difficultés particulières. Les périodes de crise mettent en évidence que les exploitants agricoles manquent cruellement de protections. Il faudra les rassurer sur ce point.
Je vous remercie par avance, monsieur le ministre, pour les réponses que vous nous apporterez sur ces différents points.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec, rapporteur du projet de loi ordinaire. Ce texte vise à réformer en profondeur notre organisation judiciaire, à rapprocher la justice des citoyens et à améliorer l’efficacité des procédures juridictionnelles. De même que mon collègue Jean-Michel Clément, je souhaite appeler votre attention et vous interroger sur un certain nombre de points particuliers, monsieur le garde des Sceaux. Je précise que Jean-Michel Clément et moi-même partageons la même vision de ce texte et que nos analyses n’ont jamais divergé sur la manière dont nous pouvons l’améliorer encore.
Concernant le renforcement de la politique d’accès au droit et la facilitation de l’accès à la justice, nous avons procédé à de nombreuses auditions et nous sommes rendus dans plusieurs palais de justice, ainsi qu’à la maison de justice et du droit (MJD) de Pontivy. Nous souhaiterions savoir si le Gouvernement envisage de développer un service d’accueil unique du justiciable (SAUJ) dans d’autres MJD et si, par la même occasion, il serait d’accord pour favoriser la tenue d’audiences foraines dans ces MJD, lesquelles représentent, du fait de leur proximité avec les citoyens, une très bonne solution alternative à la récente réforme de la carte judiciaire. D’autre part, pouvez-vous nous assurer que les moyens humains et techniques, notamment les dispositifs informatiques Portalis et Cassiopée, seront bien au rendez-vous pour garantir le succès des SAUJ ?
S’agissant de la conciliation et de la médiation, qui constituent un enjeu important, nous avons découvert le rôle primordial des conciliateurs de justice, qui interviennent à titre bénévole pour aider nos concitoyens à résoudre leurs litiges du quotidien – pour souligner leur engagement, on peut parler de « mécénat », au vrai sens du terme. Nous soutenons activement la réforme proposée par le Gouvernement, qui consiste à rendre la conciliation obligatoire pour les litiges dont l’enjeu est inférieur à 4 000 euros, sous peine d’irrecevabilité. Néanmoins, l’efficacité du dispositif repose sur les réponses que vous apporterez aux questions suivantes : comment réussir à attirer de nouveaux candidats à la fonction de conciliateur, sachant que leur activité pourrait augmenter de plus de 30 % avec ce nouveau dispositif ? De quelle manière envisagez-vous de revaloriser leurs défraiements, trop symboliques pour ne pas être ridicules ? Pourquoi ne pas avoir prévu, à ce stade, une formation initiale obligatoire à destination des conciliateurs ?
S’agissant de la médiation, nous comprenons que le Gouvernement choisisse de distinguer cette procédure de celle de la conciliation. Cependant, ne faudrait-il pas faire établir une liste des médiateurs pour chaque cour d’appel pour éviter le risque de recours à des personnes peu recommandables, voire à des charlatans, largement dénoncé lors des auditions auxquelles nous avons procédé ? En matière familiale, lorsqu’il s’agit de modifier une décision de justice relative à l’exercice de l’autorité parentale ou à la contribution à l’entretien des enfants, ne conviendrait-il pas de généraliser la tentative de médiation obligatoire expérimentée entre 2012 et 2014 dans plusieurs ressorts, et qui s’est alors révélée très intéressante ?
Enfin, si nous saluons la suppression de la juridiction de proximité, il nous paraît nécessaire de prendre certaines précautions vis-à-vis des nombreux juges de proximité – ils sont encore près de 500 – qui ont rendu d’éminents services au fonctionnement de nos juridictions.
Nous soutenons également la démarche que reflètent les nombreux amendements du Gouvernement tendant à améliorer la répression de certaines infractions routières. Nous vous proposerons pour notre part de forfaitiser certains délits routiers afin d’en faciliter le traitement et le recouvrement. Pouvez-vous nous présenter rapidement l’économie globale de la réforme que vous envisagez dans le domaine des infractions routières ?
Le Gouvernement a déposé plusieurs amendements destinés à améliorer l’organisation et le fonctionnement de la justice des mineurs. Or des amendements socialistes, écologistes ou radicaux proposent la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs. Là encore, comment la réforme qui en découlerait s’articulerait-elle avec vos amendements ?
En ce qui concerne les mesures de recentrage des juridictions sur leurs missions essentielles, nous sommes bien entendu très favorables au transfert de l’enregistrement du PACS des greffes des tribunaux de grande instance (TGI) aux officiers de l’état civil, et proposons un amendement destiné à rétablir cette mesure supprimée par le Sénat. Le risque de confusion entre PACS et mariage, avancé en 1999 pour justifier l’enregistrement au greffe du tribunal, est aujourd’hui entièrement écarté : le PACS est bien connu de nos concitoyens, qui ne le confondent aucunement avec le mariage. Par ailleurs, la loi du 17 mai 2013 a consacré le mariage des personnes de même sexe. Les obstacles symboliques allégués à l’époque ont donc totalement disparu. Il convient, en outre, de mieux affirmer le rôle d’officier de l’état civil dévolu au maire, auquel vos deux rapporteurs sont très attachés.
Vous proposez, monsieur le ministre, d’autres transferts de compétence des tribunaux vers d’autres professions, comme celle d’avocat, avec la nouvelle procédure de divorce par consentement mutuel. Quel en seront l’intérêt et le coût pour nos concitoyens ? Certains de nos collègues proposent également de transférer aux avocats la déclaration de procréation médicalement assistée avec recours à un tiers donneur, ou aux médecins le recueil du consentement en vue d’un don de moelle osseuse. Nous sommes quelque peu réservés à cet égard, mais nous estimons nécessaire de progresser dans la déjudiciarisation de ces formules de consentement ; nous formulerons nos propres propositions en ce sens.
Nous sommes très favorables à l’allégement des formalités attachées à la tenue des actes de l’état civil par les mairies. Il convient toutefois à nos yeux de ne pas altérer la place privilégiée qu’occupe l’espace communal dans le quotidien des habitants. La connaissance d’événements aussi essentiels que les naissances, les mariages et les décès participe de la vie collective et marque la place que chacun peut y prendre. Il apparaît donc nécessaire de maintenir la transcription des actes sur les registres de la commune à laquelle les personnes concernées sont rattachées par leur domiciliation. Cette transcription permet une information publique essentielle et constitue, pour les communes et leurs habitants, un vecteur essentiel de relations et un grand sujet d’attention. Nous sommes donc défavorables à votre proposition de supprimer la transcription de l’acte de décès à la mairie du domicile du défunt.
En ce qui concerne la Cour de cassation, nous comprenons parfaitement qu’il faille faire évoluer les procédures pour la préserver en tant que telle. Toutefois – le président de la commission des Lois et les deux rapporteurs, ainsi que la rapporteure du projet de loi organique, le disent avec une certaine solennité –, il ne nous paraît pas possible de faire évoluer cette institution par la technique des règles de procédure. Nous devons veiller avec la plus grande attention à ce que la Cour de cassation conserve la vocation que lui confèrent l’institution et l’organisation judiciaires, à moins d’entrer dans des modifications institutionnelles, dont le support ne saurait être qu’un support législatif dédié tant il a des conséquences sur la place de la Cour de cassation au sein de nos institutions. Mais nous aurons certainement à ce sujet un beau débat, monsieur le garde des Sceaux, car nous connaissons vos réflexions fort pertinentes en la matière.
Enfin, pourriez-vous nous présenter vos nombreux amendements relatifs à des demandes d’habilitation et justifier ce recours à des ordonnances plutôt qu’à des dispositifs législatifs, à la lumière d’observations récurrentes de grands présidents de la commission des Lois (Sourires), dont notre président actuel ?
M. Yves Goasdoué. Aux yeux du groupe Socialiste, républicain et citoyen, la grande technicité de ce projet de loi organique ne doit pas masquer son importance. Ce texte modernise considérablement le statut des magistrats et du Conseil supérieur de la magistrature ; dans une période qui n’est pas facile pour les magistrats, il pourvoit à l’attractivité de ce corps auquel nous sommes tous attachés et organise son ouverture au monde et à d’autres professions. Il crée – vous l’avez dit d’emblée, monsieur le garde des Sceaux – un véritable statut pour le juge des libertés et de la détention. Enfin – car les droits y ont pour pendant les devoirs –, il veille à la prévention des conflits d’intérêts et à la transparence de ces personnages importants dans notre société que sont celles et ceux qui rendent la justice.
La diversification des recrutements ne saurait toutefois s’affranchir des exigences de la formation et de l’excellence. Pour le dire autrement, la diversification ne saurait passer par la banalisation ou par la perte de compétences des magistrats. Mme la rapporteure a parfaitement rappelé les limites de l’exercice.
Nous avons découvert l’existence, au côté des magistrats « de droit commun », si j’ose dire, des magistrats à titre temporaire, des juges de proximité, des magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles réelles, avec tous une mission bien définie s’exerçant sur une période déterminée. Le texte clarifie leur situation ; leurs engagements sont davantage limités dans le temps, mais deviennent le cas échéant renouvelables.
Quant à l’extension de la mission de formation de l’École nationale de la magistrature, elle est essentielle : si on veut rendre la profession plus attractive et l’ouvrir davantage, il faut aussi former.
Le juge des libertés et de la détention doit devenir un juge spécialisé, nommé par le Président de la République sur votre proposition, monsieur le garde des Sceaux, après avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, et dont l’exercice des fonctions dans une même juridiction est limité à dix ans. Pourquoi ? Parce qu’il sera certainement le juge de l’habeas corpus de demain, pour reprendre votre formule. Il n’est qu’à voir les attributions que nous lui avons données dans le cadre du droit des étrangers comme du projet de loi, encore en discussion, renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale. Une fonction particulière est sur le point de naître : la protection de la liberté et le contrôle du juge par le juge. C’est ce qui rend ce statut nécessaire.
En ce qui concerne les potentiels conflits d’intérêts des magistrats, nous proposerons d’aller plus loin que les sénateurs en instituant un collège de déontologie analogue à ceux qui ont été créés pour les membres des juridictions administratives et financières dans la loi du 20 avril 2016. Nous vous ferons la même proposition pour le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et pour le Conseil constitutionnel. Les magistrats seront naturellement protégés par la confidentialité de leurs déclarations.
En ce qui concerne la déclaration de situation patrimoniale, le Sénat avait également durci le texte en étendant cette obligation aux présidents des tribunaux de première instance et aux procureurs de la République près les tribunaux de première instance et en prévoyant son envoi à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), à la différence du texte gouvernemental. Nous en sommes d’accord, et jugeons utile de soumettre aussi à cette obligation le CSM et le Conseil constitutionnel.
En contrepartie de ces obligations nouvelles, la loi organique reconnaît le droit syndical des magistrats, encadre par de nouvelles dispositions, y compris dans le temps, les poursuites disciplinaires dont ils peuvent faire l’objet et précise la protection fonctionnelle que l’État leur doit lorsqu’ils rencontrent des difficultés. C’est donc un texte équilibré que notre groupe soutiendra.
M. Alain Tourret. Je m’exprimerai au nom du groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste.
Qu’est-ce que le juge ? C’est le juge du conflit : en cas de conflit, il doit trancher. Or, actuellement, le juge est là pour authentifier, pour certifier, pour donner acte. Tout cela doit être éliminé de sa fonction ; ainsi récupérera-t-on la moitié de son temps.
Ensuite, le juge doit motiver : c’est la contrepartie de son pouvoir de décision. L’importance de la motivation doit être à la mesure de celle que l’on accorde à la décision. Or la Cour de cassation ne motive plus ses décisions, même si l’on peut en percevoir les raisons dans les rapports. C’est toute notre construction judiciaire pyramidale qui s’effondre ! Je suis scandalisé que la Cour de cassation ne trouve pas nécessaire, n’ait pas l’obligation de dire à celui qui est allé jusque devant elle pourquoi il a raison ou tort. C’est un véritable déni de justice, organisé par notre plus haute juridiction !
Dans le domaine du divorce, il faut à l’évidence éliminer le rôle du juge lorsque les deux parties sont d’accord. Faut-il alors deux avocats ou un seul ? Ce point nous avait divisés. Vous avez opté pour deux avocats ; très bien. Les avocats vous en seront reconnaissants ; les bureaux d’aide juridictionnelle, peut-être un peu moins…
Par ailleurs, l’intervention du notaire sera-t-elle obligatoire pour enregistrer l’acte ? Il avait été prévu qu’elle le soit en présence d’un bien immobilier. Mais on a très longtemps estimé qu’elle était inutile dès lors que l’un des deux avocats pouvait s’en charger.
En ce qui concerne les délits routiers, l’affaire s’était terminée de manière délicate pour Mme Taubira. Les associations de victimes de la route sont extraordinairement puissantes – je le sais, ayant eu très souvent l’occasion de plaider pour elles. Elles sont persuadées que l’on fait d’autant plus diminuer le nombre d’accidents que l’on saisit la justice et que l’on plaide. J’appelle votre attention sur ce point.
Pourquoi perd-on automatiquement son permis de conduire lorsque celui-ci n’a plus de points ? Cette question nous ramène à l’obligation de motiver sa décision. Les décisions automatiques sont insupportables ; une motivation spécifique est toujours nécessaire. Il fut un temps où l’on parlait de permis blanc et où l’on envisageait que, dans des circonstances objectivement identiques, la situation subjective de l’individu puisse motiver des décisions différentes.
S’agissant des magistrats, vous avez formulé des propositions intéressantes. Je vous ai soumis l’idée – sans malheureusement avoir le temps de préparer des amendements en ce sens – selon laquelle les professeurs de droit devraient être obligatoirement intégrés à la magistrature, comme les professeurs des centres hospitaliers régionaux universitaires le sont à l’université depuis la grande réforme du professeur Robert Debré, qui a sauvé la médecine. D’un côté, ces médecins sont professeurs ; de l’autre, ils sont soignants. Ils sont alors « bi-appartenants » et peuvent toucher une retraite en conséquence. En contrepartie, l’interdiction serait faite aux professeurs de droit d’être avocats ou consultants. En effet, comment peuvent-ils plaider pour des clients devant des juridictions alors qu’ils sont chargés, en tant qu’enseignants, d’une mission de service public ? Il en va de même de tous les professeurs de droit fiscal qui passent leur temps à dispenser des consultations contre l’État dont ils sont des agents ! Mieux vaudrait qu’ils soient des magistrats et participent, ce faisant, à la notion de fonction publique.
En ce qui concerne l’action de groupe, je suis très sceptique. Les actions de groupe peuvent faire vaciller la République. Un exemple : le groupe de pression formé par les femmes fonctionnaires – je suis rapporteur pour avis du budget de la fonction publique – a démontré que leur rémunération était inférieure de 18 % à celle de leurs collègues hommes, à profession et statut équivalent. Il s’agit à l’évidence d’une discrimination. Imaginez qu’elles intentent une action de groupe sur ce fondement, avec succès : vous devrez verser 18 % de rémunération à chacune d’entre elles, sans compter des dommages-intérêts subséquents !
En réalité, le collectif ne peut pas toujours l’emporter sur l’individuel. Abandonner l’individuel face au collectif, c’est abandonner la notion même de responsabilité. Or le droit, c’est le droit de la responsabilité : le fondement du droit, c’est l’article 1382 du code civil, non l’article 1384.
Je suis également très sceptique vis-à-vis des conciliations obligatoires. Devant les conseils de prud’hommes, la conciliation aboutit rarement – dans moins de 10 % des affaires. En rendant la conciliation obligatoire, vous empêcherez que l’affaire soit plaidée immédiatement, vous provoquerez une saisine complémentaire de la justice, vous ferez durer les procédures – le tout avec la meilleure volonté du monde. Que veulent nos concitoyens sinon, à juste titre, des décisions rapides ? Or vous irez contre cette nécessité, et en parfaite bonne foi.
M. Guy Geoffroy. Monsieur le ministre, au nom du groupe Les Républicains, je salue votre ambition mesurée. Vous n’avez pas l’intention, dites-vous, d’ouvrir de nouveaux chantiers – mais que contient alors le texte ? N’en entrouvrez-vous pas tout de même quelques-uns ? – ni d’allumer de nouveaux brasiers. Intention louable, mais qui suggère que, depuis quelques années, c’est la tendance inverse qui prévalait en matière de justice… Je ne peux que noter le grand écart entre cette fameuse « justice du XXIe siècle » dont nous parlait Mme Taubira en nous présentant le projet, le 10 septembre 2014, et ce qu’il en reste aujourd’hui et qui, sans être négligeable, n’a plus rien à voir avec la grande ambition initiale. Nous ne comprenons donc pas que vous souhaitiez revenir rétablir le titre original, que nos collègues sénateurs avaient ramené à des proportions bien plus conformes à la réalité du texte.
Le projet de loi organique a pour objectif de modifier partiellement, mais sur des sujets importants, l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. Je souligne l’intérêt de ses dispositions sur la gestion du corps judiciaire et sur l’ouverture aux magistrats de nouvelles perspectives de carrière – de telles possibilités ne doivent jamais être négligées –, sur l’élargissement du recrutement judiciaire, sur le nouveau cadre déontologique – en espérant que la déontologie ne deviendra pas le sujet unique de discussion des parlementaires, si nous ne voulons pas nous perdre dans la déontologie de la déontologie ! – et sur le statut spécifique du juge des libertés et de la détention.
À ce propos, les plus petites juridictions n’auront-elles pas quelque difficulté à disposer en permanence d’un juge des libertés et de la détention, à la place d’un juge appelé à trois heures du matin pour une personne qui vient d’être déférée devant un juge d’instruction ?
Plus généralement, comment ne pas vous interroger sur le lien entre ce projet de loi organique et la réforme constitutionnelle en cours ? Celle-ci l’est-elle encore, d’ailleurs ? Certes notre Assemblée a voté le projet de loi constitutionnelle, manquant d’une ou deux voix les trois cinquièmes des suffrages. Nous avons cru comprendre que la majorité sénatoriale n’était pas très « chaude » pour aller au Congrès dans l’état actuel du texte. Or il paraît quelque peu ambigu de parler de la magistrature, de son indépendance et de son impartialité sans savoir ce qu’il va advenir de l’hypothèse d’une réunion du Parlement en Congrès à propos de la réforme constitutionnelle.
Quant au texte relatif à l’action de groupe et à l’organisation judiciaire, il ne contient qu’un ensemble, qui n’a en soi rien de méprisable, mais rien de bien révolutionnaire, de mesures de portée somme toute limitée, sans lien évident entre elles. Bref, on a l’impression d’examiner en fin de quinquennat une sorte de loi portant diverses dispositions relatives à la justice, plutôt que des mesures fortes et structurantes organisant la justice du XXIe siècle.
J’aimerais vous poser trois questions.
En ce qui concerne en premier lieu la justice des mineurs, vous avez manifesté votre soutien, comme dans vos fonctions antérieures, à la suppression des tribunaux correctionnels mis en place pendant la précédente législature. Cela pose un problème évident : comment accepter qu’il existât des cours d’assises pour mineurs tout en étant à ce point hostile à l’idée de prévoir, dans la chaîne du traitement des mineurs, le maillon correspondant aux délits que ces derniers peuvent commettre ? À cette question, je n’ai obtenu pour l’heure aucune réponse recevable.
Ensuite, je rejoins mon collègue à propos de la Cour de cassation. Pourquoi avoir pris l’initiative de déposer des amendements tendant à faire évoluer son statut et la portée de son travail, alors même que le premier président a lancé une concertation sur la Cour, sa situation actuelle et ce qu’elle devrait peut-être devenir, et annoncé qu’il rendrait un rapport en juin afin de bâtir une réforme dans un esprit « participatif » ? La question mérite probablement une approche propre au sein d’un projet de loi traitant de l’ensemble du sujet, car bien des aspects en seraient éludés si l’on se contentait d’adopter vos amendements.
Au Sénat, à propos de la représentation obligatoire devant la chambre criminelle, vous vous êtes opposé à un amendement présenté par le président Mézard et qui a cependant été adopté. Il semble que vous ayez depuis changé d’avis. Est-ce bien le cas, ou avons-nous mal interprété votre position ? Pouvez-vous nous rassurer eu égard à ce qui peut apparaître comme une forme de fébrilité à ce sujet ?
Troisièmement, en ce qui concerne l’extension de l’action de groupe, je ne reprends pas entièrement à mon compte les propos de M. Tourret. Je note toutefois que l’amendement CL203 va plus loin que le texte d’origine en intégrant les préjudices moraux au champ de la réparation en matière de discrimination, et que les amendements CL196 et CL202 donnent qualité pour agir aux associations agréées ayant cinq ans d’ancienneté, mais suppriment en parallèle l’exigence d’un agrément national. L’action de groupe est ainsi étendue – pourquoi pas ? –, mais peut-être aussi fragilisée. J’aimerais que le Gouvernement prenne clairement position sur ce point.
L’ambition affichée au départ était grandiose : nous allions mettre en place la justice du XXIe siècle. Vous revenez plus lucidement, sans pour autant remettre en cause l’intitulé de ce texte, à des proportions plus raisonnables ; en attendant, à défaut d’avoir l’occasion de soutenir vigoureusement un tel texte, notre groupe, selon le sort réservé aux amendements, notamment sur les questions sensibles comme celle des tribunaux correctionnels pour mineurs, s’orientera vers l’abstention, à regret, ou vers une franche opposition. Car il suscite toujours de notre part une série d’interrogations qui n’ont rien de mineur.
La réunion, suspendue à 18 heures 15, est reprise à 18 heures 35.
M. le président Dominique Raimbourg. Mes chers collègues, je vous invite à reprendre nos travaux après cette suspension qui a permis à chacun d’aller voter dans l’hémicycle, mais en regrettant, comme M. Tourret tout à l’heure, de devoir travailler dans de telles conditions.
M. Olivier Dussopt. Monsieur le garde des Sceaux, je voudrais aborder la question du transfert de l’enregistrement des PACS des tribunaux d’instance vers les officiers d’état-civil. Quelques-uns d’entre nous cumulent encore un mandat de député avec un mandat de maire, et s’intéressent donc de près à la situation financière des collectivités locales.
Vous avez évoqué des mesures de compensation, sous forme de mesures de simplification, notamment, qui pourraient engendrer des économies. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce point ? Vos assurances nous permettront de soutenir cette mesure avec enthousiasme. Ce ne serait en effet que justice : la loi du 17 mai 2013 a ouvert le mariage à tous les couples ; il serait normal que cet autre type d’union qu’est le PACS puisse être enregistré en mairie, au plus près des habitants.
Je souhaite également m’assurer que l’ensemble des officiers d’état-civil seront concernés par cette mesure, autrement dit que les PACS pourront être enregistrés dans toutes les communes. En effet, lorsque les passeports biométriques ont été introduits, il y a de cela quelques années, les communes qui supportaient des charges de centralité ont dû accueillir des bornes destinées à l’établissement de ces passeports. L’installation de ces équipements s’est accompagnée d’une subvention de l’État, mais celle-ci a disparu au bout de quatre ou cinq ans. Aujourd’hui, seules les communes supportant des charges de centralité établissent ces passeports, ce qui les amène à mobiliser des agents durant un nombre d’heures souvent important ; elles se retrouvent à remplir cette mission pour tout leur bassin, sans aucune compensation ni des autres communes, ni de l’État. Il ne faudrait pas que cette situation se reproduise dans le cas des PACS.
M. Patrick Verchère. J’ai pu constater que la voie de la résolution amiable est une très bonne chose pour les litiges du quotidien : comme beaucoup d’élus, je renvoie souvent des gens vers le conciliateur. Je suis donc favorable à l’élargissement de la conciliation.
Néanmoins, les conciliateurs m’ont fait savoir qu’ils disposaient de moyens très limités. L’an dernier, ma commune a versé une subvention à l’association départementale des conciliateurs de justice, afin qu’ils puissent acheter ne serait-ce que du papier, des gommes et des stylos. Ils sont déjà quasiment bénévoles ! Or leur charge de travail va s’accroître. Quels moyens prévoyez-vous de leur apporter afin qu’ils puissent remplir leur mission dans des conditions correctes ?
Vous venez d’arriver au ministère et vous-même n’êtes donc pas en cause, mais vous avez récemment indiqué être à la tête d’un ministère « en faillite ». Vous comprendrez donc mes inquiétudes…
M. Joaquim Pueyo. Je ne reviens pas ici de façon générale sur les clarifications et simplifications apportées par ces deux textes, mais seulement sur quelques points.
L’introduction, après l’article 28-3 de l’ordonnance du 22 décembre 1958, du juge des libertés et de la détention, à l’instar des autres juges spécialisés du siège, me paraît une bonne chose. Le Sénat, vous l’avez signalé, a modifié le texte du Gouvernement sur ce point.
J’ai moi-même bien connu la situation à laquelle on peut être confronté lorsqu’il est difficile de trouver un JLD disponible… Il faudra, je crois, des postes supplémentaires pour assurer, dans les tribunaux importants, une astreinte vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Dans le cas des petits tribunaux, il y aura sans doute un poste, mais ce ne sera pas suffisant pour que la fonction soit assurée de façon permanente : des suppléants pourraient être pris parmi les juges du siège, mais quel sera leur statut ?
L’unification des différentes inspections du ministère me paraît une bonne chose. Comment, concrètement, cette unification va-t-elle s’organiser ? Ces magistrats seront indépendants, ce qui est bien, mais le ministre pourra-t-il encore, comme c’est le cas aujourd’hui, saisir l’inspection générale ?
Enfin, vous proposez de prolonger les efforts déjà consentis pour élargir le recrutement des magistrats. Il faut toutefois, à mon sens, continuer de préférer – en nombre de postes ouverts – les recrutements par concours, interne et externe. On pourrait en effet imaginer, à l’avenir, un garde des Sceaux qui privilégierait les accès directs… Votre idée est très juste ; mais prenons garde à ne pas mettre en danger les concours, qui demeurent la voie d’accès la plus égalitaire à la magistrature.
M. Lionel Tardy. Le rapport de M. Pierre Delmas-Goyon intitulé « Le juge du XXIe siècle. Un citoyen acteur, une équipe de justice » a été remis en décembre 2013. Il contenait de nombreuses propositions : création au sein du ministère de la justice d’un centre de veille et de recherche sur les nouvelles technologies, gestion électronique des audiences, possibilité de recevoir les avis et notifications procéduraux par voie électronique, création d’audiences virtuelles dans les contentieux de masse, création d’une plateforme en ligne de règlement des litiges, etc. Toutes ces propositions ne sont pas d’ordre législatif ; et pour celles qui le sont, une concertation avec les acteurs concernés s’impose.
Quelles suites entendez-vous donner à ce rapport ? Mes questions écrites, posées il y a plus de deux ans, n’ont toujours pas reçu de réponse. Ce rapport est-il, comme j’en ai le sentiment, resté au fond d’un tiroir ? Cela me porte à croire que le projet de loi initialement appelé « justice du XXIe siècle » ne comprend que peu de dispositions de modernisation de l’institution judiciaire qui feraient appel aux nouvelles technologies. C’est sans doute pour cette raison que le Sénat a retenu un titre plus réaliste.
M. Patrick Mennucci. Ce projet de loi modernise la justice de façon importante, notamment en accroissant la transparence pour les magistrats. C’est une garantie pour les justiciables – vous remarquerez que c’est de ce lobby-là que je fais partie, et pas de celui des avocats.
M. Alain Tourret. Si c’est une attaque contre moi, elle est basse ! (Sourires.)
M. Patrick Mennucci. Pas du tout ! Mais méfiez-vous : à Marseille, comme en Normandie, on dit que la première poule qui chante, c’est celle qui a pondu l’œuf ! (Rires.)
Vous prévoyez, monsieur le garde des Sceaux, de moderniser l’ENM et d’améliorer en particulier la formation continue. Comment ces dispositions seront-elles mises en œuvre ? Vous en connaissez toute la difficulté, puisque c’est à Bordeaux que vous avez effectué votre premier déplacement après votre nomination à la chancellerie. De quels moyens nouveaux pourra-t-elle bénéficier, d’autant qu’elle doit aussi former les nouveaux magistrats dont le recrutement était indispensable pour réparer les dommages de la politique du président Sarkozy ? Comment pensez-vous assurer la formation permanente dans ce cadre ?
M. le garde des Sceaux. De nombreux sujets, très différents, viennent d’être abordés – tous traités par les deux textes que nous discutons. Tous les points soulevés font l’objet d’amendements et seront donc examinés de façon précise au fur et à mesure de nos débats : je m’en tiendrai, pour cette réponse liminaire, aux plus grandes lignes.
Je ne suis pas en désaccord avec la présentation générale de Guy Geoffroy. Non, je ne veux pas ouvrir de nouveaux chantiers : ceux qui sont ouverts sont déjà bien trop nombreux ! Je n’ai pas besoin de me forcer beaucoup pour parler de sujets très divers, puisque tout est sur la table depuis très longtemps. Je veux plutôt clarifier et apporter des réponses.
Ainsi, la question de la collégialité de l’instruction est posée depuis l’affaire d’Outreau. Plusieurs fois, on a repoussé la décision, et aujourd’hui, nous sommes face à un mur. Je ne veux pas me contenter d’un énième moratoire : je crois de ma responsabilité d’apporter une réponse qui permette une clarification de l’action des magistrats. L’instabilité actuelle est néfaste pour tout le monde : pour les magistrats qui ne savent pas ce qu’ils vont devenir, pour les juridictions qui se demandent si elles vont perdre leurs juges d’instruction, pour les justiciables qui s’interrogent… J’ai essayé de peigner l’ensemble des sujets pour, à chaque fois, apporter une réponse.
Je ne veux pas allumer de nouveaux brasiers : l’institution judiciaire, que je découvre au quotidien depuis maintenant cent jours, a besoin de sérénité. Les personnels sont traumatisés. Quant aux juridictions, j’ai déjà beaucoup qualifié leur état : je n’ajouterai pas cet après-midi de nouveau terme.
Enfin, je ne veux pas ouvrir de nouveaux chantiers parce que je ne veux pas nourrir d’illusions : l’essentiel de mon activité à la chancellerie consiste à essayer de simplifier, mais aussi à rechercher des moyens supplémentaires.
J’espère finir par convaincre, comme je l’ai dit au président de votre Commission ainsi qu’à celui de la commission des Lois du Sénat, M. Philippe Bas : le Parlement a un rôle majeur à jouer pour que la société comprenne quel effort nous devons faire afin de donner aux juridictions les moyens de fonctionner. Il ne s’agit pas de faire plaisir à tel ou tel. C’est simplement l’intérêt général : les citoyens devraient être rassurés lorsqu’ils pénètrent dans un palais de justice ; or, aujourd’hui, ils se sentent plutôt inquiets ! Le simple état des bâtiments dit beaucoup des conditions dans lesquelles travaillent les personnels. Les justiciables peuvent légitimement s’interroger sur la sérénité dans laquelle les décisions judiciaires sont rendues.
Voilà pourquoi ce texte est volontairement modeste. Il est pourtant aussi, sur bien des aspects, assez audacieux, comme l’a dit Yves Goasdoué. S’il n’invente pas la justice du XXIe siècle, il pose quelques jalons que je crois féconds.
C’est le cas notamment de ce qui touche au juge des libertés et de la détention. Ce qui a été dit est juste : cette fonction doit être attractive pour des magistrats confirmés ; ils doivent jouir de larges pouvoirs. D’autres réformes, statutaires et procédurales, seront d’ailleurs nécessaires.
Ce juge devra, comme l’a dit Joaquim Pueyo, être disponible vingt-quatre heures sur vingt-quatre ; il devra statuer en temps réel. Mais il faut commencer par lui donner un statut. Les présidents des tribunaux de grande instance se sont interrogés, tout comme vous, monsieur Pueyo, sur la place de ce nouveau juge spécialisé. Les juges spécialisés existent déjà dans les petites juridictions, et elles arrivent à trouver les moyens de fonctionner. Vous me rétorquerez que leur multiplication va compliquer ce fonctionnement… Je ne nie pas la difficulté, bien au contraire.
En tout cas, parmi les efforts que nous n’avons plus à faire, il y a les créations de postes. Pour la première fois cette année, il y aura plus de magistrats qui arrivent que de magistrats qui partent : l’étau se desserre. C’est une question d’années. Mais nous posons un jalon.
L’action de groupe est un sujet essentiel. Cette législature l’a créée dans le domaine de la consommation, et parce qu’elle commence à bien fonctionner, on en sent une appétence dans tous les domaines. Le Gouvernement pouvait choisir de créer des actions de groupe dans différentes lois – à peu près toutes – ou bien d’établir un socle commun. C’est ce second choix que nous faisons.
Je ne suivrai pas sur ce sujet toutes les propositions des rapporteurs. Il faut d’abord, je crois, installer des procédés, quitte à élargir leur usage par la suite. Avec ce texte, la marche est déjà très haute. Je serai bien sûr favorable à certaines modifications : ainsi, je suis favorable à la possibilité pour les associations – sous certaines conditions d’agrément, d’ancienneté – d’engager une action de groupe. Elles auront évidemment leur mot à dire : on ne peut pas se contenter de donner aux seules organisations syndicales les moyens d’agir.
Un mot sur les collectivités locales, en réponse à Olivier Dussopt et, à travers lui, à tous les élus attentifs à cette question. Nous proposerons, par exemple, par amendement, la suppression du double original de l’état civil, ou encore la généralisation du dispositif COMEDEC (Communication électronique des données de l’état-civil), avec une aide pour les collectivités qui n’y adhèrent pas encore. Les notaires seront invités à le rejoindre rapidement. Ce système permet des économies substantielles lors de l’établissement d’actes de mariages ou de décès.
Je n’ai pas voulu sombrer dans la facilité en reportant sur les collectivités locales des charges que l’État n’a pas les moyens d’assumer. Nous avons calculé que le transfert des PACS vers l’état-civil représente 79 emplois équivalent temps plein pour nos quelque 36 000 communes : c’est quelque chose que nous devrions arriver à gérer.
Peut-être souhaitez-vous suspendre la séance, monsieur le président : je crois deviner chez vous une certaine impatience…
M. le président Dominique Raimbourg. Je vous remercie de votre compréhension, monsieur le garde des Sceaux : nous allons devoir effectivement retourner en séance. (Sourires.)
La réunion, suspendue à 18 heures 55, est reprise à 19 heures 10.
La Commission en vient à l’examen des articles du projet de loi organique relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats, ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature.
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AU STATUT DE LA MAGISTRATURE
Chapitre Ier
Dispositions relatives à la composition du corps judiciaire
Article 1er
(art. 1er de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Appartenance au corps judiciaire des magistrats exerçant des fonctions d’inspection des services judiciaires
Le présent article consacre l’appartenance au corps judiciaire des magistrats exerçant des fonctions à l’inspection générale des services judiciaires, afin de consolider leur assise statutaire.
Avec l’article 2 – relatif à ceux d’entre eux placés hors hiérarchie – et les articles 13 et 18 – relatifs à leurs conditions de nomination – du présent projet de loi, il propose une réforme d’ensemble destinée à renforcer l’indépendance des magistrats y exerçant des fonctions.
1. Place et missions de l’inspection générale des services judiciaires
• L’affirmation du rôle de l’inspection générale des services judiciaires
L’inspection générale des services judiciaires constitue, avec l’inspection des services pénitentiaires et l’inspection des services de la protection judiciaire de la jeunesse, l’une des trois structures d’inspection du ministère de la Justice.
Créée dans sa forme contemporaine en 1958 (11) et dotée d’une existence propre et pérenne en 1964 (12), la fonction d’inspecteur général des services judiciaires a vu son champ d’action, initialement centré sur les juridictions de l’ordre judiciaire – à l’exception de la Cour de Cassation – et l’ensemble des services et organismes relevant du ministère de la Justice, élargi aux tribunaux de commerce en 2006 et à la mission d’audit interne comptable des cours d’appel en 2008.
Il revient à la réforme du 29 décembre 2010 (13) d’avoir marqué un tournant dans l’histoire de l’inspection générale. Sans aller jusqu’à une fusion totale des cinq inspections alors existantes (14), cette réforme a en effet permis une organisation plus rationnelle des structures d’inspection du ministère, sous l’égide de l’inspecteur général des services judiciaires, ainsi qu’une extension des compétences de l’inspection générale.
La réforme de 2010
1) La réorganisation des structures d’inspection repose sur :
– l’intégration de la mission d’inspection des greffes à l’inspection générale ;
– la fédération, au sein d’un réseau placé sous la responsabilité de l’inspecteur général des services judiciaires, de l’inspection des services pénitentiaires et de l’inspection des services de la protection judiciaire de la jeunesse.
2) L’extension des compétences de l’inspection générale concerne :
– les personnes morales de droit public soumises à la tutelle du ministère et les personnes morales de droit privé dont l’activité relève des missions du ministère ou bénéficiant de financements publics majoritaires auxquels contribuent le ministère ;
– l’analyse de la performance des structures soumises à son contrôle.
Le décret du 14 août 2013 (15) a parachevé cette évolution en confiant à l’inspecteur général des services judiciaires une mission de réalisation et de coordination de l’audit interne comptable de l’ensemble des services du ministère de la Justice et des juridictions judiciaires.
Au total, l’inspecteur général des services judiciaires exerce actuellement une mission permanente d’inspection sur :
– les directions et services du ministère de la Justice ;
– les juridictions du premier et du second degré ;
– les personnes morales de droit public ou privé soumises à la tutelle du ministère.
Il apprécie l’activité, le fonctionnement et la performance des structures soumises à son contrôle et la manière de servir des personnels. Il présente toutes recommandations et observations utiles.
L’inspection générale procède ainsi chaque année à :
– des contrôles du fonctionnement des cours d’appel, tribunaux de grande instance, tribunaux d’instance, tribunaux de commerce et conseils de prud’hommes ;
– des enquêtes administratives relatives au comportement des magistrats et fonctionnaires susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire ;
– des missions thématiques d’ordre général portant sur l’évaluation des politiques publiques ;
– des audits du contrôle interne comptable.
Par ailleurs, l’inspecteur général assure la coordination des inspections des chefs de cour, dont il peut demander lui-même le déclenchement, et de l’inspection des services pénitentiaires et de l’inspection des services de la protection judiciaire de la jeunesse, dont les chefs de service sont des inspecteurs généraux adjoints de l’IGSJ, qui demeurent toutefois placés sous l’autorité fonctionnelle de leurs directeurs respectifs.
L’évolution des missions de l’inspection générale des services judiciaires s’est accompagnée d’un renforcement de ses effectifs, qui s’établissent aujourd’hui à 65, dont 13 inspecteurs généraux adjoints et 16 inspecteurs.
EFFECTIFS DE L’IGSJ AU 4 JANVIER 2016
Inspecteur général |
1 |
Inspecteurs généraux adjoints |
13 |
Inspecteurs des services judiciaires |
16 |
Chargés de mission |
2 |
Inspecteurs des greffes |
8 |
Auditeurs internes financiers |
4 |
Inspecteurs santé et sécurité au travail |
7 |
Fonctionnaires |
14 |
TOTAL |
65 |
Source : IGSJ.
• Une absence de reconnaissance statutaire étonnante au regard de l’affirmation du rôle de l’inspection générale des services judiciaires
En l’état du droit, les magistrats exerçant des fonctions au sein de l’inspection générale des services judiciaires ne figurent pas expressément dans la liste des membres composant le corps judiciaire établie à l’article premier de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. Ce dernier ne reconnaît en effet que trois catégories de magistrats : les magistrats du siège et du parquet affectés dans les différentes juridictions, ceux du cadre de l’administration centrale du ministère de la Justice et les auditeurs de justice.
Seul le décret du 7 janvier 1993 pris pour l’application de l’ordonnance statutaire précise, en son article 5, que l’inspecteur général, les inspecteurs généraux adjoints et les inspecteurs des services judiciaires sont « affectés à l’administration centrale » (16). Ils se voient, par conséquent, considérés comme assimilés aux magistrats du cadre de l’administration centrale du ministère, notamment pour ce qui concerne leurs conditions de nomination, sur lesquelles votre rapporteure reviendra au sujet des articles 13 et 18 du présent projet de loi.
2. Une reconnaissance statutaire bienvenue
Avec l’article 1er du présent projet de loi, le Gouvernement propose de clarifier et d’affermir la situation juridique des magistrats exerçant des fonctions d’inspection, aujourd’hui caractérisée par le manque de précision du terme « affecté » utilisé dans le décret du 7 janvier 1993 et par l’absence de mention expresse dans l’ordonnance statutaire de leurs fonctions et de leur rattachement aux règles applicables aux magistrats du cadre de l’administration centrale.
Afin de lever tout ambiguïté quant au statut des magistrats exerçant des fonctions d’inspection et, par conséquent, à leurs conditions de nomination, l’article 1er du présent projet de loi propose en effet de reconnaître ces derniers comme appartenant à une catégorie à part entière du corps judiciaire, tandis que les articles 13 et 18 précisent leurs conditions de nomination.
Votre rapporteure se félicite de cette consécration dans l’ordonnance statutaire des fonctions d’inspection, qui apparaît d’autant plus justifiée au regard des nouvelles missions qui ont été confiées aux magistrats chargés de ces fonctions.
Elle soutient par ailleurs la mise en place d’une inspection générale unique au sein du ministère de la Justice, à même de participer au « décloisonnement du ministère » et de renforcer la fonction d’inspection.
Envisagée dès 1979 par le premier inspecteur général, M. Henri Maynier, et ayant fait l’objet de neuf projets de décret successifs depuis, cette réforme, dont l’utilité a encore été soulignée par la Cour des comptes dans son référé sur la fonction d’inspection au ministère de la Justice rendu public le 20 juillet 2015 (17), ne peut plus, en effet, être différée. Elle doit favoriser le développement d’une approche plus transversale des problématiques et l’introduction d’une plus grande distance entre contrôleurs et contrôlés lors des inspections relatives à l’administration pénitentiaire et à la protection judiciaire de la jeunesse.
Aussi, votre rapporteure salue la décision, prise par le ministre de la Justice à la suite des conclusions du groupe de travail mis en place par son prédécesseur sur ce thème, de regrouper les inspections des services judiciaires, pénitentiaires et de la protection judiciaire de la jeunesse au 1er janvier 2017.
Alors que le Sénat avait adopté l’article 1er sans modification, votre commission des Lois a, à l’initiative du Gouvernement et avec l’avis favorable de votre rapporteure, pris acte, dans l’ordonnance statutaire, de la fusion des trois inspections du ministère en une seule inspection dénommée « inspection générale de la justice ». L’inspecteur général des services judiciaires devient l’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice ; les inspecteurs généraux et inspecteurs des services judiciaires deviennent, respectivement, inspecteurs généraux et inspecteurs de la justice.
*
* *
La Commission examine l’amendement CL38 du Gouvernement.
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des Sceaux, ministre de la justice. Il s’agit d’achever, Joaquim Pueyo en parlait tout à l’heure, l’unification des différentes inspections du ministère – nous sommes le dernier à compter encore trois inspections différentes, l’inspection des services judiciaires, l’inspection des services pénitentiaires et l’inspection de la protection judiciaire de la jeunesse. Nous prenons ainsi en compte dans la loi la création, par décret, d’un service unique de l’inspection générale de la justice.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure. Avis très favorable. Je remercie le Gouvernement de cette simplification.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 1ermodifié.
Article 2
(art. 3 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Création de nouvelles fonctions « hors hiérarchie »
Le présent article a pour objet de créer de nouvelles fonctions « hors hiérarchie », afin de renforcer les postes d’encadrement intermédiaire et supérieur dans les plus grandes juridictions et, ainsi, enrichir les perspectives de carrière des magistrats et mettre en cohérence la position hiérarchique de certains d’entre eux avec les responsabilités qu’ils sont amenés à exercer.
1. Des fonctions « hors hiérarchie » limitativement énumérées
La hiérarchie du corps judiciaire comprend deux grades, auxquels s’ajoute la catégorie « hors hiérarchie ».
Le second grade est celui auquel accèdent les jeunes magistrats à la sortie de l’École nationale de la magistrature (ENM). L’accès du second au premier grade est subordonné à des conditions d’ancienneté (18) et à l’inscription à un tableau d’avancement. À l’intérieur de chaque grade sont établis des échelons d’ancienneté (19).
Sont placés « hors hiérarchie » les magistrats qui, sous réserve d’avoir occupé au moins deux fonctions de premier grade et satisfait à l’obligation de mobilité institutionnelle (20), occupent les fonctions énumérées à l’article 3 de l’ordonnance statutaire et à l’article 2 du décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 pris pour l’application de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958. Sont également considérées « hors hiérarchie » les fonctions d’inspecteur général et d’inspecteur général adjoint des services judiciaires, en vertu de l’article 5 du décret n° 93-21 précité.
Les fonctions placées « hors hiérarchie »
● L’article 3 de l’ordonnance statutaire énumère les fonctions suivantes :
– magistrats de la Cour de cassation, à l’exception des conseillers référendaires et des avocats généraux référendaires ;
– premiers présidents des cours d’appel et procureurs généraux près lesdites cours ;
– présidents de chambre des cours d’appel et avocats généraux près lesdites cours ;
– présidents et premiers vice-présidents de tribunal de grande instance ainsi que procureurs de la République et procureurs de la République adjoints inscrits sur une liste établie par décret en Conseil d’État, compte tenu de l’importance de l’activité juridictionnelle, des effectifs des services judiciaires et de la population du ressort de ladite juridiction.
● L’article 2 du décret n° 93-21 d’application de l’ordonnance statutaire mentionne les emplois suivants :
– président et procureur de la République des tribunaux de grande instance d’Aix-en-Provence, Amiens, Angers, Avignon, Béthune, Bobigny, Bordeaux, Boulogne-sur-Mer, Caen, Clermont-Ferrand, Créteil, Dijon, Draguignan, Évreux, Évry, Fort-de-France, Grasse, Grenoble, Le Havre, Le Mans, Lille, Lyon, Marseille, Meaux, Melun, Metz, Montpellier, Mulhouse, Nancy, Nanterre, Nantes, Nice, Nîmes, Orléans, Paris, Perpignan, Pontoise, Rennes, Rouen, Saint-Denis-de-la-Réunion, Saint-Étienne, Strasbourg, Toulon, Toulouse, Tours, Valence, Valenciennes et Versailles ;
– premier vice-président et procureur de la République adjoint des tribunaux de grande instance de Bobigny, Bordeaux, Créteil, Évry, Lille, Lyon, Marseille, Nanterre, Paris, Pontoise, Toulouse et Versailles.
● L’article 5 du décret n° 93-21 vise également les fonctions d’inspecteur général des services judiciaires et d’inspecteur général adjoint.
Or, l’organisation actuelle présente plusieurs faiblesses.
Tout d’abord, la répartition du corps judiciaire par grade témoigne d’un réel déséquilibre. Si un peu plus du quart (26 %) des 8 342 magistrats en activité au 1er janvier 2016 occupe des fonctions du second grade, près des deux tiers (61 %) relèvent du premier grade et 13 % sont placés « hors hiérarchie ». Il existe ainsi un véritable « engorgement » des effectifs de magistrats du premier grade. Le délai moyen pour passer du premier grade à la hors hiérarchie, sans progression autre qu’en terme de rémunération, est de 15 à 18 ans.
Ensuite, il résulte du cadre juridique actuel que l’exercice de fonctions spécialisées dans des juridictions du premier degré est exclusif de l’appartenance à la « hors hiérarchie », alors que, dans certaines d’entre elles, comme à Paris ou à Nanterre, les responsabilités exercées, notamment en termes d’encadrement, sont importantes.
Enfin, l’organisation de certains tribunaux de grande instance et cours d’appel en pôles, justifiée par des contraintes pratiques comme la taille de ces juridictions ou la conduite de projets spécifiques, conduit à placer à leur tête des magistrats coordonnateurs qui se voient déléguer, par les présidents de juridictions, certaines de leurs attributions en matière d’administration et de gestion, sans que cela s’accompagne d’une reconnaissance en matière hiérarchique.
2. L’accroissement des fonctions « hors hiérarchie » proposé par le Gouvernement
Afin de remédier à ces défauts, le Gouvernement suggère de compléter la liste des fonctions « hors hiérarchie » établie à l’article 3 de l’ordonnance statutaire avec :
– celles de premiers présidents de chambre de cours d’appel et de premiers avocats généraux près lesdites cours ;
– certaines fonctions de premier vice-président chargé de l’instruction, premier vice-président chargé des fonctions de juge des enfants, premier vice-président chargé de l’application des peines, premier vice-président chargé du service d’un tribunal d’instance et premier vice-président chargé des fonctions de juge des libertés et de la détention, qui seront déterminées par décret en Conseil d’État en tenant compte des spécificités des juridictions concernées, en particulier de leur taille et de leur activité.
Il s’agit ainsi de dynamiser les perspectives de carrière des magistrats en augmentant les possibilités d’accéder à des grades élevés, de permettre aux magistrats responsables de pôle et à ceux exerçant des fonctions spécialisées et d’encadrement d’un service d’avoir une position hiérarchique en cohérence avec les responsabilités qui leur sont confiées.
Cette mesure devrait se traduire, selon le Gouvernement, par la création, à terme, de trente emplois hors hiérarchie dans des fonctions spécialisées, sis dans les douze tribunaux de grande instance les plus importants, pour un coût total en année pleine estimé à 302 000 euros.
Le présent article prévoit également, par cohérence avec l’article 1er du présent projet de loi qui consacre l’existence de l’inspection générale des services judiciaires dans l’ordonnance statutaire, d’introduire dans la liste des fonctions « hors hiérarchie » dressée à l’article 3 de l’ordonnance statutaire celles d’inspecteur général et d’inspecteur général adjoint des services judiciaires, qui sont déjà, en vertu du décret n° 93-21, « hors hiérarchie ».
L’article 2 du présent projet de loi propose enfin, en excluant expressément la fonction d’auditeur à la Cour de cassation de la liste des fonctions « hors hiérarchie », de procéder à une coordination qui n’a que trop tardé. Créée en 1984 (21), la fonction d’auditeur à la Cour de cassation (22) est en effet occupée par des magistrats des second ou premier grades (23).
3. Le dispositif adopté par le Sénat
Lors de l’examen du projet de loi en séance, le Sénat a supprimé, sur proposition de sa commission des Lois et contre l’avis du Gouvernement, de la liste des fonctions « hors hiérarchie » proposée par le Gouvernement celle de premier vice-président chargé des fonctions de juge des libertés et de la détention, compte tenu de la réforme du juge des libertés et de la détention qu’il a par ailleurs adoptée à l’article 14 du présent projet de loi.
4. Les modifications apportées par votre commission des Lois
À l’initiative de votre rapporteure et de M. Sergio Coronado, votre commission des Lois a adopté un amendement de coordination avec celui adopté à l’article 14 du projet de loi qui rétablit les fonctions de juge des libertés et de la détention au sein de la liste des fonctions spécialisées.
Votre commission des Lois a, par ailleurs, apporté une modification rédactionnelle tirant les conséquences de la création de l’inspection générale de la justice.
*
* *
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement CL39 du Gouvernement, de cohérence avec le précédent.
Puis elle examine deux amendements identiques, CL79 de la rapporteure et CL8 de M. Sergio Coronado.
Mme la rapporteure. L’amendement CL79, comme le CL8, est un amendement de cohérence avec le rétablissement du statut du juge des libertés et de la détention que je vous proposerai à l’article 14.
M. Sergio Coronado. Mme la rapporteure a excellemment défendu mon amendement CL8.
La Commission adopte les amendements identiques.
Elle adopte alors l’article 2 modifié.
Chapitre II
Dispositions relatives au recrutement et à la formation professionnelle
Article 3
(art. 14 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Extension du champ des missions de formation de l’École nationale de la magistrature
Cet article complète l’article 14 de l’ordonnance statutaire, afin d’étendre le champ des personnes pouvant bénéficier d’une formation de la part de l’École nationale de la magistrature (ENM) et d’enrichir la portée du stage de formation continue des magistrats.
L’article 14 de l’ordonnance dispose aujourd’hui qu’il revient à l’ENM d’assurer la formation professionnelle des auditeurs de justice ainsi que la formation continue des magistrats. Elle peut, en outre, contribuer à la formation des futurs magistrats d’États étrangers et à l’information et au perfectionnement des magistrats de ces États.
L’article 3 du présent projet de loi propose d’ajouter que l’ENM assure la formation des candidats admis aux concours complémentaires (24) et des candidats à une intégration directe (25). Il convient, à cet égard, de souligner que l’article 21-1 de l’ordonnance statutaire, s’agissant des candidats admis aux concours complémentaires, et l’article 25-3 de la même ordonnance, s’agissant des candidats à une intégration directe, disposent déjà que ces candidats suivent une formation probatoire organisée par l’ENM, qui comporte un stage en juridiction. Les candidats admis aux concours complémentaires bénéficient ainsi d’une formation de six mois qui, reposant sur une formation théorique intensive d’un mois dispensée par l’ENM et un stage probatoire de quatre mois en juridiction, se clôture par le passage d’un « grand oral » devant un jury d’aptitude. Les candidats à une intégration directe suivent, pour leur part, une formation probatoire organisée par l’ENM et comportant un stage en juridiction de six mois.
L’article 3 consacre par ailleurs dans l’ordonnance statutaire le rôle de l’ENM dans la formation professionnelle de personnes qui n’appartiennent pas au corps judiciaire mais sont amenées à exercer des fonctions juridictionnelles ou à contribuer étroitement à l’activité judiciaire. Cette mission est aujourd’hui inscrite à l’article 1er-1 du décret n° 72-355 du 4 mai 1972 relatif à l’École nationale de la magistrature, mais en des termes plus restrictifs puisqu’il vise les personnes n’appartenant pas au corps judiciaire et amenées à exercer, dans l’ordre judiciaire, soit des fonctions juridictionnelles, soit celles de délégués du procureur de la République, de médiateurs judiciaires ou de conciliateurs de justice. La formulation plus large proposée permettra de couvrir également, par exemple, les experts judiciaires.
L’article 3 vise enfin à renforcer la dimension pratique de la formation continue suivie par les magistrats à l’occasion de leurs changements de fonctions, en prévoyant que ceux-ci peuvent accomplir, à cette occasion, des actes juridictionnels sans pouvoir, toutefois, recevoir de délégation de signature. Il s’agit d’une avancée attendue de la part des magistrats, qui permet de mettre fin à une différence de traitement avec les auditeurs de justice qui n’apparaissait nullement justifiée.
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La Commission adopte l’article 3 sans modification.
Article 4
(art. 16 et 17 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Assouplissement des exigences de diplôme et de condition physique pour l’accès à l’École nationale de la magistrature
Cet article précise les conditions d’accès aux concours de la magistrature.
Il clarifie tout d’abord les exigences de diplôme pour concourir à l’auditorat posées par l’article 16 de l’ordonnance statutaire. Il remplace en effet l’examen au cas par cas des formations équivalentes à un diplôme sanctionnant une formation d’une durée minimale de quatre années d’études, et les dérogations particulières pour les Instituts d’études politiques ou les Écoles normales supérieures, par une rédaction globale permettant la candidature de tout titulaire d’une qualification reconnue au moins équivalente au Master I dans des conditions fixées par un décret en Conseil d’État. Il s’agit ainsi d’apporter une plus grande souplesse dans la détermination des diplômes permettant d’accéder au concours d’entrée à l’ENM.
Il aligne ensuite trois conditions d’accès aux concours de la magistrature sur les dispositions applicables à l’ensemble de la fonction publique : l’appréciation de la condition d’aptitude, la position statutaire requise et la date limite de vérification des conditions requises.
Concernant la condition d’aptitude, l’obligation d’être « reconnu indemne ou définitivement guéri de toute affection donnant droit à un congé de longue durée », supprimée du statut général de la fonction publique depuis 1983, serait remplacée par une appréciation générale de la condition physique des candidats au regard des compensations possibles de leur handicap, conformément à la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
La position statutaire requise pour participer au concours interne d’accès à l’ENM, réservé aux fonctionnaires de l’État et des collectivités territoriales, serait par ailleurs précisée. Pour être candidats, les agents devraient ainsi se trouver en position d’activité, de détachement, de congé parental ou accomplir leur service national. Cette précision priverait les fonctionnaires mis en disponibilité de participer au deuxième concours d’accès à l’ENM, à l’instar de ce qui vaut pour les concours de la fonction publique en application de l’article 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État.
La vérification des conditions requises pour concourir au concours de l’ENM serait enfin reportée au plus tard à la date de nomination comme auditeur de justice, alors qu’aujourd’hui, en l’absence de disposition spécifique dans le statut des magistrats, elle doit avoir lieu avant le début des épreuves. Cette disposition, qui a pour objectif d’alléger le travail de l’ENM en ne faisant porter la vérification que sur les admis, peut conduire à refuser la nomination d’un candidat admis. Elle vaut néanmoins déjà pour les concours de la fonction publique.
Outre un amendement rédactionnel, le Sénat a, à l’initiative de sa commission des Lois, apporté une modification à l’article 4, à propos de la date à laquelle les conditions requises pour concourir doivent être remplies. Là où le Gouvernement avait proposé d’inscrire dans l’ordonnance statutaire la date limite de la première épreuve du concours, le Sénat a privilégié la date de publication des résultats d’admissibilité, afin de permettre aux candidats de régulariser leur situation administrative.
Au-delà d’une modification rédactionnelle, votre commission des Lois a, à l’initiative du Gouvernement et avec l’avis favorable de la rapporteure, souhaité revenir au texte initial s’agissant de la date à laquelle les conditions requises pour concourir doivent être remplies.
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La Commission adopte d’abord l’amendement rédactionnel CL80 de la rapporteure.
Puis elle examine l’amendement CL34 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Il s’agit de fixer la date à laquelle les candidats au concours d’auditeur de justice doivent remplir les conditions nécessaires. Nous proposons un retour au texte initial du Gouvernement.
Mme la rapporteure. Avis favorable. C’est une mesure de bon sens : c’est à la date du début des épreuves que l’on doit remplir les conditions pour concourir.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 4 modifié.
Article 5
(art. 18-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Assouplissement des exigences d’activité ou de diplôme pour les candidats docteurs en droit ou ceux ayant exercé une activité professionnelle en lien avec les fonctions judiciaires
L’article 5 a pour objet d’assouplir les conditions de l’accès, sur titres, à l’auditorat, afin d’ouvrir davantage le recrutement et ainsi diversifier le corps de la magistrature.
Devant le constat de la faible part des nominations sur titres en qualité d’auditeur de justice (65 sur un total de 372 recrutements, soit moins de 18 %, en 2014), il est proposé de modifier l’article 18-1 de l’ordonnance statutaire, qui régit l’intégration directe dans le corps judiciaire en qualité d’auditeur de justice, selon trois axes.
Le premier consiste, pour la voie d’accès relative aux personnes faisant état d’au moins quatre années d’activité dans le domaine juridique, économique ou social les qualifiant pour l’exercice des fonctions judiciaires, à ne plus exiger une maîtrise en droit, mais à admettre tout cursus juridique d’au moins quatre années sanctionné par un diplôme, à l’instar de ce qui est prévu à l’article 4 du présent projet de loi. Cette modification permettrait en particulier aux diplômés des Instituts d’études politiques de pouvoir prétendre à l’intégration sur titre à l’auditorat.
Le deuxième revient, pour la voie d’accès propre aux doctorants et aux personnes ayant exercé pendant au moins trois ans des fonctions d’enseignement ou de recherche en droit dans un établissement public d’enseignement supérieur, à assouplir les exigences de diplôme, en supprimant la condition de double diplôme (26) pour les premiers et en modifiant la condition de diplôme pour les seconds. Ceux-ci n’auraient plus à justifier de l’obtention d’une maîtrise en droit et d’un diplôme d’études supérieures dans une discipline juridique, mais d’un diplôme sanctionnant une formation d’une durée d’au moins cinq années d’études supérieures dans un domaine juridique.
Le troisième propose de revoir les modalités de détermination du nombre de recrutements sur titres à l’auditorat. Aujourd’hui, ce nombre ne peut dépasser le tiers de celui des auditeurs issus des trois concours de l’ENM. Il résulte de cette disposition de l’article 18-1 de l’ordonnance statutaire, d’une part, que la commission d’avancement, qui est chargée d’examiner les candidatures aux nominations sur titres, doit attendre les résultats des concours, à la fin du mois de décembre, pour se prononcer et, d’autre part, que le nombre de places offertes au recrutement sur titres est davantage contraint que s’il avait été apprécié par rapport au nombre de places offertes aux concours. Afin de remédier à ces inconvénients, l’article 5 suggère de prévoir que le nombre des auditeurs recrutés sur titres ne peut dépasser le tiers du nombre de places offertes aux trois concours.
Craignant d’affaiblir la qualité des recrutements, le Sénat a, sur proposition de sa commission des Lois, rétabli la condition de double diplôme pour les docteurs en droit, alors que le Gouvernement n’y était pas favorable.
À l’initiative du groupe Socialiste, républicain et citoyen, votre commission des Lois a élargi au domaine des sciences humaines et sociales le champ du recrutement sur titres des personnes justifiant d’au moins quatre années d’activité les qualifiant pour l’exercice des fonctions judiciaires.
Elle a par ailleurs, à l’initiative du Gouvernement, étendu le recrutement sur titres aux juristes assistants nouvellement créés dans le cadre du plan de lutte anti-terroriste. Ainsi, les docteurs en droit et les personnes titulaires d’un diplôme sanctionnant cinq années d’études supérieures dans le domaine juridique ou justifiant d’une qualification au moins équivalente pourront, à l’issue de trois années au moins d’exercice professionnel en qualité de juriste assistant, être nommés directement auditeurs de justice.
Votre rapporteure a, à ce sujet, fait valoir l’utilité de limiter à un an, voire six mois, la formation à l’ENM suivie par les docteurs en droit à l’issue de leurs trois ans d’activité en tant que juristes assistants. Leur connaissance en droit du meilleur niveau et l’expérience professionnelle dont ils auront bénéficié en travaillant trois ans dans une juridiction, aux côtés d’un magistrat, justifient en effet une telle mesure, sans laquelle l’attractivité du dispositif ne sera pas garantie.
Compte tenu des effets du baby-boom sur les départs en retraite, de la désaffection pour le métier de magistrat et de la nécessité d’introduire de la diversité, il importe de mettre en place des mesures suscitant l’engagement de ces personnes. Il en est de même des professionnels du droit et en particulier des auxiliaires de justice que sont les avocats, lesquels ne disposent pas d’une passerelle suffisamment attractive, alors que leur qualification dans un domaine particulier du droit et leur expérience, en font des personnes dont le recrutement devrait être recherché par tous moyens.
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La Commission examine l’amendement CL71 de M. Yves Goasdoué.
Mme Françoise Descamps-Crosnier. Cet amendement vise à élargir les conditions de recrutement des auditeurs de justice sur titre et ainsi à favoriser l’ouverture de la magistrature.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
Mme la rapporteure. Avis favorable, à condition tout de même que les candidats disposent d’une formation juridique.
La Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CL35 rectifié du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Cet amendement est lié à la nécessité de renforcer les juridictions. Beaucoup de parlementaires m’écrivent pour me demander de désigner un magistrat dans telle ou telle juridiction. Mais il existe aujourd’hui 450 emplois de magistrats vacants ! Or chacun sait qu’il faut trente et un mois pour former un magistrat.
Nous avons donc prévu l’embauche de juristes assistants, qui seront des docteurs en droit, ceux-ci n’étant pas contraints de justifier d’une expérience professionnelle, ou des personnes justifiant d’une expérience professionnelle de deux ans et d’un diplôme sanctionnant au moins cinq années d’études supérieures dans un domaine juridique.
L’amendement CL35 rectifié a pour objet de permettre à ces juristes assistants, dès lors qu’ils justifieront d’une durée de trois années d’exercice dans ces fonctions, de bénéficier d’une passerelle pour être nommés directement auditeurs de justice, c’est-à-dire futurs magistrats.
Mme la rapporteure. Avis très favorable. Je remercie le Gouvernement de cette avancée tout à fait novatrice, que nous devrons faire connaître dans les universités, où l’on aspirera plus souvent à être magistrat.
Nous discuterons peut-être plus tard, en séance, de la durée de la formation à l’ENM des juristes assistants devenus auditeurs de justice : après dix ans d’études et trois ans d’exercice, faut-il encore leur imposer trente et un mois de formation – d’autant que cette formation est coûteuse pour l’État ? On pourrait imaginer une formation plus courte, comme je l’avais signalé dans mon exposé introductif.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite l’article 5 modifié.
Article 6
(art. 19 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Aménagement du stage des auditeurs de justice
auprès d’un barreau ou d’un avocat
Cet article a pour objet de modifier l’article 19 de l’ordonnance statutaire, afin d’aménager les modalités du stage en cabinet d’avocat que doivent réaliser les auditeurs de justice lors de leur scolarité à l’ENM.
Au cours de leur formation de 31 mois, les auditeurs de justice alternent périodes d’enseignement et stages. Au nombre de huit, ces derniers s’étendent sur une durée totale de 82 semaines, soit 70 % du temps de formation, les plus longs étant le stage juridictionnel (trente-sept semaines) et le stage auprès d’un barreau ou comme collaborateur d’un avocat inscrit au barreau (six mois au moins).
Initialement prévu pour deux mois, le « stage avocat » a vu sa durée portée à au moins six mois par la loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007 relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats, à la suite des recommandations de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale chargée de rechercher les causes des dysfonctionnements de la justice dans l’affaire dite d’Outreau. L’objectif ainsi poursuivi était de permettre aux auditeurs de justice de mieux appréhender la profession d’avocat.
Il ressort néanmoins des bilans du « stage avocat » des dernières promotions de l’ENM et des auditions menées par votre rapporteure que la durée de ce stage s’avère excessive au regard de la scolarité à l’ENM.
L’article 6 du projet de loi organique présenté par le Gouvernement proposait, par conséquent, de réduire la durée minimale du stage avocat de six à trois mois, les trois mois restants devant être consacrés à l’approfondissement de la connaissance de l’environnement judiciaire, administratif et économique, au travers par exemple de stages auprès d’autres acteurs, comme les conciliateurs ou encore les notaires ou les huissiers.
Tandis que sa commission des Lois avait décidé, sur proposition du rapporteur qui s’étonnait, à juste titre, de la mention, dans le texte organique, du seul stage d’avocat et de sa durée (27), d’indiquer que les auditeurs de justice réalisent un stage auprès d’un avocat, sans en préciser la durée, le Sénat a choisi, à l’initiative du groupe communiste, républicain et citoyen et avec l’avis favorable de la commission des Lois et du Gouvernement, de préciser que les auditeurs de justice effectuent un stage leur permettant de mieux connaître l’environnement judiciaire, administratif et économique, incluant un stage auprès d’un barreau ou comme collaborateur d’un avocat.
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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL81 de la rapporteure.
Puis elle adopte l’article 6 modifié.
La Commission examine l’amendement CL13 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Pour les magistrats recrutés par le concours complémentaire, ou par intégration directe, la brièveté de la formation et du stage en juridiction peut conduire à des refus d’intégration. L’amendement CL13 vise à donner au jury la possibilité d’imposer le renouvellement du stage avant de se prononcer définitivement.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Les concours complémentaires sont ouverts au coup par coup, selon les besoins de recrutement ; ainsi, aucun n’a été ouvert entre 2002 et 2010. Prévoir la possibilité d’un second stage impliquerait que l’on ait la certitude d’ouvrir un concours complémentaire chaque année, ce qui semble difficile.
Mme la rapporteure. Avis défavorable également. Toutefois, le dispositif actuel a été dénoncé comme trop brutal : il faudrait, si un problème survient au cours du stage, prévoir à tout le moins une obligation d’en aviser le stagiaire – au besoin par voie de circulaire –, afin de ne pas mettre certains candidats soudainement en difficulté.
La Commission rejette l’amendement.
chapitre III
Dispositions relatives aux conditions de nomination
Article 7
(art. 1er de l’ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l’État)
Nomination des procureurs généraux
Le présent article a pour objet de modifier les modalités de nomination des procureurs généraux près les cours d’appel et la Cour de cassation, en supprimant la délibération en conseil des ministres.
Actuellement, il est en effet pourvu aux emplois de procureurs généraux près les cours d’appel et la Cour de Cassation ainsi qu’à l’emploi de procureur général près la Cour des comptes en conseil des ministres, en application de l’article 1er de l’ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l’État.
S’agissant des procureurs généraux près les cours d’appel et la Cour de cassation, leurs nominations, auxquelles il est procédé par décret du Président de la République pris en conseil des ministres, sur proposition du ministre de la Justice, font en outre l’objet, depuis la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Vème République, d’un avis simple du Conseil supérieur de la magistrature.
L’article 7 du présent projet de loi organique propose de retirer les procureurs généraux près les cours d’appel et de la Cour de cassation de la liste des emplois auxquels il est pourvu en conseil des ministres.
Resterait seul concerné par une nomination en conseil des ministres le poste de procureur général près la Cour des comptes, dont la nature est différente. Son rôle est en effet de diriger le parquet général qui est chargé de veiller à l’exécution des lois, d’éclairer la Cour de ses avis et de l’aider à mettre en œuvre ses décisions ainsi que de garantir le bon exercice du ministère public près les chambres régionales et territoriales des comptes, confié aux procureurs financiers qu’il choisit. Par ailleurs, si les membres de la Cour des comptes sont des magistrats, ils ne relèvent pas du statut de la magistrature mais sont régis par les dispositions statutaires de la fonction publique de l’État. Enfin, le premier président de la Cour des comptes, les présidents de chambre et les conseillers maîtres de la Cour des comptes sont également nommés en conseil des ministres.
La mesure proposée à l’article 7 du projet de loi organique s’inscrit dans la droite ligne des préconisations formulées, en 2013, par la commission pour la modernisation de l’action publique, présidée par M. Jean-Louis Nadal (28).
Elle permet de mettre fin au déséquilibre existant aujourd’hui entre les chefs de la Cour de cassation et des cours d’appel, le premier président n’étant pas nommé en conseil des ministres, contrairement au procureur général.
Elle répond, pour partie, et au moins symboliquement, aux exigences de renforcement des garanties relatives à l’indépendance du parquet. Alors que la nomination des procureurs généraux en conseil des ministres était, lors de son introduction dans l’ordonnance organique en 1992 (29), justifiée par la nécessité de reconnaître l’importance des fonctions de procureur général et de « conforter les magistrats en province à l’égard des préfets et des autres autorités de l’État » (30), l’accroissement continu des prérogatives du parquet, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (31) et la nécessité de mieux affirmer l’unité du corps judiciaire sans renoncer au modèle d’un ministère public exercé par des magistrats appliquant la politique pénale conduite par le garde des Sceaux, plaident en effet pour une évolution de leur mode de nomination.
Votre rapporteure souligne que, si la mesure proposée bénéficie d’un large soutien de la part des organisations syndicales et de la conférence nationale des procureurs généraux, elle revêt, avant tout, un caractère symbolique, puisque les procureurs généraux demeureraient nommés par décret du Président de la République, sur proposition du garde des Sceaux et après un avis simple du Conseil supérieur de la magistrature.
Elle rappelle, à cet égard, que toute évolution significative du statut des magistrats du parquet est subordonnée à l’adoption définitive du projet de loi de révision constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature, qui a été adopté, en deuxième lecture, le 26 avril 2016, par l’Assemblée nationale, dans sa version transmise par le Sénat. Celui-ci prévoit de rapprocher le statut des magistrats du parquet sur ceux du siège, en remplaçant l’avis simple du CSM par un avis conforme de ce dernier sur l’ensemble des nominations au parquet et en érigeant le CSM en conseil de discipline des magistrats du parquet. Une volonté de réformer le statut des magistrats du parquet a été maintes fois affichée, au Sénat, lors des débats sur le présent projet de loi organique, en particulier par le président de sa commission des Lois, M. Philippe Bas (32), et le rapporteur du présent projet de loi, M. François Pillet (33).
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La Commission adopte l’article 7 sans modification.
Article 8
(art. 2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Assouplissement des obligations de mobilité pour la nomination
au premier grade
Le présent article propose d’assouplir les obligations de mobilité géographique auxquelles sont contraints les magistrats souhaitant accéder au premier grade.
L’article 2 de l’ordonnance statutaire dispose en effet que « nul magistrat ne peut être promu au premier grade dans la juridiction où il est affecté depuis plus de cinq années, à l’exception de la Cour de cassation ».
Il en résulte que le magistrat du second grade qui remplit les conditions requises (34) est contraint, s’il exerce depuis plus de cinq ans dans la même juridiction, de la quitter pour être promu au premier grade.
Conçue comme une garantie d’impartialité pour les justiciables, l’exigence de mobilité géographique tend à prévenir les risques de conflits d’intérêts, à l’instar de la mobilité fonctionnelle. Elle constitue par ailleurs un élément de souplesse dans la gestion du corps judiciaire, en permettant de pourvoir des postes géographiquement peu attractifs.
Toutefois, ses modalités de mise en œuvre contribueraient aux fortes disparités de carrière constatées entre les hommes et les femmes au sein de la magistrature. En effet, alors que les femmes représentent 64,4 % des effectifs du corps judiciaire, elles occupent près de 77 % des postes du second grade, 64 % de ceux du premier grade et 42 % seulement des postes hors hiérarchie. Sur 386 chefs de juridiction, 120 seulement sont des femmes (35).
Il ressort ainsi d’une étude confiée par le groupe de travail sur la parité constitué au sein du Conseil supérieur de la magistrature au CEVIPOF (Centre de recherches politiques de Sciences Po) (36) présentée le 25 septembre 2013 que l’une des principales causes des disparités de carrière entre les femmes et les hommes au sein de la magistrature tient à l’importance accordée à la mobilité géographique. Citant un extrait de ce rapport, l’étude d’impact du présent projet de loi souligne que « la mobilité géographique est au cœur des différences constatées entre les carrières des magistrats, selon qu’il s’agit d’hommes ou de femmes. En effet, compte tenu du fait que, dans notre société, les responsabilités familiales pèsent encore prioritairement sur les femmes, les attaches matrimoniales et ces responsabilités impliquent souvent une certaine stabilité géographique pour les femmes, au moins jusqu’à la majorité des enfants ».
Afin de remédier à ces disparités, l’article 8 du présent projet de loi propose d’allonger de cinq à sept ans la durée à partir de laquelle un magistrat ne peut plus être promu au premier grade dans la même juridiction.
Très attachée à la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, votre rapporteure soutient vivement cette mesure, qui trouve un complément utile au V de l’article 35 du présent projet de loi, qui propose de reporter l’entrée en vigueur des conditions de mobilité fonctionnelle des magistrats qui avaient été fixées en 2007.
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La Commission adopte l’article 8 sans modification.
Article 9
(art. 3-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Réforme du régime juridique relatif aux magistrats placés
L’article 9 a pour principal objet de renforcer l’attractivité de la fonction de magistrat placé en améliorant les avantages de carrière qui y sont liés, notamment en termes de priorité d’affectation géographique. Il tire par ailleurs les conséquences de la mise en place des chefs de pôle, en excluant ces fonctions de celles qui peuvent faire l’objet d’une affectation prioritaire pour les magistrats placés.
1. Les magistrats placés
Créé par la loi organique n° 80-844 du 29 octobre 1980 relative au statut de la magistrature, le dispositif des magistrats placés a pour objectif de donner aux chefs de cour une plus grande latitude dans la gestion des effectifs de magistrats et, ainsi, de contribuer au bon fonctionnement des juridictions.
Les chefs de cour peuvent en effet affecter ces magistrats, placés auprès d’eux, au remplacement de magistrats en congés ou, pour une durée limitée à huit mois, à un poste vacant ou aux fins de renforcer les effectifs d’une juridiction de telle sorte que le contentieux puisse être traité dans un délai raisonnable.
Ces « magistrats volants » sont amenés à exercer les fonctions du grade auxquels ils appartiennent à la cour d’appel à laquelle ils sont rattachés et dans l’ensemble des tribunaux de première instance du ressort de cette cour.
Défini à l’article 3-1 de l’ordonnance statutaire de 1958, le régime juridique des magistrats placés prévoit notamment un plafond d’emplois des magistrats placés dans le ressort d’une cour d’appel (un quinzième des emplois de magistrats de la cour) et une durée maximale d’exercice de cette fonction (six ans).
Compte tenu des sujétions auxquelles ces magistrats sont soumis et afin d’assurer une certaine attractivité à cette fonction, les intéressés bénéficient, à l’issue de deux années d’exercice, d’une priorité d’affectation.
Ils disposent ainsi du droit à être nommé au poste qu’ils souhaitent au sein du tribunal de grande instance (TGI) du siège de la cour d’appel à laquelle ils sont rattachés ou du TGI le plus important du département à la première vacance d’emploi constatée. Le poste doit toutefois correspondre à leur niveau hiérarchique et ne peut concerner un poste de chef de juridiction, de premier vice-président, de premier vice-président adjoint, de procureur de la République adjoint ou de premier vice-procureur de la République des tribunaux de grande instance.
Cette dernière restriction relative aux postes correspondant au grade Bbis – celui juste avant l’accès à la catégorie hors hiérarchie – a été ajoutée par la loi organique n° 2012-208 du 13 février 2012 portant diverses dispositions relatives au statut de la magistrature. Il avait en effet alors été considéré qu’il n’était pas souhaitable que la priorité d’affectation puisse permettre à des magistrats placés, avec peu d’ancienneté dans le grade, d’occuper directement des fonctions d’encadrement réservées à des magistrats plus expérimentés.
Il est par ailleurs prévu que, à l’issue de la durée maximale de six ans d’exercice en tant que magistrat placé, ces derniers soient nommés, le cas échéant en surnombre, en qualité de magistrat du siège ou du parquet au niveau hiérarchique auquel ils appartiennent au TGI du ressort de la cour d’appel ou au TGI le plus important du département, où ils ont demandé à être affectés. À défaut d’avoir exprimé un choix, ils sont nommés au TGI le plus important.
En 2015, il existait 380 emplois de magistrats placés, 244 au siège et 136 au parquet. Compte tenu de leur faible attractivité, une part importante des postes de magistrats placés est traditionnellement proposée, comme premier poste, aux auditeurs de justice. 54 d’entre eux (34 au siège et 20 au parquet) leur ont ainsi été proposés en 2015. De par la diversité des fonctions occupées, cette première expérience s’avère d’ailleurs particulièrement intéressante et formatrice, ainsi que l’a souligné l’Association des jeunes magistrats à votre rapporteure.
Telle qu’elle est rédigée actuellement, la priorité d’affectation dont bénéficient les magistrats placés soulève des difficultés de deux ordres. S’agissant tout d’abord des magistrats placés, leur choix d’affectation est restreint aux postes vacants au tribunal de grande instance de la cour d’appel ou au tribunal de grande instance le plus important du ressort. Pour ce qui concerne ensuite les autres magistrats, il leur est difficile d’accéder à certaines juridictions attractives, malgré une ancienneté importante, compte tenu de la priorité d’affectation bénéficiant aux magistrats placés.
2. Renforcer l’attractivité de la fonction de magistrat placé
Afin de remédier à ces difficultés et ainsi, améliorer l’attractivité des postes de magistrats placés, permettre un renouvellement plus fréquent et diversifié des effectifs au sein des juridictions les plus recherchées et accroître la souplesse de gestion, l’article 9 du présent projet de loi propose deux modifications.
La première consiste à étendre le périmètre géographique dans lequel le magistrat placé peut exercer son droit d’affectation prioritaire à l’ensemble des TGI du ressort de la cour d’appel (et non plus seulement le TGI du siège de la cour d’appel ou le plus important du département où elle est située). Il est prévu de même s’agissant de l’affectation à l’issue des six ans.
La seconde revient à compléter la liste des postes exclus de la priorité d’affectation des magistrats placés avec les nouvelles fonctions de chefs de pôles, à savoir : les postes de premiers vice-présidents chargés de l’instruction, des fonctions de juge des enfants, de l’application des peines, du service d’un tribunal d’instance ou des fonctions de juge des libertés et de la détention ainsi que celui de premier vice-procureur de la République financier auprès du TGI de Paris.
Le Sénat a adopté l’article 9 en supprimant la référence au juge des libertés et de la détention, compte tenu des modifications qu’il a apportées au statut de ce dernier à l’article 14 du présent projet de loi.
Après avoir procédé, à l’initiative de votre rapporteure et de M. Sergio Coronado, aux modifications de coordination rendues nécessaires par le rétablissement, en ses termes initiaux, de la réforme du statut du juge des libertés et de la détention prévue à l’article 14 du projet de loi, votre commission des Lois a adopté, à l’initiative du Gouvernement, un amendement destiné à porter de six à huit ans la durée au cours de laquelle un magistrat peut, au cours de sa carrière, occuper un poste de magistrat placé.
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La Commission examine deux amendements identiques CL82 de la rapporteure et CL9 de M. Sergio Coronado.
Mme la rapporteure. Il s’agira d’un amendement de cohérence avec les amendements déjà examinés à l’article 14.
M. Sergio Coronado. Tout à fait.
La Commission adopte les amendements identiques.
Elle examine ensuite l’amendement CL36 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. J’ai évoqué cet amendement dans mon propos liminaire : il s’agit de répondre aux souhaits de certains magistrats et d’enrayer la désaffection pour la fonction de magistrat placé.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
Puis la Commission adopte l’article 9 modifié.
Article 9 bis
(art. 6 et 20 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Suppression de l’adverbe « religieusement » dans la prestation de serment des magistrats de l’ordre judiciaire et des auditeurs de justice
L’article 9 bis résulte d’un amendement présenté en séance publique au Sénat par le Gouvernement.
Il prévoit de supprimer l’adverbe « religieusement » du serment prononcé par tout magistrat, avant son entrée en fonctions, lors de sa nomination à son premier poste et, le cas échéant, lors de sa réintégration, ainsi que du serment prononcé par l’auditeur de justice, préalablement à toute activité.
1. La solennité de la prestation de serment
● Le serment prononcé par les magistrats judiciaires est aujourd’hui inscrit à l’article 6 de l’ordonnance statutaire de 1958 dans les termes suivants : « Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder religieusement le secret des délibérations et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat ».
Remontant à 1254 pour les magistrats du siège et à une ordonnance de Philippe le Bel de 1303 pour les magistrats du parquet, la prestation de serment représente l’engagement des magistrats de remplir leurs missions de manière exemplaire et de respecter les règles morales et juridiques.
Bien au-delà d’une simple formalité, la prestation de serment constitue un événement unique dans la carrière du magistrat (sauf en cas de réintégration), marquant symboliquement la fin de sa période de formation et le début de sa carrière.
● Le serment prêté par les auditeurs de justice est inscrit à l’article 20 de l’ordonnance statutaire qui prévoit que ces derniers, préalablement à toute activité, prêtent serment devant les cours d’appel en ces termes : « Je jure de garder religieusement le secret professionnel et de me conduire en tout comme un digne et loyal auditeur de justice ».
Contrairement aux États-Unis, où les futurs magistrats invoquent l’aide de Dieu durant leur serment, il s’agit d’un serment laïc, et non d’un serment religieusement prêté. Les magistrats français ne prêtent d’ailleurs pas serment sur la Bible ou tout autre texte religieux.
Signifiant, en l’espèce, scrupuleusement, l’emploi de l’adverbe « religieusement » renvoie simplement à la dimension sacramentelle du serment.
2. L’harmonisation des termes du serment souhaitée par le Gouvernement
Alors que les tentatives de modification de la prestation de serment n’ont, jusqu’à présent, pas abouti (37), le Gouvernement souhaite, comme il l’a précisé lors des débats au Sénat, harmoniser le serment prêté par les magistrats de l’ordre judiciaire avec celui prononcé par les magistrats des juridictions financières.
En application de l’article L. 120-3 du code des juridictions financières, tout magistrat à la Cour des comptes, lors de sa nomination dans le corps, prête serment publiquement devant la Cour réunie en audience solennelle « de bien et fidèlement remplir ses fonctions, de garder le secret des délibérations et de se comporter en tout comme un digne et loyal magistrat ».
Votre rapporteure tient à souligner que la modification des termes du serment des magistrats de l’ordre judiciaire doit, par cohérence, également emporter la révision du serment prêté par les assesseurs, d’une part, et par les juges des tribunaux de commerce, d’autre part.
Il convient donc de prévoir dans le projet de loi ordinaire concomitamment examiné par l’Assemblée nationale de supprimer l’adverbe religieusement à l’article L. 251-5 du code de l’organisation judiciaire qui prévoit qu’« avant d’entrer en fonctions, les assesseurs titulaires et suppléants prêtent serment devant le tribunal de grande instance de bien et fidèlement remplir leurs fonctions et de garder religieusement le secret des délibérations », ainsi qu’à l’article
L. 722-7 du code commerce, qui dispose qu’avant d’entrer en fonctions, les juges des tribunaux de commerce prêtent le serment suivant : « Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder religieusement le secret des délibérations et de me conduire en tout comme un juge digne et loyal ».
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La Commission adopte l’article 9 bis sans modification.
Article 9 ter
(art. 6 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Lieu de prestation de serment d’un magistrat intégré et nommé dans une juridiction d’outre-mer
L’article 9 ter résulte d’un amendement présenté en séance publique par le sénateur M. Thani Mohamed Soilihi et le groupe Socialiste et républicain et adopté avec l’avis favorable de la commission des Lois et du Gouvernement.
Il a pour objet de compléter l’article 6 de l’ordonnance statutaire, afin permettre aux magistrats directement intégrés, nommés dans une juridiction d’outre-mer et effectuant leur stage préalable en métropole, de prêter serment devant la cour d’appel de leur lieu de résidence, alors qu’aujourd’hui, en vertu de l’article 6 de l’ordonnance statutaire, ils doivent le faire devant la cour d’appel de leur affectation.
Sont ici concernés les magistrats ayant fait l’objet d’une intégration directe dans le corps judiciaire au titre des articles 22 (38) (intégration directe aux fonctions du second grade de la hiérarchie judiciaire) et 23 (39) (intégration directe aux fonctions du premier grade de la hiérarchie judiciaire) de l’ordonnance statutaire de 1958.
PROCÉDURE D’INTÉGRATION DIRECTE AU TITRE DES ARTICLES 22
ET 23 DE L’ORDONNANCE STATUTAIRE
1) Instruction du dossier de candidature par le Parquet général de la cour d’appel du domicile du candidat : entretiens avec les chefs de cour et de juridiction qui rendent un avis sur la candidature, recueil des attestations auprès des personnes dont le nom a été donné par le candidat, enquête de moralité et demande d’extrait n° 2 du casier judiciaire.
2) Examen du dossier par la commission d’avancement et, le cas échéant, audition des candidats.
3) Si avis favorable de la commission d’avancement sur l’intégration directe du candidat, période probatoire comportant une semaine de formation théorique à l’ENM et un stage en juridiction.
4) Passage du candidat devant un jury, qui entend également le directur de l’ENM qui a rédigé un bilan du stage probatoire. Le jury rend un avis sur l’aptitude du candidat à exercer les fonctions judiciaires.
5) Examen par la commission d’avancement du dossier du candidat, qui a été complété avec les bilans de stage, l’avis du directeur de l’ENM et l’avis du jury. Avis définitif de la commission d’avancement, qui doit être motivé s’il est dévaforable.
6) Proposition de poste puis inscription à la transparence.
7) Avis du CSM puis décret de nomination du Président de la République.
Avant l’installation dans leurs fonctions, ces magistrats doivent effectuer une période de formation préalable de six mois, au début de laquelle ils prêtent leur serment de magistrat.
En vertu de l’article 6 de l’ordonnance statutaire, cette prestation de serment doit avoir lieu, comme pour tout magistrat (40), devant la cour d’appel d’affectation.
Cette disposition contraint les magistrats intégrés qui, nommés dans une juridiction d’outre-mer, résident et effectuent leur stage préalable en métropole, à effectuer un aller-retour outre-mer pour prêter serment avant de commencer leur stage, les frais ainsi occasionnés étant à la charge de la cour d’appel d’outre-mer.
Le présent article vise donc à remédier à cette situation, en prévoyant que la prestation de serment peut, dans ce cas précis, avoir lieu devant la cour d’appel du lieu de résidence du magistrat.
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La Commission adopte l’article 9 ter sans modification.
Article 9 quater (nouveau)
(art. 9 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Coordination
Introduit à l’initiative de M. Sergio Coronado, après un avis favorable du Gouvernement et un avis défavorable de votre rapporteure, cet article vise à prendre en compte, au sein de l’article 9 de l’ordonnance statutaire relatif aux incompatibilités applicables aux fonctions de magistrat, les modifications intervenues dans l’organisation territoriale de la République.
Il prévoit ainsi de tenir compte du changement de dénomination du conseiller général en conseiller départemental ainsi que de la création du mandat de conseiller de la métropole de Lyon.
Votre rapporteure s’interroge, en revanche, sur la suppression qu’il emporte de toute mention relative au conseiller général de Mayotte. Il est en effet expressément fait référence au conseil général du département de Mayotte à l’article L. 1711-1 du code général des collectivités territoriales.
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La Commission examine l’amendement CL21 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à actualiser les dispositions de l’ordonnance n° 58-1270 de 1958 afin de prendre en considération le changement d’appellation du conseil général en conseil départemental, la disparition de la collectivité unique de Mayotte et la création de la métropole de Lyon.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
Mme la rapporteure. Avis défavorable. Cet amendement supprime toute référence au conseil général de Mayotte, alors qu’il existe toujours.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement pense que cette référence n’a plus lieu d’être, dans la mesure où Mayotte est désormais un département d’outre-mer.
La Commission adopte l’amendement. L’article 9 quater est ainsi rédigé.
Article 10
(art. 12-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Évaluation des magistrats
Cet article a pour objet de modifier l’article 12-1 de l’ordonnance statutaire, afin de préciser le contenu de l’évaluation des magistrats et de tirer les conséquences de la possibilité, prévue par le présent projet de loi, de renouvellement des mandats des magistrats temporaires et des juges de proximité.
Introduit par la loi organique du 25 février 1992, l’article 12-1 de l’ordonnance statutaire pose le principe selon lequel l’activité professionnelle de chaque magistrat (41) est évaluée tous les deux ans et lors de chaque présentation à l’avancement.
Les magistrats exerçant à titre temporaire et les juges de proximité, qui sont soumis à quelques exceptions près au statut de la magistrature, font l’objet de l’évaluation biannuelle.
Les modalités de l’évaluation biannuelle sont les suivantes.
Précédée d’un entretien avec l’autorité hiérarchique, qui a pour objet de de dresser un état du service confié au magistrat et de décliner ses objectifs, l’évaluation repose sur une note écrite par laquelle l’autorité hiérarchique décrit les activités du magistrat, porte sur celui-ci une appréciation d’ordre général, énonce les fonctions auxquelles il est apte et définit, le cas échéant, ses besoins de formation. À cette note sont annexés une note rédigée par le magistrat décrivant ses activités et faisant état des formations qu’il a suivies ainsi que les observations de son ou ses supérieurs hiérarchiques et le résumé de l’entretien préalable avec l’autorité hiérarchique (42). L’évaluation s’appuie également sur une grille analytique standardisée, destinée à qualifier les aptitudes professionnelles du magistrat, qui visent autant les compétences juridiques et techniques que les capacités d’organisation et d’animation.
L’évaluation est communiquée au magistrat qui, pour la contester, peut saisir la commission d’avancement. Cette dernière, après avoir recueilli les observations du magistrat et celles de l’autorité qui a procédé à l’évaluation, émet un avis motivé versé au dossier du magistrat concerné.
L’article 10 du présent projet de loi prévoit tout d’abord, par cohérence avec les dispositions des articles 29 et 30 autorisant le renouvellement des mandats des juges de proximité et des magistrats exerçant à titre temporaire, une évaluation de ces derniers à l’occasion de leur demande de renouvellement de fonctions.
Il propose ensuite de préciser les modalités d’évaluation des magistrats, selon trois axes.
Le premier consiste à poser comme préalable à l’évaluation du magistrat la rédaction, par ce dernier, d’un bilan de son activité. Cette disposition revient à consacrer dans la loi organique la note que le magistrat doit aujourd’hui rédiger en vertu de l’article 20 du décret n° 93-21 et qui est annexée à son évaluation.
Le deuxième vise à inscrire dans l’ordonnance statutaire l’évaluation d’une aptitude propre aux chefs de juridiction : leur capacité à gérer et à animer une juridiction, qui figure aujourd’hui dans la grille analytique standardisée.
Le troisième prévoit la prise en compte, lors de l’évaluation, des conditions d’organisation et de fonctionnement du service dans lequel le magistrat exerce ses fonctions. Cette mise en perspective du bilan d’activité du magistrat à l’occasion de son évaluation, qui influence son avancement, apparaît d’autant plus justifiée qu’en matière disciplinaire, le Conseil d’État (43) et le CSM (44) tiennent compte, pour apprécier le dossier individuel qui leur est soumis, des facteurs extérieurs de dysfonctionnement que peuvent constituer la mauvaise organisation d’un service, une surcharge d’activité ou des moyens insuffisants.
Le Sénat a adopté cet article en y apportant une modification de coordination présentée comme destinée à tenir compte de la suppression de la juridiction de proximité à compter du 1er janvier 2017.
Il semble toutefois que la modification opérée ne remplisse pas complètement l’objectif affiché. En effet, il est fait référence, s’agissant des autorités d’évaluation des juges de proximité et des magistrats exerçant à titre temporaire, au président du TGI ou au magistrat du siège de ce tribunal chargé de l’administration du service du tribunal d’instance d’affectation sans davantage de précision, alors que la mention de ce dernier, qui concerne les seuls juges de proximité, n’aura plus de pertinence à compter de la suppression de la juridiction de proximité au 1er janvier 2017, date à partir de laquelle seul le président du TGI sera compétent.
À l’initiative de votre rapporteure, la commission des Lois a, par coordination avec la fusion du statut des magistrats à titre temporaire avec celui des juges de proximité qu’elle a adoptée aux articles 29 et 30 du projet de loi organique, apporté une modification rédactionnelle.
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La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL83 de la rapporteure et CL78 de M. Alain Tourret.
Mme la rapporteure. Cet amendement a pour objet de prendre en compte la suppression de la juridiction de proximité qui doit intervenir à compter du 1er janvier 2017, conformément à la loi du 29 décembre 2014 relative aux juridictions de proximité, ainsi que l’intégration des juges de proximité dans le statut des magistrats à titre temporaire proposée par le Gouvernement.
Il supprime les mentions relatives au juge de proximité qui figurent à l’article 10, pour ne plus faire référence qu’aux magistrats à titre temporaire.
M. Alain Tourret. Mon amendement CL78 poursuit le même objet.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement CL83.
En conséquence, l’amendement CL78 tombe.
La Commission adopte alors l’article 10 modifié.
Article 11
(art. 13 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Assouplissement de l’obligation de résidence des magistrats
Le présent article a pour objet d’assouplir les règles relatives à l’obligation de résidence des magistrats.
Actuellement, en application de l’article 13 de l’ordonnance statutaire, les magistrats doivent résider dans le siège de la juridiction à laquelle ils appartiennent ou sont rattachés. Des dérogations exceptionnelles, à caractère individuel et provisoire, peuvent toutefois être accordées, sur avis favorable des chefs de cour, par le ministre de la Justice.
La circulaire ministérielle du 13 octobre 2014 relative aux dérogations à l’obligation de résidence précise que le siège de la juridiction s’entend comme la commune sur laquelle est située la juridiction, à l’exclusion des communes limitrophes.
Elle rappelle, par ailleurs, que, si le garde des Sceaux est lié par l’avis défavorable du chef de cour, il n’en est pas de même s’agissant de l’avis favorable de ce dernier, le ministre de la Justice disposant alors d’un pouvoir discrétionnaire, qui trouve sa justification dans la nécessité d’éviter de trop grandes disparités d’application entre les cours.
Dans la circulaire précitée, le garde des Sceaux précise, en outre, que les critères retenus pour accorder les dérogations reposent, à titre principal, sur une donnée géographique (45) et, à titre subsidiaire, sur le temps de trajet entre la résidence et le siège de la juridiction.
Chaque année, environ cinq cents dispenses individuelles sont accordées par le garde des Sceaux après avis favorable des chefs de cour.
Le présent article propose d’assouplir le dispositif actuel de deux manières.
Il étend tout d’abord l’obligation de résidence au ressort de la juridiction d’affectation ou dans le ressort d’un tribunal de grande instance limitrophe (46), compte tenu du développement des moyens de transport et de communication depuis l’adoption de l’article 13 de l’ordonnance statutaire en 1958. Lors de son audition, la Conférence nationale des procureurs généraux a toutefois souligné le risque que présente une telle extension géographique pour les magistrats en poste dans les cours d’appel, ces derniers devenant des « magistrats dans les trains ».
Il prévoit ensuite que les dérogations exceptionnelles peuvent être accordées par le ministre de la Justice après un avis simple des chefs de cour. Il s’agit, ainsi, de centraliser et d’harmoniser davantage le traitement des demandes.
Considérant que cette dernière disposition priverait les chefs de cour de leur pouvoir d’appréciation sur les demandes de dérogation au regard des nécessités du service, alors que ces derniers sont l’autorité la plus qualifiée pour en apprécier l’opportunité, le Sénat a, sur proposition de sa commission des Lois, confirmé la nécessité d’un avis favorable des chefs de cour.
À l’initiative de M. Sergio Coronado et suivant l’avis favorable du Gouvernement et de la rapporteure, votre commission des Lois est revenue au principe d’un avis simple des chefs de cour s’agissant des dérogations pouvant être accordées par le ministre de la Justice.
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La Commission se saisit de l’amendement CL14 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à rétablir une disposition figurant dans le texte initial, et supprimée par la commission des Lois du Sénat.
Il prévoit d’établir la possibilité, pour le garde des Sceaux, d’accorder une dérogation à l’obligation de résidence, après avis simple des chefs de cour. Ce rétablissement permettrait une harmonisation au niveau national des règles applicables aux dérogations, tout en conservant un avis permettant de prendre en compte les situations locales.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement ne peut qu’être sensible à votre volonté de revenir au texte qu’il avait proposé.
Mme la rapporteure. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte alors l’article 11 modifié.
Article 11 bis
(art. 27 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Coordination liée à la modification des procédures suivies devant la commission d’avancement
Introduit au Sénat à l’initiative de M. Thani Mohamed Soilihi, cet article tire les conséquences sur l’article 27 de l’ordonnance statutaire des dispositions introduites, par l’article 15 du présent projet de loi, à l’article 36 de l’ordonnance statutaire, afin d’alléger les procédures devant la commission d’avancement.
Le présent article propose ainsi de supprimer la disposition de l’article 27 selon laquelle les magistrats qui n’ont pas été inscrits sur les listes de présentation en vue de l’inscription au tableau d’avancement peuvent adresser au ministre de la Justice une demande à fin d’inscription.
Cette disposition s’avère en effet inutile, dès lors que l’article 15 du présent projet de loi prévoit d’inscrire à l’article 36 de l’ordonnance statutaire le principe d’une saisine directe, par les magistrats « non présentés » de la commission d’avancement, comme c’est d’ailleurs déjà prévu par l’article 24 du décret statutaire du 7 janvier 1993 (47).
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La Commission adopte l’article 11 bis sans modification.
Article 12
(art. 27-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Extension du principe de diffusion des projets de nomination aux fonctions de substitut chargé du secrétariat général d’une juridiction
Le présent article a pour objet d’étendre aux projets de nomination aux fonctions de substitut chargé du secrétariat général d’une juridiction l’application du dispositif dit de « transparence », en vertu duquel le projet de nomination à une fonction est transmis aux magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature, ce dernier étant également destinataire de la liste des candidats à cette fonction.
En application de l’article 27-1 de l’ordonnance statutaire, le projet de nomination à une fonction du premier ou du second grade et la liste des candidats à cette fonction sont communiqués, pour les postes du siège ou pour ceux du parquet, à la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature.
Le projet de nomination est également adressé aux chefs de la Cour de cassation, aux chefs des cours d’appel et des tribunaux supérieurs d’appel, à l’inspecteur général des services judiciaires ainsi qu’aux directeurs et chefs de l’administration centrale du ministère de la justice, qui sont chargés d’en assurer la diffusion auprès des magistrats. Ce document est, par ailleurs, communiqué aux syndicats et organisations professionnelles et, sur leur demande, aux magistrats placés dans une autre position que celle de l’activité.
Ce dispositif autorise les candidats à une fonction à faire part au garde des Sceaux et au CSM de leurs observations sur les projets de nomination. Il contribue à améliorer la transparence du processus de nomination et favorise l’égalité de traitement des magistrats.
Toutefois, l’article 27-1 exclut du bénéfice de ce dispositif les projets de nomination :
– aux fonctions de substitut chargé du secrétariat général d’une juridiction ;
– des auditeurs de justice dans leurs premières fonctions de magistrat ;
– consécutifs à une sanction disciplinaire.
S’il apparaît justifié d’exclure de cette procédure les deux derniers cas (48), il n’en va pas de même s’agissant des fonctions de substitut chargé du secrétariat général d’une juridiction.
À cet égard, il convient de souligner que la circulaire ministérielle du 31 juillet 2012 (49) avait soumis au dispositif de la transparence les fonctions de substitut chargé du secrétariat général d’une juridiction mais également celles de procureur général et de magistrat du parquet général à la Cour de cassation, d’inspecteur général et d’inspecteur général adjoint des services judiciaires et de procureur général près une cour d’appel.
Le présent article propose donc d’inscrire dans la loi organique une pratique aujourd’hui définie au niveau réglementaire pour les fonctions de substitut chargé du secrétariat général d’une juridiction. Circonscrit aux seules fonctions du second et du premier grade, il trouve son complément, pour les fonctions hors hiérarchie, à l’article 17 du présent projet de loi.
Par coordination avec l’article 22 du présent projet de loi, qui consacre le principe de la liberté syndicale, le présent article propose enfin une modification rédactionnelle afin de supprimer la notion « d’organisations professionnelles », pour ne retenir que celle de « syndicats représentatifs de magistrats ».
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La Commission examine l’amendement CL42 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Cet amendement procède, comme plusieurs autres à venir, aux coordinations nécessaires du fait de la création de l’inspection générale de la justice.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 12 modifié.
Article 13
(art. 28 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Modalités de nomination des magistrats du second et du premier grade pour exercer les fonctions d’inspecteur des services judiciaires
Par cohérence avec la réforme statutaire proposée par les articles 1er, 2 et 18 du projet de loi pour les magistrats exerçant des fonctions d’inspection, le présent article complète l’article 28 de l’ordonnance statutaire de 1958, afin de préciser que les magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur des services judiciaires sont nommés dans les mêmes conditions que les magistrats du parquet.
Aujourd’hui, il n’est pas fait mention des modalités de nomination des magistrats chargés des fonctions d’inspection dans l’ordonnance statutaire.
Leurs modalités de nomination résultent de la lecture combinée de l’article 5 du décret du décret du 7 janvier 1993 pris pour l’application de l’ordonnance statutaire, qui précise que les inspecteurs des services judiciaires sont « affectés à l’administration centrale » – dont on déduit qu’ils sont assimilés aux magistrats du cadre de l’administration centrale –, et de l’article 28 de l’ordonnance statutaire, qui dispose que les règles de nomination des magistrats du parquet s’appliquent à ceux du cadre de l’administration centrale du ministère.
Il en résulte la pratique selon laquelle les magistrats concernés (50) sont nommés aux fonctions d’inspecteurs des services judiciaires par décret du Président de la République, pris sur proposition du ministre de la Justice, après un avis simple de la formation parquet du Conseil supérieur de la magistrature.
Afin de lever toute ambiguïté quant aux règles de nomination aux fonctions d’inspecteur des services judiciaires, l’article 13 du présent projet de loi propose d’inscrire dans l’ordonnance statutaire de 1958 que les nominations des magistrats concernés suivent les mêmes règles que celle des magistrats du parquet, à savoir, donc, une nomination par décret du Président de la République, pris sur proposition du ministre de la Justice, après avis de la formation parquet du Conseil supérieur de la magistrature.
La clarification des règles de nomination proposée par le présent article s’inscrit dans la logique des préconisations du Conseil supérieur de la magistrature et du Conseil d’État.
Le premier a en effet considéré, dans son avis adressé au Président de la République le 2 octobre 2003 et dans son rapport annuel 2003-2004, que les conditions de nomination et d’emploi des membres de l’inspection générale des services judiciaires devaient être modifiées pour garantir leur indépendance.
Le second, saisi par le garde des Sceaux au sujet du projet de création d’une inspection générale unique du ministère alors envisagé, a souligné, dans son avis n° 382.293 du 19 février 2009, qu’il convenait de prévoir des garanties relatives à la composition et au mode d’intervention de cette inspection, propres à assurer le respect de l’indépendance de ses membres (règles de nomination, conditions de durée, de cessation et de renouvellement des fonctions) (51).
Votre rapporteure est favorable à cette évolution, qui va dans le sens d’une plus grande indépendance des magistrats exerçant une mission d’inspection.
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La Commission est saisie de l’amendement CL43 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Même coordination que précédemment.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 13 modifié.
Article 14
(art. 28-4 (nouveau) de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Nomination aux fonctions de juge des libertés et de la détention
Cet article a pour objet de préciser les conditions de nomination aux fonctions de juge des libertés et de la détention (JLD).
Actuellement, ce juge, non spécialisé, est désigné par le président du tribunal de grande instance (52), après avis de l’assemblée générale des magistrats du siège (53), parmi ceux ayant rang de président, premier vice-président ou vice-président.
Il est en outre prévu qu’en cas d’empêchement du juge des libertés et de la détention désigné, du président, des premiers vice-présidents et des vice-présidents, celui-ci est remplacé par le magistrat du siège le plus ancien dans le grade le plus élevé, désigné par le président du tribunal de grande instance (54).
Par ailleurs, le JLD peut se voir déchargé de ses fonctions sur simple décision du président du TGI.
1. La volonté du Gouvernement de créer une nouvelle fonction spécialisée, pour affermir les garanties entourant l’exercice des missions du juge des libertés et de la détention
Dans sa version initiale, l’article 14 du présent projet de loi organique propose de compléter l’article 28-3 de l’ordonnance statutaire qui régit les fonctions spécialisées (55), afin d’y inclure celle de juge des libertés et de la détention (56).
L’objectif est de revaloriser la fonction de JLD et de conférer à ce « garant de la liberté individuelle » les assurances nécessaires à l’exercice de ses responsabilités, alors que celles-ci n’ont cessé de croître depuis la création de la fonction en 2000 (57).
Le renforcement des prérogatives du juge des libertés et de la détention, qui s’est encore confirmé avec la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France qui lui confère une nouvelle compétence en matière de décision de placement en rétention, devrait d’ailleurs connaître une nouvelle étape, avec l’adoption du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale, qui, après une première lecture à l’Assemblée nationale et au Sénat, devrait être prochainement examiné en commission mixte paritaire (58). Ce projet de loi prévoit en effet que le JLD autorise :
– les perquisitions de nuit dans les locaux d’habitation dans le cadre des enquêtes préliminaires et de l’instruction en matière de terrorisme ;
– le recours à l’« IMSI catcher » dans le cadre de l’enquête préliminaire et sur requête du procureur de la République ; en cas d’urgence, il lui revient de confirmer, dans les 24 heures, la décision prise, en la matière, par le procureur de la République ;
– la sonorisation, la fixation d’images et la captation de données informatiques lors de la phase d’enquête, sur requête du procureur de la République, ainsi que l’introduction dans un véhicule ou un lieu privé pour l’installation de ce matériel.
Afin d’apporter au JLD les garanties nécessaires à l’exercice de ses responsabilités et de revaloriser cette fonction souvent considérée comme peu attractive, le Gouvernement propose de lui conférer le statut de juge spécialisé, ce qui emporte les conséquences suivantes :
– une nomination par décret du Président de la République, pris sur proposition du garde des Sceaux, après avis conforme de la formation du siège du Conseil supérieur de la magistrature ; cette procédure présenterait l’avantage, d’une part, de prévenir tout changement d’affectation arbitraire et toute tentative d’intervention et, d’autre part, de transformer cette fonction souvent « subie » en une fonction « choisie », puisque seuls les magistrats ayant postulé pourraient se la voir attribuer ;
– une limitation de l’exercice de cette fonction dans une même juridiction à dix ans ;
– l’attribution de la prime forfaitaire prévue pour les fonctions spécialisées dans un tribunal de grande instance, ce qui devrait en renforcer l’attractivité. Le coût total est estimé, par le ministère de la Justice, à 167 000 euros en année pleine.
La modification proposée trouve son prolongement dans l’article 11 de la version initiale du projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du XXIème siècle, qui supprime les dispositions actuelles du code de procédure pénale relatives au mode de nomination du JLD et prévoit que ce dernier peut être suppléé en cas de vacance d’emploi, d’absence ou d’empêchement, ou remplacé provisoirement par un magistrat du siège désigné par le président du tribunal de grande instance.
2. Le choix du Sénat en faveur d’un dispositif plus souple
Craignant que la réforme proposée conduise à rigidifier excessivement le fonctionnement des juridictions et contribue à amoindrir encore l’attractivité de la fonction de juge des libertés et de la détention, le Sénat en a, sur proposition de sa commission des Lois et contre l’avis du Gouvernement, profondément modifié les modalités.
Refusant de faire du juge des libertés et de la détention un juge spécialisé, il a préféré maintenir le principe d’une désignation de ce dernier par le président du tribunal de grande instance, parmi les magistrats du siège du premier grade (59), mais a transformé l’avis simple de l’assemblée générale des magistrats du siège en avis conforme. Le Sénat a ainsi estimé protéger l’exercice de cette fonction, tout en évitant les rigidités entraînées par une nomination par décret.
Il a par ailleurs choisi d’inscrire dans l’ordonnance statutaire les cas dans lesquels le juge des libertés et de la détention désigné peut être suppléé (vacance d’emploi, absence ou empêchement et organisation du service de fin de semaine ou du service allégé pendant l’été), renvoyant à la loi ordinaire la détermination des modalités pratiques de mise en œuvre.
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Les auditions menées par votre rapporteure ont montré le clivage existant sur cette réforme. Les syndicats de magistrats soutiennent le projet du Gouvernement, tandis que les organisations représentatives des présidents de juridiction craignent les rigidités qu’il pourrait engendrer, en particulier dans les petites juridictions.
À cet égard, votre rapporteure tient à souligner que, s’il est vrai que l’affectation d’un magistrat dans une fonction spécialisée limitera les marges d’organisation du président de la juridiction, le juge des libertés et de la détention pourra, comme les autres juges spécialisés, se voir confier par le président du tribunal d’autres activités juridictionnelles. Par ailleurs, les dispositions relatives aux cas de vacance d’emploi initialement prévues à l’article 11 du projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du XXIème siècle ont pour objet de garantir la souplesse nécessaire dans la répartition des services. En l’absence de nomination d’un juge des libertés et de la détention dans une juridiction, le service pourra en effet être exercé par tout autre magistrat du siège de cette juridiction.
Votre rapporteure considère, en outre, que les dispositions introduites par le Sénat au sujet de l’organisation des juridictions ne relèvent pas de la loi organique, mais de la loi ordinaire.
Elle estime, enfin, que l’accroissement continu des compétences du juge des libertés et de la détention, en particulier en matière pénale, justifie que les garanties entourant l’exercice de cette fonction essentielle soient assurées, non pas par un avis conforme de l’assemblée générale des magistrats du siège comme le propose le Sénat, mais bien par la reconnaissance d’une fonction spécialisée, avec les conséquences qu’elle emporte en termes de nomination et de rémunération.
Aussi, à l’initiative de votre rapporteure ainsi que du groupe Socialiste, républicain et citoyen et de M. Sergio Coronado, la commission des Lois a rétabli la réforme du statut du juge des libertés et de la détention dans sa version initialement proposée par le Gouvernement.
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La Commission examine les amendements identiques CL84 de la rapporteure, CL10 de M. Sergio Coronado et CL72 rectifié de M. Yves Goasdoué.
Mme la rapporteure. L’amendement CL84 a pour objet de rétablir la rédaction initiale de l’article 14, afin d’inscrire la fonction de juge des libertés et de la détention (JLD) parmi les fonctions spécialisées.
Afin d’apporter au JLD les garanties nécessaires à l’exercice de ses responsabilités, qui sont croissantes, et de revaloriser cette fonction souvent considérée comme peu attractive, il est en effet proposé de lui conférer le statut de juge spécialisé, ce qui emporte les conséquences suivantes. Tout d’abord, une nomination par décret du Président de la République, pris sur proposition du garde des Sceaux, après avis conforme de la formation du siège du Conseil supérieur de la magistrature. Cette procédure présente l’avantage, d’une part, de prévenir tout changement d’affectation arbitraire et toute tentative d’intervention et, d’autre part, de transformer cette fonction souvent subie en une fonction choisie, puisque seuls les magistrats ayant postulé pourraient se la voir attribuer.
Ensuite, une limitation de l’exercice de cette fonction dans une même juridiction à dix ans est prévue.
Enfin, la troisième et dernière conséquence est l’attribution de la prime forfaitaire pour les fonctions spécialisées dans un tribunal de grande instance, ce qui devrait renforcer l’attractivité de la fonction de JLD.
Le coût total de cette réforme est estimé, par le ministère de la justice, à 167 000 euros en année pleine.
M. Sergio Coronado. L’amendement CL10 est défendu.
M. Yves Goasdoué. L’amendement CL72 rectifié est défendu.
M. Alain Tourret. Une ancienneté est-elle requise pour être nommé à ce poste ?
Mme la rapporteure. Le critère d’ancienneté est bien pris en compte dans le cadre des dispositions relatives au remplacement du JLD.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable. Depuis la création du juge de liberté et de la détention il y a seize ans, on ne cesse de lui attribuer des compétences, encore très récemment dans le projet de loi relatif au droit des étrangers en France.
Je précise à l’intention de M. Tourret que le projet de loi ordinaire prévoit des dispositions de coordination pour s’assurer que les nominations concernent des magistrats expérimentés, de premier grade.
La Commission adopte ces amendements et l’article 14 est ainsi rédigé.
Article 14 bis (nouveau)
(art. 28-3 et 31 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Règles d’affectation des magistrats à la suite de la suppression d’une juridiction ou d’une fonction
Introduit à l’initiative du Gouvernement avec l’avis favorable de votre rapporteure, cet article précise les règles d’affectation des magistrats en cas de suppression d’une juridiction ou d’une fonction.
Pour ce qui concerne les suppressions de juridiction – déjà visées à l’article 31 de l’ordonnance statutaire – , le nouvel article prévoit que les demandes d’affectation présentées par les magistrats, si elles portent sur des fonctions différentes de celles précédemment exercées, ne peuvent concerner exclusivement des emplois de premier grade de la hiérarchie judiciaire comportant un huitième échelon, cette restriction étant déjà posée pour les emplois de chef de juridiction. Cette précision concerne tant les magistrats du siège que ceux du parquet.
S’agissant ensuite des suppressions de fonction, il introduit, à l’article 31 de l’ordonnance statutaire, un nouveau dispositif destiné à garantir les droits des magistrats du siège. Il prévoit ainsi que les magistrats du siège dont la fonction est supprimée font connaître au ministre de la justice s’ils demandent leur affectation dans la même fonction ou dans la ou l’une des juridictions qui seront compétentes dans tout ou partie du contentieux et du ressort de la juridiction où la fonction a été supprimée. Ils peuvent également demander à être déchargés de cette fonction afin d’exercer les fonctions de magistrat du siège au sein de la juridiction où ils sont affectés.
À défaut, les magistrats du siège précisent les trois affectations qu’ils désireraient recevoir à niveau hiérarchique égal dans la ou l’une des juridictions qui seront compétentes dans tout ou partie du contentieux et du ressort de la juridiction où la fonction est supprimée, ou dans la juridiction où ils exercent.
S’ils n’ont pas exprimé de demande d’affectation, ces magistrats sont déchargés de la fonction supprimée afin d’exercer les fonctions de magistrat du siège au sein de la juridiction où ils sont affectés.
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La Commission examine l’amendement CL30 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Cet amendement a pour objet de procéder à des adaptations des règles d’affectation des magistrats en cas de suppression d’une fonction dans une juridiction.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement. L’article 14 bis est ainsi rédigé.
Article 15
(art. 34 et 36 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Allègement des procédures suivies devant la commission d’avancement
Cet article propose qu’après une première inscription des magistrats au tableau d’avancement, leur réinscription soit de droit dès lors qu’elle est proposée par leur autorité d’évaluation. Il s’agit ainsi de simplifier les procédures et d’alléger la tâche de la commission d’avancement (60).
Comme rappelé par votre rapporteure dans son commentaire de l’article 2, le passage du second au premier grade de la hiérarchie judiciaire, accessible après sept ans d’ancienneté dans le corps, est subordonné à l’inscription à un tableau d’avancement, qui relève de la compétence exclusive de la commission d’avancement.
La procédure, précisée par le décret n° 93-21 précité, est la suivante. Les autorités évaluatrices inscrivent, par ordre de mérite, sur des listes dites « de présentation », les magistrats qu’elles souhaitent proposer à l’avancement. Ces listes doivent être transmises avant le 1er février au ministre de la Justice, accompagnées de l’évaluation de chaque magistrat présenté. La liste alphabétique des magistrats présentés est diffusée dans la première quinzaine du mois de février, de telle sorte que les magistrats « non présentés » puissent adresser, avant le 15 mars, à la commission d’avancement une demande d’inscription au tableau d’avancement.
La commission d’avancement statue, au cours du mois de juin, sur les listes de présentation et les demandes d’inscription directe. Elle examine, à cette occasion, la valeur professionnelle et les aptitudes des magistrats concernés, avant de statuer sur leur inscription au tableau. Elle n’est pas liée par le fait que le magistrat ait été présenté par son autorité évaluatrice, ni par le fait que le magistrat ait déjà été inscrit au tableau d’avancement. Elle arrête, avant le 1er juillet, le tableau d’avancement, qui est publié au Journal officiel. Il est valable jusqu’à la date de publication du tableau établi l’année suivante.
Alors qu’aujourd’hui, l’inscription au tableau d’avancement doit être renouvelée chaque année jusqu’à l’obtention d’un poste au premier grade, le présente article propose, dans un souci de simplification, que le renouvellement de de l’inscription soit de droit dès lors que celle-ci est sollicitée par l’autorité chargée de proposer l’inscription. Il convient à cet égard de souligner que, dans son rapport d’activité 2014-2015, la commission avait jugé que « les magistrats remplissant les conditions statutaires ont vocation à être inscrits au tableau, à moins d’une réserve particulière ».
Le présent article propose par ailleurs de supprimer, aux articles 34 et 36 de l’ordonnance statutaire, des références aux listes d’aptitude et au règlement, qui n’ont plus lieu d’être.
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La Commission adopte l’article 15 sans modification.
Article 16
(art. 37 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Obligation de rapport d’installation et de bilan d’activité pour les premiers présidents de cour d’appel
Le présent article a pour objet d’introduire, dans l’ordonnance statutaire, un dispositif d’évaluation des premiers présidents de cour d’appel. Une disposition « miroir » est prévue pour les procureurs généraux près les cours d’appel à l’article 19 du présent projet de loi.
Par exception aux dispositions de l’article 12-1 de l’ordonnance statutaire qui prévoient que l’activité professionnelle de chaque magistrat fait l’objet d’une évaluation tous les deux ans, les premiers présidents de cour d’appel – ainsi que les procureurs généraux des cours d’appel et les magistrats hors hiérarchie de la Cour de cassation – ne font actuellement l’objet d’aucune évaluation, en application de l’article 39 de l’ordonnance statutaire.
Une telle exception, validée par le Conseil constitutionnel compte tenu de la « spécificité des fonctions des personnes en cause » (61), constitue une source de difficulté lorsqu’il convient de procéder aux nominations aux fonctions de premiers présidents de cour d’appel. Dans son avis du 2 octobre 2003, intitulé « Contribution à la réflexion sur la déontologie des magistrats », le Conseil supérieur de la magistrature relève ainsi que « l’absence de l’évaluation de l’activité et des aptitudes de ces magistrats, lorsqu’ils se portent candidats à de nouvelles fonctions, est susceptible d’affecter la pertinence des décisions de nomination les concernant ».
Afin d’améliorer les conditions de nomination des présidents de cour d’appel, le Gouvernement propose que ces derniers rédigent, d’une part, dans les six mois suivant leur prise de fonction, un rapport d’installation définissant les objectifs de leur action et, d’autre part, tous les deux ans, un bilan de leurs activités. Ces documents seraient versés au dossier de ces magistrats pour permettre d’apprécier leurs capacités professionnelles lorsqu’ils se présenteraient à de nouvelles fonctions.
Votre rapporteure souligne que le dispositif proposé constitue un « embryon » d’évaluation, le Gouvernement ayant écarté l’option d’une véritable évaluation, reposant sur des objectifs définis par une autorité tierce, par ailleurs chargée d’en apprécier la mise en œuvre.
Elle note par ailleurs qu’aucun dispositif d’évaluation ne demeure prévu pour les magistrats hors hiérarchie de la Cour de cassation. Un tel dispositif irait pourtant dans le sens d’une plus grande égalité entre les magistrats et d’une amélioration du système judiciaire.
Dans sa version transmise au Conseil d’État, le projet de loi organique prévoyait de soumettre ces magistrats au processus d’évaluation, le Premier président de la Cour de cassation serait alors compétent pour les magistrats du siège et le Procureur général près ladite Cour pour les magistrats du parquet.
Toutefois, dans son avis du 9 juillet 2015, le Conseil d’État a écarté cette disposition au motif que :
– une telle évaluation serait « peu opérante dès lors que la plupart de ces magistrats arrivent au terme de leur carrière et ne sont donc plus candidats à une promotion, […] inappropriée et sans précédent pour une juridiction suprême » ;
– la rédaction proposée conduirait à permettre à un magistrat du siège ou du parquet général de la Cour de cassation qui serait insatisfait de son évaluation d’exercer contre une décision d’un chef de cette Cour un recours devant la commission d’avancement présidée par le président de chambre doyen de cette même Cour ;
– elle aboutirait par ailleurs à ce que soient évalués par les chefs de la Cour de cassation les magistrats du siège et du parquet de cette Cour qui siègent au sein de chacune des deux formations du CSM et qui sont respectivement appelés à présider chacune de ces formations en cas d’empêchement, selon le cas, du Premier président ou du Procureur général.
Néanmoins, le Conseil d’État a considéré comme possible la pratique d’entretiens professionnels avec, selon le cas, le Premier président pour les magistrats du siège ou le Procureur général pour les magistrats du parquet, afin d’évoquer l’activité professionnelle de chaque magistrat.
Afin d’apporter davantage d’objectivité dans la procédure proposée à l’article 16, le Sénat a souhaité, sur proposition de sa commission des Lois, prévoir un contrôle extérieur au premier président de cour d’appel, en précisant que l’inspection générale des services judiciaires réalise régulièrement une enquête sur le fonctionnement des cours d’appel, les éléments de cette enquête étant versés au dossier des magistrats concernés.
Outre une modification rédactionnelle, votre commission des Lois a, à l’initiative de votre rapporteure et suivant l’avis favorable du Gouvernement, supprimé le contrôle de l’inspection générale introduit par le Sénat.
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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL85 de la rapporteure.
Elle passe ensuite à l’amendement CL86 du même auteur.
Mme la rapporteure. Cet amendement vise à supprimer la référence à l’enquête réalisée par l’inspection générale des services judiciaires sur le fonctionnement de la cour d’appel.
Cette disposition introduite par le Sénat est en effet malvenue. Confier à ce service rattaché au ministre de la justice qui, en l’état actuel, n’est pas composé de chefs de cour d’appel, exception faite de l’inspecteur général, la mission de procéder à des enquêtes tenant lieu d’évaluation des chefs de cour d’appel, en particulier des premiers présidents, paraît contraire au principe d’indépendance.
En outre, cet ajout apparaît inutile, les dispositions prévoyant déjà que le premier président définit ses objectifs notamment au regard des rapports sur l’état de fonctionnement de sa cour qui ont pu être établis par l’inspection.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 16 modifié.
Article 17
(art. 37-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Extension du principe de diffusion des projets de nomination
à l’ensemble des fonctions hors hiérarchie
Complément de l’article 12 du présent projet de loi, le présent article a pour objet d’étendre à l’ensemble des fonctions hors hiérarchie l’application du dispositif dit de « transparence », en vertu duquel le projet de nomination à une fonction est transmis aux magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature, ce dernier étant également destinataire de la liste des candidats à cette fonction.
En application de l’article 37-1 de l’ordonnance statutaire, qui renvoie lui-même à la procédure fixée à l’article 27-1 de l’ordonnance, les projets de nomination à certaines fonctions hors hiérarchie et les listes de candidats à ces fonctions sont communiqués à la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature.
Les projets de nomination sont également adressés aux chefs de la Cour de cassation, aux chefs des cours d’appel et des tribunaux supérieurs d’appel, à l’inspecteur général des services judiciaires ainsi qu’aux directeurs et chefs de l’administration centrale du ministère de la justice, qui sont chargés d’en assurer la diffusion auprès des magistrats. Ces documents sont, par ailleurs, communiqués aux syndicats et, sur leur demande, aux magistrats placés dans une autre position que celle de l’activité.
Ce dispositif, qui contribue à améliorer la transparence du processus de nomination et à favoriser l’égalité de traitement des magistrats, s’applique aux fonctions hors hiérarchie, à l’exception de celles :
– pour lesquelles le CSM formule une proposition, c’est-à-dire les fonctions de magistrat du siège les plus élevées dans la hiérarchie ;
– d’inspecteur général et d’inspecteur général adjoint des services judiciaires ;
– de magistrat du parquet de la Cour de cassation et de procureur général près une cour d’appel.
Dans sa version initiale, le présent article proposait de supprimer ces dérogations, à l’exception toutefois de celle relative aux fonctions d’inspecteur général des services judiciaires, au motif que la désignation de ce dernier, « placé auprès du garde des sceaux, ministre de la justice » (62) était empreinte d’intuitu personae.
Votre rapporteure note que la circulaire ministérielle du 31 juillet 2012 (63) prévoyait de soumettre au dispositif de la transparence les fonctions de procureur général et de magistrat du parquet général à la Cour de cassation, de procureur général près une cour d’appel, d’inspecteur général adjoint des services judiciaires mais également celle d’inspecteur général des services judiciaires.
Sur proposition de sa commission des Lois, le Sénat a décidé de supprimer la dernière dérogation qui était prévue et, par conséquent, d’appliquer la procédure de la transparence à l’ensemble des fonctions hors hiérarchie.
Au-delà des modifications rédactionnelles destinées à prendre en compte la création de l’inspection générale de la justice, votre commission des Lois est, à l’initiative du Gouvernement, revenue sur la modification introduite par le Sénat, considérant ainsi que le mode de désignation de l’inspecteur général justifiait qu’il échappât à la procédure de transparence.
À cet égard, si votre rapporteure n’était pas convaincue, en première analyse, par l’exception ainsi posée au dispositif de la transparence pour l’inspecteur général, elle s’est finalement rangée à la position du Gouvernement.
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La Commission est saisie de l’amendement CL44 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Cet amendement vise à rétablir le texte initial, en tenant compte néanmoins de la création de l’inspection générale de la justice. Il convient de ne pas soumettre statutairement la nomination aux fonctions d’inspecteur général, chef de l’inspection générale, à la procédure de transparence. Cette exception est justifiée par le fait que ce dernier n’est pas un magistrat en position de jugement : il exerce une fonction auprès du garde des Sceaux.
Mme la rapporteure. Dans un premier temps, j’envisageais de m’en remettre à la sagesse de la commission. Je ne saisissais pas ce qui pouvait justifier de soumettre la nomination de l’inspecteur général adjoint à la procédure de transparence et d’en dispenser l’inspecteur général. En outre, cette procédure ne me semblait pas faire obstacle à un travail en confiance avec le ministre de la justice. Au contraire, elle me paraissait intéressante pour l’ensemble de l’inspection générale. Cela étant, au bénéfice de vos explications, monsieur le garde des Sceaux, j’émets un avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 17 modifié.
Article 18
(art. 38 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Modalités de nomination des magistrats placés hors hiérarchie pour exercer les fonctions d’inspecteur général et d’inspecteur général adjoint des services judiciaires
Par cohérence avec la réforme statutaire proposée par les articles 1er, 2 et 13 du projet de loi pour les magistrats exerçant des fonctions d’inspection, le présent article complète l’article 38 de l’ordonnance statutaire de 1958, afin de préciser que les magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général et d’inspecteur général adjoint des services judiciaires sont nommés dans les mêmes conditions que les magistrats du parquet placés hors hiérarchie.
Aujourd’hui, il n’est pas fait mention des modalités de nomination des magistrats chargés des fonctions d’inspection dans l’ordonnance statutaire.
Les inspecteurs généraux adjoints se voient appliquer les mêmes règles que les inspecteurs (64). La pratique résultant de la lecture combinée de l’article 5 du décret du 7 janvier 1993 et de l’article 28 de l’ordonnance statutaire conduit à ce que les magistrats concernés (65) soient nommés aux fonctions d’inspecteurs généraux adjoints des services judiciaires par décret du Président de la République, pris sur proposition du ministre de la Justice, après avis de la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente pour les magistrats du parquet.
S’agissant de l’inspecteur général des services judiciaires (66), il était d’usage, jusqu’en 2012, qu’il fût procédé à sa nomination sans saisine préalable du Conseil supérieur de la magistrature, à l’instar du mode de nomination des procureurs généraux près les cours d’appel jusqu’à la modification de l’article 65 de la Constitution issue de la révision constitutionnelle de 2008. Mais, en janvier 2012, la nomination de l’inspecteur général des services judiciaires a, pour la première fois, été précédée d’une saisine du Conseil supérieur de la magistrature pour avis. Cette procédure a été renouvelée à l’occasion de la nomination du nouvel inspecteur général le 21 octobre 2015.
Conformément aux préconisations formulées par le Conseil supérieur de la magistrature et le Conseil d’État afin de renforcer les garanties entourant les fonctions d’inspection (67), le présent article inscrit dans l’ordonnance statutaire que les magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général et d’inspecteur général adjoint des services judiciaires sont, à l’instar des magistrats du parquet placés hors hiérarchie, nommés par décret du Président de la République après avis du Conseil supérieur de la magistrature.
Votre rapporteure est favorable à cette évolution, qui va dans le sens du renforcement de l’indépendance des magistrats exerçant les fonctions d’inspection.
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La Commission examine l’amendement CL45 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Il s’agit d’une coordination liée à la création de l’inspection générale de la justice.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 18 modifié.
Article 19
(art. 38-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958
portant loi organique relative au statut de la magistrature)
Obligation de rapport d’installation et de bilan d’activité pour les procureurs généraux près la cour d’appel
Par coordination avec l’article 16 relatif à l’évaluation des premiers présidents de cour d’appel, le présent article propose un dispositif d’évaluation des procureurs généraux près la cour d’appel.
À l’instar de ce qui est prévu pour les premiers présidents, il est proposé que, dans les six mois suivant leur prise de fonctions, les procureurs généraux élaborent un rapport d’installation, définissant les objectifs de leur action, sous réserve, toutefois, des dispositions afférentes à la détermination de la politique pénale. Les procureurs généraux devraient également rédiger, tous les deux ans, un bilan de leurs activités. Ces documents seraient versés au dossier de ces magistrats pour permettre d’apprécier leurs capacités professionnelles lorsqu’ils se présenteraient à de nouvelles fonctions.
Comme pour l’évaluation des premiers présidents de cour d’appel, le Sénat a introduit, sur proposition de sa commission des Lois, un audit périodique du fonctionnement du parquet général des cours d’appel, dont les éléments doivent être versés au dossier des magistrats concernés.
Outre une modification rédactionnelle, votre commission des Lois a, à l’initiative de votre rapporteure et suivant l’avis favorable du Gouvernement, supprimé le contrôle de l’inspection générale introduit par le Sénat.
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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL 87 de la rapporteure.
Elle en vient à l’amendement CL88 du même auteur.
Mme la rapporteure. Cet amendement est le miroir pour le parquet général de celui que nous avons adopté pour les chefs de cour d’appel.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 19 modifié.
Article 20
(art. 72, 72-1 (nouveau), 72-2 (nouveau) et 72-3 (nouveau) de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature)
Procédure de réintégration des magistrats en détachement
ou en congé parental
Le présent article a pour objet de préciser les conditions de retour de détachement ou de congé parental des magistrats.
1. Des conditions de retour inadaptées aux spécificités de l’organisation judiciaire
Les conditions de retour sont aujourd’hui déterminées par le statut général de la fonction publique, à défaut de disposition spécifique dans l’ordonnance statutaire s’agissant du retour de congé parental et, pour ce qui concerne le retour de détachement, en application de l’article 68 de l’ordonnance statutaire qui renvoie expressément au statut général de la fonction publique, sous réserve que ses dispositions ne soient pas contraires au statut de la magistrature.
DONNÉES RELATIVES AU DÉTACHEMENT ET AU CONGÉ PARENTAL DANS LA MAGISTRATURE
1) Détachement
Les fonctions exercées par les magistrats placés en position de détachement sont très variées. Sont ainsi concernés les emplois de direction et les emplois permanents d’enseignant à l’École nationale de la magistrature, l’emploi de secrétaire général du Conseil supérieur de la magistrature ou encore les fonctions exercées par des magistrats au sein des institutions européennes et internationales et des juridictions administratives.
Au 1er janvier 2016, deux cent quinze magistrats sont en position de détachement. À cette même date, la durée moyenne passée en détachement est de quatre ans, mais elle recouvre des durées individuelles très diverses.
2) Congé parental
Au 1er janvier 2016, quatorze magistrats sont en congé parental. À cette même date, la durée moyenne du congé parental est d’un an et soixante-quinze jours.
● Retour de détachement
La réintégration des magistrats à l’issue d’un détachement est régie par les dispositions du statut général de la fonction publique résultant de l’article 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et des articles 22 et suivants du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 (68).
Il en résulte que les magistrats doivent faire connaître leur choix de demander le renouvellement de leur détachement ou de réintégrer leur corps d’origine au moins trois mois avant la fin prévue du détachement. L’administration ou l’organisme d’accueil doit informer deux mois au moins avant l’expiration du détachement le fonctionnaire et son administration d’origine de sa décision de renouveler cette mesure ou d’y mettre un terme.
Si le détachement n’est pas renouvelé pour une cause autre qu’une faute commise dans l’exercice des fonctions, le magistrat est réintégré immédiatement sur un emploi vacant du grade dont il relève, le cas échéant en surnombre. Il a priorité pour être affecté au poste qu’il occupait précédemment. En cas de refus de l’emploi proposé, il se retrouve en instance d’affectation et sera nommé à un autre emploi à la vacance suivante.
Si le magistrat n’a pas fait connaître ses intentions dans le délai prévu, il est nommé à un emploi à la première vacance dans son grade d’origine. Il se trouve alors en instance d’affectation.
S’il est mis fin au détachement avant son terme normal à la demande de l’administration ou de l’organisme d’accueil, le magistrat est nommé à un emploi à la première vacance. Si, en revanche, c’est le magistrat qui a mis fin à son détachement avant le terme prévu, il est nommé à un emploi à l’une des trois premières vacances dans son grade. Il est alors placé en position de disponibilité.
Ces dispositions, en particulier celles relatives aux délais, se révèlent, dans la pratique, inadaptées aux spécificités de l’organisation judiciaire, en particulier au calendrier relatif à la procédure de nomination des magistrats (transparence, saisine du CSM et décret de nomination). Les conditions de fin de détachement peuvent ainsi conduire un magistrat à rester provisoirement sans affectation et, par conséquent, à percevoir pendant cette période, une rémunération moindre que s’il avait été affecté en juridiction.
Par ailleurs, il n’existe pas, dans l’ordonnance statutaire, de disposition relative au reclassement indiciaire après détachement. Or, les dispositions du statut générale de la fonction publique relatives au reclassement indiciaire à l’issue du détachement (69) se heurtent aux règles statutaires, en particulier celles relatives au passage du second au premier grade, qui supposent l’inscription préalable au tableau d’avancement et la nomination à un poste de premier grade.
● Retour de congé parental
En l’absence de disposition spécifique dans l’ordonnance statutaire, les dispositions du statut général de la fonction publique relatives au retour de congé parental (70) trouvent à s’appliquer aux magistrats. Elles prévoient que le fonctionnaire en congé parental est placé « hors de son administration » par périodes de six mois renouvelables et qu’à l’expiration du congé, il est réintégré de plein droit, au besoin en surnombre, dans son corps d’origine et réaffecté dans son emploi précédent. Si cela n’est pas possible, il est affecté dans l’emploi le plus proche de son dernier lieu de travail ou de son domicile.
Là encore, ces dispositions n’apparaissent pas adaptées aux spécificités de l’organisation judiciaire. En particulier, la priorité de retour sur la fonction précédemment occupée ou la plus proche du domicile soulève des difficultés, compte tenu du fait qu’il n’est pas envisageable de laisser des postes inoccupés pendant toute la durée du congé parental.
2. La mise en place de dispositifs de réintégration propres à la magistrature
L’article 20 du présent projet de loi organique propose de remédier aux difficultés soulevées.
● Retour de détachement
Neuf mois au plus tard avant l’expiration du détachement, le magistrat communique sa décision de solliciter ou non le renouvellement de son détachement.
Sept mois au plus tard avant l’expiration du détachement, l’administration d’accueil et le ministre de la justice rendent leurs décisions quant au renouvellement ou non.
En cas de décision négative ou bien si le renouvellement n’est pas sollicité, le magistrat doit demander, à cette date, son affectation dans trois juridictions au moins appartenant à des ressorts de cours d’appel différents et dans la limite de deux demandes d’avancement. Ainsi, les magistrats du second grade ne pourraient demander que deux emplois de premier grade et les magistrats du premier grade que deux postes placés hors hiérarchie. Si le magistrat occupait, avant son détachement, un emploi relevant du pouvoir de proposition du CSM et souhaitait réintégrer le corps judiciaire sur un tel emploi, il devrait adresser sa candidature au CSM au plus tard sept mois avant l’expiration du détachement.
Six mois au plus tard avant l’expiration du détachement ou à défaut de proposition d’affectation du CSM dans un délai de deux mois à compter de la candidature présentée pour les postes relevant de son pouvoir de proposition, le ministre de la Justice peut demander au magistrat de présenter trois demandes supplémentaires d’affectation dans trois juridictions appartenant à des ressorts de cours d’appel différents.
Si le magistrat n’exprime pas de demande ou si aucune de ses demandes ne peut être satisfaite, le ministre de la Justice lui propose une affectation dans trois juridictions. En l’absence d’acceptation de l’une d’entre elles dans un délai d’un mois, le magistrat est nommé à l’expiration du détachement dans l’une de ces trois affectations.
Les magistrats effectuant leur détachement dans le cadre d’une mobilité statutaire, au titre de l’article 76-4 de l’ordonnance statutaire, bénéficient du droit à retrouver une affectation dans leur juridiction d’origine.
Enfin, un dispositif de reclassement indiciaire à l’issue du détachement est prévu. S’inspirant des dispositions du statut général de la fonction publique tout en tenant compte des spécificités de la magistrature, il précise qu’il sera tenu compte, lors de la réintégration du magistrat dans le grade qu’il occupe au sein du corps judiciaire, de l’échelon qu’il avait atteint dans le corps ou le cadre d’emplois du détachement, sous réserve qu’il lui soit plus favorable.
● Retour de congé parental
Un dispositif comparable au mécanisme de retour de détachement est proposé pour les magistrats de retour de congé parental, avec toutefois quelques différences en termes de délais, de choix d’affectation et de retour dans la juridiction antérieure.
Ainsi, six mois au plus tard avant l’expiration du congé parental, le magistrat doit faire part de son intention de solliciter son renouvellement ou de réintégrer le corps judiciaire.
Si le renouvellement n’est pas sollicité ou est refusé, et au plus tard cinq mois avant l’expiration du congé parental, le magistrat fait connaître au ministre de la Justice l’affectation qu’il désirerait recevoir dans trois juridictions au moins, sans qu’il soit précisé qu’elles doivent relever de cours d’appel différentes. Le dispositif est ainsi plus souple que celui prévu dans le cas du retour de détachement.
Quatre mois avant l’expiration du congé parental, le ministre de la Justice peut inviter le magistrat à présenter trois demandes supplémentaires d’affectation dans trois juridictions appartenant à des ressorts de cour d’appel différents.
Si le magistrat n’a pas exprimé de demande ou si aucune n’a pu être satisfaite, le ministre de la Justice lui propose une affectation dans trois juridictions. À défaut d’acceptation dans le délai d’un mois, le magistrat est, à l’expiration du congé parental, nommé dans l’une de ces trois affectations.
Enfin, il est possible de recevoir une affectation dans sa juridiction antérieure, sans condition de délai et, le cas échéant, en surnombre de l’effectif.
3. Les modifications apportées par le Sénat
Considérant que la restriction à deux du nombre de postes auxquels les magistrats peuvent prétendre en avancement est de nature à les placer dans une position plus défavorable que celle qu’ils auraient connue s’ils n’avaient pas été détachés, le Sénat a, à l’initiative de sa commission des Lois, supprimé la limitation à deux demandes d’affectation en avancement.
*
* *
La Commission adopte l’article 20 sans modification.
Chapitre IV
Dispositions relatives aux droits et obligations des magistrats
La Commission est saisie de l’amendement CL15 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Cet amendement propose de préciser à l’article 5 de l’ordonnance que les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques, et non plus « sous l’autorité du garde des Sceaux, ministre de la justice ».
L’indépendance du parquet est nécessaire, non seulement pour nous conformer aux obligations européennes, mais également pour renforcer la confiance, l’efficacité et la sérénité de la justice – autant d’objectifs de ce texte comme l’a rappelé le ministre dans son propos liminaire.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. En supprimant l’autorité du garde des Sceaux sur les magistrats du parquet, nous ne pourrions plus donner corps à l’article 20 de la Constitution. La révision constitutionnelle, en cours de discussion, ne prévoit pas de remettre en cause l’autorité du garde des Sceaux. J’aurais l’occasion de le rappeler prochainement dans la circulaire de politique pénale que je vais adresser à l’ensemble des parquets : je suis extrêmement attentif aux rapports que les parquets généraux doivent transmettre au garde des Sceaux puisqu’ils sont le seul moyen d’éclairer la politique pénale que j’entends conduire.
Mme la rapporteure. Avis défavorable, pour les mêmes motifs. La définition de la politique pénale reste la première prérogative d’un ministre de la justice. Cet amendement, qui anticipe sur la révision constitutionnelle, l’en priverait.
M. Sergio Coronado. Je retire l’amendement CL15 ainsi que mon amendement de repli CL16.
Les amendements CL15 et CL16 sont retirés.
Article 21
(art. 7-1 à 7-3 [nouveaux] et 9-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature)
Conflits d’intérêts et obligations déclaratives des magistrats
Cet article met en place des instruments de prévention et de règlement des conflits d’intérêts au sein de la magistrature judiciaire, ainsi que des obligations déclaratives incombant à certains de ses membres. Il transpose des dispositifs aujourd’hui applicables aux principaux responsables publics (71), à certains fonctionnaires et agents publics, ainsi qu’aux membres des juridictions administratives et financières (72).
Ces dispositions s’ajoutent à celles, nombreuses, qui tendent à garantir l’impartialité des décisions de justice, parmi lesquelles :
– les obligations statutaires figurant dans l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, telles que la prestation de serment ou le devoir de réserve ;
– les incompatibilités applicables aux magistrats (articles 8 et 9 de la même ordonnance) ;
– les règles relatives au déport et à la récusation (articles L. 111-6 et suivants du code de l’organisation judiciaire) ;
– le régime disciplinaire, dans les conditions prévues au chapitre VII de l’ordonnance précitée.
1. La définition du conflit d’intérêts
Le présent article introduit un nouvel article 7-1 dans l’ordonnance de 1958 précitée, prévoyant que les magistrats veillent à prévenir et à faire cesser immédiatement les situations de conflit d’intérêts.
Le conflit d’intérêts y est défini, comme « toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction ».
Cette définition est identique à celle retenue à l’article 2 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique et, dans leur rédaction résultant de la loi précitée relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, à l’article 25 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, à l’article L. 4122-3 du code de la défense, aux articles L. 131-3 et L. 231-4 du code de justice administrative et aux articles L. 120-5 et L. 220-5 du code des juridictions financières.
Ces dispositions trouvent leur prolongement à l’article 12 du projet de loi – ordinaire – de modernisation de la justice du XXIème siècle, qui modifie le code de l’organisation judiciaire afin d’ajouter l’existence d’un conflit d’intérêts à la liste des motifs de récusation et de déport de magistrats.
2. Les déclarations d’intérêts
a. Le texte adopté par le Sénat
Dans le projet de loi organique déposé par le Gouvernement, le texte initial du présent article se bornait à prévoir un « entretien déontologique » de chaque magistrat, lors de l’installation dans ses fonctions, avec son chef de juridiction ou son chef de cour.
Sur proposition du rapporteur de la commission des Lois, M. François Pillet, le Sénat a ajouté l’obligation pour tout magistrat – à l’exception du premier président de la Cour de cassation et du procureur général près cette Cour – de remettre une déclaration d’intérêts (nouvel article 7-2 de l’ordonnance de 1958 précitée).
Dans les deux mois qui suivent l’installation du magistrat dans ses fonctions, cette déclaration devra être remise :
– au président du tribunal, pour les magistrats du siège d’un tribunal de première instance ;
– au procureur de la République près ce tribunal, pour les magistrats du parquet d’un tribunal de première instance ;
– au premier président de la cour, pour les magistrats du siège d’une cour et pour les présidents des tribunaux de première instance du ressort de cette cour ;
– au procureur général près cette cour, pour les magistrats du parquet d’une cour et pour les procureurs de la République près des tribunaux de première instance du ressort de cette cour ;
– au premier président de la Cour de cassation, pour les magistrats du siège de la cour, pour les conseillers à la cour en service extraordinaire et pour les premiers présidents des cours ;
– au procureur général près la Cour de cassation, pour les magistrats du parquet de la cour, pour les avocats généraux à la cour en service extraordinaire et pour les procureurs généraux près des cours.
Il aurait été concevable, en s’inspirant du modèle retenu pour les membres des juridictions administratives et financières (73), de faire intervenir le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) dans ce dispositif. Un obstacle constitutionnel semble cependant s’y opposer, dès lors qu’en matière de déontologie, l’article 65 de la Constitution n’attribue au CSM qu’une mission générale : celui-ci se prononce, en formation plénière, « sur les questions relatives à la déontologie des magistrats ainsi que sur toute question relative au fonctionnement de la justice dont le saisit le ministre de la justice » (74).
Le présent article définit la déclaration d’intérêts comme un document mentionnant « les liens et les intérêts détenus de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif des fonctions, que le déclarant a ou qu’il a eus pendant les cinq années précédant l’installation dans ses fonctions ». Son modèle et son contenu seront précisés par décret en Conseil d’État.
L’établissement de la déclaration d’intérêts donnera lieu à un entretien déontologique du magistrat avec l’autorité à laquelle sa déclaration a été remise, dont l’objet est de prévenir tout éventuel conflit d’intérêts – cet entretien pouvant être renouvelé à tout moment, à la demande du magistrat ou de l’autorité. Il est précisé que « tout entretien donne lieu à l’établissement d’un compte rendu ».
Au cours de l’exercice des fonctions, en cas de modification substantielle des liens et des intérêts détenus, une déclaration complémentaire devra être faite dans les deux mois, dans les mêmes formes. Elle pourra donner lieu à un nouvel entretien déontologique.
Conformément à la jurisprudence constitutionnelle, la déclaration d’intérêts est confidentielle (75). Le présent article précise qu’ « elle n’est pas versée au dossier du magistrat et [qu’elle] ne peut pas être communiquée aux tiers », les modalités de conservation étant précisées par décret en Conseil d’État.
En cas d’engagement d’une procédure disciplinaire, le CSM et le Garde des Sceaux pourront obtenir communication de la déclaration d’intérêts et du compte rendu de l’entretien déontologique.
En application du III de l’article 35 du présent projet de loi organique, les dispositions qui précèdent (établissement d’une déclaration d’intérêts et participation à un entretien déontologique) devront avoir été appliquées aux magistrats en fonctions dans les douze mois suivant la publication du décret en Conseil d’État mentionné au présent article.
b. Les modifications apportées par votre commission des Lois
À l’initiative de votre rapporteure et de M. Yves Goasdoué, la commission des Lois a complété les dispositions régissant l’entretien déontologique et les déclarations d’intérêts, afin de les rapprocher de celles retenues pour les membres des juridictions administratives et financières dans la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (76).
C’est ainsi que :
– le compte rendu de l’entretien déontologique a été supprimé ;
– la déclaration d’intérêts ne pourra comporter aucune mention des opinions ou des activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques du magistrat, sauf lorsque leur révélation résulte de la déclaration de fonctions ou de mandats exercés publiquement ;
– la déclaration d’intérêts du magistrat sera annexée à son dossier et assortie de garanties particulières de confidentialité (accès conditionné et limité à certaines personnes), précisées par décret en Conseil d’État ;
– des dispositions pénales sanctionneront tant la méconnaissance des obligations déclaratives que la divulgation du contenu des déclarations d’intérêts (77).
Par ailleurs, dans le texte adopté par le Sénat, la déclaration d’intérêts peut être adressée au CSM et au Garde des Sceaux en cas de poursuites disciplinaires. À l’initiative de votre rapporteure, votre commission des Lois a prolongé ces dispositions, en prévoyant une possible transmission de la déclaration d’intérêts à l’inspection générale de la justice, lorsque celle-ci est saisie, par le ministre de la justice, d’une enquête prévue aux articles 50-2 ou 63 de l’ordonnance organique de 1958 précitée.
En outre, à la différence de la loi – ordinaire – du 20 avril 2016 sur la déontologie des fonctionnaires, il a semblé préférable à votre Commission de définir directement dans l’ordonnance organique de 1958 le contenu des déclarations d’intérêts, plutôt que de renvoyer à la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. Outre que cela évite les inconvénients liés à la « cristallisation » des dispositions ordinaires auxquelles renvoie le législateur organique (78), cette modification conforte la constitutionnalité des mesures pénales sanctionnant une déclaration incomplète des intérêts, conformément au principe de légalité des délits et des peines.
Par ailleurs, à l’initiative de votre rapporteure et de M. Yves Goasdoué, votre commission des Lois a assujetti le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près ladite Cour à l’obligation de déclarer leurs intérêts. Leur déclaration serait remise à un collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire, créé par votre Commission au nouvel article 22 bis du présent projet (voir ci-après).
Autre conséquence de cette création, un chef de juridiction destinataire d’une déclaration d’intérêts pourra solliciter l’avis du collège de déontologie, en cas de doute sur une éventuelle situation de conflit d’intérêts. Le collège pourra alors adresser au premier président de la Cour de cassation et au procureur général près cette Cour des observations visant à prévenir ou à mettre fin à une telle situation. Ces dispositions s’inspirent de celles applicables aux membres des juridictions administratives et financières depuis la loi du 20 avril 2016 précitée.
3. Les déclarations de situation patrimoniale
a. Le texte adopté par le Sénat
Le nouvel article 7-3 de l’ordonnance de 1958 précitée impose à certains magistrats l’établissement d’une déclaration de situation patrimoniale (79). Sont concernés :
– le premier président et les présidents de chambre de la Cour de cassation ;
– le procureur général et les premiers avocats généraux près la Cour de cassation ;
– les premiers présidents des cours d’appel ;
– les procureurs généraux près les cours d’appel ;
– les présidents des tribunaux de première instance ;
– les procureurs de la République près les tribunaux de première instance.
Ces deux dernières catégories de magistrats ont été ajoutées par le Sénat, à l’initiative du rapporteur de la commission des Lois. À titre de comparaison, sont assujettis à une même obligation le vice-président et les présidents de section du Conseil d’État, les présidents des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, le premier président, le procureur général et les présidents de chambre de la Cour des comptes, ainsi que les présidents des chambres régionales et territoriales des comptes et les procureurs financiers près ces chambres (80).
Le contenu des déclarations de situation patrimoniale, qui peut être précisé par décret en Conseil d’État, est défini au II de l’article 4 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, auquel renvoie le présent article.
Alors que le projet de loi tendait initialement à créer une commission ad hoc de recueil des déclarations de situation patrimoniale (81), le Sénat a confié à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) le soin de recueillir et de contrôler ces déclarations.
Celles-ci devront être remises par les magistrats dans les deux mois qui suivent l’installation dans leurs fonctions, puis dans les deux mois qui suivent leur cessation, afin de permettre à la Haute Autorité de détecter d’éventuelles évolutions inexpliquées du patrimoine. Toute modification substantielle de la situation patrimoniale devra faire l’objet, dans un délai de deux mois, d’une déclaration complémentaire. Des dispenses sont, par ailleurs, prévues lorsqu’une déclaration a déjà été établie il y a moins de six mois.
Le présent article rend également applicables aux magistrats plusieurs dispositions de la loi du 11 octobre 2013 précitée :
– en l’absence de remise de la déclaration dans les délais, en cas de déclaration incomplète ou lorsqu’il n’a pas été donné suite à une demande d’explications, d’informations ou de pièces justificatives formulée par la Haute Autorité, son président peut adresser à l’intéressé une injonction tendant à y remédier. Ne pas y déférer dans le délai d’un mois est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende (V de l’article 4 et II de l’article 26 de la loi de 2013) ;
– la Haute Autorité peut obtenir les déclarations de revenus ou d’impôt de solidarité sur la fortune du magistrat (ou de son époux, de son partenaire de pacte civil de solidarité ou de son conjoint) et peut échanger avec l’administration fiscale dans conditions prévues à l’article 6 de la loi de 2013 ;
– lorsqu’elle constate une évolution de la situation patrimoniale pour laquelle elle ne dispose pas d’explications suffisantes, après que le magistrat a été mis en mesure de présenter ses observations, la Haute Autorité publie au Journal officiel un rapport spécial, assorti des observations de l’intéressé, et transmet le dossier au parquet ;
– le fait de ne pas déposer la déclaration, d’omettre de déclarer une partie substantielle de son patrimoine ou d’en fournir une évaluation mensongère est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. Peuvent être prononcées, à titre complémentaire, l’interdiction des droits civiques, selon les modalités prévues aux articles 131-26 et 131-26-1 du code pénal, ainsi que l’interdiction d’exercer une fonction publique, selon les modalités prévues à l’article 131-27 du même code (I de l’article 26 de la loi de 2013) ;
– le fait de publier ou de divulguer tout ou partie de la déclaration est puni des peines mentionnées à l’article 226-1 du code pénal (III de l’article 26 de la loi de 2013), soit un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
Enfin, à l’instar des dispositions précitées régissant les membres des juridictions administratives et financières, la déclaration de situation patrimoniale ne sera pas versée au dossier du magistrat, ni communiquée aux tiers.
Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), précisera les conditions d’application du présent article.
En application du IV de l’article 35 du présent projet de loi organique, les déclarations de situation patrimoniale des magistrats actuellement en fonctions devront être remises dans les deux mois suivant la publication du décret en Conseil d’État mentionné au présent article.
b. Les modifications apportées par votre commission des Lois
Suivant la même logique qu’à propos des déclarations d’intérêts, votre commission des Lois, sur proposition de votre rapporteure et de M. Yves Goasdoué, a modifié et complété les dispositions relatives aux déclarations de situation patrimoniale des magistrats, afin :
– d’assurer leur parallélisme avec la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, qui soumet les plus hauts membres des juridictions administratives et financières à l’obligation de déclarer leur patrimoine. ;
– d’édicter explicitement dans l’ordonnance organique de 1958 le contenu des déclarations de situation patrimoniale, les pouvoirs de contrôle de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HAVTP) et les dispositions pénales correspondantes (82), en reprenant les termes de la loi du 11 octobre 2013 précitée.
Par ailleurs, sur proposition de votre rapporteure, votre commission des Lois a remplacé l’avis préalable de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) sur le décret en Conseil d’État relatif aux déclarations de situation patrimoniale par un avis de la HATVP, dont la compétence en la matière est plus évidente (83).
4. L’actualisation de la liste des incompatibilités
Introduit à l’initiative du Sénat, le II du présent article modifie l’article 9-1 de l’ordonnance de 1958 précitée, relatif aux incompatibilités applicables aux magistrats et anciens magistrats (autres que de la Cour de cassation), dans le ressort d’une juridiction où ils ont exercé leurs fonctions depuis moins de cinq ans.
D’une part, il s’agit de tenir compte de la suppression de la profession d’avoué et du changement de dénomination des « mandataires-liquidateurs » en « mandataires judiciaires ». D’autre part, est ajoutée une incompatibilité avec la profession de commissaire-priseur judiciaire.
*
* *
La Commission examine l’amendement CL17 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à préciser que les activités ou opinions politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques ne sont pas susceptibles de constituer des conflits d’intérêts permettant la récusation du magistrat.
Il est à noter que la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a spécifiquement exclu la mention des opinions ou activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques dans les déclarations d’intérêts des fonctionnaires.
M. le garde des Sceaux. Avis défavorable. Le statut des magistrats, à l’instar de ce qui a déjà été adopté pour les magistrats administratifs et financiers, doit prévoir que les déclarations d’intérêts ne mentionnent pas les activités ou les opinions politiques syndicales, religieuses et philosophiques des magistrats. En revanche, le Gouvernement considère que la mise en œuvre des règles de récusation relève de l’interprétation par les juridictions de chaque situation individuelle. Or, l’amendement conduirait à interdire par principe la récusation d’un magistrat en raison d’un conflit d’intérêts. Cela réduirait à néant la garantie apportée par le dispositif de prévention des conflits d’intérêts. Nous aurons l’occasion d’ajouter dans le projet de loi ordinaire les conflits d’intérêts aux autres causes de récusation dans le code de l’organisation judiciaire.
Mme la rapporteure. Avis défavorable. Cette mention n’est pas utile. Tous les rapports parlementaires sur les conflits d’intérêts précisent que ceux-ci doivent être appréciés au cas par cas.
Mais surtout, monsieur Coronado, vous aurez partiellement satisfaction au travers de deux amendements que j’ai déposés à l’article 21 : le premier précisera que la déclaration d’intérêts porte sur les intérêts matériels – patrimoniaux, financiers, professionnels ou commerciaux – et non moraux – de nature intellectuelle, philosophique, politique, syndicale, idéologique ou religieuse – ; le second disposera qu’elle ne doit comporter aucune mention des opinions ou des activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques de l’intéressé.
M. Alain Tourret. Simple observation d’historien : j’ai eu l’occasion de faire des études sur les activités des magistrats entre 1900 et 1910, notamment dans le ressort de la cour d’appel de Caen. Il était indiqué que les femmes des magistrats devaient participer aux cocktails, ou plutôt aux thés, organisés une fois par semaine par le chef de cour ; tout manquement était sévèrement noté. Il était par ailleurs demandé de préciser si les personnes allaient à la messe, et l’endroit où elles s’asseyaient dans l’église, et ce pour chacun des magistrats. Nous avons bien évolué depuis cette époque… C’était du temps de l’affaire des fiches.
La Commission rejette l’amendement.
Elle passe ensuite à l’amendement CL89 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement transpose aux magistrats de l’ordre judiciaire les dispositions adoptées par le législateur pour les membres des juridictions administratives et financières dans la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires en précisant que la déclaration d’intérêts doit être « exhaustive, exacte et sincère ».
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Puis la Commission examine les amendements identiques CL90 de la rapporteure et CL59 de M. Yves Goasdoué.
Mme la rapporteure. Le Sénat n’impose aucune obligation de déclaration d’intérêts au premier président de la Cour de cassation ni au procureur général près cette Cour, faute d’autorité à qui remettre leur déclaration. Je vous propose d’y remédier en instituant, dans un amendement à venir, un collège de déontologie interne à la magistrature judiciaire, ayant pour fonction de prévenir les conflits d’intérêts, sur le modèle de ceux que nous avons créés pour les juridictions administratives et financières dans la loi du 20 avril 2016. L’amendement CL90 prévoit que le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette Cour lui remettront une déclaration d’intérêts ; tous les magistrats exerçant des fonctions juridictionnelles seront ainsi tenus de déclarer leurs intérêts. Dans un autre amendement après l’article 32, je vous proposerai de généraliser les déclarations d’intérêts à l’ensemble des membres du Conseil supérieur de la magistrature, selon le même principe.
M. Yves Goasdoué. L’amendement CL59 a le même objet. La création du collège de déontologie constitue un apport essentiel.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement est favorable à tout ce qui permet de parfaire les outils destinés à prévenir les conflits d’intérêts, dans la magistrature et ailleurs.
La Commission adopte ces amendements.
Elle est saisie, en discussion commune, des amendements identiques CL91 de la rapporteure et CL60 de M. Yves Goasdoué et l’amendement CL18 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Je retire mon amendement CL18 au profit de celui de la rapporteure.
L’amendement CL18 est retiré.
Mme la rapporteure. Dans un souci de transposition aux magistrats de l’ordre judiciaire des dispositions adoptées pour les membres des juridictions administratives et financières en vertu de la loi d’avril 2016 précitée, l’amendement CL91 définit le contenu de la déclaration d’intérêts en reprenant les termes exacts de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.
M. Yves Goasdoué. L’amendement CL60 est défendu.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement avait été séduit par la qualité du rapport sur la loi relative à la déontologie des fonctionnaires. Il est donc favorable à l’extension du dispositif.
La Commission adopte ces amendements.
Elle passe ensuite à l’amendement CL 92 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Là encore, il s’agit de transposer aux magistrats de l’ordre judiciaire des dispositions de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle en vient à l’amendement CL 93 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement a le même objet que l’amendement précédent.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement ainsi que l’amendement rédactionnel CL94 du même auteur.
Puis elle examine l’amendement CL 95 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Même objet que l’amendement précédent.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle passe ensuite à l’amendement CL 96 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Même objet que l’amendement précédent.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle en vient à l’amendement CL 97 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement permet la transmission de la déclaration d’intérêts à l’inspection générale de la justice, uniquement dans le cadre d’une enquête disciplinaire.
M. le garde des Sceaux. Et lorsqu’elle est saisie par le garde des Sceaux... Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle examine l’amendement CL 98 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement reprend les termes de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle est ensuite saisie des amendements identiques CL99 de la rapporteure et CL61 de M. Yves Goasdoué.
Mme la rapporteure. Là encore, cet amendement transpose le dispositif pénal prévu par la loi précitée en cas de non-déclaration d’intérêts.
M. Yves Goasdoué. L’amendement CL61 est défendu.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable. Ce débat a été lancé au Sénat qui a fait le choix de procéder à un renvoi aux dispositions de la loi de 2013 relative à la transparence de la vie publique. Le rapporteur avait toutefois pris soin de souligner les inconvénients de cette solution, au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à la « cristallisation ». Il est plus logique de prévoir les sanctions pénales dans la loi organique. Avis favorable.
La Commission adopte ces amendements.
Elle en vient à l’amendement CL19 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à faire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique la destinataire d’une copie de la déclaration d’intérêts. Il s’agit de compléter l’information de cette dernière qui reçoit les déclarations de situation patrimoniale par la connaissance d’un conflit d’intérêts potentiel ou possible, sans en faire pour autant une autorité de contrôle.
M. le garde des Sceaux. Soucieux du parallélisme des formes avec les magistrats administratifs et financiers, le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement. Il paraît logique que le destinataire de la déclaration d’intérêts soit le supérieur hiérarchique direct. On ne comprend pas ce que l’information de la Haute Autorité apporterait, le but étant de mettre fin à la situation de conflit d’intérêts.
Mme la rapporteure. Même avis, d’autant plus que cela poserait un problème d’indépendance de la justice par rapport à la Haute Autorité. Votre souhait sera en partie satisfait, dans la mesure où nous proposerons dans un autre amendement de créer un collège de déontologie des magistrats judiciaires, qui pourra avoir connaissance des déclarations d’intérêts.
La Commission rejette l’amendement.
Elle examine ensuite les amendements identiques CL100 de la rapporteure et CL62 de M. Yves Goasdoué.
Mme la rapporteure. Cet amendement définit dans la loi organique le contenu des déclarations de situation patrimoniale, reprenant strictement les termes de la loi relative à la transparence de la vie publique.
M. Yves Goasdoué. L’amendement est défendu.
M. le garde des Sceaux. En tant que rapporteur de cette loi dans une vie antérieure, je ne vois pas comment je pourrais m’opposer à son extension à d’autres personnes…
La Commission adopte ces amendements.
Puis elle adopte l’amendement de précision CL101 de la rapporteure.
La Commission passe à l’amendement CL102 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement substitue à l’avis de la CNIL sur le décret en Conseil d’État relatif aux déclarations de situation patrimoniale celui de la Haute Autorité.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle est saisie des amendements identiques CL103 de la rapporteure et CL63 rectifié de M. Yves Goasdoué.
Mme la rapporteure. L’amendement CL103 définit les pouvoirs de contrôle de la Haute Autorité en matière de déclarations de situation patrimoniale, ainsi que les sanctions pénales applicables, reprenant les dispositions de la loi relative à la transparence de la vie publique.
M. Yves Goasdoué. L’amendement CL63 est défendu.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte ces amendements.
Elle en vient à l’amendement CL20 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à préciser que l’obligation de déclaration d’intérêts s’applique aux juges de proximité, qui peuvent être concernés, autant que les autres magistrats, par les problèmes de conflit d’intérêts.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement n’a pas d’avis… Sinon un avis de sagesse. Je ne crois pas nécessaire d’apporter cette précision dans la loi organique d’autant que les juges de proximité vont être intégrés parmi les magistrats exerçant à titre temporaire. Je ne suis pas contre cet amendement, mais je n’en vois pas l’intérêt.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Dans la loi ordinaire, nous essayons de mettre un terme au processus de prorogation de la juridiction de proximité. Nous cherchons également à préserver une certaine cohérence face à la multiplicité des statuts de magistrat. Il faut nous en tenir à cette ligne et ne pas distinguer les juges de proximité de l’ensemble des juges.
Mme la rapporteure. Je demande le retrait de cet amendement qui sera satisfait puisque les magistrats exerçant à titre temporaire, dont les juges de proximité feront partie, seront soumis à l’obligation de déclarer leurs intérêts.
L’amendement est retiré.
La Commission adopte l’article 21 modifié.
La Commission examine l’amendement CL12 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Il s’agit par cet amendement de mettre fin à la remise de décorations publiques – Légion d’honneur et ordre national du Mérite – aux magistrats.
Une affaire portant sur l’échange de services autour d’une décoration par un ancien Président de la République a beaucoup agité les médias. L’indépendance de la magistrature n’est pas compatible avec la délivrance de médailles et décorations par le pouvoir exécutif. C’est aussi pour cette raison que les parlementaires ne peuvent recevoir de telles médailles. Dans la précédente législature, René Dosière avait défendu un amendement très similaire.
Le groupe d’États contre la corruption (GRECO), émanation du Conseil de l’Europe, a publié un rapport sur la prévention de la corruption des parlementaires, des juges et des procureurs en France, dans lequel il s’interroge notamment sur la remise aux juges par le pouvoir exécutif de « décorations symboliques ».
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement a une position constante sur ce sujet : il est défavorable à cet amendement, considérant que son adoption serait une marque de défiance à l’égard de professionnels qui servent quotidiennement le service public de la justice.
Mme la rapporteure. La question est légitime, mais elle mérite concertation et réflexion. Elle est loin d’être nouvelle. En introduisant cette disposition dans le texte, vous créez une discrimination au détriment des magistrats judiciaires puisque ce dispositif n’est pas prévu pour d’autres fonctionnaires ou pour d’autres magistrats.
M. Alain Tourret. Il est évident que cette disposition est discriminante. Elle ne peut donc pas être acceptée.
La seule solution valable consisterait à réserver la Légion d’honneur aux forces armées qui se battent pour défendre la France. Je suis le descendant de neuf générations de légionnaires qui sont tous partis se battre pour la France – et en sont morts le plus souvent.
La Commission rejette l’amendement.
Elle est saisie de l’amendement CL23 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Le droit de grève étant un droit constitutionnel, toute restriction doit être strictement encadrée et justifiée. Cet amendement vise à limiter l’interdiction de la grève pour les magistrats aux seuls mouvements qui porteraient atteinte aux libertés individuelles.
M. le garde des Sceaux. Avis défavorable.
Mme la rapporteure. L’article 10 de l’ordonnance statutaire de 1958 interdit toute action concertée de nature à arrêter ou entraver le fonctionnement des juridictions, ce qui en pratique prohibe toute grève.
Votre amendement introduit une limitation à ce principe, en n’interdisant la grève que pour autant qu’elle porterait atteinte aux libertés individuelles. Sur le plan juridique, je vois mal quelles situations seraient concrètement visées. Il ne me paraît pas opportun de modifier l’équilibre actuel, alors que certains collègues de l’opposition veulent au contraire limiter le droit syndical des magistrats que le projet de loi organique vient consacrer et renforcer. Je vous propose d’en rester là et de retirer votre amendement.
L’amendement est retiré.
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL5, CL7 et CL6, tous trois de Mme Françoise Descamps-Crosnier.
Mme Françoise Descamps-Crosnier. Ces trois amendements traitent du « pantouflage » des magistrats judiciaires, c’est-à-dire de leur départ vers le secteur privé.
Le système actuel de contrôle des départs vers le privé pour les magistrats judiciaires repose sur un décret du Président de la République, sur proposition du ministre de la justice et après avis du Conseil supérieur de la magistrature. Celui-ci avait considéré, dans sa contribution à la réflexion sur la déontologie des magistrats du 2 octobre 2003, que cette procédure n’était pas satisfaisante.
Mon amendement CL5 propose de soumettre la demande de départ à la commission de déontologie de la fonction publique. On peut m’opposer l’indépendance de la justice, mais cette commission est compétente pour le pantouflage des magistrats administratifs et financiers. En outre, le collège de déontologie qui est institué dans le projet de loi organique traite des conflits d’intérêts et non du pantouflage.
Dans l’amendement CL6, la demande est examinée par le Conseil supérieur de la magistrature, après avis de la commission de déontologie, qui possède une certaine expertise sur le sujet.
Enfin, l’amendement CL7 prévoit que la demande est soumise à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement est défavorable aux trois amendements. Les magistrats ont un statut autonome – ce ne sont pas des fonctionnaires comme les autres : les dispositions de la loi de 1983 ne leur sont pas applicables.
L’avis d’une autre structure que le CSM, sur ces sujets ne nous paraît pas pertinent. Le Gouvernement ne voit pas de raisons de modifier le fonctionnement actuel, qui lui convient.
Nous connaissons la position du CSM, qui remonte à son avis de 2003. Mais, depuis, sa composition a évolué. Il serait de bon ton de demander l’avis de l’actuel CSM sur cette question. En l’état, le Gouvernement est vraiment hostile à ces trois amendements.
Mme la rapporteure. La préoccupation est légitime, d’autant que nous avons beaucoup travaillé en miroir de la loi de 2016 sur la déontologie des fonctionnaires. Cela étant, depuis 2003, une loi organique de 2007 a donné la possibilité au CSM d’émettre un avis consultatif sur les départs vers le secteur privé. Autrement dit, le CSM se préoccupe déjà de cette question.
Ces amendements pourraient avoir pour conséquence de supprimer l’avis du CSM pour lui substituer celui de la commission de déontologie de la fonction publique, alors que les magistrats ne sont pas régis par le statut de la fonction publique.
On pourra à l’avenir s’interroger sur le rôle du collège de déontologie que nous créons sur ce point, aux côtés du CSM. Mais pour l’heure, j’émets un avis défavorable.
Mme Françoise Descamps-Crosnier. Mon intention était d’inciter à la réflexion sur cette question. Je sais que la position du CSM date de 2003. Par ailleurs, dans l’amendement CL6, je ne supprimais pas le rôle du CSM, mais je lui adjoignais l’avis de la commission de déontologie, plus experte que lui en cette matière.
Je retire les trois amendements.
M. le garde des Sceaux. Je précise que l’avis du CSM portait sur la convenance personnelle. Or un détachement n’est pas forcément pour convenance personnelle : il peut avoir d’autres motivations.
Les amendements sont retirés.
Article 22
(art. 10-1 [nouveau] de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Droit syndical des magistrats
Cet article consacre le droit syndical des magistrats de l’ordre judiciaire dans l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.
1. Le principe du droit syndical des magistrats
La liberté syndicale est reconnue, de manière générale, par le sixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, selon lequel « tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l’action syndicale et adhérer au syndicat de son choix ». Elle est garantie aux magistrats de l’ordre judiciaire par la jurisprudence du Conseil d’État, depuis son arrêt Obrego du 1er décembre 1972. Elle est également mentionnée dans le Recueil des obligations déontologiques des magistrats, établi en 2010 par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), selon lequel « le magistrat qui bénéficie du droit de se syndiquer, s’exprime librement dans ce cadre syndical ».
Alors que certaines initiatives parlementaires visent à restreindre le droit syndical des magistrats (84), le présent article en pose, au contraire, le principe et en fixe les modalités d’exercice.
Le nouvel article 10-1 de l’ordonnance de 1958 précitée prévoit ainsi que « le droit syndical est garanti aux magistrats qui peuvent librement créer des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats ».
Ces dispositions ne remettent en cause :
– ni l’interdiction faite au corps judiciaire de « toute délibération politique », posée à l’article 10 de l’ordonnance de 1958 ;
– ni la nécessité de respecter le devoir de réserve, prévu au même article. Selon la Cour européenne des droits de l’homme, « on est en droit d’attendre des fonctionnaires de l’ordre judiciaire qu’ils usent de leur liberté d’expression avec retenue chaque fois que l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire sont susceptibles d’être mises en cause » (28 octobre 1999, Wille c. Liechtenstein) ;
– ni la prohibition du droit grève, dès lors qu’est « interdite toute action concertée de nature à arrêter ou entraver le fonctionnement des juridictions » (dernier alinéa du même article 10).
2. L’exercice du droit syndical des magistrats
Le présent article rend applicables aux magistrats les dispositions législatives et réglementaires régissant le droit syndical dans la fonction publique de l’État (85). Tel est le cas, par exemple, en matière de libre détermination des structures du syndicat, d’attribution de locaux, d’organisation des réunions, de documents d’origine syndicale, de collecte des cotisations, de situation des représentants syndicaux ou de bilan social.
Des dispositions spécifiques aux magistrats sont également prévues.
Ainsi, le présent article définit les conditions de représentativité des organisations syndicales de magistrats, en s’inspirant des critères aujourd’hui prévus par la circulaire du 4 novembre 1992 relative à l’exercice du droit syndical au ministère de la Justice, signée par M. Michel Vauzelle, alors Garde des Sceaux.
Seront considérées comme représentatives les organisations ayant obtenu :
– soit au moins un siège à la commission d’avancement, parmi les sièges attribués aux magistrats des cours et tribunaux (86) ;
– soit un pourcentage minimum de voix, fixé par décret en Conseil d’État, lors de l’élection du collège des magistrats des cours et tribunaux et du ministère de la justice chargé de désigner les magistrats du corps judiciaire appelés à siéger à la commission d’avancement (87).
Le présent article permet également aux représentants syndicaux de bénéficier :
– d’autorisations d’absence pour pouvoir siéger au sein de la commission d’avancement, de la commission permanente d’études (88) ou à des réunions de travail convoquées par l’administration ;
– de décharges d’activités, « sous réserve des nécessités de service ». Cette réserve, habituelle en droit de la fonction publique, vient d’être consacrée dans le statut général par la loi du 20 avril 2016 précitée (89). Selon la jurisprudence, le refus opposé à une demande de décharge d’activité doit être motivé (90) et fondé sur des critères objectifs et particuliers (91) ;
– d’un « crédit de temps syndical », utilisable sous forme de décharges de service ou de crédits d’heures. Chaque syndicat désignera librement ceux de ses représentants qui en seront bénéficiaires. Toutefois, si cette désignation s’avérait « incompatible avec la bonne administration de la justice », le Garde des Sceaux pourra s’y opposer, au terme d’une décision motivée et après en avoir informé le CSM. Ce crédit de temps n’est pas réservé aux syndicats représentatifs : il sera réparti en fonction des suffrages recueillis par les différentes organisations, y compris lorsqu’elles n’ont pas obtenu de siège à la commission d’avancement.
Les conditions de mise en œuvre du présent article seront précisées par décret en Conseil d’État. Ce dernier fixera notamment le pourcentage minimum servant à apprécier la représentativité syndicale, ainsi que les modalités de calcul et de répartition des décharges d’activité entre les organisations syndicales.
*
* *
La Commission est saisie de l’amendement CL4 de M. Éric Ciotti.
M. Éric Ciotti. Cet amendement, qui reprend une proposition de loi que j’ai déposée, vise à rendre incompatible l’appartenance syndicale avec la fonction de magistrat, afin de garantir la neutralité et l’indépendance des magistrats vis-à-vis de toute forme d’influence. Comme beaucoup de nos concitoyens, je suis choqué par certaines expressions de syndicats de magistrats qui introduisent une confusion entre la fonction et la conviction. Il est nécessaire, pour restaurer l’indispensable lien de confiance entre la nation et la magistrature, de veiller à ce que les magistrats ne soient soumis à aucune influence.
L’affaire du « mur des cons » a instauré un malaise profond et accru la défiance des Français envers la justice. Ce « mur des cons » n’a donné lieu, de la part de votre prédécesseure, à aucune sanction à l’encontre du syndicat en cause ; la seule personne à avoir été sanctionnée est le journaliste qui a diffusé cette information sur le service public de l’audiovisuel. Cette expression était choquante. Ce mur mettait en cause des élus, des parlementaires, l’actuel Premier ministre, et, ce qui est plus grave, des victimes : le général Schmitt, père d’Anne-Lorraine Schmitt, sauvagement assassinée dans le RER, figurait sur ce « mur des cons » sans que cela n’émeuve personne au sein de l’autorité hiérarchique.
Cet exemple, extrême, j’en conviens, et sans doute non représentatif, pose la question de l’indépendance de la magistrature.
Vous avez, dans le débat sur la réforme constitutionnelle, appelé à plusieurs reprises en renfort ma proposition de loi créant l’indépendance entre le parquet et le Gouvernement. L’indépendance de la magistrature, par l’interdiction de l’appartenance syndicale ou politique, doit être couplée à la première, en vue d’un bon équilibre.
Vous m’objecterez peut-être la Convention européenne des droits de l’homme, dont l’article 11 dispose que toute personne a droit à la liberté de réunion et d’association. Je rappelle que l’alinéa 2 dudit article stipule que « le présent article n’interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l’exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l’administration de l’État. » En outre, la Constitution espagnole dispose à son article 127 : « Les juges et les magistrats ainsi que les procureurs, tant qu’ils sont en activité, ne peuvent exercer d’autres charges publiques, ni appartenir à un parti politique ou à un syndicat. » La Cour européenne des droits de l’homme a eu à connaître cet article et ne l’a pas interdit.
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des Sceaux, ministre de la justice. Avis défavorable. Notre lecture de la Convention reconnaît aux magistrats la liberté de se syndiquer. Le cas de l’Espagne est une exception au sein l’Union européenne. En outre, l’article 10 du statut des magistrats dispose que leur est interdite toute démonstration de nature politique incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonctions ; même s’ils ont cette liberté syndicale, les magistrats, dans l’exercice de leurs fonctions, doivent demeurer neutres et impartiaux. Les débordements que vous avez évoqués sont rares et ont donné lieu à des poursuites judiciaires. Du reste, pourquoi interdire l’exercice du droit syndical à la seule magistrature judiciaire, et pas administrative ou financière ?
Mme Cécile Untermaier, rapporteure. Ce projet de loi organique souhaite, au contraire, consacrer dans l’ordonnance statutaire le droit syndical des magistrats. La reconnaissance du droit syndical ne remet en cause ni l’interdiction faite au corps judiciaire « de toute délibération politique » posée par l’article 10 de l’ordonnance de 1958, ni le devoir de réserve, ni la prohibition du droit de grève. Le droit syndical ne fait pas obstacle au lien de confiance que nous recherchons tous entre citoyens et magistrats. Un cas de mauvais usage d’une liberté, comme avec le « mur des cons », ne justifie pas la suppression de cette liberté. Avis défavorable.
La Commission rejette l’amendement.
Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL104 et CL105 de la rapporteure.
Puis elle examine l’amendement CL22 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 9, qui permet au garde des Sceaux, par décision motivée, de refuser à un syndicat de désigner librement ses représentants bénéficiaires de crédits de temps syndical. Du fait du faible nombre de magistrats concernés par ces décharges, ce pouvoir de dérogation apparaît comme une atteinte disproportionné aux libertés syndicales.
M. le garde des Sceaux. Avis défavorable. Cette faculté offerte au garde des Sceaux est très utile et parfois même indispensable pour garantir la continuité du service, notamment dans les petites juridictions.
Mme la rapporteure. Avis défavorable. Cette disposition est entourée de garanties : elle devra prendre la forme d’une décision motivée, dont le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) sera informé.
La Commission rejette l’amendement.
Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL106, CL107 et CL108 de la rapporteure.
Puis elle adopte l’article 22 modifié.
Article 22 bis (nouveau)
(art. 10-2 [nouveau] de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire
Introduit à l’initiative de votre rapporteure, cet article crée un collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire.
Il s’inspire de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, qui a créé :
– un collège de déontologie de la juridiction administrative (articles L. 131-5 et suivants du code de justice administrative) ;
– un collège de déontologie des juridictions financières (articles L. 120-7 et suivants du code des juridictions financières).
1. Les missions du collège de déontologie
Le collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire est un organe consultatif, interne à l’autorité judiciaire, chargé :
– de rendre des avis « sur toute question déontologique concernant personnellement un magistrat », sur saisine de celui-ci ou de l’un de ses chefs hiérarchiques ;
– de formuler « des recommandations de nature à éclairer les magistrats sur l’application des principes déontologiques », au regard notamment du recueil des obligations déontologiques des magistrats établi par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) ;
– d’examiner les déclarations d’intérêts qui peuvent lui être transmises par les chefs de juridiction en application de l’article 7-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature (résultant de l’article 21 du présent projet de loi organique).
En application du même article 7-2, c’est également au collège de déontologie que seront remises les déclarations d’intérêts du premier président de la Cour de cassation et du procureur général près cette Cour.
Afin de ne pas empiéter sur les prérogatives du CSM, compétent sur les questions générales « relatives à la déontologie des magistrats » (article 65 de la Constitution), le collège de déontologie a vocation à n’émettre que des avis individuels, concernant les situations personnelles qui lui sont soumises.
2. La composition du collège de déontologie
Le collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire est composé de cinq membres, dont trois magistrats de l’ordre judiciaire (92) :
– un magistrat du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation, en fonctions ou honoraire, élu par l’assemblée des magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour. Le premier président de la Cour de cassation ne peut ni participer au vote, ni être élu ;
– un magistrat du parquet hors hiérarchie de la Cour de cassation, en fonctions ou honoraire, élu par l’assemblée des magistrats du parquet hors hiérarchie de la Cour. Le procureur général près ladite Cour ne peut ni participer au vote, ni être élu ;
– alternativement, un premier président de cour d’appel, en fonctions ou honoraire, élu par l’assemblée des premiers présidents de cour d’appel et d’un procureur général près une cour d’appel, en fonctions ou honoraire, élu par l’assemblée des procureurs généraux près les cours d’appel ;
– une personnalité extérieure désignée, alternativement, par le vice-président du Conseil d’État parmi les membres du Conseil d’État en fonctions ou honoraires et par le premier président de la Cour des comptes parmi les magistrats en fonctions à la Cour des comptes ou honoraires ;
– un universitaire nommé par le Président de la République sur proposition, alternativement, du premier président de la Cour de cassation et du procureur général près la Cour.
La durée du mandat des membres du collège de déontologie est de trois ans, renouvelable une fois.
Le président du collège est élu en son sein par ses membres.
Un décret en Conseil d’État précisera les conditions d’application du présent article.
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* *
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL109 de la rapporteure et CL64 de M. Yves Goasdoué.
Mme la rapporteure. Il s’agit de créer un collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire, dont j’ai parlé à plusieurs reprises, inspiré de la loi du 20 avril 2016. Son objectif est de permettre aux magistrats de disposer de ressources et de conseils en matière déontologique sans empiéter sur les compétences du CSM – qui ne peut connaître de situations individuelles – et dans le respect de l’indépendance de la justice. C’est pourquoi il n’est pas question de faire intervenir la Haute Autorité en matière de déclaration d’intérêts. Le rôle du collège n’est que consultatif, mais il pourra rendre publics certains de ses avis ou recommandations en les anonymisant. Il pourra notamment être saisi d’une déclaration d’intérêts par un chef de cour ou de tribunal qui a un doute sur l’existence d’un conflit d’intérêts.
Nous proposons que ce collège soit composé de cinq membres, trois magistrats élus par leurs pairs et deux personnes extérieures désignées par une autorité non judiciaire : un magistrat du siège de la Cour de cassation ; un magistrat du parquet de la Cour de cassation ; alternativement un magistrat du siège et du parquet d’une cour d’appel ; une personnalité extérieure désignée soit par le vice-président du Conseil d’État, soit par le premier président de la Cour des comptes ; un universitaire nommé par le Président de la République sur proposition soit du premier président soit du procureur général de la Cour de cassation.
L’amendement CL64 est retiré.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable. Ce n’est pas une innovation, car cela s’inspire de la loi d’avril 2016 concernant la magistrature administrative. Le collège n’empiétera pas sur les champs de compétence du CSM, qui n’intervient en matière de déontologie que s’il est saisi par le garde des Sceaux.
La Commission adopte l’amendement CL109. L’article 22 bis est ainsi rédigé.
Article 23
(art. 11 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Protection fonctionnelle des magistrats
Cet article tend à préciser l’étendue de la protection fonctionnelle (ou « protection statutaire ») dont bénéficient les magistrats de l’ordre judiciaire.
1. Le droit en vigueur
La protection fonctionnelle des magistrats est garantie par :
– l’article 11 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, qui dispose qu’ « indépendamment des règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, les magistrats sont protégés contre les menaces, attaques de quelque nature que ce soit, dont ils peuvent être l’objet dans l’exercice ou à l’occasion de leurs fonctions. L’État doit réparer le préjudice direct qui en résulte, dans tous les cas non prévus par la législation des pensions » ;
– un principe général du droit, consacré par le Conseil d’État. Selon ce dernier, s’il résulte des dispositions de l’article 11 précité que « les magistrats de l’ordre judiciaire sont protégés contre les menaces et attaques de quelque nature que ce soit, dont ils peuvent être l’objet dans l’exercice ou à l’occasion de leurs fonctions, ces dispositions n’étendent pas le bénéfice de la protection fonctionnelle au cas où le magistrat fait l’objet de poursuites pénales ; (…) toutefois, en vertu d’un principe général du droit qui s’applique à tous les agents publics, lorsqu’un agent public est mis en cause par un tiers à raison de ses fonctions, il incombe à la collectivité publique dont il dépend de lui accorder sa protection dans le cas où il fait l’objet de poursuites pénales, sauf s’il a commis une faute personnelle ; (…) les principes généraux qui régissent le droit de la fonction publique sont applicables aux magistrats, sauf dispositions particulières de leur statut ; (…) ainsi le principe mentionné ci-dessus est, dans le silence, sur ce point, de leur statut et en l’absence de tout principe y faisant obstacle, applicable aux magistrats de l’ordre judiciaire » (Conseil d’État, 11 février 2015, n° 372359).
2. Les deux modifications proposées
Le présent article complète l’article 11 précité, afin de prévoir qu’un décret en Conseil d’État précisera les conditions et les limites de la prise en charge par l’État, au titre de la protection, des frais exposés par le magistrat dans le cadre d’instances civiles ou pénales, ou devant la commission d’admission des requêtes du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), jusqu’au renvoi devant la formation disciplinaire compétente. Il modifie ainsi l’état du droit sur deux points.
D’une part, la protection fonctionnelle s’appliquera non seulement aux instances civiles ou pénales mettant en cause un magistrat, mais aussi à celles devant la commission d’admission des requêtes du CSM.
Ce dernier point constitue une innovation, dans la mesure où, en droit de la fonction publique, la protection fonctionnelle n’est normalement pas applicable aux procédures disciplinaires (93). L’objectif est de tenir compte de la situation particulière des magistrats depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, aux termes de laquelle « le Conseil supérieur de la magistrature peut être saisi par un justiciable dans les conditions fixées par une loi organique » (94). Or, comme le souligne l’étude d’impact jointe au présent projet de loi organique, « la faculté pour un justiciable de saisir directement le conseil de discipline (Conseil supérieur de la magistrature) est une spécificité applicable aux seuls magistrats de l’ordre judiciaire, qui n’a pas d’équivalent pour les autres agents de l’État ou les autres personnes exerçant des fonctions juridictionnelles sans être soumises au statut de la magistrature ».
Cette protection ne pourrait donc jouer qu’au stade de l’instruction de la plainte par la commission d’admission des requêtes du CSM, saisie par un justiciable, et prendrait fin en cas de renvoi du magistrat devant la formation disciplinaire.
D’autre part, le présent article renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de fixer « les conditions et les limites » de la protection fonctionnelle. Selon la jurisprudence administrative, l’État n’est pas tenu de prendre à sa charge l’intégralité des frais liés à l’assistance juridique de l’agent bénéficiant de sa protection (95). Le pouvoir réglementaire pourra ainsi, par exemple, préciser dans quelles limites des honoraires d’avocats pourront être remboursés.
Cette disposition reprend celle déjà prévue pour les fonctionnaires et les militaires :
– à l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction résultant de l’article 20 de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires ;
– à l’article L. 4123-10 du code de la défense, résultant de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale.
*
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La Commission adopte l’article 23 sans modification.
Article 24
(art. 12-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Dossier des magistrats
Cet article apporte deux modifications au dossier administratif des magistrats de l’ordre judiciaire, mentionné à l’article 12-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.
1. Le retrait du dossier des pièces relatives à un non-lieu à sanction
Le présent article prévoit que lorsqu’il a fait l’objet de poursuites disciplinaires qui se sont conclues par un non-lieu à sanction, le magistrat peut demander le retrait de son dossier des pièces relatives à cette procédure.
À l’heure actuelle, un magistrat peut obtenir de l’administration qu’elle retire de son dossier les seules pièces qui n’ont pas à y figurer (96), par exemple parce qu’elles contreviennent à l’interdiction d’y faire état de ses opinions ou de ses activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques ou d’éléments relevant strictement de sa vie privée (article 12-2 de l’ordonnance de 1958 précitée).
En revanche, les pièces relatives à des procédures disciplinaires peuvent figurer au dossier du magistrat, même si les poursuites ont donné lieu à une décision de non-lieu. Le présent article vise à permettre au magistrat concerné d’en obtenir le retrait. À l’initiative de votre rapporteure, la commission des Lois a précisé que ce retrait était de droit.
Votre rapporteure s’est interrogée sur l’opportunité d’étendre la portée de ce dispositif, en prévoyant un retrait de plein droit (et non plus sur demande du magistrat), au bout d’un certain délai. Toutefois, certains magistrats peuvent voir un intérêt à ce que de telles pièces continuent de figurer dans leur dossier, dans le but de démontrer qu’ils ont bénéficié d’un non-lieu après avoir été poursuivis à tort.
2. La dématérialisation du dossier
Comme l’indique l’étude d’impact jointe au présent projet de loi organique, la numérisation des dossiers administratifs des magistrats en activité, amorcée en décembre 2007, est achevée depuis le 30 juin 2014. Celle-ci facilite non seulement la gestion des pièces qui composent le dossier du magistrat, mais également sa consultation par les instances telles que la commission d’avancement, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et l’inspection générale des services judiciaires (IGSJ).
Le présent article consacre cette évolution, en prévoyant à l’article 12-2 de l’ordonnance de 1958 précitée que le dossier du magistrat peut être géré sur support électronique, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Ce décret précisera, en particulier, le contenu du dossier, les conditions de sa consultation et la durée de conservation des documents qui y figurent.
Des dispositions similaires sont déjà en vigueur pour les fonctionnaires, en application de l’article 18 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, modifiée par la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique (97).
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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL110 de la rapporteure.
Elle examine ensuite l’amendement CL111 de la rapporteure.
Mme le rapporteure. Il s’agit de préciser que le retrait est de droit lorsque le magistrat le demande pour des pièces relatives à des poursuites disciplinaires.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite l’article 24 modifié.
Article 25
(art. 44 et 47 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Procédure d’avertissement et prescription des procédures disciplinaires
Cet article apporte des garanties supplémentaires aux magistrats de l’ordre judiciaire faisant l’objet d’un avertissement et introduit une prescription triennale en matière disciplinaire.
1. Le renforcement des garanties applicables à la procédure d’avertissement
L’article 44 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature prévoit qu’ « en dehors de toute action disciplinaire », l’inspecteur général des services judiciaires, les premiers présidents, les procureurs généraux et les directeurs ou chefs de service à l’administration centrale ont le pouvoir de donner un avertissement aux magistrats placés sous leur autorité. Celui-ci est automatiquement effacé du dossier au bout de trois ans si aucun nouvel avertissement ou aucune sanction disciplinaire n’est intervenu pendant cette période.
Selon la jurisprudence administrative, l’avertissement étant une mesure prise en considération de la personne, elle doit être précédée de la communication du dossier (98) et respecter les droits de la défense, qui imposent à l’autorité compétente d’aviser le magistrat, dans un délai raisonnable, de la décision qu’elle s’apprête à prendre (99).
Le présent article apporte trois garanties procédurales supplémentaires.
En premier lieu, aucun avertissement ne pourra être prononcé sans entretien préalable, la convocation à ce dernier ouvrant droit à la communication du dossier et des pièces justifiant la mise en œuvre de la procédure.
En deuxième lieu, sur proposition du rapporteur de la commission des Lois, M. François Pillet, le Sénat a prévu que le magistrat concerné pourra se faire assister de la personne de son choix.
En dernier lieu, par cohérence avec l’introduction d’un délai de prescription en matière disciplinaire (voir le point 2 ci-après), le présent article dispose qu’aucun avertissement ne pourra être prononcé au delà de deux ans, à compter de la connaissance des faits justifiant cette mesure par, selon le cas, l’inspecteur général des services judiciaires, le chef de cour, le directeur ou le chef de service de l’administration centrale. Ce délai est plus court que celui de trois ans retenu en matière disciplinaire, l’avertissement étant une réponse aux manquements les moins graves.
2. L’introduction d’une prescription triennale en matière disciplinaire
À la différence du droit du travail (100), les poursuites disciplinaires à l’encontre des agents publics ont longtemps été imprescriptibles : « aucun texte n’enferme dans un délai déterminé l’exercice de l’action disciplinaire » soulignait le Conseil d’État dans l’arrêt Deleuze du 27 mai 1955 – jurisprudence réaffirmée le 12 mars 2014 (101). Le Conseil constitutionnel, quant à lui, a refusé d’ériger en principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR) « le principe selon lequel les poursuites disciplinaires sont nécessairement soumises à une règle de prescription » (102).
Toutefois, afin de renforcer les garanties offertes aux agents publics, le législateur a récemment mis fin à ce principe d’imprescriptibilité. L’article 36 de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a introduit un délai de prescription de trois ans de l’action disciplinaire dans le statut général des fonctionnaires. En application de l’article 19 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, aucune procédure disciplinaire ne peut désormais « être engagée au-delà d’un délai de trois ans à compter du jour où l’administration a eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits passibles de sanction. En cas de poursuites pénales exercées à l’encontre du fonctionnaire, ce délai est interrompu jusqu’à la décision définitive de classement sans suite, de non-lieu, d’acquittement, de relaxe ou de condamnation. Passé ce délai et hormis le cas où une autre procédure disciplinaire a été engagée à l’encontre de l’agent avant l’expiration de ce délai, les faits en cause ne peuvent plus être invoqués dans le cadre d’une procédure disciplinaire ». Des dispositions similaires ont été prises, par la même loi, à l’égard des militaires (article L. 4137-1 du code de la défense).
Le présent article introduit un même délai de trois ans en matière d’action disciplinaire contre les magistrats de l’ordre judiciaire. L’article 47 de l’ordonnance de 1958 précitée disposera ainsi que les autorités disciplinaires
– selon le cas, le Garde des Sceaux ou les chefs de cour – ne peuvent saisir le CSM de faits motivant des poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de trois ans à compter du jour où ils ont eu connaissance de ces faits.
Votre rapporteure souligne que ce délai de trois ans ne s’appliquera pas à la saisine du CSM par les justiciables. Leur opposer un tel délai pourrait, en effet, les priver de cette possibilité de saisine, dès lors qu’elle ne peut être dirigée, selon les articles 50-3 et 63 de l’ordonnance de 1958, « contre un magistrat qui demeure saisi de la procédure » ou dont le parquet auquel il appartient « demeure chargé de la procédure ».
3. Les modifications apportées par votre commission des Lois
Outre l’ajout de modifications rédactionnelles à l’article 44 de l’ordonnance de 1958 précitée tirant les conséquences de la création de l’inspection générale de la justice, votre commission des Lois, sur proposition de votre rapporteure, a complété le présent article, afin de préciser le point de départ des délais de prescription de la procédure d’avertissement et de l’action disciplinaire.
Transposant les dispositions de l’article 36 de la loi du 20 avril 2016 précitée, elle a prévu que les délais instaurés au présent article commenceront à courir à compter de la « connaissance effective de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits » passibles d’avertissement ou de sanction. La Commission a, en outre, précisé les conditions d’interruption de ces délais en cas de poursuites pénales contre le magistrat.
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La Commission est saisie de l’amendement CL46 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. C’est le même amendement que précédemment sur l’inspection générale de la justice.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CL112 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement précise le point de départ du délai de prescription pour une procédure d’avertissement à l’encontre d’un magistrat, en reprenant les mêmes conditions que celles prévues dans la loi d’avril 2016.
La Commission adopte l’amendement.
Elle en vient à l’amendement CL113 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement précise le point de départ du délai de prescription, cette fois en matière disciplinaire.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite l’article 25 modifié.
Article 25 bis
(art. 43, 48 et 59 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Exercice du pouvoir disciplinaire à l’égard des magistrats exerçant des fonctions à l’inspection générale des services judiciaires
Introduit au Sénat, cet article de coordination tire les conséquences, en matière disciplinaire, de la réforme statutaire de l’inspection générale des services judiciaires (IGSJ).
Votre rapporteure rappelle que l’article 1er du présent projet de loi organique intègre au corps judiciaire les membres de l’inspection générale des services judiciaires et que les articles 13 et 18 alignent leurs conditions de nomination sur celles des magistrats du parquet (103).
Le présent article, quant à lui, prend en compte les membres de l’inspection générale des services judiciaires dans les dispositions fixant les conditions d’exercice de l’action disciplinaire.
En conséquence, pour les magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général, d’inspecteur général adjoint ou d’inspecteur des services judiciaires :
– la faute disciplinaire s’appréciera compte tenu des obligations qui découlent de la subordination hiérarchique du magistrat concerné (article 43 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature statutaire) ;
– le pouvoir disciplinaire sera exercé par le Garde des Sceaux (article 48 de la même ordonnance) ;
– seront applicables les dispositions relatives à la discipline des magistrats du parquet, prévues à la section III du chapitre VII de la même ordonnance (en application du second alinéa de l’article 59, modifié par le présent article).
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Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement de conséquence CL47 du Gouvernement.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL114 de la rapporteure.
Puis elle adopte l’article 25 bis modifié.
Article 25 ter (nouveau)
(art. 50-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Conséquences rédactionnelles de la création
de l’inspection générale de la justice
Introduit à l’initiative du Gouvernement, cet article tire les conséquences rédactionnelles de la création de l’inspection générale de la justice à l’article 50-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature, qui régit certaines poursuites disciplinaires contre un magistrat.
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Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement CL31 du Gouvernement. L’article 25 ter est ainsi rédigé.
Article 26
(art. 50-4 et 50-5 [nouveaux], 63 et 63-1 à 63-3 [nouveaux] de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature)
Délais en matière disciplinaire
Cet article fixe des délais aux procédures disciplinaires visant les magistrats de l’ordre judiciaire, afin qu’il puisse être statué sur leur cas dans un temps raisonnable. Il peut être rapproché de l’article 25, qui introduit un délai de prescription de l’action disciplinaire.
1. Le droit en vigueur
Le pouvoir disciplinaire appartient :
– au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) s’agissant des magistrats du siège. Il statue alors dans sa formation compétente à l’égard de ces magistrats (104), à laquelle s’ajoute le magistrat du siège appartenant à la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet (article 65, alinéa 6, de la Constitution) ;
– au Garde des Sceaux, après avis du CSM, s’agissant des magistrats du parquet, de l’administration centrale et, en application de l’article 25 bis du présent projet, de l’inspection générale des services judiciaires. L’avis – simple – du CSM est rendu par sa formation compétente à l’égard des magistrats du parquet (105), complétée par le magistrat du parquet appartenant à la formation compétente à l’égard des magistrats du siège (article 65, alinéa 7, de la Constitution).
À l’heure actuelle, les seuls délais prévus en matière disciplinaire par l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature concernent la saisine du CSM à propos d’une mesure d’interdiction temporaire d’exercice (ITE) d’un magistrat (106).
En application de l’article 50, le CSM peut être saisi par le Garde des Sceaux, un premier président de cour d’appel ou un président de tribunal supérieur d’appel, afin d’interdire temporairement l’exercice de ses fonctions à un magistrat du siège faisant l’objet d’une enquête administrative ou pénale, jusqu’à la décision définitive sur les poursuites disciplinaires. Cette procédure n’est applicable que « s’il y a urgence » et à la suite d’une « plainte » adressée au Garde des Sceaux ou lorsque ce dernier ou les autorités juridictionnelles précitées sont informés de « faits paraissant de nature à entraîner des poursuites disciplinaires ».
Le CSM doit alors statuer dans les quinze jours suivant sa saisine. S’il a prononcé l’interdiction temporaire d’exercice, le CSM doit ensuite être saisi dans les deux mois, par les mêmes autorités (107), en vue de se prononcer, au fond, sur les faits motivant les poursuites disciplinaires. À défaut d’une telle saisine, l’interdiction temporaire cesse, de plein droit, de produire ses effets et le magistrat est rétabli dans ses fonctions. En revanche, la décision au fond du CSM n’est soumise à aucun délai et la durée de la mesure d’interdiction temporaire d’exercice n’est donc pas limitée. Le nouvel article 50-5 créé par le présent article tend à y remédier (voir ci-après).
Une procédure similaire et des délais identiques sont prévus à l’article 58-1 à l’égard des magistrats du parquet. Dans ce cas, les autorités de saisine sont, outre le Garde des Sceaux, les procureurs généraux près les cours d’appel et les procureurs de la République près les tribunaux supérieurs d’appel. Le CSM ne se prononce alors que pour avis, tant sur l’interdiction temporaire d’exercice que sur les faits motivant les poursuites disciplinaires.
2. L’introduction de délais applicables aux magistrats du siège
Le présent article introduit deux nouveaux articles dans l’ordonnance de 1958 précitée, comportant plusieurs délais encadrant la procédure disciplinaire applicable aux magistrats du siège.
Le nouvel article 50-4 dispose que, lorsqu’il est saisi de faits motivant des poursuites disciplinaires par le Garde des Sceaux, un premier président de cour d’appel, un président de tribunal supérieur d’appel ou un justiciable (108), le CSM se prononce dans les douze mois suivant cette saisine. Ce délai n’est cependant qu’indicatif, puisque le CSM a la faculté de le proroger, par décision motivée, pour une durée de six mois renouvelable.
Les délais qui précèdent sont réduits dans le cas particulier où le magistrat fait l’objet d’une interdiction temporaire d’exercice – soit en application de l’article 50 précité (voir le point 1 ci-avant), soit en application de l’article 51, qui permet au CSM de prononcer de sa propre initiative l’interdiction temporaire d’exercice. Le nouvel article 50-5 prévoit que le CSM se prononce alors, sur le fond des poursuites disciplinaires (109), dans les huit mois (au lieu de douze en principe), à compter de sa saisine par le Garde des Sceaux, un premier président de cour d’appel, un président de tribunal supérieur d’appel ou un justiciable. Le CSM peut, par décision motivée, proroger ce délai pour une durée de quatre mois non renouvelable (au lieu d’une durée de six mois renouvelable). La portée juridique de ces délais est ici plus contraignante, puisque leur méconnaissance entraîne le rétablissement de plein droit du magistrat dans ses fonctions. Toutefois, si ce dernier fait l’objet de poursuites pénales, le CSM peut décider de maintenir
– au delà des douze mois (huit plus quatre) – l’interdiction temporaire d’exercice jusqu’à sa décision définitive sur les poursuites disciplinaires.
3. L’introduction de délais applicables aux magistrats du parquet
Le présent article introduit trois nouveaux articles dans l’ordonnance de 1958 précitée, transposant les délais qui précèdent à la procédure disciplinaire applicable aux magistrats du parquet.
Le nouvel article 63-1 dispose que, lorsqu’il est saisi de faits motivant des poursuites disciplinaires par le Garde des Sceaux, un procureur général près une cour d’appel, un procureur de la République près les tribunaux supérieurs d’appel ou un justiciable (110), le CSM se prononce dans les douze mois suivant cette saisine. Là encore, ce délai est indicatif, le CSM ayant la faculté de le proroger, par décision motivée, pour une durée de six mois renouvelable.
Ces délais ne pèsent ainsi que sur le CSM, dont le rôle est consultatif, et non sur l’autorité décisionnaire qu’est le Garde des Sceaux.
Comme pour les magistrats du siège, des délais spécifiques – qui s’appliquent alors au Garde des Sceaux – sont prévus lorsque le magistrat du parquet fait l’objet d’une interdiction temporaire d’exercice. Le nouvel article 63-2 prévoit que le Garde des Sceaux doit se prononcer, sur le fond des poursuites disciplinaires (111), dans les huit mois à compter de la saisine du CSM par lui, par un procureur général près une cour d’appel, par un procureur de la République près les tribunaux supérieurs d’appel ou par un justiciable. Le Garde des Sceaux peut, par décision prise après avis motivé du CSM, proroger ce délai pour une durée de quatre mois non renouvelable. La méconnaissance de ces délais entraîne le rétablissement de plein droit du magistrat dans ses fonctions. Toutefois, si ce dernier fait l’objet de poursuites pénales, le Garde des Sceaux peut décider de maintenir – au delà des douze mois – l’interdiction temporaire d’exercice jusqu’à sa décision définitive sur les poursuites disciplinaires.
Pour une meilleure lisibilité des règles encadrant la procédure disciplinaire des magistrats du parquet, le nouvel article 63-2 reprend les dispositions figurant aujourd’hui aux deux derniers alinéas de l’actuel article 63, supprimés par le 2° du présent article.
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Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement CL48 du Gouvernement tirant les conséquences de la création de l’inspection générale de la justice à l’article 63 de l’ordonnance de 1958.
Elle adopte ensuite l’article 26 modifié.
Chapitre V
Dispositions relatives aux autres modalités de recrutement des magistrats
Article 27
(chapitres V bis à V quater de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958
portant loi organique relative au statut de la magistrature)
Modifications légistiques
Cet article réorganise les chapitres V bis à V quater de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. Ces quatre chapitres sont aujourd’hui relatifs, respectivement, aux conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire, au détachement judiciaire et aux magistrats exerçant à titre temporaire.
Ces dispositions ont pour point commun de s’appliquer à l’exercice provisoire, par des magistrats non professionnels, de fonctions juridictionnelles. En conséquence, le présent article tend à les regrouper dans le seul chapitre V bis, dont le nouvel intitulé sera : « De l’intégration provisoire dans le corps judiciaire ».
Ce chapitre comportera :
– une section 1 intitulée : « De l’intégration provisoire à temps plein », subdivisée en une sous-section 1 : « Des conseillers et des avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire » (articles 40-1 à 40-7) et une sous-section 2 : « Du détachement judiciaire » (articles 41 à 41-9) ;
– une section 2 intitulée : « De l’intégration provisoire à temps partiel » et comprenant une sous-section 1 : « Des magistrats exerçant à titre temporaire » (articles 41-10 à 41-16, modifiés par l’article 29 du présent projet de loi organique) et une sous-section 2 : « Des magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles » (articles 41-25 à 41-31, créés par l’article 31 du présent projet).
Purement légistiques, ces modifications contribueront à rendre plus lisible le statut de la magistrature.
À l’initiative de M. Alain Tourret, votre commission des Lois a modifié le présent article par coordination avec la nouvelle rédaction retenue à l’article 29 du présent projet, qui supprime le statut de juge de proximité et l’intègre dans celui de magistrat à titre temporaire (voir ci-après).
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La Commission est saisie de l’amendement CL77 de M. Alain Tourret.
M. Alain Tourret. Il s’agit d’un amendement de coordination qui a pour objet de prendre en compte l’intégration des juges de proximité dans le statut des magistrats à titre temporaire en réorganisant les sous-sections de la section II intitulée « De l’intégration provisoire à temps partiel » du chapitre V bis intitulé « De l’intégration provisoire dans le corps judiciaire ». La sous-section 2 serait ainsi supprimée.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
Après quoi, elle adopte l’article 27 modifié.
Article 27 bis (nouveau)
(art. 40-1, 40-2 et 40-4 de l’ordonnance n° 58-1270 du 2 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Statut des conseillers et avocats généraux
à la Cour de cassation en service extraordinaire
Introduit à l’initiative du Gouvernement, cet article vise à améliorer le statut des conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire.
Peuvent aujourd’hui être nommées en cette qualité, si elles remplissent les conditions applicables aux auditeurs de justice et si elles justifient de vingt-cinq années au moins d’activité professionnelle, « les personnes que leur compétence et leur activité qualifient particulièrement pour l’exercice de fonctions judiciaires à la Cour de cassation » (article 40-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 2 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature). La durée des fonctions ne peut excéder huit ans.
Le présent article apporte trois modifications visant à favoriser le recrutement de conseillers et d’avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire.
Premièrement, il abaisse de vingt-cinq à vingt années la durée d’expérience professionnelle préalablement requise.
Deuxièmement, il porte de huit à dix années la durée maximale d’exercice des fonctions.
Troisièmement, à l’expiration de cette durée, il permet aux conseillers ou avocats généraux en service extraordinaire de se prévaloir de l’honorariat. Cette possibilité pourrait cependant leur être refusée par une décision motivée de l’autorité qui prononce la cessation des fonctions, après avis de la formation du CSM compétente à l’égard du magistrat, selon qu’il exerce ses fonctions au siège ou au parquet. En cas de poursuites disciplinaires, l’honorariat ne pourrait être demandé que dans les deux mois suivant la fin de celles-ci.
Votre rapporteure rappelle qu’en application de l’article 78 de l’ordonnance de 1958 précitée, les magistrats honoraires demeurent attachés, en cette qualité, à la juridiction à laquelle ils appartenaient. Ils « continuent à jouir des honneurs et privilèges attachés à leur état, et peuvent assister en costume d’audience aux cérémonies solennelles de leur juridiction. Ils prennent rang à la suite des magistrats de même grade ».
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La Commission examine l’amendement CL32 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Dans l’optique d’une plus grande ouverture de la magistrature, les fonctions de conseiller et d’avocat général en service extraordinaire sont, par cet amendement, rendues plus attractives en abaissant le nombre d’années d’activité professionnelle requis pour être nommé et en fixant dorénavant la durée du mandat à dix ans. En outre, les conseillers ou avocats généraux en service extraordinaire, à l’expiration de leur mandat de dix ans, pourront dorénavant se prévaloir de l’honorariat.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
L’article 27 bis est ainsi rédigé.
Article 28
(art. 41 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Ouverture aux militaires du détachement judiciaire
Cet article ouvre aux militaires la procédure de détachement judiciaire.
En application des articles 41 et suivants de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, certaines personnes peuvent bénéficier, pour une durée de cinq ans non renouvelable, d’un détachement judiciaire leur permettant d’exercer les fonctions des premier et second grades de la hiérarchie judiciaire (112). Le nombre total de détachements judiciaires ne peut excéder un vingtième des emplois de chacun de ces deux grades.
Cette possibilité est actuellement ouverte :
– aux membres des corps recrutés par la voie de l’École nationale d’administration (ENA) ;
– aux professeurs et aux maîtres de conférences des universités ;
– dans les conditions prévues par leur statut, aux fonctionnaires de l’État, territoriaux et hospitaliers et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires appartenant à des corps et cadres d’emplois de même niveau de recrutement. En pratique, il s’agit de fonctionnaires appartenant à la catégorie A supérieure.
Pour exercer les fonctions du second grade, les personnes doivent justifier d’au moins quatre ans de service, durée portée à sept ans pour les fonctions du premier grade.
Le détachement judiciaire est prononcé, après avis conforme de la commission d’avancement, par arrêté du Garde des Sceaux et, le cas échéant, du ministre dont relève le corps auquel appartient l’intéressé. Un stage d’une durée de six mois doit être accompli avant l’exercice des fonctions judiciaires.
Afin de diversifier les recrutements, le présent article étend ces dispositions aux militaires, qui pourront ainsi bénéficier du détachement judiciaire. Comme le souligne l’étude d’impact du présent projet, « les militaires, notamment les officiers supérieurs, constituent un vivier de recrutement important et de qualité ».
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La Commission adopte l’article 28 sans modification.
Article 28 bis (nouveau)
(art. 41-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Modalités du détachement judiciaire
Introduit à l’initiative de votre rapporteure, cet article modifie les modalités du détachement judiciaire (113), en garantissant à l’agent qui en bénéficie sa prise en charge à équivalence de grade et à un échelon indiciaire égal ou immédiatement supérieur à ceux qu’il détenait avant d’être détaché. Il s’agit ainsi de rendre cette voie de recrutement plus attractive.
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La Commission examine l’amendement CL115 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit de rendre plus attrayant le détachement judiciaire, qui sera « prononcé à équivalence de grade et à l’échelon comportant un indice égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui que l’intéressé détenait dans son corps d’origine ».
M. le garde des Sceaux. Avis favorable. Cet amendement garantit une plus grande ouverture du corps de la magistrature.
La Commission adopte l’amendement. L’article 28 bis est ainsi rédigé.
Article 29
(art. 41-10 à 41-16 et chapitre V quinquies [abrogé] de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature)
Statut des magistrats exerçant à titre temporaire
Cet article vise à favoriser le recrutement de magistrats exerçant à titre temporaire.
1. Le texte adopté par le Sénat
Depuis 1995, des personnes de moins de 65 ans justifiant de sept années d’expérience professionnelle « les qualifiant particulièrement pour l’exercice des fonctions judiciaires » peuvent exercer des fonctions de juge d’instance ou d’assesseur dans les formations collégiales des tribunaux de grande instance (TGI).
Au 31 décembre 2014, on ne comptait cependant que 26 magistrats exerçant à titre temporaire. Le présent article tend à assouplir les dispositions régissant cette fonction, afin de la rendre plus attractive.
En premier lieu, il réduit à cinq ans – au lieu de sept – la durée d’exercice professionnel requise pour les membres ou anciens membres des professions libérales juridiques et judiciaires soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé (article 41-10 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature). Sont concernés les avocats, les huissiers, les notaires et les commissaires-priseurs, administrateurs et mandataires judiciaires.
En deuxième lieu, alors que les magistrats recrutés à titre temporaire sont aujourd’hui nommés pour une durée de sept ans non renouvelable, ils le seront désormais pour une durée de cinq ans renouvelable une fois (article 41-12 de la même ordonnance). Ce système sera plus souple, offrant la possibilité d’exercer soit un seul mandat plus court qu’aujourd’hui, soit deux mandats d’une durée totale plus longue.
Les magistrats à titre temporaire souhaitant exercer un second mandat devront le demander six mois avant l’expiration du premier. Le texte proposé par le Gouvernement disposait que le renouvellement serait accordé de droit, sauf opposition de la formation compétente du CSM « tenant à l’inaptitude de l’intéressé ». À l’initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. François Pillet, le Sénat a renforcé le pouvoir du CSM, en prévoyant un avis conforme de ce dernier – par parallélisme avec les formalités de nomination (114). En cas de renouvellement, le second mandat serait de droit effectué au sein de la même juridiction.
En troisième lieu, à l’instar des juges de proximité aujourd’hui (115), les magistrats exerçant à titre temporaire ne pourront être mutés sans leur consentement (article 41-13 de la même ordonnance).
Enfin, au-delà du présent article, le Gouvernement envisage de revaloriser financièrement l’exercice de la fonction de magistrat à titre temporaire, en relevant, par décret, la limite du nombre de vacations maximum que ces magistrats peuvent effectuer chaque année, afin de la placer au niveau de celle des juges de proximité – soit 200 vacations par an au lieu de 120. La rétribution par audience civile serait, elle aussi, alignée sur celle des juges de proximité, passant de trois à cinq vacations par audience civile.
2. Les modifications apportées par votre commission des Lois
À l’initiative de M. Alain Tourret et suivant l’avis favorable de votre rapporteure, votre commission des Lois a adopté une nouvelle rédaction du présent article, fusionnant le statut des magistrats à titre temporaire avec celui des juges de proximité (supprimé par l’article 30 du présent projet), ces deux statuts étant très proches.
En conséquence, les termes « juge de proximité » disparaitront, au profit des seules fonctions de « magistrat exerçant à titre temporaire ».
Le présent article reprend, en très grande partie, le droit en vigueur régissant les magistrats à titre temporaire – par exemple la définition des fonctions susceptibles d’être exercées – et les juges de proximité – en particulier l’âge minimal de 35 ans, la limite d’âge de 75 ans et le rôle du CSM dans leur recrutement.
Il conserve également les innovations qui figuraient dans le texte adopté par le Sénat, notamment :
– le mandat de cinq ans renouvelable une fois (au lieu d’une durée de sept ans non renouvelable) ;
– le renouvellement de plein droit de ce mandat, dès lors que le CSM a donné un avis conforme.
Corrélativement, le présent article augmente les capacités d’intervention des magistrats à titre temporaire : aujourd’hui fixé au quart des services du tribunal dans lequel ils sont affectés, le plafond est porté au tiers des services, afin de pouvoir y comptabiliser les anciens juges de proximité.
Sur proposition de votre rapporteure, la commission des Lois a précisé que les magistrats à titre temporaire seraient tenus d’établir une déclaration d’intérêts, dans les mêmes conditions que les autres magistrats.
L’article 35 du présent projet comporte les dispositions transitoires accompagnant cette réforme.
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La Commission examine l’amendement CL76 de M. Alain Tourret, qui fait l’objet d’un sous-amendement CL116 de la rapporteure.
M. Alain Tourret. Cet amendement vise à intégrer le statut des juges de proximité dans celui des magistrats à titre temporaire. L’objectif est d’unifier dans l’ordonnance statutaire le régime des magistrats non professionnels.
Les magistrats exerçant à titre temporaire – seule cette dénomination sera conservée – issus de la fusion avec les juges de proximité devront être âgés de trente-cinq ans au moins et justifier d’une compétence et d’une expérience les qualifiant particulièrement pour exercer des fonctions judiciaires.
Dans le cadre de cette fusion, l’autorité chargée d’examiner les candidatures sera le CSM. Il s’agit d’une reprise des dispositions actuellement applicables aux juges de proximité.
Le régime disciplinaire et les conditions d’exercice d’une activité professionnelle concomitamment à l’exercice des fonctions judiciaires actuellement applicables aux magistrats exerçant à titre temporaire, et similaires aux dispositions applicables aux juges de proximité, sont conservées et complétées.
Mme la rapporteure. Mon sous-amendement rejoint la préoccupation exprimée tout à l’heure par M. Coronado. Ces magistrats exerçant à titre temporaire seront tenus de déclarer leurs intérêts au président du tribunal de grande instance dans lequel ils exercent leurs fonctions.
M. Alain Tourret. Je suis favorable à ce sous-amendement.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement n’est pas convaincu, s’agissant du sous-amendement, que cette précision doive figurer dans la loi, mais il n’y est pas hostile. L’amendement, qui simplifie le régime des magistrats non professionnels, recueille en revanche sa vive approbation.
La Commission adopte le sous-amendement CL116.
Puis elle adopte l’amendement CL76 sous-amendé.
En conséquence, l’amendement CL65 de M. Yves Goasdoué tombe.
La Commission adopte l’article 29 modifié.
Article 30 (supprimé)
(art. 41-19 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Statut des juges de proximité
Supprimé par votre commission des Lois, cet article visait à favoriser le recrutement de juges de proximité.
1. Le texte adopté par le Sénat
La suppression des juridictions de proximité, créées en 2002-2003, a été décidée par la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles. Initialement programmée pour le 1er janvier 2013, cette suppression a fait l’objet d’un premier report au 1er janvier 2015 (116), puis d’un second au 1er janvier 2017 (117).
La loi a cependant maintenu la fonction de juge de proximité. Le statut de ces magistrats non professionnels est fixé aux articles 41-17 à 41-24 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.
Jusqu’au 31 décembre 2016, les juges de proximité exercent des fonctions civiles et pénales au siège de la juridiction de proximité et des fonctions d’assesseur au tribunal correctionnel. À compter du 1er janvier 2017, ils exerceront des fonctions civiles au siège du tribunal d’instance (TI) et du tribunal de grande instance (TGI), ne pouvant siéger que dans les formations collégiales de ce dernier. Ils exerceront également des fonctions pénales au tribunal de police et continueront à siéger en qualité d’assesseurs au tribunal correctionnel.
Au 1er janvier 2015, on dénombrait 500 juges de proximité – dont 113 achèveront leur mandat en 2019 – et 180 postes non pourvus.
Afin de rendre plus attrayant le statut de juge de proximité, le présent article modifie les règles encadrant la durée des fonctions, dans le même sens que l’article 29 pour les magistrats exerçant à titre temporaire. Les juges de proximité seront dorénavant nommés pour une durée de cinq ans renouvelable une fois (article 41-19 de l’ordonnance de 1958 précitée), et non plus pour une durée de sept ans non renouvelable.
Le renouvellement du mandat – qui serait de droit effectué au sein de la même juridiction – devra être sollicité six mois avant l’expiration du premier mandat. Comme à l’article 29, alors que le texte déposé par le Gouvernement disposait que ce renouvellement serait accordé de droit, sauf opposition de la formation compétente du CSM « tenant à l’inaptitude de l’intéressé », le Sénat a requis un avis conforme du CSM. À la différence de l’avis préalable à la nomination (118), celui-ci n’aurait évidemment pas à être précédé de la formation probatoire prévue au troisième alinéa du même article 41-19 (3° du présent article).
2. Un article supprimé par votre commission des Lois
Sur proposition de M. Alain Tourret, suivant l’avis favorable de votre rapporteure, la commission des Lois a supprimé le présent article, par coordination avec la suppression du statut de juge de proximité, désormais intégré dans celui de magistrat à titre temporaire, en application de l’article 29 – modifié par votre Commission – du présent projet de loi organique.
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La Commission est saisie de l’amendement CL75 de M. Alain Tourret.
M. Alain Tourret. Il s’agit d’un amendement de coordination qui a pour objet de prendre en compte l’intégration des juges de proximité dans le statut des magistrats à titre temporaire, en supprimant les dispositions du projet de loi organique portant sur les juges de proximité.
M. Patrick Mennucci. Les juges de proximité aujourd’hui arrivés à la fin de leur mandat pourront-ils bénéficier de cette mesure ?
M. le garde des Sceaux. Il n’y a aucune objection à ce qu’ils soient reconduits s’ils en font la demande.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’amendement CL66 de M. Yves Goasdoué tombe.
La Commission adopte l’article 30 modifié.
Article 30 bis (supprimé)
(art. 41-22 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Conséquences de la suppression des juridictions de proximité sur les incompatibilités applicables aux juges de proximité
Introduit au Sénat à l’initiative de M. Thani Mohamed Soilihi, cet article tirait les conséquences sur les dispositions relatives aux incompatibilités de la suppression des juridictions de proximité.
Cette suppression devant intervenir au 1er janvier 2017 (119), il convenait d’en tenir compte à l’article 41-22 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, qui prévoit actuellement que les membres des professions libérales juridiques et judiciaires soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et leurs salariés « ne peuvent effectuer aucun acte de leur profession dans le ressort de la juridiction de proximité à laquelle ils sont affectés ». Le présent article tend à remplacer le ressort de la juridiction de proximité par celui du tribunal de grande instance (TGI) auquel les juges de proximité concernés sont affectés. Par ailleurs, les membres et les salariés des professions précitées continueront à ne pouvoir exercer leurs fonctions de juge de proximité dans le ressort du TGI où ils ont leur domicile professionnel.
Comme pour l’article 30, la Commission a supprimé le présent article, sur proposition de M. Alain Tourret et suivant l’avis favorable de votre rapporteure, en conséquence de la suppression par l’article 29 du statut de juge de proximité, désormais intégré dans celui de magistrat à titre temporaire.
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La Commission examine l’amendement CL74 de M. Alain Tourret.
M. Alain Tourret. Il s’agit également d’un amendement de coordination qui a pour objet de prendre en compte l’intégration des juges de proximité dans le statut des magistrats à titre temporaire, en supprimant les dispositions du projet de loi organique portant sur les juges de proximité.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 30 bis est supprimé.
Article 31
(art. 41-25 à 41-31 [nouveaux] de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature)
Magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles
Cet article vise à élargir les possibilités d’exercice de fonctions juridictionnelles par des magistrats honoraires.
Ces possibilités sont aujourd’hui limitées aux quelques cas suivants :
– l’exercice de la fonction de juge de proximité (article 41-7 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) ;
– la présidence d’un tribunal des affaires de la sécurité sociale (TASS) ou d’un tribunal du contentieux de l’incapacité (TCI) (120) ;
– l’exercice de la fonction de membre de la cour régionale des pensions de Paris (s’agissant des présidents de chambre et des conseillers honoraires de la cour d’appel de Paris) (121).
Afin d’étendre les fonctions juridictionnelles susceptibles d’être exercées par des magistrats honoraires, le présent article insère de nouveaux articles 41-25 à 41-31 dans l’ordonnance de 1958 précitée, regroupés dans une nouvelle sous-section 3 du chapitre V bis, intitulée : « Des magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles » (122).
● L’article 41-25 prévoit que des magistrats honoraires peuvent être nommés pour exercer des fonctions d’assesseur dans les formations collégiales des tribunaux de grande instance (TGI) et des cours d’appel ou des fonctions de substitut près les tribunaux de grande instance ou de substitut général près les cours d’appel. Ce champ est plus large que celui des magistrats à titre temporaire et des juges de proximité, qui ne peuvent exercer que des fonctions de juge d’instance ou d’assesseur dans les formations collégiales des TGI.
À l’initiative du Gouvernement, la commission des Lois a complété les attributions des magistrats honoraires, qui pourront être désignés par le premier président de la cour d’appel pour présider la formation collégiale statuant en matière de contentieux social des TGI et des cours d’appel spécialement désignés pour connaître de ce contentieux. Il s’agit moins d’un élargissement que d’une coordination avec le projet de loi ordinaire :
– aujourd’hui, les magistrats honoraires peuvent présider un tribunal des affaires de la sécurité sociale (TASS) ou un tribunal du contentieux de l’incapacité (TCI) ;
– dès lors que les articles 8 et 52 du projet de loi de modernisation de la justice du XXIème siècle prévoient de transférer aux TGI les contentieux relevant actuellement des TASS et des TCI, il est logique de continuer à autoriser les magistrats honoraires à exercer les fonctions correspondantes.
Soucieux d’éviter que le présent article ne conduise à faire « basculer massivement en vacations de magistrats honoraires des emplois de magistrats en activité » (123), le Sénat, sur proposition du rapporteur de la commission des Lois, M. François Pillet, a instauré une limite quantitative : le nombre de magistrats honoraires exerçant les fonctions précitées ne peut excéder, pour chaque cour d’appel, le quinzième des emplois de magistrat de cette cour et des tribunaux de première instance compris dans son ressort. Il s’agit du même ratio que celui limitant le nombre de magistrats « placés », au sens du 2° du I de l’article 1er de l’ordonnance de 1958 précitée (124).
Sur proposition du Gouvernement, votre commission des Lois a supprimé cette limite quantitative, ne serait-ce que parce qu’elle s’avérerait difficile à faire respecter en pratique, les magistrats honoraires exerçant leurs fonctions sous forme de vacations, dont le nombre sera limité par le pouvoir réglementaire à 200 par an et par magistrat honoraire.
● L’article 41-26 dispose que les magistrats honoraires traitent des contentieux civil et pénal, après avoir été répartis dans les différentes formations de la juridiction par l’ordonnance de roulement prise par son président et sans que :
– la formation collégiale du TGI ne puisse comprendre plus d’un assesseur choisi parmi les magistrats honoraires ;
– la formation collégiale de la cour d’appel ne puisse comprendre plus d’un assesseur choisi parmi l’ensemble des magistrats recrutés à titre provisoire (magistrats honoraires, magistrats à titre temporaire et juges de proximité).
● L’article 41-27 prévoit que les magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles sont nommés pour une durée de cinq ans non renouvelable par le Président de la République, sur proposition du Garde des Sceaux, après :
– avis conforme de la formation compétente du CSM pour l’exercice de fonctions de magistrat du siège ;
– avis simple de la formation compétente du CSM pour l’exercice de fonctions de magistrat du parquet.
À l’instar des juges de proximité et des magistrats exerçant à titre temporaire, la procédure de transparence prévue à l’article 27-1 de l’ordonnance de 1958 ne sera pas applicable aux magistrats honoraires.
À leur demande, ces magistrats pourront bénéficier, dans les deux mois qui suivent leur installation, d’une formation préalable. Celle-ci sera obligatoire en cas de nomination à des fonctions que le magistrat n’a jamais exercées avant son admission à la retraite.
Les conditions de dépôt et d’instruction des dossiers de candidature, les modalités d’organisation et la durée de la formation, ainsi que les conditions dans lesquelles sont assurées l’indemnisation et la protection sociale des candidats seront fixées par décret en Conseil d’État.
● L’article 41-28 prévoit que les magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles ne peuvent être mutés sans leur consentement et les soumet au statut de la magistrature, sous les réserves suivantes (identiques à celles applicables aux juges de proximité) :
– ils ne peuvent être membres du CSM ou de la commission d’avancement, ni participer à la désignation des membres de ces instances ;
– ils ne peuvent recevoir aucun avancement de grade ;
– ils ne sont pas soumis à l’obligation de résidence prévue à l’article 13 de l’ordonnance de 1958 précitée ;
– ils ne sont pas liés par la limite d’âge de 67 ans fixée à l’article 76 de la même ordonnance, mais par celle de 72 ans introduite à l’article 41-31 (voir ci-après).
Les conditions d’indemnisation de ces magistrats seront définies par décret en Conseil d’État.
Sur proposition de M. Sergio Coronado et avec l’avis favorable de votre rapporteure, la commission des Lois a précisé que les magistrats honoraires étaient astreints à l’obligation de déclarer leurs intérêts.
● L’article 41-29 introduit une autre exception au statut de la magistrature, en permettant aux magistrats honoraires d’exercer concomitamment une activité professionnelle, à la condition que cette dernière :
– ne soit pas de nature à porter atteinte à la dignité de la fonction de magistrat et à son indépendance ;
– ne soit pas une activité d’agent public. Par exception, les fonctions de professeur et de maître de conférences des universités pourront être cumulées avec l’exercice de fonctions juridictionnelles ;
– ne consiste pas en l’exercice, dans le ressort de leur juridiction, d’une profession juridique ou judiciaire réglementée. Aucun acte d’une telle profession ne pourra être accompli dans ce même ressort.
Le respect de ces incompatibilités sera assuré par le premier président de la cour d’appel ou le procureur général près la cour d’appel dans le ressort de laquelle le magistrat honoraire est affecté.
Comme les juges de proximité, les magistrats honoraires ne pourront mentionner leur qualité ni en faire état dans les documents relatifs à l’exercice de leur autre activité professionnelle.
● L’article 41-30 précise les régimes pré-disciplinaire et disciplinaire applicables aux magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles. Dès lors qu’ils sont à la retraite, ils ne peuvent faire l’objet que de trois mesures : l’avertissement, le blâme avec inscription au dossier (125) ou la cessation de leurs fonctions.
● L’article 41-31 fixe à 72 ans la limite d’âge des magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles. À titre de comparaison, cette limite est en principe fixée à 67 ans pour les autres magistrats et à 75 ans pour les juges de proximité (articles 76 et 41-24 de l’ordonnance de 1958 précitée).
Enfin, ces magistrats seront inamovibles : sauf cessation prononcée à titre disciplinaire dans les conditions prévues à l’article 41-30 précité, il ne pourra être mis fin à leurs fonctions qu’à leur demande.
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La Commission est saisie de l’amendement CL53 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Il s’agit d’un amendement anticipant sur la fusion des tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS) et des tribunaux du contentieux de l’incapacité (TCI) que nous allons proposer. Ces deux juridictions sont aujourd’hui présidées par des magistrats honoraires ; nous ouvrons cette possibilité pour la future juridiction.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CL37 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Cet amendement supprime une disposition introduite par le Sénat et dont le Gouvernement considère qu’elle est impossible à mettre en pratique.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL117 de la rapporteure.
Puis elle examine l’amendement CL24 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à préciser que le mécanisme de déclaration d’intérêts s’appliquera bien aux magistrats honoraires, qui peuvent être concernés, tout autant que les autres magistrats, par les problématiques de conflit d’intérêts.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement n’estime pas nécessaire d’apporter cette précision dans la mesure où il est expressément indiqué que les magistrats honoraires sont soumis au statut de la magistrature, sauf disposition contraire. Mais si l’Assemblée y tient, il ne s’y opposera pas.
M. Sergio Coronado. Nous avons procédé à une même précision concernant les magistrats temporaires.
Mme la rapporteure. Avis favorable, en miroir de ce qui a été décidé précédemment.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL118, CL119, CL120 ainsi que l’amendement CL121 corrigeant une erreur de référence, tous de la rapporteure.
Après quoi elle adopte l’article 31 modifié.
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES AU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE
Article 32
(art. 10-1 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature)
Conflits d’intérêts des membres du Conseil supérieur de la magistrature
Cet article transpose aux membres du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) certaines des dispositions déontologiques introduites dans le statut des magistrats par l’article 21 du présent projet de loi organique.
Aujourd’hui, l’article 10-1 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature dispose que les membres du CSM exercent leur mission dans le respect des exigences d’indépendance, d’impartialité, d’intégrité et de dignité.
Le présent article ajoute qu’ils « veillent à prévenir ou à faire cesser immédiatement les situations de conflit d’intérêts ». Ces dispositions s’appliqueront également aux collaborateurs des membres du CSM, dès lors qu’il revient à ces derniers de veiller au respect des mêmes exigences déontologiques « par les personnes dont ils s’attachent les services dans l’exercice de leurs fonctions » (actuel article 10-1 précité).
En outre, comme dans le statut de la magistrature, le conflit d’intérêts sera défini, pour les membres du CSM, comme « toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction ».
Enfin, le présent article facilite le déclenchement du mécanisme de sanction en cas de manquement aux obligations déontologiques précitées. En l’état du droit, l’article 10-1 dispose que, saisie par le président d’une des formations du CSM, la formation plénière apprécie, à la majorité des membres la composant, si l’un de ses membres a manqué aux obligations déontologiques énoncées par cet article. Dans l’affirmative, la formation plénière prononce, en fonction de la gravité du manquement, un avertissement ou la démission d’office du membre concerné.
Alors que la saisine de la formation plénière est ainsi limitée aux seuls présidents des deux formations du CSM (soit le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette Cour), le présent article ouvre cette faculté à six autres membres d’une des formations, dont au moins un magistrat et une personnalité qualifiée.
Cette « minorité qualifiée », relativement élevée (six membres parmi quatorze autres que le président), vise à la fois à pallier l’éventuelle inaction du président de la formation concernée et à éviter que la procédure en manquement puisse être déclenchée par les seuls magistrats ou par les seules personnalités qualifiées membres d’une des deux formations.
Votre rapporteure rappelle, en effet, qu’en application de l’article 65 de la Constitution :
– la formation compétente à l’égard des magistrats du siège est composée du premier président de la Cour de cassation, de cinq autres magistrats du siège et d’un magistrat du parquet, d’un conseiller d’État, d’un avocat et de six personnalités qualifiées n’appartenant ni au Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif ;
– la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet est composée du procureur général près la Cour de cassation, de cinq autres magistrats du parquet, d’un magistrat du siège, du conseiller d’État, de l’avocat et des six personnalités qualifiées siégeant au sein de la formation compétente à l’égard des magistrats du siège.
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La Commission adopte successivement l’amendement rédactionnel CL122 et l’amendement CL123 de coordination de la rapporteure.
Elle adopte ensuite l’article 32 modifié.
Article 32 bis (nouveau)
(art. 10-1-1-A [nouveau] de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994
sur le Conseil supérieur de la magistrature)
Déclarations d’intérêts des membres du Conseil supérieur de la magistrature
Introduit à l’initiative de votre rapporteure, cet article étend à l’ensemble des membres du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) l’obligation d’établir une déclaration d’intérêts.
En application de l’article 21 du présent projet de loi organique, seuls les membres du CSM ayant la qualité de magistrat judiciaire seraient tenus de déclarer leurs intérêts – y compris le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette Cour, compte tenu de la modification apportée par votre Commission.
Le présent article complète ces dispositions en prévoyant que, s’ils ne sont pas soumis à l’obligation d’établir une déclaration d’intérêts à un autre titre, les membres du CSM sont soumis à cette obligation dans les conditions prévues à l’article 7-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature (résultant de l’article 21 du présent projet).
Concrètement, le présent article pourra trouver à s’appliquer à l’avocat et aux personnalités qualifiées membres du CSM – le conseiller d’État étant déjà soumis à l’obligation de déclarer ses intérêts par l’article L. 131-7 du code de justice administrative, créé par la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (126).
Les déclarations d’intérêts seraient remises, dans les deux mois de l’entrée en fonctions, à la fois au premier président de la Cour de cassation et au procureur général près cette Cour, en tant que, respectivement, président et président suppléant de la formation plénière du CSM. Ces déclarations d’intérêts obéiront au même régime juridique que celui retenu pour les magistrats – sans toutefois que le collège de déontologie créé à l’article 22 bis soit ici compétent.
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La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CL124 de la rapporteure et l’amendement CL67 de M. Yves Goasdoué.
Mme la rapporteure. Il n’est pas satisfaisant que certains membres du CSM soient tenus de remettre une déclaration d’intérêts et pas d’autres. Cet amendement y remédie en généralisant les déclarations d’intérêts, qui seront adressées au premier président de la Cour de cassation et au procureur général près cette cour, respectivement président et président suppléant de la formation plénière du CSM.
M. Yves Goasdoué. L’idée est qu’il n’y ait pas, au sein du CSM, des personnes qui aient à faire des déclarations d’intérêts et de patrimoine et d’autres non. Mais je retire mon amendement au profit de celui de la rapporteure.
L’amendement CL67 est retiré.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable. C’est un souhait légitime.
M. Alain Tourret. Qui vérifie ces déclarations ?
Mme la rapporteure. Il s’agit d’une déclaration interne.
M. le président Dominique Raimbourg. Ces déclarations sont remises au premier président ou au procureur général de la Cour de cassation.
L’amendement CL124 est adopté. L’article 32 bis est ainsi rédigé.
Article 33
(art. 10-1-1 [nouveau] de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994
sur le Conseil supérieur de la magistrature)
Déclaration de situation patrimoniale des membres du Conseil supérieur de la magistrature
Cet article soumet les membres du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) à l’obligation d’établir une déclaration de situation patrimoniale (nouvel article 10-1-1 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature).
Son texte initial prévoyait que les déclarations devraient être adressées à une commission ad hoc, mais le Sénat, en cohérence avec les modifications apportées à l’article 21 du présent projet, a prévu une remise auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).
Ces déclarations de situation patrimoniale obéiront au même régime juridique que celui retenu, pour le premier président et les présidents de chambre de la Cour de cassation, le procureur général et les premiers avocats généraux près la Cour de cassation, les premiers présidents des cours d’appel, les procureurs généraux près les cours d’appel, les présidents des tribunaux de première instance et les procureurs de la République près les tribunaux de première instance, au nouvel article 7-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, créé par l’article 21 du présent projet.
Le présent article ne s’applique qu’aux membres du CSM qui ne sont pas déjà tenus d’établir une déclaration de situation patrimoniale « à un autre titre », c’est-à-dire :
– aux magistrats non soumis à l’article 7-2 précité. Au regard de la composition du CSM définie par la loi organique de 1994 précitée, l’obligation prévue au présent article pèsera sur le magistrat du siège hors hiérarchie et sur le magistrat du parquet hors hiérarchie de la Cour de cassation, ainsi que sur les trois magistrats du siège et les trois magistrats du parquet élus au scrutin indirect, respectivement, par l’ensemble des magistrats du siège et l’ensemble des magistrats du parquet (127) ;
– à l’avocat, au conseiller d’État (128) et aux personnalités qualifiées qui ne seraient pas tenus de déclarer leur situation patrimoniale en application d’autres dispositions législatives.
À l’initiative de votre rapporteure et de M. Yves Goasdoué, votre commission des Lois a précisé que les déclarations de situation patrimoniale devront être présentées dans les deux mois suivant l’entrée en fonctions du membre du CSM concerné.
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La Commission adopte les amendements identiques de précision CL125 de la rapporteure et CL68 de M. Yves Goasdoué.
Puis elle adopte l’article 33 modifié.
La Commission examine l’amendement CL25 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Le présent amendement vise, dans le cadre des enquêtes disciplinaires, à placer l’inspection générale des services judiciaires sous la direction du Conseil supérieur de la magistrature.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. En l’état actuel des textes, l’Inspection des services judiciaires est placée sous l’autorité du seul garde des Sceaux – lui seul peut la saisir, lui seul est destinataire de ses rapports de mission. Dans l’hypothèse où le garde des Sceaux n’est pas à l’origine de la saisine du CSM, l’ordonnance statutaire de 1958 lui permet de saisir l’inspection générale préalablement à l’audience au fond. Cette disposition démontre que la volonté du législateur a érigé en prérogative du garde des Sceaux le pouvoir de saisine de l’inspection générale. Cette dernière n’est donc pas un service d’Inspection indépendant qui pourrait, au gré des circonstances, être placé sous l’autorité du CSM puis du garde des Sceaux, mais bien un service placé, en l’espèce, sous mon autorité. Il ne me paraît donc pas conforme à l’esprit du texte ni opportun de permettre au CSM de saisir l’inspection générale.
Mme la rapporteure. Même avis, pour les mêmes motifs.
L’amendement est retiré.
Article 33 bis (nouveau)
(art. 3 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature)
Conséquences de la création
de l’inspection générale de la justice
Introduit à l’initiative du Gouvernement, cet article tire les conséquences de la création de l’inspection générale de la justice au troisième alinéa de l’article 3 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature, qui fixe la procédure d’élection au CSM des magistrats du siège et du parquet. Il y est ainsi fait référence aux magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, d’inspecteur général de la justice et d’inspecteur de la justice, mentionnés au 1° bis de l’article 1er de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, introduit par l’article 1er du présent projet de loi organique.
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La Commission est saisie de l’amendement CL29 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Le présent amendement vise à intégrer dans le statut de la magistrature les magistrats qui exercent à l’inspection générale des services judiciaires, qui ne sont évoqués que dans un décret du mois de décembre 2010.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement. L’article 33 bis est ainsi rédigé.
TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES ET TRANSITOIRES
Article 34
(art. 21, 21-1, 25, 35, 76-1-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature)
Diverses dispositions
Cet article apporte diverses modifications à l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.
En premier lieu, il remplace la notion d’ « études » à l’École nationale de la magistrature (ENM) par celle de « formation » (article 21 de l’ordonnance).
En deuxième lieu, par coordination avec l’article 5 du présent projet, il clarifie la détermination du nombre de places pouvant être ouvertes aux concours complémentaires et aux intégrations directes dans le corps judiciaire. Actuellement, ces recrutements ne peuvent représenter, respectivement, plus du cinquième ou du quart du nombre total des recrutements au second grade intervenus au cours de l’année civile précédente. Le présent article remplace la référence aux « recrutements intervenus » par celle, plus précise, aux « premières nominations intervenues » – qui renvoient aux seules nominations en qualité de magistrat (articles 21-1 et 25 de l’ordonnance).
En troisième lieu, le présent article modifie, à la marge, la composition de la commission d’avancement, en prévoyant que le directeur des services judiciaires peut y être représenté par un agent d’un rang au moins égal à celui de sous-directeur adjoint et ayant la qualité de magistrat (article 35 de l’ordonnance).
En quatrième lieu, le présent article supprime l’automaticité (129), pour les magistrats ayant atteint la limite d’âge, du droit au maintien en activité et en surnombre jusqu’à l’âge de soixante-huit ans. Il reviendra au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) de se prononcer (pour avis pour un magistrat du parquet), en considération de l’aptitude du demandeur et de l’intérêt du service (I et II de l’article 76-1-1 de l’ordonnance). Le maintien en activité n’est, en revanche, pas applicable aux magistrats en position de détachement. On relèvera par ailleurs qu’à la différence du droit en vigueur (130), la rédaction proposée permet à un magistrat du siège de terminer sa carrière en tant que magistrat du parquet et inversement.
Enfin, le présent article étend aux magistrats du cadre de l’administration centrale du ministère de la Justice (MACJ) et aux magistrats exerçant à l’inspection générale des services judiciaires (IGSJ) le bénéfice du maintien en activité et en surnombre, sous réserve de leur aptitude et de l’intérêt du service (II et II bis du même article 76-1-1).
Outre des modifications rédactionnelles ou de coordination, votre commission des Lois a complété le présent article, afin d’abaisser de dix à sept années la durée d’activité professionnelle requise pour se présenter aux concours complémentaires de recrutement à un poste du second grade de la hiérarchie judiciaire (1° de l’article 21-1 de l’ordonnance de 1958 précitée). Cette durée serait ainsi harmonisée sur celle requise pour postuler à l’intégration directe dans le corps de la magistrature.
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La Commission examine l’amendement CL126 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit d’abaisser de dix à sept années la durée d’activité professionnelle requise pour se présenter aux concours complémentaires de recrutement à un poste de second grade de la hiérarchie judiciaire, donc de renforcer l’ouverture de la magistrature.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement est favorable à ce type d’amendement d’harmonisation et de simplification.
La Commission adopte l’amendement.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, elle adopte ensuite l’amendement CL54 du Gouvernement.
Puis elle adopte l’amendement de coordination CL127 de la rapporteure.
Après quoi, elle adopte l’article 34 modifié.
Article 34 bis A (nouveau)
(art. 79-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature et art. 164 de la loi n° 2010 1657 du 29 décembre 2010
de finances pour 2011)
Exercice par les magistrats honoraires d’activités non juridictionnelles
Introduit à l’initiative du Gouvernement, cet article vise à fixer dans l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature le régime applicable aux activités non juridictionnelles susceptibles d’être exercées par les magistrats honoraires.
Corrélativement, les dispositions relatives à la « réserve judiciaire », figurant au I de l’article 164 de la loi de finances pour 2011 (n° 2010-1657 du 29 décembre 2010), seraient abrogées.
En pratique, les fonctions non juridictionnelles peuvent consister à : effectuer des travaux d’analyse, des recherches de jurisprudence et des études juridiques ; aider au suivi de la mise en état des dossiers civils complexes ; assister les magistrats coordonnateurs ou chef de service ; préparer l’instruction des candidatures d’experts judiciaires ; rédiger des projets de rapports et de réquisitoires ; préparer des fiches analytiques sur des dossiers correctionnels ou criminels ; assister le magistrat du parquet en charge des délégués du procureur ; suivre l’activité d’une chambre et préparer le co-audiencement (131).
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La Commission examine l’amendement CL33 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Le présent amendement vise à intégrer dans le statut des magistrats honoraires les règles applicables à la réserve judiciaire. Là encore, il répond à un souci de simplification par l’harmonisation de deux catégories qui avaient des droits et des appellations différents.
Mme la rapporteure. Avis très favorable. Il s’agit de clarifier les activités qui peuvent être exercées par les magistrats honoraires et de supprimer la réserve judiciaire.
La Commission adopte l’amendement. L’article 34 bis A est ainsi rédigé.
Article 34 bis (supprimé)
(art. L.O. 140 du code électoral)
Incompatibilité entre le mandat parlementaire et les fonctions de juge d’un tribunal de commerce
Introduit par la commission des Lois du Sénat, à l’initiative de son rapporteur, M. François Pillet, cet article rendait incompatible le mandat parlementaire avec les fonctions de juge d’un tribunal de commerce.
Il complétait à cet effet l’article L.O. 140 du code électoral, qui prévoit aujourd’hui que « l’exercice des fonctions de magistrat est incompatible avec l’exercice d’un mandat à l’Assemblée nationale », incompatibilité également applicable aux sénateurs par renvoi de l’article L.O. 297 du même code.
Il s’agissait, pour le rapporteur de la commission des Lois du Sénat, d’ « une disposition de cohérence, de rang organique en vertu de l’article 25 de la Constitution, avec le projet de loi ordinaire » (132) relatif à l’action de groupe et à l’organisation judiciaire, qui étend aux juges consulaires, à compter du premier renouvellement suivant la promulgation de la future loi, les incompatibilités applicables aux magistrats judiciaires (articles 47 et 54 du projet de loi ordinaire).
Toutefois, outre qu’aucune disposition ne précise la date d’entrée en vigueur de l’incompatibilité prévue au présent article, son objet sera prochainement satisfait par le droit existant.
Le mandat parlementaire est, en effet, appelé à devenir « incompatible avec l’exercice de fonctions juridictionnelles autres que celles prévues par la Constitution et avec l’exercice de fonctions d’arbitre, de médiateur ou de conciliateur » en application du I de l’article 2 de la loi organique n° 2013-906 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, qui complète l’article L.O. 140 du code électoral (que tend à modifier le présent article). Aux termes du X du même article 2, cette incompatibilité entrera en vigueur, s’agissant des députés, lors du prochain renouvellement général de l’Assemblée nationale (prévu en 2017) et, s’agissant des sénateurs, lors du prochain renouvellement de la série à laquelle appartient le sénateur concerné (soit, selon le cas, en 2017 ou en 2020).
À l’initiative de cette disposition, M. Jean-Jacques Urvoas, alors président et rapporteur de votre commission des Lois, avait considéré : « le Conseil constitutionnel a eu l’occasion de juger que des fonctions de juge de tribunal de commerce, ne relevant pas du statut de la magistrature et constituant une fonction publique élective, n’étaient (…) pas incompatibles avec un mandat parlementaire, alors qu’il apparaît peu conciliable avec l’autonomie du pouvoir juridictionnel que certains membres puissent siéger au sein de juridictions électives ou échevinales telles que les tribunaux de commerce, les conseils de prud’hommes, les tribunaux pour enfants, les tribunaux des affaires de la sécurité sociale, les tribunaux paritaires des baux ruraux, le tribunal du contentieux de l’incapacité ou la cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail » (133).
En conséquence, à l’initiative de votre rapporteure, la commission des Lois a supprimé le présent article.
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La Commission examine l’amendement CL128 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit de supprimer une disposition inutile puisque déjà prévue par le droit en vigueur.
M. le président Dominique Raimbourg. Cet amendement vise, en effet, à supprimer l’article 34 bis qui rend incompatible le mandat de parlementaire avec les fonctions de juge d’un tribunal de commerce.
La Commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 34 bis est supprimé.
Article 34 ter
(art. 22 et 23 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique
relative au statut de la magistrature)
Coordinations liées à la création du corps des directeurs de greffe
des services judiciaires – Conditions de l’intégration directe
Introduit par le Sénat, cet article de coordination modifie les articles 22 et 23 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, afin de tenir compte de la création du corps des directeurs de greffe des services judiciaires, qui s’est substitué à celui des greffiers en chef en application du décret n° 2015-1273 du 13 octobre 2015 portant statut particulier du corps des directeurs des services de greffe judiciaires.
Sur proposition de votre rapporteure, la commission des Lois a complété le présent article, afin d’abaisser de 17 à 15 ans la durée d’activité professionnelle requise pour pouvoir bénéficier d’une intégration directe dans un poste du premier grade de la hiérarchie judiciaire (article 23 de l’ordonnance de 1958 précitée). Elle serait ainsi rendue identique à la durée aujourd’hui requise dans le cadre des concours complémentaires.
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La Commission est saisie de l’amendement CL129 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. L’amendement vise à harmoniser la condition d’activité professionnelle requise pour bénéficier d’une intégration directe à un poste de premier grade : les candidats devront justifier de quinze années au moins d’exercice professionnel, au lieu de dix-sept actuellement.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement est favorable à cet amendement d’harmonisation et de simplification.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite l’article 34 ter modifié.
Article 34 quater
(art. 12, 13, 31, 48, 48-1 et 72 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958
portant loi organique relative au statut de la magistrature)
Modifications rédactionnelles
Introduit par le Sénat, cet article modifie les articles 12, 13, 31, 48, 48-1 et 72 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, afin de systématiquement ajouter les mots : « garde des sceaux », à chaque fois qu’il est fait référence au ministre de la Justice.
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La Commission adopte l’article 34 quater sans modification.
Article 34 quinquies (nouveau)
(art. 3-1 et 3-2 [nouveaux] de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique
sur le Conseil constitutionnel)
Déclarations d’intérêts et déclarations de situation patrimoniale des membres du Conseil constitutionnel
Introduit à l’initiative de M. Yves Goasdoué, suivant l’avis favorable de votre rapporteure et de sagesse du Gouvernement, cet article transpose aux membres nommés du Conseil constitutionnel les obligations déclaratives prévues, pour les magistrats de l’ordre judiciaire, par l’article 21 du présent projet de loi organique et, pour les membres des juridictions administratives et financières, par la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.
Il se fonde sur l’article 63 de la Constitution, selon lequel « une loi organique détermine les règles d’organisation et de fonctionnement du Conseil constitutionnel ».
● Un nouvel article 3-1 serait introduit dans l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, édictant l’obligation pour chaque membre nommé, dans les deux mois qui suivent son entrée en fonctions, de remettre au Président du Conseil une déclaration exhaustive, exacte et sincère de ses intérêts.
Le régime juridique des déclarations d’intérêts, notamment leur contenu et les sanctions pénales, serait défini de manière identique à la loi organique n° 2013-906 et à la loi ordinaire n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique. Ces déclarations ne seraient pas publiques et demeureraient conservées au sein du Conseil constitutionnel.
Comme pour les magistrats judiciaires, administratifs ou financiers, la remise de la déclaration d’intérêts donnerait lieu à un entretien déontologique du membre du Conseil constitutionnel avec le Président, ayant pour objet de prévenir tout éventuel conflit d’intérêts et d’inviter, s’il y a lieu, à mettre fin à une telle situation.
Un décret en conseil des ministres, après consultation du Conseil constitutionnel et avis du conseil d’État, préciserait les conditions d’application de ces dispositions, notamment le modèle, le contenu et les conditions de remise, de mise à jour et de conservation de la déclaration d’intérêts.
Votre rapporteure relève qu’en l’état du texte, ni le Président du Conseil, ni les membres de droit ne seraient tenus de déclarer leurs intérêts. Ces deux questions font débat et méritent d’être examinées plus avant, dans la perspective de la séance publique.
● Un nouvel article 3-2 serait également inséré dans l’ordonnance du 7 novembre 1958 précitée, soumettant l’ensemble des membres nommés du Conseil constitutionnel – y compris son Président – à l’obligation de transmettre à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) une déclaration de situation patrimoniale.
Là encore, le régime juridique des déclarations de situation patrimoniale
– contenu, pouvoirs de contrôle de la HATVP, sanctions pénales – reprend les termes des lois du 11 octobre 2013 précitées et transpose les dispositions retenues pour les magistrats judiciaires et les membres des juridictions administratives et financières.
Votre rapporteure estime justifiée l’absence d’obligation, pour les membres de droit du Conseil constitutionnel, de déclarer leur situation patrimoniale : l’enjeu de ces déclarations est de pouvoir apprécier l’évolution du patrimoine entre l’entrée et la cessation des fonctions – ce qui n’aurait guère de sens s’agissant de fonctions conférées « à vie » par l’article 56 de la Constitution.
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La Commission examine l’amendement CL58 de M. Yves Goasdoué.
M. Yves Goasdoué. Ce long amendement, important, vise à transposer aux membres nommés du Conseil constitutionnel les obligations déclaratives prévues pour les magistrats de l’ordre judiciaire et pour les membres des juridictions administratives et financières.
Il s’agit de soumettre les membres nommés du Conseil constitutionnel à une obligation de déclaration d’intérêts reçue par le président du Conseil, et à une déclaration de patrimoine, reçue quant à elle par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
Le dispositif est totalement calqué sur les dispositions du présent projet de loi organique ainsi que sur celles de la loi du 20 avril 2016, tant pour ce qui concerne les garanties, notamment de confidentialité, qui sont apportées s’agissant des déclarations d’intérêts et de patrimoine, qu’en ce qui concerne les sanctions afférentes à l’absence de déclaration ou à des déclarations qui ne correspondraient pas à la réalité soit des intérêts, soit du patrimoine des membres nommés du Conseil constitutionnel.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement n’a pas déposé d’amendement relatif au Conseil constitutionnel. Sa réflexion n’est, en effet, pas aboutie en la matière.
Au passage, monsieur Goasdoué, pourquoi le dispositif que vous proposez ne concerne-t-il que les membres nommés du Conseil constitutionnel et pas les membres de droit ?
M. Yves Goasdoué. Nous nous sommes naturellement posés la question. Il nous a semblé qu’il pouvait être difficile de soumettre les anciens Présidents de la République à cette règle mais, après tout, et dès lors qu’ils siégeraient, il y aurait une certaine logique qu’il en fût décidé ainsi. Nous pourrons y revenir en séance publique.
M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Commission puisqu’il n’a pas évoqué la question soulevée par le présent amendement et qu’aucun arbitrage n’a été rendu.
Mme la rapporteure. Il est vrai qu’on ne voit pas l’utilité d’une obligation de déclaration de patrimoine pour les membres de droit du Conseil constitutionnel, dans la mesure où il s’agit de mesurer un éventuel enrichissement pendant la durée du mandat ; or la durée du mandat d’un membre de droit est indéfinie. Nous pouvons donc assez sereinement exclure la déclaration de patrimoine pour ces membres-là.
Pour le reste, j’émets un avis très favorable à l’amendement car, s’il n’était pas adopté, seule cette institution demeurerait à l’écart du dispositif déontologique que nous avons mis en place depuis 2013. Or il s’agit de faire en sorte que ce dernier concerne l’ensemble des institutions, des acteurs politiques, mais aussi les principaux agents publics, les juridictions administratives et financières, l’ordre judiciaire et le Conseil constitutionnel.
D’ici à la séance, il nous faudra néanmoins réfléchir à un dispositif qui étendrait au président du Conseil constitutionnel lui-même l’obligation de déclarer ses intérêts.
M. Alain Tourret. J’ai l’impression que tout cela n’est pas du meilleur goût. En effet, l’amendement prévoit que « la remise de la déclaration d’intérêts donne lieu à un entretien déontologique du membre du Conseil constitutionnel avec le président ». Soit, mais nous-mêmes, que je sache, quand nous remettons notre déclaration, nous ne sommes pas soumis à un entretien personnel. Bien plus, cet entretien « peut être renouvelé à tout moment, à la demande de l’intéressé ou du président du Conseil constitutionnel » ! J’imagine que si ce type de disposition avait été en vigueur, quand on sait les sentiments d’amitié qu’ils se vouent, le président Jean-Louis Debré aurait convoqué M. Sarkozy toutes les semaines…
Mme Élisabeth Pochon. Mais cette disposition ne concerne que les membres nommés !
M. Alain Tourret. Vous venez d’envisager qu’on l’étende aux membres de droit.
Je souhaite que l’ensemble du dispositif soit revu et que le Gouvernement donne un avis bien plus sérieux que celui qu’il vient de rendre.
M. le président Dominique Raimbourg. L’avis du Gouvernement est sérieux, Monsieur Tourret. Le garde des Sceaux vient simplement de nous indiquer qu’il n’y avait pas eu d’arbitrage et donc que cet avis n’était pas fixé.
M. Guillaume Larrivé. Il serait, en effet, intéressant que le Gouvernement s’exprime clairement en séance publique sur un amendement de cette nature, qui n’est pas banal : on parle du Conseil constitutionnel tout de même !
J’aimerais savoir où s’arrêtera la suspicion dans l’esprit des auteurs de l’amendement.
Mme Élisabeth Pochon. Jusqu’à Sarkozy !
M. Guillaume Larrivé. Au-delà de votre anti-sarkozysme primaire et même pathologique, je vous rappelle qu’une nomination au Conseil constitutionnel n’est effective qu’après audition par la commission des Lois du membre pressenti et après avis public de celle-ci. Nous avons donc compétence, ici, à poser des questions à des personnalités qui sont en général éminentes et au-dessus de tout soupçon.
Je souhaite également comprendre qui, selon les auteurs de l’amendement, contrôlera la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, autorité administrative censée contrôler elle-même le Conseil constitutionnel. Envisagez-vous, dans votre créativité débridée, de créer une Haute autorité de contrôle de la Haute Autorité ? Faut-il que le président Nadal, pour ne pas le citer, vienne rendre compte de son curriculum devant la Haute Autorité de contrôle de la Haute Autorité, laquelle devra être soumise, naturellement, au contrôle d’une autre Haute Autorité. C’est sans fin ! Cette hallucinante logique de Shadoks qui vous anime me surprend et en tout cas perturbe le classicisme institutionnel dont nous devons rester les gardiens.
Le garde des Sceaux ne paraît pas très enthousiaste, si l’on en juge par le fait qu’il n’a pas donné d’avis favorable à cet amendement. Pour ma part, je le rejetterai sans aucune difficulté.
Nous n’avons pas à entendre de leçons sur la transparence : nous y sommes tous favorables, de même qu’à la vertu, même si vous avez toujours la prétention, à gauche, d’incarner le beau, le bien et le vrai. Or nous sommes en train de discuter du Conseil constitutionnel, une institution majeure de la République, et l’on voudrait entretenir le soupçon sur ses membres. Je suis surpris, j’y insiste, de cette dérive dans le soupçon, qui devient insupportable.
M. Philippe Gosselin. Je comprends le souci légitime de transparence qui anime nos collègues et admets qu’on souhaite à tout prix que l’exercice des plus hautes fonctions de l’État soit irréprochable. Je m’étonne néanmoins d’une forme d’acharnement, ou tout au moins d’une maladresse. Ainsi, aux termes de l’amendement, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique serait en mesure d’adresser des injonctions au Conseil constitutionnel. Or, si important soit-il, le statut de cette autorité administrative indépendante l’est moins que celui du Conseil constitutionnel, organe d’État chargé de contrôler la conformité de la loi à la Constitution, de faire appliquer la hiérarchie des normes.
Le dispositif proposé constitue une forme d’intrusion et, par là-même, une atteinte à l’indépendance du Conseil constitutionnel. En voulant trop bien faire, on risque de perturber le bon fonctionnement des institutions et de suspendre une épée de Damoclès sur le Conseil, ce qui n’est conforme ni à la lettre ni à l’esprit des institutions de la Ve République.
Mme la rapporteure. Ne voyez dans l’amendement aucun acharnement. Le Conseil constitutionnel est une juridiction : ce que nous avons déjà adopté pour la Cour des comptes et pour le Conseil d’État, pourquoi ne pas l’envisager pour le Conseil constitutionnel ? De plus, cette juridiction n’est même pas composée de magistrats. On peut donc considérer que la déclaration d’intérêts, bien loin d’être un acte de défiance, constitue au contraire un acte de normalisation. Les membres du Conseil constitutionnel pourraient d’ailleurs considérer comme une injure que le dispositif envisagé, qui n’est pas du tout répressif mais d’ouverture, leur soit interdit sans raison valable. Il n’est pas question pour nous de faire peser sur ses membres une quelconque suspicion, mais bien d’ouvrir le Conseil constitutionnel au même titre, je le répète, que le Conseil d’État et la Cour des comptes, à des dispositifs à même de renforcer la confiance du citoyen en la justice.
C’est pourquoi j’émets un avis favorable.
M. Sébastien Huyghe. Le présent amendement me fait vraiment penser que lorsqu’on est pris en défaut, on a envie de laver plus blanc que blanc. Il faut, en effet, se souvenir d’où vient l’ensemble de ce système.
M. Patrick Mennucci. Balkany !
M. Sébastien Huyghe. Attendez que les éventuelles condamnations soient prononcées. Il faut se souvenir, disais-je, et je sais que cela fait très mal, que tout vient de l’affaire Cahuzac dont vous avez essayé de vous sortir, je le répète, en lavant plus blanc que blanc, c’est-à-dire en demandant à chacun de se déshabiller le plus complètement possible devant le public et devant les membres de la Haute Autorité précitée.
Cette suspicion permanente commence à être pénible.
Mme la rapporteure. Mais non, il ne s’agit pas de suspicion !
M. Sébastien Huyghe. À tous les niveaux de l’État vous la faites régner pour vous dédouaner de ce qui vous est arrivé à plusieurs reprises.
M. Patrick Mennucci. Vous portez aussi la croix de Sarkozy !
M. Sébastien Huyghe. Sarkozy n’a jamais été condamné ; cessez donc avec votre anti-sarkozysme pathologique !
M. Patrick Mennucci. Cahuzac non plus, n’a pas été condamné !
M. Sébastien Huyghe. Il a reconnu ses turpitudes et ses mensonges en tout cas, aussi savons-nous d’où vient ce système.
Il y a, néanmoins, un endroit où le bât blesse : l’amendement prévoit que, dans les deux mois qui suivent leur entrée en fonction, les membres du Conseil constitutionnel autres que les membres de droit remettent à son président une déclaration exhaustive. Or vous oubliez le président lui-même : il serait au-dessus de tout soupçon tandis que les autres membres, nommés, comme lui, seraient l’objet de votre suspicion. Il faudrait vous montrer logiques du début à la fin et défendre l’idée que tous les membres, président compris, se soumettent à la même règle.
À force de vouloir porter la suspicion à un niveau extrême, on en oublie toujours quelqu’un.
M. Guillaume Larrivé. L’amendement est-il conforme à la Constitution en tant qu’elle prévoit expressément ce qu’est le Conseil constitutionnel, son organisation, à la différence de la Cour de cassation, du Conseil d’État ? Ensuite, j’insiste, qui contrôle la Haute Autorité ? L’amendement propose de soumettre le Conseil constitutionnel au contrôle de cette Haute Autorité mais qui contrôle cette Haute Autorité surplombante, presque de droit divin ? Je souhaite bien comprendre le dispositif que vous entendez mettre en place.
M. Yves Goasdoué. Je ne suis pas un thuriféraire de la transparence pour la transparence mais puisque cette double technique de déclaration d’intérêts et de déclaration de patrimoine est en train de devenir, que vous le vouliez ou non, le droit commun, pourquoi ce dernier ne s’appliquerait-il pas à la plus haute juridiction ? Cette question n’est tout de même pas iconoclaste. En outre, des aménagements rédactionnels seront peut-être nécessaires.
Monsieur Larrivé, vous posez une question intéressante mais vous la posez mal. Il n’est pas question que la Haute Autorité chapeaute d’une quelconque manière l’activité du Conseil constitutionnel. Il est question qu’elle vérifie la variation du patrimoine de chaque membre du Conseil constitutionnel entre le moment où il entre en fonctions et celui où il cesse de les exercer. Cela n’a rien à voir avec l’activité du Conseil.
Vous demandez aussi qui surveille la Haute Autorité. Mais dans cette fonction, elle n’a pas à être surveillée. Si elle a un doute, elle doit saisir le parquet et si le parquet l’estime nécessaire, il saisira le juge. Donc, celui qui contrôle la Haute Autorité et qui a le dernier mot, c’est le juge. Aussi, je ne vois pas où est la réelle difficulté.
Il n’y a, dans le dispositif proposé, aucune forme d’acharnement. On peut y déceler des maladresses, je ne l’exclus pas. Reste que je ne vois pas pourquoi nous serions totalement bloqués sur cette proposition. Je trouve votre réaction très forte en ce qu’elle présuppose que cet amendement recèlerait une intention maligne. Je vous assure qu’il n’en est rien. Mais il faudra bien expliquer aux Français pourquoi le droit commun s’applique à tous les décideurs de la nation sauf aux membres du Conseil constitutionnel qui prennent des décisions d’une importance capitale sans qu’elles soient susceptibles de recours.
M. Philippe Gosselin. Vous évoquiez à raison, madame la rapporteure, le Conseil d’État et la Cour de cassation, qui constituent bien un ordre de juridiction, ce qui n’est en rien le cas du Conseil constitutionnel. Et je n’entrerai pas, aujourd’hui, dans le débat sur le fait de savoir si le Conseil constitutionnel est, aujourd’hui, une haute juridiction.
Vous vous référez à la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie, aux droits et aux obligations des fonctionnaires. Or les membres du Conseil constitutionnel ne sont pas des fonctionnaires, contrairement aux membres du Conseil d’État et de la Cour de cassation. J’entends bien qu’il s’agit d’une transposition, mais elle est contraire à l’esprit et à la lettre des institutions de la Ve République.
Il serait donc important que le Gouvernement, en séance publique, exprime une position précise.
M. Sébastien Huyghe. J’attends toujours la réponse à ma question sur le président du Conseil constitutionnel…
Votre raisonnement, monsieur Goasdoué, souffre tout de même d’une faiblesse : qui nous dit qu’un membre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ne pourrait pas être lui-même corrompu par un membre du Conseil constitutionnel ? Il est donc nécessaire, ainsi que l’a souligné M. Larrivé, que les membres de ladite Haute Autorité soient soumis à un contrôle afin d’avoir la certitude que le mécanisme envisagé de transmission au parquet ait bien lieu, quelle que soit la personne concernée. Il s’agit de s’assurer que les membres de la Haute Autorité ne soient pas susceptibles de faiblesse du fait de relations passées avec l’un des membres qu’ils ont à contrôler.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Dès lors qu’elles font grief, ses décisions placent le Conseil constitutionnel dans une situation exactement comparable à celle du Conseil d’État et à celle de la Cour de cassation. Par le seul fait que leurs décisions font grief, il apparaît nécessaire de placer les membres du Conseil constitutionnel dans la même situation que les membres du Conseil d’État ou de la Cour de cassation.
M. Patrick Mennucci. Pour répondre à M. Huyghe, compte tenu des dispositions régissant leur nomination, les membres de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique sont déjà soumis à une obligation déclarative du fait du rôle qu’ils jouent au sein d’autres institutions. Il n’est donc pas nécessaire de les contrôler une nouvelle fois.
Mme la rapporteure. Je vous laisse le débat sur le fait de savoir si le Conseil constitutionnel est ou non une juridiction. C’est une institution qui rend des décisions insusceptibles de recours, qui est composée de personnalités éminentes mais qui ne sont pas des magistrats. Je ne vois pas en quoi ce qui est proposé pour les magistrats judiciaires ne pourrait pas l’être pour les membres du Conseil constitutionnel. Du reste, le Conseil pourra tout à fait juger de ce dispositif.
Pour ce qui est de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, ses membres peuvent être poursuivis pour manquements déontologiques et encourir des sanctions pénales à raison d’un mauvais comportement. De plus, les décisions qu’ils rendent sont susceptibles de recours devant le Conseil d’État. On ne peut donc considérer que les membres de la Haute Autorité font ce qu’ils veulent.
C’est pourquoi je persiste à considérer que, loin d’être fondé sur la méfiance, le dispositif proposé vise à une harmonisation. Aucun justiciable ne comprendrait qu’on en écarte le Conseil constitutionnel alors que le Conseil d’État, la Cour des comptes et les magistrats de l’autorité judiciaire dans leur ensemble y sont soumis.
M. Guillaume Larrivé. Admettons qu’il faille aligner le statut des membres du Conseil constitutionnel sur celui de ceux du Conseil d’État et de la Cour de cassation. Dès lors, pourquoi diable n’alignez-vous pas le régime du président du Conseil constitutionnel sur ceux du vice-président du Conseil d’État et des premier président de la Cour de cassation et de la Cour des comptes ?
Mme la rapporteure. J’ai bel et bien envisagé, précédemment, que nous soumettions le président du Conseil constitutionnel au dispositif proposé. La difficulté est que le Conseil constitutionnel ne comprend pas de collège de déontologie. Faut-il prévoir d’en instaurer un ? Je n’ai pas d’idée particulière en la matière, mais il faut y réfléchir.
La Commission adopte l’amendement. L’article 34 quinquies est ainsi rédigé.
Article 34 sexies (nouveau)
(art. 23-1 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique
sur le Conseil constitutionnel)
Dépôt d’une question prioritaire de constitutionnalité en matière correctionnelle et contraventionnelle
Introduit à l’initiative de votre rapporteure, suivant l’avis favorable du Gouvernement, cet article modifie l’article 23-1 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, relatif à la procédure de question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
Il répond à une demande formulée conjointement par le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation.
Dans un souci de bonne administration de la justice, il tend à éviter le dépôt tardif, à des fins dilatoires, de QPC en matière correctionnelle ou contraventionnelle.
Le dépôt d’une QPC serait désormais interdit dans deux hypothèses :
– lorsque le tribunal correctionnel ou le tribunal de police est saisi à la suite d’une information judiciaire et que la QPC aurait pu être déposée au cours de la phase d’instruction. Le présent article n’a donc aucun effet sur les affaires pénales ne faisant pas l’objet d’une instruction ;
– lorsque l’affaire vient en appel et qu’aucune QPC n’a été déposée en première instance. Ainsi, la QPC ne pourrait être soulevée en appel que si elle l’a déjà été en première instance (et que, par hypothèse, elle n’a pas été transmise à la Cour de cassation). Elle devrait alors être mentionnée dans la déclaration d’appel.
Toutefois, le présent article ménage des exceptions, permettant de soulever une QPC :
– soit parce qu’elle porte sur une disposition de procédure pénale applicable seulement devant la juridiction de jugement. Cette disposition, par hypothèse, ne pouvait être contestée lors de l’instruction ;
– soit parce qu’elle porte sur une disposition de procédure pénale qui n’est applicable que devant la juridiction d’appel (qui ne pouvait donc être contestée en première instance).
Le présent article transpose, en quelque sorte, aux matières correctionnelle et contraventionnelle la restriction mise en place en matière criminelle par le législateur organique de 2009, qui a interdit de soulever une QPC devant une cour d’assises – le moyen ne pouvant être soulevé que pendant l’instruction ou en appel (134).
Au total, le présent article permet, sans porter atteinte au droit pour tout justiciable de soulever une QPC, d’éviter que son dépôt lors de l’ouverture de la phase de jugement ne perturbe gravement celle-ci et entraîne des délais de jugement déraisonnables. En ce sens, dans un rapport d’information dressant un bilan des trois premières années d’application de la QPC (n° 842, mars 2013), M. Jean-Jacques Urvoas, alors président de la commission des Lois, avait observé : « Le dépôt tardif d’une QPC peut rendre nécessaire le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure afin de permettre le respect du principe du contradictoire, ce qui contribue à désorganiser le calendrier des juridictions et à ralentir encore le fonctionnement de la justice ».
Votre rapporteure entend cependant les observations relatives à la limitation des possibilités de dépôt d’une QPC en appel et n’exclut pas de proposer d’élargir ces possibilités lors de l’examen du présent article en séance publique.
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La Commission examine l’amendement CL130 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Le présent amendement vise à modifier la procédure de question prioritaire de constitutionnalité (QPC) en matière pénale. Il prévoit que lorsqu’il y a une instruction, et seulement à cette condition, la QPC doit avoir été soulevée pendant celle-ci, sans quoi elle ne peut plus l’être à l’audience.
Il s’agit d’éviter le dépôt tardif d’une QPC à des fins dilatoires devant les tribunaux correctionnels ou, plus rarement, devant les tribunaux de police. L’amendement s’inspire du droit en vigueur en matière criminelle : la QPC ne peut être soulevée que pendant l’instruction et non devant la cour d’assises.
Le dispositif prévu ménage toutefois des exceptions : il resterait possible de poser une QPC portant sur une disposition de procédure pénale qui n’est applicable que devant la juridiction de jugement et qui, en conséquence, ne peut être contestée lors de l’instruction, ou que devant la juridiction d’appel, et qui ne peut être contestée en première instance.
M. le garde des Sceaux. Dans l’exposé sommaire de son amendement, Mme la rapporteure a l’amabilité de rappeler le rapport, intitulé Trois ans et déjà grande, que j’avais présenté au nom de la Commission en mars 2013 pour tenter d’établir un premier bilan de la QPC. J’aurais donc mauvaise grâce à dire aujourd’hui que la question soulevée ne se pose pas.
Et elle se pose d’autant plus qu’en mars 2015, le premier président de la Cour de cassation, Bertrand Louvel, le vice-président du Conseil d’État, Jean-Marc Sauvé, et le président d’alors du Conseil constitutionnel, Jean-Louis Debré, ont fait parvenir à la Chancellerie une proposition d’amendement sur ce sujet, considérant qu’il y avait là matière à discussion. Sur le principe, le Gouvernement est donc favorable au présent amendement.
À titre personnel, j’ai néanmoins une réserve sur l’impossibilité de déposer la QPC au moment de l’appel si elle ne l’a pas été en première instance. Je ne suis pas certain de la constitutionnalité de ce dispositif : des faits nouveaux peuvent, en effet, justifier le dépôt d’une QPC. Mais je n’ai pas fondé cette conviction sur autre chose que mon ressenti, et le Gouvernement, je le répète, est favorable, à ce stade, à l’amendement.
M. Guillaume Larrivé. Je rappelle que c’est en 2008, contre l’avis de l’actuelle majorité, que ce droit nouveau a été offert à tous les justiciables de saisir le Conseil constitutionnel par la voie d’exception. Sous des dehors techniques, cet amendement a une portée très forte, le ministre vient de le reconnaître par la réserve qu’il a émise ; il restreint singulièrement la liberté du justiciable de saisir le Conseil constitutionnel. Ce mécanisme d’entonnoir que vous créez interdirait la saisine en appel dès lors que cela n’aurait pas été le cas en première instance. Contra legem, l’amendement restreint trop le mécanisme de la QPC.
J’observe, par ailleurs, que cet amendement de la rapporteure n’a pas fait l’objet d’une saisine pour avis du Conseil d’État : la majorité est-elle sûre de vouloir assumer une restriction du droit des citoyens à saisir le Conseil constitutionnel afin de faire valoir les droits fondamentaux, notamment en appel ? Alors même que vous professez le progressisme juridique, c’est pour le moins curieux !
M. Alain Tourret. Cet amendement est insuffisant en lui-même, il devrait répondre à une vaste réflexion portant sur tout le problème des nullités, notamment sur le moment où elles doivent être soulevées. Ce n’est jamais avant l’ordonnance de renvoi que l’on vérifie tous les moyens de nullité, mais au moment où la juridiction est saisie, ce qui peut advenir jusqu’à dix-huit mois après cette ordonnance. Pourquoi se priver de cette possibilité, éventuellement fondée sur des arguments nouveaux, pendant toute cette période ? Le juge n’est pas saisi sur les seuls moyens de l’ordonnance de renvoi, sinon il ne serait pas possible de citer des témoins ni de communiquer d’autres pièces.
Je suis très réservé, même si je comprends le souci d’accélérer la procédure et d’empêcher les manœuvres dilatoires, qui sont certes insupportables. En tout cas, faute d’une réflexion sur l’ensemble des nullités, vous risquez de réduire à l’excès la possibilité de saisine du Conseil constitutionnel par la question prioritaire de constitutionnalité. Cela constitue une considérable réduction des libertés, et je vous invite à reprendre votre texte.
M. le président Dominique Raimbourg. Il semble que le dispositif proposé recueille un large accord au stade de l’instruction, mais beaucoup moins au stade de l’appel. La question doit être examinée de près, car en aucun cas notre intention n’est de réduire la saisine par le moyen de la QPC. Il s’agit de recourir à un mécanisme qui a donné satisfaction devant la cour d’assises, et dont l’utilité a été recommandée à plusieurs reprises.
Nous pourrions améliorer la rédaction dans le sens souhaité par tous, au-delà de la polémique, étant entendu que la disposition ne serait anticonstitutionnelle que si elle était exagérément restrictive.
Mme la rapporteure. Cet amendement répond à une demande formulée conjointement par le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation. Cette demande ne nous a pas parue absurde dans la mesure où nous transposons en matière correctionnelle, donc dans une matière moins grave, ce qui existe déjà en matière criminelle depuis 2009. De plus, le champ est extrêmement restreint puisqu’il ne porte que sur le domaine pénal et lorsqu’il y a eu instruction.
Nous pouvons effectivement prendre le temps de la réflexion, mais, pour l’heure, je maintiens l’amendement en l’état.
M. le garde des Sceaux. Nous avons connu des cas précis de recours, non pas à la QPC, mais à des manœuvres clairement dilatoires. Les présidents des juridictions suprêmes qui nous ont écrit au mois de mars dernier ont insisté sur le caractère tardif du dépôt des saisines, dont la conséquence est le gel de l’agenda de la juridiction concernée.
En l’occurrence, le rôle du tribunal d’instance de Paris est très dense, et lorsqu’une QPC est déposée au dernier moment, le temps prévu par le tribunal pour se consacrer à l’audience concernée ne peut pas être repris. C’est là une difficulté que la commission des Lois avait constatée dès 2013 et qui a été confirmée. Je pourrai, si elle le souhaite, communiquer à la rapporteure l’amendement rédigé par les présidents du Conseil constitutionnel, du Conseil d’État et de la Cour de cassation. Il y a un souci d’harmonisation de la justice.
Nonobstant ma réserve personnelle sur la deuxième exception, une faille existe qui doit être supprimée, et l’avis du Gouvernement est favorable à l’adoption de cet amendement.
M. Sébastien Huyghe. Je suis gêné par l’interdiction du recours à la QPC en appel dès lors qu’elle n’aurait pas été soulevée en première instance. Un point de droit qui pouvait sembler ne pas poser problème peut se faire jour après l’instance, et le justiciable devrait pouvoir le soulever par le truchement de la QPC. Cette interdiction est inepte et, à ce seul titre, l’amendement devrait être retiré.
M. le président Dominique Raimbourg. Je mets cet amendement aux voix, sachant qu’une difficulté demeure en ce qui concerne l’appel et qu’il faudra la résoudre.
La Commission adopte l’amendement. L’article 34 sexies est ainsi rédigé.
Article 35
(art. 36 de la loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007 relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats)
Entrées en vigueur différées et report du dispositif de mobilité statutaire
Cet article précise les conditions particulières d’entrée en vigueur de certaines dispositions du présent projet de loi organique. En outre, il reporte au 1er septembre 2020 l’application du dispositif dit de « mobilité statutaire » créé en 2007.
Les I et II du présent article ouvrent aux magistrats exerçant leurs fonctions à titre temporaire et aux juges de proximité en cours de mandat la possibilité de solliciter le renouvellement de celui-ci pour une durée de trois ans, afin d’être en mesure d’accomplir ces fonctions pendant la durée totale de dix ans permise par les articles 29 et 30 du présent projet. Les juges de proximité dont le mandat expire dans un délai inférieur à six mois lors de l’entrée en vigueur de la loi organique devront demander son renouvellement dans le mois suivant la publication de ladite loi.
Le II bis précise que la nouvelle rédaction de l’article 41-22 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature résultant de l’article 30 bis du présent projet entrera en vigueur le 1er janvier 2017, date de suppression des juridictions de proximité.
Le III dispose que, pour les magistrats en fonctions, l’obligation d’établir une déclaration d’intérêts et de participer à un entretien déontologique, instaurée à l’article 21 du présent projet, devra avoir été satisfaite dans les douze mois suivant la publication du décret en Conseil d’État prévu audit article (futur article 7-2 de l’ordonnance de 1958 précitée). Sur proposition de votre rapporteure, votre Commission l’a porté à dix-huit mois : un délai de douze mois a certes été prévu pour les membres des juridictions administratives et financières dans la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, mais l’on compte plus de 8 000 magistrats judiciaires, à comparer à environ 1 500 membres de la juridiction administrative et à environ 800 magistrats financiers.
Le IV prévoit que l’établissement, par les magistrats concernés, d’une déclaration de situation patrimoniale, prévue à l’article 21 du présent projet, devra intervenir dans les deux mois suivant la publication du décret en Conseil d’État prévu audit article (futur article 7-3 de l’ordonnance de 1958 précitée).
Le V reporte au 1er septembre 2020 l’entrée en vigueur de la mobilité statutaire introduite par la loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007 relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats (135). En application de cette dernière, l’article 76-4 de l’ordonnance de 1958 précitée dispose que, pour accéder aux emplois hors hiérarchie, les magistrats doivent accomplir, après au moins quatre années de services effectifs dans le corps judiciaire, une période de « mobilité statutaire » au cours de laquelle ils « exercent des fonctions différentes de celles normalement dévolues aux membres du corps judiciaire ». Selon l’exposé des motifs du présent projet, ce report « permettra de mettre en œuvre cette réforme dans de meilleures conditions, lorsque les vacances de postes seront moindres grâce aux recrutements en cours ».
Initialement, le Gouvernement avait prévu de supprimer ce dispositif de mobilité statutaire. Toutefois, saisi pour avis du présent projet de loi organique, le Conseil d’État a donné un avis défavorable à cette suppression, relevant qu’elle « contrariait l’objectif proclamé d’ouverture du corps judiciaire vers l’extérieur, alors que doivent être développées et valorisées les possibilités d’un exercice temporaire d’une autre activité professionnelle, lequel constitue une source de compétences personnelles supplémentaires et un facteur de dynamisme pour l’institution. [Le Conseil d’État] a seulement accepté de reporter l’application de l’obligation de mobilité à compter de 2020 » (136).
À l’initiative de votre rapporteure, du Gouvernement et de M. Yves Goasdoué, votre commission des Lois a apporté plusieurs modifications de coordination ou de conséquence au présent article.
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La Commission est saisie de l’amendement CL73 de M. Alain Tourret, qui fait l’objet du sous-amendement CL131 de la rapporteure.
M. Alain Tourret. L’amendement CL73 a pour objet de prendre en compte l’intégration des juges de proximité dans le statut des magistrats à titre temporaire en supprimant les dispositions du projet de loi organique les concernant. Il vise à assurer la mise en œuvre de ce nouveau régime pour les juges de proximité actuellement en cours de mandat.
Je suis, par ailleurs, d’accord avec la précision apportée par le sous-amendement de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Mon sous-amendement est rédactionnel.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable. C’est opportunément que le sous-amendement mentionne une date d’entrée en vigueur, car le texte en prévoit plusieurs.
La Commission adopte le sous-amendement CL131.
Elle adopte ensuite l’amendement CL73 sous-amendé.
La Commission examine l’amendement CL57 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. L’inspection dont nous avons souvent parlé n’interviendra que le 1er janvier 2017, il est donc nécessaire de prévoir des dispositions transitoires.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
Elle est ensuite saisie de l’amendement CL132 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement porte de douze à dix-huit mois le délai pendant lequel l’ensemble des magistrats judiciaires devront avoir remis leur déclaration d’intérêts et avoir fait l’objet d’un entretien déontologique. Il répond à une demande formulée par les magistrats.
M. le garde des Sceaux. Cet amendement se justifie au regard du fait qu’il y aura 7 752 magistrats qui auront à satisfaire à cette obligation.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement de précision CL133 de la rapporteure.
Elle examine ensuite les amendements identiques CL134 de la rapporteure et CL69 de M. Yves Goasdoué.
Mme la rapporteure. Il s’agit d’amendements de conséquence tendant à fixer la date de remise des déclarations d’intérêts des membres du Conseil supérieur de la magistrature.
La Commission adopte les amendements.
Puis elle adopte l’amendement de précision CL135 de la rapporteure.
Elle en vient à l’amendement CL136 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement précise les modalités d’entrée en vigueur de l’obligation d’établir une déclaration de situation patrimoniale incombant aux membres du Conseil supérieur de la magistrature.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle est saisie des amendements identiques CL137 de la rapporteure et CL70 de M. Yves Goasdoué.
Mme la rapporteure. Il s’agit de reporter au 1er septembre 2017 la création de la fonction statutaire de juge des libertés et de la détention.
M. le garde des Sceaux. Avis favorable.
La Commission adopte les amendements.
Elle examine ensuite l’amendement CL55 du Gouvernement.
M. le garde des Sceaux. Cet amendement prévoit des dispositions transitoires concernant les magistrats réservistes en cours d’activité lors de l’entrée en vigueur de la loi organique.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 35 modifié.
Intitulé du projet de loi organique
Alors que le présent projet de loi organique était initialement « relatif à l’indépendance et l’impartialité des magistrats et à l’ouverture de la magistrature sur la société », la commission des Lois du Sénat en a modifié l’intitulé, celui-ci devenant : « projet de loi organique relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature ».
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La Commission adopte l’ensemble du projet de loi organique modifié.
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En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le projet de loi organique relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature (n° 3716), adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.
Dispositions en vigueur ___ |
Texte du projet de loi organique ___ |
Texte adopté par la Commission ___ |
Projet de loi organique relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrat ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature |
Projet de loi organique relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrat ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature | |
TITRE IER |
TITRE IER | |
DISPOSITIONS RELATIVES AU STATUT |
DISPOSITIONS RELATIVES AU STATUT | |
Chapitre IER |
Chapitre IER | |
DISPOSITIONS RELATIVES À LA COMPOSITION |
DISPOSITIONS RELATIVES À LA COMPOSITION | |
Ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature |
Article 1er |
Article 1er |
Art. 1er. – I. – Le corps judiciaire comprend : |
Après le 1° du I de l’article 1er de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé : |
(Alinéa sans modification) |
1° Les magistrats du siège et du parquet de la Cour de cassation, des cours d’appel et des tribunaux de première instance ainsi que les magistrats du cadre de l’administration centrale du ministère de la justice ; |
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« 1° bis Les magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général |
« 1° bis Les magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, d’inspecteur général de la justice et d’inspecteur de la justice ; » amendement CL38 | |
2° Les magistrats du siège et du parquet placés respectivement auprès du premier président et du procureur général d’une cour d’appel et ayant qualité pour exercer les fonctions du grade auquel ils appartiennent à la cour d’appel à laquelle ils sont rattachés et dans l’ensemble des tribunaux de première instance du ressort de ladite cour ; |
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3° Les auditeurs de justice. |
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II. – Tout magistrat a vocation à être nommé, au cours de sa carrière, à des fonctions du siège et du parquet. |
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Article 2 |
Article 2 | |
L’article 3 de la même ordonnance est ainsi modifié : |
(Alinéa sans modification) | |
Art. 3. – Sont placés hors hiérarchie : |
1° Le 1° est ainsi modifié : |
1° (Sans modification) |
1° Les magistrats de la Cour de cassation, à l’exception des conseillers référendaires et des avocats généraux référendaires ; |
a) Le mot : « et » est remplacé par le signe : « , » ; |
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b) Sont ajoutés les mots : « et des auditeurs » ; |
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2° Les premiers présidents des cours d’appel et les procureurs généraux près lesdites cours ; |
2° Après le 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé : |
2° (Sans modification) |
« 2° bis Les premiers présidents de chambre des cours d’appel et les premiers avocats généraux près lesdites cours ; » |
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3° Les présidents de chambre des cours d’appel et les avocats généraux près lesdites cours. |
3° Après le 3°, il est inséré un 4° ainsi rédigé : |
3° (Alinéa sans modification) |
« 4° Les magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général |
« 4° Les magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, et d’inspecteur général de la justice. » ; amendement CL39 | |
4° Le dernier alinéa est ainsi modifié : |
4° (Alinéa sans modification) | |
Un décret en Conseil d’État fixe, en fonction de l’importance de l’activité juridictionnelle, des effectifs de magistrats et de fonctionnaires des services judiciaires et de la population du ressort, la liste des emplois de président et de premier vice-président de tribunal de grande instance, ainsi que des emplois de procureur de la République et de procureur de la République adjoint, qui sont placés hors hiérarchie. |
a) La troisième occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » ; |
a) (Sans modification) |
b) Après les mots : « tribunal de grande instance, », sont insérés les mots : « de premier vice-président chargé de l’instruction, de premier vice-président chargé des fonctions de juge des enfants, de premier vice-président chargé de l’application des peines, de premier vice-président chargé du service d’un tribunal d’instance, ». |
b) Après les mots : « tribunal de grande instance, », sont insérés les mots : « de premier vice-président chargé de l’instruction, de premier vice-président chargé des fonctions de juge des enfants, de premier vice-président chargé de l’application des peines, de premier vice-président chargé du service d’un tribunal d’instance, de premier vice-président chargé des fonctions de juge des libertés et de la détention, ». amendements CL79 et CL8 | |
Chapitre II |
Chapitre II | |
Dispositions relatives au recrutement et à la formation professionnelle |
Dispositions relatives au recrutement et à la formation professionnelle | |
Article 3 |
Article 3 | |
L’article 14 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié : |
(Sans modification) | |
Art. 14. – La formation professionnelle des auditeurs de justice est assurée par l’Ecole nationale de la magistrature. |
1° Au premier alinéa, après les mots : « auditeurs de justice », sont insérés les mots : « , des candidats admis aux concours de recrutement de magistrats prévus à l’article 21-1 et des candidats à une intégration directe dans le corps judiciaire au titre des articles 22 et 23 » ; |
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2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : |
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Les magistrats sont soumis à une obligation de formation continue. La formation continue est organisée par l’Ecole nationale de la magistrature dans les conditions fixées par un décret en Conseil d’État. |
« Les magistrats en stage de formation continue peuvent participer à l’activité juridictionnelle, sous la responsabilité des magistrats de la juridiction les accueillant, sans pouvoir toutefois recevoir délégation de signature. » ; |
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3° Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : |
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« L’école peut également contribuer à la formation professionnelle de personnes n’appartenant pas au corps judiciaire et amenées, soit à exercer des fonctions juridictionnelles dans l’ordre judiciaire, soit à concourir étroitement à l’activité judiciaire. » |
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L’école peut, en outre, contribuer soit à la formation des futurs magistrats d’État étrangers et, en particulier, des États auxquels la France est liée par des accords de coopération technique en matière judiciaire, soit à l’information et au perfectionnement des magistrats de ces États. |
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L’organisation et les conditions de fonctionnement de l’Ecole nationale de la magistrature sont fixées par un décret en Conseil d’État. |
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Article 4 |
Article 4 | |
Art. 16. – Les candidats à l’auditorat doivent : |
I. – L’article 16 de la même ordonnance est ainsi modifié : |
I. – (Alinéa sans modification) |
1° Etre titulaires d’un diplôme sanctionnant une formation d’une durée au moins égale à quatre années d’études après le baccalauréat, que ce diplôme soit national, reconnu par l’État ou délivré par un État membre de la Communauté européenne et considéré comme équivalent par le ministre de la justice après avis d’une commission dans les conditions prévues par un décret en Conseil d’État, ou d’un diplôme délivré par un institut d’études politiques, ou encore avoir obtenu le certificat attestant la qualité d’ancien élève d’une école normale supérieure. Cette exigence n’est pas applicable aux candidats visés aux 2° et 3° de l’article 17 ; |
1° Après le mot : « baccalauréat », la fin de la première phrase du 1° est ainsi rédigée : « ou justifiant d’une qualification reconnue au moins équivalente dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. » ; |
1° (Sans modification) |
2° Etre de nationalité française ; |
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3° Jouir de leurs droits civiques et être de bonne moralité ; |
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4° Se trouver en position régulière au regard du code du service national. |
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5° Remplir les conditions d’aptitude physique nécessaires à l’exercice de leurs fonctions et être reconnus indemnes ou définitivement guéris de toute affection donnant droit à un congé de longue durée. |
2° À la fin du 5°, les mots : « et être reconnus indemnes ou définitivement guéris de toute affection donnant droit à un congé de longue durée » sont remplacés par les mots : « compte tenu des possibilités de compensation du handicap » ; |
2° À la fin du 5°, les mots : « et être reconnus indemnes ou définitivement guéris de toute affection donnant droit à un congé de longue durée » sont remplacés par les mots : « compte tenu des possibilités de compensation du handicap éventuel » ; amendement CL80 |
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé : |
3° (Alinéa sans modification) | |
« Sous réserve des articles 17 et 21-1, les candidats aux concours doivent remplir les conditions requises pour être candidat à l’auditorat au plus tard à la date de |
« Sous réserve des articles 17 et 21-1, les candidats aux concours doivent remplir les conditions requises pour être candidat à l’auditorat au plus tard à la date de la première épreuve du concours. La vérification de ces conditions doit intervenir au plus tard à la date de la nomination en qualité d’auditeur de justice. » amendement CL34 | |
Art. 17. – Trois concours sont ouverts pour le recrutement d’auditeurs de justice : |
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1° Le premier, aux candidats remplissant la condition prévue au 1° de l’article 16 ; |
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2° Le deuxième, de même niveau, aux fonctionnaires régis par les titres Ier, II, III et IV du statut général des fonctionnaires de l’État et des collectivités territoriales, aux militaires et aux autres agents de l’État, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics justifiant, au 1er janvier de l’année du concours, de quatre ans de service en ces qualités ; |
II. – Au 2° de l’article 17 de la même ordonnance, après les mots : « établissements publics », sont insérés les mots : « , en activité, en détachement, en congé parental ou accomplissant leur service national, ». |
II. – (Sans modification) |
3° Le troisième, de même niveau, aux personnes justifiant, durant huit années au total, d’une ou plusieurs activités professionnelles, d’un ou plusieurs mandats de membre d’une assemblée élue d’une collectivité territoriale ou de fonctions juridictionnelles à titre non professionnel. La durée de ces activités, mandats ou fonctions ne peut être prise en compte que si les intéressés n’avaient pas, lorsqu’ils les exerçaient, la qualité de magistrat, de fonctionnaire, de militaire ou d’agent public. |
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Un cycle de préparation est ouvert aux personnes remplissant les conditions définies au 3° du présent article et ayant subi avec succès une épreuve de sélection. Les candidats ayant suivi ce cycle et échoué au troisième concours sont admis à se présenter, dans un délai de deux ans à compter de la fin du cycle, aux concours d’entrée dans les corps de catégorie A de la fonction publique de l’État, aux concours sur épreuves d’entrée dans les cadres d’emploi de catégorie A de la fonction publique territoriale ainsi qu’aux concours sur épreuves d’entrée dans les corps de la fonction publique hospitalière, dans les conditions prévues par les dispositions législatives relatives à la création d’un troisième concours d’entrée à l’Ecole nationale d’administration. |
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Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. |
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Article 5 |
Article 5 | |
L’article 18-1 de la même ordonnance est ainsi modifié : |
(Alinéa sans modification) | |
1° Le premier alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés : |
1° (Alinéa sans modification) | |
Art. 18-1. – Peuvent être nommées directement auditeurs de justice, si elles sont titulaires d’une maîtrise en droit et si elles remplissent les autres conditions fixées à l’article 16, les personnes que quatre années d’activité dans le domaine juridique, économique ou social qualifient pour l’exercice des fonctions judiciaires. |
« Peuvent être nommées directement auditeurs de justice les personnes que quatre années d’activité dans |
« Peuvent être nommées directement auditeurs de justice les personnes que quatre années d’activité dans les domaines juridique, économique ou des sciences humaines et sociales qualifient pour l’exercice des fonctions judiciaires : amendement CL71 |
« 1° Si elles sont titulaires d’un diplôme sanctionnant une formation d’une durée au moins égale à quatre années d’études après le baccalauréat dans un domaine juridique ou justifiant d’une qualification reconnue au moins équivalente dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ; |
« 1° (Sans modification) | |
« 2° Et si elles remplissent les autres conditions fixées aux 2° à 5° de l’article 16. » ; |
« 2° (Sans modification) | |
2° Le deuxième alinéa est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés : | ||
Peuvent également être nommés dans les mêmes conditions les docteurs en droit qui possèdent, outre les diplômes requis pour le doctorat, un autre diplôme d’études supérieures, ainsi que les personnes ayant exercé des fonctions d’enseignement ou de recherche en droit dans un établissement public d’enseignement supérieur pendant trois ans après l’obtention de la maîtrise en droit et possédant un diplôme d’études supérieures dans une discipline juridique. |
« Peuvent également être nommés dans les mêmes conditions : | |
« 1° Les docteurs en droit qui possèdent, outre les diplômes requis pour le doctorat, un autre diplôme d’études supérieures ; | ||
« 2° Les docteurs en droit justifiant de trois années au moins d’exercice professionnel en qualité de juriste assistant ; amendement CL35 rect. | ||
|
« 3° Les personnes titulaires d’un diplôme sanctionnant une formation d’une durée au moins égale à cinq années d’études après le baccalauréat dans un domaine juridique ou qui justifient d’une qualification reconnue au moins équivalente dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État et qui justifient de trois années au moins d’exercice professionnel en qualité de juriste assistant ; | |
« 4° Les personnes ayant exercé des fonctions d’enseignement ou de recherche en droit dans un établissement public d’enseignement supérieur pendant trois ans après l’obtention d’un diplôme sanctionnant une formation d’une durée au moins égale à cinq années d’études après le baccalauréat dans un domaine juridique ou justifiant d’une qualification reconnue au moins équivalente dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. » ; amendement CL35 rect. | ||
Le nombre des auditeurs nommés au titre du présent article ne peut dépasser le tiers du nombre des auditeurs issus des concours prévus à l’article 17 et figurant dans la promotion à laquelle ils seront intégrés. |
3° À la fin du troisième alinéa, les mots : « auditeurs issus des concours prévus à l’article 17 et figurant dans la promotion à laquelle ils seront intégrés » sont remplacés par les mots : « places offertes aux concours prévus à l’article 17 pour le recrutement des auditeurs de justice de la promotion à laquelle ils seront intégrés ». |
3° (Sans modification) |
Les candidats visés au présent article sont nommés par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, sur avis conforme de la commission prévue à l’article 34. |
||
Article 6 |
Article 6 | |
Art. 19. – Les auditeurs participent sous la responsabilité des magistrats à l’activité juridictionnelle, sans pouvoir toutefois recevoir délégation de signature. |
||
Ils peuvent notamment : |
||
Assister le juge d’instruction dans tous les actes d’information ; |
||
Assister les magistrats du ministère public dans l’exercice de l’action publique ; |
||
Siéger en surnombre et participer avec voix consultative aux délibérés des juridictions civiles et correctionnelles ; |
||
Présenter oralement devant celles-ci des réquisitions ou des conclusions ; |
||
Assister aux délibérés des cours d’assises. |
||
Sans préjudice de l’avant-dernier alinéa de l’article 18-2, les auditeurs de justice effectuent, pendant la scolarité à l’Ecole nationale de la magistrature, un stage d’une durée minimale de six mois auprès d’un barreau ou comme collaborateur d’un avocat inscrit au barreau. |
Au dernier alinéa de l’article 19 de la même ordonnance, les mots : « d’une durée minimale de six mois » sont remplacés par les mots : « leur permettant de mieux connaître l’environnement judiciaire, administratif et économique, incluant un stage ». |
Au dernier alinéa de l’article 19 de la même ordonnance, les mots : « un stage d’une durée minimale de six mois » sont remplacés par les mots : « une formation leur permettant de mieux connaître l’environnement judiciaire, administratif et économique, incluant un stage ». amendement CL81 |
Chapitre III |
Chapitre III | |
Dispositions relatives aux conditions de nomination |
Dispositions relatives aux conditions de nomination | |
Ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l’État |
Article 7 |
Article 7 |
Art. 1er. – Outre les emplois visés à l’article 13 (par. 3) de la Constitution, il est pourvu en conseil des ministres : |
Le deuxième alinéa de l’article 1er de l’ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l’État est ainsi rédigé : |
(Sans modification) |
Aux emplois de procureur général près la Cour de cassation, de procureur général près la Cour des comptes, de procureur général près une cour d’appel. |
« À l’emploi de procureur général près la Cour des comptes. » |
|
Aux emplois de direction dans les établissements publics, les entreprises publiques et les sociétés nationales quand leur importance justifie inscription sur une liste dressée par décret en conseil des ministres ; |
||
Aux emplois pour lesquels cette procédure est actuellement prévue par une disposition législative ou réglementaire particulière. |
||
Ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature |
Article 8 |
Article 8 |
Art. 2. – La hiérarchie du corps judiciaire comprend deux grades. L’accès du second au premier grade est subordonné à l’inscription à un tableau d’avancement. |
(Sans modification) | |
Nul magistrat ne peut être promu au premier grade dans la juridiction où il est affecté depuis plus de cinq années, à l’exception de la Cour de cassation. |
Au deuxième alinéa de l’article 2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept ». |
|
A l’intérieur de chaque grade sont établis des échelons d’ancienneté. |
||
Les fonctions exercées par les magistrats de chaque grade sont définies par un décret en Conseil d’État. |
||
Nul magistrat ne peut être nommé dans un emploi correspondant aux fonctions de président de tribunal de grande instance ou de tribunal de première instance et à celles de procureur de la République dans la juridiction où il est affecté. Toutefois, cette disposition n’est pas applicable au magistrat qui remplit l’une de ces fonctions lorsque l’emploi correspondant est élevé au niveau hiérarchique supérieur. |
||
Article 9 |
Article 9 | |
Art. 3-1. – Les magistrats mentionnés au 2° du I de l’article 1er sont appelés à remplacer temporairement les magistrats de leur grade des tribunaux de première instance et de la cour d’appel qui se trouvent empêchés d’exercer leurs fonctions du fait de congés de maladie, de longue maladie, pour maternité ou adoption ou du fait de leur participation à des stages de formation, ou admis à prendre leur congé annuel. |
L’article 3-1 de la même ordonnance est ainsi modifié : |
(Alinéa sans modification) |
Ils peuvent, en outre, être temporairement affectés dans ces juridictions pour exercer, pour une durée qui n’est pas renouvelable et qui ne peut excéder huit mois, les fonctions afférentes à un emploi vacant de leur grade. |
||
Ils peuvent enfin, pour une durée qui n’est pas renouvelable et qui ne peut excéder huit mois, être temporairement affectés dans un tribunal de première instance, ainsi qu’à la cour d’appel pour les magistrats du premier grade, pour renforcer l’effectif d’une juridiction afin d’assurer le traitement du contentieux dans un délai raisonnable. |
||
S’il s’agit de magistrats du siège et sauf consentement de leur part à un changement d’affectation, ils demeurent en fonctions jusqu’au retour du magistrat dont ils assurent le remplacement, ou jusqu’au terme fixé de leur affectation temporaire par l’ordonnance du premier président. |
||
L’affectation de ces magistrats, selon qu’ils appartiennent au siège ou au parquet, est prononcée par ordonnance du premier président de la cour d’appel ou par décision du procureur général, qui précise le motif et la durée du remplacement à effectuer ou de l’affectation temporaire. |
||
À défaut d’assurer un remplacement ou d’être temporairement affectés, en application des alinéas qui précèdent, ces magistrats exercent des fonctions du siège ou du parquet du niveau hiérarchique auquel ils appartiennent au tribunal de grande instance du siège de la cour d’appel à laquelle ils sont rattachés ou au tribunal de grande instance le plus important du département où est située ladite cour. |
||
Le nombre de ces magistrats ne peut excéder, pour chaque cour d’appel, le quinzième des emplois de magistrat de la cour d’appel et des tribunaux de première instance du ressort. |
||
Leur nomination peut, le cas échéant, être prononcée en surnombre de l’effectif de la cour d’appel de rattachement dans la limite de l’effectif budgétaire global des emplois de leur grade. |
1° Le neuvième alinéa est ainsi modifié : |
1° (Alinéa sans modification) |
Après deux ans d’exercice dans leurs fonctions et sur leur demande, ces magistrats sont nommés au tribunal de grande instance du siège de la cour d’appel à laquelle ils sont rattachés ou au tribunal de grande instance le plus important du département où est située ladite cour. La nomination intervient sur le premier emploi vacant respectivement du siège ou du parquet du niveau hiérarchique auquel ces magistrats appartiennent et pour lequel ils se sont portés candidats, à l’exception des emplois de chef de juridiction, premier vice-président, premier vice-président adjoint, procureur de la République adjoint ou premier vice-procureur de la République des tribunaux de grande instance. |
a) Après le mot : « nommés », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « à l’un des tribunaux de grande instance du ressort de la cour d’appel à laquelle ils sont rattachés. » ; |
a) (Sans modification) |
b) La deuxième phrase est ainsi modifiée : |
b) (Alinéa sans modification) | |
– après les mots : « premier vice-président adjoint, », sont insérés les mots : « premier vice-président chargé de l’instruction, premier vice-président chargé des fonctions de juge des enfants, premier vice-président chargé de l’application des peines, premier vice-président chargé du service d’un tribunal d’instance » ; |
– après les mots : « premier vice-président adjoint, », sont insérés les mots : « premier vice-président chargé de l’instruction, premier vice-président chargé des fonctions de juge des enfants, premier vice-président chargé de l’application des peines, premier vice-président chargé du service d’un tribunal d’instance, premier vice-président chargé des fonctions de juge des libertés et de la détention, » ; amendements CL82 et CL9 | |
– à la fin, les mots : « ou premier vice-procureur de la République des tribunaux de grande instance » sont remplacés par les mots : « , premier vice-procureur de la République des tribunaux de grande instance ou premier vice-procureur de la République financier près le tribunal de grande instance de Paris » ; |
(Alinéa sans modification) | |
2° L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié : | ||
Ces magistrats ne peuvent en aucun cas exercer les fonctions prévues au présent article pendant une durée supérieure à six ans. A l’issue de cette période, ils sont nommés respectivement en qualité de magistrat du siège ou du parquet du niveau hiérarchique auquel ils appartiennent dans celle des deux juridictions mentionnées à l’alinéa précédent où, au plus tard quatre mois avant la fin de la sixième année de leurs fonctions, ils ont demandé à être affectés. A défaut d’avoir effectué un choix, ils sont nommés au tribunal de grande instance le plus important du département où est située la cour d’appel à laquelle ils sont rattachés. Les nominations sont prononcées, le cas échéant, en surnombre de l’effectif budgétaire du niveau hiérarchique auquel ils appartiennent et, s’il y a lieu, en surnombre de l’effectif organique de la juridiction. Les surnombres sont résorbés à la première vacance utile intervenant dans la juridiction considérée. |
a) (nouveau) À la première phrase, le mot : « six » est remplacé par le mot : « huit » ; | |
|
b) À la deuxième phrase, les mots : « celle des deux juridictions mentionnées » sont remplacés par les mots : « l’un des tribunaux de grande instance mentionnés » et le mot : « sixième » est remplacé par le mot : « huitième ». amendement CL36 | |
Un décret en Conseil d’État détermine, en tant que de besoin, les conditions d’application du présent article. |
||
Article 9 bis (nouveau) |
Article 9 bis | |
Art. 6. – Tout magistrat, lors de sa nomination à son premier poste, et avant d’entrer en fonctions, prête serment en ces termes : |
(Sans modification) | |
« Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder religieusement le secret des délibérations et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat. » |
Au deuxième alinéa de l’article 6 et au troisième alinéa de l’article 20 de la même ordonnance, le mot : « religieusement » est supprimé. |
|
Il ne peut, en aucun cas, être relevé de ce serment. |
||
Le serment est prêté devant la cour d’appel. Toutefois, pour les magistrats directement nommés à la Cour de cassation, il est prêté devant cette juridiction. |
||
L’ancien magistrat prête à nouveau serment lorsqu’il est réintégré. |
||
Art. 20. – Les auditeurs de justice sont astreints au secret professionnel. |
||
Préalablement à toute activité, ils prêtent serment devant les cours d’appel en ces termes : |
||
"Je jure de garder religieusement le secret professionnel et de me conduire en tout comme un digne et loyal auditeur de justice." |
||
Ils ne peuvent, en aucun cas, être relevés de ce serment. |
||
Article 9 ter (nouveau) |
Article 9 ter | |
Art. 6. – Tout magistrat, lors de sa nomination à son premier poste, et avant d’entrer en fonctions, prête serment en ces termes : |
Avant le dernier alinéa de l’article 6 de la même ordonnance, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : |
(Sans modification) |
"Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder religieusement le secret des délibérations et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat." |
||
Il ne peut, en aucun cas, être relevé de ce serment. |
||
Le serment est prêté devant la cour d’appel. Toutefois, pour les magistrats directement nommés à la Cour de cassation, il est prêté devant cette juridiction. |
||
« Le magistrat intégré au titre des articles 22 et 23, nommé dans une juridiction d’outre-mer et effectuant son stage préalable sur le territoire métropolitain, peut prêter serment devant la cour d’appel de sa résidence. » |
||
L’ancien magistrat prête à nouveau serment lorsqu’il est réintégré. |
||
Article 9 quater (nouveau) | ||
Le chapitre Ier de la même ordonnance est ainsi modifié : | ||
1° L’article 9 est ainsi modifié : | ||
Art. 9. – L'exercice des fonctions de magistrat est incompatible avec l'exercice d'un mandat au Parlement, au Parlement européen ou au Conseil économique, social et environnemental, ainsi que de membre du congrès ou d'une assemblée de province de la Nouvelle-Calédonie, de représentant à l'assemblée de la Polynésie française, de membre de l'assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna, de conseiller territorial de Saint-Barthélemy, de conseiller territorial de Saint-Martin, de conseiller général de Mayotte ou de conseiller territorial de Saint-Pierre-et-Miquelon ou avec la fonction de membre du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ou du gouvernement de la Polynésie française. |
a) Au premier alinéa, les mots : « , de conseiller général de Mayotte » sont supprimés ; amendement CL21 | |
Nul ne peut être nommé magistrat ni le demeurer dans une juridiction dans le ressort de laquelle se trouve tout ou partie du département dont son conjoint est député ou sénateur. |
||
L'exercice des fonctions de magistrat est également incompatible avec l'exercice d'un mandat de conseiller régional, de conseiller général, de conseiller municipal ou de conseiller d'arrondissement, de conseiller de Paris, de conseiller de l'Assemblée de Corse, de conseiller de l'Assemblée de Guyane ou de conseiller de l'Assemblée de Martinique dans le ressort de la juridiction à laquelle appartient ou est rattaché le magistrat. |
b) Au troisième alinéa, le mot : « général » est remplacé par le mot : « départemental » et, après le mot : « Paris », sont insérés les mots : « , de conseiller de la métropole de Lyon » ; amendement CL21 | |
Nul ne peut être nommé magistrat ni le demeurer dans une juridiction dans le ressort de laquelle il aura exercé depuis moins de cinq ans, une fonction publique élective visée au présent article ou fait acte de candidature à l'un de ces mandats, à l'exception du mandat de représentant au Parlement européen, depuis moins de trois ans. |
||
Les dispositions des trois alinéas qui précèdent ne s'appliquent pas aux magistrats de la Cour de cassation. |
||
Art. 9-1-1. – Les magistrats et anciens magistrats ne peuvent occuper un emploi au service des collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Mayotte, de la Polynésie française et de Saint-Pierre-et-Miquelon ou de leurs établissements publics lorsqu'ils ont exercé leurs fonctions sur le territoire de la collectivité intéressée depuis moins de deux ans. |
2° À l’article 9-1-1, les mots : « , de Mayotte » sont supprimés. amendement CL21 | |
Article 10 |
Article 10 | |
L’article 12-1 de la même ordonnance est ainsi modifié : |
(Alinéa sans modification) | |
Art. 12-1. – L’activité professionnelle de chaque magistrat fait l’objet d’une évaluation tous les deux ans. Une évaluation est effectuée au cas d’une présentation à l’avancement. |
1° La seconde phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « et à l’occasion d’une candidature au renouvellement des fonctions » ; |
1° (Sans modification) |
2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé : |
2° (Alinéa sans modification) | |
Cette évaluation est précédée d’un entretien avec le chef de la juridiction où le magistrat est nommé ou rattaché ou avec le chef du service dans lequel il exerce ses fonctions. S’agissant des juges de proximité, elle est précédée d’un entretien avec le magistrat du siège du tribunal de grande instance chargé de l’administration du service du tribunal d’instance dans le ressort duquel est située la juridiction de proximité. L’évaluation est intégralement communiquée au magistrat qu’elle concerne. |
« Cette évaluation est précédée de la rédaction par le magistrat d’un bilan de son activité et d’un entretien avec le chef de la juridiction où le magistrat est nommé ou rattaché ou avec le chef du service dans lequel il exerce ses fonctions. |
« Cette évaluation est précédée de la rédaction par le magistrat d’un bilan de son activité et d’un entretien avec le chef de la juridiction où le magistrat est nommé ou rattaché ou avec le chef du service dans lequel il exerce ses fonctions. L’évaluation des magistrats exerçant à titre temporaire est précédée d’un entretien avec le président du tribunal de grande instance auprès duquel ils sont affectés. L’évaluation est intégralement communiquée au magistrat qu’elle concerne. » ; amendement CL83 |
3° Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : |
3° (Sans modification) | |
« L’autorité qui procède à l’évaluation prend en compte les conditions d’organisation et de fonctionnement du service dans lequel le magistrat exerce ses fonctions. S’agissant des chefs de juridiction, l’évaluation apprécie, outre leurs qualités juridictionnelles, leur capacité à gérer et à animer une juridiction. » |
||
Le magistrat qui conteste l’évaluation de son activité professionnelle peut saisir la commission d’avancement. Après avoir recueilli les observations du magistrat et celles de l’autorité qui a procédé à l’évaluation, la commission d’avancement émet un avis motivé versé au dossier du magistrat concerné. |
||
Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. |
||
Article 11 |
Article 11 | |
L’article 13 de la même ordonnance est ainsi modifié : |
(Alinéa sans modification) | |
1° Le premier alinéa est ainsi modifié : |
1° (Sans modification) | |
Art. 13. – Les magistrats sont astreints à résider au siège de la juridiction à laquelle ils appartiennent ou sont rattachés. |
a) Les mots : « au siège » sont remplacés par les mots : « dans le ressort » ; |
|
b) Sont ajoutés les mots : « ou dans le ressort d’un tribunal de grande instance limitrophe » ; |
||
Des dérogations exceptionnelles à caractère individuel et provisoire, peuvent être accordées sur avis favorable des chefs de cour par le ministre de la justice. |
2° (Supprimé) |
2° À la fin du second alinéa, les mots : « sur avis favorable des chefs de cour par le ministre de la justice » sont remplacés par les mots : « par le ministre de la justice après avis des chefs de cour ». amendement CL14 |
Article 11 bis (nouveau) |
Article 11 bis | |
Art. 27. – Chaque année, les listes des magistrats présentés, par ordre de mérite, en vue d’une inscription au tableau d’avancement sont adressées au garde des sceaux, ministre de la justice, par les autorités chargées de leur établissement. Ces listes sont notifiées à ces magistrats. Les magistrats non compris dans les présentations peuvent adresser au ministre de la justice, par la voie hiérarchique, une demande à fin d’inscription. |
La dernière phrase du premier alinéa de l’article 27 de la même ordonnance est supprimée. |
(Sans modification) |
Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. |
||
Article 12 |
Article 12 | |
Art. 27-1. – Le projet de nomination à une fonction du premier ou du second grade et la liste des candidats à cette fonction sont communiqués pour les postes du siège ou pour ceux du parquet à la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature. |
L’article 27-1 de la même ordonnance est ainsi modifié : |
(Alinéa sans modification) |
1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié : amendement CL42 | ||
Ce projet de nomination est adressé aux chefs de la Cour de cassation, aux chefs des cours d’appel et des tribunaux supérieurs d’appel, à l’inspecteur général des services judiciaires ainsi qu’aux directeurs et chefs de service de l’administration centrale du ministère de la justice, qui en assurent la diffusion auprès des magistrats en activité dans leur juridiction, dans le ressort de leur juridiction ou de leurs services. Ce document est adressé aux syndicats et organisations professionnelles représentatifs de magistrats et, sur leur demande, aux magistrats placés dans une autre position que celle de l’activité. |
a) (nouveau) À la première phrase, les mots : « des services judiciaires » sont remplacés par les mots : « , chef de l’inspection générale de la justice, » ; amendement CL42 | |
|
b) À la seconde phrase, les mots : « et organisations professionnelles » sont supprimés ; amendement CL42 | |
Toute observation d’un candidat relative à un projet de nomination est adressée au garde des sceaux, ministre de la justice, et au Conseil supérieur de la magistrature. |
||
Les dispositions du présent article ne s’appliquent pas aux projets de nomination de substitut chargé du secrétariat général d’une juridiction. Elles ne s’appliquent pas aux propositions de nomination prévues à l’article 26, ni aux projets de nomination pris pour l’exécution des décisions prévues aux 2°, 3° et 5° de l’article 45 et au second alinéa de l’article 46. |
2° Au dernier alinéa, les mots : « ne s’appliquent pas aux projets de nomination de substitut chargé du secrétariat général d’une juridiction. Elles » sont supprimés. |
2° (Sans modification) |
Article 13 |
Article 13 | |
Art. 28. – Les décrets de nomination aux fonctions de président d’un tribunal de grande instance ou d’un tribunal de première instance ou de conseiller référendaire à la Cour de cassation sont pris par le Président de la République sur proposition de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature. |
||
Les décrets portant promotion de grade ou nomination aux fonctions de magistrat autres que celles mentionnées à l’alinéa précédent sont pris par le Président de la République sur proposition du garde des sceaux, ministre de la justice, après avis conforme de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature pour ce qui concerne les magistrats du siège et après avis de la formation compétente du Conseil supérieur pour ce qui concerne les magistrats du parquet. Les règles de nomination des magistrats du parquet s’appliquent aux magistrats du cadre de l’administration centrale du ministère de la justice. |
La seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 28 de la même ordonnance est complétée par les mots : « et aux magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur |
La seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 28 de la même ordonnance est complétée par les mots : « et aux magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur de la justice ». amendement CL43 |
La durée d’exercice des fonctions de conseiller référendaire ou d’avocat général référendaire est de dix années ; elle ne peut être ni renouvelée, ni prorogée. |
||
Article 14 |
Article 14 | |
|
L’article 28-3 de la même ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié : | |
Art. 28-3. – Les fonctions de juge d'instruction, de juge des enfants et de juge de l'application des peines d'un tribunal de grande instance ou de première instance et celles de juge d'un tribunal de grande instance chargé du service d'un tribunal d'instance sont exercées par un magistrat du siège de ce tribunal de grande instance ou de première instance, désigné à cet effet dans les formes prévues à l'article 28. |
1° Au premier alinéa, après le mot : « fonctions », sont insérés les mots : « de juge des libertés et de la détention, » ; amendements CL84, CL 72 | |
S'il n'occupe pas déjà cet emploi lors de sa désignation, en qualité de juge d'instruction, de juge des enfants, de juge de l'application des peines ou de juge chargé du service d'un tribunal d'instance, conformément à l'alinéa précédent, le magistrat est nommé concomitamment à un emploi de magistrat du siège de ce tribunal de grande instance ou de première instance. Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l'effectif organique de la juridiction, surnombre résorbé à la première vacance utile dans cette juridiction. |
2° À la première phrase du deuxième alinéa, après le mot : « qualité », sont insérés les mots : « de juge des libertés et de la détention, » ; | |
Nul ne peut exercer plus de dix années la fonction de juge d'instruction, de juge des enfants, de juge de l'application des peines ou de juge chargé du service d'un tribunal d'instance dans un même tribunal de grande instance ou de première instance. A l'expiration de cette période, s'il n'a pas reçu une autre affectation, le magistrat est déchargé de cette fonction par décret du Président de la République et exerce au sein du tribunal de grande instance ou de première instance les fonctions de magistrat du siège auxquelles il a été initialement nommé. Il en est de même dans les cas où, avant ce terme, il est déchargé de cette fonction sur sa demande ou en application de l'article 45. |
3° À la première phrase du troisième alinéa, après le mot : « fonction », sont insérés les mots : « de juge des libertés et de la détention, ». amendements CL84, CL 72 | |
|
« Art. 28-4. – Supprimé amendements CL84, CL 72 | |
|
||
Article 14 bis (nouveau) | ||
Art. 31. – Lorsqu'il est procédé à la suppression d'une juridiction, les magistrats du siège et les magistrats du parquet reçoivent une nouvelle affectation dans les conditions fixées ci-après et selon les formes prévues aux deux premiers alinéas de l'article 28. |
Le chapitre III de la même ordonnance est ainsi modifié : | |
Neuf mois au plus tard avant la suppression de la juridiction, les magistrats du siège font connaître au ministre de la justice s'ils demandent leur affectation dans les mêmes fonctions dans la ou l'une des juridictions qui seront compétentes dans tout ou partie du ressort de la juridiction supprimée. |
1° L’article 31 est ainsi modifié : | |
S'ils ne demandent pas cette affectation, ils précisent les trois affectations qu'ils désireraient recevoir, à niveau hiérarchique égal, dans la ou l'une des juridictions qui seront compétentes dans tout ou partie du ressort de la juridiction supprimée, mais à des fonctions autres que celles qu'ils exercent, ou dans les juridictions de même nature limitrophes. Six mois au plus tard avant la date prévue à l'alinéa précédent, le ministre de la justice peut inviter ces magistrats à présenter trois demandes supplémentaires d'affectation. Les demandes d'affectation prévues au présent alinéa ne peuvent porter exclusivement sur des emplois de chef de juridiction. |
a) La dernière phrase des troisièmes et avant-dernier alinéas est complétée par les mots : « , ni sur des emplois de premier grade de la hiérarchie judiciaire comportant un huitième échelon » ; | |
À la date de suppression de la juridiction, ces magistrats sont nommés dans l'une des affectations qu'ils ont demandées. |
||
Si ces magistrats n'ont pas exprimé de demande d'affectation, ils sont nommés dans la ou l'une des juridictions qui seront compétentes dans tout ou partie du ressort de la juridiction supprimée dans les fonctions qu'ils occupaient précédemment. |
||
Les nominations prévues aux quatre alinéas précédents sont prononcées, le cas échéant, en surnombre de l'effectif budgétaire du grade auquel appartiennent les magistrats concernés et, s'il y a lieu, de l'effectif organique de la juridiction. Les surnombres sont résorbés à la première vacance intervenant dans la juridiction considérée et correspondant aux fonctions exercées. |
b) Après le sixième alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés : | |
« Les six premiers alinéas sont applicables en cas de suppression d’une fonction exercée par les magistrats du siège, sous réserve des huitièmes à dixième alinéas. | ||
« Les magistrats dont la fonction est supprimée font connaître au ministre de la justice s’ils demandent leur affectation dans la même fonction ou dans la ou l’une des juridictions qui seront compétentes dans tout ou partie du contentieux et du ressort de la juridiction où la fonction a été supprimée. Ils peuvent également demander à être déchargés de cette fonction afin d’exercer les fonctions de magistrat du siège au sein de la juridiction où ils sont affectés. | ||
« S’ils ne demandent pas cette affectation, ils précisent les trois affectations qu’ils désirent recevoir à niveau hiérarchique égal dans la ou l’une des juridictions qui seront compétentes dans tout ou partie du contentieux et du ressort de la juridiction où la fonction est supprimée, ou dans la juridiction où ils exercent. | ||
« S’ils n’ont pas exprimé de demande d’affectation, ils sont déchargés de la fonction supprimée afin d’exercer les fonctions de magistrat du siège au sein de la juridiction où ils sont affectés. » ; | ||
2° À la dernière phrase du dernier alinéa de l’article 28-3, les mots : « de l’article » sont remplacés par la référence : « des articles 31 ou ». amendement CL30 | ||
Neuf mois au plus tard avant la suppression de la juridiction, les magistrats du parquet font connaître au ministre de la justice les affectations qu'ils désireraient recevoir. Six mois au plus tard avant cette date, le ministre de la justice peut inviter ces magistrats à présenter des demandes supplémentaires d'affectation. Leurs demandes d'affectation ne peuvent porter exclusivement sur des emplois de chef de juridiction. |
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A la date de suppression de la juridiction, ils sont nommés, le cas échéant, en surnombre dans les conditions prévues au sixième alinéa, dans une nouvelle affectation. |
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Article 15 |
Article 15 | |
I. – L’article 34 de la même ordonnance est ainsi modifié : |
(Sans modification) | |
Art. 34. – Il est institué une commission chargée de dresser et d’arrêter le tableau d’avancement ainsi que les listes d’aptitude aux fonctions. Cette commission est commune aux magistrats du siège et du parquet. |
1° À la fin de la première phrase du premier alinéa, les mots : « ainsi que les listes d’aptitude aux fonctions » sont supprimés ; |
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Le tableau d’avancement est communiqué à chacune des formations du Conseil supérieur de la magistrature avant d’être signé par le Président de la République. |
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La commission d’avancement peut demander à l’autorité chargée d’évaluer l’activité professionnelle du magistrat candidat à l’inscription sur une des listes d’aptitude ou au tableau d’avancement des précisions sur le contenu de son dossier. Ces précisions et les observations du magistrat concerné sont versées dans son dossier. La commission peut également adresser aux autorités chargées d’évaluer l’activité professionnelle des magistrats les observations qu’elle estime utiles sur le contenu des dossiers examinés. |
2° À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « sur une des listes d’aptitude ou » sont supprimés. |
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La commission d’avancement établit chaque année un rapport d’activité rendu public. |
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II. – L’article 36 de la même ordonnance est ainsi modifié : |
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Art. 36. – Le tableau d’avancement est établi chaque année. Le tableau d’avancement établi pour une année déterminée est valable jusqu’à la date de publication du tableau établi pour l’année suivante. |
1° Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés : |
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« La commission d’avancement statue sur l’inscription au tableau d’avancement des magistrats du second grade dont la liste est adressée chaque année à son secrétariat dans les conditions prévues à l’article 27 et qui remplissent les conditions fixées par décret pour accéder aux fonctions du premier grade. Le renouvellement de l’inscription est de droit sur proposition de l’autorité chargée de l’établissement de la liste mentionnée au même article 27. |
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« Les magistrats non présentés peuvent saisir la commission d’avancement. » ; |
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Des listes d’aptitude sont établies au moins une fois par an.L’inscription sur les listes d’aptitude est définitive, sauf radiation décidée dans les mêmes formes que l’inscription. |
2° Les deuxième et troisième alinéas sont supprimés ; |
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Un décret en Conseil d’État spécifie les fonctions qui ne peuvent être conférées qu’après inscription sur une liste d’aptitude. |
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3° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé : |
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Il détermine le conditions exigées pour figurer au tableau d’avancement ou sur les listes d’aptitude ainsi que les modalités d’élaboration et d’établissement du tableau annuel, des tableaux supplémentaires éventuels et des listes d’aptitude. |
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions exigées pour figurer au tableau d’avancement ainsi que les modalités d’élaboration et d’établissement du tableau annuel et des tableaux supplémentaires éventuels. Il fixe les conditions pour exercer et examiner les recours. » ; |
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Ce règlement pourra en outre, déterminer : |
4° Au cinquième alinéa, le mot : « règlement » est remplacé par le mot : « décret ». |
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1° Le temps de fonctions qu’il faudra avoir accompli préalablement à toute nomination comme juge unique ; |
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2° Le temps de fonctions qu’il faudra avoir accompli comme juge unique avant d’être nommé président du tribunal ou procureur de la République. |
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Article 16 |
Article 16 | |
Art. 37. – Les magistrats du siège placés hors hiérarchie sont nommés par décret du Président de la République dans les conditions prévues à l’article 65 de la Constitution. |
Après le troisième alinéa de l’article 37 de la même ordonnance, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : |
(Alinéa sans modification) |
La fonction de premier président de cour d’appel est exercée par un magistrat hors hiérarchie du siège de la Cour de cassation, désigné à cet effet dans les formes prévues à l’alinéa précédent. |
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S’il n’occupe pas déjà cet emploi lors de sa désignation en qualité de premier président conformément à l’alinéa précédent, le magistrat est nommé concomitamment à un emploi hors hiérarchie du siège de la Cour de cassation. En ce cas, les dispositions du troisième alinéa de l’article 39 ne sont pas applicables. Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l’effectif organique de la Cour de cassation. Ce surnombre est résorbé à la première vacance utile dans cette juridiction. |
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« Dans les six mois |
« Dans les six mois suivant son installation dans ses fonctions, le premier président définit les objectifs de son action, notamment en considération des rapports sur l’état du fonctionnement de la cour d’appel et des juridictions de son ressort qui ont pu être établis par l’inspection générale des services judiciaires et par son prédécesseur ou par les présidents des tribunaux du ressort. Il élabore, tous les deux ans, un bilan de ses activités, de l’animation et de la gestion de la cour et des juridictions de son ressort ainsi que de l’administration des services judiciaires dans ce ressort. Ces éléments sont versés au dossier du magistrat. » amendements CL85 et CL86 | |
Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de premier président d’une même cour d’appel. |
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Six mois au moins avant l’expiration de cette période, le premier président peut solliciter sa nomination en qualité d’inspecteur général adjoint des services judiciaires. Cette nomination est alors de droit au terme des sept années d’exercice de ses fonctions. |
||
À l’expiration de cette période, s’il n’a pas reçu une autre affectation, le premier président est déchargé de cette fonction par décret du Président de la République et exerce au sein de la Cour de cassation les fonctions auxquelles il a été initialement nommé. Il en est de même dans le cas où, avant ce terme, il est déchargé de cette fonction sur sa demande ou en application de l’article 45. |
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Article 17 |
Article 17 | |
L’article 37-1 de la même ordonnance est ainsi rédigé : |
(Alinéa sans modification) | |
Art. 37-1. – Les dispositions de l’article 27-1 sont applicables à la nomination aux fonctions hors hiérarchie, à l’exception des fonctions pour lesquelles le Conseil supérieur de la magistrature formule une proposition, des fonctions d’inspecteur général et d’inspecteur général adjoint des services judiciaires, ainsi que des fonctions de magistrat du parquet de la Cour de cassation et de procureur général près une cour d’appel. |
« Art. 37-1. – L’article 27-1 est applicable à la nomination aux fonctions hors hiérarchie. » |
« Art. 37-1. – L’article 27-1 est applicable à la nomination aux fonctions hors hiérarchie, à l’exception des fonctions d’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice. » amendement CL44 |
Article 18 |
Article 18 | |
Art. 38. – Les magistrats du parquet placés hors hiérarchie sont nommés par décret du Président de la République après avis du Conseil supérieur de la magistrature. |
À l’article 38 de la même ordonnance, après les mots : « hors hiérarchie », sont insérés les mots : « et les magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général |
À l’article 38 de la même ordonnance, après les mots : « hors hiérarchie », sont insérés les mots : « et les magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, et d’inspecteur général de la justice ». amendement CL45 |
Article 19 |
Article 19 | |
Art. 38-1. – La fonction de procureur général près une cour d’appel est exercée par un magistrat hors hiérarchie du parquet de la Cour de cassation, désigné à cet effet dans les formes prévues à l’article 38. |
Après le deuxième alinéa de l’article 38-1 de la même ordonnance, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : |
(Alinéa sans modification) |
S’il n’occupe pas déjà cet emploi lors de sa désignation en qualité de procureur général conformément au premier alinéa du présent article, le magistrat est nommé concomitamment à un emploi hors hiérarchie du parquet de la Cour de cassation. En ce cas, les dispositions du troisième alinéa de l’article 39 ne sont pas applicables. |
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« Dans les six mois |
« Dans les six mois suivant son installation dans ses fonctions, le procureur général, sous réserve des dispositions afférentes à la détermination de la politique pénale, définit les objectifs de son action, notamment en considération des rapports sur l’état du fonctionnement du parquet général et des parquets de son ressort qui ont pu être établis par l’inspection générale des services judiciaires et par son prédécesseur ou par les procureurs de la République du ressort. Il élabore, tous les deux ans, un bilan de ses activités et de l’animation du ministère public dans son ressort ainsi que de l’administration des services judiciaires dans ce ressort. Ces éléments sont versés au dossier du magistrat. » amendements CL87 et CL88 | |
Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de procureur général près une même cour d’appel. |
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Six mois au moins avant l’expiration de cette période, le procureur général peut solliciter sa nomination en qualité d’inspecteur général adjoint des services judiciaires. Cette nomination est alors de droit au terme des sept années d’exercice de ses fonctions. |
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A l’expiration de cette période, s’il n’a pas reçu d’autre affectation, le procureur général est déchargé de cette fonction par décret du Président de la République et exerce au sein de la Cour de cassation les fonctions auxquelles il a été initialement nommé. Il en est de même dans le cas où, avant ce terme, il est déchargé de cette fonction sur sa demande ou en application de l’article 45. |
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Article 20 |
Article 20 | |
Art. 72. – La mise en position de détachement, de disponibilité ou « sous les drapeaux » est prononcée par décret du Président de la République, sur proposition du ministre de la justice et après avis de la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard du magistrat selon que celui-ci exerce des fonctions du siège ou du parquet. Cet avis porte sur le respect des dispositions du troisième alinéa de l’article 12, de l’article 68 et de l’article 4 s’il s’agit d’un magistrat du siège. Dans le cas où la demande du magistrat concerne une mise en position de détachement ou de disponibilité pour exercer une activité libérale ou une activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé, cet avis porte également sur la compatibilité des fonctions envisagées par le magistrat avec les fonctions qu’il a occupées au cours des trois dernières années. |
(Sans modification) | |
Les décrets portant détachement sont, en outre, contresignés par le ministre auprès duquel les magistrats sont détachés. Ce contreseing n’est pas nécessaire en cas de renouvellement du détachement lorsque ces conditions demeurent identiques à celles prévues par le décret initial. |
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La réintégration des magistrats est prononcée conformément aux dispositions des articles 28, 37 et 38 de la présente ordonnance. |
I. – Au dernier alinéa de l’article 72 de la même ordonnance, la référence : « et 38 » est remplacée par les références : « , 38, 72-1 et 72-2 ». |
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II. – Le chapitre VIII de la même ordonnance est complété par des articles 72-1 à 72-3 ainsi rédigés : |
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« Art. 72-1. – Neuf mois au plus tard avant l’expiration du détachement, le magistrat placé dans cette position statutaire fait connaître au garde des sceaux, ministre de la justice, sa décision de solliciter le renouvellement du détachement ou de réintégrer le corps judiciaire. |
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« Entre neuf et sept mois au plus tard avant l’expiration du détachement, l’administration ou l’organisme d’accueil fait connaître au magistrat concerné ainsi qu’au garde des sceaux, ministre de la justice, sa décision de renouveler ou non le détachement. |
||
« Dans les cas où le renouvellement n’est pas sollicité par le magistrat, n’est pas décidé par l’administration ou l’organisme d’accueil ou est refusé par le garde des sceaux, ministre de la justice, le magistrat fait connaître au moins trois choix d’affectation dans trois juridictions différentes appartenant à des ressorts de cour d’appel différents. |
||
« Pour les magistrats du second grade inscrits au tableau d’avancement, les demandes ne peuvent porter exclusivement sur des emplois du premier grade, lesquelles ne peuvent concerner exclusivement des emplois de président d’une juridiction, de procureur de la République près une juridiction, ou de premier vice-président, premier vice-président adjoint, procureur de la République adjoint ou premier vice-procureur de la République des tribunaux de grande instance. Pour les magistrats du premier grade remplissant les conditions prévues à l’article 39 pour l’accès à un emploi hors hiérarchie, les demandes ne peuvent porter exclusivement sur un emploi placé hors hiérarchie, lesquelles ne peuvent concerner exclusivement des emplois de premier président de cour d’appel ou de procureur général près une cour d’appel. |
||
« Le magistrat concerné qui occupait un emploi du siège de la Cour de cassation, de premier président de cour d’appel ou de président de tribunal de grande instance au moment de son détachement et qui souhaite réintégrer le corps judiciaire sur un tel emploi, adresse sa candidature au Conseil supérieur de la magistrature sept mois au plus tard avant l’expiration du détachement. |
||
« Six mois au plus tard avant l’expiration du détachement ou à défaut de proposition d’affectation du Conseil supérieur de la magistrature dans un délai de deux mois à compter de la candidature prévue au cinquième alinéa du présent article, le garde des sceaux, ministre de la justice, peut inviter le magistrat à présenter trois demandes supplémentaires d’affectation dans trois autres juridictions appartenant à des ressorts de cour d’appel différents. |
||
« À l’expiration du détachement, le magistrat est réintégré immédiatement dans le corps judiciaire et nommé dans l’une des fonctions qui ont fait l’objet de ses demandes dans les conditions prévues aux troisième ou sixième alinéas. |
||
« Si le magistrat n’a pas exprimé de demande dans les conditions prévues aux mêmes troisième ou sixième alinéas ou si aucune des demandes ainsi formulées ne peut être satisfaite, le garde des sceaux, ministre de la justice, lui propose une affectation dans trois juridictions. À défaut d’acceptation dans le délai d’un mois, le magistrat est, à l’expiration du détachement, nommé dans l’une de ces juridictions aux fonctions qui lui ont été proposées. |
||
« Les troisième à septième alinéa du présent article s’appliquent aux magistrats en position de détachement en application de l’article 76-4, sans préjudice de leur droit à recevoir une affectation dans la juridiction dans laquelle ils exerçaient précédemment leurs fonctions prévu au sixième alinéa du même article 76-4. Le magistrat qui souhaite bénéficier de ce droit fait connaître sa décision au garde des sceaux, ministre de la justice, au plus tard sept mois avant l’expiration du détachement. |
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« Le présent article ne s’applique pas aux magistrats détachés dans les emplois de directeur, de chef de service, de directeur adjoint ou de sous-directeur dans les administrations centrales de l’État ou de directeur de l’École nationale de la magistrature. |
||
« Art. 72-2. – Il est tenu compte, lors de la réintégration du magistrat dans le grade qu’il occupe au sein du corps judiciaire, de l’échelon qu’il a atteint dans le corps ou cadre d’emplois de détachement, sous réserve qu’il lui soit plus favorable. Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. |
||
« Art. 72-3. – La réintégration des magistrats précédemment placés en position de congé parental est prononcée conformément aux articles 28, 37 et 38. |
||
« Six mois au plus tard avant l’expiration du congé parental, le magistrat concerné fait connaître au garde des sceaux, ministre de la justice, sa décision de solliciter le renouvellement de cette position ou de réintégrer le corps judiciaire. |
||
« Dans les cas où le renouvellement n’est pas sollicité par le magistrat ou est refusé par le garde des sceaux, ministre de la justice, et au plus tard cinq mois avant l’expiration du congé parental, le magistrat fait connaître au garde des sceaux, ministre de la justice, au moins trois choix d’affectation dans trois juridictions différentes. Pour les magistrats du second grade inscrits au tableau d’avancement, les demandes ne peuvent porter exclusivement sur des emplois du premier grade, lesquelles ne peuvent concerner exclusivement des emplois de président d’une juridiction, de procureur de la République près une juridiction, ou de premier vice-président, premier vice-président adjoint, procureur de la République adjoint ou premier vice-procureur de la République des tribunaux de grande instance. Pour les magistrats du premier grade remplissant les conditions prévues à l’article 39 pour l’accès à un emploi hors hiérarchie, les demandes ne peuvent porter exclusivement sur un emploi placé hors hiérarchie, lesquelles ne peuvent concerner exclusivement des emplois de premier président de cour d’appel ou de procureur général près une cour d’appel. |
||
« Quatre mois au plus tard avant l’expiration du congé parental, le garde des sceaux, ministre de la justice, peut inviter le magistrat à présenter trois demandes supplémentaires d’affectation dans trois autres juridictions appartenant à des ressorts de cour d’appel différents, dans les conditions prévues au troisième alinéa du présent article. |
||
« À l’expiration du congé parental, le magistrat est réintégré immédiatement dans le corps judiciaire et nommé, sans préjudice du sixième alinéa, dans l’une des fonctions qui ont fait l’objet de ses demandes dans les conditions prévues au troisième alinéa et, le cas échéant, au quatrième alinéa. |
||
« Si le magistrat n’a pas exprimé de demande dans les conditions prévues au troisième alinéa et, le cas échéant, au quatrième alinéa, ou si aucune des demandes ainsi formulées ne peut être satisfaite, le garde des sceaux, ministre de la justice, propose au magistrat concerné une affectation dans trois juridictions. À défaut d’acceptation dans le délai d’un mois, le magistrat est, à l’expiration du congé parental, nommé dans l’une de ces juridictions aux fonctions qui lui ont été proposées. |
||
« Les troisième à sixième alinéas s’appliquent aux magistrats qui sollicitent leur réintégration à l’issue d’un congé parental sans préjudice de leur droit à recevoir une affectation dans la juridiction dans laquelle ils exerçaient précédemment leurs fonctions, le cas échéant, en surnombre de l’effectif budgétaire du grade auquel appartient le magistrat et, s’il y a lieu, en surnombre de l’effectif organique de la juridiction. L’intéressé est nommé au premier poste correspondant aux fonctions exercées dont la vacance survient dans la juridiction où il a été nommé en surnombre. » |
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Chapitre IV |
Chapitre IV | |
Dispositions relatives aux droits et obligations des magistrats |
Dispositions relatives aux droits et obligations des magistrats | |
Article 21 |
Article 21 | |
I. – Après l’article 7 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, sont insérés des articles 7-1 à 7-4 ainsi rédigés : |
I. – (Alinéa sans modification) | |
« Art. 7-1. – Les magistrats veillent à prévenir ou à faire cesser immédiatement les situations de conflits d’intérêts. |
« Art. 7-1. – (Sans modification) | |
« Constitue un conflit d’intérêts toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction. |
||
« Art. 7-2. – Dans les deux mois qui suivent l’installation dans leurs fonctions, les magistrats remettent une déclaration |
« Art. 7-2. – I. – Dans les deux mois qui suivent l’installation dans leurs fonctions, les magistrats remettent une déclaration exhaustive, exacte et sincère de leurs intérêts : amendements CL90, CL59 | |
« 1° Au président du tribunal, pour les magistrats du siège d’un tribunal de première instance ; |
« 1° (Sans modification) | |
« 2° Au procureur de la République près ce tribunal, pour les magistrats du parquet d’un tribunal de première instance ; |
« 2° (Sans modification) | |
« 3° Au premier président de la cour, pour les magistrats du siège d’une cour et pour les présidents des tribunaux de première instance du ressort de cette cour ; |
« 3° (Sans modification) | |
« 4° Au procureur général près cette cour, pour les magistrats du parquet d’une cour et pour les procureurs de la République près des tribunaux de première instance du ressort de cette cour ; |
« 4° (Sans modification) | |
« 5° Au premier président de la Cour de cassation, pour les magistrats du siège de la cour, pour les conseillers à la cour en service extraordinaire et pour les premiers présidents des cours ; |
« 5° (Sans modification) | |
« 6° Au procureur général près la Cour de cassation, pour les magistrats du parquet de la cour, pour les avocats généraux à la cour en service extraordinaire et pour les procureurs généraux près des cours. |
« 6° (Sans modification) | |
« 7° (nouveau) Au collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire, pour le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette Cour. | ||
« II (nouveau). – L’autorité à laquelle la déclaration a été remise peut solliciter l’avis du collège de déontologie sur la déclaration lorsqu’il existe un doute sur une éventuelle situation de conflit d’intérêts. | ||
« Le collège de déontologie peut adresser au premier président de la Cour de cassation et au procureur général près cette Cour des observations ayant pour objet de prévenir tout éventuel conflit d’intérêts et les inviter, s’il y a lieu, à mettre fin à une situation de conflit d’intérêts. amendements CL90 et CL59 | ||
« La déclaration d’intérêts |
« III (nouveau). – La déclaration d’intérêts ne comporte aucune mention des opinions ou des activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques du magistrat, sauf lorsque leur révélation résulte de la déclaration de fonctions ou de mandats exercés publiquement. | |
« Elle porte sur les éléments suivants : | ||
« 1° Les activités professionnelles donnant lieu à rémunération ou gratification exercées à la date de l’installation ; | ||
« 2° Les activités professionnelles ayant donné lieu à rémunération ou gratification exercées aux cours des cinq années précédant la date de l’installation ; | ||
« 3° Les activités de consultant exercées à la date de l’installation et au cours des cinq années précédentes ; | ||
« 4° Les participations aux organes dirigeants d’un organisme public ou privé ou d’une société à la date de l’installation ou lors des cinq années précédentes ; | ||
« 5° Les participations financières directes dans le capital d’une société à la date de l’installation ; | ||
« 6° Les activités professionnelles exercées à la date de l’installation par le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin ; | ||
« 7° Les fonctions bénévoles susceptibles de faire naître un conflit d’intérêts ; | ||
« 8° Les fonctions et mandats électifs exercés à la date de l’installation. amendements CL91 et CL60 | ||
« La remise de la déclaration d’intérêts donne lieu à un entretien déontologique du magistrat avec l’autorité à laquelle la déclaration a été remise, ayant pour objet de prévenir tout éventuel conflit d’intérêts. L’entretien peut être renouvelé à tout moment à la demande du magistrat ou de l’autorité. |
« La remise de la déclaration d’intérêts donne lieu à un entretien déontologique du magistrat avec l’autorité à laquelle la déclaration a été remise, ayant pour objet de prévenir tout éventuel conflit d’intérêts et d’inviter, s’il y a lieu, à mettre fin à une situation de conflit d’intérêts. À l’issue de l’entretien, la déclaration peut être modifiée par le magistrat. L’entretien peut être renouvelé à tout moment à la demande du magistrat ou de l’autorité. amendements CL92 et CL93 | |
« Toute modification substantielle des liens et intérêts détenus fait l’objet, dans un délai de deux mois, |
« Toute modification substantielle des liens et intérêts détenus fait l’objet, dans un délai de deux mois, d’une déclaration complémentaire dans les mêmes formes et peut donner lieu à un entretien déontologique. amendement CL94 | |
« La déclaration d’intérêts |
« La déclaration d’intérêts est annexée au dossier du magistrat selon des modalités garantissant sa confidentialité, sous réserve de sa consultation par les personnes autorisées à y accéder. amendement CL95 | |
« Lorsqu’une procédure disciplinaire est engagée, le Conseil supérieur de la magistrature et le garde des sceaux, ministre de la justice, peuvent obtenir communication de la déclaration |
« Lorsqu’une procédure disciplinaire est engagée, le Conseil supérieur de la magistrature et le garde des sceaux, ministre de la justice, peuvent obtenir communication de la déclaration. Cette déclaration d’intérêts peut également être communiquée à l’inspection générale de la justice dans le cadre de l’enquête dont elle peut être saisie par le garde des sceaux, ministre de la justice, en application des articles 50-2 et 63. amendements CL96 et CL97 | |
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Alinéa supprimé | |
« IV (nouveau). – Le fait, pour une personne tenue de remettre une déclaration d’intérêts en application du I du présent article, de ne pas adresser sa déclaration ou d’omettre de déclarer une partie substantielle de ses intérêts est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. | ||
« Peuvent être prononcées, à titre complémentaire, l’interdiction des droits civiques, selon les modalités prévues aux articles 131-26 et 131-26-1 du code pénal, ainsi que l’interdiction d’exercer une fonction publique, selon les modalités prévues à l’article 131-27 du même code. | ||
« Le fait de publier ou de divulguer, de quelque manière que ce soit, tout ou partie des déclarations ou des informations mentionnées au présent article est puni des peines mentionnées à l’article 226-1 du code pénal. amendements CL99 et CL61 | ||
« V (nouveau). – Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article, notamment le modèle, le contenu et les conditions de remise, de mise à jour, de conservation et de consultation de la déclaration d’intérêts. amendement CL98 | ||
« Art. 7-3. – Adressent au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique une déclaration de situation patrimoniale, dans les deux mois qui suivent l’installation dans leurs fonctions et dans les deux mois qui suivent la cessation de leurs fonctions : |
« Art. 7-3. – I. – Adressent au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique une déclaration exhaustive, exacte et sincère de leur situation patrimoniale, dans les deux mois qui suivent l’installation dans leurs fonctions et dans les deux mois qui suivent la cessation de leurs fonctions : amendements CL100 et CL62 | |
« 1° Le premier président et les présidents de chambre de la Cour de cassation ; |
« 1° (Sans modification) | |
« 2° Le procureur général et les premiers avocats généraux près la Cour de cassation ; |
« 2° (Sans modification) | |
« 3° Les premiers présidents des cours d’appel ; |
« 3° (Sans modification) | |
« 4° Les procureurs généraux près les cours d’appel ; |
« 4° (Sans modification) | |
« 5° Les présidents des tribunaux de première instance ; |
« 5° (Sans modification) | |
« 6° Les procureurs de la République près les tribunaux de première instance. |
« 6° (Sans modification) | |
« La déclaration de situation patrimoniale |
« II (nouveau). – La déclaration, de la situation patrimoniale du magistrat concerne la totalité de ses biens propres ainsi que, le cas échéant, ceux de la communauté ou les biens indivis. Ces biens sont évalués à la date du fait générateur de la déclaration comme en matière de droits de mutation à titre gratuit. La déclaration porte sur les éléments suivants : | |
« 1° Les immeubles bâtis et non bâtis ; | ||
« 2° Les valeurs mobilières ; | ||
« 3° Les assurances vie ; | ||
« 4° Les comptes bancaires courants ou d’épargne, les livrets et les autres produits d’épargne ; | ||
« 5° Les biens mobiliers divers d’une valeur supérieure à un montant fixé par voie réglementaire ; | ||
« 6° Les véhicules terrestres à moteur, bateaux et avions ; | ||
« 7° Les fonds de commerce ou clientèles et les charges et offices ; | ||
« 8° Les biens mobiliers, immobiliers et les comptes détenus à l’étranger ; | ||
« 9° Les autres biens ; | ||
« 10° Le passif. | ||
« Le cas échéant, la déclaration de situation patrimoniale précise, pour chaque élément mentionné aux 1° à 10° du présent II, s’il s’agit de biens propres, de biens de la communauté ou de biens indivis. | ||
« La déclaration de situation patrimoniale adressée à l’issue des fonctions comporte, en plus des éléments mentionnés aux mêmes 1° à 10°, une présentation des événements majeurs ayant affecté la composition du patrimoine depuis la précédente déclaration. amendements CL100 et CL62 | ||
« Toute modification substantielle de la situation patrimoniale fait l’objet, dans un délai de deux mois, d’une déclaration complémentaire dans les mêmes formes. |
« III. – Toute modification substantielle de la situation patrimoniale fait l’objet, dans un délai de deux mois, d’une déclaration complémentaire dans les mêmes formes. amendements CL100 et CL62 | |
« Aucune nouvelle déclaration n’est exigée du magistrat qui a établi depuis moins de six mois une déclaration en application du présent article, des articles 4 ou 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 |
« Aucune nouvelle déclaration n’est exigée du magistrat qui a établi depuis moins de six mois une déclaration en application du présent article, des articles 4 ou 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, de l’article L.O. 135-1 du code électoral, des articles L. 131-10 ou L. 231-4-4 du code de justice administrative ou des articles L. 120-12 ou L. 220-9 du code des juridictions financières. amendement CL101 | |
« La déclaration de situation patrimoniale n’est pas versée au dossier du magistrat et ne peut pas être communiquée aux tiers. |
(Alinéa sans modification) | |
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Alinéa supprimé amendement CL102 | |
« IV (nouveau). – La Haute Autorité peut demander au magistrat soumis au I du présent article toute explication nécessaire à l’exercice de sa mission de contrôle des déclarations de situation patrimoniale. En cas de déclaration incomplète ou lorsqu’il n’a pas été donné suite à une demande d’explication adressée par la Haute Autorité, cette dernière adresse à l’intéressé une injonction tendant à ce que la déclaration soit complétée ou que les explications lui soient transmises dans un délai d’un mois à compter de cette injonction. | ||
« V (nouveau). – La Haute Autorité peut demander au magistrat soumis au I du présent article communication des déclarations qu’il a souscrites en application des articles 170 à 175 A du code général des impôts et, le cas échéant, en application de l’article 885 W du même code. | ||
« Elle peut, si elle l’estime utile, demander les déclarations, mentionnées au premier alinéa du présent V, souscrites par le conjoint séparé de biens, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de tout magistrat soumis au I. | ||
« À défaut de communication dans un délai de deux mois des déclarations mentionnées aux deux premiers alinéas du présent V, elle peut demander copie de ces mêmes déclarations à l’administration fiscale, qui les lui transmet dans les trente jours. | ||
« La Haute Autorité peut demander à l’administration fiscale d’exercer le droit de communication prévu à la section 1 du chapitre II du titre II de la première partie du livre des procédures fiscales, en vue de recueillir toutes informations utiles à l’accomplissement de sa mission de contrôle. Ces informations sont transmises à la Haute Autorité dans les soixante jours suivant sa demande. | ||
« Elle peut, aux mêmes fins, demander à l’administration fiscale de mettre en œuvre les procédures d’assistance administrative internationale. | ||
« Les agents de l’administration fiscale sont déliés du secret professionnel à l’égard des membres et des rapporteurs de la Haute Autorité au titre des vérifications et contrôles qu’ils mettent en œuvre pour l’application du présent article. | ||
« VI (nouveau). – La Haute Autorité apprécie, dans un délai de six mois à compter de la réception de la déclaration, la variation de la situation patrimoniale du magistrat telle qu’elle résulte de ses déclarations, des éventuelles observations et explications qu’il a pu formuler ou des autres éléments dont elle dispose. | ||
« Lorsque les évolutions de la situation patrimoniale n’appellent pas d’observations ou lorsqu’elles sont justifiées, la Haute Autorité en informe le magistrat. | ||
« Lorsqu’elle constate une évolution de la situation patrimoniale pour laquelle elle ne dispose pas d’explications suffisantes, après que le magistrat a été mis en mesure de produire ses observations, la Haute Autorité transmet le dossier au parquet. | ||
« Lorsqu’elle constate un manquement à l’obligation de déclaration de situation patrimoniale ou un défaut de réponse à une injonction prévue au IV du présent article, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique saisit le garde des sceaux, ministre de la justice. | ||
« VII (nouveau). – Le fait, pour une personne mentionnée au I du présent article, de ne pas déposer la déclaration de situation patrimoniale, d’omettre de déclarer une partie substantielle de son patrimoine ou de fournir une évaluation mensongère de son patrimoine est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. | ||
« Peuvent être prononcées, à titre complémentaire, l’interdiction des droits civiques, selon les modalités prévues aux articles 131-26 et 131-26-1 du code pénal, ainsi que l’interdiction d’exercer une fonction publique, selon les modalités prévues à l’article 131-27 du même code. | ||
« Le fait pour une personne mentionnée au I du présent article, de ne pas déférer aux injonctions de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ou de ne pas lui communiquer les informations et pièces utiles à l’exercice de sa mission est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende. | ||
« Le fait de publier ou de divulguer, de quelque manière que ce soit, tout ou partie des déclarations ou des informations mentionnées au présent article est puni des peines mentionnées à l’article 226-1 du code pénal. amendements CL103 et CL63 | ||
« VIII (nouveau). – Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, précise les conditions d’application du présent article, notamment le modèle, le contenu et les conditions de mise à jour et de conservation des déclarations de situation patrimoniale. amendement CL102 | ||
« Art. 7-4. – (Supprimé) ». |
« Art. 7-4. – (Sans modification) | |
Ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature |
II (nouveau). – Le premier alinéa de l’article 9-1 de la même ordonnance est ainsi modifié : |
II. – (Sans modification) |
Art. 9-1. – Les magistrats et anciens magistrats ne peuvent exercer la profession d’avocat, d’avoué, de notaire, d’huissier de justice, de greffier de tribunal de commerce, d’administrateur judiciaire ou de mandataire-liquidateur ou travailler au service d’un membre de ces professions dans le ressort d’une juridiction où ils ont exercé leurs fonctions depuis moins de cinq ans. |
1° Les mots : « d’avoué, » sont supprimés ; |
|
2° Après les mots : « huissier de justice, », sont insérés les mots : « de commissaire-priseur judiciaire, » ; |
||
3° Le mot : « mandataire-liquidateur » est remplacé par les mots : « mandataire judiciaire ». |
||
Les dispositions de l’alinéa précédent ne s’appliquent pas aux magistrats de la Cour de cassation. |
||
Article 22 |
Article 22 | |
Après l’article 10 de la même ordonnance, il est inséré un article 10-1 ainsi rédigé : |
(Alinéa sans modification) | |
« Art. 10-1. – I. – Le droit syndical est garanti aux magistrats qui peuvent librement créer des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats. |
« Art. 10-1. – I. – (Sans modification) | |
« II. – Pour l’exercice de ce droit, les magistrats sont soumis aux dispositions législatives et réglementaires de droit commun applicables aux fonctionnaires, sous réserve du présent II. |
« II. – (Alinéa sans modification) | |
« Sont considérées comme représentatives, au sens de l’article 27-1, les organisations syndicales de magistrats ayant obtenu au moins un siège à la commission d’avancement prévue à l’article 34 parmi les sièges attribués aux magistrats des cours et tribunaux ou ayant obtenu |
« Sont considérées comme représentatives, au sens de l’article 27-1, les organisations syndicales de magistrats ayant obtenu au moins un siège à la commission d’avancement prévue à l’article 34 parmi les sièges attribués aux magistrats des cours et tribunaux ou ayant obtenu un taux minimal, fixé par le décret en Conseil d’État mentionné au III du présent article, de suffrages exprimés lors de l’élection du collège mentionné à l’article 13-1. amendements CL104 et CL105 | |
« Les représentants syndicaux, titulaires et suppléants appelés à siéger à la commission d’avancement ainsi qu’à la commission permanente d’études, se voient accorder une autorisation d’absence sur simple présentation de leur convocation. Ils bénéficient des mêmes droits lorsqu’ils prennent part, en cette qualité, à des réunions de travail convoquées par l’administration. |
(Alinéa sans modification) | |
« Sous réserve des nécessités de service, des décharges d’activités peuvent être accordées aux représentants des organisations syndicales représentatives de magistrats. |
(Alinéa sans modification) | |
« Un crédit de temps syndical, utilisable sous forme de décharges de service ou de crédits d’heures selon les besoins de l’activité syndicale, est attribué aux organisations syndicales de magistrats et déterminé à l’issue du renouvellement de la commission d’avancement. |
(Alinéa sans modification) | |
« Les organisations syndicales de magistrats désignent librement parmi leurs représentants les bénéficiaires de crédits de temps syndical. |
(Alinéa sans modification) | |
« |
« Lorsque la désignation d’un magistrat se révèle incompatible avec la bonne administration de la justice, le garde des sceaux, ministre de la justice, motive son refus et invite l’organisation syndicale à porter son choix sur un autre magistrat. Le Conseil supérieur de la magistrature doit être informé de cette décision. amendements CL106 et CL107 | |
« III. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article et notamment les conditions et les limites dans lesquelles les décharges |
« III. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article, notamment les conditions et les limites dans lesquelles les décharges de service peuvent intervenir. » amendement CL108 | |
Article 22 bis (nouveau) | ||
Après l’article 10 de la même ordonnance, il est inséré un article 10-2 ainsi rédigé : | ||
« Art. 10-2. – I. – Le collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire est chargé : | ||
« 1° De rendre des avis sur toute question déontologique concernant personnellement un magistrat, sur saisine de celui-ci ou de l’un de ses chefs hiérarchiques ; | ||
« 2° De formuler des recommandations de nature à éclairer les magistrats sur l’application des principes déontologiques, au regard notamment du recueil des obligations déontologiques des magistrats mentionnés à la seconde phrase de l’article 20-2 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature ; | ||
« 3° D’examiner les déclarations d’intérêts qui lui sont transmises en application de l’article 7-2 de la présente loi organique. | ||
« II. – Le collège de déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire est composé : | ||
« 1° D’un magistrat du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation, en fonctions ou honoraire, élu par l’assemblée des magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour. Le premier président de la Cour ne peut ni participer au vote ni être élu ; | ||
« 2° D’un magistrat du parquet hors hiérarchie de la Cour de cassation, en fonctions ou honoraire, élu par l’assemblée des magistrats du parquet hors hiérarchie de la Cour. Le procureur général près la Cour ne peut ni participer au vote ni être élu ; | ||
« 3° Alternativement, d’un premier président de cour d’appel, en fonctions ou honoraire, élu par l’assemblée des premiers présidents de cour d’appel et d’un procureur général près une cour d’appel, en fonctions ou honoraire, élu par l’assemblée des procureurs généraux près les cours d’appel ; | ||
« 4° D’une personnalité extérieure désignée, alternativement, par le vice-président du Conseil d’État parmi les membres du Conseil d’État en fonctions ou honoraires et par le premier président de la Cour des comptes parmi les magistrats en fonctions à la Cour des comptes ou honoraires ; | ||
« 5° D’un universitaire nommé par le Président de la République sur proposition, alternativement, du premier président de la Cour de cassation et du procureur général près ladite Cour. | ||
« Le président du collège de déontologie est élu en son sein par ses membres. | ||
« III. – La durée du mandat des membres du collège de déontologie est de trois ans, renouvelable une fois. | ||
« IV. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. » amendement CL109 | ||
Article 23 |
Article 23 | |
Art. 11. – Indépendamment des règles fixées par le Code pénal et les lois spéciales, les magistrats sont protégés contre les menaces, attaques de quelque nature que ce soit, dont ils peuvent être l’objet dans l’exercice ou à l’occasion de leurs fonctions. L’État doit réparer le préjudice direct qui en résulte, dans tous les cas non prévus par la législation des pensions. |
L’article 11 de la même ordonnance est complété par un alinéa ainsi rédigé : |
(Sans modification) |
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions et les limites de la prise en charge par l’État, au titre de la protection, des frais exposés par le magistrat dans le cadre d’instances civiles ou pénales, ou devant la commission d’admission des requêtes jusqu’au renvoi devant la formation disciplinaire compétente du Conseil supérieur de la magistrature. » |
||
Article 24 |
Article 24 | |
Art. 12-2. – Le dossier du magistrat doit comporter toutes les pièces intéressant sa situation administrative, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité. Il ne peut y être fait état ni de ses opinions ou activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques, ni d’éléments relevant strictement de sa vie privée. |
L’article 12-2 de la même ordonnance est complété par deux alinéas ainsi rédigés : |
(Alinéa sans modification) |
Tout magistrat a accès à son dossier individuel dans les conditions définies par la loi. |
||
« Lorsque le magistrat a fait l’objet de poursuites disciplinaires s’étant conclues par une décision de non-lieu à sanction, il peut demander le retrait des pièces relatives à ces poursuites de son dossier |
« Lorsque le magistrat a fait l’objet de poursuites disciplinaires s’étant conclues par une décision de non-lieu à sanction, il peut demander le retrait des pièces relatives à ces poursuites de son dossier. Ce retrait est de droit. amendements CL110 et CL111 | |
« Dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, le dossier du magistrat peut être géré sur support électronique. » |
(Alinéa sans modification) | |
Article 25 |
Article 25 | |
La même ordonnance est ainsi modifiée : |
(Alinéa sans modification) | |
|
1° L’article 44 est ainsi modifié : | |
Art. 44. – En dehors de toute action disciplinaire, l’inspecteur général des services judiciaires, les premiers présidents, les procureurs généraux et les directeurs ou chefs de service à l’administration centrale ont le pouvoir de donner un avertissement aux magistrats placés sous leur autorité. |
a) (nouveau) Au premier alinéa, les mots : « des services judiciaires » sont remplacés par les mots : « , chef de l’inspection générale de la justice » ; | |
b) Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés : amendement CL46 | ||
« Le magistrat à l’encontre duquel il est envisagé de délivrer un avertissement est convoqué à un entretien préalable. Dès sa convocation à cet entretien, le magistrat a droit à la communication de son dossier et des pièces justifiant la mise en œuvre de cette procédure. Il est informé de son droit de se faire assister de la personne de son choix. |
(Alinéa sans modification) | |
« Aucun avertissement ne peut être délivré au-delà d’un délai de deux ans à compter du jour où l’inspecteur général des services judiciaires, le chef de cour, le directeur ou le chef de service de l’administration centrale a eu connaissance des faits susceptibles de justifier une telle mesure. » ; |
« Aucun avertissement ne peut être délivré au delà d’un délai de deux ans à compter du jour où l’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, le chef de cour, le directeur ou le chef de service de l’administration centrale a eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits susceptibles de justifier une telle mesure. En cas de poursuites pénales exercées à l’encontre du magistrat, ce délai est interrompu jusqu’à la décision définitive de classement sans suite, de non-lieu, d’acquittement, de relaxe ou de condamnation. Passé ce délai et hormis le cas où une procédure disciplinaire a été engagée à l’encontre du magistrat avant l’expiration de ce délai, les faits en cause ne peuvent plus être invoqués dans le cadre d’une procédure d’avertissement. » ; amendement CL112 | |
L’avertissement est effacé automatiquement du dossier au bout de trois ans si aucun nouvel avertissement ou aucune sanction disciplinaire n’est intervenu pendant cette période. |
||
2° L’article 47 est ainsi rétabli : |
2° (Alinéa sans modification) | |
« Art. 47. – Le garde des sceaux, ministre de la justice, dans les cas mentionnés à l’article 50-1 ou au premier alinéa de l’article 63, et les chefs de cour, dans les cas mentionnés à l’article 50-2 ou au deuxième alinéa de l’article 63, ne peuvent saisir le Conseil supérieur de la magistrature de faits motivant des poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de trois ans à compter du jour où ils ont eu connaissance de ces faits. » |
« Art. 47. – Le garde des sceaux, ministre de la justice, dans les cas mentionnés à l’article 50-1 ou au premier alinéa de l’article 63, et les chefs de cour, dans les cas mentionnés à l’article 50-2 ou au deuxième alinéa de l’article 63, ne peuvent saisir le Conseil supérieur de la magistrature de faits motivant des poursuites disciplinaires au delà d’un délai de trois ans à compter du jour où ils ont eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l’ampleur de ces faits. En cas de poursuites pénales exercées à l’encontre du magistrat, ce délai est interrompu jusqu’à la décision définitive de classement sans suite, de non-lieu, d’acquittement, de relaxe ou de condamnation. Passé ce délai et hormis le cas où une autre procédure disciplinaire a été engagée à l’encontre du magistrat avant l’expiration de ce délai, les faits en cause ne peuvent plus être invoqués dans le cadre d’une procédure disciplinaire. » amendement CL113 | |
Article 25 bis (nouveau) |
Article 25 bis | |
Art. 43. – Tout manquement par un magistrat aux devoirs de son état, à l’honneur, à la délicatesse ou à la dignité, constitue une faute disciplinaire. |
|
Le même chapitre VIII est ainsi modifié : |
Constitue un des manquements aux devoirs de son état la violation grave et délibérée par un magistrat d’une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, constatée par une décision de justice devenue définitive. |
||
La faute s’apprécie pour un membre du parquet ou un magistrat du cadre de l’administration centrale du ministère de la justice compte tenu des obligations qui découlent de sa subordination hiérarchique. |
1° Au dernier alinéa de l’article 43, après |
1° Au dernier alinéa de l’article 43, après le mot : « justice », sont insérés les mots : « ainsi que pour un magistrat exerçant les fonctions d’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, d’inspecteur général de la justice ou d’inspecteur de la justice » ; amendement CL47 |
2° L’article 48 est ainsi modifié : |
2° (Alinéa sans modification) | |
Art. 48. – Le pouvoir disciplinaire est exercé, à l’égard des magistrats du siège par le Conseil supérieur de la magistrature et à l’égard des magistrats du parquet ou du cadre de l’administration centrale du ministère de la justice par le garde des sceaux, ministre de la justice. |
a) Au premier alinéa, après les mots : « ministère de la justice », sont insérés les mots : « ainsi que des magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général |
a) Au premier alinéa, après les mots : « ministère de la justice », sont insérés les mots : « ainsi que des magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, d’inspecteur général de la justice et d’inspecteur de la justice » ; amendement CL47 |
b) Le second alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés : | ||
Il est exercé à l’égard des magistrats en position de détachement ou de disponibilité ou ayant définitivement cessé leurs fonctions par la formation du Conseil supérieur compétente pour les magistrats du siège ou par le garde des sceaux, selon que ces magistrats ont exercé leurs dernières fonctions dans le corps judiciaire au siège ou au parquet et à l’administration centrale du ministère de la justice. |
b) Le second alinéa est |
« À l’égard des magistrats en position de détachement ou de disponibilité ou ayant définitivement cessé leurs fonctions, le pouvoir disciplinaire est exercé : amendement CL114 |
« 1° Par la formation du Conseil supérieur compétente pour les magistrats du siège, lorsque ces magistrats ont exercé leurs dernières fonctions dans le corps judiciaire au siège ; | ||
« 2° Par le garde des sceaux, ministre de la justice, lorsque ces magistrats ont exercé leurs dernières fonctions dans le corps judiciaire au parquet, à l’administration centrale du ministère de la justice ou en qualité d’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, d’inspecteur général de la justice ou d’inspecteur de la justice. » ; amendement CL114 | ||
Art. 59. – Aucune sanction contre un magistrat du parquet ne peut être prononcée sans l’avis de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature. |
||
Les dispositions de la présente section sont applicables aux magistrats du cadre de l’administration centrale du ministère de la justice. |
3° Le second alinéa de l’article 59 est complété par les mots : « ainsi qu’aux magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général |
3° Le second alinéa de l’article 59 est complété par les mots : « ainsi qu’aux magistrats exerçant les fonctions d’inspecteur général, chef de l’inspection générale de la justice, d’inspecteur général de la justice et d’inspecteur de la justice ». amendement CL47 |
Article 25 ter (nouveau) | ||
Art. 50-2. – Le Conseil supérieur de la magistrature est également saisi par la dénonciation des faits motivant les poursuites disciplinaires que lui adressent les premiers présidents de cour d'appel ou les présidents de tribunal supérieur d'appel. |
||
Copie des pièces est adressée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui peut demander une enquête à l'inspection générale des services judiciaires. |
À la fin du second alinéa de l’article 50-2 de la même ordonnance, les mots : « des services judiciaires » sont remplacés par les mots : « de la justice ». amendement CL31 | |
Article 26 |
Article 26 | |
|
Le chapitre VIII de la même ordonnance est ainsi modifié : | |
1° Après l’article 50-3, sont insérés des articles 50-4 et 50-5 ainsi rédigés : |
1° (Sans modification) | |
« Art. 50-4. – Le Conseil supérieur de la magistrature se prononce dans le délai de douze mois à compter du jour où il a été saisi en application des articles 50-1 à 50-3, sauf prorogation pour une durée de six mois renouvelable par décision motivée. |
||
« Art. 50-5. – Le Conseil supérieur de la magistrature se prononce sur la situation du magistrat ayant fait l’objet d’une interdiction temporaire d’exercice en application des articles 50 ou 51 dans le délai de huit mois à compter du jour où il a été saisi en application des articles 50-1 à 50-3. Il peut, par décision motivée, proroger ce délai pour une durée de quatre mois. Si, à l’expiration de ce délai, aucune décision n’a été prise, l’intéressé est rétabli dans ses fonctions. Si l’intéressé fait l’objet de poursuites pénales, le conseil peut décider de maintenir l’interdiction temporaire d’exercice jusqu’à la décision définitive sur les poursuites disciplinaires. » ; |
||
Art. 63. – Le Conseil supérieur de la magistrature est saisi par la dénonciation des faits motivant les poursuites disciplinaires que lui adresse le garde des sceaux, ministre de la justice. |
2° L’article 63 est ainsi modifié : amendement CL48 | |
Le Conseil supérieur de la magistrature est également saisi par la dénonciation des faits motivant les poursuites disciplinaires que lui adressent les procureurs généraux près les cours d’appel ou les procureurs de la République près les tribunaux supérieurs d’appel. |
||
Copie des pièces est adressée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui peut demander une enquête à l’inspection générale des services judiciaires. |
a) (nouveau) À la fin du troisième alinéa, les mots : « des services judiciaires » sont remplacés par les mots : « de la justice » ; amendement CL48 | |
Tout justiciable qui estime qu’à l’occasion d’une procédure judiciaire le concernant le comportement adopté par un magistrat du parquet dans l’exercice de ses fonctions est susceptible de recevoir une qualification disciplinaire peut saisir le Conseil supérieur de la magistrature. |
||
La plainte est examinée par une commission d’admission des requêtes composée de membres de la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet, dans les conditions prévues par l’article 18 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 précitée. |
||
À peine d’irrecevabilité, la plainte : |
||
– ne peut être dirigée contre un magistrat lorsque le parquet ou le parquet général auquel il appartient demeure chargé de la procédure ; |
||
– ne peut être présentée après l’expiration d’un délai d’un an suivant une décision irrévocable mettant fin à la procédure ; |
||
– doit contenir l’indication détaillée des faits et griefs allégués ; |
||
– doit être signée par le justiciable et indiquer son identité, son adresse ainsi que les éléments permettant d’identifier la procédure en cause. |
||
Le président de la commission d’admission des requêtes peut rejeter les plaintes manifestement infondées ou manifestement irrecevables. Lorsque la commission d’admission des requêtes du Conseil supérieur déclare la plainte recevable, elle en informe le magistrat mis en cause. |
||
La commission d’admission des requêtes sollicite du procureur général près la cour d’appel ou du procureur de la République près le tribunal supérieur d’appel dont dépend le magistrat mis en cause ses observations et tous éléments d’information utiles. Le procureur général près la cour d’appel ou le procureur de la République près le tribunal supérieur d’appel invite le magistrat à lui adresser ses observations. Dans le délai de deux mois de la demande qui lui en est faite par la commission d’admission des requêtes du Conseil supérieur, le procureur général près la cour d’appel ou le procureur de la République près le tribunal supérieur d’appel adresse l’ensemble de ces informations et observations au Conseil supérieur de la magistrature, ainsi qu’au garde des sceaux, ministre de la justice. |
||
La commission d’admission des requêtes peut entendre le magistrat mis en cause et, le cas échéant, le justiciable qui a introduit la demande. |
||
Lorsqu’elle estime que les faits sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire, la commission d’admission des requêtes du Conseil supérieur renvoie l’examen de la plainte à la formation du Conseil supérieur compétente pour la discipline des magistrats du parquet. |
||
En cas de rejet de la plainte, les autorités mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article conservent la faculté de saisir le Conseil supérieur de la magistrature des faits dénoncés. |
||
Le magistrat visé par la plainte, le justiciable, le chef de cour visé au douzième alinéa et le garde des sceaux, ministre de la justice, sont avisés du rejet de la plainte ou de l’engagement de la procédure disciplinaire. |
||
La décision de rejet n’est susceptible d’aucun recours. |
||
Dès la saisine du Conseil supérieur de la magistrature, le magistrat a droit à la communication de son dossier et des pièces de l’enquête préliminaire, s’il y a été procédé. |
|
b) Les deux derniers alinéas sont supprimés ; amendement CL48 |
Le président de la formation de discipline désigne, en qualité de rapporteur, un membre de cette formation. Il le charge, s’il y a lieu, de procéder à une enquête. Lorsque le Conseil supérieur de la magistrature a été saisi par un justiciable, la désignation du rapporteur n’intervient qu’après l’examen de la plainte par la commission d’admission des requêtes du Conseil supérieur visée aux alinéas précédents. Les dispositions de l’article 52 sont applicables. |
||
3° Après l’article 63, sont insérés des articles 63-1 à 63-3 ainsi rédigés : |
3° (Sans modification) | |
« Art. 63-1. – Le Conseil supérieur de la magistrature se prononce dans le délai de douze mois à compter du jour où il a été saisi en application de l’article 63, sauf prorogation pour une durée de six mois renouvelable par décision motivée. |
||
« Art. 63-2. – Si, à l’expiration d’un délai de huit mois à compter du jour où le Conseil supérieur de la magistrature a été saisi dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas de l’article 63 pour rendre son avis sur la situation du magistrat ayant fait l’objet d’une interdiction temporaire d’exercice, aucune décision n’a été prise par le garde des sceaux, ministre de la justice, l’intéressé est rétabli dans ses fonctions, sauf prorogation pour une durée de quatre mois après avis motivé du conseil. |
||
« Si l’intéressé fait l’objet de poursuites pénales, le garde des sceaux, ministre de la justice, peut, après avis du conseil, maintenir l’interdiction temporaire d’exercice jusqu’à la décision définitive sur les poursuites disciplinaires. |
||
« Art. 63-3. – Dès la saisine du Conseil supérieur de la magistrature, le magistrat a droit à la communication de son dossier et des pièces de l’enquête préliminaire, s’il y a été procédé. |
||
« Le président de la formation de discipline désigne, en qualité de rapporteur, un membre de cette formation. Il le charge, s’il y a lieu, de procéder à une enquête. Lorsque le Conseil supérieur de la magistrature a été saisi par un justiciable, la désignation du rapporteur n’intervient qu’après l’examen de la plainte par la commission d’admission des requêtes du Conseil supérieur de la magistrature mentionnée à l’article 63. L’article 52 est applicable. » |
||
Chapitre V |
Chapitre V | |
Dispositions relatives aux autres modalités de recrutement |
Dispositions relatives aux autres modalités de recrutement | |
Article 27 |
Article 27 | |
L’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifiée : |
(Alinéa sans modification) | |
Chapitre V bis |
1° Le chapitre V bis est ainsi modifié : |
1° (Alinéa sans modification) |
Des conseillers et des avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire |
a) L’intitulé est ainsi rédigé : « De l’intégration provisoire dans le corps judiciaire » ; |
a) (Sans modification) |
b) Au début, est ajoutée une section 1 intitulée : « De l’intégration provisoire à temps plein », comprenant une sous-section 1 intitulée : « Des conseillers et des avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire » et comprenant les articles 40-1 à 40-7 et une sous-section 2 intitulée : « Du détachement judiciaire » et comprenant les articles 41 à 41-9 ; |
b) (Sans modification) | |
c) Est |
c) Est insérée une section 2 intitulée : « De l’intégration provisoire à temps partiel », comprenant une sous-section 1 intitulée : « Des magistrats exerçant à titre temporaire », qui comprend les articles 41-10 à 41-16, et une sous-section 2 intitulée : « Des magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles », qui comprend les articles 41-25 à 41-31, tels qu’ils résultent de l’article 31 de la présente loi organique ; amendement CL77 | |
Chapitre V ter |
2° La division et les intitulés de chapitres V ter |
2° La division et l’intitulé des chapitres V ter et V quater sont supprimés. amendement CL77 |
Du détachement judiciaire |
||
Chapitre V quater |
||
Des magistrats exerçant à titre temporaire |
||
Chapitre V quinquies |
||
Des juges de proximité |
||
Article 27 bis (nouveau) | ||
Le chapitre V bis de la même ordonnance est ainsi modifié : | ||
Art. 40-1. – Peuvent être nommées conseillers ou avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire, si elles remplissent les conditions prévues à l'article 16 ci-dessus et si elles justifient de vingt-cinq années au moins d'activité professionnelle, les personnes que leur compétence et leur activité qualifient particulièrement pour l'exercice de fonctions judiciaires à la Cour de cassation. |
1° Au premier alinéa de l’article 40-1, les mots : « vingt-cinq » sont remplacés par le mot : « vingt » ; amendement CL32 | |
Les conseillers en service extraordinaire exercent les attributions des conseillers à la Cour de cassation. |
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Les avocats généraux en service extraordinaire exercent les attributions confiées au ministère public près la Cour de cassation. |
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Le nombre des conseillers et des avocats généraux en service extraordinaire ne peut respectivement excéder le dixième de l'effectif des magistrats hors hiérarchie du siège de la Cour de cassation et le dixième de l'effectif des magistrats hors hiérarchie du parquet de ladite cour. |
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Art. 40-2. – Les conseillers et les avocats généraux en service extraordinaire sont nommés pour une durée de huit ans non renouvelable, dans les formes respectivement prévues pour la nomination des magistrats du siège de la Cour de cassation et pour la nomination des magistrats du parquet de ladite cour. |
2° Au premier alinéa de l’article 40-2, le mot : « huit » est remplacé par le mot : « dix » ; amendement CL32 | |
Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions de recueil et d'instruction des dossiers de candidature à l'exercice de fonctions judiciaires en service extraordinaire. |
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Il ne peut être mis fin aux fonctions des conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation qu'à leur demande ou au cas où aurait été prononcée à leur encontre l'une des sanctions prévues aux 6° et 7° de l'article 45 et à l'article 40-3. Lorsqu'il est ainsi mis fin aux fonctions des conseillers ou des avocats généraux en service extraordinaire ayant la qualité de fonctionnaires, les dispositions de l'article 40-5 reçoivent, s'il y a lieu, application. |
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Art. 40-4. – Les conseillers et les avocats généraux en service extraordinaire sont soumis au statut de la magistrature. |
3° L’article 40-4 est complété par deux alinéas ainsi rédigés : | |
Toutefois, ils ne peuvent ni être membre du Conseil supérieur de la magistrature ou de la commission d'avancement ni participer à la désignation des membres de ces instances. |
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Ils ne peuvent recevoir aucun avancement de grade ni bénéficier d'aucune mutation dans le corps judiciaire. |
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Durant un an à compter de la cessation de leurs fonctions, ils sont tenus de s'abstenir de toute prise de position publique en relation avec les fonctions qu'ils ont exercées à la Cour de cassation. |
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« Les conseillers et les avocats généraux en service extraordinaire ayant exercé leur fonction durant dix années sont admis, à l’expiration de leur mandat, à se prévaloir de l’honorariat de ces fonctions. Toutefois, l’honorariat peut être refusé au moment de la cessation des fonctions par une décision motivée de l’autorité qui prononce la cessation des fonctions, après avis de la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard du magistrat selon qu’il exerce ses fonctions au siège ou au parquet. | ||
« Si, lors de la cessation des fonctions, le conseiller ou l’avocat général en service extraordinaire fait l’objet de poursuites disciplinaires, il ne peut se prévaloir de l’honorariat avant le terme de la procédure disciplinaire et l’honorariat peut lui être refusé dans les conditions prévues à l’avant-dernier alinéa, au plus tard deux mois après la fin de cette procédure. » amendement CL32 | ||
Article 28 |
Article 28 | |
Art. 41. – Les membres des corps recrutés par la voie de l’Ecole nationale d’administration et les professeurs et les maîtres de conférences des universités peuvent, dans les conditions prévues aux articles suivants, faire l’objet d’un détachement judiciaire pour exercer les fonctions des premier et second grades. |
(Sans modification) | |
Le présent article s’applique, dans les conditions prévues par leur statut, aux fonctionnaires de l’État, territoriaux et hospitaliers et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires appartenant à des corps et cadres d’emplois de même niveau de recrutement. |
Au second alinéa de l’article 41 de la même ordonnance, après les mots : « et hospitaliers », sont insérés les mots : « , aux militaires ». |
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Article 28 bis (nouveau) | ||
L’article 41-1 de la même ordonnance est ainsi rédigé : | ||
Art. 41-1. – Peuvent faire l'objet d'un détachement judiciaire pour exercer les fonctions du second grade les personnes visées à l'article 41 justifiant d'au moins quatre ans de service en l'une ou plusieurs des qualités mentionnées à l'article 41. |
« Art. 41-1. – Le détachement judiciaire est prononcé à équivalence de grade et à l’échelon comportant un indice égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui que l’intéressé détenait dans son corps d’origine. » amendement CL32 | |
Peuvent faire l'objet d'un détachement judiciaire pour exercer les fonctions du premier grade les personnes visées à l'article 41 justifiant d'au moins sept ans de service en l'une ou plusieurs de ces mêmes qualités. |
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Article 29 |
Article 29 | |
I. – L’article 41-10 de la même ordonnance est ainsi modifié : | ||
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé : | ||
Art. 41-10. – Peuvent être nommées, pour exercer des fonctions de juge d’instance ou d’assesseur dans les formations collégiales des tribunaux de grande instance, les personnes âgées de moins de soixante-cinq ans révolus que leur compétence et leur expérience qualifient particulièrement pour exercer ces fonctions. |
« Art. 41-10. – Peuvent être nommées magistrats exerçant à titre temporaire, pour exercer des fonctions de juge d’instance ou d’assesseur dans les formations collégiales des tribunaux de grande instance, les personnes âgées d’au moins trente-cinq ans que leur compétence et leur expérience qualifient particulièrement pour exercer ces fonctions. » ; amendement CL76 | |
Elles doivent soit remplir les conditions prévues au 1°, 2° ou 3° de l’article 22, soit être membre ou ancien membre des professions libérales juridiques et judiciaires soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et justifier de sept années au moins d’exercice professionnel. |
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2° Au second alinéa, le mot : « sept » est remplacé par le mot : « cinq » ; |
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé : | ||
« Les magistrats exerçant à titre temporaire ne peuvent demeurer en fonctions au-delà de l’âge de soixante-quinze ans. » | ||
I bis (nouveau). – L’article 41-11 de la même ordonnance est ainsi modifié : | ||
Art. 41-11. – Lorsqu'ils sont affectés dans un tribunal d'instance, les magistrats recrutés dans le cadre du présent chapitre sont répartis dans les différents services de la juridiction selon les modalités fixées par l'ordonnance annuelle prévue par le code de l'organisation judiciaire et traitent des contentieux civil et pénal à l'exclusion de la départition prud'homale. Ils ne peuvent assurer plus du quart des services du tribunal dans lequel ils sont affectés. |
1° À la première phrase du premier alinéa et à la fin de la seconde phrase du second alinéa, la référence : « du présent chapitre » est remplacée par la référence : « de la présente sous-section » ; amendement CL76 | |
Lorsqu'ils sont affectés en qualité d'assesseurs dans une formation collégiale du tribunal de grande instance, ces magistrats sont répartis dans les différentes formations de la juridiction selon les modalités fixées par l'ordonnance annuelle prévue par le code de l'organisation judiciaire et traitent des contentieux civil et pénal. Il ne peut y avoir dans ces formations plus d'un assesseur choisi parmi les magistrats recrutés dans le cadre du présent chapitre. |
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2° À la première phrase des premiers et second alinéas, le mot : « et » est remplacé par le mot : « . Ils » ; | ||
3° À la seconde phrase du premier alinéa, la mot : « quart » est remplacé par le mot : « tiers ». | ||
Art. 41-12. – La commission prévue à l’article 34 arrête la liste des candidats admis. |
II. – |
II. – L’article 41-12 de la même ordonnance est ainsi rédigé : |
« Art. 41-12. – Les magistrats recrutés au titre de l’article 41-10 sont nommés pour une durée de cinq ans, renouvelable une fois, dans les formes prévues pour les magistrats du siège. Six mois au moins avant l’expiration de leur premier mandat, ils peuvent en demander le renouvellement. Le renouvellement est accordé de droit sur avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature. Il est de droit dans la même juridiction. amendement CL76 | ||