Jean-François Ducos

1765 - 1793

Informations générales
  • Né le 10 mars 1765 à Bordeaux ( - Généralité de Bordeaux - France)
  • Décédé le 31 octobre 1793 à Paris (Département de Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Révolution
Législature
Assemblée nationale législative
Mandat
Du 29 août 1791 au 20 septembre 1792
Département
Gironde
Groupe
Gauche
Régime politique
Révolution
Législature
Convention nationale
Mandat
Du 7 septembre 1792 au 31 octobre 1793
Département
Gironde
Groupe
Girondins

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Député en 1791, membre de la Convention, né à Bordeaux (Généralité de Bordeaux, France), le 10 mars 1765, exécuté à Paris (Département de Paris, France), le 31 octobre 1793, fils d'un riche négociant de Bordeaux, il se livra avec l'enthousiasme de la jeunesse à la lecture des philosophes du XVIIIe siècle, et adopta avec ardeur les idées de la Révolution.

Le 29 août 1791, il fut élu député de la Gironde à l'Assemblée législative, le 2e sur 12, par 292 voix sur 590 votants. Il siégea au côté gauche près de Vergniaud, de Guadet et des autres brillants représentants de la Gironde ; mais, moins attaché qu'eux à la faction de Roland, il se rapprocha plus qu'eux du parti jacobin.

Il s'opposa (18 octobre 1791) à la mention au procès-verbal du nom des députés qui avaient dénoncé les ministres. « On croit, dit-il le lendemain, que le ministère est une pierre sacrée à laquelle il n'est pas permis de toucher ; mais moi qui ne suis pas dans cette opinion, je dis que l'ordre du jour (sur la dénonciation de Chabot contre Duportail) ferait le déshonneur de l'Assemblée. » Il demanda (26 octobre) que les actes civils fussent enlevés au clergé ; déclara (24 novembre) qu'il fallait faciliter l'exercice de tous les cultes ; appuya (30 octobre) une adresse contre le veto du roi à la loi des émigrés : « Le langage de la liberté, dit-il, ne doit jamais étonner des législateurs. La faculté d'approuver le veto suppose la faculté de l'improuver » ; parla (1er décembre) sur l'état des colonies et sur l'envoi de troupes à Saint-Domingue ; protesta (21 décembre) contre la décision du ministre de l'intérieur de suspendre la suppression des chambres de commerce ; réclama (janvier 1792) l'ajournement d'un projet sur la circulation des subsistances ; prononça (24 janvier) un long discours sur la réduction du prix du sucre, et fit voter la présentation d'un projet de loi pour arrêter le surhaussement des denrées coloniales ; attaqua (31 mars) les marchés de fusils faits par M. de Narbonne ; accusa (26 avril) les pénitents blancs de Toulouse d'avoir conduit Calas à l'échafaud ; fit supprimer (2 mai) les pensionnats des maisons religieuses ; accusa (28 juillet) le pouvoir exécutif de l'émeute de Bordeaux et se plaignit de la lenteur du roi à choisir ses ministres ; reprocha à Louis XVI (3 août) de n'être fidèle à la Constitution que dans ses discours, et prit une part active à la journée du 10 août. Le 14, il demanda la suppression des commissaires du roi près des tribunaux, « parce que c'est pour un pouvoir exécutif corrompu un moyen d'influencer les tribunaux » ; appuya (21 septembre) la motion d'abolir la royauté : « Le considérant de votre décret, dit-il, ce sera l'histoire des crimes de Louis XVI, histoire déjà trop connue du peuple français. Je demande donc qu'il soit rédigé dans les termes les plus simples : il n'a pas besoin d'explication après les lumières qu'a répandues la journée du 10 août. »

Le 7 septembre 1792 il fut élu, par le département de la Gironde, membre de la Convention, le 6e sur 10, avec 464 voix sur 640 votants. Il chercha à concilier les partis extrêmes, la Gironde avec la Montagne, et devant l'inutilité de ses efforts, dit un jour : « Le ventre dévorera les deux bouts. » Il réclama (29 octobre) contre le décret qui excluait les députés de toute fonction publique, parla longuement (18 décembre) sur les vices de l'éducation domestique et, dans le procès du roi, répondit au 3e appel nominal :

« Au moment de prononcer définitivement sur le sort de Louis (ci-devant roi), je dois à ma conscience et à mes commettants l'exposition de mes principes qui ont dirigé mon opinion et mon jugement.

Je ne pensais pas que la Convention nationale dût juger Louis ; je n'ai jamais douté qu'elle en eût le droit, mais je croyais qu'il ne lui convenait pas d'user de ce droit.

Elle a décrété qu'elle le jugerait : si son décret eût été repoussé par la conscience de mes devoirs et le sentiment de mon incompétence, aucune puissance sur la terre n'eût pu me forcer à l'exécuter ; il ne répugnait qu'à mon opinion, elle s'est tue devant l'opinion de la majorité.
J'ai voté contre la sanction du jugement par le peuple, parce qu'elle m'a paru subversive de tous les principes du gouvernement représentatif (sous lequel je veux vivre et mourir, car il m'est démontré que la liberté n'est que là), parce que le peuple ne peut à la fois conserver et déléguer l'exercice de ses pouvoirs, avoir des représentants et n'être pas représenté.

Quant aux formes employées dans l'instruction de cette affaire, je crois qu'elles sortent des règles ordinaires, comme le jugement devait en sortir lui-même par l'état unique de l'accusé et la nature particulière de l'accusation. J'ai dû examiner, non si elles étaient conformes aux lois et aux usages des tribunaux, mais si elles étaient suffisantes pour opérer ma conviction intime. La division des fonctions judiciaires en jury d'accusation, jury de jugement, en juges appliquant la loi, est à la fois une précaution et un moyen pris par la société pour assurer la justice; mais cette division n'est pas la justice. La justice consiste dans l'application exacte du droit au fait ; voilà ce que j'ai dû chercher dans l'instruction du procès de Louis.

Je déclare cependant que l'état extraordinaire de l'accusé a pu seul me faire concevoir et approuver la forme extraordinaire du jugement, qui doit être unique comme la cause qu'il va décider. Je déclare de plus que si la Convention voulait en porter un second sur un citoyen ordinaire, en employant les mêmes violations de forme, je la regarderais comme criminelle et tyrannique, et que je la dénoncerais à la nation française.
Citoyens, il résulte évidemment pour moi,
1° de l'examen attentif que j’ai fait de la conduite de Louis pendant le cours de l'Assemblée législative ;
2° des pièces trouvées, soit dans son château, soit chez l'intendant de la liste civile, que Louis (ci-devant roi) est convaincu d'avoir conspiré contre la sûreté générale de l'Etat et contre la liberté de la nation ;
qu'il doit subir en conséquence la peine portée au Code pénal contre les délits de cette nature.

Citoyens, condamner un homme à la mort voilà, de tous les sacrifices que j'ai faits à ma patrie, le seul qui mérite d'être compté. »
Il se sépara des autres Girondins en refusant l'appel au peuple.

Le 31 janvier 1793, il s'opposa à la réunion de Liège à la France ; appuya (1er février) le projet de déclaration de guerre au roi d'Angleterre et à la Hollande, mais combattit la motion d'une adresse au peuple anglais ; se plaignit (27 mars) des demandes de places faites auprès des ministres par des députés, et fut nommé secrétaire de l'Assemblée (30 mai).

Porté sur les listes de proscription imposées à la Convention par le peuple de Paris les 31 mai et 2 juin, il en fut rayé sur les instances de Marat, parce que, dit ce dernier, « Ducos n'ayant eu que quelques opinions erronées, dont on ne saurait lui faire un crime, ne peut pas être regardé comme un chef contre-révolutionnaire. »

Le 8 juin, Ducos appuya les mesures relatives à la tranquillité de Paris ; il prit part à la discussion de la Constitution rédigée par Hérault de Séchelles ; et appuya la proposition de Levasseur, disant qu'on ne pourrait demander aucune contribution à celui qui n'aurait que le strict nécessaire. Dés que le sort des Girondins fut en jeu, il prit courageusement leur défense, réclama (24 juin) contre leur mise au secret, et combattit (25 juin) leur translation dans une maison nationale.

La Montagne ne lui pardonna pas sa témérité généreuse. Dénoncé le 8 août 1793 par la veuve de Marat, qui lui reprochait de calomnier son mari, il fut compris dans l'acte d'accusation dressé par Amar et décrété d'arrestation le 3 octobre.

Il conserva en prison la gaieté de sa jeunesse et y composa sur l'évasion de Bailleul un pot-pourri plein de verve : Le Voyage de Provins.

Condamné à mort avec ses collègues de la Gironde (9 brumaire an II), avec son beau-frère et intime ami Boyer-Fonfrède, il marcha en chantant à l'échafaud, et, la tête sous le couteau, cria : Vive la République ! Il avait vingt-huit ans.