René, Joseph Brice
1839 - 1921
Représentant à l'Assemblée nationale de 1871, député de 1876 à 1889, né à Rennes (IIIe-et-Vilaine), le 23 juin 1839, d'une famille de commerçants, il fit son droit et, reçu docteur, s'inscrivit au barreau de sa ville natale, où il exerça avec succès la profession d'avocat. Dans les dernières années de l'Empire, M. René Brice entra dans l'opposition, et combattit le pouvoir, de sa personne comme candidat libéral, au conseil général dans le canton sud-ouest de Rennes, et de sa plume comme rédacteur d'un journal de circonstance, l'Electeur indépendant, publié en 1869.
Conseiller municipal de Rennes, il fut, après le 4 septembre 1870, nommé par le gouvernement de la Défense nationale sous-préfet de Redon, mais il se démit presque aussitôt de ses fonctions, dans le dessein de rester éligible à l'Assemblée nationale, dont la convocation prochaine était annoncée. M. Brice fut, jusqu'à l'époque des élections, membre de la commission municipale de Rennes et adjoint au maire de cette ville.
Le 8 février 1871, sa candidature, de nuance très modérée, fut acceptée à la fois par les conservateurs et par les républicains, ce qui lui valut d'être élu représentant d'Ille-et-Vilaine à une grande majorité : 102 540 voix sur 109 672 votants et 142 751 inscrits.
La même année, il devint conseiller général du canton de Sel ; à la Chambre, il siégea au centre gauche, se déclara « républicain modéré, mais très convaincu », et dans un compte rendu de son mandat, adressé en 1872, à ses électeurs, insista en disant : « Quelles garanties spéciales nous offre donc la monarchie, et ne vaut-il pas mieux une République régulière où les changements sont périodiques, s'accomplissent légalement, et où les pacifiques batailles électorales remplacent les révolutions ? »
Très favorable d'ailleurs aux opinions conservatrices, M. Brice vota d'abord le plus souvent avec la droite :
- pour les préliminaires de paix,
- pour la pétition des évêques,
- contre le retour de l'Assemblée à Paris.
Il s'abstint dans le scrutin sur le pouvoir constituant de l'Assemblée.
C'est à partir du 24 mai, qu'il se rapprocha sensiblement de la gauche ; après s'être prononcé contre l'acceptation de la démission de Thiers, il vota encore :
- contre le septennat,
- contre la loi des maires
- et contre le ministère de Broglie.
Il soutint les propositions et projets de loi tendant à l'établissement de la République telle que l'organisa la Constitution de 1875, et vota l'ensemble de cette Constitution.
Il prit la parole dans plusieurs discussions, et présenta notamment à la loi sur les conseils généraux un amendement demandant que les journaux fussent autorisés à publier les séances sans être tenus à en reproduire le compte rendu officiel.
Aux élections du 20 février 1876, M. René Brice devint député de l'arrondissement de Redon, par 11 981 voix sur 17 825 votants et 21 893 inscrits, contre 5 836 à M. Delavigne. Il siégea de nouveau au centre gauche et fut des 363.
Réélu, le 14 octobre 1877, par 12 345 voix (19 718 votants, 22 843 inscrits), contre 7 197 à M. Gérard, bonapartiste, candidat officiel, il fut élu par la majorité républicaine secrétaire de la Chambre, et s'associa à la plupart des votes de cette majorité :
- le 20 janvier 1879, pour l'ordre du jour de confiance en faveur du ministère Dufaure ;
- le 30 janvier (au Congrès), pour l'élection de M. Jules Grévy à la présidence de la République ;
- le 5 juin, pour l'invalidation de Blanqui, élu à Bordeaux ;
M. Brice se prononça pour les projets de loi du gouvernement sur l'enseignement, la liberté de la presse et le droit de réunion.
Il aborda plusieurs fois la tribune, principalement dans les débats sur des questions d'affaires et y fit preuve d'une réelle compétence ; il fut rapporteur (juin 1880) d'un projet de loi, déjà voté par le Sénat, sur la législation des chemins de fer d'intérêt local et des tramways, et il prit part, le 1er juillet de la même année, à la discussion qui précéda le vote de la loi sur l'organisation des caisses d'épargne postales, à l'exemple de l'Angleterre.
M. René Brice obtint, sans concurrent, le renouvellement de son mandat dans sa circonscription, le 21 août 1881, par 11 461 voix sur 12 146 votants et 23 741 inscrits. Il soutint, dans cette législature, la politique opportuniste de M. Jules Ferry, et se prononça notamment :
- contre l'institution d'un maire de Paris élu,
- contre la proposition Boysset tendant à l'abrogation du Concordat,
- contre le principe de l'élection de la magistrature,
- contre la révision de la Constitution,
- pour le maintien de l'ambassade auprès du pape, etc.
Il se déclara, en outre, pour les doctrines protectionnistes.
Porté aux élections d'octobre 1885, sur la liste opportuniste d'Ille-et-Vilaine, il passa, le 2e sur 9, avec 62 084 voix sur 123 294 votants, 153 125 inscrits. Il a pris encore, dans cette Chambre, une part importante aux discussions parlementaires.
Membre de la réunion du centre gauche, il a voté avec la fraction la plus modérée du parti républicain, contre les ministères radicaux, et pour les cabinets opportunistes Rouvier et Tirard.
Au début de la législature, le 26 novembre 1885, il développa une interpellation dans laquelle il reprocha aux ministres de la Guerre et de la Marine d'avoir passé des marchés de fournitures qui permettaient aux adjudicataires de s'acquitter en produits étrangers ; il voyait dans ce système un dommage réel fait à l'agriculture nationale. La majorité de la Chambre lui donna raison par l'adoption d'un ordre du jour qui admettait, en principe, la nécessité de réserver les fournitures à l'agriculture nationale.
Le député d'Ille-et-Vilaine revint, d'ailleurs, à la charge, en juillet 1886, et renouvela ses reproches à l'administration de la Guerre au sujet des avoines achetées à l'étranger; le ministre ayant répondu que l'exclusion complète des avoines exotiques entraînerait un surcroît de dépenses de deux millions, la Chambre se borna à émettre le vœu que « la plus grande partie » des fournitures militaires devait être réservée aux producteurs français.
Nouvelle interpellation de M. René Brice le 29 octobre 1887 : l'orateur fut assez heureux pour faire revenir la Chambre sur une décision précédente, en obtenant, dans l'intérêt de la petite agriculture, le vote d'un ordre du jour invitant le général Ferron, ministre de la Guerre, à recourir au système de la gestion directe par les corps de troupes, au lieu des grandes entreprises pour la fourniture des fourrages militaires. Cette résolution nouvelle entraînant une dépense immédiate de 11 millions 1/2, parce qu'elle obligeait l'Etat à rembourser sur le champ aux entrepreneurs en exercice la valeur des approvisionnements qu'ils avaient constitués, l'obligation fut jugée trop onéreuse par la commission du budget, qui, en décembre de la même année, demanda à la Chambre de se déjuger encore une fois. Sur l'assurance de M. René Brice qu'il suffirait d'un crédit de 4 millions 1/2, la Chambre accorda seulement ce dernier chiffre, et maintint sa décision. Dans la dernière session de la législature M. René Brice a voté :
- pour le rétablissement du scrutin uninominal (14 février 1889),
- pour l'ajournement indéfini de la révision de la Constitution (14 février),
- pour les poursuites contre trois députés membres de la ligue des Patriotes (14 mars),
- pour le projet de loi Lisbonne restrictif de la liberté de la presse (2 avril),
- pour les poursuites contre le général Boulanger (4 avril).
Né le 23 juin 1839 à Rennes (Ille-et-Vilaine), mort le 26 août 1921 à Paris (6e).
Représentant de l'Ille-et-Vilaine à l'Assemblée Nationale de 1871 à 1876. Député de l'Ille-et-Vilaine de 1876 à 1889 et de 1893 à 1921.
(Voir première partie de la biographie dans ROBERT ET COUGNY, Dictionnaire des Parlementaires, t. 1, p. 486).
Il échoua aux élections générales des 22 septembre et 6 octobre 1889, dans la 2e circonscription de Rennes, ses adversaires lui ayant reproché avec véhémence de s'occuper personnellement de nombreuses sociétés financières. Il était en effet sous-gouverneur du crédit foncier, administrateur des chemins de fer de l'Ouest, du crédit foncier d'Algérie, de la Paternelle, du crédit franco-canadien et ces activités privées ne furent pas étrangères à son échec.
Mais il prit sa revanche aux élections générales du 20 août 1893 en se faisant réélire au premier tour de scrutin, par 8.807 voix contre 6.288 à M. Paul Carron, député sortant.
Inscrit au groupe des républicains progressistes, il appartint à diverses commissions spéciales, et notamment à celle chargée de l'examen des projets et propositions de loi sur le tarif général des douanes. Son activité ne se ralentit pas. Il intervint à la tribune pour parler plus particulièrement : des droits de douanes sur le blé et ses dérivés, à l'importation (1894) ; de la répression des fraudes commises dans la vente des beurres (en qualité de rapporteur) (1896) ; de l'établissement d'un droit d'entrée sur le plomb et ses dérivés (en qualité de rapporteur) (1896).
Réélu aux élections générales du 8 mai 1898, au premier tour de scrutin, sans concurrent, par 12.635 voix, il interpella le Gouvernement sur les chemins de fer d'intérêt local, et les tramways (1900). Il retrouva son siège aux élections générales du 27 avril 1902, toujours au premier tour de scrutin, par 13.534 voix contre 26 à M. Huet. Il intervint en 1904 au sujet de l'amnistie des délits de régie, de chasse et de pêche.
Réélu sans concurrent aux élections générales des 6 mai 1906, 24 avril 1910 et 26 avril 1914, par 13.798, 13.111 et 12.090 voix, toujours au premier tour de scrutin, il intervint au cours de la discussion du budget de l'agriculture de l'exercice 1912, au sujet des comices agricoles qui ne purent se réunir en 1911. Au début de la législature de 1914, il s'inscrivit au groupe de la fédération républicaine.
Aux élections générales du 16 novembre 1919, il prit la tête de la liste républicaine, qui eut quatre élus. Il obtint lui-même 47.759 voix sur 114.347 votants. Mais son activité se ralentit, il ne participa plus aux débats, et à la séance du 18 octobre 1921, le Président Raoul Péret annonçait son décès à la Chambre. Il avait épousé Antoinette Doucet, fille du secrétaire perpétuel de l'Académie française, et était devenu le beau-père de Paul Deschanel. Il disparaissait à 82 ans. Dans son éloge funèbre, le Président Raoul Péret, après avoir retracé la longue carrière politique du défunt, déclara : « A cette place, nos yeux le chercheront souvent, notre souvenir retrouvera le collègue qui était la courtoisie même, le causeur délicat et charmant, le parlementaire attaché à toutes les traditions qui sont la garantie du prestige de nos assemblées. Nous sommes doublement affligés, car, dans le moment même que nous voyons disparaître un collègue vénéré que distinguaient les plus rares qualités d'esprit et de cœur notre pensée va vers celui qui, durant des années inoubliables a présidé nos débats avec un si vif éclat. »
Il avait été fait chevalier de la Légion d'honneur, le 4 janvier 1892.
Date de mise à jour : mai 2014