Jules, Abdon Fil
1899 - 1968
FIL (Jules, Abdon)
Né le 2 février 1899 à Bize-Minervois (Aude)
Décédé le 23 septembre 1968 à Carcassonne (Aude)
Député de l'Aude de 1962 à 1967
Sénateur de 1967 à 1968
Fils d'un viticulteur, Philippe Abdon Fil et de Marie-Louise Guiraud, son épouse, sans profession, Jules Fil entre à l'École normale d’instituteurs de Carcassonne (Aude). Titulaire du brevet supérieur en 1917, il exerce comme instituteur et directeur d'école dans l’Aude puis à Fourtou, au Sénégal, enfin fut nommé professeur à Saint-Louis du Sénégal, de 1927 à 1941. A cette date, il est mis à la retraite d'office par le gouvernement de Vichy comme dignitaire de la Franc-maçonnerie. Jules Fil est en effet franc-maçon et militant socialiste selon la tradition familiale. Son père a été de nombreuses années secrétaire de la section socialiste de Bize où il a lui-même adhéré en 1924, selon une note de sa main, ou en 1929, selon une lettre qu'il écrit au secrétariat général du Parti socialiste SFIO le 9 novembre 1947 pour poser sa candidature à un poste de Conseiller de l’Union française. Actif militant, propagandiste dans de nombreuses réunions publiques et par la presse, il contribue dans les années trente à créer la Fédération socialiste SFIO de l'AOF, avec le futur député Lamine-Guye. Il est secrétaire adjoint de cette dernière en 1936-1937 (le secrétaire étant Alibert) et préside le comité de Front populaire de Saint-Louis du Sénégal dans les mêmes années.
Revenu en France, à la Libération, Jules Fil, chef de bureau à Électricité de France, milite à la section socialiste SFIO de Carcassonne dont il devient secrétaire. Il va progressivement conquérir les mandats locaux qui permettent d’espérer une carrière nationale dans un département où, depuis la Libération, la SFIO, dont le leader est Georges Guille est devenue, la force politique dominante, contrôlant la majorité des municipalité et surtout le conseil général. Sa carrière politique d’élu commence en 1947 avec son élection au conseil municipal de Carcassonne. Secrétaire de la section SFIO, désigné premier adjoint au maire radical, il devient le grand argentier de la cité qui connaît deux importantes crises municipales. L’équilibre politique de la ville est délicat, la majorité de troisième force – comprenant huit radicaux, cinq socialistes et quatre MRP, face à dix communistes et à quatre élus RPF – éclate lorsque le MRP passe dans l’opposition lors du vote du budget en 1950. Le conseil est dissout, les socialistes progressent et reviennent avec sept sièges, et Fil réélu est reconduit dans ses fonctions. Mais il s’oppose au nouveau maire radical Itard-Longueville à partir de 1951 et après un rejet d’une modification budgétaire auquel les socialistes s’associent, le maire démissionne et le conseil est dissout une deuxième fois. Durant la campagne électorale de 1953, Fil conduit la liste socialiste. Il est présenté par l’Indépendant, comme le meilleur atout de la SFIO, sa personnalité « atténuera les vivacités et les maladresses du député Guille », écrit le puissant quotidien régional qui vante « la probité et la sagesse » de Fil dans un contexte de scandales qui atteint des élus radicaux et communistes du département. Jules Fil est élu maire de la cité le 26 avril 1953, en situation minoritaire, au troisième tour de scrutin, avec 11 voix sur 31 élus, grâce à l'appui du MRP. Mais il réussit à éviter toute crise municipale durant six ans et en 1959 et 1965 est réélu. Il préside l'association des maires du département en 1962.
L’entrée de Fil au conseil général est plus difficile. Candidat en octobre 1951 dans le canton de Carcassonne-Ouest, il n’arrive qu’en quatrième position, avec 1 549 suffrages sur 8 295 exprimés, derrière le maire radical, Itard-Longueville, le député communiste Jean Llante et un autre adjoint RPF. Fil refuse de se désister pour le maire radical qui est élu. Six ans plus tard, le 27 avril 1958, le maire de Carcassonne prend sa revanche : il est élu conseiller général, battant son adversaire sortant qui se retire après le premier tour. Dans l’Assemblée départementale, il préside la commission des vœux, des édifices départementaux et des œuvres scolaires et sera réélu en 1964.
Aux élections législatives de novembre 1958 dans la première circonscription de l’Aude, celle de Carcassonne, Fil est candidat suppléant de Georges Guille, député sortant qui est battu de 1 500 voix, le candidat communiste s’étant maintenu. Guille accède au Sénat l’année suivante et Fil est donc légitimement désigné candidat titulaire du parti socialiste dans la même circonscription en novembre 1962. Il axe sa campagne sur son bilan et son expérience d’élu local, affirmant vouloir défendre les libertés et établir un équilibre des pouvoirs par l’établissement d’un gouvernement de législature. Il reçoit l’appui des conseillers généraux de la circonscription, Guille en premier. Fil arrive nettement en tête de tous les candidats au premier tour le 18 novembre, avec 15 541 suffrages sur 56 450 inscrits et 39 357 exprimés, écrasant le député sortant UNR, Louis Raymond-Clergue qui perd 3 000 de ses suffrages de 1958, alors que Fil progresse de 2 000 suffrages par rapport au résultat de Guille. Au second tour, le 25 novembre, les candidats communistes et PSU se retirent en sa faveur et il est élu député, avec 24 823 suffrages sur 39 580 exprimés. Secrétaire de l'Assemblée en 1965, il appartient à la commission des Finances, puis à la commission des affaires culturelles.
En mars 1967 lors des élections législatives, Fil n’est pas candidat à sa succession, le Parti socialiste accorde son investiture à Georges Guille qui revient au Palais-Bourbon. Mais il s’agit en fait d’un transfert de poste, Jules Fil est élu en juin sénateur sur le siège laissé vacant par l’élection de Guille. Mais, il décède un an plus tard sans avoir pu se montrer très actif dans la Haute-Assemblée.
Marié le 3 avril 1923, à Elvia Crois, née le 5 avril 1903, sans profession, Jules Fil a eu un fils, Claude, né le 25 septembre 1928, qui a été responsable des Jeunesses socialistes de l'Aude, et une fille Marie-Louise, « morte pour la France » le 27 mai 1944.
Officier de la Légion d'honneur, il a été encore décoré comme officier du mérite civil et officier de l'Instruction publique.