Philippe Giovannini
1908 - 1989
GIOVANNINI (Philippe)
Né le 25 mai 1908 à Sorbo-Ocagnano (Corse)
Décédé le 8 février 1989 à Toulon (Var)
Député du Var de 1973 à 1978
Philippe Giovannini voit le jour le 29 mai 1908 à Sorbo-Ocagnano, village corse de Casinca. Il est le fils d’un artisan maçon et le deuxième enfant d’une famille qui en compte quatre. Orphelin de père dès 1912, il est élevé par sa grand-mère qui reprend le commerce – une boulangerie-épicerie - que sa mère tint jusqu’à sa mort. Après avoir obtenu le certificat d’études en 1920, il devient ouvrier agricole avant d’être employé de l’imprimerie du quotidien Bastia-journal. Il adhère alors aux Jeunesses communistes, dès l’âge de 17 ans, à partir de 1925. Deux ans plus tard, il quitte la Corse pour Toulon, à la suite d’une dispute familiale. Il y est traminot, comme receveur à la Compagnie des Tramways et participe à la création du syndicat C.G.T. de cette corporation. Mais il est renvoyé de son emploi. Dans ce qui n’est encore que la sous-préfecture du Var, il aura participé aux activités des Jeunesses communistes. Il effectue son service militaire dans l’infanterie, à Castelnaudary, entre 1929 et 1930, puis retourne en Corse et travaille dans le café de son frère aîné.
En 1932, Philippe Giovannini revient dans le Var et entre dans la métallurgie. Il devient ouvrier soudeur à l’arc aux Forges et Chantiers de la Méditerranée (F.C.M.). Le 2 juillet 1932, il épouse civilement Jeanne Anglaisio, ouvrière à la fabrique de chemises Boka, union de laquelle naît un fils. Syndiqué à la C.G.T.U., Philippe Giovannini adhère au Parti communiste français (PCF) au printemps de 1934. Le 3 novembre 1936, il est délégué d’atelier. Membre du Conseil syndical du syndicat réunifié, il en assure le secrétariat à compter du 10 février 1938. Avec le développement du PCF à partir de 1936, il est le responsable de l’une des quatre cellules des Chantiers. Licencié des F.C.M. à la suite de la grève du 30 novembre 1938, il se reconvertit dans la pêcherie, aux côtés de son beau-frère.
En 1939, il est mobilisé dans l’infanterie à Orange, dans le département du Vaucluse voisin. Il est par la suite envoyé en Corse, dans le secteur de Bonifacio, où il se met en relation avec les communistes de la région. Il participe à la confection du matériel de propagande, et travaille à la démobilisation qui est effective en juillet 1940. Il est de retour à la Seyne quelques semaines plus tard, et reprend son activité professionnelle de pêcheur. Il participe tout aussi activement à la réorganisation clandestine du Parti communiste varois. En novembre 1940, avec plusieurs de ses camarades, il est arrêté, puis interné au centre de séjour surveillé de Chibron, dans le Haut-Var, puis à Fort-Barraux (Isère), pour rejoindre, enfin, le Centre de séjour surveillé de Saint-Sulpice-La Pointe (Tarn), jusqu’au 1er mars 1943. Il s’évade alors qu’il participe à la construction du Mur de l’Atlantique. Il retrouve le Var et devient bûcheron dans la commune de Barjols. Il reprend alors contact avec le maquis des Francs tireurs et partisans français (F.T.P.F.) des Maures, qu’il avait rejoint le 3 mai 1941. Le 13 décembre 1943, il appartient au maquis de la région de Brue-Auriac Saint-Maximin. En janvier 1944, il est envoyé dans les Basses-Alpes comme commissaire aux effectifs de la deuxième compagnie F.T.P.F. puis, comme commandant-commissaire politique de la deuxième Compagnie de Provence dans la région de Castellane. A la fin du mois de mars de la même année, il est commissaire des effectifs dans les Alpes-Maritimes. A ce titre, il est l’un des organisateurs de la libération de Nice avec les F.T.P.F. dont il est le commandant départemental. Il termine le conflit décoré de la Croix de guerre (1939-1945) avec palmes, de la médaille de la Résistance, de la médaille des évadés et de la croix du combattant.
Après la guerre, Philippe Giovannini travaille quelque temps aux établissements Michels, à Nice, et aux Aciéries du Nord. Il quitte à nouveau les Alpes-Maritimes pour la Corse, et milite au sein du secrétariat de la Fédération communiste de l’île de Beauté. Aux élections municipales de 1947, il est élu conseiller municipal de Bastia, mais démissionne l’année suivante pour revenir à Nice où il est secrétaire de la section communiste du quartier populaire de Saint-Roch. Membre de la direction de la Fédération communiste entre 1949 et 1952, aux côtés de Virgile Barel, figure locale du P.C.F., il participe aussi à la direction de l’Union départementale C.G.T.
Ce n’est qu’à partir de 1952 que Philippe Giovannini s’installe durablement à La Seyne. Il travaille comme soudeur aux Chantiers du Midi et devient secrétaire de la section communiste de la commune varoise. Il se retrouve au cœur d’un complot dont on accuse les communistes provençaux, pour avoir eu la responsabilité militaire des opérations préparées par le P.C.F. contre une éventuelle prise de pouvoir du R.P.F. Ecroué, il est cependant vite libéré, le 20 août 1952. Il devient membre du bureau de la Fédération communiste du Var à partir de 1953 et de son secrétariat, à partir de 1955-1956.
Sa carrière politique, au sens strict du terme, commence en 1953. Le 26 avril, il est élu conseiller municipal et devient premier adjoint au maire communiste de La Seyne, première ville de l’agglomération toulonnaise et cité littorale accueillant les constructions navales du département du Var. Il y est réélu en 1959, puis en 1965. Le 7 juillet 1969, à la mort du premier magistrat de la ville, Toussaint Merle, Philippe Giovannini en devient le maire. Il y est réélu aux élections municipales suivantes, en mars 1971, avec 56% des suffrages exprimés. L’année précédente, il a demandé à ne pas être réélu au bureau de la Fédération communiste du Var. Fort de sa légitimité de maire de La Seyne, ville de plus de 50 000 habitants, il est le candidat désigné par le Parti communiste aux élections législatives de 1973, dans la quatrième circonscription du Var. Cette partie du département regroupe les villes de l’agglomération ouest de Toulon - Le Beausset, Ollioules, La Seyne-sur-Mer - et les quartiers ouest de la ville, représentés par ses premier et cinquième cantons. Malgré une conjoncture nationale favorable à l’Union de la gauche, le combat électoral est rude. La circonscription est détenue depuis 1968 par Marcel Bayle, secrétaire général de la commission relative à la pollution des eaux de mer, député gaulliste investi par l’Union des Républicains pour le progrès (U.R.P.). Avant cette date, le siège était détenu par l’ancien maire de la Seyne, Toussaint Merle. Au premier tour de scrutin, Philippe Giovannini et Marcel Bayle sont au coude-à-coude, obtenant chacun 30% environ des suffrages exprimés. Leur combat est d’autant plus difficile, que deux des quatre autres candidats ont réalisé de bons scores : Jean Etienne, investi par l’Union de la gauche socialiste et radicale, et Pascal Arrighi, représentant du Centre républicain, recueillent plus de 14 000 suffrages chacun. A la suite des ralliements internes à chacun des camps, l’issue du scrutin, au second tour, est très serrée. Le maire de La Seyne, secondé par Danielle Colonna, employée à la Caisse de sécurité sociale, est finalement victorieux, mais ne gagne que de 488 voix, avec un score de 50,3% des suffrages exprimés. Dans sa profession de foi, Philippe Giovannini a bien insisté sur ce qu’il considère comme la nécessaire condamnation du pouvoir gaulliste, « politique d’injustice sociale et autoritaire ». Seul le programme commun s’apparente à « une réelle politique de progrès social, de liberté et d’indépendance nationale », « le moyen le plus sûr de changer (la) vie, de la rendre plus belle et plus heureuse ».
A son arrivée à l’Assemblée nationale, le nouveau député de la quatrième circonscription du Var s’inscrit au groupe communiste. En raison de l’importance des activités liées à l’industrie de l’armement naval, dans la commune qu’il administre, comme dans la circonscription qu’il représente, il est nommé membre de la Commission de la défense nationale et des forces armées. Il y siège durant toute la législature. Au cours de son mandat, le 6 juin 1974, il dépose une proposition de loi tendant à améliorer la protection sociale des veuves et des ayants droit des sapeurs-pompiers. Il n’intervient, en séance publique, qu’à une reprise, à l’occasion de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1974. Il prend la parole au chapitre des dépenses militaires, celui des budgets annexes du service des essences et du service des poudres. A ce titre, le 8 novembre 1973, il expose la situation des personnels civils de l’Etat. Il compare, pour la regretter, l’absence de parité des salaires des ouvriers de la métallurgie dans les différentes régions de France, et évoque longuement le problème des effectifs des arsenaux de Toulon. Il condamne l’accroissement des travaux accomplis par des entreprises privées, regrettant le peu d’engagement de l’Etat dans ce domaine, en déclarant qu’il s’agit là du « début de liquidation des établissements de l’Etat en faveur du secteur privé ».
Au cours de son mandat de député, Philippe Giovannini manifeste, par ses votes, son opposition totale à la politique voulue par Georges Pompidou, comme à l’égard de celle de Valéry Giscard d’Estaing. En effet, dès le 12 avril 1973, il vote contre la déclaration de politique générale du gouvernement Messmer, et fait de même sur l’ensemble du projet de loi constitutionnelle, portant modification de l’article 6 de la Constitution sur la réduction de la durée du mandat présidentiel, dans la deuxième séance du 16 octobre suivant. Il ne soutient pas davantage le gouvernement Chirac, en rejetant la déclaration de politique générale du premier chef de gouvernement du Président Giscard d’Estaing, le 6 juin 1974. Le député communiste du Var repousse tout aussi vigoureusement le projet de loi constitutionnelle portant révision de l’article 25 de la Constitution sur les conditions de la suppléance des parlementaires, le 10 octobre 1974. En revanche, comme une large partie de la gauche, il soutient le projet de loi relatif à l’interruption volontaire de la grossesse, le 28 novembre 1974, ainsi que la réforme du divorce, le 4 juin 1975. Le 8 juin 1976, en troisième lecture, il s’oppose à l’ensemble du projet de loi constitutionnelle modifiant l’article 7 de la Constitution sur la modification des règles de la campagne électorale de l’élection présidentielle, comme il le fait vis-à-vis du programme du gouvernement Barre, le 28 avril 1977. Enfin, à l’instar de ses collègues députés, à leur presque unanimité, il approuve l’ensemble du projet de loi relatif à l’élection des représentants à l’assemblée des communautés européennes, le 21 juin 1977.
Philippe Giovannini n’est pas candidat à sa succession en 1978. Une année après sa réélection à la mairie de La Seyne, il remet sa démission au Préfet du Var qui l’accepte. Il motive ce choix par son âge, qui ne lui permet plus « une activité correspondant aux exigences de l’administration d’une commune ». Il estime qu’à 70 ans, il a atteint l’âge de sa retraite politique. Sa succession de maire est assurée par le dessinateur Maurice Blanc, jusqu’alors premier adjoint de Philippe Giovannini, et candidat aux élections législatives de 1978, comme suppléant de Danielle de March, que le maire démissionnaire de La Seyne avait choisie pour le remplacer à l’Assemblée nationale, dans la quatrième circonscription du département. La candidate communiste est cependant battue par le docteur Arthur Paecht, maire de Bandol, commune résidentielle voisine de La Seyne. Le nouveau député élu a été investi par la majorité départementale du Parti républicain de François Léotard, député-maire de Fréjus, et de Maurice Arreckx, sénateur-maire de Toulon et président du Conseil général du Var.
Retiré des affaires publiques, après une tentative de retour en politique à l’occasion des élections municipales à La Seyne en 1983, Philippe Giovannini, veuf depuis 1979, s’éteint le 8 février 1989, à l’âge de 80 ans.