Gaston Defferre
1910 - 1986
Un fonds Gaston Defferre de 40 mètres linéaires est conservé aux Archives départementales des Bouches-du-Rhône sous la cote 183 J. Donné en 2006 et enrichi d’un répertoire numérique détaillé, il est libre d’accès. Ces archives, couvrant la période 1947-1986, sont relatives aux élections, au parti socialiste, à l’Assemblée nationale et aux questions de politique générale.
De plus amples renseignements sur ce fonds sont disponibles sur le site Internet des Archives départementales des Bouches-du-Rhône.
Des archives relatives aux différents mandats de Gaston Defferre, mais principalement à celui de maire, sont conservées aux Archives municipales de Marseille sous la cote 100 II. Issu d’un dépôt de 1988 transformé en don en 1998, ce fonds de 52,5 mètres linéaires contient des documents datant de 1945 à 1986. En cours de classement, ces archives sont communicables dans le respect des délais du code du patrimoine.
De plus amples renseignements sur ce fonds sont disponibles sur le site Internet des Archives municipales de Marseille.
Né le 14 septembre 1910 à Marsillargues (Hérault)
Décédé le 7 mai 1986 à Marseille (Bouches-du-Rhône)
Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale Constituante (Bouches-du-Rhône)
Député des Bouches-du-Rhône de 1946 à 1958
Secrétaire d'Etat chargé de l'Information du 26 janvier au 24 juin 1946
Sous-secrétaire d'Etat à la France d'outre-mer du 16 décembre 1946 au 22 janvier 1947
Ministre de la Marine marchande du 12 juillet 1950 au 11 juillet 1951
Ministre de la France d’outre-mer du 1er février 1956 au 13 juin 1957
Gaston Defferre naît le 14 septembre 1910 à Marsillargues (Hérault) dans une famille protestante. Il est marqué par l'influence d'une mère cultivée qui est sa première institutrice avant qu'il n'entreprenne des études secondaires au lycée de Nîmes. Très jeune il se familiarise avec la civilisation africaine lorsqu'il rejoint son père qui possède un cabinet juridique à Dakar. Il revient à Marseille où il travaille comme avocat en 1931. Il épouse alors Andrée Aboulker. Désormais sa vie ne se sépare plus de la grande cité phocéenne. En 1933 il adhère à la Xe section de la S.F.I.O. de Marseille où il milite discrètement. Antimunichois, il saisit la première occasion de résister à l'occupant et entre dans le réseau « Froment » puis constitue avec Pierre Fourcaud et André Boyer le réseau de renseignement « Brutus ». Il participe en juin 1941 à la direction du Parti socialiste clandestin. Il refuse de siéger à l'Assemblée consultative d'Alger car il préfère être présent à Marseille lors de la Libération espérée. Dès que la ville recouvre sa liberté, Gaston Defferre devient par accord des résistants, chef de la délégation municipale. Il publie et dirige « Le Provençal ». La Croix de guerre et la Rosette de la Résistance récompensent ses activités clandestines. En septembre 1946 il épouse en secondes noces Marie-Antoinette Swaters qui vient de combattre dans l'armée britannique. Le temps est désormais venu de siéger à l'Assemblée consultative provisoire où il est inscrit dans la Commission de l'équipement national, dans la Commission de la France d'outre-mer, dans la Commission du Règlement et dans la Commission de la justice et de l'épuration.
Le jeune délégué se prononce en faveur d'une réelle épuration notamment dans l'armée et les milieux économiques et réclame un meilleur ravitaillement pour Marseille. Mais déjà il se tourne vers l'avenir et rappelle qu'il faudra tenir outre-mer les promesses de rénovation. Favorable à la réforme de l'Etat au nom des idées de la Résistance, il établit le constat de faillite de la IIIe République. Une nouvelle Constitution devrait être élaborée avec une assemblée unique. Très tôt il prend position contre le recours au référendum.
Gaston Defferre, élu en 1945, à la tête de la liste S.F.I.O. de Marseille (74 256 voix, trois députés), participe aux travaux de la première Assemblée nationale Constituante dans les Commissions des territoires d'outremer, de la presse, de la radio et du cinéma et dans la Commission du Règlement où il organise la Commission de la Constitution. Il approuve les accords de Bretton Woods. Le directeur du «Provençal» s'intéresse, comme de nombreux résistants, à la reconstitution de la presse et cherche à maintenir les acquis de la Résistance. Il présente en 1945 une proposition de loi tendant à attribuer en priorité aux journaux résistants les biens confisqués des entreprises de presse accusées de collaboration. Nommé secrétaire d'Etat chargé de l'Information il fait voter une loi relative à la dévolution des biens confisqués. Il justifie les attributions de papier qui tiennent compte des ventes de journaux et il se montre favorable au rétablissement des émissions régionales de radiodiffusion.
La situation politique très agitée de Marseille requiert l'attention de Gaston Defferre. Il est réélu lors des deux élections de 1946 mais il affronte un Parti communiste puissant, qui a toujours quatre élus et qui augmente le nombre de ses électeurs (104 920 voix en juin et 113 448 voix en novembre) alors que la S.F.I.O. subit une érosion (68 821 suffrages en juin et 49 422 en novembre). Il retrouve la Commission des territoires d'outre-mer, la Commission du règlement et la Commission de la presse. Il justifie longuement les Accords Blum-Byrnes sur la place du cinéma américain sur les écrans français que certains députés jugeaient excessive. Pour Gaston Defferre, ces accords constituent plutôt un progrès par rapport à l'avant-guerre.
Dans la première Assemblée législative le député de Marseille appartient toujours à la Commission de la presse et à la Commission de la France d'outre-mer dont il est élu vice-président en janvier 1947. Il entre dans la Commission de la marine marchande et dans la Commission de réforme administrative (1947) et est juré à la Haute Cour de justice. Dès le 16 décembre 1946 il est nommé sous-secrétaire d'Etat à la France d'outre-mer et exerce cette charge jusqu'au 22 janvier 1947. Redevenu député il s'estime offensé à la suite d'une campagne menée par « L'Aurore » dont Paul Bastid est le directeur. Un duel règle un différend assorti d'une gifle donnée en pleine assemblée. L'année 1947 est particulièrement éprouvante pour Gaston Defferre qui ne parvient pas à reconquérir la mairie de Marseille gagnée deux ans plus tôt par les communistes. Il noue une alliance avec la droite locale et « Le Provençal » publie des témoignages sur l'existence de camps de concentration en Union soviétique. De graves émeutes qui ne sont pas contrôlées par le service d'ordre composé de C.R.S., ont lieu dans la ville ; la tribune de l'Assemblée est l'écho d'échanges très vifs entre les députés communistes et Gaston Defferre qui met en cause leur responsabilité dans la tentative d'attaque de la mairie et du commissariat de police par les émeutiers.
Le député des Bouches-du-Rhône manifeste une attitude libérale vis-à-vis de l'Union française. Il est favorable à un développement des dépenses d'investissement en Afrique et à une décentralisation de la politique monétaire. Il se déclare prêt à aider les peuples d'outre-mer à mettre sur pied des institutions démocratiques. Lorsque se produisent les événements de Madagascar, il affirme sa pleine confiance dans l'aptitude du gouvernement à faire la lumière sur les responsabilités. Une mission sur place l'amène à conclure qu'un renforcement de la hiérarchie policière empêcherait le retour d'actes regrettables. S'il vote le statut de l'Algérie en 1947 c'est qu'il le considère comme l'amorce d'une nouvelle politique. En Indochine, il s'agit pour lui de mettre fin à une « triste aventure militaire ». Il précise en mars 1949 que la France n'a pas à choisir de négocier avec Ho Chi Minh ou avec Bao Daï mais qu'elle doit créer les conditions qui permettront aux peuples de désigner librement leurs représentants. Cette priorité donnée au libre choix des populations l'amènera à soutenir fermement Pierre Mendès-France en 1954.
Le 12 juillet 1950 Gaston Defferre est nommé ministre de la Marine marchande dans le cabinet de René Pleven. Il expose aux députés les solutions apportées au trafic avec la Corse et préfère à la régie directe et aux subventions la formule plus commerciale des allocations complémentaires. Il se préoccupe de réunir pour les pêcheurs français les meilleures conditions techniques d'exploitation et envisage aussi un développement des activités des chantiers navals. Sur ce sujet comme sur bien d'autres les affrontements entre Gaston Defferre et les communistes sont vifs et n'épargnent pas la tribune de l'Assemblée.
Les élections de 1951 à Marseille sont l'occasion de former des apparentements entre les listes socialiste, U.D.S.R.-R.G.R., des Indépendants et du M.R.P. afin de contrer les communistes et le R.P.F. Les listes apparentées n'obtenant pas la majorité absolue - elles n'ont que 94 076 voix - la répartition des sièges a lieu à la proportionnelle. Le Parti communiste, fort de 112 578 voix a quatre députés et la S.F.I.O. en obtient deux pour 57 690 voix. Le R.P.F. a également deux députés pour 73 683 voix et le M.R.P. -23 641 voix - n'a qu'un élu.
Gaston Defferre est nommé membre de la Commission de la marine marchande et de la Commission des territoires d'outre-mer qui le délègue dans la Commission de coordination chargée d'examiner les problèmes intéressant les Etats associés en Indochine en 1954. Partisan de la nouvelle Europe, le député de Marseille vote pour la C.E.C.A. et la C.E.D. Il s'inquiète de la politique coloniale du gouvernement qui empêche de réunir les forces nécessaires à la défense du continent européen.
Il soutient très fidèlement la politique de Pierre Mendès-France. Ses interventions sont moins nombreuses au cours de cette législature car il se consacre à la reconquête de la mairie de Marseille. Il exprime son inquiétude devant la situation lamentable des hôpitaux d'une ville tenue d'accueillir de nombreux malades de l'outre-mer sans avoir les moyens financiers correspondant à ses charges. En mai 1953 le succès couronne ses efforts puisqu'il est élu maire de Marseille. Aux élections législatives de 1956 il apparente la liste S.F.I.O. avec les Républicains sociaux et les Radicaux-U.D.S.R. Bien que les listes apparentées demeurent loin de la majorité absolue ce qui impose une répartition à la proportionnelle, le maire de Marseille remporte un beau succès avec trois élus pour 79 805 voix. Le Parti communiste a quatre élus pour 122 152 voix, les Indépendants un siège pour 55 548 voix. Il en est de même pour les poujadistes qui ont réuni 39 709 suffrages.
Gaston Defferre appartient à la Commission de l'intérieur, à la Commission de la marine marchande puis, en 1957 à la Commission de la presse, à la Commission des moyens de communication et du tourisme et enfm à la Commission des territoires d'outre-mer. Le 1er février 1956 il est nommé ministre de la France d'outre-mer dans le gouvernement de Guy Mollet. Toute son action, dans la lignée de convictions maintes fois exprimées, est tournée vers la recherche d'une solution évolutive et pacifique dans ces territoires où il est encore possible de prendre des initiatives sans être poussé par de dramatiques événements. Ainsi naît l'idée d'une loi-cadre qui permette au Parlement d'exprimer un avis global mais laisse au gouvernement l'élaboration précise des textes. Gaston Defferre cherche à associer plus étroitement les populations à la gestion en instituant des conseils de gouvernement - à Madagascar des conseils provinciaux - qui assistent le gouverneur dans l'administration du territoire. Les assemblées de territoire bénéficient d'un pouvoir délibérant. Tout est mis en œuvre pour faciliter l'accès des fonctionnaires d'origine locale à tous les échelons de la hiérarchie. Le gouverneur est chargé de prendre des mesures pour favoriser le développement économique et social, organiser et soutenir la production par le crédit, l'appel à l'investissement privé et diverses mesures sociales. Les élections auront désormais lieu au collège unique. Des dispositions particulières sont prévues pour le Togo et le Cameroun. Après le vote de la loi le 20 juin 1956, il se consacre à la mise au point des décrets d'application et recherche l'appui des députés africains et métropolitains. Aussi n'a-t-il guère le loisir de s'engager dans la crise algérienne. Il appuie le gouvernement de Pierre Pflimlin et vote contre les projets du général de Gaulle les 1er et 2 juin 1958 mais il appelle à voter pour la Constitution d'une Ve République où il poursuivra sa carrière politique.
DEFFERRE (Gaston)
Né le 14 septembre 1910 à Marsillargues (Hérault)
Décédé le 7 mai 1986 à Marseille (Bouches-du-Rhône)
Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale constituante (Bouches-du-Rhône)
Député des Bouches-du-Rhône de 1946 à 1958, de 1962 à 1981 et en 1986
Sénateur des Bouches-du-Rhône de 1959 à 1962
Secrétaire d’État chargé de l’Information du 26 janvier 1946 au 24 juin 1946
Sous-secrétaire d’État à la France d’outre-mer du 16 décembre 1946 au 22 janvier 1947
Ministre de la Marine marchande du 12 juillet 1950 au 11 juillet 1951
Ministre de la France d’outre-mer du 1er février au 13 juin 1957
Ministre de l’Intérieur et de la décentralisation du 22 mai 1981 au 17 juillet 1984
Ministre du Plan et de l’aménagement du territoire du 17 juillet 1984 au 20 mars 1986
(Voir première partie de la biographie dans le Dictionnaire des parlementaires français 1940-1958)
Député socialiste des Bouches-du-Rhône depuis 1946 et ministre à deux reprises sous la IVe République, Gaston Defferre se prononce contre l’investiture du général de Gaulle, le 1er juin 1958, et contre le projet de loi relatif aux pleins pouvoirs, le 2 juin. Malgré son ralliement à la Constitution de la Ve République et son mandat de maire de Marseille, il perd son siège à l’Assemblée nationale lors du scrutin de novembre 1958, au profit de Pascal Marchetti, greffier au tribunal de Marseille, ancien résistant et ancien membre du RPF, candidat dans la 8e circonscription des Bouches-du-Rhône, sous l’étiquette de l’Union pour la nouvelle République (UNR). Lors du premier tour, Gaston Defferre devance, avec 18 306 voix, ses principaux concurrents, le communiste Marcel Guizart (11 235 voix) et le gaulliste Pascal Marchetti (8 953 voix). C’est ce dernier, pourtant, qui l’emporte au second tour d’une courte tête, avec 38,97 % des suffrages (contre 38,52 % à Gaston Defferre), bénéficiant du report d’une partie des voix des autres candidats du premier tour (le MRP Edouard Devictor, l’Indépendant Roger Ceris et le poujadiste Jacques Loock).
Réélu maire de la cité phocéenne en mars 1959, grâce à une alliance des socialistes et de certains modérés sur les questions locales, qui exclut les communistes, il parvient, le mois suivant, à être désigné sénateur par les grands électeurs des Bouches-du-Rhône et rejoint le Palais du Luxembourg. Spécialiste de l’Afrique, l’ancien ministre de la France d’outre-mer siège à partir de juillet 1959 au sein de l’éphémère Sénat de la Communauté (1958-1961), où il exerce la présidence du groupe de la Démocratie socialiste. Bien que victorieux au renouvellement sénatorial de septembre 1962, il effectue son retour à l’Assemblée nationale en novembre de la même année.
Il est en effet élu, aux élections législatives de novembre, député de la troisième circonscription des Bouches-du-Rhône, qui regroupe alors le centre-nord de la ville de Marseille mais aussi les cantons de Marseille-Belsunce, de Marseille-Les Grands-Carmes et de Marseille-Saint-Laurent. Il réunit 10 676 voix, et 30,9 % des suffrages exprimés au premier tour, et 20 588 voix, soit 58,57 % des suffrages au second tour. Gaston Defferre conserve cette implantation jusqu’à son décès en 1986.
Au Palais-Bourbon, il s’inscrit au groupe socialiste et participe aux travaux de la commission des Affaires étrangères.
Il affirme ses positions par ses propositions de loi, en particulier celle du 21 février 1963 portant nationalisation des banques d’affaires, celle du 7 juin visant à modifier la loi du 29 juillet 1881 pour une répression plus efficace de la haine raciale, celle du 19 juillet suivant tendant à fixer à 18 ans, contre 21 ans à l’époque, l’âge de la majorité et celle du 18 décembre 1964 tendant à instituer un droit de réponse à l’Office de radiodiffusion télévision française (ORTF).
Sa notoriété et son autorité politique le conduisent à n’intervenir que dans les principaux débats, pour y porter la critique contre le gouvernement, notamment à l’occasion de la déclaration de politique générale du 13 décembre 1962, de l’allocution du Premier ministre du 19 février 1963, au début de la grande grève des mineurs, de la déclaration du gouvernement du 9 mai 1963 sur la politique économique et financière, ainsi que de la préparation du Ve Plan en novembre 1964 et novembre 1965, et de la motion de censure déposée le 20 avril 1966. Il intervient également sur le projet de loi d’amnistie relatif aux événements d’Algérie en avril 1966.
Au début des années 1960, Gaston Defferre s’est affirmé au sein de la SFIO comme le principal opposant à Guy Mollet, son secrétaire général jusqu’en 1969 et gardien de son orthodoxie. Souhaitant que « la gauche se batte non seulement pour son droit à être l’opposition, mais pour son droit à être au gouvernement », le maire de Marseille écrit en 1964 : « Nous voulons être demain le gouvernement parfaitement normal de la nation tout entière ».
Le député des Bouches-du-Rhône profite ainsi de l’élection présidentielle de 1965 pour tenter de fédérer autour de sa personne, avec notamment le club « Horizon 80 » animé par Charles-Emile Loo, l’opposition non communiste au général de Gaulle. C’est le sens de l’opération « Monsieur X contre de Gaulle », lancée en septembre-octobre 1963, dans les colonnes de L’Express de Jean-Jacques Servan-Schreiber. Ne parvenant cependant pas à constituer une troisième voie sous la forme d’une « Grande Fédération », allant de la SFIO au MRP (Mouvement républicain populaire), il retire finalement sa candidature. Il appuie la création de la FGDS (Fédération de la gauche démocrate et socialiste), le 10 septembre 1965, pour le rassemblement des gauches en vue de l’élection présidentielle et soutient celui qui l’incarne alors, François Mitterrand, député de la Nièvre.
Aux élections municipales de 1965, Gaston Defferre est parvenu à se faire réélire difficilement à Marseille en raison de la défection d’une partie minoritaire de la SFIO, conduite par Daniel Matalon, et qui a constitué une liste commune avec les communistes, menés par François Billoux. Au premier tour, sa liste « Défense et expansion de Marseille », qui comprend des modérés, des radicaux et des MRP, arrive en deuxième position avec 36,48 % des voix contre 36,52 % à celle de Daniel Matalon, et seul le fort recul de la liste Union pour la nouvelle République (UNR), conduite par Joseph Comiti, au second tour assure sa victoire, à la majorité relative.
En 1967, le député de Marseille est réélu sans difficulté au Palais-Bourbon. En tête au premier tour, avec 13 469 voix et 33,55 % des suffrages exprimés, en dépit de la présence d’un candidat communiste qui en réunit 27,77 % et arrive en deuxième position, il bat au second tour le candidat gaulliste, Félicien Grimaldi, chirurgien-dentiste et croix de guerre, avec 23 223 voix et 60,44 % des suffrages exprimés.
Inscrit au groupe de la FGDS, dont il est élu président (116 membres plus 5 apparentés dont Pierre Mendès France), il siège à la commission des lois. Il présente sa candidature à la présidence de l’Assemblée nationale face à Jacques Chaban-Delmas, qui exerce cette fonction depuis 1958, et est battu par 214 voix contre 261.
Excellent débatteur, homme de caractère, l’ancien avocat multiplie en séance les interventions très politiques : il fait notamment de nombreux rappels au règlement, mettant en cause le gouvernement ou la majorité.
Une remarque polémique et virulente à l’égard de l’un de ses collègues, le député gaulliste René Ribière, élu du Val-d’Oise, le conduit à participer le 21 avril 1967 au dernier duel connu en France. Ce jour-là, dans le parc d’un hôtel particulier de Neuilly-sur-Seine, l’épée de Gaston Defferre blesse à deux reprises l’avant-bras de son adversaire, lequel est à la veille de son mariage.
Le député FGDS s’investit dans les débats de fond en intervenant à plusieurs reprises, et en présentant également de nombreux amendements, lors de la discussion du projet de loi d’orientation foncière et urbaine, en juin 1967.
À l’occasion des événements de 1968, il exprime ses convictions, présentant dès le 10 mai une proposition de loi d’amnistie pour les manifestations et les affrontements des jours précédents entre étudiants et forces de l’ordre et défendant, lors des explications de vote, la motion de censure du 21 mai.
Les élections législatives qui suivent la dissolution sont un succès pour Gaston Defferre. Bien que dominé au premier tour avec 11 495 voix et 29,33 % des suffrages exprimés, le report au second tour d’une large partie des voix du candidat communiste Louis Calisti lui permet de battre de nouveau, mais de peu, Félicien Grimaldi, avec 19 611 voix et 50,52 % des suffrages exprimés.
À l’Assemblée nationale, d’abord membre de la commission des lois, il siège ensuite, à partir d’avril 1972, à la commission des affaires étrangères.
L’événement majeur de son agenda politique est l’élection présidentielle de juin 1969, à la suite de la démission du général de Gaulle. Contrairement à 1965, la gauche s’y présente dispersée. Jacques Duclos est le candidat du Parti communiste et les candidatures de Michel Rocard pour le Parti socialiste unifié (PSU) et d’Alain Krivine, trotskiste, se veulent dans la continuité de mai 1968.
Gaston Defferre obtient au Congrès de la SFIO à Alfortville, le 4 mai, l’investiture socialiste, en dépit de la réticence de Guy Mollet. Il propose aux Français un projet centriste qu’il entend incarner avec Pierre Mendès France, son futur Premier ministre en cas de succès. Avec seulement 5,01 % des suffrages exprimés, son échec est retentissant. Il est nettement devancé par Jacques Duclos, qui recueille 21,3 % des suffrages exprimés, et le centriste Alain Poher. Il soutient ce dernier lors du second tour qui l’oppose à Georges Pompidou.
Les socialistes entament une mutation. Au congrès d’Issy-les-Moulineaux, en juillet 1969, la SFIO devient le Nouveau parti socialiste dont le secrétaire général est Alain Savary. Après avoir été président du groupe de la FGDS (qui disparaît en novembre 1968), Gaston Defferre devient celui du groupe socialiste à la rentrée parlementaire d’octobre 1969.
Au Congrès d’Épinay en juin 1971, il présente d’abord une motion commune avec Pierre Mauroy avant de se rallier à François Mitterrand, dont les partisans sont unis derrière la motion dite Mermaz-Pontillon. Face à eux, existent deux courants de gauche, celui de Jean Poperen et celui du Centre d’études, de recherches et d’éducation socialiste (CERES). C’est sur le thème de la « rénovation » contre les équipes mollétistes, que François Mitterrand parvient finalement à fédérer autour de lui le bloc « Nord-Bouches-du-Rhône », dirigé par Pierre Mauroy et Gaston Defferre, et le CERES, pourtant très divisés, notamment sur la question de l’alliance avec les communistes. Le député de la Nièvre peut ainsi accéder quelques jours plus tard à la direction du Parti socialiste (PS) et s’engager sur la voie de l’union de la gauche et du programme commun.
Patron de l’une des plus puissantes fédérations du PS, il est aussi un parlementaire de poids et conserve jusqu’en mai 1981 la présidence du groupe socialiste. Il continue également de siéger à la commission des affaires étrangères.
Dès lors, ses propositions parlementaires et interventions en séance publique sont profondément marquées par cette fonction. Parmi les initiatives les plus emblématiques, il faut mentionner la proposition de loi pour abroger la loi « anti-casseurs » et celle pour porter le salaire minimum mensuel à 1 000 francs en décembre 1972, ainsi que soixante-trois propositions de loi déposées d’avril 1973 à juin 1974, pour donner la traduction concrète de ce que serait la mise en œuvre du programme commun. Pendant la VIe législature, Gaston Defferre dépose notamment, le 19 juin 1979, une proposition de loi en faveur de l’amnistie des sidérurgistes condamnés à la suite des manifestations du 23 mars 1979 à Paris, le 17 avril 1980, une proposition de résolution, qui sera déclarée irrecevable, visant à mettre en accusation Michel Poniatowski, alors ministre de l’Intérieur, devant la Haute Cour de Justice, sur l’affaire de Broglie, et, le 8 octobre 1980, une proposition de résolution tendant à créer une commission d’enquête sur l’extrême-droite.
Au cours de la décennie, Gaston Defferre intervient aussi régulièrement sur les déclarations du gouvernement, et en appui aux motions de censure, ainsi que lors des allocutions de fin de session. Il fait aussi de nombreux rappels au règlement. Si certains d’entre eux visent à mettre en cause ou en difficulté le gouvernement ou l’un de ses membres, d’autres témoignent d’une grande vigilance sur l’autonomie et le bon fonctionnement du Parlement. Gaston Defferre s’étonne ainsi, le 8 novembre 1973, de la consultation du Premier ministre par le président de la commission des finances sur les droits des rapporteurs.
S’affirmant ainsi pendant treize ans comme l’une des grandes voix de l’opposition, et se prononçant parfois avec dureté sur certains textes, comme le projet de loi « sécurité et liberté », en juin 1980, Gaston Defferre soutient cependant les grandes avancées que constituent notamment le projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et l’abaissement à 18 ans de l’âge de la majorité en 1974, et la réforme du divorce en 1975.
Le député de Marseille ne néglige pas les questions locales. Gaston Defferre est ainsi membre de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi d’indemnisation et intervient sur le fond du débat, en juin 1970. Il prend également une part très active à l’examen en séance publique de ses dispositions. Il intervient aussi sur le projet de loi relatif à la Compagnie nationale du Rhône, en décembre 1979. Une partie de ses questions au gouvernement, en particulier après 1978, au fur et à mesure que les effets de la crise économique se font ressentir, portent essentiellement sur les difficultés des entreprises industrielles des environs de Marseille, en particulier de Fos.
Gaston Defferre est constamment réélu tant à la mairie de Marseille, en 1971 et 1977, que dans la troisième circonscription des Bouches-du-Rhône, en 1973 et 1978. Son ancrage est facilité par la présence de deux de ses proches à la tête de la fédération socialiste des Bouches-du-Rhône, Charles-Émile Loo, de 1969 à 1979, puis Michel Pezet.
Les conditions de ses réélections changent cependant. La signature du programme commun impose à Gaston Defferre, élu contre les communistes comme maire de Marseille, mais avec eux comme député, de modifier ses alliances locales.
Les élections municipales de 1971, juste avant le congrès d’Épinay, sont ainsi les dernières où il est réélu suivant la stratégie de l’alliance au centre. Sa liste d’« Union pour l'avenir de Marseille » compte, en plus des socialistes, sans dissidence cette fois-ci, des membres du Centre démocrate et du Parti radical. Elle devance très nettement, avec plus de 44 % des voix, celle du communiste Georges Lazarino et du gaulliste Joseph Comiti, avec un peu plus de 27 % chacune. En 1977, Gaston Defferre est réélu sans alliance avec les modérés, ni les communistes, qui présentent leur propre liste, mais en s’appuyant sur un élément local, le GAM-GAES (Groupe d'action municipale-Groupe d'action économique et sociale).
S’agissant des législatives, le député de Marseille est réélu en 1973, dans une configuration semblable à celle de 1967 et 1968, au second tour, avec 24 149 voix, et 62,8 % des suffrages exprimés, contre Félicien Grimaldi, après le désistement du communiste Louis Calisti. En 1978, face au représentant du Rassemblement pour la République (RPR) Marcel Pujol, il assure sa reconduction au second tour avec 22 433 voix, et 55,7 % des suffrages exprimés.
La carrière politique nationale de Gaston Defferre repose ainsi sur un ancrage local exceptionnel qui se renforce au cours des années 1970. Le defferrisme s’est construit à partir du contrôle à la fois de la puissante fédération socialiste des Bouches-du-Rhône, mais aussi de la presse locale, notamment Le Provençal, qu’il fonde en 1944, et Le Méridional, journal de droite, qu’il achète en 1971. Parlementaire, ministre, maire et patron de presse, Gaston Defferre est également membre de la commission de développement économique et régional Provence-Alpes-Côte d’Azur de 1964 à 1973. Il préside à partir de 1974 le conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur.
En plus de ces mandats électifs, Gaston Defferre assure localement de nombreuses fonctions comme la présidence en 1973 de la société du métro de Marseille (dont il inaugure le premier tronçon le 26 novembre 1977) ou de l’établissement public d’aménagement des rives de l’étang de Berre. Il est désigné en 1977 vice-président de l’association des maires des grandes villes de France.
L’élection de François Mitterrand à la présidence de la République lui permet de retrouver, pour la première fois sous la Ve République, des fonctions gouvernementales. En 1979, au Congrès du parti socialiste à Metz, après avoir présenté sa propre motion pour maintenir la cohésion de sa fédération, il avait de nouveau et très tôt soutenu le futur président.
Il est donc nommé, dès mai 1981, ministre d’État, ministre de l’Intérieur et de la décentralisation. Lors du remplacement de Pierre Mauroy par Laurent Fabius comme Premier ministre, en juillet 1984, il devient ministre du Plan et de l’aménagement du territoire, s’engageant pour le développement de l’informatique (plan « Informatique pour tous ») et la modernisation de l’économie.
À l’Assemblée nationale, il est remplacé par son suppléant, Philippe Sanmarco, secrétaire général à l’expansion de la ville de Marseille, après une réélection au second tour par 18 898 voix et 58 % des suffrages exprimés, face à Robert Villani, candidat d’union du RPR et de l’UDF. L’avocat Michel Pezet lui succède à la tête du Conseil régional.
Place Beauvau, et conformément à ses positions en faveur de la décentralisation, exposées notamment en 1965 dans son ouvrage, Un Nouvel horizon, publié dans le cadre de la préparation de l'élection présidentielle, il met en œuvre l’une des grandes réformes du premier septennat de François Mitterrand : les lois sur la décentralisation, notamment celle du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, marquant une évolution notable de l’organisation administrative du pays. La région devient une collectivité territoriale de plein exercice. La tutelle administrative et financière du préfet sur les actes des collectivités territoriales est supprimée. Des compétences sont transférées par l’État. La fonction publique territoriale est réorganisée.
Gaston Defferre fait également adopter en 1982 les projets de loi dit PLM relatifs à l'organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et modifiant également le code électoral. Il s’agit notamment d’appliquer, dès les élections municipales de 1983, mais avec une sectorisation, les nouvelles modalités de désignation de droit commun des élus municipaux dans les trois plus grandes communes de France. Très observé, le découpage opéré à Marseille ne lui est pas jugé défavorable.
Les élections municipales de 1983 sont une échéance difficile pour Gaston Defferre, qui n’a pas fait alliance avec les communistes et doit faire face à une droite et un centre unis derrière Jean-Claude Gaudin, lequel a battu aux législatives, en 1978 puis en 1981, Charles-Émile Loo, qui s’est brouillé avec son mentor depuis le congrès de Metz. Toutefois, Gaston Defferre est finalement réélu au second tour grâce à un sursaut de la gauche dans certains secteurs. Il doit cependant faire face à une contestation interne au Parti socialiste, car depuis la fin des années 1970, le « système Defferre » commence à se fragiliser. Il est ainsi mis en minorité par son ancien dauphin, Michel Pezet, lors du congrès fédéral de Fos-sur-Mer en septembre 1985.
Sur le plan policier, Gaston Defferre doit faire face aux difficultés suscitées par les premiers attentats d’Action directe. Remplacé par Pierre Joxe au ministère de l’Intérieur, il prend charge en juillet 1984 le Plan et l’aménagement du territoire.
Les élections législatives de 1986 sont perdues par la gauche, ce qui entraîne la démission du gouvernement de Laurent Fabius et la première cohabitation de la Ve République.
Tête de liste dans les Bouches-du-Rhône, Gaston Defferre est cependant réélu sans difficulté. Avec 25,9 % des voix, sa liste « Pour une majorité de progrès avec le président de la République », où figurent également Michel Pezet, Philippe Sanmarco, Jacques Siffre et Michel Vauzelle, devance celle du Front national (22,5 %) et celle de l’UDF, menée par Jean-Claude Gaudin (21,6 %).
Il s’inscrit au groupe socialiste et devient membre de la commission de la défense nationale et des forces armées. Il intervient à la tribune, le 9 avril 1986, pour rappeler le principe de l’immunité parlementaire pour les propos tenus en séance publique par les députés.
Quelques semaines après, le 7 mai 1986, Gaston Defferre décède, hospitalisé la veille en raison d’un malaise survenu à son domicile.
Un hommage lui est rendu, le 12 mai, devant l’hôtel de ville de Marseille en présence du président de la République François Mitterrand, du Premier ministre Jacques Chirac, du président de l’Assemblée nationale Jacques Chaban-Delmas ainsi que des ministres Charles Pasqua et François Léotard. Se sont également joints à eux les anciens Premiers ministres, Pierre Mauroy et Laurent Fabius. Au Palais-Bourbon, Gaston Defferre est remplacé par son suppléant Jean-Jacques Léonetti qui ne parvient pas à se faire réélire lors des élections législatives de juin 1988. À la mairie de Marseille, c’est Robert Vigouroux, neurochirurgien et conseiller municipal socialiste depuis 1971, qui succède à celui que l’on surnomme le « Vieux Lion ».
Son éloge funèbre est prononcé le 13 mai par le président de l’Assemblée nationale.
Durant ses trente-trois années à la tête de Marseille, le député-maire Defferre a contribué à sa modernisation, en rétablissant les finances, en construisant des milliers de logements pour absorber sa croissance démographique, mais aussi en développant son offre culturelle.
Gaston Defferre avait publié non seulement en 1965 Un nouvel horizon (Gallimard) mais aussi, en 1977, Si demain la gauche… (Laffont). En troisième noces, il avait épousé en 1973 l’écrivaine Edmonde Charles-Roux.
Il était officier de la Légion d'honneur, ainsi que titulaire de la Croix de guerre 1939-1945 et de la rosette de la Résistance.