Louis, Marie, Stanislas Fréron

1754 - 1802

Informations générales
  • Né le 17 août 1754 à Paris ( - Généralité de Paris France)
  • Décédé le 15 juillet 1802 à Les Cayes (Saint-Domingue)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Révolution
Législature
Convention nationale
Mandat
Du 14 septembre 1792 au 26 octobre 1795
Département
Seine
Groupe
Montagne

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Membre de la Convention, né à Paris (Généralité de Paris) le 17 août 1754, mort à Les Cayes (Saint-Domingue( en 1802, fils du critique Elie-Catherine Fréron (1719-1776), dont les invectives de Voltaire ont assuré la célébrité; il eut pour ami le roi Stanislas, beau-père de Louis XV. À la mort de son père (il avait alors vingt-deux ans), il lui succéda dans la propriété du privilège de l'Année littéraire, qu'il fit continuer sous son nom, par les abbés Royou et Geoffroy, tandis qu'il terminait ses études au collège Louis-le-Grand, où il eut pour camarades les deux Robespierre et Camille Desmoulins.

En 1789, il adopta avec ardeur les principes de la Révolution, et, dès le mois de décembre de cette année, il fit paraître, sous le pseudonyme de Martel, une feuille intitulée l'Orateur du peuple, qui compta parmi les organes les plus passionnés du parti populaire.

Fréron fut un des premiers à dénoncer la trahison de Mirabeau, qu'il accusa de corruption et menaça de la lanterne ; puis il écrivit, lorsque le célèbre orateur se fut réconcilié avec Mirabeau le jeune : « Mirabeau attendait pour se rapprocher de son frère et lui rendre son amitié que ce dernier se fût rendu digne de lui par quelque nouvel attentat contre la nation. Non seulement il était le plus âgé, mais il avait l'aînesse des crimes. » Le 4 juillet 1790, l'Orateur du peuple publia cette lettre d'un inconnu : « Je vous demande la parole, monsieur l'Orateur, pour dénoncer à votre tribune la démarche vraiment suspecte que vient de faire M. Riquetti l'aîné... Hier, à six heures du matin, M. Riquetti l'aîné, ci-devant comte de Mirabeau, est parti de Paris à pied et s'est rendu sur le chemin qui conduit à Saint-Cloud. Une espèce de chaise de poste, tout attelée, l'y attendait. Afin qu'aucun valet ne fût dans la confidence de ce voyage mystérieux, dont l'objet est sans doute de la plus haute importance, un capitaine de dragons, neveu dudit Riquetti, servait de postillon. La veille, pour laisser croire à ses gens qu'il était à la campagne, il n'était pas rentré chez lui, n'avait pas renvoyé sa voiture, et avait décidé de passer la nuit à l'hôtel d'Aragon, chez sa nièce ; ce qu'il a fait. Arrivé à Saint-Cloud, il est monté au château. Là, une conférence très secrète s'est établie entre une très grande dame, l'archevêque de Bordeaux, ledit Riquetti et un autre personnage dont il n'est pas encore temps que je vous dise le nom, mais que vous connaîtrez sous peu de jours. Cette conférence a duré depuis sept heures du matin jusqu'à neuf. C'est alors seulement que le pouvoir exécutif s'est montré, et il est demeuré une heure et demie avec Mirabeau... etc. »

En juin 1791, Fréron appréciait ainsi, dans sa feuille, la fuite de Louis XVI : « S'il est vrai que les Autrichiens aient passé la Meuse, et que le sang français ruisselle sur les frontières, Louis XVI doit perdre la tête sur un échafaud et la reine doit, comme Frédégonde (il voulait dire Brunehaut), être traînée dans les rues de Paris à la queue d'un cheval entier. » Quelques jours plus tard, Fréron figura, au Champ-de-Mars, parmi les plus ardents promoteurs de la déchéance.

Assidu au club des Cordeliers, il prit part à la journée du Dix-Août, et fut membre de la Commune de Paris.

Le 14 septembre 1792, il fut élu, avec plusieurs autres dantonistes, député du département de Paris à la Convention nationale, le 15e sur 24, par 454 voix (647 votants). Il prit place à la Montagne, se déclara contre les Girondins et vota, lors du procès du roi, la mort sans appel ni sursis :
« Si, après avoir déclaré, dit-il, que Louis Capet est coupable de haute trahison et de conspiration contre l'Etat, vous ne lui appliquez pas la peine portée par la loi, je demande qu'avant de porter le décret de réclusion, l'image de Brutus soit voilée et son buste retiré de cette enceinte. J'ai poursuivi le tyran jusque dans son palais ; j'ai demandé sa mort, il y a deux ans, dans des écrits imprimés, qui m'ont valu les poignards de La Fayette. Je vote pour la mort. »

Après le 31 mai, Fréron fut désigné avec Barras, Salicetti et Robespierre le jeune, comme commissaire auprès de l'armée chargée de reprendre Marseille sur les insurgés. La lutte ne fut pas longue. Marseille reprise, Fréron ordonna contre plusieurs habitants des mesures de rigueur exceptionnelles, et décida que la ville s'appellerait « Sans-Nom» ; il fit raser plusieurs édifices, et se proposait de combler le port avec les démolitions (janvier 1794) ; mais un décret de la Convention, du 12 février, décida que le nom de Marseille serait maintenu. Le 25 septembre 1793, la trahison ayant livré Toulon aux Anglais, la vengeance de cet attentat fut confiée au zèle de Fréron et de ses collègues. Fréron se signala encore, après la victoire, par d'impitoyables représailles. « Fusillades, écrivait-il, fusillades jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de traîtres ! » « Les fusillades sont à l'ordre du jour ; en voilà plus de six cents, écrit-il le 16 nivôse an II. La mortalité est parmi les sujets de Louis XVII. » Il eût voulu raser Toulon jusque dans ses fondements. Le comité de salut public s'y opposa.

De retour à Paris, il fut d'abord bien accueilli au club des Jacobins ; mais la lumière s'étant faite sur les vrais sentiments de Fréron, Robespierre et les siens ne tardèrent pas à le traiter en ennemi. Il le leur rendit bien.

Au neuf thermidor, Fréron se montra avec Barras, Tallien et autres, des plus acharnés à réclamer la tête de Robespierre : « Ah ! qu'un tyran est dur à abattre ! » s'écria-t-il dans son impatience. Il eut aussi une part directe dans le vote du décret de mort rendu contre Couthon : il lui reprocha d'avoir voulu « monter au trône sur les cadavres des représentants du peuple ! »

Après la chute des Jacobins, Fréron, suivi des débris du parti dantoniste, revendiqua le titre de thermidorien et quitta la Montagne pour aller siéger au côté droit. Il y devint l'actif agent de la réaction : un jour il proposa de raser l'Hôtel-de-Ville et le club des Jacobins, un autre jour, de brûler le faubourg Saint-Antoine. Il demanda aussi la mise en accusation de Fouquier-Tinville : « Tout Paris réclame son supplice, fit-il ; il faut que ce monstre aille cuver dans les enfers tout le sang dont il s'est enivré. »

Plus tard, et immédiatement après l'exécution de Fouquier (7 mai 1795), il insista pour l'abolition du régime révolutionnaire et pour la suppression du tribunal. Avec Dusaulx comme collaborateur, il fit de son Orateur du peuple une sorte de moniteur officiel de la contre-révolution, s'exprima avec la même frénésie que par le passé, mais dans un sens tout différent, et se mit à la tête d'une bande de jeunes aristocrates qui, sous le nom de Jeunesse dorée de Fréron, parés d'habits élégants, coiffés en cadenettes et la tête ornée de poudre, parcouraient la ville en insultant et en malmenant « les patriotes », aux accents du Réveil du peuple, chanson royaliste à la mode.

Lors des mouvements du 12 germinal et du 1er prairial an III, où le député Féraud paya de la vie la fatale ressemblance de son nom avec Fréron, celui-ci marcha avec Barras contre le faubourg Saint-Antoine, et, vainqueur, voulut, suivant son usage, le livrer aux flammes. Mais l'insurrection royaliste du 13 vendémiaire arrêta les thermidoriens dans la voie de la réaction.

Fréron reparut à la Montagne et sembla revenir à la cause révolutionnaire ; il vit de jour en jour décroître son influence.

Non compris dans les réélections qui replacèrent les deux tiers de la Convention dans les Conseils établis par la Constitution de l'an III, il fut, au mois de novembre 1795, envoyé dans les départements du Midi en qualité de commissaire du Directoire exécutif. Il s'efforça, changeant encore de parti, d'y calmer les fureurs qui s'étaient donné carrière depuis le neuf Thermidor ; il s'ensuivit, entre ses amis de la veille et lui, une polémique de brochures où les récriminations les plus violentes furent échangées. Fréron engagea la lutte en publiant son Mémoire historique sur la réaction royale et sur les malheurs du Midi (1796) ; Durand de Maillanne, Isnard et autres lui répondirent.

Fréron parvint à se faire élire au Conseil des Cinq-Cents par l'assemblée électorale de la Guyane, mais les deux Conseils refusèrent de valider cette élection. Alors il disparut définitivement de la scène politique.

Sans fortune, il obtint, avec assez de peine, de Bonaparte, qui avait vécu dans son intimité, une place modeste dans l'administration des hospices. Lié avec Pauline Bonaparte, il s'en fallut de peu qu'il ne devînt le beau-frère du premier consul.

Dédommagé par le poste de sous-préfet d'un des arrondissements de Saint-Domingue, il fit partie de l'expédition du général Leclerc, devenu à sa place l'époux de la sœur de Bonaparte, et dont il partagea la fortune : à peine arrivé à destination, il succomba, victime des rigueurs du climat.

On a de Fréron, outre les écrits déjà cités, des Réflexions sur les hôpitaux et particulièrement ceux de Paris, et l'établissement d'un mont-de-piété (1800).