Jean-Baptiste Dumay

1841 - 1926

Informations générales
  • Né le 10 septembre 1841 à Le creusot (Saône-et-Loire - France)
  • Décédé le 27 avril 1926 à Paris (Seine - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
Ve législature
Mandat
Du 6 octobre 1889 au 14 octobre 1893
Département
Seine
Groupe
Non inscrit

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1889 à 1940 (Jean Jolly)

Né le 10 septembre 1841 au Creusot (Saône-et-Loire), mort le 27 avril 1926 à Paris.

Député de la Seine de 1889 à 1893.

Fils d'un mineur bourguignon tué accidentellement dans une galerie, Jean-Baptiste Dumay eut une enfance rude, subissant avec résignation la misère. Il devint apprenti tourneur sur métaux aux usines Schneider dès l'âge de 14 ans. A 17 ans, il quitta Le Creusot pour faire son « tour de France », puis il revint en 1868 chez Schneider. Il animait un groupe de jeunes ouvriers et de petits commerçants et artisans, lequel avait pris le nom de « Cercle d'études sociales » et faisait une active propagande républicaine et antischneiderienne. Dumay fut l'organisateur des grèves de 1870, à la suite desquelles fut constituée au Creusot une section de l'Internationale.

Lors de la campagne du plébiscite de 1870, il fait parti du comité antiplébiscitaire et, le 1er mai, les résultats du Creusot sont les suivants : 3.400 « non » contre 1.500 « oui », Dumay est alors renvoyé de l'usine.

En juin, il se présente au conseil d'arrondissement contre Henri Schneider fils, mais n'obtient que 500 voix contre 5.000 à son adversaire.

Après la déclaration de guerre du 19 juillet, il va à Paris prendre contact avec les dirigeants de l'Internationale et assiste aux manifestations contre la guerre. Le 8 août, il organise, à son tour, une manifestation de la section de l'Internationale du Creusot. Aux élections municipales qui suivent, il présente une liste contre celle d'Eugène Schneider père ; cette dernière l'emporte largement, mais le conseil municipal a tout juste le temps de s'installer le 2 septembre : deux jours après l'Empire est renversé et Eugène Schneider, qui était président du corps législatif, s'exile en Angleterre.

La lutte pour le pouvoir local s'engage au Creusot entre les démocrates et les conservateurs. Les premiers organisent de fréquentes réunions publiques et s'imposent au Comité de défense nationale dont Dumay devient président. Le préfet, tenant compte de l'état d'esprit de la population, le nomme maire provisoire, le 24 septembre. Mettant au premier plan le danger prussien, Dumay propose une sorte d'union sacrée « Trêve de divisions parmi nous, les hasards de la guerre peuvent amener l'ennemi aux confins du département et, ce jour-là, il nous faudra marcher tous ensemble et faire acte de fraternité ». Mais Gambetta, Ministre de l'Intérieur, s'est laissé persuader, par une délégation de la Société Schneider, que le remplacement du Conseil municipal déchaînerait une agitation révolutionnaire susceptible de paralyser la marche de l'usine qui fabrique des armes pour la défense du pays. Il maintient donc le Conseil, composé des membres de l'état-major de Schneider qui refusent les quelques mesures sociales proposées par Dumay.

Aux élections générales législatives du 8 février 1871, Dumay est candidat en Saône-et-Loire sur la liste républicaine : elle remporte au Creusot 77 % des suffrages, mais les paysans votent en masse pour la liste conservatrice qui l'emporte dans l'ensemble du département.

Avant d'évacuer la Côte d'Or, Garibaldi avait satisfait à une demande de Dumay en lui faisant remettre environ 4.000 fusils et 4.000 kilogrammes de cartouches pour armer la garde nationale.

A la suite de troubles survenus au Creusot le 26 février, le Gouvernement Thiers décide d'y envoyer des troupes. Puis, le 12 mars, il révoque le Commissaire de police pour le remplacer par l'ex-commissaire de l'Empire : Dumay envoie une protestation énergique au Ministre de l'Intérieur et le Gouvernement annule cette nomination.

C'est à Arnay-le-Duc, où il est allé le 19 mars faire une conférence aux ouvriers d'une fabrique de limes, que Dumay apprend que, la veille, le peuple de Paris s'est soulevé contre le Gouvernement Thiers. Le lendemain, le Comité républicain socialiste du Creusot décide d'organiser, pour le 26 mars, une revue de la garde nationale et une manifestation en faveur de Paris. Le 25 mars, arrive Albert Leblanc, délégué en province par le Comité central de la Garde nationale de Paris qui, après avoir raconté la proclamation de la Commune à Paris, Lyon et Saint-Etienne, incite les Creusotins à la proclamer à leur tour. Le 26 mars, une échauffourée est sur le point d'éclater sur la place de la mairie, entre les gardes nationaux et les soldats, mais tous finissent par fraterniser aux cris de « Vive la République » et le colonel fait retirer ses troupes. Dumay apparaît alors à une fenêtre du premier étage de la mairie et proclame : « Je ne suis plus le représentant du Gouvernement de Versailles, je suis le représentant de la Commune du Creusot » mais, lorsque, dans la nuit, il veut faire occuper par les gardes nationaux la gare, le télégraphe et la poste ces trois établissements sont déjà tenus par la troupe : c'est l'échec. Le matin du 27, le préfet et le Parquet arrivent par le train avec un renfort de mille soldats : les réunions sont interdites et des mandats d'arrêt sont lancés contre les chefs du mouvement. Quelques manifestations ont lieu en faveur de Dumay et de la Commune, mais elles sont dispersées et, le lendemain, le calme est définitivement rétabli. La plupart des dirigeants du Comité républicain-socialiste réussissent à gagner Genève ; quelques-uns sont emprisonnés ; Dumay se cache au Creusot même.

Le 30 avril ont lieu les élections municipales. Henri Schneider et Dumay, toujours dans la clandestinité, conduisent les deux listes qui s'opposent : Au premier tour, il ne manque que 16 voix aux candidats de la liste Dumay pour être tous élus, mais, avant le second tour, une centaine d'ouvriers sont renvoyés de l'usine et la liste Schneider passe tout entière.

Après l'écrasement de la Commune de Paris, Dumay gagne à son tour Genève. Les 28 et 29 juin, la Cour d'assises de Châlon juge vingt-deux Creusotins accusés d'avoir excité à la guerre civile : Dumay est condamné par contumace, aux travaux forcés à perpétuité.

A Genève, il est avec Malon et Guesde, l'un des fondateurs de la section de propagande et d'action révolutionnaire socialiste qui se rangea aux côtés de Bakounine et adhéra à la Fédération jurassienne. Il travailla à la percée du tunnel du Saint-Gothard.

Rentré en France après l'amnistie, en 1880, il fonda au Creusot la Fédération ouvrière de Saône-et-Loire et lança la grève de Montceau-les-Mines.

Mis à l'index par tous les patrons du département, il vient habiter Paris en 1882.

Aux élections municipales de 1884, il se présente, dans le quartier de Belleville comme candidat du parti ouvrier socialiste révolutionnaire, mais il est battu par le conseiller sortant, Braleret ; en 1887, il est élu par le même quartier et il siège à l'Hôtel de Ville, dans la fraction socialiste, jusqu'en 1890.

Lors des élections générales législatives des 22 septembre et 6 octobre 1889, il pose sa candidature dans la première circonscription du 20e arrondissement de Paris. Au premier tour de scrutin, il obtient 2.468 voix contre 2.060 à Sigismond Lacroix, 1.358 à Camelinat, 592 à Susini et 132 à Blampain ; au second tour, il est élu avec 5.584 voix contre 72 à Blampain. Rochefort avait obtenu 4.048 voix mais il était inéligible. Au Palais Bourbon, Dumay ne se fit inscrire à aucun groupe. Il fut membre de diverses Commissions notamment de la Commission chargée de la réglementation du travail et de la Commission d'enquête sur l'affaire de Panama.

Il déposa diverses propositions de loi portant abrogation de la loi contre les affiliés de l'Association internationale des travailleurs (1889), relative au placement des employés et ouvriers de toutes professions (1889), tendant à la suppression de l'article 13 de la loi organique du 13 novembre 1875 relatif à la non-validité du mandat impératif (1890), concernant l'église du Sacré-Cœur de Montmartre (1891), concernant la Banque de France (1891), tendant à l'organisation à Paris d'une exposition internationale des engins propres à éviter les accidents dans les mines et l'industrie (1891), tendant à l'abrogation des articles 414 et 415 du Code pénal relatifs aux atteintes à la liberté du travail (1891).

Ses interventions en séance publique furent trop nombreuses pour qu'on puisse les énumérer. Elles eurent trait principalement à la défense des droits syndicaux des travailleurs, à leur sécurité, aux mesures prises contre les grévistes. Dans le domaine de la politique générale, il interpella le Gouvernement sur la mise en liberté du duc d'Orléans (1890), prit part à la discussion d'une interpellation relative aux menées boulangistes (1890) ; demanda, au cours de la discussion du budget de l'exercice 1892, la suppression de l'ambassade près du Vatican et la suppression des pensions de la Pairie et de l'ancien Sénat (1891), se prononça pour la transformation de la Banque de France en banque d'Etat (1892).

Aux élections générales des 20 août et 3 septembre 1893, Dumay ne se représenta pas à Paris. Il donna sa démission de membre du Parti ouvrier et se présenta comme socialiste indépendant dans la première circonscription de Saint-Etienne : au premier tour de scrutin, Oriol, candidat opportuniste, venait en tête avec 5.972 voix contre 4.276 voix à Dumay et 1.756 à Fontaney ; au second tour, Oriol l'emporta avec 5.118 voix contre 4.891 à Dumay.

Celui-ci devient alors comptable à la mairie de Saint-Ouen, puis, lorsque la Bourse du Travail de Paris - fermée en 1893 sous le Ministère Dupuy- fut rouverte en 1896 avec une nouvelle réglementation, il fut nommé, sur proposition de la Commission du travail du Conseil municipal, régisseur-comptable. Il prit sa retraite en 1906 et mourut à Paris le 27 avril 1926 à l'âge de 85 ans.

Il avait publié en 1882 un ouvrage Un fief capitaliste : Le Creusot. Il a laissé des mémoires et une correspondance qui sont encore inédits, mais qui vont être édités par les soins de M. Pierre Ponsot, agrégé de l'Université, attaché au Centre national de la recherche scientifique.

Une rue dans le quartier de Belleville à Paris, et une rue au Creusot, rappellent le nom de Jean-Baptiste Dumay.