Nicolas, François Bellart
1761 - 1826
- Informations générales
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- Né le 20 septembre 1761 à Paris ( - Généralité de Paris France)
- Décédé le 7 juillet 1826 à Paris (Seine - France)
1761 - 1826
Député de 1815 à 1822, né à Paris (Généralité de Paris), le 20 septembre 1761, mort à Paris (Seine), le 7 juillet 1826, il était le fils d'un charron; placé au collège Mazarin, il fut un élève peu appliqué.
Entré à seize ans, comme clerc chez son parent, le praticien Pigeau, procureur au Châtelet, il s'adonna à la déclamation dramatique en même temps qu'à l'étude du droit, et Talma fut alors son ami et son condisciple.
Bellart ne se fit inscrire au tableau des avocats qu'en 1785; sa réputation se fit jour à la barre du tribunal révolutionnaire : il y plaida avec succès pour Mme de Rohan, Dufresne de Saint-Léon, Lacoste, dernier ministre de la marine de Louis XVI, dont il partagea la défense avec Tronchet. Il réussissait mieux au criminel qu'au civil, « car il avait, dit un de ses biographes, plus d'âme et de chaleur que de logique, plus d'imagination que de connaissances. »
Il fût chargé aussi de la défense de l'abbé Salamon, ancien clerc au parlement de Paris, prévenu de conspiration contre le gouvernement directorial, et, plus tard, de celle de Mlle de Cicé, convaincue d'avoir reçu et caché dans son domicile Saint-Régent et Carbon, auteurs de la machine infernale: son plaidoyer dans cette affaire ajouta beaucoup à l'opinion qu'on avait de son habileté. Dans l'exorde, l'orateur protestait tout d'abord de son « attachement sincère» à ce gouvernement « qui s'est élevé pour le bonheur de la France, qui inspire la confiance, commande l'amour et fait germer les idées libérales. » Il continuait: « Peut-être ne sera-ce point ce qu'un jour la postérité admirera le moins dans l'histoire de cet illustre citoyen (Bonaparte), que l'adresse avec laquelle il sut dans son pays, déchiré trop longtemps par des guerres sacrées, rallier à lui, et au bien public, les opinions religieuses, en les honorant toutes sans distinction comme des liens sociaux, en les honorant toutes, non pas en sectaire, mais en homme d'Etat, et sans jamais leur sacrifier la véritable philosophie. »
Bellart ne manquait pas de rendre aussi un éclatant hommage aux fondateurs de la liberté; de rappeler les droits du peuple reconquis, et le signal de la guerre faite au despotisme; il s'applaudissait de parler devant une assemblée de philosophes, qui ne font à personne un crime de son opinion, qui trouvent tous les dogmes bons, pourvu qu'ils inspirent l'horreur du mal et le goût du bien. Sa cause l'amenant à parler des chouans, il flétrissait ces hommes qui ont « joué un rôle si funeste dans nos troubles civils. » - « J'ai vainement cherché, s'écriait-il, nulle part je n'ai trouvé dans nos monuments historiques que la légende des chouans fût vaincre ou mourir. Ce cri sublime fut souvent poussé par un parti plus glorieux. Nos victorieuses et républicaines armées plus d'une fois le firent retentir, en marchant la baïonnette en avant, et si ces mots sont un signe de ralliement, c'était non de nos ennemis, mais de nos guerriers qu'Adélaïde de Cicé aurait été complice. » (Un morceau de papier, trouvé dans un vieux livre d'église de la prévenue et sur lequel on avait inscrit en lettres moulées les mots vaincre ou mourir, était présenté, dans l'acte d'accusation, comme un signe de ralliement). Enfin Bellart tonnait « contre ces émigrés véritablement condamnables, enfants parricides de la patrie, modernes Coriolans qui ont été de cour en cour mendier des outrages et des ennemis contre le pays natal. » - Bientôt Bonaparte, qui avait connu Bellart dans le salon de Bénezech, le nomma membre du Conseil général du département de la Seine; il en fut fréquemment le président et l'orateur.
Bien qu'il se fût alors retiré du palais, il continua, cependant, de figurer dans le Conseil de tous les grands procès et d'assister régulièrement à toutes les séances du Conseil de discipline ; à ces titres, il fut choisi, en 1810 pour prononcer l'éloge de Férey, le jurisconsulte, en présence de l'archichancelier de l'Empire. Lié d'amitié avec le préfet Frochot, il est juste de dire qu'après la destitution de ce fonctionnaire, à la suite de la tentative faite par Malet, le 23 octobre 1812, contre le gouvernement impérial, Bellart fit entendre devant le nouveau préfet Chabrol, l'éloge de son prédécesseur. Il n'en continua d'ailleurs pas moins de présenter à l'empereur nombre d'adresses où le chef de l'Etat était divinisé. Rien ne devait faire présumer son explosion soudaine de malveillance à l'égard de Napoléon au moment de la chute de son ancien protecteur. Les armées de la coalition étant arrivées sous les murs de Paris, il employa toute son influence pour les détacher de la cause impériale; signa, le 1er avril 1814, la fameuse adresse aux habitants de Paris : « Vos magistrats seraient traîtres envers vous, s'ils comprimaient plus longtemps la voix de leur conscience : elle vous crie que vous devez tous les maux qui vous accablent à un seul homme.., le plus épouvantable oppresseur qui ait pesé sur l'espèce humaine. » Cette adresse, rédigée par l'avocat Quéquet, fut approuvée par onze membres du conseil sur vingt-cinq et affichée par ordre de Sacken, gouverneur de Paris pour les alliés.
Après la déchéance de Napoléon, décrétée par le Sénat le 4 avril, Bellart reçut de Louis XVIII le ruban de la Légion d'honneur, des lettres de noblesse et un brevet de conseiller d'Etat. A juste titre, il jugea prudent de se mettre en lieu sûr à la première nouvelle du retour de l'île d'Elbe; il se retira en Angleterre, et revint à la seconde Restauration.
Nommé procureur général, le 14 août 1815, près la cour royale de Paris, il employa, dès lors, tous ses efforts à la défense du « trône et de l'autel. » Membre de la majorité de la Chambre introuvable (22 août), il y représenta le département de la Seine et y parla en faveur de la loi sur la détention arbitraire des prévenus d'attentats politiques : « Nulle part, dit-il, la charte n'interdit à la loi d'étendre son pouvoir et sa prévoyance aussi loin que la sûreté de l'Etat peut l'exiger. » Il défendit jusqu'aux massacres du Midi que dénonçait Voyer d'Argenson. Magistrat, il porta la parole, comme procureur général, dans le procès du maréchal Ney devant la Chambre des pairs; la première séance fut extrêmement curieuse par l'attitude de Bellart à l'égard des témoins. A l'avocat Berryer, qui invoquait le bénéfice de la convention militaire de Paris entre les alliés et le gouvernement provisoire, il répondit : « Avant que les défenseurs du maréchal s'engagent dans de nouveaux raisonnements absolument étrangers au fait de l'accusation, je dois éviter un scandale de plus dans ces pénibles discussions. Nous sommes français; ce sont les lois françaises qu'il faut invoquer. Nous avions bien pressenti qu'on avait eu l'idée de nous présenter les moyens qu'on se dispose à faire valoir; mais nous avions cru, je l'avoue, que la réflexion y ferait renoncer. Nous attendions, pour y répondre, qu'on développât la défense de l'accusé; mais puisqu'on s'écarte si notoirement de la controverse, puisqu'on oublie même l'arrêt que la cour a rendu sur la question préjudicielle, je déclare que les commissaires du roi s'opposent formellement à ce que les défenseurs de l'accusé s'écartent du point de fait qu'ils sont appelés à discuter. » Trois pairs seulement, MM. Lanjuinais, d'Aligre et de Nicolaï, protestèrent, alléguant qu'ils ne pouvaient juger en conscience, attendu le refus qu'on avait fait à l'accusé d'entendre la fin de sa défense sur la convention du 3 juillet. Le maréchal Ney fut condamné à mort.
Réélu député par le département de la Seine, le 4 octobre 1816, avec 126 voix (191 votants, 228 inscrits), puis, le 20 septembre 1817, avec 4,023 voix sur 7,378 votants et 9,677 inscrits, il siégea jusqu'au bout sur les bancs de la droite, et resta le champion passionné de la légitimité.
En 1817-1818, il parla dans la discussion de la loi sur la presse, et demanda qu'un écrit prévenu de sédition pût être saisi dans les mains mêmes de l'imprimeur. La question du dépôt à la police, considéré comme publication, ayant été écartée, il demanda qu'au moins le simple dépôt donnât ouverture à la poursuite en calomnie; et, ajouta-t-il, peut-être devrait-on revoir avec plus d'attention l'article qui a été adopté (murmure d'improbation.) En 1818-1819, il fit un important discours à propos de la résolution de la Chambre des pairs contre la loi électorale. Les royalistes constitutionnels invoquaient l'opinion. « L'opinion, répliqua Bellart, mais où est-elle? Est-ce dans ces pamphlets dont nous inondent les écrivains qui spéculent, au profit de leur cupidité affamée, des trésors grossis au prix du sang et des larmes des citoyens? Non, l'opinion publique n'est pas là; elle choisit des organes moins impurs. Est-elle dans les pétitions dont le bureau est encombré depuis quelques jours? S'imagine-t-on trouver dans cette enceinte des âmes assez pusillanimes pour s'en laisser imposer par cette tactique décriée? Ce n'est pas à la multitude à décider de ces questions abstraites du contrat social, dans lesquelles les meilleurs esprits ne sont pas bien sûrs de ne pas s'égarer... » Bellart nia que la résolution de la Chambre des pairs eût causé la moindre agitation en France, s'affligea de voir le ministère Decazes différer avec lui d'opinion, et invita la Chambre à maintenir les termes de la loi.
Il intervint encore dans les débats sur la presse et sur les affaires étrangères: à propos de la loi du 9 novembre 1815, il se plaignit amèrement de la « douceur » avec laquelle elle avait été appliquée par les tribunaux et se prononça pour le retour au système de la censure abolie par le projet nouveau. « Ce n'est point le temps, dit-il, d'être populaire, mais celui d'être impassible et énergique. » La preuve testimoniale contre les fonctionnaires ayant été adoptée, il se leva seul, avec Mestadier, à la contre-épreuve. Sur le budget des affaires étrangères, il provoqua une vive et longue agitation en soutenant que c'était usurper les droits de l'administration et sortir des limites constitutionnelles que de « déterminer que telle somme sur tel objet de dépense ne sera pas allouée... »
Dans la session de 1819-1820, il vota pour les lois d'exception et le nouveau système électoral. Tant qu'il fut procureur-général, Bellart poursuivit avec autant d'acharnement les livres et les journaux que les personnes. Avec MM. de Marchangy, de Broé, de Vatimesnil, Jacquinot de Pampelune pour substituts et pour auxiliaires, il montra la vigueur la plus impitoyable dans les procès de La Valette, des patriotes de 1816, de « l'épingle noire », « du coup de pistolet »; dans la condamnation du Censeur, dans l'arrestation de Donnadieu, de Canuel et de leurs amis. La garde des sceaux, de Serre, dut lui enjoindre formellement de n'intenter, sans un ordre exprès, aucun procès relatif à des écrits. Pourtant son ardeur ne se ralentit pas. Ce fut lui qui entreprit de ramener par la voie correctionnelle le professeur Bavoux (v. ce nom) à un enseignement plus orthodoxe. Ce fut lui qui, avant intenté des poursuites aux éditeurs de la Bibliothèque historique et du Nouvel homme gris, pour quelques réflexions satiriques contre l'emploi des régiments suisses capitulés, fit maintenir l'accusation, malgré le garde des sceaux, par les Chambres assemblées de la cour royale. La décision du jury acquitta les prévenus, Bellart fut chargé de porter la parole à la Chambre des pairs en qualité de procureur général dans le procès de Louvel. Enfin, lorsqu'en 1825 (un an avant sa mort), il s'agit de la fameuse poursuite générale des journaux, représentés par le Constitutionnel et le Courrier, Bellart, quoique malade, voulut compulser lui-même tous les dossiers et rédiger l'acte d'accusation. Louis XVIII lui avait dit : « Vous avez le malheur d'être procureur-général comme j'ai celui d'être roi. Aussi longtemps que je serai roi, vous serez mon procureur-général. » Il le fut de même de son frère, jusqu'au jour où trop affaibli par les souffrances physiques, il alla porter sa démission à Charles X, qui le vit mourir quelques jours avant d'avoir eu le temps de lui donner un successeur.
On a de Bellart, outre ses divers plaidoyers, mémoires ou discours, un Essai sur la légitimité des rois considérée dans ses rapports avec l'intérêt des peuples, en particulier avec l'intérêt des Français, imprimé à Bruxelles (1815). « Son art, a dit de lui un de ses amis et correspondants, Madrolle, tenait toute sa force de la chaleur de l'âme, de l'audace de la parole et aussi de l'habitude de ses organes. Quand il s'animait, le sang lui montait à la tête, au point qu'il devenait rouge comme un homme ivre. »
Date de mise à jour: juin 2015