Claude Fauchet

1744 - 1793

Informations générales
  • Né le 22 décembre 1744 à Dornes ( - Généralité de Moulins - France)
  • Décédé le 31 octobre 1793 à Paris (Département de Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Révolution
Législature
Assemblée nationale législative
Mandat
Du 1er septembre 1791 au 20 septembre 1792
Département
Calvados
Groupe
Gauche
Régime politique
Révolution
Législature
Convention nationale
Mandat
Du 5 septembre 1792 au 31 octobre 1793
Département
Calvados
Groupe
Gauche

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Député en 1791, membre de la Convention, né à Dornes (Généralité de Moulins, France), le 22 septembre 1744, exécuté à Paris (Département de Paris), le 31 octobre 1793, il fit de brillantes études, à la suite desquelles il embrassa l'état ecclésiastique.

Dans une lettre à Bernardin de Saint-Pierre, du 20 mai 1788, il dit qu'il n'avait que 900 livres de rente de patrimoine. Entré dans la communauté libre des prêtres de Saint-Roch, à Paris, il fut choisi pour précepteur des enfants du marquis de Choiseul, cousin du ministre, remplit quelque temps, auprès de l'archevêque de Bourges, Phélypeaux, les fonctions de grand vicaire, et fut nommé ensuite prédicateur du roi et abbé commendataire de Montfort-Lacarre, en Bretagne, par l'appui de d'Alembert et de Bernardin de St-Pierre : « Ces gens (la cour), écrivait-il peu après, sont fort honnêtes; mais des vertus il n'en est pas question. » Il prononça, en 1785, l'oraison funèbre du duc d'Orléans, petit-fils du régent, et l'année suivante celle de l'archevêque Phélypeaux. En 1788, chargé du dernier sermon de la fête de la Rosière à Suresnes, il manifesta, à cette occasion, des sentiments religieux et politiques dont la hardiesse déplut à la cour. Fauchet se vit rayé de la liste des prédicateurs du roi.

Philosophe chrétien, membre de la secte des illuminés, il avait déjà la réputation d'un réformateur quand la Révolution s'ouvrit. Un jour, prêchant à l'abbaye de Longchamp, devant la belle-sœur du roi, il avait décrit en termes saisissants la vie du pauvre, puis s'arrêtant tout à coup pour anathématiser les grands de la terre et, le visage altéré, le bras étendu vers la princesse, il s'était écrié: « Pardonnez, Madame, je vais remuer la boue du cœur humain. » Il servit avec enthousiasme, par la parole et par l'action, la cause des idées nouvelles, et déploya le plus grand zèle dans les assemblées des électeurs et des sections ; à la prise de la Bastille, on le vit, le sabre à la main, animer et conduire les assaillants. Les mémoires du temps racontent qu'il ramena trois fois à l'attaque le peuple, dispersé par le canon de la forteresse.

La chaire fut dès lors, pour lui, un autre champ de bataille sur lequel il ne cessa de porter des coups à l'édifice monarchique. Chargé, dès le 6 août, de célébrer les citoyens tués au siège de la Bastille, il choisit ce texte de Saint-Paul: Vos enim ad libertatem vocati estis, fratres: « Vous êtes appelés à la liberté, frères. » Il commença par attaquer ouvertement le despotisme des rois, et développa le thème suivant : « Lorsque des fourbes, que les princes des prêtres avaient apostés, étaient venus demander à Jésus : « Devons-nous payer le tribut à César ? » Jésus, devinant le piège, avait répondu: « Pourquoi me tentez-vous? Apportez un denier que je voie. De qui sont cette image et cette inscription? De César? Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. » Mais il reste à décider ce qui est à César. Or, est-ce la vie des hommes, est-ce leur liberté, est-ce leur âme immortelle ? La nature humaine est-elle à César ou à Dieu? » Et le prédicateur ajoutait: « Le droit d'oppression n'est à personne; le droit de défense est à tous,... ne l'oubliez pas ! c'est comme ennemi de César que Jésus fut immolé. » L'impression de ce sermon fut si vive qu'une foule considérable précédée d'un héraut qui portait une couronne civique, conduisit triomphalement Fauchet à l'Hôtel de Ville.


Quelques jours après, dans l'église paroissiale de Sainte-Marguerite, en présence des districts réunis du faubourg St-Antoine, Fauchet prononça cette parole : « Jésus-Christ n'est que la divinité concitoyenne du genre humain. » La bénédiction des drapeaux ayant eu lieu, il monta en chaire encore et présenta la Révolution française comme l'accomplissement des prophéties d'Isaïe. Convaincu qu'en disant : « Mon royaume n'est pas de ce monde,» Jésus-Christ avait entendu désigner seulement la société païenne qu'il venait détruire, Fauchet évitait de conclure à une vie de contemplation et d'ascétisme. « Frères, s'écria-t-il, jurons dans le premier temple de l'empire, sous ce vaste dais d'étendards consacrés à la religion par la liberté, jurons que nous serons heureux. » (Troisième discours de Claude Fauchet sur la liberté française.)


Ce fut, inspiré par ces croyances, qu'il fonda le journal la Bouche de fer, de concert avec Bonneville, philosophe nourri du mysticisme de Saint-Martin, et que, jaloux d'étendre son influence, il transforma bientôt une loge maçonnique établie au Palais-Royal en un club qu'il appela le Cercle social et dont il fut le principal orateur.


« Il y avait alors à Paris, a écrit Louis Blanc (Histoire de la Révolution française, tome III), un prêtre dont la voix agitait et charmait le peuple. Sa grande taille, sa chevelure noire étaient d'un guerrier, il avait le regard d'un apôtre, il avait le sourire d'une femme. Lorsque, du haut de la chaire, il animait la foule aux combats de la liberté, vous eussiez dit Savonarole; et cependant il y avait en lui quelque reflet de cette grâce pénétrante qui, dans saint François de Sales, faisait accourir les enfants et parlait au cœur troublé des mères. »


A cette époque, Fauchet fut nommé membre de la commune de Paris. C'est lui qui proposa, en 1790, de réunir toutes les gardes nationales de France sous le commandement de La Fayette. Le 25 février de la même année, il prononça, à Saint-Etienne du Mont, l'Oraison funèbre de l'abbé de l'Epée, et, le 21 juillet suivant, l'Eloge de Franklin.


En 1791, il fut élu évêque constitutionnel du Calvados. Ayant, pendant le cours de son épiscopat, publié une brochure en faveur de la loi agraire, il fut poursuivi pour cette œuvre, sur la dénonciation du district de Caen; mais le décret lancé contre lui fut presque aussitôt suspendu, à la suite de la manifestation des électeurs du Calvados en sa faveur: ils allèrent le chercher dans sa maison, l'amenèrent en triomphe à leur assemblée, l'élurent président, et le nommeront séance tenante, le 1er sur 13, par 400 voix sur 546 votants, député à la Législative.


A peine installé, il se signala par la vivacité de ses attaques contre les ministres, parla contre les émigrés, contre les prêtres réfractaires, et signala les menées de Coblentz et celles des agents des princes à Paris. En 1792, il demanda la suppression des félicitations de nouvelle année que les grands corps de l'Etat étaient dans l'usage d'adresser au trône; renouvela ses attaques contre le ministre de Lessart, et impliqua La Fayette dans l'accusation de vouloir attenter à la liberté de la nation. A cette époque, et pendant la séance où fut décrétée l'abolition du costume ecclésiastique, on le vit s'empresser d'ôter sa calotte pour la mettre dans sa poche.


Le Calvados l'élut encore, le 5 septembre 1792, le 1er de la liste, avec 478 voix sur 597 votants, membre de la Convention. Mais Fauchet y montra un changement considérable dans ses opinions. Lors du procès de Louis XVI, il vota l'appel au peuple et la réclusion et s'exprima ainsi: au 1er appel nominal: « Oui, comme citoyen; oui, comme législateur; comme juge, je n'ai point la qualité, je ne puis prononcer.» Au 2e appel nominal : « Par respect pour le peuple, par respect pour tous les principes qui intéressent l'universalité de l'empire, par respect pour la liberté de la patrie, qui n'a rien à craindre du peuple français, et qui a tout à craindre des factions qui nous environnent, je dis oui. » Au 3e appel nominal : « La Convention n'a pas le droit de cumuler, de confondre, d'exercer tous les pouvoirs. C'est le droit de la tyrannie. Je puis le subir, je ne l'exercerai jamais. Je brave tous les tyrans. Je ne suis pas juge. Je vote, comme législateur, une mesure de sûreté générale. Je demande donc la réclusion. » Précédemment, tout en déclarant que Louis XVI « avait mérité plus que la mort », il avait opiné contre sa mise en jugement. Il se prononça également contre le mariage des prêtres et pour le maintien du culte catholique.


Ces manifestations, et plus encore sa liaison avouée avec tous les chefs de la Gironde, ne tardèrent pas à lui attirer la haine des Montagnards. Il fut d'abord rayé de la liste des Jacobins, et dénoncé pour avoir procuré un passeport à l'ex-ministre Narbonne. Cependant il continua, jusqu'au 31 mai 1793, les fonctions de secrétaire de l'Assemblée, qu'il exerçait depuis quelques mois. Mais, après avoir vu proscrire tous ses nouveaux amis, il quitta le bureau de la Convention et déclara qu'il se mettait sous la sauvegarde du peuple. Lui-même ne put échapper aux mesures de rigueur. Le 18 juillet 1793, Chabot l'accusa non seulement d'avoir trempé dans tous les projets des fédéralistes, mais encore d'avoir encouragé l'attentat de Charlotte Corday. Ce qui prêtait à l'accusation, c'est que le jour même de l'arrivée de Charlotte à Paris, elle avait été conduite à la séance de la Convention par l'abbé Fauchet. Ce fut principalement sur le dernier point que, le 3 octobre, conformément au rapport d'Amar, la Convention le décreta d'accusation, et que le tribunal révolutionnaire le condamna à la mort. Il fut exécuté le 31 du même mois avec les députés de la Gironde. Le Républicain français du 6 fructidor an V publia une lettre de l'abbé Lothringer, où il était dit, à propos de cette exécution: « Pour Fauchet, je peux vous dire positivement qu'il a abjuré non seulement ses erreurs sur la constitution civile, mais toutes ses erreurs. L'abbé Fauchet, après s'être confessé, a entendu lui-même Sillery à confesse. Dans le nombre des vingt et un députés, il y en a sept qui se sont confessés à moi, savoir: Duporret, Gardien, Fauchet, Lesterp-Beauvais, Lehardy et Viger; je ne me souviens pas du nom du septième. » Nous devons ajouter que les faits contenus dans cette lettre ont été contestés par plusieurs historiens.


L'abbé Fauchet a laissé un assez grand nombre de discours et de sermons, ainsi qu'un ouvrage important: La Religion nationale, dans lequel il demandait le renouvellement de la discipline ecclésiastique et des modifications dans les rapports de l'Eglise avec l'Etat.

Date de mise à jour: octobre 2019