Maurice Deixonne
1904 - 1987
Né le 8 juin 1904 à Curepipe (Ile Maurice)
Décédé le 27 juin 1987 à Uriage (Isère)
Membre de la seconde Assemblée nationale Constituante (Tarn)
Député du Tarn de 1946 à 1958
Né le 8 juin 1904 à Curepipe (Ile Maurice), Joseph Maurice Deixonne connaît une enfance très difficile. Sa famille, originaire d'un petit village des Pyrénées orientales, est établie à Longué (Maine-et-Loire), où son grand-père, ancien élève de l'Ecole d'Alfort, exerçait comme vétérinaire. Brouillé avec ses parents à la suite de son mariage, son père, Raphaël Deixonne, également ancien élève de l'Ecole d'Alfort, part s'établir à l'Ile Maurice, où il décède prématurément d'une maladie coloniale (16 mars 1904). Maurice Deixonne, qui était le troisième enfant du ménage, sera donc élevé par sa mère et ses grands parents maternels, d'abord à l'Ile Maurice, puis à Charleville (Ardennes), avant d'être recueilli par ses grands-parents paternels à Longué.
Il fréquente l'école primaire de son village, puis, titulaire d'une bourse, entre au lycée David d'Angers. Mais sa vie est à nouveau bouleversée par les décès successifs de sa mère et de ses grands-parents, au cours de la Première Guerre mondiale, de sorte qu'il doit être recueilli par une tante, Alice Deixonne, infirmière à Longué. Reçu premier de l'Académie de Rennes au baccalauréat et titulaire d'un accessit de philosophie au Concours général, Maurice Deixonne, pour préparer le concours de l'Ecole normale supérieure, entre au lycée Lakanal à Sceaux, puis devient maître d'internat au collège d'Etampes (1924-1925). Reçu à l'Ecole normale supérieure en 1925, il y rencontre notamment Georges Lefranc, le futur historien du Front populaire, et s'inscrit au Parti socialiste en avril 1926.
Son activité de militant l'amène bientôt au poste de secrétaire parisien des Etudiants socialistes, et il est le fondateur et premier secrétaire de la Fédération nationale des étudiants socialistes. C'est dans ce milieu qu'il rencontre Suzanne Boully, elle-même fille de parlementaire. Il l'épousera le 14 août 1929. L'année suivante, Maurice Deixonne est reçu à l'agrégation de philosophie, sa jeune femme exerçant comme professeur dans l'enseignement technique. Le couple trouve un poste double à Valenciennes (Nord), où Maurice Deixonne exerce comme professeur de philosophie au lycée (1930-1933).
Dans le même temps, Maurice Deixonne poursuit sans relâche son activité de militant, participant, notamment, à la rédaction et à la publication, avec Pierre Boivin, Georges Lefranc, Claude Lévi-Strauss et Robert Marjolin, de Révolution constructive (1932). Nommé au lycée d'Aurillac (Cantal) (1933 -1935), il y continue très activement son action politique, et entre dans le Comité antifasciste du Cantal, dont il deviendra président. Devenu secrétaire de la Fédération socialiste du Cantal, il est condamné, à la suite des heurts qui se produisent à Aurillac le 22 avril 1934, à deux mois de prison avec sursis (19 décembre), et suspendu de ses fonctions. Le jugement est confirmé en appel à Riom (28 mars 1935).
Déplacé d'office au lycée de Gap (Hautes-Alpes) (1935 -1936), Maurice Deixonne, candidat socialiste aux législatives du 26 avril 1936 dans le Cantal, recueille au premier tour, devant les électeurs d'Aurillac, 4 881 voix sur 19 199 votants. Il se retire en appelant à voter pour le député radical sortant, Paul Raymond Bastid, qui, arrivé en seconde position au premier tour, est ainsi réélu (3 mai). Réintégré à Aurillac pour la rentrée de 1936, Maurice Deixonne y retrouve le secrétariat de la Fédération socialiste mais, à la suite d'une importante manifestation qui se déroule les 6 et 7 mai 1939, il est suspendu de ses fonctions sans traitement (15 octobre), condamné à trois mois de prison avec sursis et déplacé à Auch (31 janvier 1940).
Mobilisé un temps à Brest dans l'infanterie de marine, Maurice Deixonne, bientôt rendu à la vie civile, est révoqué par le gouvernement de Vichy (9 décembre 1940), tandis que sa femme est déplacée à Albi. Il doit alors exercer comme professeur dans un établissement privé à Lourdes (1941-1942), et se rapproche dans le même temps de la Résistance du Gers. Nommé, à la Libération, inspecteur d'académie à Auch (1944), il devient ensuite proviseur du lycée d'Albi (1945-1946), où Jean Jaurès avait enseigné, et il siègera provisoirement au conseil municipal de cette ville (1947).
Maurice Deixonne reprend aussitôt l'action politique, comme secrétaire de la Fédération socialiste du Tarn et éditeur du Cri des travailleurs. Il figure en deuxième position sur la liste S.F.I.O. conduite par Salomon Grumbach dans le Tarn aux élections du 21 octobre 1945 pour la première Assemblée nationale constituante, mais, avec 37 914 voix sur 146 443 suffrages exprimés, la liste n'emporte qu'un seul des quatre sièges à pourvoir.
A la suite de difficultés avec le comité directeur du Parti socialiste, Salomon Grumbach ne se représente pas aux élections du 2 juin 1946 pour la seconde Assemblée nationale constituante, et la liste S.F.I.O. du Tarn est donc conduite par Maurice Deixonne. Elu, seul de sa liste, à la plus forte moyenne (36 447 voix sur 158 561 suffrages exprimés), celui-ci est nommé membre de la Commission de l'éducation nationale et des beaux-arts, de la jeunesse, des sports et des loisirs, et désigné comme juré à la Haute cour de justice. Il intervient notamment dans les discussions des propositions de loi tendant à établir la Constitution, dont il approuve le projet le 28 septembre 1946.
Lors des élections de 10 novembre 1946, Maurice Deixonne conduit à nouveau la liste du Parti socialiste S.F.I.O. dans le Tam et, avec 33 312 voix sur 147 140 suffrages exprimés, il conserve son siège pour la première législature de la IVe République. Le député du Tarn est, à l'Assemblée, nommé membre des Commissions de la production industrielle (1946 -1951) et de l'éducation nationale (1946-1948, 1950-1951). Egalement membre suppléant de la Commission de la réforme administrative (1947), il est en outre désigné par la Commission de la production industrielle pour faire partie de la sous-commission chargée de suivre et d'apprécier la gestion des entreprises nationalisées et des sociétés d'économie mixte (1950-1951).
Député tout particulièrement actif, Maurice Deixonne ne dépose pas moins de soixante-dix textes dont la plupart sont relatifs aux problèmes de l'éducation nationale et des bibliothèques, à la création de la Caisse nationale des lettres, à la politique des houillères et à des questions plus locales (catastrophes météorologiques, etc.). Il est en outre à l'origine, le 28 mai 1948, d'une proposition de loi tendant à supprimer toute subvention déguisée à l'enseignement confessionnel. Enfin, il intervient très largement dans les débats sur ces mêmes problèmes, notamment comme rapporteur du projet de loi sur la nationalisation des écoles des houillères (13 mai 1948).
Ayant appuyé le Gouvernement lors du scrutin du 4 mai 1947 à la suite duquel Paul Ramadier se séparera de ses ministres communistes, Maurice Deixonne approuve le statut de l'Algérie (27 août) et, bien évidemment, la nationalisation des écoles des houillères (14 mai 1948). Toujours opposé au Parti communiste, il soutient le plan Marshall (7 juillet 1948), la constitution du Conseil de l'Europe (9 juillet 1949) et le pacte de l'Atlantique (26 juillet). Enfin, il vote la réforme électorale instituant le scrutin de liste majoritaire départemental à un tour avec apparentements (7 mai 1951). En 1950, il est élu président de la Fédération Léo Lagrange.
Maurice Deixonne sollicite le renouvellement de son mandat lors des élections du 17 juin 1951, toujours en tête de la liste du Parti socialiste S.F.I.O. du Tarn. Les listes S.F.I.O., Radicale socialiste et M.R.P. du Tarn, qui ont conclu un accord d'apparentement, emportent les quatre sièges à pourvoir dans ce département, tandis que le député sortant communiste, Roger Garaudy, n'est pas réélu. Avec 29 182 voix sur 148 541 suffrages exprimés, Maurice Deixonne retrouve donc son siège pour la deuxième législature. A l'Assemblée, il devient membre des Commissions de l'Education nationale (1951 -1955) et de la production industrielle (19511955), ainsi que de celle des affaires étrangères (1955). En 1955, il est élu vice-président du groupe parlementaire socialiste.
Toujours extrêmement actif, Maurice Deixonne dépose soixante dix-sept textes portant notamment sur la gestion des houillères et sur la politique scolaire. Sa proposition de loi du 12 mai 1953 tend ainsi à repousser toute économie sur le budget de l'éducation nationale aussi longtemps que ne serait pas abrogée la loi Barangé. De plus, il intervient très souvent dans les débats, en particulier, en août-septembre 1951, à propos des subventions à l'enseignement libre, du contrôle de ses établissements et de la politique gouvernementale à cet égard.
Favorable à l'échelle mobile des salaires (20 septembre 1951), Maurice Deixonne se prononce, le lendemain, contre le compte spécial scolaire. Il approuve le projet du pool charbon-acier (13 décembre) et refuse l'investiture à Antoine Pinay (6 mars 1952) puis à Joseph Laniel (26 juin 1953). Opposé au cessez-le-feu en Indochine (9 mars 1954), il refuse à nouveau sa confiance au Gouvernement après Dien-Bien-Phû (13 mai) puis lors du scrutin du 12 juin qui entraîne la chute du cabinet Laniel. Il soutient l'investiture de Pierre Mendès-France (17 juin 1954) et appuie sa politique en approuvant les accords de Genève qui mettent fin aux hostilités en Indochine (23 juillet). Enfin, européen convaincu, le député socialiste du Tarn vote contre la question préalable opposée par Edouard Herriot et le général Aumeran à la ratification du traité sur la Communauté européenne de défense (C.E.D.), et dont l'adoption entraînera le rejet du traité (30 août 1954), puis il approuve les accords de Paris permettant l'entrée de l'Allemagne dans l'O.T.A.N. (29 décembre).
Le 4 février 1955, Maurice Deixonne soutient le Gouvernement Mendès-France lors du scrutin sur l'Afrique du Nord à la suite duquel il est renversé, et il refuse, le 23 février, sa confiance à Edgar Faure. Egalement opposé à l'état d'urgence en Algérie (31 mars), il se prononce à nouveau contre la confiance au Gouvernement lors du scrutin du 29 novembre suivant sur le mode de scrutin et la date des élections. Le 2 décembre 1955, l'Asemblée nationale est dissoute.
Lors des élections législatives anticipées du 2 janvier 1956, Maurice Deixonne, toujours tête de liste socialiste S.F.I.O. dans le Tarn, retrouve assez facilement son siège de parlementaire (34 936 voix sur 165 542 suffrages exprimés). Membre de la Commission de l'éducation nationale (1956) et de celle de la production industrielle et de l'énergie (1956 -1957), il est élu président de cette dernière le 10 février 1956. Enfin, il est président du groupe parlementaire socialiste en 1957 et 1958.
Maurice Deixonne dépose trente-quatre textes au cours de cette brève législature et intervient très souvent dans les débats : principalement sur la politique scolaire, mais aussi sur de nombreux problèmes industriels (gestion des houillères, exploitation du gaz de Lacq, situation des industries du livre, voire politique de la recherche), ainsi que sur la politique générale du Gouvernement, notamment en Algérie. Il vote l'investiture du Gouvernement Guy Mollet (31 janvier 1956), soutient le programme de réformes en Algérie (12 mars) et approuve la politique générale du Gouvernement en Afrique du Nord (5 juin). Partisan de la confiance au Gouvernement Bourgès-Maunoury (12 juin 1957), puis des traités instituant la C.E.E. et l'Euratom (9 juillet), il appuie également la loi cadre sur l'Algérie lors du scrutin du 30 septembre 1957 qui entraîne la chute du cabinet Bourgès-Maunoury.
Maurice Deixonne accorde sa confiance à Pierre Pflimlin (13 mai 1958), puis approuve l'état d'urgence sur le territoire métropolitain (16 mai) et la résolution tendant à décider la révision de certains articles de la Constitution (27 mai). Le 30 mai, il accompagne Guy Mollet lors de la visite que celui-ci fait au général de Gaulle, alors à Colombey-les-Deux-Eglises, pour l'informer du ralliement socialiste à son investiture, et il déclarera lui-même qu'il s'agissait alors pour lui « d'éviter une guerre civile perdue d'avance et de mettre fin à l'effusion de sang en Algérie. »
Lors de la séance du 1er juin 1958, Maurice Deixonne justifie ses prises de position par sa fidèlité à la République et à la patrie : il vote la confiance au général de Gaulle (1er juin) avant d'approuver les pleins pouvoirs et la révision constitutionnelle (2 juin).
Maurice Deixonne est décédé à Uriage (Isère) le 27 juin 1987.