André, Maurice Dufour
1909 - 1995
Né le 13 août 1909 à Paris (14e)
Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale Constituante (Isère)
Député de l'Isère de 1946 à 1958
André Dufour est le fils d'un ouvrier du livre et d'une ouvrière de l'industrie textile. Comme le rappelle le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français de Jean Maîtron, sa famille s'installe à Lyon en 1917. Son père s'y noya accidentellement la même année. André Dufour obtient le certificat d'études primaires en 1922, puis travaille comme garçon de courses tout en suivant de 1923 à 1930 des cours du soir qui lui permettent de devenir aide-comptable.
En 1930, le jeune André Dufour satisfait à Gap aux obligations militaires dans les chasseurs alpins. Il a alors un grave accident pulmonaire qui le fait réformer et l'oblige à vivre pendant plus d'un lustre non loin de Megève et du Plateau d'Assy. La proximité des sanatoriums lui fait prendre conscience du sort déprimé des ouvriers tuberculeux. En 1936, il s'engage en politique en assurant la charge de trésorier d'un comité local du Front populaire. Après les élections, il s'installe à Grenoble et adhère au Parti communiste.
Sa promotion à l'intérieur du parti est rapide et exemplaire : administrateur du Travailleur Alpin en 1936, membre du bureau régional en 1937, trésorier régional en 1938. Il assure aussi en 1939 le secrétariat du syndicat du Bâtiment de l'Isère.
En 1939, André Dufour approuve le pacte germano-soviétique tout en affirmant la nécessité de lutter contre le nazisme. Il est arrêté et condamné le 22 septembre à une amende. Il reconstitue clandestinement le Parti communiste dissous et fait reparaître dès novembre Le Travailleur Alpin. Arrêté à nouveau en compagnie de responsables de la C.G.T., il est déféré devant le tribunal militaire qui l'acquitte de l'accusation de reconstitution d'un parti dissous. Le 30 novembre 1940, troisième arrestation. Cette fois-ci, il est libéré le 17 décembre pour raisons de santé.
Au printemps 1941, il est chargé de créer dans le département de l'Isère le Front National. Début 1942, il contribue à lancer l'organe clandestin du Front National Les Allobroges. La même année, il est désigné pour représenter le Parti communiste dans le comité départemental de « La France combattante » qui réunit différentes sensibilités de la Résistance. Pour avoir chanté La Marseillaise le 11 novembre, il est arrêté le 12 avec son frère, mais ils sont libérés sous la pression des habitants de Pont-en-Royans. En 1943, André Dufour passe dans la clandestinité. Il effectue différentes missions pour le compte de la délégation du Comité central en zone sud. Secrétaire régional du parti communiste dans le Gard en 1943 puis en Dordogne, il appartient à l'Etat-major départemental des F.T.P. A la Libération, après avoir suivi à Paris un stage d'un mois dans une Ecole centrale du Parti, il retrouve Grenoble en qualité de secrétaire régional et prend la direction du Travailleur Alpin.
Sa participation courageuse à la Résistance et la confiance qu'il inspire au Parti l'autorisent à glaner les mandats électifs. Conseiller municipal de Grenoble de juin 1945 à janvier 1959, deuxième adjoint au maire de 1945 à 1947, il se présente aux élections à la première Assemblée nationale Constituante le 21 octobre 1945.
La liste communiste et d'union républicaine et résistante conduite par Joanny Berlioz obient 81 671 voix sur 264 068 suffrages exprimés et deux élus. André Dufour est nommé membre de la Commission de la famille, de la population et de la santé publique, de la Commission des pensions civiles et militaires et des victimes de guerre et de la répression et de la Commission de la comptabilité. Le 2 juin 1946 aux élections à la seconde Constituante, André Dufour occupe toujours la deuxième place sur la liste communiste. Celle-ci avec 71 447 voix sur 257 421 recule légèrement. Au Palais Bourbon, il siège dans les mêmes commissions.
Après l'adoption du second projet constitutionnel, André Dufour se présente à nouveau aux suffrages de ses concitoyens de l'Isère. 82 020 voix sur 243 662 se portent sur la liste du Parti communiste et d'Union républicaine et résistante qui améliore cette fois-ci son score.
Sous la première législature de la Quatrième République, André Dufour est nommé membre des Commissions des pensions et de la comptabilité. Il est du reste élu secrétaire de celle-ci entre 1946 et 1949. Il participe aussi aux travaux de la Commission des moyens de communication et du tourisme et est élu vice-président de la Commission de la comptabilité en 1951. Il est enfin juge suppléant à la Haute-Cour de justice. Il dépose sur le bureau de l'Assemblée de nombreux rapports, propositions de loi et de résolution, notamment pour défendre les intérêts des victimes de la guerre et ceux de ses mandants. Ses interventions complètent son action dans ce sens. Ainsi, le 21 juillet 1947, s'oppose-t-il à la réduction de l'allocation destinée aux réfugiés et aux sinistrés nécessiteux. Le 24 juin 1948, il insiste sur la nécessité d'apporter des secours de première urgence aux victimes des inondations de l'Isère. Enfin, le 21 septembre 1948, à l'occasion de la discussion du projet de loi portant statut du personnel de la police, André Dufour fait le procès de l'attitude des forces de l'ordre lors des affrontements qui ont opposé à Grenoble les « nervis » du R.P.F. et les contre-manifestants des « organisations de Résistance et démocratiques ». André Dufour refuse de quitter la tribune après que le président lui a retiré la parole. Celui-ci décide alors de suspendre la séance, ce qui contraint le député de Grenoble à développer le lendemain son intervention sur le thème de la complicité du gouvernement avec le R.P.F. Il demande la dissolution des « groupes paramilitaires de guerre civile » du Rassemblement.
Le 17 juin 1951, André Dufour conduit la liste d'Union républicaine résistante et antifasciste pour l'Indépendance nationale, le Pain, la Liberté et la Paix, présentée par le Parti communiste français. Son score (85 524 voix sur 250 742 suffrages exprimés) interdit aux listes de la Troisième force qui se sont apparentées de se partager les sièges. Trois communistes sont donc élus à la représentation proportionnelle.
André Dufour siège dans les mêmes commissions que sous la précédente législature. Il est, en outre, nommé en 1955 secrétaire de la Commission interparlementaire chargée d'étudier la simplification des formalités de frontières pour les voyageurs, leurs bagages et leurs véhicules automobiles. Sous cette législature, il apparaît comme un des membres les plus actifs du groupe communiste multipliant rapports, propositions de loi et de résolution à caractère social. Le 12 décembre 1951, lors de la discussion du projet de loi relatif au développement des crédits de fonctionnement de l'Aviation civile et commerciale, il dépose un amendement visant à réduire de 14 millions des crédits destinés à la guerre d'Indochine. Le 25 janvier 1952, le résistant qu'il a été dépose une demande d'interpellation sur la restitution totale de ses biens au journal Le Petit Dauphinois qu'il présente comme ayant collaboré avec Vichy. Le 2 décembre de la même année, il proteste contre la décision prise de ne pas accorder la carte de déporté et interné de la Résistance aux victimes de la répression de la manifestation patriotique qui avait eu lieu à Grenoble le 11 novembre 1943.
A la suite de la dissolution de l'Assemblée nationale le 2 décembre 1955, André Dufour conduit à nouveau la liste du Parti communiste français. Avec 82190 voix sur 284 178 suffrages exprimés, elle enregistre un léger recul qui ne lui interdit pas néanmoins de conserver trois élus. Aucun apparentement n'avait été conclu.
André Dufour est nommé membre de la Commission des moyens de communication et du tourisme, de la Commission des pensions et de la comptabilité dont il est élu vice-président en 1956 et en 1957. Sous cette législature, il continue à voter lors des principaux scrutins en conformité avec les orientations de son groupe. Le 26 mars 1958, il intervient au sujet du montant des indemnités allouées aux tuberculeux. Sa maladie avait décidé de son engagement politique. Symboliquement, la défense de ses compagnons d'infortune fait l'objet de sa dernière intervention à la tribune.
Il s'oppose au retour au pouvoir du général de Gaulle et ne lui accorde pas la confiance le 1er juin. Il refuse les pleins pouvoirs à son gouvernement et la réforme constitutionnelle le 2 juin.