Jean-Jacques Duval d'Eprémesnil

1745 - 1794

Informations générales
  • Né le 5 décembre 1745 à Pondichéry (Comptoir français en Inde)
  • Décédé le 22 avril 1794 à Paris (Département de Paris - France )

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Révolution
Législature
Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 7 mai 1789 au 30 septembre 1791
Baillage
Paris-Hors-les-Murs (Type : Ville)
Groupe
Noblesse

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Député en 1789, né à Pondichéry (Comptoir français en Inde) le 5 décembre 1745, exécuté à Paris (Département de Paris) le 22 avril 1794, petit-fils du célèbre Dupleix qui gouverna les possessions françaises dans l'Inde, il était, avant la Révolution, conseiller au parlement de Paris, et l'un des plus remuants de ses membres.

Il joua un rôle important dans la lutte du parlement contre la couronne, qui servit de préface à la Révolution ainsi que dans le procès en réhabilitation de Lally-Tollendal, devant le parlement de Rouen, en 1780. D'Eprémesnil défendait la mémoire de son oncle, Duval de Leyrit, qu'on accusait d'avoir dénoncé et fait condamner le comte de Lally.

En 1781, d'Eprémesnil dénonça à la justice du parlement les Annales de Linguet, où cet écrivain érigeait la force en droit, prétendait que les princes étaient propriétaires des personnes et des biens de leurs sujets, et qu'entre eux le ciel s'expliquait seulement par des victoires. Deux ans après, il flétrit les prisons privées où, en vertu des lettres de cachet, des citoyens étaient indéfiniment détenus sans interrogatoire et sans jugement. Il attaqua plusieurs fois les profusions de la cour et, dans l'affaire du Collier, fut du nombre de ceux qui se refusèrent à condamner le cardinal de Rohan.

Son opposition aux édits établissant l'impôt du timbre et l'impôt territorial fut si active, que les ministres le firent enlever sur son siège même, et l'envoyèrent aux îles Sainte-Marguerite, où il resta plus d'une année détenu. Son retour de Provence à Paris ne fut qu'un long triomphe ; à Lyon, on le couronna au spectacle. Il n'avait cessé de réclamer les Etats généraux ; leur convocation mit le comble et aussi le terme à sa popularité.
Le 6 mai 1780, il fut élu député de la noblesse aux Etats généraux par la prévôté et vicomté de Paris hors les murs. Ses remarquables facultés d'opposition se retournèrent, avec toute la véhémence et la fougue de son caractère, contre les partisans des idées nouvelles. Il devint un des membres les plus violents de la droite, et commença la lutte contre la Révolution en s'opposant dans l'Assemblée de la noblesse à la réunion des ordres et au vote par tête. Il fit repousser la qualification de représentants des communes proposée pour les députés du tiers ; accusa ensuite le tiers de haute trahison ; combattit tous les décrets qui tendaient à restreindre l'autorité royale ; se prononça énergiquement pour la sanction et le veto du roi ; s'opposa à la mise en discussion de l'hérédité de la couronne ; s'éleva contre la constitution civile du clergé ; repoussa vivement les attaques dirigées contre le culte catholique et contre les archevêques de Paris et de Sens ; défendit le parlement de Rennes, et demanda le rappel à l'ordre contre Garat pour son discours sur la religion.
À diverses reprises, il présenta des motions pour réprimer les troubles dans les départements, réclama la suppression du comité des recherches, et l'ajournement du projet de la municipalité de Paris pour la vente des biens du clergé; demanda que Camus fût rappelé au respect dû « au sang des rois »; fit tous ses efforts pour appuyer la motion tendant à déclarer nationale la religion catholique; intervint dans la discussion sur le traitement des juges; fit le plus sombre tableau de la vie imposée aux religieux et aux moines, qui, à l'entendre, mouraient de faim ; accusa d'inquisition le comité des recherches; combattit la liberté du commerce de l'argent; interrompit violemment le discours de Mirabeau en faveur des assignats, et présenta un plan nouveau de finances. Quand le parlement de Toulouse fut accusé de rébellion, il prit sa défense; il annonça le pillage de l'hôtel de Castries, demanda ironiquement s'il « serait permis de suivre la religion catholique dans sa maison », combattit une dénonciation contre l'évêque de Clermont, intervint dans les longues discussions auxquelles donna lieu la résidence des fonctionnaires publics, et protesta contre le projet de rendre des honneurs à la mémoire de Mirabeau.
Le 28 septembre 1791, il appuya avec violence la motion de l'abbé Maury, tendant à faire rendre compte au peuple par l'Assemblée de l'état des finances de la nation, puis il quitta la séance et ne reparut plus à l'Assemblée. Sa présence y avait été d'ailleurs constamment marquée par des incidents tumultueux. Interrupteur infatigable bien plus qu'orateur, il avait le don d'exaspérer la majorité: c'est ainsi qu'il présenta, le 29 septembre 1790, au cours de la discussion sur les assignats, une motion qui fut qualifiée par décret de « produit d'une imagination en délire ». D'Epremesnil, si compromis par son impopularité, ne voulut pas émigrer. Il courut les plus grands dangers quelques jours avant le 10 août 1792 : reconnu sur la terrasse des Feuillants par quelques furieux, il allait être mis en pièces, quand il fut sauvé par l'acteur Michel, de l'Opéra-Comique. Il fut conduit à l'Abbaye. Manuel, qu'il avait obligé, l'en fit sortir à la veille des massacres de septembre. Il se retira alors dans une de ses terres en Normandie, mais il y fut de nouveau arrêté. Conduit d'abord au Havre, on lui offrit les moyens de s'échapper à bord d'un navire suédois, mais il refusa. En septembre 1793, il fut conduit à Paris par ordre du représentant du peuple Louchet, enfermé d'abord à la maison des Anglaises et ensuite au Luxembourg. Transféré à la Conciergerie, puis traduit devant le tribunal révolutionnaire, d'Eprémesnil se défendit avec dignité, et en peu de mots; il fut « convaincu d'avoir conspiré contre la République », et condamné à mort, le 22 avril 1794, le même jour que Le Chapelier, son ancien collègue et adversaire de la Constituante. « Monsieur, dit Le Chapelier, on nous donne, avant nos derniers moments, un terrible problème à résoudre. - Quel problème? répondit d'Eprémesnil. - C'est de savoir, quand nous serons sur la charrette, auquel de nous deux s'adresseront les huées. - A tous deux, » reprit d'Eprémesnil. Il attendit la mort avec calme et la reçut avec courage. D'Eprémesnil avait épousé en premières noces Mlle Desvaux, et ensuite Mme Thilorier, née J.-A. de Sanctuary, qui fut aussi condamnée à mort par le tribunal révolutionnaire, et exécutée. D'Epremesnil a laissé des Plaidoyers au Châtelet, des Plaidoyers et Mémoires dans l'affaire de Lally, des Remontrances et des Discours parlementaires.