Maurice Druon

1918 - 2009

Informations générales
  • Né le 23 avril 1918 à Paris (Seine - France)
  • Décédé le 14 avril 2009 à Paris (Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
VIe législature
Mandat
Du 19 mars 1978 au 22 mai 1981
Département
Paris
Groupe
Rassemblement pour la République

Biographies

Biographie de la Ve République

DRUON (Maurice)
Né le 23 avril 1918 à Paris (Seine)
Décédé le 14 avril 2009 à Paris

Ministre des Affaires culturelles du 5 avril 1973 au 1er mars 1974
Député de Paris de 1978 à 1981

Dans la mémoire collective, Maurice Druon restera attaché à trois éléments essentiels de la culture française. Le Chant des partisans, d’abord : il est, en 1943, avec son oncle Joseph Kessel, l’auteur de sa version française, laquelle devient l’hymne de la Résistance. L’homme de lettres ensuite, avec en particulier Les Grandes familles, en 1948, roman qui reçoit le prix Goncourt, et Les Rois maudits, fresque historique publiée à partir de 1955 et qui fera l’objet d’une adaptation télévisée très suivie au début des années 1970. Le défenseur assumé d’une conception conservatrice de la culture, enfin, qui lui vaudra comme ministre des Affaires culturelles – le Malraux de Pompidou – quelques polémiques, mais aussi celui qui obtient des moyens supplémentaires, en particulier pour le théâtre.

Maurice Druon est né à Paris, dans le 13e arrondissement, sept mois avant la fin de la Grande Guerre. Lazare Kessel, son père, un Lithuanien, de confession juive, a quitté la Russie dix ans avant sa naissance en compagnie de sa famille – son frère aîné est le futur écrivain Joseph Kessel. Personnalité douée – il est reçu pensionnaire à la Comédie-Française – mais tourmentée, Lazare Kessel se suicide à l’âge de 21 ans. Du côté de sa mère, Léonilla, née Samuel-Cros, Maurice Druon, s’inscrit aussi dans une lignée d’artistes. En effet, celle-ci a pour grand-oncle, du côté de sa mère, le poète Charles Cros. Elle épouse en 1926 René Druon, notaire dans le Nord de la France, qui reconnaît le jeune Maurice ; Maurice Druon louera chez lui « l’amour de la France [qui lui permit] d’équilibrer son énergie dionysiaque de juif des steppes ».

Après une enfance passée en Normandie, dans le village de la Croix-Saint-Leufroy, près des Andelys, Maurice Druon étudie au lycée Michelet de Mantes où il se révèle un excellent élève, avec un profil littéraire marqué, comme en témoigne sa deuxième place au concours général de littérature (1936) – le sujet appelait une réflexion sur la phrase qu’André Maurois avait prononcée en l’honneur de Louis Renault : « Des hommes et des choses, voilà le réel ». Il préside l’Association des lauréats du concours général de 1967 à 1973, puis de nouveau, de 1983 à 1988. Tout en étudiant à la faculté des lettres de Paris et à l’École libre des sciences politiques entre 1937 et 1939, il commence à publier dans des revues littéraires, encouragé par son oncle Joseph Kessel qui lui fait découvrir la magie des cabarets russes de la capitale et le met en relation avec de nombreux artistes originaires de l’Europe orientale, ainsi qu’avec les as de l’Aéropostale, Jean Mermoz, Antoine de Saint-Exupéry et Henri Guillaumet. Au contact de cet oncle de vingt ans son aîné, Maurice Druon se revendique d’une écriture classique capable de toucher le plus grand nombre.

« J’ai vingt ans et je pars », c’est sous ce titre que le jeune Maurice Druon signe, en 1939, un article dans Paris-Soir, alors dirigé par le célèbre Pierre Lazareff, indiquant qu’il entend faire son devoir, sans état d’âme, ni réserve mentale. Élève officier des cavaliers de Saumur, il participe à ce titre à la glorieuse bataille de la Loire, durant laquelle, entre Ancenis et Gien, les élèves-officiers décident de se battre, alors même que Pétain vient d’adresser un message, le 17 juin 1940, aux armées françaises pour leur demander de cesser le combat dans la perspective de l’armistice. Cette épopée sera la matière de La Dernière brigade, le premier roman de Maurice Druon, en 1946.

Démobilisé, il reste en zone libre avant de s’engager dans la Résistance. Avec son oncle Joseph Kessel, il quitte la France à la fin de 1942 et gagne Londres en hydravion, en janvier 1943, après avoir franchi les Pyrénées et rejoint l’Espagne, puis le Portugal. Aide de camp du général François d’Astier de La Vigerie, puis attaché au programme Honneur et Patrie de la BBC, auprès de l’essayiste André Gillois et du comédien Claude Dauphin, il finit la guerre comme correspondant de guerre auprès des armées françaises.

À la Libération, il se consacre à la littérature et il connaît très vite le succès. Son roman Les Grandes familles est couronné, en 1948, du prix Goncourt, préféré à Vipère au poing d’Hervé Bazin. C’est le premier roman d’une trilogie, à laquelle Maurice Druon donne le nom de La Fin des hommes – les deux autres sont La Chute des corps (1950) et Rendez-vous aux enfers (1951) –. Dix ans après sa parution, Denys de la Patellière et Michel Audiard en portent l’adaptation au cinéma. En 1989, Edouard Molinaro fait pour la télévision une mini-série de trois épisodes. Reconnu par le Paris littéraire, Maurice Druon entre, en 1953, au répertoire de la Comédie française avec sa pièce en un acte, Le Voyageur. Mais c’est avec la publication des Rois maudits qu’il devient l’un des écrivains les plus populaires. En sept volumes, publiés entre 1955 et 1977, cette fresque historique, à l’écriture de laquelle participent plusieurs « nègres » de talent (Pierre de Lacretelle et Edmonde Charles-Roux, entre autres), décrit la fin tourmentée des Capétiens directs, de Philippe IV le Bel à Philippe VI de Valois. C’est un grand succès de librairie en France et à l’étranger. Aussi, avant même la parution du dernier tome, Claude Barma et Marcel Jullian en font-ils une adaptation pour la télévision, en 1972. C’est un nouveau succès populaire qui contribue encore à la renommée de Maurice Druon. En 2006, Josée Dayan réalise un nouveau cycle de feuilletons.

Trois ans après son oncle, le 8 décembre 1966, Maurice Druon est élu à l’Académie française, au trentième fauteuil, succédant à Georges Duhamel. Réalisée en 1967 par Cartier, son épée d’académicien résume bien la richesse de sa vie alors qu’il n’a pas encore atteint les 50 ans : la sobriété de la lettre initiale d’académicien est caractéristique des sabres des cavaliers de l’École de Saumur ; la rose des vents sculptée sur la coquille de la garde renvoie à la diversité de ses origines ; sur le pommeau, la croix de Lorraine symbolise l’engagement dans la Résistance du co-auteur du Chant des partisans ; l’extrémité du fourreau est ornée de fleurs de lys pour évoquer Les Rois maudits ; enfin, la lame porte gravée « Καí εíς ανóτερα », formule que les Grecs adressent à leurs amis pour leur souhaiter des succès renouvelés, en rappel de ses romans mythologiques, dont Alexandre le Grand (1958).

Académicien, Maurice Druon continue à jouer un rôle éminent dans le monde des lettres, en particulier en sa qualité de membre de nombreux jurys littéraires, et devient la figure de l’essayiste polémiste, passé maître dans l’art de stigmatiser les principaux changements idéologiques et spirituels de son époque : il se montre hostile à l’esprit de Mai 1968. Incarnant la défense d’une culture conservatrice, Maurice Druon devient le « chantre national », comme l’appelle Georges Pompidou, lequel le choisit comme ministre des Affaires culturelles, le 5 avril 1973, à la suite du retrait de la vie politique de Jacques Duhamel.

À la tête de la rue de Valois, Jacques Duhamel avait orienté son action selon la « Nouvelle société » : insérer la culture dans la vie quotidienne, aiguiser la sensibilité des enfants aux œuvres de l'art, prendre en compte la capacité d'apprentissage des adultes et maîtriser les techniques audiovisuelles nouvelles. Il avait mis un terme à la censure politique et nommé des personnalités réputées de gauche à la tête d’institutions culturelles, dont Jack Lang à la direction du Palais de Chaillot. Le Théâtre de la Cité de Roger Planchon avait reçu le précieux label de Théâtre national populaire (TNP). Le ministre avait accompagné les premiers travaux du Centre national d’art et de culture, aux Halles, voulu par la Président Pompidou et qui porte aujourd’hui son nom.

En confiant les rênes de la rue de Valois à Maurice Druon, personnalité connue pour son goût de l’ordre et pour sa conception conservatrice de la culture, le président Pompidou entendait calmer une majorité parlementaire réticente face à ses « audaces » culturelles. C’est toutefois le seul ministre du deuxième gouvernement Messmer sans mandat électif. Cette nomination est accueillie avec réserve, d’autant que le nouveau ministre livre une interview fracassante dans laquelle, celui qui, cinq ans auparavant, s’étonnait dans son livre L’Avenir en désarroi (1968) que l’on puisse représenter Les Paravents de Jean Genet dans un théâtre public, n’hésite pas à affirmer que les directeurs d’organismes culturels publics « qui viennent à la porte de ce ministère avec une sébile dans une main et un cocktail Molotov dans l’autre devront choisir ». Maurice Druon conserve cependant Jacques Rigaud comme directeur de cabinet, gage de continuité. De nouveaux centres d’action culturelle sont ainsi homologués en province et à Paris.

Toutefois, le préjugé très défavorable dont il souffre auprès de l’intelligentsia de gauche et son goût assumé pour la polémique mettent très rapidement le ministre sous le feu des critiques. « Malraux de Pompidou », pour Paul Morand, et « Malraux du pauvre », pour le quotidien communiste L’Humanité, Maurice Druon se revendique ouvertement comme un intellectuel de droite dans une époque où le mot semble appartenir au champ lexical de la seule gauche. Les réactions sont vives. Jean-Louis Barrault et Roger Planchon signent un article dans Le Monde dénonçant « la répression culturelle ». La procession silencieuse d’une calèche tendue de velours noirs, tirée par deux chevaux blancs, est organisée pour mettre en scène, dans les rues de la capitale, l’enterrement de la liberté d’expression, le 13 mai 1973.

Le 23 novembre 1973, le ministre doit répondre à une série de questions orales lui demandant de s’expliquer sur ses propos sur la sébile et le cocktail Molotov. Roland Leroy, député communiste de la Seine-Maritime et futur directeur de l’Humanité, affirme que « le gouvernement n’a rien à édicter, rien à diriger en matière d’art [au nom de l’argument que] la liberté et la démocratie ne se morcellent pas », et s’interroge pour savoir si « Maurice Druon entend être le ministre de la Culture ou le ministre de la censure ? ». Au nom des socialistes, Georges Fillioud, député de la Drôme, rappelle les propos de Maurice Druon contre Les Paravents de Jean Genet pour mieux les opposer à ceux de Malraux qui avait voulu que la pièce soit représentée à l’Odéon. Insistant sur la rupture par rapport à tous ses prédécesseurs que constitue la nomination rue de Valois de l’auteur des Rois maudits, le député de la Drôme conclut par ces mots : « Je dirai qu’il fallait au successeur du général de Gaulle un successeur à André Malraux ». Seul le député gaulliste de Seine-et-Marne, Bertrand Flornoy, « espère que l’aide de l’État, qui n’est possible qu’avec l’argent gagné par le travail des citoyens, ne soit pas offerte à ceux dont l’objectif, maintenant clairement connu, est d’abattre une société qui est celle de tous les Français ». Michel Durafour, centriste, rappelle que l’art est, selon Malraux, une forme de « subversion ». Dans sa longue réponse, Maurice Druon déplore que sa phrase ait été en partie tronquée et rappelle ce qu’il a dit : « Que l’on ne compte pas trop sur moi pour subventionner, par préférence, avec les fonds de l’État, c’est-à-dire avec l’argent du contribuable, les expressions dites artistiques qui n’ont d’autre but que de détruire les assises et les institutions de notre société. Même si mes goûts m’y portaient, je ne trouverais pas cela loyal à l’égard de mes concitoyens. Les gens qui viennent à la porte de ce ministère avec une sébile dans une main et un cocktail Molotov dans l’autre devront choisir ! ». Il est applaudi sur les bancs de l’Union des démocrates pour la République (UDR) et des Républicains Indépendants. Il rappelle ensuite ses objectifs : conservation du patrimoine, efficacité de l’enseignement, stimulation de la création. Il estime aussi que la France doit « reprendre la tête d’un humanisme qui s’exprime et se traduit à travers des harmonies nobles, des architectures de prestige, un théâtre de grands conflits et de vraie satire, une littérature des grands témoignages, ou des grands sentiments, lesquels ne sont pas forcément d’ailleurs toujours les bons ou toujours les mauvais ». Si de tels propos rassurent les élus de la majorité, ils suscitent la critique et l’ironie sur les bancs de l’opposition qui déplore la faiblesse du budget dédié à la création. Maurice Druon n’est pas reconduit en mars 1974, dans ses fonctions ministérielles.

Après l’élection de Valéry Giscard d’Estaing à la présidence de la République, Maurice Druon ne sera plus ministre, mais n’abandonne pas la politique active.

Nommé en 1975 expert au conseil national de l’UDR pour les arts et les lettres, ce gaulliste de toujours devient, dès janvier 1977, membre du comité central du Rassemblement pour la République (RPR), qui vient d’être fondé, en décembre 1976. Candidat aux élections législatives de 1978 dans la 22e circonscription de Paris, il dramatise l’enjeu d’une victoire de la gauche. Sa profession de foi commence ainsi : « Si j’ai accepté d’entrer avec vous, parmi vous, dans la bataille des élections législatives, c’est parce que, dans ces élections, la France risque gros. De nouveau, le malheur rôde aux portes de la France. » Bien épaulé par son suppléant, le docteur Philippe Lafay, conseiller de Paris et fils du député sortant solidement implanté, décédé en 1977, Maurice Druon arrive en tête au premier tour, avec 10 549 voix et 38,30 % des suffrages exprimés, et devance de 1 481 voix son principal adversaire, Henry Estingoy, ancien directeur général de l’Institut national de la consommation et figure du Parti républicain. Le second tour, entre le candidat gaulliste soutenu par Jacques Chirac et celui de l’UDF (Union pour la démocratie française) encouragé par le président de la République, tourne à l’avantage du premier : l’ancien ministre rassemble 13 841 voix contre 9 148 pour son opposant, soit un peu plus de 60 % des suffrages exprimés contre 40 %.

Au Palais-Bourbon, le nouveau député s’inscrit au groupe RPR. Membre de la commission des affaires étrangères, il est aussi président du groupe parlementaire France-Italie et membre de la commission d’enquête sur la langue française, créée en décembre 1980. Il est également suppléant à l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe, à partir de mai 1978.

Député actif, il présente, en mai 1980, une proposition de loi, qui recueille l’assentiment de ses confrères, pour apposer sous l’Arc de Triomphe une plaque à la mémoire du général de Gaulle, rappelant les termes de l’appel du 18 juin. Ses questions au gouvernement et ses interventions portent très majoritairement sur la politique étrangère et de défense. Il est notamment, en décembre 1979, le rapporteur du projet de loi autorisant la ratification du traité d’adhésion de la Grèce à la CEE.

Mais Maurice Druon intervient également sur les questions culturelles, en mai 1978, pour défendre le projet de musée du XIXe siècle, le musée d’Orsay, prévu par le projet de loi de programme sur les musées, puis, en décembre 1978, dans la discussion du projet de loi sur les archives. Il réaffirme ses positions conservatrices, en juin 1979, lors de la déclaration du gouvernement sur l’échelle des peines, en défendant le principe de la peine de mort.

En matière de politique étrangère et européenne, Maurice Druon est un gaulliste convaincu qui est élu en juin 1979 sur la liste Défense des intérêts de la France en Europe (DIFE), conduite par Jacques Chirac, aux premières élections au suffrage universel de l’Assemblée des Communautés européennes. Ce nouveau succès dans les urnes lui vaut de devenir conseiller politique du RPR en octobre 1979. Le 18 juin 1980, date hautement symbolique, il démissionne de son mandat de député européen, au nom de « la règle du tourniquet », voulue par Jacques Chirac, pour permettre à tous les membres de sa liste de siéger à tour de rôle à Strasbourg. Durant cette brève expérience, il fait surtout parler de lui en proposant, alors que les échanges sont vifs sur le boycott des Jeux olympiques de Moscou, que toutes les rencontres olympiques aient désormais lieu en Grèce. Il estime sinon, avant tout nécessaire, d’œuvrer au renforcement de l’Exécutif européen. Toujours dans une stricte observance de la ligne gaulliste, il avait renoncé, 18 mois auparavant, en novembre 1978, à ses fonctions au sein de l’Union de l’Europe Occidentale (UEO), regrettant que celle-ci soit une coquille vide et que les pays qui aspirent à rejoindre la CEE,
s’en remettent au « parapluie » américain de l’OTAN. Dans sa conception de l’Europe, sa seule et relative prise de distance par rapport au credo gaulliste est l’anglophilie dont il fait preuve, comme membre fondateur du Conseil franco-britannique, une organisation indépendante, créée en 1972, sur une initiative conjointe de Georges Pompidou et d’Edward Heath pour une meilleure compréhension entre les deux peuples, quelques mois avant l’adhésion du Royaume-Uni à la CEE.

Après l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République, Maurice Druon décide de se mettre en retrait de la politique. Pour avoir soutenu la candidature de Michel Debré à l’élection présidentielle de mai 1981, Bernard Pons, secrétaire général du RPR, l’écarte des instances dirigeantes du parti gaulliste, dont il démissionne en 1982. Son essai Réformer la démocratie, paru chez Plon en 1982, dans lequel il formule une série de propositions pour moderniser la vie et les institutions politiques françaises, signe, par bien des aspects, une forme de rupture avec la Ve République. Comment comprendre autrement son souhait de revenir sur l’élection au suffrage universel du chef de l’État au profit d’une élection par un collège, comparé à un conclave, regroupant les principales personnalités politiques et les figures éminentes de la société civile ? Si la défense d’un gouvernement ramassé, limité à douze ou treize ministres, n’est pas un choix aussi audacieux, sa proposition que chaque circonscription élise, et un député, en charge des affaires exclusives de la nation, et un médiateur, s’occupant des problèmes locaux, est innovante. Maurice Druon souhaite l’instauration d’un service militaire pour les jeunes filles, le retour à l’État concordataire, la suppression de l’impôt sur le revenu, la fin du « féodalisme syndical », le rétablissement de la peine de mort, ainsi que de la Cour de sûreté de l’État et des peines de relégation.

Après cet étonnant, et formidable, testament politique qui clôt sa carrière de ministre et de député, Maurice Druon consacre l’essentiel de son action à l’Académie française. Le 7 novembre 1985, après un vote triomphal au cours duquel il recueille 26 des 29 suffrages, il succède à Jean Mistler, écrivain et homme politique, à la fonction de Secrétaire perpétuel. Dans la lignée de ses engagements d’élu, il cherche à limiter l’évolution de l’institution, même s’il est le premier à permettre la publication du Dictionnaire sur Internet. Farouchement opposé à l’élection de la première académicienne, Marguerite Yourcenar, hostile à la féminisation des noms de métier, il se montre réticent à l’instauration d’une nouvelle orthographe, estimant que seul l’usage ratifie les évolutions. En 1999, Hélène Carrère d’Encausse lui succède. Jusqu’au bout, celui qui fut le benjamin des Immortels, avant d’en devenir le doyen, après la mort en 2007 d’Henri Troyat, prend la plume et la parole pour défendre ses idées. Il collabore régulièrement au Figaro et n’hésite pas à prendre parti, par exemple en faveur de l’initiative de Nicolas Sarkozy de faire lire la Lettre de Guy Môquet dans les écoles primaires.

Amoureux passionné de la France et de son histoire, Maurice Druon est inhumé, selon ses dernières volontés, près des ruines de l’abbaye de la Faize, aux Artigues-de-Lussac, dans la région de Libourne, un édifice du XIIe siècle qu’il avait entrepris de restaurer. Le service religieux de ses obsèques a été célébré le 20 avril 2009 dans la cathédrale Saint-Louis des Invalides par Mgr Claude Dagens de l’Académie française, en présence du Président de la République française, de plusieurs hommes d'État et de nombreuses personnalités du monde politique et des arts. C’est tout naturellement au son du Chant des partisans que les honneurs militaires lui sont rendus dans la cour de l'Hôtel des Invalides par le chef de l'État. Titulaire de la grand-croix de la légion d’Honneur, commandeur des Arts et des Lettres, chevalier commandeur de l'ordre de l'Empire britannique, grand-croix de l’ordre du Mérite de la République italienne et de l’Aigle Aztèque du Mexique, commandeur de l’ordre du Phénix de Grèce et de l’ordre de la République tunisienne, grand officier du mérite de l’ordre de Malte, de l’ordre du Lion au Sénégal et de l’ordre d’honneur de Grèce, Maurice Druon éprouvait sans doute « le désir ardent de recouvrir la dépouille tragique de son père, Lazare Kessel, d'un linceul d'honneurs et de respectabilité », comme écrivit de lui le journaliste Étienne de Montety, dans la notice nécrologique que Le Figaro publia sur son très prestigieux collaborateur.