Roger, Armand Dusseaulx
1913 - 1988
Né le 18 juillet 1913 à Paris 12e
Décédé le 28 mai 1988 à Rosay-sur-Lieure (Eure)
Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale Constituante (Seine inférieure)
Député de la Seine inférieure de 1946 à 1951
Roger Dusseaulx est issu du milieu des artisans du 12e arrondissement de Paris. Après ses études secondaires, il s'oriente vers le diplôme d'ingénieur agricole, mais exerce la profession d'assureur conseil, de conseiller juridique et d'expert auprès des tribunaux. Sa conduite pendant la guerre lui vaut la Médaille de la Résistance. Il commence sa carrière politique sous les auspices du M.R.P. dont il conduit la liste dans la première circonscription de la Seine inférieure aux élections à la première Constituante. Le nouveau parti arrive en quatrième position avec 27 343 voix, derrière les listes communiste (51 456 suffrages), d'Entente républicaine conduite par Jacques Chastellain (39 802 voix) et socialiste (38 152 voix). Roger Dusseaulx est donc le seul élu de sa liste.
Pendant ce premier mandat, Roger Dusseaulx est membre de la Commission des affaires économiques et de celle de la presse. Il dépose une proposition de résolution invitant le gouvernement à déposer un projet de loi assurant aux agriculteurs victimes de réquisition de chevaux des facilités pour la reconstitution de leur cheptel chevalin et des indemnités compensatrices. Ses deux autres propositions de loi traitent également de problèmes économiques liés à la reconstruction. Dans les débats, il participe à trois discussions importantes : celle du budget de la presse, celle de la nationalisation de l'électricité et du gaz, celle concernant la dévolution des biens des entreprises de presse. Dans la première, le 29 décembre 1945, il critique les augmentations injustifiées à son avis de certains chapitres du budget du ministère de l'Information. Au cours de la dernière, il annonce que son mouvement ne pourra voter le projet en l'état car de nombreux points soulevés par son parti n'ont pas été pris en compte dans la rédaction du texte. Il se prononce donc pour l'abstention dans le souci de défendre la presse issue de la Résistance.
Pour la seconde Constituante, Roger Dusseaulx conduit à nouveau la liste démocrate-chrétienne et améliore sensiblement son score avec 41 959 suffrages puisqu'il passe en seconde position derrière la liste communiste (57 855 voix) mais devance la liste de Jacques Chastellain (36 847 voix) et les listes radicale (35 544 voix) et socialiste (33 171). Ses activités parlementaires restent liées aux problèmes économiques puisqu'il siège à la Commission des finances et à celle des affaires économiques, des douanes et conventions commerciales. Il ne participe que brièvement aux débats pour déposer des amendements au projet de loi de finances.
Les mêmes leaders se retrouvent pour les premières législatives de la IVe République, même si, entre temps, Roger Dusseaulx a conquis un mandat de conseiller municipal de Paris. Tous les partis, sauf le Parti communiste, connaissent un tassement de leur audience, seul reste inchangé l'ordre des résultats. Le M.R.P. est toujours en deuxième position avec 39 370 voix (2 000 en moins par rapport au précédent scrutin) derrière les communistes qui retrouvent leurs deux sièges avec 62 496 voix (5 000 voix de plus) et devant les autres listes. Pendant la première législature, Roger Dusseaulx retrouve ses fonctions à la Commission des finances dont il devient le secrétaire en 1950. Il est en outre désigné par cette commission pour représenter l'Assemblée nationale au Fonds d'encouragement à la production textile. Parlementaire actif, dans ses initiatives écrites comme dans ses interventions orales. Roger Dusseaulx dépose de nombreuses propositions de loi dont plusieurs concernent le prélèvement exceptionnel de lutte contre l'inflation. Il rédige chaque année une partie du rapport de la Commission des finances sur le budget de l'année. Il est aussi amené de ce fait à régulièrement prendre part aux discussions des différents budgets ministériels. Parmi ses interventions les plus significatives, on peut citer celle du 5 juillet 1948 où il s'inquiète de la complication du mécanisme d'application du plan Marshall et plaide pour l'unité européenne afin de faciliter la reconstruction. Le 29 mai 1949, il s'inquiète de la dérive financière que connaît le pays en raison des prélèvements exceptionnels toujours reconduits et des charges sans cesse accrues qui s'ajoutent, comme le déficit de la S.N.C.F. et le coût de la guerre d'Indochine. Il critique aussi les incertitudes des prévisions chiffrées avancées par le gouvernement et l'absence de détail dans leur composition qui privent le Parlement d'éléments d'appréciation. Il préconise pour finir une politique qui rompe avec la facilité qui prévaut depuis la Libération. Celle-ci ne pourra bientôt plus continuer faute de nouvelles recettes fiscales. Ces remarques reviennent régulièrement en termes similaires à chaque nouvelle discussion budgétaire.
Lors des législatives de 1951, Roger Dusseaulx a rompu avec son premier parti pour rallier le parti fondé par le Général de Gaulle, le R.P.F. La première circonscription de la Seine inférieure connaît la situation générale de presque tous les départements français. Une liste communiste et une liste R.P.F. tentent d'empêcher les listes apparentées (S.F.I.O., radicaux-socialistes, M.R.P. et républicains indépendants) d'obtenir la majorité absolue et ainsi tous les sièges conformément à la loi électorale votée peu auparavant. La subtilité du système se double ici d'un débat sur la notion de majorité absolue. Les premiers résultats proclamés par la Commission du recensement général des votes déjouaient le calcul des partis de la troisième force. Ceux-ci, selon la définition adoptée par cette commission, manquaient de peu la majorité absolue puisqu'ils avaient 97 243 voix pour une majorité requise de 97 347, soit exactement 104 de moins. En fonction de cette première définition, les deux députés sortants communistes et Roger Dusseaulx (34 406 voix) étaient reconduits. La majorité de l'Assemblée nationale a cependant tranché en sens inverse au terme d'un vif débat opposant des juristes de haut niveau comme Marcel Prelot et Pierre-Henri Teitgen. Contre l'avis du premier, rapporteur des opérations électorales en Seine inférieure, elle décide finalement, le 26 juillet 1951, de changer la liste des élus par 292 voix contre 196, en fonction d'une autre définition de la majorité absolue reposant sur la moyenne des suffrages de liste ce qui abaissait la barre à 96 220 voix. Les trois sortants cités sont ainsi remplacés par le chef de file du M.R.P., Jean Lecanuet, et les seconds des listes radicale et d'entente républicaine, pourtant détenteurs d'un moindre capital de voix que les premiers élus. Les thèses défendues par le Général de Gaulle et ses partisans contre le régime des partis étaient ainsi illustrées par cette manœuvre électorale au subtil habillage juridique. En compensation, Roger Dusseaulx est élu à l'Assemblée de l'Union française où il siège de 1952 à 1958, avant de retrouver le chemin des mandats législatifs et même des portefeuilles ministériels après 1958.
DUSSEAULX (Roger, Armand)
Né le 18 juillet 1913 à Paris-12ème
Décédé le 28 mai 1988 à Rosay-sur-Lieure (Eure)
Membre de la première assemblée nationale constituante (Seine-Inférieure)
Membre de la seconde assemblée nationale constituante (Seine-Inférieure)
Député de la Seine-inférieure puis de la Seine-Maritime de 1946 à 1951 et de 1958 à 1973
Ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement du 15 avril au 16 mai 1962
Ministre des travaux publics et des transports du 16 mai au 28 novembre 1962
Conseiller de l’Union française depuis juillet 1952, Roger Dusseaulx préside la Commission pour les affaires économiques au sein de cette Assemblée à partir de 1954. Il obtient l’investiture de l’Union pour la nouvelle République (UNR) pour concourir aux élections législatives des 23 et 30 novembre 1958 dans la 1ère circonscription de Seine-Maritime. Il se félicite dans sa profession de foi électorale du retour au « scrutin uninominal ». Roger Dusseaulx rappelle que « placé en tête des candidats nationaux » le 17 juin 1951, il n’avait pourtant pas été réélu en raison du système des apparentements, qu’il qualifie de « sordide(…) combinaison(…) ». Ses propos ne sont, en l’espèce, pas tout-à-fait exacts. La liste du RPF, qu’il conduisait, était certes arrivée en tête du scrutin de juin 1951, communistes exceptés, avec 17,6% des suffrages exprimés. Mais les électeurs avaient, à l’époque, la possibilité d’émettre un vote préférentiel. Or, à titre personnel, Roger Dusseaulx avait obtenu 34406 voix, soit 610 de moins que le maire de Rouen Jacques Chastellain, qui conduisait la liste des Indépendants et paysans. En novembre 1958, Roger Dusseaulx s’engage dans ses documents électoraux à « défendre les nouvelles institutions républicaines » et à « empêcher le retour au « Système » » qui a « conduit le pays au bord de la guerre civile ». Le terme de « Système » est utilisé par les gaullistes dans les années 1950 pour qualifier les institutions de la IVème République et leur fonctionnement. L’ancien député de la Seine-Inférieure (le département a pris le nom de Seine-Maritime en 1955) affiche en outre son attachement aux « libertés républicaines », au « respect des croyances » et à « la sauvegarde de la personne humaine ».
Il a pour principaux adversaires le MRP Jean Lecanuet et l’Indépendant Bernard Tissot, qui a succédé à Jacques Chastellain comme maire de Rouen en mars 1958. Le seul candidat sortant est René Tamarelle, maire de Bihorel, élu comme poujadiste le 2 janvier 1956, et qui se présente désormais comme candidat « chrétien indépendant ». Au soir du 23 novembre 1958, Bernard Tissot (20,3%) devance dans les urnes Roger Dusseaulx (19,4%), Jean Lecanuet (18,3%) et le communiste Victor Blot (17,8%). Dans le détail, les cantons de Rouen-II et Rouen-IV donnent la préférence à Bernard Tissot, qui y recueille respectivement 24,9% et 23,1% des voix, alors que le canton de Rouen-IV lui préfère Victor Blot (27,2%). Le canton de Darnétal place en revanche Roger Dusseaulx en tête avec 23,6%. C’est ce dernier qui est élu député par la 1ère circonscription de la Seine-Maritime une semaine plus tard, dans le cadre d’une quadrangulaire. Le candidat gaulliste a bénéficié de bons reports de voix venant d’une gauche modérée dont les trois candidats « pesaient » 19,3% des voix au premier tour. Il l’emporte avec 30,5% des suffrages exprimés, contre 23,9% pour Bernard Tissot, 23,3% pour le candidat communiste et 22,4% en faveur de Jean Lecanuet.
Roger Dusseaulx s’inscrit au groupe de l’UNR et siège à la Commission des finances, de l’économie générale et du Plan sous la première législature de la Vème République. Il est outre élu membre du Sénat de la Communauté le 8 juillet 1959 et appartient au Comité directeur du fonds d’aide et de coopération à partir de décembre 1960. Très actif à l’Assemblée nationale, Roger Dusseaulx s’intéresse en particulier aux secteurs de l’énergie et des transports. Lors de la discussion du budget des voies navigables et des ports pour 1960, il observe d’abord qu’« un budget n’est pas seulement la reconduction d’opérations engagées, prolongées par une loi de programme » mais qu’il se présente aussi comme « la photographie d’une politique ». C’est fort de ce constat qu’il appelle de ses vœux une véritable « politique portuaire » qui permette à la France de rivaliser avec la Belgique (Anvers), les Pays-Bas (Rotterdam) ou l’Allemagne (Hambourg). Le député rouennais suggère de lutter contre le morcellement des cargaisons et d’ « avoir le courage de dire que les ports français ont chacun des vocations particulières ». Il plaide en outre pour la détermination des tarifs de péage à l’échelle nationale (19 novembre 1959). Lors du débat qui suit la communication du Gouvernement relative à la politique de l’énergie, le 10 décembre 1959, il marque ses distances avec les projets de l’exécutif. Ceux-ci consistent à « réduire au maximum » les importations de charbon « dans les périodes où l’énergie ne manque pas en France pour éventuellement pouvoir (…) les accroître en cas de besoin ». Roger Dusseaulx pense au contraire utile de « diversifier les sources d’énergie » et de « conserver un courant d’importation étrangère ». La question touche de très près sa circonscription de Seine-Maritime : c’est notamment par le port de Rouen que le charbon polonais est alors importé en France. Un an plus tard, il plaide devant ses collègues en faveur d’une baisse du prix de l’essence et rappelle que « dans le cadre du quatrième plan quadriennal en cours de préparation, le développement annuel de l’industrie automobile doit être de l’ordre de 11 à 12 p. 100 ». Or, Roger Dusseaux constate que « les prix à la pompe » de l’essence « ont augmenté de 22% » au cours des années précédentes, ce qui exerce une pression négative sur le marché de l’automobile (8 novembre 1960).
Adjoint au maire de Rouen depuis mars 1959, le député de la Seine-Maritime se préoccupe des problèmes du logement et de la construction et souhaite que la lutte contre les taudis devienne une priorité (3 novembre 1960). Cet ancien Conseiller de l’Union française s’impose aussi comme un bon connaisseur des problèmes de Coopération. A l’été 1960, il appartient à la Commission spéciale chargée de l’examen des projets de loi autorisant la ratification des accords passés entre la France et trois anciens territoires de l’Union française : la Fédération du Mali d’une part, qui regroupe jusqu’en septembre 1960 le Sénégal et l’ancien Soudan français, et la République malgache d’autre part. Rapporteur de ces textes devant l’Assemblée nationale, Roger Dusseaulx souligne qu’il est nécessaire de donner au plus vite un contenu politique concret à la Communauté. La constitution d’un « sénat interparlementaire » qui suivrait « l’évolution de la Communauté telle qu’elle e dessinera dans les conférences des chefs d’Etat et des chefs de gouvernement » lui apparaît ainsi comme une nécessité. Il demande de plus « au Gouvernement français d’insister auprès du Gouvernement du Mali pour que sa politique étrangère soit clairement définie comme celle de tous les états modernes » (séance du 6 juillet 1960).
Roger Dusseaulx succède à Jacques Richard comme secrétaire général de l’Union pour la Nouvelle république (UNR) au printemps 1961. Soucieux, comme son prédécesseur, d’ouvrir l’UNR sur le monde économique et social, il s’efforce –vainement- de structurer la formation gaulliste sur un modèle qui rappelle le Rassemblement du peuple français (RPF). Le député rouennais voit dans le soutien de l’action gouvernementale la raison d’être de l’UNR. Il n’entend pas en faire une force de proposition s’autorisant une certaine autonomie par rapport à l’exécutif, ambition qu’avait pu nourrir avant lui Albin Chalandon, secrétaire général de l’UNR en 1959. Le contexte de la fin de la guerre d’Algérie, qui voit la création de l’Organisation Armée secrète (OAS) en février 1961, impose en effet aux gaullistes de serrer les rangs. Si Roger Dusseaulx prend la parole dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale le 21 mars 1962, trois jours après la signature des accords d’Evian, c’est pour critiquer très durement une OAS qui « n’offre rien à la France, ni à l’Algérie, que le désordre et la mort ». A Jean-Marie Le Pen, alors député de la Seine, qui croit au « miracle » en Algérie et au retour des conditions de l’intégration, l’élu normand objecte qu’ « un homme politique ne saurait se déterminer sur un éventuel miracle », ni « ne peut surtout justifier les crimes qui créeraient ce miracle ». Il rend hommage, au nom de l’UNR, aux négociateurs des accords d’Evian, « qui ont su obtenir ce que tout le monde déclarait ne pouvoir envisager dans le climat de lutte fratricide que nous subissions depuis sept ans ». Roger Dusseaulx approuve la déclaration de politique générale de Michel Debré (15 octobre 1959). Il soutient la loi réformant le financement de l’enseignement privé (23 décembre 1959) et accorde les pouvoirs spéciaux au Gouvernement pour rétablir l’ordre en Algérie au lendemain de la semaine des barricades (2 février 1960).
Considéré comme un « homme sûr » et d’une fidélité à toutes épreuves, le député de Seine-Maritime est choisi pour occuper le ministère des relations avec le Parlement dans le premier cabinet de Georges Pompidou, en avril 1962. Il est remplacé par son suppléant François Codet sur les bancs du Palais-Bourbon et par Louis Terrenoire à la tête de l’UNR. Quelques semaines plus tard, le ministre des travaux publics et des transports Robert Buron démissionne du Gouvernement, comme les autres ministres issus du MRP : ils entendent protester contre les termes utilisés par de Gaulle dans la conférence de presse du 15 mai 1962 pour éclairer sa vision de la construction européenne. Roger Dusseaulx remplace alors Robert Buron au ministère des Travaux publics et des transports. Après l’adoption de la motion de censure du 4 octobre 1962 et la dissolution de l’Assemblée nationale, il se présente aux élections législatives des 18 et 25 novembre 1962. Son suppléant François Codet étant décédé quelques jours plus tôt, il est secondé par Jean Flament, ancien de la France Libre, désormais conseiller municipal de Rouen. Parmi leurs concurrents figure Michel Bérégovoy, candidat du Parti socialiste unifié (PSU) et futur député socialiste de la Seine-Maritime. Il ne manque que 169 voix à Roger Dusseaulx pour l’emporter dès le premier tour de scrutin. Il obtient en effet 49,6% des suffrages exprimés. Le ministre des Travaux publics et des transports retrouve son siège de député une semaine plus tard grâce au soutien de 57,9% des électeurs, dans le cadre d’une triangulaire qui l’oppose au communiste Victor Blot (30,1%) et au conseiller général MRP Jacques Lemonnier Leblanc (12%).
Roger Dusseaulx ne fait pas partie du deuxième gouvernement Pompidou en décembre 1962. Il occupe un poste-clef au début de la seconde législature puisqu’il est porté à la présidence du groupe UNR-UDT à l’Assemblée nationale. Le député rouennais ne conserve toutefois cette responsabilité que cinq mois. Il est remplacé par Henry Rey, député de la Loire-Atlantique, en mai 1963. Son parcours au sein des commissions permanentes entre 1962 et 1967 est assez complexe. Il siège à la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République en décembre 1962-janvier 1963, puis brièvement à la Commission des affaires étrangères en mai 1963. Membre de la Commission de la Production et des échanges d’avril 1964 à juin 1965, il retrouve ensuite la Commission des affaires étrangères, qu’il quitte en avril 1966 pour celle des finances, de l’économie générale et du Plan.
De l’automne 1962 au printemps 1963, ses fonctions de président de groupe conduisent Roger Dusseaulx à prononcer au Palais-Bourbon des discours au ton très « politique ». Quand le socialiste André Chandernagor s’émeut, par le biais d’un rappel au règlement, le 13 décembre 1962, des places attribuées à l’opposition dans l’hémicycle, Roger Dusseaulx lui répond que l’UNR-UDT, « loin de vouloir imposer une dictature (…), [a] voulu montrer (…) que certaines notions sont dépassées », comme celles de droite et de gauche. Il ajoute que les gaullistes n’ont d’autres objectifs que « l’ordre républicain » et « la démocratie ouverte ». Lors de la même séance publique, il réagit à la déclaration de politique générale de Georges Pompidou au nom du groupe UNR-UDT. Après s’être réjoui que les Français aient manifesté leur soutien au général de Gaulle et à sa politique, il s’engage à « respecter(…) toujours les droits de l’opposition » mais se dit résolu « à affirmer les droits de la majorité ». Roger Dusseaulx reprend pour l’essentiel les sujets développés par Georges Pompidou, pour exprimer son soutien au Premier ministre, mais sans abdiquer tout capacité d’initiative des parlementaires. Il invite le Gouvernement à accepter « l’inscription à l’ordre du jour des propositions [de lois]» et lui suggère notamment de donner « une grande importance (…) aux problèmes de la vieillesse » et de « la simple subsistance des personnes devenues infirmes ou impotentes ». La discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1963 lui donne l’occasion de mettre en valeur l’action du Gouvernement en matières sociale et culturelle. Il affirme que « les dépenses d’action culturelle et d’enseignement se sont accrues de 71% » et que « les dépenses d’action sociale ont enregistré un accroissement de 54% » depuis 1958 (25 janvier 1963).
Roger Dusseaulx renoue avec ses sujets de prédilection après avoir quitté la présidence du groupe UNR-UDT à l’Assemblée nationale. Rapporteur pour avis du budget des Travaux publics et des transports pour 1965 au nom de la commission de la production, il estime possible de mettre en œuvre un grand programme de liaisons fluviales « dans le cadre du Vème Plan » et évoque notamment « la liaison Seine-Moselle » ou celle de la mer du Nord et de la Méditerranée. Il déplore en outre l’« insuffisance des crédits » consacrés à l’entretien des ports (séance du 4 novembre 1964). Il défend le projet de loi sur les ports maritimes autonomes en qualité de rapporteur au printemps 1965. Roger Dusseaulx salue de ce texte le caractère opportun, alors que, jusque-là, « la France semblait se chercher une politique maritime, une politique portuaire, sans parvenir à la trouver vraiment ». Le projet examiné par l’Assemblée nationale les 8 et 9 avril 1965 prévoit la prise en charge par l’Etat de 80% des dépenses d’infrastructures de base des ports, contre 50% précédemment, et réforme la structure administrative des ports. Le député de Rouen souhaite à cet égard « que les représentants de l’Etat ne soient pas envahissants et laissent au sein des conseils d’administration une large place aux collectivités locales ». Rapporteur spécial du budget des charges communes pour 1967, Roger Dusseaulx regrette qu’y soient inscrits « des crédits pouvant parfaitement figurer dans d’autres fascicules budgétaires ». Les « charges communes » comprennent notamment la dette et les traitements de la fonction publique (4 novembre 1966). L’ancien ministre des Travaux publics et des transports autorise la ratification du traité de l’Elysée (13 juin 1963), consent à l’encadrement du droit de grève dans les services publics (26 juillet 1963) et vote en faveur de la transformation du service militaire en service national (26 mai 1965).
Candidat de l’UD-Vème République dans la 1ère circonscription de la Seine-Maritime en mars 1967, Roger Dusseaulx perd plus de 9% des voix au premier tour par rapport au scrutin de novembre 1962 (39,3% contre 49,6%). Il est toutefois réélu député le 12 mars 1967 avec 54,8% face au communiste Victor Blot.
Inscrit au groupe de l’UD-Vème République, le député de Seine-Maritime siège à la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales sous la troisième législature de la Vème République. Il dépose deux propositions de lois en 1967-1968. La première vise à instituer un crédit privé à l’élevage bovin, chevalin et ovin (19 avril 1967), quand la seconde tend à créer une promotion spéciale de la Légion d’honneur pour commémorer le cinquantième anniversaire de la victoire de 1918 (20 décembre 1967). Rapporteur pour avis du projet de loi de finances rectificative pour 1968, il remarque que le texte prévoit une augmentation de « l’allocation supplémentaire du fonds national de solidarité », une majoration du taux des allocations familiales ainsi que « des mesures importantes d’aide au logement ». Roger Dusseaulx ne vote pas la motion de censure déposée par l’opposition pour protester contre la volonté du gouvernement de légiférer par ordonnances en matières économique et sociale (9 juin 1967).
Au lendemain des événements de mai 1968 ont lieu de nouvelles élections législatives. Dans la première circonscription de Seine-Maritime, la concurrence au premier tour du centriste Jean Lecanuet, sénateur-maire de Rouen et ancien candidat aux élections présidentielles de décembre 1965, ne permet pas à Roger Dusseaulx de progresser beaucoup au premier tour, le 23 juin 1968, malgré une tendance très favorables aux gaullistes et aux Républicains indépendants. Avec 41,3% des voix, il devance Jean Lecanuet (26,2%) et le communiste Victor Blot (23,9%). Le député sortant l’emporte une semaine plus tard sur le candidat du PCF (63,5%).
Roger Dusseaulx appartient au groupe UDR et à la Commission des finances, de l’économie générale et du Plan de l’Assemblée nationale entre 1968 et 1973. Il est nommé membre du Conseil supérieur de l’enseignement supérieur et de la recherche en avril 1971. Outre deux lois déjà proposées à l’examen de ses collègues sous la législature précédente, il dépose une proposition de loi tendant à créer une carte nationale de priorité en faveur des personnes âgées (19 juillet 1968). Il envisage également de modifier le Code électoral afin de préciser la procédure relative aux pourvois formés contre les jugements rendus en matière électorale par les tribunaux d’instance (19 septembre 1969).
L’ancien secrétaire général de l’UNR prend la parole à 13 reprises dans l’hémicycle sous la quatrième législature. Toutes ses interventions se concentrent entre juillet 1968 et novembre 1971. Elles abordent des sujets très divers. Roger Dusseaulx fait entendre sa voix le 4 octobre 1968, lors de la discussion du projet de loi d’orientation de l’enseignement supérieur. Sa position est nuancée. Il comprend que « dans le texte même, (…) certains termes soient volontairement imprécis, vagues, choisis pour permettre que demain peut-être ils recouvrent des réalités différentes », mais espère qu’une « loi de programme » apportera rapidement « la perspective d’un financement à long terme » à la politique que défend Edgar Faure, ministre de l’Education nationale. Roger Dusseaulx enregistre « un certain nombre de coups de frein » dans le texte de loi par rapport aux déclarations d’Edgar Faure et en donne la liste : « coups de frein des droits acquis, des statuts antérieurs, des pouvoirs de contrôle de l’administration centrale, des impératifs de la centralisation financière, du domaine réservé » de certains ministères. Il craint que « l’autonomie interne reconnue aux universités ne soit quelque peu un leurre ». Notant que « de nombreux (…) crédits, notamment les crédits de construction, resteront directement dans les mains de l’administration centrale », il demande au Gouvernement d’avoir recours au « contrôle financier a posteriori » plutôt qu’a priori « chaque fois qu’il sera possible ». Favorable à une approche libérale des problèmes de l’enseignement supérieur, il rappelle néanmoins que « la première préoccupation » de l’opinion est « qu’il n’y ait pas de désordres à l’Université ». L’ancien ministre se dit très attaché au « respect de la liberté de ceux des étudiants, la plupart d’ailleurs, qui considèrent que la finalité c’est l’examen et le diplôme pour lequel ils travaillent et qui engage leur avenir ». Il approuve la « loi Faure », comme 440 autres députés, le 10 octobre 1968.
Rapporteur spécial des crédits affectés aux relations culturelles par le ministère des Affaires étrangères pour 1970 –il assume à nouveau cette responsabilité pour 1971- , Roger Dusseaulx se félicite du « regroupement, au sein d’une même direction générale, de toutes les actions qui touchent aux relations culturelles, techniques ou scientifiques ». Il formule, au nom de la Commission des finances, le même vœu de réorganisation administrative à propos du système d’attribution des bourses d’études ou de stage, qu’il juge trop compliqué (4 novembre 1969). Un an plus tard, le député normand parle de« distorsion quantitative » au sujet des efforts menés par la France en matière d’action culturelle. « 75% des personnels enseignants ou experts sont affectés en Afrique du Nord et dans pays de l’ancienne Indochine » et « 75% des crédits » sont en effet consacrés aux mêmes territoires. Il évoque de surcroît une véritable « coopération de substitution » à propos des relations entre la France et certaines de ses anciennes colonies : ce terme vaut pour les pays où Paris prend « en charge des secteurs entiers de l’activité administrative, économique et culturelle ». Pour Roger Dusseaulx, « cette coopération de substitution dépasse en définitive les moyens » de la France (séance publique du 5 novembre 1970).
Il s’affirme comme un partisan résolu de la régionalisation lors du débat sur les orientations du VIème Plan. A ses yeux, « si l’on veut mieux mobiliser l’épargne, orienter les disponibilités vers une bonne utilisation, éviter la thésaurisation dans le bas de laine, il faut reprendre l’idée de la régionalisation », abandonnée après l’échec du référendum d’avril 1969 (séance du 16 juin 1970). Rien de surprenant dès lors à ce qu’il approuve la création des régions le 27 avril 1972.
L’ancien ministre vote également la loi dite « anti-casseurs » (4 juin 1970) et la réforme du service national (10 juin 1970). Il approuve les déclarations de politique générale du Premier ministres Jacques Chaban-Delmas les 15 octobre 1970 et 24 mai 1972.
C’est affaibli par une série de défaites à l’échelle locale que Roger Dusseaulx sollicite le renouvellement de son mandat de député en mars 1973. Il a été battu aux cantonales de 1967, puis aux municipales de 1971 à Rouen. Le 4 mars 1973, c’est Jean Lecanuet, sénateur-maire centriste de la ville, qui arrive en tête avec 36,3% des voix dans la 1ère circonscription de Seine-Maritime. Roger Dusseaulx (24,2%) est second, devant son vieil adversaire communiste, Victor Blot. Le député sortant choisit de se retirer avant le scrutin décisif. Fort du soutien de 62,2% des électeurs, Jean Lecanuet lui succède à l’Assemblée nationale, le 11 mars 1973.
La carrière politique de Roger Dusseaulx est alors achevée. Il est nommé au Conseil économique et social de la région Haute-Normandie en décembre 1979 et meurt un peu plus de 8 ans plus tard, à l’âge de 74 ans. Il était médaillé de la Résistance.