Paul, Marie, Victor Elbel
1875 - 1940
* : Un décret de juillet 1939 a prorogé jusqu'au 31 mai 1942 le mandat des députés élus en mai 1936
Né le 6 mars 1875 à Isches (Vosges), mort le 9 avril 1940 à Paris (7e).
Député des Vosges de 1933 à 1940
Ministre de la Marine marchande du 18 janvier au 13 mars 1938.
Petit-fils de douanier et fils de percepteur, Paul Elbel naquit le 6 mars 1875 à Isches dans une famille alsacienne et de tradition résolument républicaine. Installée à Ittlenheim (Bas-Rhin) depuis le XVILe siècle, la famille Elbel pouvait compter parmi ses membres un magistrat municipal fusillé en 1794 par l'armée des Emigrés - le bisaïeul de Paul Elbel - et un soldat des armées de la Révolution et de l'Empire - son aïeul- qui termina sa vie comme lieutenant de douanes à Strasbourg. Joseph et Victor Elbel - son père et son oncle - s'employèrent activement, le premier à Strasbourg, le second à Paris, à faire triompher la révolution de 1848 et participèrent à la défense de Strasbourg en 1870 ; alors que Victor était expulsé d'Alsace, Joseph, chef de division à la préfecture de Strasbourg sous le Second Empire, opta pour la France après l'annexion et obtint non sans mal de faire carrière dans l'administration des finances comme percepteur des contributions directes, dans le Doubs et dans les Vosges, à Isches notamment. Cette longue tradition patriotique ne devait pas se démentir pendant la première guerre mondiale, où deux des neveux du futur député des Vosges tombèrent, l'un en 1915 fusillé par les Allemands pour services rendus à la France, l'autre engagé volontaire sur le front de l'Aisne, en 1918.
C'est au collège de Saint-Dié, où ses parents avaient fini par se fixer en 1888, à l'heure de la retraite, que Paul Elbel fit ses études. Il entra à 19 ans, en 1894, à l'Ecole normale supérieure et passa son agrégation de lettres en 1897. Il enseigna alors dans les lycées de Bourg, Douai, Marseille, et fut nommé en 1908 au lycée Condorcet à Paris. En 1914, il est mobilisé comme officier d'administration et suit, jusqu'en mai 1916, la 59e division d'infanterie avec laquelle, sur le front de Lorraine et à Verdun, il se distingue assez pour obtenir la Croix de guerre avec une citation. Il passe alors à la direction de l'intendance du camp retranché de Paris et obtient son troisième galon. En septembre 1917, Clémentel l'appelle au secrétariat général du sous-secrétariat d'Etat à la Marine marchande et le 1er février 1918 lui confie la direction des services techniques du ministère du Commerce dont il deviendra, cinq mois plus tard, le secrétaire général, jusqu'en octobre 1919. Il retrouve à cette date sa chaire de lettres au (lycée Condorcet, mais pour très peu de temps, puisqu'à la fin du mois de novembre Louis Dubois, nommé ministre du Commerce le 27 novembre, en fait le chef-adjoint de son cabinet, fonction qu'il conservera jusqu'en février 1921 auprès d'Auguste Isaac, successeur de Louis Dubois. A cette époque, Paul Elbel devient sous-directeur à la direction des accords commerciaux de ce ministère : cette désignation marque le début d'une belle carrière de négociateur économique.
Il accède, en juillet 1928, à la direction des accords commerciaux et sera souvent délégué à la S.D.N. En juillet 1930, il est nommé pour sept ans membre du Comité économique de la S.D.N., qu'il présidera, et il participera à ce titre à toutes les grandes conférences internationales qui marquèrent cette époque : Lausanne, Stresa, Berlin Washington et Londres.
C'est vers la fin d'une carrière de grand commis de l'Etat que Paul Elbel se lancera dans la politique. Il se présente en effet, mais sans succès, dans ses Vosges natales, lors des élections générales des 1er et 8 mai 1932, dans la circonscription de Saint-Dié, contre le député sortant, Constant Verlot, conseiller général et maire de Senones, élu au second tour de scrutin par 12.342 voix sur 23.667 votants, alors qu'il obtenait lui-même 10.403 suffrages. Le décès de M. Verlot, le 15 avril 1933, lui permit de triompher lors de l'élection partielle du 18 juin suivant où il fut élu confortablement au second tour de scrutin par 11.746 voix sur 22.315 votants, contre 6.896 au radical indépendant Aubry, son principal adversaire. Lors des élections générales des 26 avril et 3 mai 1936, s'il n'arrive qu'en seconde position au premier tour de scrutin, il l'emporte aisément au second tour, par 13.212 voix sur 24.321 votants, contre 10.709 suffrages au candidat U.R.D. Rossillion.
Elu sur un programme radical, Paul Elbel s'inscrit tout naturellement au groupe radical-socialiste, dont il fut le président jusqu'en février 1938, date à laquelle il devint ministre de la Marine marchande.
Il a appartenu à plusieurs grandes commissions, dont celles des douanes et des conventions commerciales (1933), du commerce et de l'industrie (1934 et 1938), de la réforme de l'Etat (1934), des affaires étrangères (1936), des travaux publics et moyens de communication.
Son activité au cours des sept années qu'il passa à la Chambre fut grande et ses interventions, surtout, nombreuses. Il se passionna pour les questions agricoles, mais sa carrière au ministère du Commerce et dans la représentation française à la S.D.N. l'incita normalement à porter ses soins vers les questions économiques et douanières, faisant même de lui un spécialiste reconnu en matière de tarifs.
Plus orateur que législateur, son activité se manifesta surtout à la tribune de la Chambre où sa parole mesurée, claire et généreuse était écoutée avec soin. Dominé par sa carrière administrative, Paul Elbel verra dans l'économie une sorte de panacée prête à créer et à garantir la paix dans le monde. Il exprime l'idée de trouver la paix par un arrangement économique général et préconise la création d'une « monnaie de compte internationale ».
Sa générosité d'esprit lui fera déposer un ordre du jour à la suite du débat dramatique au cours duquel Roger Salengro, ministre de l'Intérieur, devait le 13 novembre 1936 faire face au déchaînement des passions partisanes de la droite. Constatant l'inanité des accusations portées à la tribune, il demandait le dépôt d'un projet de loi qui, tout en sauvegardant la liberté de la presse, devait permettre à toute personne attaquée de défendre efficacement son honneur.
A l'origine de la démission sans vote du troisième cabinet Chautemps en 1938, il reçut de celui-ci, qui se succédait à lui-même, le portefeuille de la Marine marchande, qu'il ne conserva que deux mois.
Le 4 avril 1940, Paul Elbel montait encore à la tribune de la Chambre, bien qu'il luttât « contre une cruelle souffrance ». Terrassé en effet par une crise d'appendicite, il devait mourir brusquement cinq jours plus tard, le 9 avril, à l'âge de 65 ans, des suites de l'opération qu'il venait de subir.
Décoré de la Croix de guerre 1914-1918, Paul Elbel était commandeur de la Légion d'honneur et titulaire de nombreux ordres étrangers.
Il préfaça de nombreux ouvrages économiques et plusieurs de ses communications ou discours furent publiés par le Comité d'action économique et douanière dont il fut le directeur.