Joseph, Vincent Dumolard
1766 - 1819
- Informations générales
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- Né le 25 novembre 1766 à La Motte-Saint-Martin ( - Généralité de Grenoble France)
- Décédé le 3 août 1819 à Villevallier (Yonne - France)
1766 - 1819
Député en 1791, aux Cinq-Cents, au Corps législatif en l'an XIV et en 1811, et représentant aux Cent-Jours, né à la Motte-Saint-Martin (Généralité de Grenoble) le 25 novembre 1766, « fils naturel et légitime de Sr François Vincent Dumolard notaire royal et chatellain de la Motte et de Delle Jeanne Baptiste Perrin-Machoud », mort à Villevallier (Yonne) le 3 août 1819, il était avocat à Grenoble avant la Révolution.
Le 1er septembre 1791, il fut élu député de l'Isère à l'Assemblée législative, le 9e et dernier, par 416 voix sur 517 votants plus jeune des membres de l'Assemblée. Il fit, à ce titre, partie, comme secrétaire, du bureau provisoire, et le président Batault s'étant trouvé empêché, il présida à son défaut l'Assemblée.
Très attaché à la monarchie constitutionnelle, il siégea au côté droit et prit très souvent la parole. Ce fut sur son initiative que l'Assemblée vota le décret aux termes duquel les émigrés qui ne rentreraient pas dans le délai d'un mois, seraient privés de leurs droits civiques ; il demanda la prestation du serment constitutionnel, et appuya les vœux et les conclusions des adresses envoyées à l'Assemblée contre les prêtres insermentés. Le 1er avril 1792, il demanda l'évacuation des tribunes qui avaient applaudi Duhem (Voy. ce nom) : « Nos prédécesseurs, s'écria-t-il, ont sauvé la nation française du despotisme; sauvons-la d'un mal non moins dangereux. M. Brissot disait à cette tribune : Le néant est là, il attend la noblesse ou la Constitution. Et moi je vous dis : Le néant est là, il attend le régime des lois ou l'anarchie. »
Le 16 juin, il réclama les honneurs de la séance pour une députation inculpant Servant ; il appuya une motion contre les rassemblements armés ; il défendit énergiquement (15 juillet) La Fayette contre les attaques des Jacobins, qu'il ne ménagea en aucune circonstance. La veille du 10 août, en sortant de la séance, il fut poursuivi par des furieux qui le menacèrent de lui couper le cou s'il retournait à l'Assemblée. Il dut se réfugier, avec un de ses collègues, dans le corps de garde du Palais-Royal ; ses agresseurs l'y poursuivirent, et allaient forcer le poste, quand il réussit à s'échapper par une porte de derrière. Ne se trouvant plus en sûreté à Paris, il se retira en Dauphiné, où il ne tarda pas du reste à être inquiété. Inscrit sur une liste de « suspects », il gagna le Jura et put passer en Suisse. Mais ayant commis l'imprudence de franchir de nouveau la frontière, il fut arrêté dans les montagnes du Dauphiné et conduit à Paris, quelques jours avant le 9 thermidor. Il resta enfermé pendant plusieurs mois dans un cachot du Luxembourg.
Le département de l'Isère l'élut, le 24 vendémiaire an IV, député au Conseil des Cinq-Cents, par 190 voix sur 347 votants. Il continua d'apporter au service des idées modérées son actif concours. Le 17 brumaire, il demanda le rappel des conventionnels en mission, dont les pouvoirs avaient pris fin avec ceux de la Convention. Le 22, il proposa de donner au Directoire le droit de compléter les administrations départementales et municipales, lorsque les électeurs se seraient séparés sans terminer leurs opérations ; le 12, il combattit la proposition d'autoriser le gouvernement à nommer aux places de juges vacantes par décès ou démission, « attendu que l'indépendance des tribunaux est la première garantie des citoyens. » Le 8 frimaire, il combattit l'établissement de l'impôt progressif, et attaqua la loi de floréal an III qui dépouillait d'une partie de leurs biens les parents des émigrés ; à ce passage de son discours : « ... Toutes les idées de justice confondues et bouleversées, le brigandage des individus consacré par l'exemple du gouvernement..; » de violentes rumeurs s'élevèrent avec les cris : « À l'Abbaye ! » Marie-Joseph Chénier se précipita à la tribune et demanda simplement contre Dumolard le rappel à l'ordre avec la censure. Dumolard se défendit habilement et en fut quitte pour la pénalité réclamée par Chénier, qui n'était pas d'ailleurs de ses amis, et qui avait fait sur lui ces vers empreints d'une dédaigneuse malveillance :
.... Dumolard, au fatras léthargique,
« Plein d'orgueil et de mots, Dumolard, aujourd'hui,
« Distille en longs discours la sottise et l'ennui... »
Le 2 germinal, il demanda qu'on activât la poursuite des fauteurs des massacres de septembre, et quelques jours après il proposa la révision de la loi sur les conseils de guerre. Le 16 floréal, Dumolard réclama le rapport de la loi qui renvoyait devant le tribunal de l'Isère les réacteurs de Lyon. Dans les séances suivantes, il fit maintenir le Code hypothécaire (2 prairial), dénonça les empiètements du Directoire, lui fit envoyer un message relativement au manque d'égards de la police envers les députés ; proposa (24 prairial) l'abrogation des lois relatives aux enfants naturels, et fut élu le 1er messidor secrétaire du Conseil.
Il prit part à presque toutes les discussions qui eurent lieu aux Cinq-Cents. Le 8 nivôse an V, il combattit le projet de Daunou sur la liberté de la presse, tendant à faire défense aux colporteurs de crier le sommaire des journaux, et en compara les dispositions tortueuses « aux replis d'un serpent qui finiraient par étouffer la presse sous prétexte d'en corriger les abus ». Le 22 nivôse, il dénonça de nouveau les empiètements du Directoire sur le Corps législatif; vota contre le serment exigé des électeurs ; réclama (17 pluviôse) des poursuites contre les agents du duc d'Orléans ; demanda (14 ventôse) l'abrogation des lois révolutionnaires et de celles « qui avaient exilé de Paris un grand nombre de Français ». En prairial, il vota la suppression du divorce pour incompatibilité d'humeur. Le 5 messidor, il blâma le renversement des Etats de Venise et de Gênes que venait d'opérer Bonaparte, et prédit que la Suisse était menacée d'un pareil sort. Bonaparte se plaignit au Directoire du discours de Dumolard, en réitérant l'offre de sa démission ; « J'ai besoin, disait-il en terminant, de vivre tranquille, si les poignards de Clichy me laissent vivre. » Dumolard dénonça (24 messidor) la Société des Jacobins.
Elu président des Cinq-Cents, il prononça le discours solennel pour la commémoration du 9 thermidor et pour l'anniversaire du 10 août 1792 : « Français, à pareil jour, il y a cinq ans, la foudre tomba sur le trône ; ses éclats furent dispersés, ses bases fracassées et anéanties ; un seul lustre s'est écoulé depuis cette grande époque, et déjà la rapidité des événements nous en a séparés par des siècles.
« Pendant ce court intervalle, que de faits mémorables se présentent les uns les autres ! Que de triomphes ! que de scènes tragiques ! Quelle réunion de sublime et de faiblesse ! Que de préjugés détruits ! Que de talents moissonnés ! Que d'efforts combinés pour faire périr la liberté naissante ! Que de vagues brisées contre la volonté nationale ! Que de lâches moyens pour étouffer la République ! Que de vipères étouffées dans ses bras de géant ....
« Représentants du peuple, le canon du 10 août a mis en poudre un trône antique et la faible constitution dont on l'avait étayé ; il ouvrit à la France des destinées nouvelles; il préluda pour ainsi dire, à cette longue suite d'événements mémorables qui semblent avoir pressé les âges dans le cadre étroit de quelques années. »
Dans les séances suivantes, Dumolard parla sur la proposition tendant à soumettre les affiches au visa de la police ; combattit (8 fructidor) le projet tendant à l'établissement d'un club de propagande pour une religion universelle et fondamentale sous le nom de théophilanthropie ; blâma vivement le 13, le pamphlet de Bailleul, qui était distribué à la porte même du Corps législatif, et il déclara qu'il y avait un complot tramé pour ramener la royauté.
« Oui, s'écria-t-il, il existe un parti pour relever le trône : c'est le parti d'Orléans. Les divisions qui règnent parmi nous sont l'ouvrage de ces factieux... » Il continua en disant qu'on voyait « des misérables gorgés d'or et d'argent, afficher un luxe insolent, eux, qui naguère encore ne possédaient pas un sou. » Quelques voix s'écrièrent : « C'est Tallien. » Il dénonça encore la faction d'Orléans le 15 fructidor, et annonça par erreur que « non loin de Paris avait paru l'aîné des fils de Philippe ».
Proscrit au 18 fructidor et condamné à la déportation, il se livra, après avoir déjoué les recherches de la police pendant quelque temps, et fut conduit à l'île d'Oléron.
Son exil cessa au commencement de 1800 ; mais par ordre des consuls il dut se fixer à Grenoble sous la surveillance de la police. Il obtint avec peine de Bonaparte, qui ne lui pardonnait pas l'improbation de sa conduite en Italie, l'autorisation d'aller habiter dans sa propriété de Villevallier, près Joigny (Yonne).
Toutefois, en l'an XII, il fut nommé sous-préfet de l'arrondissement de Cambrai.
Le 5 vendémiaire an XIV, il fut élu par le Sénat conservateur, député au Corps législatif pour le département du Nord.
Il fut réélu au Corps législatif le 4 mai 1811, par le Sénat conservateur, député du département de l'Yonne, qui l'avait chargé de présenter son adresse à l'empereur.
Il fit partie de la minorité qui essaya, en 1813, de mettre un frein au despotisme impérial. Il adhéra à la déchéance de Napoléon en 1814 et au rétablissement des Bourbons, et reçut de Louis XVIII la croix de la Légion d'honneur.
Il se dédommagea du long silence gardé sous l'Empire, en parlant avec son ancienne ardeur sur la réorganisation des tribunaux, la liberté de la presse, la représentation nationale. Il opina pour la restitution aux émigrés des biens non vendus.
À son retour de l'île d'Elbe, Napoléon le nomma commissaire de l'Empire à Besançon, siège de la 6e division militaire, puis lui confia la préfecture des Basses-Alpes. Il était en même temps élu au collège de département de l'Yonne, représentant à la Chambre des Cent-Jours par 68 voix sur 110 votants. Il refusa la préfecture des Basses-Alpes pour aller occuper son siège de représentant.
Le 5 juin, jour de l'installation de la Chambre des représentants, le président provisoire annonça « que Sa Majesté avait nommé M. le comte de Lanjuinais à la présidence définitive et que Sa Majesté ferait connaître sa décision par un chambellan de service ». Dumolard protesta contre l'inconvenance d'un tel procédé et reçut satisfaction. Ce fut le comte Regnault qui, en sa qualité de ministre d'Etat, apporta, après une suspension d'audience, le message impérial notifiant la nomination de Lanjuinais. Le 6 juin, Dumolard appuya et fit adopter la prestation du serment à l'empereur, en ces termes caractéristiques : « Il faut que la nation se sauve avec et par l'Empereur. » Le 8 juin, il fut élu secrétaire de la Chambre par 317 voix sur 460 votants. Le 10 juin il appuya le projet d'adresse à Sa Majesté et fit partie de la délégation qui le lendemain remit à l'empereur l'adresse votée par la Chambre. Le 23 juin, Dumolard combattit la proposition du représentant Félix Lepelletier, tendant à obliger les journaux à ne publier que le compte rendu des séances dont les extraits leur seraient communiqués par les secrétaires de la Chambre, comme « système destructif de toute liberté nationale ». Le 24, il demanda que la commission exécutive fît tous les jours à la Chambre une communication sur la situation du pays. Le 25, il appuya les mesures d'exception pour la surveillance et la mise en accusation des personnes suspectes, et défendit le projet sur les réquisitions pour la défense nationale. Le 28, il porta cette motion à la tribune : « Je demande qu'il soit déclaré que les braves qui ont péri à Fleurus et à Mont-Saint-Jean ont bien mérité de la patrie. Je demande que le gouvernement soit chargé de vous faire connaître l'état des familles de ces braves et quels témoignages de la reconnaissance publique la patrie peut encore leur prodiguer. »
Le 29, il parla pour l'Inviolabilité des représentants du peuple. Le 4 juillet, au cours de la « séance permanente », il défendit la proposition mettant le drapeau national et les couleurs tricolores sous la sauvegarde de l'armée, de la garde nationale et des bons citoyens. Le 4 juillet, il signa comme secrétaire la Déclaration de la Chambre des représentants. Le 6, il prit plusieurs fois la parole sur l'organisation des pouvoirs publics, et s'éleva contre le complot royaliste. M. Le Gonec ayant cité certain article du Journal de l'Empire, Dumolard s'écria : « Dans ce fameux journal, je suis une tête de Turc qu'on signale à la fureur d'un parti. Je présente, en réponse, ma vie tout entière, je voue le rédacteur au mépris qu'il mérite et je demande l'ordre du jour pur et simple. » L'ordre du jour pur et simple fut voté et la séance fut suspendue jusqu'au lendemain huit heures. Le lendemain, 7 juillet, les Chambres étaient dissoutes : Dumolard prit donc le dernier la parole dans la Chambre des Cent-Jours.
Après avoir vivement protesté contre la violence faite à la représentation nationale, Dumolard se retira dans sa terre de l'Yonne, où il mourut quatre ans après.
Date de mise à jour: mai 2013