Lucien, Auguste Dautresme
1826 - 1892
Député de 1876 à 1889 et ministre, né à Elbeuf (Seine-Inférieure), le 21 mai 1826, il entra à l'Ecole polytechnique en 1846, devint ingénieur de la marine et démissionna en 1848.
Il s'occupa alors de composition musicale, et réussit à faire jouer à l'ancien Théâtre-Lyrique Cardillac et Sous les charmilles; il ne lui avait pas fallu moins de cinq ans de lutte obstinée pour arriver à ce résultat. Avant le Quatre-Septembre, il était complètement étranger à la politique.
Aux élections du 8 février 1971, il réunit, sur une liste républicaine, 22,091 voix dans la Seine-Inférieure, tandis que le dernier élu des conservateurs, M. Ancel, en obtenait 75,385. Membre du conseil général de son département pour le canton d'Elbeuf, il se présenta, le 20 février 1876, comme candidat républicain dans la 2e circonscription de Rouen, et fut élu par 10,117 voix (15,024 votants, 20,568 inscrits), contre M. Léon Sevaistre, conservateur, 4,828.
Il siégea à gauche, fut des 363, et réélu comme tel, le 14 octobre 1877, par 12,104 voix (17,119 votants, 21,336 inscrits, contre 4,952 à M. Revelle, reprit sa place dans la majorité républicaine. Il s'associa à la plupart des votes de cette majorité :
- pour le ministère Dufaure,
- pour l'article 7,
- pour l'application des lois aux congrégations,
- pour les lois nouvelles sur la presse et le droit de réunion, etc.
Favorable à la politique opportuniste, il obtint sa réélection le 21 août 1881, par 12,789 voix (14,834 votants, 21,897 inscrits), contre 1,083 à M. Secondigné, radical-socialiste. M. Dautresme fit partie du groupe de la gauche radicale, et se sépara quelquefois de la majorité modérée : toutefois il se prononça pour les crédits de l'expédition du Tonkin. « Les ouvriers d'Elbeuf et de Sotteville qui ont fait le succès de son élection, écrivait un biographe intransigeant, ne lui pardonnent pas d'avoir repoussé le crédit de vingt-cinq millions destiné à venir en aide aux travailleurs éprouvés par le chômage. »
Porté, le 4 octobre 1885, sur la liste républicaine opportuniste de la Seine-Inférieure, M. Dautresme fut élu député de ce département, le 6e sur 12, par 79,938 voix (149,546 votants, 195,467 inscrits). Peu de jours après l'ouverture de la nouvelle législature, il fut appelé (10 novembre 1885) à succéder dans le cabinet Henri Brisson, à M. Pierre Legrand, ministre du commerce, démissionnaire. Il prit quelquefois la parole au nom du gouvernement dans des questions d'affaires, et ne se signala d'ailleurs par aucun acte personnel notable pendant ce court passage au pouvoir; il donna sa démission de ministre le 28 décembre suivant, à la chute du cabinet. M. Dautresme se prononça pour l'expulsion des princes.
Lorsque le ministère Goblet tomba, le 17 mai 1887, sur la question des économies budgétaires, M. Dautresme reprit, dans le cabinet Rouvier, constitué le 30 mai suivant, le portefeuille du commerce et de l'industrie; en cette qualité, il eut à donner ses soins aux divers projets d'organisation de l'Exposition universelle de 1889, et c'est cette considération qui le fit maintenir au même poste, dans le cabinet Tirard, qui succéda au cabinet Rouvier, le 12 décembre 1887. Mais le 30 mars 1888, ce dernier ministère ayant été renversé sur la question de la révision, M. Dautresme le suivit dans sa chute.
Dans la dernière session de la législature, M. Dautresme a voté:
- pour le rétablissement du scrutin d'arrondissement (11 février 1889),
- pour l'ajournement indéfini de la révision de la Constitution,
- pour les poursuites contre trois députés membres de la Ligue des patriotes,
- pour le projet de loi Lisbonne restrictif de la liberté de la presse,
- pour les poursuites contre le général Boulanger.
Né le 21 mai 1826 à Elbeuf (Seine-Inférieure), mort le 18 février 1892 à Paris.
Député de Seine-Inférieure de 1876 à 1891.
Sénateur de Seine-Inférieure de 1891 à 1892. Ministre du Commerce du 9 novembre 1885 au 7 janvier 1886. Ministre du Commerce et de l'Industrie du 30 mai 1887 au 3 avril 1888. (Voir première partie de la biographie dans ROBERT ET COUGNY, Dictionnaire des Parlementaires, tome II, p. 270 et 271).
Aux élections générales législatives du 22 septembre 1889, qui eurent lieu au scrutin uninominal, Lucien Dautresme, député sortant, se représentera dans son ancienne circonscription de Rouen.
Cet homme politique que son passage par l'Ecole de polytechnique n'avait pas empêché de devenir, aussi, un musicien apprécié, et dont on a pu dire, à sa mort, qu' « au cours de toute son existence, il a manifesté hautement et fermement, quoique avec modération, ses sentiments républicains et démocratiques », promettait alors à ses électeurs de rechercher les moyens propres à faciliter les rapports du capital avec le travail, donc à améliorer la condition des travailleurs. Il voulait également alléger les dépenses budgétaires, répartir plus équitablement l'impôt, une justice plus rapide et moins coûteuse, de forts droits de douane sur les marchandises étrangères pour écarter de nos fabriques le spectre du chômage, etc. Repoussant aussi, « du moins quant à présent », la révision de la Constitution, ce programme fut bien accueilli par les Rouennais et Dautresme élu député pas plus tard que le premier tour de scrutin, par 9.150 voix, n'en laissant que 8.135 à deux rivaux malheureux qui se les partageaient, sur 17.683 votants.
Vint, en 1891, le dernier renouvellement triennal du Sénat. Lucien Dautresme, qui représentait depuis longtemps le canton d'Elbeuf au Conseil général de la Seine-Inférieure, qui, de surcroît, avait déployé une activité des plus remarquées en qualité de Commissaire général de l'Exposition universelle de 1889, jugeant le moment venu pour lui d'être sénateur, se porta. Le scrutin du 4 janvier 1891 justifia son espoir, et s'il ne fut élu que le troisième sur quatre, ce fut, sur 1.491 suffrages, par 809 pour lui.
Hélas! Ses jours étaient comptés : il ne fut du Sénat que quelques mois. Mais, lit-on dans son éloge funèbre : « Quel zèle et quel dévouement, notamment dans la discussion du tarif des douanes ! »
Lucien Dautresme mourut à Paris le 18 février 1892 à l'âge de 66 ans : « à tous égards, une existence bien remplie », conclut le Président Le Royer devant ses collègues dont, en si peu de semaines ce Normand avait su conquérir l'estime « par son aménité, sa courtoisie, sa modération ».