Antoine Deléglise
1856 - 1917
Né à Saint-Jean-de-Maurienne (Savoie) le 11 juin 1856, mort à Paris le 5 septembre 1917.
Député de la Savoie de 1902 à 1917.
Avoué à Saint - Jean - de - Maurienne, membre, depuis peu, du conseil général - dont il fut vice-président - président du comice agricole, Antoine Deléglise est élu conseiller municipal le 28 juillet 1901, à une écrasante majorité contre M. Jouart, député. Ce dernier entend bien prendre sa revanche aux élections législatives qui ont lieu l'année suivante, le 27 avril 1902. Malgré l'opposition « acharnée » de M. Jouart, député sortant, qui recueille 5.430 suffrages, Antoine Deléglise l'emporte au premier tour de scrutin avec 5.831 voix sur 11.338 votants.
« Ni révolutionnaire ni collectiviste », il s'inscrit au groupe Radical-socialiste. Membre, au cours de cette huitième législature, de diverses commissions - comptes définitifs, législation fiscale, emploi des forces hydrauliques, travaux publics et chemins de fer - il abordera à plusieurs reprises la tribune. Lors de la séance du 10 février 1903, il prend part à la discussion de la loi de finances de l'exercice 1903. Député de la montagne, témoin du dépeuplement des villages, du déboisement des pentes, de la peine des hommes de la terre pour semer, récolter, soigner leur bétail, entretenir leurs chemins, il demande un dégrèvement au profit des petits agriculteurs. « Entre ceux qui travaillent, les agriculteurs surtout... et les capitalistes, l'égalité devant l'impôt n'existe pas. » Il propose pour dégager des ressources, la création d'un impôt de 4 % sur les créances privilégiées, hypothécaires et chirographaires, avant l'institution de l'impôt global et progressif sur le revenu qu'il appelle de ses vœux. Le 29 janvier 1904, il participe à la discussion de l'interpellation de MM. Arnal et Denys Cochin, sur les termes d'un jugement au tribunal correctionnel de Chambéry rendu le 7 décembre 1903.
Les 6 et 20 mai 1906, serré de près au premier tour de scrutin par son concurrent, M. Piot - 5.652 voix contre 5.474 - Antoine Deléglise l'emporte au second tour avec 7.283 voix, écrasant son rival qui ne recueille que 1.144 suffrages, sur 9.650 votants.
Il est membre, cette fois, de deux Commissions, celles des travaux publics et des chemins de fer et de la législation fiscale.
Au cours de la législature, il déposera une proposition de loi tendant à ouvrir au Ministre de l'Agriculture, sur l'exercice 1908, un crédit de 2 millions pour venir en aide aux victimes des orages, de la grêle et des inondations dans l'arrondissement de Saint-Jean-de-Maurienne, ainsi que divers rapports, dont l'un relatif à l'assiette des coupes extraordinaires dans les bois des communes et établissements publics.
Sa formation juridique, son goût pour les questions financières font qu'il intervient très souvent à la tribune au cours des discussions budgétaires. Dans ces débats, moins spectaculaires sans doute que les joutes proprement politiques, mais souvent plus réalistes, il s'applique à la solution des problèmes qui le préoccuperont pendant toute sa vie politique. Ce sont, dans l'ordre de ses interventions : le doublement de la voie ferrée sur la ligne du Mont-Cenis entre Beaulard et Turin, sujet sur lequel sa ténacité s'exercera année après année; la restauration des terrains en montagne ; la situation des postes et des troupes à la frontière des Alpes ; la rétribution de la main-d'œuvre militaire en cas de sinistre ou de calamité publique ; le maintien des droits sur l'aluminium, pour protéger l'industrie de la Maurienne ; les encouragements à donner aux améliorations pastorales et forestières ; les achats de mulets pour l'armée.
La campagne électorale de 1910 lui donne l'occasion, outre de rendre compte de son mandat, de développer une fois encore les idées générales qui font toujours de lui le candidat républicain de sa circonscription : liberté de conscience et liberté des cultes ; défense de la loi sur les associations ; anticléricalisme dans la mesure où celui-ci s'abaisse « au rang d'un moyen de propagande électorale » ; réduction de la durée du service militaire dans toute la mesure compatible avec les besoins de la Défense nationale ; priorité de l'enseignement, en particulier agricole et professionnel ; liberté de l'enseignement sous le contrôle de l'Etat ; réforme de l'impôt ; développement du crédit agricole et de la mutualité ; retraites pour la vieillesse.
Cette fois, il est élu au premier tour de scrutin, obtenant 5.316 voix contre 5.019 à son concurrent le plus dangereux, M. Vuillermet, sur 10.973 votants.
Comme les années précédentes, et sur les mêmes sujets, Antoine Deléglise multiplie les interventions. Quelques problèmes nouveaux le sollicitent et il en traite avec beaucoup de netteté et de bon sens : la construction de la route des Alpes de Thonon à Nice ; la protection de l'agriculture et de la santé publique contre les méfaits de l'industrialisation ; la protection des oiseaux migrateurs ; la création d'emplois de professeur titulaire de langues vivantes dans les écoles normales supérieures ; l'attribution de subventions aux comices agricoles comme aux syndicats agricoles ; l'établissement d'une ligne téléphonique entre Modane et Turin ; la création d'une école pratique d'agriculture en Savoie ; le transit des émigrants italiens par Modane, etc.
Aux élections générales des 26 avril et 10 mai 1914, au premier tour de scrutin, Antoine Deléglise obtient 5.408 voix alors que son concurrent, M. Falcoz, réunit 4.543 suffrages. Il sera élu au second tour avec 6.863 voix contre 857 à M. Falcoz, sur 9.390 votants.
Membre des Commissions de législation fiscale, des travaux publics, de l'agriculture et de l'administration générale, Antoine Deléglise prend part à la discussion du projet de loi, modifié par le Sénat, tendant à assurer, pendant la durée de la guerre, le fonctionnement des conseils municipaux.
C'est la dernière fois que l'on entend sa voix dans l'hémicycle. Son nom retentira encore sous la voûte mais c'est M. Paul Deschanel, président, qui le rappellera. Antoine Deléglise, dit-il « apportait, dans nos travaux, la fine raison de son pays... C'était un républicain sincère, un démocrate convaincu. Il ne séparait pas la grandeur de la patrie de l'avenir de la République.»
C'était le 18 septembre 1917. Antoine Deléglise était mort à Paris, le 5 septembre de la même année, âgé de 61 ans.