N° 4403 - Rapport de M. André Chassaigne sur la proposition de loi de Mme Huguette Bello, M. André Chassaigne et plusieurs de leurs collègues visant à assurer la revalorisation des pensions de retraites agricoles en France continentale et les Outre-mer (4348).



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N° 4403

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 janvier 2017.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI visant à assurer la revalorisation des pensions de retraites agricoles en France continentale et les Outre-mer,

Par M. André CHASSAIGNE,

Député.

——

Voir le numéro :

Assemblée nationale : 4348.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

I. L’INDISPENSABLE REVALORISATION DES RETRAITES AGRICOLES 7

A. UN NIVEAU DE RETRAITE INFÉRIEUR AU SEUIL DE PAUVRETÉ 7

B. DES RÉGIONS ULTRA-MARINES MARQUÉES PAR LA PRÉCARITÉ DU SYSTÈME DE RETRAITES 10

II. DES MESURES SALUTAIRES À AMPLIFIER DÈS AUJOURD’HUI 12

A. LES AVANCÉES NÉCESSAIRES MAIS INSUFFISANTES DE LA LOI DU 20 JANVIER 2014 12

B. LE DÉSÉQUILIBRE FINANCIER CROISSANT DU RÉGIME AGRICOLE 15

III. RÉINTÉGRER LES RETRAITES AGRICOLES DANS LE PACTE SOCIAL 18

A. CORRIGER L’EXTRÊME FAIBLESSE DES RETRAITES AGRICOLES 18

B. RECONNAÎTRE L’ENJEU SPÉCIFIQUE DES RETRAITES AGRICOLES OUTRE-MER 18

TRAVAUX DE LA COMMISSION 21

DISCUSSION GÉNÉRALE 21

EXAMEN DES ARTICLES 33

TITRE PREMIER – GARANTIR UN NIVEAU MINIMUM DE PENSION À 85 % DU SMIC ET DE NOUVELLES RECETTES POUR LE FINANCEMENT DU RÉGIME DES NON SALARIÉS AGRICOLES 33

Article 1er(Art. L. 732-63 du code rural et de la pêche maritime) : Mise en place d’une garantie « 85 % du SMIC » 33

Article 2 (Art. L. 732-58 du code rural et de la pêche maritime) : Création d’une nouvelle contribution affectée au régime de retraite complémentaire obligatoire 35

TITRE II – DISPOSITIONS EN FAVEUR DE LA REVALORISATION DES PENSIONS DE RETRAITES AGRICOLES DANS LES DÉPARTEMENTS ET RÉGIONS D’OUTRE-MER 37

Article 3 : Élargissement de l’accès à la garantie « 75 % du SMIC » outre-mer 37

Article 4 : Extension des régimes de retraite complémentaire aux salariés agricoles ultra-marins 40

Article 5 : Compensation financière des organismes de sécurité sociale 42

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 45

INTRODUCTION

Le montant moyen de la pension versée à un agriculteur retraité est aujourd’hui inférieur au seuil de pauvreté et au montant du minimum vieillesse.

La retraite d’un non-salarié agricole, tous statuts confondus – chef d’exploitation, conjoint collaborateur ou aide familial – s’élève ainsi à 766 euros par mois en moyenne, soit un niveau inférieur de 5 % à l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) et de 10 % au seuil de pauvreté.

Ce constat remet frontalement en cause notre système d’assurance vieillesse, voire notre modèle même de cohésion sociale. Supposé lutter contre la précarité et garantir un niveau de vie minimum au-delà de l’activité, le régime de retraite agricole semble aujourd’hui fragilisé financièrement et dépourvu de solides mécanismes pour assurer un niveau décent de retraite agricole.

Fondé par la loi du 10 juillet 1952 (1), le régime d’assurance vieillesse des exploitants agricoles n’a cessé de s’étendre au fil des réformes successives, avec la reconnaissance d’un statut de conjoint collaborateur en 1999, la création d’un régime de retraite complémentaire obligatoire (RCO) en 2002 et son extension à l’ensemble des non-salariés agricoles en 2011. Il s’accompagne néanmoins depuis sa fondation de difficultés structurelles liées notamment à la faiblesse des revenus agricoles et à un effort contributif inférieur à celui constaté dans d’autres régimes.

La situation est particulièrement alarmante dans les outre-mer. Des justifications historiques, économiques ou sociales pourront toujours être avancées, telles que la création plus tardive du système d’assurance vieillesse agricole outre-mer – neuf ans après l’hexagone – ou des profils de carrières et des paramètres de cotisations distincts. Ces justifications ne peuvent néanmoins pas légitimer un statu quo et appellent une correction effective de ces inégalités, correction devenue d’autant plus urgente que les dernières avancées en matière de retraites ont en grande partie laissé de côté l’enjeu spécifique des outre-mer.

Nul ne peut méconnaître les avancées effectuées sous cette législature, qui témoignent d’une politique volontariste en matière agricole dans un cadre budgétaire pourtant contraint. 900 millions d’euros ont été consacrés à la revalorisation des retraites agricoles depuis 2012, bénéficiant à près de la moitié des retraités de droit direct.

Ces réponses ne constituent toutefois qu’une étape intermédiaire et en aucun cas un aboutissement. Elles doivent être amplifiées et complétées dans le même esprit à la fois dans l’hexagone et dans les outre-mer. 1,5 million de non-salariés agricoles à la retraite attendent aujourd’hui une réponse forte des pouvoirs publics permettant de corriger enfin ces inégalités de droit et de fait et de procéder à un alignement par le haut des retraites agricoles.

Tel est le sens des trois objectifs poursuivis simultanément par cette proposition de loi, reprenant le dessein initial de la sécurité sociale : la garantie d’un niveau de retraite supérieur au seuil de pauvreté, le rétablissement de l’équilibre financier du régime de retraite agricole et la prise en compte des spécificités agricoles ultra-marines.

La construction des retraites agricoles

Les retraites agricoles sont calculées à partir d’un droit dérogatoire au régime général de la sécurité sociale permettant de tenir compte de l’activité spécifique du secteur agricole.

La retraite des non-salariés agricoles, en premier lieu, cumule une triple retraite forfaitaire, proportionnelle et complémentaire :

– la retraite forfaitaire est ouverte aux assurés dont l’activité non-salariée agricole est exercée à titre exclusif ou principal. Elle est calculée à partir d’un montant forfaitaire multiplié par le nombre de trimestres d’activité, rapporté à la durée d’assurance fixée pour chaque génération ;

– la retraite proportionnelle constitue le second pilier de la retraite de base, reposant sur l’acquisition de points cotisés dont le nombre diffère selon le statut du non-salarié. Les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole valident un nombre de points corrélé à leur revenu, qui varie de 23 à 104 points. Les collaborateurs et aides familiaux, quant à eux, voient leur cotisation assise sur une assiette forfaitaire ouvrant droit à 16 points ;

– la retraite complémentaire obligatoire (RCO), ouverte depuis 2003 aux chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole et depuis 2011 aux collaborateurs et aides familiaux, est constituée de droits gratuits et de droits acquis par cotisation.

La retraite des salariés agricoles, en second lieu, est composée d’une retraite de base auprès de la Mutualité sociale agricole et d’une retraite complémentaire auprès des régimes AGIRC-ARRCO.

● Plusieurs facteurs peuvent être avancés pour expliquer la faiblesse des retraites des non-salariés agricoles.

D’une part, le régime de retraite agricole repose sur des paramètres spécifiques de cotisation et de liquidation. Les écarts de cotisation se traduisent mécaniquement par l’acquisition de moindres droits.

D’autre part, l’acquisition de droits est limitée par des parcours de carrières agricoles discontinus – notamment pour les conjoints collaborateurs et les aides familiaux –, souvent marqués par de faibles rémunérations. Ces faibles rémunérations n’impliquent pourtant pas l’absence d’assujettissement aux cotisations. Ainsi, un exploitant contribue au financement du régime de retraite complémentaire obligatoire (RCO) y compris lorsque son revenu est déficitaire, l’assiette minimale étant fixée à 1 820 SMIC horaire.

Enfin, la mise en place tardive du régime RCO et l’absence de ressources suffisantes pour le financer n’ont pas permis d’atteindre l’objectif d’une retraite au moins égale à 75 % du SMIC mensuel défini par la « loi Peiro » du 2 mars 2002 (3). Le mécanisme d’indexation de la pension sur l’évolution des prix – et non pas sur celle du SMIC – a rendu cet objectif d’autant moins tenable : parti d’un niveau proche de 75 % du SMIC net lors de la fondation du régime RCO en 2002, le niveau moyen des pensions versées aux chefs d’exploitation n’a cessé de diminuer par la suite en proportion du SMIC, tombant à 70 % du SMIC net en 2012.

Il en résulte un écart manifeste entre les retraites servies aux non-salariés agricoles et celles servies aux autres régimes, en particulier en comparaison avec le niveau de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) et au seuil de pauvreté. Le graphique ci-dessous reproduit ces écarts.

NIVEAU MOYEN DES PENSIONS SERVIES AUX NON-SALARIÉS AGRICOLES EN COMPARAISON AVEC D’AUTRES INDICATEURS (EN MILLIERS D’EUROS MENSUELS)

Source : Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, à partir des données de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole.

Il en ressort deux constats inquiétants. D’une part, le niveau moyen d’une pension agricole – cumulant la retraite de base et la RCO – est désormais inférieur à l’ASPA et au seuil de pauvreté. Le système de retraite semble donc incapable de remplir l’un de ses principaux objectifs : la préservation d’un niveau de vie décent lors du passage à l’inactivité. D’autre part, la pension de base d’un non-salarié agricole est aujourd’hui trois fois inférieure à celle de l’ensemble des régimes, cet écart ne cessant d’ailleurs de s’accroître au fil des années.

En outre, le rapporteur souligne l’enjeu primordial de l’égalité entre les femmes et les hommes, qui demeurera hors de portée sans mesures nouvelles. La parité entre les non-salariés agricoles en matière de prestations n’est toujours pas assurée et ne permet pas de garantir l’équité du système d’assurance vieillesse. L’Association nationale des retraités agricoles de France (ANRAF) a rappelé au rapporteur la nécessité de mobiliser de nouveaux dispositifs en faveur de cet objectif. Cela pourrait passer, à terme, par l’extension du complément différentiel de points au titre du régime RCO – plus connu sous le nom de « garantie 75 % du SMIC » – aux conjoints collaborateurs et aux aides familiaux, au-delà des seuls chefs d’exploitation.

● Ces écarts de pension sont particulièrement marqués outre-mer.

Les retraités des départements d’outre-mer représentent aujourd’hui 2 % des effectifs du régime des non-salariés agricoles, soit 28 000 assurés ; la moitié de ces assurés résident à La Réunion.

Deux spécificités distinguent les non-salariés agricoles ultra-marins de leurs homologues dans l’hexagone :

– la proportion de monopensionnés, c’est-à-dire d’assurés ayant exercé une activité exclusivement agricole, est plus élevée dans les départements d’outre-mer ;

– les durées d’assurance des non-salariés agricoles sont inférieures – en moyenne de sept ans pour les monopensionnés – à celles constatées dans l’hexagone.

Ces deux caractéristiques ont un impact direct sur le niveau des pensions de ces assurés ultra-marins, qui ne peuvent donc ni compter sur des droits acquis dans d’autres régimes en complément, ni sur des carrières complètes.

Au total, un non-salarié monopensionné sur deux a une retraite inférieure à 333 euros par mois outre-mer, soit un niveau largement inférieur à la faible médiane de 517 euros déjà constatée dans l’hexagone.

La faiblesse des pensions agricoles ultra-marines doit être analysée à l’aune de la précarité du système de retraites dans ces départements.

Le système d’assurance vieillesse agricole outre-mer repose sur un droit dérogatoire qui tient compte de la spécificité de l’activité des salariés comme des non-salariés agricoles ultra-marins.

● Concernant les non-salariés agricoles, tout d’abord, la mise en place différée du régime de retraite agricole outre-mer a retardé l’acquisition de points et donc la constitution de droits.

Le régime de retraite de base, en premier lieu, a été mis en place tardivement dans les départements d’outre-mer en 1964, soit neuf ans après l’hexagone. Si les périodes d’activités antérieures à cette date ont été validées gratuitement au titre de la retraite forfaitaire, comme dans l’hexagone, aucune validation n’est toutefois intervenue pour la retraite proportionnelle.

Le régime de retraite complémentaire obligatoire, en second lieu, repose sur un mode de calcul des cotisations spécifique qui se traduit par un effort contributif moindre. Contrairement au droit commun, qui définit le revenu professionnel comme assiette, les cotisations RCO outre-mer sont calculées en fonction de la surface réelle pondérée de l’exploitation.

Cette assiette dérogatoire, qui se traduit dans les faits par le versement de cotisations plus faibles, s’accompagne de droits réduits et explique donc en partie la faiblesse des pensions versées. Ainsi, le barème de points applicable aux chefs d’exploitation outre-mer permet d’acquérir entre 16 et 30 points par an, là où le barème dans l’hexagone s’étend de 23 à 104 points. La plus grande difficulté à justifier d’une carrière complète constatée dans certains territoires ultra-marins amplifie cet écart.

La situation spécifique des exploitants ultra-marins justifie de renforcer les garanties d’acquisition de points RCO, notamment dans le cadre de la garantie « 75 % du SMIC » versée aux exploitants agricoles. Le volet ultra-marin de la proposition de loi y répond, en facilitant l’accès au complément différentiel de points de RCO.

● Concernant les salariés agricoles, par ailleurs, le régime complémentaire d’assurance vieillesse n’est pas présent dans l’ensemble des territoires ultra-marins.

La généralisation des régimes de retraite complémentaire outre-mer a été actée par la loi du 29 décembre 1972 (4). La convention collective nationale du 14 mars 1947 et l’accord du 8 décembre 1961, ayant fondé respectivement l’Association générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC) et l’Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (ARRCO), ont alors été étendus par voie d’arrêtés aux départements d’outre-mer en 1975 et 1976.

Les arrêtés d’extension recouvrent le même champ que l’hexagone, à une exception près : les professions agricoles et forestières.

Le choix a alors été fait de renvoyer l’extension des accords dans ce secteur à l’aboutissement des négociations entre partenaires sociaux. La couverture des salariés agricoles outre-mer est donc subordonnée à la conclusion d’un accord dans chaque territoire.

À ce jour, deux départements d’outre-mer ont procédé à une telle extension :

– la Guyane, tout d’abord, en 1999 ;

– la Martinique, par la suite, en 2014.

L’extension partielle des régimes de retraite complémentaire aux salariés agricoles ultra-marins, fruit d’une construction par à-coups, a pour conséquence immédiate une situation d’inégalité.

L’inégalité initiale entre les salariés agricoles de l’hexagone et ceux d’outre-mer se double désormais d’une inégalité entre salariés agricoles ultra-marins.

Des difficultés objectives peuvent expliquer l’absence d’accord dans des départements d’outre-mer, avec une double interrogation persistante concernant les taux de cotisation à retenir et l’application ou non d’une rétroactivité de la couverture complémentaire.

Ces difficultés ne justifient toutefois pas le renvoi systématique de cet enjeu à des négociations ultérieures éventuelles depuis quarante ans. La conclusion d’accords entre les partenaires sociaux en Guyane et en Martinique rend cette situation d’autant moins justifiée. La Martinique a ainsi prévu l’augmentation progressive des taux de cotisation – de 7,7 % en 2015 à 17,7 % en 2017 – et l’absence de validation des services passés.

Laissée de côté par la réforme du 20 janvier 2014, dans le cadre d’une demande de rapport au Gouvernement qui demeure en attente trois ans après, la couverture de l’ensemble des salariés agricoles constitue le second pilier du volet ultra-marin de la proposition de loi.

L’enjeu de la revalorisation des retraites agricoles constitue un volet majeur de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites. La montée en charge des dispositifs qu’elle prévoit répond à de fortes préoccupations du milieu agricole en prenant en compte ses spécificités en termes de cotisation, de durée d’activité et de statut. La seule entrée en vigueur de ces dispositifs ne suffira toutefois pas à corriger l’extrême faiblesse des retraites agricoles, appelant ainsi les mesures complémentaires inscrites dans la proposition de loi.

Le tableau ci-dessous synthétise les six principales mesures mises en œuvre sous la XIVe législature en direction des non-salariés agricoles retraités.

SYNTHÈSE DES MESURES DE REVALORISATION DES RETRAITES DES NON-SALARIÉS AGRICOLES MISES EN œUVRE SOUS LA QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Mesure

Nombre de bénéficiaires

Coût annuel

Chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole

Garantie « 75 % du SMIC »

263 000 (prévisions 2017)

137 millions d’euros (prévisions 2017)

Conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole

Extension de la retraite complémentaire obligatoire (RCO) aux conjoints et aides familiaux pour les périodes d’activité antérieures à leur affiliation obligatoire

477 000 (2014)

136 millions d’euros (2014)

Réversion des points gratuits des chefs d’exploitation décédés en activité

29 300 (2014)

4 millions d’euros (2014)

Droits combinés (permettre au conjoint survivant d’un chef d’exploitation décédé en activité de cumuler les droits du défunt et les siens)

250 (2014)

100 000 euros (2014)

Ensemble des non-salariés agricoles

Assouplissement de l’accès à la pension majorée de référence (suppression de la condition d’assurance de 17,5 ans)

1 000 (2014)

300 000 euros (2014)

Attribution de points gratuits de retraite proportionnelle pour cause de longue maladie ou d’invalidité

1 300 (2014)

1 million d’euros (2014)

Source : Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

● Le versement d’un complément différentiel de points RCO, plus connu sous le nom de « garantie 75 % du SMIC », constitue la mesure la plus attendue par les exploitants agricoles.

Il rend enfin effectif l’objectif du versement d’une retraite au moins égale à 75 % du SMIC net, inscrit il y a quinze ans comme objectif du régime de RCO dans la loi du 4 mars 2002 dite « loi Peiro ». Cette mesure n’avait jusqu’alors pas été appliquée, en l’absence de mécanismes ou de financements adéquats.

L’article 35 de la loi du 20 janvier 2014 met ainsi en place, pour les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole qui justifient d’une carrière complète en cette qualité dans le régime des non-salariés agricoles, l’attribution d’un complément de points de retraite permettant d’atteindre le montant minimum de 75 % en 2017. Deux paliers intermédiaires sont prévus pour 2015 et 2016, respectivement fixés à 73 % et 74 % du SMIC.

Cette mesure est indispensable et permet de rendre effectif un principe consacré il y a quinze ans. Elle demeure toutefois insuffisante, en maintenant le niveau minimum de retraite sous le seuil de pauvreté, rendant indispensable d’en élever le niveau à 85 %.

● Trois nouveaux dispositifs intéressent par ailleurs les conjoints de chefs d’exploitation, qui perçoivent dans leur grande majorité de très faibles retraites. Ces mesures bénéficient quasi-exclusivement aux femmes.

Leur rôle dans l’activité de l’exploitation ou de l’entreprise a été progressivement reconnu, avec l’accès à un véritable statut de collaborateur et leur affiliation au régime de RCO. La situation précaire de certains conjoints ou aides familiaux – dont l’activité dépend directement de celle du chef d’exploitation ou d’assurance – a rendu indispensable le renforcement de leurs droits, en cohérence avec leur durée d’activité.

Contrairement aux exploitants agricoles, les conjoints collaborateurs n’avaient jusqu’alors jamais bénéficié de points gratuits ou de la possibilité de procéder au rachat d’années antérieures pour rattraper leurs années d’activité précédant l’affiliation. Corrigeant cette situation, l’attribution de 66 points gratuits de RCO par an est rendue possible aux termes de l’article 34 de la loi du 20 janvier 2014 au titre des années antérieures à 2011 – c’est-à-dire à leur date d’affiliation au RCO. Cette attribution s’effectue dans la limite de 17 années et est subordonnée à une condition de durée d’affiliation minimale de 32,5 ans dans le régime des non-salariés agricoles.

La possibilité de cotiser à l’assurance vieillesse volontaire (AVV) a par ailleurs été ouverte aux conjoints collaborateurs en cas de divorce, de décès ou de départ à la retraite de l’agriculteur. Prévue par l’article 32 de la loi du 20 janvier 2014, cette disposition met un terme à la situation antérieure dans laquelle le conjoint cessait d’être affilié au régime agricole et d’acquérir des droits, à moins de reprendre l’exploitation. Les conjoints collaborateurs peuvent ainsi, depuis le 1er février 2014, cotiser à l’AVV dans les six mois suivant leur radiation.

Deux derniers dispositifs du régime RCO ont été élargis aux conjoints collaborateurs :

– le dispositif de « droits combinés » – qui permet au conjoint d’un exploitant décédé de cumuler ses droits avec ceux du défunt pour le calcul de sa retraite de base – est aujourd’hui étendu aux droits acquis dans le régime de RCO ;

– la pension de réversion versée au conjoint survivant est désormais calculée sur une assiette élargie aux points de RCO attribués à l’exploitant à titre gratuit.

● Deux avancées supplémentaires bénéficient à l’ensemble des non-salariés agricoles, quel que soit leur statut.

D’une part, la condition de 17,5 années d’assurance dans le régime des non-salariés agricole pour bénéficier de la pension majorée de référence a été supprimée. L’assuré doit désormais uniquement justifier d’une pension de retraite liquidée à taux plein.

D’autre part, des points gratuits de retraite proportionnelle sont attribués aux exploitants agricoles en cas de longue maladie ou d’invalidité.

● Une dernière avancée significative, qui devrait bénéficier particulièrement aux retraités agricoles ultra-marins, est actuellement en cours d’examen parlementaire, dans le cadre du projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

La modification du seuil de recouvrement sur succession de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) a été adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, à l’initiative de Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires sociales (5).

Le droit en vigueur prévoit un mécanisme de récupération sur la succession du bénéficiaire de l’ASPA lorsque la fraction de l’actif net successoral dépasse le seuil de 39 000 euros.

La modification proposée prévoit de porter ce seuil à 100 000 euros dans les départements et régions d’outre-mer afin de tenir compte de la situation spécifique de territoires marqués par un prix du foncier particulièrement élevé pouvant alimenter le non-recours à l’ASPA.

Cette prise en compte de la situation des territoires ultra-marins, en cohérence avec le cadre prévu par l’article 73 de la Constitution, va dans le sens des mesures inscrites dans la présente proposition de loi. Le rapporteur formule donc le vœu du rétablissement de cette disposition – supprimée au Sénat lors de la première lecture – afin de permettre son entrée en vigueur effective.

Le régime agricole d’assurance vieillesse fait face à des difficultés structurelles de financement, liées à la fois à la réduction du nombre d’actifs, à l’instabilité des recettes et aux nouvelles mesures dont le financement lui incombe.

● Le nombre de non-salariés agricoles bénéficiant d’une retraite s’élève aujourd’hui à 1,517 million. Ce nombre devrait diminuer progressivement de 3,1 % chaque année jusqu’en 2020, selon les prévisions de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA). Cette réduction du nombre de retraités agricoles, qui se traduit par une baisse plus rapide des bénéficiaires de pensions que celle des effectifs de cotisants, devrait permettre la lente amélioration du ratio entre retraités et cotisants.

En termes financiers, le régime de base des non-salariés agricoles a versé 7,8 milliards d’euros de prestations en 2015. Ce niveau devrait décroître progressivement de 2,2 % par an, pour atteindre 7 milliards d’euros en 2020 selon les prévisions de la CCMSA.

Le niveau des prestations versées au titre de la RCO, en revanche, ne cesserait de croître, passant de 674 millions d’euros en 2015 à 802 millions d’euros en 2020, selon les mêmes prévisions. La hausse annuelle s’établirait ainsi à 3,5 %.

Le régime des salariés agricoles, quant à lui, verse un total de 5,7 milliards d’euros de prestations à 2,5 millions bénéficiaires. L’augmentation du montant des prestations versées d’ici 2020, de l’ordre de 1 % par an, serait en grande partie compensée par l’augmentation parallèle du niveau des cotisations à hauteur de 1,2 % par an. L’éventuel déficit serait couvert par la branche retraite du régime général.

● Les difficultés financières se cristallisent donc aujourd’hui dans le régime RCO, et ce de manière d’autant plus préoccupante que le financement de la garantie « 75 % du SMIC » lui incombe.

Le plan de revalorisation des retraites agricoles de 2014, dont cette garantie constitue le pilier, implique la mobilisation de 285 millions d’euros en rythme de croisière, selon les estimations du Gouvernement. Son financement reposait lors de sa présentation sur deux mesures :

– d’une part, l’augmentation progressive du taux de cotisation des exploitants agricoles, de 1,3 point au total ;

– d’autre part, un dispositif de lutte contre l’optimisation sociale pour les formes sociétaires agricoles, prévu par l’article 9 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 (6) et permettant d’intégrer dans l’assiette des prélèvements sociaux les dividendes perçus par l’exploitant et sa famille.

La mesure d’augmentation du taux de cotisation ne sera finalement pas mise en œuvre en 2015 et 2016 dans un contexte de crise agricole. Le second dispositif, quant à lui, a en réalité généré des recettes sensiblement inférieures aux prévisions du Gouvernement.

Il ne s’agit pas ici de remettre en cause le bien-fondé de cette mesure – dont l’application a été affaiblie par des comportements de contournement – mais d’en tirer les conséquences. Le régime de RCO est aujourd’hui structurellement sous-financé, alors même que les nouvelles mesures qu’il doit financer atteignent leur régime de croisière. En 2015, le niveau des dépenses – 762 millions d’euros – était supérieur de 13 % à celui des recettes – 672,1 millions d’euros. Le régime RCO a alors couvert son déficit en puisant dans ses réserves, qui ont diminué de 324,2 millions d’euros en 2014 à 243,3 millions d’euros en 2015.

Sans mesure nouvelle, le déficit de la MSA ne cesserait de se creuser. Après avoir atteint – 89,9 millions d’euros en 2015, le solde poursuivrait sa dégradation sur la période 2016 – 2020, comme l’illustre le graphique ci-dessous.

ÉVOLUTION DU SOLDE ANNUEL DU RCO DE 2003 À 2019

Source : Caisse centrale de la mutualité sociale agricole.

● Alerté sur ces difficultés financières lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, le Gouvernement a renvoyé cet enjeu à une concertation ultérieure.

Une conférence sur les retraites agricoles a ainsi été organisée le 30 novembre 2016, sous l’égide des directeurs de cabinet de la ministre des Affaires sociales et de la santé et du ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. Outre la CCMSA, les organisations syndicales agricoles étaient également présentes, avec la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), les Jeunes agriculteurs (JA), la Confédération paysanne, la Coordination rurale, le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef) et l’Association nationale des retraités agricoles de France (ANRAF).

Deux mesures financières ont alors été décidées, pesant à parts égales sur les assurés du régime et la solidarité nationale :

– au titre de l’effort contributif des assurés du régime, une augmentation du taux de cotisation de 0,5 % en 2017 puis en 2018. Le taux de cotisation RCO, actuellement fixé à 3 %, sera donc progressivement porté à 4 %, aux termes du décret du 28 décembre 2016 (7) ;

– au titre de la solidarité nationale, une attribution au régime RCO d’une dotation supplémentaire de 55 millions d’euros, via l’abondement de la mission « Régimes sociaux de retraite » décidé dans la loi de finances pour 2017 (8).

Ces deux mesures seraient complétées par l’affectation de la taxe sur les farines au régime RCO à compter de 2018, pour un montant de 66 millions d’euros. En l’absence d’inscription dans une loi de finances, cette mesure est aujourd’hui sans effet.

Enfin, une mission a été confiée par le Gouvernement à l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et au Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), afin d’engager une réflexion sur les missions et les leviers de financement du régime RCO à moyen terme. Le rapporteur sera particulièrement attentif à la publication de ses conclusions, attendues au printemps 2017.

● Ces réponses ne constituent que des pansements provisoires relevant d’une vision à court terme. Il est désormais urgent de trouver des ressources pérennes seules à même de garantir le redressement financier du régime.

Le déséquilibre actuel est rendu d’autant plus inquiétant par la responsabilité directe de la branche vieillesse dans la couverture du déficit, contrairement aux autres branches. La branche maladie est intégrée financièrement à celle du régime général depuis 2009, donnant ainsi lieu à un transfert d’équilibre. La branche famille, quant à elle, voit ses dépenses et ses recettes intégrées dans les comptes de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF). La branche retraite, en revanche, ne peut pas s’appuyer sur de tels mécanismes et est donc directement en charge de la gestion du déficit du régime.

L’identification de nouvelles recettes est donc devenue incontournable, en premier lieu pour le régime RCO. La contribution prévue à l’article 2 de la proposition de loi poursuit précisément cet objectif (voir infra).

L’ampleur de la fracture sociale et financière du système de retraites agricoles apparaît donc clairement. Les droits des assurés agricoles demeurent à un niveau anormalement bas, en particulier dans les outre-mer, ce dont nul ne peut se satisfaire. Les inégalités de couverture et d’accès aux droits en matière de retraite – notamment complémentaire – nourrissent la précarité et la pauvreté de travailleurs agricoles présentant pourtant des carrières longues et pénibles.

Ce constat appelle une réponse législative déterminée, qui réaffirme la pleine intégration des retraites agricoles dans notre pacte social, le cas échéant en mobilisant des mécanismes de solidarité nationale.

La proposition de loi y répond par une double série de mesures visant à garantir simultanément la revalorisation des retraites agricoles, la pérennité du régime agricole et la prise en compte des enjeux spécifiques aux outre-mer.

Le premier volet de la proposition de loi pose le principe d’une garantie minimale de retraite portée à 85 % du SMIC, au-delà du seuil de 75 % prévu par le droit en vigueur.

Inscrit à l’article 1er, ce principe est financé à partir d’une nouvelle ressource du régime de retraite complémentaire obligatoire créée à l’article 2.

Au-delà du seul financement de cette mesure, la nouvelle ressource a pour second objectif de participer au redressement financier du régime RCO, aujourd’hui déséquilibré et dépourvu de recettes pérennes et suffisantes. Cette ressource prend la forme, dans la rédaction initiale de la proposition de loi, d’une contribution sur les revenus financiers des banques et des industries liées au secteur agricole. Cette rédaction est toutefois appelée à évoluer par voie d’amendement, au terme des auditions et des consultations menées par le rapporteur.

Le second volet de la proposition de loi vise la revalorisation des retraites agricoles dans les départements et régions d’outre-mer.

Il s’appuie sur le cadre ouvert par l’article 73 de la Constitution, qui permet d’adapter les lois et règlements afin de tenir compte des caractéristiques et contraintes particulières de ces territoires.

Deux mesures sont prévues pour les retraites agricoles outre-mer : d’une part, l’ouverture de l’accès à la garantie « 75 % du SMIC » des exploitants agricoles ; d’autre part, l’extension des régimes de retraite complémentaire à l’ensemble des salariés agricoles.

● Concernant les exploitants agricoles, dans un premier temps, la proposition de loi vise à garantir l’accès des assurés au complément différentiel de points de retraite complémentaire obligatoire (RCO) permettant de porter le niveau de la pension à 75 % du SMIC net.

L’article 3 de la proposition de loi prévoit ainsi d’élargir l’accès à la garantie « 75 % du SMIC » à l’ensemble des exploitants agricoles pouvant justifier d’une pension à taux plein. La condition de durée d’assurance en tant que chef d’exploitation prévue par le droit en vigueur ne serait plus requise.

● Concernant les salariés agricoles, dans un second temps, l’extension des régimes de retraite complémentaire à l’ensemble des salariés agricoles ultra-marins est prévue par l’article 4 de la proposition de loi.

Cette extension mettrait fin à l’inégalité d’accès à ces régimes selon le lieu d’activité du salarié agricole.

En l’absence d’accord entre partenaires sociaux, il reviendra à l’État d’acter par arrêté l’extension de ce régime aux salariés agricoles dans les territoires actuellement dépourvus de couverture – La Réunion et la Guadeloupe.

L’article 5 de la proposition de loi, enfin, prévoit la compensation par l’État des dépenses supplémentaires générées par ces mesures pour les organismes de sécurité sociale. Il gage ces mesures par la majoration à due concurrence des droits pesant sur le tabac.

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TRAVAUX DE LA COMMISSION

DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission des affaires sociales examine, sur le rapport de M. André Chassaigne, la proposition de loi de Mme Huguette Bello, M. André Chassaigne et plusieurs de leurs collèges visant à assurer la revalorisation des pensions de retraites agricoles en France continentale et les Outre-mer (n° 4348) au cours de sa séance du mercredi 25 janvier 2017.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Nous en venons à l’examen de la proposition de loi sur la revalorisation des pensions de retraite agricoles, qui sera examinée en séance publique le jeudi 2 février, dans le cadre de l’ordre du jour réservé au groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR).

M. André Chassaigne, rapporteur. Je remercie la commission des affaires sociales de m’accueillir pour la défense de cette proposition de loi, qui touche à l’un des enjeux préoccupants de notre système de protection sociale, trop fréquemment occulté : l’extrême faiblesse des retraites agricoles.

Le régime d’assurance vieillesse des exploitants agricoles s’accompagne de difficultés structurelles depuis sa création par la loi du 10 juillet 1952. Certes, des réformes ont permis d’étendre progressivement ce régime – je pense à la reconnaissance d’un statut de conjoint collaborateur en 1999, à la création d’un régime de retraite complémentaire obligatoire en 2002 et à son extension à l’ensemble des non-salariés agricoles en 2011, autant d’avancées dans lesquelles l’implication de notre collègue Germinal Peiro a été déterminante.

Ces avancées, que je ne sous-estime pas, n’ont toutefois jamais permis de garantir un niveau de vie décent au million et demi d’exploitants à la retraite. C’est la raison pour laquelle le groupe de la Gauche démocrate et républicaine se saisit aujourd’hui du problème.

Pour aborder ce débat, je citerai trois chiffres que chacun de nous doit garder à l’esprit : la retraite moyenne d’un non-salarié agricole s’élève à 766 euros par mois, c’est-à-dire un montant inférieur au seuil de pauvreté et à l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) ; un non-salarié sur trois a une retraite inférieure à 350 euros par mois ; dans les départements d’outre-mer, enfin, un non-salarié sur deux a une retraite inférieure à 330 euros par mois.

Ce constat alarmant justifie la réponse forte et urgente qui est inscrite dans cette proposition de loi. Il ne s’agit en aucun cas de méconnaître les avancées effectuées sous cette législature, qui témoignent d’une politique volontariste dans ce domaine : 900 millions d’euros ont ainsi été consacrés à la revalorisation des retraites agricoles depuis 2012, dans un cadre budgétaire pourtant contraint. Ces mesures ont bénéficié à près de la moitié des retraités de droit direct et vous trouverez tous les chiffres dans le rapport définitif. Je tiens à citer en particulier la mise en œuvre d’un complément différentiel de points de retraite complémentaire pour les chefs d’exploitation, permettant d’atteindre le seuil de 75 % du SMIC net en 2017, et l’attribution de droits gratuits aux conjoints et aux aides familiaux pour les années antérieures à leur affiliation au régime complémentaire en 2011.

Ces réponses ne constituent toutefois qu’une étape intermédiaire, en aucun cas un aboutissement. Elles doivent s’accompagner de mesures complémentaires qui permettent de garantir un niveau de vie décent aux agriculteurs lors de leur passage à la retraite et de corriger enfin les véritables inégalités de droit et de fait.

Le premier volet de la proposition de loi vise à élever le niveau minimum de pension agricole et à rétablir l’équilibre financier du régime de retraite complémentaire obligatoire (RCO). L’article 1er pose le principe d’une garantie de retraite à 85 % du SMIC net, allant ainsi au-delà du seuil de 75 % prévu par le droit actuel. Cette mesure constitue une attente centrale des exploitants à la retraite et une revendication forte de tous les syndicats agricoles. Cette mesure, dont le coût est évalué à 266 millions d’euros par la Mutualité sociale agricole (MSA), bénéficierait à 85 000 exploitants supplémentaires, portant ainsi le nombre total de bénéficiaires à 334 000. Dans le rapport définitif, vous trouverez un tableau retraçant cette évolution.

Cette mesure est financée par une nouvelle recette prévue à l’article 2. La rédaction initiale de la proposition de loi prévoyait la taxation des revenus financiers des banques et des industries liées aux secteurs agricole et agroalimentaire. Cette rédaction avait l’avantage d’impliquer directement un secteur dans la mesure qu’il finance – ici, le secteur agricole dans la revalorisation des retraites agricoles. Elle pose toutefois deux difficultés dont nous devons tenir compte : d’une part, nous ne pouvons pas identifier clairement la matière imposable du seul fait de son lien avec le secteur agricole ; d’autre part, une inégalité de traitement, difficile à justifier, pourrait résulter de la taxation des seuls revenus financiers liés à un secteur d’activité en particulier.

Nous avons eu différents échanges au cours des auditions, et je profite de mon intervention pour remercier les parlementaires de cette commission qui y ont participé en nombre – c’est assez rare. Aux termes de ces échanges, je vais vous soumettre une rédaction alternative par voie d’amendement, afin de surmonter ces deux difficultés en laissant de côté le lien à un secteur d’activité. La mesure serait financée grâce à une taxe additionnelle à la taxe sur les transactions financières.

Cette nouvelle recette permettra également d’assurer le retour à l’équilibre du régime RCO. Le déficit de ce régime, qui a atteint 90 millions d’euros en 2015, ne cessera de se creuser dans les quatre prochaines années selon les prévisions de la MSA. Or, contrairement au régime de base de la MSA, le RCO ne peut recourir à l’emprunt ; il est donc contraint de puiser dans ses réserves, qui fondent comme neige au soleil. La nouvelle recette sera donc décisive pour le redressement financier du régime.

J’en arrive au second volet de la proposition de loi, consacré à la revalorisation des pensions de retraites dans les outre-mer. Je tiens à souligner la très forte implication de notre collègue Huguette Bello, députée de La Réunion, dans ce volet particulièrement important et attendu compte tenu de l’extrême faiblesse des pensions ultramarines.

L’article 3, tout d’abord, concerne les non-salariés agricoles d’outre-mer. La situation alarmante, constatée actuellement dans ces territoires, résulte à la fois de la mise en place tardive des régimes d’assurance vieillesse outre-mer, des profils de carrières spécifiques et des paramètres de cotisations particuliers. Les justifications historiques ou sociales ne suffisent toutefois pas à légitimer une telle faiblesse des retraites agricoles. En s’appuyant sur le cadre ouvert par l’article 73 de la Constitution, il est proposé de faciliter l’accès des chefs d’exploitation agricole à la garantie de 75 % du SMIC, en faisant tomber la condition de durée d’assurance en tant que chef d’exploitation.

L’article 4, quant à lui, vise à corriger une inégalité fondamentale entre salariés agricoles dans l’accès à la retraite complémentaire selon les territoires. En 1972, la généralisation des régimes de l’Association générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC) et de l’Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (ARRCO) aux territoires d’outre-mer a laissé de côté les seules professions agricoles, en renvoyant l’extension des accords à une négociation entre partenaires sociaux. Ces négociations n’ont jamais abouti en dehors de la Guyane et de la Martinique, respectivement en 1999 et en 2014.

L’inégalité initiale entre les salariés agricoles de l’Hexagone et ceux des outre-mer se double donc désormais d’une inégalité entre salariés ultramarins selon leur lieu de résidence. La dernière réforme des retraites a renvoyé cet enjeu central à la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement. Trois ans plus tard, nous attendons toujours ce rapport !

Ces inégalités ne sont plus acceptables aujourd’hui. Nous proposons donc de poser explicitement cet enjeu dans la loi, en rappelant la responsabilité des partenaires sociaux dans l’extension du régime. À défaut d’accord au-delà d’un certain délai, il reviendrait à l’État d’engager cette extension par voie d’arrêté.

Tels sont, mes chers collègues, les termes de notre débat d’aujourd’hui. Bien sûr, d’autres enjeux fondamentaux resteraient à aborder, je pense en particulier à l’exigence de parité qui demeure encore une fiction en matière de retraite agricole. Quand on sait ce que représente le travail de la femme dans les exploitations agricoles… Les femmes effectuent un travail colossal et épuisant – à la maison et aussi en dehors, aux côtés de leur conjoint – qui n’a jamais été reconnu. Cette question de la parité n’est pas abordée directement dans le texte et il faudra bien un jour la traiter plus au fond.

Mes auditions ont également permis de faire émerger les conséquences négatives du déclassement des terres agricoles sur l’assiette de cotisation. L’artificialisation des terres se traduit par une perte de cotisations pour les terres agricoles, ce qui n’est pas sans conséquence sur le financement du régime agricole. J’ai engagé une réflexion sur ce sujet et je souhaiterais la faire aboutir d’ici la séance.

J’ai néanmoins la certitude que les avancées contenues dans cette proposition de loi sont à la fois décisives, urgentes et attendues. Nous ne pouvons plus en rester aux logiques du laisser-aller et du report à une éventuelle concertation ultérieure. Il nous reste uniquement le temps d’agir avec détermination, en rappelant notre solidarité la plus totale avec les travailleurs agricoles, en ouvrant aujourd’hui un chemin nouveau.

M. Michel Issindou. Merci, monsieur le rapporteur, d’avoir exposé un sujet qui préoccupe tout le monde : les petites retraites, dont on parle souvent sans en définir précisément les contours, et qui sont aussi le lot des artisans et des commerçants. Notre majorité s’en est préoccupée pendant toute la législature, comme l’illustre la réforme des retraites de 2014.

Un parlementaire aguerri tel que vous, monsieur le rapporteur, n’ignore pas que, présentée à ce moment de la législature, votre proposition de loi a peu de chance d’aboutir. Compte tenu des navettes, le texte est probablement condamné à ne pas avoir de suite. D’autres s’en saisiront. D’ailleurs, au cours des prochaines semaines, la revalorisation des petites pensions de retraite devrait figurer parmi les engagements des candidats à l’élection présidentielle. Chacun ici – et vous le premier, monsieur le rapporteur – aura sûrement à cœur de le rappeler au candidat de son choix. Nous abordons donc le débat sur cette proposition de loi avec beaucoup de sérénité.

Le montant moyen des retraites agricoles se situe effectivement aux alentours de 776 euros. Dès 2017, il sera porté à 860,30 euros, c’est-à-dire à 75 % du SMIC, comme prévu par le texte que nous avons adopté. Vous proposez de le relever à 976 euros, soit 85 % du SMIC.

Je ferai deux observations.

Premièrement, aucun agriculteur de plus de soixante-cinq ans ne devrait toucher moins de 800,60 euros, montant de l’ASPA – nouveau nom de ce qui s’appelait précédemment « minimum vieillesse ». Même si cette allocation ne représente pas une somme considérable et ne règle pas entièrement le problème, il n’est pas normal que des agriculteurs n’en bénéficient pas lorsqu’ils sont en difficulté,. Personne ne devrait percevoir moins, que ce soit dans le milieu agricole ou ailleurs. Or, certains agriculteurs ne connaissent pas cette allocation ; d’autres n’osent pas la demander par dignité, considérant qu’ils doivent se débrouiller par leurs propres moyens.

Deuxièmement, je voudrais rappeler ce qu’est un système contributif : chacun paie des cotisations et en retrouve peu ou prou le montant à la fin de sa vie active, ce qui fait de la pension une sorte de salaire différé. Dans le milieu agricole, les cotisations ont été faibles. Or, conformément à un adage bien connu, les petites cotisations produisent de petites pensions. Certains agriculteurs ne pouvaient pas cotiser plus et d’autres ont été mal conseillés.

Vous avez eu raison de rendre hommage à Germinal Peiro et aux gouvernements successifs qui, depuis celui de Lionel Jospin en 1999, se sont préoccupés du sujet. Notons que la règle portant la pension minimum à 75 % du SMIC avait été adoptée il y a longtemps. Dans les faits, le taux était retombé à 70 % car la droite s’était gardée d’indexer la pension minimum sur l’inflation. Les six engagements pris par le président Hollande en 2012 ont permis les revalorisations que vous avez évoquées.

Cela étant, notre groupe est conscient des difficultés rencontrées par les retraités du monde agricole, sur lesquelles les candidats aux élections auront à se prononcer. Nous reviendrons au cours de la discussion sur le financement de la mesure, qui ne nous paraît pas forcément bon. Quoi qu’il en soit, nous voterons pour votre proposition de loi que nous percevons comme un texte d’appel visant à ouvrir le débat dans la perspective de la prochaine législature.

M. Arnaud Viala. La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles en France continentale et dans les outre-mer. Je tiens à vous remercier, cher collègue Chassaigne, de mettre en évidence les difficultés énormes – à la fois économiques, sociales et sociétales – que rencontrent les agriculteurs retraités.

Dans leur immense majorité, ils perçoivent entre 700 et 800 euros de pension de retraite mensuelle. À la fin d’une vie de labeur, souvent longue et dure, ils ne s’en sortent que parce qu’ils sont logés dans leur maison familiale et qu’ils peuvent compter sur la production de leur potager et de leur poulailler. Ne parlons pas de leur capacité à financer une place en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) lorsque cela devient nécessaire. On comprend aisément qu’avec des revenus aussi bas, ce financement pose souvent un problème insurmontable. Cela est inadmissible et ne pourra pas être passé sous silence aux cours des débats liés aux échéances électorales qui nous attendent en 2017.

Votre texte propose de porter de 75 % à 85 % du SMIC, le niveau minimum de pension pour les agriculteurs retraités. Afin de financer cette hausse, vous envisagez de taxer les banques et les industries liées aux secteurs agricole et agroalimentaire. Si j’ai bien compris, vous souhaitez apporter une modification au texte initial sur ce point.

Comment ne pas partager l’objectif du rapporteur et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ? En tant qu’élu de terrain dans une circonscription rurale, je peux témoigner devant vous de la détresse dans laquelle se trouvent de nombreux agriculteurs retraités. Ils ne peuvent pas vivre décemment une fois retraités parce qu’ils perçoivent des pensions faibles alors qu’ils ont travaillé durant toute leur vie avec acharnement. À cette souffrance économique s’ajoute une souffrance sociale car ces faibles revenus engendrent un isolement et la privation d’activités que pratiquent les retraités ordinaires. Cette situation est d’autant plus indigne que les agriculteurs font vivre la « ferme France » et participent à la richesse de notre territoire. Les petites pensions de retraite, agricoles ou non, représentent un défi d’envergure auquel nous devons répondre, quelle que soit notre famille politique.

En 2012, le président Hollande s’était engagé à revaloriser les pensions de retraite agricoles. Or les quelques améliorations apportées ne sont pas conformes aux annonces initiales : il était question de faire appel à la solidarité nationale alors que la loi de finances pour 2017 prévoit de prélever des cotisations nouvelles sur le régime agricole lui-même. En outre, les mesures adoptées ne seront effectives que dans les prochains mois. C’est dire si la déception est grande parmi les retraités concernés.

Je souhaite à présent émettre des réserves quant au mode de financement de la mesure proposée. Vous indiquez que le surcoût représenté par le passage de 75 % à 85 % du SMIC s’élèverait à 266 millions d’euros en 2018, pour un nombre supplémentaire de bénéficiaires de l’ordre de 85 000. La MSA ne pourra prendre en charge ce surcoût ; le régime de retraite de base et le RCO ont déjà des difficultés à atteindre l’équilibre. L’article 2 de la proposition de loi prévoit donc d’assujettir les sociétés financières et non financières du secteur agricole, c’est-à-dire la grande distribution, les banques et les assurances, à une contribution financière dont le taux serait fixé par décret. Je crains que ces sociétés ne reportent la charge de cette contribution sur leurs clients, c’est-à-dire sur le consommateur. Dans le but de donner du pouvoir d’achat à certains, on en ferait donc perdre à d’autres. C’est pourquoi le vote au sein de notre groupe sera individuel et de sagesse.

Il nous semble que le meilleur moyen d’assurer aux retraités agricoles une pension décente est de leur permettre de gagner décemment leur vie quand ils sont en activité, afin que leurs cotisations puissent être plus importantes et leurs retraites, par voie de conséquence, revalorisées.

Il y a un très vaste débat à ouvrir sur la rémunération de l’acte de production agricole, sur les normes et les contraintes réglementaires qui pèsent sur l’activité agricole française et la rendent moins compétitive que celle de nos voisins européens, sur la question de la transmission – transmettre une ferme, c’est transmettre un patrimoine souvent familial, or cela engendre de nombreuses difficultés en l’état actuel du droit –, sur la place centrale de l’agriculture dans le monde rural, ainsi que sur les dispositions européennes censées accompagner le devenir de notre production agricole.

Malheureusement, avec la crise traversée par les agriculteurs depuis plusieurs années, leurs revenus sont en berne, ce qui laisse augurer des pensions de retraite bien maigres. Il est impératif et urgent de restaurer la compétitivité de nos exploitations agricoles afin que leur activité se développe et puisse se transmettre, et que les revenus des agriculteurs augmentent, leur permettant d’assurer leur avenir une fois à la retraite.

Mme Dominique Orliac. Nous étudions ce matin la proposition de loi de nos collègues du groupe GDR visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles en France continentale et outre-mer.

Dans le cadre du plan quinquennal de revalorisation promis par le Président de la République en 2012, plusieurs avancées ont été réalisées, notamment grâce à la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites et à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. De plus, l’extension du RCO aux conjoints et aides familiaux ainsi que la garantie d’une pension minimale, de base et complémentaire, de 75 % du SMIC net pour une carrière complète faisaient partie du dispositif gouvernemental visant à revaloriser les petites retraites agricoles.

En 2000, lorsque Lionel Jospin était Premier ministre, les retraites agricoles ont été portées à 75 % du SMIC ; pendant les deux législatures suivantes, aucune augmentation n’a eu lieu.

Toutefois, alors que ces deux outils sont venus renforcer les petites retraites agricoles, force est de constater que la précarité continue d’exister pour nombre d’agriculteurs. Vous le notez dans votre exposé des motifs, monsieur le rapporteur : d’après la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), la pension moyenne d’un retraité agricole non-salarié était de 710 euros en 2014 ; en outre, comme nous l’avons vu hier soir à l’occasion d’une autre proposition de loi de votre groupe, il y a une différence de près de 280 euros par mois entre les hommes et les femmes.

Ainsi, comme le rappelle l’Observatoire des inégalités, reprenant les chiffres de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) pour 2014, un individu est considéré, en France, comme pauvre si ses revenus mensuels sont inférieurs à 840 euros, ou 1 008 euros après impôts et prestations sociales. On voit bien qu’une retraite de 850 euros et, à plus forte raison, de 570 euros pour les femmes, place une partie de nos agricultrices et agriculteurs dans une réelle précarité.

De plus, nous le savons, les inégalités entre territoires subsistent. Si les agriculteurs de métropole doivent faire face à de nombreuses difficultés financières, la situation des agriculteurs d’outre-mer est au moins aussi problématique. Le climat et la météo ne permettent guère la diversification, et c’est un paramètre qu’il faut prendre en compte.

Votre proposition de loi tente de remédier à cette précarité. L’article 1er vise à garantir un niveau minimum de revenu, égal à 85 % du SMIC. Notre groupe vous soutient dans cette démarche.

Afin d’assurer l’équilibre du régime tout en portant le minimum de pension à 85 % du SMIC, l’article 2 propose d’assujettir les revenus financiers des sociétés financières et non financières liées au secteur agricole à une contribution complémentaire. Notre groupe entend votre revendication, et soutient l’esprit qui sous-tend cet article.

Quant aux articles 3 et 4, ils comportent plusieurs dispositions visant à revaloriser les pensions des non-salariés et des salariés agricoles des départements et régions d’outre-mer, sans toutefois que la rédaction de l’article 3 fasse spécifiquement référence aux ultramarins.

Notre groupe attendra de voir la tournure que prendra ce texte, compte tenu notamment des amendements qui seront adoptés, mais soyez d’ores et déjà assuré de notre soutien.

Mme Jacqueline Fraysse. Je ne reviens pas sur ce qui a été dit de la situation des professionnels concernés et des améliorations qui ont eu lieu au cours de cette législature, permettant de revaloriser le montant des retraites agricoles. Mais, malgré ces améliorations, les montants perçus par ces personnes restent très faibles – 766 euros par mois, bientôt portés à 860,30 euros – et ne leur permettent pas de vivre dignement.

Ce texte tend notamment à porter le montant minimum des retraites agricoles à 85 % du SMIC, soit 976 euros par mois, un montant qui reste encore modeste, au regard du coût de la vie et de l’investissement professionnel de ces personnes. Je pense que le rapporteur a eu raison d’insister sur la situation des femmes, qui, peut-être plus que dans d’autres professions, ne sont pas reconnues pour leur travail.

Cette proposition de loi est légitime et je me réjouis qu’elle soit soutenue par les groupes socialiste et RRDP. Son avenir incertain, du fait de la fin de législature, a été souligné, mais il faut peser jusqu’au bout pour qu’il vienne poursuivre l’évolution positive enclenchée pour ces catégories professionnelles. Ce texte engage la responsabilité de celles et ceux qui vont nous succéder, et tous les espoirs sont permis pour l’avenir.

M. Jean-Louis Costes. Le constat est partagé par tous. Le niveau moyen d’une retraite agricole – 766 euros – est inférieur au seuil de pauvreté. Nous pouvons tous également partager l’objectif de 85 % du SMIC. C’est en tout cas une position que j’ai défendue auprès du Gouvernement dans l’hémicycle, et je souscris à cette proposition de loi.

Les modalités de financement peuvent donner lieu à des discussions sans fin, mais il me semble important que nous affichions cet objectif, à charge ensuite pour chacun de formuler des propositions de financement. Comme l’a souligné notre collègue Viala, le niveau de 75 % a été atteint grâce à des modalités qui n’étaient pas celles qui avaient été annoncées au cours de la campagne présidentielle.

Vous avez, monsieur le rapporteur, parlé de l’ASPA. La perspective d’une récupération sur succession bloque un certain nombre de retraités agricoles, dont les revenus sont pourtant inférieurs au plafond de revenu ouvrant droit à cette allocation. Or j’ai travaillé sur le sujet avec Gisèle Biémouret : les retraités agricoles ne sont en réalité pas concernés par la récupération sur succession, dans la mesure où l’exploitation sur laquelle ils vivent en est exonérée, mais les gens ne le savent pas !

Mme Annie Le Houerou. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de placer à nouveau ce sujet sur le devant de la scène par votre proposition de loi. C’est une préoccupation majeure que celle des petites retraites en général, celles des agriculteurs chefs d’exploitation en particulier. Je salue la persévérance et le travail de longue haleine de Germinal Peiro, qui a permis, depuis vingt ans, d’apporter des améliorations au système.

Entre 1997 et 2002, le gouvernement de Lionel Jospin a revalorisé les montants des pensions de retraite issues du régime agricole, créé le statut de conjoint collaborateur par la loi d’orientation agricole du 9 juillet 1999, et mis en place un régime de retraite complémentaire obligatoire par la loi du 4 mars 2002, dite « loi Peiro ». L’objectif de 75 % du SMIC pour une retraite complète est atteint aujourd’hui seulement, en 2017, car entre 2002 à 2012 aucun effort n’a été réalisé. M. Viala peut bien critiquer le mode de financement, mais nous, au moins, nous avons agi tandis que son parti n’a rien fait pour les petits paysans durant dix ans où il était au pouvoir.

L’ouvrage a été remis sur le métier en 2012. François Hollande a pris six engagements, qui sont aujourd’hui tenus : sur l’effectivité des 75 % du SMIC, mais aussi sur la reconnaissance des femmes, qui travaillaient durement sans que leur activité soit prise en compte. Nous avons étendu le RCO aux conjoints et aux aides familiaux. Cette proposition de loi, qui vise l’objectif de 85 %, est une nouvelle étape, et le prochain gouvernement devra continuer. D’autres questions devront également être traitées, par exemple celle de la prise en compte des vingt-cinq dernières années, mais aussi celle des artisans et commerçants.

La mise en place du plan de financement a connu des difficultés compte tenu de la crise agricole : pas question, dans ce contexte, d’augmenter de manière sensible les cotisations des agriculteurs. Ces difficultés économiques sont la conséquence du système libéral mondial prôné par la droite. L’agriculture a besoin de régulation pour garantir les prix, donc les revenus et les retraites agricoles.

M. Bernard Perrut. Nous rencontrons régulièrement dans nos circonscriptions des retraités, agriculteurs mais aussi commerçants, artisans ou salariés, et nous connaissons les difficultés qu’ils rencontrent lorsqu’ils perçoivent des retraites insuffisantes. Cette proposition de loi qui a pour but de revaloriser les retraites agricoles a donc un sens, et nous ne pouvons que partager le constat de ses auteurs quant à la nécessité d’agir, ainsi que leur objectif. Les agriculteurs perçoivent des pensions faibles alors qu’ils ont travaillé toute leur vie, et ne peuvent pas tous vivre décemment une fois retraités. Cette situation est indigne, alors que les agriculteurs font vivre la « ferme France » et participent à l’aménagement et à l’entretien de notre territoire.

Cela dit, nous sommes réservés sur la mesure proposée et en particulier sur son financement. Assujettir les sociétés financières et non financières du secteur agricole à une contribution nouvelle dont le taux serait fixé par décret risque de reporter la charge de cette contribution sur les consommateurs, sur les clients de ces sociétés. Nous pensons que ce n’est pas la bonne solution.

Il faut avoir une vision plus globale des moyens d’assurer aux retraités agricoles une pension décente. Cela passe tout d’abord par le fait de leur permettre de gagner décemment leur vie lorsqu’ils sont en activité, afin que leurs cotisations soient plus importantes. Nous savons que les agriculteurs traversent depuis plusieurs années une crise et que leurs revenus sont en berne, ce qui laisse augurer des pensions de retraite bien maigres. Il est impératif et urgent de restaurer la compétitivité de nos exploitations agricoles afin que leur activité se développe et que les revenus des agriculteurs augmentent.

Les gouvernements successifs se sont penchés sur l’évolution des retraites. On peut regretter que les engagements n’aient pas tous été tenus, y compris celui du Président de la République d’augmenter les petites retraites. S’agissant du RCO, si le taux de cotisation du régime reste inchangé en 2016, il augmentera de 0,5 % une première fois en 2017, puis en 2018, en vue de rétablir l’équilibre du régime : un décret paru le 30 décembre 2016 le prévoit. En même temps que vous parlez d’augmentation des retraites des agriculteurs, vous les taxez davantage.

Ce texte, à quelques semaines d’élections nationales, n’aboutira pas, mais il faut que tous les candidats se saisissent du sujet. L’agriculture, les territoires ruraux, les agriculteurs doivent être une priorité.

M. Germinal Peiro. Je remercie notre collègue André Chassaigne. C’est un parlementaire averti et il sait donc que son texte n’aboutira pas, faute de temps d’ici la fin de la législature, mais il a le mérite de nourrir le débat.

Les deux mandats sous lesquels a progressé la question des retraites agricoles sont ceux de Lionel Jospin et de François Hollande. Cela fait vingt ans que je suis cette affaire. Sous le gouvernement de Lionel Jospin, j’ai été chargé d’un rapport sur les retraites agricoles, et je peux témoigner que c’est bien lui qui a adopté un plan quinquennal de revalorisation de la retraite de base : de 79 % pour les conjoints, de 49 % pour les aides familiaux, de 29 % pour les chefs d’exploitation, si bien que nous sommes arrivés à 50 % de la retraite de base des salariés. C’est pourquoi nous avons proposé de créer un régime complémentaire obligatoire dans l’agriculture, à l’instar de ce qui existe pour les commerçants et artisans depuis 1974 et 1976 respectivement.

La difficulté de la question ne réside pas dans le flux – les cotisations que l’on demande aujourd’hui aux agriculteurs, qui auront une meilleure retraite à la fin de leur carrière –, mais dans le stock : les 2,2 millions de retraités agricoles actuels qui touchent de très petites retraites. C’est pourquoi, sous le gouvernement Jospin, le Parlement, à l’unanimité, a adopté le RCO et relevé les retraites en attribuant des points gratuits, financés par la solidarité nationale, et créé une cotisation, fixée à 3 %, car il ne peut y avoir de retraite complémentaire sans cotisation.

Je ne puis laisser dire à notre collègue Arnaud Viala que François Hollande n’a pas tenu ses engagements. Il les a tenus, nous les avons votés. L’augmentation des cotisations comme la sollicitation des réserves de la MSA étaient prévues dans le plan de financement. Nous les avons reportées respectivement à 2016 et 2017 à cause de la crise agricole de 2015, et c’était bien normal.

Les retraites versées aux agriculteurs sont payées à 13 % par les cotisations des agriculteurs et à 87 % par les autres régimes et la solidarité nationale. Il faut continuer, monsieur Chassaigne, vous avez raison, et trouver des sources de financement adéquates. Faire croire que l’on pourra avoir des retraites demain sans cotiser, c’est un mensonge.

Je rejoins M. Costes pour souligner que beaucoup d’agriculteurs ne veulent pas faire appel à l’aide sociale alors qu’ils y ont droit, craignant un recours sur succession. Il faut leur dire, d’une part, que nous avons écarté la quasi-totalité de l’actif successoral du recours sur succession, et, d’autre part, que les conjoints travaillant sur l’exploitation agricole ne sont pas non plus concernés.

Je me réjouis, en conclusion, que le groupe socialiste soutienne cette proposition de loi.

M. le rapporteur. Je remercie tous ceux qui sont intervenus. Aussi diverses que soient nos sensibilités politiques respectives, nous nous accordons pour constater les immenses difficultés des agricultrices et agriculteurs retraités. Certes, beaucoup a déjà été fait, mais on n’avance que par des mesures concrètes qui sont autant d’étapes sur un long chemin.

Les chiffres témoignent que ce problème, que nous devons garder à l’esprit, a fait l’objet d’une attention particulière au cours des cinq dernières années. Dans mon rapport, un tableau précisera d’ailleurs les montants consacrés à l’amélioration des retraites et les effectifs concernés. Je m’en tiendrai ici à l’année 2014. L’extension de la retraite complémentaire obligatoire aux conjoints aides familiaux pour les périodes d’activité antérieures à leur affiliation a profité à 477 000 personnes, pour un coût de 136 millions d’euros. Quant à la réversion des points gratuits des chefs d’exploitation décédés en activité, ce sont 29 300 personnes supplémentaires qui en ont bénéficié, pour un coût de 4 millions d’euros. Enfin, l’attribution de points gratuits de retraite proportionnelle pour cause de longue maladie ou d’invalidité concernait pour sa part 1 300 personnes seulement, pour un coût d’un million d’euros. Il n’est donc pas juste, chers collègues, de prétendre que rien n’a été fait.

Bien sûr, dans un système contributif, c’est l’amélioration du revenu qui serait la solution la plus pertinente pour régler un problème tenant aux cotisations perçues. En l’occurrence, des prix d’achats garantis des productions permettraient cette amélioration du revenu des agriculteurs ; l’assiette des cotisations serait alors suffisante. C’est là le fond du problème. J’avais d’ailleurs déposé une proposition de loi sur cette question. Nous avons souvent évoqué, en commission des affaires économiques, cette question qui nous préoccupe beaucoup – il y a aussi des enjeux européens. C’est la priorité, et nous n’aurions pas à traiter de la même façon cette question de la revalorisation des pensions agricoles si les agriculteurs percevaient le revenu qu’ils méritent compte tenu de leur rôle dans la société.

Si nous sommes obligés de faire appel à la solidarité nationale, c’est également à cause de l’évolution du monde rural et de l’agriculture, à cause aussi de l’exode rural et d’une très importante artificialisation des terres. Ce sont là autant de phénomènes qui ont réduit les recettes des caisses de retraite. Ces agriculteurs retraités, ces femmes et ces hommes qui ont énormément travaillé tout au long de leur vie et qui ont permis de nourrir l’ensemble de la population doivent pouvoir bénéficier de la solidarité nationale.

J’observe que nous retrouvons tous sur l’objectif des 85 %. Certes, il s’agit de notre dernière niche parlementaire, c’est la journée du 2 février prochain qui lui est réservée. La proposition de loi ne pourra donc être examinée par le Sénat avant les élections législatives, mais c’est un signal fort que nous donnons là. Il faudra que chacun prenne ses responsabilités dans le cadre des campagnes électorales. Au-delà de l’affichage de l’objectif, il faudra réfléchir aux moyens de l’atteindre. Vous le savez, les élections sont un grand moment de la vie démocratique de notre pays. Si, malgré des réticences naturelles sur tel ou tel point de cette proposition de loi, nous soulevons unanimement cette question, ce sera un acte fort, qui nourrira les débats des prochains mois.

En présentant mes amendements, j’aurai l’occasion de proposer des réponses à certaines de vos questions, chers collègues, notamment sur le financement. Merci, en tout cas, d’avoir pris ce problème à cœur.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE PREMIER
GARANTIR UN NIVEAU MINIMUM DE PENSION À 85 % DU SMIC ET DE NOUVELLES RECETTES POUR LE FINANCEMENT DU RÉGIME DES NON SALARIÉS AGRICOLES

Article 1er
(Art. L. 732-63 du code rural et de la pêche maritime)

Mise en place d’une garantie « 85 % du SMIC »

Cet article vise à élever à 85 % du SMIC net le niveau minimum de retraite versée aux chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole.

● La garantie d’un montant minimum de retraite pour les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole constitue l’objectif initial du régime de retraite complémentaire obligatoire (RCO).

Ainsi, la loi fondatrice du 2 mars 2002, dite « loi Peiro » (9), a fixé pour objectif dans son article 1er de « garantir, après une carrière complète en qualité de chef d’exploitation ou d’entreprise agricole, un montant total de pension de retraite de base et de retraite complémentaire obligatoire au moins égal à 75 % du salaire minimum de croissance net ».

Cet objectif est longtemps resté théorique, en l’absence de financements dédiés et d’un mécanisme adapté de versements de points. Il faut attendre la réforme du 20 janvier 2014 (10) pour que soient prévues, à son article 35, les conditions de financement et de mise en œuvre de cette garantie « 75 % du SMIC », à partir de l’attribution d’un complément différentiel de points RCO.

● L’article L. 732-63 du code rural et de la pêche maritime définit les conditions d’éligibilité et de montée en charge de ce complément différentiel.

S’agissant des conditions d’éligibilité, en premier lieu, le droit en vigueur distingue deux situations selon la date de liquidation de la pension de base du chef d’exploitation ou d’entreprise agricole :

– pour ceux partis à la retraite avant le 1er janvier 1997, l’accès au dispositif est subordonné à 32,5 années d’activité non salariée agricole et 17,5 années d’assurance en qualité de chef d’exploitation agricole ;

– pour ceux partis à la retraite après cette date, une durée d’assurance
– tous régimes confondus – permettant de bénéficier d’une pension à taux plein et 17,5 années d’assurance en qualité de chef d’exploitation ou d’entreprise agricole devront être justifiées.

S’agissant de la montée en charge du dispositif, en second lieu, le complément différentiel versé aux exploitants devra leur permettre d’atteindre le seuil de 75 % du SMIC net en 2017. Deux paliers intermédiaires sont prévus en 2015 et 2016, respectivement fixés à 73 % et 74 % du SMIC net.

2. L’élévation de la garantie à 85 % du SMIC

L’article 1erde la proposition de loi prolonge et amplifie le versement du complément différentiel en portant de 75 % à 85 % du SMIC net le niveau garanti de retraite agricole.

Cette mesure, qui entrerait en vigueur au 1er janvier 2018, est financée par la contribution créée à l’article 2.

Son coût ne peut être évalué en amont que de manière approximative, en s’appuyant sur les hypothèses d’évolution du SMIC net. L’étude d’impact du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites reconnaissait elle-même la difficulté de procéder au chiffrage précis d’une telle mesure, dès lors que « l’estimation du coût de la mesure est très sensible aux hypothèses d’évolutions du SMIC et des prix » (11).

Une fois ces précautions méthodologiques posées, un chiffrage approximatif de la mesure « 85 % du SMIC » peut être effectué.

La montée en charge de la garantie minimale prévue par le droit en vigueur repose sur les prévisions suivantes, sur la base d’une évolution annuelle du SMIC de 2,25 % et d’une inflation de 1,75 %.

– un coût de 72 millions d’euros en 2015 pour la garantie « 73 % du SMIC » ;

– un coût de 109 millions d’euros en 2016 pour la garantie « 74 % du SMIC » ;

– un coût de 146 millions d’euros en 2017 pour la garantie « 75 % du SMIC ».

Deux effets contraires doivent être gardés à l’esprit : le coût de la mesure augmente mécaniquement à partir d’un effet volume, reposant sur l’élargissement de la base de bénéficiaires ; à l’inverse, le nombre d’exploitants retraités ne cesse de diminuer au fil des années et contient donc cette augmentation.

Au total, à partir des informations recueillies lors des auditions du rapporteur, le surcoût lié à la garantie « 85 % du SMIC » s’élèverait à 266 millions d’euros en 2018, pour un nombre supplémentaire de bénéficiaires de l’ordre de 85 000.

Le tableau ci-dessous traduit la montée en charge du dispositif depuis son entrée en vigueur en 2015 et dans la perspective prévue par la proposition de loi.

ESTIMATION DU NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES ET DU COÛT DU COMPLÉMENT DIFFÉRENTIEL DE POINTS DE RETRAITE COMPLÉMENTAIRE OBLIGATOIRE

Année

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Niveau de la garantie

73 % du SMIC

74 % du SMIC

75 % du SMIC

85 % du SMIC

85 % du SMIC

85 % du SMIC

Nombre de bénéficiaires

229 248

239 675

252 623

333 775

328 435

322 523

Coût annuel

69 591 761

107 429 849

148 768 531

412 545 900

405 120 074

394 181 832

Source : Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, à partir des données de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA).

La contribution prévue à l’article 2 générera des recettes en conséquence.

*

La Commission adopte l’article 1ersans modification.

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* *

Article 2
(Art. L. 732-58 du code rural et de la pêche maritime)

Création d’une nouvelle contribution affectée au régime de retraite complémentaire obligatoire

Cet article prévoit la création d’une contribution d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire destinée à rééquilibrer le régime de retraite complémentaire obligatoire (RCO).

● Le droit en vigueur prévoit le financement du régime RCO à partir de trois ressources identifiées à l’article L. 732-58 du code rural et de la pêche maritime :

– les cotisations versées par les exploitants ;

– une fraction du produit du droit de consommation sur les alcools, fixée à 4,18 % ;

– le produit de la taxe sur les huiles alimentaires.

Ces deux dernières recettes ont été substituées à la fraction du droit de consommation sur les tabacs affectée jusqu’alors, désormais orientée en quasi-totalité vers la branche maladie du régime général par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 (12).

Le régime fait face à un déséquilibre structurel reposant sur son sous-financement. La réponse apportée jusqu’alors par le régime – consistant à puiser dans ses réserves – n’est pas pérenne et rend indispensable l’identification d’une nouvelle ressource. En outre, contrairement au régime de base, le régime de RCO ne peut pas recourir à l’emprunt. Un déficit est donc prévu par la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) à partir de l’exercice 2017.

● La contribution créée à l’article 2 de la proposition de loi poursuit un double objectif :

– d’une part, participer au redressement financier du régime RCO ;

– d’autre part, assurer le financement de la garantie « 85 % du SMIC » prévue à l’article 1er de la proposition de loi.

Elle prend la forme d’une double contribution d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire prélevée sur les revenus financiers des sociétés liées aux milieux agricoles et agroalimentaires.

Le I de l’article 2 précise les paramètres des deux contributions :

– la première contribution assujettit les revenus financiers des prestataires de service visés au livre V du code monétaire et financier – c’est-à-dire, pour l’essentiel, les services bancaires – liés au secteur agricole ;

– la seconde assujettit les revenus financiers des sociétés immatriculées au registre du commerce et des sociétés et liées au secteur agricole.

Le taux de ces contributions est renvoyé à un décret.

Le II définit ensuite les modalités de recouvrement des deux contributions d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire en identifiant la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA), déjà compétente pour le recouvrement des cotisations versées par les non-salariés agricoles.

Le III renvoie, enfin, la définition des modalités d’application de ces dispositions à un décret en Conseil d’État.

*

La commission se saisit de l’amendement AS1 du rapporteur.

M. le rapporteur. À la suite de nos auditions, il apparaît que le financement que nous avions envisagé, avec Huguette Bello et l’ensemble des députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, ne tient pas : il est difficile de définir le périmètre concerné, comme de trouver une justification pertinente de la rupture du principe d’égalité induite par cette taxation spécifique. En l’état, cet article 2 pourrait être censuré par le Conseil constitutionnel.

Je vous propose donc d’asseoir le financement du dispositif sur la taxe sur les transactions financières. Une augmentation de 0,1 point de la taxation des transactions financières procurerait les recettes nécessaires et réglerait la question du déficit de la MSA.

M. Michel Issindou. J’ai bien compris, monsieur le rapporteur, que votre souci était de trouver la bonne solution pour assurer le financement de cette revalorisation des pensions, la rédaction initiale posant un problème de constitutionnalité.

Je propose cependant au groupe Socialiste, écologiste et républicain de s’abstenir – il sera toujours possible d’affiner le texte en vue de son examen dans l’hémicycle. Il semble effectivement que cette taxation additionnelle de 0,1 point ne suffirait pas à couvrir les besoins.

M. le rapporteur. Cela représente 500 millions d’euros !

M. Michel Issindou. Je n’ai pas les mêmes chiffres.

Pour l’instant, j’invite les membres de mon groupe à s’abstenir, et nous pourrons en reparler dans l’hémicycle la semaine prochaine.

La Commission adopte l’amendement, et l’article 2 est ainsi rédigé.

*

* *

TITRE II
DISPOSITIONS EN FAVEUR DE LA REVALORISATION DES PENSIONS
DE RETRAITES AGRICOLES DANS LES DÉPARTEMENTS ET RÉGIONS D’OUTRE-MER

Article 3
Élargissement de l’accès à la garantie « 75 % du SMIC » outre-mer

Cet article facilite l’accès des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole ultra-marins à la garantie « 75 % du SMIC ».

Les exploitants agricoles bénéficient de deux dispositifs spécifiques au régime d’assurance vieillesse des non-salariés agricoles qui permettent d’élever le montant de leur pension à un niveau minimum.

● D’une part, une majoration de pension de retraite, dite « pension majorée de référence » (PMR), est versée depuis le 1er janvier 2009 à l’ensemble des non-salariés agricoles dont la pension de base est inférieure à un niveau défini par décret. Cette majoration permet de porter le montant de la retraite à un niveau minimal fixé respectivement à 681,20 euros pour les anciens chefs d’exploitation et leurs conjoints survivants et à 541,30 euros pour les conjoints collaborateurs, les anciens conjoints participant aux travaux et les aides familiaux.

Ce dispositif, prévu à l’article L. 732-54-1 du code rural et de la pêche maritime, est similaire à celui de minimum contributif (MiCo) prévu par le régime général.

Deux conditions cumulatives étaient prévues dans le dispositif initial pour ouvrir l’accès à la PMR des assurés liquidant leur pension à taux plein à compter du 1er janvier 2002 :

– attester d’un taux minimal d’incapacité permanente, être reconnu inapte au travail ou ne pas pouvoir justifier d’une durée de cotisation suffisante lors de la demande de liquidation des droits à retraite ;

– remplir une condition de durée minimale d’assurance dans le régime agricole, fixée à 17,5 années.

Cette seconde condition a été supprimée par l’article 33 de la loi du 20 janvier 2014 (13).

● D’autre part, un complément différentiel de points de retraite complémentaire obligatoire (RCO) est ouvert aux exploitants agricoles dans le cadre de la garantie « 75 % du SMIC ». Contrairement au dispositif précédent, ce droit n’est pas ouvert aux conjoints collaborateurs et aux aides familiaux aux termes de l’article L. 732-63 du code précité.

● Ces deux dispositifs s’appliquent de manière identique dans l’hexagone et dans les outre-mer.

Afin de clarifier leur articulation, il est prévu que la pension majorée de référence est versée en priorité par rapport au complément différentiel de RCO, aux termes de l’article L. 732-54-3-1 du code précité.

2. L’extension du bénéfice de la garantie « 75 % du SMIC »

L’article 3 de la proposition de loi vise à faciliter l’accès à la garantie « 75 % du SMIC » aux exploitants agricoles ultra-marins dont la pension est inférieure à un certain niveau.

Il ouvre l’accès à cette garantie aux exploitants dont le niveau de pension est inférieur au seuil de 75 % du SMIC net prévu par l’article 35 de la loi du 20 janvier 2014 précitée après application du dispositif de PMR.

Cette disposition maintient la condition de durée d’assurance permettant l’obtention d’une retraite à taux plein dans le régime d’assurance vieillesse des non-salariés agricoles. Elle supprime en revanche la condition de durée minimale d’assurance accomplie en tant que chef d’exploitation ou d’entreprise agricole.

Le régime dérogatoire prévu à cet article se justifie par la situation spécifique des exploitants agricoles outre-mer : la faiblesse des droits ouverts
– résultant notamment des paramètres spécifiques de cotisations – et la mise en place plus tardive des régimes d’assurance vieillesse dans ces territoires rendent nécessaire d’assouplir l’accès au complément différentiel outre-mer.

*

La Commission examine l’amendement AS2 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement règle un problème soulevé par Mme Orliac. Dans sa rédaction initiale, l’article ne cible pas les collectivités d’outre-mer. Je vous propose de remédier au problème et de lever toute ambiguïté en adoptant cet amendement rédactionnel.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS3 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un amendement de clarification. Ce sont bien les seuls chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole qui bénéficient de l’extension de la garantie « 75 % du SMIC », non « toutes les personnes non-salariées des professions agricoles ».

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

*

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Article 4
Extension des régimes de retraite complémentaire
aux salariés agricoles ultra-marins

Cet article vise à garantir la couverture des salariés agricoles par les régimes d’assurance vieillesse complémentaire sur l’ensemble du territoire national.

● Le principe de la généralisation des régimes de retraite complémentaire outre-mer a été posé par la loi du 29 décembre 1972 (14). La couverture par l’Association générale des institutions de retraite complémentaire des cadres (AGIRC) et l’Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (ARRCO) est progressivement entrée en vigueur en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à La Réunion.

Cette généralisation a toutefois laissé de côté les professions agricoles et forestières outre-mer, en rendant facultative l’extension des régimes aux salariés agricoles ultra-marins.

Toute extension est subordonnée à la conclusion d’un accord entre les organisations professionnelles d’employeurs et syndicales de salariés, l’accord faisant ensuite l’objet d’un arrêté d’agrément du ministre chargé de la sécurité sociale, aux termes de l’article L. 911-4 du code de la sécurité sociale.

Deux départements et régions d’outre-mer ont procédé à l’extension des régimes d’assurance vieillesse complémentaire par voie d’accord : la Guyane en 1999 et la Martinique en 2014. Les salariés agricoles de Guadeloupe et de La Réunion ne sont donc aujourd’hui pas couverts par un tel accord.

Cet écart de couverture des régimes d’assurance vieillesse entre les territoires crée une rupture d’égalité manifeste.

● L’absence d’équité dans l’accès à l’assurance vieillesse complémentaire n’a pas été corrigée lors de la réforme du 20 janvier 2014 (15).

Son traitement a alors été renvoyé à la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement, prévu dans les termes suivants par l’article 35 de la loi du 20 janvier 2014 :

« Dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur les retraites des salariés agricoles de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion, notamment sur les modalités de mise en place d’un dispositif de retraite complémentaire au bénéfice de ces salariés, à l’instar de celui créé par la loi n° 2002-308 du 4 mars 2002 tendant à la création d’un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles, pour les exploitants agricoles. »

Ce rapport n’a pas été remis. Dans le cadre du rapport sur la mise en application de cette loi de MM. Michel Issindou et Denis Jacquat (16), le Gouvernement avait indiqué que ce rapport serait remis au plus tard à la fin de l’année 2016. Tel n’a pas été le cas.

2. Garantir l’accès de tous les salariés agricoles à la retraite complémentaire

En l’absence de correction de ce défaut d’équité entre les salariés agricoles de l’hexagone et ceux des outre-mer, mais également entre les salariés agricoles ultra-marins, il est aujourd’hui nécessaire d’accélérer le processus de convergence et d’engager l’extension des régimes complémentaires.

L’article 4 de la proposition de loi propose en conséquence de mener à terme l’extension des régimes de retraite complémentaire à l’ensemble des départements et régions d’outre-mer. Il revient à l’État d’engager ce processus en réunissant les organisations syndicales de La Réunion et de Guadeloupe afin de définir les conditions de cette extension.

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La Commission se penche sur l’amendement AS4 du rapporteur.

M. le rapporteur. Fruit de débats et réflexions approfondis, cet amendement vise à clarifier la portée de l’article 4, lequel tend à mettre un terme à cette inacceptable inégalité d’accès des salariés agricoles à la retraite complémentaire. L’extension des régimes de retraite complémentaires aux salariés agricoles, renvoyée aux partenaires sociaux, a sans cesse été repoussée faute d’accord sur les conditions de sa mise en œuvre. Avec la conclusion d’un accord en Guyane en 1999 et d’un autre à la Martinique en 2014, l’inégalité entre les salariés agricoles de métropole et ceux d’outre-mer se double d’une inégalité entre ces derniers.

La loi du 20 janvier 2014 a renvoyé la question à un rapport du Gouvernement au Parlement, que nous attendons toujours trois ans plus tard.

L’amendement vise donc à rappeler le principe clé de la négociation entre partenaires sociaux, tout en définissant une échéance au-delà de laquelle l’État pourra, s’il le souhaite, engager directement ce processus. Cette explicitation du droit en vigueur vise à corriger sans plus tarder une inégalité centrale et injustifiable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

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* *

Article 5
Compensation financière des organismes de sécurité sociale

Cet article précise les conditions de financement des dispositions prévues par la proposition de loi.

Trois mesures ont un impact direct sur le financement des régimes de retraite complémentaire :

– d’une part, l’augmentation à 85 % du SMIC net du niveau minimum de retraite servie aux chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole impliquera de financer le complément différentiel de points de retraite complémentaire obligatoire (RCO). Le financement prévu à l’article 2 devrait toutefois y répondre ;

– d’autre part, l’extension de l’accès des exploitants ultra-marins à la garantie « 75 % du SMIC », prévue à l’article 3, générera une charge supplémentaire pour le régime de retraite RCO ;

– enfin, l’extension des régimes de retraite complémentaire des salariés à l’ensemble des départements d’outre-mer impliquera de définir de nouvelles conditions de financement, qui reposeront en premier lieu sur l’effort contributif dans le cadre de cotisations. Le rattrapage des années non cotisées, si un effet rétroactif était retenu, pourrait toutefois justifier la prise en charge par la solidarité nationale d’une partie de l’acquisition des droits.

Pour y répondre, l’article 5 de la proposition de loi pose le principe d’une compensation financière de l’État aux organismes de sécurité sociale. Cette compensation reposera sur l’augmentation à due concurrence des droits pesant sur le tabac mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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La Commission adopte l’article 5 sans modification.

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Titre

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS5 du rapporteur.

Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

M. Arnaud Viala. Le groupe Les Républicains a voté en faveur de cette proposition de loi et le fera de nouveau la semaine prochaine, lors de son examen en séance.

M. Germinal Peiro. Puisque cette proposition de loi fait l’unanimité, je conseille à l’ensemble de mes collègues d’interroger leurs candidats respectifs à l’élection présidentielle. Il y a cinq ans, l’Association nationale des retraités agricoles de France (ANRAF) a sollicité tous les candidats. Un seul a répondu, par écrit. C’était François Hollande, et il a tenu ses engagements.

Mme la présidente Catherine Lemorton. C’est vrai !

M. Germinal Peiro. Je vous conseille donc, mes chers collègues, de solliciter vos candidats respectifs.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Merci, cher collègue, d’avoir rappelé les faits.

En conséquence, la commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR

Ø Fédération nationale agroalimentaire et forestière (FNAF-CGT) – M. Roger Perret, secrétaire

Ø Ministère des affaires sociales et de la santé – Direction de la sécurité sociale (DSS) – Mme Agathe Denéchère, sous-directrice des retraites et des institutions de la protection sociale complémentaire, M. Denis Lebayon, sous-directeur du financement de la sécurité sociale, et M. Clément Lacoin, chef du bureau de la synthèse financière

Ø Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA) (*) – M. Pascal Cormery, président, M. Michel Brault, directeur général, et M. Christophe Simon, chargé des relations parlementaires

Ø Association nationale des retraités agricoles de France (ANRAF) – M. Pierre Esquerré, président, MM. Guy Soulage et Paul Philippe, vice-présidents, M. Roger Treneule, secrétaire général, et M. Bernard Favodon, membre du conseil d’administration

© Assemblée nationale

1 () Loi n° 52-799 du 10 juillet 1952 assurant la mise en œuvre du régime de l’allocation de vieillesse des personnes non salariées et la substitution de ce régime à celui de l’allocation temporaire.

2 () La catégorie des non-salariés agricoles rassemble les personnes non-salariées occupées aux activités énumérées à l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime (activités de culture et d’élevage, activités équestres, entreprises de travaux agricoles, travaux forestiers et entreprises de travaux forestiers, activités de prolongement de l’acte de production agricole, activités agro-touristiques, entreprises artisanales rurales et mandataires d’assurance agricole).

3 () Loi n° 2002-308 du 4 mars 2002 tendant à la création d’un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles.

4 () Loi n° 72-1223 du 29 décembre 1972 portant généralisation de la retraite complémentaire au profit des salariés et anciens salariés.

5 () Pour plus d’éléments, se reporter au rapport de Mme Monique Orphé, présenté au nom de la commission des affaires sociales : http://www.assemblee-nationale.fr/14/rapports/r4054.asp.

6 () Loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014.

7 () Décret n° 2016-1961 du 28 décembre 2016 fixant pour les années 2016 à 2018 les modalités de financement du régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles.

8 () Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

9 () Loi n° 2002-308 du 4 mars 2002 tendant à la création d’un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles.

10 () Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.

11 () Voir l’étude d’impact du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, p. 87 : http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/projets/pl1376-ei.pdf

12 () Loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017.

13 () Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.

14 () Loi n° 72-1223 du 29 décembre 1972 portant généralisation de la retraite complémentaire au profit des salariés et anciens salariés.

15 () Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.

16 () Rapport d’information de MM. Michel Issindou et Denis Jacquat du 5 octobre 2016 sur la mise en application de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites : http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i4074.asp.