Didier Eloy
1912 - 1977
ELOY (Didier)
Né le 16 mars 1912 à Hirson (Aisne).
Mort le 30 juin 1977 à Aulnoye-Aymeries (Nord).
Député du Nord de 1967 à 1968 et de 1973 à 1977
Didier Eloy est né dans une famille ouvrière de l’Aisne le 16 mars 1912. Tout jeune encore, il s’installe avec sa famille à Aulnoye, dans le Nord, pour suivre un père cheminot. Titulaire du certificat d’études primaires, il est néanmoins contraint de travailler dès l’âge de douze ans à la boulonnerie-ferronnerie d’Haumont (Nord). Syndiqué, il est licencié à 15 ans mais réintégré à son poste après une grève de solidarité ; c’est comme secrétaire de la section syndicale CGT d’Aulnoye qu’il entame, à une date indéterminée, sa carrière de cadre ouvrier. Toute sa vie, il conservera un pied dans l’usine. Devenu agent de maîtrise à Haumont, il entre en 1936 à l’usine LMA, qui deviendra la société Vallourec. Elu délégué du personnel puis responsable de l’union locale CGT d’Aulnoye, il y termine sa carrière comme contremaître adjoint au service des expéditions. Dans sa notice personnelle qu’il rédige le 1er janvier 1977, il se présentait néanmoins plus sobrement comme « métallurgiste ». Homme consciencieux et dévoué, il avait en tout cas un sens aigu de la valeur du travail et la fierté du métier : il remporte par trois fois, à 25, 35 puis 45 ans, la médaille d’honneur du Travail. Il se marie le 7 février 1931 avec Raymonde Plume, qui lui donnera deux enfants, Raymond né le 21 octobre 1931, qui deviendra cadre à la Sécurité Sociale, et Didier, né le 14 février 1938, futur ouvrier professionnel à Vallourec.
Didier Eloy milita à la CGT avant d’entrer au PCF. Il rejoint ce dernier en 1935, à 23 ans, dans la fièvre du Rassemblement populaire et l’annonce des élections de 1936. Son service militaire, qu’il effectue en 1932, l’avait sans doute tenu à l’écart de l’activité politique et syndicale, pour laquelle il est à nouveau disponible au moment où s’enclenche la dynamique qui mène au Front Populaire. Mobilisé en 1939, il entre en résistance dès 1940, si l’on en croit sa notice biographique de 1977. Décoré de la Croix de Combattant Volontaire de la Résistance (CVR) et de la Croix de combattant 1939-1945, il est vice-président du Comité de Libération du Nord à la fin de la guerre.
Son ancrage solide dans le monde ouvrier du Nord et sa participation à la Résistance lui ouvrent de nouvelles perspectives d’action politique après la guerre. Le PCF le présente dès 1958 comme candidat dans la 23ème circonscription du Nord, où il défend son programme d’inspiration communiste dédié, comme il le déclare dans sa profession de foi de mars 1967, à la défense des revendications ouvrières et paysannes, à la « prospérité » de la région du Nord et au « développement de l’équipement social ». Maire adjoint d’Aulnoye-Aymeries (Nord) depuis 1953, il présente pour son parti toutes les qualités d’un candidat prometteur.
Vaincu aux élections de 1958 – il remporte néanmoins 9 337 voix au premier tour (soit 24,5% des 38 055 votants), mais recule au second (8 901 voix), devancé en cela par le socialiste Eugène Thomas (11 927 voix au premier tour) et surtout par le candidat « Union pour la Vème République » Paul Bécue, élu finalement avec 18 288 suffrages sur son nom –, il est à nouveau battu de justesse aux élections de novembre 1962. Contre Paul Bécue, qui se présente sous l’étiquette de l’Association pour la Ve République, et remporte 14 407 voix au premier tour et 18 836 au second, Didier Eloy présente une véritable solution de substitution : gratifié le 18 novembre 1962 de 9 663 voix (21,38% des inscrits), il rassemble pas moins de 18 185 suffrages une semaine plus tard (40,2% inscrits). Le recul significatif par rapport à 1958 du score du candidat socialiste SFIO (Léon Constant), qui se désiste en faveur du candidat communiste au second tour, permet à Didier Eloy d’opérer une nette percée électorale.
Battu en 1962 de quelques centaines de voix seulement, l’échéance électorale de mars 1967 lui permet de ravir le siège aux gaullistes. Nanti de 13 726 voix au premier tour, Didier Eloy est élu avec 20 505 voix (51,77% des votants) grâce au désistement en sa faveur du candidat FGDS Eugène Thomas (8 882 voix au premier tour). Sa victoire est large contre Paul Bécue, qui ne rassemble alors que 18 424 voix lors du second tour du 13 mars 1967.
Inscrit à la Chambre au groupe communiste, Didier Eloy est membre de la commission de la production et des échanges. Il participe à la discussion de la loi de finances de 1968, où il intervient pour évoquer la situation de l’industrie textile du Nord.
Son premier séjour à la Chambre cependant est de courte durée. Il est en effet battu aux élections de juin 1968 qui suivent la dissolution prononcée par le général de Gaulle à la faveur des événements de mai. C’est l’UDR Alban Voisin, maire de Bavay (Nord), qui emporte par 20 321 voix au second le siège de la 23e circonscription. Le premier tour avait donné lieu à une situation triangulaire brutale. Didier Eloy y faisait le plein des voix communistes, très disciplinées : son score (13 326 voix) est en effet très proche de ses scores de 1967 et de 1973. Le candidat FGDS Bernard Vincent rassemblait quant à lui 7 831 voix, qui se sont assez mal reportées finalement, malgré son désistement, sur le candidat communiste au second tour. Alban Voisin l’emportait donc, fort de ses 17 503 voix dès le premier tour. Battu, Didier Eloy reprend le cours de ses activités à l’usine et à la mairie d’Aulnoye.
Les élections législatives des 4 et 11 mars 1973 lui permettent de remplir son second mandat de député communiste. Les résultats de l’élection sont exactement symétriques : le candidat gaulliste d’Union et Progrès Albert Voisin est vaincu au second tour par 18 714 voix contre 20 929 à Eloy, qui fait dès le premier tour le plein du vote communiste (13 390 suffrages). Les 8 563 voix du candidat du PS Pierre Fatre semblent s’être mieux reportées, dans un esprit très « programme commun ». Les candidats Jacques Bran (Centre démocrate, 3 542 voix) et Alain Carton (Union pour la Majorité Présidentielle de Soutien au Président de la République, 1 909 voix) ne perturbent pas cette géométrie électorale triangulaire qui fonctionne à nouveau au profit du candidat communiste.
Le second mandat de ce dernier est plus actif que le premier, interrompu par les élections de 1968. Didier Eloy est à nouveau membre de la commission de la production et des échanges, de 1973 à 1977. Il est également nommé membre de la commission d’enquête sur l’organisation et les pratiques du commerce et de la viande le 22 octobre 1974, puis membre suppléant de la commission mixte paritaire constituée pour examiner les modifications éventuelles à apporter au permis de chasser (29 avril 1975). Les questions sur lesquelles il intervient reflètent les engagements de sa profession de foi de candidat communiste et ouvrier du Nord. Les problèmes économiques, industriels et agricoles de sa région motivent ses principales interventions. Au nom de son parti, il prête également une attention particulière au sport, largement pratiqué dans les milieux populaires.
Le 27 juin 1973, il prend ainsi part à la discussion du projet de loi sur la retraite de réversion en agriculture que son parti dépose contre le projet du gouvernement. Le 9 juin 1974, il dépose un projet de loi tendant à faire bénéficier les femmes salariées d’une réduction de l’âge d’ouverture du droit à la pension de retraite de l’assurance-vieillesse. Le 29 avril 1975, il prend part à la discussion sur le projet de loi tendant à la généralisation du régime de la Sécurité sociale, puis le 3 octobre 1975, à celle du projet de loi du gouvernement sur le développement de l’éducation physique et sportive. Selon l’éloge funèbre que prononce en sa mémoire le député communiste Gaston Plissonnier le 11 octobre 1977, son intervention fut « remarquée ». Il avait porté devant ses pairs les critiques de ce projet dont il jugeait les crédits et les innovations insuffisants. Il intervient une dernière fois le 19 novembre 1975 lors de la discussion de la loi de finances de 1976, pour exprimer les griefs de son parti contre la politique sociale et syndicale du gouvernement.
Atteint d’une longue maladie, Didier Eloy se retire de toute activité politique en 1976. A la Chambre, son suppléant Jean Jarosz, professeur de CES et maire de Feignies (Nord) le remplace alors. Didier Eloy s’est éteint le 30 juin 1977 à Aulnoye.