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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 janvier 2017.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES
SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE (n° 4375)
DE MMES Danielle AUROI, Delphine BATHO et M. Jean-Paul CHANTEGUET
pour une réforme radicale de l’élaboration et du contrôle des normes régissant l’industrie automobile européenne,
PAR Mme Delphine BATHO,
Députée
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Voir le numéro : 4375
(La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; M. Christophe CARESCHE, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; Mme Sandrine DOUCET, MM. Arnaud LEROY, André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Kader ARIF, Alain BALLAY, Mme Delphine BATHO, MM. Jean-Luc BLEUNVEN, Jean-Jacques BRIDEY, Mme Isabelle BRUNEAU, M. Jean-Yves CAULLET, Mmes Nathalie CHABANNE, Catherine COUTELLE, M. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, MM. Bernard DEFLESSELLES, Marc DOLEZ, William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Jean-Patrick GILLE, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Laurent KALINOWSKI, Marc LAFFINEUR, Charles de LA VERPILLIÈRE, Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Rémi PAUVROS, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY)
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Pages
INTRODUCTION 5
I. LE SYSTÈME EUROPÉEN DE RÉGULATION DE L’INDUSTRIE AUTOMOBILE A FAIT LA PREUVE DE SA DÉFAILLANCE 11
1. L’éclatement des compétences et des responsabilités 11
a. La Commission, les États membres et le Parlement européen se partagent la compétence de définir les normes et les procédures, essais et exigences spécifiques qui s’y réfèrent. 11
b. L’homologation est une compétence exercée au niveau des États membres et les moyens de contrôle de la Commission européenne sont inexistants. 13
2. Un cadre dépassé et défaillant 14
a. Un système normatif complexe et incomplet, la norme Euro 6 14
b. Des normes de plus en plus sévères dans les textes et de moins en moins respectées dans la réalité 16
c. Des régulateurs complaisants, voire complices 17
II. DES PROJETS DE RÉFORME INSUFFISANTS 23
1. La réforme en cours au niveau européen 23
a. Les nouveaux protocoles de test. 23
b. Le projet de réforme présenté par la Commission européenne après le « Dieselgate » 26
2. L’objet de la proposition de résolution : l’appel à une réforme d’ampleur du cadre règlementaire européen applicable à l’industrie automobile 29
TRAVAUX DE LA COMMISSION 33
AUDITION DE MME DELPHINE BATHO, RAPPORTEURE DE LA MISSION D’INFORMATION SUR L’OFFRE AUTOMOBILE FRANÇAISE DANS UNE APPROCHE INDUSTRIELLE, ÉNERGÉTIQUE ET FISCALE, LE 30 NOVEMBRE 2016 33
EXAMEN DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE 45
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE INITIALE 49
AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 55
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE ADOPTÉE PAR LA COMMISSION 59
MOTION FOR A EUROPEAN RESOLUTION 65
Mesdames, Messieurs,
Voilà un an et demi, éclatait ce qu’il est communément admis d’appeler l’« Affaire Volkswagen », avec l’aveu, à la suite d’une enquête menée par les agences américaines de protection de l’environnement fédérale et californienne – respectivement l’Environnement Protection Agency, EPA, et la California Air Resources Board, CARB – de l’installation d’un logiciel de reconnaissance des situations de tests sur banc d’essai dans les véhicules diesel commercialisés à travers le monde par différentes marques de ce groupe.
Outre l’exemple de Volkswagen, les différentes enquêtes menées en Europe et dans le monde (1) ont mis en lumière l’utilisation de logiciels truqueurs. Ainsi, par exemple, au Japon, Mitsubishi Motors et Suzuki ont reconnu au mois de mai 2016 des manipulations, et le ministère allemand des transports a dénoncé en septembre 2016 la présence d’un logiciel désactivant, sur certains moteurs diesel du constructeur américain Fiat Chrysler Automobiles (FCA), le système de contrôle des émissions de polluants automobiles, sur la base d’une enquête menée par l’agence fédérale allemande de l’automobile. Ce constructeur fait, depuis quelques jours, aux États-Unis, l’objet d’une procédure de l’EPA.
De plus, les procédures de tests mises en place en France par la commission technique du ministère de l’écologie, de l’environnement et de la mer ont donné lieu à des enquêtes de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et à l’ouverture d’une procédure judiciaire concernant le constructeur Renault en raison des écarts considérables entre les niveaux autorisés d’oxyde d’azote (NOx) et la réalité – dénoncés en réalité de longue date.
Alors que la pollution est la troisième cause de mortalité en France et qu’elle y engendre, outre ce bilan humain catastrophique, des coûts considérables pour le système de santé (2), et qu’au-delà de la France, le dernier rapport sur la qualité de l’air en Europe publié par l’Agence européenne de l’environnement (3) fait état d’environ 467 000 décès prématurés liés à l’exposition à un air pollué dans les 41 pays de l’étude – dont 436 000 dans l’Europe des 28 – ce « Dieselgate » met en évidence la faillite du système européen d’homologation des véhicules, tant dans sa partie normative que dans sa partie contrôle, entre tolérance des systèmes d’optimisation, mise en concurrence des États membres pour l’homologation des véhicules et contrôle et sanctions dévolus aux seuls États membres sans possibilité efficace de remédier à une éventuelle défaillance.
La concomitance à l’automne 2015 de ces révélations et de l’adoption par les États membres d’un « deuxième paquet » sur les tests en conditions réelles de conduite (dit RDE) relatif au NOx (cf. infra) à l’ambition amoindrie par rapport à la proposition initiale de la Commission européenne – ce qui met en évidence l’importance du rôle des États membres dans la régulation de ce secteur économique – a conduit notre Assemblée à réagir avec détermination.
Notre commission des Affaires européennes s’est saisie de cette question immédiatement, avec des conclusions adoptées le 27 octobre 2015 à l’occasion justement de l’approbation par le Comité technique sur les véhicules à moteur de ces facteurs de conformité pour le NOx, sur les mesures des émissions de polluants atmosphériques dans le secteur de l’automobile, puis avec une résolution européenne sur la révision des procédures de mesure des émissions, en janvier 2016 (4).
Les deux commissions concernées au fond, la commission des Affaires économiques et celle du Développement durable, ont également été promptes à réagir, en demandant ce même mois d’octobre 2015 en Conférence des Présidents la création d’une mission d’information sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale, dont j’ai eu l’honneur d’être la Rapporteure, et qui a déposé, le 12 octobre dernier, son rapport, intitulé « Écologie – automobile : une alliance française » (5).
Le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques a également contribué à éclairer, l’été dernier, notre Assemblée sur l’inadaptation à la gravité des enjeux en matière de polluants atmosphériques liés à l’automobile des politiques publiques de lutte contre la pollution de l’air (6).
L’Assemblée nationale a ainsi démontré sa volonté de tirer jusqu’au bout les leçons du « Dieselgate », et d’abord celle de la faillite du régulateur, européen mais aussi national, dans sa mission de protection de la santé publique et d’encadrement des normes de pollution.
Au terme d’une analyse approfondie, au travers notamment de 42 auditions plénières auxquelles se sont ajoutées 86 auditions menées par la Rapporteure, 24 déplacements dans des usines, des centres techniques, des laboratoires de recherche, les conclusions de la mission d’information sont en effet sévères : « Sans éluder les responsabilités des constructeurs, l’Europe a sa part dans la tromperie des consommateurs et l’atteinte avérée à la santé des citoyens. En n’assurant pas sa mission de contrôle, en reportant toujours à plus tard les réformes à même de rétablir la transparence sur les émissions polluantes alors que tout le monde savait que les tests étaient dévoyés et même truqués, l’Union a donné le faux espoir à l’industrie automobile qu’elle pourrait s’exonérer des enjeux fondamentaux de notre époque. Elle a laissé faire un moins-disant écologique et sanitaire qui décourage l’investissement dans l’innovation, offrant une prime aux tricheurs et infligeant un handicap aux constructeurs qui, eux, ont investi pour relever les défis de la voiture responsable et durable. » (7)
De surcroit, alors l’affaire Volkswagen a fait deux fois plus de victimes en France qu’aux États-Unis, les automobilistes français comme européens n’ont pas eu droit aux mêmes égards concernant la reconnaissance du préjudice subi. Si le constructeur allemand a accepté de verser aux États-Unis au total 22 milliards de dollars pour régler les litiges avec les propriétaires des voitures concernées, avec les concessionnaires et avec les autorités réglementaires fédérales et locales, il s’est simplement engagé en Europe à rappeler les voitures concernées afin de procéder à une mise à jour du logiciel, aucun dédommagement des clients n’étant prévu.
La Commission européenne a lancé le 8 décembre une procédure d’infraction à l’encontre de sept États membres (République tchèque, Allemagne, Grèce, Lituanie, Luxembourg, Espagne et Royaume-Uni – l’état des informations transmises par la France n’ayant pas permis à la Commission, selon elle de déterminer à ce stade si une procédure pouvait également être lancée contre notre pays) (8), mais son action en matière de protection du droit des consommateurs européens reste en deçà de ce qui est attendu de l’Union européenne par nos concitoyens.
Le rapport de la mission d’information précitée présente 120 propositions.
Une partie d’entre elles peuvent être mises en œuvre, immédiatement, au niveau national, et ont d’ailleurs commencé à l’être : ainsi, après la convergence des taux de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques (TICPE) sur l’essence et le diesel (lancée en 2014), la question de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour les véhicules d’entreprise a été enfin été tranchée, par la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 (avec un étalement sur une période de cinq années pour donner aux professionnels le temps nécessaire pour s’y s’adapter).
D’autres propositions préconisent une réforme radicale du système européen de régulation de l’industrie automobile, tant en ce qui concerne l’élaboration des normes que leur contrôle et les sanctions d’éventuelles violations.
Des modifications du cadre juridique existant sont en cours d’adoption (ce sont les différents paquets RDE, pour « Real Driving Emissions » - émissions en situation de conduite réelle - ainsi que celui relatif au WTLP, pour « Worldwide harmonized Light vehicles Test Procedures », procédure d’essai mondiale harmonisée pour les voitures particulières et véhicules utilitaires légers). De plus, une refonte globale du cadre de réception des véhicules à moteur – avec une première proposition par la Commission européenne en janvier 2014 puis une deuxième en janvier 2016 – est aujourd’hui entre les mains des co-législateurs, le Conseil des États membres et le Parlement européen.
En réalité, « tout le monde savait » (9) que :
- les normes votées par le législateur ne correspondaient aucunement à la réalité des émissions – les écarts entre le protocole d’homologation et la réalité étant connus depuis l’origine –, mais aussi que l’usage de logiciels destinés à tromper les tests était possible voire avéré ;
- la Commission européenne comme les États membres partageaient une absence d’ambition commune en matière de législation environnementale d’envergure pour l’industrie automobile, comme le démontrent le retard pris dans l’adoption d’un nouveau cycle d’homologation alors que l’obsolescence du cycle existant était de notoriété publique, la tolérance des techniques d’optimisation et la pratique des homologations dites de complaisance, ou encore l’impossible retrait, par un État membre, du marché de véhicules non conformes à la législation européenne par un État membre dans le cas d’homologations attribuées par un autre État membre.
Aussi, en dépit d’avancées notables, ces propositions sont insuffisantes aux yeux de votre Rapporteure, et cette proposition de résolution européenne présente les principaux éléments que devrait porter une réforme du cadre européen pour remédier réellement aux dysfonctionnements constatés depuis longtemps.
Pour pouvoir être mis en circulation sur la voie publique, tout véhicule doit répondre aux exigences techniques réglementaires en termes de sécurité et d’impact d’environnemental, définies par l’Union européenne afin de garantir à la fois un accès égal au marché unique et la protection des Européens. Tous les véhicules automobiles doivent donc être réceptionnés (ou homologués) selon des directives ou règlements européens (en fonction de la catégorie internationale à laquelle ils appartiennent).
En application du principe de subsidiarité, le système européen d’homologation des véhicules repose sur les États membres. L’Union européenne dispose de la compétence de définir les normes – notamment en matière de limites d’émission – et les procédures destinées à en assurer le respect, et il revient aux États membres de s’assurer de la mise en œuvre de ces procédures et d’homologuer – ou non – en conséquence les véhicules.
a. La Commission, les États membres et le Parlement européen se partagent la compétence de définir les normes et les procédures, essais et exigences spécifiques qui s’y réfèrent.
Les normes – les seuils d’émission par exemple – sont définies par les co-législateurs, tandis que la définition des procédures, essais et exigences spécifiques qui doivent permettre, lors de la procédure de réception, de vérifier la conformité des véhicules à ces normes relèvent d’un acte d’exécution de la Commission européenne.
● Deux règlements et une directive fixent le cadre général de régulation de l’industrie automobile en matière d’émissions de polluants atmosphériques.
Le règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007 relatif à la réception des véhicules à moteur au regard des émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 5 et Euro 6) et aux informations sur la réparation et l’entretien des véhicules, harmonise ainsi les exigences techniques applicables aux véhicules à moteur et la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 septembre 2007 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules (directive-cadre), encadrent l’homologation des véhicules à moteur.
En parallèle, le règlement (CE) n° 443/2009 du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 (10), modifié en 2013 et 2014 (11), établit lui le cadre relatif aux émissions de dioxyde de carbone (CO2).
Enfin, on peut y ajouter la règlementation européenne spécifique aux plafonds d’émission de quatre polluants atmosphériques majeurs, récemment révisée (12), qui concerne partiellement l’industrie automobile à travers les plafonds d’émissions nationaux en matière d’oxydes d’azote (NOx), d’une part, et de dioxydes de souffre (SO2), d’autre part. Pour ces derniers, le résultat obtenu est ainsi en grande partie dû à l’application de la directive 98/70/CE sur la qualité des carburants automobiles (13).
● La Commission européenne se voit confier une compétence d’exécution pour, dans le premier cas (normes Euro 5 et 6), les procédures, essais et exigences spécifiques qui s’y réfèrent (14), et dans le second (émissions de CO2), les modalités relatives à la surveillance et à la communication des émissions moyennes (15) ainsi que celles qui concernent les dérogations pour certains constructeurs (16).
Les exigences techniques spécifiques nécessaires au contrôle des émissions de véhicules sont ainsi définies dans une série de règlements de la Commission européenne.
Le règlement n° 692/2008 du 18 juillet 2008 portant application et modification du règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007 relatif à la réception des véhicules à moteur au regard des émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 5 et Euro 6) et aux informations sur la réparation et l’entretien des véhicules définit ainsi par exemple les modalités d’application (phase optionnelle et phase obligatoire) de la norme Euro 6.
Le cadre juridique étant antérieur au Traité de Lisbonne, ces compétences d’exécution s’inscrivent dans la procédure de réglementation avec contrôle (PRAC) (17), l’une des cinq procédures du système de « comitologie» (18). Elle repose sur un comité technique, composé de représentants des États membres – dans la plupart des cas, de hauts fonctionnaires des administrations centrales compétentes sur le texte en débat –, qui statuent à la majorité qualifiée du comité.
Le Parlement européen et le Conseil ont toutefois une faculté de « dernier mot » et peuvent s’opposer à la mesure, dans trois cas de figure : la Commission européenne a excédé les compétences prévues dans l’acte de base, la mesure n’est pas compatible avec le but ou le contenu de l’acte de base, la mesure contrevient aux principes de subsidiarité ou de proportionnalité.
b. L’homologation est une compétence exercée au niveau des États membres et les moyens de contrôle de la Commission européenne sont inexistants.
En vertu de la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 septembre 2007, la surveillance du marché et le contrôle du respect de la législation en matière de réception des véhicules incombent aux États membres.
Ce cadre se caractérise par la grande liberté laissée aux acteurs, constructeurs comme États membres.
Un constructeur est en effet libre de présenter son modèle aux tests d’homologation devant l’autorité nationale d’homologation de son choix. L’État membre dans lequel un constructeur souhaite procéder à la réception européenne (« homologation ») de son véhicule est donc librement choisi par ce dernier.
Il n’y a pas d’organe supérieur européen supervisant ou arbitrant les travaux des autorités nationales d’homologation.
La Commission européenne ne dispose pas du pouvoir de demander une réévaluation de la réception et des certificats octroyés par les autorités nationales, ou de demander aux États-membres de lancer des procédures de contrôles fondées sur des preuves. Elle est simplement tenue informée et procède, au besoin, aux consultations appropriées en vue de parvenir à régler le différend. La Commission européenne ne dispose pas non plus du pouvoir de demander le rappel ou de suspendre la mise sur le marché de véhicules lorsque preuve est faite du non-respect d’exigences prévues par le régime de réception. Le seul pouvoir de sanction à sa disposition est la saisine de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE).
La conséquence, c’est que la Commission européenne comme les autres États membres sont impuissants en cas d’inaction de l’État membre ayant accordé l’homologation, comme le montre l’utilisation, pour ses Mercedes Classe A, d’un gaz réfrigérant non conforme à la législation européenne (du fait d’un potentiel de contribution à l’effet de serre) par le groupe Mercedes-Daimler :
– face à l’extension d’homologation accordée par l’autorité allemande en dépit de sa demande expresse de cesser l’utilisation d’un gaz incompatible avec la directive 2006/40/CE du 17 mai 2006 concernant les émissions provenant des systèmes de climatisation des véhicules à moteur (19), la Commission européenne n’a eu que pour seul recours que de lancer une procédure d’infraction contre l’Allemagne (avec une mise en demeure adressée le 23 janvier 2014 de faire appliquer pleinement la directive européenne 2006/40/CE au constructeur, puis un recours devant la CJUE le 10 décembre 2015), encore en cours d’examen à ce jour ;
– la tentative de la France de faire respecter la législation européenne par le biais d’un refus de certificat d’immatriculation aux véhicules incriminés, en se fondant sur la clause de sauvegarde en cas d’atteinte grave au droit de l’environnement s’est soldée par un échec en 2013, le juge national – juge d’application du droit communautaire – ayant considéré que le motif évoqué n’était pas recevable eu égard au peu de voitures concernées.
● Une norme Euro 6 qui se décline en une multitude de seuils. La norme Euro 6, définie initialement en 2007 pour une application en 2014, se subdivise en réalité en une succession de normes différentes, chaque rehaussement successif du niveau d’ambition de la norme s’étant traduit par la complexification de cette dernière.
Après un premier découpage entre une phase optionnelle (Euro 6a) pour les constructeurs volontaires et une phase obligatoire (Euro 6b) prévu par le règlement d’application de la Commission n° 692/2008 (20), l’ajout de la mesure des particules en nombres en 2012 (21) a eu pour corollaire la définition d’un seuil intermédiaire pour les exigences relatives à la surveillance des émissions par l’ordinateur de bord (OBD) (22) et d’un seuil final plus ambitieux, ce qui a conduit à une étape supplémentaire (Euro 6c) dont l’application est prévue pour septembre 2018.
La prise en compte, en 2016, de la divergence entre mesures en laboratoires et émissions en conditions de conduite réelle (le « paquet RDE ») a introduit deux phases supplémentaires pour la mesure des émissions de NOx, avec la prise en compte de marges de tolérance (respectivement 2,1 et 1,5), l’une transitoire (Euro 6d RDE step 1) – entre (23) septembre 2019 et septembre 2021 – et l’autre définitive (Euro 6d RDE steppe 2) (24), tandis que, pour les émissions de particules le facteur de conformité égal à 1,5 (25) est applicable dès septembre 2018 pour tous les véhicules neufs.
Enfin, en dépit d’une convergence amorcée (à partir d’Euro 5 pour les particules en masse et d’Euro 6c pour les particules fines), ces règles font toujours apparaître une différence de traitement significative entre les exigences normatives pour les véhicules diesel et celles pour les véhicules essence.
● Le système de norme Euro n’intègre pas le CO2.
Règlementées par un texte spécifique (26), les émissions de CO2 sont calculéesnon pas par véhicule comme les autres polluants mais par valeur pondérée par la masse moyenne des véhicules vendus annuellement dans l’Union européenne par chaque constructeur. De surcroît, ce seuil n’est pas une limite mais un objectif au-delà duquel le constructeur doit payer des pénalités par gramme de CO2 supplémentaire.
Enfin, le calendrier d’entrée en vigueur du nouveau règlement fixant un nouvel objectif de 95 g/km de CO2, est là-encore indépendant de celui prévu pour l’entrée en vigueur du nouveau palier de la norme Euro 6 concernant les NOx, intégrant le RDE.
Tout semble ainsi organisé comme si « l’Europe avait " deux cerveaux", le climat d’un côté, la qualité de l’air de l’autre, et que les deux organes ne communiquaient jamais, à charge pour les constructeurs automobiles de veiller à la cohérence d’ensemble » (27).
b. Des normes de plus en plus sévères dans les textes et de moins en moins respectées dans la réalité
● Dès l’origine, des écarts entre les tests et la réalité des émissions ont été constatés et rendus publics et l’adéquation des protocoles d’évaluation a été contestée.
Tous les témoignages recueillis par la mission d’information corroborent ce qui avait été rendu public officiellement au niveau européen dès 2011 par le Centre commun de Recherche puis par le Commissaire européen à l’environnement de la Commission Barroso, M. Janez Potocnik : les normes négociées, puis votées ne reflètent pas la réalité (28), et « les écarts entre les tests sur banc et sur route sont tels que les normes ne correspondent plus à rien ».
L’inadéquation du protocole d’évaluation de la consommation et les émissions polluantes des véhicules en vue de leur homologation (29), réalisé en laboratoire sur des bancs à rouleau et dont l’ambition est simplement de pouvoir comparer des véhicules entre eux – et non pas de mesurer des émissions en situation de conditions de conduite réelles – a été mise en cause rapidement après son entrée en vigueur en 1973 tant les conditions de conduite que ce cycle entendait reproduire étaient très éloignées d’un usage réel.
● Plus la sévérité des normes s’est renforcée, plus cet écart constaté s’est accru.
Par étapes successives, la lutte contre la pollution de l’air due aux rejets d’émissions polluantes des véhicules s’est traduite, au niveau européen, par un relèvement progressif des règles imposées aux constructeurs automobiles.
Les normes ont été durcies pour les polluants déjà mesurés, et de nouveaux types d’émissions telles que les NOx, à partir d’Euro 3, et les particules en nombre, à partir d’Euro 5 pour les seuls véhicules diesel, ont été pris en compte ; les exigences ont été renforcées pour les particules en masse (30).
Mais en pratique, les normes sont de moins en moins respectées, comme le montrent clairement deux études de l’organisation non gouvernementale International Council on Clean Transport (ICCT) présentées par la mission d’information précitée (31) :
– pour les émissions de NOx, l’écart mesuré, en conditions de conduite réelle, était de 100 % pour la norme Euro 3, et de 700 % pour la norme Euro 6 ;
– pour les émissions de CO2, la mesure de l’écart était de 8 % en 2001, et de 40 % en 2014.
● La révision des protocoles de tests en débat pendant presque dix ans.
Ouvert en 2007, avec l’adoption du règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007 précité – dont le considérant 15 rappelle explicitement la nécessité de réviser les cycles de tests –, le débat sur l’adoption de deux nouveaux protocoles (l’un pour les émissions de NOx, appelé RDE, « Real Driving Emission », et l’autre pour les émissions de CO2, appelé WLTP, « Worldwide harmonized Light vehicles Test Procedures ») devrait s’achever en 2017, soit dix ans après !
Annoncé par la communication de la Commission « Une stratégie européenne pour des véhicules propres et économes en énergie » du 8 avril 2010 (32), un groupe de travail est créé en janvier 2011 afin de mettre au point ces nouvelles procédures d’essai, des négociations internationales étant menés à partir du même moment dans le cadre de l’organe spécialisé des Nations Unies, la CEE-ONU en vue d’établir un protocole harmonisé au niveau mondial de tests se rapprochant des conditions réelles de circulation.
La proposition relative au premier paquet RDE a été présentée au printemps 2015 et celle relative au cycle WLTP au printemps 2016, soit respectivement quatre et cinq ans après la mise en place de ce groupe de travail.
La définition technique de l’ensemble de ces nouveaux protocoles ainsi que les procédures liées à leur adoption définitive ne sont pas intégralement achevées à ce jour :
– si les premier (méthodologie) et deuxième (valeurs limites et calendrier d’entrée en vigueur pour les émissions de NOx) paquets RDE ont été publiés (33), le troisième paquet RDE (valeurs limites et calendrier d’entrée en vigueur pour les particules en nombre notamment), adopté en Comité technique des véhicules à moteur (CTVM) le 20 décembre 2016, doit être transmis au Conseil et au Parlement européen (34) ;
– le dernier paquet RDE (méthode et modalités des vérifications des résultats) n’a pas été présenté par la Commission européenne ;
– la proposition de règlement de la Commission sur le WLTP (35), adoptée en CTVM le 14 juin, est sur la table du Conseil et du Parlement depuis la fin décembre 2016.
● Le développement du « type-approval shopping » en matière d’homologation, ou l’encouragement du « moins-disant » en termes de respect de la réglementation.
Encadrée par la directive du Parlement européen et du Conseil du 5 septembre 2007 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, l’homologation des véhicules est laissée à la libre appréciation des États membres, notamment en ce qui concerne les autorités qu’il entend désigner, et le choix de l’organisme d’homologation est laissé, lui, à chaque constructeur (il peut ainsi être totalement distinct de l’État membre dans lequel se trouve le site de production, comme Luxembourg, Malte ou Chypre…).
Or si certaines de ces autorités nationales ont acquis une réputation de rigueur, d’autres ont celle de se montrer plus accommodants envers les constructeurs, avec pour conséquence, le développement d’un « type-approval shopping » : les constructeurs recherchent le système le plus souple (en raison d’une expertise technique moindre ou d’une interprétation plus laxiste des textes en vigueur, voire de liens particulièrement étroits avec les constructeurs) ou le moins cher.
Pour la mission d’information, « cette liberté conduit, de fait, à une mise en concurrence des États membres qui peut s’apparenter à une forme de " moins-disant " en termes de respect de la réglementation » (36).
● Un usage généralisé des dérogations à l’interdiction des dispositifs d’invalidation.
La réglementation européenne interdit les dispositifs d’invalidation tels que celui utilisé par le groupe Volkswagen. Néanmoins des dérogations sont possibles.
Le règlement n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007 prévoit en effet leur interdiction générale dans son article 5.2, tout en prévoyant simultanément trois cas de dérogation :
- pour protéger le moteur contre des dégâts ou un accident et pour le fonctionnement en toute sécurité du véhicule ;
- en raison d’exigences liées au démarrage du moteur ;
- lorsque les conditions sont substantiellement incluses dans les procédures d’essai pour vérifier les émissions par évaporation et les émissions moyennes au tuyau arrière d’échappement.
Or ces possibilités de dérogation, notamment la première, ont été interprétées de façon extensive, jusqu’à entraîner une utilisation systématique de ces dispositifs.
● L’exemple éclairant de l’adoption par l’Union européenne à l’automne 2015, soit de façon concomitante aux révélations concernant le groupe Volkswagen, d’une dérogation générale à ses propres seuils d’émission des NOx.
Sans faire à ce stade une description technique précise du contenu du deuxième paquet RDE (cf. infra), votre Rapporteure souhaite dénoncer l’hypocrisie du système européen et de la position d’un certain nombre d’États membres en matière de régulation de l’industrie automobile. L’adoption, dans le cadre de la procédure de comitologie, d’un relèvement des seuils d’émission de NOx via l’adoption de marges de tolérance appelées « facteurs de conformité » est en effet éclairante.
Seule détentrice du pouvoir d’initiative, la Commission européenne a proposé de « compenser » l’entrée en vigueur de procédures de tests plus rigoureuses au regard des émissions en situation de conduite réelle par une « adaptation » des seuils d’émission fixés au regard de l’ancienne procédure de tests, et a choisi d’utiliser pour ce faire sa compétence d’exécution, dont le champ est défini de façon large par le règlement (CE) n° 715/2007 du 20 juin 2007. Sa proposition initiale comportait une phase de transition nettement plus ambitieuse que celle finalement adoptée.
Cette proposition a été discutée lors d’une première réunion par le Comité technique pour les véhicules à moteur (CTVM) (37), où siègent et décident les représentants des États membres (chaque État membre étant libre de choisir le niveau auquel il souhaite être représenté), qui l’ont rejetée (38).
La Commission ayant relevé très sensiblement les seuils de sa proposition, ce compromis a été adopté le 28 octobre 2015, alors même que venait d’éclater le scandale Volkswagen. La France a exprimé un vote favorable, avant de critiquer publiquement la teneur du compromis ainsi obtenu.
Ce texte ayant été transmis parallèlement aux deux co-législateurs, le Conseil et le Parlement européen, seul ce dernier a souhaité faire usage du droit d’opposition qui lui est reconnu dans la procédure de règlementation avec contrôle. La résolution d’objection déposée contre ce texte, adoptée en Commission Environnement le 14 décembre 2015, a été rejetée en séance plénière le 3 février 2016, avec un faible écart toutefois (323 contre l’objection, 317 pour, 61 abstentions).
Le 26 juin 2016, la Ville de Paris a introduit un recours en annulation contre la Commission européenne (39) pour incompétence, du fait de son utilisation inappropriée de la procédure de règlementation avec contrôle, mais la France n’a pas souhaité se joindre à cette procédure.
En parallèle à cette tentative d’obtenir une objection, le Parlement européen a décidé, le 16 décembre 2015, de constituer une commission d’enquête chargée d’examiner les infractions au droit de l’Union européenne en ce qui concerne la mesure des émissions dans le secteur de l’automobile.
Avec l’adoption, l’année dernière, d’une résolution sur la révision des procédures de mesure des émissions de polluants atmosphériques automobiles (40), notre Commission des Affaires européennes, puis notre Assemblée, ont voulu s’associer au message politique très clair lancé par la Commission Environnement du Parlement européen : cohérence et fin des doubles discours sont demandées aux États membres et à la Commission européenne.
La mission d’information de l’Assemblée nationale a elle-aussi exprimé une forte déception : « Cet état de fait ne peut être qu’incompréhensible et choquant aux yeux des citoyens pour lesquels il s’apparente à la délivrance d’un " permis de polluer ". Il s’avère désastreux pour l’Europe, qui apparaît comme incapable de faire respecter ses propres normes et dont les institutions sont soupçonnées d’être sous la pression de lobbies industriels puissants. Enfin, l’image de l’industrie automobile elle-même est abîmée, puisque cette décision acte que les constructeurs seraient incapables de respecter les règles, le tout dans le contexte de l’affaire Volkswagen qui met déjà à rude épreuve la confiance des consommateurs en l’industrie automobile. La décision du 28 octobre 2015, devenue définitive le 20 avril 2016, ne fait donc que des perdants. Elle ne répond bien sûr pas aux attentes des citoyens qui veulent que la pollution automobile diminue, mais, au surplus, elle ne rend service ni à l’Europe dont les normes sont discréditées, ni à l’industrie automobile dont la réputation est écornée » (41).
Les modifications en cours du droit existant, portées par ces nouvelles procédures de contrôle des émissions polluantes en condition réelles de conduite, tout comme la révision plus large des règles encadrant la réception des véhicules à moteur ne sont pas à la hauteur de ce qui est nécessaire, tant pour la santé des Européens que pour l’avenir de l’industrie automobile européenne, confrontée à l’enjeu crucial du choix des normes de référence au niveau mondial.
L’une comme l’autre appellent une réforme radicale du cadre européen, reposant, pour rétablir la confiance, sur trois piliers : une norme unique, la règle des cinq ans, la création d’une agence européenne indépendante.
En lien avec les négociations du paquet « qualité de l’air » qui ont débuté en 2014, la Commission européenne avait publié le 31 janvier 2014 une proposition législative révisant le règlement (CE) n° 715/2007 relatif à la réception des véhicules légers (Euro 5 et Euro 6) et le règlement (CE) n° 595/2009 relatif aux poids lourds (Euro VI).
Cette proposition législative lui conférait des pouvoirs accrus en vue de limiter la pollution causée par ces véhicules et imposait des contraintes en matière de réduction de leurs émissions, notamment pour les oxydes d’azote (NO et NO2).
En parallèle, afin, notamment, de tirer les conséquences de la différence constatée entre les émissions réelles et celles constatées en laboratoire, et comme le règlement (CE) no 715/2007 l’y habilite, la Commission européenne a présenté, en vertu de sa compétence d’exécution, une série d’actes modifiant les conditions d’application du cadre général de réception des véhicules (procédures d’essai pour d’homologation des véhicules, création d’un test de contrôle des émissions polluantes en conditions réelles de conduite sur la voie publique, etc.).
La révélation des défaillances du cadre européen de régulation de l’industrie automobile, à la suite du « Dieselgate » déclenché par les accusations portées contre le groupe Volkswagen par les autorités américaines, fédérale et californienne de protection de l’environnement, le 18 septembre 2015, a conduit la Commission européenne à présenter à la fin du mois de janvier 2016 une nouvelle proposition de révision générale du cadre applicable à la réception des véhicules dans l’Union européenne (42).
● Les « paquets RDE » (« Real Driving Émissions », ou essai en conditions réelles de conduites, sur route) se composent de quatre textes présentés de façon échelonnée depuis la mi-2015, et adoptés ou en cours d’adoption.
♦Le règlement (UE) no 2016/427 de la Commission du 10 mars 2016 introduit un test d’émissions supplémentaire dans le cadre de la réception par type des voitures particulières et des véhicules utilitaires légers, permettant de mesurer les émissions dans les conditions de conduite réelles à l’aide de systèmes portables de mesure des émissions installés sur les véhicules (appelés PEMS) (1er « paquet RDE »).
♦Le deuxième « paquet RDE » – celui adopté par le CTVM (ou TCMV) (43) le 28 octobre 2015 (cf. supra) autorise un dépassement des plafonds limites d’émissions de Nox posés par la norme Euro 6 grâce à l’usage de marges de tolérance appelées « facteurs de conformité ».
Dans un premier temps, les niveaux d’émissions pour les NOx en conduite réelle ne devront pas dépasser la limite fixée par les normes Euro 6 majorée par application d’un coefficient multiplicateur (dit « facteur de conformité ») de 2,1 (soit 110 % au-dessus des résultats en laboratoire), au plus tard le 1er septembre 2017 pour les nouvelles homologations de véhicules et le 1er septembre 2019 pour tous les véhicules neufs vendus.
Dans un deuxième temps, le coefficient de conformité « final » est fixé à 1,5 soit 50 % de divergence autorisée au plus tard le 1er janvier 2020 pour les nouvelles homologations de véhicules et le 1er janvier 2021 pour tous les véhicules neufs vendus.
Il s’agit d’une révision à la baisse de la proposition initiale de la Commission européenne, soit une phase de transition de septembre 2017 à septembre 2019 avec un seuil de tolérance fixé à 60 %, puis à 20 % ensuite, et cela renvoie l’application réelle de la norme Euro 6 (80 mg/km) à une date hypothétique. En effet, ce règlement (UE) n° 2016/646 de la Commission du 20 avril 2016 portant modification du règlement (CE) n° 692/2008 en ce qui concerne les émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 6) ne fixe pas de date butoir à la prise en compte de marges d’erreur techniques inhérentes à la mesure des émissions avec le système embarqué PEMS.
Or la mission d’information a établi qu’il n’y avait « pas d’obstacle technologique au respect strict de la norme Euro 6, sans facteur de conformité ou avec un facteur de conformité maximal de 1.2 […] en raison de la marge technique liée à la nature non reproductible des tests. Les solutions existent et sont disponibles. […] D’autres approches techniques et politiques que la dérogation généralisée au respect de la norme Euro 6 auraient donc pu et dû être envisagées. La décision sur le facteur de conformité reste contestable et contestée sur le fond mais aussi sur la forme » (44).
♦Le troisième « paquet RDE » élargit ce nouveau test aux émissions des particules en nombre (particules fines), avec un facteur de conformité égale à 1,5 correspondant à la marge d’incertitude des instruments de mesure PEMS (établie à 50 % par le Centre Commun de Recherche), un calendrier d’entrée en vigueur calé sur le calendrier initial du 2e paquet RDE (soit une application des nouvelles règles au 1er septembre 2017 pour les nouvelles homologations et au 1er septembre 2018 pour toutes les voitures neuves vendues, ce qui revient à rendre obligatoire l’installation de filtres à particules sur tous les véhicules mis sur le marché). Il prévoit également la méthode pour prendre en compte le démarrage à froid, un test à chaud, ainsi que les spécificités liés aux hybrides et aux véhicules utilitaires.
Ce paquet va, de fait, rendre les filtres à particules obligatoires sur les moteurs des véhicules à essence, alors que ces deniers en étaient jusqu’alors exonérés.
Adopté en CTVM/TCMV le 20 décembre 2016, ce projet de règlement de la Commission doit ensuite être transmis au Conseil et au Parlement européen (45). Sa publication est attendue pour le printemps 2017.
♦ Enfin, le quatrième « paquet RDE » devrait prévoir la méthode de vérification des résultats en service (« In use conformity », ISC – test sur un véhicule usagé jusqu’à 100 000 km) et les modalités pour que des vérifications indépendantes par des tiers soient possibles. Sa discussion est prévue au cours de l’année 2017.
● La nouvelle procédure d’homologation pour mesurer la consommation de carburant ainsi que les émissions de CO2 et de polluants des véhicules, le cycle WLTP, entraine une nouvelle dérogation – temporaire toutefois – aux exigences fixées par les normes européennes.
Le règlement (UE) n° 333/2014 du 11 mars 2014 sur les modalités permettant d’atteindre l’objectif de 2020 en matière de réduction des émissions de CO2 des voitures neuves (46) prévoit que les constructeurs devront se conformer à un objectif de 95 g/km de CO2 pour tous les véhicules neufs en 2021.
Afin de mieux mesurer – mais toujours en laboratoire – la consommation de carburant ainsi que les émissions de CO2 et de polluants des véhicules, la Commission européenne a également proposé le remplacement du cycle actuel d’homologation NEDC, utilisé depuis plus de 30 ans, par le cycle d’homologation international WLTP (« World harmonized Light vehicles Test Procedures »), ce dernier étant moins éloigné de la consommation et des émissions de CO2 réelles.
Ce projet de règlement de la Commission, adopté en CTVM le 14 juin 2016, et d’ores et déjà transmis au Conseil et au Parlement européen (47) prévoit une application de ce nouveau test aux nouvelles homologations de voitures dès le 1er septembre 2017 et à toutes les voitures neuves immatriculées dès le 1er septembre 2018, tout en préservant, à l’article 15, une période transitoire de coexistence des deux cycles d’essai NEDC et WLTP.
Bien que temporaire, cette dérogation pourrait permettre de pérenniser la distorsion de concurrence entre constructeurs qui aujourd’hui résulte du mode de calcul des émissions de CO2.
● Les discussions en trilogue sur la première proposition législative de la Commission du 31 janvier 2014 de révision du règlement (CE) n° 715/2007 relatif à la réception des véhicules légers (Euro 5 et Euro 6) (ainsi que du règlement (CE) n° 595/2009 relatif aux poids lourds - Euro VI) ont été suspendues en décembre 2015, le Parlement européen souhaitant attendre les résultats de la commission d’enquête mise en place à la suite du scandale concernant l’utilisation de dispositifs d’invalidation par le constructeur allemand Volkswagen.
Les premières négociations entre le Conseil et le Parlement européen avaient permis de trouver un accord sur plusieurs des points essentiels du texte. En particulier, une nouvelle valeur limite d’émissions pour le dioxyde d’azote (NO2) sera définie dans le cadre de la procédure législative ordinaire (et non par la voie d’un acte délégué), sur la base d’un rapport que la Commission devra présenter aux co-législateurs six mois après l’entrée en vigueur de la nouvelle législation.
Deux points restaient en discussion concernant la modification de ces règlements : l’encadrement de la procédure RDE et les modalités d’adoption des actes secondaires (acte délégué ou d’exécution) notamment en ce qui concerne les procédures de test des émissions.
● Afin, notamment, de tirer tous les enseignements de l’affaire Volkswagen sur les dispositifs d’invalidation et de réduire les divergences d’interprétation du cadre réglementaire actuel, la Commission européenne a proposé au début de l’année 2016 une nouvelle proposition législative révisant le cadre applicable à l’homologation des véhicules.
Ce projet de règlement relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules (48) – qui remplace la directive cadre directive 2007/46/CE sur l’homologation des véhicules – a deux objectifs principaux.
D’une part, la proposition de la Commission européenne doit permettre d’accroître l’indépendance et la qualité de l’homologation européenne des véhicules à travers :
– le renforcement du contrôle par les États membres des autorités d’homologation et des services techniques, avec la mise en place d’un système de revue par les pairs des premières, et d’inspections croisées entre les seconds, afin de rétablir la confiance entre toutes les parties prenantes ;
– l’accroissement des pouvoirs de la Commission pour la supervision des services techniques d’homologation, dont elle pourrait suspendre, restreindre ou retirer la désignation ;
– la révision du mode de financement des coûts d’homologation et de surveillance du marché ;
– la mise en place d’un forum sur la mise en œuvre de ce règlement pour favoriser les échanges d’information et de bonnes pratiques entre les autorités nationales, etc., afin de permettre une application uniforme des règles de réception.
D’autre part, tout en réaffirmant le rôle de surveillance du marché par les États membres, la Commission européenne souhaite améliorer cette surveillance :
– en prévoyant également dans ce cadre un contrôle en conditions réelles, en aval donc de ceux réalisés au stade de la réception (réalisés sur des véhicules préparés à cet effet) ;
– en se voyant confier un rôle et des pouvoirs de supervision plus importants, avec notamment la possibilité d’infliger des sanctions. Avec cette innovation, la Commission serait ainsi en mesure de réaliser, avec l’appui de son Centre Commun de Recherche, des contrôles inopinés sur des véhicules neufs ou immatriculés présents sur le marché européen pour vérifier leur conformité vis-à-vis de la réglementation européenne, et d’imposer des amendes administratives aux constructeurs en cas de non-conformité constatée par ses soins – avec un maximum de 30 000 euros par véhicule ;
– en limitant à cinq ans la validité des homologations, sans possibilité de prolongation (alors qu’il existe des véhicules sur le marché dont l’homologation a plus de quinze ans, ce qui permet à certains constructeurs, en arguant que leurs véhicules sont d’anciens types, d’échapper aux prescriptions s’appliquant aux nouveaux types), et en proposant une plus grande transparence sur les données d’homologation comme sur les logiciels utilisés dans les véhicules ;
– en ouvrant la possibilité d’agir à l’encontre d’un constructeur en cas en cas de simple non-conformité, sans condition d’existence d’un risque environnemental ou sanitaire.
Cette proposition opère également la « lisbonisation » des actes secondaires, les annexes ne pouvant être modifiées que par la voie d’un acte délégué, et prévoit une entrée en vigueur immédiate (20 jours après la publication), avec toutefois mention d’un délai de transition d’un an à partir de l’entrée en vigueur (qui dépendra, en réalité, de l’avancée plus ou moins rapide des négociations).
Deux Présidences (Pays-Bas, puis Slovaquie) ont déjà œuvré à l’adoption de ce projet, sans aboutir à l’établissement d’une position de compromis, et le dossier a été repris par la Présidence maltaise. Au Parlement européen, à la suite du report du vote initial (prévu en novembre dernier), la Commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs (INCO), devrait se prononcer les 25 et 26 janvier prochains sur le projet de rapport, déposé le 14 septembre dernier par M. Daniel Dalton (CRE, Royaume-Uni).
Si ces propositions sont un pas dans la bonne direction pour rétablir la confiance ébranlée des consommateurs, elles se heurtent aux réticences de certains États membres peu enclins à procéder à des modifications fondamentales du système existant, mais aussi à celles du rapporteur de la commission INCO, dont le projet de rapport diminue le niveau d’ambition de la proposition de la Commission, d’une part, et elles sont insuffisantes aux yeux de votre Rapporteure, d’autre part.
Comme le souligne la mission d’information, « le risque existe que la que la montagne du Volkswagengate accouche d’une souris, et que tout continue comme avant à Bruxelles » (49).
Une approche plus radicale s’impose.
2. L’objet de la proposition de résolution : l’appel à une réforme d’ampleur du cadre règlementaire européen applicable à l’industrie automobile
La proposition de résolution européenne déposée par la Présidente de notre Commission, Mme Danielle Auroi, par le Président de la commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire, M. Jean-Paul Chanteguet et par votre Rapporteure, est la suite logique des conclusions de la mission d’information sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale, qui appellent à une réforme radicale du système européen d’élaboration et de contrôle des normes applicable à l’industrie automobile, pour mettre fin aux errements hérités du passé et ainsi rétablir un pacte de confiance pour l’avenir, d’ailleurs bénéfique à la compétitivité de l’ensemble de l’industrie automobile européenne.
À la suite de l’examen par notre Commission, parmi les alinéas de visa (alinéas 2 à 21), quinze (alinéas 3 à 17) rappellent le cadre européen dans lequel s’inscrit le système européen d’élaboration et de contrôle des normes applicable à l’industrie automobile et les évolutions en cours de ce dernier et donc par ricochet, la proposition de résolution européenne, tandis que les cinq autres (alinéas 2 et 18 à 21) sont relatifs au cadre national et aux travaux d’information effectués dès l’automne 2015 par l’Assemblée nationale en matière de polluants atmosphériques automobiles et les suites du « Dieselgate » (alinéas 18 à 21), avec l’action du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, de la commission des Affaires européennes, et de la mission d’information précitée.
Douze considérants (alinéas 22 à 33) rappellent, outre le sens des conclusions de la mission d’information précitée, qui servent de socle à cette proposition de résolution européenne (alinéa 29) :
– la faillite du système européen d’élaboration des normes, de régulation et de surveillance du marché automobile, mise en évidence par la découverte aux États-Unis d’une fraude en œuvre par l’entreprise Volkswagen, à une échelle mondiale, pour tromper les protocoles de tests mesurant les émissions de NOx, et précisément documentée par la mission d’information de l’Assemblée nationale sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale ; non seulement les défaillances et les errances ainsi mises au grand jour demeurent mais des soupçons de nouvelles fraudes apparaissent, notamment en ce qui concerne le respect des émissions de CO2 (alinéas 22, 28 et 30) ;
– la longue absence de volonté politique de la Commission européenne comme des États membres face aux insuffisances, connues depuis des années, de la règlementation européenne applicable à l’industrie automobile (alinéa 25), jusqu’à récemment, puisque dans le cadre de la procédure de comitologie relative à l’adoption du deuxième paquet RDE relatif aux tests en situations de conduite réelles, le 28 octobre 2015, a été autorisé dans des conditions de transparence insatisfaisantes un dépassement de plus de 110 % des limites des émissions d’oxydes d’azote (NOx) pourtant adoptées par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne (alinéas 23 et 24) ;
– les incidences négatives sur la santé des Européens – et notamment sur l’espérance de vie des populations les plus fragiles – qu’entrainent ces défaillances du contrôle des émissions polluantes (alinéa 31), ainsi la crédibilité entachée du législateur européen qui est la conséquence de l’absence de transparence dans le processus d’élaboration des normes européennes ainsi que leur non-respect (alinéa 32) ;
– l’action du Parlement européen, qui a décidé fin 2015 de constituer une commission d’enquête sur la mesure des émissions dans le secteur de l’automobile (alinéa 26) et de la Commission européenne, dont la deuxième proposition de réforme du cadre relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules à moteur, présentée en janvier 2016 afin de remédier aux défaillances relatives à l’homologation des véhicules, accorde davantage de pouvoirs à la Commission européenne et aux États membres (alinéa 27) ;
– le caractère préjudiciable à la compétitivité de l’industrie automobile européenne de l’instabilité et du désordre normatifs (alinéa 33).
Enfin, la position de la commission des Affaires européennes est présentée aux alinéas 34 à 47.
Cette dernière se félicite à nouveau, en premier lieu, de la mise en place par le Parlement européen d’une commission d’enquête chargée de faire toute la lumière sur les violations du droit de l’Union et attachera le plus grand intérêt à ses conclusions (alinéa 34).
Elle appelle la Commission européenne à intervenir de manière plus déterminée à l’égard du groupe Volkswagen, afin que les consommateurs européens puissent être indemnisés dans des conditions comparables à celles des consommateurs américains pour un préjudice identique et résultant de l’intégration volontaire d’un « logiciel truqueur » dans les véhicules commercialisés pendant plusieurs années par différentes marques de ce groupe (alinéa 35).
Afin de tirer toutes les conséquences de la faillite du système européen de régulation, de surveillance et d’élaboration des normes, elle juge nécessaire une réforme d’ampleur du cadre règlementaire européen actuellement en vigueur (alinéa 36), et à ce titre, appelle la Commission européenne et les États membres à :
– mettre un terme à une situation dans laquelle certains seuils d’exposition aux polluants retenus par la réglementation européenne demeurent supérieurs aux valeurs limites définies par l’Organisation mondiale de la Santé (alinéa 37) ;
– interdire explicitement les pratiques dites d’« optimisation » mises en œuvre par les constructeurs au titre des protocoles d’homologation, en formalisant une liste complète des pratiques qu’il convient de proscrire (alinéa 39) et interdire expressément tout dispositif d’invalidation en supprimant toutes les dérogations existantes à cette interdiction (alinéa 40) ;
– rendre obligatoire l’homologation des logiciels, appelés à prendre une importance majeure avec les développements technologiques des véhicules connectés et autonomes (alinéa 41) et ouvrir une enquête sur l’utilisation d’un logiciel destiné à mettre hors service le système de traitement des NOx sur les camions, en vente libre sur internet, l’« AdBlue Emulator Box » (alinéa 42) ;
– renforcer les droits des consommateurs en obligeant les constructeurs à rendre contractuelles les données relatives aux émissions (alinéa 43).
Pour asseoir pleinement son efficacité, la réforme radicale qu’appelle ainsi de ses vœux la commission des Affaires européennes doit, enfin, s’organiser autour de trois piliers majeurs (alinéa 44) :
– l’élaboration d’une nouvelle norme Euro, unique et multicritères car intégrant tous les paramètres de pollution à l’émission, qui respecte le principe de neutralité technologique (alinéa 45) ;
– le respect d’un délai de cinq ans minimum avant l’entrée en vigueur d’une nouvelle norme environnementale applicable au secteur automobile, et l’annonce dix ans à l’avance du futur objectif cible (alinéa 46) ;
– la mise sur pied d’une agence européenne indépendante en charge de la surveillance de marché et du contrôle de conformité des véhicules en circulation, des procédures de sanctions en cas de non-conformité, ainsi que de l’agrément des services techniques désignés par les autorités nationales d’homologation, pour garantir le respect de standards de qualité (alinéa 47).
AUDITION DE MME DELPHINE BATHO, RAPPORTEURE DE LA MISSION D’INFORMATION SUR L’OFFRE AUTOMOBILE FRANÇAISE DANS UNE APPROCHE INDUSTRIELLE, ÉNERGÉTIQUE ET FISCALE, LE 30 NOVEMBRE 2016
« La Présidente Danielle Auroi. Nous avons aujourd’hui le plaisir de recevoir notre collègue Delphine Batho, rapporteure de la mission d’information sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale. Le sujet a une forte dimension européenne.
Ce rapport est le résultat d’une année de travail exigeant, sérieux, approfondi et de qualité. Il est pour l’instant en Europe le plus important travail parlementaire réalisé sur le « Dieselgate » et ses conséquences, tant pour l’Union européenne que pour la filière automobile elle-même. Vous allez d’ailleurs être auditionnée dans quelques jours par la commission d’enquête EMIS mise en place par le Parlement européen. L’on voit que les travaux menés en ce domaine sont complémentaires. Comme présidente de cette commission, je ne peux que m’en réjouir.
Je ne rappelle pas les détails du scandale Volkswagen, bien connus, et notamment l’utilisation de méthodes frauduleuses par cet industriel. Cependant, puisque la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a transmis à la justice les conclusions de ses investigations sur les émissions de polluants par les véhicules Renault, nous voyons bien que la France n’est pas tout à fait dans une situation simple vis-à-vis de ces problèmes.
Il a fallu qu’une petite ONG américaine soit à l’origine de ce scandale énorme. Mais n’y a-t-il pas vraiment de quoi s’inquiéter et s’interroger encore plus sur les fameux facteurs de conformité ? Peut-on tolérer des systèmes d’optimisation ? Est-ce que la mise en concurrence des États membres ne participe pas des problèmes d’homologation des véhicules ?
Il me semble que tous les États membres devraient réfléchir davantage ensemble à avoir une position plus claire. En particulier, l’ambition initiale du deuxième paquet sur les tests en conditions réelles de conduite (ou real driving emissions, RDE), relatif au NOx, a été amoindrie. Le bilan des commissions indépendantes mises en place reste à faire. Les solutions envisagées divergent d’un État à l’autre. Quant au Conseil « Compétitivité » des lundi et mardi 28 et 29 novembre, il n’a pas donné d’indication très claire sur ce que devrait être l’ambition partagée au sein de l’Union européenne. Les procédures d’infraction annoncées voilà un peu plus de deux mois pourraient-elles être incluses dans la liste publiée le mois prochain ?
Les deux commissions de notre Assemblée concernées au fond, la commission des affaires économiques et celle du développement durable, ont réagi immédiatement, en demandant en conférence des présidents la création de la mission d’information dont vous avez été rapporteure. Quand vous aurez porté vos conclusions au niveau européen, il serait bon que nous formalisions, sous forme d’une résolution, une position officielle de l’Assemblée nationale. Après la publication de votre rapport, nous devons travailler ainsi à l’étape suivante.
Mme Delphine Batho, rapporteure de la mission d’information sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale. Le point de départ de notre mission d’information fut le scandale Volkswagen. Toute la première partie de notre rapport porte sur le volet européen de la question. Nous avons réalisé un travail important : 42 auditions en plénière, 86 auditions supplémentaires que j’ai conduites moi-même, 24 déplacements dans les usines automobiles, les centres de recherche et les services chargés de l’homologation, deux déplacements à Bruxelles.
Les conclusions présentées ont été adoptées à l’unanimité. C’est la première fois depuis dix ans qu’il y a un rapport parlementaire sur l’industrie automobile en France. Ce secteur emploie tout de même plus de 500 000 salariés directs, plus de 600 000 dans les filières aval. Si l’on compte les emplois indirects, il représente 9 % de la population active. Le secteur a connu une crise grave, puisque la France y a perdu en douze ans 42 % de sa production industrielle.
Il offre un coefficient multiplicateur de 4,1, ce qui est très élevé : chaque point de valeur ajoutée créé par le secteur automobile entraîne dans l’économie une production de valeur ajoutée quatre fois supérieure, grâce à l’effet d’entraînement sur les secteurs de la chimie, de la plasturgie et du numérique. Aussi notre rapport plaide-t-il pour une stratégie offensive fondée sur une alliance entre écologie et automobile, pour des véhicules zéro émission, pour une révolution des usages et pour le développement des véhicules autonomes.
Je concentrerai mon propos aujourd’hui sur l’aspect européen de la question. La pollution de l’air est la troisième cause de mortalité en France. L’Agence européenne de l’environnement estime à un demi-million les morts prématurées qui y sont dues en Europe chaque année. D’emblée, une anomalie européenne apparaît. Les seuils européens en matière de qualité de l’air et de particules fines ne sont pas ceux de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Ce n’est pas un hasard que le « Dieselgate » ait éclaté aux États-Unis et non en Europe. Voilà qui est révélateur de la faillite d’un système. À partir de 2005, tout le monde savait, non seulement qu’un écart séparait les résultats des tests et la réalité, mais aussi qu’il pouvait exister des logiciels truqués, et même qu’il en existait. Ce fait avait été abordé publiquement par le commissaire Potočnik en 2011. L’Union européenne s’était d’ailleurs engagée à partir de 2007 à procéder aux réformes nécessaires.
Certes, les constructeurs portent une part de responsabilité, car ils ont triché. Il ne faut pas éluder cette responsabilité. Mais le régulateur porte aussi une part de responsabilité, car il n’a pas joué son rôle en ne prévenant pas des tricheries dont il était informé et en ne les sanctionnant pas. Il laissait faire un moins-disant écologique et laissait croire à l’industrie que les choses pouvaient continuer ainsi.
L’affaire Volkswagen fait plus de victimes dans l’Union européenne qu’aux États-Unis, et deux fois plus en moyenne en France qu’aux États-Unis. Or l’on n’indemnise que les consommateurs américains ; je m’inscris en faux contre cette approche du groupe Volkswagen. Il y a eu fraude à la norme Euro 5. Les véhicules concernés ne devraient même plus avoir le droit de circuler, mais l’autorité allemande a négocié avec le constructeur une mise en conformité à la norme Euro 5. En tout état de cause, je veux tordre le cou – c’est aussi le point de vue de la DGCCRF – à cette légende répandue par le groupe Volkswagen selon laquelle la différence de réglementation entre les États-Unis et l’Europe justifierait une différence de traitement entre consommateurs américains et européens.
Dès 2007, on a débattu de la question de savoir si l’on poursuivait la marche en avant des normes, en faisant progresser les seuils théoriques, ou si l’on faisait en sorte que la norme corresponde à la réalité. Plus la norme s’est durcie, plus l’écart entre elle et la réalité s’est ensuite creusé. Alors qu’il correspondait à 100 % pour la norme Euro 3, il était de 700 % pour la norme Euro 6. Il y a donc une complicité européenne, comme nous l’ont dit beaucoup des personnes entendues. Un problème d’opacité anti-démocratique se pose aussi, du fait que des décisions politiques ont été prises en procédure de comitologie.
Nous-mêmes avons été éconduits par la Commission européenne sur la répartition des votes de chacun des États membres au sein du technical committee motor vehicles ou TCMV. Mais nous avons obtenu les renseignements par d’autres voies. Il y a tout de même une anomalie démocratique. La décision du Parlement européen de ne pas engager la procédure d’objection est une décision politique qui ne saurait clore le débat juridique sur le fait que le TCMV a excédé la compétence d’un comité technique en prenant sa décision sur le facteur de conformité au regard des particules fines. Des villes du Royaume-Uni, d’Allemagne et de France ont saisi la Cour de justice de l’Union européenne pour l’interroger sur les procédures de contrôle mises en place après l’affaire Volkswagen.
Il y a eu des échanges d’informations, mais aucun protocole commun à la base de cette procédure de test. La Commission préfère se réfugier derrière le fait que la surveillance de marché et les prérogatives d’homologation ont été confiées aux États membres. À mon sens, au vu des circonstances exceptionnelles et concernant le premier constructeur européen, l’Union européenne devait cependant pouvoir sortir de son cercle d’action habituel pour que la procédure de test soit commune à tous les États membres.
Dans notre rapport, nous formulons trois recommandations majeures. Premièrement, nous proposons l’introduction d’une norme unique. Aujourd’hui, l’Europe fonctionne comme si elle avait deux cerveaux. L’un pense au climat et aux émissions de dioxyde de carbone, l’autre se préoccupe de la pollution atmosphérique. Entre ces deux séries de problèmes, il y a un écart de calendrier et de normes.
Le système européen renvoie aux constructeurs le soin d’arbitrer entre ces différents paramètres. Nous plaidons pour qu’une nouvelle norme Euro 7 intègre tous ces paramètres. Il faudrait qu’elle soit unique et la même pour tous les carburants. Car il n’est pas possible que les normes ne soient pas les mêmes pour le diesel et pour l’essence. Il n’est pas normal qu’un véhicule diesel soit autorisé à émettre plus de NOx qu’un véhicule essence et, réciproquement, que les véhicules essence – dont les nouvelles motorisations, à injection directe, émettent beaucoup plus de particules – soient autorisés à ne pas être équipés d’un filtre à particules et à émettre dix fois plus de particules que le diesel. Vis-à-vis des constructeurs, la puissance publique doit donc redéfinir ses exigences, qui doivent devenir des exigences de résultat. Elles doivent être les mêmes pour tout véhicule thermique circulant sur les routes d’Europe.
Le constructeur doit pouvoir atteindre ce résultat avec la technologie de son choix. Cela renvoie au principe de neutralité technologique qui doit gouverner l’action de l’État et de la puissance publique.
Deuxièmement, nous plaidons pour une règle des cinq ans : les normes nouvelles seraient définitivement fixées et annoncées cinq ans à l’avance. L’adaptation aux nouvelles normes coûte 1,5 milliard d’euros à Renault, soit la totalité des marges de l’entreprise sur une année. À chaque fois qu’une norme change, il faut changer la production des usines, des chaînes de montage, remplacer jusqu’aux trois quarts des pièces d’un moteur… C’est pourquoi nous devons annoncer à l’avance les changements de norme.
Aujourd’hui, la réforme annoncée en 2007 n’a pas encore abouti à la publication des textes définitifs, alors même qu’ils devront s’appliquer dès septembre 2017… Si l’on veut faire de la norme écologique un levier de la politique industrielle, cette question du temps doit être prise en compte, en annonçant les normes cinq ans à l’avance et les objectifs cibles dix ans à l’avance. Que la Commission européenne ne commence à poser la question de la nouvelle norme en matière de dioxyde de carbone que mi-2016, dans sa communication sur la stratégie de mobilité à bas carbone, c’est tard, si cette norme doit entrer en vigueur en 2025.
Au Japon, un plan à l’horizon 2050 prévoit des objectifs intermédiaires en 2020, en 2030 et 2040. Nous-mêmes n’avons pas encore traduit l’accord de Paris en termes d’objectifs pour l’industrie automobile. Nous avons donc un besoin de planification.
Troisièmement, nous plaidons en faveur d’une agence européenne de contrôle pour éviter le contrôle à la carte. Par exemple, le groupe Daimler-Benz a obtenu en Allemagne l’homologation d’une climatisation dont la France réclame le retrait du marché. La Commission européenne a saisi sur ce sujet la Cour européenne de justice. Mais l’affaire n’est toujours pas jugée. La question cruciale porte donc sur l’articulation entre le niveau européen et le niveau des États membres. À notre sens, la certification doit relever de l’agence européenne, tandis que les États membres doivent être compétents pour effectuer les contrôles.
Nous pourrions comparer le modèle européen et le modèle américain. Certes, je n’idéalise pas ce dernier, car les normes qu’il édicte en matière de dioxyde de carbone ne sont pas satisfaisantes. Mais il repose sur l’autocontrôle ou self-control. Si la norme n’est pas respectée par cette voie, une procédure fédérale est intentée devant les tribunaux. Comme il n’y a pas de contrôle a priori, le fonctionnement est moins lourd. Cela n’empêche pas l’agence fédérale de l’environnement de tester chaque année 15 % des véhicules en circulation.
Les premières procédures de test n’ont été définies qu’après le scandale Volkswagen. Sur ce sujet, la France doit adresser un mémorandum à ses partenaires européens.
Mais, pour l’heure, tout reste comme avant. Cela n’est pas acceptable sur le plan de la santé publique, ni sur le plan de l’environnement. Cela n’est pas acceptable non plus sur le plan industriel, car cela remet en cause la crédibilité internationale des normes automobiles européennes, en concurrence avec les normes américaines. Nous aurons un jour besoin d’une norme automobile unique. Si nous ne réagissons pas, nous ne serons pas les meilleurs pour peser sur l’harmonisation mondiale de ce système normatif.
J’ai observé le travail diplomatique remarquable effectué sur la ratification de l’accord de Paris, que l’Union européenne risquait à première vue de ne pas ratifier dans les délais. Je vous propose que nous engagions sur ce dossier des normes automobiles le même travail diplomatique.
M. Jean-Luc Bleunven. Quand je vous entends dire, madame la rapporteure, qu’à la fin, rien ne se passe, je m’interroge, car il y a tout de même eu tricherie. Les procédures en cours n’ont-elles pas de chances d’aboutir ? Il en va non seulement de notre capacité à faire valoir le droit, mais aussi de son impact sur les entreprises.
La Présidente Danielle Auroi. La question de la qualité de l’air constitue un sujet d’inquiétude depuis des années, chacun reconnaissant qu’il y a un vrai danger.
De mon expérience auvergnate de responsable d’une association pour la surveillance de la qualité de l’air, j’ai retiré l’impression que l’on changeait plus volontiers, au détriment des besoins de la santé publique, les normes de qualité de l’air pour qu’elles correspondent mieux aux besoins des entreprises, qu’on ne faisait l’inverse. Tout cela est masqué sous le prétexte d’une cause certes importante – l’emploi –, que l’on met en balance avec la qualité de l’air. À la lumière de vos travaux, pourrons-nous enfin envisager cette dichotomie sous un jour nouveau ? Quant à la question de la norme unique, le risque est naturellement qu’elle soit fixée le plus bas possible, plutôt que de constituer une référence de qualité.
Madame la rapporteure, je vous suis sur les trois propositions que vous formulez. Sur la question des cinq ans à prévoir avant l’entrée en vigueur d’une norme annoncée, il est malheureusement classique qu’il n’y ait pas d’anticipation. Si une planification est sous-entendue, le terme est presque regardé comme un gros mot. Avez-vous néanmoins des choses à dire qui puissent être relayées sous un jour positif auprès du Parlement européen ? Si parlements nationaux et Parlement européen portent ensemble des propositions, nous serons en effet plus cohérents et plus efficaces.
Nous posons en fait la question des véhicules thermiques et de la façon dont on est amené à les développer. Comme vous l’avez bien dit, nous nous focalisons en effet sur le « Dieselgate ». Mais l’on oublie complètement que l’essence est aussi concernée. Des constructeurs, y compris des constructeurs français, affirment soit que les pots catalytiques règlent les problèmes environnementaux inhérents au diesel, soit que la motorisation à l’essence est plus propre que la motorisation au diesel. Mais tout moteur thermique entraîne une combustion, c’est-à-dire une forme de pollution.
Ne faut-il pas anticiper ? Ne faut-il pas, comme en Asie, questionner les constructeurs sur leurs choix de politique industrielle et sur leurs modèles de nouvelle génération ? Car leurs nouveaux véhicules n’emploient plus seulement des moteurs thermiques. J’ai l’impression que la politique se plie trop souvent aux demandes de l’industrie, et non l’inverse.
En ce qui concerne une agence européenne de contrôle, certains députés du Parlement européen ont la même volonté que vous, quoique sous une forme légèrement différente peut-être. Mais qu’en est-il de la volonté politique au Conseil, et par rebond de la Commission, de faire exister une telle entité comme entité indépendante ? Je rappelle que nous entendons souvent qu’il y a déjà trop d’agences, et que les conflits d’intérêt sont trop nombreux en leur sein – ce qui est malheureusement démontré. Que prévoyez-vous pour répondre à cela ? Comment cette nouvelle agence pourrait-elle être aussi une agence de nouvelle génération, qui échapperait aux critiques que l’on a faites aux autres ?
Mme Delphine Batho. En ce qui concerne les recours, le rapport tente de dresser un inventaire non exhaustif de l’ensemble des procédures judiciaires visant Volkswagen. Les procédures engagées aux États-Unis, par leur nombre et leur lourdeur, sont sans commune mesure avec celles qui le sont aujourd’hui en Europe.
Vous le savez, une procédure est en cours en France. Toutefois, la loi Hamon a malheureusement exclu le préjudice environnemental des motifs de l’action de groupe : celle-ci requiert un préjudice économique. Les associations de consommateurs nous ont indiqué que, du fait de cette lacune, il faut attendre de savoir si les véhicules affectés par le logiciel truqueur perdront de la valeur sur le marché de l’occasion, ou s’ils seront techniquement moins performants après la mise en conformité, avant de pouvoir faire éventuellement valoir un préjudice économique ouvrant la voie à une action de groupe. Notre rapport préconise de modifier la loi Hamon sur ce point. Cela a été fait, mais partiellement et de manière imparfaite, par la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle.
Du point de vue politique, qui n’est pas sans conséquences juridiques, il paraît choquant que les autorités européennes et françaises n’aient pas réagi beaucoup plus fortement à ce qui constitue bien une violation de la réglementation européenne, en l’espèce de la norme Euro 5. Il est faux de dire que cette norme, concernant les NOx, a été respectée. Je rappelle par ailleurs que la réglementation européenne interdit formellement tout dispositif d’invalidation et que les dérogations prévues ne peuvent en aucun cas s’appliquer à un logiciel truqueur qui a pour but d’induire en erreur le protocole d’homologation, comme le logiciel de Volkswagen ou comme celui qui a été découvert chez Fiat et qui fait fonctionner le système de traitement des émissions polluantes pendant vingt-deux minutes, sachant que le test dure vingt minutes. C’est parfaitement illégal.
Il existe en revanche un débat sur la légalité d’autres dispositifs d’invalidation, qui réglaient le système de traitement des émissions polluantes sur les mêmes points de fonctionnement du moteur ou sur la même température que ceux du protocole d’essais. Leur conformité à la réglementation actuelle doit être appréciée par la justice au cas par cas. Il paraît néanmoins très désuet que la réglementation européenne continue en 2016 de comporter une autorisation de dérogation qui y a été introduite en 1998 : aujourd’hui, un constructeur automobile peut faire fonctionner un système de traitement des émissions polluantes en permanence sans risque de casse moteur. Il est incroyable que l’on exploite des textes juridiques correspondant à un état de l’art technologique aujourd’hui caduc pour passer entre les mailles du filet et contourner les exigences de la réglementation – avec le plein assentiment de la Commission européenne.
La proposition d’un nouveau règlement par la Commission européenne a le mérite d’exister et opère d’indéniables progrès par rapport au texte actuel, mais elle reste très imparfaite : comme d’habitude, on ajoute un étage à une réglementation dont les bases sont vacillantes au lieu de résoudre entièrement le problème. En particulier, la distinction entre ce qui relève respectivement des États membres et de l’Union n’est pas clarifiée, alors qu’il s’agit d’une question majeure.
En matière de santé publique, des progrès ont été accomplis : sans les normes, sans la réglementation européenne avec toutes ses imperfections, la différence, incontestable, entre un diesel Euro 1 et un diesel Euro 6 n’existerait pas. Du point de vue écologique, ce ne sont pas les nouveaux modèles qui posent le plus gros problème dans notre pays – en dépit de leurs défauts, du fait qu’ils émettent encore trop de NOx, etc. –, mais les 61 % de véhicules diesel en circulation en France qui ne sont pas équipés d’un filtre à particules. L’accélération du renouvellement du parc est le levier principal d’une lutte efficace contre la pollution. C’est l’objet de la troisième partie du rapport.
Toutefois, les progrès plafonnent depuis Euro 4, d’autant que tous les constructeurs n’ont pas fait les mêmes choix d’investissement. Ainsi, PSA a installé des filtres à particules avant que cela ne soit obligatoire, a inventé et déployé la SCR (« selective catalytic reduction »), la technologie la plus efficace de traitement des NOx. Aujourd’hui, ces technologies sont généralisées. Sont-elles parfaites ? Non. Ont-elles définitivement résolu le problème des NOx ? Pas davantage. Mais il faut reconnaître les efforts réalisés.
En ce qui concerne l’articulation entre emploi et santé publique et le chantage à l’emploi, la réalité industrielle ne peut pas être balayée d’un revers de main. Mais quand, par conservatisme, l’État enterre le premier rapport qui, en 1997, sonne l’alarme sur les liens entre diesel et cancer, quand, en 2012, l’Organisation mondiale de la santé classe les particules diesel parmi les cancérigènes mais que tout continue comme avant sous prétexte de ne pas menacer l’avenir du secteur, cela n’aide pas l’industrie automobile à se préparer à des évolutions telles que la violente décrue des ventes de véhicules diesel aux particuliers que l’on observe aujourd’hui en France.
De ce point de vue, la règle des cinq ans est la seule manière d’articuler et même de faire converger la poursuite d’un objectif de santé publique et celle d’un objectif industriel – donc social, car il y va de l’emploi –, la reconstruction industrielle de la France. Sur ce point, et c’est l’un des enseignements marquants de nos travaux, tous sont d’accord : l’industrie automobile, les organisations non gouvernementales ; la démarche paraît crédible et réaliste à tout le monde.
Nous nous sommes rendus dans la première usine de moteurs diesel au monde, à Trémery, en Lorraine, dont il ne faut jamais oublier qu’elle a été créée pour « compenser » la crise de la sidérurgie. PSA y a investi dans des chaînes de motorisation essence et l’usine va accueillir des chaînes de production de moteurs électriques, ce qui témoigne d’une démarche de diversification. Mais l’on ne peut pas changer du jour au lendemain les règles du jeu ; il y faut du temps.
C’est également nécessaire dans la mesure où l’un des gros problèmes auxquels les constructeurs français sont confrontés est le financement de la recherche et développement. L’avenir appartient à ceux qui misent sur la R&D. Lors de la crise de 2008-2009, alors que le secteur automobile connaissait une véritable hécatombe, les équipementiers français ont fait le choix judicieux de ne pas réduire leurs budgets de R&D mais, au contraire, de les accroître. Ce pari de l’innovation leur permet de bénéficier aujourd’hui de taux de croissance stupéfiants. Nous devons donc aider nos constructeurs à augmenter leurs budgets de R&D.
À condition de se donner cinq ans et de soutenir la R&D, on peut faire accepter une norme ambitieuse et exigeante, car elle ne pose alors plus de problèmes de compétitivité ni d’emploi.
J’en viens à la focalisation sur le diesel au détriment de l’essence et à la nécessité d’envisager d’autres technologies que le moteur thermique. Pour moi, les informations les plus récentes sur les nouvelles motorisations essence modifient radicalement le débat sur le diesel. J’ai demandé à Transport & Environment, l’ONG européenne la plus en pointe dans la lutte contre la pollution automobile, s’il fallait interdire le diesel ; elle m’a répondu que non : il faut des normes exigeantes, les mêmes pour l’essence et pour le diesel, mais il ne faut pas laisser croire que l’essence serait plus vertueuse que le diesel.
Il convient d’en revenir à une différenciation selon les usages. Le diesel est adapté quand on roule 18 000 à 25 000 kilomètres par an, mais, selon l’association Diésélistes de France elle-même, « rouler en Twingo diesel pour faire cinq kilomètres par jour est une aberration », non seulement écologique, mais économique. Ce ne sont pas seulement les informations environnementales qui ont entraîné la décrue des ventes de véhicules diesel en France, mais aussi les publications de l’UFC-Que Choisir ou d’Auto Plus comparant le coût d’usage kilométrique des véhicules. Il faut donc rompre avec la diésélisation massive sans nécessairement interdire le diesel. Nous demandons dans le rapport que chaque consommateur qui achète une voiture soit informé du coût d’usage kilométrique du véhicule, afin de pouvoir opter pour la technologie de motorisation adaptée à l’usage qu’il va en faire.
Vous l’avez très bien dit, madame la présidente : le véritable enjeu n’est pas le passage du diesel à l’essence, mais le passage des énergies fossiles aux véhicules zéro émission et aux véhicules propres. Le rapport consacre à ce sujet une longue partie qui insiste sur l’électrification des transports et sur l’hydrogène. Le véhicule électrique est une technologie mature, de plus en plus compétitive, dont les ventes commencent à décoller. Quant à l’hydrogène, la France s’en est trop longtemps désintéressée alors que l’Allemagne, le Japon, la Californie, le Danemark ont lancé d’importants programmes, paradoxalement soutenus par une grande entreprise française, Air Liquide. Nous devons développer des flottes captives fonctionnant à l’hydrogène, qui nous fournira sans doute le véhicule électrique longue distance, car doté d’une longue autonomie. Cela dit, s’agissant des voitures électriques, il faut noter l’annonce par Renault du doublement de l’autonomie des batteries de la Zoé.
Et l’évolution va s’accélérer. Si nous sommes en retard sur les objectifs du plan Borloo de 2009, soit deux millions de véhicules électriques en 2020, en revanche la Commission européenne se montre insuffisamment ambitieuse et sous-estime la rapidité des changements du secteur lorsqu’elle vise 17 % de véhicules zéro émission dans l’Union en 2030.
Le problème industriel sous-jacent est celui des batteries, qui concentrent la moitié de la valeur ajoutée d’un véhicule électrique. Lorsque nous accordons un bonus de 10 000 euros pour l’achat d’un véhicule électrique – et ce soutien de l’État reste indispensable au développement du marché –, nous ne nous demandons pas où va la valeur ajoutée industrielle de cette production. L’Europe et la France doivent s’intéresser à l’industrie européenne des batteries ; c’est un enjeu stratégique majeur. Si nous ne voulons pas verser plus tard des larmes de crocodile sur la désindustrialisation de la France, nous devons dès à présent nous interroger sur ce que sera la filière industrielle du « coup d’après » et prendre les décisions nécessaires.
En ce qui concerne les véhicules thermiques, j’aimerais insister sur la notion de neutralité technologique en matière fiscale. L’État n’a aucune raison de prévoir une fiscalité différente dès lors que l’on en revient à une logique de différenciation selon les usages. Ce problème est également pointé au niveau européen.
S’agissant de l’agence européenne, j’ai entamé ce travail sans idée préconçue et ma proposition n’a rien d’un mot d’ordre ni d’un slogan. J’ai d’abord pensé que l’enjeu principal était la procédure d’homologation – donc, pour la France, la réforme de l’UTAC. Toutefois, chemin faisant, j’ai acquis la conviction que le problème premier, en Europe comme en France, est l’absence de contrôle aléatoire des véhicules en circulation. La réglementation européenne actuelle permet à la France d’instaurer sans attendre un tel contrôle ; le rapport propose donc un projet de loi tendant à créer une sorte de bureau d’enquêtes et d’analyses de la pollution des véhicules. Le mieux serait toutefois de le faire au niveau européen.
J’étais réticente à cause des problèmes de conflits d’intérêts que posent les agences européennes dans le domaine des pesticides ou des produits chimiques, mais j’en ai trouvé d’autres, peut-être moins connues, qui, à ma connaissance, ne s’exposent pas à cette critique, comme l’Agence européenne de la sécurité aérienne, une agence technique. Je n’imagine pas une administration pléthorique, mais une instance de mission dont le rôle serait très précisément défini et l’indépendance garantie, afin que ses décisions soient indiscutables.
Enfin, adopter une seule norme, ce ne peut être choisir la moins exigeante, madame la présidente, puisque l’on part de l’existant. Ce qui m’intéresse, je le répète, c’est le coup d’après : il faut débattre aujourd’hui de ce que sera la norme Euro 7. On ne peut plus accepter qu’une norme soit déclinée comme l’a été Euro 6 avec Euro 6 a, b, c, d, et bientôt e et f : personne n’y comprend plus rien. Quand on parle de la norme Euro 6 pour l’essence, on ne sait pas s’il s’agit de la version qui autorise l’émission de dix fois plus de particules que pour le diesel ou de la suivante, selon laquelle la quantité de particules autorisée est la même que pour le diesel, ce qui implique que les moteurs à essence intègrent un filtre à particules. C’est illisible pour le consommateur.
Il faut donc penser à l’étape ultérieure et en profiter pour refondre le système, ce qui requiert un changement radical s’agissant du CO2. Actuellement, en effet, l’évaluation porte sur la masse globale de la flotte des constructeurs, ce qui handicape l’industrie française, celle qui a fait le plus d’efforts, par rapport à son homologue allemande, celle qui en a fait le moins. Cela ne peut pas continuer ainsi.
La Présidente Danielle Auroi. Merci beaucoup.
Je souhaite, je le répète, que ce travail très important débouche sur une proposition de résolution européenne que nous pourrions transmettre à la commission compétente au fond, afin d’exprimer la position de l’Assemblée nationale sur le sujet. Votre audition devant le Parlement européen, prévue la semaine prochaine, vous donnera l’occasion de souligner et de clarifier tel ou tel point. Notre proposition nous permettra de contribuer à donner corps à l’Union européenne dans ce qu’elle a de plus vertueux.
Mme Delphine Batho. Nous avons évoqué ensemble cette idée, qui me paraît essentielle compte tenu du statu quo qui paraît être en train de s’installer. Les conclusions de la commission d’enquête du Parlement européen seront déterminantes pour la suite. Mais il est très important que le Parlement français fasse lui aussi entendre sa voix, notamment pour les raisons suivantes, que je n’ai pas détaillées dans mon propos liminaire.
Les dérogations à l’interdiction des dispositifs d’invalidation doivent être proscrites. Or la proposition franco-allemande en cours de rédaction ne vise qu’à les limiter.
Second exemple : l’homologation des logiciels. Nous sommes à cet égard dans une situation invraisemblable : contrairement à ceux qu’utilisent les secteurs de l’aviation et de la santé, les logiciels qui équipent les voitures ne sont pas homologués ; ce sont des sortes de boîtes noires que personne ne contrôle. Au vu du scandale qui touche aujourd’hui les logiciels truqueurs en matière d’émissions polluantes, on imagine ce qui pourrait se passer demain si l’on commençait à constater des accidents de la circulation ou des problèmes de sécurité dans des véhicules autonomes utilisant des logiciels ou des systèmes d’intelligence artificielle qui ne peuvent jamais être contrôlés par la puissance publique. Ce serait inadmissible. Ce point devra lui aussi figurer dans notre future résolution.
Enfin, ce qui importe dans le travail que nous avons mené, c’est l’unanimité à laquelle nous sommes parvenus et qui ne donne que plus de force à nos conclusions. Cette unanimité n’a pas été le fruit d’un compromis sur le plus petit dénominateur commun : au fil des auditions et des déplacements, nous avons construit une vision partagée de l’action à mener pour l’avenir de l’industrie automobile, pour une industrie automobile du XXIe siècle.
La Présidente Danielle Auroi. Plusieurs de nos collègues du Parlement européen y travaillent parallèlement ; je songe notamment à Karima Delli. Nous allons donc pousser les feux, conformément à notre rôle. Merci encore pour votre excellent travail. »
La Commission s’est réunie le 18 janvier 2017, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner la présente proposition de résolution européenne.
L’exposé de la rapporteure a été suivi d’un débat.
« La Présidente Danielle Auroi. L’actualité récente, concernant par exemple le groupe Renault, pris si je puis dire « les doigts dans le pot de confiture », justifie – si besoin en était encore – l’examen de cette proposition de résolution européenne par notre commission !
M. Jean-Louis Roumegas. Je soutiens pleinement cette proposition de résolution, qui va dans le sens des conclusions, à l’été 2016, du comité d’évaluation et de contrôle sur l’évaluation des politiques publiques de lutte contre la pollution de l’air, dont j’étais le co-rapporteur, et je vous propose d’ailleurs avec un amendement d’intégrer ce rapport à la liste des visas.
Ce cadre de régulation présente aujourd’hui de nombreuses anomalies, entre des mesures des émissions faites dans des conditions artificielles, l’absence d’intégration de tous les paramètres de pollution, des politiques fiscales incitatives conçues de manière trop restrictive en ne prenant en compte que le seul critère du CO2, des règles européennes sur l’étiquetage qui empêche un État membre d’être volontariste en matière d’information du consommateur, etc.
Il faut en effet une agence européenne qui puisse garantir la véracité des annonces des constructeurs.
M. Arnaud Richard. Le rôle de notre commission n’est pas de clouer au pilori notre constructeur national, soyons plus mesurés dans nos propos !
Certaines de vos propositions – pour certaines très techniques, pour nous qui ne sommes pas des spécialistes – me laissent perplexe, comme celle relative au caractère contractuel des données d’émissions – qui me semble être un vœu pieux – ou bien la création d’une énième agence européenne, comme si c’était la solution miracle à chaque problème. Je m’abstiendrai donc au moment du vote.
Mme Delphine Batho, rapporteure. Je suis bien entendue favorable au rajout de la mention du rapport d’évaluation des politiques publiques de lutte contre la pollution de l’air. La pollution de l’air est la troisième cause de mortalité en France, sans que la prise de conscience soit à la hauteur des enjeux il me semble.
S’agissant des conditions de tests, une réforme des procédures est en cours, dont on peut regretter d’ailleurs que, tout en rapprochant les conditions de tests des situations de conduite réelle, elle entraine aussi une modification des seuils limites d’émission. Mise en œuvre par le biais de la procédure de comitologie, cette réforme excède les pouvoirs d’exécution de la Commission car elle modifie une décision du législateur européen.
Sur la question des clauses contractuelles, je veux d’abord souligner la fausseté de l’argumentation du groupe Volkswagen : ce dernier ne respecte pas la norme Euro 5.
Il y a en effet une différence entre l’Europe et les États-Unis : la première ne prend en considération que le CO2. La prise en compte de l’ensemble des polluants dans ces données est bien un enjeu fondamental pour la prise en compte d’un préjudice.
Le vocabulaire de cette résolution est en effet technique, ces dispositifs d’invalidation, ce sont les « logiciels truqueurs ». Les dérogations permises le sont depuis 1998 ; aujourd’hui, en 2017, il existe des systèmes de traitement des pollutions qui ne menacent pas les moteurs ! Il faut donc absolument mettre à jour la réglementation européenne sur ce point pour mettre fin à ce que certains ont pu appeler une « tricherie légale ».
La norme Euro 6 se décompose en une multitude de seuils. De surcroit, essence et diesel sont traités de manière différente (avec un niveau de particules autorisé supérieur pour la première, et plus de NOx permis pour le second). Une conclusion importante du rapport d’information est la demande d’une « neutralité technologique » : le régulateur, national comme européen, doit fixer un objectif et ne plus biaiser les choix des constructeurs. Cela suppose aussi une neutralité fiscale, c’est ce que la France a engagé.
Quant à l’agence, je la conçois comme une unité légère, de mission, comme il en existe dans d’autres domaines. Elle est indispensable, car la Commission manque d’outils, et les réticences sont fortes, comme l’a montré cette procédure de comitologie.
Pour réellement améliorer le cadre européen de régulation, il faut un changement complet de philosophie, avec des tests aléatoires sur des modèles en circulation.
La Présidente Danielle Auroi. Nous allons passer à l’examen des amendements, dont le quatrième a déjà été présenté et sur lequel la rapporteure a donné un avis favorable.
Mme Delphine Batho, rapporteure. Les amendements 1 et 3 complètent la liste des visas, tandis que l’amendement 2 rectifie une erreur matérielle.
La Présidente Danielle Auroi. Je mets aux voix successivement ces quatre amendements.
Les amendements sont adoptés.
La Présidente Danielle Auroi. Je mets aux voix la proposition de résolution ainsi modifiée.
La commission a adopté la proposition de résolution. »
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE INITIALE
L’Assemblée nationale,
Vu l’article 88-4 de la Constitution,
Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment ses articles 191 et 192,
Vu le règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007 relatif à la réception des véhicules à moteur au regard des émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 5 et Euro 6) et aux informations sur la réparation et l’entretien des véhicules,
Vu la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 septembre 2007 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules (directive cadre),
Vu la directive 2001/81/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2001 fixant des plafonds d’émission nationaux pour certains polluants atmosphériques,
Vu la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe,
Vu le règlement (CE) n° 443/2009 du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 établissant les normes de performance en matière d’émissions pour les voitures particulières neuves dans le cadre de l’approche intégrée de la Communauté visant à réduire les émissions de CO2 des véhicules légers,
Vu le règlement (UE) n° 333/2014 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2014 modifiant le règlement (CE) n° 443/2009 en vue de définir les modalités permettant d’atteindre l’objectif de 2020 en matière de réduction des émissions de CO2 des voitures particulières neuves,
Vu le règlement (CE) n° 692/2008 de la Commission du 18 juillet 2008 portant application et modification du règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil relatif à la réception des véhicules à moteur au regard des émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 5 et Euro 6) et aux informations sur la réparation et l’entretien des véhicules,
Vu le règlement (UE) n° 459/2012 de la Commission du 29 mai 2012 modifiant le règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil ainsi que le règlement (CE) n° 692/2008 de la Commission en ce qui concerne les émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 6), Vu le règlement (UE) 2016/427 de la Commission du 10 mars 2016 portant modification du règlement (CE) n° 692/2008 en ce qui concerne les émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 6),
Vu le règlement (UE) 2016/646 de la Commission du 20 avril 2016 portant modification du règlement (CE) n° 692/2008 en ce qui concerne les émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 6),
Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules à moteur et de leurs remorques, ainsi que des systèmes, composants et entités techniques distinctes destinés à ces véhicules, du 27 janvier 2016 (COM(2016)31 final),
Vu la décision du Parlement européen du 17 décembre 2015 sur la constitution, les attributions, la composition numérique et la durée du mandat de la commission d’enquête sur la mesure des émissions dans le secteur de l’automobile (2015/3037/(RSO)),
Vu les conclusions adoptées le 27 octobre 2015 par la Commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale sur les mesures des émissions de polluants atmosphériques dans le secteur automobile,
Vu la résolution européenne sur la révision des procédures de mesure des émissions de polluants atmosphériques automobiles, considérée comme définitive en application de l’article 151 7 du Règlement par l’Assemblée nationale, le 26 février 2016 (T.A. 684),
Vu le rapport d’information n° 4109 « Écologie automobile : une alliance française », déposé le 12 octobre 2016 au nom de la mission d’information sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale, instituée par la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale le 6 octobre 2015,
Considérant que la découverte, aux États Unis, d’une fraude, mise en œuvre à une échelle mondiale par l’entreprise Volkswagen pour tromper les protocoles de tests mesurant les émissions de NOx a mis en évidence la faillite du système européen d’élaboration des normes, de régulation et de surveillance du marché automobile ;
Considérant que la Commission européenne s’est engagée à présenter un ensemble de mesures, dit paquets RDE pour « Real Driving Emissions », destiné à mesurer les émissions polluantes en conditions de conduite réelle ;
Considérant que dans le cadre de la procédure de comitologie relative à l’adoption du deuxième paquet RDE, le 28 octobre 2015, a été autorisé dans des conditions de transparence insatisfaisante un dépassement de plus de 110 % des limites des émissions polluantes votées par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ;
Considérant que le « Dieselgate » a mis en lumière l’absence de volonté politique conjuguée de la Commission européenne et des États membres de pallier les insuffisances, connues depuis des années, de la règlementation européenne ;
Considérant que le Parlement européen a décidé le 17 décembre 2015 de constituer une commission d’enquête sur la mesure des émissions dans le secteur de l’automobile ;
Considérant que la Commission européenne a présenté le 27 janvier 2016 une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules à moteur et de leurs remorques, ainsi que des systèmes, composants et entités techniques distinctes destinés à ces véhicules, afin de remédier aux défaillances relatives à l’homologation des véhicules en accordant davantage de pouvoirs à la Commission européenne et aux États membres ;
Considérant que la mission d’information de l’Assemblée nationale sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale a mis en évidence la faillite globale des systèmes européens de contrôle et d’élaboration des normes dans le secteur automobile ;
Considérant que les conclusions de la mission d’information précitée, présentées dans le rapport n° 4109 « Écologie automobile : une alliance française », appellent à une réforme radicale du système européen de contrôle et d’élaboration des normes pour mettre fin aux errements hérités du passé et ainsi rétablir un pacte de confiance pour l’avenir d’ailleurs bénéfique à la compétitivité de l’ensemble de l’industrie automobile européenne ;
Considérant que depuis la parution du rapport précité, non seulement les défaillances et les errances dénoncées par le rapport demeurent mais des soupçons de nouvelles fraudes se font jour, notamment en ce qui concerne le respect des émissions de CO2 ;
Considérant que les défaillances actuelles du contrôle des émissions polluantes ont de lourdes incidences sur la santé des Européens et notamment sur l’espérance de vie des populations les plus fragiles ;
Considérant que l’absence de transparence dans le processus d’élaboration des normes européennes ainsi que leur non respect entachent la crédibilité du législateur européen ;
Considérant que l’instabilité et le désordre normatifs sont préjudiciables à la compétitivité de l’industrie automobile européenne ;
1. Salue la création par le Parlement européen de la commission d’enquête (EMIS) chargée de faire toute la lumière sur les violations du droit de l’Union européenne et attend avec intérêt la publication de ses conclusions ;
2. Demande à la Commission européenne une intervention plus déterminée à l’égard du groupe Volkswagen afin que les consommateurs européens puissent être indemnisés dans des conditions comparables à celles des consommateurs américains pour un préjudice identique et résultant de l’intégration volontaire d’un « logiciel truqueur » dans les véhicules commercialisés pendant plusieurs années par différentes marques de ce groupe ;
3. Juge nécessaire une réforme d’ampleur du cadre règlementaire européen actuellement en vigueur afin de tirer toutes les conséquences de la faillite du système européen de régulation, de surveillance et d’élaboration des normes ;
4. Appelle ainsi la Commission européenne et les États membres à prendre les mesures qui s’imposent afin :
– de mettre un terme à une situation dans laquelle certains seuils d’exposition aux polluants retenus par la réglementation européenne demeurent supérieurs aux valeurs limites définies par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS),
– d’interdire explicitement les pratiques dites d’« optimisation » mises en œuvre par les constructeurs au titre des protocoles d’homologation, en formalisant une liste complète des pratiques qu’il convient de proscrire,
– d’interdire expressément tout dispositif d’invalidation en supprimant toutes les dérogations existantes à cette interdiction,
– de rendre obligatoire l’homologation des logiciels, appelés à prendre une importance majeure avec les développements technologiques des véhicules connectés et autonomes,
– d’ouvrir une enquête sur l’utilisation du « AdBlue Emulator Box » logiciel truqueur destiné à mettre hors service le système de traitement des NOx sur les camions, et qui est en vente libre sur internet,
– de renforcer les droits des consommateurs en obligeant les constructeurs à rendre contractuelles les données relatives aux émissions ;
5. Demande à la Commission européenne de présenter une réforme radicale pour refonder le système d’élaboration des normes et de contrôle autour de trois propositions majeures :
– élaborer une nouvelle norme Euro, unique et multicritères car intégrant tous les paramètres de pollution à l’émission, qui respecte le principe de neutralité technologique ;
– respecter un délai de cinq ans minimum avant l’entrée en vigueur d’une nouvelle norme environnementale applicable au secteur automobile, et énoncer dix ans à l’avance un objectif cible pour les progrès à accomplir ;
– créer une Agence européenne indépendante en charge de la surveillance de marché et du contrôle de conformité des véhicules en circulation, des procédures de sanctions en cas de non conformité, ainsi que de l’agrément des services techniques désignés par les autorités nationales d’homologation pour garantir le respect de standards de qualité.
AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION
AMENDEMENT |
No 1 |
présenté par |
Mme Delphine Batho, rapporteure |
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ARTICLE UNIQUE
Après l’alinéa 7, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Vu la directive (UE) 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques, modifiant la directive 2003/35/CE et abrogeant la directive 2001/81/CE, »
EXPOSÉ SOMMAIRE
Incluse dans le paquet « qualité de l'air » présenté en 2013 par la Commission européenne, la directive révisant la directive de 2001 sur les plafonds d'émission nationaux pour certains polluants atmosphériques – qui concerne partiellement l’industrie automobile –, publiée au JOUE du 17 décembre 2016, prévoit de nouveaux engagements nationaux de réduction des émissions applicables d’ici 2030 pour cinq des principaux polluants : le dioxyde de soufre (SO2), les oxydes d'azote (NOx), les composés organiques volatils hors méthane (COV), l'ammoniac (NH3) et les particules fines.
AMENDEMENT |
No 2 |
présenté par |
Mme Delphine Batho, rapporteure |
----------
ARTICLE UNIQUE
Remplacer l’alinéa 11 par deux alinéas ainsi rédigés :
« Vu le règlement (UE) n° 459/2012 de la Commission du 29 mai 2012 modifiant le règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil ainsi que le règlement (CE) n° 692/2008 de la Commission en ce qui concerne les émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 6),
« Vu le règlement (UE) n° 2016/427 de la Commission du 10 mars 2016 portant modification du règlement (CE) n° 692/2008 en ce qui concerne les émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 6), »
EXPOSÉ SOMMAIRE
Rectification d’une erreur matérielle.
AMENDEMENT |
No 3 |
présenté par |
Mme Delphine Batho, rapporteure |
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ARTICLE UNIQUE
Après l’alinéa 12, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (CE) n° 715/2007 et (CE) n° 595/2009 en ce qui concerne la réduction des émissions polluantes des véhicules routiers du 31 janvier 2014 (COM(2014) 28 final), »
EXPOSÉ SOMMAIRE
Amendement visant à préciser l’étendue de la révision proposée par la Commission européenne du cadre général applicable à la réception européenne des véhicules automobiles.
AMENDEMENT |
No 4 |
présenté par |
M. Jean-Louis Roumégas |
----------
ARTICLE UNIQUE
Après l’alinéa 16, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Vu le rapport d’information n° 3772 sur l’évaluation des politiques publiques de lutte contre la pollution de l’air, déposé le 19 mai 2016 au nom du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, »
EXPOSÉ SOMMAIRE
Le CEC a été missionné pour évaluer, avec le concours de la Cour des comptes, l’état de nos politiques en faveur de la qualité de l’air et a rendu ses conclusions au printemps 2016. Ses travaux viennent s’inscrire en complément de ceux menés par la mission d’information sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale. C’est pourquoi il est proposé de mentionner ce rapport dans les considérants de cette proposition de résolution européenne.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE
ADOPTÉE PAR LA COMMISSION
L’Assemblée nationale,
Vu l’article 88-4 de la Constitution,
Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment ses articles 191 et 192,
Vu le règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007 relatif à la réception des véhicules à moteur au regard des émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 5 et Euro 6) et aux informations sur la réparation et l’entretien des véhicules,
Vu la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 septembre 2007 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules (directive cadre),
Vu la directive 2001/81/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2001 fixant des plafonds d’émission nationaux pour certains polluants atmosphériques,
Vu la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe,
Vu la directive (UE) 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques, modifiant la directive 2003/35/CE et abrogeant la directive 2001/81/CE,
Vu le règlement (CE) n° 443/2009 du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 établissant les normes de performance en matière d’émissions pour les voitures particulières neuves dans le cadre de l’approche intégrée de la Communauté visant à réduire les émissions de CO2 des véhicules légers,
Vu le règlement (UE) n° 333/2014 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2014 modifiant le règlement (CE) n° 443/2009 en vue de définir les modalités permettant d’atteindre l’objectif de 2020 en matière de réduction des émissions de CO2 des voitures particulières neuves,
Vu le règlement (CE) n° 692/2008 de la Commission du 18 juillet 2008 portant application et modification du règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil relatif à la réception des véhicules à moteur au regard des émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 5 et Euro 6) et aux informations sur la réparation et l’entretien des véhicules,
Vu le règlement (UE) n° 459/2012 de la Commission du 29 mai 2012 modifiant le règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil ainsi que le règlement (CE) n° 692/2008 de la Commission en ce qui concerne les émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 6),
Vu le règlement (UE) n° 2016/427 de la Commission du 10 mars 2016 portant modification du règlement (CE) n° 692/2008 en ce qui concerne les émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 6),
Vu le règlement (UE) n° 2016/646 de la Commission du 20 avril 2016 portant modification du règlement (CE) n° 692/2008 en ce qui concerne les émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 6),
Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (CE) n° 715/2007 et (CE) n° 595/2009 en ce qui concerne la réduction des émissions polluantes des véhicules routiers, du 31 janvier 2014 (COM(2014) 28 final),
Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules à moteur et de leurs remorques, ainsi que des systèmes, composants et entités techniques distinctes destinés à ces véhicules, du 27 janvier 2016 (COM(2016) 31 final),
Vu la décision du Parlement européen du 17 décembre 2015 sur la constitution, les attributions, la composition numérique et la durée du mandat de la commission d’enquête sur la mesure des émissions dans le secteur de l’automobile (2015/3037/(RSO)),
Vu les conclusions adoptées le 27 octobre 2015 par la Commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale sur les mesures des émissions de polluants atmosphériques dans le secteur automobile,
Vu la résolution européenne sur la révision des procédures de mesure des émissions de polluants atmosphériques automobiles, considérée comme définitive en application de l’article 151 7 du Règlement par l’Assemblée nationale, le 26 février 2016 (T.A. 684),
Vu le rapport d’information n° 3772 sur l’évaluation des politiques publiques de lutte contre la pollution de l’air, déposé le 19 mai 2016 au nom du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques,
Vu le rapport d’information n° 4109 « Écologie automobile : une alliance française », déposé le 12 octobre 2016 au nom de la mission d’information sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale, instituée par la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale le 6 octobre 2015,
Considérant que la découverte, aux États Unis, d’une fraude, mise en œuvre à une échelle mondiale par l’entreprise Volkswagen pour tromper les protocoles de tests mesurant les émissions de NOx a mis en évidence la faillite du système européen d’élaboration des normes, de régulation et de surveillance du marché automobile ;
Considérant que la Commission européenne s’est engagée à présenter un ensemble de mesures, dit paquets RDE pour « Real Driving Emissions », destiné à mesurer les émissions polluantes en conditions de conduite réelle ;
Considérant que dans le cadre de la procédure de comitologie relative à l’adoption du deuxième paquet RDE, le 28 octobre 2015, a été autorisé dans des conditions de transparence insatisfaisantes un dépassement de plus de 110 % des limites des émissions polluantes votées par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ;
Considérant que le « Dieselgate » a mis en lumière l’absence de volonté politique conjuguée de la Commission européenne et des États membres de pallier les insuffisances, connues depuis des années, de la règlementation européenne ;
Considérant que le Parlement européen a décidé le 17 décembre 2015 de constituer une commission d’enquête sur la mesure des émissions dans le secteur de l’automobile ;
Considérant que la Commission européenne a présenté le 27 janvier 2016 une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules à moteur et de leurs remorques, ainsi que des systèmes, composants et entités techniques distinctes destinés à ces véhicules, afin de remédier aux défaillances relatives à l’homologation des véhicules en accordant davantage de pouvoirs à la Commission européenne et aux États membres ;
Considérant que la mission d’information de l’Assemblée nationale sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale a mis en évidence la faillite globale des systèmes européens de contrôle et d’élaboration des normes dans le secteur automobile ;
Considérant que les conclusions de la mission d’information précitée, présentées dans le rapport n° 4109 « Écologie automobile : une alliance française », appellent à une réforme radicale du système européen de contrôle et d’élaboration des normes pour mettre fin aux errements hérités du passé et ainsi rétablir un pacte de confiance pour l’avenir d’ailleurs bénéfique à la compétitivité de l’ensemble de l’industrie automobile européenne ;
Considérant que depuis la parution du rapport précité, non seulement les défaillances et les errances dénoncées par le rapport demeurent mais des soupçons de nouvelles fraudes se font jour, notamment en ce qui concerne le respect des émissions de CO2 ;
Considérant que les défaillances actuelles du contrôle des émissions polluantes ont de lourdes incidences sur la santé des Européens et notamment sur l’espérance de vie des populations les plus fragiles ;
Considérant que l’absence de transparence dans le processus d’élaboration des normes européennes ainsi que leur non respect entachent la crédibilité du législateur européen ;
Considérant que l’instabilité et le désordre normatifs sont préjudiciables à la compétitivité de l’industrie automobile européenne ;
1. Salue la création par le Parlement européen de la commission d’enquête (EMIS) chargée de faire toute la lumière sur les violations du droit de l’Union européenne et attend avec intérêt la publication de ses conclusions ;
2. Demande à la Commission européenne une intervention plus déterminée à l’égard du groupe Volkswagen afin que les consommateurs européens puissent être indemnisés dans des conditions comparables à celles des consommateurs américains pour un préjudice identique et résultant de l’intégration volontaire d’un « logiciel truqueur » dans les véhicules commercialisés pendant plusieurs années par différentes marques de ce groupe ;
3. Juge nécessaire une réforme d’ampleur du cadre règlementaire européen actuellement en vigueur afin de tirer toutes les conséquences de la faillite du système européen de régulation, de surveillance et d’élaboration des normes ;
4. Appelle ainsi la Commission européenne et les États membres à prendre les mesures qui s’imposent afin :
– de mettre un terme à une situation dans laquelle certains seuils d’exposition aux polluants retenus par la réglementation européenne demeurent supérieurs aux valeurs limites définies par l’Organisation mondiale de la Santé,
– d’interdire explicitement les pratiques dites d’« optimisation » mises en œuvre par les constructeurs au titre des protocoles d’homologation, en formalisant une liste complète des pratiques qu’il convient de proscrire,
– d’interdire expressément tout dispositif d’invalidation en supprimant toutes les dérogations existantes à cette interdiction,
– de rendre obligatoire l’homologation des logiciels, appelés à prendre une importance majeure avec les développements technologiques des véhicules connectés et autonomes,
– d’ouvrir une enquête sur l’utilisation du « AdBlue Emulator Box » logiciel truqueur destiné à mettre hors service le système de traitement des NOx sur les camions, et qui est en vente libre sur internet,
– de renforcer les droits des consommateurs en obligeant les constructeurs à rendre contractuelles les données relatives aux émissions ;
5. Demande à la Commission européenne de présenter une réforme radicale pour refonder le système d’élaboration des normes et de contrôle autour de trois propositions majeures :
– élaborer une nouvelle norme Euro, unique et multicritères car intégrant tous les paramètres de pollution à l’émission, qui respecte le principe de neutralité technologique ;
– respecter un délai de cinq ans minimum avant l’entrée en vigueur d’une nouvelle norme environnementale applicable au secteur automobile, et énoncer dix ans à l’avance un objectif cible pour les progrès à accomplir ;
– créer une agence européenne indépendante en charge de la surveillance de marché et du contrôle de conformité des véhicules en circulation, des procédures de sanctions en cas de non conformité, ainsi que de l’agrément des services techniques désignés par les autorités nationales d’homologation pour garantir le respect de standards de qualité.
MOTION FOR A EUROPEAN RESOLUTION
The National Assembly,
Having regard to article 88-4 of the Constitution,
Having regard to the Treaty on the Functioning of the European Union, and in particular articles 191 and 192,
Having regard to regulation (EC) n° 715/2007 of the European Parliament and Council of June 20, 2007 concerning the type-approval of motor vehicles in relation to the emissions of private and of light commercial vehicles (Euro 5 and Euro 6) and the information on the repair and maintenance of vehicles,
Having regard to directive 2007/46/ of the European Parliament and Council of September 5, 2007 setting up a framework for the type-approval of motor vehicles, their trailers as well as the systems, components and technical units for such vehicles (framework directive),
Having regard to directive 2001/81/EC of the European Parliament and Council of October 23, 2001 setting down ceilings for national emissions for certain airborne pollutants,
Having regard to directive 2008/50/EC May 2, 2008 concerning ambient air quality and clean air in Europe,
Having regard to directive (EU) 2016/2284 of the European Parliament and Council of December 14, 2016 concerning the reduction of national emissions of certain airborne pollutants, modifying directive 2003/35/EC and repealing directive 2001/81/EC,
Having regard to regulation (EC) n° 443/2009 of the European Parliament and Council of April 23, 2009 setting down performance standards concerning brand new private cars in the framework of the integrated approach of the Community aiming to reduce the CO2 emissions of light vehicles,
Having regard to regulation (EU) n° 333/2014 of the European Parliament and Council of March 11, 2014 modifying regulation (EC) n° 443/2009 in order to define the structures necessary to reach the 2020 objective in the field of the reduction of CO2 emissions for brand new private vehicles,
Having regard to regulation (EC) n° 692/2008 of the Commission of July 18, 2008 implementing and modifying regulation (EC) n° 715/2007 of the European Parliament and Council concerning the type-approval of motor vehicles in relation to the emissions of private and of light commercial vehicles (Euro 5 and Euro 6) and the information on the repair and maintenance of vehicles,
Having regard to regulation (EU) n° 459/2012 of the Commission of May 29, 2012 modifying regulation (EC) n° 715/2007 of the European Parliament and Council as well as regulation (EC) n° 692/2008 of the Commission concerning the emissions of light private and commercial vehicles (Euro 6),
Having regard to regulation (EU) n° 2016/427 of the Commission of March 10, 2016 modifying regulation (EC) n° 692/2008 concerning the emissions of light private and commercial vehicles (Euro 6),
Having regard to regulation (EU) n° 2016/646 of the Commission of April 20, 2016 modifying regulation (EC) n° 692/2008 concerning the emissions of light private and commercial vehicles (Euro 6),
Having regard to the draft regulation of the European Parliament and Council modifying regulations (EC) n° 715/2007 and (EC) n° 595/2009 concerning the reduction of polluting emissions of road vehicles of January 31, 2014 (COM (2014) 28 final),
Having regard to the draft regulation of the European Parliament and Council concerning type-approval and the overseeing of the motor vehicle market and trailers as well as the systems, components and technical units for such vehicles of January 27, 2016 (COM (2016) 31 final),
Having regard to the decision of the European Parliament of December 17, 2015 on the constitution, the powers, the numerical composition and the time period for the committee of inquiry on the measurement of emissions in the automobile sector (2015/3037/(RSO)),
Having regard to the conclusions adopted on October 27, 2015 by the European Affairs Committee of the French National Assembly on the measurements of airborne pollutants in the automobile sector,
Having regard to the European resolution on the revision of the measurement procedures of airborne pollutant emissions for automobiles, considered as definitive in application of article 151-7 of the Regulation by the National Assembly on February 26, 2016 (T.A. 684),
Having regard to information report n° 3772 on the assessment of public policies in the fight against air pollution filed May 19, 2016 by the Committee for the Assessment and Monitoring of Public Policies,
Having regard to information report n° 4109, “Ecology and Automobiles” filed October 12, 2016 by the Fact-finding Mission on the position of the French automobile industry in the framework of an industrial, energy-saving and fiscal path, set out by the “Conference of Presidents” of the French National Assembly on October 6, 2015,
Considering that the discovery, in the United States, of industrial fraud which was carried out on a global scale by the Volkswagen Company to manipulate the testing protocols concerning NOx emissions, highlighted the failure of the European system concerning the standards, the regulation and the monitoring of the automobile market;
Considering that the European Commission committed itself to put forward a package of measures, called the RDE measures (“Real Driving Emissions”), intended to measure the pollutant emissions in real driving conditions,
Considering that in the framework of the comitology procedure concerning the adoption of the second RDE package, on October 28, 2015, an authorization was granted, in unsatisfactory conditions of transparency, for an overrun of 110% of the pollutant emissions passed by the European Parliament and the Council of the European Union;
Considering that “Dieselgate”, highlighted the absence of combined action on the part of the European Commission and member states to address the shortcomings, which have been clear for years, of European regulations;
Considering that the European Parliament decided on December 17, 2015, to set up a committee of inquiry on the measurement of emissions in the automobile sector;
Considering that the European Commission put forward on January 27, 2016, a draft regulation of the European Parliament and of the Council concerning the type-approval and the monitoring of the market of motor vehicles, their trailers as well as the systems, components and technical units for such vehicles, so as to rectify deficiencies concerning the registration of vehicles and granting more powers to the European Commission and to member states;
Considering that by the Fact-finding Mission of the French National Assembly on the position of the French automobile industry in the framework of an industrial, energy-saving and fiscal path highlighted the overall failure of European systems for the monitoring and drawing-up of standards in the automobile sector;
Considering that the conclusions of the aforementioned Fact-finding Mission, presented in report n° 4109 “Ecology-automobile: A French alliance”, call for a radical reform of the European system for the monitoring and drawing-up of standards in order to put an end to the errors inherited from the past and thus reestablish a pact of confidence for the future which would be beneficial for competition for the whole European automobile industry;
Considering that since the publication of the aforementioned report, not only do the failings and weaknesses denounced by the report continue to be repeated but there are even suspicions of the existence of new frauds, especially regarding the respect of the level of CO2 emissions;
Considering that the current failings concerning the monitoring of pollutant emissions have serious consequences on the health of Europeans and especially on the life expectancy of those who are most vulnerable;
Considering that the absence of transparency in the process of the drawing-up of European standards as well as the fact that they are not respected tarnishes the credibility of European lawmakers;
Considering that the instability and disorderly nature of standard-setting instruments are harmful to the competitiveness of the European automobile industry;
1. Welcomes the creation by the European Parliament of a Commission of Inquiry (EMIS) tasked with bringing to light all violations of European Union law and awaits with expectation the publication of its conclusions;
2. Requests the European Commission to intervene in a more decisive manner regarding the Volkswagen Group so that European consumers may be compensated in similar conditions to those of American consumers as the former have undergone the same damage resulting from the deliberate use of “rigged software” in vehicles sold over several years by different makes belonging to the group;
3. Considers it necessary to introduce a substantial reform to the European regulation framework currently in force, so as to draw all the appropriate consequences of the failure of the European system of regulation, monitoring and drawing-up of standards;
4. Thus calls upon the European Commission and the member states to take the necessary measures in order to:
– put an end to the situation in which certain limits of exposure to pollutants set down by European regulations remain higher that the highest values established by the World Health Organization,
– explicitly prohibit the so-called “optimization” practices implemented by manufacturers under the approval protocols and draw up a formal exhaustive list of the practices which should be banned,
– formally prohibit the use of all “defeat devices” by eliminating all existing exemptions to this ban,
– Make the certification of software obligatory as it will take on huge importance in the technological development of connected and autonomous vehicles,
– open up an inquiry into the use of the “AdBlue Emulator Box” which is a “defeat device” which overrides the NOx treatment system in lorries and which is on open sale on the internet,
– strengthen consumer rights by obliging manufacturers to provide contractual terms for the data concerning emissions;
5. Requests the European Commission to put forward a radical reform to reshape the system of the drawing-up and monitoring of standards which would be based on the following three major proposals:
– the drawing-up of a new single, multi-faceted, Euro standard, which would cover all the parametres of emission pollution and would respect the principle of technological neutrality;
– the respect of a five-year minimum time period for the implementation of a new environmental standard applicable to the automobile sector and the announcement of targets concerning progress to be made over ten years;
– the creation of an independent European agency in charge of monitoring the market, the compliance of vehicles on the roads, the procedures for penalties in the case of non-compliance, as well as the licensing of technical services appointed by the national approval authorities to guarantee the respect of quality standards.
© Assemblée nationale