Auguste, Simon, Hubert, Marie Ravez
1770 - 1849
Député de 1816 à 1829, pair de France, représentant en 1849, né à Lyon (Généralité de Lyon) le 21 octobre 1770, mort à Bordeaux (Gironde) le 3 septembre 1849, fils, dit un biographe, d'un « honnête marchand de parapluies », il fit de bonnes études chez les Oratoriens de Lyon, et débuta comme clerc de procureur. Avocat à Lyon en 1791, il y prit la défense de plusieurs prêtres inquiétés pour leur attitude contre-révolutionnaire, concourut à la résistance de la ville contre les troupes de la Convention, et dut prendre la fuite après la défaite de l'insurrection. Ce fut alors qu'il se retira à Bordeaux (24 décembre 1793), où il se tint caché pendant quinze mois chez un homme de lettres, M. Delevre, dont il épousa la fille (janvier 1796).
Il se distingua bientôt comme avocat, se lia intimement avec Laîné, et adressa, en 1806, à l'archichancelier Cambacérès, comme président du collège électoral de l'arrondissement de Bordeaux, un discours rempli de protestations de dévouement à la dynastie impériale. Toutefois, Ravez fut, en 1814, un de ceux qui entraînèrent avec le plus d'ardeur les Bordelais à arborer sans retard le drapeau blanc. L'année suivante, il refusa de défendre les frères Faucher (V. ce nom), dont il avait été l'ami et qui lui avaient écrit en ces termes: « Nous avons subi notre interrogatoire, et les officiers qui viennent d'y procéder nous demandent de désigner sur-le-champ notre défenseur. Nous ne saurons en choisir un qu'après votre refus, auquel nous ne pouvons croire, parce que nous ne pouvons deviner la cause qui le motiverait. Cependant, si le fatum qui pèse sur nous nous y condamnait, nous vous conjurons de nous accorder cinq minutes d'entretien. Vous ne refuseriez pas ce genre d'appui à des infortunés coupables, vous l'accorderez au malheur immérité. Naguère nous aurions cru pouvoir réclamer d'autres sentiments. »
Elu, le 4 octobre 1816, député de la Gironde, au grand collège, par 110 voix (197 votants, 262 inscrits), Ravez prit place au côté droit et vota avec la minorité ministérielle. Il soutint le projet de loi restrictif de la liberté individuelle, parla, à propos de la continuation de la censure, de la « sollicitude paternelle du gouvernement » à l'égard de la presse, dit qu'il regardait les feuilles périodiques comme une classe à part qui lui paraissait mériter une police tout à fait spéciale, et se montra (1817-1818) l'adversaire de l'application du jury aux délits de la presse.
Le 16 avril 1817, il fut nommé conseiller d'Etat en service extraordinaire et sous-secrétaire d'Etat à la Justice : en cette qualité il porta fréquemment la parole devant les Chambres au nom du Gouvernement.
En 1819, la Chambre des députés le désigna pour son président, et ce choix fut confirmé par le roi : Ravez occupa le fauteuil, avec plus de talent peut-être que d'impartialité, pendant dix sessions successives.
Il sut conquérir une très grande influence sur la majorité parlementaire, et fut réélu, le 4 novembre 1820, député du 1er arrondissement de la Gironde (Bordeaux), par 750 voix (1 254 votants, 1 385 inscrits), contre 481 à M. Balguerie, puis, le 25 février 1824, par 686 voix (1 257 votants, 1 396 inscrits), contre 556 à M. Balguerie ; enfin, le 24 novembre 1827, au grand collège du même département, par 278 voix (526 votants, 637 inscrits). Le même jour, il obtint également la majorité dans le grand collège du département du Nord : 303 voix (482 votants, 657 inscrits). Ayant opté pour la Gironde, il fut remplacé dans le Nord, le 28 avril 1828, par M. de Brigode. Dans l'intervalle, il avait été nommé grand officier de la Légion d'honneur (18 août 1824), et commandeur des ordres du roi (31 mai 1825). Le 6 octobre 1824, Ravez fut promu premier président à la cour royale de Bordeaux. Il avait rempli en 1820 près la cour des pairs les fonctions de procureur général dans l'affaire de la conspiration contre la dynastie pour laquelle plusieurs officiers avaient été arrêtés.
Comme député, il se prononça très vivement contre l'admission de Grégoire, et opina pour les lois d'exception et pour le nouveau système électoral. Comme président, il eut fréquemment maille à partir avec l'opposition libérale : « Vous n'êtes pas un président, lui dit un jour Alexandre de Lameth ; vous êtes un membre du côté droit ! » La Biographie pittoresque des députés écrivait en 1820, à son sujet : « Un président intègre doit éviter avec le plus grand scrupule de donner lieu non seulement au reproche, mais encore au moindre soupçon de partialité, et c'est par la rigoureuse observation de ce devoir qu'il peut acquérir dans ces fonctions une réputation honorable. Mais la politique prescrit à celui qu'elle a placé au fauteuil des devoirs d'un autre genre ; et c'est par une autre voie qu'elle le conduit aux honneurs et au pouvoir. Diriger une discussion vers le but marqué par le gouvernement, poser les questions avec une adresse captieuse; employer son autorité à étouffer autant que possible la voix de l'opposition, favoriser les interruptions, les digressions qui peuvent déconcerter une attaque vive, pressante et inquiétante pour le ministre ; faire naître habilement un incident pour détourner l'attention d'un point qu'il importe de faire perdre de vue, ou pour refroidir les esprits émus par un discours énergique ; prolonger ou précipiter selon les conjonctures le terme d'une discussion; profiter d'un moment de trouble pour presser une délibération qui demanderait du calme et un examen réfléchi ; mettre brusquement aux voix une question mal comprise et mal éclaircie; enlever pour ainsi dire de vive force une décision conforme aux vues ministérielles ; trouver un prétexte pour éloigner de la tribune un orateur puissant, et capable de jeter une vive lumière sur un point qu'on a intérêt à rendre ou à laisser obscur ; dans une circonstance ou il serait urgent de décider une question incidente par un débat vif et improvisé, accorder à dessein la parole à un membre inhabile à parler et qui vient avec un discours écrit et étranger à la question du moment, trancher de son autorité privée une difficulté sujette à controverse, en un mot être partial avec adresse passionné avec l'apparence de la modération. »
Le 10 août 1829, Ravez fut élevé à la pairie. Il soutint jusqu'au bout, de ses votes, le gouvernement de Charles X, et fut rendu à la vie privée par la révolution de 1830.
Etranger à toute fonction publique pendant le règne de Louis-Philippe, il reparut sur la scène parlementaire après les événements de février 1848. Membre du conseil général de la Gironde, il fut élu, le 13 mai 1849, représentant de ce département à l'Assemblée législative, le 12e sur 13, par 67 448 voix (125 001 votants, 179 161 inscrits). Mais il fut enlevé quelques mois après (septembre), par une courte maladie.
La ville de Bordeaux a donné son nom à une de ses rues.