Charles, Guillaume Boysset
1817 - 1901
Représentant à l'Assemblée nationale de 1871, député de 1876 à 1889, né à Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire), le 29 avril 1817, il étudia le droit et se fit recevoir avocat. Connu de bonne heure pour ses opinions républicaines, il fut nommé procureur de la République à Chalon par le gouvernement provisoire de 1848 ; mais il ne conserva ces fonctions que quelques mois. Révoqué par la réaction, il collabora au journal le Peuple, de Proudhon.
Il se présenta, le 13 mai 1849, aux élections pour l'Assemblée législative, et fut élu représentant de Saône-et-Loire, le 4e sur 12, avec 73 880 voix (109 200 votants, 152 441 inscrits). Il siégea à la Montagne, vota à la fois contre la majorité de droite et contre les ministres de L.-N. Bonaparte, et se montra très opposé à l'expédition romaine, à la loi de 1850 sur l'enseignement, à la loi du 31 mai sur le suffrage universel, etc.
Lors du coup d'Etat il fut arrêté, incarcéré à Lyon et envoyé en exil. Il parcourut la Suisse, l'Italie et l'Espagne, et ne rentra en France qu'en 1867 ; aussitôt il recommença la lutte contre l'Empire, par la publication dans la Bibliothèque libérale d'un livre de philosophie politique : le Catéchisme du XIXe siècle (1868).
Le 24 mai 1869, candidat de l'opposition démocratique dans la 2e circonscription de Saône-et-Loire, il obtint 4 208 voix contre 14 491 à M. Chagot, candidat officiel, élu. (Deux autres candidats d'opposition avaient obtenu de leur côté : M. Daron, 8 575 voix, M. d'Estampes, 1 276). Le même jour, M. Boysset réunissait dans une autre circonscription du même département, la 5e, 2 402 voix contre 12 893 accordées au candidat officiel élu, M. Lacroix.
Après le 4 Septembre, il fut nommé maire de Chalon, puis commissaire du gouvernement chargé d'organiser la défense dans les départements de la Côte-d’Or et de Saône-et-Loire. Candidat aux élections générales du 8 février 1871, il échoua, et n'entra à l'Assemblée nationale, comme représentant de Saône-et-Loire, qu'à l'élection partielle du 2 juillet, avec 69 746 voix sur 103 778 votants et 170 329 inscrits. M. Boysset prit place à la gauche radicale (Union républicaine) et vota :
- le 22 juillet 1871, pour l'amendement Marcel Barthe proposant de passer à l'ordre du jour sur les pétitions des évêques ;
- le 30 août, contre le pouvoir constituant de l'Assemblée ;
- le 3 février 1872, pour le retour de l'Assemblée à Paris ;
- le 24 mai 1873, contre l'acceptation de la démission de Thiers ;
- le 19-20 novembre, contre le septennat ;
- le 20 janvier 1874, contre la loi des maires ;
- le 30 janvier 1875, pour l'amendement Wallon ;
- le 25 février 1875, pour l'ensemble des lois constitutionnelles.
Il présenta ou soutint, notamment, à la tribune de l'Assemblée, une proposition réclamant la suppression du budget des cultes.
Président du conseil général de Saône-et-Loire (1871-1886), il fut réélu, le 20 février 1876, député de la 1re circonscription de Chalon-sur-Saône, par 10 907 voix (15 640 votants, 19 556 inscrits), contre M. de la Chaise, candidat conservateur, 4 636, avec une profession de foi où il disait : « Ma vie, déjà longue, a été consacrée tout entière à la liberté, à la République, aux doctrines d'ordre et de progrès. Vous avez pu suivre ma conduite parlementaire. Mes votes ont été invariablement républicains. J'ai suivi M. Thiers tant qu'il a été président de la République, sachant que son ambition généreuse était de fonder cette République si ardemment combattue. Après le 24 mai, j'ai été l'adversaire du gouvernement de combat ; puis je n'ai point hésité à concourir, au prix de concessions nécessaires, à l'institution républicaine du 25 février avec l'impartiale présidence du maréchal de Mac-Mahon »... M. Ch. Boysset siégea dans la majorité républicaine et fut des 363.
Réélu le 14 octobre 1877, par 12 022 voix (16 409 votants, 20 316 inscrits), contre 4 307 au baron Paul Thénard il vota dans la législature,
- pour le ministère Dufaure,
- pour l'élection de M. Jules Grévy comme président de la République,
- pour le retour du Parlement à Paris,
- pour l'amnistie,
- pour l'article 7 et l'application des lois aux congrégations religieuses,
- ainsi que pour la séparation de l'Eglise et de l'Etat,
- pour le rétablissement du divorce,
- contre le rétablissement du scrutin de liste,
- et pour la liberté de réunion.
Activement mêlé aux débats parlementaires, il fut l'auteur d'un très grand nombre de projets de loi ; il déposa, le 22 mars 1879, une proposition tendant à l'investiture nouvelle de tous les magistrats en fonctions. Une autre, signée de lui et de MM. Menier et Laroche-Joubert, était relative au mode d'élection des juges de commerce; elle datait de 1877. Rapportée le 7 juin 1879 par M. Boysset, elle fut successivement l'objet d'une longue discussion, le premier jour entre M. Ribot, Giraud, Honoré Roux, Le Royer, Laroche-Joubert, R. Goblet, Gatineau et le rapporteur, puis d'un nouveau rapport de M. Boysset (17 juillet 1879). Alors intervint le projet de loi du gouvernement sur l'élection des juges consulaires. Un rapport définitif fut présenté par le député de Chalon sur les deux projets, et la loi fut votée en 1880. M. Boysset proposa encore la même année une motion tendant à modifier divers articles de la loi du 21 nov. 1872 sur le jury.
En 1881, il fut le rapporteur de la proposition de loi de M. Bardoux sur le rétablissement du scrutin de liste. Contrairement aux conclusions du rapport, la proposition fut adoptée par la Chambre le 19 mai 1881; mais, le mois suivant, elle fut rejetée par le Sénat. Très attaché au maintien du scrutin uninominal, M. Boysset, dans son rapport, avait nettement et non sans quelque acrimonie, pris parti contre Gambetta, dont nul n'ignorait les préférences pour le scrutin de liste.
Il débutait en constatant que le pays ne réclamait nullement la réforme électorale et se demandait s'il était « opportun » de soulever une question qui divisait si profondément le parti républicain. Après ce préambule, le rapporteur résumait et combattait les arguments des partisans du scrutin de liste. Il y répondait d'abord par l'historique des assemblées parlementaires françaises depuis 1789 jusqu'à nos jours, et concluait que les grandes assemblées sont les seules qui soient sorties du scrutin uninominal. Il déclarait ensuite que l'intimité de l'électeur et de l'élu est la garantie rationnelle par excellence, et qu'il est inadmissible de choisir des candidats sur la foi de comités. Quant à la corruption et à la vénalité, le scrutin de liste ne parviendrait pas à modifier cet état de choses. On ne façonne pas les moeurs par un décret. Enfin le rapporteur affirmait que le scrutin de liste aboutit à l'écrasement des minorités. « Il y aura, disait-il, des régions entières où les candidatures républicaines seront défaites. Quinze à vingt départements seront perdus pour la cause républicaine. »
La lecture du rapport, rempli de personnalités contre M. Bardoux et ses « puissants amis », fut accueillie par les protestations des opportunistes ; quittant le fauteuil présidentiel, Gambetta jugea nécessaire d'intervenir de sa personne dans la discussion.
Aux élections du 21 août 1881, M. Boysset obtint, par 10 672 voix (12 056 votants, 21 435 inscrits), contre 369 voix à M. Dumay, collectiviste, le renouvellement de son mandat. Il siégea à la gauche radicale, dont il devint le président et dont il rédigea le programme politique, à diverses reprises, il réclama la suppression du budget des cultes et la suppression des Facultés de théologie. Adversaire déclaré des cabinets Gambetta et Ferry, il les combattit constamment, repoussa les crédits demandés pour l'expédition du Tonkin et vota en outre :
- 4 mars 1882, pour l'amendement J. Roche sur l'élection du maire de Paris;
- 29 janvier 1883, pour le principe de l'élection de la magistrature ;
- 6 mars, contre l'ordre du jour de confiance accordé au ministère Ferry, etc.
M. Ch. Boysset se prononça enfin pour la révision de la Constitution de 1875.
Porté, en octobre 1885, sur la liste républicaine radicale de Saône-et-Loire, il réunit au premier tour de scrutin 46 667 voix, et fut élu au scrutin de ballottage, le 18 octobre, par 80 245 voix sur 140.510 votants et 174 124 inscrits. Il appartint, comme dans la législature précédente, à la fraction la plus avancée de la gauche radicale, et vota :
- 8 février 1886, pour la proposition Michelin tendant à rechercher les origines et les causes de l'expédition du Tonkin et à déterminer la responsabilité de ses auteurs ;
- 27 novembre, contre le maintien de l'ambassade du Vatican ;
- 2 décembre, pour l'amendement Colfavru, portant suppression des sous-préfets ;
- 17 mai 1887, pour la proposition de résolution de la commission du budget (chute du ministère Goblet) ;
- 19 novembre, pour la discussion immédiate de l'interpellation Clemenceau (chute du ministère Rouvier) ;
- 31 mars 1888, pour l'urgence de la proposition de révision (chute du ministère Tirard).
Dans la dernière session, M. Ch. Boysset s'est prononcé
- pour le rétablissement du scrutin uninominal (11 février 1889),
- contre l'ajournement indéfini de la révision de la Constitution (14 février),
- pour les poursuites contre trois députés membres de la Ligue des patriotes (14 mars),
- contre le projet de loi Lisbonne restrictif de la liberté de la presse (2 avril),
- pour les poursuites contre le général Boulanger (4 avril).
Il a collaboré à plusieurs journaux et revues, notamment au XIXe Siècle, à l'Evénement et à la Revue politique, et a refusé la croix de la Légion d'honneur en 1871.
Né le 29 avril 1817 à Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire), mort le 22 mai 1901, à Paris.
Représentant de la Saône-et-Loire à l'Assemblée nationale de 1871 à 1876
Député de la Saône-et-Loire de 1876 à 1901.
(Voir première partie de la biographie dans ROBERT ET COUGNY, Dictionnaire des Parlementaires, t. 1, p. 467).
Il fut réélu aux élections générales du 22 septembre 1889, dans la 1re circonscription de Chalon, au premier tour de scrutin, par 9.059 voix contre 5.743 à M. Duréault. Membre de diverses commissions spéciales, il prit part à la discussion du budget de l'instruction publique de l'exercice 1891, au cours de laquelle il appela l'attention du Gouvernement sur le personnel du laboratoire des travaux pratiques d'histologie à la Faculté de médecine de Paris (1890).
Il retrouva son siège, toujours au premier tour de scrutin et sans concurrent aux élections générales du 20 août 1893, par 10.576 voix sur 11.624 votants, et du 8 mai 1898, par 13.429 voix sur 14.799 votants.
En 1898, âgé de 81 ans, il devint le doyen d'âge de la Chambre, et en cette qualité présida les séances du 11 janvier 1898, des 1er et 2 juin 1898 et du 10 janvier 1899. Il fut écouté avec attention, dans un respectueux silence, et unanimement applaudi lorsqu'il descendit du fauteuil présidentiel.
Il devait mourir, deux ans plus tard, le 22 mai 1901 à Paris. Le Président Paul Deschanel annonça son décès à la Chambre à la séance du 23 mai. Après avoir rappelé ses trente années d'activité politique, il déclara : « Pour nous, le meilleur moyen d'honorer sa mémoire, est de garder au cœur le culte de ses vertus : l'unité de la vie morale, le don de soi-même à une idée, le culte délicat de l'honneur, le souci religieux de la grandeur française, inséparable de la civilisation et du droit. »