Jacques Bouchacourt

1923 - 2000

Informations générales
  • Né le 31 mai 1923 à Fourchambault (Nièvre - France)
  • Décédé le 27 décembre 2000 à Neuilly-sur-seine (Hauts-de-Seine - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IVe législature
Mandat
Du 30 juin 1968 au 1er avril 1973
Département
Nièvre
Groupe
Union des démocrates pour la République

Biographies

Biographie de la Ve République

BOUCHACOURT (Jacques)
Né le 31 mai 1923 à Fourchambault (Nièvre)
Décédé le 27 décembre 2000 à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine)

Député de la Nièvre de 1968 à 1973

Jacques Bouchacourt naît le 31 mai 1923 à Fourchambault dans la Nièvre. La rue dans laquelle se situe sa maison porte le nom de sa famille. Il est de fait issu d’une influente famille d’industriels locaux. Son arrière-grand-père, Charles Bouchacourt, ingénieur originaire de Lyon, avait installé en 1851 à Fourchambault une usine de boulonnerie et de pièces de forge comptant environ 500 ouvriers. L’entreprise fut ensuite dirigée par son grand-père puis son père, André Bouchacourt (décédé en 1956), jusqu’à la crise économique des années 1930. Cette société était connue pour ses réalisations sociales : cours d’apprentissage, régimes d’assurance maladie et de retraite, allocations aux familles nombreuses.

Après une scolarité au cours Saint-Louis à Paris et au lycée de Nevers, sanctionnée par le baccalauréat, Jacques Bouchacourt réussit en 1943 le concours de l’école de commerce ESSEC (École supérieure des sciences économiques et commerciales) tout en pratiquant le sport à un haut niveau (champion universitaire en 1942). Il restera, toute sa vie, attaché à son ancienne école, assurant notamment la vice-présidence de l’UNEC (Union nationale des anciens élèves des écoles de commerce). Durant la guerre, Jacques Bouchacourt, réfractaire au Service du travail obligatoire en juillet 1943, rejoint la Résistance. Il appartient au réseau Sosies, puis à un maquis du Cher (ORA Vengeance), dont il devient le chef. Engagé volontaire le 1er octobre 1944, il est aspirant au titre des FFI au 8e Groupe de reconnaissance divisionnaire (GRDI) devant la poche de Royan, puis chef de peloton de chars au 12e Régiment de chasseurs (1ère Armée française), cité à l’ordre du Corps d’Armée. Démobilisé le 3 février 1946, il reste en contact avec les anciens résistants et FFI (comme président d’honneur des Combattants volontaires de la Nièvre) et l’institution militaire (comme officier de réserve). En 1957, il est diplômé de l’Ecole supérieure des officiers de réserve du service d’état-major (ORSEM). Colonel de réserve, il commande de 1973 à 1979 le 12e régiment de dragons à Orléans.

Au sortir de la guerre, Jacques Bouchacourt entame des études de droit jusqu’à la soutenance d’une thèse, à la Faculté de droit de Paris en 1950. Sa thèse de doctorat, intitulée « Aspects économiques et financiers des chèques postaux », sera publiée par le ministère des PTT. Il obtient également un DES d’économie politique et de droit public. A partir de 1946, il travaille pour le ministère des Affaires étrangères, comme attaché à la direction des affaires politiques du Commissariat général aux affaires allemandes et autrichiennes. Il est successivement le collaborateur de Michel Debré, d’Alain Savary, puis d’Alain Poher. De juillet à décembre 1947, il occupe les fonctions d’attaché économique à Berlin. Nommé en 1950, avec dispense d’âge, administrateur du cadre des affaires allemandes et autrichiennes, il est affecté à la direction Europe du Quai d’Orsay. Il siège dans les délégations françaises aux conférences sur la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) et le projet d’armée européenne.

En janvier 1952, cet adhérent du Rassemblement du peuple français (RPF) abandonne le secrétariat de la conférence d’experts chargée d’élaborer la Communauté européenne de défense (CED), après avoir manifesté à plusieurs reprises et par notes son désaccord au ministère des Affaires étrangères. Le 21 octobre 1952, par un arrêté signé de Robert Schuman, il est suspendu de ses fonctions et traduit devant un conseil de discipline pour avoir appelé l’attention de plusieurs personnalités françaises sur les « graves dangers » que le traité de la CED fait, selon lui, peser sur l’indépendance nationale et la paix. En décembre 1952, il est nommé au Haut-Commissariat de la République française en Autriche, chargé du problème délicat des dommages de l’occupation française dans les provinces du Tyrol et du Vorarlberg. Il séjourne neuf mois en Autriche. En décembre 1953, il obtient une disponibilité et quitte les services du ministère des Affaires étrangères pour reprendre librement à Paris le combat contre la ratification du traité instituant le CED. Il mène l’offensive en qualité de secrétaire du Comité d’action pour l’indépendance nationale, une officine où les gaullistes sont très présents. Il est l’auteur de la brochure intitulée « Ratifier, c’est trahir », diffusée à 500 000 exemplaires par le comité, en mars 1954. Cet engagement, qu’évoquent le président Vincent Auriol dans le journal de son Septennat et l’historienne Georgette Elgey dans le deuxième tome (« La République des contradictions ») de son Histoire de la IVe République, contribuera à l’échec final de la CED, repoussée par les députés français le 30 août 1954.

De 1954 à 1966, Jacques Bouchacourt est l’adjoint du secrétaire général de la Fédération des industries mécaniques et transformatrices des métaux (FIMTM). Il crée le service outre-mer de cette importante association professionnelle et installe des délégations permanentes à Dakar, Alger, Brazzaville et Abidjan. Au sein de la FIMTM, il met en place des stages pour des ingénieurs étrangers séjournant en France, supervise l’envoi de matériels français pour des centres d’enseignement technique à l’étranger (Liban, Pérou et Iran), favorise le développement industriel dans les pays de la zone franc (notamment en Algérie dans le cadre du plan de Constantine), assure la promotion de filiales industrielles à l’étranger.

De sensibilité gaulliste, il se félicite du retour au pouvoir du général de Gaulle en juin 1958. Lors des législatives de novembre 1958, il est le suppléant de Philippe Barrès, ancien député RPF de Meurthe-et-Moselle et candidat de l’Union pour la nouvelle République (UNR) dans la 1ère circonscription de Paris, mais c’est Jean Legaret, candidat du Rassemblement des gauches républicaines-Indépendant qui l’emporte au second tour avec 18 592 voix contre 15 241 à Philippe Barrès et Jacques Bouchacourt. Il remet en février 1959 au Premier ministre Michel Debré une étude intitulée « Perspectives de la zone franc », suggérant un Plan Marshall de la Zone franc et la création d’une administration de la coopération disposant de missions dans les divers pays de la Zone. Le ministre s’en inspire pour créer, quatre mois plus tard, le ministère de la Coopération. En 1964, il prend position avec éclat contre le « cartiérisme », cette doctrine de repli sur l’Hexagone à laquelle le journaliste Raymond Cartier a attaché son nom. Jacques Bouchacourt fait connaître son désaccord avec cette ligne dans des articles parus dans Les Echos et dans La Nouvelle revue française d’outre-mer, organe du Comité central français pour l’outre-mer.

De 1966 à 1968, Jacques Bouchacourt dirige à Villeurbanne une usine de 1 800 ouvriers des Etablissements Richard-Continental, une entreprise de matériels de travaux publics. Il conclut plusieurs contrats, notamment avec Cuba, la Chine populaire et plusieurs pays africains. En 1966, il fonde et pilote le Groupement d’études économiques ECOMONDE, qui publie des études remarquées sur l’intéressement des salariés, le protectionnisme américain et la nécessité de mieux adapter les structures économiques françaises à la compétition internationale.

Sa compétence sur les questions économiques et ses amitiés gaullistes lui valent d’entrer au Conseil économique et social en 1964. Par un décret signé du général de Gaulle et de Georges Pompidou, il intègre la section de l’Expansion économique extérieure. Il sera nommé de nouveau et dans la même section en 1965 puis en janvier 1968. Au Conseil économique et social, il appelle de ses vœux une politique étrangère européenne plus solidaire face aux problèmes de sous-développement. Il en démissionne, le 1er juillet 1968, en raison de son élection à l’Assemblée nationale.

Lors des législatives anticipées de juin 1968, Jacques Bouchacourt a en effet obtenu l’investiture gaulliste dans la 2ème circonscription de la Nièvre. Au premier tour, il prend la tête avec 18 389 voix contre le candidat communiste Robert Hostier (14 242), le député sortant et maire de Fourchambault, qui ne totalise que 19 958 voix. Au second tour, il rassemble 22 449 voix et 52,93 % des suffrages. L’élu gaulliste s’inscrit au groupe Union des démocrates pour la République (UDR) et rejoint la commission de la production et des échanges, dont il est secrétaire. Il intervient fréquemment à la tribune de l’Assemblée, et ce, dès la première séance de la nouvelle législature à l’occasion du débat sur la déclaration du gouvernement relative à sa politique générale (17 juillet 1968). Il dépose deux propositions de loi, commentées dans les médias, sur le maintien d’un service minimum en cas de grève des services publics (octobre 1970) et sur des modifications du code du travail et le plein exercice des libertés syndicales (mars 1972). Rapporteur de divers projets de loi et signataire de propositions de loi émanant du groupe UDR, votées entre 1968 et 1973 et concernant le développement industriel et agricole, il est l’auteur d’un amendement au VIe Plan concernant l’octroi d’une aide à l’industrialisation en milieu rural. En octobre 1970, il est co-fondateur puis secrétaire général, à l’Assemblée nationale (avec Pierre Godefroy, député de la Manche) du groupe parlementaire pour l’amitié paneuropéenne, qui réunit des députés de tous les partis. Il se rend en URSS, en 1970, dans le cadre d’une mission d’étude parlementaire et effectue des séjours du même type en Grande-Bretagne et dans des pays africains. Il s’abstient lors du vote du projet de loi portant création et organisation des Régions (loi du 5 juillet 1972).

Candidat investi par l’UDR dans la 2e circonscription de la Nièvre (Cosne) aux législatives de 1973, Jacques Bouchacourt, arrivé en tête au premier tour avec 31,4 % des voix (soit 13 514 voix contre 11 144 au PS Jacques Huyghues des Etages), est battu au second par le socialiste, qui bénéficie, avec 25 176 voix, d’un bon report des voix communistes (le candidat du PCF avait obtenu 10 808 voix au premier tour) dans le cadre du Programme commun. Nettement devancé avec 43,2 % des suffrages exprimés seulement, Jacques Bouchacourt conserve toutefois un ancrage dans son ancienne circonscription en demeurant administrateur de la Camosine (Caisse pour les monuments et sites de la Nièvre, une association pour la sauvegarde du patrimoine départemental), dont il avait été en 1970 le cofondateur avec le préfet Jacques Gandouin. Il est réintégré dans les cadres du ministère des Affaires étrangères comme conseiller des Affaires étrangères de 1ère classe. Mais dès octobre 1973, il entre en service détaché à la Société chimique des Charbonnages de France-EDF-Chimie. Il conseille le directoire de l’entreprise pour les activités internationales, notamment au Qatar, dans les pays est-européens, en Amérique du Sud et dans le Sud-Est asiatique. Il est nommé conseiller du commerce extérieur de la France par un décret de mars 1976.

De 1976 à mai 1978, Jacques Bouchacourt, qui a pris ses distances avec le gaullisme partisan officiel incarné par le nouveau Rassemblement pour la République (RPR) de Jacques Chirac, évolue dans le petit monde des clubs et associations gaullistes de gauche d’opposition : Union des jeunes pour le progrès (UJP), Fédération des républicains de progrès (FRP) et surtout Centre d’études et de recherches égalité et liberté (CEREL), un club gaulliste dissident dont il est le secrétaire général et qui défend la participation d’une Europe confédérale opposée à la logique des blocs et à la course aux armements. C’est avec le soutien de ces maigres troupes qu’il se présente aux législatives du printemps 1978 dans la même circonscription. Ce franc-tireur, qui finance sur ses fonds personnels son journal de campagne, Démocrates du Val de Loire nivernais (le journal titre son premier et unique exemplaire : « Jacques Bouchacourt, un homme d’envergure nationale »…), est sévèrement battu, dès le premier tour, avec seulement 8,9 % des voix. C’est le député et maire de Cosne-sur-Loire, le socialiste Jacques Huyghues des Etages qui fait la course en tête au premier tour et l’emporte au second avec 59% des voix contre Francis Lefebvre-Vary, candidat de l’Union pour la démocratie française (UDF) et du Parti républicain. L’ancien député s’est marginalisé politiquement.

Réintégré dans les cadres du Quai d’Orsay à partir de juillet 1982, il est chargé de mission auprès de la Direction des affaires politiques pour suivre les dossiers relatifs aux Nations unies et aux organisations internationales. En janvier 1983, il est l’auteur d’une étude soumise au président de la République sur les problèmes du désarmement et du développement et sur les perspectives d’un nouvel ordre international fondé sur la solidarité des Etats. Le texte propose notamment la création d’un impôt mondial de solidarité, déductible des budgets militaires (dont le taux serait de l’ordre de 5 % de chacun de ces budgets) et le versement du produit de cet impôt annuel à un Fonds géré par une Organisation de solidarité mondiale (OSM) à laquelle tous les Etats seraient invités à adhérer, dont le siège serait fixé en France et dont le conseil d’administration serait composé des quinze Etats membres du Conseil de sécurité de l’ONU. La moitié de la contribution de chaque Etat serait utilisée dans le pays donateur et l’autre moitié serait constituée de dons ou de prêts à faible taux d’intérêt finançant des projets de développement dans les pays pauvres. Le projet s’inspire largement d’une autre note rédigée par l’ancien député, en mars 1976, et qui prévoyait déjà la création d’un Fonds européen de solidarité mondiale.

Après 1978, Jacques Bouchacourt cesse toute activité politique, mais reste engagé dans le monde associatif. Il préside ainsi à partir de 1992 le Rassemblement français pour l’Europe des peuples. Jacques Bouchacourt s’éteint le 27 décembre 2000. Marié en décembre 1947 à la franco-américaine Anne Bolam, il était père de trois enfants. Officier de la légion d’honneur à titre militaire et de l’Ordre national du Mérite, il était titulaire de plusieurs décorations étrangères.