Nicolas, Ferdinand, Marie, Louis, Joseph Martin du Nord
1790 - 1847
- Informations générales
-
- Né le 29 juillet 1790 à Douai (Nord - France)
- Décédé le 12 mars 1847 à Lormois (Nord - France)
1790 - 1847
Député de 1830 à 1847 et ministre, né à Douai (Nord) le 29 juillet 1790 « en légitime mariage de Me Louis François Joseph Martin procureur au parlement de Flandres et d'Anne Louise Josephe Jacquart », mort au château de Lormois (Nord) le 12 mars 1847, il étudia le droit à Paris, se fit recevoir docteur, et débuta avec succès au barreau de Douai.
Il se prononça d'abord, avec un empressement qui lui fut plus tard vivement reproché par ses adversaires, en faveur du gouvernement de la Restauration ; mais il se rallia, dès le lendemain des journées de Juillet, à la monarchie de Louis-Philippe. « Jeune, écrivait l'auteur de la Galerie des Pritchardistes (1846), il suça le lait de la Muse, et la Muse lui inspira la chanson. Le vieux temps était revenu, il chanta comme les chevaliers, son Dieu, son roi, sa dame ; il excella dans la poésie des fêtes royales et des transparents : Accepte, ô légitimité, L'envoi de ma fidélité !
Sa fidélité avait les ardeurs de l'amour et la religion des reliques. Louis XVIII passait à Cambrai et daigna laisser tomber de son nez auguste quelques grains de tabac que M. Martin (du Nord) recueillit précieusement dans un chaton tout parfumé de royalisme. Quinze ans n'attiédirent pas la foi qu'il portait à ce scapulaire, et, à la première nouvelle de l'insurrection parisienne, l'avocat Martin, transporté, hors de lui, se précipite au palais de justice ; il assemble ses co-robins : « Messieurs, le populaire s'est soulevé... Charles X ne rendra pas son épée. Nous sommes enfants du drapeau sans tache. » La harangue fut superbe ; mais il fallait lui donner un corps. L'orateur prend la plume, il écrit comme le volcan fume, il rédige la plus éloquente protestation il la signe, il la fait circuler. Elle allait partir ! Le courrier de Paris arrive pavoisé du drapeau tricolore ! L'avocat Martin le voit et tombe consterné. On le cherche, on veut lui adresser de touchantes condoléances; les légitimistes sincères voulaient pleurer avec lui ; il ne pleurait plus, il s'était dérobé ; la solitude plaît aux nobles âmes et aux grandes douleurs. M. Martin (du Nord) y cacha la sienne et s'en vint paisiblement auprès de son protecteur, M. D.-D. (Deforest de Quart Deville, premier président de la cour), lui demander de l'aider à prouver son dévouement à ce drapeau tricolore, la gloire de notre patrie, à ces nobles couleurs pour lesquelles son cœur patriotique avait conservé un culte d'autant plus ardent qu'il était plus contenu... Nous aimons à reproduire ces débuts du héros ; quand le fleuve coule dans son lit majestueux, on aime à remonter jusqu'à la source modeste d'où s'échappent ses eaux bienfaisantes... »
Nommé successivement conseiller municipal, juge-suppléant, administrateur et vice-président des hospices de Douai, il brigua, le 28 octobre 1830, le mandat de député, et le grand collège du Nord l'envoya à la Chambre par 571 voix (1,258 votants, 2,895 inscrits). M. Martin siégea dans la majorité conservatrice, dont il ne tarda pas à devenir un des membres les plus en vue. Il se fit remarquer notamment dans la discussion générale du projet de loi sur la composition des cours d'assises et sur les déclarations du jury (6 janvier 1831). Le 12 mars, il fut rapporteur de la commission chargée d'examiner le projet de loi concernant la procédure pour les délits de presse. Peu de jours après (14 mars), il fit rejeter un amendement de M. Humann, qui proposait d'appliquer à tous les travaux d'utilité publique entrepris par le gouvernement les dispositions exceptionnelles du projet sur l'expropriation temporaire des propriétés privées.
Réélu, le 5 juillet 1831, député du 5e collège du Nord (Douai), par 91 voix (128 votants, 152 inscrits), contre 35 à M. Honoré, avocat, il signala sa rentrée par un rapport considérable sur la loi de l'avancement dans l'armée (8 octobre). En février 1832, il présenta le rapport de la commission chargée d'examiner le projet de loi pour autoriser la ville de Paris à créer un emprunt dont le chiffre fut fixé à 40 millions. À cette époque, un sieur Kessner, caissier général du trésor public, disparut, laissant un déficit de plusieurs millions. Rapporteur de la commission d'enquête, M. Martin (du Nord) passa pour avoir atténué dans cette affaire certaines responsabilités, pour en avoir dissimulé d'autres. Violemment attaqué à ce sujet par la presse opposante, il fut nommé, le 6 août 1833, avocat-général près la Cour de cassation.
Il obtint à cette occasion (7 septembre) sa réélection comme député, par 93 voix (109 votants, 151 inscrits), fut un des secrétaires de la Chambre, présenta le rapport du projet de loi sur les associations adopté le 26 mars 1834, et fut promu, le 5 avril suivant, procureur-général près la cour d'appel de Paris, en remplacement de Persil, devenu garde des sceaux. Le 15 du même mois, Louis-Philippe le désignait pour remplir les fonctions de procureur-général près la cour des pairs, convoquée à l'effet de juger le fameux procès d'avril.
Réélu, en raison de sa récente promotion, député du Nord, le 10 mai 1834, par 105 voix (170 votants); puis, le 21 juin de la même année, au renouvellement général, par 109 voix (113 votants, 172 inscrits), il fut appelé, le 8 août suivant, dans la nouvelle Chambre, aux fonctions de vice-président. Mais bientôt les travaux de la cour des pairs en 1835 et en 1836, le procès des accusés d'avril, l'attentat de Fieschi, l'affaire d'Alibaud, celle du complot de Neuilly, empêchèrent M. Martin (du Nord) de suivre assidûment les débats du Parlement.
En 1835 notamment, il s'acquitta avec un zèle tout particulier de la mission exceptionnelle dont l'avait investi le gouvernement. Son réquisitoire contre les accusés d'avril, succédant devant la cour des pairs au rapport de M. Girod (de l'Ain), occupa quatre séances ; il se terminait par des conclusions tendant à la mise en accusation de 318 prévenus, tant comme auteurs d'un attentat, préparé, concerté, arrêté et commis sur divers points du royaume, dans le but de détruire ou de changer le gouvernement, d'exciter les citoyens ou habitants à s'armer contre l'autorité royale, etc., que comme complices de ce même attentat à divers titres. M. Martin (du Nord) soutint avec ardeur l'accusation, et prit la parole à plusieurs reprises.
Son dernier réquisitoire fut prononcé en juillet. Le procureur-général entra en matière, après avoir brièvement exposé dans un préambule que, malgré le silence calculé des accusés, malgré leur système d'empêcher les débats, la vérité avait pu être établie avec évidence et certitude et que les éléments de conviction ne manquaient pas. Puis il aborda la cause. L'accusation de complot n'avait pas été sérieusement discutée aux débats, et les prévenus compris dans la catégorie de Lyon n'avaient, pour la plupart, à répondre que de faits matériels d'insurrection. Ce fut cependant à constater l'existence d'un complot que s'attacha exclusivement Martin (du Nord). Reproduisant l'acte d'accusation dans ses bases et dans ses formes, il rattacha les unes aux autres les associations républicaines de Paris et des diverses parties de la France, de Lyon particulièrement, et s'efforça de prouver, par leurs actes, par les publications émanées d'elles, par les articles des journaux dévoués à leur cause, qu'elles avaient été en complot flagrant et permanent contre le gouvernement. L'orateur suivait ensuite la marche des associations républicaines à Lyon ; il les montrait se rapprochant peu à peu des associations industrielles, s'y mêlant, exerçant sur elles une influence de plus en plus marquée, et finissant par les envahir, par les dénaturer. Plus le moment de la crise avait approché, plus les associations républicaines avaient déployé de vigueur et d'activité, plus les associations industrielles étaient devenues politiques. Depuis la loi sur les associations, le parti républicain avait hautement proclamé la nécessité de la révolte, de l'insurrection ; la fusion entre les associations politiques et les associations industrielles était alors complète; le même mot d'ordre, association, résistance, courage, était adopté par la Société des Droits de l'homme et par celle des mutuellistes. Le procureur-général s'indignait ensuite de l'accusation de provocation qu'on élevait contre le gouvernement; il ne s'indignait pas moins des accusations de violence et de cruauté dirigées contre les chefs de l'armée ; enfin il terminait ainsi son discours :
« Ce grand procès, qui offre un spectacle pénible, a été une nécessité devant laquelle il n'était pas permis de reculer ; toutefois, il faut le reconnaître, il en est sorti des lumières nouvelles et d'utiles enseignements. La Société des droits de l'homme, ce foyer du républicanisme, est dévoilée par ses actes, par ses écrits ; elle ne peut les démentir : il n'est plus possible d'abuser personne sur ses doctrines, sur ses desseins. On sait comment elle entend l'ordre social, c'est l'insurrection; comment elle entend le droit de propriété, c'est l'arbitraire. Tous ceux qui possèdent (et grâce au travail, le nombre en est immense) savent quelles sûretés leur donne le code de Robespierre. La menace d'un tel avenir n'est pas l'un des moindres appuis de notre monarchie constitutionnelle. Pour vous, messieurs, vous avez donné comme juges une grave et importante leçon. Des hommes qui, comme citoyens, avaient commis le plus grand crime qu'ils pussent commettre, s'étaient flattés de conquérir l'impunité par leur résistance. Vous avez maintenu à la loi sa toute-puissance. Il serait étrange en effet que, lorsque tous les citoyens se courbant devant elle, des accusés prétendissent la dominer. Inébranlables aux outrages, vous avez eu la dignité du calme et la puissance de la modération ; la justice a puisé une force nouvelle dans votre fermeté. Souffrez que notre voix vous le dise en finissant : dans ces longs débats la France vous regarde avec reconnaissance; vous avez bien mérité de la patrie ! »
M. Chégaray (V. ce nom.), avocat général, prit la parole à son tour ; puis vinrent les plaidoiries et le jugement, M. Martin (du Nord) voyageait en Suisse, au mois de septembre 1836, lorsqu'il fut appelé à Paris pour faire partie du cabinet nouvellement constitué; une ordonnance du 20 septembre lui avait confié le portefeuille des Travaux publics, de l'Agriculture et du Commerce ; mais la maladie l'empêcha jusqu'au 16 octobre de remplir ses fonctions.
Comme député, il fut réélu, le 29 octobre 1836, puis le 4 novembre 1837, par 116 voix (119 votants, 179 inscrits) ; et, le 2 mars 1839, par 108 voix (129 votants). Comme ministre, Il présenta des lois pour l'achèvement de routes royales, de ports maritimes, de canaux, pour l'établissement de chemins de fer, pour l'amélioration de différentes rivières navigables, etc. Il déposa en outre le projet de loi sur l'application exclusive du système métrique, une autre loi sur les vices rédhibitoires des animaux domestiques, fit lever la prohibition des fils de laine à l'étranger, et abaisser les droits sur les houilles étrangères, augmenta les encouragements à l'agriculture, etc. Il tenta aussi une réorganisation du Conservatoire des Arts et Métiers et créa plusieurs bourses à l'Ecole centrale des Arts et Manufactures. Enfin, il dut s'occuper de l'établissement des grandes lignes de chemins de fer, mais ses projets ne furent pas goûtés. Le 1er avril 1839, il résigna son portefeuille, et se retira avec ses collègues du cabinet dit du 15 avril 1838, dans lequel il avait été maintenu. Appelé de nouveau par la Chambre au fauteuil de la vice-présidence, il reçut bientôt, dans la combinaison ministérielle du 29 octobre 1840, un nouveau portefeuille, celui de la Justice et des Cultes. Il le garda jusqu'au 15 janvier 1847.
Durant cette période, le collège de Douai ne cessa de le réélire :
- le 5 décembre 1840, par 137 voix (140 votants) ;
- le 9 juillet 1842, par 173 voix (177 votants, 235 inscrits) ;
- le 1er août 1846, par 172 voix (173 votants, 231 inscrits).
Le 22 septembre 1841, le garde des sceaux crut devoir adresser aux procureurs-généraux deux circulaires: l'une avait pour objet la ferme et rigoureuse exécution de la loi « sur les associations illicites », l'autre était relative aux délits de presse. Ces deux circulaires furent le sujet de vives attaques de la part de l'opposition démocratique.
Parmi les lois qu'il présenta aux Chambres, il faut citer celles sur les ventes judiciaires des immeubles, sur la responsabilité des propriétaires de navires, sur les ventes aux enchères de marchandises neuves, sur la police de la chasse, sur le conseil d'Etat, sur la restauration de la cathédrale de Paris, etc. Il s'occupa aussi de la réforme du régime hypothécaire, présenta à la Chambre des pairs un projet de loi sur le noviciat judiciaire, et prépara un projet de modifications à apporter au code d'instruction criminelle.
Ministre des cultes, il avait dû lutter contre les tendances les plus opposées et ménager les défiances les plus contraires ; il s'en était tiré par d'adroites négociations avec les jésuites et avec le Saint-Siège. Le 15 Janvier 1847, une ordonnance royale enleva le ministère de la Justice à M. Martin (du Nord) pour « raison de santé ». Cette destitution à peine déguisée eut pour motif véritable, d'après la rumeur publique, certains faits scandaleux auxquels M. Martin (du Nord) aurait participé dans une maison interlope. L'ancien ministre mourut brusquement deux mois après. Il fut remplacé comme garde des sceaux par M. Hébert.
Grand croix de la Légion d'honneur (1845)
On a de lui :
- Discours prononcé à l'audience solennelle de la cour royale de Paris du 3 novembre 1835 ;
- Expulsion des Jésuites (1845).
Date de mise à jour : septembre 2013