Dominique Dillon
1742 - 1806
Député en 1789, au Conseil des Cinq Cents et au Corps législatif de l'an VIII, né à la Chapelle-Largeau (Généralité de Poitiers ) le 22 septembre 1742, de Me Sébastien Dillon, marchand et Marie Jeanne Touchault, mort à Pouzauges (Vendée) le 15 octobre 1806, il entra dans les ordres, et devint, avant la Révolution, curé du Vieux Pouzauges.
Le 27 mars 1789, il fut élu député du clergé aux Etats-Généraux par la sénéchaussée du Poitou. M. Dillon fut des premiers membres de l'ordre du clergé qui se réunirent au tiers. Le dimanche 14 juin, à 5 heures du soir, il se présenta dans la salle du tiers-état, avec ses confrères Besse, Grégoire, Guegan, Loaisel et Bodineau, et s'exprima en ces termes :
« Messieurs,
La nation nous reprocherait sans doute de ne nous être pas rendus hier dans la Chambre de l'Assemblée générale pour vérifier en commun nos pouvoirs. Nous ne pouvons que louer le zèle et le patriotisme des confrères qui nous ont précédés; mais leur intention nous était inconnue.
Animés du désir de nous réunir à vous, nous avons voulu épuiser tous les moyens de douceur et de patience que la prudence et l'amour de la paix pouvaient nous inspirer.
Un motif non moins puissant nous arrêtait. Nous respectons, nous chérissons le monarque bienfaisant que le ciel nous a donné dans sa miséricorde. Ses intentions sont pures, ses vues pour le bonheur de son peuple nous sont connues, chacun de nous craignait de n'y pas conformer sa conduite; mais étant convaincus que nos pouvoirs doivent être connus de tous les représentants de la nation, nous nous rendons, messieurs, dans l'espérance de voir cesser enfin notre malheureuse situation. Nous venons avec confiance reprendre dans ce moment au milieu de vous les places que notre monarque bienfaisant nous avait assignées pour y travailler au grand œuvre de la félicité publique; c'est du fond de cet édifice élevé par ses ordres qu'il nous faisait entendre les expressions touchantes de son amour pour son peuple et qu'il nous invitait à réunir nos travaux. Persuadés que le concert des trois ordres peut seul opérer les heureux effets que la nation paraît attendre avec la plus vive impatience, nous vous le déclarons, messieurs, c'est le désir le plus ardent d'établir cette union qui nous conduit ici. Nous respecterons, ainsi que ceux qui nous font l'honneur de nous entendre, les droits du souverain, les lois constitutionnelles de l'Etat, la propriété des individus qui les composent.
Nous vous prions, messieurs, de vouloir bien inscrire sur vos registres et de nous délivrer copie des motifs et des principes que nous venons de vous exposer. Il est intéressant pour nous que la France, le monde entier connaisse la pureté de nos intentions. »
Ces paroles furent accueillies par de vifs applaudissements.
Dans l'Assemblée constituante, M. Dillon prit une part importante aux discussions. Il parla (4 juillet 1789) en faveur de l'admission des députés des colonies, et reconnut à la nation (12 octobre) le droit de reprendre les biens du clergé : « Les biens-fonds et les dîmes, dit-il, ont été donnés au clergé par le peuple et repris par lui dans des circonstances pressantes. Les mêmes circonstances reparaissant, la même chose doit arriver. La nation a pu les reprendre, elle le peut encore. Il ne faut pas examiner si nous sommes propriétaires ou non; il faut seulement reconnaître que notre devoir serait de renoncer à cette propriété quand même elle serait établie. On doit remettre à un bienfaiteur ce qu'on a obtenu de sa générosité, quand ce bienfaiteur lui-même est dans une telle position qu'il ne peut exister sans la remise de son bienfait. »
Il proposa (19 mars 1790) d'accorder aux religieux restant dans le cloître les vergers n'excédant pas six arpents; demanda (12 avril) de doter les curés en fonds territoriaux : « Il est donc raisonnable, ajouta-t-il, d'attendre un moment plus opportun pour vendre les biens ecclésiastiques. J'adopte l'amendement proposé hier par M. l'abbé Grégoire, et je demande que chaque évêque ait une maison de campagne avec l'enclos. Quant à la protestation de M. l'évêque de Nancy, je soutiens qu'il n'y a point ici de bon ecclésiastique qui ne soit prêt d'y donner un désaveu de bouche et de cœur. »
Le 14 juin, il parla sur la confirmation des évêques élus, et demanda que l'article fût ainsi rédigé : « L'évêque métropolitain ne pourra refuser la confirmation canonique qui lui aura été demandée. »
Le 27 décembre 1790, il prêta serment à la constitution civile du clergé : 67 de ses collègues suivirent cet exemple.
Le 17 juillet 1791, il exprima son opinion sur un placard contre la royauté : « Cette affiche, dit-il, est sûrement l'ouvrage de ces Messieurs eux-mêmes; ils cherchent à nous faire perdre notre temps. »
Les premiers « curés réunis » avaient été reçus dans le groupe des Partisans de la Constitution, dont Mirabeau, Sieyès, Pétion, Robespierre étaient les chefs. Les curés bretons y étant en majorité, la réunion prit le nom de Club breton. Lorsqu'elle fut transférée de Versailles à Paris après le 6 octobre 1789, elle s'établit en face Saint-Roch, et prit, de son nouveau local, le nom de Club des Jacobins.
M. Dillon se tint à l'écart pendant la période révolutionnaire. Le 24 germinal an VII, il fut élu député de la Vendée au Conseil des Cinq Cents par 75 voix sur 125 votants; le 28 messidor suivant, il présenta quelques observations sur l'emprunt de cent millions, et, le 1er brumaire an VIII, fut nommé secrétaire de l'assemblée.
Favorable au coup d'Etat exécuté le 18 suivant, il fut élu par le Sénat conservateur (4 nivôse an VIII) député de la Vendée au nouveau Corps législatif. Après la législature, il se retira à Pouzauges où il mourut.
Date de mise à jour: juillet 2020