Jean Deshors
1901 - 1985
Né le 26 octobre 1901 à Blanzac (Haute-Loire)
Décédé le 23 janvier 1985 à Blanzac (Haute-Loire)
Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale Constituante (Haute-Loire)
Député de la Haute-Loire de 1946 à 1955
De souche rurale, formé conjointement par l'enseignement public et l'enseignement privé, propriétaire exploitant, Jean Deshors milite, dès les années 1930, pour la mise en place de mutualités agricoles dans les communes. En 1928, il devient conseiller municipal de son village natal, puis maire de cette commune en 1933, mandat qu'il conserve jusqu'en 1953. Après cette date, il en reste maire-adjoint. En revanche, en 1936, il échoue aux élections législatives. Pendant la guerre, il appartient à la Corporation paysanne mise en place par Vichy. A la Libération, lors des élections pour la première Constituante, il est placé en troisième position sur la liste républicaine d'action sociale derrière Paul Antier et Noël Barrot. Cette liste arrive largement en tête en Haute-Loire avec 66 576 suffrages sur 118 519 exprimés. Aussi les trois premiers candidats sont-ils proclamés élus face au leader communiste, largement distancé, Alfred Biscarlet (21 446 voix). Jean Deshors choisit de siéger à la Commission de la famille, de la santé et de la population. Sa principale intervention se place après le départ du général de Gaulle, lors de la discussion d'interpellations sur la politique du gouvernement Félix Gouin. Au nom du groupe du parti paysan, Jean Deshors critique la politique de ravitaillement, sujet si sensible à l'époque, et qui le touche professionnellement. Il plaide pour une organisation professionnelle libre des agriculteurs, habilitée à étudier le plan de production et d'équipement agricole. Face à une politique gouvernementale qu'il refuse, il annonce donc que son groupe ne votera pas la confiance. Le problème de la liberté syndicale dans l'agriculture suscite sa seconde intervention lors de la discussion de propositions de lois relatives à la Constitution et à la Déclaration des droits.
Pour les élections à la seconde Constituante, la liste précédente a éclaté en deux : d'un côté on trouve la liste républicaine d'action sociale et paysanne dirigée par Paul Antier où Jean Deshors se trouve en deuxième place et de l'autre une liste M.R.P. conduite par Noël Barrot. Aussi Paul Antier et Jean Deshors ne recueillent-ils plus que 45 550 suffrages contre 29 555 au M.R.P. et 22 258 aux communistes. Les élus sont cependant les mêmes que lors du scrutin précédent. Dans la nouvelle Assemblée, Jean Deshors siège cette fois à la Commission des moyens de communication et est désigné comme juré à la Haute Cour de justice. Il a le temps, pendant son court mandat, de déposer deux propositions de loi et de résolution : la première demandant la création de fermes régionales types, la seconde invitant le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour supprimer le rationnement de tabac en métropole. Sa seule intervention publique soutient un amendement d'Arthur Ramette qui demande la suppression d'une taxe pour aider l'industrie des tulles, dentelles et broderies, activité florissante en Haute-Loire.
Pour les premières élections législatives de la IVe République, les électeurs confirment leur verdict précédent. La diminution du nombre de votants et de suffrages exprimés explique le tassement général du score de chaque liste. Paul Antier et Jean Deshors arrivent de nouveau en tête avec 39 211 voix et sont réélus comme leurs deux concurrents principaux, Noël Barrot et Alfred Biscarlet. Jean Deshors remplit de nombreuses fonctions au cours de la législature : il est membre et vice-président de la Commission de la presse, membre puis secrétaire de la Commission de l'intérieur, membre de la Commission de la famille (à partir du 26 janvier 1948), et de celle du ravitaillement (même date), de celle des moyens de communication (18 janvier 1949), de celle du travail et de la Sécurité sociale (15 novembre 1949), il appartient aussi à la Commission chargée d'enquêter sur les événements survenus en France de 1933 à 1945 (14 novembre 1950) et enfin il est désigné comme juge suppléant puis juré à la Haute Cour de justice.
Les propositions de loi ou de résolution qu'il dépose portent sur les problèmes agricoles, sur des mesures visant à libéraliser l'économie ou à effacer les séquelles de la guerre. Le 8 novembre 1949, il dépose par exemple, une proposition de loi d'amnistie pour les faits de collaboration et, le 4 novembre 1951, il invite le gouvernement à mettre en liberté le maréchal Pétain. Ses interventions orales défendent les mêmes positions. La plus importante concerne la longue discussion des projets d'amnistie pour faits de collaboration. Plaidant résolument pour le pardon au nom d'une vision chrétienne, s'appuyant sur l'autorité de penseurs ou d'écrivains connus, Jean Deshors dénonce les abus auxquels ont donné lieu les premiers temps de l'épuration sauvage et le fait qu'au-delà d'un individu coupable, c'est souvent une famille innocente qui a été plongée dans le malheur par des peines trop lourdes. Ses adversaires politiques, notamment les communistes, mais aussi certains socialistes, l'interrompent fréquemment et violemment lui attribuant une volonté de dédouaner Vichy ou la Collaboration sous couvert de clémence. Peu au fait des ressources de la rhétorique parlementaire, Jean Deshors est mis en difficulté à plusieurs reprises par ses contradicteurs qui ne laissent passer aucune formule ou imprécision de son exposé pouvant prêter à polémique ou malentendu. Ce débat tendu où Jean Deshors se trouve en première ligne avec la minorité favorable à l'oubli partiel du passé s'étale sur quatre séances (24 octobre, 4, 7, et 11 novembre 1950).
Lors des élections législatives du 17 juin 1951, Jean Deshors est le troisième sur la liste présentée par les Indépendants paysans derrière Paul Antier et Eugène Pebellier. Le jeu des apparentements avec les listes M.R.P. et R.P.F. permet aux trois candidats cités d'être élus ou réélus avec 38 % des voix en compagnie de Noël Barrot (17,7 %) tandis que le député sortant communiste perd son siège (15,7 % des voix). Dans leur proclamation électorale, les trois candidats paysans avaient fait le procès du régime des partis et de l'étatisme et prôné les vertus de la famille et de la libre entreprise. Jean Deshors appartient, dans la nouvelle législature, à la Commission de la production industrielle et, à partir de 1955, à la Commission des boissons ainsi qu'à celle de l'éducation nationale.
Au cours de la législature, Jean Deshors s'attache avant tout dans les débats à défendre l'enseignement privé, l'agriculture et l'enseignement agricole. Sur le premier point, lors de la séance du 6 septembre 1951, il soutient publiquement le projet de compte spécial du trésor déposé par Charles Barangé prévoyant qu'on accorde des bourses aux élèves de l'enseignement privé. Il souligne le rôle irremplaçable de cette filière d'enseignement en cette période de forte croissance des effectifs scolaires. Le 26 février 1952, il fait un long historique de l'insuffisance de l'enseignement agricole en France, cause du retard agricole national, et préconise une série de solutions pratiques pour y porter remède, notamment l'introduction d'un programme agricole et ménager dans l'enseignement primaire et l'intervention directe des professionnels dans l'organisation de l'enseignement agricole par l'intermédiaire des Chambres d'agriculture. Sans ces mesures, selon lui, l'enseignement dispensé aux paysans ne fera qu'aggraver, comme par le passé, la désertion des campagnes.
Après la dissolution anticipée de l'Assemblée nationale par Edgar Faure, le scrutin du 2 janvier 1956 met en présence en Haute-Loire les mêmes candidats. La liste où figure Jean Deshors subit un nouveau tassement avec 38 133 voix (au lieu de 42 175 précédemment) et perd des suffrages au profit de la liste poujadiste. L'absence d'un large accord d'apparentement entraîne l'application de la représentation proportionnelle qui aboutit mécaniquement à l'échec de la candidature de Jean Deshors. Celui-ci ne renouera avec la vie politique nationale qu'après le changement de régime en 1958. Ses positions locales restent en effet solides avec 39 657 voix portées sur son nom en 1956, un siège au Conseil général pour le canton de Saint-Paulien occupé sans interruption de 1949 à 1967 et la présidence de la Chambre d'agriculture de la Haute-Loire de 1952 à 1967.
DESHORS (Jean)
Né le 26 octobre 1901 à Blanzac (Haute-Loire).
Décédé le 23 janvier 1985 à Blanzac (Haute-Loire)
Député de la Haute-Loire de 1958 à 1962
Candidat en 1958 aux premières législatives de la Ve République dans la 2e circonscription de son département (Le Puy-Nord-Ouest et Brioude), Jean Deshors parvient à fédérer sur son nom l’électorat de droite pour l’emporter dès le premier tour avec 32 477 voix, dans une triangulaire l’opposant au communiste Alfred Biscarlet (6 397 voix) et au conseiller René Chazelle, candidat de la SFIO (13 462 voix) en l’absence de candidat gaulliste. Jean Deshors était bien connu des électeurs, puisque député depuis la Constituante de 1945 (parti et groupe paysans), sa présence dans l’hémicycle n’ayant été interrompue que lors de la dernière législature de la IVe République.
Député apparenté IPAS (Indépendants et paysans d’action sociale), Jean Deshors siège à la commission de la Défense nationale et des Forces armées, mais n’intervient à l’Assemblée que sur des questions touchant à l’agriculture, lors de la discussion du projet de loi d’orientation agricole (11 juillet 1960), de celui relatif aux assurances sociales agricoles (12 juillet 1960), du volet agriculture du projet de loi de finances pour 1962 (questions de crédit, d’endettement, de disparités de revenu…), ou alors pour s’inquiéter de la disparition de l’exploitation familiale (27 juillet 1962).
S’il vote les déclarations de politique générale du gouvernement Debré des 16 janvier et 15 octobre 1959, Jean Deshors ne s’en montre pas moins rapidement critique de la politique gouvernementale. Il vote en faveur de l’amendement Ballanger du 28 mai 1959 mais se montre favorable au projet définitif du 3 juin 1959 sur le règlement de l’Assemblée nationale. Il se prononce pour le projet de loi Debré concernant l’enseignement privé (23 décembre 1959), mais s’abstient volontairement lors du vote sur les pouvoirs spéciaux attribués au gouvernement (scrutin du 2 février 1960). Il est en mission lors du scrutin portant sur la révision de la Constitution (11 mai 1960) et ne prend pas part au vote sur la levée de l’immunité parlementaire de Georges Bidault (5 juillet 1962), puis s’abstient volontairement d’approuver le programme de gouvernement de Georges Pompidou, le 27 avril 1962. Il vote la motion de censure du 4 octobre 1962 dont l’adoption provoque la chute du gouvernement.
Cette indocilité n’est sans doute pas étrangère à l’apparition, pour les législatives de 1962, d’une candidature Union pour la nouvelle République-Union démocratique du travail (UNR-UDT) concurrente, celle de l’adjoint au maire du Puy, Marcel Raffier, qui devance, par 15 830 voix contre 15 000, Jean Deshors au premier tour, laissant leurs adversaires, le radical-socialiste Léon Sagnol (7 031 voix) et le communiste Alfred Biscarlet (6 061 voix) loin derrière, avant de battre le député sortant au second tour avec 19 482 voix contre 16 393 et 11 747 au candidat d’union de la gauche Léon Sagnol. Jean Deshors tente de reconquérir son siège lors des élections législatives de 1967, mais il ne parvient à rassembler au premier tour que 5 089 suffrages, contre respectivement 13 990 au député sortant et 12 196 à son vieil adversaire socialiste, René Chazelle, présenté par la Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS), élu au second tour à la faveur d’un bon report des voix de l’ensemble de la gauche, à l’instar de ce qui s’observe à l’échelle nationale.
Jean Deshors quitte alors la vie politique au terme de son mandat au conseil général en 1967, cessant la même année de présider la Chambre d’agriculture de la Haute-Loire. Il s’éteint le 23 janvier 1985 dans la commune où il avait vu le jour.