Jules Houcke
1898 - 1968
Né le 20 mai 1898 à Nieppe (Nord)
Décédé le 12 mars 1968 à Nieppe
Membre de la première Assemblée nationale constituante (Nord)
Conseiller de la République, puis Sénateur du Nord de 1948 à 1958
Fils d'un confectionneur du Nord, Jules Houcke naît le 20 mai 1898 à Nieppe, au nord-ouest de Lille, à quelques pas de la frontière avec la Belgique. Il fait ses études au Lycée Paul Hazard d'Armentières, puis au Lycée de Saint-Omer, d'où il sort avec le baccalauréat.
Ardent patriote dès sa jeunesse, Jules Houcke s'engage en 1916 pour quatre ans. La Croix de guerre 14-18 avec palme récompense son courage. Peu après son retour, il épouse, en 1919, Raymonde Delettri, qui lui donnera six enfants. En 1920, il reprend l'entreprise de confection de son père.
L'intérêt qu'il porte à sa ville l'amène en 1939 à prendre la direction des affaires municipales, au moment où la guerre éclate. Dès le début de l'occupation, « Résistant d'avant [1'] appel », comme le dira le général de Gaulle, Jules Houcke, fidèle ami de la première heure, oppose aux occupants une résistance qui prend les formes les plus diverses. Il s'occupe tout particulièrement des réfractaires et soustrait ainsi les jeunes au Service du Travail Obligatoire (STO) en leur fournissant de faux papiers qu'il se procure sans se soucier des dangers qu'il court. Il assure le passage des patriotes en zone sud. Il fait de Nieppe un relais pour les aviateurs alliés en facilitant leur évasion puis en leur garantissant par la suite une aide précieuse. Enfin, il coordonne les parachutages réalisés dans l'Artois, et répartit notamment les armes.
La Gestapo l'arrête pour avoir permis la remise des cartes de ravitaillement à un réfractaire. Jules Houcke est condamné à six mois d'emprisonnement, mais, grâce à des complicités, il parvient à s'échapper de la prison de Loos (Nord) et, bien que recherché, reprend alors ses activités dans la clandestinité.
Durant tout le temps de l'Occupation, il ne consent jamais à suspendre son action, et entretient des liens assez étroits avec les résistants qui s'organisent autour de la Voix du Nord clandestine. Ce journal, fondé par Jules Noutour et Natalis Dumez pour guider l'opinion publique et établir un programme sur les orientations qui devront donner à la France un nouveau visage, acquiert de l'influence, et devient l'ennemi principal de la Gestapo.
En septembre 1944, Jules Houcke représente le mouvement « Voix du Nord » au comité départemental de la Libération du Nord et joue un rôle modérateur au sein de ce comité. Il crée la Société « Voix du Nord », et occupe le poste de Président du Conseil de gérance.
Elu Conseiller général du canton de Bailleul Nord-Est (Nord), il se présente comme candidat aux élections d'octobre 1945 à l'Assemblée nationale Constituante, en déclarant vouloir lutter « contre la dictature de la Résistance, contre les menées communistes et contre les désordres de l'Assemblée ». Sa liste de la Voix du Nord arrive, avec 24 897 suffrages, sur 107 854 exprimés devant les communistes (17 295 suffrages) et juste derrière le MRP (36 320 suffrages) et la SFIO (29 342 suffrages). Une fois à la Chambre, Jules Houcke s'inscrit au groupe des Indépendants. Secrétaire de la Commission de la Justice, il monte deux fois à la tribune du Palais Bourbon, pour des interventions remarquées : la première est liée au dépôt d'un projet de loi concernant l'éligibilité des instituteurs. Jules Houcke combat ce projet avec véhémence, voulant empêcher, dit-il, que les éducateurs du peuple soient mêlés « à l'abomination » des campagnes électorales, dont il a connu lui-même les excès ; la seconde intervention, inspirée par l'esprit chrétien qui le caractérise, est un plaidoyer en faveur des moins de vingt ans poursuivis pour faits de collaboration. Il soulève des protestations violentes sur tous les bancs de la Chambre. La majorité devait pourtant, plus tard, faire montre de plus d'indulgence. C'est là le testament parlementaire du député de l'Assemblée Constituante, que son expérience a rendu quelque peu amer : un an plus tard, au renouvellement de l'Assemblée (juin 1946), Jules Houcke ne se représente pas, abandonnant la place à Paul Reynaud sans que les deux hommes, visiblement, se soient concertés.
Cette retraite débute pour Jules Houcke dans une atmosphère très pénible. C'est l'époque où la société « Voix du Nord » - dont Jules Houcke est resté membre après avoir quitté la présidence -, est assignée en justice sous le chef d'accusation qu'elle ne représente pas la Résistance. C'est aussi l'époque où le personnel du journal, reprochant au Conseil de gérance de borner son activité à la gestion des fonds, déclenche une grève qui dure plus d'un mois.
Jules Houcke, déjà décoré de la rosette de la Résistance, est fait Chevalier de la Légion d'honneur, à titre militaire, par le général de Gaulle en novembre 1946. Il est alors si malade et affaibli qu'il semble voué à une longue convalescence.
Le voilà pourtant qui se relance, en tête de liste du Rassemblement du Peuple Français (RPF), dans la lutte pour les élections de novembre 1948 au Conseil de la République. Cette candidature le dispense, il est vrai, de tout contact avec « l'abomination » des campagnes électorales qu'implique le vote au suffrage universel, et surtout c'est pour lui l'occasion de dire ce qu'il pense du régime en vigueur et de sa Constitution, dans le plus pur esprit gaulliste.
Jules Houcke est élu le 7 novembre 1948 sénateur du Nord. Il s'inscrit au groupe des Républicains sociaux. Dès son arrivée au Palais du Luxembourg, il est nommé membre de la Commission de la presse, de la radio et du cinéma, ainsi que de la Commission des pensions (pensions civiles et militaires, et victimes de la guerre et de l'oppression). Ses interventions sont rares, comme naguère au Palais Bourbon, mais toujours inspirées par un profond humanisme. Au cours de son premier mandat, lors des sessions de 1949 et 1950, il intervient ainsi dans la discussion de la proposition de loi tendant à accorder le bénéfice de l'amnistie à certains mineurs de 21 ans, proposant notamment, en 1949, un amendement tendant à placer en détention, dans des camps, ou établissement de travail et de rééducation, les condamnés âgés de moins de 25 ans. Lors de la session de 1951, il s'intéresse également, dans un esprit de justice sociale, à la répartition du produit de la taxe locale, et aux dépenses de fonctionnement des services de la santé publique et de la population pour l'année 1952.
Réélu le 18 mai 1952, Jules Houcke poursuit efficacement son action. En 1956, tout en demeurant à la tête de la Commission des pensions, de la Commission de la presse, de la radio et du cinéma, il devient membre suppléant de la Commission de la production industrielle, et de la Commission de la reconstruction et des dommages de guerre. Au cours de cette année, il attire l'attention du ministre de l'agriculture sur sa région, dont les agriculteurs ont subi, en 1951, des ravages énormes, causés par l'extension de l'épidémie de fièvre aphteuse et aggravés par les retards dans les livraisons de vaccins.
Aux élections législatives de janvier 1956, Jules Houcke se porte candidat sur la liste de Paul Reynaud qu'il contribue à faire réélire ; lui-même n'est pas élu.
En 1958, Jules Houcke, qui se dit fatigué, décide de se retirer de la vie publique puisque ses idées, incarnées par le général de Gaulle, sont désormais au pouvoir. Celui-ci le fait officier de la Légion d'honneur en 1961. Jules Houcke, par fidélité, retourne au combat pour se porter candidat contre Paul Reynaud, passé à l'opposition, aux élections législatives du 18 novembre 1962. Contre toute attente, il le bat et entre au Palais Bourbon comme député du Nord.
Réélu régulièrement au conseil général représentant le canton de Bailleul Nord-Est, titulaire de la médaille départementale et communale. Jules Houcke demeure jusqu'à sa mort, le 12 mars 1968, maire de Nieppe.