Louis, Jean, Baptiste Aurelle de Paladines
1804 - 1877
Représentant à l'Assemblée nationale de 1871, puis sénateur inamovible, né au Malzieu (Lozère), le 9 janvier 1804, mort à Versailles, le 16 décembre 1877, sorti de l'école de Saint-Cyr en 1824 sans avoir obtenu aucun grade à cause de son insubordination, il dut s'engager comme simple soldat, et franchir tous les grades de la hiérarchie militaire.
Lieutenant en 1830, capitaine en 1834, chef de bataillon en 1843, lieutenant-colonel en 1847, il coopéra comme colonel à l'expédition de Rome, après avoir passé plusieurs années en Afrique. Il se fit ensuite remarquer, au 2 décembre 1851, par l'ardeur de son adhésion au coup d'Etat : vingt jours après, il était nommé général de brigade. Lors de la guerre de Crimée, à laquelle il prit part, il fut fait général de division. En 1859 (guerre d'Italie), il eut à s'occuper, comme commandant de la 9e division militaire à Marseille, de l'expédition des hommes et du matériel. Il fut, cette même année, nommé officier de la Légion d'honneur; il devint grand-croix en 1868.
Il se trouvait dans le chef-lieu des Bouches-du-Rhône en 1864, lorsque Napoléon III, se rendant en Algérie, passa en revue, dans la rade, une partie de l'escadre de la Méditerranée. Les journaux du temps racontent que le général d'Aurelle de Paladines avait pris place, pour assister à la fête nautique, sur une corvette avec les principales autorités de la ville. Au moment où cette corvette s'avançait vers le yacht impérial, elle fut heurtée perpendiculairement par un navire cuirassé qui la fendit en deux. Les autorités se sauvèrent comme elles purent. Quant au général, lancé violemment par dessus bord, il n'évita de se noyer qu'en s'accrochant à la gueule d'un canon, où il resta assez longtemps suspendu. L'aventure fit beaucoup de bruit à Marseille, ou l'on crut à de la malveillance de la part du commandant du navire cuirassé.
Dans les dernières années de l'Empire, le général d'Aurelle passait pour être moins bien en cour qu'au début du règne. Il allait entrer dans le cadre de réserve, au moment de la déclaration de guerre ; il fut rappelé à l'activité et replacé dans la 9e division militaire. La révolution du 4 Septembre et les démêlés qu'il eut avec M. Esquiros, préfet de la Défense nationale, obligèrent le général à quitter Marseille ; mais, après les défaites du général de La Motterouge près d'Orléans, un décret de la délégation de Tours (14 novembre 1871) lui confia le commandement de la 1re armée de la Loire. Il y débuta par un succès, la victoire de Coulmiers, qui fit naître de vives espérances, bientôt déçues. Le général d'Aurelle ne profita pas de sa victoire, et laissa reprendre Orléans ; les Prussiens, forcés d'abord de se retirer sur Saint-Péravy et sur Toury, reprirent l'offensive ; le général d'Aurelle battit en retraite à son tour, et la délégation de Tours elle-même dût se replier en toute hâte sur Bordeaux (9 décembre). Elle se montra exaspérée de cet échec inattendu, accusa le général d'Aurelle de n'avoir pas obéi aux pressantes dépêches qui lui enjoignaient d'arrêter son mouvement de retraite, et nomma une commission d'enquête chargée d'examiner sa conduite; en même temps, elle lui donnait pour remplaçant le général Chanzy. L'ancien commandant de l'Armée de la Loire réclama la juridiction du Conseil de guerre et se retira à Belley, dans l'Ain, après avoir donné sa démission.
Jusqu'à la fin de la guerre, il resta à l'écart des opérations. Il ne sortit de sa retraite que pour aller siéger à l'Assemblée nationale où l'envoyèrent, le 8 février 1871, deux départements, la Gironde et l'Allier.
Il opta pour l'Allier, qui lui avait donné 51 004 voix sur 76 640 votants et 106 359 inscrits, et se fit inscrire au groupe de la Droite modérée. Il fut désigné comme membre de la commission chargée de suivre les négociations avec la Prusse, et, le 3 mars 1871, Thiers le nomma commandant supérieur de la garde nationale de la Seine : interprétée comme un acte de provocation à l'égard de la population parisiennes, cette nomination ne fut pas sans influence sur les événements du 18 mars. Au mois de juillet suivant, M. d'Aurelle fut mis à la tête de la 14e division, à Bordeaux. Lorsque ces fonctions ne le retinrent pas à sa résidence militaire, il vota avec la droite de l'Assemblée, notamment :
- pour la proposition Cazenove sur les prières publiques,
- pour l’abrogation des lois d'exil, la validation de l'élection des princes, etc.
Après s'être abstenu, le 24 mai 1873, sur la démission de Thiers, il adhéra au septennat, le 19 novembre, et ne refusa son acquiescement à aucune des mesures du gouvernement dit « de combat ». En mars 1875, il signa la lettre adressée par plusieurs députés à l'archevêque de Paris, pour souscrire à l'érection de l'église du Sacré-Cœur. Il vota enfin, contre la constitution de 1875. Au mois de septembre 1873, il avait reçu le commandement du 18e corps d'armée ; mais, atteint par la limite d'âge, il dut, en janvier 1874, se démettre de son commandement.
Le 10 décembre 1875, il fut élu le 19e sénateur inamovible, sur les 75 nommés par l'Assemblée nationale : il avait réuni 346 voix sur 690 votants, un certain nombre de représentants de la gauche lui ayant donné leurs suffrages, qui s'ajoutèrent à ceux de la droite.
Au Sénat comme à l'Assemblée nationale, l'action parlementaire du général a été peu importante ; il s'est borné à voter constamment avec la droite, par exemple, en juin 1877, pour la dissolution de la Chambre des députés.
Il était, à sa mort, un des trois questeurs de la Chambre haute.
Le général d'Aurelle a publié sous ce titre : la Première armée de la Loire (1872), un récit apologétique de ses opérations ; il s'est attaché surtout, dans cet ouvrage, à combattre les assertions de M. de Freycinet, qui, dans la Guerre en province pendant le siège de Paris, s'était fait l'interprète des griefs du gouvernement de la Défense à l'égard du général. Incriminé à propos des revers de l'armée de la Loire, M. d'Aurelle répondit en prétendant qu'ils étaient dus à l'ingérence de l'élément civil dans la conduite de la campagne.