Pierre, Marie de Boissoneaux de Chevigny
1914 - 2001
Né le 3 juin 1914 à Colmey (Meurthe-et-Moselle)
Sénateur de Meurthe-et-Moselle de 1952 à 1956
Député de Meurthe-et-Moselle de 1956 à 1958
Né le 3 juin 1914 au château familial de Martigny, d'un père officier d'infanterie et propriétaire foncier, Pierre de Boissonneaux de Chevigny fréquente l'Ecole des Roches avant d'obtenir le diplôme de l'Ecole nationale de la France d'outre-mer. Lieutenant d'artillerie pendant la guerre de 1939-1945, d'abord affecté dans la D.C.A. à Metz, il prend ensuite part aux campagnes de Hollande et de Belgique. Fait prisonnier, il s'évade et rejoint les lignes françaises. Pendant l'Occupation il s'engage dans la Résistance. Arrêté une première fois à Paris en février 1941, relaxé, il dirige le secteur lyonnais du réseau de renseignements militaires franco-britannique « Alliance ». Quelques mois après son mariage, il est arrêté par la Gestapo ainsi que sa femme qui s'était associée à son action clandestine. Il connaît diverses prisons avant d'être déporté à Buchenwald. Sur le point d'être mère, Madame de Chevigny sera libérée après un long séjour à Fresnes. Le comportement de Pierre de Chevigny lui vaut la Croix de guerre avec deux citations, le grade de Chevalier dans l'ordre de la Légion d'honneur attribuée à titre militaire et la Médaille de la Résistance.
De retour à Colmey il reprend l'exploitation familiale qui avait beaucoup souffert de la guerre et de l'Occupation. Sa réussite, ses compétences et ses intérêts pour les questions agricoles l'amènent à exercer de nombreuses responsabilités : président du comice agricole de Briey, président de la coopérative laitière du bassin de Longwy, il est par ailleurs vice-président de la Chambre d'agriculture.
Parallèlement à sa vie professionnelle et familiale - il aura cinq enfants - Pierre de Chevigny entreprend une carrière politique. Elu maire de Colmey en 1945, réélu en 1947 et en 1953, il se présente aux élections législatives du 17 juin 1951 en troisième position sur la liste des Indépendants paysans et républicains nationaux. Avec 23,6 % des suffrages exprimés elle arrive en tête distançant légèrement le R.P.F. avec lequel elle était apparentée. Malheureusement pour Pierre de Chevigny l'apparentement ne franchit pas la majorité absolue - il réalise un peu moins de 47 % des suffrages - et chacune des listes le constituant n'obtient que deux élus sur les six sièges à pourvoir. Quatre mois plus tard, Pierre de Chevigny conquiert le canton de Longuyon représenté par un communiste. De 1955 à 1958, il sera vice-président du conseil général mais ne retrouvera pas son siège aux élections d'avril 1958. Nettement en tête au premier tour, devant le candidat du Parti communiste, il affronte au second tour un divers gauche arrivé en troisième position pour lequel le candidat communiste s'était désisté. Il est battu de quelques voix.
Aux élections du 18 mai 1952, Pierre de Chevigny est élu au Conseil de la République. S'inscrivant au groupe du Centre républicain d'action rurale et sociale, il siège à la Commission du travail et de la Sécurité sociale pendant toute la durée de son mandat, à celle des boissons en 1952, à celle de la famille en 1953 puis à la Commission du suffrage universel à partir de 1954.
C'est en tant qu'ancien résistant qu'il prononce sa première intervention, le 7 juillet 1953, dans la discussion de propositions de loi qui deviendront la loi du 6 août 1953 portant amnistie. En termes émouvants il relate son engagement et décrit les souffrances qu'il a côtoyées. Favorable au pardon, spécialement pour ceux qui, sans commettre de crimes, n'ont fait qu'obéir aux ordres, il stigmatise les « faux résistants » et demande que l'amnistie ne couvre pas les crimes et délits commis, après 1946, « dans l'esprit de la Résistance ». Deux ans plus tard, le 12 juillet 1955, il s'opposera à ce que les termes « travailleurs déportés » soient substitués aux mots « personnes contraintes au travail » dans le titre de la loi du 14 mai 1951.
Partisan de la réforme de l'Etat, il rapporte devant le Conseil de la République le projet de loi sur le regroupement des dates des élections (20 juillet 1954). Dans le même domaine, il intervient le 8 novembre 1955 sur le projet de loi relatif au renouvellement de l'Assemblée nationale. Il y dépose un amendement instituant le vote obligatoire. Par sa proposition de résolution du 1er mars 1955, Pierre de Chevigny souhaite faciliter l'exercice du droit de dissolution : celle-ci devenant automatique si deux crises ministérielles surviennent dans la période de dix-huit mois suivant les dix-huit premiers mois de la législature.
Enfin, au titre de la Commission du travail et de la Sécurité sociale, il rapporte une proposition de loi tendant à la coordination des régimes de retraite professionnels (8 novembre 1955).
Pierre de Chevigny aurait pu poursuivre sa carrière de sénateur mais le 2 janvier 1956, il est à nouveau candidat aux élections législatives, toujours en troisième position sur la liste d'Union des indépendants et paysans. Arrivé à nouveau en tête, cette fois-ci devant le Parti communiste, elle obtient trois sièges. Le nouvel élu opte pour l'Assemblée nationale.
Apparenté aux Indépendants et paysans d'action sociale puis membre du groupe Paysan d'action rurale et sociale, il siège à la Commission de la famille, de la population et de la santé publique ainsi qu'à celle du travail et de la Sécurité sociale puis à la Commission de la presse. Avec de nouveaux élus il fonde un groupe de jeunes députés rassemblant notamment Valéry Giscard d'Estaing (Indépendant), Jean de Lipkowski (R.P.F.), Christian Bonnet (M.R.P.), Pascal Arrighi (Radical) et Paul Alduy (S.F.I.O.). Pendant cette courte législature, le député de la Meurthe-et-Moselle dépose quatre propositions à caractère social, deux d'entre elles concernent les victimes de la guerre. Le 9 octobre 1956 il prend à nouveau part à la discussion d'une proposition de loi relative à la désignation des personnes contraintes au travail en pays ennemi. Il estime que le titre de déporté doit être réservé à ceux qui ont connu les camps de concentration et condamne l'attitude du Parti communiste à l'égard des requis du S.T.O.
S'il s'abstient volontairement sur l'investiture de Guy Mollet (31 janvier 1956), il lui accorde les pouvoirs spéciaux en Algérie (12 mars) et vote la confiance après l'expédition de Suez (25 octobre). Il ne participe pas au scrutin d'investiture de Maurice Bourgès-Maunoury (12 juin 1957) mais contribue à sa chute sur les institutions de l'Algérie (30 septembre). Il accorde la confiance à Félix Gaillard lors de son investiture (5 novembre) ainsi que les pouvoirs spéciaux en Algérie (12 novembre) mais vote contre le gouvernement le 15 avril 1958 (chute du cabinet). En matière européenne, il s'abstient volontairement sur la ratification des traités relatifs à la C.E.E. et à l'Euratom (9 juillet 1957). Dans les dernières semaines de la IVe République, il s'oppose à l'investiture de Pierre Pflimlin (13 mai 1958), à la déclaration de l'état d'urgence sur le territoire métropolitain (16 mai), à la révision de la Constitution (27 mai) avant d'accorder sa confiance au général de Gaulle (1er juin), de voter les pleins pouvoirs et d'approuver la révision constitutionnelle (2 juin).