Jean-Baptiste Mailhe
1750 - 1834
Député en 1791, membre de la Convention, député au Conseil des Cinq-Cents, né le 2 juin 1750 à Guizerix (Généralité d'Auch), mort à Paris (Seine) le 1er juin 1834, Jean-Baptiste Mailhe était homme de loi dans sa ville natale lors de la Révolution.
Procureur général syndic de la Haute-Garonne en 1790, il fut élu, le 4 septembre 1791, député de ce département à l'Assemblée législative, le 1er sur 12, par 347 voix (475 votants). Il fit partie du comité diplomatique, présenta un rapport en faveur des soldats de Châteauvieux ; appuya le décret d'accusation contre les ministres Bertrand de Molleville et de Lessart ; opina pour qu'il fût demandé positivement à l'empereur s'il entendait rester ami et allié de la France ; vota ensuite pour la déclaration de guerre à François II ; réclama la suppression sans indemnité des droits féodaux, le licenciement de la garde constitutionnelle du roi, l'organisation d'un corps de douze cents tyrannicides ; fit rendre un décret qui conservait aux habitants des campagnes la propriété des bois communaux, et proposa que l'émigration fût ajoutée au nombre des causes de divorce.
Son ardeur révolutionnaire parut s'atténuer à la Convention, où la Haute-Garonne le renvoya, le 5 septembre 1792, le 1er sur 12, avec 629 voix (688 votants).
Membre du comité de législation, il fut chargé du rapport sur la mise en accusation de Louis XVI (7 novembre 1792). Examinant d'abord la question de savoir si le roi pouvait être mis en jugement, il prononça l'affirmative, et déclara insoutenable le dogme de l'inviolabilité constitutionnelle, par ce motif que Louis XVI ne pouvait avoir de juges plus impartiaux, plus désintéressés que les membres de la Convention. Ses conclusions furent que :
« Louis peut être jugé, qu'il le sera par la Convention, que des commissaires pris dans son sein feront un rapport énonciatif des délits dont Louis XVI sera prévenu, que cet acte sera imprimé et que les originaux des pièces à charge lui seront communiqués et que la Convention fixera le jour où Louis paraîtra devant elle ; que Louis XVI présentera, par lui ou par ses conseils, sa défense écrite ou verbale ; enfin que le jugement sera porté par appel nominal. »
Mailhe ajoutait :
« Vous aurez aussi à balancer les destinées du fils de Louis avec l'intérêt de la République. »
Il insista pour que la Convention procédât dans cette affaire avec solennité et sans précipitation.
Lorsque Louis XVI fut amené, le 11 décembre 1792, à la barre de la Convention, Mailhe, l'un des secrétaires, lut l'acte énonciatif des faits qui constituaient l'accusation. Puis, par suite du roulement qui s'opéra entre les départements pour procéder aux appels nominaux, ayant été appelé le premier à voter dans le procès, Mailhe s'exprima ainsi sur la question de la peine à infliger à Louis XVI :
« Par une conséquence qui me parait naturelle, par une conséquence de l'opinion que j'ai déjà émise sur la première question, je vote pour la mort. Je ferai une simple observation. Si la mort a la majorité, je crois qu'il serait digne de la Convention nationale d'examiner s'il ne serait pas utile de retarder le moment de l'exécution. Je reviens à la question, et je vote pour la mort. »
Vingt-six seulement de ses collègues se rattachèrent à cette opinion.
L'appel nominal terminé, Garrau, député de la Gironde, demanda que Mailhe expliquât lui-même un vœu qui paraissait devoir être suivi par plusieurs membres, et dont il importait de connaître la nature. A quoi Mailhe répondit par cette déclaration :
« Citoyens, chers et respectables collègues, au point où en sont les choses, il ne m'est possible que de répéter le vœu que j'ai émis hier ; je le répéterai donc sans en changer, non pas un mot, mais une seule lettre. Je prie les citoyens qui m'ont entendu d'attester ce que je vais répéter et ce que j'ai prononcé hier. »
Et il répéta textuellement son vote de la veille. La Convention jugeant que Mailhe avait abandonné cette réserve, en se bornant à répéter son vote et en esquivant l'explication qu'on lui demandait, comprit les votants de cette catégorie au nombre des votants pour la mort sans condition.
Au 3e appel nominal, Mailhe cependant vota pour le sursis.
En avril 1793, il remplit une mission temporaire dans la Haute-Garonne. Après les événements du 31 mai, il garda le silence jusqu'au 9 thermidor. Alors il se signala parmi les partisans de la réaction, s'éleva contre les « terroristes », en même temps que contre ceux qui méditaient le rétablissement de la royauté, et, envoyé en mission à Dijon, il y poursuivit les restes du parti jacobin. Le 11 juillet 1795, il dénonça les manœuvres de royalistes, mais, fidèle à sa politique de bascule, il fit décréter, le 23 août, la dissolution des sociétés populaires, qu'il disait influencées tour à tour par les royalistes et les anarchistes.
Devenu, le 23 vendémiaire an IV, député au Conseil des Cinq-Cents, élu par neuf départements, il prononça, en mars 1796, un nouveau discours sur la nécessité d'anéantir les sociétés populaires, et essaya de faire comprendre dans la même mesure les réunions religieuses. La même année, il fit un rapport sur les ordres monastiques existant dans les Pays-Bas, et il combattit vivement, le 31 octobre un message du Directoire, qui demandait qu'on limitât la liberté de la presse. Deux jours après, il parla en faveur des parents des émigrés et s'étonna qu'on pût donner des fonctions publiques à des terroristes, « dont les mains, disait-il, étaient pleines de sang », tandis qu'on en écartait des parents d'émigrés contre lesquels on n'avait à opposer que des préventions.
Mailhe cessa de faire partie du Conseil le 1er prairial an V. Il rédigeait alors un journal, l'Ami de la Constitution, qui semblait s'être donné la tâche d'aplanir les voies au rétablissement de la monarchie. Compris en raison de ces tendances dans la proscription du 18 fructidor en V, il fut transporté a l'île d'Oléron, où il resta environ un an.
Mais le gouvernement consulaire le rappela, pour le nommer secrétaire général des Hautes-Pyrénées (floréal an VIII). Il refusa cet emploi, revint à Paris et fut nommé avoué (avocat) au tribunal de cassation, fonctions qu'il exerça jusqu'au 9 février 1815.
En avril 1814, il avait envoyé une adresse au Sénat pour le féliciter d'avoir prononcé la déchéance de Napoléon. La loi de 1816 contre les régicides l'obligea à quitter la France.
Il se retira à Bruxelles, puis à Liège, où sa femme et ses enfants vinrent le rejoindre en 1818, et où il se fit avocat consultant.
De retour en France après la révolution de Juillet, Mailhe mourut à Paris (1834), étranger aux affaires publiques.