Victor, Léon, Henri Chatenay
1886 - 1985
Né le 3 avril 1886 à Doué-la-Fontaine (Maine-et-Loire)
Décédé le 11 mars 1985 à Saint-Barthélemy-d'Anjou (Maine-et-Loire)
Sénateur du Maine-et-Loire de 1948 à 1951
Député du Maine-et-Loire de 1951 à 1958
Fils de Louis Chatenay, négociant, Victor Chatenay effectue sa scolarité secondaire au collège Mongazon à Angers. Il obtient sa licence en droit après avoir suivi les cours de la Faculté catholique d'Angers. Engagé volontaire en 1914, il est blessé à trois reprises. Sa conduite lui vaut d'être promu sous-lieutenant et décoré de la Croix de guerre et de la Légion d'honneur. En 1920, il prend la succession de son père dans le commerce de l'alimentation et de vins que tient celui-ci à Doué-la-Fontaine. En 1931, il devient l'administrateur délégué des établissements Brisset, maison à succursales multiples d'Angers, dont il sera, à partir de 1958, le directeur général. Sa notoriété professionnelle le fait élire membre et secrétaire de la Chambre de commerce de Saumur. Il témoigne de nouveau de son patriotisme et de son courage pendant la Seconde Guerre mondiale. Il est en effet le chef du réseau de résistance « Honneur et Patrie ». Arrêté en février 1942, il parvient à s'échapper et passe en Angleterre en septembre 1943. Il est décoré à la Libération de la Rosette de la Résistance, de la Croix de guerre 1939-1945 et de la King's Medal of Courage.
Il s'engage en politique sous les couleurs du R.P.F., lors des élections municipales de 1947. Sa liste l'emporte sur celle du maire sortant socialiste d'Angers et il devient maire de l'« Athènes de l'Ouest », mandat qu'il conserve jusqu'en 1959. Présenté par le R.P.F. aux élections de 1948 pour le Conseil de la République, il est élu par 807 voix sur 1 237 votants. Il appartient à la Commission des affaires économiques et à celle du suffrage universel. Au cours de son bref mandat, il dépose diverses propositions d'intérêt local. Aux élections législatives du 17 juin 1951, Victor Chatenay se présente à la tête de la liste R.P.F. du Maine-et-Loire. Avec 36,3 % des voix, sa formation arrive nettement en tête devant le M.R.P. et les indépendants. Aux côtés de Victor Chatenay sont élus Diomède Catroux et le contre-amiral André Commentry son adjoint à la mairie. Aussi Victor Chatenay démissionne-t-il, le 31 juillet 1951, de son mandat sénatorial.
Pendant la législature, le maire d'Angers appartient aux mêmes Commissions qu'au Conseil de la République. En outre, il siège à la Commission des moyens de communication à partir de 1953 puis à celle de la production industrielle en 1955. Très absorbé par ses fonctions de dirigeant d'entreprise et de maire d'une grande ville, Victor Chatenay n'intervient pas en séance et dépose une seule proposition de résolution tendant à inviter le gouvernement à exclure des mesures de licenciement, prévues par la loi n° 47-1680, les fonctionnaires et agents civils orphelins de guerre ou mutilés à moins de 80 %. Il vote les lois scolaires de 1951 favorables à l'enseignement privé (lois dites André Marie et Barangé) mais s'oppose aux gouvernements des débuts de la législature.
Il s'abstient lors des investitures d'Antoine Pinay (6 mars 1952) et de Joseph Laniel (26 juin 1953) dont il soutient la politique indochinoise jusqu'au débat sur Dien-Bien-Phü à la suite duquel il vote contre le gouvernement (13 mai 1954). Confirmant ce dernier vote, il refuse la confiance le 12 juin 1954 (chute du cabinet Laniel). Il accorde alors son soutien à Pierre Mendès-France (17 juin 1954), vote les accords de Genève (23 juillet) mais refuse la C.E.D. (30 août). S'il approuve les accords de Londres qui mettent fin à l'occupation de l'Allemagne (12 octobre) il s'abstient sur ceux de Paris qui autorisent le réarmement de la R.F.A. (29 décembre). Il reste fidèle au président du Conseil le 4 février 1955 (chute du gouvernement) puis soutient Edgar Faure, mais lui refuse la confiance, sur le mode de scrutin et la date des élections, le 29 novembre 1955 (chute du gouvernement).
Aux élections du 2 janvier 1956, la multiplicité des listes en présence et la crise du mouvement gaulliste expliquent que la liste des Républicains sociaux, conduite par Victor Chatenay, ne recueille que 24 155 suffrages, lui-même en obtient 27 691 à titre personnel. Toutefois, l'apparentement conclu par Victor Chatenay avec le M.R.P., le C.N.I. et d'autres indépendants dépasse la majorité absolue et se répartit par conséquent la totalité des sièges à pourvoir.
Victor Chatenay siège au sein des mêmes commissions et se voit confier l'élaboration de deux rapports qui porte l'un sur la réorganisation du service des instruments de mesure, l'autre sur une proposition de loi tendant à faire bénéficier les étudiants de la région parisienne d'une réduction de 50 % sur le tarif des transports en commun.
Au début de la législature, il ne participe pas aux scrutins sur l'investiture de Guy Mollet et sur les pouvoirs spéciaux en Algérie (31 janvier et 12 mars 1956) alors que la majorité de ses collègues du groupe des Républicains sociaux soutiennent le nouveau président du Conseil. Il apporte ensuite son concours à Maurice Bourgès-Maunoury (12 juin 1957) et à Félix Gaillard (5 novembre) mais vote contre la C.E.E. (9 juillet) et refuse la confiance au gouvernement sur la mission dite des « bons offices » le 15 avril 1958 (chute du cabinet Gaillard). Il entre donc dans l'opposition, refuse la confiance à Pierre Pflimlin (13 mai 1958), l'état d'urgence en métropole (16 mai) et la révision de la Constitution (27 mai) avant de voter l'investiture du général de Gaulle (1er juin), les pleins pouvoirs et la révision constitutionnelle (2 juin).
CHATENAY (Victor, Léon, Henri)
Né le 3 avril 1886 à Doué-la-Fontaine (Maine-et-Loire)
Décédé le 11 mars 1985 à Saint-Barthélemy-d’Anjou (Maine-et-Loire)
Sénateur du Maine-et-Loire de 1948 à 1951
Député du Maine-et-Loire de 1951 à 1959
Victor Chatenay avait été un des rares députés gaullistes à retrouver son siège le 2 janvier 1956. Maire d’Angers depuis 1947, il sollicite le renouvellement de son mandat parlementaire à l’occasion des élections législatives de novembre 1958, plusieurs mois après le retour au pouvoir du général de Gaulle. Il obtient l’investiture de l’Union pour la nouvelle république (UNR) dans la 1ère circonscription du Maine-et-Loire, qui est formée des cantons d’Angers nord-est, Châteauneuf-sur-Sarthe et Tiercé. Dans sa profession de foi électorale, il se dépeint en « homme ferme dans ses convictions », en fidèle « compagnon du général de Gaulle ». Il rappelle qu’il n’a « jamais cessé de proclamer, malgré les sourires, les moqueries, les sarcasmes, voire les injures et les menaces, qu’il De Gaulle était l’homme qui pouvait sauver le pays de la décadence et de la ruine ». Il fait référence à l’envoi du contingent en Algérie en notant que « si la liste sur les Monuments aux morts n’est jamais close », la faute en incombe aux « mauvais gouvernements » de la IVème République. Victor Chatenay plaide en faveur de « la liberté de l’école », thème mobilisateur dans ces terres de l’Ouest français où nombre d’enfants sont scolarisés dans des établissements d’enseignement libre à cette époque. Il a pour suppléant un jeune et brillant professeur de droit, Jean Foyer, conseiller technique auprès du général de Gaulle à la présidence du Conseil, où il s’occupe des problèmes de la Communauté. Le maire d’Angers subit cependant la concurrence d’un de ses adjoints, l’Indépendant Prosper David. Parmi les autres candidats se distingue le nom de Roger Quilliot, professeur agrégé, qui porte les couleurs de SFIO et devait ensuite s’implanter dans le Puy-de-Dôme. Le 23 novembre 1958, Victor Chatenay arrive en tête avec 35,6% des suffrages exprimés, devant Prosper David (30,7%). Le candidat de gauche le mieux placé est le communiste Pierre Sicard, qui n’obtient cependant que 13,1% des voix. Au second tour, le maire d’Angers l’emporte grâce au soutien de 46,5% des électeurs dans le cadre d’une triangulaire qui l’oppose à Prosper David (40,3%) et au candidat du Parti communiste (13,2%).
L’édile angevin s’inscrit au groupe de l’Union pour la nouvelle République (UNR) et approuve le programme du gouvernement de Michel Debré le 16 janvier 1959. Il ne siège que quelques jours à la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale. Le 20 février 1959, il est en effet nommé membre du Conseil constitutionnel par le président de l’Assemblée nationale Jacques Chaban-Delmas. Cette nouvelle institution, régie par le titre VII de la Constitution de la Vème République, est composée de neuf membres : le chef de l’Etat et les présidents des deux Assemblées procèdent chacun à la nomination de trois d’entre eux. La procédure revêt un caractère exceptionnel en 1959, puisqu’il est prévu que trois conseillers constitutionnels, dont Victor Chatenay, n’exerceront ces responsabilités que pendant trois ans, tandis que les fonctions des autres dureront six ou neuf ans. L’objectif est de permettre un renouvellement significatif de cette instance après ses premières années de fonctionnement.
La nomination de Victor Chatenay au Conseil constitutionnel représente une forme de « compensation ». Au moment de l’annonce de la composition du gouvernement de Michel Debré, en janvier 1959, une erreur de communication avait fait annoncer « Victor Chatenay » comme secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre, alors que c’est le haut fonctionnaire Pierre Chatenet qui avait été nommé à ce poste.
L’article 57 de la Constitution de la Vème République dispose que « les fonctions de membre du Conseil constitutionnel sont incompatibles avec celles de ministre ou de membre du Parlement ». En mars 1959, Victor Chatenay est donc remplacé au Palais-Bourbon par son suppléant Jean Foyer. Il quitte également la mairie d’Angers, où l’avocat Jacques Millot lui succède.
L’ancien parlementaire se montre très assidu aux séances du Conseil constitutionnel, puisqu’il ne fait défaut qu’à une seule occasion en trois ans. Outre le président Léon Noël, il y fréquente notamment Georges Pompidou ou les deux anciens présidents de la République Vincent Auriol et René Coty, qui sont membres de droit. Victor Chatenay intervient moins fréquemment lors de ces réunions que certains de ses anciens collègues parlementaires, comme Jean Gilbert-Jules. Il est cependant désigné comme rapporteur du règlement provisoire de l’Assemblée nationale et se trouve donc à l’origine de la décision des 17, 18 et 24 juin 1959. Dans son rapport, l’ancien élu gaulliste a adopté une conception très stricte de la notion de « conformité » des règlements des Assemblées à la Constitution. Cette démarche le conduit à préconiser une décision qui empêche toute reconquête des droits du Parlement en matière de fixation de l’ordre du jour ou d’attribution aux commissions permanentes des prérogatives des commissions d’enquête. La décision du Conseil constitutionnel a nécessité trois jours de délibérations et reprend, pour l’essentiel, les conclusions du rapporteur. Elle est comprise dans les milieux politiques comme une manière de renforcer la prépondérance de l’exécutif sur le législatif.
Les fonctions de Victor Chatenay au Conseil constitutionnel prennent fin en février 1962. Il est alors remplacé par l’ancien Garde des sceaux Edmond Michelet. Victor Chatenay reste directeur général jusqu’en 1968 de l’entreprise à succursales multiples où il travaille depuis 1931. Rentré dans la vie privée à la fin des années 1960, il décède près de vingt ans plus tard, âgé de 98 ans.
Victor Chatenay était grand officier de la Légion d’honneur, commandeur des palmes académiques et du Mérite civil et titulaire des croix de guerres 1914-1918 et 1939-1945. Il avait également été décoré de la King’s Medal for Courage britannique.