Albert, Silas, Médéric, Charles Christophle
1830 - 1904
Représentant à l'Assemblée nationale de 1871, ministre, député de 1876 à 1885 et de 1887 à 1889, né à Domfront (Orne), le 13 juillet 1830, il fit son droit à Caen, et fut lauréat de la Faculté de cette ville en 1850.
Reçu docteur la même année, il fut nommé avocat au conseil d'Etat et à la cour de cassation en 1856. Il publia de nombreux articles de droit administratif dans les Revues pratique et critique de jurisprudence, collabora à la Presse de 1858 à 1859, écrivit en 1862 un Traité des travaux publics et fit partie du conseil de l'ordre des avocats de 1866 à 1869.
Le 6 septembre 1870, il fut nommé préfet de l'Orne. M. Christophle prit l'initiative de faire nommer, dans son département, les maires et adjoints par les conseils municipaux, et s'occupa activement, de concert avec le conseil général, de l'équipement des 4 bataillons de mobiles et des 3 légions de mobilisés de l'Orne. Mais le 23 décembre, à la suite du décret de la Délégation portant dissolution des conseils généraux et invitant les préfets à constituer des commissions départementales, il donna sa démission.
Aux élections générales du 8 février 1871, M. Christophle fut élu représentant de l'Orne à l'Assemblée nationale, le 5e sur 8, avec 63,618 voix (65,515 votants, 123,713 inscrits.) Il vint siéger au centre gauche et fut nommé président de cette réunion. Il fit partie de nombreuses commissions, entre autres de celles des lois sur la magistrature, les conseils municipaux, la décentralisation, etc. Il prit la parole à plusieurs reprises dans des questions d'affaires, et se fit une certaine réputation d'orateur pratique et de jurisconsulte. Il vota pour les préliminaires de paix, s'abstint sur les questions des prières publiques, de l'abrogation des lois d'exil, et du pouvoir constituant de l'Assemblée, et se prononça
- contre les pétitions des évêques,
- pour le retour du Parlement à Paris,
- contre la démission de Thiers au 24 mai,
- contre le septennat,
- contre l'état de siège,
- contre la loi des maires,
- contre le ministère de Broglie,
- pour les amendements Wallon et Pascal Duprat,
- ainsi que pour l'ensemble des lois constitutionnelles.
Partisan de la République conservatrice, telle que Thiers la comprenait, il se déclara contre toute tentative de restauration monarchique; le 5 octobre 1873, il écrivait à M. Léon Say : « Le pays comprend le 24 mai; il juge le gouvernement qui en est issu, à la fois jouet et complice de factions monarchiques. Il ne se demande plus où le mènent ces hommes; il le sait, et quand, au bout de la voie où ses conducteurs l'entraînent, il aperçoit une nouvelle Restauration, il s'indigne et gémit. Jamais les passions n'ont été plus vivement excitées, les inquiétudes plus vives, le calme moral moins profond. L'Europe, troublée par des projets qui la menacent, se coalise en vue d'événements impossibles, mais dont l'éventualité seule éveille ses susceptibilités. La paix intérieure mal assurée, la paix extérieure compromise, voilà le bilan politique des restaurateurs de la société ébranlée, des théoriciens et des doctrinaires de la responsabilité ministérielle. Et voilà le moment que l'on choisit ! et voilà les hommes qui se proposent pour accomplir dans l'ordre politique un changement qui serait une révolution radicale, un retour à des idées surannées, odieuses à la majorité du pays, contraires au dogme inviolable de la souveraineté nationale et au bon sens public ! Non, mon cher collègue, nous ne verrons pas de pareilles choses... etc. »
Plus tard, en 1875, après le vote de la Constitution, dans un banquet donné à l'occasion du comice de la Ferté-Macé (Orne), M. Christophle eut une occasion nouvelle d'affirmer ses préférences : son discours fit du bruit. En réponse à la parole que M. Buffet lui avait lancée, du haut de la tribune : « Je ne serai jamais votre allié, » il entreprit de démontrer à ses auditeurs que l'œuvre du 25 février était à la fois libérale et conservatrice et qu'elle donnait satisfaction aux aspirations des républicains en sauvegardant tous les intérêts. « Oui, certes, disait-il, pour nos nouveaux alliés comme pour les anciens, il n'y avait dans notre conduite ni doute ni ambiguïté sur nos sentiments, nous étions bien pour tous de vrais et de sincères conservateurs ! Qui donc en aurait pu douter en voyant dans nos rangs des hommes qui ne le cèdent à personne par le talent, la situation sociale, la fortune acquise? Et n'était-ce pas, vraiment, une dérision amère et une conception extravagante d'avoir, même au milieu de la lutte, appelé sur ces hommes le soupçon de n'être point les défenseurs nés de tous les grands principes qui sont l'honneur et le fondement des sociétés modernes. C'était là pourtant ce qu'on disait alors. Beaucoup le disaient, sans y croire; et le jour où, placés en face des réalités politiques, forcés de prendre un parti, nos anciens adversaires ont juré nécessaire de conclure l'alliance féconde qui a fait la République, je dis que, de notre côté, nous n'avons fait, nous n'avons eu à faire aucun sacrifice. Les choses ont pris la place qu'elles devaient avoir : seule, l'équivoque factice, créée à grand peine, a disparu. »
Le 20 février 1876, M. Christophle fut réélu député par la 1re circonscription de Domfront avec 8,681 voix (10,591 votants, 14,349 inscrits), contre 1,883 au baron Houssin de Saint-Laurent. Dans sa circulaire électorale il avait, à nouveau, insisté sur le développement de son thème favori : à savoir que les maux politiques des derniers temps n'avaient « guère eu d'autre cause qu'une classification arbitraire et imprudente des partis. Ceux qui voulaient détruire l'œuvre du 25 février se sont intitulés conservateurs! On a appelé révolutionnaires ceux qui voulaient en faire l'épreuve sincère et loyale. »
M. Christophle reprit sa place au centre gauche, et bientôt entra, avec le portefeuille des travaux publics, dans le ministère qui se forma sous la présidence de Dufaure, le 9 mars 1876. Diverses réformes administratives, marquèrent son passage aux affaires : il plaça des ingénieurs à la tête de tous les services du ministère, admit pour la première fois les conseils supérieurs des ponts-et-chaussées et des mines à donner leur avis sur les titres à l'avancement, et se montra très préoccupé de mettre à l'étude l'amélioration du régime des chemins de fer. M. Christophle resta titulaire du département des travaux publics dans le cabinet Jules Simon, jusqu'à la chute de ce dernier, en mai 1877. Il revint alors occuper son siège de député, et combattit, dans les rangs des 363, le ministère Broglie-Fourtou.
Après la dissolution, il se représenta aux suffrages des mêmes électeurs qui le renvoyèrent à la Chambre le 14 octobre 1877 par 9,117 voix (11,683 votants, 14,824 inscrits), contre 2,531 au candidat officiel, M. Grippon. Il siégea, comme précédemment, parmi les modères de la majorité républicaine, appuya de son vote les invalidations de plusieurs députés de la droite, soutint le nouveau cabinet Dufaure, et fut nommé le 13 février 1878, gouverneur du Crédit foncier, en remplacement de M. Grivart, sénateur. Il donna parfois son opinion sur les questions de finances, et vota encore, dans la législature, contre l'amnistie plénière, pour l'invalidation de l'élection de Blanqui, pour l'article 7 et l'application des décrets aux congrégations, etc.
Il obtint sa réélection dans la même circonscription, le 21 août 1881, par 7,758 voix (9,215 votants, 14,609 inscrits), et opina avec les opportunistes : contre l'élection d'un maire de Paris, contre l'abrogation du Concordat, contre l'élection de la magistrature, pour l'expédition du Tonkin, etc.
Aux élections d'octobre 1885, M. Christophle fut porté sur la liste républicaine opportuniste, et échoua au second tour avec 41,997 voix contre 45,479 au dernier élu de la liste conservatrice, M. de Lévis-Mirepoix. (Au premier tour, un seul candidat opportuniste M. Gévelot avait été proclamé élu, avec 44,585 voix.)
Le 16 octobre 1887, il fut élu dans une élection partielle de l'Orne, en remplacement de M. Roulleaux-Dugage, décédé, par 47,283 voix, sur 61,125 votants et 107,223 inscrits, contre 1,275 voix à M. le vicomte de Banville. Dans la dernière session, il a voté:
- pour le rétablissement du scrutin d'arrondissement (11 février 1889),
- pour les poursuites contre trois députés membres de la Ligue des patriotes,
- pour le projet de loi Lisbonne restrictif de la liberté de la presse, pour les poursuites contre le général Boulanger.
Il était absent par congé lors du scrutin sur l'ajournement indéfini de la révision de la Constitution.
Chevalier de la Légion d'honneur, du 28 décembre 1885, et officier, du 29 octobre 1889.
Date de mise à jour: juin 2017
Né le 13 juillet 1830 à Domfront (Orne), mort le 23 janvier 1904 à Paris-16e.
Représentant de l'Orne à l'Assemblée Nationale de 1871.
Député de l'Orne de 1876 à 1885 et de 1887 à 1902.
Ministre des Travaux publics du 9 mars 1876 au 17 mai 1877. (Voir première partie de la biographie dans ROBERT ET COUGNY, Dictionnaire des Parlementaires, t. II, p. 111.)
Réélu aux élections générales législatives dans la première circonscription de Domfront, le 22 septembre 1889, au premier tour de scrutin, par 6.765 voix contre 5.245 au docteur Cachet, sur 12.140 votants, il fut membre de diverses commissions, notamment de celle des chemins de fer. Il se fit entendre au cours de la discussion d'une interpellation sur les causes qui motivèrent la démission d'un sous-gouverneur du Crédit foncier (1890).
Il retrouva son siège aux élections générales du 20 août 1893, toujours au premier tour de scrutin, par 8.956 voix sans concurrent, sur 14.415 votants. Il se contenta de siéger dans diverses commissions et n'aborda jamais la tribune. Ses électeurs lui restèrent fidèles aux élections générales du 8 mai 1898 en lui accordant dès le premier tour de scrutin 6.335 voix contre 3.222 au docteur Barrabé et 1.788 au docteur Poulain, sur 11.675 votants. Membre de diverses commissions, il déposa une proposition de loi tendant à venir en aide aux populations et aux communes de l'arrondissement de Vienne (Isère) éprouvées par les inondations du mois de janvier 1899 (1899), et présenta un rapport sur des opérations électorales (1898).
Il subit un échec aux élections générales des 27 avril et 11 mai 1902, où il n'obtint au deuxième tour de scrutin que 4.900 voix contre 6.546 au docteur Cachet, de nuance radicale, qui lui succéda, sur 11.630 votants.
Il abandonna alors la politique et mourut deux ans plus tard à Paris, le 23 janvier 1904, à 74 ans.
On lui doit, en dehors de son œuvre parlementaire, des manuels de droit pratique, des notes d'histoire, des poésies et un recueil de Fables à l'intention de ses petits-enfants.