Makhlouf Gahlam
1924 - 1971
GAHLAM (Makhlouf)
Né le 13 mars 1924 à Fort-National (Algérie)
Décédé le 28 mars 1971 à Paris
Député d’Algérie (Médéa) de 1958 à 1962
Makhlouf Gahlam est né le 13 mars 1924 à Fort-National, une localité des environs de Tizi-Ouzou, en Algérie. Fonctionnaire du service des finances de l’Algérie, il se marie en 1943 avec Saâda Garti, qui lui donnera quatre enfants.
On sait peu de choses sur ses activités politiques avant 1958. Mais il est certain qu’il est un fervent partisan de l’Algérie française.
Premier président de la délégation spéciale de Berrouaghia, dans la région de Médéa, Makhlouf Gahlam se présente en effet à la députation dans la 4e circonscription de Médéa sur une liste de l’Union pour le Salut et le Renouveau de l’Algérie Française. Ce parti, formé par Jacques Soustelle en 1956 après que celui-ci ait pris ses distances avec le général de Gaulle, regroupe des hommes de diverses tendances au service d’une idée fixe : la présence de la France en Algérie.
Les élections ont lieu en Algérie le 30 novembre 1958. La liste de l’USRAF, sur laquelle figure Makhlouf Gahlman, est opposée à la liste Fraternité et Action pour la Paix en Algérie, qui regroupe Joseph Rostoll, Bachir Ben Cherif, Nefa Nadji Mekki et Amar Chergui. Sur 305 304 inscrits, la liste USRAF rassemble 128 045 voix, contre 45 583 voix à la liste adverse. Makhlouf Gahlam est donc porté à la Chambre, avec ses colistiers Kaddour Messaoudi, Pierre Vignau et Benalia Benelkadi. Son élection est validée le 9 décembre 1958.
A la Chambre, Makhlouf Gahlam adopte une attitude indécise à l’égard de la politique algérienne gaullienne. Ses votes comme ses apparentements le suggèrent. Jusqu’au début de 1960, il est membre de la formation administrative des élus d’Algérie (EAS) (qui devient le groupe Unité de la République en juillet 1959). Son état d’esprit est alors bien rendu par sa profession de foi de novembre 1958 : « cimenter d’une manière définitive l’Algérie et le Sahara à la France, dans une égalité absolue des droits et des devoirs ». « Hors de l’intégration, affirme-t-il, […] il n’y a pas de salut possible et pour l’Algérie, et pour la France ». L’USRAF est même atlantiste, puisque elle cherche à renforcer « les liens qui nous unissent à l’Europe et à l’Ouest ».
La confiance dans la politique gaullienne guide ses premiers votes : Makhlouf Gahlam se prononce en faveur du programme du gouvernement Debré le 16 janvier 1959, puis vote pour le règlement définitif de l’Assemblée nationale le 3 juin 1959. Il vote encore pour la loi sur l’enseignement privé le 23 décembre 1959. Mais il n’a pas pris part au vote sur la déclaration de politique générale du Premier Ministre le 15 octobre 1959, un vote qui fait suite au discours du Général de Gaulle sur l’autodétermination le 16 septembre précédent. Sa position évolue donc à partir de la fin de 1959. Le 2 février 1960, il s’abstient lors du vote des pleins pouvoirs à Michel Debré, et s’inscrit au groupe parlementaire des Indépendants et Paysans d’Action Sociale (IPAS). C’est sous cette étiquette qu’il s’abstient à nouveau sur la modification de l’article XII de la Constitution, le 11 mai 1960.
Makhlouf Gahlam ne compte pas cependant parmi les députés les plus radicalement partisans de l’Algérie française : d’autres, plus durs que lui, votent contre le gouvernement lors des mêmes scrutins parlementaires. Ses positions traduisent d’ailleurs cette situation intermédiaire à partir de 1961. Il s’isole plus encore : il quitte le groupe IPAS pour se déclarer Indépendant le 24 février 1961. Dans son intervention lors de la discussion de la déclaration du Premier Ministre sur la situation en Algérie, le 7 décembre 1960, son désespoir quant au régime d’exception imposé aux Algériens est perceptible. Finalement, le 2 mars 1961, il s’inscrit au groupe UNR. Makhlouf Gahlam aura donc flotté aux frontières des groupes parlementaires où se rassemblent, malgré leurs différences, tous les députés « Algérie française ». Sans doute résigné au destin de l’Algérie, il vote en faveur de la politique générale du gouvernement Pompidou le 27 avril 1962. Pourtant, lors d’un débat sur la communication du gouvernement relative à l’Algérie, le 20 mars 1962 – alors même que les Accords d’Evian viennent d’être ratifiés –, il rend à de Gaulle un hommage ambigu, puisqu’il l’honore du titre de « plus grand décolonisateur de tous les temps ». Comme la plupart des élus d’Algérie, Makhlouf Gahlam s’est trouvé confronté à une situation inextricable, face à laquelle il était personnellement désarmé.
A la Chambre, Makhlouf Gahlam est membre de la Commission des finances en 1959, puis de la Commission des lois du 6 octobre 1960 à avril 1962, date à laquelle il rejoint la Commission de la Défense nationale. Il est également membre, à partir du 22 juillet 1960, de la Commission d’élus pour l’étude des questions algériennes. Le 29 décembre 1959, il dépose – geste symbolique – un projet de loi qui vise à supprimer la délégation générale du gouvernement à Alger.
Le 14 octobre 1959, lors de la discussion sur la déclaration du Premier Ministre Michel Debré relative à la politique générale du gouvernement, il élève une protestation contre celle-ci au nom des « élus d’Algérie ». Il déplore en particulier l’influence insignifiante des réformes engagées sur la « rébellion », qui se durcit au contraire devant les hésitations de la France, et réclame que les députés français affichent une « attitude nette » sur l’unité de la République et de l’Algérie française. Le lendemain, il ne prend pas part au vote sur la politique générale du gouvernement Debré.
Le 7 décembre 1960, il participe à nouveau à la discussion sur la déclaration du Premier Ministre relative à l’Algérie : il évoque en particulier la situation misérable des populations de l’intérieur du pays, et souligne l’espoir mis dans le Général de Gaulle, « créateur du collège unique ». Le 20 mars 1962, il témoigne encore de cet attachement à la personne du général, si bien qu’on ne sait s’il ressentit l’abandon de l’Algérie comme une trahison ou une nécessité désespérante.
En juillet 1962, Makhlouf Gahlman quitte l’Algérie et adopte la nationalité française. Il s’installe alors à Fontenay-aux-Roses. Le 9 janvier 1971, il tente une première fois de se suicider dans son appartement, mais il est secouru. Le 19 mars 1971, il décide alors de se donner la mort par un geste radical : il s’immole par le feu au carrefour Sèvres-Babylone à Paris. Gravement brûlé, il survit une semaine à ses blessures, et s’éteint à l’hôpital Cochin le 28 mars 1971. Selon L’Aurore, qui ne publie qu’un court entrefilet sur l’événement dans son numéro du 3 et 4 avril 1971, la solitude et la misère l’avaient poussé à cet acte désespéré de protestation contre le naufrage de l’Algérie française, auquel il avait, lui député algérien de la Ve République, assisté impuissant.