Jean Filliol
1906 - 1981
FILLIOL (Jean, Jules, François)
Né le 11 septembre 1908 à Argentat (Corrèze)
Décédé le 5 septembre 1981 à Tulle (Corrèze)
Député de la Corrèze de 1958 à 1962
Jean Filliol est issu d’une très ancienne famille corrézienne. Après des études primaires et secondaires dans son départemental natal, il gagne la classe de première supérieure du lycée Louis-le-Grand à Paris. Il n’intègre pas l’Ecole normale supérieure mais obtient une licence de lettres et un diplôme d’études supérieures de philosophie. Il enseigne cette discipline au lycée Chaptal à partir d’avril 1932, sans avoir obtenu l’agrégation. Il s’est auparavant marié en Pologne, en 1931. Diplômé de l’Institut des hautes études internationales, il est admis au concours pour l’emploi d’attaché de consulat en juillet 1934. Le ministère des Affaires étrangères l’affecte au consulat de France à Londres. Jean Filliol demeure dans la capitale britannique pendant cinq ans, comme attaché de consulat puis vice-consul archiviste. Il vient d’être nommé vice-consul à Copenhague lorsqu’éclate la deuxième guerre mondiale. En avril 1940, il quitte la capitale danoise pour Helsinki, où il est envoyé en qualité de Vice-consul. La Finlande, défaite par l’Union soviétique, a alors cédé de nombreux territoires au titre du traité de Moscou, signé le 12 mars 1940. Jeune diplomate, Jean Filliol ne peut se résoudre à la défaite française à l’issue de la campagne de France. Il s’engage dans les Forces françaises libres le 19 juin 1940, peu après l’appel lancé par le général de Gaulle sur les ondes de la BBC. Deux autres diplomates en poste à Helsinki, François Coulet et Pierre-Eugène Gilbert, effectuent le même choix à cette époque. Le régime de Vichy les radie en conséquence des cadres du personnel diplomatique et consulaire. Jean Filliol rejoint Le Caire en décembre 1940, à l’issue d’un voyage très difficile. Il y travaille comme conseiller auprès de la Délégation de la France libre pour le Moyen-Orient jusqu’à la fin du conflit. A la Libération, il rejoint l’administration centrale du ministère des affaires étrangères et sa direction d’Europe en qualité de sous-directeur. Chargé du consulat général de Shanghaï de septembre 1945 au printemps 1946, Jean Filliol retrouve alors l’Egypte, où il fait fonction de consul général à Alexandrie. Le gouvernement français l’envoie comme représentant politique à Trieste en 1950. Entre 1947 et 1954, le territoire libre de Trieste est en effet divisé entre une zone A, qui comprend la ville éponyme et est administrée par les armées britannique et américaine, et une zone B occupée par les Yougoslaves. Conseiller des affaires étrangères en janvier 1951, Jean Filliol devient secrétaire général du Haut commissariat de la République en Sarre en décembre 1951, puis conseiller d’ambassade à Sarrebrück. Il est alors un des principaux collaborateurs de Gilbert Grandval -ce gaulliste est en poste à Sarrebrück de 1946 à 1955-. Nommé ministre plénipotentiaire en décembre 1954, Jean Filliol quitte la Sarre lorsque ce territoire est rattaché à l’Allemagne. Il est nommé ambassadeur à Djeddah, en Arabie saoudite, en février 1955, puis haut-commissaire adjoint au Sud-Vietnam, à Saïgon. Il regagne cependant la métropole dès 1956. Il dirige le service du chiffre et des transmissions au ministère des affaires étrangères en 1957-1958.
Le diplomate se réjouit du retour au pouvoir du général de Gaulle au printemps 1958. Il décide de se présenter aux élections législatives dans la 2ème circonscription de la Corrèze, qui ne comprend pourtant pas la ville d’Argentat. Il reçoit l’investiture de l’Union pour la nouvelle République (UNR) et se présente dans sa profession de foi comme « un homme à la fois libre et fidèle » au général de Gaulle. Il rappelle son engagement dans les Forces françaises libres et se dit déterminé à soutenir l’action de l’homme du 18 juin. Dans ses documents électoraux, il plaide en particulier pour que s’ouvre « une discussion avec les élus algériens » dans « le respect de la personnalité algérienne » et « l’égalité sociale entre les deux communautés musulmane et européenne ». Les suffrages modérés sont notamment contestés à Jean Filliol par le général Pierre Pouyade, candidat d’ « Union républicaine sociale et agricole ». Au premier tour, c’est le député sortant communiste Jean Goudoux qui arrive en tête avec 26,9%, devant Jean Filliol (23,1%). Ce dernier l’emporte dans le canton le plus peuplé de la circonscription, celui de Brive-la-Gaillarde-Nord (32,1%). Le gaulliste est élu député de la Corrèze le 30 novembre 1958 grâce au soutien de 49,7% des électeurs dans le cadre d’une triangulaire.
Il s’inscrit au groupe de l’UNR et siège à la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale. Il est désigné par ses collègues pour siéger à l’Assemblée parlementaire européenne en janvier 1959. Jean Filliol prend la parole à deux reprises dans l’hémicycle. En octobre 1960, le département de la Corrèze a, comme d’autres, connu des inondations exceptionnelles. Jean Filliol note que 3000 personnes peuvent être considérées comme des sinistrés à Brive-la-Gaillarde, et que c’est « toute la vie économique du département de la Corrèze industrielle, commerciale, artisanale axée sur Brive et Tulle, et sur la vallée qui les relie qui a été blessée à mort ». Il ne craint pas de se montrer critique à l’égard du gouvernement, qu’il accuse de manquer à la fois « de générosité et de réalisme » dans ses projets d’indemnisation. Jean Filliol reproche à ceux-ci d’opérer « une distinction (…) entre les diverses catégories de sinistrés ». Le texte de loi présenté par le gouvernement lui semble en outre « peu conforme à l’esprit du code civil », comme à celui du « code fiscal ». Le député de la Corrèze reproche implicitement au ministre des finances des chercher à réduire le montant des indemnisations : les principales victimes de ce défaut de solidarité seraient « les industriels, les commerçants et les artisans ». Il conclut son propos en rappelant que « l’argent n’est pas un but en soi » et qu’ « il n’est qu’un moyen au service de la nation, pour sa prospérité et son bonheur » (séance du 24 novembre 1960). Lorsque ce projet de loi sur la participation de l’Etat à la réparation des dommages causés par les inondations est examiné en seconde lecture, le 9 décembre 1960, Jean Filliol tient à saluer les améliorations qui y ont été apportées par le ministre des finances et le Sénat.
Le député de la Corrèze soutient la politique de l’exécutif sous la première législature de la Vème République. Il approuve le programme du gouvernement de Michel Debré (16 janvier 1959) comme le règlement de l’Assemblée nationale (3 juin 1959) ou la déclaration de politique générale du Premier ministre (15 octobre 1959). Il vote la loi qui réforme le financement de l’enseignement privé (23 décembre 1959) et accorde les pleins pouvoirs au gouvernement pour ramener l’ordre en Algérie au lendemain de la semaine des barricades (2 février 1960). Il ne prend pas part au scrutin sur le programme du gouvernement Pompidou (27 avril 1962) mais autorise la levée de l’immunité parlementaire de Georges Bidault, député de la Loire et ancien président du Conseil (5 juillet 1962). Il ne s’associe pas à la motion de censure qui renverse le gouvernement Pompidou le 4 octobre 1962.
La maladie frappe Jean Filliol dès ses premières années de mandat parlementaire. Elle affecte sa validité, mais non son jugement ni son intérêt pour la chose publique. Il choisit néanmoins de ne pas se représenter dans la 2ème circonscription de la Corrèze à l’occasion des élections législatives de novembre 1962. Le jeune Jean Charbonnel, agrégé d’histoire, normalien et ancien élève de l’ENA, lui succède alors avec le soutien de l’Union pour la nouvelle République (UNR).
Jean Filliol s’éteint en Corrèze, à la veille de son soixante-treizième anniversaire. Il était officier de la Légion d’honneur et titulaire de la médaille de la Résistance.