Nicolas Grunitzky
1913 - 1969
Né le 5 avril 1913 à Atakpamé (Togo)
Décédé le 27 septembre 1969 à Paris
Député du Togo de 1951 à 1958
Nicolas Grunitzky est le fils de Harry Grunitzky et de dame Sossime, né le 5 avril 1913 au Togo. C'était alors une colonie allemande avant d'être partagée en 1922 entre deux territoires sous mandat confiés l'un à la France, l'autre à l'Angleterre. Après avoir fréquenté le lycée Mignet d'Aix-en-Provence et obtenu le baccalauréat, Nicolas Grunitzky est de 1933 à 1936 élève de l'Ecole spéciale des travaux publics de Paris. Dès sa sortie de l'Ecole, il est employé comme agent des travaux publics auxiliaire de l'administration au Dahomey puis à partir de 1938 au Togo. En 1939, il est mobilisé et reste en garnison à Saint-Louis du Sénégal jusqu'à sa démobilisation en octobre 1940. De retour à la vie civile, il est successivement chef du bureau du secrétariat des travaux publics et du bureau du chemin de fer du Togo de 1940 à 1944, puis chef de subdivision des travaux publics. En 1949, il obtient sa mise en disponibilité pour diriger « la Nouvelle Entreprise Togolaise » qu'il a fondée.
Pendant la deuxième guerre mondiale, à côté de son activité professionnelle, Nicolas Grunitzky milite en faveur du mouvement gaulliste. En 1944, il devient le secrétaire du groupement Combat-Togo. A l'issue de la guerre, la France devait compter avec une opinion publique togolaise qui ne lui était pas entièrement acquise. L'essor économique de la Gold Coast voisine impressionnait fort des élites togolaises d'autant plus anglophiles qu'elles soupçonnaient la France de vouloir contrarier la marche à l'autonomie du Togo qu'elles pouvaient atteindre par le système du mandat. En avril 1946, Nicolas Grunitzky fonde le Parti togolais du progrès (PTP) pro-français pour faire pièce à l'action anti-française du Comité de l'unité togolaise (CUT) de Sylvanus Olympio fondé en 1938. Le PTP recrutait parmi les fonctionnaires et se tint à l'écart du Rassemblement démocratique africain. En 1946, lors des élections législatives, le CUT connut un grand succès et priva Nicolas Grunitzky de la tribune de l'Assemblée nationale pour s'opposer à la politique de Sylvanus Olympio qui visait à réclamer, notamment en inondant l'ONU de pétitions, l'unification du pays des Ewé qui se trouvait sur les territoires du Togo français, du Togo britannique et de la Gold Coast.
Pour s'opposer à la propagande en faveur de l'intégration du Togo à la Gold Coast, l'administration française soutient la candidature de Nicolas Grunitzky aux élections législatives de 1951. Il fait campagne sur le thème de l'autonomie du Togo dans le cadre de l'Union française et pour ce faire réclame la mise en place immédiate d'institutions de nature à assurer au Togo son autonomie : Assemblée législative et commission exécutive composée de ministres (cela revient à réclamer ce qui fut accordé aux territoires d'outre-mer en 1956 par la loi-cadre Defferre), conseils de circonscription et communes de plein exercice. Il réclame aussi la reconstitution de l'ancien Togo allemand lorsque les deux Togo placés sous tutelle française et britannique auront accédé à l'autonomie. Le leader du PTP est élu avec 16 255 voix contre 10 268 voix au député sortant, le docteur Andréas Aku. Le nouveau député du Togo s'inscrit au groupe des Indépendants d'Outre-mer et pour manifester sa loyauté à l'égard de la France vote l'investiture de tous les présidents du Conseil de cette législature.
A l'Assemblée nationale, Nicolas Grunitzky est nommé membre des commissions de la marine marchande et des pêches (1951), de la reconstruction et des dommages de guerre (1953-1954), des affaires étrangères (1954-1955) et de la production industrielle. Assez peu actif sur la plan parlementaire, le nouveau député intervient dans les débats qui intéressent directement les réformes institutionnelles au Togo. Après avoir obtenu en 1952 la suppression du double collège, il œuvre pendant plus de deux ans avec les sénateurs Ajavon et Zèle et le conseiller de l'Union française Mama, en faveur de l'aboutissement de ces réformes. Ainsi le 3 novembre 1954, après avoir dressé un tableau historique et politique de la situation au Togo, Nicolas Grunitzky précise-t-il à nouveau que « ce que demandent les populations togolaises, c'est une participation chaque jour plus grande et plus poussée dans la gestion des affaires de leur pays ». L'assemblée territoriale devrait devenir un véritable petit parlement local. Le 15 mars 1955, lors de la discussion en deuxième lecture de ce projet de loi relatif aux institutions territoriales et régionales du Togo, Nicolas Grunitzky regrette que le Conseil de la République ait cru devoir modifier le premier texte dans le sens d'une moindre démocratisation et d'un rétrécissement du champ d'action du futur conseil du gouvernement local, et il le regrette d'autant plus, précise-t-il, que l'Angleterre va proposer l'absorption du Togo sous sa tutelle par la Gold Coast (futur Ghana). Nicolas Grunitzky voit donc avec satisfaction le vote de la loi (en projet depuis décembre 1952) qui crée un conseil de gouvernement local et élargit les compétences de l'assemblée territoriale le 16 avril 1955, soit un an avant le vote de la loi-cadre Defferre. En novembre 1955, l'Assemblée nationale adopte une loi sur l'organisation municipale en Afrique qui autorise d'élever au statut de communes de plein exercice des villes au fur et à mesure de leur développement.
Fort de ce bilan, Nicolas Grunitzky est reconduit dans son mandat de député en 1956. Seul candidat, il rassemble la totalité des suffrages exprimés. Membre de la Commission des affaires étrangères, il prend part en mars 1956 à la discussion du projet de loi-cadre concernant les territoires d'outre-mer présenté par Gaston Defferre. A cette occasion, il appelle à nouveau l'attention de l'Assemblée sur la nécessité de définir rapidement le statut futur du Togo eu égard à l'organisation d'un référendum le 9 mai dans le Togo placé sous tutelle anglaise. Il réclame l'autonomie interne dans l'Union française et se prononce à nouveau en faveur de l'unité des deux Togo. Il regrette que le futur statut du Togo soit défini par décret et non par une loi mais comprend la justification de faire vite. En août 1956, par décret, la République autonome du Togo fut créée. Avec l'accord des chefs du nord du pays, il devient le premier Premier ministre en 1956. Mais en 1958, le CUT l'emporte et Sylvanus Olympio devient le premier président de la République du Togo.
Renversé du pouvoir en 1967, Nicolas Grunitzky demande l'asile politique à la Côte-d'Ivoire. A l'occasion d'un séjour en France, il meurt à Paris, le 27 septembre 1969, à l'âge de 56 ans.